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LE SAS DES LEADERS

Estelle Morin : L'urgence de faire advenir le sens

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41min |02/01/2024
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Estelle Morin : L'urgence de faire advenir le sens

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Description

Si la pandémie a eu un effet positif, c’est bien d'accélèrer la prise de conscience de faire advenir davantage de sens au travail.

Aujourd’hui, la quête de sens, que l’on estimait un luxe réservé aux milléniaux est devenue multigénérationnelle.

Fin 2020 dans une étude de l’APEC, 94 % des cadres jugeaient important d’exercer un métier qui a du sens.


La question du sens « pour quoi je me lève le matin pour aller au travail » est ainsi devenu un enjeu sociétal, qui confronte, non seulement l’individu, mais aussi l’entreprise afin de maintenir ou rehausser un niveau d’engagement et donc de performance optimale.

« Comment générer plus de sens pour ses collaborateurs? »

 

Je suis ravie aujourd’hui de cheminer avec vous sur une question qui est au cœur de ma pratique, avec à mes côtés, l’une des plus grandes spécialistes dans le domaine Estelle Morin, professeure en management à HEC Montréal et professeure associée à la Chaire Sens et Travail de l’Icam.


Estelle a choisi très tôt de devenir psychologue et a consacré sa carrière à essayer de comprendre ce qui donne un sens au travail afin que les individus puissent s'accomplir pleinement et créer un monde meilleur...telle est, en toute simplicité le sens qu'elle a donné à sa vie professionnelle.

Au-delà d'évoquer l’évolution du rapport au travail sur les dernières décennies, Estelle nous partagera les composants clés  du sens au travail et les leviers pour générer concrètement en tant que leader plus de sens au sein de son équipe !!

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Dans le registre du travail, c'est être, être qui nous sommes, et nous sommes ce que nous faisons, et ce que nous faisons nous transforme. Alors si nous faisons quelque chose qui ne fait pas de sens, à un certain moment, notre vie n'a pas de sens et nous n'avons pas de sens. C'est ce qu'on appelle une névrose existentielle. C'est-à-dire j'existe, mais pourquoi ?

  • Speaker #1

    Bienvenue sur le podcast Le Sass des leaders. Votre espace-temps pour ensemble, passez à la prochaine étape et avancez en cohérence avec les nouvelles attentes de la société. Ce podcast est présenté avec le soutien du cabinet de chasse exécutif Morgan Phillips Canada, dirigé par Frédéric Vigneault. Si la pandémie a eu un effet positif... c'est bien d'accélérer la prise de conscience sur la nécessité de donner du sens au travail. Aujourd'hui, la quête de sens, que l'on estimait un luxe réservé aux millenials, est devenue multigénérationnelle. Fin 2020, dans une étude de la paix, 94% des cadres jugeaient important d'exercer un métier qui a du sens. Pourquoi je me lève le matin pour aller au travail ? est ainsi devenu un enjeu sociétal qui confronte non pas seulement l'individu, mais aussi les entreprises, afin de maintenir ou rehausser un niveau d'engagement et donc de performance optimale. Comment générer plus de sens au quotidien pour mes collaborateurs ? Bonjour à vous ! Yvan Le Dord, je suis coach professionnel accrédité et fondatrice du cabinet franco-québécois Le Sass. Je suis ravie aujourd'hui de cheminer avec vous sur une question qui est au cœur de ma pratique avec à mes côtés l'une des plus grandes spécialistes dans le domaine, Estelle Morin, professeure en management à HEC Montréal et professeure associée à la chaire Sens et Travail de l'ICAM. Estelle a choisi très tôt de devenir psychologue et a consacré sa carrière à essayer de comprendre ce qui donne un sens au travail et comment gérer les individus afin qu'ils trouvent eux-mêmes un sens, puissent s'accomplir et, ce faisant, créer un monde meilleur. Voilà en toute simplicité le sens qu'elle a donné à sa vie professionnelle. Au-delà d'évoquer l'évolution du rapport au travail sur les dernières décennies, est-elle nous pas partagera ce qui donne réellement du sens au travail. Je la questionnerai également sur les leviers pour générer concrètement, en tant que leader, plus de sens au sein de son équipe. Bonne écoute. Estelle, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Écoute, je pense que ce serait très intéressant que tu nous fasses part dans un premier temps de ton regard finalement sur l'évolution du rapport au travail dans le monde. sur les dernières décennies, on va dire. Comment tu as vu changer les choses ?

  • Speaker #0

    Alors, le travail, c'est quelque chose d'aussi essentiel que l'amour, disait Simeon Freud. Les humains, on a besoin de travailler comme on a besoin d'aimer. Parce que c'est par le travail qu'on peut faire la démonstration qu'on a une vie qui vaut la peine d'être vécue. C'est grâce au travail qu'on est capable d'exercer notre intelligence. notre imagination, notre créativité pour ajouter de la valeur à quelque chose, pour rendre service aux autres, pour laisser sa marque, faire son empreinte, une preuve de son passage. Ce n'est pas étonnant qu'on associe le sens du travail au sens de la vie. Le travail contribue à avoir le sentiment d'avoir vécu une vie utile. C'est quelque chose de fondamental. Les années de l'industrialisation a commencé probablement à la fin du 19e siècle. On a dévié la notion du travail vers celle de l'emploi. Donc, beaucoup assimilent l'emploi au travail. Ce n'est pas du tout la même chose.

  • Speaker #1

    Alors, quelle distinction tu fais ? C'est intéressant.

  • Speaker #0

    L'emploi, c'est une activité économique. C'est une transaction. Je fais quelque chose en échange de quelque chose. En général, ce quelque Ausha, c'est un salaire, ce sont des avantages sociaux, un régime de retraite, l'assurance d'une certaine sécurité financière. Ça peut être aussi des marques de réussite sociale, du prestige, statut. Ça peut être... Enfin, c'est tout ce qui est du domaine de... Le registre de l'avoir.

  • Speaker #1

    Ah, c'est ça ! Bien oui. Et alors, donc, amène-nous sur le travail. Le travail...

  • Speaker #0

    Alors que le travail, il n'est pas dans le registre de l'avoir. Il est dans le registre de l'être.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    On fait... On transforme, hein ? Les esprits, certains esprits, j'allais dire mal tournés, mais dans le bon sens, associent travail, trépalium, torture. Quand je travaille, je me travaille et ça me torture, donc c'est pénible. C'est une façon d'imaginer le travail. Dans la lignée judéo-chrétienne, où le travail, c'est la punition infligée à Adam pour avoir mangé le fruit de l'arbre défendu.

  • Speaker #1

    Et alors, comment tu as vu les choses évoluer finalement, dans le temps ? Parce qu'aujourd'hui, la notion de travail en tant que tel, je veux me sentir utile, je veux être et je veux développer mon être à travers le travail. Et là, concrètement, on y est. À quel moment ? À quel moment tu as pu constater qu'il y avait vraiment une bascule ?

  • Speaker #0

    Il y a toujours des effets de bascule lorsqu'on va dans des extrêmes. Alors, je dirais les années 90 ont basculé la gestion du travail dans la gestion de l'emploi pour faire le plus d'argent possible. On a accéléré le développement de valeurs individualistes qui ont malheureusement comme conséquence de briser la collectivité. Alors, avec le résultat que les gens perdent le sens du travail. C'est là-dessus que j'ai commencé mes travaux en 1992. Alors que je rencontrais des dirigeants d'entreprise pour leur faire parler d'efficacité d'entreprise et que dans les conversations initiales, plusieurs se sont plaintes d'avoir un travail qui ne faisait pas de sens. C'est quand même troublant d'entendre des entrepreneurs, des dirigeants d'entreprise se plaindre que leur travail ne fait pas de sens, même s'ils font beaucoup d'argent.

  • Speaker #1

    Cela dit, c'est très fréquent et c'est ce que je te partageais aussi. Moi, très souvent, j'ai des dirigeants qui… une fois qu'ils ont atteint leur objectif, qui avait du sens pour eux avant, de se dire, je veux appartenir à un COMEX, je veux finalement gérer 200 employés, je veux avoir tant de salaires. Une fois que ce statut-là est atteint, ils prennent le mur, ils prennent le mur justement du sens. Qu'est-ce que je fais là ? Quel sens a finalement de faire tout ça ?

  • Speaker #0

    En fait, c'est apercevant. Il faut avoir pour vivre. Il faut avoir un toit, il faut avoir à manger, il faut avoir une sécurité financière, il faut avoir pour vivre. Mais quand on a juste ce qu'on a, c'est ça, quand on va dans l'extrême, ça ne fonctionne plus. Parce que, oui, l'argent a une signification très émotionnelle. Ça tâche beaucoup, beaucoup d'importance à l'argent, puis ça va en-delà de la raison. L'argent, ça ne fait pas le bonheur. Et surtout, l'argent, on ne l'emporte pas en terre. On vient au monde tout nu et on meurt tout nu.

  • Speaker #1

    J'adore.

  • Speaker #0

    Quand on a autant et qu'on se rend compte qu'au fond, ce n'est pas ça qui contribue de naissance à la vie qu'on mène, manquablement, on s'interroge sur le sens du travail qu'on fait et pourquoi on le fait.

  • Speaker #1

    Et puis, il y avait, je ne sais pas, tu connais Bill Jones dans le leadership authentique, il dit finalement, si on vous questionne sur quel est le sens de votre métier, puis que vous répondez l'argent, l'argent devrait être une question, une conséquence finalement, du sens et de l'utilité que vous apportez à votre travail.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Mais la vraie question, c'est pourquoi vous êtes un leader ? Quel sens vous donnez à votre leadership ?

  • Speaker #0

    Oui. Parce qu'en fait, dans le rejet du travail, c'est être. Être qui nous sommes. Et nous sommes ce que nous faisons. Et ce que nous faisons nous transforme. Alors, si nous faisons quelque chose qui ne fait pas de sens, à un certain moment, notre vie n'a pas de sens et nous n'avons pas de sens. C'est ce qu'on appelle une névrose existentielle. C'est-à-dire, j'existe, mais pourquoi ?

  • Speaker #1

    80 000 heures, on travaille dans notre vie quand même. Oui. J'adore retransmettre parfois ce chiffre-là aux personnes que j'entends qui se questionnent en disant, À quel niveau mon égo parle quand je dis que je voudrais donner du sens à ce que je fais ? Est-ce que je ne devrais pas tout simplement me contenter finalement de ramener de l'argent à chaque fin de mois pour ma famille et pour les miens ?

  • Speaker #0

    Oui, mais vive le jour de la marmotte ! On n'est pas des fourmis, nous ne sommes pas des fourmis, nous ne sommes pas des marmottes. Les humains, nous aimons bien la routine parce que ça structure le quotidien. Ça permet de gérer notre anxiété. Mais la routine tue notre créativité. Ça nous ennuie mortellement. Donc, on a besoin de faire un travail qui résonne avec qui nous sommes.

  • Speaker #1

    Et alors, du coup, si on revient sur cette notion de bascule. Donc, tu me disais que tu avais une bascule qui s'est opérée dans les années 90. où finalement on est passé d'une gestion du travail, du sens du travail à une gestion de l'emploi, donc une culture beaucoup plus individualiste, qui est portée aussi beaucoup plus finalement sur des axes financiers. À quel moment tu as revu une autre bascule se faire ? Parce qu'elle a eu lieu quand même. Oui,

  • Speaker #0

    elle a eu lieu, mais je pense que… Bon, les phénomènes sociaux prennent racine, je veux dire, on ne cesse de répéter l'histoire. Donc, c'est difficile de dire à quel moment précisément ça a commencé, mais certainement que la pandémie a sonné l'alarme. Je dis là, ça suffit. Parce que c'est un phénomène que nous avons vécu collectivement partout sur la planète. Enfin, dans tous les pays industrialisés, la pandémie a forcé les populations à se confiner quand c'était possible dans leur domicile pour prévenir la propagation du virus, pendant que d'autres qui ne pouvaient pas travailler de chez eux se sont vus obligés d'aller au travail et s'exposer aux risques. du virus. Et c'est quand même une situation qui a duré et qui continue de durer. Alors, ça fait au moins deux ans qu'on vit dans cet état de vigilance en raison du risque de maladie.

  • Speaker #1

    Et en quoi, selon toi, ça nous a ramené justement à la nature même du sens du travail ?

  • Speaker #0

    Parce que pour les personnes... qui ont été obligées de travailler de chez elles. Ça, c'est une enquête que nous avons faite, Laurent Falk et moi, en 2019. Oui. En 2020, puis qu'on a reprise en 2021. Les personnes en France, les personnes qui ont été obligées de se confiner pour travailler de chez elles, quand même à une proportion considérable, plus du tiers. ont remis en question l'utilité du travail qu'elles faisaient. Si le travail peut se faire malgré leur absence, à quoi sert leur travail ? Si les dirigeants, les cadres, les entrepreneurs qui se sont vus obligés de travailler de chez eux parce que c'était possible de le faire grâce aux technologies, une grande proportion ont réalisé que... Oui, le travail peut se faire très bien sans leur supervision, c'est-à-dire qu'on n'a pas besoin d'eux. Alors, quoi sert leur travail ? Pire, il y a des entrepreneurs qui se sont dit, ce que nous faisons dans l'entreprise, ça ne sert à rien en fait, ça pollue, et qui ont converti leur production pour faire des produits plus utiles.

  • Speaker #1

    Alors, ça m'amène aussi à la question de se dire finalement, aujourd'hui… Selon toi, selon les études que tu as pu mener, qu'est-ce qui donne réellement du sens au travail ? Quels sont les grandes composantes clés ?

  • Speaker #0

    D'abord, il faut admettre que le sens est une expérience subjective. Ce qui fait du sens pour l'un ne fait pas forcément du sens pour l'autre.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Ensuite, j'ai fait, j'ai mené des enquêtes dans plusieurs pays, bien entendu au Canada, mais aussi en France et au Brésil, et dans d'autres pays aussi, je pense au Portugal ou à la Belgique. Mais de manière générale, en Occident en tout cas, le travail a du sens lorsque nous faisons quelque chose d'utile. Le sentiment d'utilité, c'est important pour nous dans le monde occidental. Je présume que c'est pareil dans le monde oriental, mais j'en sais rien. Alors, il faut quand même limiter. OK,

  • Speaker #1

    donc, sentiment d'utilité.

  • Speaker #0

    Oui, le sentiment d'utilité, c'est très important. Ensuite, un travail fait du sens parce qu'il permet de mobiliser. les capacités, les compétences des gens pour le faire d'une manière efficace. Le sentiment d'efficacité est très important aussi pour que le travail fasse du sens. Le mot efficacité n'est pas banal. Si vous regardez l'étymologie du mot efficacité, c'est faire l'effet qu'on recherche. On veut faire, c'est produire l'effet recherché.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Alors, il y en a qui disent que c'est l'atteinte du objectif, mais c'est franchement fortuné. Au petit Robert, regardez l'étymologie. C'est produire l'effet recherché. Alors, donc, c'est plus que l'objectif. C'est toutes les conséquences et les répercussions qui engendrent le fait de faire le travail. Ce sentiment d'efficacité est associé à notre besoin de pouvoir, qui est fondamental chez les humains. Ensuite, bon, sentiment d'utilité, sentiment d'efficacité. Ce qui est très important aussi dans le travail est savoir plutôt avec le contexte dans lequel le travail s'effectue, c'est la qualité des relations que le travail engendre. C'est-à-dire que pour travailler, c'est très rare qu'on travaille sans être en relation avec d'autres. Le fait de travailler nous met en relation avec les autres, nous permet de nous insérer dans le monde.

  • Speaker #1

    Il y a le sentiment, le besoin d'appartenance, en fait. Oui.

  • Speaker #0

    C'est le travail engendre ce que j'appellerais le sentiment d'identité. Parce que je fais quelque chose avec d'autres et pour d'autres, j'arrive à définir qui je suis. et à transformer mon identité grâce à ce que je fais. Parce que je reviens à cette formule, nous sommes ce que nous faisons, et ce que nous faisons nous transforme. Alors, c'est très important de réaliser ça, parce qu'il n'y a pas de geste qui n'a pas d'importance sur notre identité.

  • Speaker #1

    Nous sommes ce que nous faisons.

  • Speaker #0

    Oui, ce que nous faisons nous transforme. Et ce que nous faisons nous transforme. Alors, si je fais, et ça c'est... C'est moi qui ai créé la formule, mais elle n'est pas de Réunion. Elle vient en fait de Simone Veil, dans un livre qu'elle a écrit, La condition ouvrière. Tous les gestes que nous posons tous les jours contribuent à qui nous sommes.

  • Speaker #1

    C'est sûr.

  • Speaker #0

    Alors, c'est vraiment le travail réel. Alors là, j'en réfère à Christophe Dejour, qui parle de... travail réel versus le travail prescrit. Moi, je n'ai pas étudié le travail prescrit, j'ai étudié le travail réel. Ce que les gens font chaque jour.

  • Speaker #1

    Et Estelle, justement pour continuer dans ce cheminement de pensée, comment en tant que leader aujourd'hui, on peut justement développer le sens au travail, au sein de ses équipes ? Qu'est-ce que ça apprend selon toi ?

  • Speaker #0

    Bon, alors ça, c'est un... C'est un projet que Laurent Falk et moi menons à la chaire sens et travail de l'ICAM à Lille. C'est d'identifier les pratiques de management du travail. Parce que c'est quand même assez étonnant, les écoles de commerce n'étudient pas le management du travail. On étudie la stratégie, donc le management de l'organisation. On étudie la gestion des ressources humaines, donc le management des personnes. Mais la gestion du travail lui-même, ce que font les gens en équipe, le travail concret, on n'étudie pas ça. Alors, notre projet, c'est de déterminer les pratiques de management du travail qui aident à lui donner du sens. Alors, jusqu'à présent, nous en avons identifié, on en a identifié six, en fait. Six qui vont faire, qui font l'objet actuellement d'une enquête dans cinq pays du monde. Oui. Donc, un oriental, les Philippines. La première, c'est de donner une direction claire et inspirante.

  • Speaker #1

    De donner ou de co-créer. Parce qu'aujourd'hui, moi, j'ai quand même le sens, au niveau du collectif. qu'on n'est plus sur quelque chose de descendant et qu'au contraire, il faut quand même réellement travailler sur la co-création d'une vision qui soit partagée par tous.

  • Speaker #0

    Oui et non. Parce que ce qui donne un sens au travail que je fais, c'est la correspondance qu'il y a entre mon travail concret, ce que je suis en train de faire, avec la mission de mon école.

  • Speaker #1

    La mission de ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis professeure, donc avec la mission de mon école. Et ça, bien oui, c'est descendant. Parce que la mission de l'école, elle est publique et elle fonde la légitimité de l'école. Les organisations sont des systèmes complexes, absolument pas vivants. Ce sont des représentations, donc ce sont des constructions collectives, mais elles existent pour vrai. parce qu'elles sont fondées par des registres juridiques.

  • Speaker #1

    Donc, tu dis le premier élément.

  • Speaker #0

    C'est donner une direction claire et inspirante au travail que je fais, qui est aligné avec la mission de notre établissement, de notre organisme, de notre entreprise. S'il n'y a pas de lien direct entre ce que je fais tous les jours et la mission de l'organisation, C'est difficile de voir d'une part en quoi mon travail va contribuer à l'accomplissement de notre mission collective qui est prescrite par la société, l'organisation. Et puis d'autre part, si jamais quelqu'un avait l'idée de rationaliser des effectifs, je serais la première sur la liste parce que mon travail ne contribue pas à la mission. Oui.

  • Speaker #1

    Estelle, petite question et si la mission de l'entreprise n'a pas de sens ?

  • Speaker #0

    C'est bon ça non ? Oui c'est une bonne question mais en même temps j'ai envie de mettre un avertissement cette question là suppose un jugement de valeur. Pour être capable de porter un jugement de valeur, il faut être conscient des valeurs qu'on porte

  • Speaker #1

    J'adore ...

  • Speaker #0

    Tu vois ? Oui. On a une question éthique ici. Et avec toute la question de la diversité culturelle, puis des différentes variations. Alors, qu'est-ce qui fait du sens ? Qu'est-ce qu'il n'y en a pas ?

  • Speaker #1

    Mais c'est intéressant parce que tu ramènes quand même à la notion de valeur. Et c'est vrai que... C'est vrai que c'est un travail qui est fondamental, c'est-à-dire pour générer du sens, savoir finalement quelle réalité on veut oeuvrer et qui va nous toucher nous en tant qu'individu. Ça nécessite en amont d'avoir clarifié et de connaître clairement ces valeurs.

  • Speaker #0

    Absolument. Oui, et là, ça, c'est un travail individuel. Bon, cela dit…

  • Speaker #1

    Une fois qu'on a dit ça.

  • Speaker #0

    D'un point de vue individuel. Si j'estime que je travaille dans une organisation qui a une mission qui n'a pas de sens pour moi, franchement, je n'ai pas d'affaire là. C'est une question d'honnêteté morale, de dignité personnelle, de se retirer d'une situation qui va à l'encontre de ses valeurs. Je ne vois pas comment quelqu'un peut supporter cette dissonance-là. sans me compromettre sa santé mentale. Vous allez me dire peut-être que, oui, mais il faut quand même gagner sa vie. Oui, il faut gagner sa vie, mais je ne peux pas croire aujourd'hui, en 2022, qu'on ne peut pas trouver un endroit sur la planète où on peut gagner sa vie, dans un environnement qui est en responsabilité de valeur. Ce n'est pas possible. Il y a une responsabilité individuelle. Les humains, nous sommes venus au monde libre. Nous pouvons à tout moment refuser. Cette capacité de s'affirmer, de dire non, nous apprenons à la domestiquer, si je peux dire, dès qu'on a 18 mois. C'est l'âge impérialiste où on dit non à tout. Et on apprend tout son enfance et son adolescence à s'affirmer. Alors si on arrive à Dieu, puis qu'on est dans une situation qui va à l'encontre de nos valeurs, il faut réanimer cet instinct d'affirmation de soi, de respect de soi-même, et de sortir de là.

  • Speaker #1

    Et c'est vrai que souvent, j'ai des clients qui viennent à moi en me disant « OK, là, je ne sais pas s'il faut que je franchisse le cap de partir de mon entreprise ou pas. » Et puis, dès là, finalement, on se rend compte qu'il y a une déconnexion entre les valeurs de l'individu et celles de son employeur. C'est certain que ça parle. Et qu'il faut effectivement oser pousser la porte et partir.

  • Speaker #0

    Il faut, c'est une question d'hygiène mentale. Complètement. J'ai eu une cliente qui était alors associée à un grand cabinet d'avocats pancanadiens qui a fait une dépression, mais franchement, une dépression majeure. Et dans le travail thérapeutique qu'elle a réalisé, en fait, qu'elle ne faisait plus. Le travail pour lequel elle avait étudié, oui, elle était avocate, oui, elle était associée, certainement faisait beaucoup d'argent, j'en rêve encore, mais ce qu'elle faisait n'était plus du droit. Elle s'était tellement écartée de ce qu'elle était que ça l'a rendue malade. Elle a recouvré sa santé, elle est retournée au bureau pour faire la preuve qu'elle est encore capable. Et quand elle s'est sentie assez forte, elle a quitté le bureau pour fonder sa propre entreprise de plaidoirie. Maintenant, elle fait du droit. Elle a retrouvé sa santé, mais pas seulement. Elle fait plus d'argent qu'avant. Alors cette question, souvent les gens restent dans des emplois parce qu'ils ont de l'insécurité financière ou parce qu'ils gagnent tellement d'argent, comme une cage dorée, qu'ils ne peuvent pas imaginer être ailleurs. C'est pour ça que tantôt je disais, l'argent a une valeur émotionnelle. Le chiffre a de la valeur à nos yeux.

  • Speaker #1

    Est-ce que le bonheur, c'est clair, il y a une expression comme ça qui dit, c'est le bonheur qui amène le succès et non pas le succès qui amène le bonheur. Alors, je ne serais plus capable de donner le nom de la personne qui a cité, mais c'est vraiment ça. Et c'est vrai que moi, je suis confrontée souvent à des gens qui… qui se questionnent comme ça sur est-ce que je fais le pari de pousser effectivement cette porte et de chercher plus d'alignement. Alors c'est certain que parfois à court terme, ça demande aussi de revoir certaines prétentions salariales, mais l'effet de bascule arrive très rapidement à partir du moment où on est aligné, parce qu'on est capable d'avancer avec beaucoup plus de résilience et au-delà des obstacles. on a une motivation en nous qui est tellement forte, avec un degré qu'on est capable effectivement de développer son potentiel de manière exponentielle comme on ne l'a jamais fait. Donc, c'est certain qu'effectivement, on a ce cercle vertueux qui se crée.

  • Speaker #0

    Mais c'est surtout que la santé n'a pas de prix. J'adore. On ne peut pas acheter la santé. On peut vivre dans des conditions saines qui vont favoriser notre santé. Mais la santé, c'est quelque chose que nous avons, la majorité d'entre nous, à la naissance, et qu'on peut perdre parce qu'on abuse de nos capacités physiques et mentales. Alors, il faut quand même devenir conscient des répercussions des choix que nous faisons. Et chacun, chacune est responsable de ses choix. C'est sûr. Nous sommes libres de ces choix.

  • Speaker #1

    C'est sûr. Et là-dessus, il y a énormément de travail. Souvent, je confie que quand j'ai travaillé pendant 15 ans en ressources humaines et à un moment donné, je me suis dit, je ne suis plus capable d'avancer effectivement dans ce type de contexte parce qu'on était en transformation organisationnelle en continu, revoir les processus d'affaires, les rôles et responsabilités, redéfinir les indicateurs. Tu pitches les gens effectivement dans ces cases-là. Et on passe complètement finalement à côté du potentiel des ressources parce qu'on ne s'intéresse pas à la singularité ni aux forces des gens. Mais il y a aussi une co-responsabilité qui est présente. C'est-à-dire qu'à un moment donné, les gens aussi décident de rentrer dans cette case et de se conformer à ça. Et ne pas oser finalement considérer qu'il y a d'autres possibles qui peuvent se réaliser, comme tu le disais.

  • Speaker #0

    Oui, nous sommes libres.

  • Speaker #1

    On est libre.

  • Speaker #0

    Mais exercer sa liberté, ça demande d'être conscient. Et être conscient, ça demande de l'énergie. Et tout le monde ne veut pas mettre cette énergie. C'est beaucoup plus tranquille que d'aller dans le courant et de se laisser porter. Et lorsque nous sommes malheureux, de blâmer les conditions, les autres, le gouvernement, l'Altaire, pour... les conditions que l'on vit. Ça demande du courage de vivre pour assumer. Se connaître,

  • Speaker #1

    oui, effectivement. Ça nécessite aussi la connaissance de soi. C'est quand même un élément tellement important. Plus on développe la lecture de quelles sont nos forces, quels sont nos essentiels, sur quelle réalité, finalement, quelle réalité nous touche, nous, en tant qu'individus, sur lequel on veut contribuer, de par notre histoire, de par ce que l'on a pu... finalement constaté dans le monde et qui vient nous toucher individuellement. Et ça, c'est vrai que c'est un vrai travail. Et ce travail-là, à un moment donné, c'est s'offrir du temps, c'est pour avancer et cheminer à ce niveau-là.

  • Speaker #0

    Mais c'est aussi connaître ses limites, Yvanne.

  • Speaker #1

    Bien, c'est sûr.

  • Speaker #0

    Parce que les humains, nous ne pouvons pas être sans les autres. Et dans cette prise de conscience de qui je suis, Et immanquablement, il faut aussi que je prenne conscience d'avec qui je suis. Et avec qui je veux être. Et avec qui je veux être. Et pour qui et pourquoi. Parce que le mouvement du comportement positif ou de la psychologie positive, moi je veux bien. Mais il ne faut pas oublier qu'à côté des forces, il y a des limites. Nous ne sommes pas des êtres surnaturels, nous sommes des êtres vivants avec des capacités, mais aussi des limites. Et c'est grâce à ces limites qu'on est capable de développer notre humilité et notre capacité à travailler avec les autres, à collaborer avec les autres. L'instinct de coopération, c'est très important pour les humains. On a besoin de balancer ce regard. porté sur soi, avec un regard porté sur les autres, avec qui je suis. Il faut prendre en compte les autres. C'est là où, aujourd'hui, en 2022, on est encore loin du compte. Parce qu'on est tellement, on est en train de sortir de l'individualisme. De toute façon, on n'a pas le choix. On n'a pas le choix parce que le climat va nous le rappeler. Que si on veut son vœu. comme humanité survivre à ce qui nous attend, ce qui est en train de se faire et ce qui nous attend, on va être obligés de collaborer ensemble.

  • Speaker #1

    De coopérer.

  • Speaker #0

    Et de partager ensemble.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'elle, juste, tu sais, pour revenir quand même sur la question que je te posais tout à l'heure, parce qu'on s'est un petit peu éloigné, mais c'était intéressant.

  • Speaker #0

    Parce que ce qui donne un sens au travail, oui, c'est ce que nous faisons. Mais c'est aussi avec qui et pour qui nous le faisons. Tout le concept de relation de l'entreprise dans laquelle je suis, avec qui je travaille et pour qui je travaille, et qui sont mes clients, tout ça, ce sont des relations. Et si les relations, en général, les gens quittent un emploi, non pas à cause du travail, mais à cause des relations qu'ils ont dans leur entreprise. C'est dire la... l'importance de la qualité des relations humaines.

  • Speaker #1

    Alors, du coup, en tant que leader, justement, si on veut mettre en place quelques actions qui peuvent finalement avoir un impact sur le sentiment de ses collaborateurs d'exercer sa fonction avec sens, quels seraient tes conseils ?

  • Speaker #0

    Alors, du point de vue... Non, j'ai déjà parlé pour le travail. C'est le sentiment d'utilité, d'efficacité. C'est très important. Oui, mais sur le plan de l'équipe, c'est très important de porter attention à la qualité des échanges réciproques, à la réciprocité des échanges dans l'équipe, la capacité de se soutenir, de s'entraider, de régler les problèmes, pas simplement les problèmes techniques, mais aussi les problèmes interpersonnels. C'est souvent là où on observe des difficultés parce que les conflits, les tensions dans une équipe. engendre des émotions négatives comme de l'anxiété, de l'envie, de la colère. Et nous ne sommes pas très habiles à gérer ces émotions-là. Donc, c'est important que le travail ait du sens, que le chef d'équipe soit capable de gérer les tensions et les conflits dans l'équipe pour maintenir une cohésion, pour renforcer la solidarité de l'équipe. à faire le travail qui est attendu avec cet esprit d'échange réciproque, de se concentrer.

  • Speaker #1

    C'est-à-dire qu'en fait, on peut aussi limiter cette vision-là de se dire finalement, gérer les tensions, les conflits, de se dire finalement, peut-être démultiplier les temps d'échange et de collaboration et de réciprocité. Donc, amener finalement, amener l'équipe à porter de l'intérêt finalement au vécu de chacun dans notre...

  • Speaker #0

    Au vécu de chacun, oui.

  • Speaker #1

    Dans l'exercice de sa famille.

  • Speaker #0

    Mais au vécu de chacun par rapport au travail à faire ensemble.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #0

    Quoi d'autre ? Puis, un autre aspect qui est très important, donc je parlais du travail, de la qualité des relations dans l'équipe qui forme une vraie équipe. Et puis, une… Une fonction importante d'un chef d'équipe, c'est d'être attentif à des occasions d'innovation.

  • Speaker #1

    Alors, qu'est-ce que tu entends par être attentif ?

  • Speaker #0

    Que ce soit dans l'exécution des tâches, dans la manière de faire le travail, comme dans la manière de soutenir le développement des compétences des membres, d'être attentif aux occasions de faire mieux. Ces occasions de faire mieux, ce qu'on fait ensemble, va stimuler l'apprentissage, va stimuler le développement, va stimuler l'innovation dans l'équipe. Et ça, ça assure la pérennité de l'équipe. Les équipes vont continuer de bien travailler ensemble parce qu'elles ont développé des capacités à s'améliorer et à faire grandir les personnes et l'équipe dans l'organisation. Je ne sais pas si je m'exprime clairement. Oui,

  • Speaker #1

    si, si, c'est très clair. C'est finalement à travers le développement d'occasions d'innovation, c'est aussi offrir l'opportunité au collectif et à l'individu de se développer et de développer aussi l'organisation en tant que telle. Donc, vous avez une santé de sentiments aussi de contributifs.

  • Speaker #0

    Oui, et de faire avancer.

  • Speaker #1

    Oui, OK.

  • Speaker #0

    On n'est pas dans la reproduction de ce qu'on sait faire, mais dans la production et la création. de mieux faire.

  • Speaker #1

    Donc, c'est sortir de la routine. C'est finalement faciliter toujours ce mieux-faire et pousser encore plus loin ces équipes.

  • Speaker #0

    Oui. Et ça, non seulement ça stimule le développement des compétences des personnes, mais surtout, ça renforce la capacité de l'équipe à bien faire le travail, à mieux faire le travail, ce qui va contribuer au développement de l'organisation dans la mesure où, bien entendu, tout ce qu'elle fait est aligné avec sa mission.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il y a un autre élément ? Donc,

  • Speaker #0

    réciprocité des échanges,

  • Speaker #1

    développer finalement, s'assurer que les gens avancent avec une vision qui soit claire et engageante pour tous. Et puis, le troisième élément, ça sera effectivement développer des occasions d'innovation pour grandir ensemble.

  • Speaker #0

    Exactement, exactement. Voilà, on peut le dire comme ça.

  • Speaker #1

    Super ça. Eh bien, merci beaucoup pour ce temps d'échange, Estelle. Est-ce qu'il y a une question que je ne t'ai pas posée qui, selon toi, aurait pu être pertinente ?

  • Speaker #0

    J'avais envie de te poser la question, toi. Quel est le sens de ton travail ?

  • Speaker #1

    Écoute, moi, je te dirais que c'est vraiment cette recherche d'amener un individu à un collectif. à s'offrir l'opportunité de s'aligner davantage dans ce qu'il fait, pour qu'il puisse se réaliser et aller plus loin aussi dans son niveau de contribution. Donc c'est ça, c'est aligner davantage qui l'on est avec ce que l'on fait, puis comment on le fait, puis je sais à quel point, parce que c'est une thématique qui m'est chère finalement, comment on accompagne une personne ou un collectif à avoir ce sentiment d'avoir plus de sens. Puis moi, je l'ai vécu dans ma vie. dans ma vie professionnelle. Et ça fait sept ans que j'accompagne des individus et des collectifs. Et c'est tellement nourrissant de voir les gens grandir, prendre conscience qu'ils ont le droit de se réaliser. qu'ils ont en eux énormément de talents qui peuvent servir à faire une différence et puis que finalement, ça prend juste le pouvoir d'oser en fait, d'oser voir de tout possible et puis oser s'affranchir pour avancer différemment et se réaliser. Alors moi, c'est ça. Tu vois, c'est vraiment amener les gens à avancer avec plus de sens et d'authenticité. pour finalement se réaliser davantage.

  • Speaker #0

    Mais tu réalises que c'est grâce à ton accompagnement, dans la relation qu'ils ont avec toi, qu'ils peuvent réaliser ça.

  • Speaker #1

    Merci, Estelle. Ça me touche vraiment beaucoup. C'est un beau miroir que tu me renvoies. Et surtout, un beau miroir aussi sur la profession de coach, qui, c'est vrai, très souvent est mise à mal. Donc, merci pour ça. Alors, surtout... merci à toi pour ce temps et je t'avoue que je sais déjà que je vais repartir avec cette phrase que je n'hésiterai pas à partager toute ma vie,

  • Speaker #2

    c'est certain nous sommes ce que nous faisons et ce que nous faisons nous transforme Rendez-vous sur le-sas-coaching.com

Description

Si la pandémie a eu un effet positif, c’est bien d'accélèrer la prise de conscience de faire advenir davantage de sens au travail.

Aujourd’hui, la quête de sens, que l’on estimait un luxe réservé aux milléniaux est devenue multigénérationnelle.

Fin 2020 dans une étude de l’APEC, 94 % des cadres jugeaient important d’exercer un métier qui a du sens.


La question du sens « pour quoi je me lève le matin pour aller au travail » est ainsi devenu un enjeu sociétal, qui confronte, non seulement l’individu, mais aussi l’entreprise afin de maintenir ou rehausser un niveau d’engagement et donc de performance optimale.

« Comment générer plus de sens pour ses collaborateurs? »

 

Je suis ravie aujourd’hui de cheminer avec vous sur une question qui est au cœur de ma pratique, avec à mes côtés, l’une des plus grandes spécialistes dans le domaine Estelle Morin, professeure en management à HEC Montréal et professeure associée à la Chaire Sens et Travail de l’Icam.


Estelle a choisi très tôt de devenir psychologue et a consacré sa carrière à essayer de comprendre ce qui donne un sens au travail afin que les individus puissent s'accomplir pleinement et créer un monde meilleur...telle est, en toute simplicité le sens qu'elle a donné à sa vie professionnelle.

Au-delà d'évoquer l’évolution du rapport au travail sur les dernières décennies, Estelle nous partagera les composants clés  du sens au travail et les leviers pour générer concrètement en tant que leader plus de sens au sein de son équipe !!

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Dans le registre du travail, c'est être, être qui nous sommes, et nous sommes ce que nous faisons, et ce que nous faisons nous transforme. Alors si nous faisons quelque chose qui ne fait pas de sens, à un certain moment, notre vie n'a pas de sens et nous n'avons pas de sens. C'est ce qu'on appelle une névrose existentielle. C'est-à-dire j'existe, mais pourquoi ?

  • Speaker #1

    Bienvenue sur le podcast Le Sass des leaders. Votre espace-temps pour ensemble, passez à la prochaine étape et avancez en cohérence avec les nouvelles attentes de la société. Ce podcast est présenté avec le soutien du cabinet de chasse exécutif Morgan Phillips Canada, dirigé par Frédéric Vigneault. Si la pandémie a eu un effet positif... c'est bien d'accélérer la prise de conscience sur la nécessité de donner du sens au travail. Aujourd'hui, la quête de sens, que l'on estimait un luxe réservé aux millenials, est devenue multigénérationnelle. Fin 2020, dans une étude de la paix, 94% des cadres jugeaient important d'exercer un métier qui a du sens. Pourquoi je me lève le matin pour aller au travail ? est ainsi devenu un enjeu sociétal qui confronte non pas seulement l'individu, mais aussi les entreprises, afin de maintenir ou rehausser un niveau d'engagement et donc de performance optimale. Comment générer plus de sens au quotidien pour mes collaborateurs ? Bonjour à vous ! Yvan Le Dord, je suis coach professionnel accrédité et fondatrice du cabinet franco-québécois Le Sass. Je suis ravie aujourd'hui de cheminer avec vous sur une question qui est au cœur de ma pratique avec à mes côtés l'une des plus grandes spécialistes dans le domaine, Estelle Morin, professeure en management à HEC Montréal et professeure associée à la chaire Sens et Travail de l'ICAM. Estelle a choisi très tôt de devenir psychologue et a consacré sa carrière à essayer de comprendre ce qui donne un sens au travail et comment gérer les individus afin qu'ils trouvent eux-mêmes un sens, puissent s'accomplir et, ce faisant, créer un monde meilleur. Voilà en toute simplicité le sens qu'elle a donné à sa vie professionnelle. Au-delà d'évoquer l'évolution du rapport au travail sur les dernières décennies, est-elle nous pas partagera ce qui donne réellement du sens au travail. Je la questionnerai également sur les leviers pour générer concrètement, en tant que leader, plus de sens au sein de son équipe. Bonne écoute. Estelle, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Écoute, je pense que ce serait très intéressant que tu nous fasses part dans un premier temps de ton regard finalement sur l'évolution du rapport au travail dans le monde. sur les dernières décennies, on va dire. Comment tu as vu changer les choses ?

  • Speaker #0

    Alors, le travail, c'est quelque chose d'aussi essentiel que l'amour, disait Simeon Freud. Les humains, on a besoin de travailler comme on a besoin d'aimer. Parce que c'est par le travail qu'on peut faire la démonstration qu'on a une vie qui vaut la peine d'être vécue. C'est grâce au travail qu'on est capable d'exercer notre intelligence. notre imagination, notre créativité pour ajouter de la valeur à quelque chose, pour rendre service aux autres, pour laisser sa marque, faire son empreinte, une preuve de son passage. Ce n'est pas étonnant qu'on associe le sens du travail au sens de la vie. Le travail contribue à avoir le sentiment d'avoir vécu une vie utile. C'est quelque chose de fondamental. Les années de l'industrialisation a commencé probablement à la fin du 19e siècle. On a dévié la notion du travail vers celle de l'emploi. Donc, beaucoup assimilent l'emploi au travail. Ce n'est pas du tout la même chose.

  • Speaker #1

    Alors, quelle distinction tu fais ? C'est intéressant.

  • Speaker #0

    L'emploi, c'est une activité économique. C'est une transaction. Je fais quelque chose en échange de quelque chose. En général, ce quelque Ausha, c'est un salaire, ce sont des avantages sociaux, un régime de retraite, l'assurance d'une certaine sécurité financière. Ça peut être aussi des marques de réussite sociale, du prestige, statut. Ça peut être... Enfin, c'est tout ce qui est du domaine de... Le registre de l'avoir.

  • Speaker #1

    Ah, c'est ça ! Bien oui. Et alors, donc, amène-nous sur le travail. Le travail...

  • Speaker #0

    Alors que le travail, il n'est pas dans le registre de l'avoir. Il est dans le registre de l'être.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    On fait... On transforme, hein ? Les esprits, certains esprits, j'allais dire mal tournés, mais dans le bon sens, associent travail, trépalium, torture. Quand je travaille, je me travaille et ça me torture, donc c'est pénible. C'est une façon d'imaginer le travail. Dans la lignée judéo-chrétienne, où le travail, c'est la punition infligée à Adam pour avoir mangé le fruit de l'arbre défendu.

  • Speaker #1

    Et alors, comment tu as vu les choses évoluer finalement, dans le temps ? Parce qu'aujourd'hui, la notion de travail en tant que tel, je veux me sentir utile, je veux être et je veux développer mon être à travers le travail. Et là, concrètement, on y est. À quel moment ? À quel moment tu as pu constater qu'il y avait vraiment une bascule ?

  • Speaker #0

    Il y a toujours des effets de bascule lorsqu'on va dans des extrêmes. Alors, je dirais les années 90 ont basculé la gestion du travail dans la gestion de l'emploi pour faire le plus d'argent possible. On a accéléré le développement de valeurs individualistes qui ont malheureusement comme conséquence de briser la collectivité. Alors, avec le résultat que les gens perdent le sens du travail. C'est là-dessus que j'ai commencé mes travaux en 1992. Alors que je rencontrais des dirigeants d'entreprise pour leur faire parler d'efficacité d'entreprise et que dans les conversations initiales, plusieurs se sont plaintes d'avoir un travail qui ne faisait pas de sens. C'est quand même troublant d'entendre des entrepreneurs, des dirigeants d'entreprise se plaindre que leur travail ne fait pas de sens, même s'ils font beaucoup d'argent.

  • Speaker #1

    Cela dit, c'est très fréquent et c'est ce que je te partageais aussi. Moi, très souvent, j'ai des dirigeants qui… une fois qu'ils ont atteint leur objectif, qui avait du sens pour eux avant, de se dire, je veux appartenir à un COMEX, je veux finalement gérer 200 employés, je veux avoir tant de salaires. Une fois que ce statut-là est atteint, ils prennent le mur, ils prennent le mur justement du sens. Qu'est-ce que je fais là ? Quel sens a finalement de faire tout ça ?

  • Speaker #0

    En fait, c'est apercevant. Il faut avoir pour vivre. Il faut avoir un toit, il faut avoir à manger, il faut avoir une sécurité financière, il faut avoir pour vivre. Mais quand on a juste ce qu'on a, c'est ça, quand on va dans l'extrême, ça ne fonctionne plus. Parce que, oui, l'argent a une signification très émotionnelle. Ça tâche beaucoup, beaucoup d'importance à l'argent, puis ça va en-delà de la raison. L'argent, ça ne fait pas le bonheur. Et surtout, l'argent, on ne l'emporte pas en terre. On vient au monde tout nu et on meurt tout nu.

  • Speaker #1

    J'adore.

  • Speaker #0

    Quand on a autant et qu'on se rend compte qu'au fond, ce n'est pas ça qui contribue de naissance à la vie qu'on mène, manquablement, on s'interroge sur le sens du travail qu'on fait et pourquoi on le fait.

  • Speaker #1

    Et puis, il y avait, je ne sais pas, tu connais Bill Jones dans le leadership authentique, il dit finalement, si on vous questionne sur quel est le sens de votre métier, puis que vous répondez l'argent, l'argent devrait être une question, une conséquence finalement, du sens et de l'utilité que vous apportez à votre travail.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Mais la vraie question, c'est pourquoi vous êtes un leader ? Quel sens vous donnez à votre leadership ?

  • Speaker #0

    Oui. Parce qu'en fait, dans le rejet du travail, c'est être. Être qui nous sommes. Et nous sommes ce que nous faisons. Et ce que nous faisons nous transforme. Alors, si nous faisons quelque chose qui ne fait pas de sens, à un certain moment, notre vie n'a pas de sens et nous n'avons pas de sens. C'est ce qu'on appelle une névrose existentielle. C'est-à-dire, j'existe, mais pourquoi ?

  • Speaker #1

    80 000 heures, on travaille dans notre vie quand même. Oui. J'adore retransmettre parfois ce chiffre-là aux personnes que j'entends qui se questionnent en disant, À quel niveau mon égo parle quand je dis que je voudrais donner du sens à ce que je fais ? Est-ce que je ne devrais pas tout simplement me contenter finalement de ramener de l'argent à chaque fin de mois pour ma famille et pour les miens ?

  • Speaker #0

    Oui, mais vive le jour de la marmotte ! On n'est pas des fourmis, nous ne sommes pas des fourmis, nous ne sommes pas des marmottes. Les humains, nous aimons bien la routine parce que ça structure le quotidien. Ça permet de gérer notre anxiété. Mais la routine tue notre créativité. Ça nous ennuie mortellement. Donc, on a besoin de faire un travail qui résonne avec qui nous sommes.

  • Speaker #1

    Et alors, du coup, si on revient sur cette notion de bascule. Donc, tu me disais que tu avais une bascule qui s'est opérée dans les années 90. où finalement on est passé d'une gestion du travail, du sens du travail à une gestion de l'emploi, donc une culture beaucoup plus individualiste, qui est portée aussi beaucoup plus finalement sur des axes financiers. À quel moment tu as revu une autre bascule se faire ? Parce qu'elle a eu lieu quand même. Oui,

  • Speaker #0

    elle a eu lieu, mais je pense que… Bon, les phénomènes sociaux prennent racine, je veux dire, on ne cesse de répéter l'histoire. Donc, c'est difficile de dire à quel moment précisément ça a commencé, mais certainement que la pandémie a sonné l'alarme. Je dis là, ça suffit. Parce que c'est un phénomène que nous avons vécu collectivement partout sur la planète. Enfin, dans tous les pays industrialisés, la pandémie a forcé les populations à se confiner quand c'était possible dans leur domicile pour prévenir la propagation du virus, pendant que d'autres qui ne pouvaient pas travailler de chez eux se sont vus obligés d'aller au travail et s'exposer aux risques. du virus. Et c'est quand même une situation qui a duré et qui continue de durer. Alors, ça fait au moins deux ans qu'on vit dans cet état de vigilance en raison du risque de maladie.

  • Speaker #1

    Et en quoi, selon toi, ça nous a ramené justement à la nature même du sens du travail ?

  • Speaker #0

    Parce que pour les personnes... qui ont été obligées de travailler de chez elles. Ça, c'est une enquête que nous avons faite, Laurent Falk et moi, en 2019. Oui. En 2020, puis qu'on a reprise en 2021. Les personnes en France, les personnes qui ont été obligées de se confiner pour travailler de chez elles, quand même à une proportion considérable, plus du tiers. ont remis en question l'utilité du travail qu'elles faisaient. Si le travail peut se faire malgré leur absence, à quoi sert leur travail ? Si les dirigeants, les cadres, les entrepreneurs qui se sont vus obligés de travailler de chez eux parce que c'était possible de le faire grâce aux technologies, une grande proportion ont réalisé que... Oui, le travail peut se faire très bien sans leur supervision, c'est-à-dire qu'on n'a pas besoin d'eux. Alors, quoi sert leur travail ? Pire, il y a des entrepreneurs qui se sont dit, ce que nous faisons dans l'entreprise, ça ne sert à rien en fait, ça pollue, et qui ont converti leur production pour faire des produits plus utiles.

  • Speaker #1

    Alors, ça m'amène aussi à la question de se dire finalement, aujourd'hui… Selon toi, selon les études que tu as pu mener, qu'est-ce qui donne réellement du sens au travail ? Quels sont les grandes composantes clés ?

  • Speaker #0

    D'abord, il faut admettre que le sens est une expérience subjective. Ce qui fait du sens pour l'un ne fait pas forcément du sens pour l'autre.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Ensuite, j'ai fait, j'ai mené des enquêtes dans plusieurs pays, bien entendu au Canada, mais aussi en France et au Brésil, et dans d'autres pays aussi, je pense au Portugal ou à la Belgique. Mais de manière générale, en Occident en tout cas, le travail a du sens lorsque nous faisons quelque chose d'utile. Le sentiment d'utilité, c'est important pour nous dans le monde occidental. Je présume que c'est pareil dans le monde oriental, mais j'en sais rien. Alors, il faut quand même limiter. OK,

  • Speaker #1

    donc, sentiment d'utilité.

  • Speaker #0

    Oui, le sentiment d'utilité, c'est très important. Ensuite, un travail fait du sens parce qu'il permet de mobiliser. les capacités, les compétences des gens pour le faire d'une manière efficace. Le sentiment d'efficacité est très important aussi pour que le travail fasse du sens. Le mot efficacité n'est pas banal. Si vous regardez l'étymologie du mot efficacité, c'est faire l'effet qu'on recherche. On veut faire, c'est produire l'effet recherché.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Alors, il y en a qui disent que c'est l'atteinte du objectif, mais c'est franchement fortuné. Au petit Robert, regardez l'étymologie. C'est produire l'effet recherché. Alors, donc, c'est plus que l'objectif. C'est toutes les conséquences et les répercussions qui engendrent le fait de faire le travail. Ce sentiment d'efficacité est associé à notre besoin de pouvoir, qui est fondamental chez les humains. Ensuite, bon, sentiment d'utilité, sentiment d'efficacité. Ce qui est très important aussi dans le travail est savoir plutôt avec le contexte dans lequel le travail s'effectue, c'est la qualité des relations que le travail engendre. C'est-à-dire que pour travailler, c'est très rare qu'on travaille sans être en relation avec d'autres. Le fait de travailler nous met en relation avec les autres, nous permet de nous insérer dans le monde.

  • Speaker #1

    Il y a le sentiment, le besoin d'appartenance, en fait. Oui.

  • Speaker #0

    C'est le travail engendre ce que j'appellerais le sentiment d'identité. Parce que je fais quelque chose avec d'autres et pour d'autres, j'arrive à définir qui je suis. et à transformer mon identité grâce à ce que je fais. Parce que je reviens à cette formule, nous sommes ce que nous faisons, et ce que nous faisons nous transforme. Alors, c'est très important de réaliser ça, parce qu'il n'y a pas de geste qui n'a pas d'importance sur notre identité.

  • Speaker #1

    Nous sommes ce que nous faisons.

  • Speaker #0

    Oui, ce que nous faisons nous transforme. Et ce que nous faisons nous transforme. Alors, si je fais, et ça c'est... C'est moi qui ai créé la formule, mais elle n'est pas de Réunion. Elle vient en fait de Simone Veil, dans un livre qu'elle a écrit, La condition ouvrière. Tous les gestes que nous posons tous les jours contribuent à qui nous sommes.

  • Speaker #1

    C'est sûr.

  • Speaker #0

    Alors, c'est vraiment le travail réel. Alors là, j'en réfère à Christophe Dejour, qui parle de... travail réel versus le travail prescrit. Moi, je n'ai pas étudié le travail prescrit, j'ai étudié le travail réel. Ce que les gens font chaque jour.

  • Speaker #1

    Et Estelle, justement pour continuer dans ce cheminement de pensée, comment en tant que leader aujourd'hui, on peut justement développer le sens au travail, au sein de ses équipes ? Qu'est-ce que ça apprend selon toi ?

  • Speaker #0

    Bon, alors ça, c'est un... C'est un projet que Laurent Falk et moi menons à la chaire sens et travail de l'ICAM à Lille. C'est d'identifier les pratiques de management du travail. Parce que c'est quand même assez étonnant, les écoles de commerce n'étudient pas le management du travail. On étudie la stratégie, donc le management de l'organisation. On étudie la gestion des ressources humaines, donc le management des personnes. Mais la gestion du travail lui-même, ce que font les gens en équipe, le travail concret, on n'étudie pas ça. Alors, notre projet, c'est de déterminer les pratiques de management du travail qui aident à lui donner du sens. Alors, jusqu'à présent, nous en avons identifié, on en a identifié six, en fait. Six qui vont faire, qui font l'objet actuellement d'une enquête dans cinq pays du monde. Oui. Donc, un oriental, les Philippines. La première, c'est de donner une direction claire et inspirante.

  • Speaker #1

    De donner ou de co-créer. Parce qu'aujourd'hui, moi, j'ai quand même le sens, au niveau du collectif. qu'on n'est plus sur quelque chose de descendant et qu'au contraire, il faut quand même réellement travailler sur la co-création d'une vision qui soit partagée par tous.

  • Speaker #0

    Oui et non. Parce que ce qui donne un sens au travail que je fais, c'est la correspondance qu'il y a entre mon travail concret, ce que je suis en train de faire, avec la mission de mon école.

  • Speaker #1

    La mission de ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis professeure, donc avec la mission de mon école. Et ça, bien oui, c'est descendant. Parce que la mission de l'école, elle est publique et elle fonde la légitimité de l'école. Les organisations sont des systèmes complexes, absolument pas vivants. Ce sont des représentations, donc ce sont des constructions collectives, mais elles existent pour vrai. parce qu'elles sont fondées par des registres juridiques.

  • Speaker #1

    Donc, tu dis le premier élément.

  • Speaker #0

    C'est donner une direction claire et inspirante au travail que je fais, qui est aligné avec la mission de notre établissement, de notre organisme, de notre entreprise. S'il n'y a pas de lien direct entre ce que je fais tous les jours et la mission de l'organisation, C'est difficile de voir d'une part en quoi mon travail va contribuer à l'accomplissement de notre mission collective qui est prescrite par la société, l'organisation. Et puis d'autre part, si jamais quelqu'un avait l'idée de rationaliser des effectifs, je serais la première sur la liste parce que mon travail ne contribue pas à la mission. Oui.

  • Speaker #1

    Estelle, petite question et si la mission de l'entreprise n'a pas de sens ?

  • Speaker #0

    C'est bon ça non ? Oui c'est une bonne question mais en même temps j'ai envie de mettre un avertissement cette question là suppose un jugement de valeur. Pour être capable de porter un jugement de valeur, il faut être conscient des valeurs qu'on porte

  • Speaker #1

    J'adore ...

  • Speaker #0

    Tu vois ? Oui. On a une question éthique ici. Et avec toute la question de la diversité culturelle, puis des différentes variations. Alors, qu'est-ce qui fait du sens ? Qu'est-ce qu'il n'y en a pas ?

  • Speaker #1

    Mais c'est intéressant parce que tu ramènes quand même à la notion de valeur. Et c'est vrai que... C'est vrai que c'est un travail qui est fondamental, c'est-à-dire pour générer du sens, savoir finalement quelle réalité on veut oeuvrer et qui va nous toucher nous en tant qu'individu. Ça nécessite en amont d'avoir clarifié et de connaître clairement ces valeurs.

  • Speaker #0

    Absolument. Oui, et là, ça, c'est un travail individuel. Bon, cela dit…

  • Speaker #1

    Une fois qu'on a dit ça.

  • Speaker #0

    D'un point de vue individuel. Si j'estime que je travaille dans une organisation qui a une mission qui n'a pas de sens pour moi, franchement, je n'ai pas d'affaire là. C'est une question d'honnêteté morale, de dignité personnelle, de se retirer d'une situation qui va à l'encontre de ses valeurs. Je ne vois pas comment quelqu'un peut supporter cette dissonance-là. sans me compromettre sa santé mentale. Vous allez me dire peut-être que, oui, mais il faut quand même gagner sa vie. Oui, il faut gagner sa vie, mais je ne peux pas croire aujourd'hui, en 2022, qu'on ne peut pas trouver un endroit sur la planète où on peut gagner sa vie, dans un environnement qui est en responsabilité de valeur. Ce n'est pas possible. Il y a une responsabilité individuelle. Les humains, nous sommes venus au monde libre. Nous pouvons à tout moment refuser. Cette capacité de s'affirmer, de dire non, nous apprenons à la domestiquer, si je peux dire, dès qu'on a 18 mois. C'est l'âge impérialiste où on dit non à tout. Et on apprend tout son enfance et son adolescence à s'affirmer. Alors si on arrive à Dieu, puis qu'on est dans une situation qui va à l'encontre de nos valeurs, il faut réanimer cet instinct d'affirmation de soi, de respect de soi-même, et de sortir de là.

  • Speaker #1

    Et c'est vrai que souvent, j'ai des clients qui viennent à moi en me disant « OK, là, je ne sais pas s'il faut que je franchisse le cap de partir de mon entreprise ou pas. » Et puis, dès là, finalement, on se rend compte qu'il y a une déconnexion entre les valeurs de l'individu et celles de son employeur. C'est certain que ça parle. Et qu'il faut effectivement oser pousser la porte et partir.

  • Speaker #0

    Il faut, c'est une question d'hygiène mentale. Complètement. J'ai eu une cliente qui était alors associée à un grand cabinet d'avocats pancanadiens qui a fait une dépression, mais franchement, une dépression majeure. Et dans le travail thérapeutique qu'elle a réalisé, en fait, qu'elle ne faisait plus. Le travail pour lequel elle avait étudié, oui, elle était avocate, oui, elle était associée, certainement faisait beaucoup d'argent, j'en rêve encore, mais ce qu'elle faisait n'était plus du droit. Elle s'était tellement écartée de ce qu'elle était que ça l'a rendue malade. Elle a recouvré sa santé, elle est retournée au bureau pour faire la preuve qu'elle est encore capable. Et quand elle s'est sentie assez forte, elle a quitté le bureau pour fonder sa propre entreprise de plaidoirie. Maintenant, elle fait du droit. Elle a retrouvé sa santé, mais pas seulement. Elle fait plus d'argent qu'avant. Alors cette question, souvent les gens restent dans des emplois parce qu'ils ont de l'insécurité financière ou parce qu'ils gagnent tellement d'argent, comme une cage dorée, qu'ils ne peuvent pas imaginer être ailleurs. C'est pour ça que tantôt je disais, l'argent a une valeur émotionnelle. Le chiffre a de la valeur à nos yeux.

  • Speaker #1

    Est-ce que le bonheur, c'est clair, il y a une expression comme ça qui dit, c'est le bonheur qui amène le succès et non pas le succès qui amène le bonheur. Alors, je ne serais plus capable de donner le nom de la personne qui a cité, mais c'est vraiment ça. Et c'est vrai que moi, je suis confrontée souvent à des gens qui… qui se questionnent comme ça sur est-ce que je fais le pari de pousser effectivement cette porte et de chercher plus d'alignement. Alors c'est certain que parfois à court terme, ça demande aussi de revoir certaines prétentions salariales, mais l'effet de bascule arrive très rapidement à partir du moment où on est aligné, parce qu'on est capable d'avancer avec beaucoup plus de résilience et au-delà des obstacles. on a une motivation en nous qui est tellement forte, avec un degré qu'on est capable effectivement de développer son potentiel de manière exponentielle comme on ne l'a jamais fait. Donc, c'est certain qu'effectivement, on a ce cercle vertueux qui se crée.

  • Speaker #0

    Mais c'est surtout que la santé n'a pas de prix. J'adore. On ne peut pas acheter la santé. On peut vivre dans des conditions saines qui vont favoriser notre santé. Mais la santé, c'est quelque chose que nous avons, la majorité d'entre nous, à la naissance, et qu'on peut perdre parce qu'on abuse de nos capacités physiques et mentales. Alors, il faut quand même devenir conscient des répercussions des choix que nous faisons. Et chacun, chacune est responsable de ses choix. C'est sûr. Nous sommes libres de ces choix.

  • Speaker #1

    C'est sûr. Et là-dessus, il y a énormément de travail. Souvent, je confie que quand j'ai travaillé pendant 15 ans en ressources humaines et à un moment donné, je me suis dit, je ne suis plus capable d'avancer effectivement dans ce type de contexte parce qu'on était en transformation organisationnelle en continu, revoir les processus d'affaires, les rôles et responsabilités, redéfinir les indicateurs. Tu pitches les gens effectivement dans ces cases-là. Et on passe complètement finalement à côté du potentiel des ressources parce qu'on ne s'intéresse pas à la singularité ni aux forces des gens. Mais il y a aussi une co-responsabilité qui est présente. C'est-à-dire qu'à un moment donné, les gens aussi décident de rentrer dans cette case et de se conformer à ça. Et ne pas oser finalement considérer qu'il y a d'autres possibles qui peuvent se réaliser, comme tu le disais.

  • Speaker #0

    Oui, nous sommes libres.

  • Speaker #1

    On est libre.

  • Speaker #0

    Mais exercer sa liberté, ça demande d'être conscient. Et être conscient, ça demande de l'énergie. Et tout le monde ne veut pas mettre cette énergie. C'est beaucoup plus tranquille que d'aller dans le courant et de se laisser porter. Et lorsque nous sommes malheureux, de blâmer les conditions, les autres, le gouvernement, l'Altaire, pour... les conditions que l'on vit. Ça demande du courage de vivre pour assumer. Se connaître,

  • Speaker #1

    oui, effectivement. Ça nécessite aussi la connaissance de soi. C'est quand même un élément tellement important. Plus on développe la lecture de quelles sont nos forces, quels sont nos essentiels, sur quelle réalité, finalement, quelle réalité nous touche, nous, en tant qu'individus, sur lequel on veut contribuer, de par notre histoire, de par ce que l'on a pu... finalement constaté dans le monde et qui vient nous toucher individuellement. Et ça, c'est vrai que c'est un vrai travail. Et ce travail-là, à un moment donné, c'est s'offrir du temps, c'est pour avancer et cheminer à ce niveau-là.

  • Speaker #0

    Mais c'est aussi connaître ses limites, Yvanne.

  • Speaker #1

    Bien, c'est sûr.

  • Speaker #0

    Parce que les humains, nous ne pouvons pas être sans les autres. Et dans cette prise de conscience de qui je suis, Et immanquablement, il faut aussi que je prenne conscience d'avec qui je suis. Et avec qui je veux être. Et avec qui je veux être. Et pour qui et pourquoi. Parce que le mouvement du comportement positif ou de la psychologie positive, moi je veux bien. Mais il ne faut pas oublier qu'à côté des forces, il y a des limites. Nous ne sommes pas des êtres surnaturels, nous sommes des êtres vivants avec des capacités, mais aussi des limites. Et c'est grâce à ces limites qu'on est capable de développer notre humilité et notre capacité à travailler avec les autres, à collaborer avec les autres. L'instinct de coopération, c'est très important pour les humains. On a besoin de balancer ce regard. porté sur soi, avec un regard porté sur les autres, avec qui je suis. Il faut prendre en compte les autres. C'est là où, aujourd'hui, en 2022, on est encore loin du compte. Parce qu'on est tellement, on est en train de sortir de l'individualisme. De toute façon, on n'a pas le choix. On n'a pas le choix parce que le climat va nous le rappeler. Que si on veut son vœu. comme humanité survivre à ce qui nous attend, ce qui est en train de se faire et ce qui nous attend, on va être obligés de collaborer ensemble.

  • Speaker #1

    De coopérer.

  • Speaker #0

    Et de partager ensemble.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'elle, juste, tu sais, pour revenir quand même sur la question que je te posais tout à l'heure, parce qu'on s'est un petit peu éloigné, mais c'était intéressant.

  • Speaker #0

    Parce que ce qui donne un sens au travail, oui, c'est ce que nous faisons. Mais c'est aussi avec qui et pour qui nous le faisons. Tout le concept de relation de l'entreprise dans laquelle je suis, avec qui je travaille et pour qui je travaille, et qui sont mes clients, tout ça, ce sont des relations. Et si les relations, en général, les gens quittent un emploi, non pas à cause du travail, mais à cause des relations qu'ils ont dans leur entreprise. C'est dire la... l'importance de la qualité des relations humaines.

  • Speaker #1

    Alors, du coup, en tant que leader, justement, si on veut mettre en place quelques actions qui peuvent finalement avoir un impact sur le sentiment de ses collaborateurs d'exercer sa fonction avec sens, quels seraient tes conseils ?

  • Speaker #0

    Alors, du point de vue... Non, j'ai déjà parlé pour le travail. C'est le sentiment d'utilité, d'efficacité. C'est très important. Oui, mais sur le plan de l'équipe, c'est très important de porter attention à la qualité des échanges réciproques, à la réciprocité des échanges dans l'équipe, la capacité de se soutenir, de s'entraider, de régler les problèmes, pas simplement les problèmes techniques, mais aussi les problèmes interpersonnels. C'est souvent là où on observe des difficultés parce que les conflits, les tensions dans une équipe. engendre des émotions négatives comme de l'anxiété, de l'envie, de la colère. Et nous ne sommes pas très habiles à gérer ces émotions-là. Donc, c'est important que le travail ait du sens, que le chef d'équipe soit capable de gérer les tensions et les conflits dans l'équipe pour maintenir une cohésion, pour renforcer la solidarité de l'équipe. à faire le travail qui est attendu avec cet esprit d'échange réciproque, de se concentrer.

  • Speaker #1

    C'est-à-dire qu'en fait, on peut aussi limiter cette vision-là de se dire finalement, gérer les tensions, les conflits, de se dire finalement, peut-être démultiplier les temps d'échange et de collaboration et de réciprocité. Donc, amener finalement, amener l'équipe à porter de l'intérêt finalement au vécu de chacun dans notre...

  • Speaker #0

    Au vécu de chacun, oui.

  • Speaker #1

    Dans l'exercice de sa famille.

  • Speaker #0

    Mais au vécu de chacun par rapport au travail à faire ensemble.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #0

    Quoi d'autre ? Puis, un autre aspect qui est très important, donc je parlais du travail, de la qualité des relations dans l'équipe qui forme une vraie équipe. Et puis, une… Une fonction importante d'un chef d'équipe, c'est d'être attentif à des occasions d'innovation.

  • Speaker #1

    Alors, qu'est-ce que tu entends par être attentif ?

  • Speaker #0

    Que ce soit dans l'exécution des tâches, dans la manière de faire le travail, comme dans la manière de soutenir le développement des compétences des membres, d'être attentif aux occasions de faire mieux. Ces occasions de faire mieux, ce qu'on fait ensemble, va stimuler l'apprentissage, va stimuler le développement, va stimuler l'innovation dans l'équipe. Et ça, ça assure la pérennité de l'équipe. Les équipes vont continuer de bien travailler ensemble parce qu'elles ont développé des capacités à s'améliorer et à faire grandir les personnes et l'équipe dans l'organisation. Je ne sais pas si je m'exprime clairement. Oui,

  • Speaker #1

    si, si, c'est très clair. C'est finalement à travers le développement d'occasions d'innovation, c'est aussi offrir l'opportunité au collectif et à l'individu de se développer et de développer aussi l'organisation en tant que telle. Donc, vous avez une santé de sentiments aussi de contributifs.

  • Speaker #0

    Oui, et de faire avancer.

  • Speaker #1

    Oui, OK.

  • Speaker #0

    On n'est pas dans la reproduction de ce qu'on sait faire, mais dans la production et la création. de mieux faire.

  • Speaker #1

    Donc, c'est sortir de la routine. C'est finalement faciliter toujours ce mieux-faire et pousser encore plus loin ces équipes.

  • Speaker #0

    Oui. Et ça, non seulement ça stimule le développement des compétences des personnes, mais surtout, ça renforce la capacité de l'équipe à bien faire le travail, à mieux faire le travail, ce qui va contribuer au développement de l'organisation dans la mesure où, bien entendu, tout ce qu'elle fait est aligné avec sa mission.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il y a un autre élément ? Donc,

  • Speaker #0

    réciprocité des échanges,

  • Speaker #1

    développer finalement, s'assurer que les gens avancent avec une vision qui soit claire et engageante pour tous. Et puis, le troisième élément, ça sera effectivement développer des occasions d'innovation pour grandir ensemble.

  • Speaker #0

    Exactement, exactement. Voilà, on peut le dire comme ça.

  • Speaker #1

    Super ça. Eh bien, merci beaucoup pour ce temps d'échange, Estelle. Est-ce qu'il y a une question que je ne t'ai pas posée qui, selon toi, aurait pu être pertinente ?

  • Speaker #0

    J'avais envie de te poser la question, toi. Quel est le sens de ton travail ?

  • Speaker #1

    Écoute, moi, je te dirais que c'est vraiment cette recherche d'amener un individu à un collectif. à s'offrir l'opportunité de s'aligner davantage dans ce qu'il fait, pour qu'il puisse se réaliser et aller plus loin aussi dans son niveau de contribution. Donc c'est ça, c'est aligner davantage qui l'on est avec ce que l'on fait, puis comment on le fait, puis je sais à quel point, parce que c'est une thématique qui m'est chère finalement, comment on accompagne une personne ou un collectif à avoir ce sentiment d'avoir plus de sens. Puis moi, je l'ai vécu dans ma vie. dans ma vie professionnelle. Et ça fait sept ans que j'accompagne des individus et des collectifs. Et c'est tellement nourrissant de voir les gens grandir, prendre conscience qu'ils ont le droit de se réaliser. qu'ils ont en eux énormément de talents qui peuvent servir à faire une différence et puis que finalement, ça prend juste le pouvoir d'oser en fait, d'oser voir de tout possible et puis oser s'affranchir pour avancer différemment et se réaliser. Alors moi, c'est ça. Tu vois, c'est vraiment amener les gens à avancer avec plus de sens et d'authenticité. pour finalement se réaliser davantage.

  • Speaker #0

    Mais tu réalises que c'est grâce à ton accompagnement, dans la relation qu'ils ont avec toi, qu'ils peuvent réaliser ça.

  • Speaker #1

    Merci, Estelle. Ça me touche vraiment beaucoup. C'est un beau miroir que tu me renvoies. Et surtout, un beau miroir aussi sur la profession de coach, qui, c'est vrai, très souvent est mise à mal. Donc, merci pour ça. Alors, surtout... merci à toi pour ce temps et je t'avoue que je sais déjà que je vais repartir avec cette phrase que je n'hésiterai pas à partager toute ma vie,

  • Speaker #2

    c'est certain nous sommes ce que nous faisons et ce que nous faisons nous transforme Rendez-vous sur le-sas-coaching.com

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Description

Si la pandémie a eu un effet positif, c’est bien d'accélèrer la prise de conscience de faire advenir davantage de sens au travail.

Aujourd’hui, la quête de sens, que l’on estimait un luxe réservé aux milléniaux est devenue multigénérationnelle.

Fin 2020 dans une étude de l’APEC, 94 % des cadres jugeaient important d’exercer un métier qui a du sens.


La question du sens « pour quoi je me lève le matin pour aller au travail » est ainsi devenu un enjeu sociétal, qui confronte, non seulement l’individu, mais aussi l’entreprise afin de maintenir ou rehausser un niveau d’engagement et donc de performance optimale.

« Comment générer plus de sens pour ses collaborateurs? »

 

Je suis ravie aujourd’hui de cheminer avec vous sur une question qui est au cœur de ma pratique, avec à mes côtés, l’une des plus grandes spécialistes dans le domaine Estelle Morin, professeure en management à HEC Montréal et professeure associée à la Chaire Sens et Travail de l’Icam.


Estelle a choisi très tôt de devenir psychologue et a consacré sa carrière à essayer de comprendre ce qui donne un sens au travail afin que les individus puissent s'accomplir pleinement et créer un monde meilleur...telle est, en toute simplicité le sens qu'elle a donné à sa vie professionnelle.

Au-delà d'évoquer l’évolution du rapport au travail sur les dernières décennies, Estelle nous partagera les composants clés  du sens au travail et les leviers pour générer concrètement en tant que leader plus de sens au sein de son équipe !!

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Dans le registre du travail, c'est être, être qui nous sommes, et nous sommes ce que nous faisons, et ce que nous faisons nous transforme. Alors si nous faisons quelque chose qui ne fait pas de sens, à un certain moment, notre vie n'a pas de sens et nous n'avons pas de sens. C'est ce qu'on appelle une névrose existentielle. C'est-à-dire j'existe, mais pourquoi ?

  • Speaker #1

    Bienvenue sur le podcast Le Sass des leaders. Votre espace-temps pour ensemble, passez à la prochaine étape et avancez en cohérence avec les nouvelles attentes de la société. Ce podcast est présenté avec le soutien du cabinet de chasse exécutif Morgan Phillips Canada, dirigé par Frédéric Vigneault. Si la pandémie a eu un effet positif... c'est bien d'accélérer la prise de conscience sur la nécessité de donner du sens au travail. Aujourd'hui, la quête de sens, que l'on estimait un luxe réservé aux millenials, est devenue multigénérationnelle. Fin 2020, dans une étude de la paix, 94% des cadres jugeaient important d'exercer un métier qui a du sens. Pourquoi je me lève le matin pour aller au travail ? est ainsi devenu un enjeu sociétal qui confronte non pas seulement l'individu, mais aussi les entreprises, afin de maintenir ou rehausser un niveau d'engagement et donc de performance optimale. Comment générer plus de sens au quotidien pour mes collaborateurs ? Bonjour à vous ! Yvan Le Dord, je suis coach professionnel accrédité et fondatrice du cabinet franco-québécois Le Sass. Je suis ravie aujourd'hui de cheminer avec vous sur une question qui est au cœur de ma pratique avec à mes côtés l'une des plus grandes spécialistes dans le domaine, Estelle Morin, professeure en management à HEC Montréal et professeure associée à la chaire Sens et Travail de l'ICAM. Estelle a choisi très tôt de devenir psychologue et a consacré sa carrière à essayer de comprendre ce qui donne un sens au travail et comment gérer les individus afin qu'ils trouvent eux-mêmes un sens, puissent s'accomplir et, ce faisant, créer un monde meilleur. Voilà en toute simplicité le sens qu'elle a donné à sa vie professionnelle. Au-delà d'évoquer l'évolution du rapport au travail sur les dernières décennies, est-elle nous pas partagera ce qui donne réellement du sens au travail. Je la questionnerai également sur les leviers pour générer concrètement, en tant que leader, plus de sens au sein de son équipe. Bonne écoute. Estelle, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Écoute, je pense que ce serait très intéressant que tu nous fasses part dans un premier temps de ton regard finalement sur l'évolution du rapport au travail dans le monde. sur les dernières décennies, on va dire. Comment tu as vu changer les choses ?

  • Speaker #0

    Alors, le travail, c'est quelque chose d'aussi essentiel que l'amour, disait Simeon Freud. Les humains, on a besoin de travailler comme on a besoin d'aimer. Parce que c'est par le travail qu'on peut faire la démonstration qu'on a une vie qui vaut la peine d'être vécue. C'est grâce au travail qu'on est capable d'exercer notre intelligence. notre imagination, notre créativité pour ajouter de la valeur à quelque chose, pour rendre service aux autres, pour laisser sa marque, faire son empreinte, une preuve de son passage. Ce n'est pas étonnant qu'on associe le sens du travail au sens de la vie. Le travail contribue à avoir le sentiment d'avoir vécu une vie utile. C'est quelque chose de fondamental. Les années de l'industrialisation a commencé probablement à la fin du 19e siècle. On a dévié la notion du travail vers celle de l'emploi. Donc, beaucoup assimilent l'emploi au travail. Ce n'est pas du tout la même chose.

  • Speaker #1

    Alors, quelle distinction tu fais ? C'est intéressant.

  • Speaker #0

    L'emploi, c'est une activité économique. C'est une transaction. Je fais quelque chose en échange de quelque chose. En général, ce quelque Ausha, c'est un salaire, ce sont des avantages sociaux, un régime de retraite, l'assurance d'une certaine sécurité financière. Ça peut être aussi des marques de réussite sociale, du prestige, statut. Ça peut être... Enfin, c'est tout ce qui est du domaine de... Le registre de l'avoir.

  • Speaker #1

    Ah, c'est ça ! Bien oui. Et alors, donc, amène-nous sur le travail. Le travail...

  • Speaker #0

    Alors que le travail, il n'est pas dans le registre de l'avoir. Il est dans le registre de l'être.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    On fait... On transforme, hein ? Les esprits, certains esprits, j'allais dire mal tournés, mais dans le bon sens, associent travail, trépalium, torture. Quand je travaille, je me travaille et ça me torture, donc c'est pénible. C'est une façon d'imaginer le travail. Dans la lignée judéo-chrétienne, où le travail, c'est la punition infligée à Adam pour avoir mangé le fruit de l'arbre défendu.

  • Speaker #1

    Et alors, comment tu as vu les choses évoluer finalement, dans le temps ? Parce qu'aujourd'hui, la notion de travail en tant que tel, je veux me sentir utile, je veux être et je veux développer mon être à travers le travail. Et là, concrètement, on y est. À quel moment ? À quel moment tu as pu constater qu'il y avait vraiment une bascule ?

  • Speaker #0

    Il y a toujours des effets de bascule lorsqu'on va dans des extrêmes. Alors, je dirais les années 90 ont basculé la gestion du travail dans la gestion de l'emploi pour faire le plus d'argent possible. On a accéléré le développement de valeurs individualistes qui ont malheureusement comme conséquence de briser la collectivité. Alors, avec le résultat que les gens perdent le sens du travail. C'est là-dessus que j'ai commencé mes travaux en 1992. Alors que je rencontrais des dirigeants d'entreprise pour leur faire parler d'efficacité d'entreprise et que dans les conversations initiales, plusieurs se sont plaintes d'avoir un travail qui ne faisait pas de sens. C'est quand même troublant d'entendre des entrepreneurs, des dirigeants d'entreprise se plaindre que leur travail ne fait pas de sens, même s'ils font beaucoup d'argent.

  • Speaker #1

    Cela dit, c'est très fréquent et c'est ce que je te partageais aussi. Moi, très souvent, j'ai des dirigeants qui… une fois qu'ils ont atteint leur objectif, qui avait du sens pour eux avant, de se dire, je veux appartenir à un COMEX, je veux finalement gérer 200 employés, je veux avoir tant de salaires. Une fois que ce statut-là est atteint, ils prennent le mur, ils prennent le mur justement du sens. Qu'est-ce que je fais là ? Quel sens a finalement de faire tout ça ?

  • Speaker #0

    En fait, c'est apercevant. Il faut avoir pour vivre. Il faut avoir un toit, il faut avoir à manger, il faut avoir une sécurité financière, il faut avoir pour vivre. Mais quand on a juste ce qu'on a, c'est ça, quand on va dans l'extrême, ça ne fonctionne plus. Parce que, oui, l'argent a une signification très émotionnelle. Ça tâche beaucoup, beaucoup d'importance à l'argent, puis ça va en-delà de la raison. L'argent, ça ne fait pas le bonheur. Et surtout, l'argent, on ne l'emporte pas en terre. On vient au monde tout nu et on meurt tout nu.

  • Speaker #1

    J'adore.

  • Speaker #0

    Quand on a autant et qu'on se rend compte qu'au fond, ce n'est pas ça qui contribue de naissance à la vie qu'on mène, manquablement, on s'interroge sur le sens du travail qu'on fait et pourquoi on le fait.

  • Speaker #1

    Et puis, il y avait, je ne sais pas, tu connais Bill Jones dans le leadership authentique, il dit finalement, si on vous questionne sur quel est le sens de votre métier, puis que vous répondez l'argent, l'argent devrait être une question, une conséquence finalement, du sens et de l'utilité que vous apportez à votre travail.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Mais la vraie question, c'est pourquoi vous êtes un leader ? Quel sens vous donnez à votre leadership ?

  • Speaker #0

    Oui. Parce qu'en fait, dans le rejet du travail, c'est être. Être qui nous sommes. Et nous sommes ce que nous faisons. Et ce que nous faisons nous transforme. Alors, si nous faisons quelque chose qui ne fait pas de sens, à un certain moment, notre vie n'a pas de sens et nous n'avons pas de sens. C'est ce qu'on appelle une névrose existentielle. C'est-à-dire, j'existe, mais pourquoi ?

  • Speaker #1

    80 000 heures, on travaille dans notre vie quand même. Oui. J'adore retransmettre parfois ce chiffre-là aux personnes que j'entends qui se questionnent en disant, À quel niveau mon égo parle quand je dis que je voudrais donner du sens à ce que je fais ? Est-ce que je ne devrais pas tout simplement me contenter finalement de ramener de l'argent à chaque fin de mois pour ma famille et pour les miens ?

  • Speaker #0

    Oui, mais vive le jour de la marmotte ! On n'est pas des fourmis, nous ne sommes pas des fourmis, nous ne sommes pas des marmottes. Les humains, nous aimons bien la routine parce que ça structure le quotidien. Ça permet de gérer notre anxiété. Mais la routine tue notre créativité. Ça nous ennuie mortellement. Donc, on a besoin de faire un travail qui résonne avec qui nous sommes.

  • Speaker #1

    Et alors, du coup, si on revient sur cette notion de bascule. Donc, tu me disais que tu avais une bascule qui s'est opérée dans les années 90. où finalement on est passé d'une gestion du travail, du sens du travail à une gestion de l'emploi, donc une culture beaucoup plus individualiste, qui est portée aussi beaucoup plus finalement sur des axes financiers. À quel moment tu as revu une autre bascule se faire ? Parce qu'elle a eu lieu quand même. Oui,

  • Speaker #0

    elle a eu lieu, mais je pense que… Bon, les phénomènes sociaux prennent racine, je veux dire, on ne cesse de répéter l'histoire. Donc, c'est difficile de dire à quel moment précisément ça a commencé, mais certainement que la pandémie a sonné l'alarme. Je dis là, ça suffit. Parce que c'est un phénomène que nous avons vécu collectivement partout sur la planète. Enfin, dans tous les pays industrialisés, la pandémie a forcé les populations à se confiner quand c'était possible dans leur domicile pour prévenir la propagation du virus, pendant que d'autres qui ne pouvaient pas travailler de chez eux se sont vus obligés d'aller au travail et s'exposer aux risques. du virus. Et c'est quand même une situation qui a duré et qui continue de durer. Alors, ça fait au moins deux ans qu'on vit dans cet état de vigilance en raison du risque de maladie.

  • Speaker #1

    Et en quoi, selon toi, ça nous a ramené justement à la nature même du sens du travail ?

  • Speaker #0

    Parce que pour les personnes... qui ont été obligées de travailler de chez elles. Ça, c'est une enquête que nous avons faite, Laurent Falk et moi, en 2019. Oui. En 2020, puis qu'on a reprise en 2021. Les personnes en France, les personnes qui ont été obligées de se confiner pour travailler de chez elles, quand même à une proportion considérable, plus du tiers. ont remis en question l'utilité du travail qu'elles faisaient. Si le travail peut se faire malgré leur absence, à quoi sert leur travail ? Si les dirigeants, les cadres, les entrepreneurs qui se sont vus obligés de travailler de chez eux parce que c'était possible de le faire grâce aux technologies, une grande proportion ont réalisé que... Oui, le travail peut se faire très bien sans leur supervision, c'est-à-dire qu'on n'a pas besoin d'eux. Alors, quoi sert leur travail ? Pire, il y a des entrepreneurs qui se sont dit, ce que nous faisons dans l'entreprise, ça ne sert à rien en fait, ça pollue, et qui ont converti leur production pour faire des produits plus utiles.

  • Speaker #1

    Alors, ça m'amène aussi à la question de se dire finalement, aujourd'hui… Selon toi, selon les études que tu as pu mener, qu'est-ce qui donne réellement du sens au travail ? Quels sont les grandes composantes clés ?

  • Speaker #0

    D'abord, il faut admettre que le sens est une expérience subjective. Ce qui fait du sens pour l'un ne fait pas forcément du sens pour l'autre.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Ensuite, j'ai fait, j'ai mené des enquêtes dans plusieurs pays, bien entendu au Canada, mais aussi en France et au Brésil, et dans d'autres pays aussi, je pense au Portugal ou à la Belgique. Mais de manière générale, en Occident en tout cas, le travail a du sens lorsque nous faisons quelque chose d'utile. Le sentiment d'utilité, c'est important pour nous dans le monde occidental. Je présume que c'est pareil dans le monde oriental, mais j'en sais rien. Alors, il faut quand même limiter. OK,

  • Speaker #1

    donc, sentiment d'utilité.

  • Speaker #0

    Oui, le sentiment d'utilité, c'est très important. Ensuite, un travail fait du sens parce qu'il permet de mobiliser. les capacités, les compétences des gens pour le faire d'une manière efficace. Le sentiment d'efficacité est très important aussi pour que le travail fasse du sens. Le mot efficacité n'est pas banal. Si vous regardez l'étymologie du mot efficacité, c'est faire l'effet qu'on recherche. On veut faire, c'est produire l'effet recherché.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Alors, il y en a qui disent que c'est l'atteinte du objectif, mais c'est franchement fortuné. Au petit Robert, regardez l'étymologie. C'est produire l'effet recherché. Alors, donc, c'est plus que l'objectif. C'est toutes les conséquences et les répercussions qui engendrent le fait de faire le travail. Ce sentiment d'efficacité est associé à notre besoin de pouvoir, qui est fondamental chez les humains. Ensuite, bon, sentiment d'utilité, sentiment d'efficacité. Ce qui est très important aussi dans le travail est savoir plutôt avec le contexte dans lequel le travail s'effectue, c'est la qualité des relations que le travail engendre. C'est-à-dire que pour travailler, c'est très rare qu'on travaille sans être en relation avec d'autres. Le fait de travailler nous met en relation avec les autres, nous permet de nous insérer dans le monde.

  • Speaker #1

    Il y a le sentiment, le besoin d'appartenance, en fait. Oui.

  • Speaker #0

    C'est le travail engendre ce que j'appellerais le sentiment d'identité. Parce que je fais quelque chose avec d'autres et pour d'autres, j'arrive à définir qui je suis. et à transformer mon identité grâce à ce que je fais. Parce que je reviens à cette formule, nous sommes ce que nous faisons, et ce que nous faisons nous transforme. Alors, c'est très important de réaliser ça, parce qu'il n'y a pas de geste qui n'a pas d'importance sur notre identité.

  • Speaker #1

    Nous sommes ce que nous faisons.

  • Speaker #0

    Oui, ce que nous faisons nous transforme. Et ce que nous faisons nous transforme. Alors, si je fais, et ça c'est... C'est moi qui ai créé la formule, mais elle n'est pas de Réunion. Elle vient en fait de Simone Veil, dans un livre qu'elle a écrit, La condition ouvrière. Tous les gestes que nous posons tous les jours contribuent à qui nous sommes.

  • Speaker #1

    C'est sûr.

  • Speaker #0

    Alors, c'est vraiment le travail réel. Alors là, j'en réfère à Christophe Dejour, qui parle de... travail réel versus le travail prescrit. Moi, je n'ai pas étudié le travail prescrit, j'ai étudié le travail réel. Ce que les gens font chaque jour.

  • Speaker #1

    Et Estelle, justement pour continuer dans ce cheminement de pensée, comment en tant que leader aujourd'hui, on peut justement développer le sens au travail, au sein de ses équipes ? Qu'est-ce que ça apprend selon toi ?

  • Speaker #0

    Bon, alors ça, c'est un... C'est un projet que Laurent Falk et moi menons à la chaire sens et travail de l'ICAM à Lille. C'est d'identifier les pratiques de management du travail. Parce que c'est quand même assez étonnant, les écoles de commerce n'étudient pas le management du travail. On étudie la stratégie, donc le management de l'organisation. On étudie la gestion des ressources humaines, donc le management des personnes. Mais la gestion du travail lui-même, ce que font les gens en équipe, le travail concret, on n'étudie pas ça. Alors, notre projet, c'est de déterminer les pratiques de management du travail qui aident à lui donner du sens. Alors, jusqu'à présent, nous en avons identifié, on en a identifié six, en fait. Six qui vont faire, qui font l'objet actuellement d'une enquête dans cinq pays du monde. Oui. Donc, un oriental, les Philippines. La première, c'est de donner une direction claire et inspirante.

  • Speaker #1

    De donner ou de co-créer. Parce qu'aujourd'hui, moi, j'ai quand même le sens, au niveau du collectif. qu'on n'est plus sur quelque chose de descendant et qu'au contraire, il faut quand même réellement travailler sur la co-création d'une vision qui soit partagée par tous.

  • Speaker #0

    Oui et non. Parce que ce qui donne un sens au travail que je fais, c'est la correspondance qu'il y a entre mon travail concret, ce que je suis en train de faire, avec la mission de mon école.

  • Speaker #1

    La mission de ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis professeure, donc avec la mission de mon école. Et ça, bien oui, c'est descendant. Parce que la mission de l'école, elle est publique et elle fonde la légitimité de l'école. Les organisations sont des systèmes complexes, absolument pas vivants. Ce sont des représentations, donc ce sont des constructions collectives, mais elles existent pour vrai. parce qu'elles sont fondées par des registres juridiques.

  • Speaker #1

    Donc, tu dis le premier élément.

  • Speaker #0

    C'est donner une direction claire et inspirante au travail que je fais, qui est aligné avec la mission de notre établissement, de notre organisme, de notre entreprise. S'il n'y a pas de lien direct entre ce que je fais tous les jours et la mission de l'organisation, C'est difficile de voir d'une part en quoi mon travail va contribuer à l'accomplissement de notre mission collective qui est prescrite par la société, l'organisation. Et puis d'autre part, si jamais quelqu'un avait l'idée de rationaliser des effectifs, je serais la première sur la liste parce que mon travail ne contribue pas à la mission. Oui.

  • Speaker #1

    Estelle, petite question et si la mission de l'entreprise n'a pas de sens ?

  • Speaker #0

    C'est bon ça non ? Oui c'est une bonne question mais en même temps j'ai envie de mettre un avertissement cette question là suppose un jugement de valeur. Pour être capable de porter un jugement de valeur, il faut être conscient des valeurs qu'on porte

  • Speaker #1

    J'adore ...

  • Speaker #0

    Tu vois ? Oui. On a une question éthique ici. Et avec toute la question de la diversité culturelle, puis des différentes variations. Alors, qu'est-ce qui fait du sens ? Qu'est-ce qu'il n'y en a pas ?

  • Speaker #1

    Mais c'est intéressant parce que tu ramènes quand même à la notion de valeur. Et c'est vrai que... C'est vrai que c'est un travail qui est fondamental, c'est-à-dire pour générer du sens, savoir finalement quelle réalité on veut oeuvrer et qui va nous toucher nous en tant qu'individu. Ça nécessite en amont d'avoir clarifié et de connaître clairement ces valeurs.

  • Speaker #0

    Absolument. Oui, et là, ça, c'est un travail individuel. Bon, cela dit…

  • Speaker #1

    Une fois qu'on a dit ça.

  • Speaker #0

    D'un point de vue individuel. Si j'estime que je travaille dans une organisation qui a une mission qui n'a pas de sens pour moi, franchement, je n'ai pas d'affaire là. C'est une question d'honnêteté morale, de dignité personnelle, de se retirer d'une situation qui va à l'encontre de ses valeurs. Je ne vois pas comment quelqu'un peut supporter cette dissonance-là. sans me compromettre sa santé mentale. Vous allez me dire peut-être que, oui, mais il faut quand même gagner sa vie. Oui, il faut gagner sa vie, mais je ne peux pas croire aujourd'hui, en 2022, qu'on ne peut pas trouver un endroit sur la planète où on peut gagner sa vie, dans un environnement qui est en responsabilité de valeur. Ce n'est pas possible. Il y a une responsabilité individuelle. Les humains, nous sommes venus au monde libre. Nous pouvons à tout moment refuser. Cette capacité de s'affirmer, de dire non, nous apprenons à la domestiquer, si je peux dire, dès qu'on a 18 mois. C'est l'âge impérialiste où on dit non à tout. Et on apprend tout son enfance et son adolescence à s'affirmer. Alors si on arrive à Dieu, puis qu'on est dans une situation qui va à l'encontre de nos valeurs, il faut réanimer cet instinct d'affirmation de soi, de respect de soi-même, et de sortir de là.

  • Speaker #1

    Et c'est vrai que souvent, j'ai des clients qui viennent à moi en me disant « OK, là, je ne sais pas s'il faut que je franchisse le cap de partir de mon entreprise ou pas. » Et puis, dès là, finalement, on se rend compte qu'il y a une déconnexion entre les valeurs de l'individu et celles de son employeur. C'est certain que ça parle. Et qu'il faut effectivement oser pousser la porte et partir.

  • Speaker #0

    Il faut, c'est une question d'hygiène mentale. Complètement. J'ai eu une cliente qui était alors associée à un grand cabinet d'avocats pancanadiens qui a fait une dépression, mais franchement, une dépression majeure. Et dans le travail thérapeutique qu'elle a réalisé, en fait, qu'elle ne faisait plus. Le travail pour lequel elle avait étudié, oui, elle était avocate, oui, elle était associée, certainement faisait beaucoup d'argent, j'en rêve encore, mais ce qu'elle faisait n'était plus du droit. Elle s'était tellement écartée de ce qu'elle était que ça l'a rendue malade. Elle a recouvré sa santé, elle est retournée au bureau pour faire la preuve qu'elle est encore capable. Et quand elle s'est sentie assez forte, elle a quitté le bureau pour fonder sa propre entreprise de plaidoirie. Maintenant, elle fait du droit. Elle a retrouvé sa santé, mais pas seulement. Elle fait plus d'argent qu'avant. Alors cette question, souvent les gens restent dans des emplois parce qu'ils ont de l'insécurité financière ou parce qu'ils gagnent tellement d'argent, comme une cage dorée, qu'ils ne peuvent pas imaginer être ailleurs. C'est pour ça que tantôt je disais, l'argent a une valeur émotionnelle. Le chiffre a de la valeur à nos yeux.

  • Speaker #1

    Est-ce que le bonheur, c'est clair, il y a une expression comme ça qui dit, c'est le bonheur qui amène le succès et non pas le succès qui amène le bonheur. Alors, je ne serais plus capable de donner le nom de la personne qui a cité, mais c'est vraiment ça. Et c'est vrai que moi, je suis confrontée souvent à des gens qui… qui se questionnent comme ça sur est-ce que je fais le pari de pousser effectivement cette porte et de chercher plus d'alignement. Alors c'est certain que parfois à court terme, ça demande aussi de revoir certaines prétentions salariales, mais l'effet de bascule arrive très rapidement à partir du moment où on est aligné, parce qu'on est capable d'avancer avec beaucoup plus de résilience et au-delà des obstacles. on a une motivation en nous qui est tellement forte, avec un degré qu'on est capable effectivement de développer son potentiel de manière exponentielle comme on ne l'a jamais fait. Donc, c'est certain qu'effectivement, on a ce cercle vertueux qui se crée.

  • Speaker #0

    Mais c'est surtout que la santé n'a pas de prix. J'adore. On ne peut pas acheter la santé. On peut vivre dans des conditions saines qui vont favoriser notre santé. Mais la santé, c'est quelque chose que nous avons, la majorité d'entre nous, à la naissance, et qu'on peut perdre parce qu'on abuse de nos capacités physiques et mentales. Alors, il faut quand même devenir conscient des répercussions des choix que nous faisons. Et chacun, chacune est responsable de ses choix. C'est sûr. Nous sommes libres de ces choix.

  • Speaker #1

    C'est sûr. Et là-dessus, il y a énormément de travail. Souvent, je confie que quand j'ai travaillé pendant 15 ans en ressources humaines et à un moment donné, je me suis dit, je ne suis plus capable d'avancer effectivement dans ce type de contexte parce qu'on était en transformation organisationnelle en continu, revoir les processus d'affaires, les rôles et responsabilités, redéfinir les indicateurs. Tu pitches les gens effectivement dans ces cases-là. Et on passe complètement finalement à côté du potentiel des ressources parce qu'on ne s'intéresse pas à la singularité ni aux forces des gens. Mais il y a aussi une co-responsabilité qui est présente. C'est-à-dire qu'à un moment donné, les gens aussi décident de rentrer dans cette case et de se conformer à ça. Et ne pas oser finalement considérer qu'il y a d'autres possibles qui peuvent se réaliser, comme tu le disais.

  • Speaker #0

    Oui, nous sommes libres.

  • Speaker #1

    On est libre.

  • Speaker #0

    Mais exercer sa liberté, ça demande d'être conscient. Et être conscient, ça demande de l'énergie. Et tout le monde ne veut pas mettre cette énergie. C'est beaucoup plus tranquille que d'aller dans le courant et de se laisser porter. Et lorsque nous sommes malheureux, de blâmer les conditions, les autres, le gouvernement, l'Altaire, pour... les conditions que l'on vit. Ça demande du courage de vivre pour assumer. Se connaître,

  • Speaker #1

    oui, effectivement. Ça nécessite aussi la connaissance de soi. C'est quand même un élément tellement important. Plus on développe la lecture de quelles sont nos forces, quels sont nos essentiels, sur quelle réalité, finalement, quelle réalité nous touche, nous, en tant qu'individus, sur lequel on veut contribuer, de par notre histoire, de par ce que l'on a pu... finalement constaté dans le monde et qui vient nous toucher individuellement. Et ça, c'est vrai que c'est un vrai travail. Et ce travail-là, à un moment donné, c'est s'offrir du temps, c'est pour avancer et cheminer à ce niveau-là.

  • Speaker #0

    Mais c'est aussi connaître ses limites, Yvanne.

  • Speaker #1

    Bien, c'est sûr.

  • Speaker #0

    Parce que les humains, nous ne pouvons pas être sans les autres. Et dans cette prise de conscience de qui je suis, Et immanquablement, il faut aussi que je prenne conscience d'avec qui je suis. Et avec qui je veux être. Et avec qui je veux être. Et pour qui et pourquoi. Parce que le mouvement du comportement positif ou de la psychologie positive, moi je veux bien. Mais il ne faut pas oublier qu'à côté des forces, il y a des limites. Nous ne sommes pas des êtres surnaturels, nous sommes des êtres vivants avec des capacités, mais aussi des limites. Et c'est grâce à ces limites qu'on est capable de développer notre humilité et notre capacité à travailler avec les autres, à collaborer avec les autres. L'instinct de coopération, c'est très important pour les humains. On a besoin de balancer ce regard. porté sur soi, avec un regard porté sur les autres, avec qui je suis. Il faut prendre en compte les autres. C'est là où, aujourd'hui, en 2022, on est encore loin du compte. Parce qu'on est tellement, on est en train de sortir de l'individualisme. De toute façon, on n'a pas le choix. On n'a pas le choix parce que le climat va nous le rappeler. Que si on veut son vœu. comme humanité survivre à ce qui nous attend, ce qui est en train de se faire et ce qui nous attend, on va être obligés de collaborer ensemble.

  • Speaker #1

    De coopérer.

  • Speaker #0

    Et de partager ensemble.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'elle, juste, tu sais, pour revenir quand même sur la question que je te posais tout à l'heure, parce qu'on s'est un petit peu éloigné, mais c'était intéressant.

  • Speaker #0

    Parce que ce qui donne un sens au travail, oui, c'est ce que nous faisons. Mais c'est aussi avec qui et pour qui nous le faisons. Tout le concept de relation de l'entreprise dans laquelle je suis, avec qui je travaille et pour qui je travaille, et qui sont mes clients, tout ça, ce sont des relations. Et si les relations, en général, les gens quittent un emploi, non pas à cause du travail, mais à cause des relations qu'ils ont dans leur entreprise. C'est dire la... l'importance de la qualité des relations humaines.

  • Speaker #1

    Alors, du coup, en tant que leader, justement, si on veut mettre en place quelques actions qui peuvent finalement avoir un impact sur le sentiment de ses collaborateurs d'exercer sa fonction avec sens, quels seraient tes conseils ?

  • Speaker #0

    Alors, du point de vue... Non, j'ai déjà parlé pour le travail. C'est le sentiment d'utilité, d'efficacité. C'est très important. Oui, mais sur le plan de l'équipe, c'est très important de porter attention à la qualité des échanges réciproques, à la réciprocité des échanges dans l'équipe, la capacité de se soutenir, de s'entraider, de régler les problèmes, pas simplement les problèmes techniques, mais aussi les problèmes interpersonnels. C'est souvent là où on observe des difficultés parce que les conflits, les tensions dans une équipe. engendre des émotions négatives comme de l'anxiété, de l'envie, de la colère. Et nous ne sommes pas très habiles à gérer ces émotions-là. Donc, c'est important que le travail ait du sens, que le chef d'équipe soit capable de gérer les tensions et les conflits dans l'équipe pour maintenir une cohésion, pour renforcer la solidarité de l'équipe. à faire le travail qui est attendu avec cet esprit d'échange réciproque, de se concentrer.

  • Speaker #1

    C'est-à-dire qu'en fait, on peut aussi limiter cette vision-là de se dire finalement, gérer les tensions, les conflits, de se dire finalement, peut-être démultiplier les temps d'échange et de collaboration et de réciprocité. Donc, amener finalement, amener l'équipe à porter de l'intérêt finalement au vécu de chacun dans notre...

  • Speaker #0

    Au vécu de chacun, oui.

  • Speaker #1

    Dans l'exercice de sa famille.

  • Speaker #0

    Mais au vécu de chacun par rapport au travail à faire ensemble.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #0

    Quoi d'autre ? Puis, un autre aspect qui est très important, donc je parlais du travail, de la qualité des relations dans l'équipe qui forme une vraie équipe. Et puis, une… Une fonction importante d'un chef d'équipe, c'est d'être attentif à des occasions d'innovation.

  • Speaker #1

    Alors, qu'est-ce que tu entends par être attentif ?

  • Speaker #0

    Que ce soit dans l'exécution des tâches, dans la manière de faire le travail, comme dans la manière de soutenir le développement des compétences des membres, d'être attentif aux occasions de faire mieux. Ces occasions de faire mieux, ce qu'on fait ensemble, va stimuler l'apprentissage, va stimuler le développement, va stimuler l'innovation dans l'équipe. Et ça, ça assure la pérennité de l'équipe. Les équipes vont continuer de bien travailler ensemble parce qu'elles ont développé des capacités à s'améliorer et à faire grandir les personnes et l'équipe dans l'organisation. Je ne sais pas si je m'exprime clairement. Oui,

  • Speaker #1

    si, si, c'est très clair. C'est finalement à travers le développement d'occasions d'innovation, c'est aussi offrir l'opportunité au collectif et à l'individu de se développer et de développer aussi l'organisation en tant que telle. Donc, vous avez une santé de sentiments aussi de contributifs.

  • Speaker #0

    Oui, et de faire avancer.

  • Speaker #1

    Oui, OK.

  • Speaker #0

    On n'est pas dans la reproduction de ce qu'on sait faire, mais dans la production et la création. de mieux faire.

  • Speaker #1

    Donc, c'est sortir de la routine. C'est finalement faciliter toujours ce mieux-faire et pousser encore plus loin ces équipes.

  • Speaker #0

    Oui. Et ça, non seulement ça stimule le développement des compétences des personnes, mais surtout, ça renforce la capacité de l'équipe à bien faire le travail, à mieux faire le travail, ce qui va contribuer au développement de l'organisation dans la mesure où, bien entendu, tout ce qu'elle fait est aligné avec sa mission.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il y a un autre élément ? Donc,

  • Speaker #0

    réciprocité des échanges,

  • Speaker #1

    développer finalement, s'assurer que les gens avancent avec une vision qui soit claire et engageante pour tous. Et puis, le troisième élément, ça sera effectivement développer des occasions d'innovation pour grandir ensemble.

  • Speaker #0

    Exactement, exactement. Voilà, on peut le dire comme ça.

  • Speaker #1

    Super ça. Eh bien, merci beaucoup pour ce temps d'échange, Estelle. Est-ce qu'il y a une question que je ne t'ai pas posée qui, selon toi, aurait pu être pertinente ?

  • Speaker #0

    J'avais envie de te poser la question, toi. Quel est le sens de ton travail ?

  • Speaker #1

    Écoute, moi, je te dirais que c'est vraiment cette recherche d'amener un individu à un collectif. à s'offrir l'opportunité de s'aligner davantage dans ce qu'il fait, pour qu'il puisse se réaliser et aller plus loin aussi dans son niveau de contribution. Donc c'est ça, c'est aligner davantage qui l'on est avec ce que l'on fait, puis comment on le fait, puis je sais à quel point, parce que c'est une thématique qui m'est chère finalement, comment on accompagne une personne ou un collectif à avoir ce sentiment d'avoir plus de sens. Puis moi, je l'ai vécu dans ma vie. dans ma vie professionnelle. Et ça fait sept ans que j'accompagne des individus et des collectifs. Et c'est tellement nourrissant de voir les gens grandir, prendre conscience qu'ils ont le droit de se réaliser. qu'ils ont en eux énormément de talents qui peuvent servir à faire une différence et puis que finalement, ça prend juste le pouvoir d'oser en fait, d'oser voir de tout possible et puis oser s'affranchir pour avancer différemment et se réaliser. Alors moi, c'est ça. Tu vois, c'est vraiment amener les gens à avancer avec plus de sens et d'authenticité. pour finalement se réaliser davantage.

  • Speaker #0

    Mais tu réalises que c'est grâce à ton accompagnement, dans la relation qu'ils ont avec toi, qu'ils peuvent réaliser ça.

  • Speaker #1

    Merci, Estelle. Ça me touche vraiment beaucoup. C'est un beau miroir que tu me renvoies. Et surtout, un beau miroir aussi sur la profession de coach, qui, c'est vrai, très souvent est mise à mal. Donc, merci pour ça. Alors, surtout... merci à toi pour ce temps et je t'avoue que je sais déjà que je vais repartir avec cette phrase que je n'hésiterai pas à partager toute ma vie,

  • Speaker #2

    c'est certain nous sommes ce que nous faisons et ce que nous faisons nous transforme Rendez-vous sur le-sas-coaching.com

Description

Si la pandémie a eu un effet positif, c’est bien d'accélèrer la prise de conscience de faire advenir davantage de sens au travail.

Aujourd’hui, la quête de sens, que l’on estimait un luxe réservé aux milléniaux est devenue multigénérationnelle.

Fin 2020 dans une étude de l’APEC, 94 % des cadres jugeaient important d’exercer un métier qui a du sens.


La question du sens « pour quoi je me lève le matin pour aller au travail » est ainsi devenu un enjeu sociétal, qui confronte, non seulement l’individu, mais aussi l’entreprise afin de maintenir ou rehausser un niveau d’engagement et donc de performance optimale.

« Comment générer plus de sens pour ses collaborateurs? »

 

Je suis ravie aujourd’hui de cheminer avec vous sur une question qui est au cœur de ma pratique, avec à mes côtés, l’une des plus grandes spécialistes dans le domaine Estelle Morin, professeure en management à HEC Montréal et professeure associée à la Chaire Sens et Travail de l’Icam.


Estelle a choisi très tôt de devenir psychologue et a consacré sa carrière à essayer de comprendre ce qui donne un sens au travail afin que les individus puissent s'accomplir pleinement et créer un monde meilleur...telle est, en toute simplicité le sens qu'elle a donné à sa vie professionnelle.

Au-delà d'évoquer l’évolution du rapport au travail sur les dernières décennies, Estelle nous partagera les composants clés  du sens au travail et les leviers pour générer concrètement en tant que leader plus de sens au sein de son équipe !!

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Dans le registre du travail, c'est être, être qui nous sommes, et nous sommes ce que nous faisons, et ce que nous faisons nous transforme. Alors si nous faisons quelque chose qui ne fait pas de sens, à un certain moment, notre vie n'a pas de sens et nous n'avons pas de sens. C'est ce qu'on appelle une névrose existentielle. C'est-à-dire j'existe, mais pourquoi ?

  • Speaker #1

    Bienvenue sur le podcast Le Sass des leaders. Votre espace-temps pour ensemble, passez à la prochaine étape et avancez en cohérence avec les nouvelles attentes de la société. Ce podcast est présenté avec le soutien du cabinet de chasse exécutif Morgan Phillips Canada, dirigé par Frédéric Vigneault. Si la pandémie a eu un effet positif... c'est bien d'accélérer la prise de conscience sur la nécessité de donner du sens au travail. Aujourd'hui, la quête de sens, que l'on estimait un luxe réservé aux millenials, est devenue multigénérationnelle. Fin 2020, dans une étude de la paix, 94% des cadres jugeaient important d'exercer un métier qui a du sens. Pourquoi je me lève le matin pour aller au travail ? est ainsi devenu un enjeu sociétal qui confronte non pas seulement l'individu, mais aussi les entreprises, afin de maintenir ou rehausser un niveau d'engagement et donc de performance optimale. Comment générer plus de sens au quotidien pour mes collaborateurs ? Bonjour à vous ! Yvan Le Dord, je suis coach professionnel accrédité et fondatrice du cabinet franco-québécois Le Sass. Je suis ravie aujourd'hui de cheminer avec vous sur une question qui est au cœur de ma pratique avec à mes côtés l'une des plus grandes spécialistes dans le domaine, Estelle Morin, professeure en management à HEC Montréal et professeure associée à la chaire Sens et Travail de l'ICAM. Estelle a choisi très tôt de devenir psychologue et a consacré sa carrière à essayer de comprendre ce qui donne un sens au travail et comment gérer les individus afin qu'ils trouvent eux-mêmes un sens, puissent s'accomplir et, ce faisant, créer un monde meilleur. Voilà en toute simplicité le sens qu'elle a donné à sa vie professionnelle. Au-delà d'évoquer l'évolution du rapport au travail sur les dernières décennies, est-elle nous pas partagera ce qui donne réellement du sens au travail. Je la questionnerai également sur les leviers pour générer concrètement, en tant que leader, plus de sens au sein de son équipe. Bonne écoute. Estelle, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Écoute, je pense que ce serait très intéressant que tu nous fasses part dans un premier temps de ton regard finalement sur l'évolution du rapport au travail dans le monde. sur les dernières décennies, on va dire. Comment tu as vu changer les choses ?

  • Speaker #0

    Alors, le travail, c'est quelque chose d'aussi essentiel que l'amour, disait Simeon Freud. Les humains, on a besoin de travailler comme on a besoin d'aimer. Parce que c'est par le travail qu'on peut faire la démonstration qu'on a une vie qui vaut la peine d'être vécue. C'est grâce au travail qu'on est capable d'exercer notre intelligence. notre imagination, notre créativité pour ajouter de la valeur à quelque chose, pour rendre service aux autres, pour laisser sa marque, faire son empreinte, une preuve de son passage. Ce n'est pas étonnant qu'on associe le sens du travail au sens de la vie. Le travail contribue à avoir le sentiment d'avoir vécu une vie utile. C'est quelque chose de fondamental. Les années de l'industrialisation a commencé probablement à la fin du 19e siècle. On a dévié la notion du travail vers celle de l'emploi. Donc, beaucoup assimilent l'emploi au travail. Ce n'est pas du tout la même chose.

  • Speaker #1

    Alors, quelle distinction tu fais ? C'est intéressant.

  • Speaker #0

    L'emploi, c'est une activité économique. C'est une transaction. Je fais quelque chose en échange de quelque chose. En général, ce quelque Ausha, c'est un salaire, ce sont des avantages sociaux, un régime de retraite, l'assurance d'une certaine sécurité financière. Ça peut être aussi des marques de réussite sociale, du prestige, statut. Ça peut être... Enfin, c'est tout ce qui est du domaine de... Le registre de l'avoir.

  • Speaker #1

    Ah, c'est ça ! Bien oui. Et alors, donc, amène-nous sur le travail. Le travail...

  • Speaker #0

    Alors que le travail, il n'est pas dans le registre de l'avoir. Il est dans le registre de l'être.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    On fait... On transforme, hein ? Les esprits, certains esprits, j'allais dire mal tournés, mais dans le bon sens, associent travail, trépalium, torture. Quand je travaille, je me travaille et ça me torture, donc c'est pénible. C'est une façon d'imaginer le travail. Dans la lignée judéo-chrétienne, où le travail, c'est la punition infligée à Adam pour avoir mangé le fruit de l'arbre défendu.

  • Speaker #1

    Et alors, comment tu as vu les choses évoluer finalement, dans le temps ? Parce qu'aujourd'hui, la notion de travail en tant que tel, je veux me sentir utile, je veux être et je veux développer mon être à travers le travail. Et là, concrètement, on y est. À quel moment ? À quel moment tu as pu constater qu'il y avait vraiment une bascule ?

  • Speaker #0

    Il y a toujours des effets de bascule lorsqu'on va dans des extrêmes. Alors, je dirais les années 90 ont basculé la gestion du travail dans la gestion de l'emploi pour faire le plus d'argent possible. On a accéléré le développement de valeurs individualistes qui ont malheureusement comme conséquence de briser la collectivité. Alors, avec le résultat que les gens perdent le sens du travail. C'est là-dessus que j'ai commencé mes travaux en 1992. Alors que je rencontrais des dirigeants d'entreprise pour leur faire parler d'efficacité d'entreprise et que dans les conversations initiales, plusieurs se sont plaintes d'avoir un travail qui ne faisait pas de sens. C'est quand même troublant d'entendre des entrepreneurs, des dirigeants d'entreprise se plaindre que leur travail ne fait pas de sens, même s'ils font beaucoup d'argent.

  • Speaker #1

    Cela dit, c'est très fréquent et c'est ce que je te partageais aussi. Moi, très souvent, j'ai des dirigeants qui… une fois qu'ils ont atteint leur objectif, qui avait du sens pour eux avant, de se dire, je veux appartenir à un COMEX, je veux finalement gérer 200 employés, je veux avoir tant de salaires. Une fois que ce statut-là est atteint, ils prennent le mur, ils prennent le mur justement du sens. Qu'est-ce que je fais là ? Quel sens a finalement de faire tout ça ?

  • Speaker #0

    En fait, c'est apercevant. Il faut avoir pour vivre. Il faut avoir un toit, il faut avoir à manger, il faut avoir une sécurité financière, il faut avoir pour vivre. Mais quand on a juste ce qu'on a, c'est ça, quand on va dans l'extrême, ça ne fonctionne plus. Parce que, oui, l'argent a une signification très émotionnelle. Ça tâche beaucoup, beaucoup d'importance à l'argent, puis ça va en-delà de la raison. L'argent, ça ne fait pas le bonheur. Et surtout, l'argent, on ne l'emporte pas en terre. On vient au monde tout nu et on meurt tout nu.

  • Speaker #1

    J'adore.

  • Speaker #0

    Quand on a autant et qu'on se rend compte qu'au fond, ce n'est pas ça qui contribue de naissance à la vie qu'on mène, manquablement, on s'interroge sur le sens du travail qu'on fait et pourquoi on le fait.

  • Speaker #1

    Et puis, il y avait, je ne sais pas, tu connais Bill Jones dans le leadership authentique, il dit finalement, si on vous questionne sur quel est le sens de votre métier, puis que vous répondez l'argent, l'argent devrait être une question, une conséquence finalement, du sens et de l'utilité que vous apportez à votre travail.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Mais la vraie question, c'est pourquoi vous êtes un leader ? Quel sens vous donnez à votre leadership ?

  • Speaker #0

    Oui. Parce qu'en fait, dans le rejet du travail, c'est être. Être qui nous sommes. Et nous sommes ce que nous faisons. Et ce que nous faisons nous transforme. Alors, si nous faisons quelque chose qui ne fait pas de sens, à un certain moment, notre vie n'a pas de sens et nous n'avons pas de sens. C'est ce qu'on appelle une névrose existentielle. C'est-à-dire, j'existe, mais pourquoi ?

  • Speaker #1

    80 000 heures, on travaille dans notre vie quand même. Oui. J'adore retransmettre parfois ce chiffre-là aux personnes que j'entends qui se questionnent en disant, À quel niveau mon égo parle quand je dis que je voudrais donner du sens à ce que je fais ? Est-ce que je ne devrais pas tout simplement me contenter finalement de ramener de l'argent à chaque fin de mois pour ma famille et pour les miens ?

  • Speaker #0

    Oui, mais vive le jour de la marmotte ! On n'est pas des fourmis, nous ne sommes pas des fourmis, nous ne sommes pas des marmottes. Les humains, nous aimons bien la routine parce que ça structure le quotidien. Ça permet de gérer notre anxiété. Mais la routine tue notre créativité. Ça nous ennuie mortellement. Donc, on a besoin de faire un travail qui résonne avec qui nous sommes.

  • Speaker #1

    Et alors, du coup, si on revient sur cette notion de bascule. Donc, tu me disais que tu avais une bascule qui s'est opérée dans les années 90. où finalement on est passé d'une gestion du travail, du sens du travail à une gestion de l'emploi, donc une culture beaucoup plus individualiste, qui est portée aussi beaucoup plus finalement sur des axes financiers. À quel moment tu as revu une autre bascule se faire ? Parce qu'elle a eu lieu quand même. Oui,

  • Speaker #0

    elle a eu lieu, mais je pense que… Bon, les phénomènes sociaux prennent racine, je veux dire, on ne cesse de répéter l'histoire. Donc, c'est difficile de dire à quel moment précisément ça a commencé, mais certainement que la pandémie a sonné l'alarme. Je dis là, ça suffit. Parce que c'est un phénomène que nous avons vécu collectivement partout sur la planète. Enfin, dans tous les pays industrialisés, la pandémie a forcé les populations à se confiner quand c'était possible dans leur domicile pour prévenir la propagation du virus, pendant que d'autres qui ne pouvaient pas travailler de chez eux se sont vus obligés d'aller au travail et s'exposer aux risques. du virus. Et c'est quand même une situation qui a duré et qui continue de durer. Alors, ça fait au moins deux ans qu'on vit dans cet état de vigilance en raison du risque de maladie.

  • Speaker #1

    Et en quoi, selon toi, ça nous a ramené justement à la nature même du sens du travail ?

  • Speaker #0

    Parce que pour les personnes... qui ont été obligées de travailler de chez elles. Ça, c'est une enquête que nous avons faite, Laurent Falk et moi, en 2019. Oui. En 2020, puis qu'on a reprise en 2021. Les personnes en France, les personnes qui ont été obligées de se confiner pour travailler de chez elles, quand même à une proportion considérable, plus du tiers. ont remis en question l'utilité du travail qu'elles faisaient. Si le travail peut se faire malgré leur absence, à quoi sert leur travail ? Si les dirigeants, les cadres, les entrepreneurs qui se sont vus obligés de travailler de chez eux parce que c'était possible de le faire grâce aux technologies, une grande proportion ont réalisé que... Oui, le travail peut se faire très bien sans leur supervision, c'est-à-dire qu'on n'a pas besoin d'eux. Alors, quoi sert leur travail ? Pire, il y a des entrepreneurs qui se sont dit, ce que nous faisons dans l'entreprise, ça ne sert à rien en fait, ça pollue, et qui ont converti leur production pour faire des produits plus utiles.

  • Speaker #1

    Alors, ça m'amène aussi à la question de se dire finalement, aujourd'hui… Selon toi, selon les études que tu as pu mener, qu'est-ce qui donne réellement du sens au travail ? Quels sont les grandes composantes clés ?

  • Speaker #0

    D'abord, il faut admettre que le sens est une expérience subjective. Ce qui fait du sens pour l'un ne fait pas forcément du sens pour l'autre.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Ensuite, j'ai fait, j'ai mené des enquêtes dans plusieurs pays, bien entendu au Canada, mais aussi en France et au Brésil, et dans d'autres pays aussi, je pense au Portugal ou à la Belgique. Mais de manière générale, en Occident en tout cas, le travail a du sens lorsque nous faisons quelque chose d'utile. Le sentiment d'utilité, c'est important pour nous dans le monde occidental. Je présume que c'est pareil dans le monde oriental, mais j'en sais rien. Alors, il faut quand même limiter. OK,

  • Speaker #1

    donc, sentiment d'utilité.

  • Speaker #0

    Oui, le sentiment d'utilité, c'est très important. Ensuite, un travail fait du sens parce qu'il permet de mobiliser. les capacités, les compétences des gens pour le faire d'une manière efficace. Le sentiment d'efficacité est très important aussi pour que le travail fasse du sens. Le mot efficacité n'est pas banal. Si vous regardez l'étymologie du mot efficacité, c'est faire l'effet qu'on recherche. On veut faire, c'est produire l'effet recherché.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Alors, il y en a qui disent que c'est l'atteinte du objectif, mais c'est franchement fortuné. Au petit Robert, regardez l'étymologie. C'est produire l'effet recherché. Alors, donc, c'est plus que l'objectif. C'est toutes les conséquences et les répercussions qui engendrent le fait de faire le travail. Ce sentiment d'efficacité est associé à notre besoin de pouvoir, qui est fondamental chez les humains. Ensuite, bon, sentiment d'utilité, sentiment d'efficacité. Ce qui est très important aussi dans le travail est savoir plutôt avec le contexte dans lequel le travail s'effectue, c'est la qualité des relations que le travail engendre. C'est-à-dire que pour travailler, c'est très rare qu'on travaille sans être en relation avec d'autres. Le fait de travailler nous met en relation avec les autres, nous permet de nous insérer dans le monde.

  • Speaker #1

    Il y a le sentiment, le besoin d'appartenance, en fait. Oui.

  • Speaker #0

    C'est le travail engendre ce que j'appellerais le sentiment d'identité. Parce que je fais quelque chose avec d'autres et pour d'autres, j'arrive à définir qui je suis. et à transformer mon identité grâce à ce que je fais. Parce que je reviens à cette formule, nous sommes ce que nous faisons, et ce que nous faisons nous transforme. Alors, c'est très important de réaliser ça, parce qu'il n'y a pas de geste qui n'a pas d'importance sur notre identité.

  • Speaker #1

    Nous sommes ce que nous faisons.

  • Speaker #0

    Oui, ce que nous faisons nous transforme. Et ce que nous faisons nous transforme. Alors, si je fais, et ça c'est... C'est moi qui ai créé la formule, mais elle n'est pas de Réunion. Elle vient en fait de Simone Veil, dans un livre qu'elle a écrit, La condition ouvrière. Tous les gestes que nous posons tous les jours contribuent à qui nous sommes.

  • Speaker #1

    C'est sûr.

  • Speaker #0

    Alors, c'est vraiment le travail réel. Alors là, j'en réfère à Christophe Dejour, qui parle de... travail réel versus le travail prescrit. Moi, je n'ai pas étudié le travail prescrit, j'ai étudié le travail réel. Ce que les gens font chaque jour.

  • Speaker #1

    Et Estelle, justement pour continuer dans ce cheminement de pensée, comment en tant que leader aujourd'hui, on peut justement développer le sens au travail, au sein de ses équipes ? Qu'est-ce que ça apprend selon toi ?

  • Speaker #0

    Bon, alors ça, c'est un... C'est un projet que Laurent Falk et moi menons à la chaire sens et travail de l'ICAM à Lille. C'est d'identifier les pratiques de management du travail. Parce que c'est quand même assez étonnant, les écoles de commerce n'étudient pas le management du travail. On étudie la stratégie, donc le management de l'organisation. On étudie la gestion des ressources humaines, donc le management des personnes. Mais la gestion du travail lui-même, ce que font les gens en équipe, le travail concret, on n'étudie pas ça. Alors, notre projet, c'est de déterminer les pratiques de management du travail qui aident à lui donner du sens. Alors, jusqu'à présent, nous en avons identifié, on en a identifié six, en fait. Six qui vont faire, qui font l'objet actuellement d'une enquête dans cinq pays du monde. Oui. Donc, un oriental, les Philippines. La première, c'est de donner une direction claire et inspirante.

  • Speaker #1

    De donner ou de co-créer. Parce qu'aujourd'hui, moi, j'ai quand même le sens, au niveau du collectif. qu'on n'est plus sur quelque chose de descendant et qu'au contraire, il faut quand même réellement travailler sur la co-création d'une vision qui soit partagée par tous.

  • Speaker #0

    Oui et non. Parce que ce qui donne un sens au travail que je fais, c'est la correspondance qu'il y a entre mon travail concret, ce que je suis en train de faire, avec la mission de mon école.

  • Speaker #1

    La mission de ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis professeure, donc avec la mission de mon école. Et ça, bien oui, c'est descendant. Parce que la mission de l'école, elle est publique et elle fonde la légitimité de l'école. Les organisations sont des systèmes complexes, absolument pas vivants. Ce sont des représentations, donc ce sont des constructions collectives, mais elles existent pour vrai. parce qu'elles sont fondées par des registres juridiques.

  • Speaker #1

    Donc, tu dis le premier élément.

  • Speaker #0

    C'est donner une direction claire et inspirante au travail que je fais, qui est aligné avec la mission de notre établissement, de notre organisme, de notre entreprise. S'il n'y a pas de lien direct entre ce que je fais tous les jours et la mission de l'organisation, C'est difficile de voir d'une part en quoi mon travail va contribuer à l'accomplissement de notre mission collective qui est prescrite par la société, l'organisation. Et puis d'autre part, si jamais quelqu'un avait l'idée de rationaliser des effectifs, je serais la première sur la liste parce que mon travail ne contribue pas à la mission. Oui.

  • Speaker #1

    Estelle, petite question et si la mission de l'entreprise n'a pas de sens ?

  • Speaker #0

    C'est bon ça non ? Oui c'est une bonne question mais en même temps j'ai envie de mettre un avertissement cette question là suppose un jugement de valeur. Pour être capable de porter un jugement de valeur, il faut être conscient des valeurs qu'on porte

  • Speaker #1

    J'adore ...

  • Speaker #0

    Tu vois ? Oui. On a une question éthique ici. Et avec toute la question de la diversité culturelle, puis des différentes variations. Alors, qu'est-ce qui fait du sens ? Qu'est-ce qu'il n'y en a pas ?

  • Speaker #1

    Mais c'est intéressant parce que tu ramènes quand même à la notion de valeur. Et c'est vrai que... C'est vrai que c'est un travail qui est fondamental, c'est-à-dire pour générer du sens, savoir finalement quelle réalité on veut oeuvrer et qui va nous toucher nous en tant qu'individu. Ça nécessite en amont d'avoir clarifié et de connaître clairement ces valeurs.

  • Speaker #0

    Absolument. Oui, et là, ça, c'est un travail individuel. Bon, cela dit…

  • Speaker #1

    Une fois qu'on a dit ça.

  • Speaker #0

    D'un point de vue individuel. Si j'estime que je travaille dans une organisation qui a une mission qui n'a pas de sens pour moi, franchement, je n'ai pas d'affaire là. C'est une question d'honnêteté morale, de dignité personnelle, de se retirer d'une situation qui va à l'encontre de ses valeurs. Je ne vois pas comment quelqu'un peut supporter cette dissonance-là. sans me compromettre sa santé mentale. Vous allez me dire peut-être que, oui, mais il faut quand même gagner sa vie. Oui, il faut gagner sa vie, mais je ne peux pas croire aujourd'hui, en 2022, qu'on ne peut pas trouver un endroit sur la planète où on peut gagner sa vie, dans un environnement qui est en responsabilité de valeur. Ce n'est pas possible. Il y a une responsabilité individuelle. Les humains, nous sommes venus au monde libre. Nous pouvons à tout moment refuser. Cette capacité de s'affirmer, de dire non, nous apprenons à la domestiquer, si je peux dire, dès qu'on a 18 mois. C'est l'âge impérialiste où on dit non à tout. Et on apprend tout son enfance et son adolescence à s'affirmer. Alors si on arrive à Dieu, puis qu'on est dans une situation qui va à l'encontre de nos valeurs, il faut réanimer cet instinct d'affirmation de soi, de respect de soi-même, et de sortir de là.

  • Speaker #1

    Et c'est vrai que souvent, j'ai des clients qui viennent à moi en me disant « OK, là, je ne sais pas s'il faut que je franchisse le cap de partir de mon entreprise ou pas. » Et puis, dès là, finalement, on se rend compte qu'il y a une déconnexion entre les valeurs de l'individu et celles de son employeur. C'est certain que ça parle. Et qu'il faut effectivement oser pousser la porte et partir.

  • Speaker #0

    Il faut, c'est une question d'hygiène mentale. Complètement. J'ai eu une cliente qui était alors associée à un grand cabinet d'avocats pancanadiens qui a fait une dépression, mais franchement, une dépression majeure. Et dans le travail thérapeutique qu'elle a réalisé, en fait, qu'elle ne faisait plus. Le travail pour lequel elle avait étudié, oui, elle était avocate, oui, elle était associée, certainement faisait beaucoup d'argent, j'en rêve encore, mais ce qu'elle faisait n'était plus du droit. Elle s'était tellement écartée de ce qu'elle était que ça l'a rendue malade. Elle a recouvré sa santé, elle est retournée au bureau pour faire la preuve qu'elle est encore capable. Et quand elle s'est sentie assez forte, elle a quitté le bureau pour fonder sa propre entreprise de plaidoirie. Maintenant, elle fait du droit. Elle a retrouvé sa santé, mais pas seulement. Elle fait plus d'argent qu'avant. Alors cette question, souvent les gens restent dans des emplois parce qu'ils ont de l'insécurité financière ou parce qu'ils gagnent tellement d'argent, comme une cage dorée, qu'ils ne peuvent pas imaginer être ailleurs. C'est pour ça que tantôt je disais, l'argent a une valeur émotionnelle. Le chiffre a de la valeur à nos yeux.

  • Speaker #1

    Est-ce que le bonheur, c'est clair, il y a une expression comme ça qui dit, c'est le bonheur qui amène le succès et non pas le succès qui amène le bonheur. Alors, je ne serais plus capable de donner le nom de la personne qui a cité, mais c'est vraiment ça. Et c'est vrai que moi, je suis confrontée souvent à des gens qui… qui se questionnent comme ça sur est-ce que je fais le pari de pousser effectivement cette porte et de chercher plus d'alignement. Alors c'est certain que parfois à court terme, ça demande aussi de revoir certaines prétentions salariales, mais l'effet de bascule arrive très rapidement à partir du moment où on est aligné, parce qu'on est capable d'avancer avec beaucoup plus de résilience et au-delà des obstacles. on a une motivation en nous qui est tellement forte, avec un degré qu'on est capable effectivement de développer son potentiel de manière exponentielle comme on ne l'a jamais fait. Donc, c'est certain qu'effectivement, on a ce cercle vertueux qui se crée.

  • Speaker #0

    Mais c'est surtout que la santé n'a pas de prix. J'adore. On ne peut pas acheter la santé. On peut vivre dans des conditions saines qui vont favoriser notre santé. Mais la santé, c'est quelque chose que nous avons, la majorité d'entre nous, à la naissance, et qu'on peut perdre parce qu'on abuse de nos capacités physiques et mentales. Alors, il faut quand même devenir conscient des répercussions des choix que nous faisons. Et chacun, chacune est responsable de ses choix. C'est sûr. Nous sommes libres de ces choix.

  • Speaker #1

    C'est sûr. Et là-dessus, il y a énormément de travail. Souvent, je confie que quand j'ai travaillé pendant 15 ans en ressources humaines et à un moment donné, je me suis dit, je ne suis plus capable d'avancer effectivement dans ce type de contexte parce qu'on était en transformation organisationnelle en continu, revoir les processus d'affaires, les rôles et responsabilités, redéfinir les indicateurs. Tu pitches les gens effectivement dans ces cases-là. Et on passe complètement finalement à côté du potentiel des ressources parce qu'on ne s'intéresse pas à la singularité ni aux forces des gens. Mais il y a aussi une co-responsabilité qui est présente. C'est-à-dire qu'à un moment donné, les gens aussi décident de rentrer dans cette case et de se conformer à ça. Et ne pas oser finalement considérer qu'il y a d'autres possibles qui peuvent se réaliser, comme tu le disais.

  • Speaker #0

    Oui, nous sommes libres.

  • Speaker #1

    On est libre.

  • Speaker #0

    Mais exercer sa liberté, ça demande d'être conscient. Et être conscient, ça demande de l'énergie. Et tout le monde ne veut pas mettre cette énergie. C'est beaucoup plus tranquille que d'aller dans le courant et de se laisser porter. Et lorsque nous sommes malheureux, de blâmer les conditions, les autres, le gouvernement, l'Altaire, pour... les conditions que l'on vit. Ça demande du courage de vivre pour assumer. Se connaître,

  • Speaker #1

    oui, effectivement. Ça nécessite aussi la connaissance de soi. C'est quand même un élément tellement important. Plus on développe la lecture de quelles sont nos forces, quels sont nos essentiels, sur quelle réalité, finalement, quelle réalité nous touche, nous, en tant qu'individus, sur lequel on veut contribuer, de par notre histoire, de par ce que l'on a pu... finalement constaté dans le monde et qui vient nous toucher individuellement. Et ça, c'est vrai que c'est un vrai travail. Et ce travail-là, à un moment donné, c'est s'offrir du temps, c'est pour avancer et cheminer à ce niveau-là.

  • Speaker #0

    Mais c'est aussi connaître ses limites, Yvanne.

  • Speaker #1

    Bien, c'est sûr.

  • Speaker #0

    Parce que les humains, nous ne pouvons pas être sans les autres. Et dans cette prise de conscience de qui je suis, Et immanquablement, il faut aussi que je prenne conscience d'avec qui je suis. Et avec qui je veux être. Et avec qui je veux être. Et pour qui et pourquoi. Parce que le mouvement du comportement positif ou de la psychologie positive, moi je veux bien. Mais il ne faut pas oublier qu'à côté des forces, il y a des limites. Nous ne sommes pas des êtres surnaturels, nous sommes des êtres vivants avec des capacités, mais aussi des limites. Et c'est grâce à ces limites qu'on est capable de développer notre humilité et notre capacité à travailler avec les autres, à collaborer avec les autres. L'instinct de coopération, c'est très important pour les humains. On a besoin de balancer ce regard. porté sur soi, avec un regard porté sur les autres, avec qui je suis. Il faut prendre en compte les autres. C'est là où, aujourd'hui, en 2022, on est encore loin du compte. Parce qu'on est tellement, on est en train de sortir de l'individualisme. De toute façon, on n'a pas le choix. On n'a pas le choix parce que le climat va nous le rappeler. Que si on veut son vœu. comme humanité survivre à ce qui nous attend, ce qui est en train de se faire et ce qui nous attend, on va être obligés de collaborer ensemble.

  • Speaker #1

    De coopérer.

  • Speaker #0

    Et de partager ensemble.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'elle, juste, tu sais, pour revenir quand même sur la question que je te posais tout à l'heure, parce qu'on s'est un petit peu éloigné, mais c'était intéressant.

  • Speaker #0

    Parce que ce qui donne un sens au travail, oui, c'est ce que nous faisons. Mais c'est aussi avec qui et pour qui nous le faisons. Tout le concept de relation de l'entreprise dans laquelle je suis, avec qui je travaille et pour qui je travaille, et qui sont mes clients, tout ça, ce sont des relations. Et si les relations, en général, les gens quittent un emploi, non pas à cause du travail, mais à cause des relations qu'ils ont dans leur entreprise. C'est dire la... l'importance de la qualité des relations humaines.

  • Speaker #1

    Alors, du coup, en tant que leader, justement, si on veut mettre en place quelques actions qui peuvent finalement avoir un impact sur le sentiment de ses collaborateurs d'exercer sa fonction avec sens, quels seraient tes conseils ?

  • Speaker #0

    Alors, du point de vue... Non, j'ai déjà parlé pour le travail. C'est le sentiment d'utilité, d'efficacité. C'est très important. Oui, mais sur le plan de l'équipe, c'est très important de porter attention à la qualité des échanges réciproques, à la réciprocité des échanges dans l'équipe, la capacité de se soutenir, de s'entraider, de régler les problèmes, pas simplement les problèmes techniques, mais aussi les problèmes interpersonnels. C'est souvent là où on observe des difficultés parce que les conflits, les tensions dans une équipe. engendre des émotions négatives comme de l'anxiété, de l'envie, de la colère. Et nous ne sommes pas très habiles à gérer ces émotions-là. Donc, c'est important que le travail ait du sens, que le chef d'équipe soit capable de gérer les tensions et les conflits dans l'équipe pour maintenir une cohésion, pour renforcer la solidarité de l'équipe. à faire le travail qui est attendu avec cet esprit d'échange réciproque, de se concentrer.

  • Speaker #1

    C'est-à-dire qu'en fait, on peut aussi limiter cette vision-là de se dire finalement, gérer les tensions, les conflits, de se dire finalement, peut-être démultiplier les temps d'échange et de collaboration et de réciprocité. Donc, amener finalement, amener l'équipe à porter de l'intérêt finalement au vécu de chacun dans notre...

  • Speaker #0

    Au vécu de chacun, oui.

  • Speaker #1

    Dans l'exercice de sa famille.

  • Speaker #0

    Mais au vécu de chacun par rapport au travail à faire ensemble.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça.

  • Speaker #0

    Quoi d'autre ? Puis, un autre aspect qui est très important, donc je parlais du travail, de la qualité des relations dans l'équipe qui forme une vraie équipe. Et puis, une… Une fonction importante d'un chef d'équipe, c'est d'être attentif à des occasions d'innovation.

  • Speaker #1

    Alors, qu'est-ce que tu entends par être attentif ?

  • Speaker #0

    Que ce soit dans l'exécution des tâches, dans la manière de faire le travail, comme dans la manière de soutenir le développement des compétences des membres, d'être attentif aux occasions de faire mieux. Ces occasions de faire mieux, ce qu'on fait ensemble, va stimuler l'apprentissage, va stimuler le développement, va stimuler l'innovation dans l'équipe. Et ça, ça assure la pérennité de l'équipe. Les équipes vont continuer de bien travailler ensemble parce qu'elles ont développé des capacités à s'améliorer et à faire grandir les personnes et l'équipe dans l'organisation. Je ne sais pas si je m'exprime clairement. Oui,

  • Speaker #1

    si, si, c'est très clair. C'est finalement à travers le développement d'occasions d'innovation, c'est aussi offrir l'opportunité au collectif et à l'individu de se développer et de développer aussi l'organisation en tant que telle. Donc, vous avez une santé de sentiments aussi de contributifs.

  • Speaker #0

    Oui, et de faire avancer.

  • Speaker #1

    Oui, OK.

  • Speaker #0

    On n'est pas dans la reproduction de ce qu'on sait faire, mais dans la production et la création. de mieux faire.

  • Speaker #1

    Donc, c'est sortir de la routine. C'est finalement faciliter toujours ce mieux-faire et pousser encore plus loin ces équipes.

  • Speaker #0

    Oui. Et ça, non seulement ça stimule le développement des compétences des personnes, mais surtout, ça renforce la capacité de l'équipe à bien faire le travail, à mieux faire le travail, ce qui va contribuer au développement de l'organisation dans la mesure où, bien entendu, tout ce qu'elle fait est aligné avec sa mission.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il y a un autre élément ? Donc,

  • Speaker #0

    réciprocité des échanges,

  • Speaker #1

    développer finalement, s'assurer que les gens avancent avec une vision qui soit claire et engageante pour tous. Et puis, le troisième élément, ça sera effectivement développer des occasions d'innovation pour grandir ensemble.

  • Speaker #0

    Exactement, exactement. Voilà, on peut le dire comme ça.

  • Speaker #1

    Super ça. Eh bien, merci beaucoup pour ce temps d'échange, Estelle. Est-ce qu'il y a une question que je ne t'ai pas posée qui, selon toi, aurait pu être pertinente ?

  • Speaker #0

    J'avais envie de te poser la question, toi. Quel est le sens de ton travail ?

  • Speaker #1

    Écoute, moi, je te dirais que c'est vraiment cette recherche d'amener un individu à un collectif. à s'offrir l'opportunité de s'aligner davantage dans ce qu'il fait, pour qu'il puisse se réaliser et aller plus loin aussi dans son niveau de contribution. Donc c'est ça, c'est aligner davantage qui l'on est avec ce que l'on fait, puis comment on le fait, puis je sais à quel point, parce que c'est une thématique qui m'est chère finalement, comment on accompagne une personne ou un collectif à avoir ce sentiment d'avoir plus de sens. Puis moi, je l'ai vécu dans ma vie. dans ma vie professionnelle. Et ça fait sept ans que j'accompagne des individus et des collectifs. Et c'est tellement nourrissant de voir les gens grandir, prendre conscience qu'ils ont le droit de se réaliser. qu'ils ont en eux énormément de talents qui peuvent servir à faire une différence et puis que finalement, ça prend juste le pouvoir d'oser en fait, d'oser voir de tout possible et puis oser s'affranchir pour avancer différemment et se réaliser. Alors moi, c'est ça. Tu vois, c'est vraiment amener les gens à avancer avec plus de sens et d'authenticité. pour finalement se réaliser davantage.

  • Speaker #0

    Mais tu réalises que c'est grâce à ton accompagnement, dans la relation qu'ils ont avec toi, qu'ils peuvent réaliser ça.

  • Speaker #1

    Merci, Estelle. Ça me touche vraiment beaucoup. C'est un beau miroir que tu me renvoies. Et surtout, un beau miroir aussi sur la profession de coach, qui, c'est vrai, très souvent est mise à mal. Donc, merci pour ça. Alors, surtout... merci à toi pour ce temps et je t'avoue que je sais déjà que je vais repartir avec cette phrase que je n'hésiterai pas à partager toute ma vie,

  • Speaker #2

    c'est certain nous sommes ce que nous faisons et ce que nous faisons nous transforme Rendez-vous sur le-sas-coaching.com

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