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Les Aéro-Chroniques de ONEBIRD

L'Origine : comment l'avion est né.

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29min |31/05/2025
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Les Aéro-Chroniques de ONEBIRD

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Description

L’Origine – Une Aéro-Chronique de ONEBIRD
Découvrez la fabuleuse histoire de l'AVION et de so inventeur génial. Un récit immersif entre invention, poésie et exploits méconnus, raconté comme un film pour les oreilles. Laissez-vous emporter là où tout a commencé : dans le ciel de France.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Chers aéronautes, bonjour et bienvenue à bord de cette nouvelle aérochronique de One Bird. Installez-vous confortablement et envolons-nous ensemble pour une toute nouvelle et incroyable aventure des airs. L'immense inventeur et artiste Léonard de Vinci a dit Une fois que vous aurez goûté au vol, vous marcherez à jamais, les yeux tournés vers le ciel, car c'est là que vous êtes allés, et c'est là que toujours, vous désirerez ardemment retourner. Arrêtons-nous un instant sur Léonard pour nous souvenir que c'est ici, en France, plus exactement à Amboise et sous la protection du roi François Ier, qu'il dessina les premiers aéronefs. C'était en 1500 et des nuages, voyez comme le rêve ne date pas d'hier. Néanmoins, il aura fallu attendre longtemps pour que le désir de vol soit assouvi. Plus ou moins 200 ans d'ailleurs. 200 ans pour que deux frères, Joseph Michel et Jacques-Étienne Montgolfier, puissent faire voler les premiers hommes à bord de la célèbre Montgolfière. L'expérience, si elle donna de l'espoir à bien des inventeurs fous, n'ira pas aussi loin que les deux frères l'avaient espéré. Pour que l'incroyable aventure de l'aviation soit bel et bien lancée, il faudra patienter encore un peu. Le 2 avril 1841, l'archange n'est pas encore de ce monde. Cependant, une personne qui lui sera d'une importance capitale, à lui comme à tous ceux qui ont à cœur de toucher les nuages, est sur le point de découvrir notre planète dans un petit village de Haute-Garonne. A l'instar de Jean Mermoz, rien ne prédisposait ce nouveau personnage à son improbable destin qui, à bien des égards, changera le monde. Au sud-ouest de Toulouse, En bord de Garonne, entourée de charmants petits lacs et de prairies délicieuses, est une petite bourgade du nom de Muray. Comme tous les petits villages français, en son centre trône une élégante église, l'église Saint-Jacques. Non loin de là, les aléniels, au milieu desquels domine la statue du célèbre général, sont bordés de fiers platanes. Sous la fraîcheur des grands arbres, résonnent des conversations à l'accent chantant, suivi de rires sincères, suivi... d'autres conversations encore plus animées. En descendant vers la Garonne, aux 19 rues Sabatières, la maison du menuisier est étonnamment silencieuse. Dans la fraîcheur de ce début de printemps, les volets sont entre-ouverts et la porte de l'atelier est fermée. À l'étage, le plancher craque sous les pas impatients de François qui tourne comme une horloge devant la porte de sa chambre. À l'intérieur de cette dernière, Antoinette, sa femme, n'en peut plus de cette grossesse. et brûle de rencontrer son enfant. Après moultes allers-retours sur le plancher grinçant, après mille inspirations et expirations pour calmer le calvaire de la douleur, après bien des inquiétudes et des espoirs, un cri se fait entendre dans les petites rues du petit village de Haute-Garole. C'est un garçon et ses parents l'appelleront Clément. La vie du petit Clément est belle. Fils unique, il a toute l'attention et l'amour de ses parents qui le chérissent autant que les parents peuvent chérir leurs enfants. Clément va à l'école du village, une petite école de briquettes adossée à la mai. Après une journée studieuse, Clément va jouer à faire des ricochets dans la Garonne avant de rentrer. Des journées de classe à la construction de cabanes dans les bois, Clément a la vie dont rêvent tous les enfants sous le bienveillant soleil du sud-ouest. Quand il n'est pas dans les jambes de ses parents, Clément aime rendre visite à son grand-père paternel, ce dernier ayant servi dans les armées de Napoléon Ier. a des millions d'histoires à raconter à son petit-fils. Outre sa fascination pour ce personnage héroïque, Clément adore se rendre chez son grand-père, car ce dernier habite dans un moulin. Clément est plus que fasciné par ce gigantesque mécanisme, les rouages, les poulies, le mouvement si précis. Clément regarde tout ceci comme une œuvre d'art, quand d'autres n'y voient qu'un outil. Père menuisier, le moulin de son grand-père et son arrière-grand-père, lui aussi menuisier et architecte, Clément a de quoi être inspiré et stimulé. Très tôt, il se nourrit de tout ce qu'il veut. Plus que de la curiosité et de l'observation, Clément voudrait pouvoir répliquer tout ce qui pour lui fonctionne et améliorer tout ce qui, selon lui, devrait l'être. À chacune de ses balades dans les campagnes autour de son village, Clément observe et prend des notes. Très tôt, il compile des idées. théorie sur des feuilles de papier. Des milliers d'idées qui, pour la plupart, ne resteront que des traits de charbon sur quelques feuilles blanches. Mais son cerveau travaille. Il travaille peut-être même un peu trop vite pour un gamin d'à peine 10 ans. Des multitudes de petits croquis que Clément griffonne sur ses cahiers naissent des machines et des pièces de menuiserie entre art et mécanique des plus surprenantes. Plus Clément expérimente, plus son esprit s'affine. Lui qui dessinait bien devient un véritable artiste s'essayant à la peinture avec un véritable talent. Toutes ces expérimentations l'incitent à regarder le monde comme seuls les inventeurs les plus extravagants le regardent. Très vite, le voilà en admiration. devant les insectes et autres animaux volants. Crayons et pinceaux à la main, Clément imagine mille façons de s'envoler. Il se dit Comme Léonard de Vinci et les frères Montgolfier avant lui, Clément se met à rêver du ciel. Alors il croque, imagine, observe tout ce qui vole des hannetons aux oiseaux. Il se nourrit de tout ce qui pourra bien l'aider. à comprendre le pourquoi du comment et il analyse tout ce qui pourra l'aider à atteindre les nuages. Ainsi, en 1855, Clément décide de s'envoler. Il a à peine 14 ans et toute une vie devant lui. Mais à cet âge-là, on est pressé, exalté et surconfiant. Ses parents, ayant essayé à plusieurs reprises de le convaincre de ne pas s'exposer physiquement à des expérimentations immatures et pour le moins très optimistes, Clément décide de se lancer seul. et dans la clandestinité la plus totale, dans une expérience de vol. Clément se dit À ce stade, et sur le fond, allez, on est d'accord. Sur la forme par contre, bon, jugeons plutôt. Il s'agit pour lui de se confectionner un costume d'oiseau, du moins un costume représentant une interprétation de l'oiseau. et de se lancer du haut d'une colline. Le costume en lui-même se compose d'un pantalon avec une ceinture censée accueillir une sorte de grande cape fabriquée d'une veste large et de lustrine. De chaque côté, d'amples manches sont attachées à des bâtons, un pour chaque main. L'idée étant d'avoir deux espèces de grandes ailes actionnées par les bras du pilote. C'est là plus que de l'optimisme et on est bien au-delà de la confiance. Alors, de nuit. sans bruit. L'ombre de cet étrange oiseau nocturne se faufile à travers champs et bosquets. Au-dessus de la Garonne, en haut d'une sombre colline, une sorte d'étrange écureuil volant déploie ses ailes. Clément est prêt. Là-bas, au pied de la pente, brille sous la lune comme le paisible serpent d'argent la Garonne. Les herbes hautes comme une mer pétrole d'Odeline sous une brise qui ne demande qu'à forcer. L'étrange volatile inspire de tout son corps pour se donner du courage, comme pour rappeler à lui Zéphir et son souffle divin. En cette nuit remplie d'espoir, Zéphir est au rendez-vous. Une onde sombre court sur le flanc végétal de la petite colline. Clément, sûr de lui, c'est le moment. Un pas puis un autre, et c'est le poids de son corps qui l'entraîne dans la porte. Encore quelques souliers et l'onde invisible rencontrera le jeune pilote. Les ailes surprenantes se gonflent. tout à coup dans le dos de Clément, qui commence à ressentir comme résistance. Clément se dit « J'en étais sûr ! » Mais la lame d'air traverse l'aéronef singulier. Elle s'engouffre avec violence dans l'étrange assemblage. Dans la nuit noire et lugubre, Clément sent comme une main ferme qui le saisit par le dos et tire en arc-en-ciel. Un instant plus tard, au sol, amalgamé à sa construction de fortune, désorienté et couvert d'herbe, Clément croit sentir une présence. Le petit ingénieur redevient soudainement un enfant et fuit le monstre de son imagination en courant à travers bois pour retrouver rapidement la protection du foyer familial. La vie d'inventeur rêveur est parfois mouvementée. L'année d'après, Clément a 15 ans. Dans son école toulousaine, ses professeurs louent ses capacités en mathématiques et en dessin. Cette année-là, il obtient son baccalauréat. A cette époque, un baccalauréat est une valeur sûre permettant d'accéder aux meilleurs emplois. Me Quand son école ouvre une classe de formation au métier de l'ingénierie, Clément y est poussé par ses professeurs qui voient en lui un espoir réel. Quelle clairvoyance ! En 1861, Clément est diplômé ingénieur. Légitimé par ce nouveau statut et volontaire à changer le monde, Clément traverse la vie comme il l'a toujours fait. Un calepin et un crayon à la main à l'affût de tout ce qui pourrait être changé, transformé, amélioré. En 1867, le voilà à Paris pour une exposition universelle. Lui qui avait expérimenté et fabriqué de nombreuses machines durant sa jeunesse, tombe sur un stand qui lui rappelle de beaux souvenirs. Sur ce stand, il reconnaît l'adrésienne de son enfance, ce véhicule sans pédale, mi-vélo, mi-trottinette. Mais celle-ci est équipée de grandes roues en métal et d'une sorte de mécanisme actionné par les pieds du pilote. Son nom est Vélocipeg. Immédiatement après avoir observé et essayé l'engin, Clément note une faiblesse majeure au Vélocipeg. Son manque de confort et de discrétion dû à la qualité exclusive métallique de ses roues. Clément note dans son carnet. Puis, nous recouvrions les ronds avec du caoutchouc. Par ailleurs, le vélocipède est bien trop lourd pour être agréable à la manœuvre. Je dois travailler la suite. Aussitôt écrit, aussitôt dessiné, aussitôt fait. En 1867, les premiers vélocipèdes à roues de caoutchouc sortent sous le nom de Véloz-Caoutchouc. Mieux encore, et pour la première fois de l'histoire de la bicyclette, comme on l'appellera bientôt, le cadre est composé de tubules en creuse soudées entre elles afin d'alléger le tout. Clément ne le sait pas et ne le saura peut-être jamais, mais le Tour de France et le Bélib lui doivent leur existence. Après la guerre franco-prussienne de 1870, durant laquelle il a vainement tenté de convaincre les états-majors français de miser sur le ciel pour observer l'ennemi, Clément se consacre à une carrière dans les chemins de fer. Durant cette période, l'ingénieur développera des processus pratiques et fiables dédiés à la construction des ponts ferroviaires. En gagnant du temps, et de la fiabilité dans la construction de ces ouvrages, l'extension des chemins de fer s'envoie améliorer de manière particulièrement significative. Mieux encore, observant le labeur des ouvriers sur les chantiers de postes de rails, Clément Griffon. C'est l'encrime sur des bêtes. Il faut avoir un moyen d'améliorer leurs conditions de travail, tout en gagnant en productivité. Je dois automatiser la pose des rails. Aussitôt dit, aussitôt fait. Quelques traits de crayon plus tard. Et c'est une machine à poser les rails qui sort de l'esprit de Clément. L'industrie du rail s'en voit révolutionner et les congés payés aussi. Et puisqu'on est dans le rail, il ne faut pas plus de temps que cela pour que Clément observe que, grâce au rail, on peut faire transiter de très grosses charges. Clément écrit. Les rails n'étaient pas posés pour faire circuler les véhicules, mais ils sont intégrés au véhicule même. Et alors, allez partout ! Dès lors, rien ne compte plus pour Clément que de réaliser cette vision. Ainsi, Clément dessine de grandes roues capables de faire circuler cette bande de rails qui va relier toutes les autres roues du véhicule entre elles. Par conséquent, posées uniformément sur le sol, les tramways et autres wagons en tout genre pourront circuler sur tout type de terrain. Clément construit rapidement les premiers prototypes et les expose au public à Paris. Son idée est de proposer le concept aux compagnies de transport, en particulier dans les Landes, qui sont encore mal desservies et uniquement par des chemins sablonneux. Mais aussi de le vendre aux militaires, qui pourraient en équiper leurs attelages de campagne, par exemple. Malheureusement, personne à cette époque ne sut voir aussi loin que Clément, qui lui venait d'inventer. Les chenilles. Heureusement, le monde est vaste et bien des choses restent à améliorer et inventer. En parallèle de cette frénésie de recherches et développements divers, Clément ne perd pas de vue le sien. Avec ses fonds propres, il continue à chercher un moyen de faire voler l'homme plus efficacement qu'en ballon. Va naître de son cerveau une armature de 9 mètres d'envergure pour seulement 24 kg, faite de bois et de plumes et capable d'être endossée par un pilote, qui en bougeraient les ailes à la force des bras. Bon, rapidement, Clément s'aperçoit que nul homme ne peut être assez fort pour actionner le dispositif, aussi sera-t-il plus raisonnable de l'équiper d'un moteur. Bien du travail reste donc à accomplir. Et pour cela, eh bien pour cela, il faut de l'argent. Toujours en quête du futur par l'amélioration de l'existant, Clément qui était aussi bon ingénieur qu'électricien de génie, décide de se pencher sur cette invention. toute récente que l'on appelle le téléphone. En se saisissant de ce qui existe déjà, Clément rend le téléphone plus polyvalent en l'équipant de charbon pour transformer le son en électricité, ce qui va permettre de pouvoir communiquer sur de très grandes distances. En s'associant avec quelques autres inventeurs de génie, Clément va construire les premiers postes de téléphonie mobile. Alors, soyons clairs, par téléphonie mobile, on entend un... Un téléphone équipé d'une manivelle permettant de recharger une batterie, le tout à brancher sur des câbles préalablement déployés entre deux points distants. Rien à voir avec nos smartphones actuels, mais sans cette avancée remarquable, la firme à la pomme n'en serait pas là où elle en est aujourd'hui. Quant à l'armée de cette époque, elle sera ravie de cette invention qui lui fera économiser bien du temps et des messagers. Toujours en quête de perfectionnement, Clément pense à équiper le fameux téléphone de deux choses que nous connaissons tous. Une sonnerie électromagnétique et un accessoire regroupant l'émetteur et le récepteur que l'on appellera le combiné. Autant dire qu'une fois encore, Clément allait très durablement changer notre société. De quoi assurer sur le long terme ses besoins financiers. Pour en finir avec sa période téléphonique... Clément, toujours en avance sur son temps, imagina la possibilité de créer des récepteurs à disposer dans les salles de concerts et autres opéras, afin de transporter le spectacle directement chez les particuliers grâce au téléphone. Se doutit-il que cette idée serait reprise, retravaillée et développée jusqu'à nous donner la radio et plus tard la fibre optique et la télévision en streaming ? À présent à l'abri du besoin et décoré de la Légion d'honneur, Clément continue à... inventer l'avenir. Il va améliorer son travail sur le téléphone, inventer l'hydroglisseur, voir grâce à son canot à bâtins pneumatiques les crânoplanes avant l'heure. Pour ceux qui se poseraient la question, les crânoplanes est une curiosité aéronautique. En l'espèce, un hybride entre un avion et un bateau dont le but était de voler très rapidement à peine au-dessus des flots grâce à l'effet de sol. L'effet de sol est une sorte de coussin d'air formé entre la machine et l'eau. Une technologie complexe dont le développement a été mis en suspens à la fin de la guerre froide. Mais qui sait, si comme Clément vous avez un carnet et un crayon, il y a peut-être quelque chose à améliorer. Clément, lui, n'a pas attendu la guerre froide pour améliorer de manière plus significative la télégraphie sous-marine. Il a par ailleurs travaillé sur le concept de torpille à usage militaire et des notes ont été retrouvées qui démontrent qu'il avait déjà dans la tête bien des idées autour du moteur à réaction. Mais, et c'est là que tout va réellement changer, grâce à ses nouvelles et très confortables ressources financières, il va pouvoir se consacrer à cette invention qu'il n'arrive pas à réaliser, l'aéroplane. Son aile ultra légère n'a pas fonctionné. Son esprit vif et créatif, c'est que la première chose à faire est d'inventer le bon moteur. Il écrit dans son calepin. Les moteurs existants sont trop massifs, trop courts. L'ennemi du vol, c'est le poids. J'ai déjà allégé l'extraire, je dois alléger le moteur et le rendre plus puissant. Oui, faisons ça, rendons-le plus puissant. Alors Clément taille un crayon. Délicatement, la mine se pose sur une feuille de papier immaculée pour finalement commencer sa danse. va naître de son cerveau brillant un moteur à vapeur aux performances surprenantes. Quand les frères Wright, 13 ans plus tard, voleront à leur tour, leur aéroplane sera équipée d'un moteur de 12 chevaux pesant 75 kg. En 1890, Clément va développer et construire un moteur de 20 chevaux pour seulement 51 kg. Et les gens de l'air savent très bien ce que change un kilo quand on cherche à se rapprocher des nuages. Cette nouvelle passion pour la mécanique va d'ailleurs mener Clément à conceptualiser et fabriquer en 1903 une architecture de moteur bien connue des mécaniciens, des amateurs comme professionnels, des aviateurs, des automobilistes ou encore des marins. Le très fameux V8. Parce que oui, souvenons-nous que si le premier moteur en V, un V2 pour deux cylindres, fut inventé par certains Daimler en Allemagne, où le premier moteur V8 fut inventé par Clément. ici, en France. Ce dernier l'installa sur un châssis pour participer à une course entre Paris et Madrid en 1903. Pour l'anecdote, la première voiture de série à être équipée d'un moteur V8 fut, là encore, française, une De Dion Bouton V8. En ce début 1900, le V8 de Dion Bouton a une cylindrée de plus de 6 litres pour une puissance ébouriffante de 35 chevaux. Il faudra attendre une demi-décennie de plus pour que les Américains s'attachent amoureusement à ce moteur légendaire, avec le succès qu'on lui connaît. En 1890, le moteur le plus léger possible est prêt. Oublié les oiseaux, Clément décide de se fier à l'aérodynamisme des chauves-sous. Ayant longuement observé ce petit mammifère, Clément imagine un complexe assemblage afin d'assurer une géométrie variable aux ailes de son aéroplane qu'il va nommer l'avion 1 EOL. Dans le nez d'EOL vient se loger le moteur. à vapeur au bout duquel est installée une hélice de 4 pales de 2,6 mètres de diamètre. Il faut voir cet engin pour comprendre que si, par miracle, il s'envole, il ne sera pas manœuvrable. C'est effectivement une sorte de chauve-souris faite de grosses toiles de soie beige. Sa grande hélice de bambou semble vouloir se briser avant même le moteur mis en route. La mécanique, quant à elle, est alimentée par des brûleurs à alcool. Bois, toile, bambou, alcool, il fallait du courage. Et du courage, Clément en a. On est le 9 octobre 1890 au château de Madame Perrer à Gretz-Arminvilliers en Seine-et-Marne. Eole est enfin prêt à prendre l'air. Clément dans une tenue plus ou moins adaptée à une mort. douloureuse en cas d'échec, s'installe fastidieusement à l'intérieur de son volatile de bois creux. Le terrain de 200 mètres de long sur 25 de large face à éoles est plus ou moins plat et bordé de grands arbres. Des brûleurs à alcool, du bois, de la toile, des bambous et une piste pas si large et pas plus longue encadrée de grands arbres. Inconscience, courage, à ce niveau-là, qui pourrait encore le dire ? Quoi qu'il en soit, Clément est prêt autant qu'il est possible de l'être. Disons qu'Eol est là, les ailes tiennent en place et la structure supporte le poids du petit moteur et du pilote. L'alcool est injecté dans les brûleurs et bientôt le moteur de 20 chevaux entraîne la surprenante hélice en bambou qui donne à l'avion 1, Eol, son air de moulin à vent pour enfants. Sur le bord de la piste, terme à prendre au sens d'un chemin de terre à travers bois, les assistants de Clément sont autant concentrés que prêts à porter secours. à l'ingénieur Temerev. Il est 16h passées de 5 minutes en cet après-midi d'automne et le bruit du petit moteur à alcool résonne désagréablement à travers les arbres. L'air vibre et se déchire alors que la grande hélice prend de la vitesse. C'est un miracle, elle ne casse pas. Rassurée par la solidité de sa construction, Clément met les gaz. Sous la force rageuse du moteur, l'hélice singulière entraîne l'éole qui glisse sur la bague d'air battu. 10 mètres, 20 mètres. Ça vibre, ça couine, ça craque, mais ça marche. Les ailes se tendent et se galbent perceptiblement. 50 mètres, 80, bientôt 100. Soudain, Clément ressent clairement un flottement. Assourdi par le bruit du moteur et incapable de voir l'avant de sa course de par la conception épique de son avion 1, Clément ne voit que ses associés lui faire de grands signes sur le bord de la piste chemin. Devinant rapidement que la lisière de la forêt, en bout de piste, approche dangereusement, Clément coupe le moteur et instantanément, Eole glisse sur la terre battue pour finalement s'arrêter un peu au hasard de sa course. Clément ne le sait pas encore, mais l'avion 1, dit Eole, vient de quitter terre de quelques centimètres sur près de 50 mètres. Ça semble complètement ridicule pour qui vit au XXIe siècle. Cependant, en ce jour du 9 octobre 1890, Ici, en France, plus exactement en Seine-et-Marne, quelque chose vient de changer notre rapport au monde, au temps, à l'espace et à l'humanité. En ce jour du 9 octobre 1890, Clément Hadère, ingénieur de génie, inventeur providentiel et pourvoyeur d'avenir, vient de faire voler pour la première fois dans l'histoire de l'humanité un engin plus lourd que l'air. Alors ? Bien entendu, 50 mètres, c'est peu. On est encore loin de pouvoir manœuvrer l'appareil et encore plus loin de pouvoir voyager avec. Encore plus loin, pas si sûr. Fort de cette révolution aéronautique, Clément va immédiatement construire successivement l'avion 2, dit Zephyr, et l'avion 3, dit Aquilon. Et de 50 mètres, passer à 300 mètres. Certes, il ne volera qu'en ligne plus ou moins droite, sans contrôler sa trajectoire. Mais Clément Hadère vient d'ouvrir le ciel. À qui en rêve ? Un an après Eole, Otto Lilienthal fera voler un planeur en Allemagne. Alberto Santos Dumont, un aviateur brésilien, viendra en France s'inspirer de tout cela pour faire s'envoler son aéroplane motorisé manœuvrable dans le parc de Bagatelle à Paris. On est le 23 octobre 1906. Moins d'un mois plus tard, le 12 novembre 1906, toujours Alberto Santos Dumont réalise le... premier record du monde d'aviation homologué en parcourant 220 mètres à la vitesse considérable de 41,3 km heure, gagnant au passage le déjà prestigieux prix de l'Aéroclub de France. Si je précise homologué, c'est parce que pour être honnête, ce n'est pas Alberto Santos Dumont qui fit voler le premier aéronef motorisé manœuvrable de l'histoire. C'était bel et bien Orville et Wilbur Wright le 17 décembre 1903 à Kitty Hawk, USA. Mais l'information à cette époque-ci n'avait pas encore circulé. Il n'a pas fallu beaucoup plus de dix ans entre le miracle de Clément et l'aviation telle qu'on la connaît encore aujourd'hui. Il est d'ailleurs amusant de penser que c'est probablement l'invention de Clément Hadère la moins efficace qu'il ait jamais mise au point, qui, finalement, aura changé le monde comme nul autre avant elle. Le 3 mai 1925, dans sa région chérie de Haute-Garonne, Clément Hadère, enfant curieux, ingénieur visionnaire et aventurier de l'air, quitte ce monde pour ses cieux qu'il avait tant désiré à l'âge de 84 ans. Non loin de là, sur l'aérodrome de Montaudran, près de Toulouse, un jeune homme, que l'on surnomme l'Archange, monte à bord d'un Breguet 14 pour emporter une lettre, écrite ici, aujourd'hui, et qui arrivera là-bas, demain, peut-être. faisant de ce monde un petit village à ciel ouvert. Se doute-t-il, Jean Mermoz, que non loin de là vient de s'éteindre celui sans qui toute l'aventure de l'aviation n'aurait pu être possible ? En repensant à Clément Hadère et à ses aéronefs, baptisés par lui d'un mot imaginé pour l'occasion, me vient en mémoire ce poème que Guillaume Apollinaire avait écrit pour lui. Ô peuple de Paris, vous, Marseille et Lyon, Vous tous, fleuves français, vous, françaises de montagne, habitants des cités, et vous, gens des campagnes, l'instrument à voler se nomme l'avion. Il fallait un murmure et la voix d'Ariel pour nommer l'instrument qui nous emporte au ciel. La plainte de la brise, un oiseau dans l'espace, et c'est un mot français qui dans nos bouches passe. L'avion. L'avion. Qu'il monte dans les airs, qu'il plane sur les monts, qu'il traverse les mers, qu'il aille regarder le soleil comme Icare, et plus loin. Encore un avion s'égare et trace dans les terres un éternel sillon. Mais gardons-lui le nom suave d'avion, car du magique mot, les cinq lettres habiles eurent cette vertu d'ouvrir les ciels mobiles. Nous sommes Aéronautes depuis 1890, depuis que Clément Hadère, inventeur de génie et fournisseur d'avenir, nous a offert 50 mètres à quelques centimètres du sol. 50 premiers mètres pour rétrécir l'espace et maîtriser le temps. Nos 50 premiers mètres à quelques centimètres du sol pour nous ouvrir les portes de tous les ciels du monde. 50 mètres que nous avons transformés en formidables aventures, nous, mais également tous ceux qui, un jour, ont levé les yeux au ciel en y voyant le futur. 50 mètres et un mot pour définir celui sans qui rien ne serait possible, l'avion. Et finalement, 50 mètres auront suffi pour déposer l'humanité sur la Lune. A peine 50 mètres pour bientôt, peut-être, marcher sur Mars. 50 mètres pour un jour, qui sait, rencontrer d'autres aéronautes des confins de l'univers, qui, eux aussi, auront eu la chance d'avoir leur Clément Hadère, pour leur offrir leurs premiers 50 mètres vers l'infini et l'au-delà.

  • Speaker #1

    On va passer par la terre maintenant. Un petit pas pour le monde. Un grand pas pour le monde.

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Découvrez la fabuleuse histoire de l'AVION et de so inventeur génial. Un récit immersif entre invention, poésie et exploits méconnus, raconté comme un film pour les oreilles. Laissez-vous emporter là où tout a commencé : dans le ciel de France.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

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  • Speaker #0

    Chers aéronautes, bonjour et bienvenue à bord de cette nouvelle aérochronique de One Bird. Installez-vous confortablement et envolons-nous ensemble pour une toute nouvelle et incroyable aventure des airs. L'immense inventeur et artiste Léonard de Vinci a dit Une fois que vous aurez goûté au vol, vous marcherez à jamais, les yeux tournés vers le ciel, car c'est là que vous êtes allés, et c'est là que toujours, vous désirerez ardemment retourner. Arrêtons-nous un instant sur Léonard pour nous souvenir que c'est ici, en France, plus exactement à Amboise et sous la protection du roi François Ier, qu'il dessina les premiers aéronefs. C'était en 1500 et des nuages, voyez comme le rêve ne date pas d'hier. Néanmoins, il aura fallu attendre longtemps pour que le désir de vol soit assouvi. Plus ou moins 200 ans d'ailleurs. 200 ans pour que deux frères, Joseph Michel et Jacques-Étienne Montgolfier, puissent faire voler les premiers hommes à bord de la célèbre Montgolfière. L'expérience, si elle donna de l'espoir à bien des inventeurs fous, n'ira pas aussi loin que les deux frères l'avaient espéré. Pour que l'incroyable aventure de l'aviation soit bel et bien lancée, il faudra patienter encore un peu. Le 2 avril 1841, l'archange n'est pas encore de ce monde. Cependant, une personne qui lui sera d'une importance capitale, à lui comme à tous ceux qui ont à cœur de toucher les nuages, est sur le point de découvrir notre planète dans un petit village de Haute-Garonne. A l'instar de Jean Mermoz, rien ne prédisposait ce nouveau personnage à son improbable destin qui, à bien des égards, changera le monde. Au sud-ouest de Toulouse, En bord de Garonne, entourée de charmants petits lacs et de prairies délicieuses, est une petite bourgade du nom de Muray. Comme tous les petits villages français, en son centre trône une élégante église, l'église Saint-Jacques. Non loin de là, les aléniels, au milieu desquels domine la statue du célèbre général, sont bordés de fiers platanes. Sous la fraîcheur des grands arbres, résonnent des conversations à l'accent chantant, suivi de rires sincères, suivi... d'autres conversations encore plus animées. En descendant vers la Garonne, aux 19 rues Sabatières, la maison du menuisier est étonnamment silencieuse. Dans la fraîcheur de ce début de printemps, les volets sont entre-ouverts et la porte de l'atelier est fermée. À l'étage, le plancher craque sous les pas impatients de François qui tourne comme une horloge devant la porte de sa chambre. À l'intérieur de cette dernière, Antoinette, sa femme, n'en peut plus de cette grossesse. et brûle de rencontrer son enfant. Après moultes allers-retours sur le plancher grinçant, après mille inspirations et expirations pour calmer le calvaire de la douleur, après bien des inquiétudes et des espoirs, un cri se fait entendre dans les petites rues du petit village de Haute-Garole. C'est un garçon et ses parents l'appelleront Clément. La vie du petit Clément est belle. Fils unique, il a toute l'attention et l'amour de ses parents qui le chérissent autant que les parents peuvent chérir leurs enfants. Clément va à l'école du village, une petite école de briquettes adossée à la mai. Après une journée studieuse, Clément va jouer à faire des ricochets dans la Garonne avant de rentrer. Des journées de classe à la construction de cabanes dans les bois, Clément a la vie dont rêvent tous les enfants sous le bienveillant soleil du sud-ouest. Quand il n'est pas dans les jambes de ses parents, Clément aime rendre visite à son grand-père paternel, ce dernier ayant servi dans les armées de Napoléon Ier. a des millions d'histoires à raconter à son petit-fils. Outre sa fascination pour ce personnage héroïque, Clément adore se rendre chez son grand-père, car ce dernier habite dans un moulin. Clément est plus que fasciné par ce gigantesque mécanisme, les rouages, les poulies, le mouvement si précis. Clément regarde tout ceci comme une œuvre d'art, quand d'autres n'y voient qu'un outil. Père menuisier, le moulin de son grand-père et son arrière-grand-père, lui aussi menuisier et architecte, Clément a de quoi être inspiré et stimulé. Très tôt, il se nourrit de tout ce qu'il veut. Plus que de la curiosité et de l'observation, Clément voudrait pouvoir répliquer tout ce qui pour lui fonctionne et améliorer tout ce qui, selon lui, devrait l'être. À chacune de ses balades dans les campagnes autour de son village, Clément observe et prend des notes. Très tôt, il compile des idées. théorie sur des feuilles de papier. Des milliers d'idées qui, pour la plupart, ne resteront que des traits de charbon sur quelques feuilles blanches. Mais son cerveau travaille. Il travaille peut-être même un peu trop vite pour un gamin d'à peine 10 ans. Des multitudes de petits croquis que Clément griffonne sur ses cahiers naissent des machines et des pièces de menuiserie entre art et mécanique des plus surprenantes. Plus Clément expérimente, plus son esprit s'affine. Lui qui dessinait bien devient un véritable artiste s'essayant à la peinture avec un véritable talent. Toutes ces expérimentations l'incitent à regarder le monde comme seuls les inventeurs les plus extravagants le regardent. Très vite, le voilà en admiration. devant les insectes et autres animaux volants. Crayons et pinceaux à la main, Clément imagine mille façons de s'envoler. Il se dit Comme Léonard de Vinci et les frères Montgolfier avant lui, Clément se met à rêver du ciel. Alors il croque, imagine, observe tout ce qui vole des hannetons aux oiseaux. Il se nourrit de tout ce qui pourra bien l'aider. à comprendre le pourquoi du comment et il analyse tout ce qui pourra l'aider à atteindre les nuages. Ainsi, en 1855, Clément décide de s'envoler. Il a à peine 14 ans et toute une vie devant lui. Mais à cet âge-là, on est pressé, exalté et surconfiant. Ses parents, ayant essayé à plusieurs reprises de le convaincre de ne pas s'exposer physiquement à des expérimentations immatures et pour le moins très optimistes, Clément décide de se lancer seul. et dans la clandestinité la plus totale, dans une expérience de vol. Clément se dit À ce stade, et sur le fond, allez, on est d'accord. Sur la forme par contre, bon, jugeons plutôt. Il s'agit pour lui de se confectionner un costume d'oiseau, du moins un costume représentant une interprétation de l'oiseau. et de se lancer du haut d'une colline. Le costume en lui-même se compose d'un pantalon avec une ceinture censée accueillir une sorte de grande cape fabriquée d'une veste large et de lustrine. De chaque côté, d'amples manches sont attachées à des bâtons, un pour chaque main. L'idée étant d'avoir deux espèces de grandes ailes actionnées par les bras du pilote. C'est là plus que de l'optimisme et on est bien au-delà de la confiance. Alors, de nuit. sans bruit. L'ombre de cet étrange oiseau nocturne se faufile à travers champs et bosquets. Au-dessus de la Garonne, en haut d'une sombre colline, une sorte d'étrange écureuil volant déploie ses ailes. Clément est prêt. Là-bas, au pied de la pente, brille sous la lune comme le paisible serpent d'argent la Garonne. Les herbes hautes comme une mer pétrole d'Odeline sous une brise qui ne demande qu'à forcer. L'étrange volatile inspire de tout son corps pour se donner du courage, comme pour rappeler à lui Zéphir et son souffle divin. En cette nuit remplie d'espoir, Zéphir est au rendez-vous. Une onde sombre court sur le flanc végétal de la petite colline. Clément, sûr de lui, c'est le moment. Un pas puis un autre, et c'est le poids de son corps qui l'entraîne dans la porte. Encore quelques souliers et l'onde invisible rencontrera le jeune pilote. Les ailes surprenantes se gonflent. tout à coup dans le dos de Clément, qui commence à ressentir comme résistance. Clément se dit « J'en étais sûr ! » Mais la lame d'air traverse l'aéronef singulier. Elle s'engouffre avec violence dans l'étrange assemblage. Dans la nuit noire et lugubre, Clément sent comme une main ferme qui le saisit par le dos et tire en arc-en-ciel. Un instant plus tard, au sol, amalgamé à sa construction de fortune, désorienté et couvert d'herbe, Clément croit sentir une présence. Le petit ingénieur redevient soudainement un enfant et fuit le monstre de son imagination en courant à travers bois pour retrouver rapidement la protection du foyer familial. La vie d'inventeur rêveur est parfois mouvementée. L'année d'après, Clément a 15 ans. Dans son école toulousaine, ses professeurs louent ses capacités en mathématiques et en dessin. Cette année-là, il obtient son baccalauréat. A cette époque, un baccalauréat est une valeur sûre permettant d'accéder aux meilleurs emplois. Me Quand son école ouvre une classe de formation au métier de l'ingénierie, Clément y est poussé par ses professeurs qui voient en lui un espoir réel. Quelle clairvoyance ! En 1861, Clément est diplômé ingénieur. Légitimé par ce nouveau statut et volontaire à changer le monde, Clément traverse la vie comme il l'a toujours fait. Un calepin et un crayon à la main à l'affût de tout ce qui pourrait être changé, transformé, amélioré. En 1867, le voilà à Paris pour une exposition universelle. Lui qui avait expérimenté et fabriqué de nombreuses machines durant sa jeunesse, tombe sur un stand qui lui rappelle de beaux souvenirs. Sur ce stand, il reconnaît l'adrésienne de son enfance, ce véhicule sans pédale, mi-vélo, mi-trottinette. Mais celle-ci est équipée de grandes roues en métal et d'une sorte de mécanisme actionné par les pieds du pilote. Son nom est Vélocipeg. Immédiatement après avoir observé et essayé l'engin, Clément note une faiblesse majeure au Vélocipeg. Son manque de confort et de discrétion dû à la qualité exclusive métallique de ses roues. Clément note dans son carnet. Puis, nous recouvrions les ronds avec du caoutchouc. Par ailleurs, le vélocipède est bien trop lourd pour être agréable à la manœuvre. Je dois travailler la suite. Aussitôt écrit, aussitôt dessiné, aussitôt fait. En 1867, les premiers vélocipèdes à roues de caoutchouc sortent sous le nom de Véloz-Caoutchouc. Mieux encore, et pour la première fois de l'histoire de la bicyclette, comme on l'appellera bientôt, le cadre est composé de tubules en creuse soudées entre elles afin d'alléger le tout. Clément ne le sait pas et ne le saura peut-être jamais, mais le Tour de France et le Bélib lui doivent leur existence. Après la guerre franco-prussienne de 1870, durant laquelle il a vainement tenté de convaincre les états-majors français de miser sur le ciel pour observer l'ennemi, Clément se consacre à une carrière dans les chemins de fer. Durant cette période, l'ingénieur développera des processus pratiques et fiables dédiés à la construction des ponts ferroviaires. En gagnant du temps, et de la fiabilité dans la construction de ces ouvrages, l'extension des chemins de fer s'envoie améliorer de manière particulièrement significative. Mieux encore, observant le labeur des ouvriers sur les chantiers de postes de rails, Clément Griffon. C'est l'encrime sur des bêtes. Il faut avoir un moyen d'améliorer leurs conditions de travail, tout en gagnant en productivité. Je dois automatiser la pose des rails. Aussitôt dit, aussitôt fait. Quelques traits de crayon plus tard. Et c'est une machine à poser les rails qui sort de l'esprit de Clément. L'industrie du rail s'en voit révolutionner et les congés payés aussi. Et puisqu'on est dans le rail, il ne faut pas plus de temps que cela pour que Clément observe que, grâce au rail, on peut faire transiter de très grosses charges. Clément écrit. Les rails n'étaient pas posés pour faire circuler les véhicules, mais ils sont intégrés au véhicule même. Et alors, allez partout ! Dès lors, rien ne compte plus pour Clément que de réaliser cette vision. Ainsi, Clément dessine de grandes roues capables de faire circuler cette bande de rails qui va relier toutes les autres roues du véhicule entre elles. Par conséquent, posées uniformément sur le sol, les tramways et autres wagons en tout genre pourront circuler sur tout type de terrain. Clément construit rapidement les premiers prototypes et les expose au public à Paris. Son idée est de proposer le concept aux compagnies de transport, en particulier dans les Landes, qui sont encore mal desservies et uniquement par des chemins sablonneux. Mais aussi de le vendre aux militaires, qui pourraient en équiper leurs attelages de campagne, par exemple. Malheureusement, personne à cette époque ne sut voir aussi loin que Clément, qui lui venait d'inventer. Les chenilles. Heureusement, le monde est vaste et bien des choses restent à améliorer et inventer. En parallèle de cette frénésie de recherches et développements divers, Clément ne perd pas de vue le sien. Avec ses fonds propres, il continue à chercher un moyen de faire voler l'homme plus efficacement qu'en ballon. Va naître de son cerveau une armature de 9 mètres d'envergure pour seulement 24 kg, faite de bois et de plumes et capable d'être endossée par un pilote, qui en bougeraient les ailes à la force des bras. Bon, rapidement, Clément s'aperçoit que nul homme ne peut être assez fort pour actionner le dispositif, aussi sera-t-il plus raisonnable de l'équiper d'un moteur. Bien du travail reste donc à accomplir. Et pour cela, eh bien pour cela, il faut de l'argent. Toujours en quête du futur par l'amélioration de l'existant, Clément qui était aussi bon ingénieur qu'électricien de génie, décide de se pencher sur cette invention. toute récente que l'on appelle le téléphone. En se saisissant de ce qui existe déjà, Clément rend le téléphone plus polyvalent en l'équipant de charbon pour transformer le son en électricité, ce qui va permettre de pouvoir communiquer sur de très grandes distances. En s'associant avec quelques autres inventeurs de génie, Clément va construire les premiers postes de téléphonie mobile. Alors, soyons clairs, par téléphonie mobile, on entend un... Un téléphone équipé d'une manivelle permettant de recharger une batterie, le tout à brancher sur des câbles préalablement déployés entre deux points distants. Rien à voir avec nos smartphones actuels, mais sans cette avancée remarquable, la firme à la pomme n'en serait pas là où elle en est aujourd'hui. Quant à l'armée de cette époque, elle sera ravie de cette invention qui lui fera économiser bien du temps et des messagers. Toujours en quête de perfectionnement, Clément pense à équiper le fameux téléphone de deux choses que nous connaissons tous. Une sonnerie électromagnétique et un accessoire regroupant l'émetteur et le récepteur que l'on appellera le combiné. Autant dire qu'une fois encore, Clément allait très durablement changer notre société. De quoi assurer sur le long terme ses besoins financiers. Pour en finir avec sa période téléphonique... Clément, toujours en avance sur son temps, imagina la possibilité de créer des récepteurs à disposer dans les salles de concerts et autres opéras, afin de transporter le spectacle directement chez les particuliers grâce au téléphone. Se doutit-il que cette idée serait reprise, retravaillée et développée jusqu'à nous donner la radio et plus tard la fibre optique et la télévision en streaming ? À présent à l'abri du besoin et décoré de la Légion d'honneur, Clément continue à... inventer l'avenir. Il va améliorer son travail sur le téléphone, inventer l'hydroglisseur, voir grâce à son canot à bâtins pneumatiques les crânoplanes avant l'heure. Pour ceux qui se poseraient la question, les crânoplanes est une curiosité aéronautique. En l'espèce, un hybride entre un avion et un bateau dont le but était de voler très rapidement à peine au-dessus des flots grâce à l'effet de sol. L'effet de sol est une sorte de coussin d'air formé entre la machine et l'eau. Une technologie complexe dont le développement a été mis en suspens à la fin de la guerre froide. Mais qui sait, si comme Clément vous avez un carnet et un crayon, il y a peut-être quelque chose à améliorer. Clément, lui, n'a pas attendu la guerre froide pour améliorer de manière plus significative la télégraphie sous-marine. Il a par ailleurs travaillé sur le concept de torpille à usage militaire et des notes ont été retrouvées qui démontrent qu'il avait déjà dans la tête bien des idées autour du moteur à réaction. Mais, et c'est là que tout va réellement changer, grâce à ses nouvelles et très confortables ressources financières, il va pouvoir se consacrer à cette invention qu'il n'arrive pas à réaliser, l'aéroplane. Son aile ultra légère n'a pas fonctionné. Son esprit vif et créatif, c'est que la première chose à faire est d'inventer le bon moteur. Il écrit dans son calepin. Les moteurs existants sont trop massifs, trop courts. L'ennemi du vol, c'est le poids. J'ai déjà allégé l'extraire, je dois alléger le moteur et le rendre plus puissant. Oui, faisons ça, rendons-le plus puissant. Alors Clément taille un crayon. Délicatement, la mine se pose sur une feuille de papier immaculée pour finalement commencer sa danse. va naître de son cerveau brillant un moteur à vapeur aux performances surprenantes. Quand les frères Wright, 13 ans plus tard, voleront à leur tour, leur aéroplane sera équipée d'un moteur de 12 chevaux pesant 75 kg. En 1890, Clément va développer et construire un moteur de 20 chevaux pour seulement 51 kg. Et les gens de l'air savent très bien ce que change un kilo quand on cherche à se rapprocher des nuages. Cette nouvelle passion pour la mécanique va d'ailleurs mener Clément à conceptualiser et fabriquer en 1903 une architecture de moteur bien connue des mécaniciens, des amateurs comme professionnels, des aviateurs, des automobilistes ou encore des marins. Le très fameux V8. Parce que oui, souvenons-nous que si le premier moteur en V, un V2 pour deux cylindres, fut inventé par certains Daimler en Allemagne, où le premier moteur V8 fut inventé par Clément. ici, en France. Ce dernier l'installa sur un châssis pour participer à une course entre Paris et Madrid en 1903. Pour l'anecdote, la première voiture de série à être équipée d'un moteur V8 fut, là encore, française, une De Dion Bouton V8. En ce début 1900, le V8 de Dion Bouton a une cylindrée de plus de 6 litres pour une puissance ébouriffante de 35 chevaux. Il faudra attendre une demi-décennie de plus pour que les Américains s'attachent amoureusement à ce moteur légendaire, avec le succès qu'on lui connaît. En 1890, le moteur le plus léger possible est prêt. Oublié les oiseaux, Clément décide de se fier à l'aérodynamisme des chauves-sous. Ayant longuement observé ce petit mammifère, Clément imagine un complexe assemblage afin d'assurer une géométrie variable aux ailes de son aéroplane qu'il va nommer l'avion 1 EOL. Dans le nez d'EOL vient se loger le moteur. à vapeur au bout duquel est installée une hélice de 4 pales de 2,6 mètres de diamètre. Il faut voir cet engin pour comprendre que si, par miracle, il s'envole, il ne sera pas manœuvrable. C'est effectivement une sorte de chauve-souris faite de grosses toiles de soie beige. Sa grande hélice de bambou semble vouloir se briser avant même le moteur mis en route. La mécanique, quant à elle, est alimentée par des brûleurs à alcool. Bois, toile, bambou, alcool, il fallait du courage. Et du courage, Clément en a. On est le 9 octobre 1890 au château de Madame Perrer à Gretz-Arminvilliers en Seine-et-Marne. Eole est enfin prêt à prendre l'air. Clément dans une tenue plus ou moins adaptée à une mort. douloureuse en cas d'échec, s'installe fastidieusement à l'intérieur de son volatile de bois creux. Le terrain de 200 mètres de long sur 25 de large face à éoles est plus ou moins plat et bordé de grands arbres. Des brûleurs à alcool, du bois, de la toile, des bambous et une piste pas si large et pas plus longue encadrée de grands arbres. Inconscience, courage, à ce niveau-là, qui pourrait encore le dire ? Quoi qu'il en soit, Clément est prêt autant qu'il est possible de l'être. Disons qu'Eol est là, les ailes tiennent en place et la structure supporte le poids du petit moteur et du pilote. L'alcool est injecté dans les brûleurs et bientôt le moteur de 20 chevaux entraîne la surprenante hélice en bambou qui donne à l'avion 1, Eol, son air de moulin à vent pour enfants. Sur le bord de la piste, terme à prendre au sens d'un chemin de terre à travers bois, les assistants de Clément sont autant concentrés que prêts à porter secours. à l'ingénieur Temerev. Il est 16h passées de 5 minutes en cet après-midi d'automne et le bruit du petit moteur à alcool résonne désagréablement à travers les arbres. L'air vibre et se déchire alors que la grande hélice prend de la vitesse. C'est un miracle, elle ne casse pas. Rassurée par la solidité de sa construction, Clément met les gaz. Sous la force rageuse du moteur, l'hélice singulière entraîne l'éole qui glisse sur la bague d'air battu. 10 mètres, 20 mètres. Ça vibre, ça couine, ça craque, mais ça marche. Les ailes se tendent et se galbent perceptiblement. 50 mètres, 80, bientôt 100. Soudain, Clément ressent clairement un flottement. Assourdi par le bruit du moteur et incapable de voir l'avant de sa course de par la conception épique de son avion 1, Clément ne voit que ses associés lui faire de grands signes sur le bord de la piste chemin. Devinant rapidement que la lisière de la forêt, en bout de piste, approche dangereusement, Clément coupe le moteur et instantanément, Eole glisse sur la terre battue pour finalement s'arrêter un peu au hasard de sa course. Clément ne le sait pas encore, mais l'avion 1, dit Eole, vient de quitter terre de quelques centimètres sur près de 50 mètres. Ça semble complètement ridicule pour qui vit au XXIe siècle. Cependant, en ce jour du 9 octobre 1890, Ici, en France, plus exactement en Seine-et-Marne, quelque chose vient de changer notre rapport au monde, au temps, à l'espace et à l'humanité. En ce jour du 9 octobre 1890, Clément Hadère, ingénieur de génie, inventeur providentiel et pourvoyeur d'avenir, vient de faire voler pour la première fois dans l'histoire de l'humanité un engin plus lourd que l'air. Alors ? Bien entendu, 50 mètres, c'est peu. On est encore loin de pouvoir manœuvrer l'appareil et encore plus loin de pouvoir voyager avec. Encore plus loin, pas si sûr. Fort de cette révolution aéronautique, Clément va immédiatement construire successivement l'avion 2, dit Zephyr, et l'avion 3, dit Aquilon. Et de 50 mètres, passer à 300 mètres. Certes, il ne volera qu'en ligne plus ou moins droite, sans contrôler sa trajectoire. Mais Clément Hadère vient d'ouvrir le ciel. À qui en rêve ? Un an après Eole, Otto Lilienthal fera voler un planeur en Allemagne. Alberto Santos Dumont, un aviateur brésilien, viendra en France s'inspirer de tout cela pour faire s'envoler son aéroplane motorisé manœuvrable dans le parc de Bagatelle à Paris. On est le 23 octobre 1906. Moins d'un mois plus tard, le 12 novembre 1906, toujours Alberto Santos Dumont réalise le... premier record du monde d'aviation homologué en parcourant 220 mètres à la vitesse considérable de 41,3 km heure, gagnant au passage le déjà prestigieux prix de l'Aéroclub de France. Si je précise homologué, c'est parce que pour être honnête, ce n'est pas Alberto Santos Dumont qui fit voler le premier aéronef motorisé manœuvrable de l'histoire. C'était bel et bien Orville et Wilbur Wright le 17 décembre 1903 à Kitty Hawk, USA. Mais l'information à cette époque-ci n'avait pas encore circulé. Il n'a pas fallu beaucoup plus de dix ans entre le miracle de Clément et l'aviation telle qu'on la connaît encore aujourd'hui. Il est d'ailleurs amusant de penser que c'est probablement l'invention de Clément Hadère la moins efficace qu'il ait jamais mise au point, qui, finalement, aura changé le monde comme nul autre avant elle. Le 3 mai 1925, dans sa région chérie de Haute-Garonne, Clément Hadère, enfant curieux, ingénieur visionnaire et aventurier de l'air, quitte ce monde pour ses cieux qu'il avait tant désiré à l'âge de 84 ans. Non loin de là, sur l'aérodrome de Montaudran, près de Toulouse, un jeune homme, que l'on surnomme l'Archange, monte à bord d'un Breguet 14 pour emporter une lettre, écrite ici, aujourd'hui, et qui arrivera là-bas, demain, peut-être. faisant de ce monde un petit village à ciel ouvert. Se doute-t-il, Jean Mermoz, que non loin de là vient de s'éteindre celui sans qui toute l'aventure de l'aviation n'aurait pu être possible ? En repensant à Clément Hadère et à ses aéronefs, baptisés par lui d'un mot imaginé pour l'occasion, me vient en mémoire ce poème que Guillaume Apollinaire avait écrit pour lui. Ô peuple de Paris, vous, Marseille et Lyon, Vous tous, fleuves français, vous, françaises de montagne, habitants des cités, et vous, gens des campagnes, l'instrument à voler se nomme l'avion. Il fallait un murmure et la voix d'Ariel pour nommer l'instrument qui nous emporte au ciel. La plainte de la brise, un oiseau dans l'espace, et c'est un mot français qui dans nos bouches passe. L'avion. L'avion. Qu'il monte dans les airs, qu'il plane sur les monts, qu'il traverse les mers, qu'il aille regarder le soleil comme Icare, et plus loin. Encore un avion s'égare et trace dans les terres un éternel sillon. Mais gardons-lui le nom suave d'avion, car du magique mot, les cinq lettres habiles eurent cette vertu d'ouvrir les ciels mobiles. Nous sommes Aéronautes depuis 1890, depuis que Clément Hadère, inventeur de génie et fournisseur d'avenir, nous a offert 50 mètres à quelques centimètres du sol. 50 premiers mètres pour rétrécir l'espace et maîtriser le temps. Nos 50 premiers mètres à quelques centimètres du sol pour nous ouvrir les portes de tous les ciels du monde. 50 mètres que nous avons transformés en formidables aventures, nous, mais également tous ceux qui, un jour, ont levé les yeux au ciel en y voyant le futur. 50 mètres et un mot pour définir celui sans qui rien ne serait possible, l'avion. Et finalement, 50 mètres auront suffi pour déposer l'humanité sur la Lune. A peine 50 mètres pour bientôt, peut-être, marcher sur Mars. 50 mètres pour un jour, qui sait, rencontrer d'autres aéronautes des confins de l'univers, qui, eux aussi, auront eu la chance d'avoir leur Clément Hadère, pour leur offrir leurs premiers 50 mètres vers l'infini et l'au-delà.

  • Speaker #1

    On va passer par la terre maintenant. Un petit pas pour le monde. Un grand pas pour le monde.

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L’Origine – Une Aéro-Chronique de ONEBIRD
Découvrez la fabuleuse histoire de l'AVION et de so inventeur génial. Un récit immersif entre invention, poésie et exploits méconnus, raconté comme un film pour les oreilles. Laissez-vous emporter là où tout a commencé : dans le ciel de France.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Chers aéronautes, bonjour et bienvenue à bord de cette nouvelle aérochronique de One Bird. Installez-vous confortablement et envolons-nous ensemble pour une toute nouvelle et incroyable aventure des airs. L'immense inventeur et artiste Léonard de Vinci a dit Une fois que vous aurez goûté au vol, vous marcherez à jamais, les yeux tournés vers le ciel, car c'est là que vous êtes allés, et c'est là que toujours, vous désirerez ardemment retourner. Arrêtons-nous un instant sur Léonard pour nous souvenir que c'est ici, en France, plus exactement à Amboise et sous la protection du roi François Ier, qu'il dessina les premiers aéronefs. C'était en 1500 et des nuages, voyez comme le rêve ne date pas d'hier. Néanmoins, il aura fallu attendre longtemps pour que le désir de vol soit assouvi. Plus ou moins 200 ans d'ailleurs. 200 ans pour que deux frères, Joseph Michel et Jacques-Étienne Montgolfier, puissent faire voler les premiers hommes à bord de la célèbre Montgolfière. L'expérience, si elle donna de l'espoir à bien des inventeurs fous, n'ira pas aussi loin que les deux frères l'avaient espéré. Pour que l'incroyable aventure de l'aviation soit bel et bien lancée, il faudra patienter encore un peu. Le 2 avril 1841, l'archange n'est pas encore de ce monde. Cependant, une personne qui lui sera d'une importance capitale, à lui comme à tous ceux qui ont à cœur de toucher les nuages, est sur le point de découvrir notre planète dans un petit village de Haute-Garonne. A l'instar de Jean Mermoz, rien ne prédisposait ce nouveau personnage à son improbable destin qui, à bien des égards, changera le monde. Au sud-ouest de Toulouse, En bord de Garonne, entourée de charmants petits lacs et de prairies délicieuses, est une petite bourgade du nom de Muray. Comme tous les petits villages français, en son centre trône une élégante église, l'église Saint-Jacques. Non loin de là, les aléniels, au milieu desquels domine la statue du célèbre général, sont bordés de fiers platanes. Sous la fraîcheur des grands arbres, résonnent des conversations à l'accent chantant, suivi de rires sincères, suivi... d'autres conversations encore plus animées. En descendant vers la Garonne, aux 19 rues Sabatières, la maison du menuisier est étonnamment silencieuse. Dans la fraîcheur de ce début de printemps, les volets sont entre-ouverts et la porte de l'atelier est fermée. À l'étage, le plancher craque sous les pas impatients de François qui tourne comme une horloge devant la porte de sa chambre. À l'intérieur de cette dernière, Antoinette, sa femme, n'en peut plus de cette grossesse. et brûle de rencontrer son enfant. Après moultes allers-retours sur le plancher grinçant, après mille inspirations et expirations pour calmer le calvaire de la douleur, après bien des inquiétudes et des espoirs, un cri se fait entendre dans les petites rues du petit village de Haute-Garole. C'est un garçon et ses parents l'appelleront Clément. La vie du petit Clément est belle. Fils unique, il a toute l'attention et l'amour de ses parents qui le chérissent autant que les parents peuvent chérir leurs enfants. Clément va à l'école du village, une petite école de briquettes adossée à la mai. Après une journée studieuse, Clément va jouer à faire des ricochets dans la Garonne avant de rentrer. Des journées de classe à la construction de cabanes dans les bois, Clément a la vie dont rêvent tous les enfants sous le bienveillant soleil du sud-ouest. Quand il n'est pas dans les jambes de ses parents, Clément aime rendre visite à son grand-père paternel, ce dernier ayant servi dans les armées de Napoléon Ier. a des millions d'histoires à raconter à son petit-fils. Outre sa fascination pour ce personnage héroïque, Clément adore se rendre chez son grand-père, car ce dernier habite dans un moulin. Clément est plus que fasciné par ce gigantesque mécanisme, les rouages, les poulies, le mouvement si précis. Clément regarde tout ceci comme une œuvre d'art, quand d'autres n'y voient qu'un outil. Père menuisier, le moulin de son grand-père et son arrière-grand-père, lui aussi menuisier et architecte, Clément a de quoi être inspiré et stimulé. Très tôt, il se nourrit de tout ce qu'il veut. Plus que de la curiosité et de l'observation, Clément voudrait pouvoir répliquer tout ce qui pour lui fonctionne et améliorer tout ce qui, selon lui, devrait l'être. À chacune de ses balades dans les campagnes autour de son village, Clément observe et prend des notes. Très tôt, il compile des idées. théorie sur des feuilles de papier. Des milliers d'idées qui, pour la plupart, ne resteront que des traits de charbon sur quelques feuilles blanches. Mais son cerveau travaille. Il travaille peut-être même un peu trop vite pour un gamin d'à peine 10 ans. Des multitudes de petits croquis que Clément griffonne sur ses cahiers naissent des machines et des pièces de menuiserie entre art et mécanique des plus surprenantes. Plus Clément expérimente, plus son esprit s'affine. Lui qui dessinait bien devient un véritable artiste s'essayant à la peinture avec un véritable talent. Toutes ces expérimentations l'incitent à regarder le monde comme seuls les inventeurs les plus extravagants le regardent. Très vite, le voilà en admiration. devant les insectes et autres animaux volants. Crayons et pinceaux à la main, Clément imagine mille façons de s'envoler. Il se dit Comme Léonard de Vinci et les frères Montgolfier avant lui, Clément se met à rêver du ciel. Alors il croque, imagine, observe tout ce qui vole des hannetons aux oiseaux. Il se nourrit de tout ce qui pourra bien l'aider. à comprendre le pourquoi du comment et il analyse tout ce qui pourra l'aider à atteindre les nuages. Ainsi, en 1855, Clément décide de s'envoler. Il a à peine 14 ans et toute une vie devant lui. Mais à cet âge-là, on est pressé, exalté et surconfiant. Ses parents, ayant essayé à plusieurs reprises de le convaincre de ne pas s'exposer physiquement à des expérimentations immatures et pour le moins très optimistes, Clément décide de se lancer seul. et dans la clandestinité la plus totale, dans une expérience de vol. Clément se dit À ce stade, et sur le fond, allez, on est d'accord. Sur la forme par contre, bon, jugeons plutôt. Il s'agit pour lui de se confectionner un costume d'oiseau, du moins un costume représentant une interprétation de l'oiseau. et de se lancer du haut d'une colline. Le costume en lui-même se compose d'un pantalon avec une ceinture censée accueillir une sorte de grande cape fabriquée d'une veste large et de lustrine. De chaque côté, d'amples manches sont attachées à des bâtons, un pour chaque main. L'idée étant d'avoir deux espèces de grandes ailes actionnées par les bras du pilote. C'est là plus que de l'optimisme et on est bien au-delà de la confiance. Alors, de nuit. sans bruit. L'ombre de cet étrange oiseau nocturne se faufile à travers champs et bosquets. Au-dessus de la Garonne, en haut d'une sombre colline, une sorte d'étrange écureuil volant déploie ses ailes. Clément est prêt. Là-bas, au pied de la pente, brille sous la lune comme le paisible serpent d'argent la Garonne. Les herbes hautes comme une mer pétrole d'Odeline sous une brise qui ne demande qu'à forcer. L'étrange volatile inspire de tout son corps pour se donner du courage, comme pour rappeler à lui Zéphir et son souffle divin. En cette nuit remplie d'espoir, Zéphir est au rendez-vous. Une onde sombre court sur le flanc végétal de la petite colline. Clément, sûr de lui, c'est le moment. Un pas puis un autre, et c'est le poids de son corps qui l'entraîne dans la porte. Encore quelques souliers et l'onde invisible rencontrera le jeune pilote. Les ailes surprenantes se gonflent. tout à coup dans le dos de Clément, qui commence à ressentir comme résistance. Clément se dit « J'en étais sûr ! » Mais la lame d'air traverse l'aéronef singulier. Elle s'engouffre avec violence dans l'étrange assemblage. Dans la nuit noire et lugubre, Clément sent comme une main ferme qui le saisit par le dos et tire en arc-en-ciel. Un instant plus tard, au sol, amalgamé à sa construction de fortune, désorienté et couvert d'herbe, Clément croit sentir une présence. Le petit ingénieur redevient soudainement un enfant et fuit le monstre de son imagination en courant à travers bois pour retrouver rapidement la protection du foyer familial. La vie d'inventeur rêveur est parfois mouvementée. L'année d'après, Clément a 15 ans. Dans son école toulousaine, ses professeurs louent ses capacités en mathématiques et en dessin. Cette année-là, il obtient son baccalauréat. A cette époque, un baccalauréat est une valeur sûre permettant d'accéder aux meilleurs emplois. Me Quand son école ouvre une classe de formation au métier de l'ingénierie, Clément y est poussé par ses professeurs qui voient en lui un espoir réel. Quelle clairvoyance ! En 1861, Clément est diplômé ingénieur. Légitimé par ce nouveau statut et volontaire à changer le monde, Clément traverse la vie comme il l'a toujours fait. Un calepin et un crayon à la main à l'affût de tout ce qui pourrait être changé, transformé, amélioré. En 1867, le voilà à Paris pour une exposition universelle. Lui qui avait expérimenté et fabriqué de nombreuses machines durant sa jeunesse, tombe sur un stand qui lui rappelle de beaux souvenirs. Sur ce stand, il reconnaît l'adrésienne de son enfance, ce véhicule sans pédale, mi-vélo, mi-trottinette. Mais celle-ci est équipée de grandes roues en métal et d'une sorte de mécanisme actionné par les pieds du pilote. Son nom est Vélocipeg. Immédiatement après avoir observé et essayé l'engin, Clément note une faiblesse majeure au Vélocipeg. Son manque de confort et de discrétion dû à la qualité exclusive métallique de ses roues. Clément note dans son carnet. Puis, nous recouvrions les ronds avec du caoutchouc. Par ailleurs, le vélocipède est bien trop lourd pour être agréable à la manœuvre. Je dois travailler la suite. Aussitôt écrit, aussitôt dessiné, aussitôt fait. En 1867, les premiers vélocipèdes à roues de caoutchouc sortent sous le nom de Véloz-Caoutchouc. Mieux encore, et pour la première fois de l'histoire de la bicyclette, comme on l'appellera bientôt, le cadre est composé de tubules en creuse soudées entre elles afin d'alléger le tout. Clément ne le sait pas et ne le saura peut-être jamais, mais le Tour de France et le Bélib lui doivent leur existence. Après la guerre franco-prussienne de 1870, durant laquelle il a vainement tenté de convaincre les états-majors français de miser sur le ciel pour observer l'ennemi, Clément se consacre à une carrière dans les chemins de fer. Durant cette période, l'ingénieur développera des processus pratiques et fiables dédiés à la construction des ponts ferroviaires. En gagnant du temps, et de la fiabilité dans la construction de ces ouvrages, l'extension des chemins de fer s'envoie améliorer de manière particulièrement significative. Mieux encore, observant le labeur des ouvriers sur les chantiers de postes de rails, Clément Griffon. C'est l'encrime sur des bêtes. Il faut avoir un moyen d'améliorer leurs conditions de travail, tout en gagnant en productivité. Je dois automatiser la pose des rails. Aussitôt dit, aussitôt fait. Quelques traits de crayon plus tard. Et c'est une machine à poser les rails qui sort de l'esprit de Clément. L'industrie du rail s'en voit révolutionner et les congés payés aussi. Et puisqu'on est dans le rail, il ne faut pas plus de temps que cela pour que Clément observe que, grâce au rail, on peut faire transiter de très grosses charges. Clément écrit. Les rails n'étaient pas posés pour faire circuler les véhicules, mais ils sont intégrés au véhicule même. Et alors, allez partout ! Dès lors, rien ne compte plus pour Clément que de réaliser cette vision. Ainsi, Clément dessine de grandes roues capables de faire circuler cette bande de rails qui va relier toutes les autres roues du véhicule entre elles. Par conséquent, posées uniformément sur le sol, les tramways et autres wagons en tout genre pourront circuler sur tout type de terrain. Clément construit rapidement les premiers prototypes et les expose au public à Paris. Son idée est de proposer le concept aux compagnies de transport, en particulier dans les Landes, qui sont encore mal desservies et uniquement par des chemins sablonneux. Mais aussi de le vendre aux militaires, qui pourraient en équiper leurs attelages de campagne, par exemple. Malheureusement, personne à cette époque ne sut voir aussi loin que Clément, qui lui venait d'inventer. Les chenilles. Heureusement, le monde est vaste et bien des choses restent à améliorer et inventer. En parallèle de cette frénésie de recherches et développements divers, Clément ne perd pas de vue le sien. Avec ses fonds propres, il continue à chercher un moyen de faire voler l'homme plus efficacement qu'en ballon. Va naître de son cerveau une armature de 9 mètres d'envergure pour seulement 24 kg, faite de bois et de plumes et capable d'être endossée par un pilote, qui en bougeraient les ailes à la force des bras. Bon, rapidement, Clément s'aperçoit que nul homme ne peut être assez fort pour actionner le dispositif, aussi sera-t-il plus raisonnable de l'équiper d'un moteur. Bien du travail reste donc à accomplir. Et pour cela, eh bien pour cela, il faut de l'argent. Toujours en quête du futur par l'amélioration de l'existant, Clément qui était aussi bon ingénieur qu'électricien de génie, décide de se pencher sur cette invention. toute récente que l'on appelle le téléphone. En se saisissant de ce qui existe déjà, Clément rend le téléphone plus polyvalent en l'équipant de charbon pour transformer le son en électricité, ce qui va permettre de pouvoir communiquer sur de très grandes distances. En s'associant avec quelques autres inventeurs de génie, Clément va construire les premiers postes de téléphonie mobile. Alors, soyons clairs, par téléphonie mobile, on entend un... Un téléphone équipé d'une manivelle permettant de recharger une batterie, le tout à brancher sur des câbles préalablement déployés entre deux points distants. Rien à voir avec nos smartphones actuels, mais sans cette avancée remarquable, la firme à la pomme n'en serait pas là où elle en est aujourd'hui. Quant à l'armée de cette époque, elle sera ravie de cette invention qui lui fera économiser bien du temps et des messagers. Toujours en quête de perfectionnement, Clément pense à équiper le fameux téléphone de deux choses que nous connaissons tous. Une sonnerie électromagnétique et un accessoire regroupant l'émetteur et le récepteur que l'on appellera le combiné. Autant dire qu'une fois encore, Clément allait très durablement changer notre société. De quoi assurer sur le long terme ses besoins financiers. Pour en finir avec sa période téléphonique... Clément, toujours en avance sur son temps, imagina la possibilité de créer des récepteurs à disposer dans les salles de concerts et autres opéras, afin de transporter le spectacle directement chez les particuliers grâce au téléphone. Se doutit-il que cette idée serait reprise, retravaillée et développée jusqu'à nous donner la radio et plus tard la fibre optique et la télévision en streaming ? À présent à l'abri du besoin et décoré de la Légion d'honneur, Clément continue à... inventer l'avenir. Il va améliorer son travail sur le téléphone, inventer l'hydroglisseur, voir grâce à son canot à bâtins pneumatiques les crânoplanes avant l'heure. Pour ceux qui se poseraient la question, les crânoplanes est une curiosité aéronautique. En l'espèce, un hybride entre un avion et un bateau dont le but était de voler très rapidement à peine au-dessus des flots grâce à l'effet de sol. L'effet de sol est une sorte de coussin d'air formé entre la machine et l'eau. Une technologie complexe dont le développement a été mis en suspens à la fin de la guerre froide. Mais qui sait, si comme Clément vous avez un carnet et un crayon, il y a peut-être quelque chose à améliorer. Clément, lui, n'a pas attendu la guerre froide pour améliorer de manière plus significative la télégraphie sous-marine. Il a par ailleurs travaillé sur le concept de torpille à usage militaire et des notes ont été retrouvées qui démontrent qu'il avait déjà dans la tête bien des idées autour du moteur à réaction. Mais, et c'est là que tout va réellement changer, grâce à ses nouvelles et très confortables ressources financières, il va pouvoir se consacrer à cette invention qu'il n'arrive pas à réaliser, l'aéroplane. Son aile ultra légère n'a pas fonctionné. Son esprit vif et créatif, c'est que la première chose à faire est d'inventer le bon moteur. Il écrit dans son calepin. Les moteurs existants sont trop massifs, trop courts. L'ennemi du vol, c'est le poids. J'ai déjà allégé l'extraire, je dois alléger le moteur et le rendre plus puissant. Oui, faisons ça, rendons-le plus puissant. Alors Clément taille un crayon. Délicatement, la mine se pose sur une feuille de papier immaculée pour finalement commencer sa danse. va naître de son cerveau brillant un moteur à vapeur aux performances surprenantes. Quand les frères Wright, 13 ans plus tard, voleront à leur tour, leur aéroplane sera équipée d'un moteur de 12 chevaux pesant 75 kg. En 1890, Clément va développer et construire un moteur de 20 chevaux pour seulement 51 kg. Et les gens de l'air savent très bien ce que change un kilo quand on cherche à se rapprocher des nuages. Cette nouvelle passion pour la mécanique va d'ailleurs mener Clément à conceptualiser et fabriquer en 1903 une architecture de moteur bien connue des mécaniciens, des amateurs comme professionnels, des aviateurs, des automobilistes ou encore des marins. Le très fameux V8. Parce que oui, souvenons-nous que si le premier moteur en V, un V2 pour deux cylindres, fut inventé par certains Daimler en Allemagne, où le premier moteur V8 fut inventé par Clément. ici, en France. Ce dernier l'installa sur un châssis pour participer à une course entre Paris et Madrid en 1903. Pour l'anecdote, la première voiture de série à être équipée d'un moteur V8 fut, là encore, française, une De Dion Bouton V8. En ce début 1900, le V8 de Dion Bouton a une cylindrée de plus de 6 litres pour une puissance ébouriffante de 35 chevaux. Il faudra attendre une demi-décennie de plus pour que les Américains s'attachent amoureusement à ce moteur légendaire, avec le succès qu'on lui connaît. En 1890, le moteur le plus léger possible est prêt. Oublié les oiseaux, Clément décide de se fier à l'aérodynamisme des chauves-sous. Ayant longuement observé ce petit mammifère, Clément imagine un complexe assemblage afin d'assurer une géométrie variable aux ailes de son aéroplane qu'il va nommer l'avion 1 EOL. Dans le nez d'EOL vient se loger le moteur. à vapeur au bout duquel est installée une hélice de 4 pales de 2,6 mètres de diamètre. Il faut voir cet engin pour comprendre que si, par miracle, il s'envole, il ne sera pas manœuvrable. C'est effectivement une sorte de chauve-souris faite de grosses toiles de soie beige. Sa grande hélice de bambou semble vouloir se briser avant même le moteur mis en route. La mécanique, quant à elle, est alimentée par des brûleurs à alcool. Bois, toile, bambou, alcool, il fallait du courage. Et du courage, Clément en a. On est le 9 octobre 1890 au château de Madame Perrer à Gretz-Arminvilliers en Seine-et-Marne. Eole est enfin prêt à prendre l'air. Clément dans une tenue plus ou moins adaptée à une mort. douloureuse en cas d'échec, s'installe fastidieusement à l'intérieur de son volatile de bois creux. Le terrain de 200 mètres de long sur 25 de large face à éoles est plus ou moins plat et bordé de grands arbres. Des brûleurs à alcool, du bois, de la toile, des bambous et une piste pas si large et pas plus longue encadrée de grands arbres. Inconscience, courage, à ce niveau-là, qui pourrait encore le dire ? Quoi qu'il en soit, Clément est prêt autant qu'il est possible de l'être. Disons qu'Eol est là, les ailes tiennent en place et la structure supporte le poids du petit moteur et du pilote. L'alcool est injecté dans les brûleurs et bientôt le moteur de 20 chevaux entraîne la surprenante hélice en bambou qui donne à l'avion 1, Eol, son air de moulin à vent pour enfants. Sur le bord de la piste, terme à prendre au sens d'un chemin de terre à travers bois, les assistants de Clément sont autant concentrés que prêts à porter secours. à l'ingénieur Temerev. Il est 16h passées de 5 minutes en cet après-midi d'automne et le bruit du petit moteur à alcool résonne désagréablement à travers les arbres. L'air vibre et se déchire alors que la grande hélice prend de la vitesse. C'est un miracle, elle ne casse pas. Rassurée par la solidité de sa construction, Clément met les gaz. Sous la force rageuse du moteur, l'hélice singulière entraîne l'éole qui glisse sur la bague d'air battu. 10 mètres, 20 mètres. Ça vibre, ça couine, ça craque, mais ça marche. Les ailes se tendent et se galbent perceptiblement. 50 mètres, 80, bientôt 100. Soudain, Clément ressent clairement un flottement. Assourdi par le bruit du moteur et incapable de voir l'avant de sa course de par la conception épique de son avion 1, Clément ne voit que ses associés lui faire de grands signes sur le bord de la piste chemin. Devinant rapidement que la lisière de la forêt, en bout de piste, approche dangereusement, Clément coupe le moteur et instantanément, Eole glisse sur la terre battue pour finalement s'arrêter un peu au hasard de sa course. Clément ne le sait pas encore, mais l'avion 1, dit Eole, vient de quitter terre de quelques centimètres sur près de 50 mètres. Ça semble complètement ridicule pour qui vit au XXIe siècle. Cependant, en ce jour du 9 octobre 1890, Ici, en France, plus exactement en Seine-et-Marne, quelque chose vient de changer notre rapport au monde, au temps, à l'espace et à l'humanité. En ce jour du 9 octobre 1890, Clément Hadère, ingénieur de génie, inventeur providentiel et pourvoyeur d'avenir, vient de faire voler pour la première fois dans l'histoire de l'humanité un engin plus lourd que l'air. Alors ? Bien entendu, 50 mètres, c'est peu. On est encore loin de pouvoir manœuvrer l'appareil et encore plus loin de pouvoir voyager avec. Encore plus loin, pas si sûr. Fort de cette révolution aéronautique, Clément va immédiatement construire successivement l'avion 2, dit Zephyr, et l'avion 3, dit Aquilon. Et de 50 mètres, passer à 300 mètres. Certes, il ne volera qu'en ligne plus ou moins droite, sans contrôler sa trajectoire. Mais Clément Hadère vient d'ouvrir le ciel. À qui en rêve ? Un an après Eole, Otto Lilienthal fera voler un planeur en Allemagne. Alberto Santos Dumont, un aviateur brésilien, viendra en France s'inspirer de tout cela pour faire s'envoler son aéroplane motorisé manœuvrable dans le parc de Bagatelle à Paris. On est le 23 octobre 1906. Moins d'un mois plus tard, le 12 novembre 1906, toujours Alberto Santos Dumont réalise le... premier record du monde d'aviation homologué en parcourant 220 mètres à la vitesse considérable de 41,3 km heure, gagnant au passage le déjà prestigieux prix de l'Aéroclub de France. Si je précise homologué, c'est parce que pour être honnête, ce n'est pas Alberto Santos Dumont qui fit voler le premier aéronef motorisé manœuvrable de l'histoire. C'était bel et bien Orville et Wilbur Wright le 17 décembre 1903 à Kitty Hawk, USA. Mais l'information à cette époque-ci n'avait pas encore circulé. Il n'a pas fallu beaucoup plus de dix ans entre le miracle de Clément et l'aviation telle qu'on la connaît encore aujourd'hui. Il est d'ailleurs amusant de penser que c'est probablement l'invention de Clément Hadère la moins efficace qu'il ait jamais mise au point, qui, finalement, aura changé le monde comme nul autre avant elle. Le 3 mai 1925, dans sa région chérie de Haute-Garonne, Clément Hadère, enfant curieux, ingénieur visionnaire et aventurier de l'air, quitte ce monde pour ses cieux qu'il avait tant désiré à l'âge de 84 ans. Non loin de là, sur l'aérodrome de Montaudran, près de Toulouse, un jeune homme, que l'on surnomme l'Archange, monte à bord d'un Breguet 14 pour emporter une lettre, écrite ici, aujourd'hui, et qui arrivera là-bas, demain, peut-être. faisant de ce monde un petit village à ciel ouvert. Se doute-t-il, Jean Mermoz, que non loin de là vient de s'éteindre celui sans qui toute l'aventure de l'aviation n'aurait pu être possible ? En repensant à Clément Hadère et à ses aéronefs, baptisés par lui d'un mot imaginé pour l'occasion, me vient en mémoire ce poème que Guillaume Apollinaire avait écrit pour lui. Ô peuple de Paris, vous, Marseille et Lyon, Vous tous, fleuves français, vous, françaises de montagne, habitants des cités, et vous, gens des campagnes, l'instrument à voler se nomme l'avion. Il fallait un murmure et la voix d'Ariel pour nommer l'instrument qui nous emporte au ciel. La plainte de la brise, un oiseau dans l'espace, et c'est un mot français qui dans nos bouches passe. L'avion. L'avion. Qu'il monte dans les airs, qu'il plane sur les monts, qu'il traverse les mers, qu'il aille regarder le soleil comme Icare, et plus loin. Encore un avion s'égare et trace dans les terres un éternel sillon. Mais gardons-lui le nom suave d'avion, car du magique mot, les cinq lettres habiles eurent cette vertu d'ouvrir les ciels mobiles. Nous sommes Aéronautes depuis 1890, depuis que Clément Hadère, inventeur de génie et fournisseur d'avenir, nous a offert 50 mètres à quelques centimètres du sol. 50 premiers mètres pour rétrécir l'espace et maîtriser le temps. Nos 50 premiers mètres à quelques centimètres du sol pour nous ouvrir les portes de tous les ciels du monde. 50 mètres que nous avons transformés en formidables aventures, nous, mais également tous ceux qui, un jour, ont levé les yeux au ciel en y voyant le futur. 50 mètres et un mot pour définir celui sans qui rien ne serait possible, l'avion. Et finalement, 50 mètres auront suffi pour déposer l'humanité sur la Lune. A peine 50 mètres pour bientôt, peut-être, marcher sur Mars. 50 mètres pour un jour, qui sait, rencontrer d'autres aéronautes des confins de l'univers, qui, eux aussi, auront eu la chance d'avoir leur Clément Hadère, pour leur offrir leurs premiers 50 mètres vers l'infini et l'au-delà.

  • Speaker #1

    On va passer par la terre maintenant. Un petit pas pour le monde. Un grand pas pour le monde.

Description

L’Origine – Une Aéro-Chronique de ONEBIRD
Découvrez la fabuleuse histoire de l'AVION et de so inventeur génial. Un récit immersif entre invention, poésie et exploits méconnus, raconté comme un film pour les oreilles. Laissez-vous emporter là où tout a commencé : dans le ciel de France.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Chers aéronautes, bonjour et bienvenue à bord de cette nouvelle aérochronique de One Bird. Installez-vous confortablement et envolons-nous ensemble pour une toute nouvelle et incroyable aventure des airs. L'immense inventeur et artiste Léonard de Vinci a dit Une fois que vous aurez goûté au vol, vous marcherez à jamais, les yeux tournés vers le ciel, car c'est là que vous êtes allés, et c'est là que toujours, vous désirerez ardemment retourner. Arrêtons-nous un instant sur Léonard pour nous souvenir que c'est ici, en France, plus exactement à Amboise et sous la protection du roi François Ier, qu'il dessina les premiers aéronefs. C'était en 1500 et des nuages, voyez comme le rêve ne date pas d'hier. Néanmoins, il aura fallu attendre longtemps pour que le désir de vol soit assouvi. Plus ou moins 200 ans d'ailleurs. 200 ans pour que deux frères, Joseph Michel et Jacques-Étienne Montgolfier, puissent faire voler les premiers hommes à bord de la célèbre Montgolfière. L'expérience, si elle donna de l'espoir à bien des inventeurs fous, n'ira pas aussi loin que les deux frères l'avaient espéré. Pour que l'incroyable aventure de l'aviation soit bel et bien lancée, il faudra patienter encore un peu. Le 2 avril 1841, l'archange n'est pas encore de ce monde. Cependant, une personne qui lui sera d'une importance capitale, à lui comme à tous ceux qui ont à cœur de toucher les nuages, est sur le point de découvrir notre planète dans un petit village de Haute-Garonne. A l'instar de Jean Mermoz, rien ne prédisposait ce nouveau personnage à son improbable destin qui, à bien des égards, changera le monde. Au sud-ouest de Toulouse, En bord de Garonne, entourée de charmants petits lacs et de prairies délicieuses, est une petite bourgade du nom de Muray. Comme tous les petits villages français, en son centre trône une élégante église, l'église Saint-Jacques. Non loin de là, les aléniels, au milieu desquels domine la statue du célèbre général, sont bordés de fiers platanes. Sous la fraîcheur des grands arbres, résonnent des conversations à l'accent chantant, suivi de rires sincères, suivi... d'autres conversations encore plus animées. En descendant vers la Garonne, aux 19 rues Sabatières, la maison du menuisier est étonnamment silencieuse. Dans la fraîcheur de ce début de printemps, les volets sont entre-ouverts et la porte de l'atelier est fermée. À l'étage, le plancher craque sous les pas impatients de François qui tourne comme une horloge devant la porte de sa chambre. À l'intérieur de cette dernière, Antoinette, sa femme, n'en peut plus de cette grossesse. et brûle de rencontrer son enfant. Après moultes allers-retours sur le plancher grinçant, après mille inspirations et expirations pour calmer le calvaire de la douleur, après bien des inquiétudes et des espoirs, un cri se fait entendre dans les petites rues du petit village de Haute-Garole. C'est un garçon et ses parents l'appelleront Clément. La vie du petit Clément est belle. Fils unique, il a toute l'attention et l'amour de ses parents qui le chérissent autant que les parents peuvent chérir leurs enfants. Clément va à l'école du village, une petite école de briquettes adossée à la mai. Après une journée studieuse, Clément va jouer à faire des ricochets dans la Garonne avant de rentrer. Des journées de classe à la construction de cabanes dans les bois, Clément a la vie dont rêvent tous les enfants sous le bienveillant soleil du sud-ouest. Quand il n'est pas dans les jambes de ses parents, Clément aime rendre visite à son grand-père paternel, ce dernier ayant servi dans les armées de Napoléon Ier. a des millions d'histoires à raconter à son petit-fils. Outre sa fascination pour ce personnage héroïque, Clément adore se rendre chez son grand-père, car ce dernier habite dans un moulin. Clément est plus que fasciné par ce gigantesque mécanisme, les rouages, les poulies, le mouvement si précis. Clément regarde tout ceci comme une œuvre d'art, quand d'autres n'y voient qu'un outil. Père menuisier, le moulin de son grand-père et son arrière-grand-père, lui aussi menuisier et architecte, Clément a de quoi être inspiré et stimulé. Très tôt, il se nourrit de tout ce qu'il veut. Plus que de la curiosité et de l'observation, Clément voudrait pouvoir répliquer tout ce qui pour lui fonctionne et améliorer tout ce qui, selon lui, devrait l'être. À chacune de ses balades dans les campagnes autour de son village, Clément observe et prend des notes. Très tôt, il compile des idées. théorie sur des feuilles de papier. Des milliers d'idées qui, pour la plupart, ne resteront que des traits de charbon sur quelques feuilles blanches. Mais son cerveau travaille. Il travaille peut-être même un peu trop vite pour un gamin d'à peine 10 ans. Des multitudes de petits croquis que Clément griffonne sur ses cahiers naissent des machines et des pièces de menuiserie entre art et mécanique des plus surprenantes. Plus Clément expérimente, plus son esprit s'affine. Lui qui dessinait bien devient un véritable artiste s'essayant à la peinture avec un véritable talent. Toutes ces expérimentations l'incitent à regarder le monde comme seuls les inventeurs les plus extravagants le regardent. Très vite, le voilà en admiration. devant les insectes et autres animaux volants. Crayons et pinceaux à la main, Clément imagine mille façons de s'envoler. Il se dit Comme Léonard de Vinci et les frères Montgolfier avant lui, Clément se met à rêver du ciel. Alors il croque, imagine, observe tout ce qui vole des hannetons aux oiseaux. Il se nourrit de tout ce qui pourra bien l'aider. à comprendre le pourquoi du comment et il analyse tout ce qui pourra l'aider à atteindre les nuages. Ainsi, en 1855, Clément décide de s'envoler. Il a à peine 14 ans et toute une vie devant lui. Mais à cet âge-là, on est pressé, exalté et surconfiant. Ses parents, ayant essayé à plusieurs reprises de le convaincre de ne pas s'exposer physiquement à des expérimentations immatures et pour le moins très optimistes, Clément décide de se lancer seul. et dans la clandestinité la plus totale, dans une expérience de vol. Clément se dit À ce stade, et sur le fond, allez, on est d'accord. Sur la forme par contre, bon, jugeons plutôt. Il s'agit pour lui de se confectionner un costume d'oiseau, du moins un costume représentant une interprétation de l'oiseau. et de se lancer du haut d'une colline. Le costume en lui-même se compose d'un pantalon avec une ceinture censée accueillir une sorte de grande cape fabriquée d'une veste large et de lustrine. De chaque côté, d'amples manches sont attachées à des bâtons, un pour chaque main. L'idée étant d'avoir deux espèces de grandes ailes actionnées par les bras du pilote. C'est là plus que de l'optimisme et on est bien au-delà de la confiance. Alors, de nuit. sans bruit. L'ombre de cet étrange oiseau nocturne se faufile à travers champs et bosquets. Au-dessus de la Garonne, en haut d'une sombre colline, une sorte d'étrange écureuil volant déploie ses ailes. Clément est prêt. Là-bas, au pied de la pente, brille sous la lune comme le paisible serpent d'argent la Garonne. Les herbes hautes comme une mer pétrole d'Odeline sous une brise qui ne demande qu'à forcer. L'étrange volatile inspire de tout son corps pour se donner du courage, comme pour rappeler à lui Zéphir et son souffle divin. En cette nuit remplie d'espoir, Zéphir est au rendez-vous. Une onde sombre court sur le flanc végétal de la petite colline. Clément, sûr de lui, c'est le moment. Un pas puis un autre, et c'est le poids de son corps qui l'entraîne dans la porte. Encore quelques souliers et l'onde invisible rencontrera le jeune pilote. Les ailes surprenantes se gonflent. tout à coup dans le dos de Clément, qui commence à ressentir comme résistance. Clément se dit « J'en étais sûr ! » Mais la lame d'air traverse l'aéronef singulier. Elle s'engouffre avec violence dans l'étrange assemblage. Dans la nuit noire et lugubre, Clément sent comme une main ferme qui le saisit par le dos et tire en arc-en-ciel. Un instant plus tard, au sol, amalgamé à sa construction de fortune, désorienté et couvert d'herbe, Clément croit sentir une présence. Le petit ingénieur redevient soudainement un enfant et fuit le monstre de son imagination en courant à travers bois pour retrouver rapidement la protection du foyer familial. La vie d'inventeur rêveur est parfois mouvementée. L'année d'après, Clément a 15 ans. Dans son école toulousaine, ses professeurs louent ses capacités en mathématiques et en dessin. Cette année-là, il obtient son baccalauréat. A cette époque, un baccalauréat est une valeur sûre permettant d'accéder aux meilleurs emplois. Me Quand son école ouvre une classe de formation au métier de l'ingénierie, Clément y est poussé par ses professeurs qui voient en lui un espoir réel. Quelle clairvoyance ! En 1861, Clément est diplômé ingénieur. Légitimé par ce nouveau statut et volontaire à changer le monde, Clément traverse la vie comme il l'a toujours fait. Un calepin et un crayon à la main à l'affût de tout ce qui pourrait être changé, transformé, amélioré. En 1867, le voilà à Paris pour une exposition universelle. Lui qui avait expérimenté et fabriqué de nombreuses machines durant sa jeunesse, tombe sur un stand qui lui rappelle de beaux souvenirs. Sur ce stand, il reconnaît l'adrésienne de son enfance, ce véhicule sans pédale, mi-vélo, mi-trottinette. Mais celle-ci est équipée de grandes roues en métal et d'une sorte de mécanisme actionné par les pieds du pilote. Son nom est Vélocipeg. Immédiatement après avoir observé et essayé l'engin, Clément note une faiblesse majeure au Vélocipeg. Son manque de confort et de discrétion dû à la qualité exclusive métallique de ses roues. Clément note dans son carnet. Puis, nous recouvrions les ronds avec du caoutchouc. Par ailleurs, le vélocipède est bien trop lourd pour être agréable à la manœuvre. Je dois travailler la suite. Aussitôt écrit, aussitôt dessiné, aussitôt fait. En 1867, les premiers vélocipèdes à roues de caoutchouc sortent sous le nom de Véloz-Caoutchouc. Mieux encore, et pour la première fois de l'histoire de la bicyclette, comme on l'appellera bientôt, le cadre est composé de tubules en creuse soudées entre elles afin d'alléger le tout. Clément ne le sait pas et ne le saura peut-être jamais, mais le Tour de France et le Bélib lui doivent leur existence. Après la guerre franco-prussienne de 1870, durant laquelle il a vainement tenté de convaincre les états-majors français de miser sur le ciel pour observer l'ennemi, Clément se consacre à une carrière dans les chemins de fer. Durant cette période, l'ingénieur développera des processus pratiques et fiables dédiés à la construction des ponts ferroviaires. En gagnant du temps, et de la fiabilité dans la construction de ces ouvrages, l'extension des chemins de fer s'envoie améliorer de manière particulièrement significative. Mieux encore, observant le labeur des ouvriers sur les chantiers de postes de rails, Clément Griffon. C'est l'encrime sur des bêtes. Il faut avoir un moyen d'améliorer leurs conditions de travail, tout en gagnant en productivité. Je dois automatiser la pose des rails. Aussitôt dit, aussitôt fait. Quelques traits de crayon plus tard. Et c'est une machine à poser les rails qui sort de l'esprit de Clément. L'industrie du rail s'en voit révolutionner et les congés payés aussi. Et puisqu'on est dans le rail, il ne faut pas plus de temps que cela pour que Clément observe que, grâce au rail, on peut faire transiter de très grosses charges. Clément écrit. Les rails n'étaient pas posés pour faire circuler les véhicules, mais ils sont intégrés au véhicule même. Et alors, allez partout ! Dès lors, rien ne compte plus pour Clément que de réaliser cette vision. Ainsi, Clément dessine de grandes roues capables de faire circuler cette bande de rails qui va relier toutes les autres roues du véhicule entre elles. Par conséquent, posées uniformément sur le sol, les tramways et autres wagons en tout genre pourront circuler sur tout type de terrain. Clément construit rapidement les premiers prototypes et les expose au public à Paris. Son idée est de proposer le concept aux compagnies de transport, en particulier dans les Landes, qui sont encore mal desservies et uniquement par des chemins sablonneux. Mais aussi de le vendre aux militaires, qui pourraient en équiper leurs attelages de campagne, par exemple. Malheureusement, personne à cette époque ne sut voir aussi loin que Clément, qui lui venait d'inventer. Les chenilles. Heureusement, le monde est vaste et bien des choses restent à améliorer et inventer. En parallèle de cette frénésie de recherches et développements divers, Clément ne perd pas de vue le sien. Avec ses fonds propres, il continue à chercher un moyen de faire voler l'homme plus efficacement qu'en ballon. Va naître de son cerveau une armature de 9 mètres d'envergure pour seulement 24 kg, faite de bois et de plumes et capable d'être endossée par un pilote, qui en bougeraient les ailes à la force des bras. Bon, rapidement, Clément s'aperçoit que nul homme ne peut être assez fort pour actionner le dispositif, aussi sera-t-il plus raisonnable de l'équiper d'un moteur. Bien du travail reste donc à accomplir. Et pour cela, eh bien pour cela, il faut de l'argent. Toujours en quête du futur par l'amélioration de l'existant, Clément qui était aussi bon ingénieur qu'électricien de génie, décide de se pencher sur cette invention. toute récente que l'on appelle le téléphone. En se saisissant de ce qui existe déjà, Clément rend le téléphone plus polyvalent en l'équipant de charbon pour transformer le son en électricité, ce qui va permettre de pouvoir communiquer sur de très grandes distances. En s'associant avec quelques autres inventeurs de génie, Clément va construire les premiers postes de téléphonie mobile. Alors, soyons clairs, par téléphonie mobile, on entend un... Un téléphone équipé d'une manivelle permettant de recharger une batterie, le tout à brancher sur des câbles préalablement déployés entre deux points distants. Rien à voir avec nos smartphones actuels, mais sans cette avancée remarquable, la firme à la pomme n'en serait pas là où elle en est aujourd'hui. Quant à l'armée de cette époque, elle sera ravie de cette invention qui lui fera économiser bien du temps et des messagers. Toujours en quête de perfectionnement, Clément pense à équiper le fameux téléphone de deux choses que nous connaissons tous. Une sonnerie électromagnétique et un accessoire regroupant l'émetteur et le récepteur que l'on appellera le combiné. Autant dire qu'une fois encore, Clément allait très durablement changer notre société. De quoi assurer sur le long terme ses besoins financiers. Pour en finir avec sa période téléphonique... Clément, toujours en avance sur son temps, imagina la possibilité de créer des récepteurs à disposer dans les salles de concerts et autres opéras, afin de transporter le spectacle directement chez les particuliers grâce au téléphone. Se doutit-il que cette idée serait reprise, retravaillée et développée jusqu'à nous donner la radio et plus tard la fibre optique et la télévision en streaming ? À présent à l'abri du besoin et décoré de la Légion d'honneur, Clément continue à... inventer l'avenir. Il va améliorer son travail sur le téléphone, inventer l'hydroglisseur, voir grâce à son canot à bâtins pneumatiques les crânoplanes avant l'heure. Pour ceux qui se poseraient la question, les crânoplanes est une curiosité aéronautique. En l'espèce, un hybride entre un avion et un bateau dont le but était de voler très rapidement à peine au-dessus des flots grâce à l'effet de sol. L'effet de sol est une sorte de coussin d'air formé entre la machine et l'eau. Une technologie complexe dont le développement a été mis en suspens à la fin de la guerre froide. Mais qui sait, si comme Clément vous avez un carnet et un crayon, il y a peut-être quelque chose à améliorer. Clément, lui, n'a pas attendu la guerre froide pour améliorer de manière plus significative la télégraphie sous-marine. Il a par ailleurs travaillé sur le concept de torpille à usage militaire et des notes ont été retrouvées qui démontrent qu'il avait déjà dans la tête bien des idées autour du moteur à réaction. Mais, et c'est là que tout va réellement changer, grâce à ses nouvelles et très confortables ressources financières, il va pouvoir se consacrer à cette invention qu'il n'arrive pas à réaliser, l'aéroplane. Son aile ultra légère n'a pas fonctionné. Son esprit vif et créatif, c'est que la première chose à faire est d'inventer le bon moteur. Il écrit dans son calepin. Les moteurs existants sont trop massifs, trop courts. L'ennemi du vol, c'est le poids. J'ai déjà allégé l'extraire, je dois alléger le moteur et le rendre plus puissant. Oui, faisons ça, rendons-le plus puissant. Alors Clément taille un crayon. Délicatement, la mine se pose sur une feuille de papier immaculée pour finalement commencer sa danse. va naître de son cerveau brillant un moteur à vapeur aux performances surprenantes. Quand les frères Wright, 13 ans plus tard, voleront à leur tour, leur aéroplane sera équipée d'un moteur de 12 chevaux pesant 75 kg. En 1890, Clément va développer et construire un moteur de 20 chevaux pour seulement 51 kg. Et les gens de l'air savent très bien ce que change un kilo quand on cherche à se rapprocher des nuages. Cette nouvelle passion pour la mécanique va d'ailleurs mener Clément à conceptualiser et fabriquer en 1903 une architecture de moteur bien connue des mécaniciens, des amateurs comme professionnels, des aviateurs, des automobilistes ou encore des marins. Le très fameux V8. Parce que oui, souvenons-nous que si le premier moteur en V, un V2 pour deux cylindres, fut inventé par certains Daimler en Allemagne, où le premier moteur V8 fut inventé par Clément. ici, en France. Ce dernier l'installa sur un châssis pour participer à une course entre Paris et Madrid en 1903. Pour l'anecdote, la première voiture de série à être équipée d'un moteur V8 fut, là encore, française, une De Dion Bouton V8. En ce début 1900, le V8 de Dion Bouton a une cylindrée de plus de 6 litres pour une puissance ébouriffante de 35 chevaux. Il faudra attendre une demi-décennie de plus pour que les Américains s'attachent amoureusement à ce moteur légendaire, avec le succès qu'on lui connaît. En 1890, le moteur le plus léger possible est prêt. Oublié les oiseaux, Clément décide de se fier à l'aérodynamisme des chauves-sous. Ayant longuement observé ce petit mammifère, Clément imagine un complexe assemblage afin d'assurer une géométrie variable aux ailes de son aéroplane qu'il va nommer l'avion 1 EOL. Dans le nez d'EOL vient se loger le moteur. à vapeur au bout duquel est installée une hélice de 4 pales de 2,6 mètres de diamètre. Il faut voir cet engin pour comprendre que si, par miracle, il s'envole, il ne sera pas manœuvrable. C'est effectivement une sorte de chauve-souris faite de grosses toiles de soie beige. Sa grande hélice de bambou semble vouloir se briser avant même le moteur mis en route. La mécanique, quant à elle, est alimentée par des brûleurs à alcool. Bois, toile, bambou, alcool, il fallait du courage. Et du courage, Clément en a. On est le 9 octobre 1890 au château de Madame Perrer à Gretz-Arminvilliers en Seine-et-Marne. Eole est enfin prêt à prendre l'air. Clément dans une tenue plus ou moins adaptée à une mort. douloureuse en cas d'échec, s'installe fastidieusement à l'intérieur de son volatile de bois creux. Le terrain de 200 mètres de long sur 25 de large face à éoles est plus ou moins plat et bordé de grands arbres. Des brûleurs à alcool, du bois, de la toile, des bambous et une piste pas si large et pas plus longue encadrée de grands arbres. Inconscience, courage, à ce niveau-là, qui pourrait encore le dire ? Quoi qu'il en soit, Clément est prêt autant qu'il est possible de l'être. Disons qu'Eol est là, les ailes tiennent en place et la structure supporte le poids du petit moteur et du pilote. L'alcool est injecté dans les brûleurs et bientôt le moteur de 20 chevaux entraîne la surprenante hélice en bambou qui donne à l'avion 1, Eol, son air de moulin à vent pour enfants. Sur le bord de la piste, terme à prendre au sens d'un chemin de terre à travers bois, les assistants de Clément sont autant concentrés que prêts à porter secours. à l'ingénieur Temerev. Il est 16h passées de 5 minutes en cet après-midi d'automne et le bruit du petit moteur à alcool résonne désagréablement à travers les arbres. L'air vibre et se déchire alors que la grande hélice prend de la vitesse. C'est un miracle, elle ne casse pas. Rassurée par la solidité de sa construction, Clément met les gaz. Sous la force rageuse du moteur, l'hélice singulière entraîne l'éole qui glisse sur la bague d'air battu. 10 mètres, 20 mètres. Ça vibre, ça couine, ça craque, mais ça marche. Les ailes se tendent et se galbent perceptiblement. 50 mètres, 80, bientôt 100. Soudain, Clément ressent clairement un flottement. Assourdi par le bruit du moteur et incapable de voir l'avant de sa course de par la conception épique de son avion 1, Clément ne voit que ses associés lui faire de grands signes sur le bord de la piste chemin. Devinant rapidement que la lisière de la forêt, en bout de piste, approche dangereusement, Clément coupe le moteur et instantanément, Eole glisse sur la terre battue pour finalement s'arrêter un peu au hasard de sa course. Clément ne le sait pas encore, mais l'avion 1, dit Eole, vient de quitter terre de quelques centimètres sur près de 50 mètres. Ça semble complètement ridicule pour qui vit au XXIe siècle. Cependant, en ce jour du 9 octobre 1890, Ici, en France, plus exactement en Seine-et-Marne, quelque chose vient de changer notre rapport au monde, au temps, à l'espace et à l'humanité. En ce jour du 9 octobre 1890, Clément Hadère, ingénieur de génie, inventeur providentiel et pourvoyeur d'avenir, vient de faire voler pour la première fois dans l'histoire de l'humanité un engin plus lourd que l'air. Alors ? Bien entendu, 50 mètres, c'est peu. On est encore loin de pouvoir manœuvrer l'appareil et encore plus loin de pouvoir voyager avec. Encore plus loin, pas si sûr. Fort de cette révolution aéronautique, Clément va immédiatement construire successivement l'avion 2, dit Zephyr, et l'avion 3, dit Aquilon. Et de 50 mètres, passer à 300 mètres. Certes, il ne volera qu'en ligne plus ou moins droite, sans contrôler sa trajectoire. Mais Clément Hadère vient d'ouvrir le ciel. À qui en rêve ? Un an après Eole, Otto Lilienthal fera voler un planeur en Allemagne. Alberto Santos Dumont, un aviateur brésilien, viendra en France s'inspirer de tout cela pour faire s'envoler son aéroplane motorisé manœuvrable dans le parc de Bagatelle à Paris. On est le 23 octobre 1906. Moins d'un mois plus tard, le 12 novembre 1906, toujours Alberto Santos Dumont réalise le... premier record du monde d'aviation homologué en parcourant 220 mètres à la vitesse considérable de 41,3 km heure, gagnant au passage le déjà prestigieux prix de l'Aéroclub de France. Si je précise homologué, c'est parce que pour être honnête, ce n'est pas Alberto Santos Dumont qui fit voler le premier aéronef motorisé manœuvrable de l'histoire. C'était bel et bien Orville et Wilbur Wright le 17 décembre 1903 à Kitty Hawk, USA. Mais l'information à cette époque-ci n'avait pas encore circulé. Il n'a pas fallu beaucoup plus de dix ans entre le miracle de Clément et l'aviation telle qu'on la connaît encore aujourd'hui. Il est d'ailleurs amusant de penser que c'est probablement l'invention de Clément Hadère la moins efficace qu'il ait jamais mise au point, qui, finalement, aura changé le monde comme nul autre avant elle. Le 3 mai 1925, dans sa région chérie de Haute-Garonne, Clément Hadère, enfant curieux, ingénieur visionnaire et aventurier de l'air, quitte ce monde pour ses cieux qu'il avait tant désiré à l'âge de 84 ans. Non loin de là, sur l'aérodrome de Montaudran, près de Toulouse, un jeune homme, que l'on surnomme l'Archange, monte à bord d'un Breguet 14 pour emporter une lettre, écrite ici, aujourd'hui, et qui arrivera là-bas, demain, peut-être. faisant de ce monde un petit village à ciel ouvert. Se doute-t-il, Jean Mermoz, que non loin de là vient de s'éteindre celui sans qui toute l'aventure de l'aviation n'aurait pu être possible ? En repensant à Clément Hadère et à ses aéronefs, baptisés par lui d'un mot imaginé pour l'occasion, me vient en mémoire ce poème que Guillaume Apollinaire avait écrit pour lui. Ô peuple de Paris, vous, Marseille et Lyon, Vous tous, fleuves français, vous, françaises de montagne, habitants des cités, et vous, gens des campagnes, l'instrument à voler se nomme l'avion. Il fallait un murmure et la voix d'Ariel pour nommer l'instrument qui nous emporte au ciel. La plainte de la brise, un oiseau dans l'espace, et c'est un mot français qui dans nos bouches passe. L'avion. L'avion. Qu'il monte dans les airs, qu'il plane sur les monts, qu'il traverse les mers, qu'il aille regarder le soleil comme Icare, et plus loin. Encore un avion s'égare et trace dans les terres un éternel sillon. Mais gardons-lui le nom suave d'avion, car du magique mot, les cinq lettres habiles eurent cette vertu d'ouvrir les ciels mobiles. Nous sommes Aéronautes depuis 1890, depuis que Clément Hadère, inventeur de génie et fournisseur d'avenir, nous a offert 50 mètres à quelques centimètres du sol. 50 premiers mètres pour rétrécir l'espace et maîtriser le temps. Nos 50 premiers mètres à quelques centimètres du sol pour nous ouvrir les portes de tous les ciels du monde. 50 mètres que nous avons transformés en formidables aventures, nous, mais également tous ceux qui, un jour, ont levé les yeux au ciel en y voyant le futur. 50 mètres et un mot pour définir celui sans qui rien ne serait possible, l'avion. Et finalement, 50 mètres auront suffi pour déposer l'humanité sur la Lune. A peine 50 mètres pour bientôt, peut-être, marcher sur Mars. 50 mètres pour un jour, qui sait, rencontrer d'autres aéronautes des confins de l'univers, qui, eux aussi, auront eu la chance d'avoir leur Clément Hadère, pour leur offrir leurs premiers 50 mètres vers l'infini et l'au-delà.

  • Speaker #1

    On va passer par la terre maintenant. Un petit pas pour le monde. Un grand pas pour le monde.

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