Speaker #0Vous écoutez le podcast fiction des enfants de Gaïa. Au commencement était Gaïa, mère créatrice de la terre et des cieux, origine de toute vie. Elle façonna d'abord les douze divinités, êtres majestueux dotés de pouvoirs extraordinaires. Fartent ensuite les humains, fragiles et modestes, mais pleins de potentiel. Les premiers n'acceptèrent pas les seconds. Une guerre fratricide menaça d'anéantir tous les enfants de Gaïa. Gaïa entra alors dans une colère folle. et exila les douze divinités loin de la terre qui fut confiée aux humains. Où furent-elles exilées ? Jusqu'à quand ? Pourront-elles ou voudront-elles revenir un jour sur terre ? Ceci est le témoignage de Ba, treizième né de Gaïa, douzième divinité. Traumasvertissement, violence, sang, meurtre. Qu'est-ce que tu fais là, toi ? Tu veux mourir ? « Ouais, c'est ça. Tiens-toi bien loin de moi. On sait jamais. Déjà, comment t'es arrivé là ? Ça n'a pas d'importance. » « Bien sûr que si, ça en a. Et puis d'abord, tu veux quoi ? Que je te raconte ma version de l'histoire ? » « Pfff. Et puis quoi encore ? Tout le monde la connaît, non ? Tu crois que je sais pas comment vous m'appelez, vous autres ? » « Bah, la vilaine. La fausse divinité. La cruelle manipulatrice. » La fratricide, sororicide, le parasite. Te fatigue pas à nier. Et t'sais quoi ? Vous avez raison. Voilà. T'es content ? Quoi, ma sœur ? Ma sœur est morte. À cause de moi. Ok ? J'ai accepté, avalé et digéré ça. Mais sache un truc. Guéra, elle était tout pour moi. Elle était pas comme vous. Elle m'aimait. Et pas juste comme une sœur ou un frère. Elle m'aimait pour moi. Nos âmes étaient connectées. Encore plus que nous, Rézoé. Tu veux que je te parle d'elle ? Mais t'es sûre ? Bon, ok. Guerra, elle était puissante, rapide, sage aussi, bienveillante avec tout le monde. Elle était métamorphe. Elle pouvait se transformer à volonté en n'importe quoi, en n'importe qui. Mais quelle que soit l'enveloppe, elle restait la même. Douce, gentille. généreuse. On était inséparables. On faisait tout ensemble. On se lâchait pas d'une semelle. Guéra et Ba, Ba et Guéra, Ba-Guéra. On était une, en fait. Et puis, les humains sont arrivés et ils ont tout gâché. Parce que c'est des humains et qu'ils savent faire que ça. Gâcher ce qui existe depuis toujours. Gâcher ce qui est beau. Gâcher tout. Mais Guéra, elle est tombée amoureuse de... Comment elle s'appelait déjà ? Un truc en N. Violaine ? Marilène ? Germaine, voilà, c'est ça. Tu te souviens de Germaine ? Quelle horreur. Et c'était pareil avec toutes celles et ceux qui sont arrivées après. Je sais toujours pas pourquoi. Honnêtement, elle leur trouvait quoi de plus que nous ? Quoi de plus que moi ? Je comprends pas. Bref, elle aimait les humains, pas moi. Elle passait de plus en plus de temps avec les humains, pas moi. Et donc, on était de moins en moins ensemble. Et ça, c'était que le début. De la jalousie ? Bah oui, ça me tue de le dire, mais oui. J'éprouvais surtout de la haine pour les humains, mais aussi de la jalousie. Guéra a été curieuse. Elle me racontait le soir quand on se retrouvait. Elle voulait tout savoir des humains. Elle les trouvait fascinants. Me demande pas pourquoi, je t'ai dit, je comprends pas ce qu'elle leur trouvait. Elle voulait les intégrer, faire en sorte qu'ils n'aient pas peur de nous. Qu'ils nous aiment eux aussi. Qu'ils nous fassent confiance, tout ça, tout ça. Elle a même inventé un jeu pour eux. Le jeu des vérités. Tu connais pas ? C'est un jeu où on trace un cercle sur le sol, et on y entre, chacun notre tour. Et une fois qu'on est dans le cercle, on doit révéler une vérité sur nous-mêmes. Si ce qu'on dit est vrai, le cercle s'illumine et rien ne se passe. Sinon, on est puni. Guéra était trop gentil. Ses punitions, c'était des trucs mignons, comme se faire décoiffer ou chatouiller. Les miennes étaient plus... définitives. Les humains n'aimaient pas jouer avec moi. Mais en fait, ils avaient qu'à dire la vérité. Il leur serait rien arrivé. Je te dis, je les comprends pas. Guerra, elle les aimait tellement qu'elle a proposé d'adopter l'un des leurs. Tu te rends compte ? D'adopter un humain. Il s'appelait Paul. T'as déjà entendu un nom plus ridicule ? Paul. Pfff, bref. Elle voulait qu'on l'élève ensemble. J'ai dit non, évidemment. Ça va pas la tête ? Moi, élever un humain ? J'ai mis mon veto. Et là, j'ai vu la cassure dans ses yeux. La déception. J'ai senti que ce qui nous unissait était en train de se fêler. Que quoi qu'il arrive, ça serait entre nous, cette blessure, cette cicatrice. Et ça, c'était une raison supplémentaire de haïr les humains. C'est Coco qui l'a récupéré. Le Paul. Coco, malgré tout ce qui s'est passé, il a toujours pas compris. Bon, ça s'écrit pas avec un C. Trop bon. Bref, t'as compris. Paul était... influençable. C'était trop facile de lui faire faire n'importe quoi. Il est tombé amoureux de cette autre humaine, celle qui dansait avec Abby. C'était comment déjà son nom ? Un truc en A. Marina, Maria... Ouais, c'est ça, Maya. Maya, elle n'était pas intéressée. Mais Paul, eh ben, il n'a pas compris. Il la regardait danser et il était sûr que c'était pour lui qu'elle dansait. Parce que, pour quelle autre raison, pour quels autres yeux elle aurait pu danser ? Bah ouais. Paul, c'était un humain, donc une créature stupide, égocentrique et narcissique. Guerra a essayé de lui expliquer que l'amour, ça se faisait à deux, au moins, et que c'était pas possible autrement. La patience qu'elle avait. Paul a pas écouté. Il a violé Maya. J'ai voulu le tuer pour ça. Même si Maya était inhumaine. Mais Guerra a dit « Non, bah, ça suffit. La violence n'est pas la réponse à tout. » Encore une fois, j'ai pas compris pourquoi. Mais j'ai obéi. Et la fissure entre nous s'est élargie. Encore. Je l'ai pas tué, Paul. Mais à la réflexion, il méritait pas de mourir. Il méritait pire. Alors je suis allée le voir. Et je lui ai parlé de son fils. Celui qu'Abi gardait. Quoi que j'ai jamais su son nom. Et je t'arrête tout de suite, je veux pas le savoir. Je savais qu'Abi ne rendrait pas l'enfant, qu'elle trouverait une excuse. Et j'avoue, lui dire que son fils était mort, j'aurais pas fait mieux moi-même. Et j'avoue, ça m'a fait du bien de voir la réaction de ce pauvre type. De le voir souffrir, de le voir pleurer, de le voir s'arracher les cheveux. Bien sûr, le petit morveux est allé se plaindre à son papa, à Coco. Et Coco, il est allé voir Abby pour comprendre pourquoi son fiston chéri pleurait. Il est arrivé avec ses gros muscles et ses grands airs. Mais Abby, elle s'est pas démontée. Je l'admire pour ça. Abby, elle a peur de rien. Elle lui a expliqué que son fils adoptif, c'était un gros connard. Coco, il n'a pas voulu la croire. Il protégeait les siens. Il protégeait son fils. Mais son fils, c'était pas son fils, bordel ! C'était un humain. Et en plus, cet humain parasite, il ramenait déjà ses potes humains fouineurs dans les pattes de sa famille adoptive. Si ça, c'était pas un signe, je comprends pas. Quand Coco a décidé de fuir, Paul est resté en arrière pour soi-disant retenir les autres. Tu parles. Il a fait ça au début. Enfin, avant que j'intervienne. Mais c'était trop facile. Je n'ai eu qu'à lui dire que Abby avait menti. Que son fils était vivant. Et que Coco savait. Que Coco avait vu son fils. Qu'il n'avait rien fait. Et quand Paul m'a demandé pourquoi, j'ai haussé les épaules. Je voulais le laisser tirer ses propres conclusions. mais il était si lent alors peut-être que j'ai suggéré que peut-être coco ne lui faisait pas assez confiance pour élever un petit que peut-être il le trouvait trop faible trop génial trop pathétique et que tout ça expliquerait pourquoi là maintenant il l'avait laissé derrière que c'était finalement la solution de facilité pour se débarrasser de lui paul il est devenu fou de rage les humains sont tellement prévisibles Et c'était parti pour les grands discours. Mon propre père m'a trahi, blablabla. On peut faire confiance à personne, blablabla. Alors je lui ai dit qu'il n'avait qu'à faire pareil. Qu'il n'avait qu'à enlever les petites cocos pour lui montrer. Comme ça, il saurait, il comprendrait. Paul a rameuté ses potes humains et il leur a dit où étaient partis ses parents. Ils y sont allés, ils ont camouflé leur odeur et ils ont commencé à enlever les plus petits. Honnêtement ? Je pensais que ça prendrait plus de temps, mais Coco a vite fait appel à moi. Et moi, comment je pouvais refuser d'aider mon propre frère ? Alors, je lui ai dit où se cachaient les humains. Je lui ai aussi dit où ils avaient emmené ces petits. Est-ce que j'ai prévenu les humains aussi ? Impossible. Après tout, les humains étaient en danger. Coco en colère, c'est quelque chose. Mais je pensais qu'ils s'enfuiraient. Je pensais vraiment qu'ils s'enfuiraient. Parce que les humains, ils sont lâches. d'habitude. Profitez de l'absence de coco pour attaquer le clan de coco. Cette idée, ils l'ont eue tout seul. Comme quoi, et moi, je dois dire que ça m'allait bien. Le clan se défendrait. Il fracasserait quelques crânes humains. Coco serait encore plus en colère. Il reviendrait à toute vitesse. Il fracasserait ce qui resterait. Et voilà. J'aurais atteint mon objectif. Moins d'humains. J'ai peut-être demandé à Morgane de s'assurer que les humains ne réfléchissent pas trop avant d'agir. Peut-être. Mais bon, c'était il y a trop longtemps. Et puis on a raconté tellement de choses, et tellement de fois. Tout est allé très vite, beaucoup trop vite. Quand ça va si vite, ça devient flou, même pour une divinité. J'ai fait une erreur. Mon erreur, c'est que j'ai pas vu les fusils. Si j'avais su que les humains feraient couler le sang, je serais intervenue, bien sûr. Je suis pas le monstre que tout le monde dit que je suis. Quand je m'en suis rendu compte, j'ai appelé Guerra tout de suite. Mais c'était trop tard. Les humains étaient en route et Coco aussi. Je lui ai tout raconté. Et le regard qu'elle m'a lancé, j'en ai encore des frissons. Elle s'est transformée en panthère des neiges et elle a disparu. Je l'ai rappelé. J'ai crié son nom. De toutes mes forces, de toute ma voix. Des échos m'ont répondu. Des voix humaines qui reprenaient en cœur. Guerre, guerre. Les abrutis. Je me suis élancée moi aussi. Mais je n'étais pas aussi rapide que Guerra. Et quand je suis arrivée... C'était déjà trop tard. Guerra était prisonnière d'un filet. Les humains la piquaient avec leur lance ridicule. La vue de son sang, ça m'a paralysée. Guerra se défendait même pas. Elle les aimait trop. Elle avait sans doute trop peur de les blesser. Elle leur parlait. Elle essayait de leur expliquer que la violence ne résout rien. Qu'ils pouvaient s'excuser encore et que tout rentrerait dans l'ordre. Qu'elle les protégerait. Les humains l'ont entendu. Mais ils l'ont pas écouté. J'allais intervenir quand le fils de Coco s'est avancé et a demandé aux autres de ranger leurs armes. Ils lui ont obéi. Il s'est approché tout près de Guéra. Il lui a caressé la joue à travers les mailles du filet. J'ai vu les larmes couler sur sa fourrure blanche de diamant. À ce moment-là, j'ai rugi le nom de ma sœur. C'était un avertissement. Pour ma sœur, mais aussi pour cette enfoirée d'humain qui osait la toucher. Pour qui l'autre, ces sales doigts de ma sœur ? Guéra a tourné la tête vers moi et nos regards se sont croisés. ce que j'ai lu dans ses yeux c'était de l'amour pur si pur que j'en ai oublié toute colère paul m'a souri d'un sourire mauvais et avant que j'aie pu faire quoi que ce soit il a enfoncé sa lame dans la gorge blanche de ma soeur et tout est devenu rouge un hurlement terrible a retenti et a fait trembler le sol j'ai cru que c'était le mien mais en fait c'était le mien et celui de coco ce qui est arrivé après c'était la suite logique j'ai bondi j'ai décapité l'humain Ou peut-être que c'est Coco. Je me souviens mal. Tout est flou. Et puis, ça a été le tour des autres. Jusqu'à ce qu'il n'y ait plus personne. En fait, j'ai pas tué tant d'humains que ça, moi. J'étais trop occupée à essayer de sauver Guerra. Sa blessure était grave, mais une divinité pouvait survivre à pire si elle le voulait. Et c'était ça le problème. Guerra, elle ne voulait plus. Je crois que... Je crois qu'elle avait été trop déçue. Par tout monde. J'avais jamais vu Coco comme ça. Il était fou de douleur, de haine, de rage. Il pleurait les siens et moi, moi je pleurais guéra. C'est là que Jabda est arrivé. Et Coco, j'ai même pas eu le temps de lui dire que ces petits étaient sains et saufs, que je les avais tous mis en sécurité. De toute façon, il m'aurait pas entendu, il m'aurait pas écouté. Mais bien sûr que c'est vrai. Je t'ai dit, je ne suis pas le monstre que vous voulez tous que je sois. Ces petits étaient en sécurité quand Jabda nous a emmenés. Mais ça fait si longtemps maintenant. Peut-être que les humains les ont retrouvés. Sûrement. De toute façon, tout ça n'a aucune importance maintenant. Gera est morte, les humains l'ont tuée. Mais c'est ma faute. Je le sais. Si j'avais pas autant haï les humains, alors peut-être, peut-être que Gera serait toujours en vie. Peut-être que ma sœur serait toujours là. Et le fait que je haïsse les humains encore plus maintenant, alors que je sais que ma haine... et la cause de la mort de Guéra. Ça, ça me tue. Et ça me donne encore plus envie d'exterminer tous les humains. La mort de Guéra, ça m'a changé. Littéralement. Quand elle est morte, je suis devenue la douzième. Je suis devenue la dernière divinité. J'ai récupéré les pouvoirs et la force de ma sœur, mais j'en voulais pas. Je n'en veux pas. Je veux qu'elle revienne. Elle me manque. Elle me manque tellement. À la fin... Elle avait toujours l'apparence d'une panthère. Une panthère blanche. J'ai gardé sa fourrure, tu sais. la fourrure de Guéras. Jabdam a laissé faire. Comme ça, Gera est toujours un peu avec moi. Et comme ça, je suis sûre de ne pas oublier. Je l'entends parfois, et je lui parle. Et un jour, les humains seront tous morts. J'espère que je pourrai en tuer encore quelques-uns de mes propres griffes. Et ce jour-là, ce jour-là, je pourrai rejoindre Gera au pays des âmes. En attendant, je veille. Il est hors de question qu'une autre divinité soit tuée, même si vous me détestez. Et vous avez tous les droits pour ça. Moi, je vous aime. Vous êtes ma famille, mon sang. Et il est hors de question qu'il vous arrive quoi que ce soit. Pas tant que je serai là. Et je prévois pas de partir. J'aimerais que t'arrêtes de m'appeler Ba. J'aimerais que tout le monde arrête. Je m'appelle Baguera. Je suis la douzième divinité. Et je jure sur l'âme de ma sœur d'exterminer tout humain qui aura l'audace et la folie de croiser mon chemin. Fais passer le message. « Et maintenant, va-t'en. Je suis trop en colère. C'est dangereux pour tes plumes. » « Le crépuscule est là, de toute façon. C'est le moment où l'ange est prêt à tomber du ciel. » Ce témoignage touche à sa fin. Merci de l'avoir écouté jusqu'au bout. S'il vous a plu, dites-le à votre plateforme d'écoute en vous abonnant, en commentant, en notant ce podcast. Si Gaïa le permet, rendez-vous la semaine prochaine pour le témoignage suivant. Signé. Quoi ?