undefined cover
undefined cover
#49 Nouvelle Assemblée nationale : où sont les femmes ? Décryptage avec Fiona Texeire cover
#49 Nouvelle Assemblée nationale : où sont les femmes ? Décryptage avec Fiona Texeire cover
Les Mariannes

#49 Nouvelle Assemblée nationale : où sont les femmes ? Décryptage avec Fiona Texeire

#49 Nouvelle Assemblée nationale : où sont les femmes ? Décryptage avec Fiona Texeire

42min |12/07/2024
Play
undefined cover
undefined cover
#49 Nouvelle Assemblée nationale : où sont les femmes ? Décryptage avec Fiona Texeire cover
#49 Nouvelle Assemblée nationale : où sont les femmes ? Décryptage avec Fiona Texeire cover
Les Mariannes

#49 Nouvelle Assemblée nationale : où sont les femmes ? Décryptage avec Fiona Texeire

#49 Nouvelle Assemblée nationale : où sont les femmes ? Décryptage avec Fiona Texeire

42min |12/07/2024
Play

Description

Au lendemain des élections législatives anticipées du mois de juillet, quel est le nouveau visage de l’Assemblée nationale et quelle est la place des femmes ?


En 2017, le nombre de femmes députées avait atteint un record de 38,8 %. Cependant, une première baisse a été enregistrée en 2022 avec 37,3 %, et cette diminution continue en 2024, puisque la proportion de femmes à l'AN est aujourd'hui de 36 %. En comparaison, le taux de féminisation du Sénat est de 36,8%.


Comment expliquer ce recul de la parité ? Quelles conséquences pour les avancées en matière de droits des femmes ?  En quoi cette campagne a invisibilisé les femmes pendant les débats télévisés ? Retour sur cette campagne éclair, qui a été incontestablement marquée par un climat de violences et de tensions palpables. 


Pour analyser la situation, j'ai le plaisir d'accueillir Fiona Texeire, Conseillère politique, enseignante à Sciences Po Rennes et co-fondatrice de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique à l'origine du #MeTooPolitique et autrice du podcast Y'a pas mort d’homme diffusé sur Binge audio. 



Références de l'épisode :




Pour suivre Fiona Texeire :


🎙 Pour soutenir le podcast gratuitement :

1. Abonnez-vous 🔔

2. Laissez un avis 5 étoiles ⭐⭐⭐⭐⭐ sur Apple Podcast ou sur Spotify. 

3. Partagez l'épisode à 3 personnes autour de vous ! 📢


Vous pouvez allonger la durée de vie du podcast en laissant un don sur Tipee. 🙏 

 

Pour suivre le podcast :

Retrouvez le podcast sur les réseaux sociaux avec le compte @LMariannesfr

Bonne écoute !    


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis Laurie Théron et je vous accueille sur mon podcast Les Mariannes. Dans cette émission, que j'ai conçue pour vous aider à prendre toute votre place dans la vie publique de notre société, je reçois des femmes politiques et des activistes qui inventent le monde de demain. Mesdames,

  • Speaker #1

    vous êtes légitimes, vous avez votre place, vous êtes compétentes. Investissez-vous dans cette vie politique ? Il faut du courage pour faire de la politique, que l'on soit homme ou femme.

  • Speaker #0

    Mais je crois qu'on ne pardonne à rien nos femmes.

  • Speaker #1

    On vient vous chercher parce que vous êtes une des pièces du puzzle qui va faire gagner. Un message qui, moi, m'a été transmis alors que j'étais jeune et que je n'avais pas forcément confiance en moi. On m'a dit, Sophie, il faut y croire, toujours y croire.

  • Speaker #0

    Quand vous doutez de vous, pensez-vous. Avec les Mariannes, je vous propose de partir à la rencontre de femmes qui s'engagent dans leur territoire. ou à l'échelle nationale, pour défendre leurs idées et construire différemment le monde de demain. Quant à moi, je suis une passionnée de politique et d'engagement et je rêve d'une société plus égalitaire. J'ai passé 7 ans dans la peau d'une collaboratrice parlementaire au Sénat et j'accompagne aujourd'hui les entreprises et les changemakers dans leur communication digitale et la conception de leur stratégie éditoriale. Pour soutenir ce podcast et permettre au maximum de personnes de bénéficier de son contenu, Abonnez-vous, notez le 5 étoiles et partagez-le autour de vous. Je suis évidemment présente sur les réseaux sociaux, vous me retrouverez avec le compte ElmarianneFR. Enfin, pour être informé de la sortie d'un nouvel épisode, abonnez-vous à la newsletter que vous trouverez sur mon blog. Et puis vous pouvez aussi soutenir financièrement le podcast en laissant un don sur la plateforme Tipeee. Bienvenue dans l'univers des Mariannes. Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Les Mariannes. Aujourd'hui j'ai le plaisir d'accueillir Fiona Texer, une femme aux multiples engagements, elle est conseillère politique depuis 15 ans, enseignante en sciences po-reines, cofondatrice de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique et autrice du podcast que vous avez peut-être écouté, Y'a pas mort d'homme, qui a été publié sur Binge Audio. Alors je vous propose cet épisode au lendemain des élections législatives anticipées qui ont eu lieu après la dissolution de l'Assemblée nationale par le Président de la République. On va s'interroger sur le visage de cette nouvelle Assemblée nationale et évidemment sur la place que vont occuper les femmes dans cette nouvelle Assemblée. Pour vous donner quelques repères, le nombre de femmes députées avait atteint son record en 2017. On avait constaté une première baisse en 2022 et en 2024, leur nombre recule toujours. puisqu'on est passé de 2017 à 38,8% à aujourd'hui 36%. Alors comment expliquer ce recul de la parité ? Quelles conséquences concrètes en matière de droits des femmes ? En quoi cette campagne Éclair a été marquée par un climat de violence, mais aussi par l'invisibilisation des femmes sur les plateaux télévisés ? Nous discuterons de tout ça avec Fiona Texer. Enfin, à travers cette conversation, vous découvrirez aussi les nombreux engagements professionnelle et militante de Fiona Texer, qui évolue depuis 15 ans dans le milieu politique qu'elle connaît donc parfaitement. Je vous souhaite une très belle écoute et surtout je vous souhaite de passer un très bel été. N'oubliez pas quand même de faire une pause pour recharger vos batteries et je vous dis à très vite. Bonjour Fiona.

  • Speaker #1

    Bonjour Laurie.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté mon invitation sur le podcast des Mariannes à l'issue des élections en législative anticipée de dimanche dernier. Alors on va commencer cette interview avec le traditionnel portrait chinois. Alors, si vous pouviez dîner avec une grande femme de l'histoire, qui choisiriez-vous ?

  • Speaker #1

    Gisèle Halimi.

  • Speaker #0

    Si vous aviez une heure de plus chaque jour, que feriez-vous ?

  • Speaker #1

    Du yoga.

  • Speaker #0

    Et si vous aviez un super pouvoir, ce serait lequel ?

  • Speaker #1

    Peut-être de remonter dans le temps et de faire en sorte que la révolution française soit plus féminine et plus féministe et qu'on entende les femmes dès la première heure, qu'on entende les femmes comme l'homme de gauche depuis le début et peut-être qu'on ne serait pas dans la situation dans laquelle on est si on avait écouté les femmes plus tôt.

  • Speaker #0

    On aurait gagné du temps, ça c'est sûr. Alors, nous enregistrons cet épisode quelques jours après le deuxième tour des élections législatives anticipées du 7 juillet. L'Assemblée nationale a un nouveau visage et elle compte désormais 36% de femmes, c'est-à-dire moins qu'en 2022 et moins qu'en 2017. Quelle est votre réaction par rapport à ce recul des femmes ?

  • Speaker #1

    C'est une très mauvaise nouvelle. C'est une mauvaise nouvelle parce que ça montre que les lois de parité ont des limites. Il y avait une progression assez constante depuis les lois de parité, c'est-à-dire en gros de 2002, donc des élections législatives de 2002 jusqu'en 2017. Et on a peut-être pensé trop rapidement que cette progression serait constante jusqu'à ce qu'on atteigne 50%. Et aujourd'hui, on voit qu'on recule élection après élection et donc ça souligne plusieurs choses. D'une part, que la loi n'est pas assez contraignante puisque la loi n'oblige pas les partis à présenter autant d'hommes que de femmes. Elle émet juste des incitations financières et certains partis ont clairement les moyens de passer outre la loi. Ce sont même des choix financiers qui sont faits et puis d'autre part que les partis politiques ne font pas assez d'efforts puisqu'en fait quand on ne les y contraint pas, ils ne le font pas d'eux-mêmes. Ce sont les partis qui font les choix d'investir telle ou telle personne. Ce sont les partis qui font dès le début le choix d'investir moins de femmes que d'hommes. Par ailleurs, on sait qu'ils font le plus souvent le choix d'investir des femmes dans des circonscriptions moins bonnes, moins gagnables. Et donc, in fine, il y a moins de femmes à l'Assemblée nationale. Et ça, oui, c'est une décision qui relève des États-majors des partis.

  • Speaker #0

    À votre avis, quelles conséquences cela va avoir en matière de droits des femmes, en matière de législation, cette baisse constante des femmes dans la vie politique ?

  • Speaker #1

    Ça a plusieurs types d'effets. Je pense que ça a un effet immédiat, et ça je le dis parce que j'étais collaboratrice parlementaire, c'est en effet sur l'environnement de travail à l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale, c'est évidemment le lieu où on fait la loi, mais c'est aussi un environnement de travail pour des centaines de personnes. Et plus un climat de travail est masculin, plus on sait qu'il est propice à un climat de harcèlement sexuel ou d'agression sexuelle. Et donc c'est une mauvaise nouvelle pour les femmes qui travaillent à l'Assemblée nationale, qu'elles soient... députées, fonctionnaires, collaboratrices et même dans une certaine mesure les journalistes, enfin toutes les femmes qui sont amenées à côtoyer ce lieu. Je pense que ce qui donnera un signal, c'est est-ce que le président ou la présidente de l'Assemblée s'engagera enfin à prendre un plan de lutte contre les violences sexistes et sexuelles à l'Assemblée. À l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, on avait fait des propositions en 2022. On avait notamment... souligner qu'il était important qu'il y ait une formation obligatoire pour tous les personnels de l'Assemblée, pour tous les élus, les collaborateurs, les collaboratrices, les fonctionnaires. Ça n'avait pas été le cas. Et il y a tout un tas de mesures qu'on pourrait mettre en place pour limiter le sexisme à l'Assemblée, c'est-à-dire sanctionner systématiquement les propos sexistes, avoir une cellule d'écoute digne de ce nom, être beaucoup plus intransigeant lorsqu'il y a des cas de harcèlement entre députés et collaboratrices. Par exemple, aujourd'hui, les députés sont très protégés, notamment par ce qu'on appelle la... la clause de loyauté qui leur permet en gros de licencier leurs collègues quand ils ne sont pas d'accord, y compris lorsqu'il y a des dénonciations de violence. Il y a aussi quelque chose qui me choque, c'est que personne ne prend la peine de mesurer la réalité de ces violences à l'Assemblée. Il n'y a jamais eu de vraie enquête de victimation faite par les services de l'Assemblée nationale et donc aujourd'hui on ne mesure pas le problème et donc on n'apporte aucune solution en interne. Donc voilà, ça aura des conséquences d'abord sur le climat de travail à l'Assemblée. Après, ça aura probablement des conséquences au-delà, c'est-à-dire Qu'est-ce que cette Assemblée va réserver aux propositions en faveur de la protection ou de l'extension des droits des femmes ? Si on fait un recul historique, si on prend la Ve République, on se rend compte que toutes les mesures législatives qui ont permis d'avancer sur la question des droits des femmes, que ce soit l'IVG, la pénalisation du viol, la pénalisation du harcèlement sexuel, toutes ces questions-là, elles ont été portées par des femmes. Il y a une exception, c'est la loi Neuvirth sur la contraception. Mais sinon, toutes ces grandes avances-là ont été portées par des femmes. Et en fait, quand on regarde dans le détail, on se rend compte que les hommes politiques ne s'intéressent pas ou peu aux droits des femmes. Et c'est le même flagrant. On a eu un exemple assez parlant, je trouve, cet hiver, lorsqu'il y a eu le texte pour constitutionnaliser l'IVG et qu'il y avait un petit moment de blocage au Sénat. Ce qui a permis de faire basculer, en fait, l'opinion des sénateurs, c'est que les sénatrices en faveur de cette réforme et les militantes se sont mises à faire pression sur les épouses, les sœurs, les filles, les nièces, les sénateurs conservateurs qui bloquaient le texte, parce qu'eux ne voyaient pas l'intérêt, en fait. Et c'est dire, si eux-mêmes ne voient pas l'intérêt d'un projet de société, il fallait convaincre leurs entourages féminins d'accepter. Donc voilà, moi, ce qui m'inquiète, c'est qu'on va avoir une assemblée plus masculine et on va avoir aussi une assemblée beaucoup plus conservatrice que la précédente, puisque la poussée du RN n'est pas une bonne nouvelle pour les droits des femmes. Là où l'extrême droite... passe, les droits des femmes trépassent. Et on peut aussi d'ores et déjà constater qu'il y a des profils très inquiétants au RN, notamment des cas d'hommes violents avec leurs conjointes qui ont été élus.

  • Speaker #0

    Oui, alors je rebondis sur cette question des hommes politiques condamnés pour pure violence. Damien Bade, Adrien Quatennens ou Julien Bayou ne sont plus députés. Vous qui aviez cofondé l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles, est-ce que vous vous en réjouissez aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Ce qui est certain, c'est que la dissolution, elle a eu pour conséquence la clarification. Ça a permis au moins ça, et ça a permis de clarifier le statut de député qui était déboulé pour leur camp. Le premier à retirer sa candidature dans la course aux législatives, c'était Julien Bayou, qui de toute façon avait déjà quitté l'ELV et son groupe parlementaire. Lui, il était visé par une plainte pour harcèlement moral et à Bûche-Roduleux, l'état de faiblesse. Et ensuite, les militantes de gauche ont dû très fortement se mobiliser pour le retrait de la candidature d'Adrien Quatennens, qui était le seul à avoir été condamné pour violences conjugales à l'Assemblée nationale, mais qui lui était soutenu par la direction de l'ELFI. Et donc, il a finalement dû admettre que... Son maintien a été intenable pendant cette campagne. Mais ce qui est intéressant, c'est qu'en fait, une fois qu'il s'est désisté, c'est à ce moment-là que le camp d'Emmanuel Macron s'est mis à lâcher Damien Abad, qui lui est mis en examen pour tentative de viol et qui a été éliminé au premier tour. Et autre conséquence que ça a eu sur le camp présidentiel, c'est que Jérôme Perra, qui lui est conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine, qui était candidat en Dordogne et qui était condamné pour violence conjugale lui aussi, ce qui s'est passé avec Jérôme Perra, c'est qu'en fait, la Macronie a mis un... candidat face à lui, mais c'était un candidat fantôme, dans le sens où il n'habitait pas la circonscription, où il n'a pas déposé sa profession de foi, et donc il n'y avait pas de bulletin pour lui dans les bureaux de vote au premier tour. Mais la manœuvre n'a pas suffi et lui aussi, il a été éliminé au premier tour. Donc oui, moi je me réjouis qu'au moins, ces boulets pour leur camp politiquement, et puis ces hommes qui ne sont pas les amis des droits des femmes. soit écarté de l'Assemblée. Après, on notera que Gérald Darmanin a été réélu et que, par exemple, Frédéric Bocchaletti, député RN du Var, a été réélu. Sa femme a livré récemment un témoignage glaçant de violences conjugales.

  • Speaker #0

    Alors, j'aimerais qu'on revienne un peu sur le moment de la campagne et notamment de l'entre-deux-tours. Vous, vous avez signé une tribune avec d'autres personnes qui a été publiée dans Libération, tribune en date du 2 juillet dernier, pour dénoncer l'invisibilisation des femmes. dans la campagne, dans cette campagne législative, au cours de laquelle elles n'ont représenté les femmes que 41%, qu'on les a moins vues sur les affiches, mais on les a moins vues aussi sur les plateaux télé. Qu'est-ce que vous en avez pensé de ça ?

  • Speaker #1

    Les partis ont beaucoup prétexté l'urgence de la situation pour s'excuser sur le fait qu'ils n'ont pas été à la hauteur sur les droits des femmes. Je pense que c'est un problème de prétexter l'urgence parce que ça veut dire que les droits des femmes ne se poseraient qu'en période d'élection. Or c'est un sujet sur lequel les partis doivent faire des efforts au quotidien. Et on voit qu'ils n'ont collectivement pas été bons sur la question des investitures, même s'il y a des nuances. Le populaire se rapprochait de la parité et les républicains, par exemple, en étaient extrêmement loin. Mais après, il y a eu aussi qui on met en avant dans cette période. Et c'est vrai que la campagne a cruellement manqué de figures féminines. Et en fait, les figures féminines qui émergeaient ont été silenciées, c'était le sens de cette tribune. C'est-à-dire que... Le fait que le Nouveau Front populaire est comme figure 4 chef de parti, il y avait eu une espèce de répartition des débats entre eux dès le début. C'est-à-dire que Manuel Bompard allait au premier débat, Olivier Faure allait à un autre, et Marine Tondelier allait encore à un autre. Et lorsque le jour du débat Tondelier-Bardella approchait, Bardella a signifié son refus de débattre avec elle. Ce qui veut dire qu'il a privé Marine Tondelier de débat. En un sens, qu'il ait eu peur, qu'il n'ait pas eu envie, ça, ça lui appartient. On ne peut pas lui reprocher. Ce qui est sidérant, c'est que BFMTV ait accepté cette situation et qu'ils aient laissé faire, puisque la silenciation des femmes dans l'espace public, c'est la responsabilité des médias qui leur donnent ou qui ne leur donnent pas la parole.

  • Speaker #0

    Alors, une campagne aussi marquée par la violence, avec un climat de tensions très palpables. Plus de 50 agressions recensées partout sur le territoire, selon une source du ministère de l'Intérieur. On pense bien sûr à l'agression médiatisée de Priska Thevenot, porte-parole du gouvernement, agressée avec son équipe à Meudon alors qu'elle collait des affiches. C'est un phénomène qui existait déjà, la violence dans la vie politique, que ce soit pour les hommes ou pour les femmes, mais c'est un phénomène qui s'est intensifié pendant cette campagne ?

  • Speaker #1

    Ah oui, indiscutablement, ça s'est intensifié. Ça s'est intensifié dans la campagne contre les candidats, puisqu'il y a eu une hausse des agressions. On a cité Priska Thevenot. Après, il y a eu des remontées en fait dans tout. Les équipes, que ce soit de l'extrême droite jusqu'à la gauche, tous ont rapporté avoir été victimes d'attaques de l'autre camp. Et puis, il y a eu une violence, surtout libérée dans la société, avec une hausse des agressions racistes, des agressions homophobes, des propos intolérables qui ont pu être tenus et dont on a vu l'écho dans les médias. On pense à la séquence d'envoyé spécial avec cette femme divine, aide-soignante, insultée par ses voisins dans le Loiret. Et puis aussi, un petit côté, on a lâché la rampe, on a lâché les chiens sur les agressions de journalistes. Je pense notamment aux journalistes du service public, Karim Vessouli et Mohamed Bouafsi, qui ont été intimidés également par... Des courriers notamment, donc une campagne vraiment marquée par les violences envers les politiques, envers les médias et envers les concitoyens qui ont le malheur de déplaire l'extrême droite aussi.

  • Speaker #0

    Alors dans l'entre-deux-tours, on a découvert la figure de Marine Tondelier, secrétaire nationale d'Europe Écologie Les Verts. On l'a découverte en larmes au micro de France Inter. Elle s'est imposée comme une nouvelle figure. On l'a beaucoup comparée à Jacinda Ardern pour son côté authentique. Selon vous, en quoi Marine Tondelier assume une posture politique un peu différente ?

  • Speaker #1

    Moi, je suis contente qu'on l'ait découverte, parce que moi, je la connais depuis une quinzaine d'années. Donc, ça me fait plaisir que la France, maintenant, la connaisse. Et je crois que sa force à Marine Tondelier, ça a été de rappeler que la politique, elle se fait avec des convictions, mais aussi avec des émotions. Dans la séquence que vous citez sur France Inter, elle... Elle rappelle en fait que l'empathie est politique et dans cette séquence, elle est émue parce qu'elle revient sur des propos tenus par Bruno Le Maire et elle, elle dit qu'en fait, la politique, elle a des conséquences très concrètes sur la vie des gens et que seuls des privilégiés comme Bruno Le Maire peuvent feindre de l'ignorer en fait. Et ce qu'on doit à Marine Tondelier, c'est aussi d'avoir un très fort ancrage local. Elle est élue d'opposition à Énard Beaumont, donc le fief de Marine. Le Pen, elle sait ce que c'est aussi que de subir le RN au pouvoir localement. Je crois que ça fait aussi sa force, cette connaissance du terrain, mêlée à une vraie empathie, une vraie sensibilité. Puis après, on a beaucoup parlé de sa veste, puisque le style aussi est politique. Et donc sa veste vert, je crois qu'on appelle ça le vert véronèse, ça a permis de la rendre identifiable sur les plateaux, ça a permis de la rendre identifiable sur le terrain. Et puis... Et puis c'était un coup très bien joué, puisque ça envoie un message clair et lisible, à la fois la respectabilité de la veste et puis aussi l'intransigeance sur les convictions. Moi, elle me rappelle un petit peu, dans un même registre, le côté girl next door qu'on appréciait chez Cécile Duflo il y a une dizaine d'années. À la fois, voilà, bonne camarade, proche des gens. Et puis, je trouve que ce qui a marqué aussi, lors du deuxième dimanche électoral, c'était son excellent tréparti, notamment face à Jean-Philippe Tanguy. Tout ça fait qu'elle sort très populaire et renforcée de la séquence.

  • Speaker #0

    On a parlé de l'importance des femmes dans la vie parlementaire de notre pays. Alors comment renforcer l'accès des femmes à la vie politique ? Et faut-il aller plus loin en matière de parité dans la loi ?

  • Speaker #1

    Moi, je crois qu'il n'y a que la loi qu'on comprend en matière de parité. En fait, quand on regarde à tous les échelons, il y a de la parité là où la loi est contraignante. Il n'y en a pas là où la loi ne dit rien. Si on prend les conseils municipaux, les conseils régionaux, les conseils départementaux, il y a à peu près 50-50 de conseillers et de conseillères. Par contre, si on prend les exécutifs, les têtes, les maires, les présidents de conseils départementaux, les présidents de conseils généraux, là, la parité n'existe pas. Parce qu'en fait, il y a zéro contrainte. Il y a une parité parfaite au Parlement européen parce que la loi l'oblige. Et puis, il n'y en a pas au Parlement national parce que la loi ne l'oblige pas. Et puis il y a aussi mille façons de contourner la loi. Quand on regarde au Sénat, si aujourd'hui il n'y a pas la parité au Sénat, c'est parce qu'il y a plein de façons de contourner la loi, notamment de présenter des listes dissidentes, d'avoir des ententes sur le fait de présenter deux fois des hommes tête de liste dans certains départements. Il y a plein de façons de contourner la loi et on les connaît, elles sont visibles, elles sont même devenues grossières. Si on veut vraiment la parité... il faut renforcer la loi, il faut que ça passe par la loi. Les partis ne comprennent que ça. Après, on nous dira aussi, ah mais oui, mais on a du mal à trouver des candidats. C'est les partis qui le disent. Les femmes n'osent pas se lancer, etc. Mais moi, j'ai envie de leur demander, qu'est-ce que vous faites pour que les femmes se lancent ? Pourquoi est-ce qu'il y a encore des barrières et des censures ? Est-ce que vous avez réfléchi à quelle heure tombent vos réunions ? Est-ce que vous avez réfléchi à... à l'articulation entre les temps de vie privée, de vie professionnelle et de vie politique. Est-ce que vous avez réfléchi à la sécurité financière des femmes dans les campagnes ? Parce qu'en fait, une campagne, ça coûte de l'argent, surtout quand on n'est pas sûr de se faire rembourser, et que les femmes gagnent moins d'argent que les hommes. Qu'est-ce que vous faites pour leur garantir un meilleur accès ? Il y a plein de leviers sur lesquels on peut jouer, que ce soit les heures des réunions, la façon de faire de la politique, quand est-ce qu'on arrêtera de valoriser ? le mâle alpha, le grand tribun, l'homme qui porte ses couilles, c'est quand même ça dont on parle. On peut valoriser autre chose en politique et on peut faire de la place, mais ça demande de faire des efforts et ça demande aussi de casser des styles ou des référentiels politiques qui aujourd'hui sont parfois présentés comme neutres, alors qu'en fait ils sont extrêmement masculins.

  • Speaker #0

    Alors c'est une transition parfaite pour ma prochaine question qui vous est adressée plus personnellement. Vous, votre parcours il est marqué par la politique bien sûr. Vous avez travaillé 15 ans en tant que collaboratrice d'élu. Vous travaillez depuis 15 ans en tant que collaboratrice d'élu. Est-ce que vous, vous n'avez jamais pensé à passer de l'autre côté ?

  • Speaker #1

    Alors non, jamais. Pour moi, ça a toujours été une grosse ligne rouge. Mais je pense aussi parce que j'ai une très haute estime de la politique et que pour avoir beaucoup côtoyé les élus, j'ai une image de la fonction qui, à mon sens, doit être exemplaire. Et je pense aussi que c'est un type d'engagement dans lequel on ne peut pas faire une franche séparation entre le privé et le politique, et qui est extrêmement engageante et qui est extrêmement impliquante. Et que moi, j'ai toujours tenu à me dire si j'ai envie d'avoir une vie à côté, si j'ai envie de ne pas être tenue par la responsabilité. Eh bien, en fait, moi, c'est juste mon travail. Et à un moment donné, je rentre chez moi, j'éteins mon téléphone. Donc, je pense que c'est une charge qui est extrêmement haute et qui est extrêmement importante. Et moi, j'ai toujours trouvé que ma place était davantage dans l'ombre ou dans l'ombre. Eh bien, c'est un travail avant d'être un engagement.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu de votre métier de collaboratrice en quelques mots ? Quel est votre quotidien ? À quoi il ressemble ? Sur quel sujet est-ce que vous travaillez ? Pour celles et ceux qui n'auraient pas forcément une idée précise de ce que ça revêt d'être collaborateur d'élu.

  • Speaker #1

    Alors, c'est vrai que collaborateur d'élu, souvent, on ne sait pas ce que c'est. Et si on sait ce que c'est, on a souvent une mauvaise image parce que malheureusement... J'ai envie de dire que ce sont les pires d'entre nous qui font le plus par les deux, puisqu'un bon collaborateur, c'est quelqu'un qui reste dans l'ombre et qui sait rester à sa place. C'est-à-dire que Pénélope Fillon ou Alexandre Benalla n'étaient pas de bons collaborateurs, puisqu'ils ont trop fait par les deux. Donc moi, j'ai fait ça pendant 15 ans. Je travaillais, vous l'avez rappelé, en mairie, au Sénat, en cabinet de l'Install, à Matignon. J'ai travaillé pour des personnalités de la gauche et de l'écologie. Et puis j'ai fait différents types de postes. J'étais collaboratrice parlementaire, donc dans un travail plutôt... J'étais secrétaire générale de groupe parlementaire, qui a un travail de coordination dans le groupe politique, à la fois en interne, où c'était au Sénat, et puis aussi en externe, dans la relation avec, par exemple, l'Assemblée, le parti politique, etc. J'étais chef de cabinet, qui est plutôt un travail de logistique et de planification du temps et des déplacements des élus. Et puis j'étais conseillère, donc davantage dans la production de notes, de conseils, etc. S'il y en a parmi vous qui hésitent à y aller, j'ai envie de vous dire, faites-le. C'est très formateur, surtout quand vous êtes jeune diplômé. Le profil idéal, c'est d'être quand même jeune diplômé en droit ou en sciences politiques et puis avec des affinités partisanes. Ce n'est pas obligatoire, mais c'est toujours un atout. Faites-le, mais sachez aussi que c'est dur. C'est passionnant, mais c'est dur. Moi, je trouve que c'est un milieu traumatisant qui est violent. Moi-même, j'ai subi du harcèlement sexuel et des agressions sexuelles au travail. Et pendant trop longtemps, elles ont été passées sous silence. Donc il faut aussi y aller en se disant qu'il est probable qu'on n'en sorte pas un d'un quand même. Donc il faut apprendre à se protéger et il faut essayer d'exercer ce métier dans les meilleures conditions possibles.

  • Speaker #0

    Alors pour ceux qui rêvent de ces carrières, quel est le conseil numéro 1 à donner ? Quand on n'a pas de réseau, qu'on n'a pas de contact, qu'on ne sait pas comment s'y prendre, est-ce que les candidatures spontanées fonctionnent ? C'est une question qu'on me pose souvent.

  • Speaker #1

    Ça ne coûte rien d'essayer. En tout cas, ça ne coûte rien d'essayer. Après, l'idéal, c'est de quand même se renseigner sur la personne que vous targettez, sinon c'est plus difficile. Et puis, les campagnes sont des bons moments aussi pour se frotter un peu à la politique. Là, on vient de vivre une campagne express, mais c'est très intéressant si vous n'avez jamais vu ça de votre vie. Si ça se trouve, il y aura des élections dans un an, donc vous pouvez retenter le coup. Mais c'est intéressant d'aller suivre un candidat au quotidien, de voir ce que c'est que la rencontre avec les gens. de se rapprocher de l'équipe de campagne, de voir ce que c'est que d'aller tracter sur un marché, faire du porte-à-porte. Donc ça, c'est une bonne porte d'entrée, c'est de se rapprocher d'une équipe. Après, il y a plein de façons d'y aller, qui sont des façons thématiques. Vous êtes expert sur un sujet, je ne sais pas, ça peut être le numérique, ça peut être les libertés publiques, les finances. Regardez les députés qui siègent dans ces commissions et qui sont passionnés pour ces sujets-là. Il y a plusieurs types de portes d'entrée. L'idéal, c'est... La compétence, sachant qu'être généraliste est aussi une compétence, et l'affinité partisane, mais on a aussi des profils qui arrivent tout à fait à se refiler autrement. Et puis ça dépend si vous voulez davantage travailler sur le terrain, en circonscription ou à l'Assemblée nationale. Ça dépend si vous êtes plutôt des professionnels du droit ou de la communication. Les gens qui écrivent très bien aussi sont des profils recherchés. On a toujours besoin de plumes dans ce métier. Bref, il y a plein de possibilités. Pensez aussi au Parlement européen. On les oublie un peu trop souvent et il y a plus de postes là-bas. Les équipes sont plus nombreuses. Bref, il y a plein de façons de s'y prendre. Le seul conseil que j'ai à donner, c'est de soyez vraiment motivé parce que c'est dur et c'est chronophage. Donc autant y aller en ayant vraiment envie d'y aller.

  • Speaker #0

    Merci. Alors, vous avez mentionné les agressions dont vous avez été victime dans le cadre de votre travail de collaboratrice d'élu. Est-ce que c'est ça qui vous a donné envie de cofonder l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles et de prendre part à ce grand mouvement sociétal du MeToo politique ? Parce que dès 2021, vous avez été à l'initiative de nombreuses tribunes publiques pour dénoncer les violences sexuelles et sexistes dans ce milieu politique. Vous avez exhorté les partis à écouter les victimes. Donc est-ce que c'est finalement cette expérience du terrain qui vous a donné envie de... De militer ?

  • Speaker #1

    Absolument, oui, c'est la raison pour laquelle j'ai été à l'initiative de MeToo Politique il y a trois ans, pour alerter sur ce sujet, pour montrer que les violences, elles sont systémiques, que ce ne sont pas des cas isolés, parce qu'en fait, on les retrouve dans toutes les familles politiques, de l'extrême gauche à l'extrême droite, jusqu'à l'extrême centre, et puis aussi à tous les échelons de pouvoir. C'est-à-dire que j'ai reçu des témoignages de femmes qui ont été agressées par un conseiller municipal dans un tout petit village, et puis parfois, ça se passe aussi au plus haut sommet de l'État. Et en fait, on peut être tenté de penser que ces violences, elles sont loin de soi lorsqu'on est loin de la politique, que oui, c'est un problème de collaboratrice parlementaire. Bon, quand même, c'est déjà un problème, mais en fait, ça peut concerner n'importe qui. Si on prend le cas de Nafissatou Diallo, qui a été la victime de Dominique Strauss-Kahn, on voit bien que sa vie ne la prédestinait pas à côtoyer des hommes politiques. Et en fait, ça peut concerner n'importe qui dans le sens où... Les histoires récentes nous ont montré qu'il était concerné les épouses, les administrés qui venaient demander des services, des militantes, des journalistes, des collègues élus, des fonctionnaires et des collaboratrices, mais en fait ça peut être n'importe qui. Et donc c'est pour ça que moi il me semble important de marteler aux partis politiques qu'il faut prendre au sérieux cet enjeu et qu'il faut cesser de promouvoir, d'embaucher, d'investir des hommes violents. Souvent les profils sont connus dans les partis, il y a toujours ce truc de... Ah oui, tout le monde savait, mais personne n'a rien dit. Ben non, mais en fait, si on sait, il faut le dire et puis il faut empêcher de nuire. Parce qu'en fait, ça cause un double problème. C'est à la fois un problème de santé publique, parce que les violences sexuelles sont un problème de santé publique, mais c'est aussi un problème démocratique, parce qu'en fait, il y a des femmes qui quittent la politique parce qu'elles sont dégoûtées. Et quand on enlève toutes les dégoûtées, à la fin, il ne reste que les dégoûtants. Et c'est ce qui fait qu'on tourne en rond. Et évidemment que les... que les commissions électorales ont du mal à trouver des femmes pour aller mener telle ou telle campagne. Si elles ont été aussi mal accueillies et si elles ont été aussi violentées, pourquoi s'investir ?

  • Speaker #0

    Est-ce que les commissions électorales doivent être paritaires ? Est-ce qu'elles le sont déjà ?

  • Speaker #1

    Alors ça, ça dépend des parties, des statuts des parties. C'est très varié. Il n'y a aucune obligation qu'elles le soient. C'est au libre vouloir des parties, au bon vouloir des parties.

  • Speaker #0

    Dans le cadre de votre action à l'Observatoire, pour ne citer qu'une des actions, parce qu'elles ont été très nombreuses, mais j'ai envie de parler d'un long rapport fleuve dans lequel vous avez étudié les discours des personnalités politiques accusées de violences, un travail vraiment titanesque. Vous avez recensé les stratégies de défense, les réactions des hommes politiques, les réactions de leurs entourages aussi et des organisations politiques. Pourquoi ce rapport et quel accueil est-ce qu'il a reçu ? Alors ce qu'on voulait montrer en fait c'est que les violences ont bien ce caractère systémique et on a pris des exemples de gauche comme de droite. On analyse la communication de Nicolas Hulot, de Gérald Darmanin, mais aussi d'Éric Zemmour, mais aussi d'Adrien Quatennens ou d'Éric Coquerel. Et en fait de montrer que ça n'est pas une histoire de camp politique, ça n'est pas une histoire de niveau de mandat. Toujours la même histoire, c'est l'histoire d'hommes qui vont déployer les mêmes arguments à chaque fois qu'une accusation va être portée contre eux. La première de leurs réactions, c'est de dire qu'ils n'ont rien fait, ou si c'est impossible de minimiser les faits, de rappeler qu'il y a tel contexte et qu'en fait, ce n'était pas si grave, mais que c'était une gifle, oui, mais que cette gifle n'a pas laissé de traces, oui, mais que le contexte était quand même un divorce. On trouvera toujours une bonne raison. La deuxième chose qu'ils vont faire, c'est essayer de... de manipuler le vocabulaire juridique pour qu'on perde un peu l'essentiel du message. On va entendre des phrases un peu comme je me tiens à la disposition de la justice Toujours montrer qu'on a le droit derrière soi. Je pense par exemple à Damien Abad lorsqu'il a été mis en examen. Pour qu'un député soit mis en examen, il faut que le parquet demande au bureau de l'Assemblée nationale de lever son immunité parlementaire. Le bureau de l'Assemblée nationale a levé l'immunité parlementaire de Damien Abad. Mais Damien Abad est venu expliquer à l'AFP que c'est lui qui l'avait demandé, alors qu'il n'a rien à voir dans la procédure, comme pour montrer qu'il était du bon côté du droit, alors que non. Le Barquet a transmis la demande au bureau, le bureau a répondu, Damien Abad n'a rien à faire dans cette histoire. Et donc, sans cesse se présenter comme dans son bon droit, ça c'est le deuxième trait commun à toutes les stratégies de défense. Et puis, le troisième, en fait, ça va être d'expliquer que c'est globalement un... complot politique contre eux. Ce ne sont pas leurs faits et gestes qui sont en cause, puisque de toute façon, ils n'ont rien fait, mais qu'on veut attaquer leur honneur et leur combat politique. Donc, en fait, expliquer que les femmes mentent et qu'elles sont manipulées à des fins politiques. C'est un peu la constante de toutes ces défenses-là. Et pourquoi avoir montré ça ? Eh bien, en fait, pour montrer que sans solution globale, on ne s'en sortira pas. traiter au cas par cas tous ces sujets-là, c'est bien, il faut le faire. Idéalement, que les partis politiques et les familles politiques s'en saisissent, c'est mieux. Mais que si on refuse de voir le tableau global, on aura une vie politique qui sera gangrénée par les violences sexuelles pendant encore très longtemps.

  • Speaker #1

    Parmi les solutions que vous proposez pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, il y a la création d'une instance, une supracellule d'écoute qui pourrait réceptionner... les témoignages et les signalements des victimes. Est-ce que les partis vous ont écouté en ce sens ? Encore une fois, est-ce que cette proposition a reçu un accueil favorable de la part des principaux concernés ? Alors,

  • Speaker #0

    pas du tout, parce que les partis ont quand même tendance à mettre des œillères jusqu'à ce que les scandales éclatent à la figure. Et c'est une proposition qui vient du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, qui est issu d'un de leurs rapports de 2019, et qui en fait fait un parallèle intéressant. avec la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Alors, pour faire un petit peu l'historique, vos auditeurs et vos auditrices se souviennent sûrement de l'affaire Cahuzac. L'affaire Cahuzac, elle éclate en 2012 quand Mediapart, puisque heureusement qu'il y a de la presse qui fait des enquêtes sérieuses, qu'elles soient sur les scandales financiers ou les scandales sexuels, Mediapart révèle les comptes cachés du ministre du Budget. Et à ce moment-là, on trouve une stratégie... pas très différente de ce que je viens de vous décrire. Jérôme Camusac qui dit que pas du tout, il n'a rien fait, que ce n'est pas lui, qu'on cherche à lui nuire et que de toute façon, tout le monde ment. Et bizarrement, comme c'est des questions d'argent, les gens s'intéressent davantage. Et en fait, à ce moment-là, la classe politique, elle a deux options. C'est-à-dire soit faire comme d'habitude, dire Ah mais oui, mais lui, c'était une brebis galeuse, on est désolés et puis on passe à autre chose. Ou soit se dire On a un problème systémique, la confiance avec les citoyens est rompue et il faut qu'on... fassent quelque chose de fort, poser un acte politique important pour restaurer le lien avec les citoyens et pour empêcher que ça se reproduise. Et c'est à ce moment-là qu'est votée la loi pour la transparence de la vie publique, qui découle sur la création d'une haute autorité indépendante, la haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui en fait est chargée de contrôler la probité des hommes et femmes politiques de ce pays, et même des collaborateurs, des hauts fonctionnaires, bref. Avoir un super pouvoir de contrôle. Et aujourd'hui, quand vous discutez avec les élus, s'il y a bien une instance qui craigne... C'est celle-là. Et tout le monde a peur de se faire pincer pour une mauvaise déclaration, une maison de vacances qui a été oubliée, une histoire de SCI qu'on avait oubliée dans un coin. Bref, et en fait, quand on regarde aussi ce qui s'est passé depuis dix ans, depuis que la haute autorité existe, c'est que les grandes figures politiques qui sont tombées, elles sont tombées pour des histoires de mauvaise déclaration. Vous prenez par exemple Caroline Cailleu. qui a été ministre sous Macron il y a deux ans, elle n'est pas tombée parce qu'elle a tenu des propos homophobes, elle est tombée parce qu'elle avait une déclaration mal remplie. Vous prenez Laura Flessel, ou alors dans un autre registre, François de Rugy, avec son histoire de homard. Bon, on n'enlèvera pas l'idée qu'en fait, avoir fait une petite orgie de homard au frais du contribuable, c'est moins grave que des violences conjugales. Et pour autant, c'est ce type de scénario qui se produit. Aujourd'hui, on ne tolère pas. plus les manifestations financières en politique et je m'en réjouis. En fait ce qui nous manque c'est un électrochoc sur les violences sexuelles semblable à l'électrochoc qui a été l'affaire Cavusac et je ne comprends pas comment ce qui s'est passé ces dernières années sur Hulot, sur Katnins, sur Abad n'est pas encore servi de leçon.

  • Speaker #1

    Pour faire un mauvais jeu de mots il s'agit d'une hiérarchisation des périls.

  • Speaker #0

    Exactement.

  • Speaker #1

    Il faut une sacrée force quand même pour adopter le rôle de vigie que vous avez eu et que vous avez toujours pour oser dénoncer les actes de personnes puissantes, il faut le dire quand même, et pour essayer d'infléchir les positions des partis. Est-ce que vous, vous vous sentez parfois abattue ou impuissante ? A contrario, vous qui renvoyez comme une image de force, qu'est-ce qui vous donne cette force pour adopter ce rôle ?

  • Speaker #0

    Alors oui, c'est dur. et oui, ça repiète sur la santé mentale. Moi, j'ai fait un burn-out militant, par exemple, il y a 18 mois, parce qu'on se sent démoralisé, impuissant, qu'on se dit que l'ampleur de la tâche est trop importante. Et donc, il faut savoir bien s'entourer, il faut être soutenu et surtout, il faut savoir faire des pauses pour ensuite repartir si on en a envie ou alors se dire, c'est bon, j'ai fait ma part et je passe à autre chose. Après, je voudrais souligner aussi qu'il y a des façons de s'engager qui exposent davantage que d'autres. Moi, j'ai testé différents modes d'engagement. Par exemple, j'ai co-écrit une série documentaire pour Binge Audio qui s'appelle Y'a pas mort d'homme qui est une série en huit épisodes sur la violence sexuelle. Ce n'est pas la même chose, par exemple.

  • Speaker #1

    On mettra les références dans le descriptif de l'épisode.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas la même chose qu'organiser des manifs, ce n'est pas la même chose qu'avoir des prises de parole publiques, ce n'est pas la même chose que faire des contenus en ligne sur les réseaux sociaux. Moi, il y a eu aussi un autre type d'engagement qui m'a beaucoup plu. J'ai pu donner cours à Science Porraine pendant deux ans et créer un cours sur les violences sexistes et sexuelles. Ce qui est intéressant, ça veut dire qu'on est au contact de centaines d'étudiants pour faire passer des messages qui sont... aussi des messages de prévention sur ces questions-là. Donc il y a différents types d'engagement. Il y a différents types d'engagement. Ce qu'il faut, c'est savoir écouter ses limites, savoir s'arrêter lorsque l'on milite dans un environnement toxique, parce que le milieu militant, il n'est pas totalement exempt de violences non plus. Et puis, il faut savoir se reposer, surtout.

  • Speaker #1

    Vous avez des chiffres sur le burn-out militant ?

  • Speaker #0

    Alors moi, je ne connais pas de chiffres sur le burn-out militant. Néanmoins, je sais qu'il y a des ressources assez utiles. Je pense notamment au livre d'Elsa Deck-Marceau, Faire justice qui évoque la question notamment du burn-out militant dans les violences sexistes et sexuelles. Et puis également les travaux du sociologue Simon Cotter-Marx, qui a travaillé sur ces questions-là dans le milieu associatif.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. On mettra les références encore une fois dans le descriptif de l'épisode. Alors on s'approche de la fin de cette interview. Dans l'esprit de sororité du podcast, je vais vous inviter à nous donner quelques conseils. Alors des conseils en ce qui concerne les relations avec les médias. Vous, vous êtes quand même habitué des plateaux radio et télé ou des contacts avec des journalistes pour défendre vos idées et vos propositions. Qu'est-ce que vous conseilleriez à une personne qui veut prendre davantage la parole dans les médias ? Comment bien se préparer et comment ne pas trop stresser finalement avant une interview ?

  • Speaker #0

    Préparez-vous, préparez-vous bien. Ce n'est pas un exercice qui s'improvise. Je vous recommanderais vraiment de vous former avant de vous lancer. Parfois, on trouve des ressources dans les collectifs militants ou dans les partis. Il y a souvent des formations qui sont proposées. Je pense qu'il faut être très clair sur ce qu'on a à dire. Et le plus important, en fait, c'est d'avoir un message suffisamment clair et concis dans sa tête. pour pouvoir le restituer de façon claire et concise. Et j'ai envie de dire, peu importe les questions que vous posera la journaliste, ce qui compte, c'est votre message. Et souriez et êtes détendus.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous auriez un dernier conseil à transmettre aux femmes qui vont entrer au Palais Bourbon, tant que nouvelles députées, et aux femmes plus largement qui veulent s'engager, que ce soit dans des partis politiques, dans des associations, dans la société civile ? Quel conseil est-ce que vous aimeriez leur transmettre ?

  • Speaker #0

    Alors aux femmes députées, moi je donne toujours le même conseil, parce que j'ai des amis députés et à chaque fois je leur ai dit la même chose. Ne tombez pas dans le syndrome de la bonne élève. On a vraiment tendance à s'enfermer dedans en tant que femme, à vouloir être bonne partout, à garder ce côté première de la classe parce qu'évidemment chez les députés, il y a beaucoup de femmes qui ont été très fortes à l'école et qui sont très studieuses. Vouloir être bonne partout à l'Assemblée, c'est s'épuiser. Ce n'est pas bon signe de s'épuiser parce qu'on ne pourra jamais tout faire et jamais être bonne partout. Il faut prioriser dès le début du mandat ces combats, se répartir avec... ses collègues de sous-groupes parlementaires ou des intergroupes, les sujets sur lesquels on veut vraiment s'investir et se dire je ne serais pas partout au même moment, donc autant se limiter à ce que je sais faire de mieux ou ce qui me motive le plus Et il ne faut surtout pas négliger la circonscription, on le voit, c'est important de ne jamais casser le lien avec les électeurs et les électrices, surtout quand des législatives anticipées peuvent poindre à tout moment. Et puis formez-vous, formez-vous au management, formez-vous à la prévention contre les VSS. Pensez à vos collaborateurs et vos collaboratrices, c'est des métiers où la souffrance psychique est élevée. Ce sont des gens qui vont se donner pour vous bien au-delà de ce que permet le droit du travail pendant des années. Alors prenez soin d'eux, payez-les correctement et soyez polis et respectez le droit du travail autant que possible parce que c'est trop peu souvent le cas. Après un conseil aux femmes qui souhaitent s'engager en général, vraiment c'est le moment. On a beaucoup répété ces derniers temps la citation de Simone de Beauvoir, il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Je crois que la crise elle est là, elle est profonde. Et les résultats de dimanche dernier, c'est pas vraiment une victoire, c'est surtout un répit. Alors c'est le moment de s'engager, il y a plein de façons de le faire. La plus évidente peut-être que c'est de rejoindre un parti, mais il y en a plein d'autres. Si vous êtes... palais avec les partis politiques et la société civile qui a joué un rôle incroyable dans cette campagne. Je pense notamment aux initiatives de militantes comme Caroline Devasse qui ont su motiver et mobiliser des dizaines de milliers de personnes pendant cette campagne. Et puis les présidentielles c'est dans trois ans, c'est une course de fonds. Donc voilà si ça vous intéresse il y a le site indivisible.fr qui vous offre plein de ressources. Et puis il y a la société civile, il y a les partis, il y a aussi les syndicats. Peut-être le moment de se syndiquer. Je crois que des personnalités comme Sophie Binet, à la tête de la CGT, ont vraiment redoré l'image du syndicalisme récemment. Et puis, si vous décidez de vous engager, faites-le en vous faisant plaisir, en faisant ce que vous savez faire. Si votre truc, c'est de faire du porte-à-porte, d'être dans le contact avec des gens, faites ça. Si votre truc, c'est de faire des contenus sur les réseaux sociaux, faites ça. Mais si votre truc, c'est de faire des sandwiches et d'avoir une oreille attentive pour les militants qui sont épuisés, C'est bien aussi, en fait. Voilà, il faut savoir trouver sa juste place. Il y a de la place pour absolument tout le monde, peu importe vos compétences et peu importe le degré d'engagement que vous êtes prêt à y mettre. Et surtout, connaissez vos limites et arrêtez-vous avant de vous faire mal.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup, Fiona. Et une dernière question. Qui aimeriez-vous entendre sur les Mariannes ?

  • Speaker #0

    Marine Tondonier, la star du moment.

  • Speaker #1

    La star du moment. Effectivement, elle revient beaucoup dans les propositions des auditeurs et auditrices. Un grand, grand, grand merci pour ce partage hyper riche. Et on mettra évidemment toutes les références. Votre épouse est engagée. Si ce vote-là m'a parlé, je vous répète, vous avez le nom de 5e de ma chaîne.

  • Speaker #0

    On se retrouve très vite.

  • Speaker #1

    Mais en attendant, vous pouvez rejoindre la communauté sur Instagram, Twitter, Facebook, sous le nom ElleMarianneFR. Je vous dis à bientôt.

  • Speaker #0

    Bonjour.

Description

Au lendemain des élections législatives anticipées du mois de juillet, quel est le nouveau visage de l’Assemblée nationale et quelle est la place des femmes ?


En 2017, le nombre de femmes députées avait atteint un record de 38,8 %. Cependant, une première baisse a été enregistrée en 2022 avec 37,3 %, et cette diminution continue en 2024, puisque la proportion de femmes à l'AN est aujourd'hui de 36 %. En comparaison, le taux de féminisation du Sénat est de 36,8%.


Comment expliquer ce recul de la parité ? Quelles conséquences pour les avancées en matière de droits des femmes ?  En quoi cette campagne a invisibilisé les femmes pendant les débats télévisés ? Retour sur cette campagne éclair, qui a été incontestablement marquée par un climat de violences et de tensions palpables. 


Pour analyser la situation, j'ai le plaisir d'accueillir Fiona Texeire, Conseillère politique, enseignante à Sciences Po Rennes et co-fondatrice de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique à l'origine du #MeTooPolitique et autrice du podcast Y'a pas mort d’homme diffusé sur Binge audio. 



Références de l'épisode :




Pour suivre Fiona Texeire :


🎙 Pour soutenir le podcast gratuitement :

1. Abonnez-vous 🔔

2. Laissez un avis 5 étoiles ⭐⭐⭐⭐⭐ sur Apple Podcast ou sur Spotify. 

3. Partagez l'épisode à 3 personnes autour de vous ! 📢


Vous pouvez allonger la durée de vie du podcast en laissant un don sur Tipee. 🙏 

 

Pour suivre le podcast :

Retrouvez le podcast sur les réseaux sociaux avec le compte @LMariannesfr

Bonne écoute !    


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis Laurie Théron et je vous accueille sur mon podcast Les Mariannes. Dans cette émission, que j'ai conçue pour vous aider à prendre toute votre place dans la vie publique de notre société, je reçois des femmes politiques et des activistes qui inventent le monde de demain. Mesdames,

  • Speaker #1

    vous êtes légitimes, vous avez votre place, vous êtes compétentes. Investissez-vous dans cette vie politique ? Il faut du courage pour faire de la politique, que l'on soit homme ou femme.

  • Speaker #0

    Mais je crois qu'on ne pardonne à rien nos femmes.

  • Speaker #1

    On vient vous chercher parce que vous êtes une des pièces du puzzle qui va faire gagner. Un message qui, moi, m'a été transmis alors que j'étais jeune et que je n'avais pas forcément confiance en moi. On m'a dit, Sophie, il faut y croire, toujours y croire.

  • Speaker #0

    Quand vous doutez de vous, pensez-vous. Avec les Mariannes, je vous propose de partir à la rencontre de femmes qui s'engagent dans leur territoire. ou à l'échelle nationale, pour défendre leurs idées et construire différemment le monde de demain. Quant à moi, je suis une passionnée de politique et d'engagement et je rêve d'une société plus égalitaire. J'ai passé 7 ans dans la peau d'une collaboratrice parlementaire au Sénat et j'accompagne aujourd'hui les entreprises et les changemakers dans leur communication digitale et la conception de leur stratégie éditoriale. Pour soutenir ce podcast et permettre au maximum de personnes de bénéficier de son contenu, Abonnez-vous, notez le 5 étoiles et partagez-le autour de vous. Je suis évidemment présente sur les réseaux sociaux, vous me retrouverez avec le compte ElmarianneFR. Enfin, pour être informé de la sortie d'un nouvel épisode, abonnez-vous à la newsletter que vous trouverez sur mon blog. Et puis vous pouvez aussi soutenir financièrement le podcast en laissant un don sur la plateforme Tipeee. Bienvenue dans l'univers des Mariannes. Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Les Mariannes. Aujourd'hui j'ai le plaisir d'accueillir Fiona Texer, une femme aux multiples engagements, elle est conseillère politique depuis 15 ans, enseignante en sciences po-reines, cofondatrice de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique et autrice du podcast que vous avez peut-être écouté, Y'a pas mort d'homme, qui a été publié sur Binge Audio. Alors je vous propose cet épisode au lendemain des élections législatives anticipées qui ont eu lieu après la dissolution de l'Assemblée nationale par le Président de la République. On va s'interroger sur le visage de cette nouvelle Assemblée nationale et évidemment sur la place que vont occuper les femmes dans cette nouvelle Assemblée. Pour vous donner quelques repères, le nombre de femmes députées avait atteint son record en 2017. On avait constaté une première baisse en 2022 et en 2024, leur nombre recule toujours. puisqu'on est passé de 2017 à 38,8% à aujourd'hui 36%. Alors comment expliquer ce recul de la parité ? Quelles conséquences concrètes en matière de droits des femmes ? En quoi cette campagne Éclair a été marquée par un climat de violence, mais aussi par l'invisibilisation des femmes sur les plateaux télévisés ? Nous discuterons de tout ça avec Fiona Texer. Enfin, à travers cette conversation, vous découvrirez aussi les nombreux engagements professionnelle et militante de Fiona Texer, qui évolue depuis 15 ans dans le milieu politique qu'elle connaît donc parfaitement. Je vous souhaite une très belle écoute et surtout je vous souhaite de passer un très bel été. N'oubliez pas quand même de faire une pause pour recharger vos batteries et je vous dis à très vite. Bonjour Fiona.

  • Speaker #1

    Bonjour Laurie.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté mon invitation sur le podcast des Mariannes à l'issue des élections en législative anticipée de dimanche dernier. Alors on va commencer cette interview avec le traditionnel portrait chinois. Alors, si vous pouviez dîner avec une grande femme de l'histoire, qui choisiriez-vous ?

  • Speaker #1

    Gisèle Halimi.

  • Speaker #0

    Si vous aviez une heure de plus chaque jour, que feriez-vous ?

  • Speaker #1

    Du yoga.

  • Speaker #0

    Et si vous aviez un super pouvoir, ce serait lequel ?

  • Speaker #1

    Peut-être de remonter dans le temps et de faire en sorte que la révolution française soit plus féminine et plus féministe et qu'on entende les femmes dès la première heure, qu'on entende les femmes comme l'homme de gauche depuis le début et peut-être qu'on ne serait pas dans la situation dans laquelle on est si on avait écouté les femmes plus tôt.

  • Speaker #0

    On aurait gagné du temps, ça c'est sûr. Alors, nous enregistrons cet épisode quelques jours après le deuxième tour des élections législatives anticipées du 7 juillet. L'Assemblée nationale a un nouveau visage et elle compte désormais 36% de femmes, c'est-à-dire moins qu'en 2022 et moins qu'en 2017. Quelle est votre réaction par rapport à ce recul des femmes ?

  • Speaker #1

    C'est une très mauvaise nouvelle. C'est une mauvaise nouvelle parce que ça montre que les lois de parité ont des limites. Il y avait une progression assez constante depuis les lois de parité, c'est-à-dire en gros de 2002, donc des élections législatives de 2002 jusqu'en 2017. Et on a peut-être pensé trop rapidement que cette progression serait constante jusqu'à ce qu'on atteigne 50%. Et aujourd'hui, on voit qu'on recule élection après élection et donc ça souligne plusieurs choses. D'une part, que la loi n'est pas assez contraignante puisque la loi n'oblige pas les partis à présenter autant d'hommes que de femmes. Elle émet juste des incitations financières et certains partis ont clairement les moyens de passer outre la loi. Ce sont même des choix financiers qui sont faits et puis d'autre part que les partis politiques ne font pas assez d'efforts puisqu'en fait quand on ne les y contraint pas, ils ne le font pas d'eux-mêmes. Ce sont les partis qui font les choix d'investir telle ou telle personne. Ce sont les partis qui font dès le début le choix d'investir moins de femmes que d'hommes. Par ailleurs, on sait qu'ils font le plus souvent le choix d'investir des femmes dans des circonscriptions moins bonnes, moins gagnables. Et donc, in fine, il y a moins de femmes à l'Assemblée nationale. Et ça, oui, c'est une décision qui relève des États-majors des partis.

  • Speaker #0

    À votre avis, quelles conséquences cela va avoir en matière de droits des femmes, en matière de législation, cette baisse constante des femmes dans la vie politique ?

  • Speaker #1

    Ça a plusieurs types d'effets. Je pense que ça a un effet immédiat, et ça je le dis parce que j'étais collaboratrice parlementaire, c'est en effet sur l'environnement de travail à l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale, c'est évidemment le lieu où on fait la loi, mais c'est aussi un environnement de travail pour des centaines de personnes. Et plus un climat de travail est masculin, plus on sait qu'il est propice à un climat de harcèlement sexuel ou d'agression sexuelle. Et donc c'est une mauvaise nouvelle pour les femmes qui travaillent à l'Assemblée nationale, qu'elles soient... députées, fonctionnaires, collaboratrices et même dans une certaine mesure les journalistes, enfin toutes les femmes qui sont amenées à côtoyer ce lieu. Je pense que ce qui donnera un signal, c'est est-ce que le président ou la présidente de l'Assemblée s'engagera enfin à prendre un plan de lutte contre les violences sexistes et sexuelles à l'Assemblée. À l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, on avait fait des propositions en 2022. On avait notamment... souligner qu'il était important qu'il y ait une formation obligatoire pour tous les personnels de l'Assemblée, pour tous les élus, les collaborateurs, les collaboratrices, les fonctionnaires. Ça n'avait pas été le cas. Et il y a tout un tas de mesures qu'on pourrait mettre en place pour limiter le sexisme à l'Assemblée, c'est-à-dire sanctionner systématiquement les propos sexistes, avoir une cellule d'écoute digne de ce nom, être beaucoup plus intransigeant lorsqu'il y a des cas de harcèlement entre députés et collaboratrices. Par exemple, aujourd'hui, les députés sont très protégés, notamment par ce qu'on appelle la... la clause de loyauté qui leur permet en gros de licencier leurs collègues quand ils ne sont pas d'accord, y compris lorsqu'il y a des dénonciations de violence. Il y a aussi quelque chose qui me choque, c'est que personne ne prend la peine de mesurer la réalité de ces violences à l'Assemblée. Il n'y a jamais eu de vraie enquête de victimation faite par les services de l'Assemblée nationale et donc aujourd'hui on ne mesure pas le problème et donc on n'apporte aucune solution en interne. Donc voilà, ça aura des conséquences d'abord sur le climat de travail à l'Assemblée. Après, ça aura probablement des conséquences au-delà, c'est-à-dire Qu'est-ce que cette Assemblée va réserver aux propositions en faveur de la protection ou de l'extension des droits des femmes ? Si on fait un recul historique, si on prend la Ve République, on se rend compte que toutes les mesures législatives qui ont permis d'avancer sur la question des droits des femmes, que ce soit l'IVG, la pénalisation du viol, la pénalisation du harcèlement sexuel, toutes ces questions-là, elles ont été portées par des femmes. Il y a une exception, c'est la loi Neuvirth sur la contraception. Mais sinon, toutes ces grandes avances-là ont été portées par des femmes. Et en fait, quand on regarde dans le détail, on se rend compte que les hommes politiques ne s'intéressent pas ou peu aux droits des femmes. Et c'est le même flagrant. On a eu un exemple assez parlant, je trouve, cet hiver, lorsqu'il y a eu le texte pour constitutionnaliser l'IVG et qu'il y avait un petit moment de blocage au Sénat. Ce qui a permis de faire basculer, en fait, l'opinion des sénateurs, c'est que les sénatrices en faveur de cette réforme et les militantes se sont mises à faire pression sur les épouses, les sœurs, les filles, les nièces, les sénateurs conservateurs qui bloquaient le texte, parce qu'eux ne voyaient pas l'intérêt, en fait. Et c'est dire, si eux-mêmes ne voient pas l'intérêt d'un projet de société, il fallait convaincre leurs entourages féminins d'accepter. Donc voilà, moi, ce qui m'inquiète, c'est qu'on va avoir une assemblée plus masculine et on va avoir aussi une assemblée beaucoup plus conservatrice que la précédente, puisque la poussée du RN n'est pas une bonne nouvelle pour les droits des femmes. Là où l'extrême droite... passe, les droits des femmes trépassent. Et on peut aussi d'ores et déjà constater qu'il y a des profils très inquiétants au RN, notamment des cas d'hommes violents avec leurs conjointes qui ont été élus.

  • Speaker #0

    Oui, alors je rebondis sur cette question des hommes politiques condamnés pour pure violence. Damien Bade, Adrien Quatennens ou Julien Bayou ne sont plus députés. Vous qui aviez cofondé l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles, est-ce que vous vous en réjouissez aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Ce qui est certain, c'est que la dissolution, elle a eu pour conséquence la clarification. Ça a permis au moins ça, et ça a permis de clarifier le statut de député qui était déboulé pour leur camp. Le premier à retirer sa candidature dans la course aux législatives, c'était Julien Bayou, qui de toute façon avait déjà quitté l'ELV et son groupe parlementaire. Lui, il était visé par une plainte pour harcèlement moral et à Bûche-Roduleux, l'état de faiblesse. Et ensuite, les militantes de gauche ont dû très fortement se mobiliser pour le retrait de la candidature d'Adrien Quatennens, qui était le seul à avoir été condamné pour violences conjugales à l'Assemblée nationale, mais qui lui était soutenu par la direction de l'ELFI. Et donc, il a finalement dû admettre que... Son maintien a été intenable pendant cette campagne. Mais ce qui est intéressant, c'est qu'en fait, une fois qu'il s'est désisté, c'est à ce moment-là que le camp d'Emmanuel Macron s'est mis à lâcher Damien Abad, qui lui est mis en examen pour tentative de viol et qui a été éliminé au premier tour. Et autre conséquence que ça a eu sur le camp présidentiel, c'est que Jérôme Perra, qui lui est conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine, qui était candidat en Dordogne et qui était condamné pour violence conjugale lui aussi, ce qui s'est passé avec Jérôme Perra, c'est qu'en fait, la Macronie a mis un... candidat face à lui, mais c'était un candidat fantôme, dans le sens où il n'habitait pas la circonscription, où il n'a pas déposé sa profession de foi, et donc il n'y avait pas de bulletin pour lui dans les bureaux de vote au premier tour. Mais la manœuvre n'a pas suffi et lui aussi, il a été éliminé au premier tour. Donc oui, moi je me réjouis qu'au moins, ces boulets pour leur camp politiquement, et puis ces hommes qui ne sont pas les amis des droits des femmes. soit écarté de l'Assemblée. Après, on notera que Gérald Darmanin a été réélu et que, par exemple, Frédéric Bocchaletti, député RN du Var, a été réélu. Sa femme a livré récemment un témoignage glaçant de violences conjugales.

  • Speaker #0

    Alors, j'aimerais qu'on revienne un peu sur le moment de la campagne et notamment de l'entre-deux-tours. Vous, vous avez signé une tribune avec d'autres personnes qui a été publiée dans Libération, tribune en date du 2 juillet dernier, pour dénoncer l'invisibilisation des femmes. dans la campagne, dans cette campagne législative, au cours de laquelle elles n'ont représenté les femmes que 41%, qu'on les a moins vues sur les affiches, mais on les a moins vues aussi sur les plateaux télé. Qu'est-ce que vous en avez pensé de ça ?

  • Speaker #1

    Les partis ont beaucoup prétexté l'urgence de la situation pour s'excuser sur le fait qu'ils n'ont pas été à la hauteur sur les droits des femmes. Je pense que c'est un problème de prétexter l'urgence parce que ça veut dire que les droits des femmes ne se poseraient qu'en période d'élection. Or c'est un sujet sur lequel les partis doivent faire des efforts au quotidien. Et on voit qu'ils n'ont collectivement pas été bons sur la question des investitures, même s'il y a des nuances. Le populaire se rapprochait de la parité et les républicains, par exemple, en étaient extrêmement loin. Mais après, il y a eu aussi qui on met en avant dans cette période. Et c'est vrai que la campagne a cruellement manqué de figures féminines. Et en fait, les figures féminines qui émergeaient ont été silenciées, c'était le sens de cette tribune. C'est-à-dire que... Le fait que le Nouveau Front populaire est comme figure 4 chef de parti, il y avait eu une espèce de répartition des débats entre eux dès le début. C'est-à-dire que Manuel Bompard allait au premier débat, Olivier Faure allait à un autre, et Marine Tondelier allait encore à un autre. Et lorsque le jour du débat Tondelier-Bardella approchait, Bardella a signifié son refus de débattre avec elle. Ce qui veut dire qu'il a privé Marine Tondelier de débat. En un sens, qu'il ait eu peur, qu'il n'ait pas eu envie, ça, ça lui appartient. On ne peut pas lui reprocher. Ce qui est sidérant, c'est que BFMTV ait accepté cette situation et qu'ils aient laissé faire, puisque la silenciation des femmes dans l'espace public, c'est la responsabilité des médias qui leur donnent ou qui ne leur donnent pas la parole.

  • Speaker #0

    Alors, une campagne aussi marquée par la violence, avec un climat de tensions très palpables. Plus de 50 agressions recensées partout sur le territoire, selon une source du ministère de l'Intérieur. On pense bien sûr à l'agression médiatisée de Priska Thevenot, porte-parole du gouvernement, agressée avec son équipe à Meudon alors qu'elle collait des affiches. C'est un phénomène qui existait déjà, la violence dans la vie politique, que ce soit pour les hommes ou pour les femmes, mais c'est un phénomène qui s'est intensifié pendant cette campagne ?

  • Speaker #1

    Ah oui, indiscutablement, ça s'est intensifié. Ça s'est intensifié dans la campagne contre les candidats, puisqu'il y a eu une hausse des agressions. On a cité Priska Thevenot. Après, il y a eu des remontées en fait dans tout. Les équipes, que ce soit de l'extrême droite jusqu'à la gauche, tous ont rapporté avoir été victimes d'attaques de l'autre camp. Et puis, il y a eu une violence, surtout libérée dans la société, avec une hausse des agressions racistes, des agressions homophobes, des propos intolérables qui ont pu être tenus et dont on a vu l'écho dans les médias. On pense à la séquence d'envoyé spécial avec cette femme divine, aide-soignante, insultée par ses voisins dans le Loiret. Et puis aussi, un petit côté, on a lâché la rampe, on a lâché les chiens sur les agressions de journalistes. Je pense notamment aux journalistes du service public, Karim Vessouli et Mohamed Bouafsi, qui ont été intimidés également par... Des courriers notamment, donc une campagne vraiment marquée par les violences envers les politiques, envers les médias et envers les concitoyens qui ont le malheur de déplaire l'extrême droite aussi.

  • Speaker #0

    Alors dans l'entre-deux-tours, on a découvert la figure de Marine Tondelier, secrétaire nationale d'Europe Écologie Les Verts. On l'a découverte en larmes au micro de France Inter. Elle s'est imposée comme une nouvelle figure. On l'a beaucoup comparée à Jacinda Ardern pour son côté authentique. Selon vous, en quoi Marine Tondelier assume une posture politique un peu différente ?

  • Speaker #1

    Moi, je suis contente qu'on l'ait découverte, parce que moi, je la connais depuis une quinzaine d'années. Donc, ça me fait plaisir que la France, maintenant, la connaisse. Et je crois que sa force à Marine Tondelier, ça a été de rappeler que la politique, elle se fait avec des convictions, mais aussi avec des émotions. Dans la séquence que vous citez sur France Inter, elle... Elle rappelle en fait que l'empathie est politique et dans cette séquence, elle est émue parce qu'elle revient sur des propos tenus par Bruno Le Maire et elle, elle dit qu'en fait, la politique, elle a des conséquences très concrètes sur la vie des gens et que seuls des privilégiés comme Bruno Le Maire peuvent feindre de l'ignorer en fait. Et ce qu'on doit à Marine Tondelier, c'est aussi d'avoir un très fort ancrage local. Elle est élue d'opposition à Énard Beaumont, donc le fief de Marine. Le Pen, elle sait ce que c'est aussi que de subir le RN au pouvoir localement. Je crois que ça fait aussi sa force, cette connaissance du terrain, mêlée à une vraie empathie, une vraie sensibilité. Puis après, on a beaucoup parlé de sa veste, puisque le style aussi est politique. Et donc sa veste vert, je crois qu'on appelle ça le vert véronèse, ça a permis de la rendre identifiable sur les plateaux, ça a permis de la rendre identifiable sur le terrain. Et puis... Et puis c'était un coup très bien joué, puisque ça envoie un message clair et lisible, à la fois la respectabilité de la veste et puis aussi l'intransigeance sur les convictions. Moi, elle me rappelle un petit peu, dans un même registre, le côté girl next door qu'on appréciait chez Cécile Duflo il y a une dizaine d'années. À la fois, voilà, bonne camarade, proche des gens. Et puis, je trouve que ce qui a marqué aussi, lors du deuxième dimanche électoral, c'était son excellent tréparti, notamment face à Jean-Philippe Tanguy. Tout ça fait qu'elle sort très populaire et renforcée de la séquence.

  • Speaker #0

    On a parlé de l'importance des femmes dans la vie parlementaire de notre pays. Alors comment renforcer l'accès des femmes à la vie politique ? Et faut-il aller plus loin en matière de parité dans la loi ?

  • Speaker #1

    Moi, je crois qu'il n'y a que la loi qu'on comprend en matière de parité. En fait, quand on regarde à tous les échelons, il y a de la parité là où la loi est contraignante. Il n'y en a pas là où la loi ne dit rien. Si on prend les conseils municipaux, les conseils régionaux, les conseils départementaux, il y a à peu près 50-50 de conseillers et de conseillères. Par contre, si on prend les exécutifs, les têtes, les maires, les présidents de conseils départementaux, les présidents de conseils généraux, là, la parité n'existe pas. Parce qu'en fait, il y a zéro contrainte. Il y a une parité parfaite au Parlement européen parce que la loi l'oblige. Et puis, il n'y en a pas au Parlement national parce que la loi ne l'oblige pas. Et puis il y a aussi mille façons de contourner la loi. Quand on regarde au Sénat, si aujourd'hui il n'y a pas la parité au Sénat, c'est parce qu'il y a plein de façons de contourner la loi, notamment de présenter des listes dissidentes, d'avoir des ententes sur le fait de présenter deux fois des hommes tête de liste dans certains départements. Il y a plein de façons de contourner la loi et on les connaît, elles sont visibles, elles sont même devenues grossières. Si on veut vraiment la parité... il faut renforcer la loi, il faut que ça passe par la loi. Les partis ne comprennent que ça. Après, on nous dira aussi, ah mais oui, mais on a du mal à trouver des candidats. C'est les partis qui le disent. Les femmes n'osent pas se lancer, etc. Mais moi, j'ai envie de leur demander, qu'est-ce que vous faites pour que les femmes se lancent ? Pourquoi est-ce qu'il y a encore des barrières et des censures ? Est-ce que vous avez réfléchi à quelle heure tombent vos réunions ? Est-ce que vous avez réfléchi à... à l'articulation entre les temps de vie privée, de vie professionnelle et de vie politique. Est-ce que vous avez réfléchi à la sécurité financière des femmes dans les campagnes ? Parce qu'en fait, une campagne, ça coûte de l'argent, surtout quand on n'est pas sûr de se faire rembourser, et que les femmes gagnent moins d'argent que les hommes. Qu'est-ce que vous faites pour leur garantir un meilleur accès ? Il y a plein de leviers sur lesquels on peut jouer, que ce soit les heures des réunions, la façon de faire de la politique, quand est-ce qu'on arrêtera de valoriser ? le mâle alpha, le grand tribun, l'homme qui porte ses couilles, c'est quand même ça dont on parle. On peut valoriser autre chose en politique et on peut faire de la place, mais ça demande de faire des efforts et ça demande aussi de casser des styles ou des référentiels politiques qui aujourd'hui sont parfois présentés comme neutres, alors qu'en fait ils sont extrêmement masculins.

  • Speaker #0

    Alors c'est une transition parfaite pour ma prochaine question qui vous est adressée plus personnellement. Vous, votre parcours il est marqué par la politique bien sûr. Vous avez travaillé 15 ans en tant que collaboratrice d'élu. Vous travaillez depuis 15 ans en tant que collaboratrice d'élu. Est-ce que vous, vous n'avez jamais pensé à passer de l'autre côté ?

  • Speaker #1

    Alors non, jamais. Pour moi, ça a toujours été une grosse ligne rouge. Mais je pense aussi parce que j'ai une très haute estime de la politique et que pour avoir beaucoup côtoyé les élus, j'ai une image de la fonction qui, à mon sens, doit être exemplaire. Et je pense aussi que c'est un type d'engagement dans lequel on ne peut pas faire une franche séparation entre le privé et le politique, et qui est extrêmement engageante et qui est extrêmement impliquante. Et que moi, j'ai toujours tenu à me dire si j'ai envie d'avoir une vie à côté, si j'ai envie de ne pas être tenue par la responsabilité. Eh bien, en fait, moi, c'est juste mon travail. Et à un moment donné, je rentre chez moi, j'éteins mon téléphone. Donc, je pense que c'est une charge qui est extrêmement haute et qui est extrêmement importante. Et moi, j'ai toujours trouvé que ma place était davantage dans l'ombre ou dans l'ombre. Eh bien, c'est un travail avant d'être un engagement.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu de votre métier de collaboratrice en quelques mots ? Quel est votre quotidien ? À quoi il ressemble ? Sur quel sujet est-ce que vous travaillez ? Pour celles et ceux qui n'auraient pas forcément une idée précise de ce que ça revêt d'être collaborateur d'élu.

  • Speaker #1

    Alors, c'est vrai que collaborateur d'élu, souvent, on ne sait pas ce que c'est. Et si on sait ce que c'est, on a souvent une mauvaise image parce que malheureusement... J'ai envie de dire que ce sont les pires d'entre nous qui font le plus par les deux, puisqu'un bon collaborateur, c'est quelqu'un qui reste dans l'ombre et qui sait rester à sa place. C'est-à-dire que Pénélope Fillon ou Alexandre Benalla n'étaient pas de bons collaborateurs, puisqu'ils ont trop fait par les deux. Donc moi, j'ai fait ça pendant 15 ans. Je travaillais, vous l'avez rappelé, en mairie, au Sénat, en cabinet de l'Install, à Matignon. J'ai travaillé pour des personnalités de la gauche et de l'écologie. Et puis j'ai fait différents types de postes. J'étais collaboratrice parlementaire, donc dans un travail plutôt... J'étais secrétaire générale de groupe parlementaire, qui a un travail de coordination dans le groupe politique, à la fois en interne, où c'était au Sénat, et puis aussi en externe, dans la relation avec, par exemple, l'Assemblée, le parti politique, etc. J'étais chef de cabinet, qui est plutôt un travail de logistique et de planification du temps et des déplacements des élus. Et puis j'étais conseillère, donc davantage dans la production de notes, de conseils, etc. S'il y en a parmi vous qui hésitent à y aller, j'ai envie de vous dire, faites-le. C'est très formateur, surtout quand vous êtes jeune diplômé. Le profil idéal, c'est d'être quand même jeune diplômé en droit ou en sciences politiques et puis avec des affinités partisanes. Ce n'est pas obligatoire, mais c'est toujours un atout. Faites-le, mais sachez aussi que c'est dur. C'est passionnant, mais c'est dur. Moi, je trouve que c'est un milieu traumatisant qui est violent. Moi-même, j'ai subi du harcèlement sexuel et des agressions sexuelles au travail. Et pendant trop longtemps, elles ont été passées sous silence. Donc il faut aussi y aller en se disant qu'il est probable qu'on n'en sorte pas un d'un quand même. Donc il faut apprendre à se protéger et il faut essayer d'exercer ce métier dans les meilleures conditions possibles.

  • Speaker #0

    Alors pour ceux qui rêvent de ces carrières, quel est le conseil numéro 1 à donner ? Quand on n'a pas de réseau, qu'on n'a pas de contact, qu'on ne sait pas comment s'y prendre, est-ce que les candidatures spontanées fonctionnent ? C'est une question qu'on me pose souvent.

  • Speaker #1

    Ça ne coûte rien d'essayer. En tout cas, ça ne coûte rien d'essayer. Après, l'idéal, c'est de quand même se renseigner sur la personne que vous targettez, sinon c'est plus difficile. Et puis, les campagnes sont des bons moments aussi pour se frotter un peu à la politique. Là, on vient de vivre une campagne express, mais c'est très intéressant si vous n'avez jamais vu ça de votre vie. Si ça se trouve, il y aura des élections dans un an, donc vous pouvez retenter le coup. Mais c'est intéressant d'aller suivre un candidat au quotidien, de voir ce que c'est que la rencontre avec les gens. de se rapprocher de l'équipe de campagne, de voir ce que c'est que d'aller tracter sur un marché, faire du porte-à-porte. Donc ça, c'est une bonne porte d'entrée, c'est de se rapprocher d'une équipe. Après, il y a plein de façons d'y aller, qui sont des façons thématiques. Vous êtes expert sur un sujet, je ne sais pas, ça peut être le numérique, ça peut être les libertés publiques, les finances. Regardez les députés qui siègent dans ces commissions et qui sont passionnés pour ces sujets-là. Il y a plusieurs types de portes d'entrée. L'idéal, c'est... La compétence, sachant qu'être généraliste est aussi une compétence, et l'affinité partisane, mais on a aussi des profils qui arrivent tout à fait à se refiler autrement. Et puis ça dépend si vous voulez davantage travailler sur le terrain, en circonscription ou à l'Assemblée nationale. Ça dépend si vous êtes plutôt des professionnels du droit ou de la communication. Les gens qui écrivent très bien aussi sont des profils recherchés. On a toujours besoin de plumes dans ce métier. Bref, il y a plein de possibilités. Pensez aussi au Parlement européen. On les oublie un peu trop souvent et il y a plus de postes là-bas. Les équipes sont plus nombreuses. Bref, il y a plein de façons de s'y prendre. Le seul conseil que j'ai à donner, c'est de soyez vraiment motivé parce que c'est dur et c'est chronophage. Donc autant y aller en ayant vraiment envie d'y aller.

  • Speaker #0

    Merci. Alors, vous avez mentionné les agressions dont vous avez été victime dans le cadre de votre travail de collaboratrice d'élu. Est-ce que c'est ça qui vous a donné envie de cofonder l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles et de prendre part à ce grand mouvement sociétal du MeToo politique ? Parce que dès 2021, vous avez été à l'initiative de nombreuses tribunes publiques pour dénoncer les violences sexuelles et sexistes dans ce milieu politique. Vous avez exhorté les partis à écouter les victimes. Donc est-ce que c'est finalement cette expérience du terrain qui vous a donné envie de... De militer ?

  • Speaker #1

    Absolument, oui, c'est la raison pour laquelle j'ai été à l'initiative de MeToo Politique il y a trois ans, pour alerter sur ce sujet, pour montrer que les violences, elles sont systémiques, que ce ne sont pas des cas isolés, parce qu'en fait, on les retrouve dans toutes les familles politiques, de l'extrême gauche à l'extrême droite, jusqu'à l'extrême centre, et puis aussi à tous les échelons de pouvoir. C'est-à-dire que j'ai reçu des témoignages de femmes qui ont été agressées par un conseiller municipal dans un tout petit village, et puis parfois, ça se passe aussi au plus haut sommet de l'État. Et en fait, on peut être tenté de penser que ces violences, elles sont loin de soi lorsqu'on est loin de la politique, que oui, c'est un problème de collaboratrice parlementaire. Bon, quand même, c'est déjà un problème, mais en fait, ça peut concerner n'importe qui. Si on prend le cas de Nafissatou Diallo, qui a été la victime de Dominique Strauss-Kahn, on voit bien que sa vie ne la prédestinait pas à côtoyer des hommes politiques. Et en fait, ça peut concerner n'importe qui dans le sens où... Les histoires récentes nous ont montré qu'il était concerné les épouses, les administrés qui venaient demander des services, des militantes, des journalistes, des collègues élus, des fonctionnaires et des collaboratrices, mais en fait ça peut être n'importe qui. Et donc c'est pour ça que moi il me semble important de marteler aux partis politiques qu'il faut prendre au sérieux cet enjeu et qu'il faut cesser de promouvoir, d'embaucher, d'investir des hommes violents. Souvent les profils sont connus dans les partis, il y a toujours ce truc de... Ah oui, tout le monde savait, mais personne n'a rien dit. Ben non, mais en fait, si on sait, il faut le dire et puis il faut empêcher de nuire. Parce qu'en fait, ça cause un double problème. C'est à la fois un problème de santé publique, parce que les violences sexuelles sont un problème de santé publique, mais c'est aussi un problème démocratique, parce qu'en fait, il y a des femmes qui quittent la politique parce qu'elles sont dégoûtées. Et quand on enlève toutes les dégoûtées, à la fin, il ne reste que les dégoûtants. Et c'est ce qui fait qu'on tourne en rond. Et évidemment que les... que les commissions électorales ont du mal à trouver des femmes pour aller mener telle ou telle campagne. Si elles ont été aussi mal accueillies et si elles ont été aussi violentées, pourquoi s'investir ?

  • Speaker #0

    Est-ce que les commissions électorales doivent être paritaires ? Est-ce qu'elles le sont déjà ?

  • Speaker #1

    Alors ça, ça dépend des parties, des statuts des parties. C'est très varié. Il n'y a aucune obligation qu'elles le soient. C'est au libre vouloir des parties, au bon vouloir des parties.

  • Speaker #0

    Dans le cadre de votre action à l'Observatoire, pour ne citer qu'une des actions, parce qu'elles ont été très nombreuses, mais j'ai envie de parler d'un long rapport fleuve dans lequel vous avez étudié les discours des personnalités politiques accusées de violences, un travail vraiment titanesque. Vous avez recensé les stratégies de défense, les réactions des hommes politiques, les réactions de leurs entourages aussi et des organisations politiques. Pourquoi ce rapport et quel accueil est-ce qu'il a reçu ? Alors ce qu'on voulait montrer en fait c'est que les violences ont bien ce caractère systémique et on a pris des exemples de gauche comme de droite. On analyse la communication de Nicolas Hulot, de Gérald Darmanin, mais aussi d'Éric Zemmour, mais aussi d'Adrien Quatennens ou d'Éric Coquerel. Et en fait de montrer que ça n'est pas une histoire de camp politique, ça n'est pas une histoire de niveau de mandat. Toujours la même histoire, c'est l'histoire d'hommes qui vont déployer les mêmes arguments à chaque fois qu'une accusation va être portée contre eux. La première de leurs réactions, c'est de dire qu'ils n'ont rien fait, ou si c'est impossible de minimiser les faits, de rappeler qu'il y a tel contexte et qu'en fait, ce n'était pas si grave, mais que c'était une gifle, oui, mais que cette gifle n'a pas laissé de traces, oui, mais que le contexte était quand même un divorce. On trouvera toujours une bonne raison. La deuxième chose qu'ils vont faire, c'est essayer de... de manipuler le vocabulaire juridique pour qu'on perde un peu l'essentiel du message. On va entendre des phrases un peu comme je me tiens à la disposition de la justice Toujours montrer qu'on a le droit derrière soi. Je pense par exemple à Damien Abad lorsqu'il a été mis en examen. Pour qu'un député soit mis en examen, il faut que le parquet demande au bureau de l'Assemblée nationale de lever son immunité parlementaire. Le bureau de l'Assemblée nationale a levé l'immunité parlementaire de Damien Abad. Mais Damien Abad est venu expliquer à l'AFP que c'est lui qui l'avait demandé, alors qu'il n'a rien à voir dans la procédure, comme pour montrer qu'il était du bon côté du droit, alors que non. Le Barquet a transmis la demande au bureau, le bureau a répondu, Damien Abad n'a rien à faire dans cette histoire. Et donc, sans cesse se présenter comme dans son bon droit, ça c'est le deuxième trait commun à toutes les stratégies de défense. Et puis, le troisième, en fait, ça va être d'expliquer que c'est globalement un... complot politique contre eux. Ce ne sont pas leurs faits et gestes qui sont en cause, puisque de toute façon, ils n'ont rien fait, mais qu'on veut attaquer leur honneur et leur combat politique. Donc, en fait, expliquer que les femmes mentent et qu'elles sont manipulées à des fins politiques. C'est un peu la constante de toutes ces défenses-là. Et pourquoi avoir montré ça ? Eh bien, en fait, pour montrer que sans solution globale, on ne s'en sortira pas. traiter au cas par cas tous ces sujets-là, c'est bien, il faut le faire. Idéalement, que les partis politiques et les familles politiques s'en saisissent, c'est mieux. Mais que si on refuse de voir le tableau global, on aura une vie politique qui sera gangrénée par les violences sexuelles pendant encore très longtemps.

  • Speaker #1

    Parmi les solutions que vous proposez pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, il y a la création d'une instance, une supracellule d'écoute qui pourrait réceptionner... les témoignages et les signalements des victimes. Est-ce que les partis vous ont écouté en ce sens ? Encore une fois, est-ce que cette proposition a reçu un accueil favorable de la part des principaux concernés ? Alors,

  • Speaker #0

    pas du tout, parce que les partis ont quand même tendance à mettre des œillères jusqu'à ce que les scandales éclatent à la figure. Et c'est une proposition qui vient du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, qui est issu d'un de leurs rapports de 2019, et qui en fait fait un parallèle intéressant. avec la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Alors, pour faire un petit peu l'historique, vos auditeurs et vos auditrices se souviennent sûrement de l'affaire Cahuzac. L'affaire Cahuzac, elle éclate en 2012 quand Mediapart, puisque heureusement qu'il y a de la presse qui fait des enquêtes sérieuses, qu'elles soient sur les scandales financiers ou les scandales sexuels, Mediapart révèle les comptes cachés du ministre du Budget. Et à ce moment-là, on trouve une stratégie... pas très différente de ce que je viens de vous décrire. Jérôme Camusac qui dit que pas du tout, il n'a rien fait, que ce n'est pas lui, qu'on cherche à lui nuire et que de toute façon, tout le monde ment. Et bizarrement, comme c'est des questions d'argent, les gens s'intéressent davantage. Et en fait, à ce moment-là, la classe politique, elle a deux options. C'est-à-dire soit faire comme d'habitude, dire Ah mais oui, mais lui, c'était une brebis galeuse, on est désolés et puis on passe à autre chose. Ou soit se dire On a un problème systémique, la confiance avec les citoyens est rompue et il faut qu'on... fassent quelque chose de fort, poser un acte politique important pour restaurer le lien avec les citoyens et pour empêcher que ça se reproduise. Et c'est à ce moment-là qu'est votée la loi pour la transparence de la vie publique, qui découle sur la création d'une haute autorité indépendante, la haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui en fait est chargée de contrôler la probité des hommes et femmes politiques de ce pays, et même des collaborateurs, des hauts fonctionnaires, bref. Avoir un super pouvoir de contrôle. Et aujourd'hui, quand vous discutez avec les élus, s'il y a bien une instance qui craigne... C'est celle-là. Et tout le monde a peur de se faire pincer pour une mauvaise déclaration, une maison de vacances qui a été oubliée, une histoire de SCI qu'on avait oubliée dans un coin. Bref, et en fait, quand on regarde aussi ce qui s'est passé depuis dix ans, depuis que la haute autorité existe, c'est que les grandes figures politiques qui sont tombées, elles sont tombées pour des histoires de mauvaise déclaration. Vous prenez par exemple Caroline Cailleu. qui a été ministre sous Macron il y a deux ans, elle n'est pas tombée parce qu'elle a tenu des propos homophobes, elle est tombée parce qu'elle avait une déclaration mal remplie. Vous prenez Laura Flessel, ou alors dans un autre registre, François de Rugy, avec son histoire de homard. Bon, on n'enlèvera pas l'idée qu'en fait, avoir fait une petite orgie de homard au frais du contribuable, c'est moins grave que des violences conjugales. Et pour autant, c'est ce type de scénario qui se produit. Aujourd'hui, on ne tolère pas. plus les manifestations financières en politique et je m'en réjouis. En fait ce qui nous manque c'est un électrochoc sur les violences sexuelles semblable à l'électrochoc qui a été l'affaire Cavusac et je ne comprends pas comment ce qui s'est passé ces dernières années sur Hulot, sur Katnins, sur Abad n'est pas encore servi de leçon.

  • Speaker #1

    Pour faire un mauvais jeu de mots il s'agit d'une hiérarchisation des périls.

  • Speaker #0

    Exactement.

  • Speaker #1

    Il faut une sacrée force quand même pour adopter le rôle de vigie que vous avez eu et que vous avez toujours pour oser dénoncer les actes de personnes puissantes, il faut le dire quand même, et pour essayer d'infléchir les positions des partis. Est-ce que vous, vous vous sentez parfois abattue ou impuissante ? A contrario, vous qui renvoyez comme une image de force, qu'est-ce qui vous donne cette force pour adopter ce rôle ?

  • Speaker #0

    Alors oui, c'est dur. et oui, ça repiète sur la santé mentale. Moi, j'ai fait un burn-out militant, par exemple, il y a 18 mois, parce qu'on se sent démoralisé, impuissant, qu'on se dit que l'ampleur de la tâche est trop importante. Et donc, il faut savoir bien s'entourer, il faut être soutenu et surtout, il faut savoir faire des pauses pour ensuite repartir si on en a envie ou alors se dire, c'est bon, j'ai fait ma part et je passe à autre chose. Après, je voudrais souligner aussi qu'il y a des façons de s'engager qui exposent davantage que d'autres. Moi, j'ai testé différents modes d'engagement. Par exemple, j'ai co-écrit une série documentaire pour Binge Audio qui s'appelle Y'a pas mort d'homme qui est une série en huit épisodes sur la violence sexuelle. Ce n'est pas la même chose, par exemple.

  • Speaker #1

    On mettra les références dans le descriptif de l'épisode.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas la même chose qu'organiser des manifs, ce n'est pas la même chose qu'avoir des prises de parole publiques, ce n'est pas la même chose que faire des contenus en ligne sur les réseaux sociaux. Moi, il y a eu aussi un autre type d'engagement qui m'a beaucoup plu. J'ai pu donner cours à Science Porraine pendant deux ans et créer un cours sur les violences sexistes et sexuelles. Ce qui est intéressant, ça veut dire qu'on est au contact de centaines d'étudiants pour faire passer des messages qui sont... aussi des messages de prévention sur ces questions-là. Donc il y a différents types d'engagement. Il y a différents types d'engagement. Ce qu'il faut, c'est savoir écouter ses limites, savoir s'arrêter lorsque l'on milite dans un environnement toxique, parce que le milieu militant, il n'est pas totalement exempt de violences non plus. Et puis, il faut savoir se reposer, surtout.

  • Speaker #1

    Vous avez des chiffres sur le burn-out militant ?

  • Speaker #0

    Alors moi, je ne connais pas de chiffres sur le burn-out militant. Néanmoins, je sais qu'il y a des ressources assez utiles. Je pense notamment au livre d'Elsa Deck-Marceau, Faire justice qui évoque la question notamment du burn-out militant dans les violences sexistes et sexuelles. Et puis également les travaux du sociologue Simon Cotter-Marx, qui a travaillé sur ces questions-là dans le milieu associatif.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. On mettra les références encore une fois dans le descriptif de l'épisode. Alors on s'approche de la fin de cette interview. Dans l'esprit de sororité du podcast, je vais vous inviter à nous donner quelques conseils. Alors des conseils en ce qui concerne les relations avec les médias. Vous, vous êtes quand même habitué des plateaux radio et télé ou des contacts avec des journalistes pour défendre vos idées et vos propositions. Qu'est-ce que vous conseilleriez à une personne qui veut prendre davantage la parole dans les médias ? Comment bien se préparer et comment ne pas trop stresser finalement avant une interview ?

  • Speaker #0

    Préparez-vous, préparez-vous bien. Ce n'est pas un exercice qui s'improvise. Je vous recommanderais vraiment de vous former avant de vous lancer. Parfois, on trouve des ressources dans les collectifs militants ou dans les partis. Il y a souvent des formations qui sont proposées. Je pense qu'il faut être très clair sur ce qu'on a à dire. Et le plus important, en fait, c'est d'avoir un message suffisamment clair et concis dans sa tête. pour pouvoir le restituer de façon claire et concise. Et j'ai envie de dire, peu importe les questions que vous posera la journaliste, ce qui compte, c'est votre message. Et souriez et êtes détendus.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous auriez un dernier conseil à transmettre aux femmes qui vont entrer au Palais Bourbon, tant que nouvelles députées, et aux femmes plus largement qui veulent s'engager, que ce soit dans des partis politiques, dans des associations, dans la société civile ? Quel conseil est-ce que vous aimeriez leur transmettre ?

  • Speaker #0

    Alors aux femmes députées, moi je donne toujours le même conseil, parce que j'ai des amis députés et à chaque fois je leur ai dit la même chose. Ne tombez pas dans le syndrome de la bonne élève. On a vraiment tendance à s'enfermer dedans en tant que femme, à vouloir être bonne partout, à garder ce côté première de la classe parce qu'évidemment chez les députés, il y a beaucoup de femmes qui ont été très fortes à l'école et qui sont très studieuses. Vouloir être bonne partout à l'Assemblée, c'est s'épuiser. Ce n'est pas bon signe de s'épuiser parce qu'on ne pourra jamais tout faire et jamais être bonne partout. Il faut prioriser dès le début du mandat ces combats, se répartir avec... ses collègues de sous-groupes parlementaires ou des intergroupes, les sujets sur lesquels on veut vraiment s'investir et se dire je ne serais pas partout au même moment, donc autant se limiter à ce que je sais faire de mieux ou ce qui me motive le plus Et il ne faut surtout pas négliger la circonscription, on le voit, c'est important de ne jamais casser le lien avec les électeurs et les électrices, surtout quand des législatives anticipées peuvent poindre à tout moment. Et puis formez-vous, formez-vous au management, formez-vous à la prévention contre les VSS. Pensez à vos collaborateurs et vos collaboratrices, c'est des métiers où la souffrance psychique est élevée. Ce sont des gens qui vont se donner pour vous bien au-delà de ce que permet le droit du travail pendant des années. Alors prenez soin d'eux, payez-les correctement et soyez polis et respectez le droit du travail autant que possible parce que c'est trop peu souvent le cas. Après un conseil aux femmes qui souhaitent s'engager en général, vraiment c'est le moment. On a beaucoup répété ces derniers temps la citation de Simone de Beauvoir, il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Je crois que la crise elle est là, elle est profonde. Et les résultats de dimanche dernier, c'est pas vraiment une victoire, c'est surtout un répit. Alors c'est le moment de s'engager, il y a plein de façons de le faire. La plus évidente peut-être que c'est de rejoindre un parti, mais il y en a plein d'autres. Si vous êtes... palais avec les partis politiques et la société civile qui a joué un rôle incroyable dans cette campagne. Je pense notamment aux initiatives de militantes comme Caroline Devasse qui ont su motiver et mobiliser des dizaines de milliers de personnes pendant cette campagne. Et puis les présidentielles c'est dans trois ans, c'est une course de fonds. Donc voilà si ça vous intéresse il y a le site indivisible.fr qui vous offre plein de ressources. Et puis il y a la société civile, il y a les partis, il y a aussi les syndicats. Peut-être le moment de se syndiquer. Je crois que des personnalités comme Sophie Binet, à la tête de la CGT, ont vraiment redoré l'image du syndicalisme récemment. Et puis, si vous décidez de vous engager, faites-le en vous faisant plaisir, en faisant ce que vous savez faire. Si votre truc, c'est de faire du porte-à-porte, d'être dans le contact avec des gens, faites ça. Si votre truc, c'est de faire des contenus sur les réseaux sociaux, faites ça. Mais si votre truc, c'est de faire des sandwiches et d'avoir une oreille attentive pour les militants qui sont épuisés, C'est bien aussi, en fait. Voilà, il faut savoir trouver sa juste place. Il y a de la place pour absolument tout le monde, peu importe vos compétences et peu importe le degré d'engagement que vous êtes prêt à y mettre. Et surtout, connaissez vos limites et arrêtez-vous avant de vous faire mal.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup, Fiona. Et une dernière question. Qui aimeriez-vous entendre sur les Mariannes ?

  • Speaker #0

    Marine Tondonier, la star du moment.

  • Speaker #1

    La star du moment. Effectivement, elle revient beaucoup dans les propositions des auditeurs et auditrices. Un grand, grand, grand merci pour ce partage hyper riche. Et on mettra évidemment toutes les références. Votre épouse est engagée. Si ce vote-là m'a parlé, je vous répète, vous avez le nom de 5e de ma chaîne.

  • Speaker #0

    On se retrouve très vite.

  • Speaker #1

    Mais en attendant, vous pouvez rejoindre la communauté sur Instagram, Twitter, Facebook, sous le nom ElleMarianneFR. Je vous dis à bientôt.

  • Speaker #0

    Bonjour.

Share

Embed

You may also like

Description

Au lendemain des élections législatives anticipées du mois de juillet, quel est le nouveau visage de l’Assemblée nationale et quelle est la place des femmes ?


En 2017, le nombre de femmes députées avait atteint un record de 38,8 %. Cependant, une première baisse a été enregistrée en 2022 avec 37,3 %, et cette diminution continue en 2024, puisque la proportion de femmes à l'AN est aujourd'hui de 36 %. En comparaison, le taux de féminisation du Sénat est de 36,8%.


Comment expliquer ce recul de la parité ? Quelles conséquences pour les avancées en matière de droits des femmes ?  En quoi cette campagne a invisibilisé les femmes pendant les débats télévisés ? Retour sur cette campagne éclair, qui a été incontestablement marquée par un climat de violences et de tensions palpables. 


Pour analyser la situation, j'ai le plaisir d'accueillir Fiona Texeire, Conseillère politique, enseignante à Sciences Po Rennes et co-fondatrice de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique à l'origine du #MeTooPolitique et autrice du podcast Y'a pas mort d’homme diffusé sur Binge audio. 



Références de l'épisode :




Pour suivre Fiona Texeire :


🎙 Pour soutenir le podcast gratuitement :

1. Abonnez-vous 🔔

2. Laissez un avis 5 étoiles ⭐⭐⭐⭐⭐ sur Apple Podcast ou sur Spotify. 

3. Partagez l'épisode à 3 personnes autour de vous ! 📢


Vous pouvez allonger la durée de vie du podcast en laissant un don sur Tipee. 🙏 

 

Pour suivre le podcast :

Retrouvez le podcast sur les réseaux sociaux avec le compte @LMariannesfr

Bonne écoute !    


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis Laurie Théron et je vous accueille sur mon podcast Les Mariannes. Dans cette émission, que j'ai conçue pour vous aider à prendre toute votre place dans la vie publique de notre société, je reçois des femmes politiques et des activistes qui inventent le monde de demain. Mesdames,

  • Speaker #1

    vous êtes légitimes, vous avez votre place, vous êtes compétentes. Investissez-vous dans cette vie politique ? Il faut du courage pour faire de la politique, que l'on soit homme ou femme.

  • Speaker #0

    Mais je crois qu'on ne pardonne à rien nos femmes.

  • Speaker #1

    On vient vous chercher parce que vous êtes une des pièces du puzzle qui va faire gagner. Un message qui, moi, m'a été transmis alors que j'étais jeune et que je n'avais pas forcément confiance en moi. On m'a dit, Sophie, il faut y croire, toujours y croire.

  • Speaker #0

    Quand vous doutez de vous, pensez-vous. Avec les Mariannes, je vous propose de partir à la rencontre de femmes qui s'engagent dans leur territoire. ou à l'échelle nationale, pour défendre leurs idées et construire différemment le monde de demain. Quant à moi, je suis une passionnée de politique et d'engagement et je rêve d'une société plus égalitaire. J'ai passé 7 ans dans la peau d'une collaboratrice parlementaire au Sénat et j'accompagne aujourd'hui les entreprises et les changemakers dans leur communication digitale et la conception de leur stratégie éditoriale. Pour soutenir ce podcast et permettre au maximum de personnes de bénéficier de son contenu, Abonnez-vous, notez le 5 étoiles et partagez-le autour de vous. Je suis évidemment présente sur les réseaux sociaux, vous me retrouverez avec le compte ElmarianneFR. Enfin, pour être informé de la sortie d'un nouvel épisode, abonnez-vous à la newsletter que vous trouverez sur mon blog. Et puis vous pouvez aussi soutenir financièrement le podcast en laissant un don sur la plateforme Tipeee. Bienvenue dans l'univers des Mariannes. Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Les Mariannes. Aujourd'hui j'ai le plaisir d'accueillir Fiona Texer, une femme aux multiples engagements, elle est conseillère politique depuis 15 ans, enseignante en sciences po-reines, cofondatrice de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique et autrice du podcast que vous avez peut-être écouté, Y'a pas mort d'homme, qui a été publié sur Binge Audio. Alors je vous propose cet épisode au lendemain des élections législatives anticipées qui ont eu lieu après la dissolution de l'Assemblée nationale par le Président de la République. On va s'interroger sur le visage de cette nouvelle Assemblée nationale et évidemment sur la place que vont occuper les femmes dans cette nouvelle Assemblée. Pour vous donner quelques repères, le nombre de femmes députées avait atteint son record en 2017. On avait constaté une première baisse en 2022 et en 2024, leur nombre recule toujours. puisqu'on est passé de 2017 à 38,8% à aujourd'hui 36%. Alors comment expliquer ce recul de la parité ? Quelles conséquences concrètes en matière de droits des femmes ? En quoi cette campagne Éclair a été marquée par un climat de violence, mais aussi par l'invisibilisation des femmes sur les plateaux télévisés ? Nous discuterons de tout ça avec Fiona Texer. Enfin, à travers cette conversation, vous découvrirez aussi les nombreux engagements professionnelle et militante de Fiona Texer, qui évolue depuis 15 ans dans le milieu politique qu'elle connaît donc parfaitement. Je vous souhaite une très belle écoute et surtout je vous souhaite de passer un très bel été. N'oubliez pas quand même de faire une pause pour recharger vos batteries et je vous dis à très vite. Bonjour Fiona.

  • Speaker #1

    Bonjour Laurie.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté mon invitation sur le podcast des Mariannes à l'issue des élections en législative anticipée de dimanche dernier. Alors on va commencer cette interview avec le traditionnel portrait chinois. Alors, si vous pouviez dîner avec une grande femme de l'histoire, qui choisiriez-vous ?

  • Speaker #1

    Gisèle Halimi.

  • Speaker #0

    Si vous aviez une heure de plus chaque jour, que feriez-vous ?

  • Speaker #1

    Du yoga.

  • Speaker #0

    Et si vous aviez un super pouvoir, ce serait lequel ?

  • Speaker #1

    Peut-être de remonter dans le temps et de faire en sorte que la révolution française soit plus féminine et plus féministe et qu'on entende les femmes dès la première heure, qu'on entende les femmes comme l'homme de gauche depuis le début et peut-être qu'on ne serait pas dans la situation dans laquelle on est si on avait écouté les femmes plus tôt.

  • Speaker #0

    On aurait gagné du temps, ça c'est sûr. Alors, nous enregistrons cet épisode quelques jours après le deuxième tour des élections législatives anticipées du 7 juillet. L'Assemblée nationale a un nouveau visage et elle compte désormais 36% de femmes, c'est-à-dire moins qu'en 2022 et moins qu'en 2017. Quelle est votre réaction par rapport à ce recul des femmes ?

  • Speaker #1

    C'est une très mauvaise nouvelle. C'est une mauvaise nouvelle parce que ça montre que les lois de parité ont des limites. Il y avait une progression assez constante depuis les lois de parité, c'est-à-dire en gros de 2002, donc des élections législatives de 2002 jusqu'en 2017. Et on a peut-être pensé trop rapidement que cette progression serait constante jusqu'à ce qu'on atteigne 50%. Et aujourd'hui, on voit qu'on recule élection après élection et donc ça souligne plusieurs choses. D'une part, que la loi n'est pas assez contraignante puisque la loi n'oblige pas les partis à présenter autant d'hommes que de femmes. Elle émet juste des incitations financières et certains partis ont clairement les moyens de passer outre la loi. Ce sont même des choix financiers qui sont faits et puis d'autre part que les partis politiques ne font pas assez d'efforts puisqu'en fait quand on ne les y contraint pas, ils ne le font pas d'eux-mêmes. Ce sont les partis qui font les choix d'investir telle ou telle personne. Ce sont les partis qui font dès le début le choix d'investir moins de femmes que d'hommes. Par ailleurs, on sait qu'ils font le plus souvent le choix d'investir des femmes dans des circonscriptions moins bonnes, moins gagnables. Et donc, in fine, il y a moins de femmes à l'Assemblée nationale. Et ça, oui, c'est une décision qui relève des États-majors des partis.

  • Speaker #0

    À votre avis, quelles conséquences cela va avoir en matière de droits des femmes, en matière de législation, cette baisse constante des femmes dans la vie politique ?

  • Speaker #1

    Ça a plusieurs types d'effets. Je pense que ça a un effet immédiat, et ça je le dis parce que j'étais collaboratrice parlementaire, c'est en effet sur l'environnement de travail à l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale, c'est évidemment le lieu où on fait la loi, mais c'est aussi un environnement de travail pour des centaines de personnes. Et plus un climat de travail est masculin, plus on sait qu'il est propice à un climat de harcèlement sexuel ou d'agression sexuelle. Et donc c'est une mauvaise nouvelle pour les femmes qui travaillent à l'Assemblée nationale, qu'elles soient... députées, fonctionnaires, collaboratrices et même dans une certaine mesure les journalistes, enfin toutes les femmes qui sont amenées à côtoyer ce lieu. Je pense que ce qui donnera un signal, c'est est-ce que le président ou la présidente de l'Assemblée s'engagera enfin à prendre un plan de lutte contre les violences sexistes et sexuelles à l'Assemblée. À l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, on avait fait des propositions en 2022. On avait notamment... souligner qu'il était important qu'il y ait une formation obligatoire pour tous les personnels de l'Assemblée, pour tous les élus, les collaborateurs, les collaboratrices, les fonctionnaires. Ça n'avait pas été le cas. Et il y a tout un tas de mesures qu'on pourrait mettre en place pour limiter le sexisme à l'Assemblée, c'est-à-dire sanctionner systématiquement les propos sexistes, avoir une cellule d'écoute digne de ce nom, être beaucoup plus intransigeant lorsqu'il y a des cas de harcèlement entre députés et collaboratrices. Par exemple, aujourd'hui, les députés sont très protégés, notamment par ce qu'on appelle la... la clause de loyauté qui leur permet en gros de licencier leurs collègues quand ils ne sont pas d'accord, y compris lorsqu'il y a des dénonciations de violence. Il y a aussi quelque chose qui me choque, c'est que personne ne prend la peine de mesurer la réalité de ces violences à l'Assemblée. Il n'y a jamais eu de vraie enquête de victimation faite par les services de l'Assemblée nationale et donc aujourd'hui on ne mesure pas le problème et donc on n'apporte aucune solution en interne. Donc voilà, ça aura des conséquences d'abord sur le climat de travail à l'Assemblée. Après, ça aura probablement des conséquences au-delà, c'est-à-dire Qu'est-ce que cette Assemblée va réserver aux propositions en faveur de la protection ou de l'extension des droits des femmes ? Si on fait un recul historique, si on prend la Ve République, on se rend compte que toutes les mesures législatives qui ont permis d'avancer sur la question des droits des femmes, que ce soit l'IVG, la pénalisation du viol, la pénalisation du harcèlement sexuel, toutes ces questions-là, elles ont été portées par des femmes. Il y a une exception, c'est la loi Neuvirth sur la contraception. Mais sinon, toutes ces grandes avances-là ont été portées par des femmes. Et en fait, quand on regarde dans le détail, on se rend compte que les hommes politiques ne s'intéressent pas ou peu aux droits des femmes. Et c'est le même flagrant. On a eu un exemple assez parlant, je trouve, cet hiver, lorsqu'il y a eu le texte pour constitutionnaliser l'IVG et qu'il y avait un petit moment de blocage au Sénat. Ce qui a permis de faire basculer, en fait, l'opinion des sénateurs, c'est que les sénatrices en faveur de cette réforme et les militantes se sont mises à faire pression sur les épouses, les sœurs, les filles, les nièces, les sénateurs conservateurs qui bloquaient le texte, parce qu'eux ne voyaient pas l'intérêt, en fait. Et c'est dire, si eux-mêmes ne voient pas l'intérêt d'un projet de société, il fallait convaincre leurs entourages féminins d'accepter. Donc voilà, moi, ce qui m'inquiète, c'est qu'on va avoir une assemblée plus masculine et on va avoir aussi une assemblée beaucoup plus conservatrice que la précédente, puisque la poussée du RN n'est pas une bonne nouvelle pour les droits des femmes. Là où l'extrême droite... passe, les droits des femmes trépassent. Et on peut aussi d'ores et déjà constater qu'il y a des profils très inquiétants au RN, notamment des cas d'hommes violents avec leurs conjointes qui ont été élus.

  • Speaker #0

    Oui, alors je rebondis sur cette question des hommes politiques condamnés pour pure violence. Damien Bade, Adrien Quatennens ou Julien Bayou ne sont plus députés. Vous qui aviez cofondé l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles, est-ce que vous vous en réjouissez aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Ce qui est certain, c'est que la dissolution, elle a eu pour conséquence la clarification. Ça a permis au moins ça, et ça a permis de clarifier le statut de député qui était déboulé pour leur camp. Le premier à retirer sa candidature dans la course aux législatives, c'était Julien Bayou, qui de toute façon avait déjà quitté l'ELV et son groupe parlementaire. Lui, il était visé par une plainte pour harcèlement moral et à Bûche-Roduleux, l'état de faiblesse. Et ensuite, les militantes de gauche ont dû très fortement se mobiliser pour le retrait de la candidature d'Adrien Quatennens, qui était le seul à avoir été condamné pour violences conjugales à l'Assemblée nationale, mais qui lui était soutenu par la direction de l'ELFI. Et donc, il a finalement dû admettre que... Son maintien a été intenable pendant cette campagne. Mais ce qui est intéressant, c'est qu'en fait, une fois qu'il s'est désisté, c'est à ce moment-là que le camp d'Emmanuel Macron s'est mis à lâcher Damien Abad, qui lui est mis en examen pour tentative de viol et qui a été éliminé au premier tour. Et autre conséquence que ça a eu sur le camp présidentiel, c'est que Jérôme Perra, qui lui est conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine, qui était candidat en Dordogne et qui était condamné pour violence conjugale lui aussi, ce qui s'est passé avec Jérôme Perra, c'est qu'en fait, la Macronie a mis un... candidat face à lui, mais c'était un candidat fantôme, dans le sens où il n'habitait pas la circonscription, où il n'a pas déposé sa profession de foi, et donc il n'y avait pas de bulletin pour lui dans les bureaux de vote au premier tour. Mais la manœuvre n'a pas suffi et lui aussi, il a été éliminé au premier tour. Donc oui, moi je me réjouis qu'au moins, ces boulets pour leur camp politiquement, et puis ces hommes qui ne sont pas les amis des droits des femmes. soit écarté de l'Assemblée. Après, on notera que Gérald Darmanin a été réélu et que, par exemple, Frédéric Bocchaletti, député RN du Var, a été réélu. Sa femme a livré récemment un témoignage glaçant de violences conjugales.

  • Speaker #0

    Alors, j'aimerais qu'on revienne un peu sur le moment de la campagne et notamment de l'entre-deux-tours. Vous, vous avez signé une tribune avec d'autres personnes qui a été publiée dans Libération, tribune en date du 2 juillet dernier, pour dénoncer l'invisibilisation des femmes. dans la campagne, dans cette campagne législative, au cours de laquelle elles n'ont représenté les femmes que 41%, qu'on les a moins vues sur les affiches, mais on les a moins vues aussi sur les plateaux télé. Qu'est-ce que vous en avez pensé de ça ?

  • Speaker #1

    Les partis ont beaucoup prétexté l'urgence de la situation pour s'excuser sur le fait qu'ils n'ont pas été à la hauteur sur les droits des femmes. Je pense que c'est un problème de prétexter l'urgence parce que ça veut dire que les droits des femmes ne se poseraient qu'en période d'élection. Or c'est un sujet sur lequel les partis doivent faire des efforts au quotidien. Et on voit qu'ils n'ont collectivement pas été bons sur la question des investitures, même s'il y a des nuances. Le populaire se rapprochait de la parité et les républicains, par exemple, en étaient extrêmement loin. Mais après, il y a eu aussi qui on met en avant dans cette période. Et c'est vrai que la campagne a cruellement manqué de figures féminines. Et en fait, les figures féminines qui émergeaient ont été silenciées, c'était le sens de cette tribune. C'est-à-dire que... Le fait que le Nouveau Front populaire est comme figure 4 chef de parti, il y avait eu une espèce de répartition des débats entre eux dès le début. C'est-à-dire que Manuel Bompard allait au premier débat, Olivier Faure allait à un autre, et Marine Tondelier allait encore à un autre. Et lorsque le jour du débat Tondelier-Bardella approchait, Bardella a signifié son refus de débattre avec elle. Ce qui veut dire qu'il a privé Marine Tondelier de débat. En un sens, qu'il ait eu peur, qu'il n'ait pas eu envie, ça, ça lui appartient. On ne peut pas lui reprocher. Ce qui est sidérant, c'est que BFMTV ait accepté cette situation et qu'ils aient laissé faire, puisque la silenciation des femmes dans l'espace public, c'est la responsabilité des médias qui leur donnent ou qui ne leur donnent pas la parole.

  • Speaker #0

    Alors, une campagne aussi marquée par la violence, avec un climat de tensions très palpables. Plus de 50 agressions recensées partout sur le territoire, selon une source du ministère de l'Intérieur. On pense bien sûr à l'agression médiatisée de Priska Thevenot, porte-parole du gouvernement, agressée avec son équipe à Meudon alors qu'elle collait des affiches. C'est un phénomène qui existait déjà, la violence dans la vie politique, que ce soit pour les hommes ou pour les femmes, mais c'est un phénomène qui s'est intensifié pendant cette campagne ?

  • Speaker #1

    Ah oui, indiscutablement, ça s'est intensifié. Ça s'est intensifié dans la campagne contre les candidats, puisqu'il y a eu une hausse des agressions. On a cité Priska Thevenot. Après, il y a eu des remontées en fait dans tout. Les équipes, que ce soit de l'extrême droite jusqu'à la gauche, tous ont rapporté avoir été victimes d'attaques de l'autre camp. Et puis, il y a eu une violence, surtout libérée dans la société, avec une hausse des agressions racistes, des agressions homophobes, des propos intolérables qui ont pu être tenus et dont on a vu l'écho dans les médias. On pense à la séquence d'envoyé spécial avec cette femme divine, aide-soignante, insultée par ses voisins dans le Loiret. Et puis aussi, un petit côté, on a lâché la rampe, on a lâché les chiens sur les agressions de journalistes. Je pense notamment aux journalistes du service public, Karim Vessouli et Mohamed Bouafsi, qui ont été intimidés également par... Des courriers notamment, donc une campagne vraiment marquée par les violences envers les politiques, envers les médias et envers les concitoyens qui ont le malheur de déplaire l'extrême droite aussi.

  • Speaker #0

    Alors dans l'entre-deux-tours, on a découvert la figure de Marine Tondelier, secrétaire nationale d'Europe Écologie Les Verts. On l'a découverte en larmes au micro de France Inter. Elle s'est imposée comme une nouvelle figure. On l'a beaucoup comparée à Jacinda Ardern pour son côté authentique. Selon vous, en quoi Marine Tondelier assume une posture politique un peu différente ?

  • Speaker #1

    Moi, je suis contente qu'on l'ait découverte, parce que moi, je la connais depuis une quinzaine d'années. Donc, ça me fait plaisir que la France, maintenant, la connaisse. Et je crois que sa force à Marine Tondelier, ça a été de rappeler que la politique, elle se fait avec des convictions, mais aussi avec des émotions. Dans la séquence que vous citez sur France Inter, elle... Elle rappelle en fait que l'empathie est politique et dans cette séquence, elle est émue parce qu'elle revient sur des propos tenus par Bruno Le Maire et elle, elle dit qu'en fait, la politique, elle a des conséquences très concrètes sur la vie des gens et que seuls des privilégiés comme Bruno Le Maire peuvent feindre de l'ignorer en fait. Et ce qu'on doit à Marine Tondelier, c'est aussi d'avoir un très fort ancrage local. Elle est élue d'opposition à Énard Beaumont, donc le fief de Marine. Le Pen, elle sait ce que c'est aussi que de subir le RN au pouvoir localement. Je crois que ça fait aussi sa force, cette connaissance du terrain, mêlée à une vraie empathie, une vraie sensibilité. Puis après, on a beaucoup parlé de sa veste, puisque le style aussi est politique. Et donc sa veste vert, je crois qu'on appelle ça le vert véronèse, ça a permis de la rendre identifiable sur les plateaux, ça a permis de la rendre identifiable sur le terrain. Et puis... Et puis c'était un coup très bien joué, puisque ça envoie un message clair et lisible, à la fois la respectabilité de la veste et puis aussi l'intransigeance sur les convictions. Moi, elle me rappelle un petit peu, dans un même registre, le côté girl next door qu'on appréciait chez Cécile Duflo il y a une dizaine d'années. À la fois, voilà, bonne camarade, proche des gens. Et puis, je trouve que ce qui a marqué aussi, lors du deuxième dimanche électoral, c'était son excellent tréparti, notamment face à Jean-Philippe Tanguy. Tout ça fait qu'elle sort très populaire et renforcée de la séquence.

  • Speaker #0

    On a parlé de l'importance des femmes dans la vie parlementaire de notre pays. Alors comment renforcer l'accès des femmes à la vie politique ? Et faut-il aller plus loin en matière de parité dans la loi ?

  • Speaker #1

    Moi, je crois qu'il n'y a que la loi qu'on comprend en matière de parité. En fait, quand on regarde à tous les échelons, il y a de la parité là où la loi est contraignante. Il n'y en a pas là où la loi ne dit rien. Si on prend les conseils municipaux, les conseils régionaux, les conseils départementaux, il y a à peu près 50-50 de conseillers et de conseillères. Par contre, si on prend les exécutifs, les têtes, les maires, les présidents de conseils départementaux, les présidents de conseils généraux, là, la parité n'existe pas. Parce qu'en fait, il y a zéro contrainte. Il y a une parité parfaite au Parlement européen parce que la loi l'oblige. Et puis, il n'y en a pas au Parlement national parce que la loi ne l'oblige pas. Et puis il y a aussi mille façons de contourner la loi. Quand on regarde au Sénat, si aujourd'hui il n'y a pas la parité au Sénat, c'est parce qu'il y a plein de façons de contourner la loi, notamment de présenter des listes dissidentes, d'avoir des ententes sur le fait de présenter deux fois des hommes tête de liste dans certains départements. Il y a plein de façons de contourner la loi et on les connaît, elles sont visibles, elles sont même devenues grossières. Si on veut vraiment la parité... il faut renforcer la loi, il faut que ça passe par la loi. Les partis ne comprennent que ça. Après, on nous dira aussi, ah mais oui, mais on a du mal à trouver des candidats. C'est les partis qui le disent. Les femmes n'osent pas se lancer, etc. Mais moi, j'ai envie de leur demander, qu'est-ce que vous faites pour que les femmes se lancent ? Pourquoi est-ce qu'il y a encore des barrières et des censures ? Est-ce que vous avez réfléchi à quelle heure tombent vos réunions ? Est-ce que vous avez réfléchi à... à l'articulation entre les temps de vie privée, de vie professionnelle et de vie politique. Est-ce que vous avez réfléchi à la sécurité financière des femmes dans les campagnes ? Parce qu'en fait, une campagne, ça coûte de l'argent, surtout quand on n'est pas sûr de se faire rembourser, et que les femmes gagnent moins d'argent que les hommes. Qu'est-ce que vous faites pour leur garantir un meilleur accès ? Il y a plein de leviers sur lesquels on peut jouer, que ce soit les heures des réunions, la façon de faire de la politique, quand est-ce qu'on arrêtera de valoriser ? le mâle alpha, le grand tribun, l'homme qui porte ses couilles, c'est quand même ça dont on parle. On peut valoriser autre chose en politique et on peut faire de la place, mais ça demande de faire des efforts et ça demande aussi de casser des styles ou des référentiels politiques qui aujourd'hui sont parfois présentés comme neutres, alors qu'en fait ils sont extrêmement masculins.

  • Speaker #0

    Alors c'est une transition parfaite pour ma prochaine question qui vous est adressée plus personnellement. Vous, votre parcours il est marqué par la politique bien sûr. Vous avez travaillé 15 ans en tant que collaboratrice d'élu. Vous travaillez depuis 15 ans en tant que collaboratrice d'élu. Est-ce que vous, vous n'avez jamais pensé à passer de l'autre côté ?

  • Speaker #1

    Alors non, jamais. Pour moi, ça a toujours été une grosse ligne rouge. Mais je pense aussi parce que j'ai une très haute estime de la politique et que pour avoir beaucoup côtoyé les élus, j'ai une image de la fonction qui, à mon sens, doit être exemplaire. Et je pense aussi que c'est un type d'engagement dans lequel on ne peut pas faire une franche séparation entre le privé et le politique, et qui est extrêmement engageante et qui est extrêmement impliquante. Et que moi, j'ai toujours tenu à me dire si j'ai envie d'avoir une vie à côté, si j'ai envie de ne pas être tenue par la responsabilité. Eh bien, en fait, moi, c'est juste mon travail. Et à un moment donné, je rentre chez moi, j'éteins mon téléphone. Donc, je pense que c'est une charge qui est extrêmement haute et qui est extrêmement importante. Et moi, j'ai toujours trouvé que ma place était davantage dans l'ombre ou dans l'ombre. Eh bien, c'est un travail avant d'être un engagement.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu de votre métier de collaboratrice en quelques mots ? Quel est votre quotidien ? À quoi il ressemble ? Sur quel sujet est-ce que vous travaillez ? Pour celles et ceux qui n'auraient pas forcément une idée précise de ce que ça revêt d'être collaborateur d'élu.

  • Speaker #1

    Alors, c'est vrai que collaborateur d'élu, souvent, on ne sait pas ce que c'est. Et si on sait ce que c'est, on a souvent une mauvaise image parce que malheureusement... J'ai envie de dire que ce sont les pires d'entre nous qui font le plus par les deux, puisqu'un bon collaborateur, c'est quelqu'un qui reste dans l'ombre et qui sait rester à sa place. C'est-à-dire que Pénélope Fillon ou Alexandre Benalla n'étaient pas de bons collaborateurs, puisqu'ils ont trop fait par les deux. Donc moi, j'ai fait ça pendant 15 ans. Je travaillais, vous l'avez rappelé, en mairie, au Sénat, en cabinet de l'Install, à Matignon. J'ai travaillé pour des personnalités de la gauche et de l'écologie. Et puis j'ai fait différents types de postes. J'étais collaboratrice parlementaire, donc dans un travail plutôt... J'étais secrétaire générale de groupe parlementaire, qui a un travail de coordination dans le groupe politique, à la fois en interne, où c'était au Sénat, et puis aussi en externe, dans la relation avec, par exemple, l'Assemblée, le parti politique, etc. J'étais chef de cabinet, qui est plutôt un travail de logistique et de planification du temps et des déplacements des élus. Et puis j'étais conseillère, donc davantage dans la production de notes, de conseils, etc. S'il y en a parmi vous qui hésitent à y aller, j'ai envie de vous dire, faites-le. C'est très formateur, surtout quand vous êtes jeune diplômé. Le profil idéal, c'est d'être quand même jeune diplômé en droit ou en sciences politiques et puis avec des affinités partisanes. Ce n'est pas obligatoire, mais c'est toujours un atout. Faites-le, mais sachez aussi que c'est dur. C'est passionnant, mais c'est dur. Moi, je trouve que c'est un milieu traumatisant qui est violent. Moi-même, j'ai subi du harcèlement sexuel et des agressions sexuelles au travail. Et pendant trop longtemps, elles ont été passées sous silence. Donc il faut aussi y aller en se disant qu'il est probable qu'on n'en sorte pas un d'un quand même. Donc il faut apprendre à se protéger et il faut essayer d'exercer ce métier dans les meilleures conditions possibles.

  • Speaker #0

    Alors pour ceux qui rêvent de ces carrières, quel est le conseil numéro 1 à donner ? Quand on n'a pas de réseau, qu'on n'a pas de contact, qu'on ne sait pas comment s'y prendre, est-ce que les candidatures spontanées fonctionnent ? C'est une question qu'on me pose souvent.

  • Speaker #1

    Ça ne coûte rien d'essayer. En tout cas, ça ne coûte rien d'essayer. Après, l'idéal, c'est de quand même se renseigner sur la personne que vous targettez, sinon c'est plus difficile. Et puis, les campagnes sont des bons moments aussi pour se frotter un peu à la politique. Là, on vient de vivre une campagne express, mais c'est très intéressant si vous n'avez jamais vu ça de votre vie. Si ça se trouve, il y aura des élections dans un an, donc vous pouvez retenter le coup. Mais c'est intéressant d'aller suivre un candidat au quotidien, de voir ce que c'est que la rencontre avec les gens. de se rapprocher de l'équipe de campagne, de voir ce que c'est que d'aller tracter sur un marché, faire du porte-à-porte. Donc ça, c'est une bonne porte d'entrée, c'est de se rapprocher d'une équipe. Après, il y a plein de façons d'y aller, qui sont des façons thématiques. Vous êtes expert sur un sujet, je ne sais pas, ça peut être le numérique, ça peut être les libertés publiques, les finances. Regardez les députés qui siègent dans ces commissions et qui sont passionnés pour ces sujets-là. Il y a plusieurs types de portes d'entrée. L'idéal, c'est... La compétence, sachant qu'être généraliste est aussi une compétence, et l'affinité partisane, mais on a aussi des profils qui arrivent tout à fait à se refiler autrement. Et puis ça dépend si vous voulez davantage travailler sur le terrain, en circonscription ou à l'Assemblée nationale. Ça dépend si vous êtes plutôt des professionnels du droit ou de la communication. Les gens qui écrivent très bien aussi sont des profils recherchés. On a toujours besoin de plumes dans ce métier. Bref, il y a plein de possibilités. Pensez aussi au Parlement européen. On les oublie un peu trop souvent et il y a plus de postes là-bas. Les équipes sont plus nombreuses. Bref, il y a plein de façons de s'y prendre. Le seul conseil que j'ai à donner, c'est de soyez vraiment motivé parce que c'est dur et c'est chronophage. Donc autant y aller en ayant vraiment envie d'y aller.

  • Speaker #0

    Merci. Alors, vous avez mentionné les agressions dont vous avez été victime dans le cadre de votre travail de collaboratrice d'élu. Est-ce que c'est ça qui vous a donné envie de cofonder l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles et de prendre part à ce grand mouvement sociétal du MeToo politique ? Parce que dès 2021, vous avez été à l'initiative de nombreuses tribunes publiques pour dénoncer les violences sexuelles et sexistes dans ce milieu politique. Vous avez exhorté les partis à écouter les victimes. Donc est-ce que c'est finalement cette expérience du terrain qui vous a donné envie de... De militer ?

  • Speaker #1

    Absolument, oui, c'est la raison pour laquelle j'ai été à l'initiative de MeToo Politique il y a trois ans, pour alerter sur ce sujet, pour montrer que les violences, elles sont systémiques, que ce ne sont pas des cas isolés, parce qu'en fait, on les retrouve dans toutes les familles politiques, de l'extrême gauche à l'extrême droite, jusqu'à l'extrême centre, et puis aussi à tous les échelons de pouvoir. C'est-à-dire que j'ai reçu des témoignages de femmes qui ont été agressées par un conseiller municipal dans un tout petit village, et puis parfois, ça se passe aussi au plus haut sommet de l'État. Et en fait, on peut être tenté de penser que ces violences, elles sont loin de soi lorsqu'on est loin de la politique, que oui, c'est un problème de collaboratrice parlementaire. Bon, quand même, c'est déjà un problème, mais en fait, ça peut concerner n'importe qui. Si on prend le cas de Nafissatou Diallo, qui a été la victime de Dominique Strauss-Kahn, on voit bien que sa vie ne la prédestinait pas à côtoyer des hommes politiques. Et en fait, ça peut concerner n'importe qui dans le sens où... Les histoires récentes nous ont montré qu'il était concerné les épouses, les administrés qui venaient demander des services, des militantes, des journalistes, des collègues élus, des fonctionnaires et des collaboratrices, mais en fait ça peut être n'importe qui. Et donc c'est pour ça que moi il me semble important de marteler aux partis politiques qu'il faut prendre au sérieux cet enjeu et qu'il faut cesser de promouvoir, d'embaucher, d'investir des hommes violents. Souvent les profils sont connus dans les partis, il y a toujours ce truc de... Ah oui, tout le monde savait, mais personne n'a rien dit. Ben non, mais en fait, si on sait, il faut le dire et puis il faut empêcher de nuire. Parce qu'en fait, ça cause un double problème. C'est à la fois un problème de santé publique, parce que les violences sexuelles sont un problème de santé publique, mais c'est aussi un problème démocratique, parce qu'en fait, il y a des femmes qui quittent la politique parce qu'elles sont dégoûtées. Et quand on enlève toutes les dégoûtées, à la fin, il ne reste que les dégoûtants. Et c'est ce qui fait qu'on tourne en rond. Et évidemment que les... que les commissions électorales ont du mal à trouver des femmes pour aller mener telle ou telle campagne. Si elles ont été aussi mal accueillies et si elles ont été aussi violentées, pourquoi s'investir ?

  • Speaker #0

    Est-ce que les commissions électorales doivent être paritaires ? Est-ce qu'elles le sont déjà ?

  • Speaker #1

    Alors ça, ça dépend des parties, des statuts des parties. C'est très varié. Il n'y a aucune obligation qu'elles le soient. C'est au libre vouloir des parties, au bon vouloir des parties.

  • Speaker #0

    Dans le cadre de votre action à l'Observatoire, pour ne citer qu'une des actions, parce qu'elles ont été très nombreuses, mais j'ai envie de parler d'un long rapport fleuve dans lequel vous avez étudié les discours des personnalités politiques accusées de violences, un travail vraiment titanesque. Vous avez recensé les stratégies de défense, les réactions des hommes politiques, les réactions de leurs entourages aussi et des organisations politiques. Pourquoi ce rapport et quel accueil est-ce qu'il a reçu ? Alors ce qu'on voulait montrer en fait c'est que les violences ont bien ce caractère systémique et on a pris des exemples de gauche comme de droite. On analyse la communication de Nicolas Hulot, de Gérald Darmanin, mais aussi d'Éric Zemmour, mais aussi d'Adrien Quatennens ou d'Éric Coquerel. Et en fait de montrer que ça n'est pas une histoire de camp politique, ça n'est pas une histoire de niveau de mandat. Toujours la même histoire, c'est l'histoire d'hommes qui vont déployer les mêmes arguments à chaque fois qu'une accusation va être portée contre eux. La première de leurs réactions, c'est de dire qu'ils n'ont rien fait, ou si c'est impossible de minimiser les faits, de rappeler qu'il y a tel contexte et qu'en fait, ce n'était pas si grave, mais que c'était une gifle, oui, mais que cette gifle n'a pas laissé de traces, oui, mais que le contexte était quand même un divorce. On trouvera toujours une bonne raison. La deuxième chose qu'ils vont faire, c'est essayer de... de manipuler le vocabulaire juridique pour qu'on perde un peu l'essentiel du message. On va entendre des phrases un peu comme je me tiens à la disposition de la justice Toujours montrer qu'on a le droit derrière soi. Je pense par exemple à Damien Abad lorsqu'il a été mis en examen. Pour qu'un député soit mis en examen, il faut que le parquet demande au bureau de l'Assemblée nationale de lever son immunité parlementaire. Le bureau de l'Assemblée nationale a levé l'immunité parlementaire de Damien Abad. Mais Damien Abad est venu expliquer à l'AFP que c'est lui qui l'avait demandé, alors qu'il n'a rien à voir dans la procédure, comme pour montrer qu'il était du bon côté du droit, alors que non. Le Barquet a transmis la demande au bureau, le bureau a répondu, Damien Abad n'a rien à faire dans cette histoire. Et donc, sans cesse se présenter comme dans son bon droit, ça c'est le deuxième trait commun à toutes les stratégies de défense. Et puis, le troisième, en fait, ça va être d'expliquer que c'est globalement un... complot politique contre eux. Ce ne sont pas leurs faits et gestes qui sont en cause, puisque de toute façon, ils n'ont rien fait, mais qu'on veut attaquer leur honneur et leur combat politique. Donc, en fait, expliquer que les femmes mentent et qu'elles sont manipulées à des fins politiques. C'est un peu la constante de toutes ces défenses-là. Et pourquoi avoir montré ça ? Eh bien, en fait, pour montrer que sans solution globale, on ne s'en sortira pas. traiter au cas par cas tous ces sujets-là, c'est bien, il faut le faire. Idéalement, que les partis politiques et les familles politiques s'en saisissent, c'est mieux. Mais que si on refuse de voir le tableau global, on aura une vie politique qui sera gangrénée par les violences sexuelles pendant encore très longtemps.

  • Speaker #1

    Parmi les solutions que vous proposez pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, il y a la création d'une instance, une supracellule d'écoute qui pourrait réceptionner... les témoignages et les signalements des victimes. Est-ce que les partis vous ont écouté en ce sens ? Encore une fois, est-ce que cette proposition a reçu un accueil favorable de la part des principaux concernés ? Alors,

  • Speaker #0

    pas du tout, parce que les partis ont quand même tendance à mettre des œillères jusqu'à ce que les scandales éclatent à la figure. Et c'est une proposition qui vient du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, qui est issu d'un de leurs rapports de 2019, et qui en fait fait un parallèle intéressant. avec la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Alors, pour faire un petit peu l'historique, vos auditeurs et vos auditrices se souviennent sûrement de l'affaire Cahuzac. L'affaire Cahuzac, elle éclate en 2012 quand Mediapart, puisque heureusement qu'il y a de la presse qui fait des enquêtes sérieuses, qu'elles soient sur les scandales financiers ou les scandales sexuels, Mediapart révèle les comptes cachés du ministre du Budget. Et à ce moment-là, on trouve une stratégie... pas très différente de ce que je viens de vous décrire. Jérôme Camusac qui dit que pas du tout, il n'a rien fait, que ce n'est pas lui, qu'on cherche à lui nuire et que de toute façon, tout le monde ment. Et bizarrement, comme c'est des questions d'argent, les gens s'intéressent davantage. Et en fait, à ce moment-là, la classe politique, elle a deux options. C'est-à-dire soit faire comme d'habitude, dire Ah mais oui, mais lui, c'était une brebis galeuse, on est désolés et puis on passe à autre chose. Ou soit se dire On a un problème systémique, la confiance avec les citoyens est rompue et il faut qu'on... fassent quelque chose de fort, poser un acte politique important pour restaurer le lien avec les citoyens et pour empêcher que ça se reproduise. Et c'est à ce moment-là qu'est votée la loi pour la transparence de la vie publique, qui découle sur la création d'une haute autorité indépendante, la haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui en fait est chargée de contrôler la probité des hommes et femmes politiques de ce pays, et même des collaborateurs, des hauts fonctionnaires, bref. Avoir un super pouvoir de contrôle. Et aujourd'hui, quand vous discutez avec les élus, s'il y a bien une instance qui craigne... C'est celle-là. Et tout le monde a peur de se faire pincer pour une mauvaise déclaration, une maison de vacances qui a été oubliée, une histoire de SCI qu'on avait oubliée dans un coin. Bref, et en fait, quand on regarde aussi ce qui s'est passé depuis dix ans, depuis que la haute autorité existe, c'est que les grandes figures politiques qui sont tombées, elles sont tombées pour des histoires de mauvaise déclaration. Vous prenez par exemple Caroline Cailleu. qui a été ministre sous Macron il y a deux ans, elle n'est pas tombée parce qu'elle a tenu des propos homophobes, elle est tombée parce qu'elle avait une déclaration mal remplie. Vous prenez Laura Flessel, ou alors dans un autre registre, François de Rugy, avec son histoire de homard. Bon, on n'enlèvera pas l'idée qu'en fait, avoir fait une petite orgie de homard au frais du contribuable, c'est moins grave que des violences conjugales. Et pour autant, c'est ce type de scénario qui se produit. Aujourd'hui, on ne tolère pas. plus les manifestations financières en politique et je m'en réjouis. En fait ce qui nous manque c'est un électrochoc sur les violences sexuelles semblable à l'électrochoc qui a été l'affaire Cavusac et je ne comprends pas comment ce qui s'est passé ces dernières années sur Hulot, sur Katnins, sur Abad n'est pas encore servi de leçon.

  • Speaker #1

    Pour faire un mauvais jeu de mots il s'agit d'une hiérarchisation des périls.

  • Speaker #0

    Exactement.

  • Speaker #1

    Il faut une sacrée force quand même pour adopter le rôle de vigie que vous avez eu et que vous avez toujours pour oser dénoncer les actes de personnes puissantes, il faut le dire quand même, et pour essayer d'infléchir les positions des partis. Est-ce que vous, vous vous sentez parfois abattue ou impuissante ? A contrario, vous qui renvoyez comme une image de force, qu'est-ce qui vous donne cette force pour adopter ce rôle ?

  • Speaker #0

    Alors oui, c'est dur. et oui, ça repiète sur la santé mentale. Moi, j'ai fait un burn-out militant, par exemple, il y a 18 mois, parce qu'on se sent démoralisé, impuissant, qu'on se dit que l'ampleur de la tâche est trop importante. Et donc, il faut savoir bien s'entourer, il faut être soutenu et surtout, il faut savoir faire des pauses pour ensuite repartir si on en a envie ou alors se dire, c'est bon, j'ai fait ma part et je passe à autre chose. Après, je voudrais souligner aussi qu'il y a des façons de s'engager qui exposent davantage que d'autres. Moi, j'ai testé différents modes d'engagement. Par exemple, j'ai co-écrit une série documentaire pour Binge Audio qui s'appelle Y'a pas mort d'homme qui est une série en huit épisodes sur la violence sexuelle. Ce n'est pas la même chose, par exemple.

  • Speaker #1

    On mettra les références dans le descriptif de l'épisode.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas la même chose qu'organiser des manifs, ce n'est pas la même chose qu'avoir des prises de parole publiques, ce n'est pas la même chose que faire des contenus en ligne sur les réseaux sociaux. Moi, il y a eu aussi un autre type d'engagement qui m'a beaucoup plu. J'ai pu donner cours à Science Porraine pendant deux ans et créer un cours sur les violences sexistes et sexuelles. Ce qui est intéressant, ça veut dire qu'on est au contact de centaines d'étudiants pour faire passer des messages qui sont... aussi des messages de prévention sur ces questions-là. Donc il y a différents types d'engagement. Il y a différents types d'engagement. Ce qu'il faut, c'est savoir écouter ses limites, savoir s'arrêter lorsque l'on milite dans un environnement toxique, parce que le milieu militant, il n'est pas totalement exempt de violences non plus. Et puis, il faut savoir se reposer, surtout.

  • Speaker #1

    Vous avez des chiffres sur le burn-out militant ?

  • Speaker #0

    Alors moi, je ne connais pas de chiffres sur le burn-out militant. Néanmoins, je sais qu'il y a des ressources assez utiles. Je pense notamment au livre d'Elsa Deck-Marceau, Faire justice qui évoque la question notamment du burn-out militant dans les violences sexistes et sexuelles. Et puis également les travaux du sociologue Simon Cotter-Marx, qui a travaillé sur ces questions-là dans le milieu associatif.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. On mettra les références encore une fois dans le descriptif de l'épisode. Alors on s'approche de la fin de cette interview. Dans l'esprit de sororité du podcast, je vais vous inviter à nous donner quelques conseils. Alors des conseils en ce qui concerne les relations avec les médias. Vous, vous êtes quand même habitué des plateaux radio et télé ou des contacts avec des journalistes pour défendre vos idées et vos propositions. Qu'est-ce que vous conseilleriez à une personne qui veut prendre davantage la parole dans les médias ? Comment bien se préparer et comment ne pas trop stresser finalement avant une interview ?

  • Speaker #0

    Préparez-vous, préparez-vous bien. Ce n'est pas un exercice qui s'improvise. Je vous recommanderais vraiment de vous former avant de vous lancer. Parfois, on trouve des ressources dans les collectifs militants ou dans les partis. Il y a souvent des formations qui sont proposées. Je pense qu'il faut être très clair sur ce qu'on a à dire. Et le plus important, en fait, c'est d'avoir un message suffisamment clair et concis dans sa tête. pour pouvoir le restituer de façon claire et concise. Et j'ai envie de dire, peu importe les questions que vous posera la journaliste, ce qui compte, c'est votre message. Et souriez et êtes détendus.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous auriez un dernier conseil à transmettre aux femmes qui vont entrer au Palais Bourbon, tant que nouvelles députées, et aux femmes plus largement qui veulent s'engager, que ce soit dans des partis politiques, dans des associations, dans la société civile ? Quel conseil est-ce que vous aimeriez leur transmettre ?

  • Speaker #0

    Alors aux femmes députées, moi je donne toujours le même conseil, parce que j'ai des amis députés et à chaque fois je leur ai dit la même chose. Ne tombez pas dans le syndrome de la bonne élève. On a vraiment tendance à s'enfermer dedans en tant que femme, à vouloir être bonne partout, à garder ce côté première de la classe parce qu'évidemment chez les députés, il y a beaucoup de femmes qui ont été très fortes à l'école et qui sont très studieuses. Vouloir être bonne partout à l'Assemblée, c'est s'épuiser. Ce n'est pas bon signe de s'épuiser parce qu'on ne pourra jamais tout faire et jamais être bonne partout. Il faut prioriser dès le début du mandat ces combats, se répartir avec... ses collègues de sous-groupes parlementaires ou des intergroupes, les sujets sur lesquels on veut vraiment s'investir et se dire je ne serais pas partout au même moment, donc autant se limiter à ce que je sais faire de mieux ou ce qui me motive le plus Et il ne faut surtout pas négliger la circonscription, on le voit, c'est important de ne jamais casser le lien avec les électeurs et les électrices, surtout quand des législatives anticipées peuvent poindre à tout moment. Et puis formez-vous, formez-vous au management, formez-vous à la prévention contre les VSS. Pensez à vos collaborateurs et vos collaboratrices, c'est des métiers où la souffrance psychique est élevée. Ce sont des gens qui vont se donner pour vous bien au-delà de ce que permet le droit du travail pendant des années. Alors prenez soin d'eux, payez-les correctement et soyez polis et respectez le droit du travail autant que possible parce que c'est trop peu souvent le cas. Après un conseil aux femmes qui souhaitent s'engager en général, vraiment c'est le moment. On a beaucoup répété ces derniers temps la citation de Simone de Beauvoir, il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Je crois que la crise elle est là, elle est profonde. Et les résultats de dimanche dernier, c'est pas vraiment une victoire, c'est surtout un répit. Alors c'est le moment de s'engager, il y a plein de façons de le faire. La plus évidente peut-être que c'est de rejoindre un parti, mais il y en a plein d'autres. Si vous êtes... palais avec les partis politiques et la société civile qui a joué un rôle incroyable dans cette campagne. Je pense notamment aux initiatives de militantes comme Caroline Devasse qui ont su motiver et mobiliser des dizaines de milliers de personnes pendant cette campagne. Et puis les présidentielles c'est dans trois ans, c'est une course de fonds. Donc voilà si ça vous intéresse il y a le site indivisible.fr qui vous offre plein de ressources. Et puis il y a la société civile, il y a les partis, il y a aussi les syndicats. Peut-être le moment de se syndiquer. Je crois que des personnalités comme Sophie Binet, à la tête de la CGT, ont vraiment redoré l'image du syndicalisme récemment. Et puis, si vous décidez de vous engager, faites-le en vous faisant plaisir, en faisant ce que vous savez faire. Si votre truc, c'est de faire du porte-à-porte, d'être dans le contact avec des gens, faites ça. Si votre truc, c'est de faire des contenus sur les réseaux sociaux, faites ça. Mais si votre truc, c'est de faire des sandwiches et d'avoir une oreille attentive pour les militants qui sont épuisés, C'est bien aussi, en fait. Voilà, il faut savoir trouver sa juste place. Il y a de la place pour absolument tout le monde, peu importe vos compétences et peu importe le degré d'engagement que vous êtes prêt à y mettre. Et surtout, connaissez vos limites et arrêtez-vous avant de vous faire mal.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup, Fiona. Et une dernière question. Qui aimeriez-vous entendre sur les Mariannes ?

  • Speaker #0

    Marine Tondonier, la star du moment.

  • Speaker #1

    La star du moment. Effectivement, elle revient beaucoup dans les propositions des auditeurs et auditrices. Un grand, grand, grand merci pour ce partage hyper riche. Et on mettra évidemment toutes les références. Votre épouse est engagée. Si ce vote-là m'a parlé, je vous répète, vous avez le nom de 5e de ma chaîne.

  • Speaker #0

    On se retrouve très vite.

  • Speaker #1

    Mais en attendant, vous pouvez rejoindre la communauté sur Instagram, Twitter, Facebook, sous le nom ElleMarianneFR. Je vous dis à bientôt.

  • Speaker #0

    Bonjour.

Description

Au lendemain des élections législatives anticipées du mois de juillet, quel est le nouveau visage de l’Assemblée nationale et quelle est la place des femmes ?


En 2017, le nombre de femmes députées avait atteint un record de 38,8 %. Cependant, une première baisse a été enregistrée en 2022 avec 37,3 %, et cette diminution continue en 2024, puisque la proportion de femmes à l'AN est aujourd'hui de 36 %. En comparaison, le taux de féminisation du Sénat est de 36,8%.


Comment expliquer ce recul de la parité ? Quelles conséquences pour les avancées en matière de droits des femmes ?  En quoi cette campagne a invisibilisé les femmes pendant les débats télévisés ? Retour sur cette campagne éclair, qui a été incontestablement marquée par un climat de violences et de tensions palpables. 


Pour analyser la situation, j'ai le plaisir d'accueillir Fiona Texeire, Conseillère politique, enseignante à Sciences Po Rennes et co-fondatrice de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique à l'origine du #MeTooPolitique et autrice du podcast Y'a pas mort d’homme diffusé sur Binge audio. 



Références de l'épisode :




Pour suivre Fiona Texeire :


🎙 Pour soutenir le podcast gratuitement :

1. Abonnez-vous 🔔

2. Laissez un avis 5 étoiles ⭐⭐⭐⭐⭐ sur Apple Podcast ou sur Spotify. 

3. Partagez l'épisode à 3 personnes autour de vous ! 📢


Vous pouvez allonger la durée de vie du podcast en laissant un don sur Tipee. 🙏 

 

Pour suivre le podcast :

Retrouvez le podcast sur les réseaux sociaux avec le compte @LMariannesfr

Bonne écoute !    


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis Laurie Théron et je vous accueille sur mon podcast Les Mariannes. Dans cette émission, que j'ai conçue pour vous aider à prendre toute votre place dans la vie publique de notre société, je reçois des femmes politiques et des activistes qui inventent le monde de demain. Mesdames,

  • Speaker #1

    vous êtes légitimes, vous avez votre place, vous êtes compétentes. Investissez-vous dans cette vie politique ? Il faut du courage pour faire de la politique, que l'on soit homme ou femme.

  • Speaker #0

    Mais je crois qu'on ne pardonne à rien nos femmes.

  • Speaker #1

    On vient vous chercher parce que vous êtes une des pièces du puzzle qui va faire gagner. Un message qui, moi, m'a été transmis alors que j'étais jeune et que je n'avais pas forcément confiance en moi. On m'a dit, Sophie, il faut y croire, toujours y croire.

  • Speaker #0

    Quand vous doutez de vous, pensez-vous. Avec les Mariannes, je vous propose de partir à la rencontre de femmes qui s'engagent dans leur territoire. ou à l'échelle nationale, pour défendre leurs idées et construire différemment le monde de demain. Quant à moi, je suis une passionnée de politique et d'engagement et je rêve d'une société plus égalitaire. J'ai passé 7 ans dans la peau d'une collaboratrice parlementaire au Sénat et j'accompagne aujourd'hui les entreprises et les changemakers dans leur communication digitale et la conception de leur stratégie éditoriale. Pour soutenir ce podcast et permettre au maximum de personnes de bénéficier de son contenu, Abonnez-vous, notez le 5 étoiles et partagez-le autour de vous. Je suis évidemment présente sur les réseaux sociaux, vous me retrouverez avec le compte ElmarianneFR. Enfin, pour être informé de la sortie d'un nouvel épisode, abonnez-vous à la newsletter que vous trouverez sur mon blog. Et puis vous pouvez aussi soutenir financièrement le podcast en laissant un don sur la plateforme Tipeee. Bienvenue dans l'univers des Mariannes. Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Les Mariannes. Aujourd'hui j'ai le plaisir d'accueillir Fiona Texer, une femme aux multiples engagements, elle est conseillère politique depuis 15 ans, enseignante en sciences po-reines, cofondatrice de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique et autrice du podcast que vous avez peut-être écouté, Y'a pas mort d'homme, qui a été publié sur Binge Audio. Alors je vous propose cet épisode au lendemain des élections législatives anticipées qui ont eu lieu après la dissolution de l'Assemblée nationale par le Président de la République. On va s'interroger sur le visage de cette nouvelle Assemblée nationale et évidemment sur la place que vont occuper les femmes dans cette nouvelle Assemblée. Pour vous donner quelques repères, le nombre de femmes députées avait atteint son record en 2017. On avait constaté une première baisse en 2022 et en 2024, leur nombre recule toujours. puisqu'on est passé de 2017 à 38,8% à aujourd'hui 36%. Alors comment expliquer ce recul de la parité ? Quelles conséquences concrètes en matière de droits des femmes ? En quoi cette campagne Éclair a été marquée par un climat de violence, mais aussi par l'invisibilisation des femmes sur les plateaux télévisés ? Nous discuterons de tout ça avec Fiona Texer. Enfin, à travers cette conversation, vous découvrirez aussi les nombreux engagements professionnelle et militante de Fiona Texer, qui évolue depuis 15 ans dans le milieu politique qu'elle connaît donc parfaitement. Je vous souhaite une très belle écoute et surtout je vous souhaite de passer un très bel été. N'oubliez pas quand même de faire une pause pour recharger vos batteries et je vous dis à très vite. Bonjour Fiona.

  • Speaker #1

    Bonjour Laurie.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté mon invitation sur le podcast des Mariannes à l'issue des élections en législative anticipée de dimanche dernier. Alors on va commencer cette interview avec le traditionnel portrait chinois. Alors, si vous pouviez dîner avec une grande femme de l'histoire, qui choisiriez-vous ?

  • Speaker #1

    Gisèle Halimi.

  • Speaker #0

    Si vous aviez une heure de plus chaque jour, que feriez-vous ?

  • Speaker #1

    Du yoga.

  • Speaker #0

    Et si vous aviez un super pouvoir, ce serait lequel ?

  • Speaker #1

    Peut-être de remonter dans le temps et de faire en sorte que la révolution française soit plus féminine et plus féministe et qu'on entende les femmes dès la première heure, qu'on entende les femmes comme l'homme de gauche depuis le début et peut-être qu'on ne serait pas dans la situation dans laquelle on est si on avait écouté les femmes plus tôt.

  • Speaker #0

    On aurait gagné du temps, ça c'est sûr. Alors, nous enregistrons cet épisode quelques jours après le deuxième tour des élections législatives anticipées du 7 juillet. L'Assemblée nationale a un nouveau visage et elle compte désormais 36% de femmes, c'est-à-dire moins qu'en 2022 et moins qu'en 2017. Quelle est votre réaction par rapport à ce recul des femmes ?

  • Speaker #1

    C'est une très mauvaise nouvelle. C'est une mauvaise nouvelle parce que ça montre que les lois de parité ont des limites. Il y avait une progression assez constante depuis les lois de parité, c'est-à-dire en gros de 2002, donc des élections législatives de 2002 jusqu'en 2017. Et on a peut-être pensé trop rapidement que cette progression serait constante jusqu'à ce qu'on atteigne 50%. Et aujourd'hui, on voit qu'on recule élection après élection et donc ça souligne plusieurs choses. D'une part, que la loi n'est pas assez contraignante puisque la loi n'oblige pas les partis à présenter autant d'hommes que de femmes. Elle émet juste des incitations financières et certains partis ont clairement les moyens de passer outre la loi. Ce sont même des choix financiers qui sont faits et puis d'autre part que les partis politiques ne font pas assez d'efforts puisqu'en fait quand on ne les y contraint pas, ils ne le font pas d'eux-mêmes. Ce sont les partis qui font les choix d'investir telle ou telle personne. Ce sont les partis qui font dès le début le choix d'investir moins de femmes que d'hommes. Par ailleurs, on sait qu'ils font le plus souvent le choix d'investir des femmes dans des circonscriptions moins bonnes, moins gagnables. Et donc, in fine, il y a moins de femmes à l'Assemblée nationale. Et ça, oui, c'est une décision qui relève des États-majors des partis.

  • Speaker #0

    À votre avis, quelles conséquences cela va avoir en matière de droits des femmes, en matière de législation, cette baisse constante des femmes dans la vie politique ?

  • Speaker #1

    Ça a plusieurs types d'effets. Je pense que ça a un effet immédiat, et ça je le dis parce que j'étais collaboratrice parlementaire, c'est en effet sur l'environnement de travail à l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale, c'est évidemment le lieu où on fait la loi, mais c'est aussi un environnement de travail pour des centaines de personnes. Et plus un climat de travail est masculin, plus on sait qu'il est propice à un climat de harcèlement sexuel ou d'agression sexuelle. Et donc c'est une mauvaise nouvelle pour les femmes qui travaillent à l'Assemblée nationale, qu'elles soient... députées, fonctionnaires, collaboratrices et même dans une certaine mesure les journalistes, enfin toutes les femmes qui sont amenées à côtoyer ce lieu. Je pense que ce qui donnera un signal, c'est est-ce que le président ou la présidente de l'Assemblée s'engagera enfin à prendre un plan de lutte contre les violences sexistes et sexuelles à l'Assemblée. À l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, on avait fait des propositions en 2022. On avait notamment... souligner qu'il était important qu'il y ait une formation obligatoire pour tous les personnels de l'Assemblée, pour tous les élus, les collaborateurs, les collaboratrices, les fonctionnaires. Ça n'avait pas été le cas. Et il y a tout un tas de mesures qu'on pourrait mettre en place pour limiter le sexisme à l'Assemblée, c'est-à-dire sanctionner systématiquement les propos sexistes, avoir une cellule d'écoute digne de ce nom, être beaucoup plus intransigeant lorsqu'il y a des cas de harcèlement entre députés et collaboratrices. Par exemple, aujourd'hui, les députés sont très protégés, notamment par ce qu'on appelle la... la clause de loyauté qui leur permet en gros de licencier leurs collègues quand ils ne sont pas d'accord, y compris lorsqu'il y a des dénonciations de violence. Il y a aussi quelque chose qui me choque, c'est que personne ne prend la peine de mesurer la réalité de ces violences à l'Assemblée. Il n'y a jamais eu de vraie enquête de victimation faite par les services de l'Assemblée nationale et donc aujourd'hui on ne mesure pas le problème et donc on n'apporte aucune solution en interne. Donc voilà, ça aura des conséquences d'abord sur le climat de travail à l'Assemblée. Après, ça aura probablement des conséquences au-delà, c'est-à-dire Qu'est-ce que cette Assemblée va réserver aux propositions en faveur de la protection ou de l'extension des droits des femmes ? Si on fait un recul historique, si on prend la Ve République, on se rend compte que toutes les mesures législatives qui ont permis d'avancer sur la question des droits des femmes, que ce soit l'IVG, la pénalisation du viol, la pénalisation du harcèlement sexuel, toutes ces questions-là, elles ont été portées par des femmes. Il y a une exception, c'est la loi Neuvirth sur la contraception. Mais sinon, toutes ces grandes avances-là ont été portées par des femmes. Et en fait, quand on regarde dans le détail, on se rend compte que les hommes politiques ne s'intéressent pas ou peu aux droits des femmes. Et c'est le même flagrant. On a eu un exemple assez parlant, je trouve, cet hiver, lorsqu'il y a eu le texte pour constitutionnaliser l'IVG et qu'il y avait un petit moment de blocage au Sénat. Ce qui a permis de faire basculer, en fait, l'opinion des sénateurs, c'est que les sénatrices en faveur de cette réforme et les militantes se sont mises à faire pression sur les épouses, les sœurs, les filles, les nièces, les sénateurs conservateurs qui bloquaient le texte, parce qu'eux ne voyaient pas l'intérêt, en fait. Et c'est dire, si eux-mêmes ne voient pas l'intérêt d'un projet de société, il fallait convaincre leurs entourages féminins d'accepter. Donc voilà, moi, ce qui m'inquiète, c'est qu'on va avoir une assemblée plus masculine et on va avoir aussi une assemblée beaucoup plus conservatrice que la précédente, puisque la poussée du RN n'est pas une bonne nouvelle pour les droits des femmes. Là où l'extrême droite... passe, les droits des femmes trépassent. Et on peut aussi d'ores et déjà constater qu'il y a des profils très inquiétants au RN, notamment des cas d'hommes violents avec leurs conjointes qui ont été élus.

  • Speaker #0

    Oui, alors je rebondis sur cette question des hommes politiques condamnés pour pure violence. Damien Bade, Adrien Quatennens ou Julien Bayou ne sont plus députés. Vous qui aviez cofondé l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles, est-ce que vous vous en réjouissez aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Ce qui est certain, c'est que la dissolution, elle a eu pour conséquence la clarification. Ça a permis au moins ça, et ça a permis de clarifier le statut de député qui était déboulé pour leur camp. Le premier à retirer sa candidature dans la course aux législatives, c'était Julien Bayou, qui de toute façon avait déjà quitté l'ELV et son groupe parlementaire. Lui, il était visé par une plainte pour harcèlement moral et à Bûche-Roduleux, l'état de faiblesse. Et ensuite, les militantes de gauche ont dû très fortement se mobiliser pour le retrait de la candidature d'Adrien Quatennens, qui était le seul à avoir été condamné pour violences conjugales à l'Assemblée nationale, mais qui lui était soutenu par la direction de l'ELFI. Et donc, il a finalement dû admettre que... Son maintien a été intenable pendant cette campagne. Mais ce qui est intéressant, c'est qu'en fait, une fois qu'il s'est désisté, c'est à ce moment-là que le camp d'Emmanuel Macron s'est mis à lâcher Damien Abad, qui lui est mis en examen pour tentative de viol et qui a été éliminé au premier tour. Et autre conséquence que ça a eu sur le camp présidentiel, c'est que Jérôme Perra, qui lui est conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine, qui était candidat en Dordogne et qui était condamné pour violence conjugale lui aussi, ce qui s'est passé avec Jérôme Perra, c'est qu'en fait, la Macronie a mis un... candidat face à lui, mais c'était un candidat fantôme, dans le sens où il n'habitait pas la circonscription, où il n'a pas déposé sa profession de foi, et donc il n'y avait pas de bulletin pour lui dans les bureaux de vote au premier tour. Mais la manœuvre n'a pas suffi et lui aussi, il a été éliminé au premier tour. Donc oui, moi je me réjouis qu'au moins, ces boulets pour leur camp politiquement, et puis ces hommes qui ne sont pas les amis des droits des femmes. soit écarté de l'Assemblée. Après, on notera que Gérald Darmanin a été réélu et que, par exemple, Frédéric Bocchaletti, député RN du Var, a été réélu. Sa femme a livré récemment un témoignage glaçant de violences conjugales.

  • Speaker #0

    Alors, j'aimerais qu'on revienne un peu sur le moment de la campagne et notamment de l'entre-deux-tours. Vous, vous avez signé une tribune avec d'autres personnes qui a été publiée dans Libération, tribune en date du 2 juillet dernier, pour dénoncer l'invisibilisation des femmes. dans la campagne, dans cette campagne législative, au cours de laquelle elles n'ont représenté les femmes que 41%, qu'on les a moins vues sur les affiches, mais on les a moins vues aussi sur les plateaux télé. Qu'est-ce que vous en avez pensé de ça ?

  • Speaker #1

    Les partis ont beaucoup prétexté l'urgence de la situation pour s'excuser sur le fait qu'ils n'ont pas été à la hauteur sur les droits des femmes. Je pense que c'est un problème de prétexter l'urgence parce que ça veut dire que les droits des femmes ne se poseraient qu'en période d'élection. Or c'est un sujet sur lequel les partis doivent faire des efforts au quotidien. Et on voit qu'ils n'ont collectivement pas été bons sur la question des investitures, même s'il y a des nuances. Le populaire se rapprochait de la parité et les républicains, par exemple, en étaient extrêmement loin. Mais après, il y a eu aussi qui on met en avant dans cette période. Et c'est vrai que la campagne a cruellement manqué de figures féminines. Et en fait, les figures féminines qui émergeaient ont été silenciées, c'était le sens de cette tribune. C'est-à-dire que... Le fait que le Nouveau Front populaire est comme figure 4 chef de parti, il y avait eu une espèce de répartition des débats entre eux dès le début. C'est-à-dire que Manuel Bompard allait au premier débat, Olivier Faure allait à un autre, et Marine Tondelier allait encore à un autre. Et lorsque le jour du débat Tondelier-Bardella approchait, Bardella a signifié son refus de débattre avec elle. Ce qui veut dire qu'il a privé Marine Tondelier de débat. En un sens, qu'il ait eu peur, qu'il n'ait pas eu envie, ça, ça lui appartient. On ne peut pas lui reprocher. Ce qui est sidérant, c'est que BFMTV ait accepté cette situation et qu'ils aient laissé faire, puisque la silenciation des femmes dans l'espace public, c'est la responsabilité des médias qui leur donnent ou qui ne leur donnent pas la parole.

  • Speaker #0

    Alors, une campagne aussi marquée par la violence, avec un climat de tensions très palpables. Plus de 50 agressions recensées partout sur le territoire, selon une source du ministère de l'Intérieur. On pense bien sûr à l'agression médiatisée de Priska Thevenot, porte-parole du gouvernement, agressée avec son équipe à Meudon alors qu'elle collait des affiches. C'est un phénomène qui existait déjà, la violence dans la vie politique, que ce soit pour les hommes ou pour les femmes, mais c'est un phénomène qui s'est intensifié pendant cette campagne ?

  • Speaker #1

    Ah oui, indiscutablement, ça s'est intensifié. Ça s'est intensifié dans la campagne contre les candidats, puisqu'il y a eu une hausse des agressions. On a cité Priska Thevenot. Après, il y a eu des remontées en fait dans tout. Les équipes, que ce soit de l'extrême droite jusqu'à la gauche, tous ont rapporté avoir été victimes d'attaques de l'autre camp. Et puis, il y a eu une violence, surtout libérée dans la société, avec une hausse des agressions racistes, des agressions homophobes, des propos intolérables qui ont pu être tenus et dont on a vu l'écho dans les médias. On pense à la séquence d'envoyé spécial avec cette femme divine, aide-soignante, insultée par ses voisins dans le Loiret. Et puis aussi, un petit côté, on a lâché la rampe, on a lâché les chiens sur les agressions de journalistes. Je pense notamment aux journalistes du service public, Karim Vessouli et Mohamed Bouafsi, qui ont été intimidés également par... Des courriers notamment, donc une campagne vraiment marquée par les violences envers les politiques, envers les médias et envers les concitoyens qui ont le malheur de déplaire l'extrême droite aussi.

  • Speaker #0

    Alors dans l'entre-deux-tours, on a découvert la figure de Marine Tondelier, secrétaire nationale d'Europe Écologie Les Verts. On l'a découverte en larmes au micro de France Inter. Elle s'est imposée comme une nouvelle figure. On l'a beaucoup comparée à Jacinda Ardern pour son côté authentique. Selon vous, en quoi Marine Tondelier assume une posture politique un peu différente ?

  • Speaker #1

    Moi, je suis contente qu'on l'ait découverte, parce que moi, je la connais depuis une quinzaine d'années. Donc, ça me fait plaisir que la France, maintenant, la connaisse. Et je crois que sa force à Marine Tondelier, ça a été de rappeler que la politique, elle se fait avec des convictions, mais aussi avec des émotions. Dans la séquence que vous citez sur France Inter, elle... Elle rappelle en fait que l'empathie est politique et dans cette séquence, elle est émue parce qu'elle revient sur des propos tenus par Bruno Le Maire et elle, elle dit qu'en fait, la politique, elle a des conséquences très concrètes sur la vie des gens et que seuls des privilégiés comme Bruno Le Maire peuvent feindre de l'ignorer en fait. Et ce qu'on doit à Marine Tondelier, c'est aussi d'avoir un très fort ancrage local. Elle est élue d'opposition à Énard Beaumont, donc le fief de Marine. Le Pen, elle sait ce que c'est aussi que de subir le RN au pouvoir localement. Je crois que ça fait aussi sa force, cette connaissance du terrain, mêlée à une vraie empathie, une vraie sensibilité. Puis après, on a beaucoup parlé de sa veste, puisque le style aussi est politique. Et donc sa veste vert, je crois qu'on appelle ça le vert véronèse, ça a permis de la rendre identifiable sur les plateaux, ça a permis de la rendre identifiable sur le terrain. Et puis... Et puis c'était un coup très bien joué, puisque ça envoie un message clair et lisible, à la fois la respectabilité de la veste et puis aussi l'intransigeance sur les convictions. Moi, elle me rappelle un petit peu, dans un même registre, le côté girl next door qu'on appréciait chez Cécile Duflo il y a une dizaine d'années. À la fois, voilà, bonne camarade, proche des gens. Et puis, je trouve que ce qui a marqué aussi, lors du deuxième dimanche électoral, c'était son excellent tréparti, notamment face à Jean-Philippe Tanguy. Tout ça fait qu'elle sort très populaire et renforcée de la séquence.

  • Speaker #0

    On a parlé de l'importance des femmes dans la vie parlementaire de notre pays. Alors comment renforcer l'accès des femmes à la vie politique ? Et faut-il aller plus loin en matière de parité dans la loi ?

  • Speaker #1

    Moi, je crois qu'il n'y a que la loi qu'on comprend en matière de parité. En fait, quand on regarde à tous les échelons, il y a de la parité là où la loi est contraignante. Il n'y en a pas là où la loi ne dit rien. Si on prend les conseils municipaux, les conseils régionaux, les conseils départementaux, il y a à peu près 50-50 de conseillers et de conseillères. Par contre, si on prend les exécutifs, les têtes, les maires, les présidents de conseils départementaux, les présidents de conseils généraux, là, la parité n'existe pas. Parce qu'en fait, il y a zéro contrainte. Il y a une parité parfaite au Parlement européen parce que la loi l'oblige. Et puis, il n'y en a pas au Parlement national parce que la loi ne l'oblige pas. Et puis il y a aussi mille façons de contourner la loi. Quand on regarde au Sénat, si aujourd'hui il n'y a pas la parité au Sénat, c'est parce qu'il y a plein de façons de contourner la loi, notamment de présenter des listes dissidentes, d'avoir des ententes sur le fait de présenter deux fois des hommes tête de liste dans certains départements. Il y a plein de façons de contourner la loi et on les connaît, elles sont visibles, elles sont même devenues grossières. Si on veut vraiment la parité... il faut renforcer la loi, il faut que ça passe par la loi. Les partis ne comprennent que ça. Après, on nous dira aussi, ah mais oui, mais on a du mal à trouver des candidats. C'est les partis qui le disent. Les femmes n'osent pas se lancer, etc. Mais moi, j'ai envie de leur demander, qu'est-ce que vous faites pour que les femmes se lancent ? Pourquoi est-ce qu'il y a encore des barrières et des censures ? Est-ce que vous avez réfléchi à quelle heure tombent vos réunions ? Est-ce que vous avez réfléchi à... à l'articulation entre les temps de vie privée, de vie professionnelle et de vie politique. Est-ce que vous avez réfléchi à la sécurité financière des femmes dans les campagnes ? Parce qu'en fait, une campagne, ça coûte de l'argent, surtout quand on n'est pas sûr de se faire rembourser, et que les femmes gagnent moins d'argent que les hommes. Qu'est-ce que vous faites pour leur garantir un meilleur accès ? Il y a plein de leviers sur lesquels on peut jouer, que ce soit les heures des réunions, la façon de faire de la politique, quand est-ce qu'on arrêtera de valoriser ? le mâle alpha, le grand tribun, l'homme qui porte ses couilles, c'est quand même ça dont on parle. On peut valoriser autre chose en politique et on peut faire de la place, mais ça demande de faire des efforts et ça demande aussi de casser des styles ou des référentiels politiques qui aujourd'hui sont parfois présentés comme neutres, alors qu'en fait ils sont extrêmement masculins.

  • Speaker #0

    Alors c'est une transition parfaite pour ma prochaine question qui vous est adressée plus personnellement. Vous, votre parcours il est marqué par la politique bien sûr. Vous avez travaillé 15 ans en tant que collaboratrice d'élu. Vous travaillez depuis 15 ans en tant que collaboratrice d'élu. Est-ce que vous, vous n'avez jamais pensé à passer de l'autre côté ?

  • Speaker #1

    Alors non, jamais. Pour moi, ça a toujours été une grosse ligne rouge. Mais je pense aussi parce que j'ai une très haute estime de la politique et que pour avoir beaucoup côtoyé les élus, j'ai une image de la fonction qui, à mon sens, doit être exemplaire. Et je pense aussi que c'est un type d'engagement dans lequel on ne peut pas faire une franche séparation entre le privé et le politique, et qui est extrêmement engageante et qui est extrêmement impliquante. Et que moi, j'ai toujours tenu à me dire si j'ai envie d'avoir une vie à côté, si j'ai envie de ne pas être tenue par la responsabilité. Eh bien, en fait, moi, c'est juste mon travail. Et à un moment donné, je rentre chez moi, j'éteins mon téléphone. Donc, je pense que c'est une charge qui est extrêmement haute et qui est extrêmement importante. Et moi, j'ai toujours trouvé que ma place était davantage dans l'ombre ou dans l'ombre. Eh bien, c'est un travail avant d'être un engagement.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu de votre métier de collaboratrice en quelques mots ? Quel est votre quotidien ? À quoi il ressemble ? Sur quel sujet est-ce que vous travaillez ? Pour celles et ceux qui n'auraient pas forcément une idée précise de ce que ça revêt d'être collaborateur d'élu.

  • Speaker #1

    Alors, c'est vrai que collaborateur d'élu, souvent, on ne sait pas ce que c'est. Et si on sait ce que c'est, on a souvent une mauvaise image parce que malheureusement... J'ai envie de dire que ce sont les pires d'entre nous qui font le plus par les deux, puisqu'un bon collaborateur, c'est quelqu'un qui reste dans l'ombre et qui sait rester à sa place. C'est-à-dire que Pénélope Fillon ou Alexandre Benalla n'étaient pas de bons collaborateurs, puisqu'ils ont trop fait par les deux. Donc moi, j'ai fait ça pendant 15 ans. Je travaillais, vous l'avez rappelé, en mairie, au Sénat, en cabinet de l'Install, à Matignon. J'ai travaillé pour des personnalités de la gauche et de l'écologie. Et puis j'ai fait différents types de postes. J'étais collaboratrice parlementaire, donc dans un travail plutôt... J'étais secrétaire générale de groupe parlementaire, qui a un travail de coordination dans le groupe politique, à la fois en interne, où c'était au Sénat, et puis aussi en externe, dans la relation avec, par exemple, l'Assemblée, le parti politique, etc. J'étais chef de cabinet, qui est plutôt un travail de logistique et de planification du temps et des déplacements des élus. Et puis j'étais conseillère, donc davantage dans la production de notes, de conseils, etc. S'il y en a parmi vous qui hésitent à y aller, j'ai envie de vous dire, faites-le. C'est très formateur, surtout quand vous êtes jeune diplômé. Le profil idéal, c'est d'être quand même jeune diplômé en droit ou en sciences politiques et puis avec des affinités partisanes. Ce n'est pas obligatoire, mais c'est toujours un atout. Faites-le, mais sachez aussi que c'est dur. C'est passionnant, mais c'est dur. Moi, je trouve que c'est un milieu traumatisant qui est violent. Moi-même, j'ai subi du harcèlement sexuel et des agressions sexuelles au travail. Et pendant trop longtemps, elles ont été passées sous silence. Donc il faut aussi y aller en se disant qu'il est probable qu'on n'en sorte pas un d'un quand même. Donc il faut apprendre à se protéger et il faut essayer d'exercer ce métier dans les meilleures conditions possibles.

  • Speaker #0

    Alors pour ceux qui rêvent de ces carrières, quel est le conseil numéro 1 à donner ? Quand on n'a pas de réseau, qu'on n'a pas de contact, qu'on ne sait pas comment s'y prendre, est-ce que les candidatures spontanées fonctionnent ? C'est une question qu'on me pose souvent.

  • Speaker #1

    Ça ne coûte rien d'essayer. En tout cas, ça ne coûte rien d'essayer. Après, l'idéal, c'est de quand même se renseigner sur la personne que vous targettez, sinon c'est plus difficile. Et puis, les campagnes sont des bons moments aussi pour se frotter un peu à la politique. Là, on vient de vivre une campagne express, mais c'est très intéressant si vous n'avez jamais vu ça de votre vie. Si ça se trouve, il y aura des élections dans un an, donc vous pouvez retenter le coup. Mais c'est intéressant d'aller suivre un candidat au quotidien, de voir ce que c'est que la rencontre avec les gens. de se rapprocher de l'équipe de campagne, de voir ce que c'est que d'aller tracter sur un marché, faire du porte-à-porte. Donc ça, c'est une bonne porte d'entrée, c'est de se rapprocher d'une équipe. Après, il y a plein de façons d'y aller, qui sont des façons thématiques. Vous êtes expert sur un sujet, je ne sais pas, ça peut être le numérique, ça peut être les libertés publiques, les finances. Regardez les députés qui siègent dans ces commissions et qui sont passionnés pour ces sujets-là. Il y a plusieurs types de portes d'entrée. L'idéal, c'est... La compétence, sachant qu'être généraliste est aussi une compétence, et l'affinité partisane, mais on a aussi des profils qui arrivent tout à fait à se refiler autrement. Et puis ça dépend si vous voulez davantage travailler sur le terrain, en circonscription ou à l'Assemblée nationale. Ça dépend si vous êtes plutôt des professionnels du droit ou de la communication. Les gens qui écrivent très bien aussi sont des profils recherchés. On a toujours besoin de plumes dans ce métier. Bref, il y a plein de possibilités. Pensez aussi au Parlement européen. On les oublie un peu trop souvent et il y a plus de postes là-bas. Les équipes sont plus nombreuses. Bref, il y a plein de façons de s'y prendre. Le seul conseil que j'ai à donner, c'est de soyez vraiment motivé parce que c'est dur et c'est chronophage. Donc autant y aller en ayant vraiment envie d'y aller.

  • Speaker #0

    Merci. Alors, vous avez mentionné les agressions dont vous avez été victime dans le cadre de votre travail de collaboratrice d'élu. Est-ce que c'est ça qui vous a donné envie de cofonder l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles et de prendre part à ce grand mouvement sociétal du MeToo politique ? Parce que dès 2021, vous avez été à l'initiative de nombreuses tribunes publiques pour dénoncer les violences sexuelles et sexistes dans ce milieu politique. Vous avez exhorté les partis à écouter les victimes. Donc est-ce que c'est finalement cette expérience du terrain qui vous a donné envie de... De militer ?

  • Speaker #1

    Absolument, oui, c'est la raison pour laquelle j'ai été à l'initiative de MeToo Politique il y a trois ans, pour alerter sur ce sujet, pour montrer que les violences, elles sont systémiques, que ce ne sont pas des cas isolés, parce qu'en fait, on les retrouve dans toutes les familles politiques, de l'extrême gauche à l'extrême droite, jusqu'à l'extrême centre, et puis aussi à tous les échelons de pouvoir. C'est-à-dire que j'ai reçu des témoignages de femmes qui ont été agressées par un conseiller municipal dans un tout petit village, et puis parfois, ça se passe aussi au plus haut sommet de l'État. Et en fait, on peut être tenté de penser que ces violences, elles sont loin de soi lorsqu'on est loin de la politique, que oui, c'est un problème de collaboratrice parlementaire. Bon, quand même, c'est déjà un problème, mais en fait, ça peut concerner n'importe qui. Si on prend le cas de Nafissatou Diallo, qui a été la victime de Dominique Strauss-Kahn, on voit bien que sa vie ne la prédestinait pas à côtoyer des hommes politiques. Et en fait, ça peut concerner n'importe qui dans le sens où... Les histoires récentes nous ont montré qu'il était concerné les épouses, les administrés qui venaient demander des services, des militantes, des journalistes, des collègues élus, des fonctionnaires et des collaboratrices, mais en fait ça peut être n'importe qui. Et donc c'est pour ça que moi il me semble important de marteler aux partis politiques qu'il faut prendre au sérieux cet enjeu et qu'il faut cesser de promouvoir, d'embaucher, d'investir des hommes violents. Souvent les profils sont connus dans les partis, il y a toujours ce truc de... Ah oui, tout le monde savait, mais personne n'a rien dit. Ben non, mais en fait, si on sait, il faut le dire et puis il faut empêcher de nuire. Parce qu'en fait, ça cause un double problème. C'est à la fois un problème de santé publique, parce que les violences sexuelles sont un problème de santé publique, mais c'est aussi un problème démocratique, parce qu'en fait, il y a des femmes qui quittent la politique parce qu'elles sont dégoûtées. Et quand on enlève toutes les dégoûtées, à la fin, il ne reste que les dégoûtants. Et c'est ce qui fait qu'on tourne en rond. Et évidemment que les... que les commissions électorales ont du mal à trouver des femmes pour aller mener telle ou telle campagne. Si elles ont été aussi mal accueillies et si elles ont été aussi violentées, pourquoi s'investir ?

  • Speaker #0

    Est-ce que les commissions électorales doivent être paritaires ? Est-ce qu'elles le sont déjà ?

  • Speaker #1

    Alors ça, ça dépend des parties, des statuts des parties. C'est très varié. Il n'y a aucune obligation qu'elles le soient. C'est au libre vouloir des parties, au bon vouloir des parties.

  • Speaker #0

    Dans le cadre de votre action à l'Observatoire, pour ne citer qu'une des actions, parce qu'elles ont été très nombreuses, mais j'ai envie de parler d'un long rapport fleuve dans lequel vous avez étudié les discours des personnalités politiques accusées de violences, un travail vraiment titanesque. Vous avez recensé les stratégies de défense, les réactions des hommes politiques, les réactions de leurs entourages aussi et des organisations politiques. Pourquoi ce rapport et quel accueil est-ce qu'il a reçu ? Alors ce qu'on voulait montrer en fait c'est que les violences ont bien ce caractère systémique et on a pris des exemples de gauche comme de droite. On analyse la communication de Nicolas Hulot, de Gérald Darmanin, mais aussi d'Éric Zemmour, mais aussi d'Adrien Quatennens ou d'Éric Coquerel. Et en fait de montrer que ça n'est pas une histoire de camp politique, ça n'est pas une histoire de niveau de mandat. Toujours la même histoire, c'est l'histoire d'hommes qui vont déployer les mêmes arguments à chaque fois qu'une accusation va être portée contre eux. La première de leurs réactions, c'est de dire qu'ils n'ont rien fait, ou si c'est impossible de minimiser les faits, de rappeler qu'il y a tel contexte et qu'en fait, ce n'était pas si grave, mais que c'était une gifle, oui, mais que cette gifle n'a pas laissé de traces, oui, mais que le contexte était quand même un divorce. On trouvera toujours une bonne raison. La deuxième chose qu'ils vont faire, c'est essayer de... de manipuler le vocabulaire juridique pour qu'on perde un peu l'essentiel du message. On va entendre des phrases un peu comme je me tiens à la disposition de la justice Toujours montrer qu'on a le droit derrière soi. Je pense par exemple à Damien Abad lorsqu'il a été mis en examen. Pour qu'un député soit mis en examen, il faut que le parquet demande au bureau de l'Assemblée nationale de lever son immunité parlementaire. Le bureau de l'Assemblée nationale a levé l'immunité parlementaire de Damien Abad. Mais Damien Abad est venu expliquer à l'AFP que c'est lui qui l'avait demandé, alors qu'il n'a rien à voir dans la procédure, comme pour montrer qu'il était du bon côté du droit, alors que non. Le Barquet a transmis la demande au bureau, le bureau a répondu, Damien Abad n'a rien à faire dans cette histoire. Et donc, sans cesse se présenter comme dans son bon droit, ça c'est le deuxième trait commun à toutes les stratégies de défense. Et puis, le troisième, en fait, ça va être d'expliquer que c'est globalement un... complot politique contre eux. Ce ne sont pas leurs faits et gestes qui sont en cause, puisque de toute façon, ils n'ont rien fait, mais qu'on veut attaquer leur honneur et leur combat politique. Donc, en fait, expliquer que les femmes mentent et qu'elles sont manipulées à des fins politiques. C'est un peu la constante de toutes ces défenses-là. Et pourquoi avoir montré ça ? Eh bien, en fait, pour montrer que sans solution globale, on ne s'en sortira pas. traiter au cas par cas tous ces sujets-là, c'est bien, il faut le faire. Idéalement, que les partis politiques et les familles politiques s'en saisissent, c'est mieux. Mais que si on refuse de voir le tableau global, on aura une vie politique qui sera gangrénée par les violences sexuelles pendant encore très longtemps.

  • Speaker #1

    Parmi les solutions que vous proposez pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, il y a la création d'une instance, une supracellule d'écoute qui pourrait réceptionner... les témoignages et les signalements des victimes. Est-ce que les partis vous ont écouté en ce sens ? Encore une fois, est-ce que cette proposition a reçu un accueil favorable de la part des principaux concernés ? Alors,

  • Speaker #0

    pas du tout, parce que les partis ont quand même tendance à mettre des œillères jusqu'à ce que les scandales éclatent à la figure. Et c'est une proposition qui vient du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, qui est issu d'un de leurs rapports de 2019, et qui en fait fait un parallèle intéressant. avec la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Alors, pour faire un petit peu l'historique, vos auditeurs et vos auditrices se souviennent sûrement de l'affaire Cahuzac. L'affaire Cahuzac, elle éclate en 2012 quand Mediapart, puisque heureusement qu'il y a de la presse qui fait des enquêtes sérieuses, qu'elles soient sur les scandales financiers ou les scandales sexuels, Mediapart révèle les comptes cachés du ministre du Budget. Et à ce moment-là, on trouve une stratégie... pas très différente de ce que je viens de vous décrire. Jérôme Camusac qui dit que pas du tout, il n'a rien fait, que ce n'est pas lui, qu'on cherche à lui nuire et que de toute façon, tout le monde ment. Et bizarrement, comme c'est des questions d'argent, les gens s'intéressent davantage. Et en fait, à ce moment-là, la classe politique, elle a deux options. C'est-à-dire soit faire comme d'habitude, dire Ah mais oui, mais lui, c'était une brebis galeuse, on est désolés et puis on passe à autre chose. Ou soit se dire On a un problème systémique, la confiance avec les citoyens est rompue et il faut qu'on... fassent quelque chose de fort, poser un acte politique important pour restaurer le lien avec les citoyens et pour empêcher que ça se reproduise. Et c'est à ce moment-là qu'est votée la loi pour la transparence de la vie publique, qui découle sur la création d'une haute autorité indépendante, la haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui en fait est chargée de contrôler la probité des hommes et femmes politiques de ce pays, et même des collaborateurs, des hauts fonctionnaires, bref. Avoir un super pouvoir de contrôle. Et aujourd'hui, quand vous discutez avec les élus, s'il y a bien une instance qui craigne... C'est celle-là. Et tout le monde a peur de se faire pincer pour une mauvaise déclaration, une maison de vacances qui a été oubliée, une histoire de SCI qu'on avait oubliée dans un coin. Bref, et en fait, quand on regarde aussi ce qui s'est passé depuis dix ans, depuis que la haute autorité existe, c'est que les grandes figures politiques qui sont tombées, elles sont tombées pour des histoires de mauvaise déclaration. Vous prenez par exemple Caroline Cailleu. qui a été ministre sous Macron il y a deux ans, elle n'est pas tombée parce qu'elle a tenu des propos homophobes, elle est tombée parce qu'elle avait une déclaration mal remplie. Vous prenez Laura Flessel, ou alors dans un autre registre, François de Rugy, avec son histoire de homard. Bon, on n'enlèvera pas l'idée qu'en fait, avoir fait une petite orgie de homard au frais du contribuable, c'est moins grave que des violences conjugales. Et pour autant, c'est ce type de scénario qui se produit. Aujourd'hui, on ne tolère pas. plus les manifestations financières en politique et je m'en réjouis. En fait ce qui nous manque c'est un électrochoc sur les violences sexuelles semblable à l'électrochoc qui a été l'affaire Cavusac et je ne comprends pas comment ce qui s'est passé ces dernières années sur Hulot, sur Katnins, sur Abad n'est pas encore servi de leçon.

  • Speaker #1

    Pour faire un mauvais jeu de mots il s'agit d'une hiérarchisation des périls.

  • Speaker #0

    Exactement.

  • Speaker #1

    Il faut une sacrée force quand même pour adopter le rôle de vigie que vous avez eu et que vous avez toujours pour oser dénoncer les actes de personnes puissantes, il faut le dire quand même, et pour essayer d'infléchir les positions des partis. Est-ce que vous, vous vous sentez parfois abattue ou impuissante ? A contrario, vous qui renvoyez comme une image de force, qu'est-ce qui vous donne cette force pour adopter ce rôle ?

  • Speaker #0

    Alors oui, c'est dur. et oui, ça repiète sur la santé mentale. Moi, j'ai fait un burn-out militant, par exemple, il y a 18 mois, parce qu'on se sent démoralisé, impuissant, qu'on se dit que l'ampleur de la tâche est trop importante. Et donc, il faut savoir bien s'entourer, il faut être soutenu et surtout, il faut savoir faire des pauses pour ensuite repartir si on en a envie ou alors se dire, c'est bon, j'ai fait ma part et je passe à autre chose. Après, je voudrais souligner aussi qu'il y a des façons de s'engager qui exposent davantage que d'autres. Moi, j'ai testé différents modes d'engagement. Par exemple, j'ai co-écrit une série documentaire pour Binge Audio qui s'appelle Y'a pas mort d'homme qui est une série en huit épisodes sur la violence sexuelle. Ce n'est pas la même chose, par exemple.

  • Speaker #1

    On mettra les références dans le descriptif de l'épisode.

  • Speaker #0

    Ce n'est pas la même chose qu'organiser des manifs, ce n'est pas la même chose qu'avoir des prises de parole publiques, ce n'est pas la même chose que faire des contenus en ligne sur les réseaux sociaux. Moi, il y a eu aussi un autre type d'engagement qui m'a beaucoup plu. J'ai pu donner cours à Science Porraine pendant deux ans et créer un cours sur les violences sexistes et sexuelles. Ce qui est intéressant, ça veut dire qu'on est au contact de centaines d'étudiants pour faire passer des messages qui sont... aussi des messages de prévention sur ces questions-là. Donc il y a différents types d'engagement. Il y a différents types d'engagement. Ce qu'il faut, c'est savoir écouter ses limites, savoir s'arrêter lorsque l'on milite dans un environnement toxique, parce que le milieu militant, il n'est pas totalement exempt de violences non plus. Et puis, il faut savoir se reposer, surtout.

  • Speaker #1

    Vous avez des chiffres sur le burn-out militant ?

  • Speaker #0

    Alors moi, je ne connais pas de chiffres sur le burn-out militant. Néanmoins, je sais qu'il y a des ressources assez utiles. Je pense notamment au livre d'Elsa Deck-Marceau, Faire justice qui évoque la question notamment du burn-out militant dans les violences sexistes et sexuelles. Et puis également les travaux du sociologue Simon Cotter-Marx, qui a travaillé sur ces questions-là dans le milieu associatif.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. On mettra les références encore une fois dans le descriptif de l'épisode. Alors on s'approche de la fin de cette interview. Dans l'esprit de sororité du podcast, je vais vous inviter à nous donner quelques conseils. Alors des conseils en ce qui concerne les relations avec les médias. Vous, vous êtes quand même habitué des plateaux radio et télé ou des contacts avec des journalistes pour défendre vos idées et vos propositions. Qu'est-ce que vous conseilleriez à une personne qui veut prendre davantage la parole dans les médias ? Comment bien se préparer et comment ne pas trop stresser finalement avant une interview ?

  • Speaker #0

    Préparez-vous, préparez-vous bien. Ce n'est pas un exercice qui s'improvise. Je vous recommanderais vraiment de vous former avant de vous lancer. Parfois, on trouve des ressources dans les collectifs militants ou dans les partis. Il y a souvent des formations qui sont proposées. Je pense qu'il faut être très clair sur ce qu'on a à dire. Et le plus important, en fait, c'est d'avoir un message suffisamment clair et concis dans sa tête. pour pouvoir le restituer de façon claire et concise. Et j'ai envie de dire, peu importe les questions que vous posera la journaliste, ce qui compte, c'est votre message. Et souriez et êtes détendus.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous auriez un dernier conseil à transmettre aux femmes qui vont entrer au Palais Bourbon, tant que nouvelles députées, et aux femmes plus largement qui veulent s'engager, que ce soit dans des partis politiques, dans des associations, dans la société civile ? Quel conseil est-ce que vous aimeriez leur transmettre ?

  • Speaker #0

    Alors aux femmes députées, moi je donne toujours le même conseil, parce que j'ai des amis députés et à chaque fois je leur ai dit la même chose. Ne tombez pas dans le syndrome de la bonne élève. On a vraiment tendance à s'enfermer dedans en tant que femme, à vouloir être bonne partout, à garder ce côté première de la classe parce qu'évidemment chez les députés, il y a beaucoup de femmes qui ont été très fortes à l'école et qui sont très studieuses. Vouloir être bonne partout à l'Assemblée, c'est s'épuiser. Ce n'est pas bon signe de s'épuiser parce qu'on ne pourra jamais tout faire et jamais être bonne partout. Il faut prioriser dès le début du mandat ces combats, se répartir avec... ses collègues de sous-groupes parlementaires ou des intergroupes, les sujets sur lesquels on veut vraiment s'investir et se dire je ne serais pas partout au même moment, donc autant se limiter à ce que je sais faire de mieux ou ce qui me motive le plus Et il ne faut surtout pas négliger la circonscription, on le voit, c'est important de ne jamais casser le lien avec les électeurs et les électrices, surtout quand des législatives anticipées peuvent poindre à tout moment. Et puis formez-vous, formez-vous au management, formez-vous à la prévention contre les VSS. Pensez à vos collaborateurs et vos collaboratrices, c'est des métiers où la souffrance psychique est élevée. Ce sont des gens qui vont se donner pour vous bien au-delà de ce que permet le droit du travail pendant des années. Alors prenez soin d'eux, payez-les correctement et soyez polis et respectez le droit du travail autant que possible parce que c'est trop peu souvent le cas. Après un conseil aux femmes qui souhaitent s'engager en général, vraiment c'est le moment. On a beaucoup répété ces derniers temps la citation de Simone de Beauvoir, il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Je crois que la crise elle est là, elle est profonde. Et les résultats de dimanche dernier, c'est pas vraiment une victoire, c'est surtout un répit. Alors c'est le moment de s'engager, il y a plein de façons de le faire. La plus évidente peut-être que c'est de rejoindre un parti, mais il y en a plein d'autres. Si vous êtes... palais avec les partis politiques et la société civile qui a joué un rôle incroyable dans cette campagne. Je pense notamment aux initiatives de militantes comme Caroline Devasse qui ont su motiver et mobiliser des dizaines de milliers de personnes pendant cette campagne. Et puis les présidentielles c'est dans trois ans, c'est une course de fonds. Donc voilà si ça vous intéresse il y a le site indivisible.fr qui vous offre plein de ressources. Et puis il y a la société civile, il y a les partis, il y a aussi les syndicats. Peut-être le moment de se syndiquer. Je crois que des personnalités comme Sophie Binet, à la tête de la CGT, ont vraiment redoré l'image du syndicalisme récemment. Et puis, si vous décidez de vous engager, faites-le en vous faisant plaisir, en faisant ce que vous savez faire. Si votre truc, c'est de faire du porte-à-porte, d'être dans le contact avec des gens, faites ça. Si votre truc, c'est de faire des contenus sur les réseaux sociaux, faites ça. Mais si votre truc, c'est de faire des sandwiches et d'avoir une oreille attentive pour les militants qui sont épuisés, C'est bien aussi, en fait. Voilà, il faut savoir trouver sa juste place. Il y a de la place pour absolument tout le monde, peu importe vos compétences et peu importe le degré d'engagement que vous êtes prêt à y mettre. Et surtout, connaissez vos limites et arrêtez-vous avant de vous faire mal.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup, Fiona. Et une dernière question. Qui aimeriez-vous entendre sur les Mariannes ?

  • Speaker #0

    Marine Tondonier, la star du moment.

  • Speaker #1

    La star du moment. Effectivement, elle revient beaucoup dans les propositions des auditeurs et auditrices. Un grand, grand, grand merci pour ce partage hyper riche. Et on mettra évidemment toutes les références. Votre épouse est engagée. Si ce vote-là m'a parlé, je vous répète, vous avez le nom de 5e de ma chaîne.

  • Speaker #0

    On se retrouve très vite.

  • Speaker #1

    Mais en attendant, vous pouvez rejoindre la communauté sur Instagram, Twitter, Facebook, sous le nom ElleMarianneFR. Je vous dis à bientôt.

  • Speaker #0

    Bonjour.

Share

Embed

You may also like