Description
La plupart des pays, sinon tous, qui ont vécu l'expérience de la justice transitionnelle pour revisiter leur passé de droits de l'Homme, en particulier en Afrique, sont des pays qui ont été exposés, avant de subir des violations flagrantes des droits de l'Homme, à une surexploitation coloniale qui a engendré des dysfonctionnements politiques, économiques, sociaux et culturels.
Il est certain que ces dysfonctionnements font partie des causes des violations flagrantes des droits de l'Homme que ces pays ont vécues après leur indépendance. Pourtant, plusieurs théoriciens de la justice transitionnelle, notamment les Africains, affirment que le traitement des violations pendant l’indépendance conformément à la méthodologie de la justice transitionnelle nécessite la détermination précise de la période de leur perpétration et que cette période ne doit pas inclure la période coloniale. Selon eux, ladite méthodologie ne sied au traitement ni des violations des droits de l’Homme héritées de la colonisation ni de la dette historique coloniale.
C’est sur cette base que, dans notre pays, l’Instance Équité et Réconciliation a travaillé sur la période allant de 1956 à 1999 en écartant complètement la période coloniale (1912-1956). Pour nous, il s’agit d’une aberration méthodologique vu que la mise en place de la démocratie dans n’importe quel pays ne peut être saine tant qu’on n’a pas réglé la dette historique et rompu avec la période coloniale et ses stigmates.
Suite à cette assertion, nous nous posons la question suivante :
En écartant le traitement des graves violations des droits de l’homme durant la période coloniale et de la dette historique coloniale, en particulier dans les pays où lesdites violations se sont déclenchées immédiatement après la période coloniale, pouvons-nous créer une approche sud-sud pour traiter les questions de la justice transitionnelle, la construction d’un État de droit et la résolution de toutes les problématiques économiques, politiques et juridiques qui y sont associées, comme cela a été soulevé par le forum de Rabat qui a précédé la Conférence internationale des droits de l’Homme organisée à Rabat en fin de semaine dernière ?
Mon long travail dans le domaine de la justice transitionnelle en tant qu’ex vice-président du forum marocain pour la vérité et la justice et aussi comme président, depuis sa création, du Centre de la Mémoire Commune pour la démocratie et la paix, institution qui cherche à adapter les mécanismes de la justice transitionnelle pour faire face aux violations flagrantes des droits de l'Homme à l'époque coloniale, je puis confirmer que le traitement réel du passé des violations flagrantes des droits de l'Homme, surtout dans les pays qui ont connu de telles exactions après le départ des colonisateurs, restera incomplet si la période dudit traitement ne s’étend pas de la période coloniale jusqu’au moment où la décision a été prise de se pencher sur ce passé.
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