- Manon
Bienvenue dans Mosaïque Salsa, le podcast qui t'emmène au cœur de la salsa portoricaine en explorant sa danse, sa musique, son histoire et sa culture. Moi c'est Manon, et sur cet épisode je t'invite à approfondir la notion de connexion et tout ce qu'elle implique entre les deux partenaires de danse. On prend le temps d'en discuter avec Carole, une danseuse passionnée avec qui j'ai eu le plaisir de partager cette conversation. Bonjour Carole.
- Carole
Bonjour Manon.
- Manon
Avant qu'on rentre dans le vif du sujet, est-ce que tu peux te présenter ?
- Carole
Eh bien écoute c'est bien ça commence avec une question piège comme ça je peux improviser. Donc moi c'est Carole pour ceux qui m'ont peut-être déjà croisée du coup sur les pistes de danse ça fait une bonne dizaine d'années que je pratique la salsa qui est devenue une passion mais dès le départ. Franchement j'allais dire dès la première soirée à laquelle on m'a invité franchement j'ai trouvé ça incroyable et ça m'a vraiment donné envie de danser et justement j'allais dire de pratiquer et j'ai pu le faire sur scène mais bien sûr aussi en social donc depuis toutes ces années.
- Manon
On va discuter autour de la connexion.
- Carole
Oui.
- Manon
Pourquoi la connexion ? Pourquoi tu as envie de discuter de ça avec moi ?
- Carole
Alors ce sujet, c'est vrai que du coup quand tu m'as proposé, c'est tout de suite ce qui m'est venu en tête, parce qu'historiquement, avant la salsa... Je viens en fait de danse plus soliste on va dire. J'ai commencé quand j'étais petite par la danse classique, après j'ai fait de la danse moderne, un petit peu de contemporain. On faisait quand même bien sûr des chorégraphies de groupe, mais c'est vrai qu'on était seuls, on devait juste, enfin voilà, le groupe en lui-même devait représenter quelque chose. Et vient la danse de couple. De manière assez inattendue encore une fois, je ne m'attendais pas du tout à aimer ça et avoir envie de la pratiquer. Et donc dans la danse de couple vient cette notion tout de suite de connexion. Et dès le départ c'est vrai que j'entends beaucoup les gens parler de la connexion. Je trouve qu'il y avait un côté assez mystérieux en fait, mais même d'ailleurs toujours et je pense qu'on pourra un petit peu le détailler. Qu'est-ce que c'est cette connexion ? Qu'est-ce qui se passe entre le danseur et la danseuse ? Puisqu'au départ, dans la salsa, c'est quand même beaucoup historiquement ce qu'on voit. C'est le garçon qui lead et la fille qui follow. On précisera comme ça en début d'intervention qu'évidemment, je vais plutôt employer les mots leader, follower, parce qu'à l'heure actuelle, ça se démocratise et on va dire que chaque genre se permet de changer d'attribution de rôle, justement. Et donc, voilà, cette énigme. Et j'entendais des danseurs et des danseuses commenter ça, sans vraiment savoir de quoi il s'agissait. Et puis quand on démarre, au début, je pense que ça l'a fait à toute personne débutante, on n'est pas sûr de soi, on cherche ses marques, et c'est vrai qu'il se passe tellement de choses déjà dans la connexion, ça en dit beaucoup et c'est vraiment quelque chose de très difficile à appréhender, je pense, par rapport à plein d'autres danses justement. Je ne m'attendez pas à ce que ce soit un si gros sujet.
- Manon
Au début c'est un peu abstrait et on a même l'impression qu'une bonne connexion c'est un peu le Graal.
- Carole
Exactement, c'est ça. C'est-à-dire que quand on entend tout le monde parler, ça met une espèce de pression, je pense, des deux côtés, leader ou follower, où on se dit, "ouais, mais c'est quoi en fait ? Est-ce que là, j'en ai ?" En espérant que justement, on a une bonne connexion et que c'est ce qu'il faut atteindre et ce qu'on aimerait qu'on dise de nous avec les années après quand on progresse. Oui, tout à fait.
- Manon
Et du coup, pour toi, c'est quoi la connexion ?
- Carole
Alors déjà, on peut peut-être essayer quand même de redéfinir ce que c'est. Donc ça va être toutes les informations qui vont passer donc du leader vers le follower au départ, parce que, évidemment, c'est le leader qui va indiquer dans quelle direction il faut aller, quelles sont les figures qu'il faut réaliser, etc. Donc voilà, c'est vraiment quelque chose d'abord de physique, des indications physiques, auxquelles le follower va devoir répondre. Mais du coup, lui aussi, en répondant, va avoir certains mouvements, va avoir certaines réactions qui sont attendues, du coup, des déplacements et aussi une façon de se mouvoir dans l'espace, mais en fait c'est plus que ça aussi, c'est-à-dire qu'il y a vraiment, on pense aux mains en fait en premier, donc évidemment c'est ce qui va se passer au niveau de ces interactions entre les mains des différents partenaires, et ensuite ça va être aussi toute la communication finalement non-verbale qui va se produire, et donc c'est beaucoup plus large. Ça peut être aussi le regard, ça peut être la position du corps dans l'espace, donc ce qu'on appelle aussi un petit peu le cadre, par rapport au buste, comment il est positionné, donc ça va être aussi toutes ces choses-là qui vont rentrer en ligne de compte. Et après sur un niveau peut-être plus supérieur, parce qu'on apprend après à danser, on se fait plus confiance, on connaît aussi potentiellement avec la personne avec qui on danse. Il y a des choses beaucoup plus subtiles je pense qui rentrent en ligne de compte. Quand on connaît bien la personne, qu'on sait comment elle danse, donc là c'est peut-être un peu plus dur à décrire, mais oui je pense qu'il peut y avoir une sorte de chimie qui va se créer. Et où là, il y a bah peut-être un côté hormonal qui joue, ça va beaucoup plus loin que juste le regard, les mouvements, les indications. Il y a vraiment quelque chose de cette connaissance profonde, quand on se connaît bien en tout cas entre partenaires.
- Manon
En tout cas, on parle au début d'une connexion plutôt physique, c'est ça, d'une réponse à un guidage, ou en tout cas d'un échange à ce niveau-là, et assez rapidement, c'est ça, quand on évoque cette notion-là de connexion, on vient sur toutes les autres dimensions, et là, rien qu'en quelques minutes, on se rend compte que c'est à la fois très riche, et du coup forcément très complexe.
- Carole
Oui, très complexe et c'est pour ça qu'aussi je pense qu'il peut y avoir une frustration au départ par rapport à ça, que c'est justement difficile à appréhender, qu'il y a des personnes qui vont... Attention, je ne blâme personne mais je pense qu'il y a des gens qui passeront toujours à côté parce qu'ils n'ont pas forcément eu les bons outils, parce qu'ils n'auront pas forcément eu les bons retours non plus et qu'ils n'auront pas compris en effet ce qui pouvait se jouer. Bon, encore une fois quand on est passionné et qu'on pratique pendant des années, je pense que dans tous les cas on finit par vivre des choses assez incroyables. En tout cas moi j'ai vraiment des souvenirs de danse. Je l'évoque déjà mais parce que ça me vient là dans notre échange où avec le fait d'apprendre à se connaître justement il se passe ces choses magiques pareil ça va être la bonne musique, la bonne énergie le fait d'arriver à bien se mettre en phase avec l'autre on a travaillé cette connexion et du coup la danse c'est incroyable. Et en même temps, ça arrive aussi avec des gens qu'on ne connaît pas du tout. Sur des fois, une seule danse. Je repense à une danse en particulier, il y en a eu plusieurs, mais vraiment une où en plus, je ne connaissais pas du tout la personne. Je ne m'attendais pas du tout à quelque chose d'incroyable. Et c'était magique. Et après, je recherche cette personne. Parce qu'en fait, dans un second temps, je me dis, quand même, il faudrait au moins que je sache qui c'est, qu'on se présente. Et je ne l'ai jamais revue.
- Manon
Donc ça reste dans la tête.
- Carole
Ça reste dans la tête, exactement, oui oui. Mais c'est ça qui est hyper magique. Et en fait, quand on ne s'y attend pas, qu'on est entraîné, et que justement il y a cette alchimie, là on est vraiment sur un niveau un peu plus haut. Parce que c'est vrai que si on revient au départ... Le but de ce guidage du leader vers le follower et de cette réponse, le fait de suivre pour le follower et que justement ça soit en harmonie, ça soit quelque chose de fluide, qui se passe avec une compréhension, c'est un autre genre de langage, et beh c'est justement de pouvoir réaliser les mouvements, les figures qui sont attendues sur la musique. Évidemment, c'est quand même important, donc il y a cette notion-là aussi. Et c'est ça qui fait que, justement, c'est agréable qu'on est vraiment dans la salsa, avec ces rapprochements, ces éloignements, qui font vraiment, j'allais dire, les caractéristiques de cette danse-là, en fait.
- Manon
Je repense à ce que tu disais par rapport à cette danse que tu as eue, avec cette connexion-là, qui était super. Je pense qu'effectivement, on a tous un souvenir comme ça d'un endroit, d'une danse, d'une musique, où il y a eu cette fameuse connexion. Et je pense que ça... Ça met vraiment en évidence que c'est vraiment très important dans notre danse, dans l'aspect social de la danse qu'on pratique. En fait, la connexion, c'est un élément qui va être marquant parce que justement, c'est vraiment au cœur de notre échange.
- Carole
Totalement. Et c'est pour ça, je vais y revenir un petit peu après, qu'il y a beaucoup d'interrogations là-dessus aussi quand elle ne se fait pas. Donc ça, on l'abordera après. Ce qui m'a frappée justement en faisant quelques recherches et en me réinterrogeant sur le sujet, c'est de voir que c'était quand même un sujet qui alimentait toujours pas mal les conversations en regardant sur les réseaux sociaux, en regardant, même en en discutant avec d'autres danseurs et danseuses. Et c'est vrai qu'on voit beaucoup, il y a quand même tout un marché aussi qui est lié à ça. Bon déjà, évidemment, dans les cours, on en parle. Je voyais des stages et là, c'est en plus, il y en a pas mal en ce moment. Il y a différents artistes qui le proposent sur la connexion et la musicalité. On va dire que c'est un peu les deux clés, avoir ce guidage incroyable et être capable d'y répondre, et puis bien sûr danser comme un dieu ou une déesse sur la musique. Des contenus qu'il rappelle, qu'il en parle, et il y a une vidéo il n'y a pas longtemps qui m'a marquée, justement d'un prof qui explique comment entraîner un follower sur la piste et dans la danse. Je suis assez mitigée par rapport à cette vidéo parce que je la trouvais très donneuse de leçons. Je pense qu'il y a plein de façons, mais il y avait vraiment un côté en fait où c'est vrai que des fois, sur ces attentes, pareil, leader, follower, il y a un lead qui va t'attraper et te tirer. Et en fait, il montrait que déjà, c'était un mauvais démarrage dans la connexion. Parce que c'est vrai que pour que justement, elle puisse se faire, elle puisse se mettre en place, il faut qu'il y ait de la confiance, il faut que le follower surtout, mais même le leader, puisse être relâché et que du coup, on soit dans les bonnes conditions. C'est là où quand même je trouve qu'il y avait un point positif à cette vidéo. Oui, de se dire qu'on va délicatement entraîner son ou sa partenaire sur la piste et que du coup, après on va le faire d'une certaine façon. C'est vrai que ça peut mettre dans des meilleures conditions pour la suite.
- Manon
Surtout que je trouve que finalement, cette connexion, elle peut être à son apogée pendant la danse, mais assez rapidement en fait, on le sent. Si on va avoir une bonne connexion ou pas. Donc effectivement, ça commence même sur l'invitation, ou en tout cas sur la proposition de rejoindre la piste.
- Carole
Oui, et des fois, peut-être qu'on l'oublie. Donc, c'est vrai que c'est bien de repenser à ces basiques-là. Des fois, c'est aussi très maladroit, mais parce qu'en fait, la personne est timide, c'est compliqué d'inviter. Il y a vraiment, en effet, après tout ce côté social qui va rentrer en ligne de compte, aussi un côté que je trouve assez dur. J'en parle maintenant, j'allais dire, je mets le pied dans la porte. Mais quand il y a, en effet, un déséquilibre entre leader, follower, souvent, c'est qu'il y a plus de followers. Il faut un peu se jeter, quand même, comme ça sur les leaders parce qu'en fait sinon on danse pas, on reste sur le côté. Donc quand on a plus d'expérience, des fois on les connaît donc c'est un peu plus facile d'inviter. Mais c'est vrai que des fois il faut être dans une attitude quand même très agressive. Enfin, il faut... Encore une fois, en tout cas, ça nous pousse à...
- Manon
C'est ce qui peut se passer.
- Carole
C'est ce qui peut se passer et qui, d'ailleurs, moi, à titre personnel, je trouve ça assez désagréable parce que, justement, on arrive sur le leader de manière... Là, par opposition à la vidéo que j'ai vue, de manière assez frontale et ça ne lui laisse pas le temps. Peut-être qu'il n'avait pas envie, peut-être qu'il avait envie de sortir et c'est super compliqué, je trouve. Et en même temps, le follower est frustré, a envie de danser et donc, ça donne des arrivées un petit peu, j'allais dire... Brutes. Oui, brutales, c'est ça. Exactement.
- Manon
C'est pas la meilleure façon d'engager une bonne connexion.
- Carole
Oui, tout à fait. C'est pour ça que ça se vit, je pense, dans les deux sens. Et j'ai quand même relevé aussi quelque chose qui m'a choquée, que j'ai vue à différents endroits, en fait, justement, il y a plein de sites internet, des écoles de danse ou autres, qui vont parler de ce qu'est une bonne connexion entre deux partenaires, etc., de dire que c'est hyper important, que c'est vraiment l'essence de la danse de couple, et vraiment tourner, justement, sur le follower, en disant comme si la responsabilité, et là pareil je vais aborder les deux volets, comme si la responsabilité incombait uniquement au follower de bien suivre, de ne pas anticiper. Ça on le sait, du coup on s'apprend justement quand on doit vraiment attendre d'avoir la bonne indication pour faire la figure au bon moment. Il y a quand même eu beaucoup ce discours, et je dirais quand même, je l'ai beaucoup entendu aussi par le passé, de mettre la responsabilité des fois uniquement sur le follower. J'entends dans les conversations, voilà, cette personne, ah ouais, elle tire, elle est lourde, elle pèse sur la main, c'est compliqué, il faut la tracter, enfin franchement là je fais juste des petits extraits. Et en fait, c'est partagé déjà, c'est-à-dire que la responsabilité elle est vraiment de chaque côté. Donc oui, c'est assez dur je trouve ce regard sur le follower de dire que ça va être de sa faute, alors qu'il y a aussi toute une autre école qui va dire que... Si en fait le leader ne demande pas correctement les choses avec la bonne intensité, avec justement la bonne force, en étant vraiment juste, de toute façon pour le follower c'est impossible que ça donne quelque chose. Je pense qu'il faut quand même se dire qu'en fait chacun a sa part de responsabilité, que c'est chacun qui va faire un pas vers l'autre, 50-50. Et ça rejoint des choses que j'ai entendues il n'y a pas longtemps justement aux Etats-Unis. C'était un échange, c'était un live Instagram, c'était hyper intéressant sur un autre sujet, qui disait en fait que, qui parlait justement de ce fait d'atteindre la connexion parfaite, comment ça pouvait être vraiment génial d'être à ce stade, et qu'en fait on avait vraiment besoin l'un de l'autre dans la relation, dans la danse, et que c'était vraiment en fait 50-50, et partager, je trouvais ça bien de le rappeler.
- Manon
Je trouve qu'au final, les discours, ils évoluent quand même par rapport à ça, en tout cas, comme ça pose question. Mais ça me fait penser aussi, tu sais, quand on est débutant, à tout ce qui se dit sur, de toute façon, tout repose sur le garçon, sur son guidage, et les follows, vous n'avez rien à faire à part suivre. Mais sauf qu'en fait, on est d'accord que ce n'est pas aussi simple que ça. Et là, avec tout ce que tu viens de citer, ça montre bien que dès le début, en fait, c'est du 50-50. Pour instaurer une bonne connexion, on doit faire attention à bien suivre. Mais on doit aussi faire attention à bien guider. L'un va pas sans l'autre. Ce que je voulais dire aussi, c'est quand on est en soirée, on discute entre nous et on se dit tel ou tel leader...
- Carole
Est incroyable.
- Manon
Incroyable, j'avais une connexion de dingue. Et donc à niveau égal, en fait, pour deux followers par exemple, quand on va inviter un leader, on va pas forcément avoir le même ressenti. Même ça arrive que ce soit complètement différent.
- Carole
Par exemple, tel follower c'est génial, puis l'autre arrive et dit ouais bof. Ça, ça m'est déjà arrivé dans le sens inverse. Moi, je suis follower.
- Manon
C'est des scènes de notre quotidien, enfin en soirée. Et du coup, ça montre bien aussi que la bonne connexion, elle n'est pas dépendante que de la technique.
- Carole
Exactement. Alors, ce n'est pas que de la technique. Des fois, ce qui peut arriver aussi, ça va être ce moment précis, cette musique, genre c'était le feu. Il y avait vraiment quelque chose. Et puis après, il y a de la fatigue, la musique est moins bien. C'est aussi pour ça que du coup, de... Je pense ne pas juger et se permettre de redanser avec les mêmes personnes sur des soirées différentes, des événements différents. Ça permet de les découvrir autrement.
- Manon
Ça veut dire que la connexion peut évoluer.
- Carole
Exactement. Déjà, oui, parce qu'on va se connaître mieux. Mais en plus, t'es plus ou moins en forme, t'étais plus ou moins inspirée tel ou tel jour, ou tu suivais plus ou moins bien. Des fois, j'ai des petits moments où je me rends compte, je me dis que j'en fais qu'à ma tête. Non, j'exagère, mais il y a des petits moments, je sais pas, t'as envie de plus de prise de liberté, t'as envie qu'on te laisse faire plus de shines. Donc, c'est comme les humeurs, en fait. Donc, c'est vrai que ça, ça va jouer. Après, j'ai quand même l'impression, je sais pas ce que t'en penses, enfin ton avis m'intéresse, que dépasser quand même un certain niveau où tu commences à être bien confirmé, il y a quand même ce côté en tout cas en tant que follower où tu sais que dans tous les cas normalement ça devrait quand même bien se passer. Donc t'as quand même un espèce de truc de base où tu te dis non quand même là ça va forcément bien se passer mais après c'est que tu vas aller chercher plus haut, c'est que tu vas vraiment commencer à aller chercher des choses très très filmées. Globalement il n'y aura pas de catastrophe, la danse va bien se passer et même si mettons c'est un lead assez débutant qui t'invite bah vous ferez des choses simples, il ratera des trucs que tu vas un petit peu rattraper d'ailleurs et inversement et en fait c'est cool et ça je trouve que c'est chouette aussi tu vas te dépasser ce stade là et de savoir qu'il n'y a pas de drame.
- Manon
Et effectivement souvent, moi je vais parfois sentir une super connexion avec quelqu'un qui va être disponible avec moi dans la danse, en dehors même d'un super guidage ou effectivement avec parfois des ratés dans les passes ou je ne sais quoi. Mais parce qu'en fait finalement la connexion elle va se faire, par ailleurs tu as parlé là plusieurs fois aussi de l'environnement, de la musique et de l'énergie qu'il y a aussi sur la piste à ce moment-là. Donc non, il y a plein de choses qui jouent et encore une fois c'est ce qui fait la complexité de ce concept.
- Carole
Tout à fait, mais c'est ce qu'on joue.
- Manon
Et c'est la surprise aussi, finalement, c'est ça aussi.
- Carole
Ouais,c'est ça qui fait que c'est magique, je pense, et qu'on va le chercher, parce que c'est le côté incroyable, c'est justement ce... Je pense que c'est de toute façon quand même ce partage qu'on peut avoir, et ça tombe très bien, parce que un des points que je voulais évoquer, c'est le point un peu, j'allais dire, épineux de cet échange, c'est celui sur en fait, est-ce qu'on est avec l'autre ou pas ? Est-ce qu'en fait on est... Et justement, quand je faisais un peu mes recherches, je regardais ce que disaient certaines personnes, j'écoutais aussi, et puis j'ai aussi une certaine vision là, sur une dizaine d'années, un peu plus de pratique, de l'évolution aussi du milieu, de qu'est-ce qui peut se passer, etc. Donc sur le fait, voilà, normalement on est censé être ensemble, concentré sur son partenaire, et c'est là où on sait très bien que normalement on va avoir les meilleures danses, mais il y a tout un tas de facteurs qui font qu'on peut observer des fois du chacun pour soi, voire un autre cas que je voulais évoquer, une espèce de bataille entre les partenaires. Donc tout un tas de facteurs, c'est qu'en effet on n'est pas tout seul dans une salle, il y a plein de gens autour, il y a plein de codes sociaux qui vont se mettre en jeu, et donc il se passe tout ça, des fois il faut briller en fonction aussi de son statut dans la salsa, est-ce qu'on est un artiste ? Est ce qu'il faut qu'on montre qu'on est très fort, etc. On sent un petit peu la critique sous-jacente, mais non, on a tous et toutes vu des moments où en effet, alors moi je pense aux followers en premier, des followers se faire traîner sur la piste, malmenés, là dans un cadre où c'est souvent que le leader, il est dans sa bulle, dans son monde, et il ne pense plus vraiment à la personne qui est là en fait. Donc c'est là où il y a, pour moi, ça c'est une cassure super forte dans la connexion et aussi dans le respect qu'on est censé mettre. Donc ça, c'est peut-être le cas un petit peu extrême. Il y a le cas où, en fait, ça suit, mais du coup, c'est vraiment une bataille, voire c'est mis en avant parce qu'en fait, il faut mettre la misère, il faut, entre guillemets, faire tourner très très très vite.
- Manon
Et parfois, c'est la musique qui va primer sur la connexion, ou en tout cas, notre interprétation de la musique.
- Carole
Même si on le sent, parce que pareil, en fait, la connexion est censée s'adapter aussi au niveau technique de la personne, ou en tout cas, de son niveau au temps T qu'on est en train de considérer. Et donc oui, du coup, normalement, on est censé s'adapter, on est censé peut-être redescendre si on se rend compte que ça ne passera pas. Et encore une fois, dans la salsa, il y a quand même de la compétition. On ne peut pas le cacher. Donc évidemment, chacun y va avec une approche différente. Il y a des gens qui vont vraiment juste pour profiter. Mais il y a aussi tous ces phénomènes de compétition, de comparaison. aussi parce qu'on est dans de la danse, voilà, donc il y a des côtés élitistes, sélectifs, etc. Surtout peut-être pour les gens dont c'est le métier, qui vont en tirer un revenu, ou qui d'une façon ou d'une autre, en tout cas, leur statut va leur permettre d'avoir des choses aussi. Donc là, il y a d'autres facteurs qui rentrent en ligne de compte. Et donc, c'est assez triste en fait, je trouve, à des moments à voir, parce que bon, il y en a forcément un des deux pour qui ça se passe pas super bien. De toute façon, pour la personne qui va imposer ce truc-là quand c'est le leader, je ne sais pas si c'est si fun que ça au final, parce qu'évidemment qu'on perd quelque chose. Et c'est vrai que des fois, je pense à être trop un peu dans le star system, je ne sais pas comment l'appeler autrement, ou de partir sur ces choses-là, ou de plus se rendre compte. On oublie qu'en fait, on est quand même avec un autre être humain. Et donc si je me place de l'autre côté, côté follower, il y a des jours où on est plus en mode automatique. Parce que pareil, passer un certain niveau technique, on peut des fois laisser un peu couler, dérouler le truc mais ne pas être vraiment là. Être vraiment là c'est faire attention aux petits détails, c'est vraiment écouter la musique, c'est rajouter quelque chose, c'est parfois aussi, moi je l'ai expérimenté dans un certain pays où il y a beaucoup de fun, enfin il y a ce côté je trouve vraiment dans la danse qui ressort, c'est faire rire l'autre, interagir, qu'il y a un vrai jeu. Ça peut être aussi un jeu de séduction, enfin ça peut être sur différents registres, et en fait on perd tout ça du coup. Et donc à l'inverse oui des fois on peut suivre en mode automatique, on est fatigué, il y a beaucoup de danse, on enchaîne, on enchaîne, mais en fait on est un peu comme au boulot, on fait automatiquement les tâches, on les maitrises. et on perd du coup cette intensité, et je me dis que pour le leader, alors ça j'ai peu débriefé là-dessus, ça serait intéressant d'avoir leur avis, ça doit pas être très chouette, et d'avoir l'impression que la personne n'est pas vraiment la par choix, enfin qu'il y a un espèce de côté automatique, et c'est dommage. Donc après, la quantité des fois fait que peut-être on perd en qualité quand on est partout, quand on veut tout faire, quand il y a beaucoup d'autres choses qui jouent, mais... Peut-être s'interroger en fait, en tout cas moi j'essaye de le faire maintenant, même dans les soirées un peu anodines, sur pourquoi je suis là, d'essayer vraiment d'être dans le partage, d'essayer de donner, d'essayer que ça soit sympa, et de justement être, en tout cas déjà être dans un état de présence. Moi ça c'est un travail que j'effectue, qui je pense est au long cours, de me dire là je suis présente. Parce que pareil, on est dans des rythmes de vie je pense pour beaucoup, ça va très vite dans les grandes villes etc. Et en fait des fois je me surprends et tu penses, ah il faut que je fasse ça, ah oui j'ai pas fait ces courses là, ah oui ça arrive. Donc je pense que ça arrive à chacun quand on commence à avoir l'habitude et non. Faire cet effort d'être dans l'instant présent permet de considérer je pense la personne et ce qui est en train de se passer du mieux possible en tout cas. Évidemment après, la vie fait qu'on peut pas être tout le temps sur ces niveaux, je pense, ah il faut que je fasse ça, ah oui j'ai pas fait ces courses là, ah oui ça arrive, donc je pense que ça arrive à chacun quand on commence à avoir l'habitude, et non, faire cet effort d'être dans l'instant présent permet de considérer je pense la personne et ce qui est en train de se passer du mieux possible en tout cas. Évidemment après, la vie fait qu'on peut pas être tout le temps sur ces niveaux je pense, de présence à soi et de considération de l'autre, et dans les deux sens. Mais c'est vrai que ce sont des fois recensés sur les réseaux ou dans des vidéos, en fait, beaucoup, beaucoup de moments où on voit que c'est pas fluide, on voit que c'est haché, on voit qu'il y a un des deux partenaires qui souffre. Et là, dans ces cas-là, je trouve qu'on peut vraiment s'interroger sur le guidage, le guidage en mode torture, le guidage qui va humilier. Ça peut être aussi beaucoup de choses, hein, via la connexion. Quelqu'un qui va pas à un moment redescendre de niveau, par exemple. Pour un lead, quand il sent que le follower c'est trop compliqué pour plein de raisons, c'est vraiment une non-écoute en fait. C'est le fait de, voilà, en fait comme dans une conversation, encore une fois il y a vraiment... le parallèle est total, du coup on parle, on parle, mais sans écouter l'autre. Et ça, ça peut être hyper violent. Donc oui, ça peut aller loin, ça peut aller pour les followers sur des épaules après, enfin des blessures, des choses qui sont vraiment après compliquées quoi, qui mettent un impact fort sur la personne à long terme.
- Manon
Oui,qui vont gâcher finalement la beauté du moment et même la beauté de la danse, parce que comme tu dis, parfois ça se voit très clairement que la connexion n'est pas là. Et d'ailleurs, on n'a pas envie d'y aller. On n'a pas envie de subir la même chose. Mais en fait, la connexion, elle l'est ou elle n'est pas entre deux personnes, mais elle se voit aussi de l'extérieur. Parce qu'une belle danse, souvent, c'est que la connexion, elle est là.
- Carole
Oui, tout à fait. Et d'ailleurs, en fait, ça va se voir, mais sans qu'on puisse forcément distinctement le détailler, en fait, sur qu'est-ce qui se passe au niveau des mouvements physiques. Mais en effet, du coup, ça va plus loin, ça va être un respect, ça va être une considération de l'autre, ça va être le fait de faire attention. Pareil, c'est très apprécié quand même par les followers. C'est le rôle du lead, j'avoue, qui leur incombe et qui n'est pas facile de gérer l'espace de danse.
- Manon
Ah je ne suis pas tout à fait d'accord sur ça. Moi, de plus en plus, j'essaye vraiment de faire attention, quand on est dans des endroits où il n'y a pas beaucoup de place, de faire moi aussi attention à l'espace de danse. Parce que je trouve qu'on peut nous aussi gérer. Alors, quand on est follow, on a peut-être moins de marge de manœuvre par rapport à ça. Mais malgré tout, on voit où on va, on a les yeux ouverts. En tout cas,
- Carole
Normalement. On est tellement connectés que tout est les yeux fermés. Ouais, non, mais oui.
- Manon
Et du coup, moi, je trouve que... Fin j'essaye, en tout cas, quand je peux, de dégager cette responsabilité un peu, en tout cas, de prendre ma part par rapport aux personnes qui me guident. Je pense que c'est un peu arrivé parce que parfois, il y a certaines personnes qui ne vont pas faire attention. Peut-être que j'ai commencé, moi, à faire attention pour protéger mes pieds, protéger mes bras. Et puis, parce que j'ai pris des fois une ou deux claques. Donc, tu vois, je trouve que ça... Historiquement, on dit beaucoup que c'est au leader de faire attention à ça. Mais je trouve qu'en tant que follow, on peut aussi le faire. Alors, j'en ai... On a aussi une part à prendre.
- Carole
Je suis tout à fait d'accord et c'est vrai que oui là je vois surtout au départ le côté du leader parce que j'en ai vu plein se prendre des coups, être vraiment même dans quelque chose des fois d'assez agressif pour se faire respecter surtout dans les soirées où du coup il y a énormément de densité. Et par contre je suis très en phase, moi je dirais que c'est quelque chose qui est venu avec les années et où en effet je fais attention. Si je sens en plus que le leader des fois est plus débutant et est déjà en train de gérer beaucoup beaucoup d'autres paramètres, bah c'est aussi de l'aider. Quand il y a plein de monde théoriquement on danse plus petit, il y a plein de règles en fait finalement que là on est en train d'essayer d'expliciter mais qu'on connaît. Et donc très très en phase avec toi, la responsabilité peut être en effet beaucoup plus prise aussi par le follower, de faire attention, de ne pas mettre non plus l'autre en galère, de lui faciliter les choses. Si d'ailleurs on voit des fois qu'il y a un problème, je pense qu'on peut aussi verbaliser, parce que des fois il y en a qui disent Ah oui du coup et là je me suis pris un talon machin, mais oui mais du coup si déjà tu avais vu que c'était très compliqué, peut-être que tu pouvais aller ailleurs, ou peut-être qu'à un moment on peut aussi se dire que parce qu'on est pris dans la folie certes, de danser et d'en profiter à fond, mais attends on s'arrête et du coup on va ailleurs là où c'est plus confortable. Donc ouais, tout à fait. C'est aussi rappeler la danse, c'est du fun, on s'amuse, on prend du plaisir. Mais en fait, c'est rappeler finalement toutes les responsabilités qui incombent derrière. Et donc, ce n'est pas du tout anodin en fait de se lancer dans ce partage-là et d'avoir ces échanges. On donne finalement beaucoup de soi.
- Manon
Mais après, c'est payant. Quand on met la bonne énergie, la bonne disponibilité, que ce soit mentale, physique, etc. Souvent, c'est ça qui paye.
- Carole
Ouais, tout à fait. Et donc un autre point que je voulais aborder dans cette façon de percevoir la connexion entre deux partenaires, justement comme étant la bonne connexion, ce fameux Graal qu'on recherche, c'est aussi du fait d'avoir pu expérimenter dans celles et celles à ça, donc dans différents pays, évidemment les perceptions étaient différentes en fonction des cultures. Ça s'explique parce qu'évidemment la salsa qu'on danse elle a évolué différemment. Là en l'occurrence c'est le New York style qui en effet s'est développé à New York et qui après s'est exporté en Europe et dans plein d'autres pays. Et donc déjà en prenant juste ces deux exemples-là, c'est-à-dire les États-Unis et l'Europe, il n'y a pas la même façon d'appréhender ce qu'est une bonne connexion. De manière sous-jacente c'est aussi que ce ne sont pas les mêmes musiques forcément qui sont jouées, les mêmes atmosphères dans les soirées, donc ça va générer je pense en tout cas, j'imagine des choses différentes, mais je trouve ça vraiment intéressant quand même, parce que, évidemment, c'est partenaire dépendant, donc en fonction des leaders, en fonction des followers, bien sûr, il y a toute la diversité du monde qu'on peut trouver, mais de voir que dans un même lieu, dans une même ville ou dans une même communauté, dans un pays, on retrouve quand même les grands classiques. Enfin, on retrouve surtout le même type de connexion. Et donc si je compare, ce qu'on entend beaucoup, et tu me diras justement ce que t'en penses par rapport à toi, ton vécu, c'est qu'en Europe, on est réputé pour des connexions extrêmement fluides, extrêmement douces, agréables, justement. Voilà, donc il y a ce côté, je sais pas, qu'on imagine très fluide, enveloppant, j'allais dire, quasiment. VS, aux US, une connexion dynamique, beaucoup plus tonique, pour utiliser les mots. Donc pareil, des fois, ça peut surprendre, et donc on vient d'Europe, on va aux Etats-Unis, et tout d'un coup on se dit Oulala, qu'est-ce que c'est que ça ? Ça tire ou c'est un peu plus, ce qu'on appelle une connexion un peu plus dure. Mais en fait, pareil, tout dépend de son référentiel et encore une fois, après, il y aura la variabilité quand même des danseurs.
- Manon
Et puis là, on parle de connexion dure, mais c'est pas forcément péjoratif parce qu'il y a aussi, quand on parle entre follow, on n'a pas tous, toutes les mêmes préférences en fait.
- Carole
Ouais, ça c'est intéressant, ouais c'est vrai.
- Manon
Ce que tu me dis, ça me fait aussi penser peut-être à l'influence, à la culture des shows.
- Carole
Alors, Apparemment, enfin je ne voudrais pas faire un lien qui ne serait pas un vrai lien historique, mais justement ce côté beaucoup plus tonique, beaucoup plus dynamique, en effet est très lié au fait qu'aux États-Unis et aussi en Amérique latine, parce que du coup pareil pour avoir expérimenté avec un public plus latino, sur de la salsa On1 etc, c'est pas du tout les mêmes dynamiques, donc la connexion est encore différente. Oui, il y a vraiment une culture de faire le show, d'être sur scène, de briller, et donc forcément on travaille, là il faut beaucoup de réactivité, être capable de faire des figures assez incroyables, donc forcément ça donne des guidages qui sont différents, Donc oui, je pense que c'est lié. A contrario, en Europe, une grande histoire du social. Du fait en social d'être agréable, d'être considéré justement comme quelqu'un de délicat. Je pense qu'il y a aussi tous les... Oui, c'est très valorisé. C'est valorisé, voilà tout à fait. Et donc, moi je me souviens, un souvenir qui m'a marqué, on parlait tout à l'heure du début et de ces fameuses histoires. Ah, la bonne connexion, elle est extraordinaire. Donc en plus au début, quand on ne sait pas trop comment se situer, de la connexion légère. Moi je me souviens que j'entendais beaucoup de leaders qui disaient...
- Manon
La légèreté.
- Carole
Ouais, exactement. Qu'est-ce qu'elle est légère et tout, je me disais mais euh comment c'est possible... Tu la regardes danser, ça ne te donne pas la solution, t'aimerais. Et tu te dis, mais c'est quoi être légère ? Et parce qu'en fait, en effet, je pense que d'un côté et de l'autre, les pires critiques qu'on peut entendre, c'est pour vraiment un leader, de dire qu'il a été vraiment dur, qu'il casse les bras. Je crois qu'il y avait cette expression à une époque. Pardonnez-moi si je reemploie des vieilles expressions, j'aime bien. Et pour le follower, ouais, de tirer, d'être lourde, souvent on entend, voilà, elle me fait mal. Je fais le tracté aussi. Voilà, le tracté. Ce qui franchement je trouvais assez horrible, on a l'impression que c'est un chariot qu'on déplace quoi. Enfin, je trouve le parallèle assez dur. Je suis d'accord. Donc, alors que, en fait, des fois, c'est aussi qu'on ne s'est pas compris. C'est aussi qu'il y a un décalage entre les partenaires. Et pour la petite anecdote, je cite quand même quelque chose que j'ai entendu il n'y a vraiment pas longtemps. D'une follower qui demandait vraiment à être brutalisée. D'accord. Donc, ça existe aussi. Du coup, elle dit, ouais, elle voulait vraiment que ce soit plus fort, que ce soit plus... Ce qui a mis, du coup, les leaders en difficulté. Ils ne savaient plus trop quoi faire, ils étaient perdus.
- Manon
Enfin, en tout cas, c'est assez inédit comme demande, effectivement.
- Carole
Mais ça rejoint un petit peu quand même ce que tu disais sur les goûts et les couleurs, on a pas et les mêmes attentes. Et voilà, finalement, chacun a une préférence. Enfin, et voilà, là, moi, je vais quand même préférer que ça soit quand même assez doux ou que sinon, ça peut être tonique, mais en tout cas, du coup, il faut que ce soit assez précis parce que dans ce cas, ça permet en effet de ne pas faire mal. Moi, je n'ai pas du tout envie d'avoir ces extrêmes-là. Mais peut-être qu'en effet, pour des personnes qui aussi sont moins habituées, tout dépend aussi comment est-ce qu'on a appris ya besoin d'avoir vraiment quelque chose de... Du coup de presque brutale, bon c'est pas l'idéal là, ça reste quand même un cas particulier. Je crois qu'elle en a eu pour ce qu'elle voulait pour son argent, comme on dit.
- Manon
Moi, ce que je trouve intéressant, là, ça fait quelques temps que j'essaye de m'aventurer un petit peu plus dans le rôle de leader.
- Carole
Oui.
- Manon
Très humblement et pas si souvent que ça, mais quand même un petit peu. Et en tout cas, je trouve... Enfin, pour moi, l'intérêt de faire ça, c'était justement d'aller chercher aussi d'autres indices sur cette bonne connexion. Parce que je trouve que de changer de rôle, finalement, ça permet aussi de changer de perspective et peut-être de comprendre, en se mettant dans la peau de l'autre, comment... optimiser ou comment développer une bonne connexion.
- Carole
Alors complètement. C'est vrai que dans l'idéal, dans un monde où on a tous beaucoup de temps, on est tous hyper intéressés d'aller chercher justement sur ces sujets-là, il faudrait que chacun se mette dans la peau de l'autre. Parce que c'est vrai que ça permet de se rendre compte. D'ailleurs, on voit, on a donc des rôles, j'allais dire, qui seraient attribués au départ de c'est plus les hommes qui guident, c'est plus les femmes qui suivent. C'est aussi un peu en train de changer. On voit maintenant dans les congrès, plein d'hommes qui prennent le rôle du follower. Quelques femmes aussi qui prennent le rôle de leader. Et d'ailleurs, franchement, moi, à titre personnel, ça a été toujours des très très bonnes expériences. Parce que du coup, je pense que aussi, quand on bascule sur le rôle de leader en tant que femme, comme on a été beaucoup followers avant, ça donne un autre aperçu. Et moi, je serais d'ailleurs très intéressée d'avoir plus de retours des hommes qui deviennent followers, avec d'autres hommes, pour voir justement. Mais en tout cas, moi, j'ai été souvent... hyper agréablement surprise et on sent ça enrichit en fait vraiment la connexion, exactement et d'avoir eu des danses incroyables et justement de me dire à chaque fois en fait c'est dommage que je ne connaisse pas plus de leaders femmes parce que dans ce cas j'irais vraiment les invités mais comme des fois on ne sait pas ou on ne les voit pas forcément et ben voilà on va passer à côté et c'est bien dommage et donc du coup qu'est-ce que je te pose la question pour aller un peu plus loin parce que moi c'était il y a plus longtemps où j'ai justement pris des cours un petit peu en leader etc faudrait que... Faudrait que je le refasse, mais en tout cas où j'avais pris un peu ce temps-là, mais c'était quand même déjà il y a plusieurs années, et c'est vrai que ça m'avait pas mal apporté, je m'étais rendue compte de la difficulté aussi de le faire, de s'affirmer, c'était totalement un autre paradigme. Et il y avait autre chose que je voulais évoquer pour terminer justement sur ce sujet, vraiment de la connexion ensemble ou pas, cette notion de légèreté ou pas. Il n'y a pas longtemps, sur les réseaux sociaux, et ça avait vraiment attiré mon attention, il y a eu le Toilet Paper Challenge. Je ne sais pas si tu l'as vu passer. Non, je n'ai pas vu. Donc ça a été lancé, du coup je les cite, par Svetlana Ray et Samuel Funflow. Et en fait, l'idée c'est de prendre en fait deux morceaux de papier toilette, donc dans chaque main. Voilà, après le leader et le follower se mettent en face à face.
- Manon
De les partager ?
- Carole
Ben en fait non, du coup d'avoir vraiment, c'est-à-dire que t'as tes... Parce qu'un morceau t'es un peu près, donc deux morceaux. Ah oui, d'accord. Et en fait, tu... Donc voilà, deux morceaux d'un côté, deux morceaux de l'autre. Tu les tiens avec tes doigts et de faire une danse comme ça. Donc il disait voilà, prenez la musique que vous adorez, faites une danse et bien sûr envoyez-nous vos vidéos. J'ai vu quelques vidéos, c'est assez... Bon, c'est drôle, hein. Je ne sais pas ce qu'il en est, je crois que c'était pour qu'il y ait un gagnant, donc ça, je ne sais pas comment ça s'est terminé. Mais donc, de pouvoir tester justement ça, avec donc un papier qui est très fin, qui va pouvoir se déchirer potentiellement, pour justement qu'il ne se déchire pas, et réussir à faire toute la danse comme ça. Donc un bon moyen de se challenger, fin d'essayer de voir qu'est-ce qu'il en est. Alors après ça peut aussi se déchirer, parce que justement si on prend deux morceaux, on peut imaginer que ça va se déchirer entre les deux, parce qu'à un moment on n'aura pas compris, on n'aura pas suivi. Je pense qu'il n'y a pas que l'histoire de légèreté ou pas, c'est aussi justement la concentration pour vraiment rester hyper connectée. Et je trouvais que c'était assez drôle de voir ça et d'imaginer les gens faire leur vidéo avec.
- Manon
Ça donne envie d'essayer. Oui. Mais ça me fait penser, tu sais, à l'autre, à ce qu'ils pratiquent parfois en soirée. En tout cas, on l'a tous vu au moins une fois. C'est ces danses en wifi. Ou du coup, ça vient tester la connexion différemment, le fait de danser sans se toucher les mains. Et donc là, de miser plutôt sur la connexion, sur la tension que tu portes au mouvement de l'autre, sans le ressenti tactile, ou en tout cas sans le ressenti de la pression ou pas. Du coup, je trouve que les deux se complètent très bien pour travailler la connexion.
- Carole
Oui, exactement. Oui, tout à fait. Et c'est vrai que ces expériences, ça m'est arrivé quelques fois aussi en mode Wi-Fi. Bon, plus facile quand tu... connais quand même un petit peu le partenaire. Et oui, quand tu as le niveau requis pour comprendre techniquement, mais justement, ça oblige à être hyper concentré et à prendre tous les autres détails qu'on ne va pas forcément faire attention habituellement. En tout cas, après tout ce qu'on vient de partager, j'avais envie de conclure. sur ce que ce sujet m'inspirait et aussi par des personnes qui en ont en effet bien parlé parce que beaucoup d'artistes se sont saisis du sujet, on entend beaucoup de gens encore une fois du milieu intervenir là-dessus, sur ce que ça implique donc cette fameuse communication entre leader-follower, cette connexion donc sur tous les niveaux qu'on a évoqués au départ physique mais en fait aussi avec tout ce qui est non-verbal et après même encore plus loin peut-être sur quelque chose en effet de chimique, d'émotionnel qui va se construire dans le temps, pour soi-même et aussi avec les autres. Et ce qui m'a inspiré pour cette conclusion, c'est un post assez récent de Frankie Martinez, donc un grand danseur qui du coup est basé à New York pour ceux qui le connaissent, qui rappelait justement, alors lui il va intellectualiser beaucoup justement tous les sujets qu'il va évoquer, mais toute l'essence justement de cette connexion, de la communication entre les deux partenaires, ce que ça signifiait et que justement ça signifiait donc d'être impliqué de manière égale chacun dans son rôle, de pouvoir être relâché, connecter de la bonne façon, connecter à la musique, connecter à l'autre. Donc c'est vraiment beaucoup de paramètres qui rentrent en ligne de compte. Que justement toutes les informations transmises par le langage non-verbal soient bien prises en compte, que les réponses soient fluides et que justement ça puisse un peu, il prenait l'image de ça coule comme de l'eau. Je trouvais ça pas mal parce que c'est vraiment ça. Surtout sur les musiques du On2, il y a vraiment cette fluidité et le fait que ça soit un peu une rivière qui traverse comme ça avec des fois des virages un peu plus serrés et puis des fois plus calmes. Je trouvais que l'analogie était très belle. Que ça peut demander de sortir aussi des codes qui sont attendus, on l'a un peu évoqué, donc les rôles qu'on s'attribue en fonction de notre genre, qu'il ne faut pas forcément rester aussi dans les stéréotypes et ce qu'on attend de nous en termes de posture. Tu l'as très bien dit avec cette histoire pour le follower de faire aussi attention à l'espace de danse, bah en fait oui, se questionner sur la part qu'on peut jouer pour que la connexion grandisse et soit plus belle. Ça demande aussi d'envisager la danse comme une vraie conversation, avec le respect qu'on doit avoir, encore une fois, tout ce qu'on mettrait quand on est sur du verbal, qu'on est face à un autre être humain, que c'est hyper important de ne pas perdre en fait ce pour quoi on est là, qui est quand même de partager et d'avoir du plaisir ensemble sur la musique. Peut-être des fois, c'est bien de se le rappeler je trouve après pas mal d'années de pratique. Et enfin, que finalement cette connexion, c'est un des éléments les plus sophistiqués dans la salsa. Ça demande voilà énormément et que pour que justement on puisse exprimer le plein potentiel de ce que ça contient, il faut qu'on puisse respecter tous les principes qui permettent de construire et on les a tous évoqués, une connexion de qualité. Ça me donne envie de remettre en pratique plein de choses, d'avoir échangé là-dessus, et oui, de continuer à m'interroger, de continuer aussi d'être surprise, et je le souhaite vraiment à tous ceux qui nous écoutent, à tous les danseurs, toutes les danseuses, parce que... Je nous le souhaite, oui, souhaitons-le nous, parce que c'est des moments magiques, et justement, quand on prenait les exemples des danses dont on se souvient, de ces personnes disparues, enfin disparues parce qu'on ne les connaissait pas. J'espère qu'elles sont en vie. Et les personnes qu'on connaît, avec qui on va redanser, c'est quand même génial. C'est ce qui fait vraiment, je pense, le sel de la danse de couple. Et encore plus dans la salsa.
- Manon
J'ai une dernière question pour toi Carole. Est-ce que tu saurais dire qu'est-ce qui t'a accrochée dans la salsa ? Qu'est-ce qui t'a happée dans ce milieu depuis un petit peu plus de dix ans ?
- Carole
Je dirais que c'est une question d'énergie. L'énergie que j'ai vue entre les danseurs. Donc il y a la notion de partage. Au début je ne pouvais pas vraiment mettre des mots dessus parce qu'en fait je me souviens vraiment de cette première soirée à laquelle on m'a amenée. J'ai trouvé ça incroyable. Et en fait avec le recul c'était en fait une toute petite soirée avec pas beaucoup de danseurs. Cette énergie sur la musique, cette musique aussi qui pour moi était étrangère entre guillemets, parce que je n'écoutais pas du tout la musique salsa, j'avais très peu de connaissances, donc je trouvais ça assez incroyable. La liberté que j'ai vue aussi, le côté extrêmement festif, j'ai commencé en faisant un petit peu de salsa cubaine, donc il y avait beaucoup de liberté, beaucoup de fêtes, on sentait aussi qu'il y avait... Je trouvais que... comme si on pouvait un peu inviter tout le monde, qu'il y avait beaucoup de partage au sens, peu importe le milieu social, on peut se mélanger, on est juste content d'être ensemble, beaucoup d'acceptation des autres. Et c'est vrai que ça, c'était assez magique parce qu'encore une fois, je ne venais pas du tout de cet univers-là.
- Manon
Merci.
- Carole
Merci beaucoup Manon. C'était un plaisir en tout cas pour moi d'intervenir et de pouvoir partager sur ce sujet.
- Manon
Merci pour ton écoute. J'espère que cet épisode t'a plu. Tu retrouveras les différentes références en barre d'infos. Maintenant que la connexion est bien établie, je te propose qu'on se penche sur les spécificités des rôles, du guide et du suiveur avec Yégor. En attendant, n'hésite pas à partager cet épisode et à rejoindre Mosaïque Salsa sur Instagram. A lundi prochain !