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Comment devient-on artiste contemporain ? | Feipel & Bechameil cover
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Raconte Media - Des histoires qui inspirent, connectent et transforment.

Comment devient-on artiste contemporain ? | Feipel & Bechameil

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1h00 |19/06/2025
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1h00 |19/06/2025
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Description

🎨 Feipel & Bechameil : Devenir artiste contemporain aujourd’hui

Dans cette interview exclusive réalisée dans leur atelier à Bruxelles, le duo d’artistes Feipel & Bechameil nous ouvre les portes de leur univers créatif.

Comment devient-on artiste contemporain ? Où puiser l'inspiration ? Et surtout, comment construire une carrière artistique dans un monde en perpétuelle évolution ?

Feipel & Bechameil partagent leur parcours, leurs réflexions et leur vision de l’art contemporain, entre démarche personnelle et reconnaissance institutionnelle.

Ils reviennent également sur un moment fort de leur carrière : leur participation à la Biennale de Venise, où ils ont représenté le Luxembourg.


📍 Une immersion rare dans le quotidien d’artistes engagés, signée Raconte.


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Raconte est un média produit par le studio dbcreation, sous la direction d'Anthony Dehez et Michel Bourgeois.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Merci pour votre écoute. Retrouvez nos photographies et écrits sur raconte.media ainsi que sur nos réseaux sociaux. Raconte est une création originale d'Anthony Dehé et Michel Bourgeois, du studio DB Création, spécialisé en design de marques et photographies. Vous avez apprécié cette rencontre ? Partagez-la sur vos réseaux sociaux et laissez-nous une note sur votre plateforme préférée. Cela contribue réellement à la visibilité de Raconte. Une suggestion d'invité ? Écrivez-nous.

  • Speaker #1

    qu'une oeuvre de fait pas c'est parti d'un coup du patrimoine avec elle devient quelque chose de rare et de très demandé ça malheureusement personne n'est en mesure de répondre ni les artistes ni les directeurs de musées ni les galeristes parce qu'en fait personne ne sait qu'est ce qui va devenir le patrimoine de demain. À Venise, beaucoup d'artistes finissent ruinés. C'est pas bon ? Il y a même des artistes qui ont dû... Je crois que c'est l'artiste de Salvador qui a dû revendre son million d'or pour pouvoir payer ses dettes.

  • Speaker #2

    Non, je pense que de toute façon, si on fait des œuvres pour plaire à quelqu'un, ça ne peut pas marcher. Parce qu'on fait une œuvre qui... Je pense que le plus important, c'est que les œuvres qu'on fasse nous plaisent à nous.

  • Speaker #0

    Raconte la rencontre Bonjour Martine Faypel, bonjour Jean-Béchamel, bienvenue sur Raconte.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Est-ce que je pourrais vous demander de vous présenter en quelques mots ? Que faites-vous ? Qui êtes-vous ?

  • Speaker #2

    On est un couple d'artistes, donc on est un couple dans la vie et dans le travail. Depuis 16 ans, on fait de l'art, des installations, des sculptures, de la céramique, des dessins, différents médiums.

  • Speaker #1

    On travaille surtout... On a une pratique d'atelier, on peut dire, comme on voit ici. Donc on fait souvent des choses nous-mêmes, mais pas que. Et puis on aime bien expérimenter avec des médias très différents. Ça peut être de la vidéo, ça peut être de la robotique, ça peut être de la céramique. Donc voilà, on n'a pas vraiment... Comment dire, on a plusieurs médias de prédilection, mais on n'est pas spécialisés dans une chose.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on peut dire un peu, pour contextualiser, oĂą nous nous trouvons actuellement pour cet enregistrement ?

  • Speaker #2

    On se retrouve dans notre atelier qui est à Bruxelles, où on fait une grande partie de nos œuvres sont produites ici.

  • Speaker #0

    Et je crois savoir que vous êtes luxembourgeoise. Et française, si je ne me trompe pas, c'est bien ça. Comment ça se fait que vous vous retrouvez à Bruxelles ?

  • Speaker #1

    Alors, en fait, on a habité dans pas mal de capitales. Martine, tu as habité à ?

  • Speaker #2

    À Londres, à Berlin, à Strasbourg, un peu en Italie. Et Jean, il a habité...

  • Speaker #1

    À Copenhague. à Paris, puisque je viens de Paris, et dans d'autres villes aussi. Donc, on s'est dit qu'on essaierait de trouver une ville ensoleillée, plutôt chaude, comme ça, pas loin de la mer.

  • Speaker #0

    C'est complètement réussi, on peut le dire.

  • Speaker #1

    VoilĂ , des Bruxelles, c'est parfait.

  • Speaker #2

    Non, mais on avait envie de s'installer dans un endroit où aucun de nous deux n'avait vécu avant. Et puis on a fait un travail à Bruxelles, on a adoré Bruxelles. Aussi par ce mélange de cultures, entre une culture latine et une culture nordique, plus avec la culture flamande. Et puis du monde qui vit à Bruxelles, qui vient de partout, une scène artistique vraiment bien fournie. Donc on était tombés amoureux de Bruxelles. on s'est installé ici.

  • Speaker #0

    C'est le fameux meeting pot, comme on dit, qui vous a séduit en fait.

  • Speaker #1

    Oui, il y a quand même une communauté d'artistes ici qui est assez importante, donc on peut confronter nos idées avec d'autres gens aussi.

  • Speaker #0

    Vous faites ça souvent ?

  • Speaker #1

    Oui, on fait un bar clandestin pendant le Covid ici, avec des... Enfin, clandestin, je m'entends, mais en tout cas, on a des scripts.

  • Speaker #2

    On l'a appelé comme ça.

  • Speaker #1

    On l'a appelé comme ça pour rigoler, quoi.

  • Speaker #2

    Toujours quand il y a des petits groupes d'artistes, on a discuté, on a vu des coups ensemble,

  • Speaker #0

    comme ça. Mais ça a débouché sur des collaborations, des œuvres ?

  • Speaker #2

    Comment ?

  • Speaker #0

    Ça a débouché sur des collaborations, des œuvres ?

  • Speaker #2

    Pas forcément, mais il y a eu des... On a discuté d'œuvres communes, en partie. Ça n'a pas forcément abouti jusque-là, c'est quand même important de confronter ces idées et d'avoir cet échange. Même si ça n'aboutit pas, c'est riche en débats et en confrontations.

  • Speaker #1

    Ça aboutit sur des sacrées discussions.

  • Speaker #0

    Pour en revenir à vous, quels sont vos cursus ? Comment on devient artiste contemporain ? Parce que ce n'est pas très courant. Dites-moi un peu comment on arrive là.

  • Speaker #2

    Je pense que J'ai été attirée par l'art dès la jeunesse, je pense. J'ai eu une mère qui peignait, un oncle qui peignait, mais pas professionnellement. Il y a une curiosité qui s'est éveillée par rapport à ça. Après, j'ai fait des études d'art. D'abord à Strasbourg, et après j'étais à Berlin et à Londres. J'ai fait un master en fine art. Et c'était aussi, je pense qu'en dehors des écoles, c'est une façon aussi de voyager dans des endroits, de rencontrer différents points de vue à travers les écoles, mais aussi à travers les élèves. À Berlin, les profs étaient des artistes qui racontaient un peu de comment ils faisaient les expositions. À Londres aussi, etc. Donc, c'est vraiment petit à petit, comprendre de quoi il s'agit, faire des expositions déjà en tant qu'étudiant. Et voilà, on a commencé à faire de l'art. Et puis, jamais lâcher, surtout. C'est une forme de persévérance. C'est sûr, peut-être, un peu d'entêtement de continuer à le faire, parce qu'il y a certainement au début des moments où ce n'est pas si évident.

  • Speaker #0

    Il faut être entêté pour être artiste.

  • Speaker #2

    Un peu, je pense, oui. C'est quelque chose, on est porté par une envie de le faire. Donc, c'est plus fort qu'il reste.

  • Speaker #0

    Et comment on gère cette envie au quotidien ?

  • Speaker #1

    Il faut déjà trouver des gens qui en ont envie aussi avec vous, parce que c'est quand même déjà suffisamment solitaire comme ça. Donc après, il faut pouvoir exposer ses œuvres, les vendre, les montrer. Donc il y a aussi peut-être trouver des gens qui ont un regard sur notre œuvre, qui ne soit pas uniquement nous, parce que sinon c'est un peu triste. Mais ça c'est tout un travail aussi. Faire des expositions, montrer son travail dès qu'on peut. C'est comme ça que ça commence, en fait. En fait, c'est souvent le début d'une vie d'artiste, c'est vraiment sauter sur la moindre occasion de montrer son travail. Et petit à petit, les gens vous connaissent, ils vous réinvitent. C'est comme ça que ça se fait petit à petit. Mais c'est vrai qu'au début, il y a tout à... Au début, on se demande vraiment pour quelle raison les gens montreraient votre travail dans tout ce qu'il y a déjà à montrer. Et finalement, en fait, ça arrive.

  • Speaker #2

    Après, en plus, on est un couple, donc c'est aussi le travail qui fait partie de notre vie. Pas seulement quand on est à l'atelier. On rentre avec nos idées, nos discussions, nos inquiétudes, nos envies à la maison. On continue à en discuter. C'est quelque chose qui occupe notre vie du matin au soir. Mais c'est aussi passionnant parce qu'on fait un travail où on réalise nos rêves. C'est quand même une chance. C'est un privilège.

  • Speaker #0

    On va y revenir. Peut-être juste pour faire une parenthèse, le cursus de Jean, c'était quoi ? Alors,

  • Speaker #1

    aucun cursus. J'ai été un peu invité dans des cursus, disons, de beaux-arts, etc. Mais en réalité, ma pratique vient surtout du cinéma. J'ai travaillé dans le cinéma assez longtemps.

  • Speaker #0

    À quel poste ?

  • Speaker #1

    Dans la décoration.

  • Speaker #0

    OK.

  • Speaker #1

    et en fait J'avais participé à l'aventure de Lars von Trier pendant toutes les années 90 et j'habitais au Danemark à ce moment-là. Donc j'ai fait pas mal de décors pour toute cette mouvance du cinéma scandinave.

  • Speaker #0

    Ça a été découvert par le grand public finalement, cette époque-là de cinéma scandinave. Voilà,

  • Speaker #1

    à l'époque il n'y avait un peu que Bill August qui était connu et puis est arrivé Trier, Winterberg, toute une génération de jeunes cinéastes qui... qui avaient une façon complètement différente de faire des films et aussi de voir le décor, de voir l'environnement autour d'un script qui était quand même assez intéressant. Et voilà, j'ai eu la chance de participer à ça. Donc ça m'a permis aussi peut-être d'avoir une approche de ma pratique en tant qu'artiste qui était être porté sur la scénographie, sur l'espace, sur le sur l'environnement dans lequel on était, etc., qui était peut-être moins de l'ordre de l'objet ou de l'ordre de la peinture, par exemple. Mais même si jamais, tout ça, c'est des choses qui se rejoignent.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on verra peut-être un peu plus loin. Vous êtes multidisciplinaire, on peut dire ça. Vous n'avez pas un médium sur lequel vous êtes arrêté. Vous avez plusieurs médiums, plusieurs matières, etc. Je pense qu'on va en parler un peu plus loin. Oui. Non, Pour revenir au côté première fois, vous vous êtes rencontrés comment ?

  • Speaker #2

    Alors, on s'est rencontrés dans une fête. Et voilà, donc on est tombés amoureux. On a d'abord été amoureux l'un de l'autre. Et dans nos discussions des premiers jours, des premières semaines, à travers nos discussions, on a inventé des projets ensemble. Et au bout d'un mois, on a fait la première œuvre ensemble qui s'appelle « Peste et choléra » ,

  • Speaker #0

    Jean et moi.

  • Speaker #2

    C'était très optimiste à l'époque. Oui, je pense que c'était très électrique. On est tout de suite tombés amoureux et tout de suite, on avait envie de plein de choses. Et puis, on l'a fait. On était tout de suite dans une sorte d'action, dans une énergie très… très dynamique et puis on n'a jamais arrêté en fait.

  • Speaker #0

    C'était vers quelle année ça ?

  • Speaker #2

    C'était en 2008.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    On a fait la première œuvre en fait à Copenhague dans mon atelier. Et voilà, à l'époque on ne savait même pas vraiment où on allait habiter puisqu'on était tous les deux à moitié en transit. Et c'était un peu... Bon, on va faire l'œuvre, on va la montrer là, après on est partis travailler. à Trinidad. Ensuite, on est allés en Islande. Donc, c'était assez...

  • Speaker #2

    On a fait plein de voyages ensemble. On a un peu travaillé aussi dans le cinéma ensemble. Mais assez rapidement, on a quand même donné la priorité à l'art. Et puis, on a eu plein d'expositions, et puis ça s'est enchaîné. On n'a jamais arrêté.

  • Speaker #0

    Ça a dû être une nourriture intellectuelle formidable, tous ces voyages dans tous ces lieux. Oui,

  • Speaker #2

    c'est vrai. Parce qu'aussi, Comme l'a déjà dit Jean, on est des curieux de l'espace. Je pense qu'on a souvent une envie de comprendre comment les sociétés marchent sociologiquement, politiquement, même architecturalement, etc. Et donc, à travers ces voyages, on découvre plein de choses, on se confronte à d'autres façons de vivre. Et puis voilà, on a tout de suite aussi intégré dans nos discussions, dans nos échanges, dans notre travail. Et c'est clair que c'est riche de pouvoir voyager ensemble. Et le fait de travailler ensemble, c'est aussi de faire tous ces voyages ensemble et d'être immédiatement dans un échange autour.

  • Speaker #1

    C'est d'agréable de travailler dans beaucoup de ces pays. Donc c'est aussi assez différent que juste voyager parce qu'on a quand même été confronté aux scènes locales, avec des gens qui vivaient sur place. C'était quand même d'assez longue période, ce n'était pas juste des voyages de trois semaines.

  • Speaker #2

    Oui, c'était des voyages de trois mois. Donc c'est déjà une autre façon de vivre ces espaces.

  • Speaker #0

    Vous étiez dans des ateliers ? Pratico-pratique, vos voyages, vous étiez en résidence, atelier ?

  • Speaker #2

    Alors, ce n'était pas des résidences. On a travaillé sur des films, donc on a un atelier où on réalisait des choses pour le film ou dans des résidences pour nous-mêmes. Ça, ça dépend. Au début, c'était vraiment relativement entremêlé et après, ça s'est cristallisé sur... sur notre carrière d'artiste.

  • Speaker #0

    Justement pour en venir à ça, vous étiez, on va dire, comment dire, de manière légèrement péjorative, vous étiez sur une production plutôt alimentaire, dans vos métiers de décorateur, etc. Et comment ça s'est passé le changement pour devenir artiste, vraiment, je deviens artiste ? À quel moment ?

  • Speaker #2

    Disons que peut-être c'est un peu différent pour Jean que pour moi, parce que... Moi, c'était vraiment depuis toujours, c'était être artiste. Quand on s'est connus, on a travaillé sur des films ensemble, mais moi, j'ai jamais arrêté, on n'a jamais arrêté de faire des œuvres. Alors que pour Jean, c'est peut-être plus mélangé.

  • Speaker #1

    Mélangé, oui. Et puis petit à petit, on a eu des galeries qui se sont intéressées à notre travail. On a eu des institutions qui ont...

  • Speaker #0

    Comment la rencontre se fait justement avec les galeries, etc. ? Ils viennent Ă  une expo ?

  • Speaker #1

    Ils viennent à une expo et ils voient les œuvres qui, pour eux, pourraient être des œuvres collectionnées. Je pense que c'est comme ça qu'ils voient la chose. Soit parce que c'est de... ça correspond à un moment où c'est aussi ça correspond à une qualité peut-être du 2,2 de l'oeuvre je sais pas trop mais en tout cas ce qui est certain c'est que on n'a pas nous fait une démarche vraiment vers les galeries c'est plutôt les galeries qui sont venus et qui nous ont demandé travailler avec nous parce que ce qui se passe souvent c'est que c'est eux ils sont submergés d'artistes on peut dire et donc c'est un peu eux qui font le tri en fait c'est un peu Donc c'est vrai que les galeries, même les institutions, ça vient petit à petit aussi à travers les concours, parce qu'on a fait pas mal de concours. On a fait quand même quelques concours où on a gagné, et donc après on a eu la chance de représenter par exemple le Luxembourg à la Biennale de Venise, ou des choses comme ça, qui sont quand même des concours dans lesquels il faut s'investir sans savoir si jamais ça va marcher ou pas.

  • Speaker #0

    Et comment vous y prenez pour participer à un concours ? C'est des cahiers des charges ? Vous scrutez un peu ça et puis vous dites, tiens, ça c'est compatible avec notre approche ?

  • Speaker #2

    Oui, c'est toujours, on fait un concours parce qu'il y a quand même quelque chose qui nous intéresse particulièrement dans ces concours-là, parce que c'est proche de notre sensibilité ou de notre réflexion, etc. On n'en fait peut-être pas tant que ça quand même des concours, mais de temps en temps. Mais après, c'est vrai que je pense qu'au début, on en a fait. Et après, c'est aussi des choses qui se mettent un peu en place où les gens nous contactent. Et bon, c'est un mélange.

  • Speaker #0

    Vous venez de Paris, justement, de la Biennale de Venise, où vous avez représenté le Luxembourg. C'est un événement majeur sur la scène mondiale de l'art contemporain. Ça change tout dans une carrière ou pas tant que ça ?

  • Speaker #2

    Si, oui, ça change parce que d'abord, c'est quand même... Disons, on a fait la Biennale de Venise en 2011. On avait tous les deux depuis des années une pratique artistique, mais on était un couple d'artistes depuis 3 à 4 ans, 3 ans. et donc On était connus dans un certain milieu, mais le fait d'être à Venise, ça crée une visibilité vraiment mondiale. Il y a quand même des gens du monde entier qui viennent voir la Biennale. Et ça, on n'en aura pas profité en montrant notre travail là où on l'a montré avant, c'est-à-dire au Luxembourg, en Belgique. Ça donnait tout de suite une ampleur plus vaste quand même à notre travail.

  • Speaker #1

    Et puis c'était un succès.

  • Speaker #2

    Oui, c'est quand même, on a eu vraiment un vrai retour avec beaucoup d'articles, beaucoup de demandes après, donc ça nous a tout de suite positionnés quelque part. Donc après, c'est aussi une suite de continuer.

  • Speaker #1

    Après, il fallait continuer, ce qui n'est pas évident, parce que la Biennale de Venise, c'est un événement majeur, mais qui... qui n'est pas un événement commercial. Donc après, il faut trouver un moyen de rebondir, de pouvoir en vivre après, ce qui n'est pas évident. Parce que c'est la Biennale de Venise, beaucoup d'artistes finissent ruinés en fait. C'est un bon moment. Oui, il y a même des artistes qui ont dû, je crois que c'est l'artiste du Salvador qui a dû revendre son million d'or pour pouvoir payer ses dettes. Et en fait, c'est vrai que c'est un peu le problème des grandes manifestations. Comme ça, ce n'est pas du tout destiné à commercialiser des œuvres. Donc après, il faut trouver un moyen de rebondir, de trouver des gens qui vont vous inviter à d'autres choses, etc. Tout de suite, parce que si jamais on a la chance que ça marche, c'est bien. C'est vraiment une bonne chose.

  • Speaker #0

    Et là, c'est plus la rencontre avec le marché des arts, des galeristes et marchands qui doit se faire. Oui,

  • Speaker #1

    et aussi les institutions. Parce que les institutions comptent aussi énormément. Il faut pas... rencontrer que le marché de l'art dans une carrière d'artiste, c'est un peu de...

  • Speaker #2

    Follé de...

  • Speaker #1

    Follé de quoi ? C'est toujours pareil, parce que c'est un peu... Les institutions, elles ont ainsi un rôle important dans l'art. C'est quand même elles qui vont investir dans des grandes productions et puis qui vont montrer aussi à un public beaucoup plus large que le marché lui-même. Donc ça, c'est important. Peut-être... à un public beaucoup plus hétéroclite que ne l'est le marché des foires et des galeries.

  • Speaker #0

    C'est quelque chose qui vous tient à cœur, de toucher des gens qui ne sont pas de prime abord clients d'art contemporain ?

  • Speaker #2

    Oui. Nous, quand même, dans notre travail, d'abord, on adore faire aussi des installations ou des œuvres qui répondent à un contexte et qui est vraiment dirigé à un public. Donc, ça c'est vraiment, je pense, l'essence de notre travail, c'est aussi le travail avec les lieux. On a fait quand même beaucoup d'œuvres aussi dans l'espace public et souvent aussi une façon dans notre œuvre d'intégrer le public dans nos œuvres. Donc, c'est important de toucher, de pouvoir aussi toucher les gens qui ne vont peut-être pas avoir des musées. Donc voilà, c'est... Ouais.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'il y a un côté assez ludique dans votre travail. Ce sont des œuvres que l'on peut toucher, parfois même monter dessus. Je parle des œuvres extérieures, etc., les grands formats. Ce n'est pas une œuvre qui est dans un musée derrière une vitrine de l'AD. Le public peut avoir vraiment une connexion au sens propre du terme avec vos œuvres.

  • Speaker #2

    Oui, parce que je pense qu'aussi, pour nous, c'est important que ce ne soit pas seulement une expérience intellectuelle et conceptuelle par rapport à l'œuvre, mais aussi... Une expérience physique et visuelle, mais physique aussi, et puis ce rapport social au public qui nous est cher. Donc oui, on a fait des œuvres qui peuvent aussi servir d'assises, ou on a fait des œuvres comme les brutalistes qu'on a faits, qui sont installés de façon... définitive à Nantes. C'est des grandes sculptures en béton et en pierre de lave émaillée. Mais à l'intérieur des sculptures, il y a des fours à pizzas. Et c'était vraiment pensé pour que les gens du quartier se réunissent autour de ces œuvres. Ils font des pizzas et il y a un partage. Il y a aussi une inclusion sociale par rapport à ce travail et une convivialité qui se crée dans le quartier. Du coup, c'est une façon aussi de désacraliser. Une œuvre qu'on ne peut pas toucher, mais qui sert, qui devient en fait part du quotidien et qui met aussi l'homme au centre de cette attractivité autour de l'œuvre. Et ce n'est pas du coup seulement une œuvre contemplative, ça peut l'être aussi parce que c'est une sculpture, c'est aussi une forme plastique qui est développée, qui nous est chère. qui fonctionne en tant que juste sculpture. Mais c'est aussi important, du coup, c'est intéressant de basculer dans quelque chose où ça devient vivant, il y a du feu aussi sur la place, mais des bûches, du coup, c'est vraiment...

  • Speaker #0

    On se rapproche un petit peu du design industriel, un peu, en faisant ça.

  • Speaker #2

    Oui, c'est peut-être pas du design, mais oui, ça se rapproche dans un sens du design.

  • Speaker #1

    De toute façon, ce n'est pas non plus des œuvres qu'on va reproduire à l'infini. Cette expérience-là à Nantes, ce sera une autre expérience à Bastogne, une troisième à Toulouse où on fait une station de métro. À chaque fois, c'est des idées assez différentes, mais toujours tournées vers le public. Mais ce n'est pas une série de... de choses qui vont être tournées vers une grande production.

  • Speaker #0

    Et quand c'est comme ça, vous rencontrez les habitants des quartiers dans lesquels va finir l'œuvre ? Oui. Il y a un échange qui se fait ?

  • Speaker #1

    C'est ça. On a travaillé avec les enfants du quartier pour décider un peu justement de la forme et de la couleur de l'œuvre. On avait fait tout un camp de vacances avec eux. À Toulouse, là, c'est vraiment un dialogue avec déjà les gens qui construisent le métro parce que là, on vient complètement en amont. de la construction du métro, c'est-à-dire qu'en fait on a travaillé sur la station avant même qu'elle soit construite, qu'elle sorte de terre, et donc là on pouvait vraiment modifier un peu la construction elle-même du métro, un peu dans la mesure où c'était.

  • Speaker #2

    Oui parce qu'on a eu vraiment un échange, parce que le bâtiment n'était pas encore dessiné. C'est-à-dire qu'il était prédessiné, mais il n'était pas fini. Donc, on a fini les cahiers de charge en même temps que les architectes. Et ça, c'était intéressant dans le dialogue de pouvoir vraiment implémenter l'œuvre en échange avec les architectes.

  • Speaker #1

    Et puis, on va travailler justement sur toute la fréquence des métros. Donc, l'œuvre qui est un bas-relief, elle va être en mouvement un petit peu avant que la rame arrive dans la station. pour signaler son arrivée éminente de chaque côté. C'est tout un travail aussi sur le mouvement, sur ce côté très erratique du métro, très quotidien, avec des mouvements dans la structure elle-même.

  • Speaker #2

    C'est une œuvre interconnectée sur le système du métro.

  • Speaker #0

    Une question que je vais vous poser par rapport Ă  Adia. On n'arrĂŞte pas d'en parler en ce moment. Est-ce que c'est quelque chose que vous pensez utiliser dans votre pratique artistique un jour ?

  • Speaker #1

    On l'utilise dans les mouvements. Parce que nous, on utilise de la robotique qui se sert de l'IA. On n'utilise pas pour fabriquer des œuvres. Mais disons qu'on l'utilise effectivement dans certains mouvements de robotique qui sont très compliqués. La programmation, c'est nous qui la faisons. Mais une partie des corrections du moteur et des mouvements se fait avec l'IA. Ce qui va être assez compliqué.

  • Speaker #2

    Oui, c'est des moteurs robotiques et c'est des moteurs industriels, ce qui nous ramène peut-être au côté industriel. L'industrie, c'est quelque chose qui nous intéresse aussi. C'est-à-dire aussi la technologie, l'industrie. C'est-à-dire que notre travail, c'est quand même, d'une certaine manière, toujours une réflexion sur la modernité et comment cette modernité, à travers... la technologie, l'architecture, ces idéologies, a changé notre rapport à l'espace, au monde, à l'autre, aussi à la nature. Et donc, souvent, on essaie de s'approprier les moyens de cette modernité, ce qu'on a fait avec la robotique.

  • Speaker #1

    C'est juste qu'on a fait aussi à Ibiza, on a scanné un bâtiment d'un architecte José Luisert, qui était un des symboles de la modernité, aussi un grand ami de Le Corbusier, on l'a en fait scanné avec un laser assez perfectionné, qui sert normalement dans l'industrie à scanner des grands bâtiments industriels. Et en fait, là, on voulait s'en servir justement pour que le spectateur voit le bâtiment tel qu'il l'était à ce moment-là, parce qu'en grande partie, il va être démoli petit à petit.

  • Speaker #2

    Il faut garder une trace patrimoniale de ce bâtiment,

  • Speaker #1

    mais c'est une trace complètement emblématique de l'île.

  • Speaker #0

    L'idée de la trace, l'idée du temps qui passe, c'est quelque chose qui vous inspire au quotidien dans vos œuvres ?

  • Speaker #2

    Oui, je pense que le temps, dans une sorte même... Oui, le temps... Jouer avec une sorte d'intemporalité ou le temps qui passe, etc. Oui, c'est très présent ce que travaillent quand même les temporalités et comment modifier aussi ces temporalités.

  • Speaker #1

    En plus, on a souvent un travail d'archives, en fait, parce que, par exemple, quand on avait fait tout le travail sur les grands ensembles et les logements sociaux, on avait essayé d'aller vers les... les plans de l'époque qui étaient des plans avant AutoCAD. Donc, c'est très curieux de s'imaginer. Les plans en papier. Les plans en papier, ce qui est assez curieux, quand on imagine les grandes cités des années 70-80, n'ont en fait pas été dessinées par ordinateur. Et alors, on a eu accès à ces archives qui nous ont été exceptionnellement ouvertes et qui sont des archives dont des architectes, les architectes de ces années. donc euh 60-70, début des années 80, sont maintenant à la retraite et ils donnent volontairement leur fonds de dessins et de documents à cette bibliothèque. Et donc, c'est très intéressant parce que c'est vraiment le projet brut. Qu'est-ce qu'était un projet d'habitat social dans les années 70 ? Comment il a été dessiné ? Là, on en voit… Là, ce n'est pas du tout quelque chose de…

  • Speaker #0

    Il y a des grandes notions sociologiques de l'époque aussi. Oui, c'est intéressant.

  • Speaker #2

    C'est peut-être aussi pour ça qu'on avait envie de retourner vraiment au début de cette modernité, parce que c'est vraiment la modernité qui contient encore ce rêve d'un meilleur monde possible à travers ces nouvelles architectures, etc. Donc, c'est vraiment une utopie et ça se retrouve. dans ses bâtiments, dans ses dessins des bâtiments, etc. Donc, c'est ça qui nous a beaucoup fascinés, l'œuvre à monde parfait qu'on a fait.

  • Speaker #1

    En plus, pour nous, c'était un peu la première fois dans l'histoire qu'on était face à du monumental fait pour la classe populaire. Parce qu'en fait, il n'y a pas vraiment d'architecture monumentale pour les classes populaires avant. Il n'y a pas d'exemple, les petites maisons où... où les petits immeubles de trois étages, ce n'est pas réellement monumental, mais une barre d'immeubles. quand c'est reproduit de façon sérielle avec 4000 logements, ça a quand même quelque chose de, même, on peut dire, politiquement, un peu effrayant. Et d'ailleurs, c'est ce qui s'est passé, parce que politiquement, ça a été vraiment des endroits très vilipendés. On a souvent parlé de ces cités comme des cités qui sont hors contrôle,

  • Speaker #0

    etc.

  • Speaker #1

    Et donc, ça a été pour nous un véritable retour à quelles étaient les vraies idées derrière. Surtout que moi, j'ai grandi dans une barre. C'est quand même une expérience que j'ai vraiment eue de première. C'est quand même intéressant comme mouvement architectural, d'autant plus qu'ils sont en grande partie en cours de démolition. Il y a quand même beaucoup de ces barres qui se font exploser à l'heure actuelle.

  • Speaker #2

    Raconte la forme avec le fond.

  • Speaker #0

    On vient de parler en détail de ce qui vous inspire, entre autres. Mais comment, pratiquement, vous y prenez pour créer une nouvelle œuvre ? Comment ça se passe, ce processus créatif ? Vous levez le matin, je crée une œuvre, comment ça se passe ?

  • Speaker #1

    C'est marrant parce qu'on me pose souvent cette question. Et en fait, c'est un peu difficile à répondre parce que c'est vraiment un processus étrange où on discute d'un projet, on revient dessus, en...

  • Speaker #2

    C'est quand même... Ça part quand même d'un sujet qui nous passionne. Par exemple, quand on a commencé à travailler sur la robotique, parce qu'on a eu une résidence au Luxembourg sur un site industriel à Belleval. Et donc, on était confrontés à ces éléments qu'on connaissait très bien. C'est au fourneau de l'industrie sidérurgique du Luxembourg. qui sont obsolètes maintenant, mais il y a quand même encore l'industrie. Quand on a visité l'usine ArcelorMittal, etc. Il y a une fascination pour ces géants du passé, ces hauts fourneaux, ces bêtes presque. Ça paraît comme des bêtes, parce que c'est des espèces de monstres d'industrie. Et l'automation dans l'usine à côté. Ce qui nous a donné envie de travailler avec la technologie, de faire une réflexion là-dessus et de travailler avec, de répondre à cette industrie du passé avec la robotique d'aujourd'hui, la robotique industrielle. Et donc, il y a toujours quelque chose qui déclenche une envie par une confrontation ou quelque chose. Et là-dessus, on commence à... souvent à faire des longues recherches sur le sujet, à se documenter, à lire dessus, à nous y intéresser, et petit à petit à développer un projet, une idée, comment réagir par rapport à ça, comment questionner ces technologies par exemple.

  • Speaker #1

    Il faut dire aussi que quand on a visité les usines ArcelorMittal, ce qui nous a vraiment frappé, c'est qu'il n'y avait personne. C'est-à-dire, c'était entièrement automatisé. Entièrement, il ne faut pas non plus exagérer, mais disons, il y a beaucoup, beaucoup de tâches qui sont automatisées. Et dans cette automatisation, dans ces machines qui marchent toutes seules, avec des programmes très compliqués quand même, en fait, ce qui nous fascinait, ce n'était pas du tout la robotique humanoïde, avec des espèces de robots qui imitent l'homme. Ce qui nous fascinait, c'est ce côté automation. d'un énorme process très compliqué. Et en fait, on avait envie de s'en emparer. Tout de suite, on nous a découragé en nous disant « Mais vous savez, la robotique industrielle, c'est vraiment fait pour des ingénieurs qui ont une formation. C'est vraiment fait pour des gens qui sont habitués à travailler de l'électronique. » Alors, ça nous a donné encore plus envie de s'en emparer parce que du coup, on a commencé à acheter des... des morceaux de robots, apprendre à le programmer avec des gens qui ont bien voulu nous aider, ce qui n'était pas évident parce que c'est vrai que c'est un milieu finalement très fermé au public parce que ce n'est pas du tout public. Dans la robotique industrielle, le principe, c'est que justement, il n'y a pas de public. Donc, on a commencé à travailler là-dessus et c'est un peu par hasard. C'est typiquement, par exemple, dans ce cas-là d'une œuvre comme ça, c'est un peu… Petit à petit, on va faire des recherches, on va tomber sur une chose, on va aller vers des gens qui s'y connaissent, on va retomber sur une recherche peut-être plus théorique, et puis on va en faire quelque chose qui est notre propre œuvre. Ça c'est le cas pour cette œuvre-là, mais pour une autre œuvre, ça pourrait être un peu le même process où on va aller vers les archives des architectes et on va trouver des dessins qui nous fascinent, et on va interroger des gens qui ont fait partie de ce mouvement architectural. C'est toujours une espèce de recherche à la fois, je dirais, sensible au niveau de l'image, de la picturalité de la chose, mais aussi une recherche, on pourrait dire, plus intellectuelle, de livres, d'écrits, de conférences.

  • Speaker #0

    La recherche prend vraiment un temps énorme, en fait, dans votre processus. La lecture, la documentation.

  • Speaker #1

    C'est...

  • Speaker #0

    Vous donnez une idée, c'est quoi ? C'est des semaines ? C'est des mois ?

  • Speaker #2

    Eh ben... Oui, sur deux semaines, ça c'est sûr. Après, c'est entremêlé avec peut-être aussi même une recherche, donc des lectures. Des sujets autour qui nous intéressent, aussi une recherche peut-être formelle, des expérimentations déjà dans l'atelier. C'est des choses qui se mettent en place comme ça, l'un dans l'autre. C'est rarement aussi... Je pense que maintenant, très souvent, on travaille sur des choses un peu comme ça, on continue, c'est un peu organique. C'est pas... On commence un projet et puis on recherche et puis on réhabilite. C'est plusieurs choses qui peuvent aussi se changer. Donc, c'est un processus. Mais c'est souvent quelque chose qui nous inspire, qui déclenche l'envie de faire cette recherche et qui, après, petit à petit, nous amène quelque part et on se laisse guider par ce sujet, etc. Et on développe un travail artistique autour.

  • Speaker #0

    Vous créez plusieurs œuvres en parallèle ?

  • Speaker #2

    Ça peut arriver, ça dépend. Ça dépend aussi de l'ampleur du projet. On vient de parler de Ballad of Destruction. Ça, par contre, c'est vrai qu'on a fait toute une recherche. Après, on l'a réalisé. Donc, c'était une résidence aussi de six mois. Donc, on a quand même travaillé sur une longue période sur ce projet essentiellement. Oui,

  • Speaker #1

    mais là, on s'en est arrivé. Mais après,

  • Speaker #2

    ça dépend. Mais après, il y a d'autres choses où on travaille sur différentes choses en même temps. Ça dépend.

  • Speaker #1

    Il y a des choses qu'on laisse un peu de côté, parce qu'on sent qu'on est arrivé peut-être au bout de ce qu'on pouvait faire avec, et puis on revient dessus.

  • Speaker #2

    On revient sur des choses, même des sujets qu'on s'est éloignés, et puis après on revient dessus. De toute façon, ça fait partie d'un tout, c'est pas si tranché.

  • Speaker #0

    Justement, ça a amené une des questions que j'avais ici. On imagine toujours les artistes, des gens pas pressés, un peu rêveurs et tout ça, je caricature à peine. Mais quand vous faites des commandes justement pour des institutions, des domaines publics, etc., on vous donne des designs, des cahiers de charges, c'est ultra carré en fait.

  • Speaker #2

    Pour des commandes publiques, par exemple, il y a vraiment des cahiers de charges relativement...

  • Speaker #1

    Sévènes ?

  • Speaker #2

    Oui, définis. Mais après, ceci dit, on propose un projet. après s'il est Donc, c'est une ébauche d'un projet. Après, s'il est pris, il y a quand même pas mal de temps pour le développer, pour peut-être le rediriger, le développer,

  • Speaker #1

    l'améliorer ou le continuer.

  • Speaker #2

    Donc, après, on est toujours un peu libre de notre emploi du temps. Après, c'est sûr aussi qu'on doit quand même répondre à des délais.

  • Speaker #1

    Et on se laissera un peu, les gens restent un an et demi pour les techniques.

  • Speaker #2

    Si on est programmé, il faut... On ne peut pas dire qu'on a fait un mois plus tard. Mais je dirais qu'on travaille quand même beaucoup. On est aussi passionnés par ce qu'on fait, donc on ne lâche jamais. Mais on n'arrête jamais non plus.

  • Speaker #0

    Vous faites un travail justement de commande, comme ça. Vous avez des interactions avec les services publics ou des directeurs de cours. Comment ça se passe avec eux ?

  • Speaker #1

    Alors là, on a eu très nombreuses interactions parce qu'en fait, eux, ils ne sont pas seulement demandeurs d'une œuvre, ils sont demandeurs d'un projet, maintenant de plus en plus aussi un projet qui inclut les habitants. Parce qu'en fait, peut-être parce qu'ils ont aussi envie de pouvoir défendre des œuvres face à leurs électeurs, donc on est de plus en plus confrontés à une demande des services publics de participation. mais c'est un bien grand mot parce qu'en fait on ne demande pas que le public vienne participer à l'oeuvre mais en tout cas ils demandent à être consultés ils veulent avoir leur mot à dire ils sont aussi présents parfois dans même l'oeuvre parce que dans le cas de Nantes ils sont présents dans l'oeuvre c'est tout un travail qui était une volonté de notre part c'était pas une volonté d'ailleurs du demandeur mais c'est vrai qu'il y a des endroits Il y a des endroits aussi, comment faire œuvre dans un endroit qui est parfois hostile ou qui n'est pas évident à vivre ? Comment rendre cet endroit différent ? On peut se demander ça comme artiste ?

  • Speaker #2

    Je trouve quand même qu'on a la plupart du temps une carte blanche, parce qu'il y a les œuvres dans l'espace, il y a les commandes publiques. ça sert à... un appel à projets, mais ça c'est juste une petite partie parce que d'ailleurs Nantes c'était pas le cas mais c'était à travers les voyages en Nantes et on avait carte blanche et quand on travaille avec des institutions pour une exposition dans un centre d'art, dans un PC, on a... carte blanche et après il s'établit un échange avec le curateur de l'exposition, avec aussi du coup l'équipe pour mettre le projet en place, mais il n'y a personne qui se met quand même du projet. Et quand on fait des expositions dans les galeries, c'est pareil, il y a certes un échange, mais on a quand même toujours carte blanche de faire ce qu'on veut. Il n'y a jamais personne qui est intervenu dans le travail.

  • Speaker #1

    c'est pas du tout le sujet parce que le sujet bon ou alors c'est pas du tout ce qu'on avait cru ou non c'est pas ça n'est pas rire non non c'est plus dans un dans une idée d'échangé pense que après il ya quand même des il ya quand même un budget donc c'est aussi par infini et puis il y a quand même aussi une temporalité, c'est-à-dire qu'il faut que ce soit prêt les jours de l'exposition.

  • Speaker #0

    Vous venez de parler de budget. Comment on fixe le prix d'une œuvre ? C'est peut-être une question un peu touchy dans le milieu de l'art, mais comment on peut définir que cette œuvre vaut 1 100, 100 000, 1 million ? Je ne sais pas.

  • Speaker #2

    Ça, c'est un bilan.

  • Speaker #0

    Jamais ? C'est de consulter ou ? Non,

  • Speaker #2

    non, on définit nos prix, mais après, c'est aussi une question de comment l'œuvre... Elle évolue dans un marché, ça, je ne sais pas. Ça,

  • Speaker #1

    c'est une série d'évents.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas vraiment.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il va faire qu'une œuvre fait partie tout d'un coup du patrimoine et qu'elle devient quelque chose de rare et de très demandé ? Ça, malheureusement, personne n'est en mesure de répondre, ni les artistes, ni les directeurs de musées, ni les galeristes, parce qu'en fait, personne ne sait qu'est-ce qui va devenir le patrimoine de demain. enfin je veux dire ouais Nous, on fait l'œuvre aujourd'hui. Qu'est-ce qui va faire ensuite qu'elle va prendre une énorme valeur ? Alors là, c'est un grand mystère.

  • Speaker #0

    C'est quelque chose qui vous tracasse ou pas du tout ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas vraiment quelque chose qui nous tracasse. Nous, on fait de l'art aujourd'hui. On n'est pas après...

  • Speaker #2

    Ce qui nous tracasse, c'est qu'en face des œuvres et qu'en puissant... vivre et qu'on puisse continuer à réaliser nos oeuvres. C'est-à-dire d'avoir les moyens pour faire ce qu'on a envie de faire. Après, on n'est pas... Je pense qu'on n'est jamais trop en train de se questionner comment faire pour qu'une oeuvre monte en valeur, pour qu'elle soit l'oeuvre de demain,

  • Speaker #0

    je ne sais pas. C'est Ă  tout prix, en fait. Non,

  • Speaker #2

    c'est Ă  tout prix.

  • Speaker #0

    C'est Ă  tout prix. ...

  • Speaker #2

    ça ne marche pas mieux que de ne pas plaire non je pense que de toute façon si on fait des oeuvres pour plaire à quelqu'un ça ne peut pas marcher parce qu'on fait une oeuvre qui je pense que le plus important c'est que les oeuvres qu'on fasse nous plaisent à nous et après si nous on est content avec l'oeuvre, si nous on exprime ce qu'on a envie, si on estime qu'on arrive à vraiment exprimer ce qu'on a envie d'exprimer à travers cette œuvre, je pense que c'est une œuvre réussite. Après, c'est au public de juger s'il est d'accord ou pas, mais le plus important, c'est d'être satisfait soi-même des œuvres qu'on fasse, moi je trouve.

  • Speaker #0

    Il faut s'affranchir du goût et des envies du candidaton aussi.

  • Speaker #1

    Oui, mais il n'y a pas beaucoup de... Disons que c'est rare, à part pour les œuvres très politiques, C'est rare qu'il y ait une réelle... révolte du public contre des œuvres. Le problème, je dirais, c'est plutôt son indifférence, en fait. Parce qu'il y a beaucoup d'œuvres, mais finalement, quand on voit des villes comme Bruxelles ou d'autres villes, il n'y a pas beaucoup d'œuvres dans l'espace public. L'art contemporain, l'art fait par des artistes d'aujourd'hui, n'est pas si présent que ça. Donc, en fait, notre problème, c'est de faire notre place dans tout l'univers, le bâti, l'architecture. les grandes infrastructures, les institutions, c'est de faire notre place là-dedans. Parce que l'air de rien, si jamais on regarde les grandes institutions aujourd'hui, les grandes infrastructures, il n'y a pas beaucoup d'œuvres. On n'est pas extrêmement présent. Je sais que beaucoup de gens trouvent qu'on dépense beaucoup d'argent pour les artistes, mais si jamais on regardait à l'aune de qu'est-ce que dépense un État pour ses... ces infrastructures ou ces bâtiments, l'art contemporain est quand même peu présent. Donc, nous, on essaye de faire notre place là-dedans, de montrer qu'il y a une modernité qui peut être là sans que ça pose forcément un problème énorme, et qu'au contraire. On est là pour marquer une période, parce que finalement, qu'est-ce qui va rester de cette période-là dans laquelle on vit ? Il va rester des journaux, des bâtiments, des infrastructures, plus ou moins en bon état. Mais est-ce qu'il va rester beaucoup d'œuvres ? Est-ce qu'il va rester beaucoup d'œuvres qui symbolisent cette époque ? Et c'est un peu ça le problème. C'est toujours la question de quelle va être notre place dedans. Je dis notre place en tant qu'artiste en général. parmi tous les autres artistes qu'on connaît, c'est le même problème. C'est comment faire œuvre dans une société qui a aussi plein d'autres problèmes à gérer, bien sûr.

  • Speaker #0

    Marquer son temps. Comment ? Marquer son temps.

  • Speaker #1

    Marquer son temps, et puis aussi le retranscrire, parce qu'en fait, qu'est-ce que c'est qu'une œuvre du XIXe siècle sur une place publique ? C'est une œuvre qui exprime qu'est-ce qu'était le XIXe siècle. Donc, elle a quand même... Elle a aussi une façon de raconter l'histoire de ce moment-là. Voilà.

  • Speaker #0

    Raconte,

  • Speaker #2

    oĂą chaque format donne vie Ă  une histoire.

  • Speaker #0

    Comment s'est passée la première fois où vous avez vendu une œuvre ? Vous vous en rappelez ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas si je me rappelle la première œuvre qu'on a vendue. Je ne sais pas. Mais...

  • Speaker #1

    On a vendu... C'est difficile à dire. Parce que c'est difficile de dire si jamais c'est une œuvre vendue ou si jamais c'est une institution qui a finalement accepté de la prendre dans sa collection. C'est quand même assez différent. Comme démarche ? Non, pas comme démarche, mais comme...

  • Speaker #2

    C'est une œuvre vendue.

  • Speaker #1

    C'est une œuvre vendue, c'est vrai. C'est une œuvre incontestable, on peut dire.

  • Speaker #2

    Disons que le fait de vendre une œuvre, ça fait toujours plaisir. Ça fait toujours plaisir. Ça fait plaisir qu'il y ait quelqu'un qui aime le travail au point de l'acheter. Donc, c'est quand même toujours une...

  • Speaker #1

    C'est quelque chose de joyeux.

  • Speaker #2

    C'est joyeux en dehors du fait qu'on reçoit de l'argent pour vendre une œuvre. Mais c'est aussi une forme de reconnaissance, donc une forme de succès. Donc ça, c'est toujours joyeux. De la première jusqu'à la dernière.

  • Speaker #1

    En fait, ce n'est pas seulement d'avoir de la première, c'est de continuer à en vendre.

  • Speaker #0

    Justement, toutes ces œuvres, quand elles parlent de votre atelier où nous nous trouvons actuellement, ça ne vous rend pas triste ?

  • Speaker #2

    Si, parfois, c'est vraiment difficile de se séparer des œuvres aussi.

  • Speaker #1

    Alors moi,

  • Speaker #2

    je dis,

  • Speaker #1

    tu ne la vends pas, on ne la vend pas, parce que je l'aime trop, etc. Et souvent, je dis ça. Oui.

  • Speaker #0

    Une petite collection privée alors que personne... Non,

  • Speaker #1

    en fait, non. On a des oeuvres.

  • Speaker #2

    Mais c'est vrai qu'il y a quand même des oeuvres qu'on vend malgré le fait que ces difficiles sont séparés. C'est toujours un peu comme une part de nous-mêmes qui part. C'est comme donner son bébé à quelqu'un. On espère qu'il est bien soigné, le bébé. que l'œuvre est en de bon moment et qu'elle sera respectée. Mais oui, c'est parfois dur de se séparer.

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas grave, parce que du coup, on peut en acheter d'autres Ă  d'autres artistes. Parce qu'on a aussi notre petite collection, on ne peut pas croire.

  • Speaker #0

    C'est une dynamique.

  • Speaker #1

    Comment ?

  • Speaker #0

    C'est une dynamique.

  • Speaker #1

    Oui, et puis bon, c'est vrai que même nous, en tant qu'artistes, moi je trouve ça vraiment joyeux d'acheter une œuvre à un artiste. d'aller dans une exposition et de pouvoir dire « Ah, j'aimerais vraiment bien acheter cette œuvre et je vais l'acheter. »

  • Speaker #2

    Et le fait de vendre une œuvre, ça motive aussi, dont on a du mal à se séparer, ça motive de faire une autre œuvre qu'on aime autant ou même plus.

  • Speaker #0

    C'est tout à fait une évolution.

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #0

    On en parlait justement avant l'interview. Ici, c'est votre atelier. Mais vous ne vivez pas ici, vous vivez ailleurs. C'est un choix délibéré pour une coupure vie privée-vie professionnelle ?

  • Speaker #2

    Oui, disons que c'est peut-être pas tout à fait un choix délibéré, mais ce n'est pas plus mal, parce que je pense que déjà, on est un couple qui travaille ensemble, donc on ramène quand même notre travail chez nous malgré tout. Il faut dire aussi que chez nous, dans notre appartement, on a une pièce qui est le bureau où on dessine, où on travaille sur l'ordinateur, où on réfléchit, on lit, on fait les recherches. Donc il y a déjà une forme d'atelier aussi intégré à la maison. Et c'est parfois bien aussi de pouvoir fermer une porte, marcher, arriver à un autre lieu, donc avoir cette espèce de séparation. de respirer entre... voilà, ou de rentrer chez soi et d'être baigné dans une autre ambiance. Ceci-ci, ce serait de toute façon impossible de vivre dans le même espace, vu qu'on est... quand même surtout des sculpteurs, un céramiste, qui a beaucoup de poussière, etc. Donc ce serait impossible.

  • Speaker #1

    Il respire un peu.

  • Speaker #2

    Il faudrait déjà que la maison soit sur un autre étage ou à côté. Mais...

  • Speaker #0

    Vous avez dit que vous faites tout en duo. Vous avez déjà eu des envies de faire un truc en solo ? Comme tous les groupes de rock, de temps en temps, il y en a un qui parle et qui fait un homme.

  • Speaker #1

    Alors, je ne te l'ai pas dit, mais... Non, c'est pas vrai.

  • Speaker #2

    Pas vraiment pour l'instant, mais... Non, pas vrai.

  • Speaker #1

    Non, mais pour l'instant...

  • Speaker #2

    Ce n'est pas Ă  exclure, mais pour l'instant, on ne l'a pas fait en tout cas.

  • Speaker #0

    Et vous n'avez jamais eu de panne d'inspiration ? Des moments où votre carrière est déjà maintenant assez longue ? Il n'y a pas eu des moments où on ne trouve pas ?

  • Speaker #1

    Non. En fait, on a eu de panne beaucoup de choses. Par exemple, manque de moyens.

  • Speaker #0

    Le manque de temps pour les matériaux.

  • Speaker #1

    Oui, c'est du manque de temps, je trouve. Mais en fait, le nombre de choses qu'on a envie de faire...

  • Speaker #0

    C'est plutĂ´t le contraire, en fait. VoilĂ ,

  • Speaker #1

    c'est assez problématique.

  • Speaker #2

    C'est ça. Et en plus, on a quand même... On a aussi des projets qu'on a développés, qu'on a dessinés, qu'on a écrits et qu'on n'a jamais...

  • Speaker #1

    Qu'on n'a jamais eu le temps de faire.

  • Speaker #2

    Donc, on a en plus des petits projets dans les tiroirs. que peut-être un jour ils vont se faire, mais peut-être aussi pas. Ce seront toujours des projets inachevés peut-être. Mais c'est-à-dire que parfois, j'ai l'impression qu'on n'aura pas le temps de faire toutes les choses qu'on a envie de faire. Donc c'est plutôt ça.

  • Speaker #0

    Vous n'avez jamais eu envie d'avoir une sorte de factory avec des gens qui viennent travailler avec vous ?

  • Speaker #1

    Ah non.

  • Speaker #2

    C'est-à-dire qu'on a quand même des assistants de temps en temps. on n'a pas des assistants en continu. C'est selon les projets, selon la difficulté du projet, etc. Et aussi, il y a parfois des choses qu'on fait quand même faire. Pensez à de la fonderie ou des choses comme ça. On n'est pas capable de faire ça chez nous. Mais je pense que le fait d'avoir beaucoup de gens qui t'attendent à l'atelier...

  • Speaker #1

    C'est très mieux.

  • Speaker #2

    Nous, on aime... Nous, on aime bien le faire. C'est important pour nous d'être impliqués dans le travail. Et je pense qu'il y a une espèce de pression. Enfin, ça devient industriel. Il commence à y avoir trop de gens. Je pense qu'on perd un peu le lien à l'œuvre.

  • Speaker #1

    On devient un organisateur.

  • Speaker #2

    Je trouve que c'est une autre forme de travail. Personnellement, moi et Jean aussi, on trouve que c'est important de garder le rapport à l'œuvre. Donc ça peut être avec bien sûr de l'aide de temps en temps, parce que c'est difficile de faire vraiment tout. Comme on dit, on a parfois aussi l'impression de ne pas avoir assez de temps. Mais je pense que c'est important d'avoir toujours gardé ce rapport à l'œuvre.

  • Speaker #1

    Oui, puis faire de l'organisation. Parce que quand on commence à avoir un atelier, d'arriver le matin et d'organiser les tâches, tout ça...

  • Speaker #0

    Ça devient une entreprise, en fait, plus un atelier.

  • Speaker #1

    Oui, alors... En plus, comme artiste, c'est risqué, parce que ça veut dire aussi produire tout le temps des grandes œuvres et les vendre. C'est quand même... Ça devient vraiment... Ça met une question...

  • Speaker #2

    Une question de... de production et de vente. On aime bien garder une certaine liberté avec ça. Être capable de se dire, pendant un moment, réfléchir aux choses et on n'a pas dix assistants à payer. Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est vraiment ça aussi, je pense, qui est compliqué pour des artistes qui sont comme ça dans un... dans un système très entrepreneurial, c'est que ça devient vraiment des enjeux aussi financiers sans arrêt.

  • Speaker #2

    Je pense que c'est une question de liberté. Je pense qu'on aime bien être libre, libre de décider comme ça, voilà, combien d'œuvres on fait, comment on les fait, de pouvoir expérimenter, de pouvoir prendre le temps par moments de réfléchir.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, même quand il y a des assistants, on expérimente. Parce que la dernière assistante qui était ici, on a expérimenté avec elle des choses que je ne savais pas du tout faire. Donc elle était un peu, des fois... Parce qu'il faut dire aussi une chose, c'est que... Quand on fait les choses soi-même, quand on les expérimente soi-même, il y a quand même toute une partie un peu d'erreurs, de choses qui ne marchent pas très bien. Ce n'est pas grave, parce que ce ne sont pas des enjeux énormes, donc ça va. À la fin, il faut que ça marche, mais bon, sur le moment, ce n'est pas non plus évident.

  • Speaker #2

    Il y a quand mĂŞme tous les deux des amoureux du faire.

  • Speaker #1

    Du faire. On aime bien les faire.

  • Speaker #2

    Donc, on aime bien donner la forme, être aussi dans la pratique, pas seulement dans la conception d'une œuvre, mais aussi dans la pratique de l'artiste. Donc, c'est important pour nous d'avoir ce rapport tactile peut-être à l'œuvre aussi.

  • Speaker #1

    Si on s'intéresse à la robotique, on va apprendre à programmer, mais si on s'intéresse à la céramique, on va apprendre à faire de la céramique. Peut-être qu'on ne fera pas des milliers de choses dans notre vie, mais en tout cas, ça. On le sait. Voilà.

  • Speaker #0

    Il me reste à vous poser la dernière question qui est la même pour tous nos invités. Qui voudrait entendre, voir, lire dans Raconte à votre place ?

  • Speaker #2

    Comment ?

  • Speaker #1

    Qui on aimerait ?

  • Speaker #0

    Qui voudrait Ă  votre place, qu'on pourrait inviter Ă  venir expliquer son travail,

  • Speaker #1

    sa vie ? Moi, je pense à quelqu'un, en tout cas au Luxembourg, que je trouve qui est un vrai témoin de ce qui s'est passé disons les 20 dernières années dans l'art contemporain et dans aussi dans le théâtre dans le dans le théâtre dans l'art dans beaucoup de choses justement dans le milieu culturel c'est josé hamza on la connaît ben je trouve que c'est quelqu'un de très oui alors puisqu'il maintenant à une autre pratique au ministère mais c'est intéressant c'est quelqu'un qui a vraiment navigué dans pas mal de gens disent moi aussi avec moi et l'analyse mais voilà Après, il y a d'autres gens comme artistes.

  • Speaker #0

    Ça peut être autre chose que d'apprendre d'autres choses. Ah oui, ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    C'est typiquement le genre de truc, sur le moment, j'ai un blackout.

  • Speaker #0

    C'est une question très difficile.

  • Speaker #2

    Mais après, si je réfléchis, je vais peut-être donner d'autres personnes vraiment que j'aimerais, parce qu'il y a plein de gens que j'aimerais savoir. ce qu'ils ont raconté. Il me faudrait un moment de réflexion, mais plus qu'à une minute, parce que là, c'est trop de pression.

  • Speaker #0

    On en reparlera plus tard. Il me reste Ă  vous remercier. Merci beaucoup Martine, merci beaucoup Jean.

  • Speaker #1

    Merci Ă  toi.

  • Speaker #2

    C'était très agréable d'avoir cette interview. Merci.

  • Speaker #1

    Raconte, s'écoute,

  • Speaker #2

    s'élie. et c'est un câble.

Description

🎨 Feipel & Bechameil : Devenir artiste contemporain aujourd’hui

Dans cette interview exclusive réalisée dans leur atelier à Bruxelles, le duo d’artistes Feipel & Bechameil nous ouvre les portes de leur univers créatif.

Comment devient-on artiste contemporain ? Où puiser l'inspiration ? Et surtout, comment construire une carrière artistique dans un monde en perpétuelle évolution ?

Feipel & Bechameil partagent leur parcours, leurs réflexions et leur vision de l’art contemporain, entre démarche personnelle et reconnaissance institutionnelle.

Ils reviennent également sur un moment fort de leur carrière : leur participation à la Biennale de Venise, où ils ont représenté le Luxembourg.


📍 Une immersion rare dans le quotidien d’artistes engagés, signée Raconte.


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Transcription

  • Speaker #0

    Merci pour votre écoute. Retrouvez nos photographies et écrits sur raconte.media ainsi que sur nos réseaux sociaux. Raconte est une création originale d'Anthony Dehé et Michel Bourgeois, du studio DB Création, spécialisé en design de marques et photographies. Vous avez apprécié cette rencontre ? Partagez-la sur vos réseaux sociaux et laissez-nous une note sur votre plateforme préférée. Cela contribue réellement à la visibilité de Raconte. Une suggestion d'invité ? Écrivez-nous.

  • Speaker #1

    qu'une oeuvre de fait pas c'est parti d'un coup du patrimoine avec elle devient quelque chose de rare et de très demandé ça malheureusement personne n'est en mesure de répondre ni les artistes ni les directeurs de musées ni les galeristes parce qu'en fait personne ne sait qu'est ce qui va devenir le patrimoine de demain. À Venise, beaucoup d'artistes finissent ruinés. C'est pas bon ? Il y a même des artistes qui ont dû... Je crois que c'est l'artiste de Salvador qui a dû revendre son million d'or pour pouvoir payer ses dettes.

  • Speaker #2

    Non, je pense que de toute façon, si on fait des œuvres pour plaire à quelqu'un, ça ne peut pas marcher. Parce qu'on fait une œuvre qui... Je pense que le plus important, c'est que les œuvres qu'on fasse nous plaisent à nous.

  • Speaker #0

    Raconte la rencontre Bonjour Martine Faypel, bonjour Jean-Béchamel, bienvenue sur Raconte.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Est-ce que je pourrais vous demander de vous présenter en quelques mots ? Que faites-vous ? Qui êtes-vous ?

  • Speaker #2

    On est un couple d'artistes, donc on est un couple dans la vie et dans le travail. Depuis 16 ans, on fait de l'art, des installations, des sculptures, de la céramique, des dessins, différents médiums.

  • Speaker #1

    On travaille surtout... On a une pratique d'atelier, on peut dire, comme on voit ici. Donc on fait souvent des choses nous-mêmes, mais pas que. Et puis on aime bien expérimenter avec des médias très différents. Ça peut être de la vidéo, ça peut être de la robotique, ça peut être de la céramique. Donc voilà, on n'a pas vraiment... Comment dire, on a plusieurs médias de prédilection, mais on n'est pas spécialisés dans une chose.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on peut dire un peu, pour contextualiser, oĂą nous nous trouvons actuellement pour cet enregistrement ?

  • Speaker #2

    On se retrouve dans notre atelier qui est à Bruxelles, où on fait une grande partie de nos œuvres sont produites ici.

  • Speaker #0

    Et je crois savoir que vous êtes luxembourgeoise. Et française, si je ne me trompe pas, c'est bien ça. Comment ça se fait que vous vous retrouvez à Bruxelles ?

  • Speaker #1

    Alors, en fait, on a habité dans pas mal de capitales. Martine, tu as habité à ?

  • Speaker #2

    À Londres, à Berlin, à Strasbourg, un peu en Italie. Et Jean, il a habité...

  • Speaker #1

    À Copenhague. à Paris, puisque je viens de Paris, et dans d'autres villes aussi. Donc, on s'est dit qu'on essaierait de trouver une ville ensoleillée, plutôt chaude, comme ça, pas loin de la mer.

  • Speaker #0

    C'est complètement réussi, on peut le dire.

  • Speaker #1

    VoilĂ , des Bruxelles, c'est parfait.

  • Speaker #2

    Non, mais on avait envie de s'installer dans un endroit où aucun de nous deux n'avait vécu avant. Et puis on a fait un travail à Bruxelles, on a adoré Bruxelles. Aussi par ce mélange de cultures, entre une culture latine et une culture nordique, plus avec la culture flamande. Et puis du monde qui vit à Bruxelles, qui vient de partout, une scène artistique vraiment bien fournie. Donc on était tombés amoureux de Bruxelles. on s'est installé ici.

  • Speaker #0

    C'est le fameux meeting pot, comme on dit, qui vous a séduit en fait.

  • Speaker #1

    Oui, il y a quand même une communauté d'artistes ici qui est assez importante, donc on peut confronter nos idées avec d'autres gens aussi.

  • Speaker #0

    Vous faites ça souvent ?

  • Speaker #1

    Oui, on fait un bar clandestin pendant le Covid ici, avec des... Enfin, clandestin, je m'entends, mais en tout cas, on a des scripts.

  • Speaker #2

    On l'a appelé comme ça.

  • Speaker #1

    On l'a appelé comme ça pour rigoler, quoi.

  • Speaker #2

    Toujours quand il y a des petits groupes d'artistes, on a discuté, on a vu des coups ensemble,

  • Speaker #0

    comme ça. Mais ça a débouché sur des collaborations, des œuvres ?

  • Speaker #2

    Comment ?

  • Speaker #0

    Ça a débouché sur des collaborations, des œuvres ?

  • Speaker #2

    Pas forcément, mais il y a eu des... On a discuté d'œuvres communes, en partie. Ça n'a pas forcément abouti jusque-là, c'est quand même important de confronter ces idées et d'avoir cet échange. Même si ça n'aboutit pas, c'est riche en débats et en confrontations.

  • Speaker #1

    Ça aboutit sur des sacrées discussions.

  • Speaker #0

    Pour en revenir à vous, quels sont vos cursus ? Comment on devient artiste contemporain ? Parce que ce n'est pas très courant. Dites-moi un peu comment on arrive là.

  • Speaker #2

    Je pense que J'ai été attirée par l'art dès la jeunesse, je pense. J'ai eu une mère qui peignait, un oncle qui peignait, mais pas professionnellement. Il y a une curiosité qui s'est éveillée par rapport à ça. Après, j'ai fait des études d'art. D'abord à Strasbourg, et après j'étais à Berlin et à Londres. J'ai fait un master en fine art. Et c'était aussi, je pense qu'en dehors des écoles, c'est une façon aussi de voyager dans des endroits, de rencontrer différents points de vue à travers les écoles, mais aussi à travers les élèves. À Berlin, les profs étaient des artistes qui racontaient un peu de comment ils faisaient les expositions. À Londres aussi, etc. Donc, c'est vraiment petit à petit, comprendre de quoi il s'agit, faire des expositions déjà en tant qu'étudiant. Et voilà, on a commencé à faire de l'art. Et puis, jamais lâcher, surtout. C'est une forme de persévérance. C'est sûr, peut-être, un peu d'entêtement de continuer à le faire, parce qu'il y a certainement au début des moments où ce n'est pas si évident.

  • Speaker #0

    Il faut être entêté pour être artiste.

  • Speaker #2

    Un peu, je pense, oui. C'est quelque chose, on est porté par une envie de le faire. Donc, c'est plus fort qu'il reste.

  • Speaker #0

    Et comment on gère cette envie au quotidien ?

  • Speaker #1

    Il faut déjà trouver des gens qui en ont envie aussi avec vous, parce que c'est quand même déjà suffisamment solitaire comme ça. Donc après, il faut pouvoir exposer ses œuvres, les vendre, les montrer. Donc il y a aussi peut-être trouver des gens qui ont un regard sur notre œuvre, qui ne soit pas uniquement nous, parce que sinon c'est un peu triste. Mais ça c'est tout un travail aussi. Faire des expositions, montrer son travail dès qu'on peut. C'est comme ça que ça commence, en fait. En fait, c'est souvent le début d'une vie d'artiste, c'est vraiment sauter sur la moindre occasion de montrer son travail. Et petit à petit, les gens vous connaissent, ils vous réinvitent. C'est comme ça que ça se fait petit à petit. Mais c'est vrai qu'au début, il y a tout à... Au début, on se demande vraiment pour quelle raison les gens montreraient votre travail dans tout ce qu'il y a déjà à montrer. Et finalement, en fait, ça arrive.

  • Speaker #2

    Après, en plus, on est un couple, donc c'est aussi le travail qui fait partie de notre vie. Pas seulement quand on est à l'atelier. On rentre avec nos idées, nos discussions, nos inquiétudes, nos envies à la maison. On continue à en discuter. C'est quelque chose qui occupe notre vie du matin au soir. Mais c'est aussi passionnant parce qu'on fait un travail où on réalise nos rêves. C'est quand même une chance. C'est un privilège.

  • Speaker #0

    On va y revenir. Peut-être juste pour faire une parenthèse, le cursus de Jean, c'était quoi ? Alors,

  • Speaker #1

    aucun cursus. J'ai été un peu invité dans des cursus, disons, de beaux-arts, etc. Mais en réalité, ma pratique vient surtout du cinéma. J'ai travaillé dans le cinéma assez longtemps.

  • Speaker #0

    À quel poste ?

  • Speaker #1

    Dans la décoration.

  • Speaker #0

    OK.

  • Speaker #1

    et en fait J'avais participé à l'aventure de Lars von Trier pendant toutes les années 90 et j'habitais au Danemark à ce moment-là. Donc j'ai fait pas mal de décors pour toute cette mouvance du cinéma scandinave.

  • Speaker #0

    Ça a été découvert par le grand public finalement, cette époque-là de cinéma scandinave. Voilà,

  • Speaker #1

    à l'époque il n'y avait un peu que Bill August qui était connu et puis est arrivé Trier, Winterberg, toute une génération de jeunes cinéastes qui... qui avaient une façon complètement différente de faire des films et aussi de voir le décor, de voir l'environnement autour d'un script qui était quand même assez intéressant. Et voilà, j'ai eu la chance de participer à ça. Donc ça m'a permis aussi peut-être d'avoir une approche de ma pratique en tant qu'artiste qui était être porté sur la scénographie, sur l'espace, sur le sur l'environnement dans lequel on était, etc., qui était peut-être moins de l'ordre de l'objet ou de l'ordre de la peinture, par exemple. Mais même si jamais, tout ça, c'est des choses qui se rejoignent.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on verra peut-être un peu plus loin. Vous êtes multidisciplinaire, on peut dire ça. Vous n'avez pas un médium sur lequel vous êtes arrêté. Vous avez plusieurs médiums, plusieurs matières, etc. Je pense qu'on va en parler un peu plus loin. Oui. Non, Pour revenir au côté première fois, vous vous êtes rencontrés comment ?

  • Speaker #2

    Alors, on s'est rencontrés dans une fête. Et voilà, donc on est tombés amoureux. On a d'abord été amoureux l'un de l'autre. Et dans nos discussions des premiers jours, des premières semaines, à travers nos discussions, on a inventé des projets ensemble. Et au bout d'un mois, on a fait la première œuvre ensemble qui s'appelle « Peste et choléra » ,

  • Speaker #0

    Jean et moi.

  • Speaker #2

    C'était très optimiste à l'époque. Oui, je pense que c'était très électrique. On est tout de suite tombés amoureux et tout de suite, on avait envie de plein de choses. Et puis, on l'a fait. On était tout de suite dans une sorte d'action, dans une énergie très… très dynamique et puis on n'a jamais arrêté en fait.

  • Speaker #0

    C'était vers quelle année ça ?

  • Speaker #2

    C'était en 2008.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    On a fait la première œuvre en fait à Copenhague dans mon atelier. Et voilà, à l'époque on ne savait même pas vraiment où on allait habiter puisqu'on était tous les deux à moitié en transit. Et c'était un peu... Bon, on va faire l'œuvre, on va la montrer là, après on est partis travailler. à Trinidad. Ensuite, on est allés en Islande. Donc, c'était assez...

  • Speaker #2

    On a fait plein de voyages ensemble. On a un peu travaillé aussi dans le cinéma ensemble. Mais assez rapidement, on a quand même donné la priorité à l'art. Et puis, on a eu plein d'expositions, et puis ça s'est enchaîné. On n'a jamais arrêté.

  • Speaker #0

    Ça a dû être une nourriture intellectuelle formidable, tous ces voyages dans tous ces lieux. Oui,

  • Speaker #2

    c'est vrai. Parce qu'aussi, Comme l'a déjà dit Jean, on est des curieux de l'espace. Je pense qu'on a souvent une envie de comprendre comment les sociétés marchent sociologiquement, politiquement, même architecturalement, etc. Et donc, à travers ces voyages, on découvre plein de choses, on se confronte à d'autres façons de vivre. Et puis voilà, on a tout de suite aussi intégré dans nos discussions, dans nos échanges, dans notre travail. Et c'est clair que c'est riche de pouvoir voyager ensemble. Et le fait de travailler ensemble, c'est aussi de faire tous ces voyages ensemble et d'être immédiatement dans un échange autour.

  • Speaker #1

    C'est d'agréable de travailler dans beaucoup de ces pays. Donc c'est aussi assez différent que juste voyager parce qu'on a quand même été confronté aux scènes locales, avec des gens qui vivaient sur place. C'était quand même d'assez longue période, ce n'était pas juste des voyages de trois semaines.

  • Speaker #2

    Oui, c'était des voyages de trois mois. Donc c'est déjà une autre façon de vivre ces espaces.

  • Speaker #0

    Vous étiez dans des ateliers ? Pratico-pratique, vos voyages, vous étiez en résidence, atelier ?

  • Speaker #2

    Alors, ce n'était pas des résidences. On a travaillé sur des films, donc on a un atelier où on réalisait des choses pour le film ou dans des résidences pour nous-mêmes. Ça, ça dépend. Au début, c'était vraiment relativement entremêlé et après, ça s'est cristallisé sur... sur notre carrière d'artiste.

  • Speaker #0

    Justement pour en venir à ça, vous étiez, on va dire, comment dire, de manière légèrement péjorative, vous étiez sur une production plutôt alimentaire, dans vos métiers de décorateur, etc. Et comment ça s'est passé le changement pour devenir artiste, vraiment, je deviens artiste ? À quel moment ?

  • Speaker #2

    Disons que peut-être c'est un peu différent pour Jean que pour moi, parce que... Moi, c'était vraiment depuis toujours, c'était être artiste. Quand on s'est connus, on a travaillé sur des films ensemble, mais moi, j'ai jamais arrêté, on n'a jamais arrêté de faire des œuvres. Alors que pour Jean, c'est peut-être plus mélangé.

  • Speaker #1

    Mélangé, oui. Et puis petit à petit, on a eu des galeries qui se sont intéressées à notre travail. On a eu des institutions qui ont...

  • Speaker #0

    Comment la rencontre se fait justement avec les galeries, etc. ? Ils viennent Ă  une expo ?

  • Speaker #1

    Ils viennent à une expo et ils voient les œuvres qui, pour eux, pourraient être des œuvres collectionnées. Je pense que c'est comme ça qu'ils voient la chose. Soit parce que c'est de... ça correspond à un moment où c'est aussi ça correspond à une qualité peut-être du 2,2 de l'oeuvre je sais pas trop mais en tout cas ce qui est certain c'est que on n'a pas nous fait une démarche vraiment vers les galeries c'est plutôt les galeries qui sont venus et qui nous ont demandé travailler avec nous parce que ce qui se passe souvent c'est que c'est eux ils sont submergés d'artistes on peut dire et donc c'est un peu eux qui font le tri en fait c'est un peu Donc c'est vrai que les galeries, même les institutions, ça vient petit à petit aussi à travers les concours, parce qu'on a fait pas mal de concours. On a fait quand même quelques concours où on a gagné, et donc après on a eu la chance de représenter par exemple le Luxembourg à la Biennale de Venise, ou des choses comme ça, qui sont quand même des concours dans lesquels il faut s'investir sans savoir si jamais ça va marcher ou pas.

  • Speaker #0

    Et comment vous y prenez pour participer à un concours ? C'est des cahiers des charges ? Vous scrutez un peu ça et puis vous dites, tiens, ça c'est compatible avec notre approche ?

  • Speaker #2

    Oui, c'est toujours, on fait un concours parce qu'il y a quand même quelque chose qui nous intéresse particulièrement dans ces concours-là, parce que c'est proche de notre sensibilité ou de notre réflexion, etc. On n'en fait peut-être pas tant que ça quand même des concours, mais de temps en temps. Mais après, c'est vrai que je pense qu'au début, on en a fait. Et après, c'est aussi des choses qui se mettent un peu en place où les gens nous contactent. Et bon, c'est un mélange.

  • Speaker #0

    Vous venez de Paris, justement, de la Biennale de Venise, où vous avez représenté le Luxembourg. C'est un événement majeur sur la scène mondiale de l'art contemporain. Ça change tout dans une carrière ou pas tant que ça ?

  • Speaker #2

    Si, oui, ça change parce que d'abord, c'est quand même... Disons, on a fait la Biennale de Venise en 2011. On avait tous les deux depuis des années une pratique artistique, mais on était un couple d'artistes depuis 3 à 4 ans, 3 ans. et donc On était connus dans un certain milieu, mais le fait d'être à Venise, ça crée une visibilité vraiment mondiale. Il y a quand même des gens du monde entier qui viennent voir la Biennale. Et ça, on n'en aura pas profité en montrant notre travail là où on l'a montré avant, c'est-à-dire au Luxembourg, en Belgique. Ça donnait tout de suite une ampleur plus vaste quand même à notre travail.

  • Speaker #1

    Et puis c'était un succès.

  • Speaker #2

    Oui, c'est quand même, on a eu vraiment un vrai retour avec beaucoup d'articles, beaucoup de demandes après, donc ça nous a tout de suite positionnés quelque part. Donc après, c'est aussi une suite de continuer.

  • Speaker #1

    Après, il fallait continuer, ce qui n'est pas évident, parce que la Biennale de Venise, c'est un événement majeur, mais qui... qui n'est pas un événement commercial. Donc après, il faut trouver un moyen de rebondir, de pouvoir en vivre après, ce qui n'est pas évident. Parce que c'est la Biennale de Venise, beaucoup d'artistes finissent ruinés en fait. C'est un bon moment. Oui, il y a même des artistes qui ont dû, je crois que c'est l'artiste du Salvador qui a dû revendre son million d'or pour pouvoir payer ses dettes. Et en fait, c'est vrai que c'est un peu le problème des grandes manifestations. Comme ça, ce n'est pas du tout destiné à commercialiser des œuvres. Donc après, il faut trouver un moyen de rebondir, de trouver des gens qui vont vous inviter à d'autres choses, etc. Tout de suite, parce que si jamais on a la chance que ça marche, c'est bien. C'est vraiment une bonne chose.

  • Speaker #0

    Et là, c'est plus la rencontre avec le marché des arts, des galeristes et marchands qui doit se faire. Oui,

  • Speaker #1

    et aussi les institutions. Parce que les institutions comptent aussi énormément. Il faut pas... rencontrer que le marché de l'art dans une carrière d'artiste, c'est un peu de...

  • Speaker #2

    Follé de...

  • Speaker #1

    Follé de quoi ? C'est toujours pareil, parce que c'est un peu... Les institutions, elles ont ainsi un rôle important dans l'art. C'est quand même elles qui vont investir dans des grandes productions et puis qui vont montrer aussi à un public beaucoup plus large que le marché lui-même. Donc ça, c'est important. Peut-être... à un public beaucoup plus hétéroclite que ne l'est le marché des foires et des galeries.

  • Speaker #0

    C'est quelque chose qui vous tient à cœur, de toucher des gens qui ne sont pas de prime abord clients d'art contemporain ?

  • Speaker #2

    Oui. Nous, quand même, dans notre travail, d'abord, on adore faire aussi des installations ou des œuvres qui répondent à un contexte et qui est vraiment dirigé à un public. Donc, ça c'est vraiment, je pense, l'essence de notre travail, c'est aussi le travail avec les lieux. On a fait quand même beaucoup d'œuvres aussi dans l'espace public et souvent aussi une façon dans notre œuvre d'intégrer le public dans nos œuvres. Donc, c'est important de toucher, de pouvoir aussi toucher les gens qui ne vont peut-être pas avoir des musées. Donc voilà, c'est... Ouais.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'il y a un côté assez ludique dans votre travail. Ce sont des œuvres que l'on peut toucher, parfois même monter dessus. Je parle des œuvres extérieures, etc., les grands formats. Ce n'est pas une œuvre qui est dans un musée derrière une vitrine de l'AD. Le public peut avoir vraiment une connexion au sens propre du terme avec vos œuvres.

  • Speaker #2

    Oui, parce que je pense qu'aussi, pour nous, c'est important que ce ne soit pas seulement une expérience intellectuelle et conceptuelle par rapport à l'œuvre, mais aussi... Une expérience physique et visuelle, mais physique aussi, et puis ce rapport social au public qui nous est cher. Donc oui, on a fait des œuvres qui peuvent aussi servir d'assises, ou on a fait des œuvres comme les brutalistes qu'on a faits, qui sont installés de façon... définitive à Nantes. C'est des grandes sculptures en béton et en pierre de lave émaillée. Mais à l'intérieur des sculptures, il y a des fours à pizzas. Et c'était vraiment pensé pour que les gens du quartier se réunissent autour de ces œuvres. Ils font des pizzas et il y a un partage. Il y a aussi une inclusion sociale par rapport à ce travail et une convivialité qui se crée dans le quartier. Du coup, c'est une façon aussi de désacraliser. Une œuvre qu'on ne peut pas toucher, mais qui sert, qui devient en fait part du quotidien et qui met aussi l'homme au centre de cette attractivité autour de l'œuvre. Et ce n'est pas du coup seulement une œuvre contemplative, ça peut l'être aussi parce que c'est une sculpture, c'est aussi une forme plastique qui est développée, qui nous est chère. qui fonctionne en tant que juste sculpture. Mais c'est aussi important, du coup, c'est intéressant de basculer dans quelque chose où ça devient vivant, il y a du feu aussi sur la place, mais des bûches, du coup, c'est vraiment...

  • Speaker #0

    On se rapproche un petit peu du design industriel, un peu, en faisant ça.

  • Speaker #2

    Oui, c'est peut-être pas du design, mais oui, ça se rapproche dans un sens du design.

  • Speaker #1

    De toute façon, ce n'est pas non plus des œuvres qu'on va reproduire à l'infini. Cette expérience-là à Nantes, ce sera une autre expérience à Bastogne, une troisième à Toulouse où on fait une station de métro. À chaque fois, c'est des idées assez différentes, mais toujours tournées vers le public. Mais ce n'est pas une série de... de choses qui vont être tournées vers une grande production.

  • Speaker #0

    Et quand c'est comme ça, vous rencontrez les habitants des quartiers dans lesquels va finir l'œuvre ? Oui. Il y a un échange qui se fait ?

  • Speaker #1

    C'est ça. On a travaillé avec les enfants du quartier pour décider un peu justement de la forme et de la couleur de l'œuvre. On avait fait tout un camp de vacances avec eux. À Toulouse, là, c'est vraiment un dialogue avec déjà les gens qui construisent le métro parce que là, on vient complètement en amont. de la construction du métro, c'est-à-dire qu'en fait on a travaillé sur la station avant même qu'elle soit construite, qu'elle sorte de terre, et donc là on pouvait vraiment modifier un peu la construction elle-même du métro, un peu dans la mesure où c'était.

  • Speaker #2

    Oui parce qu'on a eu vraiment un échange, parce que le bâtiment n'était pas encore dessiné. C'est-à-dire qu'il était prédessiné, mais il n'était pas fini. Donc, on a fini les cahiers de charge en même temps que les architectes. Et ça, c'était intéressant dans le dialogue de pouvoir vraiment implémenter l'œuvre en échange avec les architectes.

  • Speaker #1

    Et puis, on va travailler justement sur toute la fréquence des métros. Donc, l'œuvre qui est un bas-relief, elle va être en mouvement un petit peu avant que la rame arrive dans la station. pour signaler son arrivée éminente de chaque côté. C'est tout un travail aussi sur le mouvement, sur ce côté très erratique du métro, très quotidien, avec des mouvements dans la structure elle-même.

  • Speaker #2

    C'est une œuvre interconnectée sur le système du métro.

  • Speaker #0

    Une question que je vais vous poser par rapport Ă  Adia. On n'arrĂŞte pas d'en parler en ce moment. Est-ce que c'est quelque chose que vous pensez utiliser dans votre pratique artistique un jour ?

  • Speaker #1

    On l'utilise dans les mouvements. Parce que nous, on utilise de la robotique qui se sert de l'IA. On n'utilise pas pour fabriquer des œuvres. Mais disons qu'on l'utilise effectivement dans certains mouvements de robotique qui sont très compliqués. La programmation, c'est nous qui la faisons. Mais une partie des corrections du moteur et des mouvements se fait avec l'IA. Ce qui va être assez compliqué.

  • Speaker #2

    Oui, c'est des moteurs robotiques et c'est des moteurs industriels, ce qui nous ramène peut-être au côté industriel. L'industrie, c'est quelque chose qui nous intéresse aussi. C'est-à-dire aussi la technologie, l'industrie. C'est-à-dire que notre travail, c'est quand même, d'une certaine manière, toujours une réflexion sur la modernité et comment cette modernité, à travers... la technologie, l'architecture, ces idéologies, a changé notre rapport à l'espace, au monde, à l'autre, aussi à la nature. Et donc, souvent, on essaie de s'approprier les moyens de cette modernité, ce qu'on a fait avec la robotique.

  • Speaker #1

    C'est juste qu'on a fait aussi à Ibiza, on a scanné un bâtiment d'un architecte José Luisert, qui était un des symboles de la modernité, aussi un grand ami de Le Corbusier, on l'a en fait scanné avec un laser assez perfectionné, qui sert normalement dans l'industrie à scanner des grands bâtiments industriels. Et en fait, là, on voulait s'en servir justement pour que le spectateur voit le bâtiment tel qu'il l'était à ce moment-là, parce qu'en grande partie, il va être démoli petit à petit.

  • Speaker #2

    Il faut garder une trace patrimoniale de ce bâtiment,

  • Speaker #1

    mais c'est une trace complètement emblématique de l'île.

  • Speaker #0

    L'idée de la trace, l'idée du temps qui passe, c'est quelque chose qui vous inspire au quotidien dans vos œuvres ?

  • Speaker #2

    Oui, je pense que le temps, dans une sorte même... Oui, le temps... Jouer avec une sorte d'intemporalité ou le temps qui passe, etc. Oui, c'est très présent ce que travaillent quand même les temporalités et comment modifier aussi ces temporalités.

  • Speaker #1

    En plus, on a souvent un travail d'archives, en fait, parce que, par exemple, quand on avait fait tout le travail sur les grands ensembles et les logements sociaux, on avait essayé d'aller vers les... les plans de l'époque qui étaient des plans avant AutoCAD. Donc, c'est très curieux de s'imaginer. Les plans en papier. Les plans en papier, ce qui est assez curieux, quand on imagine les grandes cités des années 70-80, n'ont en fait pas été dessinées par ordinateur. Et alors, on a eu accès à ces archives qui nous ont été exceptionnellement ouvertes et qui sont des archives dont des architectes, les architectes de ces années. donc euh 60-70, début des années 80, sont maintenant à la retraite et ils donnent volontairement leur fonds de dessins et de documents à cette bibliothèque. Et donc, c'est très intéressant parce que c'est vraiment le projet brut. Qu'est-ce qu'était un projet d'habitat social dans les années 70 ? Comment il a été dessiné ? Là, on en voit… Là, ce n'est pas du tout quelque chose de…

  • Speaker #0

    Il y a des grandes notions sociologiques de l'époque aussi. Oui, c'est intéressant.

  • Speaker #2

    C'est peut-être aussi pour ça qu'on avait envie de retourner vraiment au début de cette modernité, parce que c'est vraiment la modernité qui contient encore ce rêve d'un meilleur monde possible à travers ces nouvelles architectures, etc. Donc, c'est vraiment une utopie et ça se retrouve. dans ses bâtiments, dans ses dessins des bâtiments, etc. Donc, c'est ça qui nous a beaucoup fascinés, l'œuvre à monde parfait qu'on a fait.

  • Speaker #1

    En plus, pour nous, c'était un peu la première fois dans l'histoire qu'on était face à du monumental fait pour la classe populaire. Parce qu'en fait, il n'y a pas vraiment d'architecture monumentale pour les classes populaires avant. Il n'y a pas d'exemple, les petites maisons où... où les petits immeubles de trois étages, ce n'est pas réellement monumental, mais une barre d'immeubles. quand c'est reproduit de façon sérielle avec 4000 logements, ça a quand même quelque chose de, même, on peut dire, politiquement, un peu effrayant. Et d'ailleurs, c'est ce qui s'est passé, parce que politiquement, ça a été vraiment des endroits très vilipendés. On a souvent parlé de ces cités comme des cités qui sont hors contrôle,

  • Speaker #0

    etc.

  • Speaker #1

    Et donc, ça a été pour nous un véritable retour à quelles étaient les vraies idées derrière. Surtout que moi, j'ai grandi dans une barre. C'est quand même une expérience que j'ai vraiment eue de première. C'est quand même intéressant comme mouvement architectural, d'autant plus qu'ils sont en grande partie en cours de démolition. Il y a quand même beaucoup de ces barres qui se font exploser à l'heure actuelle.

  • Speaker #2

    Raconte la forme avec le fond.

  • Speaker #0

    On vient de parler en détail de ce qui vous inspire, entre autres. Mais comment, pratiquement, vous y prenez pour créer une nouvelle œuvre ? Comment ça se passe, ce processus créatif ? Vous levez le matin, je crée une œuvre, comment ça se passe ?

  • Speaker #1

    C'est marrant parce qu'on me pose souvent cette question. Et en fait, c'est un peu difficile à répondre parce que c'est vraiment un processus étrange où on discute d'un projet, on revient dessus, en...

  • Speaker #2

    C'est quand même... Ça part quand même d'un sujet qui nous passionne. Par exemple, quand on a commencé à travailler sur la robotique, parce qu'on a eu une résidence au Luxembourg sur un site industriel à Belleval. Et donc, on était confrontés à ces éléments qu'on connaissait très bien. C'est au fourneau de l'industrie sidérurgique du Luxembourg. qui sont obsolètes maintenant, mais il y a quand même encore l'industrie. Quand on a visité l'usine ArcelorMittal, etc. Il y a une fascination pour ces géants du passé, ces hauts fourneaux, ces bêtes presque. Ça paraît comme des bêtes, parce que c'est des espèces de monstres d'industrie. Et l'automation dans l'usine à côté. Ce qui nous a donné envie de travailler avec la technologie, de faire une réflexion là-dessus et de travailler avec, de répondre à cette industrie du passé avec la robotique d'aujourd'hui, la robotique industrielle. Et donc, il y a toujours quelque chose qui déclenche une envie par une confrontation ou quelque chose. Et là-dessus, on commence à... souvent à faire des longues recherches sur le sujet, à se documenter, à lire dessus, à nous y intéresser, et petit à petit à développer un projet, une idée, comment réagir par rapport à ça, comment questionner ces technologies par exemple.

  • Speaker #1

    Il faut dire aussi que quand on a visité les usines ArcelorMittal, ce qui nous a vraiment frappé, c'est qu'il n'y avait personne. C'est-à-dire, c'était entièrement automatisé. Entièrement, il ne faut pas non plus exagérer, mais disons, il y a beaucoup, beaucoup de tâches qui sont automatisées. Et dans cette automatisation, dans ces machines qui marchent toutes seules, avec des programmes très compliqués quand même, en fait, ce qui nous fascinait, ce n'était pas du tout la robotique humanoïde, avec des espèces de robots qui imitent l'homme. Ce qui nous fascinait, c'est ce côté automation. d'un énorme process très compliqué. Et en fait, on avait envie de s'en emparer. Tout de suite, on nous a découragé en nous disant « Mais vous savez, la robotique industrielle, c'est vraiment fait pour des ingénieurs qui ont une formation. C'est vraiment fait pour des gens qui sont habitués à travailler de l'électronique. » Alors, ça nous a donné encore plus envie de s'en emparer parce que du coup, on a commencé à acheter des... des morceaux de robots, apprendre à le programmer avec des gens qui ont bien voulu nous aider, ce qui n'était pas évident parce que c'est vrai que c'est un milieu finalement très fermé au public parce que ce n'est pas du tout public. Dans la robotique industrielle, le principe, c'est que justement, il n'y a pas de public. Donc, on a commencé à travailler là-dessus et c'est un peu par hasard. C'est typiquement, par exemple, dans ce cas-là d'une œuvre comme ça, c'est un peu… Petit à petit, on va faire des recherches, on va tomber sur une chose, on va aller vers des gens qui s'y connaissent, on va retomber sur une recherche peut-être plus théorique, et puis on va en faire quelque chose qui est notre propre œuvre. Ça c'est le cas pour cette œuvre-là, mais pour une autre œuvre, ça pourrait être un peu le même process où on va aller vers les archives des architectes et on va trouver des dessins qui nous fascinent, et on va interroger des gens qui ont fait partie de ce mouvement architectural. C'est toujours une espèce de recherche à la fois, je dirais, sensible au niveau de l'image, de la picturalité de la chose, mais aussi une recherche, on pourrait dire, plus intellectuelle, de livres, d'écrits, de conférences.

  • Speaker #0

    La recherche prend vraiment un temps énorme, en fait, dans votre processus. La lecture, la documentation.

  • Speaker #1

    C'est...

  • Speaker #0

    Vous donnez une idée, c'est quoi ? C'est des semaines ? C'est des mois ?

  • Speaker #2

    Eh ben... Oui, sur deux semaines, ça c'est sûr. Après, c'est entremêlé avec peut-être aussi même une recherche, donc des lectures. Des sujets autour qui nous intéressent, aussi une recherche peut-être formelle, des expérimentations déjà dans l'atelier. C'est des choses qui se mettent en place comme ça, l'un dans l'autre. C'est rarement aussi... Je pense que maintenant, très souvent, on travaille sur des choses un peu comme ça, on continue, c'est un peu organique. C'est pas... On commence un projet et puis on recherche et puis on réhabilite. C'est plusieurs choses qui peuvent aussi se changer. Donc, c'est un processus. Mais c'est souvent quelque chose qui nous inspire, qui déclenche l'envie de faire cette recherche et qui, après, petit à petit, nous amène quelque part et on se laisse guider par ce sujet, etc. Et on développe un travail artistique autour.

  • Speaker #0

    Vous créez plusieurs œuvres en parallèle ?

  • Speaker #2

    Ça peut arriver, ça dépend. Ça dépend aussi de l'ampleur du projet. On vient de parler de Ballad of Destruction. Ça, par contre, c'est vrai qu'on a fait toute une recherche. Après, on l'a réalisé. Donc, c'était une résidence aussi de six mois. Donc, on a quand même travaillé sur une longue période sur ce projet essentiellement. Oui,

  • Speaker #1

    mais là, on s'en est arrivé. Mais après,

  • Speaker #2

    ça dépend. Mais après, il y a d'autres choses où on travaille sur différentes choses en même temps. Ça dépend.

  • Speaker #1

    Il y a des choses qu'on laisse un peu de côté, parce qu'on sent qu'on est arrivé peut-être au bout de ce qu'on pouvait faire avec, et puis on revient dessus.

  • Speaker #2

    On revient sur des choses, même des sujets qu'on s'est éloignés, et puis après on revient dessus. De toute façon, ça fait partie d'un tout, c'est pas si tranché.

  • Speaker #0

    Justement, ça a amené une des questions que j'avais ici. On imagine toujours les artistes, des gens pas pressés, un peu rêveurs et tout ça, je caricature à peine. Mais quand vous faites des commandes justement pour des institutions, des domaines publics, etc., on vous donne des designs, des cahiers de charges, c'est ultra carré en fait.

  • Speaker #2

    Pour des commandes publiques, par exemple, il y a vraiment des cahiers de charges relativement...

  • Speaker #1

    Sévènes ?

  • Speaker #2

    Oui, définis. Mais après, ceci dit, on propose un projet. après s'il est Donc, c'est une ébauche d'un projet. Après, s'il est pris, il y a quand même pas mal de temps pour le développer, pour peut-être le rediriger, le développer,

  • Speaker #1

    l'améliorer ou le continuer.

  • Speaker #2

    Donc, après, on est toujours un peu libre de notre emploi du temps. Après, c'est sûr aussi qu'on doit quand même répondre à des délais.

  • Speaker #1

    Et on se laissera un peu, les gens restent un an et demi pour les techniques.

  • Speaker #2

    Si on est programmé, il faut... On ne peut pas dire qu'on a fait un mois plus tard. Mais je dirais qu'on travaille quand même beaucoup. On est aussi passionnés par ce qu'on fait, donc on ne lâche jamais. Mais on n'arrête jamais non plus.

  • Speaker #0

    Vous faites un travail justement de commande, comme ça. Vous avez des interactions avec les services publics ou des directeurs de cours. Comment ça se passe avec eux ?

  • Speaker #1

    Alors là, on a eu très nombreuses interactions parce qu'en fait, eux, ils ne sont pas seulement demandeurs d'une œuvre, ils sont demandeurs d'un projet, maintenant de plus en plus aussi un projet qui inclut les habitants. Parce qu'en fait, peut-être parce qu'ils ont aussi envie de pouvoir défendre des œuvres face à leurs électeurs, donc on est de plus en plus confrontés à une demande des services publics de participation. mais c'est un bien grand mot parce qu'en fait on ne demande pas que le public vienne participer à l'oeuvre mais en tout cas ils demandent à être consultés ils veulent avoir leur mot à dire ils sont aussi présents parfois dans même l'oeuvre parce que dans le cas de Nantes ils sont présents dans l'oeuvre c'est tout un travail qui était une volonté de notre part c'était pas une volonté d'ailleurs du demandeur mais c'est vrai qu'il y a des endroits Il y a des endroits aussi, comment faire œuvre dans un endroit qui est parfois hostile ou qui n'est pas évident à vivre ? Comment rendre cet endroit différent ? On peut se demander ça comme artiste ?

  • Speaker #2

    Je trouve quand même qu'on a la plupart du temps une carte blanche, parce qu'il y a les œuvres dans l'espace, il y a les commandes publiques. ça sert à... un appel à projets, mais ça c'est juste une petite partie parce que d'ailleurs Nantes c'était pas le cas mais c'était à travers les voyages en Nantes et on avait carte blanche et quand on travaille avec des institutions pour une exposition dans un centre d'art, dans un PC, on a... carte blanche et après il s'établit un échange avec le curateur de l'exposition, avec aussi du coup l'équipe pour mettre le projet en place, mais il n'y a personne qui se met quand même du projet. Et quand on fait des expositions dans les galeries, c'est pareil, il y a certes un échange, mais on a quand même toujours carte blanche de faire ce qu'on veut. Il n'y a jamais personne qui est intervenu dans le travail.

  • Speaker #1

    c'est pas du tout le sujet parce que le sujet bon ou alors c'est pas du tout ce qu'on avait cru ou non c'est pas ça n'est pas rire non non c'est plus dans un dans une idée d'échangé pense que après il ya quand même des il ya quand même un budget donc c'est aussi par infini et puis il y a quand même aussi une temporalité, c'est-à-dire qu'il faut que ce soit prêt les jours de l'exposition.

  • Speaker #0

    Vous venez de parler de budget. Comment on fixe le prix d'une œuvre ? C'est peut-être une question un peu touchy dans le milieu de l'art, mais comment on peut définir que cette œuvre vaut 1 100, 100 000, 1 million ? Je ne sais pas.

  • Speaker #2

    Ça, c'est un bilan.

  • Speaker #0

    Jamais ? C'est de consulter ou ? Non,

  • Speaker #2

    non, on définit nos prix, mais après, c'est aussi une question de comment l'œuvre... Elle évolue dans un marché, ça, je ne sais pas. Ça,

  • Speaker #1

    c'est une série d'évents.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas vraiment.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il va faire qu'une œuvre fait partie tout d'un coup du patrimoine et qu'elle devient quelque chose de rare et de très demandé ? Ça, malheureusement, personne n'est en mesure de répondre, ni les artistes, ni les directeurs de musées, ni les galeristes, parce qu'en fait, personne ne sait qu'est-ce qui va devenir le patrimoine de demain. enfin je veux dire ouais Nous, on fait l'œuvre aujourd'hui. Qu'est-ce qui va faire ensuite qu'elle va prendre une énorme valeur ? Alors là, c'est un grand mystère.

  • Speaker #0

    C'est quelque chose qui vous tracasse ou pas du tout ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas vraiment quelque chose qui nous tracasse. Nous, on fait de l'art aujourd'hui. On n'est pas après...

  • Speaker #2

    Ce qui nous tracasse, c'est qu'en face des œuvres et qu'en puissant... vivre et qu'on puisse continuer à réaliser nos oeuvres. C'est-à-dire d'avoir les moyens pour faire ce qu'on a envie de faire. Après, on n'est pas... Je pense qu'on n'est jamais trop en train de se questionner comment faire pour qu'une oeuvre monte en valeur, pour qu'elle soit l'oeuvre de demain,

  • Speaker #0

    je ne sais pas. C'est Ă  tout prix, en fait. Non,

  • Speaker #2

    c'est Ă  tout prix.

  • Speaker #0

    C'est Ă  tout prix. ...

  • Speaker #2

    ça ne marche pas mieux que de ne pas plaire non je pense que de toute façon si on fait des oeuvres pour plaire à quelqu'un ça ne peut pas marcher parce qu'on fait une oeuvre qui je pense que le plus important c'est que les oeuvres qu'on fasse nous plaisent à nous et après si nous on est content avec l'oeuvre, si nous on exprime ce qu'on a envie, si on estime qu'on arrive à vraiment exprimer ce qu'on a envie d'exprimer à travers cette œuvre, je pense que c'est une œuvre réussite. Après, c'est au public de juger s'il est d'accord ou pas, mais le plus important, c'est d'être satisfait soi-même des œuvres qu'on fasse, moi je trouve.

  • Speaker #0

    Il faut s'affranchir du goût et des envies du candidaton aussi.

  • Speaker #1

    Oui, mais il n'y a pas beaucoup de... Disons que c'est rare, à part pour les œuvres très politiques, C'est rare qu'il y ait une réelle... révolte du public contre des œuvres. Le problème, je dirais, c'est plutôt son indifférence, en fait. Parce qu'il y a beaucoup d'œuvres, mais finalement, quand on voit des villes comme Bruxelles ou d'autres villes, il n'y a pas beaucoup d'œuvres dans l'espace public. L'art contemporain, l'art fait par des artistes d'aujourd'hui, n'est pas si présent que ça. Donc, en fait, notre problème, c'est de faire notre place dans tout l'univers, le bâti, l'architecture. les grandes infrastructures, les institutions, c'est de faire notre place là-dedans. Parce que l'air de rien, si jamais on regarde les grandes institutions aujourd'hui, les grandes infrastructures, il n'y a pas beaucoup d'œuvres. On n'est pas extrêmement présent. Je sais que beaucoup de gens trouvent qu'on dépense beaucoup d'argent pour les artistes, mais si jamais on regardait à l'aune de qu'est-ce que dépense un État pour ses... ces infrastructures ou ces bâtiments, l'art contemporain est quand même peu présent. Donc, nous, on essaye de faire notre place là-dedans, de montrer qu'il y a une modernité qui peut être là sans que ça pose forcément un problème énorme, et qu'au contraire. On est là pour marquer une période, parce que finalement, qu'est-ce qui va rester de cette période-là dans laquelle on vit ? Il va rester des journaux, des bâtiments, des infrastructures, plus ou moins en bon état. Mais est-ce qu'il va rester beaucoup d'œuvres ? Est-ce qu'il va rester beaucoup d'œuvres qui symbolisent cette époque ? Et c'est un peu ça le problème. C'est toujours la question de quelle va être notre place dedans. Je dis notre place en tant qu'artiste en général. parmi tous les autres artistes qu'on connaît, c'est le même problème. C'est comment faire œuvre dans une société qui a aussi plein d'autres problèmes à gérer, bien sûr.

  • Speaker #0

    Marquer son temps. Comment ? Marquer son temps.

  • Speaker #1

    Marquer son temps, et puis aussi le retranscrire, parce qu'en fait, qu'est-ce que c'est qu'une œuvre du XIXe siècle sur une place publique ? C'est une œuvre qui exprime qu'est-ce qu'était le XIXe siècle. Donc, elle a quand même... Elle a aussi une façon de raconter l'histoire de ce moment-là. Voilà.

  • Speaker #0

    Raconte,

  • Speaker #2

    oĂą chaque format donne vie Ă  une histoire.

  • Speaker #0

    Comment s'est passée la première fois où vous avez vendu une œuvre ? Vous vous en rappelez ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas si je me rappelle la première œuvre qu'on a vendue. Je ne sais pas. Mais...

  • Speaker #1

    On a vendu... C'est difficile à dire. Parce que c'est difficile de dire si jamais c'est une œuvre vendue ou si jamais c'est une institution qui a finalement accepté de la prendre dans sa collection. C'est quand même assez différent. Comme démarche ? Non, pas comme démarche, mais comme...

  • Speaker #2

    C'est une œuvre vendue.

  • Speaker #1

    C'est une œuvre vendue, c'est vrai. C'est une œuvre incontestable, on peut dire.

  • Speaker #2

    Disons que le fait de vendre une œuvre, ça fait toujours plaisir. Ça fait toujours plaisir. Ça fait plaisir qu'il y ait quelqu'un qui aime le travail au point de l'acheter. Donc, c'est quand même toujours une...

  • Speaker #1

    C'est quelque chose de joyeux.

  • Speaker #2

    C'est joyeux en dehors du fait qu'on reçoit de l'argent pour vendre une œuvre. Mais c'est aussi une forme de reconnaissance, donc une forme de succès. Donc ça, c'est toujours joyeux. De la première jusqu'à la dernière.

  • Speaker #1

    En fait, ce n'est pas seulement d'avoir de la première, c'est de continuer à en vendre.

  • Speaker #0

    Justement, toutes ces œuvres, quand elles parlent de votre atelier où nous nous trouvons actuellement, ça ne vous rend pas triste ?

  • Speaker #2

    Si, parfois, c'est vraiment difficile de se séparer des œuvres aussi.

  • Speaker #1

    Alors moi,

  • Speaker #2

    je dis,

  • Speaker #1

    tu ne la vends pas, on ne la vend pas, parce que je l'aime trop, etc. Et souvent, je dis ça. Oui.

  • Speaker #0

    Une petite collection privée alors que personne... Non,

  • Speaker #1

    en fait, non. On a des oeuvres.

  • Speaker #2

    Mais c'est vrai qu'il y a quand même des oeuvres qu'on vend malgré le fait que ces difficiles sont séparés. C'est toujours un peu comme une part de nous-mêmes qui part. C'est comme donner son bébé à quelqu'un. On espère qu'il est bien soigné, le bébé. que l'œuvre est en de bon moment et qu'elle sera respectée. Mais oui, c'est parfois dur de se séparer.

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas grave, parce que du coup, on peut en acheter d'autres Ă  d'autres artistes. Parce qu'on a aussi notre petite collection, on ne peut pas croire.

  • Speaker #0

    C'est une dynamique.

  • Speaker #1

    Comment ?

  • Speaker #0

    C'est une dynamique.

  • Speaker #1

    Oui, et puis bon, c'est vrai que même nous, en tant qu'artistes, moi je trouve ça vraiment joyeux d'acheter une œuvre à un artiste. d'aller dans une exposition et de pouvoir dire « Ah, j'aimerais vraiment bien acheter cette œuvre et je vais l'acheter. »

  • Speaker #2

    Et le fait de vendre une œuvre, ça motive aussi, dont on a du mal à se séparer, ça motive de faire une autre œuvre qu'on aime autant ou même plus.

  • Speaker #0

    C'est tout à fait une évolution.

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #0

    On en parlait justement avant l'interview. Ici, c'est votre atelier. Mais vous ne vivez pas ici, vous vivez ailleurs. C'est un choix délibéré pour une coupure vie privée-vie professionnelle ?

  • Speaker #2

    Oui, disons que c'est peut-être pas tout à fait un choix délibéré, mais ce n'est pas plus mal, parce que je pense que déjà, on est un couple qui travaille ensemble, donc on ramène quand même notre travail chez nous malgré tout. Il faut dire aussi que chez nous, dans notre appartement, on a une pièce qui est le bureau où on dessine, où on travaille sur l'ordinateur, où on réfléchit, on lit, on fait les recherches. Donc il y a déjà une forme d'atelier aussi intégré à la maison. Et c'est parfois bien aussi de pouvoir fermer une porte, marcher, arriver à un autre lieu, donc avoir cette espèce de séparation. de respirer entre... voilà, ou de rentrer chez soi et d'être baigné dans une autre ambiance. Ceci-ci, ce serait de toute façon impossible de vivre dans le même espace, vu qu'on est... quand même surtout des sculpteurs, un céramiste, qui a beaucoup de poussière, etc. Donc ce serait impossible.

  • Speaker #1

    Il respire un peu.

  • Speaker #2

    Il faudrait déjà que la maison soit sur un autre étage ou à côté. Mais...

  • Speaker #0

    Vous avez dit que vous faites tout en duo. Vous avez déjà eu des envies de faire un truc en solo ? Comme tous les groupes de rock, de temps en temps, il y en a un qui parle et qui fait un homme.

  • Speaker #1

    Alors, je ne te l'ai pas dit, mais... Non, c'est pas vrai.

  • Speaker #2

    Pas vraiment pour l'instant, mais... Non, pas vrai.

  • Speaker #1

    Non, mais pour l'instant...

  • Speaker #2

    Ce n'est pas Ă  exclure, mais pour l'instant, on ne l'a pas fait en tout cas.

  • Speaker #0

    Et vous n'avez jamais eu de panne d'inspiration ? Des moments où votre carrière est déjà maintenant assez longue ? Il n'y a pas eu des moments où on ne trouve pas ?

  • Speaker #1

    Non. En fait, on a eu de panne beaucoup de choses. Par exemple, manque de moyens.

  • Speaker #0

    Le manque de temps pour les matériaux.

  • Speaker #1

    Oui, c'est du manque de temps, je trouve. Mais en fait, le nombre de choses qu'on a envie de faire...

  • Speaker #0

    C'est plutĂ´t le contraire, en fait. VoilĂ ,

  • Speaker #1

    c'est assez problématique.

  • Speaker #2

    C'est ça. Et en plus, on a quand même... On a aussi des projets qu'on a développés, qu'on a dessinés, qu'on a écrits et qu'on n'a jamais...

  • Speaker #1

    Qu'on n'a jamais eu le temps de faire.

  • Speaker #2

    Donc, on a en plus des petits projets dans les tiroirs. que peut-être un jour ils vont se faire, mais peut-être aussi pas. Ce seront toujours des projets inachevés peut-être. Mais c'est-à-dire que parfois, j'ai l'impression qu'on n'aura pas le temps de faire toutes les choses qu'on a envie de faire. Donc c'est plutôt ça.

  • Speaker #0

    Vous n'avez jamais eu envie d'avoir une sorte de factory avec des gens qui viennent travailler avec vous ?

  • Speaker #1

    Ah non.

  • Speaker #2

    C'est-à-dire qu'on a quand même des assistants de temps en temps. on n'a pas des assistants en continu. C'est selon les projets, selon la difficulté du projet, etc. Et aussi, il y a parfois des choses qu'on fait quand même faire. Pensez à de la fonderie ou des choses comme ça. On n'est pas capable de faire ça chez nous. Mais je pense que le fait d'avoir beaucoup de gens qui t'attendent à l'atelier...

  • Speaker #1

    C'est très mieux.

  • Speaker #2

    Nous, on aime... Nous, on aime bien le faire. C'est important pour nous d'être impliqués dans le travail. Et je pense qu'il y a une espèce de pression. Enfin, ça devient industriel. Il commence à y avoir trop de gens. Je pense qu'on perd un peu le lien à l'œuvre.

  • Speaker #1

    On devient un organisateur.

  • Speaker #2

    Je trouve que c'est une autre forme de travail. Personnellement, moi et Jean aussi, on trouve que c'est important de garder le rapport à l'œuvre. Donc ça peut être avec bien sûr de l'aide de temps en temps, parce que c'est difficile de faire vraiment tout. Comme on dit, on a parfois aussi l'impression de ne pas avoir assez de temps. Mais je pense que c'est important d'avoir toujours gardé ce rapport à l'œuvre.

  • Speaker #1

    Oui, puis faire de l'organisation. Parce que quand on commence à avoir un atelier, d'arriver le matin et d'organiser les tâches, tout ça...

  • Speaker #0

    Ça devient une entreprise, en fait, plus un atelier.

  • Speaker #1

    Oui, alors... En plus, comme artiste, c'est risqué, parce que ça veut dire aussi produire tout le temps des grandes œuvres et les vendre. C'est quand même... Ça devient vraiment... Ça met une question...

  • Speaker #2

    Une question de... de production et de vente. On aime bien garder une certaine liberté avec ça. Être capable de se dire, pendant un moment, réfléchir aux choses et on n'a pas dix assistants à payer. Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est vraiment ça aussi, je pense, qui est compliqué pour des artistes qui sont comme ça dans un... dans un système très entrepreneurial, c'est que ça devient vraiment des enjeux aussi financiers sans arrêt.

  • Speaker #2

    Je pense que c'est une question de liberté. Je pense qu'on aime bien être libre, libre de décider comme ça, voilà, combien d'œuvres on fait, comment on les fait, de pouvoir expérimenter, de pouvoir prendre le temps par moments de réfléchir.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, même quand il y a des assistants, on expérimente. Parce que la dernière assistante qui était ici, on a expérimenté avec elle des choses que je ne savais pas du tout faire. Donc elle était un peu, des fois... Parce qu'il faut dire aussi une chose, c'est que... Quand on fait les choses soi-même, quand on les expérimente soi-même, il y a quand même toute une partie un peu d'erreurs, de choses qui ne marchent pas très bien. Ce n'est pas grave, parce que ce ne sont pas des enjeux énormes, donc ça va. À la fin, il faut que ça marche, mais bon, sur le moment, ce n'est pas non plus évident.

  • Speaker #2

    Il y a quand mĂŞme tous les deux des amoureux du faire.

  • Speaker #1

    Du faire. On aime bien les faire.

  • Speaker #2

    Donc, on aime bien donner la forme, être aussi dans la pratique, pas seulement dans la conception d'une œuvre, mais aussi dans la pratique de l'artiste. Donc, c'est important pour nous d'avoir ce rapport tactile peut-être à l'œuvre aussi.

  • Speaker #1

    Si on s'intéresse à la robotique, on va apprendre à programmer, mais si on s'intéresse à la céramique, on va apprendre à faire de la céramique. Peut-être qu'on ne fera pas des milliers de choses dans notre vie, mais en tout cas, ça. On le sait. Voilà.

  • Speaker #0

    Il me reste à vous poser la dernière question qui est la même pour tous nos invités. Qui voudrait entendre, voir, lire dans Raconte à votre place ?

  • Speaker #2

    Comment ?

  • Speaker #1

    Qui on aimerait ?

  • Speaker #0

    Qui voudrait Ă  votre place, qu'on pourrait inviter Ă  venir expliquer son travail,

  • Speaker #1

    sa vie ? Moi, je pense à quelqu'un, en tout cas au Luxembourg, que je trouve qui est un vrai témoin de ce qui s'est passé disons les 20 dernières années dans l'art contemporain et dans aussi dans le théâtre dans le dans le théâtre dans l'art dans beaucoup de choses justement dans le milieu culturel c'est josé hamza on la connaît ben je trouve que c'est quelqu'un de très oui alors puisqu'il maintenant à une autre pratique au ministère mais c'est intéressant c'est quelqu'un qui a vraiment navigué dans pas mal de gens disent moi aussi avec moi et l'analyse mais voilà Après, il y a d'autres gens comme artistes.

  • Speaker #0

    Ça peut être autre chose que d'apprendre d'autres choses. Ah oui, ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    C'est typiquement le genre de truc, sur le moment, j'ai un blackout.

  • Speaker #0

    C'est une question très difficile.

  • Speaker #2

    Mais après, si je réfléchis, je vais peut-être donner d'autres personnes vraiment que j'aimerais, parce qu'il y a plein de gens que j'aimerais savoir. ce qu'ils ont raconté. Il me faudrait un moment de réflexion, mais plus qu'à une minute, parce que là, c'est trop de pression.

  • Speaker #0

    On en reparlera plus tard. Il me reste Ă  vous remercier. Merci beaucoup Martine, merci beaucoup Jean.

  • Speaker #1

    Merci Ă  toi.

  • Speaker #2

    C'était très agréable d'avoir cette interview. Merci.

  • Speaker #1

    Raconte, s'écoute,

  • Speaker #2

    s'élie. et c'est un câble.

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Description

🎨 Feipel & Bechameil : Devenir artiste contemporain aujourd’hui

Dans cette interview exclusive réalisée dans leur atelier à Bruxelles, le duo d’artistes Feipel & Bechameil nous ouvre les portes de leur univers créatif.

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Ils reviennent également sur un moment fort de leur carrière : leur participation à la Biennale de Venise, où ils ont représenté le Luxembourg.


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  • Speaker #0

    Merci pour votre écoute. Retrouvez nos photographies et écrits sur raconte.media ainsi que sur nos réseaux sociaux. Raconte est une création originale d'Anthony Dehé et Michel Bourgeois, du studio DB Création, spécialisé en design de marques et photographies. Vous avez apprécié cette rencontre ? Partagez-la sur vos réseaux sociaux et laissez-nous une note sur votre plateforme préférée. Cela contribue réellement à la visibilité de Raconte. Une suggestion d'invité ? Écrivez-nous.

  • Speaker #1

    qu'une oeuvre de fait pas c'est parti d'un coup du patrimoine avec elle devient quelque chose de rare et de très demandé ça malheureusement personne n'est en mesure de répondre ni les artistes ni les directeurs de musées ni les galeristes parce qu'en fait personne ne sait qu'est ce qui va devenir le patrimoine de demain. À Venise, beaucoup d'artistes finissent ruinés. C'est pas bon ? Il y a même des artistes qui ont dû... Je crois que c'est l'artiste de Salvador qui a dû revendre son million d'or pour pouvoir payer ses dettes.

  • Speaker #2

    Non, je pense que de toute façon, si on fait des œuvres pour plaire à quelqu'un, ça ne peut pas marcher. Parce qu'on fait une œuvre qui... Je pense que le plus important, c'est que les œuvres qu'on fasse nous plaisent à nous.

  • Speaker #0

    Raconte la rencontre Bonjour Martine Faypel, bonjour Jean-Béchamel, bienvenue sur Raconte.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Est-ce que je pourrais vous demander de vous présenter en quelques mots ? Que faites-vous ? Qui êtes-vous ?

  • Speaker #2

    On est un couple d'artistes, donc on est un couple dans la vie et dans le travail. Depuis 16 ans, on fait de l'art, des installations, des sculptures, de la céramique, des dessins, différents médiums.

  • Speaker #1

    On travaille surtout... On a une pratique d'atelier, on peut dire, comme on voit ici. Donc on fait souvent des choses nous-mêmes, mais pas que. Et puis on aime bien expérimenter avec des médias très différents. Ça peut être de la vidéo, ça peut être de la robotique, ça peut être de la céramique. Donc voilà, on n'a pas vraiment... Comment dire, on a plusieurs médias de prédilection, mais on n'est pas spécialisés dans une chose.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on peut dire un peu, pour contextualiser, oĂą nous nous trouvons actuellement pour cet enregistrement ?

  • Speaker #2

    On se retrouve dans notre atelier qui est à Bruxelles, où on fait une grande partie de nos œuvres sont produites ici.

  • Speaker #0

    Et je crois savoir que vous êtes luxembourgeoise. Et française, si je ne me trompe pas, c'est bien ça. Comment ça se fait que vous vous retrouvez à Bruxelles ?

  • Speaker #1

    Alors, en fait, on a habité dans pas mal de capitales. Martine, tu as habité à ?

  • Speaker #2

    À Londres, à Berlin, à Strasbourg, un peu en Italie. Et Jean, il a habité...

  • Speaker #1

    À Copenhague. à Paris, puisque je viens de Paris, et dans d'autres villes aussi. Donc, on s'est dit qu'on essaierait de trouver une ville ensoleillée, plutôt chaude, comme ça, pas loin de la mer.

  • Speaker #0

    C'est complètement réussi, on peut le dire.

  • Speaker #1

    VoilĂ , des Bruxelles, c'est parfait.

  • Speaker #2

    Non, mais on avait envie de s'installer dans un endroit où aucun de nous deux n'avait vécu avant. Et puis on a fait un travail à Bruxelles, on a adoré Bruxelles. Aussi par ce mélange de cultures, entre une culture latine et une culture nordique, plus avec la culture flamande. Et puis du monde qui vit à Bruxelles, qui vient de partout, une scène artistique vraiment bien fournie. Donc on était tombés amoureux de Bruxelles. on s'est installé ici.

  • Speaker #0

    C'est le fameux meeting pot, comme on dit, qui vous a séduit en fait.

  • Speaker #1

    Oui, il y a quand même une communauté d'artistes ici qui est assez importante, donc on peut confronter nos idées avec d'autres gens aussi.

  • Speaker #0

    Vous faites ça souvent ?

  • Speaker #1

    Oui, on fait un bar clandestin pendant le Covid ici, avec des... Enfin, clandestin, je m'entends, mais en tout cas, on a des scripts.

  • Speaker #2

    On l'a appelé comme ça.

  • Speaker #1

    On l'a appelé comme ça pour rigoler, quoi.

  • Speaker #2

    Toujours quand il y a des petits groupes d'artistes, on a discuté, on a vu des coups ensemble,

  • Speaker #0

    comme ça. Mais ça a débouché sur des collaborations, des œuvres ?

  • Speaker #2

    Comment ?

  • Speaker #0

    Ça a débouché sur des collaborations, des œuvres ?

  • Speaker #2

    Pas forcément, mais il y a eu des... On a discuté d'œuvres communes, en partie. Ça n'a pas forcément abouti jusque-là, c'est quand même important de confronter ces idées et d'avoir cet échange. Même si ça n'aboutit pas, c'est riche en débats et en confrontations.

  • Speaker #1

    Ça aboutit sur des sacrées discussions.

  • Speaker #0

    Pour en revenir à vous, quels sont vos cursus ? Comment on devient artiste contemporain ? Parce que ce n'est pas très courant. Dites-moi un peu comment on arrive là.

  • Speaker #2

    Je pense que J'ai été attirée par l'art dès la jeunesse, je pense. J'ai eu une mère qui peignait, un oncle qui peignait, mais pas professionnellement. Il y a une curiosité qui s'est éveillée par rapport à ça. Après, j'ai fait des études d'art. D'abord à Strasbourg, et après j'étais à Berlin et à Londres. J'ai fait un master en fine art. Et c'était aussi, je pense qu'en dehors des écoles, c'est une façon aussi de voyager dans des endroits, de rencontrer différents points de vue à travers les écoles, mais aussi à travers les élèves. À Berlin, les profs étaient des artistes qui racontaient un peu de comment ils faisaient les expositions. À Londres aussi, etc. Donc, c'est vraiment petit à petit, comprendre de quoi il s'agit, faire des expositions déjà en tant qu'étudiant. Et voilà, on a commencé à faire de l'art. Et puis, jamais lâcher, surtout. C'est une forme de persévérance. C'est sûr, peut-être, un peu d'entêtement de continuer à le faire, parce qu'il y a certainement au début des moments où ce n'est pas si évident.

  • Speaker #0

    Il faut être entêté pour être artiste.

  • Speaker #2

    Un peu, je pense, oui. C'est quelque chose, on est porté par une envie de le faire. Donc, c'est plus fort qu'il reste.

  • Speaker #0

    Et comment on gère cette envie au quotidien ?

  • Speaker #1

    Il faut déjà trouver des gens qui en ont envie aussi avec vous, parce que c'est quand même déjà suffisamment solitaire comme ça. Donc après, il faut pouvoir exposer ses œuvres, les vendre, les montrer. Donc il y a aussi peut-être trouver des gens qui ont un regard sur notre œuvre, qui ne soit pas uniquement nous, parce que sinon c'est un peu triste. Mais ça c'est tout un travail aussi. Faire des expositions, montrer son travail dès qu'on peut. C'est comme ça que ça commence, en fait. En fait, c'est souvent le début d'une vie d'artiste, c'est vraiment sauter sur la moindre occasion de montrer son travail. Et petit à petit, les gens vous connaissent, ils vous réinvitent. C'est comme ça que ça se fait petit à petit. Mais c'est vrai qu'au début, il y a tout à... Au début, on se demande vraiment pour quelle raison les gens montreraient votre travail dans tout ce qu'il y a déjà à montrer. Et finalement, en fait, ça arrive.

  • Speaker #2

    Après, en plus, on est un couple, donc c'est aussi le travail qui fait partie de notre vie. Pas seulement quand on est à l'atelier. On rentre avec nos idées, nos discussions, nos inquiétudes, nos envies à la maison. On continue à en discuter. C'est quelque chose qui occupe notre vie du matin au soir. Mais c'est aussi passionnant parce qu'on fait un travail où on réalise nos rêves. C'est quand même une chance. C'est un privilège.

  • Speaker #0

    On va y revenir. Peut-être juste pour faire une parenthèse, le cursus de Jean, c'était quoi ? Alors,

  • Speaker #1

    aucun cursus. J'ai été un peu invité dans des cursus, disons, de beaux-arts, etc. Mais en réalité, ma pratique vient surtout du cinéma. J'ai travaillé dans le cinéma assez longtemps.

  • Speaker #0

    À quel poste ?

  • Speaker #1

    Dans la décoration.

  • Speaker #0

    OK.

  • Speaker #1

    et en fait J'avais participé à l'aventure de Lars von Trier pendant toutes les années 90 et j'habitais au Danemark à ce moment-là. Donc j'ai fait pas mal de décors pour toute cette mouvance du cinéma scandinave.

  • Speaker #0

    Ça a été découvert par le grand public finalement, cette époque-là de cinéma scandinave. Voilà,

  • Speaker #1

    à l'époque il n'y avait un peu que Bill August qui était connu et puis est arrivé Trier, Winterberg, toute une génération de jeunes cinéastes qui... qui avaient une façon complètement différente de faire des films et aussi de voir le décor, de voir l'environnement autour d'un script qui était quand même assez intéressant. Et voilà, j'ai eu la chance de participer à ça. Donc ça m'a permis aussi peut-être d'avoir une approche de ma pratique en tant qu'artiste qui était être porté sur la scénographie, sur l'espace, sur le sur l'environnement dans lequel on était, etc., qui était peut-être moins de l'ordre de l'objet ou de l'ordre de la peinture, par exemple. Mais même si jamais, tout ça, c'est des choses qui se rejoignent.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on verra peut-être un peu plus loin. Vous êtes multidisciplinaire, on peut dire ça. Vous n'avez pas un médium sur lequel vous êtes arrêté. Vous avez plusieurs médiums, plusieurs matières, etc. Je pense qu'on va en parler un peu plus loin. Oui. Non, Pour revenir au côté première fois, vous vous êtes rencontrés comment ?

  • Speaker #2

    Alors, on s'est rencontrés dans une fête. Et voilà, donc on est tombés amoureux. On a d'abord été amoureux l'un de l'autre. Et dans nos discussions des premiers jours, des premières semaines, à travers nos discussions, on a inventé des projets ensemble. Et au bout d'un mois, on a fait la première œuvre ensemble qui s'appelle « Peste et choléra » ,

  • Speaker #0

    Jean et moi.

  • Speaker #2

    C'était très optimiste à l'époque. Oui, je pense que c'était très électrique. On est tout de suite tombés amoureux et tout de suite, on avait envie de plein de choses. Et puis, on l'a fait. On était tout de suite dans une sorte d'action, dans une énergie très… très dynamique et puis on n'a jamais arrêté en fait.

  • Speaker #0

    C'était vers quelle année ça ?

  • Speaker #2

    C'était en 2008.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    On a fait la première œuvre en fait à Copenhague dans mon atelier. Et voilà, à l'époque on ne savait même pas vraiment où on allait habiter puisqu'on était tous les deux à moitié en transit. Et c'était un peu... Bon, on va faire l'œuvre, on va la montrer là, après on est partis travailler. à Trinidad. Ensuite, on est allés en Islande. Donc, c'était assez...

  • Speaker #2

    On a fait plein de voyages ensemble. On a un peu travaillé aussi dans le cinéma ensemble. Mais assez rapidement, on a quand même donné la priorité à l'art. Et puis, on a eu plein d'expositions, et puis ça s'est enchaîné. On n'a jamais arrêté.

  • Speaker #0

    Ça a dû être une nourriture intellectuelle formidable, tous ces voyages dans tous ces lieux. Oui,

  • Speaker #2

    c'est vrai. Parce qu'aussi, Comme l'a déjà dit Jean, on est des curieux de l'espace. Je pense qu'on a souvent une envie de comprendre comment les sociétés marchent sociologiquement, politiquement, même architecturalement, etc. Et donc, à travers ces voyages, on découvre plein de choses, on se confronte à d'autres façons de vivre. Et puis voilà, on a tout de suite aussi intégré dans nos discussions, dans nos échanges, dans notre travail. Et c'est clair que c'est riche de pouvoir voyager ensemble. Et le fait de travailler ensemble, c'est aussi de faire tous ces voyages ensemble et d'être immédiatement dans un échange autour.

  • Speaker #1

    C'est d'agréable de travailler dans beaucoup de ces pays. Donc c'est aussi assez différent que juste voyager parce qu'on a quand même été confronté aux scènes locales, avec des gens qui vivaient sur place. C'était quand même d'assez longue période, ce n'était pas juste des voyages de trois semaines.

  • Speaker #2

    Oui, c'était des voyages de trois mois. Donc c'est déjà une autre façon de vivre ces espaces.

  • Speaker #0

    Vous étiez dans des ateliers ? Pratico-pratique, vos voyages, vous étiez en résidence, atelier ?

  • Speaker #2

    Alors, ce n'était pas des résidences. On a travaillé sur des films, donc on a un atelier où on réalisait des choses pour le film ou dans des résidences pour nous-mêmes. Ça, ça dépend. Au début, c'était vraiment relativement entremêlé et après, ça s'est cristallisé sur... sur notre carrière d'artiste.

  • Speaker #0

    Justement pour en venir à ça, vous étiez, on va dire, comment dire, de manière légèrement péjorative, vous étiez sur une production plutôt alimentaire, dans vos métiers de décorateur, etc. Et comment ça s'est passé le changement pour devenir artiste, vraiment, je deviens artiste ? À quel moment ?

  • Speaker #2

    Disons que peut-être c'est un peu différent pour Jean que pour moi, parce que... Moi, c'était vraiment depuis toujours, c'était être artiste. Quand on s'est connus, on a travaillé sur des films ensemble, mais moi, j'ai jamais arrêté, on n'a jamais arrêté de faire des œuvres. Alors que pour Jean, c'est peut-être plus mélangé.

  • Speaker #1

    Mélangé, oui. Et puis petit à petit, on a eu des galeries qui se sont intéressées à notre travail. On a eu des institutions qui ont...

  • Speaker #0

    Comment la rencontre se fait justement avec les galeries, etc. ? Ils viennent Ă  une expo ?

  • Speaker #1

    Ils viennent à une expo et ils voient les œuvres qui, pour eux, pourraient être des œuvres collectionnées. Je pense que c'est comme ça qu'ils voient la chose. Soit parce que c'est de... ça correspond à un moment où c'est aussi ça correspond à une qualité peut-être du 2,2 de l'oeuvre je sais pas trop mais en tout cas ce qui est certain c'est que on n'a pas nous fait une démarche vraiment vers les galeries c'est plutôt les galeries qui sont venus et qui nous ont demandé travailler avec nous parce que ce qui se passe souvent c'est que c'est eux ils sont submergés d'artistes on peut dire et donc c'est un peu eux qui font le tri en fait c'est un peu Donc c'est vrai que les galeries, même les institutions, ça vient petit à petit aussi à travers les concours, parce qu'on a fait pas mal de concours. On a fait quand même quelques concours où on a gagné, et donc après on a eu la chance de représenter par exemple le Luxembourg à la Biennale de Venise, ou des choses comme ça, qui sont quand même des concours dans lesquels il faut s'investir sans savoir si jamais ça va marcher ou pas.

  • Speaker #0

    Et comment vous y prenez pour participer à un concours ? C'est des cahiers des charges ? Vous scrutez un peu ça et puis vous dites, tiens, ça c'est compatible avec notre approche ?

  • Speaker #2

    Oui, c'est toujours, on fait un concours parce qu'il y a quand même quelque chose qui nous intéresse particulièrement dans ces concours-là, parce que c'est proche de notre sensibilité ou de notre réflexion, etc. On n'en fait peut-être pas tant que ça quand même des concours, mais de temps en temps. Mais après, c'est vrai que je pense qu'au début, on en a fait. Et après, c'est aussi des choses qui se mettent un peu en place où les gens nous contactent. Et bon, c'est un mélange.

  • Speaker #0

    Vous venez de Paris, justement, de la Biennale de Venise, où vous avez représenté le Luxembourg. C'est un événement majeur sur la scène mondiale de l'art contemporain. Ça change tout dans une carrière ou pas tant que ça ?

  • Speaker #2

    Si, oui, ça change parce que d'abord, c'est quand même... Disons, on a fait la Biennale de Venise en 2011. On avait tous les deux depuis des années une pratique artistique, mais on était un couple d'artistes depuis 3 à 4 ans, 3 ans. et donc On était connus dans un certain milieu, mais le fait d'être à Venise, ça crée une visibilité vraiment mondiale. Il y a quand même des gens du monde entier qui viennent voir la Biennale. Et ça, on n'en aura pas profité en montrant notre travail là où on l'a montré avant, c'est-à-dire au Luxembourg, en Belgique. Ça donnait tout de suite une ampleur plus vaste quand même à notre travail.

  • Speaker #1

    Et puis c'était un succès.

  • Speaker #2

    Oui, c'est quand même, on a eu vraiment un vrai retour avec beaucoup d'articles, beaucoup de demandes après, donc ça nous a tout de suite positionnés quelque part. Donc après, c'est aussi une suite de continuer.

  • Speaker #1

    Après, il fallait continuer, ce qui n'est pas évident, parce que la Biennale de Venise, c'est un événement majeur, mais qui... qui n'est pas un événement commercial. Donc après, il faut trouver un moyen de rebondir, de pouvoir en vivre après, ce qui n'est pas évident. Parce que c'est la Biennale de Venise, beaucoup d'artistes finissent ruinés en fait. C'est un bon moment. Oui, il y a même des artistes qui ont dû, je crois que c'est l'artiste du Salvador qui a dû revendre son million d'or pour pouvoir payer ses dettes. Et en fait, c'est vrai que c'est un peu le problème des grandes manifestations. Comme ça, ce n'est pas du tout destiné à commercialiser des œuvres. Donc après, il faut trouver un moyen de rebondir, de trouver des gens qui vont vous inviter à d'autres choses, etc. Tout de suite, parce que si jamais on a la chance que ça marche, c'est bien. C'est vraiment une bonne chose.

  • Speaker #0

    Et là, c'est plus la rencontre avec le marché des arts, des galeristes et marchands qui doit se faire. Oui,

  • Speaker #1

    et aussi les institutions. Parce que les institutions comptent aussi énormément. Il faut pas... rencontrer que le marché de l'art dans une carrière d'artiste, c'est un peu de...

  • Speaker #2

    Follé de...

  • Speaker #1

    Follé de quoi ? C'est toujours pareil, parce que c'est un peu... Les institutions, elles ont ainsi un rôle important dans l'art. C'est quand même elles qui vont investir dans des grandes productions et puis qui vont montrer aussi à un public beaucoup plus large que le marché lui-même. Donc ça, c'est important. Peut-être... à un public beaucoup plus hétéroclite que ne l'est le marché des foires et des galeries.

  • Speaker #0

    C'est quelque chose qui vous tient à cœur, de toucher des gens qui ne sont pas de prime abord clients d'art contemporain ?

  • Speaker #2

    Oui. Nous, quand même, dans notre travail, d'abord, on adore faire aussi des installations ou des œuvres qui répondent à un contexte et qui est vraiment dirigé à un public. Donc, ça c'est vraiment, je pense, l'essence de notre travail, c'est aussi le travail avec les lieux. On a fait quand même beaucoup d'œuvres aussi dans l'espace public et souvent aussi une façon dans notre œuvre d'intégrer le public dans nos œuvres. Donc, c'est important de toucher, de pouvoir aussi toucher les gens qui ne vont peut-être pas avoir des musées. Donc voilà, c'est... Ouais.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'il y a un côté assez ludique dans votre travail. Ce sont des œuvres que l'on peut toucher, parfois même monter dessus. Je parle des œuvres extérieures, etc., les grands formats. Ce n'est pas une œuvre qui est dans un musée derrière une vitrine de l'AD. Le public peut avoir vraiment une connexion au sens propre du terme avec vos œuvres.

  • Speaker #2

    Oui, parce que je pense qu'aussi, pour nous, c'est important que ce ne soit pas seulement une expérience intellectuelle et conceptuelle par rapport à l'œuvre, mais aussi... Une expérience physique et visuelle, mais physique aussi, et puis ce rapport social au public qui nous est cher. Donc oui, on a fait des œuvres qui peuvent aussi servir d'assises, ou on a fait des œuvres comme les brutalistes qu'on a faits, qui sont installés de façon... définitive à Nantes. C'est des grandes sculptures en béton et en pierre de lave émaillée. Mais à l'intérieur des sculptures, il y a des fours à pizzas. Et c'était vraiment pensé pour que les gens du quartier se réunissent autour de ces œuvres. Ils font des pizzas et il y a un partage. Il y a aussi une inclusion sociale par rapport à ce travail et une convivialité qui se crée dans le quartier. Du coup, c'est une façon aussi de désacraliser. Une œuvre qu'on ne peut pas toucher, mais qui sert, qui devient en fait part du quotidien et qui met aussi l'homme au centre de cette attractivité autour de l'œuvre. Et ce n'est pas du coup seulement une œuvre contemplative, ça peut l'être aussi parce que c'est une sculpture, c'est aussi une forme plastique qui est développée, qui nous est chère. qui fonctionne en tant que juste sculpture. Mais c'est aussi important, du coup, c'est intéressant de basculer dans quelque chose où ça devient vivant, il y a du feu aussi sur la place, mais des bûches, du coup, c'est vraiment...

  • Speaker #0

    On se rapproche un petit peu du design industriel, un peu, en faisant ça.

  • Speaker #2

    Oui, c'est peut-être pas du design, mais oui, ça se rapproche dans un sens du design.

  • Speaker #1

    De toute façon, ce n'est pas non plus des œuvres qu'on va reproduire à l'infini. Cette expérience-là à Nantes, ce sera une autre expérience à Bastogne, une troisième à Toulouse où on fait une station de métro. À chaque fois, c'est des idées assez différentes, mais toujours tournées vers le public. Mais ce n'est pas une série de... de choses qui vont être tournées vers une grande production.

  • Speaker #0

    Et quand c'est comme ça, vous rencontrez les habitants des quartiers dans lesquels va finir l'œuvre ? Oui. Il y a un échange qui se fait ?

  • Speaker #1

    C'est ça. On a travaillé avec les enfants du quartier pour décider un peu justement de la forme et de la couleur de l'œuvre. On avait fait tout un camp de vacances avec eux. À Toulouse, là, c'est vraiment un dialogue avec déjà les gens qui construisent le métro parce que là, on vient complètement en amont. de la construction du métro, c'est-à-dire qu'en fait on a travaillé sur la station avant même qu'elle soit construite, qu'elle sorte de terre, et donc là on pouvait vraiment modifier un peu la construction elle-même du métro, un peu dans la mesure où c'était.

  • Speaker #2

    Oui parce qu'on a eu vraiment un échange, parce que le bâtiment n'était pas encore dessiné. C'est-à-dire qu'il était prédessiné, mais il n'était pas fini. Donc, on a fini les cahiers de charge en même temps que les architectes. Et ça, c'était intéressant dans le dialogue de pouvoir vraiment implémenter l'œuvre en échange avec les architectes.

  • Speaker #1

    Et puis, on va travailler justement sur toute la fréquence des métros. Donc, l'œuvre qui est un bas-relief, elle va être en mouvement un petit peu avant que la rame arrive dans la station. pour signaler son arrivée éminente de chaque côté. C'est tout un travail aussi sur le mouvement, sur ce côté très erratique du métro, très quotidien, avec des mouvements dans la structure elle-même.

  • Speaker #2

    C'est une œuvre interconnectée sur le système du métro.

  • Speaker #0

    Une question que je vais vous poser par rapport Ă  Adia. On n'arrĂŞte pas d'en parler en ce moment. Est-ce que c'est quelque chose que vous pensez utiliser dans votre pratique artistique un jour ?

  • Speaker #1

    On l'utilise dans les mouvements. Parce que nous, on utilise de la robotique qui se sert de l'IA. On n'utilise pas pour fabriquer des œuvres. Mais disons qu'on l'utilise effectivement dans certains mouvements de robotique qui sont très compliqués. La programmation, c'est nous qui la faisons. Mais une partie des corrections du moteur et des mouvements se fait avec l'IA. Ce qui va être assez compliqué.

  • Speaker #2

    Oui, c'est des moteurs robotiques et c'est des moteurs industriels, ce qui nous ramène peut-être au côté industriel. L'industrie, c'est quelque chose qui nous intéresse aussi. C'est-à-dire aussi la technologie, l'industrie. C'est-à-dire que notre travail, c'est quand même, d'une certaine manière, toujours une réflexion sur la modernité et comment cette modernité, à travers... la technologie, l'architecture, ces idéologies, a changé notre rapport à l'espace, au monde, à l'autre, aussi à la nature. Et donc, souvent, on essaie de s'approprier les moyens de cette modernité, ce qu'on a fait avec la robotique.

  • Speaker #1

    C'est juste qu'on a fait aussi à Ibiza, on a scanné un bâtiment d'un architecte José Luisert, qui était un des symboles de la modernité, aussi un grand ami de Le Corbusier, on l'a en fait scanné avec un laser assez perfectionné, qui sert normalement dans l'industrie à scanner des grands bâtiments industriels. Et en fait, là, on voulait s'en servir justement pour que le spectateur voit le bâtiment tel qu'il l'était à ce moment-là, parce qu'en grande partie, il va être démoli petit à petit.

  • Speaker #2

    Il faut garder une trace patrimoniale de ce bâtiment,

  • Speaker #1

    mais c'est une trace complètement emblématique de l'île.

  • Speaker #0

    L'idée de la trace, l'idée du temps qui passe, c'est quelque chose qui vous inspire au quotidien dans vos œuvres ?

  • Speaker #2

    Oui, je pense que le temps, dans une sorte même... Oui, le temps... Jouer avec une sorte d'intemporalité ou le temps qui passe, etc. Oui, c'est très présent ce que travaillent quand même les temporalités et comment modifier aussi ces temporalités.

  • Speaker #1

    En plus, on a souvent un travail d'archives, en fait, parce que, par exemple, quand on avait fait tout le travail sur les grands ensembles et les logements sociaux, on avait essayé d'aller vers les... les plans de l'époque qui étaient des plans avant AutoCAD. Donc, c'est très curieux de s'imaginer. Les plans en papier. Les plans en papier, ce qui est assez curieux, quand on imagine les grandes cités des années 70-80, n'ont en fait pas été dessinées par ordinateur. Et alors, on a eu accès à ces archives qui nous ont été exceptionnellement ouvertes et qui sont des archives dont des architectes, les architectes de ces années. donc euh 60-70, début des années 80, sont maintenant à la retraite et ils donnent volontairement leur fonds de dessins et de documents à cette bibliothèque. Et donc, c'est très intéressant parce que c'est vraiment le projet brut. Qu'est-ce qu'était un projet d'habitat social dans les années 70 ? Comment il a été dessiné ? Là, on en voit… Là, ce n'est pas du tout quelque chose de…

  • Speaker #0

    Il y a des grandes notions sociologiques de l'époque aussi. Oui, c'est intéressant.

  • Speaker #2

    C'est peut-être aussi pour ça qu'on avait envie de retourner vraiment au début de cette modernité, parce que c'est vraiment la modernité qui contient encore ce rêve d'un meilleur monde possible à travers ces nouvelles architectures, etc. Donc, c'est vraiment une utopie et ça se retrouve. dans ses bâtiments, dans ses dessins des bâtiments, etc. Donc, c'est ça qui nous a beaucoup fascinés, l'œuvre à monde parfait qu'on a fait.

  • Speaker #1

    En plus, pour nous, c'était un peu la première fois dans l'histoire qu'on était face à du monumental fait pour la classe populaire. Parce qu'en fait, il n'y a pas vraiment d'architecture monumentale pour les classes populaires avant. Il n'y a pas d'exemple, les petites maisons où... où les petits immeubles de trois étages, ce n'est pas réellement monumental, mais une barre d'immeubles. quand c'est reproduit de façon sérielle avec 4000 logements, ça a quand même quelque chose de, même, on peut dire, politiquement, un peu effrayant. Et d'ailleurs, c'est ce qui s'est passé, parce que politiquement, ça a été vraiment des endroits très vilipendés. On a souvent parlé de ces cités comme des cités qui sont hors contrôle,

  • Speaker #0

    etc.

  • Speaker #1

    Et donc, ça a été pour nous un véritable retour à quelles étaient les vraies idées derrière. Surtout que moi, j'ai grandi dans une barre. C'est quand même une expérience que j'ai vraiment eue de première. C'est quand même intéressant comme mouvement architectural, d'autant plus qu'ils sont en grande partie en cours de démolition. Il y a quand même beaucoup de ces barres qui se font exploser à l'heure actuelle.

  • Speaker #2

    Raconte la forme avec le fond.

  • Speaker #0

    On vient de parler en détail de ce qui vous inspire, entre autres. Mais comment, pratiquement, vous y prenez pour créer une nouvelle œuvre ? Comment ça se passe, ce processus créatif ? Vous levez le matin, je crée une œuvre, comment ça se passe ?

  • Speaker #1

    C'est marrant parce qu'on me pose souvent cette question. Et en fait, c'est un peu difficile à répondre parce que c'est vraiment un processus étrange où on discute d'un projet, on revient dessus, en...

  • Speaker #2

    C'est quand même... Ça part quand même d'un sujet qui nous passionne. Par exemple, quand on a commencé à travailler sur la robotique, parce qu'on a eu une résidence au Luxembourg sur un site industriel à Belleval. Et donc, on était confrontés à ces éléments qu'on connaissait très bien. C'est au fourneau de l'industrie sidérurgique du Luxembourg. qui sont obsolètes maintenant, mais il y a quand même encore l'industrie. Quand on a visité l'usine ArcelorMittal, etc. Il y a une fascination pour ces géants du passé, ces hauts fourneaux, ces bêtes presque. Ça paraît comme des bêtes, parce que c'est des espèces de monstres d'industrie. Et l'automation dans l'usine à côté. Ce qui nous a donné envie de travailler avec la technologie, de faire une réflexion là-dessus et de travailler avec, de répondre à cette industrie du passé avec la robotique d'aujourd'hui, la robotique industrielle. Et donc, il y a toujours quelque chose qui déclenche une envie par une confrontation ou quelque chose. Et là-dessus, on commence à... souvent à faire des longues recherches sur le sujet, à se documenter, à lire dessus, à nous y intéresser, et petit à petit à développer un projet, une idée, comment réagir par rapport à ça, comment questionner ces technologies par exemple.

  • Speaker #1

    Il faut dire aussi que quand on a visité les usines ArcelorMittal, ce qui nous a vraiment frappé, c'est qu'il n'y avait personne. C'est-à-dire, c'était entièrement automatisé. Entièrement, il ne faut pas non plus exagérer, mais disons, il y a beaucoup, beaucoup de tâches qui sont automatisées. Et dans cette automatisation, dans ces machines qui marchent toutes seules, avec des programmes très compliqués quand même, en fait, ce qui nous fascinait, ce n'était pas du tout la robotique humanoïde, avec des espèces de robots qui imitent l'homme. Ce qui nous fascinait, c'est ce côté automation. d'un énorme process très compliqué. Et en fait, on avait envie de s'en emparer. Tout de suite, on nous a découragé en nous disant « Mais vous savez, la robotique industrielle, c'est vraiment fait pour des ingénieurs qui ont une formation. C'est vraiment fait pour des gens qui sont habitués à travailler de l'électronique. » Alors, ça nous a donné encore plus envie de s'en emparer parce que du coup, on a commencé à acheter des... des morceaux de robots, apprendre à le programmer avec des gens qui ont bien voulu nous aider, ce qui n'était pas évident parce que c'est vrai que c'est un milieu finalement très fermé au public parce que ce n'est pas du tout public. Dans la robotique industrielle, le principe, c'est que justement, il n'y a pas de public. Donc, on a commencé à travailler là-dessus et c'est un peu par hasard. C'est typiquement, par exemple, dans ce cas-là d'une œuvre comme ça, c'est un peu… Petit à petit, on va faire des recherches, on va tomber sur une chose, on va aller vers des gens qui s'y connaissent, on va retomber sur une recherche peut-être plus théorique, et puis on va en faire quelque chose qui est notre propre œuvre. Ça c'est le cas pour cette œuvre-là, mais pour une autre œuvre, ça pourrait être un peu le même process où on va aller vers les archives des architectes et on va trouver des dessins qui nous fascinent, et on va interroger des gens qui ont fait partie de ce mouvement architectural. C'est toujours une espèce de recherche à la fois, je dirais, sensible au niveau de l'image, de la picturalité de la chose, mais aussi une recherche, on pourrait dire, plus intellectuelle, de livres, d'écrits, de conférences.

  • Speaker #0

    La recherche prend vraiment un temps énorme, en fait, dans votre processus. La lecture, la documentation.

  • Speaker #1

    C'est...

  • Speaker #0

    Vous donnez une idée, c'est quoi ? C'est des semaines ? C'est des mois ?

  • Speaker #2

    Eh ben... Oui, sur deux semaines, ça c'est sûr. Après, c'est entremêlé avec peut-être aussi même une recherche, donc des lectures. Des sujets autour qui nous intéressent, aussi une recherche peut-être formelle, des expérimentations déjà dans l'atelier. C'est des choses qui se mettent en place comme ça, l'un dans l'autre. C'est rarement aussi... Je pense que maintenant, très souvent, on travaille sur des choses un peu comme ça, on continue, c'est un peu organique. C'est pas... On commence un projet et puis on recherche et puis on réhabilite. C'est plusieurs choses qui peuvent aussi se changer. Donc, c'est un processus. Mais c'est souvent quelque chose qui nous inspire, qui déclenche l'envie de faire cette recherche et qui, après, petit à petit, nous amène quelque part et on se laisse guider par ce sujet, etc. Et on développe un travail artistique autour.

  • Speaker #0

    Vous créez plusieurs œuvres en parallèle ?

  • Speaker #2

    Ça peut arriver, ça dépend. Ça dépend aussi de l'ampleur du projet. On vient de parler de Ballad of Destruction. Ça, par contre, c'est vrai qu'on a fait toute une recherche. Après, on l'a réalisé. Donc, c'était une résidence aussi de six mois. Donc, on a quand même travaillé sur une longue période sur ce projet essentiellement. Oui,

  • Speaker #1

    mais là, on s'en est arrivé. Mais après,

  • Speaker #2

    ça dépend. Mais après, il y a d'autres choses où on travaille sur différentes choses en même temps. Ça dépend.

  • Speaker #1

    Il y a des choses qu'on laisse un peu de côté, parce qu'on sent qu'on est arrivé peut-être au bout de ce qu'on pouvait faire avec, et puis on revient dessus.

  • Speaker #2

    On revient sur des choses, même des sujets qu'on s'est éloignés, et puis après on revient dessus. De toute façon, ça fait partie d'un tout, c'est pas si tranché.

  • Speaker #0

    Justement, ça a amené une des questions que j'avais ici. On imagine toujours les artistes, des gens pas pressés, un peu rêveurs et tout ça, je caricature à peine. Mais quand vous faites des commandes justement pour des institutions, des domaines publics, etc., on vous donne des designs, des cahiers de charges, c'est ultra carré en fait.

  • Speaker #2

    Pour des commandes publiques, par exemple, il y a vraiment des cahiers de charges relativement...

  • Speaker #1

    Sévènes ?

  • Speaker #2

    Oui, définis. Mais après, ceci dit, on propose un projet. après s'il est Donc, c'est une ébauche d'un projet. Après, s'il est pris, il y a quand même pas mal de temps pour le développer, pour peut-être le rediriger, le développer,

  • Speaker #1

    l'améliorer ou le continuer.

  • Speaker #2

    Donc, après, on est toujours un peu libre de notre emploi du temps. Après, c'est sûr aussi qu'on doit quand même répondre à des délais.

  • Speaker #1

    Et on se laissera un peu, les gens restent un an et demi pour les techniques.

  • Speaker #2

    Si on est programmé, il faut... On ne peut pas dire qu'on a fait un mois plus tard. Mais je dirais qu'on travaille quand même beaucoup. On est aussi passionnés par ce qu'on fait, donc on ne lâche jamais. Mais on n'arrête jamais non plus.

  • Speaker #0

    Vous faites un travail justement de commande, comme ça. Vous avez des interactions avec les services publics ou des directeurs de cours. Comment ça se passe avec eux ?

  • Speaker #1

    Alors là, on a eu très nombreuses interactions parce qu'en fait, eux, ils ne sont pas seulement demandeurs d'une œuvre, ils sont demandeurs d'un projet, maintenant de plus en plus aussi un projet qui inclut les habitants. Parce qu'en fait, peut-être parce qu'ils ont aussi envie de pouvoir défendre des œuvres face à leurs électeurs, donc on est de plus en plus confrontés à une demande des services publics de participation. mais c'est un bien grand mot parce qu'en fait on ne demande pas que le public vienne participer à l'oeuvre mais en tout cas ils demandent à être consultés ils veulent avoir leur mot à dire ils sont aussi présents parfois dans même l'oeuvre parce que dans le cas de Nantes ils sont présents dans l'oeuvre c'est tout un travail qui était une volonté de notre part c'était pas une volonté d'ailleurs du demandeur mais c'est vrai qu'il y a des endroits Il y a des endroits aussi, comment faire œuvre dans un endroit qui est parfois hostile ou qui n'est pas évident à vivre ? Comment rendre cet endroit différent ? On peut se demander ça comme artiste ?

  • Speaker #2

    Je trouve quand même qu'on a la plupart du temps une carte blanche, parce qu'il y a les œuvres dans l'espace, il y a les commandes publiques. ça sert à... un appel à projets, mais ça c'est juste une petite partie parce que d'ailleurs Nantes c'était pas le cas mais c'était à travers les voyages en Nantes et on avait carte blanche et quand on travaille avec des institutions pour une exposition dans un centre d'art, dans un PC, on a... carte blanche et après il s'établit un échange avec le curateur de l'exposition, avec aussi du coup l'équipe pour mettre le projet en place, mais il n'y a personne qui se met quand même du projet. Et quand on fait des expositions dans les galeries, c'est pareil, il y a certes un échange, mais on a quand même toujours carte blanche de faire ce qu'on veut. Il n'y a jamais personne qui est intervenu dans le travail.

  • Speaker #1

    c'est pas du tout le sujet parce que le sujet bon ou alors c'est pas du tout ce qu'on avait cru ou non c'est pas ça n'est pas rire non non c'est plus dans un dans une idée d'échangé pense que après il ya quand même des il ya quand même un budget donc c'est aussi par infini et puis il y a quand même aussi une temporalité, c'est-à-dire qu'il faut que ce soit prêt les jours de l'exposition.

  • Speaker #0

    Vous venez de parler de budget. Comment on fixe le prix d'une œuvre ? C'est peut-être une question un peu touchy dans le milieu de l'art, mais comment on peut définir que cette œuvre vaut 1 100, 100 000, 1 million ? Je ne sais pas.

  • Speaker #2

    Ça, c'est un bilan.

  • Speaker #0

    Jamais ? C'est de consulter ou ? Non,

  • Speaker #2

    non, on définit nos prix, mais après, c'est aussi une question de comment l'œuvre... Elle évolue dans un marché, ça, je ne sais pas. Ça,

  • Speaker #1

    c'est une série d'évents.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas vraiment.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il va faire qu'une œuvre fait partie tout d'un coup du patrimoine et qu'elle devient quelque chose de rare et de très demandé ? Ça, malheureusement, personne n'est en mesure de répondre, ni les artistes, ni les directeurs de musées, ni les galeristes, parce qu'en fait, personne ne sait qu'est-ce qui va devenir le patrimoine de demain. enfin je veux dire ouais Nous, on fait l'œuvre aujourd'hui. Qu'est-ce qui va faire ensuite qu'elle va prendre une énorme valeur ? Alors là, c'est un grand mystère.

  • Speaker #0

    C'est quelque chose qui vous tracasse ou pas du tout ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas vraiment quelque chose qui nous tracasse. Nous, on fait de l'art aujourd'hui. On n'est pas après...

  • Speaker #2

    Ce qui nous tracasse, c'est qu'en face des œuvres et qu'en puissant... vivre et qu'on puisse continuer à réaliser nos oeuvres. C'est-à-dire d'avoir les moyens pour faire ce qu'on a envie de faire. Après, on n'est pas... Je pense qu'on n'est jamais trop en train de se questionner comment faire pour qu'une oeuvre monte en valeur, pour qu'elle soit l'oeuvre de demain,

  • Speaker #0

    je ne sais pas. C'est Ă  tout prix, en fait. Non,

  • Speaker #2

    c'est Ă  tout prix.

  • Speaker #0

    C'est Ă  tout prix. ...

  • Speaker #2

    ça ne marche pas mieux que de ne pas plaire non je pense que de toute façon si on fait des oeuvres pour plaire à quelqu'un ça ne peut pas marcher parce qu'on fait une oeuvre qui je pense que le plus important c'est que les oeuvres qu'on fasse nous plaisent à nous et après si nous on est content avec l'oeuvre, si nous on exprime ce qu'on a envie, si on estime qu'on arrive à vraiment exprimer ce qu'on a envie d'exprimer à travers cette œuvre, je pense que c'est une œuvre réussite. Après, c'est au public de juger s'il est d'accord ou pas, mais le plus important, c'est d'être satisfait soi-même des œuvres qu'on fasse, moi je trouve.

  • Speaker #0

    Il faut s'affranchir du goût et des envies du candidaton aussi.

  • Speaker #1

    Oui, mais il n'y a pas beaucoup de... Disons que c'est rare, à part pour les œuvres très politiques, C'est rare qu'il y ait une réelle... révolte du public contre des œuvres. Le problème, je dirais, c'est plutôt son indifférence, en fait. Parce qu'il y a beaucoup d'œuvres, mais finalement, quand on voit des villes comme Bruxelles ou d'autres villes, il n'y a pas beaucoup d'œuvres dans l'espace public. L'art contemporain, l'art fait par des artistes d'aujourd'hui, n'est pas si présent que ça. Donc, en fait, notre problème, c'est de faire notre place dans tout l'univers, le bâti, l'architecture. les grandes infrastructures, les institutions, c'est de faire notre place là-dedans. Parce que l'air de rien, si jamais on regarde les grandes institutions aujourd'hui, les grandes infrastructures, il n'y a pas beaucoup d'œuvres. On n'est pas extrêmement présent. Je sais que beaucoup de gens trouvent qu'on dépense beaucoup d'argent pour les artistes, mais si jamais on regardait à l'aune de qu'est-ce que dépense un État pour ses... ces infrastructures ou ces bâtiments, l'art contemporain est quand même peu présent. Donc, nous, on essaye de faire notre place là-dedans, de montrer qu'il y a une modernité qui peut être là sans que ça pose forcément un problème énorme, et qu'au contraire. On est là pour marquer une période, parce que finalement, qu'est-ce qui va rester de cette période-là dans laquelle on vit ? Il va rester des journaux, des bâtiments, des infrastructures, plus ou moins en bon état. Mais est-ce qu'il va rester beaucoup d'œuvres ? Est-ce qu'il va rester beaucoup d'œuvres qui symbolisent cette époque ? Et c'est un peu ça le problème. C'est toujours la question de quelle va être notre place dedans. Je dis notre place en tant qu'artiste en général. parmi tous les autres artistes qu'on connaît, c'est le même problème. C'est comment faire œuvre dans une société qui a aussi plein d'autres problèmes à gérer, bien sûr.

  • Speaker #0

    Marquer son temps. Comment ? Marquer son temps.

  • Speaker #1

    Marquer son temps, et puis aussi le retranscrire, parce qu'en fait, qu'est-ce que c'est qu'une œuvre du XIXe siècle sur une place publique ? C'est une œuvre qui exprime qu'est-ce qu'était le XIXe siècle. Donc, elle a quand même... Elle a aussi une façon de raconter l'histoire de ce moment-là. Voilà.

  • Speaker #0

    Raconte,

  • Speaker #2

    oĂą chaque format donne vie Ă  une histoire.

  • Speaker #0

    Comment s'est passée la première fois où vous avez vendu une œuvre ? Vous vous en rappelez ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas si je me rappelle la première œuvre qu'on a vendue. Je ne sais pas. Mais...

  • Speaker #1

    On a vendu... C'est difficile à dire. Parce que c'est difficile de dire si jamais c'est une œuvre vendue ou si jamais c'est une institution qui a finalement accepté de la prendre dans sa collection. C'est quand même assez différent. Comme démarche ? Non, pas comme démarche, mais comme...

  • Speaker #2

    C'est une œuvre vendue.

  • Speaker #1

    C'est une œuvre vendue, c'est vrai. C'est une œuvre incontestable, on peut dire.

  • Speaker #2

    Disons que le fait de vendre une œuvre, ça fait toujours plaisir. Ça fait toujours plaisir. Ça fait plaisir qu'il y ait quelqu'un qui aime le travail au point de l'acheter. Donc, c'est quand même toujours une...

  • Speaker #1

    C'est quelque chose de joyeux.

  • Speaker #2

    C'est joyeux en dehors du fait qu'on reçoit de l'argent pour vendre une œuvre. Mais c'est aussi une forme de reconnaissance, donc une forme de succès. Donc ça, c'est toujours joyeux. De la première jusqu'à la dernière.

  • Speaker #1

    En fait, ce n'est pas seulement d'avoir de la première, c'est de continuer à en vendre.

  • Speaker #0

    Justement, toutes ces œuvres, quand elles parlent de votre atelier où nous nous trouvons actuellement, ça ne vous rend pas triste ?

  • Speaker #2

    Si, parfois, c'est vraiment difficile de se séparer des œuvres aussi.

  • Speaker #1

    Alors moi,

  • Speaker #2

    je dis,

  • Speaker #1

    tu ne la vends pas, on ne la vend pas, parce que je l'aime trop, etc. Et souvent, je dis ça. Oui.

  • Speaker #0

    Une petite collection privée alors que personne... Non,

  • Speaker #1

    en fait, non. On a des oeuvres.

  • Speaker #2

    Mais c'est vrai qu'il y a quand même des oeuvres qu'on vend malgré le fait que ces difficiles sont séparés. C'est toujours un peu comme une part de nous-mêmes qui part. C'est comme donner son bébé à quelqu'un. On espère qu'il est bien soigné, le bébé. que l'œuvre est en de bon moment et qu'elle sera respectée. Mais oui, c'est parfois dur de se séparer.

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas grave, parce que du coup, on peut en acheter d'autres Ă  d'autres artistes. Parce qu'on a aussi notre petite collection, on ne peut pas croire.

  • Speaker #0

    C'est une dynamique.

  • Speaker #1

    Comment ?

  • Speaker #0

    C'est une dynamique.

  • Speaker #1

    Oui, et puis bon, c'est vrai que même nous, en tant qu'artistes, moi je trouve ça vraiment joyeux d'acheter une œuvre à un artiste. d'aller dans une exposition et de pouvoir dire « Ah, j'aimerais vraiment bien acheter cette œuvre et je vais l'acheter. »

  • Speaker #2

    Et le fait de vendre une œuvre, ça motive aussi, dont on a du mal à se séparer, ça motive de faire une autre œuvre qu'on aime autant ou même plus.

  • Speaker #0

    C'est tout à fait une évolution.

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #0

    On en parlait justement avant l'interview. Ici, c'est votre atelier. Mais vous ne vivez pas ici, vous vivez ailleurs. C'est un choix délibéré pour une coupure vie privée-vie professionnelle ?

  • Speaker #2

    Oui, disons que c'est peut-être pas tout à fait un choix délibéré, mais ce n'est pas plus mal, parce que je pense que déjà, on est un couple qui travaille ensemble, donc on ramène quand même notre travail chez nous malgré tout. Il faut dire aussi que chez nous, dans notre appartement, on a une pièce qui est le bureau où on dessine, où on travaille sur l'ordinateur, où on réfléchit, on lit, on fait les recherches. Donc il y a déjà une forme d'atelier aussi intégré à la maison. Et c'est parfois bien aussi de pouvoir fermer une porte, marcher, arriver à un autre lieu, donc avoir cette espèce de séparation. de respirer entre... voilà, ou de rentrer chez soi et d'être baigné dans une autre ambiance. Ceci-ci, ce serait de toute façon impossible de vivre dans le même espace, vu qu'on est... quand même surtout des sculpteurs, un céramiste, qui a beaucoup de poussière, etc. Donc ce serait impossible.

  • Speaker #1

    Il respire un peu.

  • Speaker #2

    Il faudrait déjà que la maison soit sur un autre étage ou à côté. Mais...

  • Speaker #0

    Vous avez dit que vous faites tout en duo. Vous avez déjà eu des envies de faire un truc en solo ? Comme tous les groupes de rock, de temps en temps, il y en a un qui parle et qui fait un homme.

  • Speaker #1

    Alors, je ne te l'ai pas dit, mais... Non, c'est pas vrai.

  • Speaker #2

    Pas vraiment pour l'instant, mais... Non, pas vrai.

  • Speaker #1

    Non, mais pour l'instant...

  • Speaker #2

    Ce n'est pas Ă  exclure, mais pour l'instant, on ne l'a pas fait en tout cas.

  • Speaker #0

    Et vous n'avez jamais eu de panne d'inspiration ? Des moments où votre carrière est déjà maintenant assez longue ? Il n'y a pas eu des moments où on ne trouve pas ?

  • Speaker #1

    Non. En fait, on a eu de panne beaucoup de choses. Par exemple, manque de moyens.

  • Speaker #0

    Le manque de temps pour les matériaux.

  • Speaker #1

    Oui, c'est du manque de temps, je trouve. Mais en fait, le nombre de choses qu'on a envie de faire...

  • Speaker #0

    C'est plutĂ´t le contraire, en fait. VoilĂ ,

  • Speaker #1

    c'est assez problématique.

  • Speaker #2

    C'est ça. Et en plus, on a quand même... On a aussi des projets qu'on a développés, qu'on a dessinés, qu'on a écrits et qu'on n'a jamais...

  • Speaker #1

    Qu'on n'a jamais eu le temps de faire.

  • Speaker #2

    Donc, on a en plus des petits projets dans les tiroirs. que peut-être un jour ils vont se faire, mais peut-être aussi pas. Ce seront toujours des projets inachevés peut-être. Mais c'est-à-dire que parfois, j'ai l'impression qu'on n'aura pas le temps de faire toutes les choses qu'on a envie de faire. Donc c'est plutôt ça.

  • Speaker #0

    Vous n'avez jamais eu envie d'avoir une sorte de factory avec des gens qui viennent travailler avec vous ?

  • Speaker #1

    Ah non.

  • Speaker #2

    C'est-à-dire qu'on a quand même des assistants de temps en temps. on n'a pas des assistants en continu. C'est selon les projets, selon la difficulté du projet, etc. Et aussi, il y a parfois des choses qu'on fait quand même faire. Pensez à de la fonderie ou des choses comme ça. On n'est pas capable de faire ça chez nous. Mais je pense que le fait d'avoir beaucoup de gens qui t'attendent à l'atelier...

  • Speaker #1

    C'est très mieux.

  • Speaker #2

    Nous, on aime... Nous, on aime bien le faire. C'est important pour nous d'être impliqués dans le travail. Et je pense qu'il y a une espèce de pression. Enfin, ça devient industriel. Il commence à y avoir trop de gens. Je pense qu'on perd un peu le lien à l'œuvre.

  • Speaker #1

    On devient un organisateur.

  • Speaker #2

    Je trouve que c'est une autre forme de travail. Personnellement, moi et Jean aussi, on trouve que c'est important de garder le rapport à l'œuvre. Donc ça peut être avec bien sûr de l'aide de temps en temps, parce que c'est difficile de faire vraiment tout. Comme on dit, on a parfois aussi l'impression de ne pas avoir assez de temps. Mais je pense que c'est important d'avoir toujours gardé ce rapport à l'œuvre.

  • Speaker #1

    Oui, puis faire de l'organisation. Parce que quand on commence à avoir un atelier, d'arriver le matin et d'organiser les tâches, tout ça...

  • Speaker #0

    Ça devient une entreprise, en fait, plus un atelier.

  • Speaker #1

    Oui, alors... En plus, comme artiste, c'est risqué, parce que ça veut dire aussi produire tout le temps des grandes œuvres et les vendre. C'est quand même... Ça devient vraiment... Ça met une question...

  • Speaker #2

    Une question de... de production et de vente. On aime bien garder une certaine liberté avec ça. Être capable de se dire, pendant un moment, réfléchir aux choses et on n'a pas dix assistants à payer. Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est vraiment ça aussi, je pense, qui est compliqué pour des artistes qui sont comme ça dans un... dans un système très entrepreneurial, c'est que ça devient vraiment des enjeux aussi financiers sans arrêt.

  • Speaker #2

    Je pense que c'est une question de liberté. Je pense qu'on aime bien être libre, libre de décider comme ça, voilà, combien d'œuvres on fait, comment on les fait, de pouvoir expérimenter, de pouvoir prendre le temps par moments de réfléchir.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, même quand il y a des assistants, on expérimente. Parce que la dernière assistante qui était ici, on a expérimenté avec elle des choses que je ne savais pas du tout faire. Donc elle était un peu, des fois... Parce qu'il faut dire aussi une chose, c'est que... Quand on fait les choses soi-même, quand on les expérimente soi-même, il y a quand même toute une partie un peu d'erreurs, de choses qui ne marchent pas très bien. Ce n'est pas grave, parce que ce ne sont pas des enjeux énormes, donc ça va. À la fin, il faut que ça marche, mais bon, sur le moment, ce n'est pas non plus évident.

  • Speaker #2

    Il y a quand mĂŞme tous les deux des amoureux du faire.

  • Speaker #1

    Du faire. On aime bien les faire.

  • Speaker #2

    Donc, on aime bien donner la forme, être aussi dans la pratique, pas seulement dans la conception d'une œuvre, mais aussi dans la pratique de l'artiste. Donc, c'est important pour nous d'avoir ce rapport tactile peut-être à l'œuvre aussi.

  • Speaker #1

    Si on s'intéresse à la robotique, on va apprendre à programmer, mais si on s'intéresse à la céramique, on va apprendre à faire de la céramique. Peut-être qu'on ne fera pas des milliers de choses dans notre vie, mais en tout cas, ça. On le sait. Voilà.

  • Speaker #0

    Il me reste à vous poser la dernière question qui est la même pour tous nos invités. Qui voudrait entendre, voir, lire dans Raconte à votre place ?

  • Speaker #2

    Comment ?

  • Speaker #1

    Qui on aimerait ?

  • Speaker #0

    Qui voudrait Ă  votre place, qu'on pourrait inviter Ă  venir expliquer son travail,

  • Speaker #1

    sa vie ? Moi, je pense à quelqu'un, en tout cas au Luxembourg, que je trouve qui est un vrai témoin de ce qui s'est passé disons les 20 dernières années dans l'art contemporain et dans aussi dans le théâtre dans le dans le théâtre dans l'art dans beaucoup de choses justement dans le milieu culturel c'est josé hamza on la connaît ben je trouve que c'est quelqu'un de très oui alors puisqu'il maintenant à une autre pratique au ministère mais c'est intéressant c'est quelqu'un qui a vraiment navigué dans pas mal de gens disent moi aussi avec moi et l'analyse mais voilà Après, il y a d'autres gens comme artistes.

  • Speaker #0

    Ça peut être autre chose que d'apprendre d'autres choses. Ah oui, ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    C'est typiquement le genre de truc, sur le moment, j'ai un blackout.

  • Speaker #0

    C'est une question très difficile.

  • Speaker #2

    Mais après, si je réfléchis, je vais peut-être donner d'autres personnes vraiment que j'aimerais, parce qu'il y a plein de gens que j'aimerais savoir. ce qu'ils ont raconté. Il me faudrait un moment de réflexion, mais plus qu'à une minute, parce que là, c'est trop de pression.

  • Speaker #0

    On en reparlera plus tard. Il me reste Ă  vous remercier. Merci beaucoup Martine, merci beaucoup Jean.

  • Speaker #1

    Merci Ă  toi.

  • Speaker #2

    C'était très agréable d'avoir cette interview. Merci.

  • Speaker #1

    Raconte, s'écoute,

  • Speaker #2

    s'élie. et c'est un câble.

Description

🎨 Feipel & Bechameil : Devenir artiste contemporain aujourd’hui

Dans cette interview exclusive réalisée dans leur atelier à Bruxelles, le duo d’artistes Feipel & Bechameil nous ouvre les portes de leur univers créatif.

Comment devient-on artiste contemporain ? Où puiser l'inspiration ? Et surtout, comment construire une carrière artistique dans un monde en perpétuelle évolution ?

Feipel & Bechameil partagent leur parcours, leurs réflexions et leur vision de l’art contemporain, entre démarche personnelle et reconnaissance institutionnelle.

Ils reviennent également sur un moment fort de leur carrière : leur participation à la Biennale de Venise, où ils ont représenté le Luxembourg.


📍 Une immersion rare dans le quotidien d’artistes engagés, signée Raconte.


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Raconte est un média produit par le studio dbcreation, sous la direction d'Anthony Dehez et Michel Bourgeois.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Merci pour votre écoute. Retrouvez nos photographies et écrits sur raconte.media ainsi que sur nos réseaux sociaux. Raconte est une création originale d'Anthony Dehé et Michel Bourgeois, du studio DB Création, spécialisé en design de marques et photographies. Vous avez apprécié cette rencontre ? Partagez-la sur vos réseaux sociaux et laissez-nous une note sur votre plateforme préférée. Cela contribue réellement à la visibilité de Raconte. Une suggestion d'invité ? Écrivez-nous.

  • Speaker #1

    qu'une oeuvre de fait pas c'est parti d'un coup du patrimoine avec elle devient quelque chose de rare et de très demandé ça malheureusement personne n'est en mesure de répondre ni les artistes ni les directeurs de musées ni les galeristes parce qu'en fait personne ne sait qu'est ce qui va devenir le patrimoine de demain. À Venise, beaucoup d'artistes finissent ruinés. C'est pas bon ? Il y a même des artistes qui ont dû... Je crois que c'est l'artiste de Salvador qui a dû revendre son million d'or pour pouvoir payer ses dettes.

  • Speaker #2

    Non, je pense que de toute façon, si on fait des œuvres pour plaire à quelqu'un, ça ne peut pas marcher. Parce qu'on fait une œuvre qui... Je pense que le plus important, c'est que les œuvres qu'on fasse nous plaisent à nous.

  • Speaker #0

    Raconte la rencontre Bonjour Martine Faypel, bonjour Jean-Béchamel, bienvenue sur Raconte.

  • Speaker #1

    Merci.

  • Speaker #0

    Est-ce que je pourrais vous demander de vous présenter en quelques mots ? Que faites-vous ? Qui êtes-vous ?

  • Speaker #2

    On est un couple d'artistes, donc on est un couple dans la vie et dans le travail. Depuis 16 ans, on fait de l'art, des installations, des sculptures, de la céramique, des dessins, différents médiums.

  • Speaker #1

    On travaille surtout... On a une pratique d'atelier, on peut dire, comme on voit ici. Donc on fait souvent des choses nous-mêmes, mais pas que. Et puis on aime bien expérimenter avec des médias très différents. Ça peut être de la vidéo, ça peut être de la robotique, ça peut être de la céramique. Donc voilà, on n'a pas vraiment... Comment dire, on a plusieurs médias de prédilection, mais on n'est pas spécialisés dans une chose.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on peut dire un peu, pour contextualiser, oĂą nous nous trouvons actuellement pour cet enregistrement ?

  • Speaker #2

    On se retrouve dans notre atelier qui est à Bruxelles, où on fait une grande partie de nos œuvres sont produites ici.

  • Speaker #0

    Et je crois savoir que vous êtes luxembourgeoise. Et française, si je ne me trompe pas, c'est bien ça. Comment ça se fait que vous vous retrouvez à Bruxelles ?

  • Speaker #1

    Alors, en fait, on a habité dans pas mal de capitales. Martine, tu as habité à ?

  • Speaker #2

    À Londres, à Berlin, à Strasbourg, un peu en Italie. Et Jean, il a habité...

  • Speaker #1

    À Copenhague. à Paris, puisque je viens de Paris, et dans d'autres villes aussi. Donc, on s'est dit qu'on essaierait de trouver une ville ensoleillée, plutôt chaude, comme ça, pas loin de la mer.

  • Speaker #0

    C'est complètement réussi, on peut le dire.

  • Speaker #1

    VoilĂ , des Bruxelles, c'est parfait.

  • Speaker #2

    Non, mais on avait envie de s'installer dans un endroit où aucun de nous deux n'avait vécu avant. Et puis on a fait un travail à Bruxelles, on a adoré Bruxelles. Aussi par ce mélange de cultures, entre une culture latine et une culture nordique, plus avec la culture flamande. Et puis du monde qui vit à Bruxelles, qui vient de partout, une scène artistique vraiment bien fournie. Donc on était tombés amoureux de Bruxelles. on s'est installé ici.

  • Speaker #0

    C'est le fameux meeting pot, comme on dit, qui vous a séduit en fait.

  • Speaker #1

    Oui, il y a quand même une communauté d'artistes ici qui est assez importante, donc on peut confronter nos idées avec d'autres gens aussi.

  • Speaker #0

    Vous faites ça souvent ?

  • Speaker #1

    Oui, on fait un bar clandestin pendant le Covid ici, avec des... Enfin, clandestin, je m'entends, mais en tout cas, on a des scripts.

  • Speaker #2

    On l'a appelé comme ça.

  • Speaker #1

    On l'a appelé comme ça pour rigoler, quoi.

  • Speaker #2

    Toujours quand il y a des petits groupes d'artistes, on a discuté, on a vu des coups ensemble,

  • Speaker #0

    comme ça. Mais ça a débouché sur des collaborations, des œuvres ?

  • Speaker #2

    Comment ?

  • Speaker #0

    Ça a débouché sur des collaborations, des œuvres ?

  • Speaker #2

    Pas forcément, mais il y a eu des... On a discuté d'œuvres communes, en partie. Ça n'a pas forcément abouti jusque-là, c'est quand même important de confronter ces idées et d'avoir cet échange. Même si ça n'aboutit pas, c'est riche en débats et en confrontations.

  • Speaker #1

    Ça aboutit sur des sacrées discussions.

  • Speaker #0

    Pour en revenir à vous, quels sont vos cursus ? Comment on devient artiste contemporain ? Parce que ce n'est pas très courant. Dites-moi un peu comment on arrive là.

  • Speaker #2

    Je pense que J'ai été attirée par l'art dès la jeunesse, je pense. J'ai eu une mère qui peignait, un oncle qui peignait, mais pas professionnellement. Il y a une curiosité qui s'est éveillée par rapport à ça. Après, j'ai fait des études d'art. D'abord à Strasbourg, et après j'étais à Berlin et à Londres. J'ai fait un master en fine art. Et c'était aussi, je pense qu'en dehors des écoles, c'est une façon aussi de voyager dans des endroits, de rencontrer différents points de vue à travers les écoles, mais aussi à travers les élèves. À Berlin, les profs étaient des artistes qui racontaient un peu de comment ils faisaient les expositions. À Londres aussi, etc. Donc, c'est vraiment petit à petit, comprendre de quoi il s'agit, faire des expositions déjà en tant qu'étudiant. Et voilà, on a commencé à faire de l'art. Et puis, jamais lâcher, surtout. C'est une forme de persévérance. C'est sûr, peut-être, un peu d'entêtement de continuer à le faire, parce qu'il y a certainement au début des moments où ce n'est pas si évident.

  • Speaker #0

    Il faut être entêté pour être artiste.

  • Speaker #2

    Un peu, je pense, oui. C'est quelque chose, on est porté par une envie de le faire. Donc, c'est plus fort qu'il reste.

  • Speaker #0

    Et comment on gère cette envie au quotidien ?

  • Speaker #1

    Il faut déjà trouver des gens qui en ont envie aussi avec vous, parce que c'est quand même déjà suffisamment solitaire comme ça. Donc après, il faut pouvoir exposer ses œuvres, les vendre, les montrer. Donc il y a aussi peut-être trouver des gens qui ont un regard sur notre œuvre, qui ne soit pas uniquement nous, parce que sinon c'est un peu triste. Mais ça c'est tout un travail aussi. Faire des expositions, montrer son travail dès qu'on peut. C'est comme ça que ça commence, en fait. En fait, c'est souvent le début d'une vie d'artiste, c'est vraiment sauter sur la moindre occasion de montrer son travail. Et petit à petit, les gens vous connaissent, ils vous réinvitent. C'est comme ça que ça se fait petit à petit. Mais c'est vrai qu'au début, il y a tout à... Au début, on se demande vraiment pour quelle raison les gens montreraient votre travail dans tout ce qu'il y a déjà à montrer. Et finalement, en fait, ça arrive.

  • Speaker #2

    Après, en plus, on est un couple, donc c'est aussi le travail qui fait partie de notre vie. Pas seulement quand on est à l'atelier. On rentre avec nos idées, nos discussions, nos inquiétudes, nos envies à la maison. On continue à en discuter. C'est quelque chose qui occupe notre vie du matin au soir. Mais c'est aussi passionnant parce qu'on fait un travail où on réalise nos rêves. C'est quand même une chance. C'est un privilège.

  • Speaker #0

    On va y revenir. Peut-être juste pour faire une parenthèse, le cursus de Jean, c'était quoi ? Alors,

  • Speaker #1

    aucun cursus. J'ai été un peu invité dans des cursus, disons, de beaux-arts, etc. Mais en réalité, ma pratique vient surtout du cinéma. J'ai travaillé dans le cinéma assez longtemps.

  • Speaker #0

    À quel poste ?

  • Speaker #1

    Dans la décoration.

  • Speaker #0

    OK.

  • Speaker #1

    et en fait J'avais participé à l'aventure de Lars von Trier pendant toutes les années 90 et j'habitais au Danemark à ce moment-là. Donc j'ai fait pas mal de décors pour toute cette mouvance du cinéma scandinave.

  • Speaker #0

    Ça a été découvert par le grand public finalement, cette époque-là de cinéma scandinave. Voilà,

  • Speaker #1

    à l'époque il n'y avait un peu que Bill August qui était connu et puis est arrivé Trier, Winterberg, toute une génération de jeunes cinéastes qui... qui avaient une façon complètement différente de faire des films et aussi de voir le décor, de voir l'environnement autour d'un script qui était quand même assez intéressant. Et voilà, j'ai eu la chance de participer à ça. Donc ça m'a permis aussi peut-être d'avoir une approche de ma pratique en tant qu'artiste qui était être porté sur la scénographie, sur l'espace, sur le sur l'environnement dans lequel on était, etc., qui était peut-être moins de l'ordre de l'objet ou de l'ordre de la peinture, par exemple. Mais même si jamais, tout ça, c'est des choses qui se rejoignent.

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'on verra peut-être un peu plus loin. Vous êtes multidisciplinaire, on peut dire ça. Vous n'avez pas un médium sur lequel vous êtes arrêté. Vous avez plusieurs médiums, plusieurs matières, etc. Je pense qu'on va en parler un peu plus loin. Oui. Non, Pour revenir au côté première fois, vous vous êtes rencontrés comment ?

  • Speaker #2

    Alors, on s'est rencontrés dans une fête. Et voilà, donc on est tombés amoureux. On a d'abord été amoureux l'un de l'autre. Et dans nos discussions des premiers jours, des premières semaines, à travers nos discussions, on a inventé des projets ensemble. Et au bout d'un mois, on a fait la première œuvre ensemble qui s'appelle « Peste et choléra » ,

  • Speaker #0

    Jean et moi.

  • Speaker #2

    C'était très optimiste à l'époque. Oui, je pense que c'était très électrique. On est tout de suite tombés amoureux et tout de suite, on avait envie de plein de choses. Et puis, on l'a fait. On était tout de suite dans une sorte d'action, dans une énergie très… très dynamique et puis on n'a jamais arrêté en fait.

  • Speaker #0

    C'était vers quelle année ça ?

  • Speaker #2

    C'était en 2008.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    On a fait la première œuvre en fait à Copenhague dans mon atelier. Et voilà, à l'époque on ne savait même pas vraiment où on allait habiter puisqu'on était tous les deux à moitié en transit. Et c'était un peu... Bon, on va faire l'œuvre, on va la montrer là, après on est partis travailler. à Trinidad. Ensuite, on est allés en Islande. Donc, c'était assez...

  • Speaker #2

    On a fait plein de voyages ensemble. On a un peu travaillé aussi dans le cinéma ensemble. Mais assez rapidement, on a quand même donné la priorité à l'art. Et puis, on a eu plein d'expositions, et puis ça s'est enchaîné. On n'a jamais arrêté.

  • Speaker #0

    Ça a dû être une nourriture intellectuelle formidable, tous ces voyages dans tous ces lieux. Oui,

  • Speaker #2

    c'est vrai. Parce qu'aussi, Comme l'a déjà dit Jean, on est des curieux de l'espace. Je pense qu'on a souvent une envie de comprendre comment les sociétés marchent sociologiquement, politiquement, même architecturalement, etc. Et donc, à travers ces voyages, on découvre plein de choses, on se confronte à d'autres façons de vivre. Et puis voilà, on a tout de suite aussi intégré dans nos discussions, dans nos échanges, dans notre travail. Et c'est clair que c'est riche de pouvoir voyager ensemble. Et le fait de travailler ensemble, c'est aussi de faire tous ces voyages ensemble et d'être immédiatement dans un échange autour.

  • Speaker #1

    C'est d'agréable de travailler dans beaucoup de ces pays. Donc c'est aussi assez différent que juste voyager parce qu'on a quand même été confronté aux scènes locales, avec des gens qui vivaient sur place. C'était quand même d'assez longue période, ce n'était pas juste des voyages de trois semaines.

  • Speaker #2

    Oui, c'était des voyages de trois mois. Donc c'est déjà une autre façon de vivre ces espaces.

  • Speaker #0

    Vous étiez dans des ateliers ? Pratico-pratique, vos voyages, vous étiez en résidence, atelier ?

  • Speaker #2

    Alors, ce n'était pas des résidences. On a travaillé sur des films, donc on a un atelier où on réalisait des choses pour le film ou dans des résidences pour nous-mêmes. Ça, ça dépend. Au début, c'était vraiment relativement entremêlé et après, ça s'est cristallisé sur... sur notre carrière d'artiste.

  • Speaker #0

    Justement pour en venir à ça, vous étiez, on va dire, comment dire, de manière légèrement péjorative, vous étiez sur une production plutôt alimentaire, dans vos métiers de décorateur, etc. Et comment ça s'est passé le changement pour devenir artiste, vraiment, je deviens artiste ? À quel moment ?

  • Speaker #2

    Disons que peut-être c'est un peu différent pour Jean que pour moi, parce que... Moi, c'était vraiment depuis toujours, c'était être artiste. Quand on s'est connus, on a travaillé sur des films ensemble, mais moi, j'ai jamais arrêté, on n'a jamais arrêté de faire des œuvres. Alors que pour Jean, c'est peut-être plus mélangé.

  • Speaker #1

    Mélangé, oui. Et puis petit à petit, on a eu des galeries qui se sont intéressées à notre travail. On a eu des institutions qui ont...

  • Speaker #0

    Comment la rencontre se fait justement avec les galeries, etc. ? Ils viennent Ă  une expo ?

  • Speaker #1

    Ils viennent à une expo et ils voient les œuvres qui, pour eux, pourraient être des œuvres collectionnées. Je pense que c'est comme ça qu'ils voient la chose. Soit parce que c'est de... ça correspond à un moment où c'est aussi ça correspond à une qualité peut-être du 2,2 de l'oeuvre je sais pas trop mais en tout cas ce qui est certain c'est que on n'a pas nous fait une démarche vraiment vers les galeries c'est plutôt les galeries qui sont venus et qui nous ont demandé travailler avec nous parce que ce qui se passe souvent c'est que c'est eux ils sont submergés d'artistes on peut dire et donc c'est un peu eux qui font le tri en fait c'est un peu Donc c'est vrai que les galeries, même les institutions, ça vient petit à petit aussi à travers les concours, parce qu'on a fait pas mal de concours. On a fait quand même quelques concours où on a gagné, et donc après on a eu la chance de représenter par exemple le Luxembourg à la Biennale de Venise, ou des choses comme ça, qui sont quand même des concours dans lesquels il faut s'investir sans savoir si jamais ça va marcher ou pas.

  • Speaker #0

    Et comment vous y prenez pour participer à un concours ? C'est des cahiers des charges ? Vous scrutez un peu ça et puis vous dites, tiens, ça c'est compatible avec notre approche ?

  • Speaker #2

    Oui, c'est toujours, on fait un concours parce qu'il y a quand même quelque chose qui nous intéresse particulièrement dans ces concours-là, parce que c'est proche de notre sensibilité ou de notre réflexion, etc. On n'en fait peut-être pas tant que ça quand même des concours, mais de temps en temps. Mais après, c'est vrai que je pense qu'au début, on en a fait. Et après, c'est aussi des choses qui se mettent un peu en place où les gens nous contactent. Et bon, c'est un mélange.

  • Speaker #0

    Vous venez de Paris, justement, de la Biennale de Venise, où vous avez représenté le Luxembourg. C'est un événement majeur sur la scène mondiale de l'art contemporain. Ça change tout dans une carrière ou pas tant que ça ?

  • Speaker #2

    Si, oui, ça change parce que d'abord, c'est quand même... Disons, on a fait la Biennale de Venise en 2011. On avait tous les deux depuis des années une pratique artistique, mais on était un couple d'artistes depuis 3 à 4 ans, 3 ans. et donc On était connus dans un certain milieu, mais le fait d'être à Venise, ça crée une visibilité vraiment mondiale. Il y a quand même des gens du monde entier qui viennent voir la Biennale. Et ça, on n'en aura pas profité en montrant notre travail là où on l'a montré avant, c'est-à-dire au Luxembourg, en Belgique. Ça donnait tout de suite une ampleur plus vaste quand même à notre travail.

  • Speaker #1

    Et puis c'était un succès.

  • Speaker #2

    Oui, c'est quand même, on a eu vraiment un vrai retour avec beaucoup d'articles, beaucoup de demandes après, donc ça nous a tout de suite positionnés quelque part. Donc après, c'est aussi une suite de continuer.

  • Speaker #1

    Après, il fallait continuer, ce qui n'est pas évident, parce que la Biennale de Venise, c'est un événement majeur, mais qui... qui n'est pas un événement commercial. Donc après, il faut trouver un moyen de rebondir, de pouvoir en vivre après, ce qui n'est pas évident. Parce que c'est la Biennale de Venise, beaucoup d'artistes finissent ruinés en fait. C'est un bon moment. Oui, il y a même des artistes qui ont dû, je crois que c'est l'artiste du Salvador qui a dû revendre son million d'or pour pouvoir payer ses dettes. Et en fait, c'est vrai que c'est un peu le problème des grandes manifestations. Comme ça, ce n'est pas du tout destiné à commercialiser des œuvres. Donc après, il faut trouver un moyen de rebondir, de trouver des gens qui vont vous inviter à d'autres choses, etc. Tout de suite, parce que si jamais on a la chance que ça marche, c'est bien. C'est vraiment une bonne chose.

  • Speaker #0

    Et là, c'est plus la rencontre avec le marché des arts, des galeristes et marchands qui doit se faire. Oui,

  • Speaker #1

    et aussi les institutions. Parce que les institutions comptent aussi énormément. Il faut pas... rencontrer que le marché de l'art dans une carrière d'artiste, c'est un peu de...

  • Speaker #2

    Follé de...

  • Speaker #1

    Follé de quoi ? C'est toujours pareil, parce que c'est un peu... Les institutions, elles ont ainsi un rôle important dans l'art. C'est quand même elles qui vont investir dans des grandes productions et puis qui vont montrer aussi à un public beaucoup plus large que le marché lui-même. Donc ça, c'est important. Peut-être... à un public beaucoup plus hétéroclite que ne l'est le marché des foires et des galeries.

  • Speaker #0

    C'est quelque chose qui vous tient à cœur, de toucher des gens qui ne sont pas de prime abord clients d'art contemporain ?

  • Speaker #2

    Oui. Nous, quand même, dans notre travail, d'abord, on adore faire aussi des installations ou des œuvres qui répondent à un contexte et qui est vraiment dirigé à un public. Donc, ça c'est vraiment, je pense, l'essence de notre travail, c'est aussi le travail avec les lieux. On a fait quand même beaucoup d'œuvres aussi dans l'espace public et souvent aussi une façon dans notre œuvre d'intégrer le public dans nos œuvres. Donc, c'est important de toucher, de pouvoir aussi toucher les gens qui ne vont peut-être pas avoir des musées. Donc voilà, c'est... Ouais.

  • Speaker #0

    C'est vrai qu'il y a un côté assez ludique dans votre travail. Ce sont des œuvres que l'on peut toucher, parfois même monter dessus. Je parle des œuvres extérieures, etc., les grands formats. Ce n'est pas une œuvre qui est dans un musée derrière une vitrine de l'AD. Le public peut avoir vraiment une connexion au sens propre du terme avec vos œuvres.

  • Speaker #2

    Oui, parce que je pense qu'aussi, pour nous, c'est important que ce ne soit pas seulement une expérience intellectuelle et conceptuelle par rapport à l'œuvre, mais aussi... Une expérience physique et visuelle, mais physique aussi, et puis ce rapport social au public qui nous est cher. Donc oui, on a fait des œuvres qui peuvent aussi servir d'assises, ou on a fait des œuvres comme les brutalistes qu'on a faits, qui sont installés de façon... définitive à Nantes. C'est des grandes sculptures en béton et en pierre de lave émaillée. Mais à l'intérieur des sculptures, il y a des fours à pizzas. Et c'était vraiment pensé pour que les gens du quartier se réunissent autour de ces œuvres. Ils font des pizzas et il y a un partage. Il y a aussi une inclusion sociale par rapport à ce travail et une convivialité qui se crée dans le quartier. Du coup, c'est une façon aussi de désacraliser. Une œuvre qu'on ne peut pas toucher, mais qui sert, qui devient en fait part du quotidien et qui met aussi l'homme au centre de cette attractivité autour de l'œuvre. Et ce n'est pas du coup seulement une œuvre contemplative, ça peut l'être aussi parce que c'est une sculpture, c'est aussi une forme plastique qui est développée, qui nous est chère. qui fonctionne en tant que juste sculpture. Mais c'est aussi important, du coup, c'est intéressant de basculer dans quelque chose où ça devient vivant, il y a du feu aussi sur la place, mais des bûches, du coup, c'est vraiment...

  • Speaker #0

    On se rapproche un petit peu du design industriel, un peu, en faisant ça.

  • Speaker #2

    Oui, c'est peut-être pas du design, mais oui, ça se rapproche dans un sens du design.

  • Speaker #1

    De toute façon, ce n'est pas non plus des œuvres qu'on va reproduire à l'infini. Cette expérience-là à Nantes, ce sera une autre expérience à Bastogne, une troisième à Toulouse où on fait une station de métro. À chaque fois, c'est des idées assez différentes, mais toujours tournées vers le public. Mais ce n'est pas une série de... de choses qui vont être tournées vers une grande production.

  • Speaker #0

    Et quand c'est comme ça, vous rencontrez les habitants des quartiers dans lesquels va finir l'œuvre ? Oui. Il y a un échange qui se fait ?

  • Speaker #1

    C'est ça. On a travaillé avec les enfants du quartier pour décider un peu justement de la forme et de la couleur de l'œuvre. On avait fait tout un camp de vacances avec eux. À Toulouse, là, c'est vraiment un dialogue avec déjà les gens qui construisent le métro parce que là, on vient complètement en amont. de la construction du métro, c'est-à-dire qu'en fait on a travaillé sur la station avant même qu'elle soit construite, qu'elle sorte de terre, et donc là on pouvait vraiment modifier un peu la construction elle-même du métro, un peu dans la mesure où c'était.

  • Speaker #2

    Oui parce qu'on a eu vraiment un échange, parce que le bâtiment n'était pas encore dessiné. C'est-à-dire qu'il était prédessiné, mais il n'était pas fini. Donc, on a fini les cahiers de charge en même temps que les architectes. Et ça, c'était intéressant dans le dialogue de pouvoir vraiment implémenter l'œuvre en échange avec les architectes.

  • Speaker #1

    Et puis, on va travailler justement sur toute la fréquence des métros. Donc, l'œuvre qui est un bas-relief, elle va être en mouvement un petit peu avant que la rame arrive dans la station. pour signaler son arrivée éminente de chaque côté. C'est tout un travail aussi sur le mouvement, sur ce côté très erratique du métro, très quotidien, avec des mouvements dans la structure elle-même.

  • Speaker #2

    C'est une œuvre interconnectée sur le système du métro.

  • Speaker #0

    Une question que je vais vous poser par rapport Ă  Adia. On n'arrĂŞte pas d'en parler en ce moment. Est-ce que c'est quelque chose que vous pensez utiliser dans votre pratique artistique un jour ?

  • Speaker #1

    On l'utilise dans les mouvements. Parce que nous, on utilise de la robotique qui se sert de l'IA. On n'utilise pas pour fabriquer des œuvres. Mais disons qu'on l'utilise effectivement dans certains mouvements de robotique qui sont très compliqués. La programmation, c'est nous qui la faisons. Mais une partie des corrections du moteur et des mouvements se fait avec l'IA. Ce qui va être assez compliqué.

  • Speaker #2

    Oui, c'est des moteurs robotiques et c'est des moteurs industriels, ce qui nous ramène peut-être au côté industriel. L'industrie, c'est quelque chose qui nous intéresse aussi. C'est-à-dire aussi la technologie, l'industrie. C'est-à-dire que notre travail, c'est quand même, d'une certaine manière, toujours une réflexion sur la modernité et comment cette modernité, à travers... la technologie, l'architecture, ces idéologies, a changé notre rapport à l'espace, au monde, à l'autre, aussi à la nature. Et donc, souvent, on essaie de s'approprier les moyens de cette modernité, ce qu'on a fait avec la robotique.

  • Speaker #1

    C'est juste qu'on a fait aussi à Ibiza, on a scanné un bâtiment d'un architecte José Luisert, qui était un des symboles de la modernité, aussi un grand ami de Le Corbusier, on l'a en fait scanné avec un laser assez perfectionné, qui sert normalement dans l'industrie à scanner des grands bâtiments industriels. Et en fait, là, on voulait s'en servir justement pour que le spectateur voit le bâtiment tel qu'il l'était à ce moment-là, parce qu'en grande partie, il va être démoli petit à petit.

  • Speaker #2

    Il faut garder une trace patrimoniale de ce bâtiment,

  • Speaker #1

    mais c'est une trace complètement emblématique de l'île.

  • Speaker #0

    L'idée de la trace, l'idée du temps qui passe, c'est quelque chose qui vous inspire au quotidien dans vos œuvres ?

  • Speaker #2

    Oui, je pense que le temps, dans une sorte même... Oui, le temps... Jouer avec une sorte d'intemporalité ou le temps qui passe, etc. Oui, c'est très présent ce que travaillent quand même les temporalités et comment modifier aussi ces temporalités.

  • Speaker #1

    En plus, on a souvent un travail d'archives, en fait, parce que, par exemple, quand on avait fait tout le travail sur les grands ensembles et les logements sociaux, on avait essayé d'aller vers les... les plans de l'époque qui étaient des plans avant AutoCAD. Donc, c'est très curieux de s'imaginer. Les plans en papier. Les plans en papier, ce qui est assez curieux, quand on imagine les grandes cités des années 70-80, n'ont en fait pas été dessinées par ordinateur. Et alors, on a eu accès à ces archives qui nous ont été exceptionnellement ouvertes et qui sont des archives dont des architectes, les architectes de ces années. donc euh 60-70, début des années 80, sont maintenant à la retraite et ils donnent volontairement leur fonds de dessins et de documents à cette bibliothèque. Et donc, c'est très intéressant parce que c'est vraiment le projet brut. Qu'est-ce qu'était un projet d'habitat social dans les années 70 ? Comment il a été dessiné ? Là, on en voit… Là, ce n'est pas du tout quelque chose de…

  • Speaker #0

    Il y a des grandes notions sociologiques de l'époque aussi. Oui, c'est intéressant.

  • Speaker #2

    C'est peut-être aussi pour ça qu'on avait envie de retourner vraiment au début de cette modernité, parce que c'est vraiment la modernité qui contient encore ce rêve d'un meilleur monde possible à travers ces nouvelles architectures, etc. Donc, c'est vraiment une utopie et ça se retrouve. dans ses bâtiments, dans ses dessins des bâtiments, etc. Donc, c'est ça qui nous a beaucoup fascinés, l'œuvre à monde parfait qu'on a fait.

  • Speaker #1

    En plus, pour nous, c'était un peu la première fois dans l'histoire qu'on était face à du monumental fait pour la classe populaire. Parce qu'en fait, il n'y a pas vraiment d'architecture monumentale pour les classes populaires avant. Il n'y a pas d'exemple, les petites maisons où... où les petits immeubles de trois étages, ce n'est pas réellement monumental, mais une barre d'immeubles. quand c'est reproduit de façon sérielle avec 4000 logements, ça a quand même quelque chose de, même, on peut dire, politiquement, un peu effrayant. Et d'ailleurs, c'est ce qui s'est passé, parce que politiquement, ça a été vraiment des endroits très vilipendés. On a souvent parlé de ces cités comme des cités qui sont hors contrôle,

  • Speaker #0

    etc.

  • Speaker #1

    Et donc, ça a été pour nous un véritable retour à quelles étaient les vraies idées derrière. Surtout que moi, j'ai grandi dans une barre. C'est quand même une expérience que j'ai vraiment eue de première. C'est quand même intéressant comme mouvement architectural, d'autant plus qu'ils sont en grande partie en cours de démolition. Il y a quand même beaucoup de ces barres qui se font exploser à l'heure actuelle.

  • Speaker #2

    Raconte la forme avec le fond.

  • Speaker #0

    On vient de parler en détail de ce qui vous inspire, entre autres. Mais comment, pratiquement, vous y prenez pour créer une nouvelle œuvre ? Comment ça se passe, ce processus créatif ? Vous levez le matin, je crée une œuvre, comment ça se passe ?

  • Speaker #1

    C'est marrant parce qu'on me pose souvent cette question. Et en fait, c'est un peu difficile à répondre parce que c'est vraiment un processus étrange où on discute d'un projet, on revient dessus, en...

  • Speaker #2

    C'est quand même... Ça part quand même d'un sujet qui nous passionne. Par exemple, quand on a commencé à travailler sur la robotique, parce qu'on a eu une résidence au Luxembourg sur un site industriel à Belleval. Et donc, on était confrontés à ces éléments qu'on connaissait très bien. C'est au fourneau de l'industrie sidérurgique du Luxembourg. qui sont obsolètes maintenant, mais il y a quand même encore l'industrie. Quand on a visité l'usine ArcelorMittal, etc. Il y a une fascination pour ces géants du passé, ces hauts fourneaux, ces bêtes presque. Ça paraît comme des bêtes, parce que c'est des espèces de monstres d'industrie. Et l'automation dans l'usine à côté. Ce qui nous a donné envie de travailler avec la technologie, de faire une réflexion là-dessus et de travailler avec, de répondre à cette industrie du passé avec la robotique d'aujourd'hui, la robotique industrielle. Et donc, il y a toujours quelque chose qui déclenche une envie par une confrontation ou quelque chose. Et là-dessus, on commence à... souvent à faire des longues recherches sur le sujet, à se documenter, à lire dessus, à nous y intéresser, et petit à petit à développer un projet, une idée, comment réagir par rapport à ça, comment questionner ces technologies par exemple.

  • Speaker #1

    Il faut dire aussi que quand on a visité les usines ArcelorMittal, ce qui nous a vraiment frappé, c'est qu'il n'y avait personne. C'est-à-dire, c'était entièrement automatisé. Entièrement, il ne faut pas non plus exagérer, mais disons, il y a beaucoup, beaucoup de tâches qui sont automatisées. Et dans cette automatisation, dans ces machines qui marchent toutes seules, avec des programmes très compliqués quand même, en fait, ce qui nous fascinait, ce n'était pas du tout la robotique humanoïde, avec des espèces de robots qui imitent l'homme. Ce qui nous fascinait, c'est ce côté automation. d'un énorme process très compliqué. Et en fait, on avait envie de s'en emparer. Tout de suite, on nous a découragé en nous disant « Mais vous savez, la robotique industrielle, c'est vraiment fait pour des ingénieurs qui ont une formation. C'est vraiment fait pour des gens qui sont habitués à travailler de l'électronique. » Alors, ça nous a donné encore plus envie de s'en emparer parce que du coup, on a commencé à acheter des... des morceaux de robots, apprendre à le programmer avec des gens qui ont bien voulu nous aider, ce qui n'était pas évident parce que c'est vrai que c'est un milieu finalement très fermé au public parce que ce n'est pas du tout public. Dans la robotique industrielle, le principe, c'est que justement, il n'y a pas de public. Donc, on a commencé à travailler là-dessus et c'est un peu par hasard. C'est typiquement, par exemple, dans ce cas-là d'une œuvre comme ça, c'est un peu… Petit à petit, on va faire des recherches, on va tomber sur une chose, on va aller vers des gens qui s'y connaissent, on va retomber sur une recherche peut-être plus théorique, et puis on va en faire quelque chose qui est notre propre œuvre. Ça c'est le cas pour cette œuvre-là, mais pour une autre œuvre, ça pourrait être un peu le même process où on va aller vers les archives des architectes et on va trouver des dessins qui nous fascinent, et on va interroger des gens qui ont fait partie de ce mouvement architectural. C'est toujours une espèce de recherche à la fois, je dirais, sensible au niveau de l'image, de la picturalité de la chose, mais aussi une recherche, on pourrait dire, plus intellectuelle, de livres, d'écrits, de conférences.

  • Speaker #0

    La recherche prend vraiment un temps énorme, en fait, dans votre processus. La lecture, la documentation.

  • Speaker #1

    C'est...

  • Speaker #0

    Vous donnez une idée, c'est quoi ? C'est des semaines ? C'est des mois ?

  • Speaker #2

    Eh ben... Oui, sur deux semaines, ça c'est sûr. Après, c'est entremêlé avec peut-être aussi même une recherche, donc des lectures. Des sujets autour qui nous intéressent, aussi une recherche peut-être formelle, des expérimentations déjà dans l'atelier. C'est des choses qui se mettent en place comme ça, l'un dans l'autre. C'est rarement aussi... Je pense que maintenant, très souvent, on travaille sur des choses un peu comme ça, on continue, c'est un peu organique. C'est pas... On commence un projet et puis on recherche et puis on réhabilite. C'est plusieurs choses qui peuvent aussi se changer. Donc, c'est un processus. Mais c'est souvent quelque chose qui nous inspire, qui déclenche l'envie de faire cette recherche et qui, après, petit à petit, nous amène quelque part et on se laisse guider par ce sujet, etc. Et on développe un travail artistique autour.

  • Speaker #0

    Vous créez plusieurs œuvres en parallèle ?

  • Speaker #2

    Ça peut arriver, ça dépend. Ça dépend aussi de l'ampleur du projet. On vient de parler de Ballad of Destruction. Ça, par contre, c'est vrai qu'on a fait toute une recherche. Après, on l'a réalisé. Donc, c'était une résidence aussi de six mois. Donc, on a quand même travaillé sur une longue période sur ce projet essentiellement. Oui,

  • Speaker #1

    mais là, on s'en est arrivé. Mais après,

  • Speaker #2

    ça dépend. Mais après, il y a d'autres choses où on travaille sur différentes choses en même temps. Ça dépend.

  • Speaker #1

    Il y a des choses qu'on laisse un peu de côté, parce qu'on sent qu'on est arrivé peut-être au bout de ce qu'on pouvait faire avec, et puis on revient dessus.

  • Speaker #2

    On revient sur des choses, même des sujets qu'on s'est éloignés, et puis après on revient dessus. De toute façon, ça fait partie d'un tout, c'est pas si tranché.

  • Speaker #0

    Justement, ça a amené une des questions que j'avais ici. On imagine toujours les artistes, des gens pas pressés, un peu rêveurs et tout ça, je caricature à peine. Mais quand vous faites des commandes justement pour des institutions, des domaines publics, etc., on vous donne des designs, des cahiers de charges, c'est ultra carré en fait.

  • Speaker #2

    Pour des commandes publiques, par exemple, il y a vraiment des cahiers de charges relativement...

  • Speaker #1

    Sévènes ?

  • Speaker #2

    Oui, définis. Mais après, ceci dit, on propose un projet. après s'il est Donc, c'est une ébauche d'un projet. Après, s'il est pris, il y a quand même pas mal de temps pour le développer, pour peut-être le rediriger, le développer,

  • Speaker #1

    l'améliorer ou le continuer.

  • Speaker #2

    Donc, après, on est toujours un peu libre de notre emploi du temps. Après, c'est sûr aussi qu'on doit quand même répondre à des délais.

  • Speaker #1

    Et on se laissera un peu, les gens restent un an et demi pour les techniques.

  • Speaker #2

    Si on est programmé, il faut... On ne peut pas dire qu'on a fait un mois plus tard. Mais je dirais qu'on travaille quand même beaucoup. On est aussi passionnés par ce qu'on fait, donc on ne lâche jamais. Mais on n'arrête jamais non plus.

  • Speaker #0

    Vous faites un travail justement de commande, comme ça. Vous avez des interactions avec les services publics ou des directeurs de cours. Comment ça se passe avec eux ?

  • Speaker #1

    Alors là, on a eu très nombreuses interactions parce qu'en fait, eux, ils ne sont pas seulement demandeurs d'une œuvre, ils sont demandeurs d'un projet, maintenant de plus en plus aussi un projet qui inclut les habitants. Parce qu'en fait, peut-être parce qu'ils ont aussi envie de pouvoir défendre des œuvres face à leurs électeurs, donc on est de plus en plus confrontés à une demande des services publics de participation. mais c'est un bien grand mot parce qu'en fait on ne demande pas que le public vienne participer à l'oeuvre mais en tout cas ils demandent à être consultés ils veulent avoir leur mot à dire ils sont aussi présents parfois dans même l'oeuvre parce que dans le cas de Nantes ils sont présents dans l'oeuvre c'est tout un travail qui était une volonté de notre part c'était pas une volonté d'ailleurs du demandeur mais c'est vrai qu'il y a des endroits Il y a des endroits aussi, comment faire œuvre dans un endroit qui est parfois hostile ou qui n'est pas évident à vivre ? Comment rendre cet endroit différent ? On peut se demander ça comme artiste ?

  • Speaker #2

    Je trouve quand même qu'on a la plupart du temps une carte blanche, parce qu'il y a les œuvres dans l'espace, il y a les commandes publiques. ça sert à... un appel à projets, mais ça c'est juste une petite partie parce que d'ailleurs Nantes c'était pas le cas mais c'était à travers les voyages en Nantes et on avait carte blanche et quand on travaille avec des institutions pour une exposition dans un centre d'art, dans un PC, on a... carte blanche et après il s'établit un échange avec le curateur de l'exposition, avec aussi du coup l'équipe pour mettre le projet en place, mais il n'y a personne qui se met quand même du projet. Et quand on fait des expositions dans les galeries, c'est pareil, il y a certes un échange, mais on a quand même toujours carte blanche de faire ce qu'on veut. Il n'y a jamais personne qui est intervenu dans le travail.

  • Speaker #1

    c'est pas du tout le sujet parce que le sujet bon ou alors c'est pas du tout ce qu'on avait cru ou non c'est pas ça n'est pas rire non non c'est plus dans un dans une idée d'échangé pense que après il ya quand même des il ya quand même un budget donc c'est aussi par infini et puis il y a quand même aussi une temporalité, c'est-à-dire qu'il faut que ce soit prêt les jours de l'exposition.

  • Speaker #0

    Vous venez de parler de budget. Comment on fixe le prix d'une œuvre ? C'est peut-être une question un peu touchy dans le milieu de l'art, mais comment on peut définir que cette œuvre vaut 1 100, 100 000, 1 million ? Je ne sais pas.

  • Speaker #2

    Ça, c'est un bilan.

  • Speaker #0

    Jamais ? C'est de consulter ou ? Non,

  • Speaker #2

    non, on définit nos prix, mais après, c'est aussi une question de comment l'œuvre... Elle évolue dans un marché, ça, je ne sais pas. Ça,

  • Speaker #1

    c'est une série d'évents.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas vraiment.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qu'il va faire qu'une œuvre fait partie tout d'un coup du patrimoine et qu'elle devient quelque chose de rare et de très demandé ? Ça, malheureusement, personne n'est en mesure de répondre, ni les artistes, ni les directeurs de musées, ni les galeristes, parce qu'en fait, personne ne sait qu'est-ce qui va devenir le patrimoine de demain. enfin je veux dire ouais Nous, on fait l'œuvre aujourd'hui. Qu'est-ce qui va faire ensuite qu'elle va prendre une énorme valeur ? Alors là, c'est un grand mystère.

  • Speaker #0

    C'est quelque chose qui vous tracasse ou pas du tout ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas vraiment quelque chose qui nous tracasse. Nous, on fait de l'art aujourd'hui. On n'est pas après...

  • Speaker #2

    Ce qui nous tracasse, c'est qu'en face des œuvres et qu'en puissant... vivre et qu'on puisse continuer à réaliser nos oeuvres. C'est-à-dire d'avoir les moyens pour faire ce qu'on a envie de faire. Après, on n'est pas... Je pense qu'on n'est jamais trop en train de se questionner comment faire pour qu'une oeuvre monte en valeur, pour qu'elle soit l'oeuvre de demain,

  • Speaker #0

    je ne sais pas. C'est Ă  tout prix, en fait. Non,

  • Speaker #2

    c'est Ă  tout prix.

  • Speaker #0

    C'est Ă  tout prix. ...

  • Speaker #2

    ça ne marche pas mieux que de ne pas plaire non je pense que de toute façon si on fait des oeuvres pour plaire à quelqu'un ça ne peut pas marcher parce qu'on fait une oeuvre qui je pense que le plus important c'est que les oeuvres qu'on fasse nous plaisent à nous et après si nous on est content avec l'oeuvre, si nous on exprime ce qu'on a envie, si on estime qu'on arrive à vraiment exprimer ce qu'on a envie d'exprimer à travers cette œuvre, je pense que c'est une œuvre réussite. Après, c'est au public de juger s'il est d'accord ou pas, mais le plus important, c'est d'être satisfait soi-même des œuvres qu'on fasse, moi je trouve.

  • Speaker #0

    Il faut s'affranchir du goût et des envies du candidaton aussi.

  • Speaker #1

    Oui, mais il n'y a pas beaucoup de... Disons que c'est rare, à part pour les œuvres très politiques, C'est rare qu'il y ait une réelle... révolte du public contre des œuvres. Le problème, je dirais, c'est plutôt son indifférence, en fait. Parce qu'il y a beaucoup d'œuvres, mais finalement, quand on voit des villes comme Bruxelles ou d'autres villes, il n'y a pas beaucoup d'œuvres dans l'espace public. L'art contemporain, l'art fait par des artistes d'aujourd'hui, n'est pas si présent que ça. Donc, en fait, notre problème, c'est de faire notre place dans tout l'univers, le bâti, l'architecture. les grandes infrastructures, les institutions, c'est de faire notre place là-dedans. Parce que l'air de rien, si jamais on regarde les grandes institutions aujourd'hui, les grandes infrastructures, il n'y a pas beaucoup d'œuvres. On n'est pas extrêmement présent. Je sais que beaucoup de gens trouvent qu'on dépense beaucoup d'argent pour les artistes, mais si jamais on regardait à l'aune de qu'est-ce que dépense un État pour ses... ces infrastructures ou ces bâtiments, l'art contemporain est quand même peu présent. Donc, nous, on essaye de faire notre place là-dedans, de montrer qu'il y a une modernité qui peut être là sans que ça pose forcément un problème énorme, et qu'au contraire. On est là pour marquer une période, parce que finalement, qu'est-ce qui va rester de cette période-là dans laquelle on vit ? Il va rester des journaux, des bâtiments, des infrastructures, plus ou moins en bon état. Mais est-ce qu'il va rester beaucoup d'œuvres ? Est-ce qu'il va rester beaucoup d'œuvres qui symbolisent cette époque ? Et c'est un peu ça le problème. C'est toujours la question de quelle va être notre place dedans. Je dis notre place en tant qu'artiste en général. parmi tous les autres artistes qu'on connaît, c'est le même problème. C'est comment faire œuvre dans une société qui a aussi plein d'autres problèmes à gérer, bien sûr.

  • Speaker #0

    Marquer son temps. Comment ? Marquer son temps.

  • Speaker #1

    Marquer son temps, et puis aussi le retranscrire, parce qu'en fait, qu'est-ce que c'est qu'une œuvre du XIXe siècle sur une place publique ? C'est une œuvre qui exprime qu'est-ce qu'était le XIXe siècle. Donc, elle a quand même... Elle a aussi une façon de raconter l'histoire de ce moment-là. Voilà.

  • Speaker #0

    Raconte,

  • Speaker #2

    oĂą chaque format donne vie Ă  une histoire.

  • Speaker #0

    Comment s'est passée la première fois où vous avez vendu une œuvre ? Vous vous en rappelez ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #2

    Je ne sais pas si je me rappelle la première œuvre qu'on a vendue. Je ne sais pas. Mais...

  • Speaker #1

    On a vendu... C'est difficile à dire. Parce que c'est difficile de dire si jamais c'est une œuvre vendue ou si jamais c'est une institution qui a finalement accepté de la prendre dans sa collection. C'est quand même assez différent. Comme démarche ? Non, pas comme démarche, mais comme...

  • Speaker #2

    C'est une œuvre vendue.

  • Speaker #1

    C'est une œuvre vendue, c'est vrai. C'est une œuvre incontestable, on peut dire.

  • Speaker #2

    Disons que le fait de vendre une œuvre, ça fait toujours plaisir. Ça fait toujours plaisir. Ça fait plaisir qu'il y ait quelqu'un qui aime le travail au point de l'acheter. Donc, c'est quand même toujours une...

  • Speaker #1

    C'est quelque chose de joyeux.

  • Speaker #2

    C'est joyeux en dehors du fait qu'on reçoit de l'argent pour vendre une œuvre. Mais c'est aussi une forme de reconnaissance, donc une forme de succès. Donc ça, c'est toujours joyeux. De la première jusqu'à la dernière.

  • Speaker #1

    En fait, ce n'est pas seulement d'avoir de la première, c'est de continuer à en vendre.

  • Speaker #0

    Justement, toutes ces œuvres, quand elles parlent de votre atelier où nous nous trouvons actuellement, ça ne vous rend pas triste ?

  • Speaker #2

    Si, parfois, c'est vraiment difficile de se séparer des œuvres aussi.

  • Speaker #1

    Alors moi,

  • Speaker #2

    je dis,

  • Speaker #1

    tu ne la vends pas, on ne la vend pas, parce que je l'aime trop, etc. Et souvent, je dis ça. Oui.

  • Speaker #0

    Une petite collection privée alors que personne... Non,

  • Speaker #1

    en fait, non. On a des oeuvres.

  • Speaker #2

    Mais c'est vrai qu'il y a quand même des oeuvres qu'on vend malgré le fait que ces difficiles sont séparés. C'est toujours un peu comme une part de nous-mêmes qui part. C'est comme donner son bébé à quelqu'un. On espère qu'il est bien soigné, le bébé. que l'œuvre est en de bon moment et qu'elle sera respectée. Mais oui, c'est parfois dur de se séparer.

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas grave, parce que du coup, on peut en acheter d'autres Ă  d'autres artistes. Parce qu'on a aussi notre petite collection, on ne peut pas croire.

  • Speaker #0

    C'est une dynamique.

  • Speaker #1

    Comment ?

  • Speaker #0

    C'est une dynamique.

  • Speaker #1

    Oui, et puis bon, c'est vrai que même nous, en tant qu'artistes, moi je trouve ça vraiment joyeux d'acheter une œuvre à un artiste. d'aller dans une exposition et de pouvoir dire « Ah, j'aimerais vraiment bien acheter cette œuvre et je vais l'acheter. »

  • Speaker #2

    Et le fait de vendre une œuvre, ça motive aussi, dont on a du mal à se séparer, ça motive de faire une autre œuvre qu'on aime autant ou même plus.

  • Speaker #0

    C'est tout à fait une évolution.

  • Speaker #2

    Oui.

  • Speaker #0

    On en parlait justement avant l'interview. Ici, c'est votre atelier. Mais vous ne vivez pas ici, vous vivez ailleurs. C'est un choix délibéré pour une coupure vie privée-vie professionnelle ?

  • Speaker #2

    Oui, disons que c'est peut-être pas tout à fait un choix délibéré, mais ce n'est pas plus mal, parce que je pense que déjà, on est un couple qui travaille ensemble, donc on ramène quand même notre travail chez nous malgré tout. Il faut dire aussi que chez nous, dans notre appartement, on a une pièce qui est le bureau où on dessine, où on travaille sur l'ordinateur, où on réfléchit, on lit, on fait les recherches. Donc il y a déjà une forme d'atelier aussi intégré à la maison. Et c'est parfois bien aussi de pouvoir fermer une porte, marcher, arriver à un autre lieu, donc avoir cette espèce de séparation. de respirer entre... voilà, ou de rentrer chez soi et d'être baigné dans une autre ambiance. Ceci-ci, ce serait de toute façon impossible de vivre dans le même espace, vu qu'on est... quand même surtout des sculpteurs, un céramiste, qui a beaucoup de poussière, etc. Donc ce serait impossible.

  • Speaker #1

    Il respire un peu.

  • Speaker #2

    Il faudrait déjà que la maison soit sur un autre étage ou à côté. Mais...

  • Speaker #0

    Vous avez dit que vous faites tout en duo. Vous avez déjà eu des envies de faire un truc en solo ? Comme tous les groupes de rock, de temps en temps, il y en a un qui parle et qui fait un homme.

  • Speaker #1

    Alors, je ne te l'ai pas dit, mais... Non, c'est pas vrai.

  • Speaker #2

    Pas vraiment pour l'instant, mais... Non, pas vrai.

  • Speaker #1

    Non, mais pour l'instant...

  • Speaker #2

    Ce n'est pas Ă  exclure, mais pour l'instant, on ne l'a pas fait en tout cas.

  • Speaker #0

    Et vous n'avez jamais eu de panne d'inspiration ? Des moments où votre carrière est déjà maintenant assez longue ? Il n'y a pas eu des moments où on ne trouve pas ?

  • Speaker #1

    Non. En fait, on a eu de panne beaucoup de choses. Par exemple, manque de moyens.

  • Speaker #0

    Le manque de temps pour les matériaux.

  • Speaker #1

    Oui, c'est du manque de temps, je trouve. Mais en fait, le nombre de choses qu'on a envie de faire...

  • Speaker #0

    C'est plutĂ´t le contraire, en fait. VoilĂ ,

  • Speaker #1

    c'est assez problématique.

  • Speaker #2

    C'est ça. Et en plus, on a quand même... On a aussi des projets qu'on a développés, qu'on a dessinés, qu'on a écrits et qu'on n'a jamais...

  • Speaker #1

    Qu'on n'a jamais eu le temps de faire.

  • Speaker #2

    Donc, on a en plus des petits projets dans les tiroirs. que peut-être un jour ils vont se faire, mais peut-être aussi pas. Ce seront toujours des projets inachevés peut-être. Mais c'est-à-dire que parfois, j'ai l'impression qu'on n'aura pas le temps de faire toutes les choses qu'on a envie de faire. Donc c'est plutôt ça.

  • Speaker #0

    Vous n'avez jamais eu envie d'avoir une sorte de factory avec des gens qui viennent travailler avec vous ?

  • Speaker #1

    Ah non.

  • Speaker #2

    C'est-à-dire qu'on a quand même des assistants de temps en temps. on n'a pas des assistants en continu. C'est selon les projets, selon la difficulté du projet, etc. Et aussi, il y a parfois des choses qu'on fait quand même faire. Pensez à de la fonderie ou des choses comme ça. On n'est pas capable de faire ça chez nous. Mais je pense que le fait d'avoir beaucoup de gens qui t'attendent à l'atelier...

  • Speaker #1

    C'est très mieux.

  • Speaker #2

    Nous, on aime... Nous, on aime bien le faire. C'est important pour nous d'être impliqués dans le travail. Et je pense qu'il y a une espèce de pression. Enfin, ça devient industriel. Il commence à y avoir trop de gens. Je pense qu'on perd un peu le lien à l'œuvre.

  • Speaker #1

    On devient un organisateur.

  • Speaker #2

    Je trouve que c'est une autre forme de travail. Personnellement, moi et Jean aussi, on trouve que c'est important de garder le rapport à l'œuvre. Donc ça peut être avec bien sûr de l'aide de temps en temps, parce que c'est difficile de faire vraiment tout. Comme on dit, on a parfois aussi l'impression de ne pas avoir assez de temps. Mais je pense que c'est important d'avoir toujours gardé ce rapport à l'œuvre.

  • Speaker #1

    Oui, puis faire de l'organisation. Parce que quand on commence à avoir un atelier, d'arriver le matin et d'organiser les tâches, tout ça...

  • Speaker #0

    Ça devient une entreprise, en fait, plus un atelier.

  • Speaker #1

    Oui, alors... En plus, comme artiste, c'est risqué, parce que ça veut dire aussi produire tout le temps des grandes œuvres et les vendre. C'est quand même... Ça devient vraiment... Ça met une question...

  • Speaker #2

    Une question de... de production et de vente. On aime bien garder une certaine liberté avec ça. Être capable de se dire, pendant un moment, réfléchir aux choses et on n'a pas dix assistants à payer. Je ne sais pas.

  • Speaker #1

    C'est vraiment ça aussi, je pense, qui est compliqué pour des artistes qui sont comme ça dans un... dans un système très entrepreneurial, c'est que ça devient vraiment des enjeux aussi financiers sans arrêt.

  • Speaker #2

    Je pense que c'est une question de liberté. Je pense qu'on aime bien être libre, libre de décider comme ça, voilà, combien d'œuvres on fait, comment on les fait, de pouvoir expérimenter, de pouvoir prendre le temps par moments de réfléchir.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, même quand il y a des assistants, on expérimente. Parce que la dernière assistante qui était ici, on a expérimenté avec elle des choses que je ne savais pas du tout faire. Donc elle était un peu, des fois... Parce qu'il faut dire aussi une chose, c'est que... Quand on fait les choses soi-même, quand on les expérimente soi-même, il y a quand même toute une partie un peu d'erreurs, de choses qui ne marchent pas très bien. Ce n'est pas grave, parce que ce ne sont pas des enjeux énormes, donc ça va. À la fin, il faut que ça marche, mais bon, sur le moment, ce n'est pas non plus évident.

  • Speaker #2

    Il y a quand mĂŞme tous les deux des amoureux du faire.

  • Speaker #1

    Du faire. On aime bien les faire.

  • Speaker #2

    Donc, on aime bien donner la forme, être aussi dans la pratique, pas seulement dans la conception d'une œuvre, mais aussi dans la pratique de l'artiste. Donc, c'est important pour nous d'avoir ce rapport tactile peut-être à l'œuvre aussi.

  • Speaker #1

    Si on s'intéresse à la robotique, on va apprendre à programmer, mais si on s'intéresse à la céramique, on va apprendre à faire de la céramique. Peut-être qu'on ne fera pas des milliers de choses dans notre vie, mais en tout cas, ça. On le sait. Voilà.

  • Speaker #0

    Il me reste à vous poser la dernière question qui est la même pour tous nos invités. Qui voudrait entendre, voir, lire dans Raconte à votre place ?

  • Speaker #2

    Comment ?

  • Speaker #1

    Qui on aimerait ?

  • Speaker #0

    Qui voudrait Ă  votre place, qu'on pourrait inviter Ă  venir expliquer son travail,

  • Speaker #1

    sa vie ? Moi, je pense à quelqu'un, en tout cas au Luxembourg, que je trouve qui est un vrai témoin de ce qui s'est passé disons les 20 dernières années dans l'art contemporain et dans aussi dans le théâtre dans le dans le théâtre dans l'art dans beaucoup de choses justement dans le milieu culturel c'est josé hamza on la connaît ben je trouve que c'est quelqu'un de très oui alors puisqu'il maintenant à une autre pratique au ministère mais c'est intéressant c'est quelqu'un qui a vraiment navigué dans pas mal de gens disent moi aussi avec moi et l'analyse mais voilà Après, il y a d'autres gens comme artistes.

  • Speaker #0

    Ça peut être autre chose que d'apprendre d'autres choses. Ah oui, ce que vous voulez.

  • Speaker #2

    C'est typiquement le genre de truc, sur le moment, j'ai un blackout.

  • Speaker #0

    C'est une question très difficile.

  • Speaker #2

    Mais après, si je réfléchis, je vais peut-être donner d'autres personnes vraiment que j'aimerais, parce qu'il y a plein de gens que j'aimerais savoir. ce qu'ils ont raconté. Il me faudrait un moment de réflexion, mais plus qu'à une minute, parce que là, c'est trop de pression.

  • Speaker #0

    On en reparlera plus tard. Il me reste Ă  vous remercier. Merci beaucoup Martine, merci beaucoup Jean.

  • Speaker #1

    Merci Ă  toi.

  • Speaker #2

    C'était très agréable d'avoir cette interview. Merci.

  • Speaker #1

    Raconte, s'écoute,

  • Speaker #2

    s'élie. et c'est un câble.

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