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Myriam Leroy: No small talk cover
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Raconte Media - Des histoires qui inspirent, connectent et transforment.

Myriam Leroy: No small talk

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1h00 |08/05/2025
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Description

Dans cette interview, nous partons à la rencontre de l’autrice belge Myriam Leroy. En toute intimité, elle nous parle de ses processus créatifs, de son rapport au monde et de la manière dont elle convoque le réel dans une écriture nourrie de fiction.


Un entretien sans filtre, où, comme elle le dit si bien : « Le small talk, dans la vie de tous les jours ou la vie médiatique, pour moi, c’est douloureux. » Et on ne peut que lui donner raison.


Après des études de journalisme, Myriam plonge dans l’univers médiatique où elle touche à peu près à tout, acquérant une vision lucide et complète de ce milieu. Elle finit par s’en détacher pour se consacrer pleinement à l’écriture. « Pour le bien de ma santé mentale, j’ai besoin de cette forme d’abstraction, de monter vivre dans ma tête, souvent, pour écrire. » Depuis l’enfance, elle ressent une pression constante à rentrer dans un moule — une contrainte contre laquelle elle lutte avec force.


Cette résistance, portée par une colère sourde mais motrice, nourrit son regard affûté sur le monde. Elle le retranscrit dans une œuvre riche, qui se décline aussi bien en romans qu’en pièces de théâtre. Myriam Leroy est également chroniqueuse à la radio, où elle signe la chronique satirique : « Myriam Leroy n’aime pas ».


#processuscréatif #ecriture #autrice #interview #MyriamLeroy #Interview #Littérature #CréationLittéraire #AutriceBelge #Féminisme #Écriture #Roman #Théâtre #Satire #ChroniqueRadio #Intimité #Inspiration


Son instagram : https://www.instagram.com/lareineleroy/


ITW et Réalisation : Anthony Dehez : https://www.instagram.com/anthonydehez/

Cadre et graphisme : Michel Bourgeois : https://www.instagram.com/dbcreation


S'abonner à la chaine : https://www.youtube.com/@raconte_media?sub_confirmation=1

Site web : https://www.raconte.media


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Comme je déteste le small talk que les autres m'infligent, je fais tout pour ne pas moi-même être dans le small talk. Donc j'essaye de créer, de dire vraiment des choses et de répondre vraiment aux questions. Raconte, c'est goût, c'est l'amour. Et ce regard, raconte la rencontre.

  • Speaker #1

    Bonjour Myriam Leroy. Bonjour. Bienvenue sur Raconte.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Sans savoir, tu inaugures quelque chose aujourd'hui sur Raconte, à savoir qu'à la fin de chaque interview, on demande à l'invité d'inviter aussi quelqu'un. Et tu as été invité. Oui. Par quelqu'un d'autre qui est passé avant toi chez nous et c'est Barbara Hornart qui est sommelière ici à Scarbeck.

  • Speaker #0

    Je l'ai entendu.

  • Speaker #1

    Ah ben voilà.

  • Speaker #0

    Ça m'a fait plaisir.

  • Speaker #1

    Ben écoute, j'espère que ça lui fera plaisir aussi de vous regarder mutuellement, de vous découvrir à travers vos interviews respectives.

  • Speaker #0

    Et moi je devrais inviter quelqu'un aussi ?

  • Speaker #1

    Exact. D'accord. Tout à l'heure. Il faut un peu de temps et d'y réfléchir. Les gens t'aiment bien un peu, beaucoup, pas beaucoup. C'est large. Donc voilà, écoute, qui es-tu ? Est-ce que je pourrais te demander de te présenter ?

  • Speaker #0

    Je m'appelle Myriam, j'ai 42 ans, j'habite Ixelles, je suis la maîtresse de mon chien, la locataire de ces lieux. J'écris, et voilà, ce que je fais pour vivre, c'est j'écris.

  • Speaker #1

    Ok, et on est où ici ?

  • Speaker #0

    On est chez moi, on est dans mon salon.

  • Speaker #1

    C'est ici que tu travailles ?

  • Speaker #0

    Euh... Oui, une fois oui. Je travaille beaucoup dans mon lit. C'est moins télégénique, c'est beaucoup plus en bordel. Mais je vais écrire aussi ici. Mais il faut que le projet soit déjà bien lancé pour que je puisse écrire assise. Moi j'ai besoin de commencer mes projets en position semi-couchée. C'est un concept.

  • Speaker #1

    Et ça marche ?

  • Speaker #0

    Des fois oui, et puis des fois non.

  • Speaker #1

    Justement, vu qu'on attaque tout de suite sur le processus créatif, tu écris à quel moment du jour, la nuit ?

  • Speaker #0

    C'est très difficile à dire, il n'y a pas vraiment de régularité. Je sais que j'aime l'été, en tout cas que l'été est propice à la création de nouveaux projets. C'est souvent l'été que je me lance dans des nouvelles idées, parce que je suis moins stimulée, moins stressée, j'ai moins de rendez-vous, il y a plus de place. pour faire affleurer les idées. Mais cet été-ci, elles ne sont pas arrivées. Donc peut-être qu'il n'y aura pas de projet cette année, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Je précise qu'on enregistre ici fin août.

  • Speaker #0

    Oui. Non, mais j'ai beaucoup de choses à faire cet été, des choses pratico-pratiques qui n'avaient rien à voir avec la création. Je n'ai pratiquement pas écrit et je n'ai même pratiquement pas lu. Alors que d'habitude, l'été, j'aime lire un livre par jour. Et là, j'ai lu un livre sur mon été.

  • Speaker #1

    D'où vient ce manque de régularité d'un coup ?

  • Speaker #0

    Je crois que j'ai eu une année assez compliquée. Il s'est passé beaucoup de choses. Il y a eu beaucoup de frustrations, à tout point de vue, personnelles, artistiques, professionnelles. Il y a eu beaucoup de choses qui ne se sont pas passées comme je voulais que ça se passe. Et je pense que ça m'a un peu échaudée. Donc peut-être que je me lance moins spontanément dans des nouveaux projets. C'est peut-être ça. C'est peut-être la crise de la quarantaine. J'en sais rien du tout, en fait. Je m'auto-examine beaucoup pour savoir ce qui s'est passé cet été. Mais je ne sais toujours pas.

  • Speaker #1

    C'est une quête, un peu.

  • Speaker #0

    C'est une quête d'avoir quelque chose à écrire. De savoir ce que je veux écrire. C'est une quête permanente de... D'essayer de trouver la pomme prête à être cueillie dans l'arbre et qui sera bonne à manger. Ça c'est tout le temps. Et c'est des quêtes qui sont souvent couronnées d'un succès. Et cette année particulièrement.

  • Speaker #1

    L'arbre, c'est une mauvaise récolte en fait. Tu n'as pas trouvé d'arbre, tu n'as pas trouvé de fruit.

  • Speaker #0

    Si, peut-être que le fruit est là, mais je ne l'ai pas vu. Il est abrité par le feuillage et il faut que je... C'est toujours comme ça avec les idées. Elles sont là, elles ont toujours été là, mais on passe devant sans les voir ou sans comprendre que c'est précisément celle-là qu'il faut creuser. Donc moi, j'ai cru plusieurs fois avoir trouvé ma pomme cette année. Et puis, pas forcément, ce n'était pas la bonne. Je ne sais pas, voilà. J'ai pas les yeux en face des trous là. Mais c'est peut-être normal, je sors d'une période où j'ai fait que ça, travailler, écrire, brasser des idées dans tous les sens, donc peut-être qu'il faut de la friche un peu pour laisser les choses arriver naturellement. En tout cas c'est sûr qu'il ne faut pas forcer, c'est ça qui est paradoxal, c'est que plus on cherche, moins on trouve.

  • Speaker #1

    Ce qui est propre à quasiment tous les métiers créatifs finalement.

  • Speaker #0

    Oui, oui, bien sûr. Le média intimiste, mais pas indiscret.

  • Speaker #1

    Mais avant tout ça, on va peut-être en revenir à la base, au tout début. Tu viens d'où ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis née en Brabant-Ouallon, et j'ai beaucoup vécu en Brabant-Ouallon. Puis j'ai déménagé à Bruxelles, et je viens... J'ai fait des études de journalisme à l'UCL, et puis progressivement, je me suis désengagée du métier. de journaliste enfin en tout cas des rédactions journalistiques et je pratique toujours l'écriture et l'écriture qui essaye de raconter le monde tel que je le vois mais en motorisant des incursions dans la fiction c'est un peu ta signature littéraire quand on te dit c'est un peu ce qu'on ce qu'on ressent oui enfin j'écris beaucoup sur ce que j'ai sous les yeux quoi parfois avec avec des torsions, de la mise en scène. Et des autorisations que le journalisme ne permettrait pas. Mais ce qui est sûr, c'est que j'ai envie de raconter le réel. Et que je n'invente pas des mondes qui n'existent pas. Je suis très admirative des gens qui arrivent à bâtir des mondes. Mais ce n'est pas ce que je fais. Moi, je n'ai pas toute cette imagination. Mais par contre, j'ai un bon sens de l'observation. Donc voilà, je m'appuie là-dessus pour écrire.

  • Speaker #1

    Une trame documentaire ?

  • Speaker #0

    Sans doute, oui.

  • Speaker #1

    Justement, quand on lit ton premier livre, Ariane, qui relate sa fin de ton enfance, ton début d'adolescence, et aussi une grande description du monde du Brabant-Moison, d'où tu viens.

  • Speaker #0

    Je te coupe juste pour dire que ce n'est pas réellement une description littérale de la fin de mon enfance, de mon adolescence. La narratrice n'a pas de prénom, et c'est aussi à dessein qu'elle n'a pas de prénom, parce qu'à la fois c'est moi, mais ce n'est pas du tout moi. C'est un livre d'autofiction. Je me suis basée sur des choses vécues et vues, et puis j'en ai fait autre chose.

  • Speaker #1

    Mais ça dit quand même beaucoup de choses sur ta perception assez jeune du monde, ce côté documentaire, de voir comment tu étudies les gens, le lieu, la ville d'où tu es originaire, Nivelles, que tu sembles adorer.

  • Speaker #0

    Je ne viens pas de Nivelles. Ah non, mais voilà ! Je ne viens pas de Nivelles, moi je viens d'Otigny et de Wavre. Et j'ai placé l'intrigue de mon livre à Nivelles, notamment parce que ma mère était épouvantée que je puisse dire du mal de Wavre.

  • Speaker #1

    Tu ne peux pas dire du mal de Wavre ?

  • Speaker #0

    Non, mais il passe beaucoup de temps. Il fait beaucoup ses courses, il a beaucoup d'amis. Et donc, elle n'avait pas envie qu'on lui jette des pierres, des goudrons et des plumes quand elle se balade dans la rue. Donc, elle m'a demandé de déplacer mon histoire. Donc, je l'ai déplacé à Nivelles, qui pour moi, était un peu un copier-coller d'Oivre. Enfin, c'est ce que je pensais parce que je connais assez peu Nivelles. Et manifestement, pas du tout. Et les Nivellois sont extrêmement chauvins et très, très, très, très, très heurtés par le portrait pleuvant. peu flatteur que j'ai fait de leur ville. Je ne savais pas du tout que le plus grand danger en écrivant cette histoire, ça allait venir des nivellois.

  • Speaker #1

    Tu as reçu des maux ?

  • Speaker #0

    Oui, beaucoup. Je sais qu'il y a des librairies nivelloises qui ont refusé absolument de mettre le livre en rayon. On rappellera quand même que c'est... une enfant de 12 ans, c'est-à-dire un nivel fictif vu par les yeux d'un enfant de 12 ans dans un livre de fiction. Mais ça a été très au sérieux. Apparemment, ils font partie des Belges les plus chauves, les nivellois. J'ignorais totalement. Un jour, je faisais une dédicace de ce livre à la librairie filigrane et il y a un type dont la tête est hyper familière qui vient faire signer le livre et qui n'a pas l'air content. Il me dit, écrivez Oui. pour un gros con qui habite Nivelles. Et au début, je crois qu'il rigole, il fait une petite blague, puis en fait, il insiste, je dois écrire pour un gros con qui habite Nivelles. Donc j'ai écrit pour un gros con qui habite Nivelles, et je mets quand même une astérisque en disant dédicace, écrite sous la contrainte et tout. Je ne comprends toujours pas l'attitude de ce gars, et puis il se tire en faisant claquer le livre sur le rebord de la table, et il s'en va, il était venu tout seul, comme ça. Et puis à un moment donné, en fait, je ne sais pas, les... Casse du bandit manchot sa ligne et je me souviens de qui c'est. Et c'était Gérard Depré, qui est un homme politique quand même de premier plan. Je me dis, ce mec, il a vécu la violence de la vie politique à tellement d'échelons. il va faire 45 minutes de route pour par vexation pour se faire signer un livre pour un gros con qui habite nivelles voilà c'est marrant c'est un acte politique peut-être pour lui j'imagine peut-être qu'il est très impliqué dans la vie de sa commune je sais pas je connais pas trop le de près en fait la carrière politique déjà de près mais

  • Speaker #1

    voilà le genre d'anecdotes que j'ai eu avec ariane en annivelle pas mal je pense qu'il ya pas beaucoup d'auteurs d'autrices qui peuvent avoir des fans par des fans entre guillemets de cet acabit pas sûr qu'il était fan il

  • Speaker #0

    a quand même acheté le bouquin il a quand même acheté le bouquin, c'est vrai.

  • Speaker #1

    C'est déjà ça. tu l'as dit ce n'est pas vraiment toi c'est un peu des ellipses etc un peu romancer c'est le cas de dire mais qu'est ce que ça fait de vivre dans brabant ouadon dans les années 90 d'où tu viens

  • Speaker #0

    A la fois, moi j'ai adoré mon adolescence parce que c'était enfin une forme d'apprentissage de la liberté, j'ai adoré faire des petites bêtises, j'ai adoré l'apprentissage de la liberté, de la séduction, enfin voilà, tous ces trucs-là. J'ai adoré aussi la découverte de l'alcool quand j'étais jeune ado. Mais je me suis toujours sentie vachement à l'étroit en bravant wallon. J'ai toujours dit que je me tirerais au plus vite. Et en fait, je ne me suis pas tirée si vite que ça. Je pense que j'avais 22 ans quand je suis partie et que je suis allée à Bruxelles. Donc, ce n'est pas non plus comme si j'avais fui. Mais c'est sûr que je me sens beaucoup plus à ma place à Bruxelles. Notamment parce que je ne conduis pas, j'ai une phobie épouvantable de la conduite automobile et que je me sens aussi de plus en plus mal dans les transports en commun. Je suis claustro, j'ai des phobies par milliers. Et l'autonomie en bras bon à l'ongle, quand on a des phobies par milliers, c'est assez compliqué. À Bruxelles, c'est beaucoup plus simple. On peut vivre avec mille phobies à Bruxelles sans que ça change fondamentalement l'existence par rapport à quelqu'un qui n'en a pas. Tandis que quand on habite plus loin, on est plus excentré. C'est plus compliqué. des phobies sociales ou des phobies de claustrophobie des phobies de d'agoraphobie trop isolé par rapport à une grande ville j'ai la phobie de toutes les situations dont on peut s'enfuir facilement au sens propre comme au sens figuré comme une interview par exemple voilà je suis en pleine crise d'angoisse merci de cet effort en tout cas

  • Speaker #1

    C'est intéressant, ça dit aussi un peu une autre facette du personnage, de ta personne.

  • Speaker #0

    Oh, j'ai jamais vraiment eu de nombreuses phobies qui se déplacent avec les années. J'ai longtemps eu la phobie du train, puis maintenant c'est plutôt la phobie des ascenseurs. Je n'ai plus pris l'ascenseur depuis cinq ans, par exemple. Ça par contre, en ville, c'est plus compliqué qu'à la campagne, parce que l'offre d'ascenseur est quand même beaucoup plus pléthorique.

  • Speaker #1

    raconte la rencontre tu prends une filière tu choisis des études comme tu disais de journalisme à l'université de louvain-lanoeuf qui un peu dire pour dire gentiment un entre-soi c'est assez refermé quand même nous voilà neuf avons pas alors je n'ai jamais vraiment pénétré l'entre-soi j'ai pas l'impression de m'être intégré à quoi que ce soit le voir la neuve

  • Speaker #0

    Moi, je ne cotais pas, puisque mes parents habitaient à côté, donc je n'ai pas vécu la vie néo-louvaniste de cercle, de baptême, etc. Je voyais ça, en plus, je n'aimais pas le Val-la-Neuve à l'époque. Ça a un peu changé, ça a même beaucoup changé depuis, mais je n'aimais vraiment pas. Et donc, j'allais en cours et puis je me tirais dès que les cours étaient terminés. Donc, je n'ai pas l'impression non plus d'avoir gardé d'immenses contacts avec les gens rencontrés à la fac, à part ma meilleure amie que j'ai rencontrée sur les bancs de l'université en première candidature.

  • Speaker #1

    mais c'est peut-être un entre-soi mais en communication et journalisme je n'ai pas perçu comme ça en tout cas j'en ai pas bénéficié en tout cas c'est sûr ce que je voulais dire par entre-soi c'était plutôt que c'est tout petit c'est vraiment un truc d'étudiant quasiment c'est tout petit par rapport à des vies des vies étudiantines comme il y en a liège en belgique ou même bruxelles oui

  • Speaker #0

    c'est vrai c'est cet essence du propos oui c'est clair que c'est Surtout une génération qui se côtoie et puis basta. Oui, donc c'est une vie totalement artificielle qu'on vit à l'Ouen-d'Ouve. C'est aussi ça, je crois, qui ne me plaisait pas tellement quand je faisais mes études et qui maintenant me plaît, maintenant que je suis beaucoup plus âgée, pour aller un peu m'abreuver à la sève de ces jeunes personnes que je ne fais plus.

  • Speaker #1

    T'aimais bien les études ?

  • Speaker #0

    Ouais, moi j'ai bien aimé les études. J'ai toujours été très scolaire, j'ai toujours su parfaitement régurgiter la matière quand on me faisait ingurgiter. J'ai adoré les blocus, je pensais à trop souhaite de potasser obsessionnellement des syllabies. C'était une période de grande liberté pour moi, je pouvais me lever à l'heure à laquelle je voulais, c'était très cool, j'aimais beaucoup ça. J'ai bien aimé les études. Avec le recul, je pense que je n'aurais pas choisi ces études-là. C'est sûr que je n'aurais pas choisi ces études-là.

  • Speaker #1

    Tu as choisi quoi ?

  • Speaker #0

    J'aurais fait la réalisation. Probablement à l'IAD, puisque je n'habitais pas à tout près. Ou alors à l'INSAS, si j'avais eu la maturité de quitter la maison et de travailler pour habiter plus loin. Mais oui, j'aurais fait des études artistiques. on le sait pratiquement sûr on peut dire que la réalisation est venue à toi par la suite aussi oui mais je sens qu'il me manque un retard quoi un retard à combler donc c'est aussi pour ça que je mange obsessionnellement des films et des documentaires, des séries, des livres pour combler ce retard. Aussi je viens d'une famille où la culture n'était pas du tout au centre de la vie. Mes parents n'ont pas beaucoup au cinéma, ne disent pas. Donc ils n'écoutent pas de musique, donc c'est vrai que j'ai l'impression d'avoir toujours... Une guerre de retard et d'être autodidacte, forcément. Plus que des gens qui auraient eu un cursus où ils auraient tout compris. Moi, la grille de décryptage, je suis seulement en train de la former.

  • Speaker #1

    C'est intéressant parce qu'à 40 ans passés, tu te dis, alors que tu as un background pour le moins important, tu es seulement en train de former la grille culturelle.

  • Speaker #0

    Alors j'ai quand même eu une hyperphagie de livres, de films, de BD, donc c'est clair que je suis à fond. Donc parler de retard ne serait pas tout à fait juste, mais je sens qu'il y a quelque chose qui a comme un blanc et qu'il faut le combler. Il y a comme un gouffre, il y a comme une béance due peut-être aussi au Brabant-Ouallon, qui n'est pas une province particulièrement tonique d'un point de vue culturel. Il y a une boulimie qui s'est installée et cette boulimie, elle est là aussi pour comprendre. Je vais beaucoup au cinéma, par exemple, pour comprendre comment est faite la saucisse, comment les gens l'ont cuisinée, ce qu'il y a dedans, les ingrédients. Alors, je pourrais m'inscrire à un cours, mais je préfère apprendre avec les œuvres.

  • Speaker #1

    Décortiquant.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Tiens, quel plan ça va être après ? Un plan large, un plan serré ? Oui. Qu'est-ce que...

  • Speaker #0

    Le langage de la caméra, quoi. C'est... Au lieu de l'étudier dans un cours, j'essaie de me poser la question de quelle est l'intention derrière le plan et qu'est-ce que ça me fait à moi, la réceptrice, quoi. Voilà.

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qui t'a toujours passionné ou ça vient seulement maintenant ?

  • Speaker #0

    Clairement, moi, c'est la littérature ma première passion. Le livre, quoi, plus que l'image.

  • Speaker #1

    Justement, à quel moment c'était la rencontre avec la littérature ? Tu viens de dire qu'à la maison, il n'y avait pas beaucoup de culture.

  • Speaker #0

    comment ça s'est fait que tu es tombé dedans mais moi j'ai réussi à lire très très tôt donc à trois ans je savais lire et on a hérité de la bibliothèque de mes grands parents donc j'ai lu tout ce qu'ils avaient donc ça c'était du la bibliothèque rose mais aussi ma médecine naturelle de rick azaray des tout et n'importe quoi beaucoup de n'importe quoi aussi mais donc voilà c'était C'est aussi là une hyperphagie constante. Sans hiérarchie, sans jugement de valeur aussi. Je trouve que j'ai eu de la chance aussi, enfin quelque part quand on vient d'une famille qui n'est pas très cultureuse, on a de la chance de ne pas être moquée, jugée, snobée pour ses goûts et d'avoir l'occasion de les composer soi-même vraiment à 100%. Donc lire, l'acte de lecture, peu importe ce que je lisais, a toujours été pour moi de l'ordre de la respiration dans ma journée. C'était impensable et ça l'est toujours de ne pas lire avant de dormir. par exemple. Donc ça c'est pour le goût de la lecture. Le goût de l'écriture, il est venu très petit aussi. Je me souviens que j'écrivais des petites bandes dessinées pour mes camarades de classe, que je vendais des abonnements pour les petites bandes dessinées.

  • Speaker #1

    Tu vas devenir dans l'entrepreneuriat avec une...

  • Speaker #0

    Oui, en plus, je n'honorais même pas les commandes. Je prenais le fric. Je n'écrivais pas l'épisode 2. Donc oui, j'ai écrit beaucoup de poèmes, beaucoup de poèmes d'amour, beaucoup de chansons. Oui, j'ai toujours... Si je n'écris pas, je ne me sens pas bien. Vraiment, je me sens...

  • Speaker #1

    Depuis cet âge-là.

  • Speaker #0

    Vide.

  • Speaker #1

    Depuis cet âge-là.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    C'est une nourriture, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, et j'ai l'impression que c'est une forme de pleine conscience qui, mentalement, pour ma santé mentale, j'ai vraiment besoin de cette forme d'abstraction dans ma tête, de monter et vivre dans ma tête, souvent, pour écrire. De m'abstraire de la vie sociale pour... ne plus faire qu'à agencer des mots entre eux. Ça c'est complètement capital. Ce qui fait que les périodes de friche intellectuelle, même si je sais qu'elles sont nécessaires à la création, elles sont particulièrement difficiles à vivre pour moi. Parce qu'on ne sait jamais si ça va se remettre, en fait. On ne sait jamais si ça va se rétablir, on ne sait jamais si la soupe ne s'est pas tarie, si je ne portais en moi que trois livres, enfin trois romans et un documentaire. Il n'y a peut-être rien d'autre, c'est possible aussi. Bon, normalement, il devrait y avoir autre chose. Il y avait un fil, j'ai tiré, j'ai vu qu'il y avait quand même une pelote derrière, mais voilà, le reste de la pelote tarde à se manifester.

  • Speaker #1

    Ça te fait peur ?

  • Speaker #0

    Oui, vachement. Oui, j'ai peur, mais ça j'ai l'impression que depuis que j'ai 18 ans, même avant, je me dis toujours, avec un sens du drama quand même assez outré, je suis finie, ça y est, il n'y a plus rien, mes meilleures années sont derrière moi. Oui, mais je me le dis depuis que je suis ado. Et puis, je rebondis, toujours.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qui fait que tu rebondis ?

  • Speaker #0

    Je sais pas. Honnêtement, aucune idée. Si je le savais, je le convoquerais, quoi.

  • Speaker #1

    Tu l'as jamais analysé ?

  • Speaker #0

    Mais si, j'essaye. J'essaye de savoir quelles sont les conditions, justement, de ce rebond, mais... Non, je sais pas. J'ai pas trouvé.

  • Speaker #1

    On avance dans la vie, alors on va revenir au côté plus chronologique des choses. Tu viens de finir tes études à l'université, tu les as réussies vu que tu étais bon élève, comme tu disais. Le premier boulot, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Oh, j'en ai plein parce que je suis arrivée sur le marché du travail au moment où il n'y en avait plus, en tout cas en journalisme.

  • Speaker #1

    On est à quelle année plus ou moins ?

  • Speaker #0

    On est en 2005-2006. Et donc j'ai fait tous les petits boulots possibles et imaginables de la presse. J'ai été maquettiste au Vers l'avenir Brabant Wallon. J'ai été pigiste pour à peu près tout ce qui était possible d'investiguer comme média. Je travaillais partout, à Belle RTL, au Soir Magazine. à la livre. Beaucoup, j'ai travaillé longtemps au site internet des journaux du groupe IPM parce que j'ai rencontré à la salle de sport près de chez moi, alors que j'habitais encore chez mes parents, un des boss du développement web du groupe. Et c'est là que je pense que j'ai vraiment... J'ai commencé à m'asseoir un peu plus confortablement dans l'univers des médias. Enfin, confortablement, il faut le dire vite, parce que c'était vraiment... C'était franchement chiant à faire. Heureusement que les collègues étaient super. On était tous dans la même galère, on s'est bien entendus. C'est ça qui a forgé des bons souvenirs de cette époque. Mais sinon, c'était quand même vraiment répétitif. C'était du bâtonnage de dépêche. On les mettait en ligne, on trouvait un titre, on croppait une photo. C'était ce genre de boulot, la mise en ligne de dépêche.

  • Speaker #1

    Pas très exaltant.

  • Speaker #0

    Pas très exaltant. C'était formateur à certains niveaux. À l'époque aussi, j'étais... modératrice des forums du groupe IPM, parce qu'il n'y avait pas encore les commentaires sous les articles ou s'il fallait aller dans un forum pour commenter. Je pense que c'était évidemment pas aussi orduré qu'aujourd'hui, mais il fallait quand même avoir le cœur bien accroché et l'estomac aussi pour lire toutes ces saloperies. Et donc c'est nous, les petites mains du web, qui devions nettoyer de toutes les invectives, menaces.

  • Speaker #1

    C'est un peu une période transitoire parce que c'est à ce moment-là que c'est apparu finalement tout ça. Les réseaux sociaux, Facebook est né un an ou deux après si je ne me trompe pas.

  • Speaker #0

    Moi je terminais mes études quand les réseaux sociaux sont apparus. Donc quand j'ai commencé mes études, je n'imaginais pas que ça allait prendre une place si grande à tout point de vue. À la fois dans le travail, à la fois en imposant un service après-vente à ce travail. Et je pense que c'est aussi une des raisons pour lesquelles si je devais refaire ma vie, je ne le ferais pas. des études de journalisme parce que j'en ai rien à foutre en fait. d'assurer un service après-vente ou d'assurer une communication autour de mon travail. Ça ne m'intéresse pas, ça ne m'amuse pas.

  • Speaker #1

    Mais au fond, c'est pas très d'un journaliste d'assurer un service après-vente.

  • Speaker #0

    Exactement, je suis tout à fait d'accord. Mais ça le devient, beaucoup. ça devient ça les devises et finir plus dire nous devoir se justifier à tout point de vue en fait c'est ça que tu veux dire il ya évidemment le fait de dealer avec tous les commentaires parfois des commentaires tout à fait constructif mais bon aussi beaucoup de comment haineux, vindicatifs, auxquels longtemps les rédactions ont trouvé qu'il fallait prêter attention. Aujourd'hui on a un peu plus à répondre, si je comprends bien comment les choses se passent, des réponses toutes faites, des lettres type de « je vous remercie » , même quand tu te prends une énorme insulte dans la tronche, le média répond, si c'est sur la page Facebook du du média, du média... répond merci beaucoup pour votre intérêt, une sorte de cirage de pompe très hypocrite, mais qui est supposé calmer la personne en face.

  • Speaker #1

    Ça ne doit pas vraiment marcher.

  • Speaker #0

    Et qui n'entre pas dans la polémique, alors qu'avant, il fallait absolument répondre à chaque commentaire, fâché ou content, et ne pas perdre l'opportunité d'avoir un abonné ou un adhérent. Et c'est fini ça. Tant mieux.

  • Speaker #1

    tu retournerais pas en tout cas non non non et ça nous amène aussi à un autre de thé Un autre de tes travaux, on en a parlé un tout petit peu au début, tu as été dans la réalisation, enfin co-réalisatrice du documentaire Hashtag ça pue.

  • Speaker #0

    Tout à fait, et j'ai aussi co-réalisé un documentaire, un webdoc en 2011 sur l'IVG qui s'appelle Cuisine interne.

  • Speaker #1

    Comment tu rentres ? Tu décides d'abord que tu es du côté journaliste, puis en parallèle littéraire, et puis là tu viens à l'image. Comment ça se fait ? Comment ça se met en place ?

  • Speaker #0

    Alors en réalité, c'est d'abord par le théâtre que j'ai fait mon premier pas de côté des médias. Parce que via les émissions radio pour lesquelles je bossais, j'avais fait la rencontre d'une directrice de théâtre, Nathalie Huffner. qui m'a proposé un jour d'écrire une pièce. Et j'en ai écrite une d'ailleurs, qu'elle n'a pas prise. Et puis, quelques années plus tard, elle m'a redemandé d'écrire quelque chose. Elle m'a fait une commande assez précise. Et là j'ai écrit un truc et c'était déjà trop bien, trop chouette à écrire et trop chouette à regarder réaliser par d'autres, par des comédiens et des comédiennes et par la metteuse en scène qui était Nathalie Huffner, cette espèce d'écriture qui passe pas uniquement par les mots mais qui s'appuie aussi sur des corps. Ça a créé chez moi un sentiment de joie et même un peu de puissance. d'avoir créé un monde, ou participer à créer un monde, puisque c'est de la co-écriture, l'écriture de plateau. Je pense que c'est peut-être bien là qu'en fait l'envie de faire du documentaire, de faire du cinéma de fiction, c'est vraiment affermi. C'est en voyant mes mots mis en scène, mis en voix, mis en espace par d'autres. personne. Et ma première pièce a bien marché, donc ça m'a donné la confiance et ça m'a donné la confiance d'essayer d'autres disciplines aussi, donc littérature, qui était la première chose que je voulais faire dans la vie, c'était écrire des romans. Mais je n'osais pas. Ou j'avais l'impression que c'était un travail de trop longue haleine pour que ma musculature mentale me le permette. Puis finalement, ça va. Et voilà, c'est comme ça. L'idée c'est aussi d'explorer les différents médiums, médias, qui permettent de raconter une histoire telle que j'estime qu'elle doit être racontée. J'ai l'impression que chaque histoire appelle son médium, et bien sûr sa narration, son adresse, etc. Mais il y a des choses que je veux raconter, mais je ne trouve pas du tout ça pertinent de le faire en roman. où je ne trouve pas du tout pertinent de faire ça en pièces. Je choisis l'endroit où il me semble plus juste que ça atterrisse. tu viens de parler de confiance tu es quelqu'un qui a confiance en elle dans la vie de manière générale ou dans tes créations je pense ouais et

  • Speaker #1

    je pense surtout en regardant parce que je me rendais pas bien compte c'est en train en faisant du travail collectif avec d'autres personnes ces dernières années, de la co-écriture par exemple, où je vois Alors je doute toujours du travail en cours, je doute toujours de ce qui est en train d'être fait, je questionne tout le temps la matière, ce qu'on raconte, est-ce qu'on a bien choisi le bon chemin pour le raconter. C'est d'ailleurs un peu chiant pour les gens qui travaillent avec moi, voire tout à fait chiant parce que c'est pas... c'est jamais verrouillé quoi, on n'est jamais sur une autoroute, on est tout le temps en train de prendre des chemins de traverse et c'est pas toujours... je pense que... Même si j'essaie de respecter les gens, quand on travaille collectivement, qu'il y ait toujours quelqu'un qui vienne questionner ce qu'il est en train de faire, ça doit vraiment être difficile à vivre. Mais en travaillant avec ces autres personnes, je me rends compte que j'ai quand même relativement confiance en moi. Et donc c'est par contraste avec le manque de confiance des autres que je me rends compte que chez moi, c'est quand même un truc assez solide. Peut-être que ça vient aussi... Je n'ai pas l'impression d'être née avec cette confiance. Je pense qu'elle est arrivée assez récemment, il y a 5-10 ans peut-être. Parce que je crois que d'une certaine manière, j'ai décidé d'arrêter d'être dans cette posture de la femme qui doute. Qui est une posture que... dans laquelle les femmes se mettent. Parce qu'une femme qui ne doute pas, c'est considéré comme pas féminin, pas jolie. Les femmes sont supposées ne pas avoir confiance en elles. Une femme affirmée a plutôt tendance à... à être disruptive dans l'univers. Et j'ai longtemps joué le jeu de la fille qui n'avait pas confiance en elle. J'ai longtemps fait « mon Dieu, je ne sais pas, c'est nul, je suis nulle, je n'y arriverai pas » . J'ai beaucoup joué ça. Et puis je me suis rendue compte que c'était un jeu justement. Et j'essaye de déconstruire ça. Et donc de reconstruire quelque chose de juste. Et ce qui est juste, c'est que je crois que je suis consciente, assez lucide de mes qualités et de mes défauts aussi, et de mes atouts et de ce dans quoi je suis vraiment nulle. Mais donc, si tu agites le tout, je pense à avoir confiance en moi. est ce que tu penses qu'il ya un avant et un après de documentaires que tu as co réalisé hashtag sa pute ce qu'il ya avant et après oui et non à la fois non parce que ça s'inscrit dans la continuité des du sujet que je creusais à ce moment là et que je continue d'ailleurs à creuser c'est la misogynie. J'ai pas l'impression que ça me met assis, une crédibilité particulièrement éclatante. Parce que dans ces métiers-là, t'as beau avoir fait plein de trucs, tu repars toujours de zéro et c'est comme si t'avais jamais rien fait, t'as encore tout à prouver. ce qui a ses côtés positifs aussi, c'est pas que négatif, mais bon, c'est assez insécurisant. Par contre, là où il y a eu un avant et un après, c'est que j'ai kiffé, quoi. J'ai kiffé faire des tournages, j'ai surtout kiffé le montage, l'étalonnage, toutes ces petits... Moi, les grosses œuvres, c'est pas tellement ce qui m'excite. Je préfère les...

  • Speaker #0

    Donc, aller tourner les at-il-vous, c'était pas trop ton truc, en fait ? Rencontrer...

  • Speaker #1

    J'apprécie encore dix fois plus ... Et même dans l'écriture de bouquins, déplacer des virgules, des respirations, faire des interventions sur des micro-trucs, ça, ça me fait vraiment triper. Et je me suis... J'ai adoré la rencontre avec tous les professionnels du cinéma, qui était pour moi une grande découverte de gens tous plus talentueux et passionnés les uns que les autres. où le film en cours est vraiment le sujet le plus important. C'est paradoxalement un milieu où il y a beaucoup moins d'égo, je trouve, le cinéma, que les médias. Alors que ce qu'on y fait est beaucoup plus chiadé et supposé t'apporter aussi plus d'argent, de gloire, enfin je ne sais pas quoi. En tout cas, c'est contre-intuitif, je trouve, de constater que le milieu du cinéma est plus simple que le milieu des... de la radio, de la télé, de la presse écrite. J'ai adoré me frotter à ces professionnels, professionnels du son, de l'image, des gens hyper spécialisés dans leur domaine, les talonneuses, la monteuse de son. J'ai envie de revivre ça, quoi. J'ai envie de revivre ça plein de fois.

  • Speaker #0

    Côté très technique, en fait.

  • Speaker #1

    Oui, oui. Comment des toutes petites interventions peuvent... Inventer ou proposer un langage différent, une manière de dire différente, très précise. La précision qu'on peut avoir dans l'expression sur des tout petits postes, comme une simple modification de la lumière ou même simplement l'image. La cheffe opératrice, son travail, je trouve ça tout à fait fascinant. ce que racontent les plans, ce que raconte son éclairage. J'ai trouvé ça génial d'explorer ça. Donc oui, il y a un avant et un après ce documentaire. Par rapport à ça, par rapport à mes envies professionnelles, c'est clair. Maintenant, politiquement, je n'ai pas l'impression que ni pour moi, ni pour le monde, il y ait eu vraiment un avant et un après. Parce que les choses n'ont pas changé. Si, en fait, elles sont pires.

  • Speaker #0

    je te suis beaucoup via tes stories instagram je crois que tu aimes beaucoup ça tu en fais un certain nombre par jour et l'autre jour tu avais été je crois dans une école ou une rencontre de jeunes et tu avais un ressenti assez assez fort par rapport à ça, où tu disais que finalement ça s'empirait ? C'était ton ressorti à la sortie de cet événement, si je me rappelle bien en tout cas.

  • Speaker #1

    Non, en fait, en réalité, c'est une intervention qu'on a faite à plusieurs, on était trois, sur l'invisibilisation des femmes dans l'espace public et dans l'histoire. Et donc chacune avec sa spécialisation, moi c'était parce que j'avais écrit un bouquin sur une résistante oubliée, elle était « Allez parler à des jeunes gens » . et une des intervenantes en est sortie particulièrement chamboulée de l'accueil assez hostile qui a été fait aux idées féministes. Moi, je ne sais pas pourquoi, ça ne m'a pas tellement ébranlée parce que peut-être que je le savais déjà. Et qu'un article récent que j'ai lu dans Le Monde démontrait que, d'après je ne sais pas quelle étude récente elle aussi, les jeunes garçons étaient de plus en plus conservateurs et les jeunes filles de plus en plus progressistes, et qu'il y avait un double mouvement en fait, qui créait aussi des tensions, de la friction, de la violence. Parce qu'on a beaucoup tendance à croire à tort que le monde est de plus en plus féministe, C'est clair qu'il y a des gens qui sont... de plus en plus féministe et de plus en plus progressiste. Mais à côté de ça, tu as toute une partie de la population qui est aussi de plus en plus hostile aux idéaux d'égalité. Et c'est comme ça que je l'avais... que j'avais digéré en fait cette rencontre avec ses élèves moi je fais beaucoup je vais beaucoup dans les écoles et en général ça se passe assez bien même plus qu'assez bien ça se passe toujours super bien pour les écoles je vais dans des écoles surtout avec mon deuxième bouquin les Les yeux rouges, qui est un livre d'autofiction où la narratrice est harcelée par un homme. Je suis beaucoup invitée. Je suis beaucoup invitée parce que, comme ça parle de harcèlement et que c'est une problématique capitale dans les écoles et que les enseignants et les directions ont vraiment du mal à savoir par quel bout la prendre, ils prennent mon livre comme support de discussion. Mon livre ne parle pas des ados, donc je pense que les ados ne sont pas... On ne voit pas immédiatement la correspondance qu'il y a entre la situation de cette femme, la narratrice et la leur, mais en classe, moi comme c'est un sujet que je connais très bien, je peux en parler de leur réalité aussi à eux, je crois. Et c'est super, j'ai fait beaucoup de ça en Belgique, beaucoup de ça en France aussi. Et j'adore en fait moi le contact avec les ados, même quand il est musclé, même quand il est parfois un peu hostile. J'en sors toujours avec quelque chose, il se passe toujours un petit truc un peu magique. Qu'avec les adultes, pas. Avec les adultes, les rencontres littéraires, c'est surtout chouette au début de la sortie d'un bouquin, parce que... Tu comprends enfin ce que tu as écrit en le confrontant au regard des autres qui sont face à toi et qui peuvent te faire un retour ou te poser des questions, même quand ils n'ont pas lu le bouquin. Mais à partir d'un certain moment, c'est un peu souvent la même chose et il y a une forme de lassitude qui s'installe. Tandis qu'avec les ados, ce n'est jamais la même chose. C'est très vivant. C'est très vivant et parfois c'est violent un peu, mais moi ça me plaît vachement. Mais certaines personnes peuvent être... Moi je crois que la castagne ça a tendance à m'exciter un peu. Mais certaines personnes, la castagne ça a tendance à les... Donc oui, c'est un constat que je valide totalement. Mon expérience empirique de visite dans les écoles montre qu'il y a de plus en plus de jeunes garçons très hostiles aux idéaux d'égalité et aux idéaux féministes en particulier, et de plus en plus de jeunes filles ultra vénères. ultra instruite en matière de lutte politique, très mature sur ses questions et très agacée par l'inertie en face dans le meilleur des cas et le rejet en face dans le pire des cas. Ça, c'est certain.

  • Speaker #0

    C'est à quel moment de ta vie que tu as pris conscience des luttes féministes ?

  • Speaker #1

    Alors j'ai pris conscience que les luttes féministes me précédaient, il n'y a pas si longtemps en fait. Mais moi je me suis sentie féministe et ça a été un sujet pour moi depuis que je suis enfant. Ça c'est sûr. Depuis que je suis enfant j'ai l'impression qu'on essaie de me mettre dans un moule et que j'essaie d'en sortir. C'est comme ça que j'estime. être féministe ou avoir un regard affaibli sur les choses. J'ai longtemps cru que je pourrais échapper totalement au moule et que, en me battant bien, il n'y aurait pas de déterminisme ni social, ni environnemental, ni de genre. Et c'est aujourd'hui que je me dis, en regardant un peu le passé, que je me suis quand même... J'ai pas gagné sur tous les plans. Et il y a des tas de domaines sur lesquels j'ai abdiqué un peu, en fait, pour avoir la paix. Voilà, en gros, c'est ça. Les luttes féministes m'intéressent vachement. Je lis énormément sur le sujet. Je n'ai pas l'impression, moi, d'avoir une pensée nouvelle et originale à proposer. Ce que je fais, je ne suis pas une théoricienne du féminisme, mais ce que je fais, je crois, dans mon travail, que ce soit en journalisme, en littérature, dans les pièces que j'écris, documentaires, c'est que j'essaye de visibiliser l'expérience sociale des femmes. J'essaye de montrer les choses telles qu'elles sont. J'essaye de « cut the bullshit » . mon ikigai ma mission en tout cas c'est que je crois m'être donné est ce que ça te rend ça te rend connaître Oui, oui, oui, je suis quelqu'un de... assez... Ouais, je suis quelqu'un d'en colère, c'est sûr.

  • Speaker #0

    Mais est-ce que c'est un moteur, cette colère ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, c'est même le moteur principal. La colère, la frustration, le... Ouais, oui, c'est vraiment un moteur à piston, quoi. C'est mon fuel, c'est mon fuel quoi, pour activer le moteur, c'est sûr que c'est la colère. Et la colère n'est pas toujours une colère sociale, c'est parfois des colères très personnelles, c'est parfois des injustices que j'estime avoir subies de manière interpersonnelle et qui ne sont pas forcément politiques. Mais voilà, c'est ça qui me fait écrire, c'est ça qui me fait dire.

  • Speaker #0

    Donc si on te met en colère maintenant, il y a des chances que tu trouves d'inspiration pour le roman que tu as cherché tout l'été ?

  • Speaker #1

    Ah oui, c'est ça que je tiens. Peut-être que s'il m'arrive un énorme malheur, une terrible injustice, il y a un très très bon roman qui va sortir, mais j'aurais dû me frapper cet énorme malheur, cette terrible injustice. Donc je préfère aller puiser dans les malheurs et les injustices qui se sont déjà produits dans le passé. Et donc voilà. Et comme il y en a... me semble-t-il à mon estime un certain nombre je pense que je devrais avoir de quoi de quoi faire mais j'ai pas encore trouvé lequel tu regardes quoi tu parlais tout à l'heure que tu regardais énormément de films etc est ce qu'il ya un style en particulier ou un auteur une autrice non je change beaucoup change beaucoup d'avis change beaucoup de passion j'ai par exemple ma période de... Indienne, où je regardais beaucoup de séries indiennes. Voilà, certaines faites pour le marché américain et d'autres faites pour le marché indien, pour comprendre comment les gens vivent. J'ai beaucoup aimé, puis aussi j'ai eu ma période japonaise, coréenne, comprendre, et en littérature aussi, parce que là même la fiction je trouve apporte des éléments de compréhension du réel, de la manière dont des gens qui vivent très loin de nous vivent. Voilà, mes périodes changent et mes obsessions changent. J'ai beaucoup lu de l'autofiction à une époque. J'adorais, enfin ce que je préférais c'était de voir comment les gens se meuvent dans l'existence. Maintenant l'autofiction, j'en ai vraiment marre. Je cherche de... Je cherche... J'ai cherché beaucoup de la fiction, mais de la fiction très élaborée, pour savoir comment les gens aussi créent les personnages, pour être face à une mécanique d'invention nourrissante, intellectuellement pour moi. Mais je trouve peu de fiction qui ne m'ennuie pas très vite. Donc, je lis beaucoup de longs récits journalistiques, beaucoup d'enquêtes. Voilà. C'est ça ce que je lis beaucoup en ce moment.

  • Speaker #0

    On revient au côté sociologique et documentaire. Ouais. C'est un peu un leitmotiv en fait.

  • Speaker #1

    Les livres d'Ariane Chemin, de Raphaël Baquet, des journalistes du monde. J'essaye de ne pas tous les lire trop vite parce qu'après il n'y en aura plus, mais... Clairement ça me plaît beaucoup. et ça m'intéresse surtout ça m'intéresse parce que je me désintéresse très très vite des choses en ce moment pourquoi peut-être parce que je sens que le voilà j'ai 40 ans plus de 40 ans et je sens que peut-être que le temps est compté et que quand je perds mon temps c'est un temps qui ne reviendra j'ai commencé à comprendre que le temps ne reviendra jamais et que Un livre qui m'énerve, une posture d'auteur qui m'agace, en fait, c'est du temps qui, je pense, ne sert à rien.

  • Speaker #0

    Du temps déprécieux. Oui. C'est récent,

  • Speaker #1

    cet échec de temps.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    c'est très récent.

  • Speaker #0

    Une année file, finalement, la voie avancée à l'orcap. Avant, une après-midi pouvait paraître une éternité. Et puis maintenant ?

  • Speaker #1

    Oui, oui tout à fait, exactement. Les jours, les semaines, les années, ça passe comme des voitures. Donc il est temps de faire des choix, d'arrêter les non-choix. Moi j'ai fait beaucoup de non-choix, mais là il est temps de faire des choix, je crois. Et à tout point de vue.

  • Speaker #0

    Tu as peur de ne pas avoir assez de temps pour faire tout ce que tu voudrais faire ?

  • Speaker #1

    Non pas trop, sûrement, mais c'est pas comme ça que je formule les choses. J'ai peur de perdre tout à fait mon énergie, de ne plus arriver à faire exactement ce que je veux faire. Mais je suis pas, je me dis, oh la la, je suis pas dans l'état d'esprit de se dire, je n'ai plus que 40 ans à vivre, il faut que je me dépêche. Il n'y a pas une dead end à la fin. Moi, je veux juste que la dead end, elle ne soit pas maintenant.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu aimes l'époque ? L'époque dans laquelle on vit ?

  • Speaker #1

    Je ne la déteste pas.

  • Speaker #0

    Mais tu n'aimes pas ?

  • Speaker #1

    J'essaie de... parce que j'ai aimé une époque, peut-être pas. Il y a quand même plein de trucs excitants et intéressants qui se passent en ce moment. On ne peut pas dire que l'époque n'est pas intéressante. Bon, elle est violente, elle est triste à plein de niveaux, mais les gens qui disent qu'ils n'aiment pas l'époque, c'est souvent des gens ou des artistes qu'on lit dans les magazines dire que... On n'a plus de liberté, on ne peut plus rien dire, on ne peut plus rien faire. C'est souvent une vision assez réactionnaire des choses. Moi je trouve qu'on n'a jamais pu autant dire de trucs et faire de trucs. Je me sens beaucoup plus libre, j'ai l'impression que tout le monde est beaucoup plus libre aujourd'hui que dans les années 90 par exemple. Ce que je n'aime pas de l'époque, et là c'est peut-être mon côté réac naissant ou renaissant qui s'exprime, c'est... Peut-être le culte de l'influence, à tout point de vue. Je pense qu'il y a autant d'influenceurs et d'influenceuses que de... de sujets de préoccupation, quoi. Donc, je ne suis pas anti-influenceur ou influenceuse. Moi-même, je consomme pas mal de vidéos, notamment de youtubeurs sur des sujets très précis qui peuvent être considérés comme des influenceurs, des influenceuses. Mais que le nombre d'abonnés, que le nombre de clics soit vraiment l'unique prisme par lequel on envisage quelqu'un aujourd'hui, ça, ça me fait assez peur, quoi. TikTok, ça me fait assez peur aussi. J'ai l'impression que c'est en train de réduire notre capacité d'attention encore plus que ce qu'elle était déjà circonscrite. Donc ouais, ça c'est des trucs qui me font peur. Des trucs liés à une forme d'idiocratie, comme dans le film. Ça, ça me stresse. Mais je trouve que plein de choses aussi qui sont géniales dans l'époque dans laquelle on vit.

  • Speaker #0

    Par exemple ?

  • Speaker #1

    L'émergence publique d'identités plus marginales, qui arrêtent de se cacher, qui existent, des représentations qui n'existaient pas avant, des gens qu'on ne voyait pas avant, qui maintenant sont visibles, parfois spectaculairement visibles. s'agrègent les uns aux autres, qui trouvent des communautés, des familles. Ça c'était pas du tout possible dans les années 90. Dans les années 90, t'avais une identité un peu marginale, je sais pas moi, t'étais neuro-atypique ou... porteur de je sais pas d'une originalité ou envie de revendiquer une originalité battait tout seul quoi tu étais tout seul et en général plutôt j'étais plutôt des pierres quoi et aujourd'hui même si les pierres existent encore tu as aussi le reste quoi tu as aussi la possibilité de de taf il y à d'autres je trouve ça vraiment formidable ce récord la bande originale de ta vie alors là une musique en particulier mais ça je n'en ai strictement aucune idée c'est beaucoup trop vaste comme question tellement vaste que je fais un black out

  • Speaker #0

    Écoute, certains non, d'autres non pas, ce n'est pas une question obligatoire. On a posé à 2-3 personnes, certaines personnes ça vient tout de suite comme ça, presque même pas besoin de poser la question. Et puis d'autres, j'avoue que moi-même si on me la posait, je serais incapable de répondre. C'est un peu fort de ma part de poser une question à laquelle je ne serais pas capable de répondre.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas pourquoi, mais il y a une idée qui me vient, c'est « I wanna be your dog » des Stooges. Pour la pulsation, l'énergie mordante de la chanson.

  • Speaker #0

    Le rythme.

  • Speaker #1

    Oui, mais un truc acéré, électrique et acéré. ça je pense que ça peut c'est une pulsation assez naturel par rapport à mon rythme interne à moi et qu'elle est il ton rythme interne comment c'est quoi ton rythme interne c'est les doigts dans la prise carrément mais ça va ça fait pas trop mal alors ici quand même ça chauffe parfois mais ça marche moi ça me maintient ça me maintient en effet

  • Speaker #0

    Bien. Est-ce que tu as une héroïne, un héros, quelqu'un qui t'a toujours fait fasciner, fait rêver, fictionnel ou vrai ?

  • Speaker #1

    De moins en moins. Clairement, moi je suis une padawan de Virginie Despentes. J'ai énormément d'admiration pour Virginie Despentes. Quand la vie va mal, je me fais souvent une petite interview audio-vidéo de Virginie Despentes sur YouTube. Parce que je trouve sa clairvoyance et son authenticité, ça fait vachement de bien de la lire. Moi c'est quelqu'un qui me procure de l'apaisement, beaucoup. tellement qu'elle est sharp et affûtée. Ouais, Virginie Despentes. c'est bon alors c'est un peu ridicule de dire mon héroïne parce que si ça se trouve en privé c'est une atroce personne je ne pense pas mais tout cas elle donne du sens à l ordonne le monde de manière beaucoup plus claire mais

  • Speaker #0

    est ce que tu voudrais que des gens disent la même chose de l'interview qu'on est en train de tourner que ça les apaise, que ça leur donne du clé ou quoi, quand ils la regarderont, enfin on espère.

  • Speaker #1

    Oui évidemment, je préfère que les gens trouvent que c'est apaisant et stimulant intellectuellement, que ça leur a volé une partie de leur temps qui ne reviendra jamais, c'est sûr. Maintenant est-ce que ça me meut d'une manière ou d'une autre, je sais pas. En tout cas je sais que moi j'aime les gens qui les interviewent, les propos de gens qui ne tournent pas autour du... du pot et qui disent vraiment des choses, qui ne sont pas dans le small talk. Le small talk dans la vie de tous les jours et dans le discours médiatique, c'est vraiment pour moi, c'est douloureux. Et donc, j'essaye en interview, et parfois, je sais que je peux être dans un excès de sincérité à cause de ça. Comme je déteste le small talk que les autres m'infligent, je fais tout pour ne pas moi-même être dans le small talk. Donc, j'essaye de créer, de dire vraiment des choses et de répondre vraiment aux questions et de mobiliser vraiment. Après les interviews, je suis souvent hyper crevée, parce que c'est sportif, je reste pas en surface. Donc oui, si quelqu'un dit que l'interview lui a apporté de la nourriture à quelconque niveau, je serais contente.

  • Speaker #0

    et justement comment tu vis le rapport avec les gens qui te disent des fans etc comment tu échanges avec eux d'une manière ou d'une autre oui je suis dispo sur instagram donc enfin c'est un

  • Speaker #1

    compte privé est verrouillé, mais la plupart des gens, ils me font une demande d'abonnement, je les accepte. Je ne les accepte pas quand ils ont l'air d'immenses psychopathes, mais bon, parfois...

  • Speaker #0

    On l'a fait cet après-midi avant de venir, donc on va vérifier.

  • Speaker #1

    Mais voilà. C'est pour ça qu'il y a beaucoup de gens en attente, parce que parfois, je ne suis pas sûre qu'ils soient des psychopathes ou pas. J'ai complètement oublié ce que je racontais. Oui, voilà, le rapport avec les gens qui me lisent. Oui, oui, en fait, j'ai beaucoup et souvent et un peu trop, parce que j'ai notamment avec mon dernier bouquin, j'ai accepté toutes les invitations. Je dis oui à toutes les invitations. Alors que je m'étais dit non, cette fois-ci, tu vas vraiment choisir. Tu vas faire trois librairies. Et puis c'est tout. Et en fait, j'ai dit oui absolument à tout. J'ai fait tous les festivals. C'était à la fois des trucs prestigieux. Et à la fois des trucs dans des bleds improbables où il y a les trois pelées de tondu, j'ai vraiment tout fait. Et donc j'ai rencontré tout type de gens, des gens complètement indifférents à ce que je faisais, mais aussi des gens, des fans hardcore, des gens qui avaient lu distraitement et d'autres qui avaient fait une exégèse des bouquins, qui les connaissaient mieux que moi. Donc oui, je suis souvent en contact avec des gens qui me lisent et je leur parle souvent. Je crois qu'il faut trouver une posture où à la fois tu entends ce qu'on te dit, mais tu ne prends pas pour argent comptant ni les compliments, ni les scuds. Voilà, c'est... Je sais pas très bien comment on arrive à faire ça. Je pense avec l'habitude, l'expérience. Mais je crois que j'y arrive. Je crois que je sais très exactement ce que j'écris et certains compliments ne me font jamais plaisir parce que je les trouve faux et certains scuds ne me font jamais mal parce que je les trouve faux aussi.

  • Speaker #0

    C'est pari pour la critique.

  • Speaker #1

    Ouais. Je pense que je sais très bien ce que je fais et que... je suis vraiment ces derniers temps je suis ma propre boussole quoi et c'est mon intuition sur mon texte qui doit me laisser la l'impression finale et parce que tartampion on dira de bien ou de mal tartampion ou ou le pape 1 lui envoyer un livre au pape oui non c'est une idée par l'impression que c'est. Ça l'intéressera forcément.

  • Speaker #0

    Avec ça, j'arrive à la fameuse dernière question pour boucler la boucle. Qui voudrais-tu voir, entendre, lire dans Raconte ?

  • Speaker #1

    J'étais tellement concentrée sur tes questions que je n'ai pas réfléchi. Ça doit être absolument un artiste ou une artiste ?

  • Speaker #0

    Forcément, toute personne.

  • Speaker #1

    Alors, moi, je suis assez fascinée par Raja Mawan, l'ancienne coprésidente d'Ecolo.

  • Speaker #0

    notamment pour sa solidité mentale, le fait d'avoir choisi une carrière qui t'expose tout entière, en tant que personne aussi, en tant que corps, en tant que tout. Et elle, j'ai l'impression qu'elle traverse la violence de la vie politique avec une force et une forme de placidité qui me fascine. comprendre avec quelles lunettes elle regarde le monde et comment elle fait pour vivre, survivre et même peut-être même s'amuser de toutes les attaques qu'elle endure, de toutes les violences, les cruautés qui traversent son existence. Pour moi, une petite dissection du cerveau de Raja Mahwan, ça pourrait beaucoup m'intéresser, je pourrais beaucoup apprendre, je crois.

  • Speaker #1

    Écoute, on va essayer de programmer cette dissection prochainement. Merci beaucoup Myriam. Merci.

Description

Dans cette interview, nous partons à la rencontre de l’autrice belge Myriam Leroy. En toute intimité, elle nous parle de ses processus créatifs, de son rapport au monde et de la manière dont elle convoque le réel dans une écriture nourrie de fiction.


Un entretien sans filtre, où, comme elle le dit si bien : « Le small talk, dans la vie de tous les jours ou la vie médiatique, pour moi, c’est douloureux. » Et on ne peut que lui donner raison.


Après des études de journalisme, Myriam plonge dans l’univers médiatique où elle touche à peu près à tout, acquérant une vision lucide et complète de ce milieu. Elle finit par s’en détacher pour se consacrer pleinement à l’écriture. « Pour le bien de ma santé mentale, j’ai besoin de cette forme d’abstraction, de monter vivre dans ma tête, souvent, pour écrire. » Depuis l’enfance, elle ressent une pression constante à rentrer dans un moule — une contrainte contre laquelle elle lutte avec force.


Cette résistance, portée par une colère sourde mais motrice, nourrit son regard affûté sur le monde. Elle le retranscrit dans une œuvre riche, qui se décline aussi bien en romans qu’en pièces de théâtre. Myriam Leroy est également chroniqueuse à la radio, où elle signe la chronique satirique : « Myriam Leroy n’aime pas ».


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Transcription

  • Speaker #0

    Comme je déteste le small talk que les autres m'infligent, je fais tout pour ne pas moi-même être dans le small talk. Donc j'essaye de créer, de dire vraiment des choses et de répondre vraiment aux questions. Raconte, c'est goût, c'est l'amour. Et ce regard, raconte la rencontre.

  • Speaker #1

    Bonjour Myriam Leroy. Bonjour. Bienvenue sur Raconte.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Sans savoir, tu inaugures quelque chose aujourd'hui sur Raconte, à savoir qu'à la fin de chaque interview, on demande à l'invité d'inviter aussi quelqu'un. Et tu as été invité. Oui. Par quelqu'un d'autre qui est passé avant toi chez nous et c'est Barbara Hornart qui est sommelière ici à Scarbeck.

  • Speaker #0

    Je l'ai entendu.

  • Speaker #1

    Ah ben voilà.

  • Speaker #0

    Ça m'a fait plaisir.

  • Speaker #1

    Ben écoute, j'espère que ça lui fera plaisir aussi de vous regarder mutuellement, de vous découvrir à travers vos interviews respectives.

  • Speaker #0

    Et moi je devrais inviter quelqu'un aussi ?

  • Speaker #1

    Exact. D'accord. Tout à l'heure. Il faut un peu de temps et d'y réfléchir. Les gens t'aiment bien un peu, beaucoup, pas beaucoup. C'est large. Donc voilà, écoute, qui es-tu ? Est-ce que je pourrais te demander de te présenter ?

  • Speaker #0

    Je m'appelle Myriam, j'ai 42 ans, j'habite Ixelles, je suis la maîtresse de mon chien, la locataire de ces lieux. J'écris, et voilà, ce que je fais pour vivre, c'est j'écris.

  • Speaker #1

    Ok, et on est où ici ?

  • Speaker #0

    On est chez moi, on est dans mon salon.

  • Speaker #1

    C'est ici que tu travailles ?

  • Speaker #0

    Euh... Oui, une fois oui. Je travaille beaucoup dans mon lit. C'est moins télégénique, c'est beaucoup plus en bordel. Mais je vais écrire aussi ici. Mais il faut que le projet soit déjà bien lancé pour que je puisse écrire assise. Moi j'ai besoin de commencer mes projets en position semi-couchée. C'est un concept.

  • Speaker #1

    Et ça marche ?

  • Speaker #0

    Des fois oui, et puis des fois non.

  • Speaker #1

    Justement, vu qu'on attaque tout de suite sur le processus créatif, tu écris à quel moment du jour, la nuit ?

  • Speaker #0

    C'est très difficile à dire, il n'y a pas vraiment de régularité. Je sais que j'aime l'été, en tout cas que l'été est propice à la création de nouveaux projets. C'est souvent l'été que je me lance dans des nouvelles idées, parce que je suis moins stimulée, moins stressée, j'ai moins de rendez-vous, il y a plus de place. pour faire affleurer les idées. Mais cet été-ci, elles ne sont pas arrivées. Donc peut-être qu'il n'y aura pas de projet cette année, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Je précise qu'on enregistre ici fin août.

  • Speaker #0

    Oui. Non, mais j'ai beaucoup de choses à faire cet été, des choses pratico-pratiques qui n'avaient rien à voir avec la création. Je n'ai pratiquement pas écrit et je n'ai même pratiquement pas lu. Alors que d'habitude, l'été, j'aime lire un livre par jour. Et là, j'ai lu un livre sur mon été.

  • Speaker #1

    D'où vient ce manque de régularité d'un coup ?

  • Speaker #0

    Je crois que j'ai eu une année assez compliquée. Il s'est passé beaucoup de choses. Il y a eu beaucoup de frustrations, à tout point de vue, personnelles, artistiques, professionnelles. Il y a eu beaucoup de choses qui ne se sont pas passées comme je voulais que ça se passe. Et je pense que ça m'a un peu échaudée. Donc peut-être que je me lance moins spontanément dans des nouveaux projets. C'est peut-être ça. C'est peut-être la crise de la quarantaine. J'en sais rien du tout, en fait. Je m'auto-examine beaucoup pour savoir ce qui s'est passé cet été. Mais je ne sais toujours pas.

  • Speaker #1

    C'est une quête, un peu.

  • Speaker #0

    C'est une quête d'avoir quelque chose à écrire. De savoir ce que je veux écrire. C'est une quête permanente de... D'essayer de trouver la pomme prête à être cueillie dans l'arbre et qui sera bonne à manger. Ça c'est tout le temps. Et c'est des quêtes qui sont souvent couronnées d'un succès. Et cette année particulièrement.

  • Speaker #1

    L'arbre, c'est une mauvaise récolte en fait. Tu n'as pas trouvé d'arbre, tu n'as pas trouvé de fruit.

  • Speaker #0

    Si, peut-être que le fruit est là, mais je ne l'ai pas vu. Il est abrité par le feuillage et il faut que je... C'est toujours comme ça avec les idées. Elles sont là, elles ont toujours été là, mais on passe devant sans les voir ou sans comprendre que c'est précisément celle-là qu'il faut creuser. Donc moi, j'ai cru plusieurs fois avoir trouvé ma pomme cette année. Et puis, pas forcément, ce n'était pas la bonne. Je ne sais pas, voilà. J'ai pas les yeux en face des trous là. Mais c'est peut-être normal, je sors d'une période où j'ai fait que ça, travailler, écrire, brasser des idées dans tous les sens, donc peut-être qu'il faut de la friche un peu pour laisser les choses arriver naturellement. En tout cas c'est sûr qu'il ne faut pas forcer, c'est ça qui est paradoxal, c'est que plus on cherche, moins on trouve.

  • Speaker #1

    Ce qui est propre à quasiment tous les métiers créatifs finalement.

  • Speaker #0

    Oui, oui, bien sûr. Le média intimiste, mais pas indiscret.

  • Speaker #1

    Mais avant tout ça, on va peut-être en revenir à la base, au tout début. Tu viens d'où ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis née en Brabant-Ouallon, et j'ai beaucoup vécu en Brabant-Ouallon. Puis j'ai déménagé à Bruxelles, et je viens... J'ai fait des études de journalisme à l'UCL, et puis progressivement, je me suis désengagée du métier. de journaliste enfin en tout cas des rédactions journalistiques et je pratique toujours l'écriture et l'écriture qui essaye de raconter le monde tel que je le vois mais en motorisant des incursions dans la fiction c'est un peu ta signature littéraire quand on te dit c'est un peu ce qu'on ce qu'on ressent oui enfin j'écris beaucoup sur ce que j'ai sous les yeux quoi parfois avec avec des torsions, de la mise en scène. Et des autorisations que le journalisme ne permettrait pas. Mais ce qui est sûr, c'est que j'ai envie de raconter le réel. Et que je n'invente pas des mondes qui n'existent pas. Je suis très admirative des gens qui arrivent à bâtir des mondes. Mais ce n'est pas ce que je fais. Moi, je n'ai pas toute cette imagination. Mais par contre, j'ai un bon sens de l'observation. Donc voilà, je m'appuie là-dessus pour écrire.

  • Speaker #1

    Une trame documentaire ?

  • Speaker #0

    Sans doute, oui.

  • Speaker #1

    Justement, quand on lit ton premier livre, Ariane, qui relate sa fin de ton enfance, ton début d'adolescence, et aussi une grande description du monde du Brabant-Moison, d'où tu viens.

  • Speaker #0

    Je te coupe juste pour dire que ce n'est pas réellement une description littérale de la fin de mon enfance, de mon adolescence. La narratrice n'a pas de prénom, et c'est aussi à dessein qu'elle n'a pas de prénom, parce qu'à la fois c'est moi, mais ce n'est pas du tout moi. C'est un livre d'autofiction. Je me suis basée sur des choses vécues et vues, et puis j'en ai fait autre chose.

  • Speaker #1

    Mais ça dit quand même beaucoup de choses sur ta perception assez jeune du monde, ce côté documentaire, de voir comment tu étudies les gens, le lieu, la ville d'où tu es originaire, Nivelles, que tu sembles adorer.

  • Speaker #0

    Je ne viens pas de Nivelles. Ah non, mais voilà ! Je ne viens pas de Nivelles, moi je viens d'Otigny et de Wavre. Et j'ai placé l'intrigue de mon livre à Nivelles, notamment parce que ma mère était épouvantée que je puisse dire du mal de Wavre.

  • Speaker #1

    Tu ne peux pas dire du mal de Wavre ?

  • Speaker #0

    Non, mais il passe beaucoup de temps. Il fait beaucoup ses courses, il a beaucoup d'amis. Et donc, elle n'avait pas envie qu'on lui jette des pierres, des goudrons et des plumes quand elle se balade dans la rue. Donc, elle m'a demandé de déplacer mon histoire. Donc, je l'ai déplacé à Nivelles, qui pour moi, était un peu un copier-coller d'Oivre. Enfin, c'est ce que je pensais parce que je connais assez peu Nivelles. Et manifestement, pas du tout. Et les Nivellois sont extrêmement chauvins et très, très, très, très, très heurtés par le portrait pleuvant. peu flatteur que j'ai fait de leur ville. Je ne savais pas du tout que le plus grand danger en écrivant cette histoire, ça allait venir des nivellois.

  • Speaker #1

    Tu as reçu des maux ?

  • Speaker #0

    Oui, beaucoup. Je sais qu'il y a des librairies nivelloises qui ont refusé absolument de mettre le livre en rayon. On rappellera quand même que c'est... une enfant de 12 ans, c'est-à-dire un nivel fictif vu par les yeux d'un enfant de 12 ans dans un livre de fiction. Mais ça a été très au sérieux. Apparemment, ils font partie des Belges les plus chauves, les nivellois. J'ignorais totalement. Un jour, je faisais une dédicace de ce livre à la librairie filigrane et il y a un type dont la tête est hyper familière qui vient faire signer le livre et qui n'a pas l'air content. Il me dit, écrivez Oui. pour un gros con qui habite Nivelles. Et au début, je crois qu'il rigole, il fait une petite blague, puis en fait, il insiste, je dois écrire pour un gros con qui habite Nivelles. Donc j'ai écrit pour un gros con qui habite Nivelles, et je mets quand même une astérisque en disant dédicace, écrite sous la contrainte et tout. Je ne comprends toujours pas l'attitude de ce gars, et puis il se tire en faisant claquer le livre sur le rebord de la table, et il s'en va, il était venu tout seul, comme ça. Et puis à un moment donné, en fait, je ne sais pas, les... Casse du bandit manchot sa ligne et je me souviens de qui c'est. Et c'était Gérard Depré, qui est un homme politique quand même de premier plan. Je me dis, ce mec, il a vécu la violence de la vie politique à tellement d'échelons. il va faire 45 minutes de route pour par vexation pour se faire signer un livre pour un gros con qui habite nivelles voilà c'est marrant c'est un acte politique peut-être pour lui j'imagine peut-être qu'il est très impliqué dans la vie de sa commune je sais pas je connais pas trop le de près en fait la carrière politique déjà de près mais

  • Speaker #1

    voilà le genre d'anecdotes que j'ai eu avec ariane en annivelle pas mal je pense qu'il ya pas beaucoup d'auteurs d'autrices qui peuvent avoir des fans par des fans entre guillemets de cet acabit pas sûr qu'il était fan il

  • Speaker #0

    a quand même acheté le bouquin il a quand même acheté le bouquin, c'est vrai.

  • Speaker #1

    C'est déjà ça. tu l'as dit ce n'est pas vraiment toi c'est un peu des ellipses etc un peu romancer c'est le cas de dire mais qu'est ce que ça fait de vivre dans brabant ouadon dans les années 90 d'où tu viens

  • Speaker #0

    A la fois, moi j'ai adoré mon adolescence parce que c'était enfin une forme d'apprentissage de la liberté, j'ai adoré faire des petites bêtises, j'ai adoré l'apprentissage de la liberté, de la séduction, enfin voilà, tous ces trucs-là. J'ai adoré aussi la découverte de l'alcool quand j'étais jeune ado. Mais je me suis toujours sentie vachement à l'étroit en bravant wallon. J'ai toujours dit que je me tirerais au plus vite. Et en fait, je ne me suis pas tirée si vite que ça. Je pense que j'avais 22 ans quand je suis partie et que je suis allée à Bruxelles. Donc, ce n'est pas non plus comme si j'avais fui. Mais c'est sûr que je me sens beaucoup plus à ma place à Bruxelles. Notamment parce que je ne conduis pas, j'ai une phobie épouvantable de la conduite automobile et que je me sens aussi de plus en plus mal dans les transports en commun. Je suis claustro, j'ai des phobies par milliers. Et l'autonomie en bras bon à l'ongle, quand on a des phobies par milliers, c'est assez compliqué. À Bruxelles, c'est beaucoup plus simple. On peut vivre avec mille phobies à Bruxelles sans que ça change fondamentalement l'existence par rapport à quelqu'un qui n'en a pas. Tandis que quand on habite plus loin, on est plus excentré. C'est plus compliqué. des phobies sociales ou des phobies de claustrophobie des phobies de d'agoraphobie trop isolé par rapport à une grande ville j'ai la phobie de toutes les situations dont on peut s'enfuir facilement au sens propre comme au sens figuré comme une interview par exemple voilà je suis en pleine crise d'angoisse merci de cet effort en tout cas

  • Speaker #1

    C'est intéressant, ça dit aussi un peu une autre facette du personnage, de ta personne.

  • Speaker #0

    Oh, j'ai jamais vraiment eu de nombreuses phobies qui se déplacent avec les années. J'ai longtemps eu la phobie du train, puis maintenant c'est plutôt la phobie des ascenseurs. Je n'ai plus pris l'ascenseur depuis cinq ans, par exemple. Ça par contre, en ville, c'est plus compliqué qu'à la campagne, parce que l'offre d'ascenseur est quand même beaucoup plus pléthorique.

  • Speaker #1

    raconte la rencontre tu prends une filière tu choisis des études comme tu disais de journalisme à l'université de louvain-lanoeuf qui un peu dire pour dire gentiment un entre-soi c'est assez refermé quand même nous voilà neuf avons pas alors je n'ai jamais vraiment pénétré l'entre-soi j'ai pas l'impression de m'être intégré à quoi que ce soit le voir la neuve

  • Speaker #0

    Moi, je ne cotais pas, puisque mes parents habitaient à côté, donc je n'ai pas vécu la vie néo-louvaniste de cercle, de baptême, etc. Je voyais ça, en plus, je n'aimais pas le Val-la-Neuve à l'époque. Ça a un peu changé, ça a même beaucoup changé depuis, mais je n'aimais vraiment pas. Et donc, j'allais en cours et puis je me tirais dès que les cours étaient terminés. Donc, je n'ai pas l'impression non plus d'avoir gardé d'immenses contacts avec les gens rencontrés à la fac, à part ma meilleure amie que j'ai rencontrée sur les bancs de l'université en première candidature.

  • Speaker #1

    mais c'est peut-être un entre-soi mais en communication et journalisme je n'ai pas perçu comme ça en tout cas j'en ai pas bénéficié en tout cas c'est sûr ce que je voulais dire par entre-soi c'était plutôt que c'est tout petit c'est vraiment un truc d'étudiant quasiment c'est tout petit par rapport à des vies des vies étudiantines comme il y en a liège en belgique ou même bruxelles oui

  • Speaker #0

    c'est vrai c'est cet essence du propos oui c'est clair que c'est Surtout une génération qui se côtoie et puis basta. Oui, donc c'est une vie totalement artificielle qu'on vit à l'Ouen-d'Ouve. C'est aussi ça, je crois, qui ne me plaisait pas tellement quand je faisais mes études et qui maintenant me plaît, maintenant que je suis beaucoup plus âgée, pour aller un peu m'abreuver à la sève de ces jeunes personnes que je ne fais plus.

  • Speaker #1

    T'aimais bien les études ?

  • Speaker #0

    Ouais, moi j'ai bien aimé les études. J'ai toujours été très scolaire, j'ai toujours su parfaitement régurgiter la matière quand on me faisait ingurgiter. J'ai adoré les blocus, je pensais à trop souhaite de potasser obsessionnellement des syllabies. C'était une période de grande liberté pour moi, je pouvais me lever à l'heure à laquelle je voulais, c'était très cool, j'aimais beaucoup ça. J'ai bien aimé les études. Avec le recul, je pense que je n'aurais pas choisi ces études-là. C'est sûr que je n'aurais pas choisi ces études-là.

  • Speaker #1

    Tu as choisi quoi ?

  • Speaker #0

    J'aurais fait la réalisation. Probablement à l'IAD, puisque je n'habitais pas à tout près. Ou alors à l'INSAS, si j'avais eu la maturité de quitter la maison et de travailler pour habiter plus loin. Mais oui, j'aurais fait des études artistiques. on le sait pratiquement sûr on peut dire que la réalisation est venue à toi par la suite aussi oui mais je sens qu'il me manque un retard quoi un retard à combler donc c'est aussi pour ça que je mange obsessionnellement des films et des documentaires, des séries, des livres pour combler ce retard. Aussi je viens d'une famille où la culture n'était pas du tout au centre de la vie. Mes parents n'ont pas beaucoup au cinéma, ne disent pas. Donc ils n'écoutent pas de musique, donc c'est vrai que j'ai l'impression d'avoir toujours... Une guerre de retard et d'être autodidacte, forcément. Plus que des gens qui auraient eu un cursus où ils auraient tout compris. Moi, la grille de décryptage, je suis seulement en train de la former.

  • Speaker #1

    C'est intéressant parce qu'à 40 ans passés, tu te dis, alors que tu as un background pour le moins important, tu es seulement en train de former la grille culturelle.

  • Speaker #0

    Alors j'ai quand même eu une hyperphagie de livres, de films, de BD, donc c'est clair que je suis à fond. Donc parler de retard ne serait pas tout à fait juste, mais je sens qu'il y a quelque chose qui a comme un blanc et qu'il faut le combler. Il y a comme un gouffre, il y a comme une béance due peut-être aussi au Brabant-Ouallon, qui n'est pas une province particulièrement tonique d'un point de vue culturel. Il y a une boulimie qui s'est installée et cette boulimie, elle est là aussi pour comprendre. Je vais beaucoup au cinéma, par exemple, pour comprendre comment est faite la saucisse, comment les gens l'ont cuisinée, ce qu'il y a dedans, les ingrédients. Alors, je pourrais m'inscrire à un cours, mais je préfère apprendre avec les œuvres.

  • Speaker #1

    Décortiquant.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Tiens, quel plan ça va être après ? Un plan large, un plan serré ? Oui. Qu'est-ce que...

  • Speaker #0

    Le langage de la caméra, quoi. C'est... Au lieu de l'étudier dans un cours, j'essaie de me poser la question de quelle est l'intention derrière le plan et qu'est-ce que ça me fait à moi, la réceptrice, quoi. Voilà.

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qui t'a toujours passionné ou ça vient seulement maintenant ?

  • Speaker #0

    Clairement, moi, c'est la littérature ma première passion. Le livre, quoi, plus que l'image.

  • Speaker #1

    Justement, à quel moment c'était la rencontre avec la littérature ? Tu viens de dire qu'à la maison, il n'y avait pas beaucoup de culture.

  • Speaker #0

    comment ça s'est fait que tu es tombé dedans mais moi j'ai réussi à lire très très tôt donc à trois ans je savais lire et on a hérité de la bibliothèque de mes grands parents donc j'ai lu tout ce qu'ils avaient donc ça c'était du la bibliothèque rose mais aussi ma médecine naturelle de rick azaray des tout et n'importe quoi beaucoup de n'importe quoi aussi mais donc voilà c'était C'est aussi là une hyperphagie constante. Sans hiérarchie, sans jugement de valeur aussi. Je trouve que j'ai eu de la chance aussi, enfin quelque part quand on vient d'une famille qui n'est pas très cultureuse, on a de la chance de ne pas être moquée, jugée, snobée pour ses goûts et d'avoir l'occasion de les composer soi-même vraiment à 100%. Donc lire, l'acte de lecture, peu importe ce que je lisais, a toujours été pour moi de l'ordre de la respiration dans ma journée. C'était impensable et ça l'est toujours de ne pas lire avant de dormir. par exemple. Donc ça c'est pour le goût de la lecture. Le goût de l'écriture, il est venu très petit aussi. Je me souviens que j'écrivais des petites bandes dessinées pour mes camarades de classe, que je vendais des abonnements pour les petites bandes dessinées.

  • Speaker #1

    Tu vas devenir dans l'entrepreneuriat avec une...

  • Speaker #0

    Oui, en plus, je n'honorais même pas les commandes. Je prenais le fric. Je n'écrivais pas l'épisode 2. Donc oui, j'ai écrit beaucoup de poèmes, beaucoup de poèmes d'amour, beaucoup de chansons. Oui, j'ai toujours... Si je n'écris pas, je ne me sens pas bien. Vraiment, je me sens...

  • Speaker #1

    Depuis cet âge-là.

  • Speaker #0

    Vide.

  • Speaker #1

    Depuis cet âge-là.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    C'est une nourriture, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, et j'ai l'impression que c'est une forme de pleine conscience qui, mentalement, pour ma santé mentale, j'ai vraiment besoin de cette forme d'abstraction dans ma tête, de monter et vivre dans ma tête, souvent, pour écrire. De m'abstraire de la vie sociale pour... ne plus faire qu'à agencer des mots entre eux. Ça c'est complètement capital. Ce qui fait que les périodes de friche intellectuelle, même si je sais qu'elles sont nécessaires à la création, elles sont particulièrement difficiles à vivre pour moi. Parce qu'on ne sait jamais si ça va se remettre, en fait. On ne sait jamais si ça va se rétablir, on ne sait jamais si la soupe ne s'est pas tarie, si je ne portais en moi que trois livres, enfin trois romans et un documentaire. Il n'y a peut-être rien d'autre, c'est possible aussi. Bon, normalement, il devrait y avoir autre chose. Il y avait un fil, j'ai tiré, j'ai vu qu'il y avait quand même une pelote derrière, mais voilà, le reste de la pelote tarde à se manifester.

  • Speaker #1

    Ça te fait peur ?

  • Speaker #0

    Oui, vachement. Oui, j'ai peur, mais ça j'ai l'impression que depuis que j'ai 18 ans, même avant, je me dis toujours, avec un sens du drama quand même assez outré, je suis finie, ça y est, il n'y a plus rien, mes meilleures années sont derrière moi. Oui, mais je me le dis depuis que je suis ado. Et puis, je rebondis, toujours.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qui fait que tu rebondis ?

  • Speaker #0

    Je sais pas. Honnêtement, aucune idée. Si je le savais, je le convoquerais, quoi.

  • Speaker #1

    Tu l'as jamais analysé ?

  • Speaker #0

    Mais si, j'essaye. J'essaye de savoir quelles sont les conditions, justement, de ce rebond, mais... Non, je sais pas. J'ai pas trouvé.

  • Speaker #1

    On avance dans la vie, alors on va revenir au côté plus chronologique des choses. Tu viens de finir tes études à l'université, tu les as réussies vu que tu étais bon élève, comme tu disais. Le premier boulot, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Oh, j'en ai plein parce que je suis arrivée sur le marché du travail au moment où il n'y en avait plus, en tout cas en journalisme.

  • Speaker #1

    On est à quelle année plus ou moins ?

  • Speaker #0

    On est en 2005-2006. Et donc j'ai fait tous les petits boulots possibles et imaginables de la presse. J'ai été maquettiste au Vers l'avenir Brabant Wallon. J'ai été pigiste pour à peu près tout ce qui était possible d'investiguer comme média. Je travaillais partout, à Belle RTL, au Soir Magazine. à la livre. Beaucoup, j'ai travaillé longtemps au site internet des journaux du groupe IPM parce que j'ai rencontré à la salle de sport près de chez moi, alors que j'habitais encore chez mes parents, un des boss du développement web du groupe. Et c'est là que je pense que j'ai vraiment... J'ai commencé à m'asseoir un peu plus confortablement dans l'univers des médias. Enfin, confortablement, il faut le dire vite, parce que c'était vraiment... C'était franchement chiant à faire. Heureusement que les collègues étaient super. On était tous dans la même galère, on s'est bien entendus. C'est ça qui a forgé des bons souvenirs de cette époque. Mais sinon, c'était quand même vraiment répétitif. C'était du bâtonnage de dépêche. On les mettait en ligne, on trouvait un titre, on croppait une photo. C'était ce genre de boulot, la mise en ligne de dépêche.

  • Speaker #1

    Pas très exaltant.

  • Speaker #0

    Pas très exaltant. C'était formateur à certains niveaux. À l'époque aussi, j'étais... modératrice des forums du groupe IPM, parce qu'il n'y avait pas encore les commentaires sous les articles ou s'il fallait aller dans un forum pour commenter. Je pense que c'était évidemment pas aussi orduré qu'aujourd'hui, mais il fallait quand même avoir le cœur bien accroché et l'estomac aussi pour lire toutes ces saloperies. Et donc c'est nous, les petites mains du web, qui devions nettoyer de toutes les invectives, menaces.

  • Speaker #1

    C'est un peu une période transitoire parce que c'est à ce moment-là que c'est apparu finalement tout ça. Les réseaux sociaux, Facebook est né un an ou deux après si je ne me trompe pas.

  • Speaker #0

    Moi je terminais mes études quand les réseaux sociaux sont apparus. Donc quand j'ai commencé mes études, je n'imaginais pas que ça allait prendre une place si grande à tout point de vue. À la fois dans le travail, à la fois en imposant un service après-vente à ce travail. Et je pense que c'est aussi une des raisons pour lesquelles si je devais refaire ma vie, je ne le ferais pas. des études de journalisme parce que j'en ai rien à foutre en fait. d'assurer un service après-vente ou d'assurer une communication autour de mon travail. Ça ne m'intéresse pas, ça ne m'amuse pas.

  • Speaker #1

    Mais au fond, c'est pas très d'un journaliste d'assurer un service après-vente.

  • Speaker #0

    Exactement, je suis tout à fait d'accord. Mais ça le devient, beaucoup. ça devient ça les devises et finir plus dire nous devoir se justifier à tout point de vue en fait c'est ça que tu veux dire il ya évidemment le fait de dealer avec tous les commentaires parfois des commentaires tout à fait constructif mais bon aussi beaucoup de comment haineux, vindicatifs, auxquels longtemps les rédactions ont trouvé qu'il fallait prêter attention. Aujourd'hui on a un peu plus à répondre, si je comprends bien comment les choses se passent, des réponses toutes faites, des lettres type de « je vous remercie » , même quand tu te prends une énorme insulte dans la tronche, le média répond, si c'est sur la page Facebook du du média, du média... répond merci beaucoup pour votre intérêt, une sorte de cirage de pompe très hypocrite, mais qui est supposé calmer la personne en face.

  • Speaker #1

    Ça ne doit pas vraiment marcher.

  • Speaker #0

    Et qui n'entre pas dans la polémique, alors qu'avant, il fallait absolument répondre à chaque commentaire, fâché ou content, et ne pas perdre l'opportunité d'avoir un abonné ou un adhérent. Et c'est fini ça. Tant mieux.

  • Speaker #1

    tu retournerais pas en tout cas non non non et ça nous amène aussi à un autre de thé Un autre de tes travaux, on en a parlé un tout petit peu au début, tu as été dans la réalisation, enfin co-réalisatrice du documentaire Hashtag ça pue.

  • Speaker #0

    Tout à fait, et j'ai aussi co-réalisé un documentaire, un webdoc en 2011 sur l'IVG qui s'appelle Cuisine interne.

  • Speaker #1

    Comment tu rentres ? Tu décides d'abord que tu es du côté journaliste, puis en parallèle littéraire, et puis là tu viens à l'image. Comment ça se fait ? Comment ça se met en place ?

  • Speaker #0

    Alors en réalité, c'est d'abord par le théâtre que j'ai fait mon premier pas de côté des médias. Parce que via les émissions radio pour lesquelles je bossais, j'avais fait la rencontre d'une directrice de théâtre, Nathalie Huffner. qui m'a proposé un jour d'écrire une pièce. Et j'en ai écrite une d'ailleurs, qu'elle n'a pas prise. Et puis, quelques années plus tard, elle m'a redemandé d'écrire quelque chose. Elle m'a fait une commande assez précise. Et là j'ai écrit un truc et c'était déjà trop bien, trop chouette à écrire et trop chouette à regarder réaliser par d'autres, par des comédiens et des comédiennes et par la metteuse en scène qui était Nathalie Huffner, cette espèce d'écriture qui passe pas uniquement par les mots mais qui s'appuie aussi sur des corps. Ça a créé chez moi un sentiment de joie et même un peu de puissance. d'avoir créé un monde, ou participer à créer un monde, puisque c'est de la co-écriture, l'écriture de plateau. Je pense que c'est peut-être bien là qu'en fait l'envie de faire du documentaire, de faire du cinéma de fiction, c'est vraiment affermi. C'est en voyant mes mots mis en scène, mis en voix, mis en espace par d'autres. personne. Et ma première pièce a bien marché, donc ça m'a donné la confiance et ça m'a donné la confiance d'essayer d'autres disciplines aussi, donc littérature, qui était la première chose que je voulais faire dans la vie, c'était écrire des romans. Mais je n'osais pas. Ou j'avais l'impression que c'était un travail de trop longue haleine pour que ma musculature mentale me le permette. Puis finalement, ça va. Et voilà, c'est comme ça. L'idée c'est aussi d'explorer les différents médiums, médias, qui permettent de raconter une histoire telle que j'estime qu'elle doit être racontée. J'ai l'impression que chaque histoire appelle son médium, et bien sûr sa narration, son adresse, etc. Mais il y a des choses que je veux raconter, mais je ne trouve pas du tout ça pertinent de le faire en roman. où je ne trouve pas du tout pertinent de faire ça en pièces. Je choisis l'endroit où il me semble plus juste que ça atterrisse. tu viens de parler de confiance tu es quelqu'un qui a confiance en elle dans la vie de manière générale ou dans tes créations je pense ouais et

  • Speaker #1

    je pense surtout en regardant parce que je me rendais pas bien compte c'est en train en faisant du travail collectif avec d'autres personnes ces dernières années, de la co-écriture par exemple, où je vois Alors je doute toujours du travail en cours, je doute toujours de ce qui est en train d'être fait, je questionne tout le temps la matière, ce qu'on raconte, est-ce qu'on a bien choisi le bon chemin pour le raconter. C'est d'ailleurs un peu chiant pour les gens qui travaillent avec moi, voire tout à fait chiant parce que c'est pas... c'est jamais verrouillé quoi, on n'est jamais sur une autoroute, on est tout le temps en train de prendre des chemins de traverse et c'est pas toujours... je pense que... Même si j'essaie de respecter les gens, quand on travaille collectivement, qu'il y ait toujours quelqu'un qui vienne questionner ce qu'il est en train de faire, ça doit vraiment être difficile à vivre. Mais en travaillant avec ces autres personnes, je me rends compte que j'ai quand même relativement confiance en moi. Et donc c'est par contraste avec le manque de confiance des autres que je me rends compte que chez moi, c'est quand même un truc assez solide. Peut-être que ça vient aussi... Je n'ai pas l'impression d'être née avec cette confiance. Je pense qu'elle est arrivée assez récemment, il y a 5-10 ans peut-être. Parce que je crois que d'une certaine manière, j'ai décidé d'arrêter d'être dans cette posture de la femme qui doute. Qui est une posture que... dans laquelle les femmes se mettent. Parce qu'une femme qui ne doute pas, c'est considéré comme pas féminin, pas jolie. Les femmes sont supposées ne pas avoir confiance en elles. Une femme affirmée a plutôt tendance à... à être disruptive dans l'univers. Et j'ai longtemps joué le jeu de la fille qui n'avait pas confiance en elle. J'ai longtemps fait « mon Dieu, je ne sais pas, c'est nul, je suis nulle, je n'y arriverai pas » . J'ai beaucoup joué ça. Et puis je me suis rendue compte que c'était un jeu justement. Et j'essaye de déconstruire ça. Et donc de reconstruire quelque chose de juste. Et ce qui est juste, c'est que je crois que je suis consciente, assez lucide de mes qualités et de mes défauts aussi, et de mes atouts et de ce dans quoi je suis vraiment nulle. Mais donc, si tu agites le tout, je pense à avoir confiance en moi. est ce que tu penses qu'il ya un avant et un après de documentaires que tu as co réalisé hashtag sa pute ce qu'il ya avant et après oui et non à la fois non parce que ça s'inscrit dans la continuité des du sujet que je creusais à ce moment là et que je continue d'ailleurs à creuser c'est la misogynie. J'ai pas l'impression que ça me met assis, une crédibilité particulièrement éclatante. Parce que dans ces métiers-là, t'as beau avoir fait plein de trucs, tu repars toujours de zéro et c'est comme si t'avais jamais rien fait, t'as encore tout à prouver. ce qui a ses côtés positifs aussi, c'est pas que négatif, mais bon, c'est assez insécurisant. Par contre, là où il y a eu un avant et un après, c'est que j'ai kiffé, quoi. J'ai kiffé faire des tournages, j'ai surtout kiffé le montage, l'étalonnage, toutes ces petits... Moi, les grosses œuvres, c'est pas tellement ce qui m'excite. Je préfère les...

  • Speaker #0

    Donc, aller tourner les at-il-vous, c'était pas trop ton truc, en fait ? Rencontrer...

  • Speaker #1

    J'apprécie encore dix fois plus ... Et même dans l'écriture de bouquins, déplacer des virgules, des respirations, faire des interventions sur des micro-trucs, ça, ça me fait vraiment triper. Et je me suis... J'ai adoré la rencontre avec tous les professionnels du cinéma, qui était pour moi une grande découverte de gens tous plus talentueux et passionnés les uns que les autres. où le film en cours est vraiment le sujet le plus important. C'est paradoxalement un milieu où il y a beaucoup moins d'égo, je trouve, le cinéma, que les médias. Alors que ce qu'on y fait est beaucoup plus chiadé et supposé t'apporter aussi plus d'argent, de gloire, enfin je ne sais pas quoi. En tout cas, c'est contre-intuitif, je trouve, de constater que le milieu du cinéma est plus simple que le milieu des... de la radio, de la télé, de la presse écrite. J'ai adoré me frotter à ces professionnels, professionnels du son, de l'image, des gens hyper spécialisés dans leur domaine, les talonneuses, la monteuse de son. J'ai envie de revivre ça, quoi. J'ai envie de revivre ça plein de fois.

  • Speaker #0

    Côté très technique, en fait.

  • Speaker #1

    Oui, oui. Comment des toutes petites interventions peuvent... Inventer ou proposer un langage différent, une manière de dire différente, très précise. La précision qu'on peut avoir dans l'expression sur des tout petits postes, comme une simple modification de la lumière ou même simplement l'image. La cheffe opératrice, son travail, je trouve ça tout à fait fascinant. ce que racontent les plans, ce que raconte son éclairage. J'ai trouvé ça génial d'explorer ça. Donc oui, il y a un avant et un après ce documentaire. Par rapport à ça, par rapport à mes envies professionnelles, c'est clair. Maintenant, politiquement, je n'ai pas l'impression que ni pour moi, ni pour le monde, il y ait eu vraiment un avant et un après. Parce que les choses n'ont pas changé. Si, en fait, elles sont pires.

  • Speaker #0

    je te suis beaucoup via tes stories instagram je crois que tu aimes beaucoup ça tu en fais un certain nombre par jour et l'autre jour tu avais été je crois dans une école ou une rencontre de jeunes et tu avais un ressenti assez assez fort par rapport à ça, où tu disais que finalement ça s'empirait ? C'était ton ressorti à la sortie de cet événement, si je me rappelle bien en tout cas.

  • Speaker #1

    Non, en fait, en réalité, c'est une intervention qu'on a faite à plusieurs, on était trois, sur l'invisibilisation des femmes dans l'espace public et dans l'histoire. Et donc chacune avec sa spécialisation, moi c'était parce que j'avais écrit un bouquin sur une résistante oubliée, elle était « Allez parler à des jeunes gens » . et une des intervenantes en est sortie particulièrement chamboulée de l'accueil assez hostile qui a été fait aux idées féministes. Moi, je ne sais pas pourquoi, ça ne m'a pas tellement ébranlée parce que peut-être que je le savais déjà. Et qu'un article récent que j'ai lu dans Le Monde démontrait que, d'après je ne sais pas quelle étude récente elle aussi, les jeunes garçons étaient de plus en plus conservateurs et les jeunes filles de plus en plus progressistes, et qu'il y avait un double mouvement en fait, qui créait aussi des tensions, de la friction, de la violence. Parce qu'on a beaucoup tendance à croire à tort que le monde est de plus en plus féministe, C'est clair qu'il y a des gens qui sont... de plus en plus féministe et de plus en plus progressiste. Mais à côté de ça, tu as toute une partie de la population qui est aussi de plus en plus hostile aux idéaux d'égalité. Et c'est comme ça que je l'avais... que j'avais digéré en fait cette rencontre avec ses élèves moi je fais beaucoup je vais beaucoup dans les écoles et en général ça se passe assez bien même plus qu'assez bien ça se passe toujours super bien pour les écoles je vais dans des écoles surtout avec mon deuxième bouquin les Les yeux rouges, qui est un livre d'autofiction où la narratrice est harcelée par un homme. Je suis beaucoup invitée. Je suis beaucoup invitée parce que, comme ça parle de harcèlement et que c'est une problématique capitale dans les écoles et que les enseignants et les directions ont vraiment du mal à savoir par quel bout la prendre, ils prennent mon livre comme support de discussion. Mon livre ne parle pas des ados, donc je pense que les ados ne sont pas... On ne voit pas immédiatement la correspondance qu'il y a entre la situation de cette femme, la narratrice et la leur, mais en classe, moi comme c'est un sujet que je connais très bien, je peux en parler de leur réalité aussi à eux, je crois. Et c'est super, j'ai fait beaucoup de ça en Belgique, beaucoup de ça en France aussi. Et j'adore en fait moi le contact avec les ados, même quand il est musclé, même quand il est parfois un peu hostile. J'en sors toujours avec quelque chose, il se passe toujours un petit truc un peu magique. Qu'avec les adultes, pas. Avec les adultes, les rencontres littéraires, c'est surtout chouette au début de la sortie d'un bouquin, parce que... Tu comprends enfin ce que tu as écrit en le confrontant au regard des autres qui sont face à toi et qui peuvent te faire un retour ou te poser des questions, même quand ils n'ont pas lu le bouquin. Mais à partir d'un certain moment, c'est un peu souvent la même chose et il y a une forme de lassitude qui s'installe. Tandis qu'avec les ados, ce n'est jamais la même chose. C'est très vivant. C'est très vivant et parfois c'est violent un peu, mais moi ça me plaît vachement. Mais certaines personnes peuvent être... Moi je crois que la castagne ça a tendance à m'exciter un peu. Mais certaines personnes, la castagne ça a tendance à les... Donc oui, c'est un constat que je valide totalement. Mon expérience empirique de visite dans les écoles montre qu'il y a de plus en plus de jeunes garçons très hostiles aux idéaux d'égalité et aux idéaux féministes en particulier, et de plus en plus de jeunes filles ultra vénères. ultra instruite en matière de lutte politique, très mature sur ses questions et très agacée par l'inertie en face dans le meilleur des cas et le rejet en face dans le pire des cas. Ça, c'est certain.

  • Speaker #0

    C'est à quel moment de ta vie que tu as pris conscience des luttes féministes ?

  • Speaker #1

    Alors j'ai pris conscience que les luttes féministes me précédaient, il n'y a pas si longtemps en fait. Mais moi je me suis sentie féministe et ça a été un sujet pour moi depuis que je suis enfant. Ça c'est sûr. Depuis que je suis enfant j'ai l'impression qu'on essaie de me mettre dans un moule et que j'essaie d'en sortir. C'est comme ça que j'estime. être féministe ou avoir un regard affaibli sur les choses. J'ai longtemps cru que je pourrais échapper totalement au moule et que, en me battant bien, il n'y aurait pas de déterminisme ni social, ni environnemental, ni de genre. Et c'est aujourd'hui que je me dis, en regardant un peu le passé, que je me suis quand même... J'ai pas gagné sur tous les plans. Et il y a des tas de domaines sur lesquels j'ai abdiqué un peu, en fait, pour avoir la paix. Voilà, en gros, c'est ça. Les luttes féministes m'intéressent vachement. Je lis énormément sur le sujet. Je n'ai pas l'impression, moi, d'avoir une pensée nouvelle et originale à proposer. Ce que je fais, je ne suis pas une théoricienne du féminisme, mais ce que je fais, je crois, dans mon travail, que ce soit en journalisme, en littérature, dans les pièces que j'écris, documentaires, c'est que j'essaye de visibiliser l'expérience sociale des femmes. J'essaye de montrer les choses telles qu'elles sont. J'essaye de « cut the bullshit » . mon ikigai ma mission en tout cas c'est que je crois m'être donné est ce que ça te rend ça te rend connaître Oui, oui, oui, je suis quelqu'un de... assez... Ouais, je suis quelqu'un d'en colère, c'est sûr.

  • Speaker #0

    Mais est-ce que c'est un moteur, cette colère ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, c'est même le moteur principal. La colère, la frustration, le... Ouais, oui, c'est vraiment un moteur à piston, quoi. C'est mon fuel, c'est mon fuel quoi, pour activer le moteur, c'est sûr que c'est la colère. Et la colère n'est pas toujours une colère sociale, c'est parfois des colères très personnelles, c'est parfois des injustices que j'estime avoir subies de manière interpersonnelle et qui ne sont pas forcément politiques. Mais voilà, c'est ça qui me fait écrire, c'est ça qui me fait dire.

  • Speaker #0

    Donc si on te met en colère maintenant, il y a des chances que tu trouves d'inspiration pour le roman que tu as cherché tout l'été ?

  • Speaker #1

    Ah oui, c'est ça que je tiens. Peut-être que s'il m'arrive un énorme malheur, une terrible injustice, il y a un très très bon roman qui va sortir, mais j'aurais dû me frapper cet énorme malheur, cette terrible injustice. Donc je préfère aller puiser dans les malheurs et les injustices qui se sont déjà produits dans le passé. Et donc voilà. Et comme il y en a... me semble-t-il à mon estime un certain nombre je pense que je devrais avoir de quoi de quoi faire mais j'ai pas encore trouvé lequel tu regardes quoi tu parlais tout à l'heure que tu regardais énormément de films etc est ce qu'il ya un style en particulier ou un auteur une autrice non je change beaucoup change beaucoup d'avis change beaucoup de passion j'ai par exemple ma période de... Indienne, où je regardais beaucoup de séries indiennes. Voilà, certaines faites pour le marché américain et d'autres faites pour le marché indien, pour comprendre comment les gens vivent. J'ai beaucoup aimé, puis aussi j'ai eu ma période japonaise, coréenne, comprendre, et en littérature aussi, parce que là même la fiction je trouve apporte des éléments de compréhension du réel, de la manière dont des gens qui vivent très loin de nous vivent. Voilà, mes périodes changent et mes obsessions changent. J'ai beaucoup lu de l'autofiction à une époque. J'adorais, enfin ce que je préférais c'était de voir comment les gens se meuvent dans l'existence. Maintenant l'autofiction, j'en ai vraiment marre. Je cherche de... Je cherche... J'ai cherché beaucoup de la fiction, mais de la fiction très élaborée, pour savoir comment les gens aussi créent les personnages, pour être face à une mécanique d'invention nourrissante, intellectuellement pour moi. Mais je trouve peu de fiction qui ne m'ennuie pas très vite. Donc, je lis beaucoup de longs récits journalistiques, beaucoup d'enquêtes. Voilà. C'est ça ce que je lis beaucoup en ce moment.

  • Speaker #0

    On revient au côté sociologique et documentaire. Ouais. C'est un peu un leitmotiv en fait.

  • Speaker #1

    Les livres d'Ariane Chemin, de Raphaël Baquet, des journalistes du monde. J'essaye de ne pas tous les lire trop vite parce qu'après il n'y en aura plus, mais... Clairement ça me plaît beaucoup. et ça m'intéresse surtout ça m'intéresse parce que je me désintéresse très très vite des choses en ce moment pourquoi peut-être parce que je sens que le voilà j'ai 40 ans plus de 40 ans et je sens que peut-être que le temps est compté et que quand je perds mon temps c'est un temps qui ne reviendra j'ai commencé à comprendre que le temps ne reviendra jamais et que Un livre qui m'énerve, une posture d'auteur qui m'agace, en fait, c'est du temps qui, je pense, ne sert à rien.

  • Speaker #0

    Du temps déprécieux. Oui. C'est récent,

  • Speaker #1

    cet échec de temps.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    c'est très récent.

  • Speaker #0

    Une année file, finalement, la voie avancée à l'orcap. Avant, une après-midi pouvait paraître une éternité. Et puis maintenant ?

  • Speaker #1

    Oui, oui tout à fait, exactement. Les jours, les semaines, les années, ça passe comme des voitures. Donc il est temps de faire des choix, d'arrêter les non-choix. Moi j'ai fait beaucoup de non-choix, mais là il est temps de faire des choix, je crois. Et à tout point de vue.

  • Speaker #0

    Tu as peur de ne pas avoir assez de temps pour faire tout ce que tu voudrais faire ?

  • Speaker #1

    Non pas trop, sûrement, mais c'est pas comme ça que je formule les choses. J'ai peur de perdre tout à fait mon énergie, de ne plus arriver à faire exactement ce que je veux faire. Mais je suis pas, je me dis, oh la la, je suis pas dans l'état d'esprit de se dire, je n'ai plus que 40 ans à vivre, il faut que je me dépêche. Il n'y a pas une dead end à la fin. Moi, je veux juste que la dead end, elle ne soit pas maintenant.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu aimes l'époque ? L'époque dans laquelle on vit ?

  • Speaker #1

    Je ne la déteste pas.

  • Speaker #0

    Mais tu n'aimes pas ?

  • Speaker #1

    J'essaie de... parce que j'ai aimé une époque, peut-être pas. Il y a quand même plein de trucs excitants et intéressants qui se passent en ce moment. On ne peut pas dire que l'époque n'est pas intéressante. Bon, elle est violente, elle est triste à plein de niveaux, mais les gens qui disent qu'ils n'aiment pas l'époque, c'est souvent des gens ou des artistes qu'on lit dans les magazines dire que... On n'a plus de liberté, on ne peut plus rien dire, on ne peut plus rien faire. C'est souvent une vision assez réactionnaire des choses. Moi je trouve qu'on n'a jamais pu autant dire de trucs et faire de trucs. Je me sens beaucoup plus libre, j'ai l'impression que tout le monde est beaucoup plus libre aujourd'hui que dans les années 90 par exemple. Ce que je n'aime pas de l'époque, et là c'est peut-être mon côté réac naissant ou renaissant qui s'exprime, c'est... Peut-être le culte de l'influence, à tout point de vue. Je pense qu'il y a autant d'influenceurs et d'influenceuses que de... de sujets de préoccupation, quoi. Donc, je ne suis pas anti-influenceur ou influenceuse. Moi-même, je consomme pas mal de vidéos, notamment de youtubeurs sur des sujets très précis qui peuvent être considérés comme des influenceurs, des influenceuses. Mais que le nombre d'abonnés, que le nombre de clics soit vraiment l'unique prisme par lequel on envisage quelqu'un aujourd'hui, ça, ça me fait assez peur, quoi. TikTok, ça me fait assez peur aussi. J'ai l'impression que c'est en train de réduire notre capacité d'attention encore plus que ce qu'elle était déjà circonscrite. Donc ouais, ça c'est des trucs qui me font peur. Des trucs liés à une forme d'idiocratie, comme dans le film. Ça, ça me stresse. Mais je trouve que plein de choses aussi qui sont géniales dans l'époque dans laquelle on vit.

  • Speaker #0

    Par exemple ?

  • Speaker #1

    L'émergence publique d'identités plus marginales, qui arrêtent de se cacher, qui existent, des représentations qui n'existaient pas avant, des gens qu'on ne voyait pas avant, qui maintenant sont visibles, parfois spectaculairement visibles. s'agrègent les uns aux autres, qui trouvent des communautés, des familles. Ça c'était pas du tout possible dans les années 90. Dans les années 90, t'avais une identité un peu marginale, je sais pas moi, t'étais neuro-atypique ou... porteur de je sais pas d'une originalité ou envie de revendiquer une originalité battait tout seul quoi tu étais tout seul et en général plutôt j'étais plutôt des pierres quoi et aujourd'hui même si les pierres existent encore tu as aussi le reste quoi tu as aussi la possibilité de de taf il y à d'autres je trouve ça vraiment formidable ce récord la bande originale de ta vie alors là une musique en particulier mais ça je n'en ai strictement aucune idée c'est beaucoup trop vaste comme question tellement vaste que je fais un black out

  • Speaker #0

    Écoute, certains non, d'autres non pas, ce n'est pas une question obligatoire. On a posé à 2-3 personnes, certaines personnes ça vient tout de suite comme ça, presque même pas besoin de poser la question. Et puis d'autres, j'avoue que moi-même si on me la posait, je serais incapable de répondre. C'est un peu fort de ma part de poser une question à laquelle je ne serais pas capable de répondre.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas pourquoi, mais il y a une idée qui me vient, c'est « I wanna be your dog » des Stooges. Pour la pulsation, l'énergie mordante de la chanson.

  • Speaker #0

    Le rythme.

  • Speaker #1

    Oui, mais un truc acéré, électrique et acéré. ça je pense que ça peut c'est une pulsation assez naturel par rapport à mon rythme interne à moi et qu'elle est il ton rythme interne comment c'est quoi ton rythme interne c'est les doigts dans la prise carrément mais ça va ça fait pas trop mal alors ici quand même ça chauffe parfois mais ça marche moi ça me maintient ça me maintient en effet

  • Speaker #0

    Bien. Est-ce que tu as une héroïne, un héros, quelqu'un qui t'a toujours fait fasciner, fait rêver, fictionnel ou vrai ?

  • Speaker #1

    De moins en moins. Clairement, moi je suis une padawan de Virginie Despentes. J'ai énormément d'admiration pour Virginie Despentes. Quand la vie va mal, je me fais souvent une petite interview audio-vidéo de Virginie Despentes sur YouTube. Parce que je trouve sa clairvoyance et son authenticité, ça fait vachement de bien de la lire. Moi c'est quelqu'un qui me procure de l'apaisement, beaucoup. tellement qu'elle est sharp et affûtée. Ouais, Virginie Despentes. c'est bon alors c'est un peu ridicule de dire mon héroïne parce que si ça se trouve en privé c'est une atroce personne je ne pense pas mais tout cas elle donne du sens à l ordonne le monde de manière beaucoup plus claire mais

  • Speaker #0

    est ce que tu voudrais que des gens disent la même chose de l'interview qu'on est en train de tourner que ça les apaise, que ça leur donne du clé ou quoi, quand ils la regarderont, enfin on espère.

  • Speaker #1

    Oui évidemment, je préfère que les gens trouvent que c'est apaisant et stimulant intellectuellement, que ça leur a volé une partie de leur temps qui ne reviendra jamais, c'est sûr. Maintenant est-ce que ça me meut d'une manière ou d'une autre, je sais pas. En tout cas je sais que moi j'aime les gens qui les interviewent, les propos de gens qui ne tournent pas autour du... du pot et qui disent vraiment des choses, qui ne sont pas dans le small talk. Le small talk dans la vie de tous les jours et dans le discours médiatique, c'est vraiment pour moi, c'est douloureux. Et donc, j'essaye en interview, et parfois, je sais que je peux être dans un excès de sincérité à cause de ça. Comme je déteste le small talk que les autres m'infligent, je fais tout pour ne pas moi-même être dans le small talk. Donc, j'essaye de créer, de dire vraiment des choses et de répondre vraiment aux questions et de mobiliser vraiment. Après les interviews, je suis souvent hyper crevée, parce que c'est sportif, je reste pas en surface. Donc oui, si quelqu'un dit que l'interview lui a apporté de la nourriture à quelconque niveau, je serais contente.

  • Speaker #0

    et justement comment tu vis le rapport avec les gens qui te disent des fans etc comment tu échanges avec eux d'une manière ou d'une autre oui je suis dispo sur instagram donc enfin c'est un

  • Speaker #1

    compte privé est verrouillé, mais la plupart des gens, ils me font une demande d'abonnement, je les accepte. Je ne les accepte pas quand ils ont l'air d'immenses psychopathes, mais bon, parfois...

  • Speaker #0

    On l'a fait cet après-midi avant de venir, donc on va vérifier.

  • Speaker #1

    Mais voilà. C'est pour ça qu'il y a beaucoup de gens en attente, parce que parfois, je ne suis pas sûre qu'ils soient des psychopathes ou pas. J'ai complètement oublié ce que je racontais. Oui, voilà, le rapport avec les gens qui me lisent. Oui, oui, en fait, j'ai beaucoup et souvent et un peu trop, parce que j'ai notamment avec mon dernier bouquin, j'ai accepté toutes les invitations. Je dis oui à toutes les invitations. Alors que je m'étais dit non, cette fois-ci, tu vas vraiment choisir. Tu vas faire trois librairies. Et puis c'est tout. Et en fait, j'ai dit oui absolument à tout. J'ai fait tous les festivals. C'était à la fois des trucs prestigieux. Et à la fois des trucs dans des bleds improbables où il y a les trois pelées de tondu, j'ai vraiment tout fait. Et donc j'ai rencontré tout type de gens, des gens complètement indifférents à ce que je faisais, mais aussi des gens, des fans hardcore, des gens qui avaient lu distraitement et d'autres qui avaient fait une exégèse des bouquins, qui les connaissaient mieux que moi. Donc oui, je suis souvent en contact avec des gens qui me lisent et je leur parle souvent. Je crois qu'il faut trouver une posture où à la fois tu entends ce qu'on te dit, mais tu ne prends pas pour argent comptant ni les compliments, ni les scuds. Voilà, c'est... Je sais pas très bien comment on arrive à faire ça. Je pense avec l'habitude, l'expérience. Mais je crois que j'y arrive. Je crois que je sais très exactement ce que j'écris et certains compliments ne me font jamais plaisir parce que je les trouve faux et certains scuds ne me font jamais mal parce que je les trouve faux aussi.

  • Speaker #0

    C'est pari pour la critique.

  • Speaker #1

    Ouais. Je pense que je sais très bien ce que je fais et que... je suis vraiment ces derniers temps je suis ma propre boussole quoi et c'est mon intuition sur mon texte qui doit me laisser la l'impression finale et parce que tartampion on dira de bien ou de mal tartampion ou ou le pape 1 lui envoyer un livre au pape oui non c'est une idée par l'impression que c'est. Ça l'intéressera forcément.

  • Speaker #0

    Avec ça, j'arrive à la fameuse dernière question pour boucler la boucle. Qui voudrais-tu voir, entendre, lire dans Raconte ?

  • Speaker #1

    J'étais tellement concentrée sur tes questions que je n'ai pas réfléchi. Ça doit être absolument un artiste ou une artiste ?

  • Speaker #0

    Forcément, toute personne.

  • Speaker #1

    Alors, moi, je suis assez fascinée par Raja Mawan, l'ancienne coprésidente d'Ecolo.

  • Speaker #0

    notamment pour sa solidité mentale, le fait d'avoir choisi une carrière qui t'expose tout entière, en tant que personne aussi, en tant que corps, en tant que tout. Et elle, j'ai l'impression qu'elle traverse la violence de la vie politique avec une force et une forme de placidité qui me fascine. comprendre avec quelles lunettes elle regarde le monde et comment elle fait pour vivre, survivre et même peut-être même s'amuser de toutes les attaques qu'elle endure, de toutes les violences, les cruautés qui traversent son existence. Pour moi, une petite dissection du cerveau de Raja Mahwan, ça pourrait beaucoup m'intéresser, je pourrais beaucoup apprendre, je crois.

  • Speaker #1

    Écoute, on va essayer de programmer cette dissection prochainement. Merci beaucoup Myriam. Merci.

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Description

Dans cette interview, nous partons à la rencontre de l’autrice belge Myriam Leroy. En toute intimité, elle nous parle de ses processus créatifs, de son rapport au monde et de la manière dont elle convoque le réel dans une écriture nourrie de fiction.


Un entretien sans filtre, où, comme elle le dit si bien : « Le small talk, dans la vie de tous les jours ou la vie médiatique, pour moi, c’est douloureux. » Et on ne peut que lui donner raison.


Après des études de journalisme, Myriam plonge dans l’univers médiatique où elle touche à peu près à tout, acquérant une vision lucide et complète de ce milieu. Elle finit par s’en détacher pour se consacrer pleinement à l’écriture. « Pour le bien de ma santé mentale, j’ai besoin de cette forme d’abstraction, de monter vivre dans ma tête, souvent, pour écrire. » Depuis l’enfance, elle ressent une pression constante à rentrer dans un moule — une contrainte contre laquelle elle lutte avec force.


Cette résistance, portée par une colère sourde mais motrice, nourrit son regard affûté sur le monde. Elle le retranscrit dans une œuvre riche, qui se décline aussi bien en romans qu’en pièces de théâtre. Myriam Leroy est également chroniqueuse à la radio, où elle signe la chronique satirique : « Myriam Leroy n’aime pas ».


#processuscréatif #ecriture #autrice #interview #MyriamLeroy #Interview #Littérature #CréationLittéraire #AutriceBelge #Féminisme #Écriture #Roman #Théâtre #Satire #ChroniqueRadio #Intimité #Inspiration


Son instagram : https://www.instagram.com/lareineleroy/


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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Comme je déteste le small talk que les autres m'infligent, je fais tout pour ne pas moi-même être dans le small talk. Donc j'essaye de créer, de dire vraiment des choses et de répondre vraiment aux questions. Raconte, c'est goût, c'est l'amour. Et ce regard, raconte la rencontre.

  • Speaker #1

    Bonjour Myriam Leroy. Bonjour. Bienvenue sur Raconte.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Sans savoir, tu inaugures quelque chose aujourd'hui sur Raconte, à savoir qu'à la fin de chaque interview, on demande à l'invité d'inviter aussi quelqu'un. Et tu as été invité. Oui. Par quelqu'un d'autre qui est passé avant toi chez nous et c'est Barbara Hornart qui est sommelière ici à Scarbeck.

  • Speaker #0

    Je l'ai entendu.

  • Speaker #1

    Ah ben voilà.

  • Speaker #0

    Ça m'a fait plaisir.

  • Speaker #1

    Ben écoute, j'espère que ça lui fera plaisir aussi de vous regarder mutuellement, de vous découvrir à travers vos interviews respectives.

  • Speaker #0

    Et moi je devrais inviter quelqu'un aussi ?

  • Speaker #1

    Exact. D'accord. Tout à l'heure. Il faut un peu de temps et d'y réfléchir. Les gens t'aiment bien un peu, beaucoup, pas beaucoup. C'est large. Donc voilà, écoute, qui es-tu ? Est-ce que je pourrais te demander de te présenter ?

  • Speaker #0

    Je m'appelle Myriam, j'ai 42 ans, j'habite Ixelles, je suis la maîtresse de mon chien, la locataire de ces lieux. J'écris, et voilà, ce que je fais pour vivre, c'est j'écris.

  • Speaker #1

    Ok, et on est où ici ?

  • Speaker #0

    On est chez moi, on est dans mon salon.

  • Speaker #1

    C'est ici que tu travailles ?

  • Speaker #0

    Euh... Oui, une fois oui. Je travaille beaucoup dans mon lit. C'est moins télégénique, c'est beaucoup plus en bordel. Mais je vais écrire aussi ici. Mais il faut que le projet soit déjà bien lancé pour que je puisse écrire assise. Moi j'ai besoin de commencer mes projets en position semi-couchée. C'est un concept.

  • Speaker #1

    Et ça marche ?

  • Speaker #0

    Des fois oui, et puis des fois non.

  • Speaker #1

    Justement, vu qu'on attaque tout de suite sur le processus créatif, tu écris à quel moment du jour, la nuit ?

  • Speaker #0

    C'est très difficile à dire, il n'y a pas vraiment de régularité. Je sais que j'aime l'été, en tout cas que l'été est propice à la création de nouveaux projets. C'est souvent l'été que je me lance dans des nouvelles idées, parce que je suis moins stimulée, moins stressée, j'ai moins de rendez-vous, il y a plus de place. pour faire affleurer les idées. Mais cet été-ci, elles ne sont pas arrivées. Donc peut-être qu'il n'y aura pas de projet cette année, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Je précise qu'on enregistre ici fin août.

  • Speaker #0

    Oui. Non, mais j'ai beaucoup de choses à faire cet été, des choses pratico-pratiques qui n'avaient rien à voir avec la création. Je n'ai pratiquement pas écrit et je n'ai même pratiquement pas lu. Alors que d'habitude, l'été, j'aime lire un livre par jour. Et là, j'ai lu un livre sur mon été.

  • Speaker #1

    D'où vient ce manque de régularité d'un coup ?

  • Speaker #0

    Je crois que j'ai eu une année assez compliquée. Il s'est passé beaucoup de choses. Il y a eu beaucoup de frustrations, à tout point de vue, personnelles, artistiques, professionnelles. Il y a eu beaucoup de choses qui ne se sont pas passées comme je voulais que ça se passe. Et je pense que ça m'a un peu échaudée. Donc peut-être que je me lance moins spontanément dans des nouveaux projets. C'est peut-être ça. C'est peut-être la crise de la quarantaine. J'en sais rien du tout, en fait. Je m'auto-examine beaucoup pour savoir ce qui s'est passé cet été. Mais je ne sais toujours pas.

  • Speaker #1

    C'est une quête, un peu.

  • Speaker #0

    C'est une quête d'avoir quelque chose à écrire. De savoir ce que je veux écrire. C'est une quête permanente de... D'essayer de trouver la pomme prête à être cueillie dans l'arbre et qui sera bonne à manger. Ça c'est tout le temps. Et c'est des quêtes qui sont souvent couronnées d'un succès. Et cette année particulièrement.

  • Speaker #1

    L'arbre, c'est une mauvaise récolte en fait. Tu n'as pas trouvé d'arbre, tu n'as pas trouvé de fruit.

  • Speaker #0

    Si, peut-être que le fruit est là, mais je ne l'ai pas vu. Il est abrité par le feuillage et il faut que je... C'est toujours comme ça avec les idées. Elles sont là, elles ont toujours été là, mais on passe devant sans les voir ou sans comprendre que c'est précisément celle-là qu'il faut creuser. Donc moi, j'ai cru plusieurs fois avoir trouvé ma pomme cette année. Et puis, pas forcément, ce n'était pas la bonne. Je ne sais pas, voilà. J'ai pas les yeux en face des trous là. Mais c'est peut-être normal, je sors d'une période où j'ai fait que ça, travailler, écrire, brasser des idées dans tous les sens, donc peut-être qu'il faut de la friche un peu pour laisser les choses arriver naturellement. En tout cas c'est sûr qu'il ne faut pas forcer, c'est ça qui est paradoxal, c'est que plus on cherche, moins on trouve.

  • Speaker #1

    Ce qui est propre à quasiment tous les métiers créatifs finalement.

  • Speaker #0

    Oui, oui, bien sûr. Le média intimiste, mais pas indiscret.

  • Speaker #1

    Mais avant tout ça, on va peut-être en revenir à la base, au tout début. Tu viens d'où ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis née en Brabant-Ouallon, et j'ai beaucoup vécu en Brabant-Ouallon. Puis j'ai déménagé à Bruxelles, et je viens... J'ai fait des études de journalisme à l'UCL, et puis progressivement, je me suis désengagée du métier. de journaliste enfin en tout cas des rédactions journalistiques et je pratique toujours l'écriture et l'écriture qui essaye de raconter le monde tel que je le vois mais en motorisant des incursions dans la fiction c'est un peu ta signature littéraire quand on te dit c'est un peu ce qu'on ce qu'on ressent oui enfin j'écris beaucoup sur ce que j'ai sous les yeux quoi parfois avec avec des torsions, de la mise en scène. Et des autorisations que le journalisme ne permettrait pas. Mais ce qui est sûr, c'est que j'ai envie de raconter le réel. Et que je n'invente pas des mondes qui n'existent pas. Je suis très admirative des gens qui arrivent à bâtir des mondes. Mais ce n'est pas ce que je fais. Moi, je n'ai pas toute cette imagination. Mais par contre, j'ai un bon sens de l'observation. Donc voilà, je m'appuie là-dessus pour écrire.

  • Speaker #1

    Une trame documentaire ?

  • Speaker #0

    Sans doute, oui.

  • Speaker #1

    Justement, quand on lit ton premier livre, Ariane, qui relate sa fin de ton enfance, ton début d'adolescence, et aussi une grande description du monde du Brabant-Moison, d'où tu viens.

  • Speaker #0

    Je te coupe juste pour dire que ce n'est pas réellement une description littérale de la fin de mon enfance, de mon adolescence. La narratrice n'a pas de prénom, et c'est aussi à dessein qu'elle n'a pas de prénom, parce qu'à la fois c'est moi, mais ce n'est pas du tout moi. C'est un livre d'autofiction. Je me suis basée sur des choses vécues et vues, et puis j'en ai fait autre chose.

  • Speaker #1

    Mais ça dit quand même beaucoup de choses sur ta perception assez jeune du monde, ce côté documentaire, de voir comment tu étudies les gens, le lieu, la ville d'où tu es originaire, Nivelles, que tu sembles adorer.

  • Speaker #0

    Je ne viens pas de Nivelles. Ah non, mais voilà ! Je ne viens pas de Nivelles, moi je viens d'Otigny et de Wavre. Et j'ai placé l'intrigue de mon livre à Nivelles, notamment parce que ma mère était épouvantée que je puisse dire du mal de Wavre.

  • Speaker #1

    Tu ne peux pas dire du mal de Wavre ?

  • Speaker #0

    Non, mais il passe beaucoup de temps. Il fait beaucoup ses courses, il a beaucoup d'amis. Et donc, elle n'avait pas envie qu'on lui jette des pierres, des goudrons et des plumes quand elle se balade dans la rue. Donc, elle m'a demandé de déplacer mon histoire. Donc, je l'ai déplacé à Nivelles, qui pour moi, était un peu un copier-coller d'Oivre. Enfin, c'est ce que je pensais parce que je connais assez peu Nivelles. Et manifestement, pas du tout. Et les Nivellois sont extrêmement chauvins et très, très, très, très, très heurtés par le portrait pleuvant. peu flatteur que j'ai fait de leur ville. Je ne savais pas du tout que le plus grand danger en écrivant cette histoire, ça allait venir des nivellois.

  • Speaker #1

    Tu as reçu des maux ?

  • Speaker #0

    Oui, beaucoup. Je sais qu'il y a des librairies nivelloises qui ont refusé absolument de mettre le livre en rayon. On rappellera quand même que c'est... une enfant de 12 ans, c'est-à-dire un nivel fictif vu par les yeux d'un enfant de 12 ans dans un livre de fiction. Mais ça a été très au sérieux. Apparemment, ils font partie des Belges les plus chauves, les nivellois. J'ignorais totalement. Un jour, je faisais une dédicace de ce livre à la librairie filigrane et il y a un type dont la tête est hyper familière qui vient faire signer le livre et qui n'a pas l'air content. Il me dit, écrivez Oui. pour un gros con qui habite Nivelles. Et au début, je crois qu'il rigole, il fait une petite blague, puis en fait, il insiste, je dois écrire pour un gros con qui habite Nivelles. Donc j'ai écrit pour un gros con qui habite Nivelles, et je mets quand même une astérisque en disant dédicace, écrite sous la contrainte et tout. Je ne comprends toujours pas l'attitude de ce gars, et puis il se tire en faisant claquer le livre sur le rebord de la table, et il s'en va, il était venu tout seul, comme ça. Et puis à un moment donné, en fait, je ne sais pas, les... Casse du bandit manchot sa ligne et je me souviens de qui c'est. Et c'était Gérard Depré, qui est un homme politique quand même de premier plan. Je me dis, ce mec, il a vécu la violence de la vie politique à tellement d'échelons. il va faire 45 minutes de route pour par vexation pour se faire signer un livre pour un gros con qui habite nivelles voilà c'est marrant c'est un acte politique peut-être pour lui j'imagine peut-être qu'il est très impliqué dans la vie de sa commune je sais pas je connais pas trop le de près en fait la carrière politique déjà de près mais

  • Speaker #1

    voilà le genre d'anecdotes que j'ai eu avec ariane en annivelle pas mal je pense qu'il ya pas beaucoup d'auteurs d'autrices qui peuvent avoir des fans par des fans entre guillemets de cet acabit pas sûr qu'il était fan il

  • Speaker #0

    a quand même acheté le bouquin il a quand même acheté le bouquin, c'est vrai.

  • Speaker #1

    C'est déjà ça. tu l'as dit ce n'est pas vraiment toi c'est un peu des ellipses etc un peu romancer c'est le cas de dire mais qu'est ce que ça fait de vivre dans brabant ouadon dans les années 90 d'où tu viens

  • Speaker #0

    A la fois, moi j'ai adoré mon adolescence parce que c'était enfin une forme d'apprentissage de la liberté, j'ai adoré faire des petites bêtises, j'ai adoré l'apprentissage de la liberté, de la séduction, enfin voilà, tous ces trucs-là. J'ai adoré aussi la découverte de l'alcool quand j'étais jeune ado. Mais je me suis toujours sentie vachement à l'étroit en bravant wallon. J'ai toujours dit que je me tirerais au plus vite. Et en fait, je ne me suis pas tirée si vite que ça. Je pense que j'avais 22 ans quand je suis partie et que je suis allée à Bruxelles. Donc, ce n'est pas non plus comme si j'avais fui. Mais c'est sûr que je me sens beaucoup plus à ma place à Bruxelles. Notamment parce que je ne conduis pas, j'ai une phobie épouvantable de la conduite automobile et que je me sens aussi de plus en plus mal dans les transports en commun. Je suis claustro, j'ai des phobies par milliers. Et l'autonomie en bras bon à l'ongle, quand on a des phobies par milliers, c'est assez compliqué. À Bruxelles, c'est beaucoup plus simple. On peut vivre avec mille phobies à Bruxelles sans que ça change fondamentalement l'existence par rapport à quelqu'un qui n'en a pas. Tandis que quand on habite plus loin, on est plus excentré. C'est plus compliqué. des phobies sociales ou des phobies de claustrophobie des phobies de d'agoraphobie trop isolé par rapport à une grande ville j'ai la phobie de toutes les situations dont on peut s'enfuir facilement au sens propre comme au sens figuré comme une interview par exemple voilà je suis en pleine crise d'angoisse merci de cet effort en tout cas

  • Speaker #1

    C'est intéressant, ça dit aussi un peu une autre facette du personnage, de ta personne.

  • Speaker #0

    Oh, j'ai jamais vraiment eu de nombreuses phobies qui se déplacent avec les années. J'ai longtemps eu la phobie du train, puis maintenant c'est plutôt la phobie des ascenseurs. Je n'ai plus pris l'ascenseur depuis cinq ans, par exemple. Ça par contre, en ville, c'est plus compliqué qu'à la campagne, parce que l'offre d'ascenseur est quand même beaucoup plus pléthorique.

  • Speaker #1

    raconte la rencontre tu prends une filière tu choisis des études comme tu disais de journalisme à l'université de louvain-lanoeuf qui un peu dire pour dire gentiment un entre-soi c'est assez refermé quand même nous voilà neuf avons pas alors je n'ai jamais vraiment pénétré l'entre-soi j'ai pas l'impression de m'être intégré à quoi que ce soit le voir la neuve

  • Speaker #0

    Moi, je ne cotais pas, puisque mes parents habitaient à côté, donc je n'ai pas vécu la vie néo-louvaniste de cercle, de baptême, etc. Je voyais ça, en plus, je n'aimais pas le Val-la-Neuve à l'époque. Ça a un peu changé, ça a même beaucoup changé depuis, mais je n'aimais vraiment pas. Et donc, j'allais en cours et puis je me tirais dès que les cours étaient terminés. Donc, je n'ai pas l'impression non plus d'avoir gardé d'immenses contacts avec les gens rencontrés à la fac, à part ma meilleure amie que j'ai rencontrée sur les bancs de l'université en première candidature.

  • Speaker #1

    mais c'est peut-être un entre-soi mais en communication et journalisme je n'ai pas perçu comme ça en tout cas j'en ai pas bénéficié en tout cas c'est sûr ce que je voulais dire par entre-soi c'était plutôt que c'est tout petit c'est vraiment un truc d'étudiant quasiment c'est tout petit par rapport à des vies des vies étudiantines comme il y en a liège en belgique ou même bruxelles oui

  • Speaker #0

    c'est vrai c'est cet essence du propos oui c'est clair que c'est Surtout une génération qui se côtoie et puis basta. Oui, donc c'est une vie totalement artificielle qu'on vit à l'Ouen-d'Ouve. C'est aussi ça, je crois, qui ne me plaisait pas tellement quand je faisais mes études et qui maintenant me plaît, maintenant que je suis beaucoup plus âgée, pour aller un peu m'abreuver à la sève de ces jeunes personnes que je ne fais plus.

  • Speaker #1

    T'aimais bien les études ?

  • Speaker #0

    Ouais, moi j'ai bien aimé les études. J'ai toujours été très scolaire, j'ai toujours su parfaitement régurgiter la matière quand on me faisait ingurgiter. J'ai adoré les blocus, je pensais à trop souhaite de potasser obsessionnellement des syllabies. C'était une période de grande liberté pour moi, je pouvais me lever à l'heure à laquelle je voulais, c'était très cool, j'aimais beaucoup ça. J'ai bien aimé les études. Avec le recul, je pense que je n'aurais pas choisi ces études-là. C'est sûr que je n'aurais pas choisi ces études-là.

  • Speaker #1

    Tu as choisi quoi ?

  • Speaker #0

    J'aurais fait la réalisation. Probablement à l'IAD, puisque je n'habitais pas à tout près. Ou alors à l'INSAS, si j'avais eu la maturité de quitter la maison et de travailler pour habiter plus loin. Mais oui, j'aurais fait des études artistiques. on le sait pratiquement sûr on peut dire que la réalisation est venue à toi par la suite aussi oui mais je sens qu'il me manque un retard quoi un retard à combler donc c'est aussi pour ça que je mange obsessionnellement des films et des documentaires, des séries, des livres pour combler ce retard. Aussi je viens d'une famille où la culture n'était pas du tout au centre de la vie. Mes parents n'ont pas beaucoup au cinéma, ne disent pas. Donc ils n'écoutent pas de musique, donc c'est vrai que j'ai l'impression d'avoir toujours... Une guerre de retard et d'être autodidacte, forcément. Plus que des gens qui auraient eu un cursus où ils auraient tout compris. Moi, la grille de décryptage, je suis seulement en train de la former.

  • Speaker #1

    C'est intéressant parce qu'à 40 ans passés, tu te dis, alors que tu as un background pour le moins important, tu es seulement en train de former la grille culturelle.

  • Speaker #0

    Alors j'ai quand même eu une hyperphagie de livres, de films, de BD, donc c'est clair que je suis à fond. Donc parler de retard ne serait pas tout à fait juste, mais je sens qu'il y a quelque chose qui a comme un blanc et qu'il faut le combler. Il y a comme un gouffre, il y a comme une béance due peut-être aussi au Brabant-Ouallon, qui n'est pas une province particulièrement tonique d'un point de vue culturel. Il y a une boulimie qui s'est installée et cette boulimie, elle est là aussi pour comprendre. Je vais beaucoup au cinéma, par exemple, pour comprendre comment est faite la saucisse, comment les gens l'ont cuisinée, ce qu'il y a dedans, les ingrédients. Alors, je pourrais m'inscrire à un cours, mais je préfère apprendre avec les œuvres.

  • Speaker #1

    Décortiquant.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Tiens, quel plan ça va être après ? Un plan large, un plan serré ? Oui. Qu'est-ce que...

  • Speaker #0

    Le langage de la caméra, quoi. C'est... Au lieu de l'étudier dans un cours, j'essaie de me poser la question de quelle est l'intention derrière le plan et qu'est-ce que ça me fait à moi, la réceptrice, quoi. Voilà.

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qui t'a toujours passionné ou ça vient seulement maintenant ?

  • Speaker #0

    Clairement, moi, c'est la littérature ma première passion. Le livre, quoi, plus que l'image.

  • Speaker #1

    Justement, à quel moment c'était la rencontre avec la littérature ? Tu viens de dire qu'à la maison, il n'y avait pas beaucoup de culture.

  • Speaker #0

    comment ça s'est fait que tu es tombé dedans mais moi j'ai réussi à lire très très tôt donc à trois ans je savais lire et on a hérité de la bibliothèque de mes grands parents donc j'ai lu tout ce qu'ils avaient donc ça c'était du la bibliothèque rose mais aussi ma médecine naturelle de rick azaray des tout et n'importe quoi beaucoup de n'importe quoi aussi mais donc voilà c'était C'est aussi là une hyperphagie constante. Sans hiérarchie, sans jugement de valeur aussi. Je trouve que j'ai eu de la chance aussi, enfin quelque part quand on vient d'une famille qui n'est pas très cultureuse, on a de la chance de ne pas être moquée, jugée, snobée pour ses goûts et d'avoir l'occasion de les composer soi-même vraiment à 100%. Donc lire, l'acte de lecture, peu importe ce que je lisais, a toujours été pour moi de l'ordre de la respiration dans ma journée. C'était impensable et ça l'est toujours de ne pas lire avant de dormir. par exemple. Donc ça c'est pour le goût de la lecture. Le goût de l'écriture, il est venu très petit aussi. Je me souviens que j'écrivais des petites bandes dessinées pour mes camarades de classe, que je vendais des abonnements pour les petites bandes dessinées.

  • Speaker #1

    Tu vas devenir dans l'entrepreneuriat avec une...

  • Speaker #0

    Oui, en plus, je n'honorais même pas les commandes. Je prenais le fric. Je n'écrivais pas l'épisode 2. Donc oui, j'ai écrit beaucoup de poèmes, beaucoup de poèmes d'amour, beaucoup de chansons. Oui, j'ai toujours... Si je n'écris pas, je ne me sens pas bien. Vraiment, je me sens...

  • Speaker #1

    Depuis cet âge-là.

  • Speaker #0

    Vide.

  • Speaker #1

    Depuis cet âge-là.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    C'est une nourriture, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, et j'ai l'impression que c'est une forme de pleine conscience qui, mentalement, pour ma santé mentale, j'ai vraiment besoin de cette forme d'abstraction dans ma tête, de monter et vivre dans ma tête, souvent, pour écrire. De m'abstraire de la vie sociale pour... ne plus faire qu'à agencer des mots entre eux. Ça c'est complètement capital. Ce qui fait que les périodes de friche intellectuelle, même si je sais qu'elles sont nécessaires à la création, elles sont particulièrement difficiles à vivre pour moi. Parce qu'on ne sait jamais si ça va se remettre, en fait. On ne sait jamais si ça va se rétablir, on ne sait jamais si la soupe ne s'est pas tarie, si je ne portais en moi que trois livres, enfin trois romans et un documentaire. Il n'y a peut-être rien d'autre, c'est possible aussi. Bon, normalement, il devrait y avoir autre chose. Il y avait un fil, j'ai tiré, j'ai vu qu'il y avait quand même une pelote derrière, mais voilà, le reste de la pelote tarde à se manifester.

  • Speaker #1

    Ça te fait peur ?

  • Speaker #0

    Oui, vachement. Oui, j'ai peur, mais ça j'ai l'impression que depuis que j'ai 18 ans, même avant, je me dis toujours, avec un sens du drama quand même assez outré, je suis finie, ça y est, il n'y a plus rien, mes meilleures années sont derrière moi. Oui, mais je me le dis depuis que je suis ado. Et puis, je rebondis, toujours.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qui fait que tu rebondis ?

  • Speaker #0

    Je sais pas. Honnêtement, aucune idée. Si je le savais, je le convoquerais, quoi.

  • Speaker #1

    Tu l'as jamais analysé ?

  • Speaker #0

    Mais si, j'essaye. J'essaye de savoir quelles sont les conditions, justement, de ce rebond, mais... Non, je sais pas. J'ai pas trouvé.

  • Speaker #1

    On avance dans la vie, alors on va revenir au côté plus chronologique des choses. Tu viens de finir tes études à l'université, tu les as réussies vu que tu étais bon élève, comme tu disais. Le premier boulot, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Oh, j'en ai plein parce que je suis arrivée sur le marché du travail au moment où il n'y en avait plus, en tout cas en journalisme.

  • Speaker #1

    On est à quelle année plus ou moins ?

  • Speaker #0

    On est en 2005-2006. Et donc j'ai fait tous les petits boulots possibles et imaginables de la presse. J'ai été maquettiste au Vers l'avenir Brabant Wallon. J'ai été pigiste pour à peu près tout ce qui était possible d'investiguer comme média. Je travaillais partout, à Belle RTL, au Soir Magazine. à la livre. Beaucoup, j'ai travaillé longtemps au site internet des journaux du groupe IPM parce que j'ai rencontré à la salle de sport près de chez moi, alors que j'habitais encore chez mes parents, un des boss du développement web du groupe. Et c'est là que je pense que j'ai vraiment... J'ai commencé à m'asseoir un peu plus confortablement dans l'univers des médias. Enfin, confortablement, il faut le dire vite, parce que c'était vraiment... C'était franchement chiant à faire. Heureusement que les collègues étaient super. On était tous dans la même galère, on s'est bien entendus. C'est ça qui a forgé des bons souvenirs de cette époque. Mais sinon, c'était quand même vraiment répétitif. C'était du bâtonnage de dépêche. On les mettait en ligne, on trouvait un titre, on croppait une photo. C'était ce genre de boulot, la mise en ligne de dépêche.

  • Speaker #1

    Pas très exaltant.

  • Speaker #0

    Pas très exaltant. C'était formateur à certains niveaux. À l'époque aussi, j'étais... modératrice des forums du groupe IPM, parce qu'il n'y avait pas encore les commentaires sous les articles ou s'il fallait aller dans un forum pour commenter. Je pense que c'était évidemment pas aussi orduré qu'aujourd'hui, mais il fallait quand même avoir le cœur bien accroché et l'estomac aussi pour lire toutes ces saloperies. Et donc c'est nous, les petites mains du web, qui devions nettoyer de toutes les invectives, menaces.

  • Speaker #1

    C'est un peu une période transitoire parce que c'est à ce moment-là que c'est apparu finalement tout ça. Les réseaux sociaux, Facebook est né un an ou deux après si je ne me trompe pas.

  • Speaker #0

    Moi je terminais mes études quand les réseaux sociaux sont apparus. Donc quand j'ai commencé mes études, je n'imaginais pas que ça allait prendre une place si grande à tout point de vue. À la fois dans le travail, à la fois en imposant un service après-vente à ce travail. Et je pense que c'est aussi une des raisons pour lesquelles si je devais refaire ma vie, je ne le ferais pas. des études de journalisme parce que j'en ai rien à foutre en fait. d'assurer un service après-vente ou d'assurer une communication autour de mon travail. Ça ne m'intéresse pas, ça ne m'amuse pas.

  • Speaker #1

    Mais au fond, c'est pas très d'un journaliste d'assurer un service après-vente.

  • Speaker #0

    Exactement, je suis tout à fait d'accord. Mais ça le devient, beaucoup. ça devient ça les devises et finir plus dire nous devoir se justifier à tout point de vue en fait c'est ça que tu veux dire il ya évidemment le fait de dealer avec tous les commentaires parfois des commentaires tout à fait constructif mais bon aussi beaucoup de comment haineux, vindicatifs, auxquels longtemps les rédactions ont trouvé qu'il fallait prêter attention. Aujourd'hui on a un peu plus à répondre, si je comprends bien comment les choses se passent, des réponses toutes faites, des lettres type de « je vous remercie » , même quand tu te prends une énorme insulte dans la tronche, le média répond, si c'est sur la page Facebook du du média, du média... répond merci beaucoup pour votre intérêt, une sorte de cirage de pompe très hypocrite, mais qui est supposé calmer la personne en face.

  • Speaker #1

    Ça ne doit pas vraiment marcher.

  • Speaker #0

    Et qui n'entre pas dans la polémique, alors qu'avant, il fallait absolument répondre à chaque commentaire, fâché ou content, et ne pas perdre l'opportunité d'avoir un abonné ou un adhérent. Et c'est fini ça. Tant mieux.

  • Speaker #1

    tu retournerais pas en tout cas non non non et ça nous amène aussi à un autre de thé Un autre de tes travaux, on en a parlé un tout petit peu au début, tu as été dans la réalisation, enfin co-réalisatrice du documentaire Hashtag ça pue.

  • Speaker #0

    Tout à fait, et j'ai aussi co-réalisé un documentaire, un webdoc en 2011 sur l'IVG qui s'appelle Cuisine interne.

  • Speaker #1

    Comment tu rentres ? Tu décides d'abord que tu es du côté journaliste, puis en parallèle littéraire, et puis là tu viens à l'image. Comment ça se fait ? Comment ça se met en place ?

  • Speaker #0

    Alors en réalité, c'est d'abord par le théâtre que j'ai fait mon premier pas de côté des médias. Parce que via les émissions radio pour lesquelles je bossais, j'avais fait la rencontre d'une directrice de théâtre, Nathalie Huffner. qui m'a proposé un jour d'écrire une pièce. Et j'en ai écrite une d'ailleurs, qu'elle n'a pas prise. Et puis, quelques années plus tard, elle m'a redemandé d'écrire quelque chose. Elle m'a fait une commande assez précise. Et là j'ai écrit un truc et c'était déjà trop bien, trop chouette à écrire et trop chouette à regarder réaliser par d'autres, par des comédiens et des comédiennes et par la metteuse en scène qui était Nathalie Huffner, cette espèce d'écriture qui passe pas uniquement par les mots mais qui s'appuie aussi sur des corps. Ça a créé chez moi un sentiment de joie et même un peu de puissance. d'avoir créé un monde, ou participer à créer un monde, puisque c'est de la co-écriture, l'écriture de plateau. Je pense que c'est peut-être bien là qu'en fait l'envie de faire du documentaire, de faire du cinéma de fiction, c'est vraiment affermi. C'est en voyant mes mots mis en scène, mis en voix, mis en espace par d'autres. personne. Et ma première pièce a bien marché, donc ça m'a donné la confiance et ça m'a donné la confiance d'essayer d'autres disciplines aussi, donc littérature, qui était la première chose que je voulais faire dans la vie, c'était écrire des romans. Mais je n'osais pas. Ou j'avais l'impression que c'était un travail de trop longue haleine pour que ma musculature mentale me le permette. Puis finalement, ça va. Et voilà, c'est comme ça. L'idée c'est aussi d'explorer les différents médiums, médias, qui permettent de raconter une histoire telle que j'estime qu'elle doit être racontée. J'ai l'impression que chaque histoire appelle son médium, et bien sûr sa narration, son adresse, etc. Mais il y a des choses que je veux raconter, mais je ne trouve pas du tout ça pertinent de le faire en roman. où je ne trouve pas du tout pertinent de faire ça en pièces. Je choisis l'endroit où il me semble plus juste que ça atterrisse. tu viens de parler de confiance tu es quelqu'un qui a confiance en elle dans la vie de manière générale ou dans tes créations je pense ouais et

  • Speaker #1

    je pense surtout en regardant parce que je me rendais pas bien compte c'est en train en faisant du travail collectif avec d'autres personnes ces dernières années, de la co-écriture par exemple, où je vois Alors je doute toujours du travail en cours, je doute toujours de ce qui est en train d'être fait, je questionne tout le temps la matière, ce qu'on raconte, est-ce qu'on a bien choisi le bon chemin pour le raconter. C'est d'ailleurs un peu chiant pour les gens qui travaillent avec moi, voire tout à fait chiant parce que c'est pas... c'est jamais verrouillé quoi, on n'est jamais sur une autoroute, on est tout le temps en train de prendre des chemins de traverse et c'est pas toujours... je pense que... Même si j'essaie de respecter les gens, quand on travaille collectivement, qu'il y ait toujours quelqu'un qui vienne questionner ce qu'il est en train de faire, ça doit vraiment être difficile à vivre. Mais en travaillant avec ces autres personnes, je me rends compte que j'ai quand même relativement confiance en moi. Et donc c'est par contraste avec le manque de confiance des autres que je me rends compte que chez moi, c'est quand même un truc assez solide. Peut-être que ça vient aussi... Je n'ai pas l'impression d'être née avec cette confiance. Je pense qu'elle est arrivée assez récemment, il y a 5-10 ans peut-être. Parce que je crois que d'une certaine manière, j'ai décidé d'arrêter d'être dans cette posture de la femme qui doute. Qui est une posture que... dans laquelle les femmes se mettent. Parce qu'une femme qui ne doute pas, c'est considéré comme pas féminin, pas jolie. Les femmes sont supposées ne pas avoir confiance en elles. Une femme affirmée a plutôt tendance à... à être disruptive dans l'univers. Et j'ai longtemps joué le jeu de la fille qui n'avait pas confiance en elle. J'ai longtemps fait « mon Dieu, je ne sais pas, c'est nul, je suis nulle, je n'y arriverai pas » . J'ai beaucoup joué ça. Et puis je me suis rendue compte que c'était un jeu justement. Et j'essaye de déconstruire ça. Et donc de reconstruire quelque chose de juste. Et ce qui est juste, c'est que je crois que je suis consciente, assez lucide de mes qualités et de mes défauts aussi, et de mes atouts et de ce dans quoi je suis vraiment nulle. Mais donc, si tu agites le tout, je pense à avoir confiance en moi. est ce que tu penses qu'il ya un avant et un après de documentaires que tu as co réalisé hashtag sa pute ce qu'il ya avant et après oui et non à la fois non parce que ça s'inscrit dans la continuité des du sujet que je creusais à ce moment là et que je continue d'ailleurs à creuser c'est la misogynie. J'ai pas l'impression que ça me met assis, une crédibilité particulièrement éclatante. Parce que dans ces métiers-là, t'as beau avoir fait plein de trucs, tu repars toujours de zéro et c'est comme si t'avais jamais rien fait, t'as encore tout à prouver. ce qui a ses côtés positifs aussi, c'est pas que négatif, mais bon, c'est assez insécurisant. Par contre, là où il y a eu un avant et un après, c'est que j'ai kiffé, quoi. J'ai kiffé faire des tournages, j'ai surtout kiffé le montage, l'étalonnage, toutes ces petits... Moi, les grosses œuvres, c'est pas tellement ce qui m'excite. Je préfère les...

  • Speaker #0

    Donc, aller tourner les at-il-vous, c'était pas trop ton truc, en fait ? Rencontrer...

  • Speaker #1

    J'apprécie encore dix fois plus ... Et même dans l'écriture de bouquins, déplacer des virgules, des respirations, faire des interventions sur des micro-trucs, ça, ça me fait vraiment triper. Et je me suis... J'ai adoré la rencontre avec tous les professionnels du cinéma, qui était pour moi une grande découverte de gens tous plus talentueux et passionnés les uns que les autres. où le film en cours est vraiment le sujet le plus important. C'est paradoxalement un milieu où il y a beaucoup moins d'égo, je trouve, le cinéma, que les médias. Alors que ce qu'on y fait est beaucoup plus chiadé et supposé t'apporter aussi plus d'argent, de gloire, enfin je ne sais pas quoi. En tout cas, c'est contre-intuitif, je trouve, de constater que le milieu du cinéma est plus simple que le milieu des... de la radio, de la télé, de la presse écrite. J'ai adoré me frotter à ces professionnels, professionnels du son, de l'image, des gens hyper spécialisés dans leur domaine, les talonneuses, la monteuse de son. J'ai envie de revivre ça, quoi. J'ai envie de revivre ça plein de fois.

  • Speaker #0

    Côté très technique, en fait.

  • Speaker #1

    Oui, oui. Comment des toutes petites interventions peuvent... Inventer ou proposer un langage différent, une manière de dire différente, très précise. La précision qu'on peut avoir dans l'expression sur des tout petits postes, comme une simple modification de la lumière ou même simplement l'image. La cheffe opératrice, son travail, je trouve ça tout à fait fascinant. ce que racontent les plans, ce que raconte son éclairage. J'ai trouvé ça génial d'explorer ça. Donc oui, il y a un avant et un après ce documentaire. Par rapport à ça, par rapport à mes envies professionnelles, c'est clair. Maintenant, politiquement, je n'ai pas l'impression que ni pour moi, ni pour le monde, il y ait eu vraiment un avant et un après. Parce que les choses n'ont pas changé. Si, en fait, elles sont pires.

  • Speaker #0

    je te suis beaucoup via tes stories instagram je crois que tu aimes beaucoup ça tu en fais un certain nombre par jour et l'autre jour tu avais été je crois dans une école ou une rencontre de jeunes et tu avais un ressenti assez assez fort par rapport à ça, où tu disais que finalement ça s'empirait ? C'était ton ressorti à la sortie de cet événement, si je me rappelle bien en tout cas.

  • Speaker #1

    Non, en fait, en réalité, c'est une intervention qu'on a faite à plusieurs, on était trois, sur l'invisibilisation des femmes dans l'espace public et dans l'histoire. Et donc chacune avec sa spécialisation, moi c'était parce que j'avais écrit un bouquin sur une résistante oubliée, elle était « Allez parler à des jeunes gens » . et une des intervenantes en est sortie particulièrement chamboulée de l'accueil assez hostile qui a été fait aux idées féministes. Moi, je ne sais pas pourquoi, ça ne m'a pas tellement ébranlée parce que peut-être que je le savais déjà. Et qu'un article récent que j'ai lu dans Le Monde démontrait que, d'après je ne sais pas quelle étude récente elle aussi, les jeunes garçons étaient de plus en plus conservateurs et les jeunes filles de plus en plus progressistes, et qu'il y avait un double mouvement en fait, qui créait aussi des tensions, de la friction, de la violence. Parce qu'on a beaucoup tendance à croire à tort que le monde est de plus en plus féministe, C'est clair qu'il y a des gens qui sont... de plus en plus féministe et de plus en plus progressiste. Mais à côté de ça, tu as toute une partie de la population qui est aussi de plus en plus hostile aux idéaux d'égalité. Et c'est comme ça que je l'avais... que j'avais digéré en fait cette rencontre avec ses élèves moi je fais beaucoup je vais beaucoup dans les écoles et en général ça se passe assez bien même plus qu'assez bien ça se passe toujours super bien pour les écoles je vais dans des écoles surtout avec mon deuxième bouquin les Les yeux rouges, qui est un livre d'autofiction où la narratrice est harcelée par un homme. Je suis beaucoup invitée. Je suis beaucoup invitée parce que, comme ça parle de harcèlement et que c'est une problématique capitale dans les écoles et que les enseignants et les directions ont vraiment du mal à savoir par quel bout la prendre, ils prennent mon livre comme support de discussion. Mon livre ne parle pas des ados, donc je pense que les ados ne sont pas... On ne voit pas immédiatement la correspondance qu'il y a entre la situation de cette femme, la narratrice et la leur, mais en classe, moi comme c'est un sujet que je connais très bien, je peux en parler de leur réalité aussi à eux, je crois. Et c'est super, j'ai fait beaucoup de ça en Belgique, beaucoup de ça en France aussi. Et j'adore en fait moi le contact avec les ados, même quand il est musclé, même quand il est parfois un peu hostile. J'en sors toujours avec quelque chose, il se passe toujours un petit truc un peu magique. Qu'avec les adultes, pas. Avec les adultes, les rencontres littéraires, c'est surtout chouette au début de la sortie d'un bouquin, parce que... Tu comprends enfin ce que tu as écrit en le confrontant au regard des autres qui sont face à toi et qui peuvent te faire un retour ou te poser des questions, même quand ils n'ont pas lu le bouquin. Mais à partir d'un certain moment, c'est un peu souvent la même chose et il y a une forme de lassitude qui s'installe. Tandis qu'avec les ados, ce n'est jamais la même chose. C'est très vivant. C'est très vivant et parfois c'est violent un peu, mais moi ça me plaît vachement. Mais certaines personnes peuvent être... Moi je crois que la castagne ça a tendance à m'exciter un peu. Mais certaines personnes, la castagne ça a tendance à les... Donc oui, c'est un constat que je valide totalement. Mon expérience empirique de visite dans les écoles montre qu'il y a de plus en plus de jeunes garçons très hostiles aux idéaux d'égalité et aux idéaux féministes en particulier, et de plus en plus de jeunes filles ultra vénères. ultra instruite en matière de lutte politique, très mature sur ses questions et très agacée par l'inertie en face dans le meilleur des cas et le rejet en face dans le pire des cas. Ça, c'est certain.

  • Speaker #0

    C'est à quel moment de ta vie que tu as pris conscience des luttes féministes ?

  • Speaker #1

    Alors j'ai pris conscience que les luttes féministes me précédaient, il n'y a pas si longtemps en fait. Mais moi je me suis sentie féministe et ça a été un sujet pour moi depuis que je suis enfant. Ça c'est sûr. Depuis que je suis enfant j'ai l'impression qu'on essaie de me mettre dans un moule et que j'essaie d'en sortir. C'est comme ça que j'estime. être féministe ou avoir un regard affaibli sur les choses. J'ai longtemps cru que je pourrais échapper totalement au moule et que, en me battant bien, il n'y aurait pas de déterminisme ni social, ni environnemental, ni de genre. Et c'est aujourd'hui que je me dis, en regardant un peu le passé, que je me suis quand même... J'ai pas gagné sur tous les plans. Et il y a des tas de domaines sur lesquels j'ai abdiqué un peu, en fait, pour avoir la paix. Voilà, en gros, c'est ça. Les luttes féministes m'intéressent vachement. Je lis énormément sur le sujet. Je n'ai pas l'impression, moi, d'avoir une pensée nouvelle et originale à proposer. Ce que je fais, je ne suis pas une théoricienne du féminisme, mais ce que je fais, je crois, dans mon travail, que ce soit en journalisme, en littérature, dans les pièces que j'écris, documentaires, c'est que j'essaye de visibiliser l'expérience sociale des femmes. J'essaye de montrer les choses telles qu'elles sont. J'essaye de « cut the bullshit » . mon ikigai ma mission en tout cas c'est que je crois m'être donné est ce que ça te rend ça te rend connaître Oui, oui, oui, je suis quelqu'un de... assez... Ouais, je suis quelqu'un d'en colère, c'est sûr.

  • Speaker #0

    Mais est-ce que c'est un moteur, cette colère ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, c'est même le moteur principal. La colère, la frustration, le... Ouais, oui, c'est vraiment un moteur à piston, quoi. C'est mon fuel, c'est mon fuel quoi, pour activer le moteur, c'est sûr que c'est la colère. Et la colère n'est pas toujours une colère sociale, c'est parfois des colères très personnelles, c'est parfois des injustices que j'estime avoir subies de manière interpersonnelle et qui ne sont pas forcément politiques. Mais voilà, c'est ça qui me fait écrire, c'est ça qui me fait dire.

  • Speaker #0

    Donc si on te met en colère maintenant, il y a des chances que tu trouves d'inspiration pour le roman que tu as cherché tout l'été ?

  • Speaker #1

    Ah oui, c'est ça que je tiens. Peut-être que s'il m'arrive un énorme malheur, une terrible injustice, il y a un très très bon roman qui va sortir, mais j'aurais dû me frapper cet énorme malheur, cette terrible injustice. Donc je préfère aller puiser dans les malheurs et les injustices qui se sont déjà produits dans le passé. Et donc voilà. Et comme il y en a... me semble-t-il à mon estime un certain nombre je pense que je devrais avoir de quoi de quoi faire mais j'ai pas encore trouvé lequel tu regardes quoi tu parlais tout à l'heure que tu regardais énormément de films etc est ce qu'il ya un style en particulier ou un auteur une autrice non je change beaucoup change beaucoup d'avis change beaucoup de passion j'ai par exemple ma période de... Indienne, où je regardais beaucoup de séries indiennes. Voilà, certaines faites pour le marché américain et d'autres faites pour le marché indien, pour comprendre comment les gens vivent. J'ai beaucoup aimé, puis aussi j'ai eu ma période japonaise, coréenne, comprendre, et en littérature aussi, parce que là même la fiction je trouve apporte des éléments de compréhension du réel, de la manière dont des gens qui vivent très loin de nous vivent. Voilà, mes périodes changent et mes obsessions changent. J'ai beaucoup lu de l'autofiction à une époque. J'adorais, enfin ce que je préférais c'était de voir comment les gens se meuvent dans l'existence. Maintenant l'autofiction, j'en ai vraiment marre. Je cherche de... Je cherche... J'ai cherché beaucoup de la fiction, mais de la fiction très élaborée, pour savoir comment les gens aussi créent les personnages, pour être face à une mécanique d'invention nourrissante, intellectuellement pour moi. Mais je trouve peu de fiction qui ne m'ennuie pas très vite. Donc, je lis beaucoup de longs récits journalistiques, beaucoup d'enquêtes. Voilà. C'est ça ce que je lis beaucoup en ce moment.

  • Speaker #0

    On revient au côté sociologique et documentaire. Ouais. C'est un peu un leitmotiv en fait.

  • Speaker #1

    Les livres d'Ariane Chemin, de Raphaël Baquet, des journalistes du monde. J'essaye de ne pas tous les lire trop vite parce qu'après il n'y en aura plus, mais... Clairement ça me plaît beaucoup. et ça m'intéresse surtout ça m'intéresse parce que je me désintéresse très très vite des choses en ce moment pourquoi peut-être parce que je sens que le voilà j'ai 40 ans plus de 40 ans et je sens que peut-être que le temps est compté et que quand je perds mon temps c'est un temps qui ne reviendra j'ai commencé à comprendre que le temps ne reviendra jamais et que Un livre qui m'énerve, une posture d'auteur qui m'agace, en fait, c'est du temps qui, je pense, ne sert à rien.

  • Speaker #0

    Du temps déprécieux. Oui. C'est récent,

  • Speaker #1

    cet échec de temps.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    c'est très récent.

  • Speaker #0

    Une année file, finalement, la voie avancée à l'orcap. Avant, une après-midi pouvait paraître une éternité. Et puis maintenant ?

  • Speaker #1

    Oui, oui tout à fait, exactement. Les jours, les semaines, les années, ça passe comme des voitures. Donc il est temps de faire des choix, d'arrêter les non-choix. Moi j'ai fait beaucoup de non-choix, mais là il est temps de faire des choix, je crois. Et à tout point de vue.

  • Speaker #0

    Tu as peur de ne pas avoir assez de temps pour faire tout ce que tu voudrais faire ?

  • Speaker #1

    Non pas trop, sûrement, mais c'est pas comme ça que je formule les choses. J'ai peur de perdre tout à fait mon énergie, de ne plus arriver à faire exactement ce que je veux faire. Mais je suis pas, je me dis, oh la la, je suis pas dans l'état d'esprit de se dire, je n'ai plus que 40 ans à vivre, il faut que je me dépêche. Il n'y a pas une dead end à la fin. Moi, je veux juste que la dead end, elle ne soit pas maintenant.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu aimes l'époque ? L'époque dans laquelle on vit ?

  • Speaker #1

    Je ne la déteste pas.

  • Speaker #0

    Mais tu n'aimes pas ?

  • Speaker #1

    J'essaie de... parce que j'ai aimé une époque, peut-être pas. Il y a quand même plein de trucs excitants et intéressants qui se passent en ce moment. On ne peut pas dire que l'époque n'est pas intéressante. Bon, elle est violente, elle est triste à plein de niveaux, mais les gens qui disent qu'ils n'aiment pas l'époque, c'est souvent des gens ou des artistes qu'on lit dans les magazines dire que... On n'a plus de liberté, on ne peut plus rien dire, on ne peut plus rien faire. C'est souvent une vision assez réactionnaire des choses. Moi je trouve qu'on n'a jamais pu autant dire de trucs et faire de trucs. Je me sens beaucoup plus libre, j'ai l'impression que tout le monde est beaucoup plus libre aujourd'hui que dans les années 90 par exemple. Ce que je n'aime pas de l'époque, et là c'est peut-être mon côté réac naissant ou renaissant qui s'exprime, c'est... Peut-être le culte de l'influence, à tout point de vue. Je pense qu'il y a autant d'influenceurs et d'influenceuses que de... de sujets de préoccupation, quoi. Donc, je ne suis pas anti-influenceur ou influenceuse. Moi-même, je consomme pas mal de vidéos, notamment de youtubeurs sur des sujets très précis qui peuvent être considérés comme des influenceurs, des influenceuses. Mais que le nombre d'abonnés, que le nombre de clics soit vraiment l'unique prisme par lequel on envisage quelqu'un aujourd'hui, ça, ça me fait assez peur, quoi. TikTok, ça me fait assez peur aussi. J'ai l'impression que c'est en train de réduire notre capacité d'attention encore plus que ce qu'elle était déjà circonscrite. Donc ouais, ça c'est des trucs qui me font peur. Des trucs liés à une forme d'idiocratie, comme dans le film. Ça, ça me stresse. Mais je trouve que plein de choses aussi qui sont géniales dans l'époque dans laquelle on vit.

  • Speaker #0

    Par exemple ?

  • Speaker #1

    L'émergence publique d'identités plus marginales, qui arrêtent de se cacher, qui existent, des représentations qui n'existaient pas avant, des gens qu'on ne voyait pas avant, qui maintenant sont visibles, parfois spectaculairement visibles. s'agrègent les uns aux autres, qui trouvent des communautés, des familles. Ça c'était pas du tout possible dans les années 90. Dans les années 90, t'avais une identité un peu marginale, je sais pas moi, t'étais neuro-atypique ou... porteur de je sais pas d'une originalité ou envie de revendiquer une originalité battait tout seul quoi tu étais tout seul et en général plutôt j'étais plutôt des pierres quoi et aujourd'hui même si les pierres existent encore tu as aussi le reste quoi tu as aussi la possibilité de de taf il y à d'autres je trouve ça vraiment formidable ce récord la bande originale de ta vie alors là une musique en particulier mais ça je n'en ai strictement aucune idée c'est beaucoup trop vaste comme question tellement vaste que je fais un black out

  • Speaker #0

    Écoute, certains non, d'autres non pas, ce n'est pas une question obligatoire. On a posé à 2-3 personnes, certaines personnes ça vient tout de suite comme ça, presque même pas besoin de poser la question. Et puis d'autres, j'avoue que moi-même si on me la posait, je serais incapable de répondre. C'est un peu fort de ma part de poser une question à laquelle je ne serais pas capable de répondre.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas pourquoi, mais il y a une idée qui me vient, c'est « I wanna be your dog » des Stooges. Pour la pulsation, l'énergie mordante de la chanson.

  • Speaker #0

    Le rythme.

  • Speaker #1

    Oui, mais un truc acéré, électrique et acéré. ça je pense que ça peut c'est une pulsation assez naturel par rapport à mon rythme interne à moi et qu'elle est il ton rythme interne comment c'est quoi ton rythme interne c'est les doigts dans la prise carrément mais ça va ça fait pas trop mal alors ici quand même ça chauffe parfois mais ça marche moi ça me maintient ça me maintient en effet

  • Speaker #0

    Bien. Est-ce que tu as une héroïne, un héros, quelqu'un qui t'a toujours fait fasciner, fait rêver, fictionnel ou vrai ?

  • Speaker #1

    De moins en moins. Clairement, moi je suis une padawan de Virginie Despentes. J'ai énormément d'admiration pour Virginie Despentes. Quand la vie va mal, je me fais souvent une petite interview audio-vidéo de Virginie Despentes sur YouTube. Parce que je trouve sa clairvoyance et son authenticité, ça fait vachement de bien de la lire. Moi c'est quelqu'un qui me procure de l'apaisement, beaucoup. tellement qu'elle est sharp et affûtée. Ouais, Virginie Despentes. c'est bon alors c'est un peu ridicule de dire mon héroïne parce que si ça se trouve en privé c'est une atroce personne je ne pense pas mais tout cas elle donne du sens à l ordonne le monde de manière beaucoup plus claire mais

  • Speaker #0

    est ce que tu voudrais que des gens disent la même chose de l'interview qu'on est en train de tourner que ça les apaise, que ça leur donne du clé ou quoi, quand ils la regarderont, enfin on espère.

  • Speaker #1

    Oui évidemment, je préfère que les gens trouvent que c'est apaisant et stimulant intellectuellement, que ça leur a volé une partie de leur temps qui ne reviendra jamais, c'est sûr. Maintenant est-ce que ça me meut d'une manière ou d'une autre, je sais pas. En tout cas je sais que moi j'aime les gens qui les interviewent, les propos de gens qui ne tournent pas autour du... du pot et qui disent vraiment des choses, qui ne sont pas dans le small talk. Le small talk dans la vie de tous les jours et dans le discours médiatique, c'est vraiment pour moi, c'est douloureux. Et donc, j'essaye en interview, et parfois, je sais que je peux être dans un excès de sincérité à cause de ça. Comme je déteste le small talk que les autres m'infligent, je fais tout pour ne pas moi-même être dans le small talk. Donc, j'essaye de créer, de dire vraiment des choses et de répondre vraiment aux questions et de mobiliser vraiment. Après les interviews, je suis souvent hyper crevée, parce que c'est sportif, je reste pas en surface. Donc oui, si quelqu'un dit que l'interview lui a apporté de la nourriture à quelconque niveau, je serais contente.

  • Speaker #0

    et justement comment tu vis le rapport avec les gens qui te disent des fans etc comment tu échanges avec eux d'une manière ou d'une autre oui je suis dispo sur instagram donc enfin c'est un

  • Speaker #1

    compte privé est verrouillé, mais la plupart des gens, ils me font une demande d'abonnement, je les accepte. Je ne les accepte pas quand ils ont l'air d'immenses psychopathes, mais bon, parfois...

  • Speaker #0

    On l'a fait cet après-midi avant de venir, donc on va vérifier.

  • Speaker #1

    Mais voilà. C'est pour ça qu'il y a beaucoup de gens en attente, parce que parfois, je ne suis pas sûre qu'ils soient des psychopathes ou pas. J'ai complètement oublié ce que je racontais. Oui, voilà, le rapport avec les gens qui me lisent. Oui, oui, en fait, j'ai beaucoup et souvent et un peu trop, parce que j'ai notamment avec mon dernier bouquin, j'ai accepté toutes les invitations. Je dis oui à toutes les invitations. Alors que je m'étais dit non, cette fois-ci, tu vas vraiment choisir. Tu vas faire trois librairies. Et puis c'est tout. Et en fait, j'ai dit oui absolument à tout. J'ai fait tous les festivals. C'était à la fois des trucs prestigieux. Et à la fois des trucs dans des bleds improbables où il y a les trois pelées de tondu, j'ai vraiment tout fait. Et donc j'ai rencontré tout type de gens, des gens complètement indifférents à ce que je faisais, mais aussi des gens, des fans hardcore, des gens qui avaient lu distraitement et d'autres qui avaient fait une exégèse des bouquins, qui les connaissaient mieux que moi. Donc oui, je suis souvent en contact avec des gens qui me lisent et je leur parle souvent. Je crois qu'il faut trouver une posture où à la fois tu entends ce qu'on te dit, mais tu ne prends pas pour argent comptant ni les compliments, ni les scuds. Voilà, c'est... Je sais pas très bien comment on arrive à faire ça. Je pense avec l'habitude, l'expérience. Mais je crois que j'y arrive. Je crois que je sais très exactement ce que j'écris et certains compliments ne me font jamais plaisir parce que je les trouve faux et certains scuds ne me font jamais mal parce que je les trouve faux aussi.

  • Speaker #0

    C'est pari pour la critique.

  • Speaker #1

    Ouais. Je pense que je sais très bien ce que je fais et que... je suis vraiment ces derniers temps je suis ma propre boussole quoi et c'est mon intuition sur mon texte qui doit me laisser la l'impression finale et parce que tartampion on dira de bien ou de mal tartampion ou ou le pape 1 lui envoyer un livre au pape oui non c'est une idée par l'impression que c'est. Ça l'intéressera forcément.

  • Speaker #0

    Avec ça, j'arrive à la fameuse dernière question pour boucler la boucle. Qui voudrais-tu voir, entendre, lire dans Raconte ?

  • Speaker #1

    J'étais tellement concentrée sur tes questions que je n'ai pas réfléchi. Ça doit être absolument un artiste ou une artiste ?

  • Speaker #0

    Forcément, toute personne.

  • Speaker #1

    Alors, moi, je suis assez fascinée par Raja Mawan, l'ancienne coprésidente d'Ecolo.

  • Speaker #0

    notamment pour sa solidité mentale, le fait d'avoir choisi une carrière qui t'expose tout entière, en tant que personne aussi, en tant que corps, en tant que tout. Et elle, j'ai l'impression qu'elle traverse la violence de la vie politique avec une force et une forme de placidité qui me fascine. comprendre avec quelles lunettes elle regarde le monde et comment elle fait pour vivre, survivre et même peut-être même s'amuser de toutes les attaques qu'elle endure, de toutes les violences, les cruautés qui traversent son existence. Pour moi, une petite dissection du cerveau de Raja Mahwan, ça pourrait beaucoup m'intéresser, je pourrais beaucoup apprendre, je crois.

  • Speaker #1

    Écoute, on va essayer de programmer cette dissection prochainement. Merci beaucoup Myriam. Merci.

Description

Dans cette interview, nous partons à la rencontre de l’autrice belge Myriam Leroy. En toute intimité, elle nous parle de ses processus créatifs, de son rapport au monde et de la manière dont elle convoque le réel dans une écriture nourrie de fiction.


Un entretien sans filtre, où, comme elle le dit si bien : « Le small talk, dans la vie de tous les jours ou la vie médiatique, pour moi, c’est douloureux. » Et on ne peut que lui donner raison.


Après des études de journalisme, Myriam plonge dans l’univers médiatique où elle touche à peu près à tout, acquérant une vision lucide et complète de ce milieu. Elle finit par s’en détacher pour se consacrer pleinement à l’écriture. « Pour le bien de ma santé mentale, j’ai besoin de cette forme d’abstraction, de monter vivre dans ma tête, souvent, pour écrire. » Depuis l’enfance, elle ressent une pression constante à rentrer dans un moule — une contrainte contre laquelle elle lutte avec force.


Cette résistance, portée par une colère sourde mais motrice, nourrit son regard affûté sur le monde. Elle le retranscrit dans une œuvre riche, qui se décline aussi bien en romans qu’en pièces de théâtre. Myriam Leroy est également chroniqueuse à la radio, où elle signe la chronique satirique : « Myriam Leroy n’aime pas ».


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Cadre et graphisme : Michel Bourgeois : https://www.instagram.com/dbcreation


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Transcription

  • Speaker #0

    Comme je déteste le small talk que les autres m'infligent, je fais tout pour ne pas moi-même être dans le small talk. Donc j'essaye de créer, de dire vraiment des choses et de répondre vraiment aux questions. Raconte, c'est goût, c'est l'amour. Et ce regard, raconte la rencontre.

  • Speaker #1

    Bonjour Myriam Leroy. Bonjour. Bienvenue sur Raconte.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Sans savoir, tu inaugures quelque chose aujourd'hui sur Raconte, à savoir qu'à la fin de chaque interview, on demande à l'invité d'inviter aussi quelqu'un. Et tu as été invité. Oui. Par quelqu'un d'autre qui est passé avant toi chez nous et c'est Barbara Hornart qui est sommelière ici à Scarbeck.

  • Speaker #0

    Je l'ai entendu.

  • Speaker #1

    Ah ben voilà.

  • Speaker #0

    Ça m'a fait plaisir.

  • Speaker #1

    Ben écoute, j'espère que ça lui fera plaisir aussi de vous regarder mutuellement, de vous découvrir à travers vos interviews respectives.

  • Speaker #0

    Et moi je devrais inviter quelqu'un aussi ?

  • Speaker #1

    Exact. D'accord. Tout à l'heure. Il faut un peu de temps et d'y réfléchir. Les gens t'aiment bien un peu, beaucoup, pas beaucoup. C'est large. Donc voilà, écoute, qui es-tu ? Est-ce que je pourrais te demander de te présenter ?

  • Speaker #0

    Je m'appelle Myriam, j'ai 42 ans, j'habite Ixelles, je suis la maîtresse de mon chien, la locataire de ces lieux. J'écris, et voilà, ce que je fais pour vivre, c'est j'écris.

  • Speaker #1

    Ok, et on est où ici ?

  • Speaker #0

    On est chez moi, on est dans mon salon.

  • Speaker #1

    C'est ici que tu travailles ?

  • Speaker #0

    Euh... Oui, une fois oui. Je travaille beaucoup dans mon lit. C'est moins télégénique, c'est beaucoup plus en bordel. Mais je vais écrire aussi ici. Mais il faut que le projet soit déjà bien lancé pour que je puisse écrire assise. Moi j'ai besoin de commencer mes projets en position semi-couchée. C'est un concept.

  • Speaker #1

    Et ça marche ?

  • Speaker #0

    Des fois oui, et puis des fois non.

  • Speaker #1

    Justement, vu qu'on attaque tout de suite sur le processus créatif, tu écris à quel moment du jour, la nuit ?

  • Speaker #0

    C'est très difficile à dire, il n'y a pas vraiment de régularité. Je sais que j'aime l'été, en tout cas que l'été est propice à la création de nouveaux projets. C'est souvent l'été que je me lance dans des nouvelles idées, parce que je suis moins stimulée, moins stressée, j'ai moins de rendez-vous, il y a plus de place. pour faire affleurer les idées. Mais cet été-ci, elles ne sont pas arrivées. Donc peut-être qu'il n'y aura pas de projet cette année, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Je précise qu'on enregistre ici fin août.

  • Speaker #0

    Oui. Non, mais j'ai beaucoup de choses à faire cet été, des choses pratico-pratiques qui n'avaient rien à voir avec la création. Je n'ai pratiquement pas écrit et je n'ai même pratiquement pas lu. Alors que d'habitude, l'été, j'aime lire un livre par jour. Et là, j'ai lu un livre sur mon été.

  • Speaker #1

    D'où vient ce manque de régularité d'un coup ?

  • Speaker #0

    Je crois que j'ai eu une année assez compliquée. Il s'est passé beaucoup de choses. Il y a eu beaucoup de frustrations, à tout point de vue, personnelles, artistiques, professionnelles. Il y a eu beaucoup de choses qui ne se sont pas passées comme je voulais que ça se passe. Et je pense que ça m'a un peu échaudée. Donc peut-être que je me lance moins spontanément dans des nouveaux projets. C'est peut-être ça. C'est peut-être la crise de la quarantaine. J'en sais rien du tout, en fait. Je m'auto-examine beaucoup pour savoir ce qui s'est passé cet été. Mais je ne sais toujours pas.

  • Speaker #1

    C'est une quête, un peu.

  • Speaker #0

    C'est une quête d'avoir quelque chose à écrire. De savoir ce que je veux écrire. C'est une quête permanente de... D'essayer de trouver la pomme prête à être cueillie dans l'arbre et qui sera bonne à manger. Ça c'est tout le temps. Et c'est des quêtes qui sont souvent couronnées d'un succès. Et cette année particulièrement.

  • Speaker #1

    L'arbre, c'est une mauvaise récolte en fait. Tu n'as pas trouvé d'arbre, tu n'as pas trouvé de fruit.

  • Speaker #0

    Si, peut-être que le fruit est là, mais je ne l'ai pas vu. Il est abrité par le feuillage et il faut que je... C'est toujours comme ça avec les idées. Elles sont là, elles ont toujours été là, mais on passe devant sans les voir ou sans comprendre que c'est précisément celle-là qu'il faut creuser. Donc moi, j'ai cru plusieurs fois avoir trouvé ma pomme cette année. Et puis, pas forcément, ce n'était pas la bonne. Je ne sais pas, voilà. J'ai pas les yeux en face des trous là. Mais c'est peut-être normal, je sors d'une période où j'ai fait que ça, travailler, écrire, brasser des idées dans tous les sens, donc peut-être qu'il faut de la friche un peu pour laisser les choses arriver naturellement. En tout cas c'est sûr qu'il ne faut pas forcer, c'est ça qui est paradoxal, c'est que plus on cherche, moins on trouve.

  • Speaker #1

    Ce qui est propre à quasiment tous les métiers créatifs finalement.

  • Speaker #0

    Oui, oui, bien sûr. Le média intimiste, mais pas indiscret.

  • Speaker #1

    Mais avant tout ça, on va peut-être en revenir à la base, au tout début. Tu viens d'où ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis née en Brabant-Ouallon, et j'ai beaucoup vécu en Brabant-Ouallon. Puis j'ai déménagé à Bruxelles, et je viens... J'ai fait des études de journalisme à l'UCL, et puis progressivement, je me suis désengagée du métier. de journaliste enfin en tout cas des rédactions journalistiques et je pratique toujours l'écriture et l'écriture qui essaye de raconter le monde tel que je le vois mais en motorisant des incursions dans la fiction c'est un peu ta signature littéraire quand on te dit c'est un peu ce qu'on ce qu'on ressent oui enfin j'écris beaucoup sur ce que j'ai sous les yeux quoi parfois avec avec des torsions, de la mise en scène. Et des autorisations que le journalisme ne permettrait pas. Mais ce qui est sûr, c'est que j'ai envie de raconter le réel. Et que je n'invente pas des mondes qui n'existent pas. Je suis très admirative des gens qui arrivent à bâtir des mondes. Mais ce n'est pas ce que je fais. Moi, je n'ai pas toute cette imagination. Mais par contre, j'ai un bon sens de l'observation. Donc voilà, je m'appuie là-dessus pour écrire.

  • Speaker #1

    Une trame documentaire ?

  • Speaker #0

    Sans doute, oui.

  • Speaker #1

    Justement, quand on lit ton premier livre, Ariane, qui relate sa fin de ton enfance, ton début d'adolescence, et aussi une grande description du monde du Brabant-Moison, d'où tu viens.

  • Speaker #0

    Je te coupe juste pour dire que ce n'est pas réellement une description littérale de la fin de mon enfance, de mon adolescence. La narratrice n'a pas de prénom, et c'est aussi à dessein qu'elle n'a pas de prénom, parce qu'à la fois c'est moi, mais ce n'est pas du tout moi. C'est un livre d'autofiction. Je me suis basée sur des choses vécues et vues, et puis j'en ai fait autre chose.

  • Speaker #1

    Mais ça dit quand même beaucoup de choses sur ta perception assez jeune du monde, ce côté documentaire, de voir comment tu étudies les gens, le lieu, la ville d'où tu es originaire, Nivelles, que tu sembles adorer.

  • Speaker #0

    Je ne viens pas de Nivelles. Ah non, mais voilà ! Je ne viens pas de Nivelles, moi je viens d'Otigny et de Wavre. Et j'ai placé l'intrigue de mon livre à Nivelles, notamment parce que ma mère était épouvantée que je puisse dire du mal de Wavre.

  • Speaker #1

    Tu ne peux pas dire du mal de Wavre ?

  • Speaker #0

    Non, mais il passe beaucoup de temps. Il fait beaucoup ses courses, il a beaucoup d'amis. Et donc, elle n'avait pas envie qu'on lui jette des pierres, des goudrons et des plumes quand elle se balade dans la rue. Donc, elle m'a demandé de déplacer mon histoire. Donc, je l'ai déplacé à Nivelles, qui pour moi, était un peu un copier-coller d'Oivre. Enfin, c'est ce que je pensais parce que je connais assez peu Nivelles. Et manifestement, pas du tout. Et les Nivellois sont extrêmement chauvins et très, très, très, très, très heurtés par le portrait pleuvant. peu flatteur que j'ai fait de leur ville. Je ne savais pas du tout que le plus grand danger en écrivant cette histoire, ça allait venir des nivellois.

  • Speaker #1

    Tu as reçu des maux ?

  • Speaker #0

    Oui, beaucoup. Je sais qu'il y a des librairies nivelloises qui ont refusé absolument de mettre le livre en rayon. On rappellera quand même que c'est... une enfant de 12 ans, c'est-à-dire un nivel fictif vu par les yeux d'un enfant de 12 ans dans un livre de fiction. Mais ça a été très au sérieux. Apparemment, ils font partie des Belges les plus chauves, les nivellois. J'ignorais totalement. Un jour, je faisais une dédicace de ce livre à la librairie filigrane et il y a un type dont la tête est hyper familière qui vient faire signer le livre et qui n'a pas l'air content. Il me dit, écrivez Oui. pour un gros con qui habite Nivelles. Et au début, je crois qu'il rigole, il fait une petite blague, puis en fait, il insiste, je dois écrire pour un gros con qui habite Nivelles. Donc j'ai écrit pour un gros con qui habite Nivelles, et je mets quand même une astérisque en disant dédicace, écrite sous la contrainte et tout. Je ne comprends toujours pas l'attitude de ce gars, et puis il se tire en faisant claquer le livre sur le rebord de la table, et il s'en va, il était venu tout seul, comme ça. Et puis à un moment donné, en fait, je ne sais pas, les... Casse du bandit manchot sa ligne et je me souviens de qui c'est. Et c'était Gérard Depré, qui est un homme politique quand même de premier plan. Je me dis, ce mec, il a vécu la violence de la vie politique à tellement d'échelons. il va faire 45 minutes de route pour par vexation pour se faire signer un livre pour un gros con qui habite nivelles voilà c'est marrant c'est un acte politique peut-être pour lui j'imagine peut-être qu'il est très impliqué dans la vie de sa commune je sais pas je connais pas trop le de près en fait la carrière politique déjà de près mais

  • Speaker #1

    voilà le genre d'anecdotes que j'ai eu avec ariane en annivelle pas mal je pense qu'il ya pas beaucoup d'auteurs d'autrices qui peuvent avoir des fans par des fans entre guillemets de cet acabit pas sûr qu'il était fan il

  • Speaker #0

    a quand même acheté le bouquin il a quand même acheté le bouquin, c'est vrai.

  • Speaker #1

    C'est déjà ça. tu l'as dit ce n'est pas vraiment toi c'est un peu des ellipses etc un peu romancer c'est le cas de dire mais qu'est ce que ça fait de vivre dans brabant ouadon dans les années 90 d'où tu viens

  • Speaker #0

    A la fois, moi j'ai adoré mon adolescence parce que c'était enfin une forme d'apprentissage de la liberté, j'ai adoré faire des petites bêtises, j'ai adoré l'apprentissage de la liberté, de la séduction, enfin voilà, tous ces trucs-là. J'ai adoré aussi la découverte de l'alcool quand j'étais jeune ado. Mais je me suis toujours sentie vachement à l'étroit en bravant wallon. J'ai toujours dit que je me tirerais au plus vite. Et en fait, je ne me suis pas tirée si vite que ça. Je pense que j'avais 22 ans quand je suis partie et que je suis allée à Bruxelles. Donc, ce n'est pas non plus comme si j'avais fui. Mais c'est sûr que je me sens beaucoup plus à ma place à Bruxelles. Notamment parce que je ne conduis pas, j'ai une phobie épouvantable de la conduite automobile et que je me sens aussi de plus en plus mal dans les transports en commun. Je suis claustro, j'ai des phobies par milliers. Et l'autonomie en bras bon à l'ongle, quand on a des phobies par milliers, c'est assez compliqué. À Bruxelles, c'est beaucoup plus simple. On peut vivre avec mille phobies à Bruxelles sans que ça change fondamentalement l'existence par rapport à quelqu'un qui n'en a pas. Tandis que quand on habite plus loin, on est plus excentré. C'est plus compliqué. des phobies sociales ou des phobies de claustrophobie des phobies de d'agoraphobie trop isolé par rapport à une grande ville j'ai la phobie de toutes les situations dont on peut s'enfuir facilement au sens propre comme au sens figuré comme une interview par exemple voilà je suis en pleine crise d'angoisse merci de cet effort en tout cas

  • Speaker #1

    C'est intéressant, ça dit aussi un peu une autre facette du personnage, de ta personne.

  • Speaker #0

    Oh, j'ai jamais vraiment eu de nombreuses phobies qui se déplacent avec les années. J'ai longtemps eu la phobie du train, puis maintenant c'est plutôt la phobie des ascenseurs. Je n'ai plus pris l'ascenseur depuis cinq ans, par exemple. Ça par contre, en ville, c'est plus compliqué qu'à la campagne, parce que l'offre d'ascenseur est quand même beaucoup plus pléthorique.

  • Speaker #1

    raconte la rencontre tu prends une filière tu choisis des études comme tu disais de journalisme à l'université de louvain-lanoeuf qui un peu dire pour dire gentiment un entre-soi c'est assez refermé quand même nous voilà neuf avons pas alors je n'ai jamais vraiment pénétré l'entre-soi j'ai pas l'impression de m'être intégré à quoi que ce soit le voir la neuve

  • Speaker #0

    Moi, je ne cotais pas, puisque mes parents habitaient à côté, donc je n'ai pas vécu la vie néo-louvaniste de cercle, de baptême, etc. Je voyais ça, en plus, je n'aimais pas le Val-la-Neuve à l'époque. Ça a un peu changé, ça a même beaucoup changé depuis, mais je n'aimais vraiment pas. Et donc, j'allais en cours et puis je me tirais dès que les cours étaient terminés. Donc, je n'ai pas l'impression non plus d'avoir gardé d'immenses contacts avec les gens rencontrés à la fac, à part ma meilleure amie que j'ai rencontrée sur les bancs de l'université en première candidature.

  • Speaker #1

    mais c'est peut-être un entre-soi mais en communication et journalisme je n'ai pas perçu comme ça en tout cas j'en ai pas bénéficié en tout cas c'est sûr ce que je voulais dire par entre-soi c'était plutôt que c'est tout petit c'est vraiment un truc d'étudiant quasiment c'est tout petit par rapport à des vies des vies étudiantines comme il y en a liège en belgique ou même bruxelles oui

  • Speaker #0

    c'est vrai c'est cet essence du propos oui c'est clair que c'est Surtout une génération qui se côtoie et puis basta. Oui, donc c'est une vie totalement artificielle qu'on vit à l'Ouen-d'Ouve. C'est aussi ça, je crois, qui ne me plaisait pas tellement quand je faisais mes études et qui maintenant me plaît, maintenant que je suis beaucoup plus âgée, pour aller un peu m'abreuver à la sève de ces jeunes personnes que je ne fais plus.

  • Speaker #1

    T'aimais bien les études ?

  • Speaker #0

    Ouais, moi j'ai bien aimé les études. J'ai toujours été très scolaire, j'ai toujours su parfaitement régurgiter la matière quand on me faisait ingurgiter. J'ai adoré les blocus, je pensais à trop souhaite de potasser obsessionnellement des syllabies. C'était une période de grande liberté pour moi, je pouvais me lever à l'heure à laquelle je voulais, c'était très cool, j'aimais beaucoup ça. J'ai bien aimé les études. Avec le recul, je pense que je n'aurais pas choisi ces études-là. C'est sûr que je n'aurais pas choisi ces études-là.

  • Speaker #1

    Tu as choisi quoi ?

  • Speaker #0

    J'aurais fait la réalisation. Probablement à l'IAD, puisque je n'habitais pas à tout près. Ou alors à l'INSAS, si j'avais eu la maturité de quitter la maison et de travailler pour habiter plus loin. Mais oui, j'aurais fait des études artistiques. on le sait pratiquement sûr on peut dire que la réalisation est venue à toi par la suite aussi oui mais je sens qu'il me manque un retard quoi un retard à combler donc c'est aussi pour ça que je mange obsessionnellement des films et des documentaires, des séries, des livres pour combler ce retard. Aussi je viens d'une famille où la culture n'était pas du tout au centre de la vie. Mes parents n'ont pas beaucoup au cinéma, ne disent pas. Donc ils n'écoutent pas de musique, donc c'est vrai que j'ai l'impression d'avoir toujours... Une guerre de retard et d'être autodidacte, forcément. Plus que des gens qui auraient eu un cursus où ils auraient tout compris. Moi, la grille de décryptage, je suis seulement en train de la former.

  • Speaker #1

    C'est intéressant parce qu'à 40 ans passés, tu te dis, alors que tu as un background pour le moins important, tu es seulement en train de former la grille culturelle.

  • Speaker #0

    Alors j'ai quand même eu une hyperphagie de livres, de films, de BD, donc c'est clair que je suis à fond. Donc parler de retard ne serait pas tout à fait juste, mais je sens qu'il y a quelque chose qui a comme un blanc et qu'il faut le combler. Il y a comme un gouffre, il y a comme une béance due peut-être aussi au Brabant-Ouallon, qui n'est pas une province particulièrement tonique d'un point de vue culturel. Il y a une boulimie qui s'est installée et cette boulimie, elle est là aussi pour comprendre. Je vais beaucoup au cinéma, par exemple, pour comprendre comment est faite la saucisse, comment les gens l'ont cuisinée, ce qu'il y a dedans, les ingrédients. Alors, je pourrais m'inscrire à un cours, mais je préfère apprendre avec les œuvres.

  • Speaker #1

    Décortiquant.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Tiens, quel plan ça va être après ? Un plan large, un plan serré ? Oui. Qu'est-ce que...

  • Speaker #0

    Le langage de la caméra, quoi. C'est... Au lieu de l'étudier dans un cours, j'essaie de me poser la question de quelle est l'intention derrière le plan et qu'est-ce que ça me fait à moi, la réceptrice, quoi. Voilà.

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qui t'a toujours passionné ou ça vient seulement maintenant ?

  • Speaker #0

    Clairement, moi, c'est la littérature ma première passion. Le livre, quoi, plus que l'image.

  • Speaker #1

    Justement, à quel moment c'était la rencontre avec la littérature ? Tu viens de dire qu'à la maison, il n'y avait pas beaucoup de culture.

  • Speaker #0

    comment ça s'est fait que tu es tombé dedans mais moi j'ai réussi à lire très très tôt donc à trois ans je savais lire et on a hérité de la bibliothèque de mes grands parents donc j'ai lu tout ce qu'ils avaient donc ça c'était du la bibliothèque rose mais aussi ma médecine naturelle de rick azaray des tout et n'importe quoi beaucoup de n'importe quoi aussi mais donc voilà c'était C'est aussi là une hyperphagie constante. Sans hiérarchie, sans jugement de valeur aussi. Je trouve que j'ai eu de la chance aussi, enfin quelque part quand on vient d'une famille qui n'est pas très cultureuse, on a de la chance de ne pas être moquée, jugée, snobée pour ses goûts et d'avoir l'occasion de les composer soi-même vraiment à 100%. Donc lire, l'acte de lecture, peu importe ce que je lisais, a toujours été pour moi de l'ordre de la respiration dans ma journée. C'était impensable et ça l'est toujours de ne pas lire avant de dormir. par exemple. Donc ça c'est pour le goût de la lecture. Le goût de l'écriture, il est venu très petit aussi. Je me souviens que j'écrivais des petites bandes dessinées pour mes camarades de classe, que je vendais des abonnements pour les petites bandes dessinées.

  • Speaker #1

    Tu vas devenir dans l'entrepreneuriat avec une...

  • Speaker #0

    Oui, en plus, je n'honorais même pas les commandes. Je prenais le fric. Je n'écrivais pas l'épisode 2. Donc oui, j'ai écrit beaucoup de poèmes, beaucoup de poèmes d'amour, beaucoup de chansons. Oui, j'ai toujours... Si je n'écris pas, je ne me sens pas bien. Vraiment, je me sens...

  • Speaker #1

    Depuis cet âge-là.

  • Speaker #0

    Vide.

  • Speaker #1

    Depuis cet âge-là.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    C'est une nourriture, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, et j'ai l'impression que c'est une forme de pleine conscience qui, mentalement, pour ma santé mentale, j'ai vraiment besoin de cette forme d'abstraction dans ma tête, de monter et vivre dans ma tête, souvent, pour écrire. De m'abstraire de la vie sociale pour... ne plus faire qu'à agencer des mots entre eux. Ça c'est complètement capital. Ce qui fait que les périodes de friche intellectuelle, même si je sais qu'elles sont nécessaires à la création, elles sont particulièrement difficiles à vivre pour moi. Parce qu'on ne sait jamais si ça va se remettre, en fait. On ne sait jamais si ça va se rétablir, on ne sait jamais si la soupe ne s'est pas tarie, si je ne portais en moi que trois livres, enfin trois romans et un documentaire. Il n'y a peut-être rien d'autre, c'est possible aussi. Bon, normalement, il devrait y avoir autre chose. Il y avait un fil, j'ai tiré, j'ai vu qu'il y avait quand même une pelote derrière, mais voilà, le reste de la pelote tarde à se manifester.

  • Speaker #1

    Ça te fait peur ?

  • Speaker #0

    Oui, vachement. Oui, j'ai peur, mais ça j'ai l'impression que depuis que j'ai 18 ans, même avant, je me dis toujours, avec un sens du drama quand même assez outré, je suis finie, ça y est, il n'y a plus rien, mes meilleures années sont derrière moi. Oui, mais je me le dis depuis que je suis ado. Et puis, je rebondis, toujours.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce qui fait que tu rebondis ?

  • Speaker #0

    Je sais pas. Honnêtement, aucune idée. Si je le savais, je le convoquerais, quoi.

  • Speaker #1

    Tu l'as jamais analysé ?

  • Speaker #0

    Mais si, j'essaye. J'essaye de savoir quelles sont les conditions, justement, de ce rebond, mais... Non, je sais pas. J'ai pas trouvé.

  • Speaker #1

    On avance dans la vie, alors on va revenir au côté plus chronologique des choses. Tu viens de finir tes études à l'université, tu les as réussies vu que tu étais bon élève, comme tu disais. Le premier boulot, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Oh, j'en ai plein parce que je suis arrivée sur le marché du travail au moment où il n'y en avait plus, en tout cas en journalisme.

  • Speaker #1

    On est à quelle année plus ou moins ?

  • Speaker #0

    On est en 2005-2006. Et donc j'ai fait tous les petits boulots possibles et imaginables de la presse. J'ai été maquettiste au Vers l'avenir Brabant Wallon. J'ai été pigiste pour à peu près tout ce qui était possible d'investiguer comme média. Je travaillais partout, à Belle RTL, au Soir Magazine. à la livre. Beaucoup, j'ai travaillé longtemps au site internet des journaux du groupe IPM parce que j'ai rencontré à la salle de sport près de chez moi, alors que j'habitais encore chez mes parents, un des boss du développement web du groupe. Et c'est là que je pense que j'ai vraiment... J'ai commencé à m'asseoir un peu plus confortablement dans l'univers des médias. Enfin, confortablement, il faut le dire vite, parce que c'était vraiment... C'était franchement chiant à faire. Heureusement que les collègues étaient super. On était tous dans la même galère, on s'est bien entendus. C'est ça qui a forgé des bons souvenirs de cette époque. Mais sinon, c'était quand même vraiment répétitif. C'était du bâtonnage de dépêche. On les mettait en ligne, on trouvait un titre, on croppait une photo. C'était ce genre de boulot, la mise en ligne de dépêche.

  • Speaker #1

    Pas très exaltant.

  • Speaker #0

    Pas très exaltant. C'était formateur à certains niveaux. À l'époque aussi, j'étais... modératrice des forums du groupe IPM, parce qu'il n'y avait pas encore les commentaires sous les articles ou s'il fallait aller dans un forum pour commenter. Je pense que c'était évidemment pas aussi orduré qu'aujourd'hui, mais il fallait quand même avoir le cœur bien accroché et l'estomac aussi pour lire toutes ces saloperies. Et donc c'est nous, les petites mains du web, qui devions nettoyer de toutes les invectives, menaces.

  • Speaker #1

    C'est un peu une période transitoire parce que c'est à ce moment-là que c'est apparu finalement tout ça. Les réseaux sociaux, Facebook est né un an ou deux après si je ne me trompe pas.

  • Speaker #0

    Moi je terminais mes études quand les réseaux sociaux sont apparus. Donc quand j'ai commencé mes études, je n'imaginais pas que ça allait prendre une place si grande à tout point de vue. À la fois dans le travail, à la fois en imposant un service après-vente à ce travail. Et je pense que c'est aussi une des raisons pour lesquelles si je devais refaire ma vie, je ne le ferais pas. des études de journalisme parce que j'en ai rien à foutre en fait. d'assurer un service après-vente ou d'assurer une communication autour de mon travail. Ça ne m'intéresse pas, ça ne m'amuse pas.

  • Speaker #1

    Mais au fond, c'est pas très d'un journaliste d'assurer un service après-vente.

  • Speaker #0

    Exactement, je suis tout à fait d'accord. Mais ça le devient, beaucoup. ça devient ça les devises et finir plus dire nous devoir se justifier à tout point de vue en fait c'est ça que tu veux dire il ya évidemment le fait de dealer avec tous les commentaires parfois des commentaires tout à fait constructif mais bon aussi beaucoup de comment haineux, vindicatifs, auxquels longtemps les rédactions ont trouvé qu'il fallait prêter attention. Aujourd'hui on a un peu plus à répondre, si je comprends bien comment les choses se passent, des réponses toutes faites, des lettres type de « je vous remercie » , même quand tu te prends une énorme insulte dans la tronche, le média répond, si c'est sur la page Facebook du du média, du média... répond merci beaucoup pour votre intérêt, une sorte de cirage de pompe très hypocrite, mais qui est supposé calmer la personne en face.

  • Speaker #1

    Ça ne doit pas vraiment marcher.

  • Speaker #0

    Et qui n'entre pas dans la polémique, alors qu'avant, il fallait absolument répondre à chaque commentaire, fâché ou content, et ne pas perdre l'opportunité d'avoir un abonné ou un adhérent. Et c'est fini ça. Tant mieux.

  • Speaker #1

    tu retournerais pas en tout cas non non non et ça nous amène aussi à un autre de thé Un autre de tes travaux, on en a parlé un tout petit peu au début, tu as été dans la réalisation, enfin co-réalisatrice du documentaire Hashtag ça pue.

  • Speaker #0

    Tout à fait, et j'ai aussi co-réalisé un documentaire, un webdoc en 2011 sur l'IVG qui s'appelle Cuisine interne.

  • Speaker #1

    Comment tu rentres ? Tu décides d'abord que tu es du côté journaliste, puis en parallèle littéraire, et puis là tu viens à l'image. Comment ça se fait ? Comment ça se met en place ?

  • Speaker #0

    Alors en réalité, c'est d'abord par le théâtre que j'ai fait mon premier pas de côté des médias. Parce que via les émissions radio pour lesquelles je bossais, j'avais fait la rencontre d'une directrice de théâtre, Nathalie Huffner. qui m'a proposé un jour d'écrire une pièce. Et j'en ai écrite une d'ailleurs, qu'elle n'a pas prise. Et puis, quelques années plus tard, elle m'a redemandé d'écrire quelque chose. Elle m'a fait une commande assez précise. Et là j'ai écrit un truc et c'était déjà trop bien, trop chouette à écrire et trop chouette à regarder réaliser par d'autres, par des comédiens et des comédiennes et par la metteuse en scène qui était Nathalie Huffner, cette espèce d'écriture qui passe pas uniquement par les mots mais qui s'appuie aussi sur des corps. Ça a créé chez moi un sentiment de joie et même un peu de puissance. d'avoir créé un monde, ou participer à créer un monde, puisque c'est de la co-écriture, l'écriture de plateau. Je pense que c'est peut-être bien là qu'en fait l'envie de faire du documentaire, de faire du cinéma de fiction, c'est vraiment affermi. C'est en voyant mes mots mis en scène, mis en voix, mis en espace par d'autres. personne. Et ma première pièce a bien marché, donc ça m'a donné la confiance et ça m'a donné la confiance d'essayer d'autres disciplines aussi, donc littérature, qui était la première chose que je voulais faire dans la vie, c'était écrire des romans. Mais je n'osais pas. Ou j'avais l'impression que c'était un travail de trop longue haleine pour que ma musculature mentale me le permette. Puis finalement, ça va. Et voilà, c'est comme ça. L'idée c'est aussi d'explorer les différents médiums, médias, qui permettent de raconter une histoire telle que j'estime qu'elle doit être racontée. J'ai l'impression que chaque histoire appelle son médium, et bien sûr sa narration, son adresse, etc. Mais il y a des choses que je veux raconter, mais je ne trouve pas du tout ça pertinent de le faire en roman. où je ne trouve pas du tout pertinent de faire ça en pièces. Je choisis l'endroit où il me semble plus juste que ça atterrisse. tu viens de parler de confiance tu es quelqu'un qui a confiance en elle dans la vie de manière générale ou dans tes créations je pense ouais et

  • Speaker #1

    je pense surtout en regardant parce que je me rendais pas bien compte c'est en train en faisant du travail collectif avec d'autres personnes ces dernières années, de la co-écriture par exemple, où je vois Alors je doute toujours du travail en cours, je doute toujours de ce qui est en train d'être fait, je questionne tout le temps la matière, ce qu'on raconte, est-ce qu'on a bien choisi le bon chemin pour le raconter. C'est d'ailleurs un peu chiant pour les gens qui travaillent avec moi, voire tout à fait chiant parce que c'est pas... c'est jamais verrouillé quoi, on n'est jamais sur une autoroute, on est tout le temps en train de prendre des chemins de traverse et c'est pas toujours... je pense que... Même si j'essaie de respecter les gens, quand on travaille collectivement, qu'il y ait toujours quelqu'un qui vienne questionner ce qu'il est en train de faire, ça doit vraiment être difficile à vivre. Mais en travaillant avec ces autres personnes, je me rends compte que j'ai quand même relativement confiance en moi. Et donc c'est par contraste avec le manque de confiance des autres que je me rends compte que chez moi, c'est quand même un truc assez solide. Peut-être que ça vient aussi... Je n'ai pas l'impression d'être née avec cette confiance. Je pense qu'elle est arrivée assez récemment, il y a 5-10 ans peut-être. Parce que je crois que d'une certaine manière, j'ai décidé d'arrêter d'être dans cette posture de la femme qui doute. Qui est une posture que... dans laquelle les femmes se mettent. Parce qu'une femme qui ne doute pas, c'est considéré comme pas féminin, pas jolie. Les femmes sont supposées ne pas avoir confiance en elles. Une femme affirmée a plutôt tendance à... à être disruptive dans l'univers. Et j'ai longtemps joué le jeu de la fille qui n'avait pas confiance en elle. J'ai longtemps fait « mon Dieu, je ne sais pas, c'est nul, je suis nulle, je n'y arriverai pas » . J'ai beaucoup joué ça. Et puis je me suis rendue compte que c'était un jeu justement. Et j'essaye de déconstruire ça. Et donc de reconstruire quelque chose de juste. Et ce qui est juste, c'est que je crois que je suis consciente, assez lucide de mes qualités et de mes défauts aussi, et de mes atouts et de ce dans quoi je suis vraiment nulle. Mais donc, si tu agites le tout, je pense à avoir confiance en moi. est ce que tu penses qu'il ya un avant et un après de documentaires que tu as co réalisé hashtag sa pute ce qu'il ya avant et après oui et non à la fois non parce que ça s'inscrit dans la continuité des du sujet que je creusais à ce moment là et que je continue d'ailleurs à creuser c'est la misogynie. J'ai pas l'impression que ça me met assis, une crédibilité particulièrement éclatante. Parce que dans ces métiers-là, t'as beau avoir fait plein de trucs, tu repars toujours de zéro et c'est comme si t'avais jamais rien fait, t'as encore tout à prouver. ce qui a ses côtés positifs aussi, c'est pas que négatif, mais bon, c'est assez insécurisant. Par contre, là où il y a eu un avant et un après, c'est que j'ai kiffé, quoi. J'ai kiffé faire des tournages, j'ai surtout kiffé le montage, l'étalonnage, toutes ces petits... Moi, les grosses œuvres, c'est pas tellement ce qui m'excite. Je préfère les...

  • Speaker #0

    Donc, aller tourner les at-il-vous, c'était pas trop ton truc, en fait ? Rencontrer...

  • Speaker #1

    J'apprécie encore dix fois plus ... Et même dans l'écriture de bouquins, déplacer des virgules, des respirations, faire des interventions sur des micro-trucs, ça, ça me fait vraiment triper. Et je me suis... J'ai adoré la rencontre avec tous les professionnels du cinéma, qui était pour moi une grande découverte de gens tous plus talentueux et passionnés les uns que les autres. où le film en cours est vraiment le sujet le plus important. C'est paradoxalement un milieu où il y a beaucoup moins d'égo, je trouve, le cinéma, que les médias. Alors que ce qu'on y fait est beaucoup plus chiadé et supposé t'apporter aussi plus d'argent, de gloire, enfin je ne sais pas quoi. En tout cas, c'est contre-intuitif, je trouve, de constater que le milieu du cinéma est plus simple que le milieu des... de la radio, de la télé, de la presse écrite. J'ai adoré me frotter à ces professionnels, professionnels du son, de l'image, des gens hyper spécialisés dans leur domaine, les talonneuses, la monteuse de son. J'ai envie de revivre ça, quoi. J'ai envie de revivre ça plein de fois.

  • Speaker #0

    Côté très technique, en fait.

  • Speaker #1

    Oui, oui. Comment des toutes petites interventions peuvent... Inventer ou proposer un langage différent, une manière de dire différente, très précise. La précision qu'on peut avoir dans l'expression sur des tout petits postes, comme une simple modification de la lumière ou même simplement l'image. La cheffe opératrice, son travail, je trouve ça tout à fait fascinant. ce que racontent les plans, ce que raconte son éclairage. J'ai trouvé ça génial d'explorer ça. Donc oui, il y a un avant et un après ce documentaire. Par rapport à ça, par rapport à mes envies professionnelles, c'est clair. Maintenant, politiquement, je n'ai pas l'impression que ni pour moi, ni pour le monde, il y ait eu vraiment un avant et un après. Parce que les choses n'ont pas changé. Si, en fait, elles sont pires.

  • Speaker #0

    je te suis beaucoup via tes stories instagram je crois que tu aimes beaucoup ça tu en fais un certain nombre par jour et l'autre jour tu avais été je crois dans une école ou une rencontre de jeunes et tu avais un ressenti assez assez fort par rapport à ça, où tu disais que finalement ça s'empirait ? C'était ton ressorti à la sortie de cet événement, si je me rappelle bien en tout cas.

  • Speaker #1

    Non, en fait, en réalité, c'est une intervention qu'on a faite à plusieurs, on était trois, sur l'invisibilisation des femmes dans l'espace public et dans l'histoire. Et donc chacune avec sa spécialisation, moi c'était parce que j'avais écrit un bouquin sur une résistante oubliée, elle était « Allez parler à des jeunes gens » . et une des intervenantes en est sortie particulièrement chamboulée de l'accueil assez hostile qui a été fait aux idées féministes. Moi, je ne sais pas pourquoi, ça ne m'a pas tellement ébranlée parce que peut-être que je le savais déjà. Et qu'un article récent que j'ai lu dans Le Monde démontrait que, d'après je ne sais pas quelle étude récente elle aussi, les jeunes garçons étaient de plus en plus conservateurs et les jeunes filles de plus en plus progressistes, et qu'il y avait un double mouvement en fait, qui créait aussi des tensions, de la friction, de la violence. Parce qu'on a beaucoup tendance à croire à tort que le monde est de plus en plus féministe, C'est clair qu'il y a des gens qui sont... de plus en plus féministe et de plus en plus progressiste. Mais à côté de ça, tu as toute une partie de la population qui est aussi de plus en plus hostile aux idéaux d'égalité. Et c'est comme ça que je l'avais... que j'avais digéré en fait cette rencontre avec ses élèves moi je fais beaucoup je vais beaucoup dans les écoles et en général ça se passe assez bien même plus qu'assez bien ça se passe toujours super bien pour les écoles je vais dans des écoles surtout avec mon deuxième bouquin les Les yeux rouges, qui est un livre d'autofiction où la narratrice est harcelée par un homme. Je suis beaucoup invitée. Je suis beaucoup invitée parce que, comme ça parle de harcèlement et que c'est une problématique capitale dans les écoles et que les enseignants et les directions ont vraiment du mal à savoir par quel bout la prendre, ils prennent mon livre comme support de discussion. Mon livre ne parle pas des ados, donc je pense que les ados ne sont pas... On ne voit pas immédiatement la correspondance qu'il y a entre la situation de cette femme, la narratrice et la leur, mais en classe, moi comme c'est un sujet que je connais très bien, je peux en parler de leur réalité aussi à eux, je crois. Et c'est super, j'ai fait beaucoup de ça en Belgique, beaucoup de ça en France aussi. Et j'adore en fait moi le contact avec les ados, même quand il est musclé, même quand il est parfois un peu hostile. J'en sors toujours avec quelque chose, il se passe toujours un petit truc un peu magique. Qu'avec les adultes, pas. Avec les adultes, les rencontres littéraires, c'est surtout chouette au début de la sortie d'un bouquin, parce que... Tu comprends enfin ce que tu as écrit en le confrontant au regard des autres qui sont face à toi et qui peuvent te faire un retour ou te poser des questions, même quand ils n'ont pas lu le bouquin. Mais à partir d'un certain moment, c'est un peu souvent la même chose et il y a une forme de lassitude qui s'installe. Tandis qu'avec les ados, ce n'est jamais la même chose. C'est très vivant. C'est très vivant et parfois c'est violent un peu, mais moi ça me plaît vachement. Mais certaines personnes peuvent être... Moi je crois que la castagne ça a tendance à m'exciter un peu. Mais certaines personnes, la castagne ça a tendance à les... Donc oui, c'est un constat que je valide totalement. Mon expérience empirique de visite dans les écoles montre qu'il y a de plus en plus de jeunes garçons très hostiles aux idéaux d'égalité et aux idéaux féministes en particulier, et de plus en plus de jeunes filles ultra vénères. ultra instruite en matière de lutte politique, très mature sur ses questions et très agacée par l'inertie en face dans le meilleur des cas et le rejet en face dans le pire des cas. Ça, c'est certain.

  • Speaker #0

    C'est à quel moment de ta vie que tu as pris conscience des luttes féministes ?

  • Speaker #1

    Alors j'ai pris conscience que les luttes féministes me précédaient, il n'y a pas si longtemps en fait. Mais moi je me suis sentie féministe et ça a été un sujet pour moi depuis que je suis enfant. Ça c'est sûr. Depuis que je suis enfant j'ai l'impression qu'on essaie de me mettre dans un moule et que j'essaie d'en sortir. C'est comme ça que j'estime. être féministe ou avoir un regard affaibli sur les choses. J'ai longtemps cru que je pourrais échapper totalement au moule et que, en me battant bien, il n'y aurait pas de déterminisme ni social, ni environnemental, ni de genre. Et c'est aujourd'hui que je me dis, en regardant un peu le passé, que je me suis quand même... J'ai pas gagné sur tous les plans. Et il y a des tas de domaines sur lesquels j'ai abdiqué un peu, en fait, pour avoir la paix. Voilà, en gros, c'est ça. Les luttes féministes m'intéressent vachement. Je lis énormément sur le sujet. Je n'ai pas l'impression, moi, d'avoir une pensée nouvelle et originale à proposer. Ce que je fais, je ne suis pas une théoricienne du féminisme, mais ce que je fais, je crois, dans mon travail, que ce soit en journalisme, en littérature, dans les pièces que j'écris, documentaires, c'est que j'essaye de visibiliser l'expérience sociale des femmes. J'essaye de montrer les choses telles qu'elles sont. J'essaye de « cut the bullshit » . mon ikigai ma mission en tout cas c'est que je crois m'être donné est ce que ça te rend ça te rend connaître Oui, oui, oui, je suis quelqu'un de... assez... Ouais, je suis quelqu'un d'en colère, c'est sûr.

  • Speaker #0

    Mais est-ce que c'est un moteur, cette colère ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, c'est même le moteur principal. La colère, la frustration, le... Ouais, oui, c'est vraiment un moteur à piston, quoi. C'est mon fuel, c'est mon fuel quoi, pour activer le moteur, c'est sûr que c'est la colère. Et la colère n'est pas toujours une colère sociale, c'est parfois des colères très personnelles, c'est parfois des injustices que j'estime avoir subies de manière interpersonnelle et qui ne sont pas forcément politiques. Mais voilà, c'est ça qui me fait écrire, c'est ça qui me fait dire.

  • Speaker #0

    Donc si on te met en colère maintenant, il y a des chances que tu trouves d'inspiration pour le roman que tu as cherché tout l'été ?

  • Speaker #1

    Ah oui, c'est ça que je tiens. Peut-être que s'il m'arrive un énorme malheur, une terrible injustice, il y a un très très bon roman qui va sortir, mais j'aurais dû me frapper cet énorme malheur, cette terrible injustice. Donc je préfère aller puiser dans les malheurs et les injustices qui se sont déjà produits dans le passé. Et donc voilà. Et comme il y en a... me semble-t-il à mon estime un certain nombre je pense que je devrais avoir de quoi de quoi faire mais j'ai pas encore trouvé lequel tu regardes quoi tu parlais tout à l'heure que tu regardais énormément de films etc est ce qu'il ya un style en particulier ou un auteur une autrice non je change beaucoup change beaucoup d'avis change beaucoup de passion j'ai par exemple ma période de... Indienne, où je regardais beaucoup de séries indiennes. Voilà, certaines faites pour le marché américain et d'autres faites pour le marché indien, pour comprendre comment les gens vivent. J'ai beaucoup aimé, puis aussi j'ai eu ma période japonaise, coréenne, comprendre, et en littérature aussi, parce que là même la fiction je trouve apporte des éléments de compréhension du réel, de la manière dont des gens qui vivent très loin de nous vivent. Voilà, mes périodes changent et mes obsessions changent. J'ai beaucoup lu de l'autofiction à une époque. J'adorais, enfin ce que je préférais c'était de voir comment les gens se meuvent dans l'existence. Maintenant l'autofiction, j'en ai vraiment marre. Je cherche de... Je cherche... J'ai cherché beaucoup de la fiction, mais de la fiction très élaborée, pour savoir comment les gens aussi créent les personnages, pour être face à une mécanique d'invention nourrissante, intellectuellement pour moi. Mais je trouve peu de fiction qui ne m'ennuie pas très vite. Donc, je lis beaucoup de longs récits journalistiques, beaucoup d'enquêtes. Voilà. C'est ça ce que je lis beaucoup en ce moment.

  • Speaker #0

    On revient au côté sociologique et documentaire. Ouais. C'est un peu un leitmotiv en fait.

  • Speaker #1

    Les livres d'Ariane Chemin, de Raphaël Baquet, des journalistes du monde. J'essaye de ne pas tous les lire trop vite parce qu'après il n'y en aura plus, mais... Clairement ça me plaît beaucoup. et ça m'intéresse surtout ça m'intéresse parce que je me désintéresse très très vite des choses en ce moment pourquoi peut-être parce que je sens que le voilà j'ai 40 ans plus de 40 ans et je sens que peut-être que le temps est compté et que quand je perds mon temps c'est un temps qui ne reviendra j'ai commencé à comprendre que le temps ne reviendra jamais et que Un livre qui m'énerve, une posture d'auteur qui m'agace, en fait, c'est du temps qui, je pense, ne sert à rien.

  • Speaker #0

    Du temps déprécieux. Oui. C'est récent,

  • Speaker #1

    cet échec de temps.

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    c'est très récent.

  • Speaker #0

    Une année file, finalement, la voie avancée à l'orcap. Avant, une après-midi pouvait paraître une éternité. Et puis maintenant ?

  • Speaker #1

    Oui, oui tout à fait, exactement. Les jours, les semaines, les années, ça passe comme des voitures. Donc il est temps de faire des choix, d'arrêter les non-choix. Moi j'ai fait beaucoup de non-choix, mais là il est temps de faire des choix, je crois. Et à tout point de vue.

  • Speaker #0

    Tu as peur de ne pas avoir assez de temps pour faire tout ce que tu voudrais faire ?

  • Speaker #1

    Non pas trop, sûrement, mais c'est pas comme ça que je formule les choses. J'ai peur de perdre tout à fait mon énergie, de ne plus arriver à faire exactement ce que je veux faire. Mais je suis pas, je me dis, oh la la, je suis pas dans l'état d'esprit de se dire, je n'ai plus que 40 ans à vivre, il faut que je me dépêche. Il n'y a pas une dead end à la fin. Moi, je veux juste que la dead end, elle ne soit pas maintenant.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu aimes l'époque ? L'époque dans laquelle on vit ?

  • Speaker #1

    Je ne la déteste pas.

  • Speaker #0

    Mais tu n'aimes pas ?

  • Speaker #1

    J'essaie de... parce que j'ai aimé une époque, peut-être pas. Il y a quand même plein de trucs excitants et intéressants qui se passent en ce moment. On ne peut pas dire que l'époque n'est pas intéressante. Bon, elle est violente, elle est triste à plein de niveaux, mais les gens qui disent qu'ils n'aiment pas l'époque, c'est souvent des gens ou des artistes qu'on lit dans les magazines dire que... On n'a plus de liberté, on ne peut plus rien dire, on ne peut plus rien faire. C'est souvent une vision assez réactionnaire des choses. Moi je trouve qu'on n'a jamais pu autant dire de trucs et faire de trucs. Je me sens beaucoup plus libre, j'ai l'impression que tout le monde est beaucoup plus libre aujourd'hui que dans les années 90 par exemple. Ce que je n'aime pas de l'époque, et là c'est peut-être mon côté réac naissant ou renaissant qui s'exprime, c'est... Peut-être le culte de l'influence, à tout point de vue. Je pense qu'il y a autant d'influenceurs et d'influenceuses que de... de sujets de préoccupation, quoi. Donc, je ne suis pas anti-influenceur ou influenceuse. Moi-même, je consomme pas mal de vidéos, notamment de youtubeurs sur des sujets très précis qui peuvent être considérés comme des influenceurs, des influenceuses. Mais que le nombre d'abonnés, que le nombre de clics soit vraiment l'unique prisme par lequel on envisage quelqu'un aujourd'hui, ça, ça me fait assez peur, quoi. TikTok, ça me fait assez peur aussi. J'ai l'impression que c'est en train de réduire notre capacité d'attention encore plus que ce qu'elle était déjà circonscrite. Donc ouais, ça c'est des trucs qui me font peur. Des trucs liés à une forme d'idiocratie, comme dans le film. Ça, ça me stresse. Mais je trouve que plein de choses aussi qui sont géniales dans l'époque dans laquelle on vit.

  • Speaker #0

    Par exemple ?

  • Speaker #1

    L'émergence publique d'identités plus marginales, qui arrêtent de se cacher, qui existent, des représentations qui n'existaient pas avant, des gens qu'on ne voyait pas avant, qui maintenant sont visibles, parfois spectaculairement visibles. s'agrègent les uns aux autres, qui trouvent des communautés, des familles. Ça c'était pas du tout possible dans les années 90. Dans les années 90, t'avais une identité un peu marginale, je sais pas moi, t'étais neuro-atypique ou... porteur de je sais pas d'une originalité ou envie de revendiquer une originalité battait tout seul quoi tu étais tout seul et en général plutôt j'étais plutôt des pierres quoi et aujourd'hui même si les pierres existent encore tu as aussi le reste quoi tu as aussi la possibilité de de taf il y à d'autres je trouve ça vraiment formidable ce récord la bande originale de ta vie alors là une musique en particulier mais ça je n'en ai strictement aucune idée c'est beaucoup trop vaste comme question tellement vaste que je fais un black out

  • Speaker #0

    Écoute, certains non, d'autres non pas, ce n'est pas une question obligatoire. On a posé à 2-3 personnes, certaines personnes ça vient tout de suite comme ça, presque même pas besoin de poser la question. Et puis d'autres, j'avoue que moi-même si on me la posait, je serais incapable de répondre. C'est un peu fort de ma part de poser une question à laquelle je ne serais pas capable de répondre.

  • Speaker #1

    Je ne sais pas pourquoi, mais il y a une idée qui me vient, c'est « I wanna be your dog » des Stooges. Pour la pulsation, l'énergie mordante de la chanson.

  • Speaker #0

    Le rythme.

  • Speaker #1

    Oui, mais un truc acéré, électrique et acéré. ça je pense que ça peut c'est une pulsation assez naturel par rapport à mon rythme interne à moi et qu'elle est il ton rythme interne comment c'est quoi ton rythme interne c'est les doigts dans la prise carrément mais ça va ça fait pas trop mal alors ici quand même ça chauffe parfois mais ça marche moi ça me maintient ça me maintient en effet

  • Speaker #0

    Bien. Est-ce que tu as une héroïne, un héros, quelqu'un qui t'a toujours fait fasciner, fait rêver, fictionnel ou vrai ?

  • Speaker #1

    De moins en moins. Clairement, moi je suis une padawan de Virginie Despentes. J'ai énormément d'admiration pour Virginie Despentes. Quand la vie va mal, je me fais souvent une petite interview audio-vidéo de Virginie Despentes sur YouTube. Parce que je trouve sa clairvoyance et son authenticité, ça fait vachement de bien de la lire. Moi c'est quelqu'un qui me procure de l'apaisement, beaucoup. tellement qu'elle est sharp et affûtée. Ouais, Virginie Despentes. c'est bon alors c'est un peu ridicule de dire mon héroïne parce que si ça se trouve en privé c'est une atroce personne je ne pense pas mais tout cas elle donne du sens à l ordonne le monde de manière beaucoup plus claire mais

  • Speaker #0

    est ce que tu voudrais que des gens disent la même chose de l'interview qu'on est en train de tourner que ça les apaise, que ça leur donne du clé ou quoi, quand ils la regarderont, enfin on espère.

  • Speaker #1

    Oui évidemment, je préfère que les gens trouvent que c'est apaisant et stimulant intellectuellement, que ça leur a volé une partie de leur temps qui ne reviendra jamais, c'est sûr. Maintenant est-ce que ça me meut d'une manière ou d'une autre, je sais pas. En tout cas je sais que moi j'aime les gens qui les interviewent, les propos de gens qui ne tournent pas autour du... du pot et qui disent vraiment des choses, qui ne sont pas dans le small talk. Le small talk dans la vie de tous les jours et dans le discours médiatique, c'est vraiment pour moi, c'est douloureux. Et donc, j'essaye en interview, et parfois, je sais que je peux être dans un excès de sincérité à cause de ça. Comme je déteste le small talk que les autres m'infligent, je fais tout pour ne pas moi-même être dans le small talk. Donc, j'essaye de créer, de dire vraiment des choses et de répondre vraiment aux questions et de mobiliser vraiment. Après les interviews, je suis souvent hyper crevée, parce que c'est sportif, je reste pas en surface. Donc oui, si quelqu'un dit que l'interview lui a apporté de la nourriture à quelconque niveau, je serais contente.

  • Speaker #0

    et justement comment tu vis le rapport avec les gens qui te disent des fans etc comment tu échanges avec eux d'une manière ou d'une autre oui je suis dispo sur instagram donc enfin c'est un

  • Speaker #1

    compte privé est verrouillé, mais la plupart des gens, ils me font une demande d'abonnement, je les accepte. Je ne les accepte pas quand ils ont l'air d'immenses psychopathes, mais bon, parfois...

  • Speaker #0

    On l'a fait cet après-midi avant de venir, donc on va vérifier.

  • Speaker #1

    Mais voilà. C'est pour ça qu'il y a beaucoup de gens en attente, parce que parfois, je ne suis pas sûre qu'ils soient des psychopathes ou pas. J'ai complètement oublié ce que je racontais. Oui, voilà, le rapport avec les gens qui me lisent. Oui, oui, en fait, j'ai beaucoup et souvent et un peu trop, parce que j'ai notamment avec mon dernier bouquin, j'ai accepté toutes les invitations. Je dis oui à toutes les invitations. Alors que je m'étais dit non, cette fois-ci, tu vas vraiment choisir. Tu vas faire trois librairies. Et puis c'est tout. Et en fait, j'ai dit oui absolument à tout. J'ai fait tous les festivals. C'était à la fois des trucs prestigieux. Et à la fois des trucs dans des bleds improbables où il y a les trois pelées de tondu, j'ai vraiment tout fait. Et donc j'ai rencontré tout type de gens, des gens complètement indifférents à ce que je faisais, mais aussi des gens, des fans hardcore, des gens qui avaient lu distraitement et d'autres qui avaient fait une exégèse des bouquins, qui les connaissaient mieux que moi. Donc oui, je suis souvent en contact avec des gens qui me lisent et je leur parle souvent. Je crois qu'il faut trouver une posture où à la fois tu entends ce qu'on te dit, mais tu ne prends pas pour argent comptant ni les compliments, ni les scuds. Voilà, c'est... Je sais pas très bien comment on arrive à faire ça. Je pense avec l'habitude, l'expérience. Mais je crois que j'y arrive. Je crois que je sais très exactement ce que j'écris et certains compliments ne me font jamais plaisir parce que je les trouve faux et certains scuds ne me font jamais mal parce que je les trouve faux aussi.

  • Speaker #0

    C'est pari pour la critique.

  • Speaker #1

    Ouais. Je pense que je sais très bien ce que je fais et que... je suis vraiment ces derniers temps je suis ma propre boussole quoi et c'est mon intuition sur mon texte qui doit me laisser la l'impression finale et parce que tartampion on dira de bien ou de mal tartampion ou ou le pape 1 lui envoyer un livre au pape oui non c'est une idée par l'impression que c'est. Ça l'intéressera forcément.

  • Speaker #0

    Avec ça, j'arrive à la fameuse dernière question pour boucler la boucle. Qui voudrais-tu voir, entendre, lire dans Raconte ?

  • Speaker #1

    J'étais tellement concentrée sur tes questions que je n'ai pas réfléchi. Ça doit être absolument un artiste ou une artiste ?

  • Speaker #0

    Forcément, toute personne.

  • Speaker #1

    Alors, moi, je suis assez fascinée par Raja Mawan, l'ancienne coprésidente d'Ecolo.

  • Speaker #0

    notamment pour sa solidité mentale, le fait d'avoir choisi une carrière qui t'expose tout entière, en tant que personne aussi, en tant que corps, en tant que tout. Et elle, j'ai l'impression qu'elle traverse la violence de la vie politique avec une force et une forme de placidité qui me fascine. comprendre avec quelles lunettes elle regarde le monde et comment elle fait pour vivre, survivre et même peut-être même s'amuser de toutes les attaques qu'elle endure, de toutes les violences, les cruautés qui traversent son existence. Pour moi, une petite dissection du cerveau de Raja Mahwan, ça pourrait beaucoup m'intéresser, je pourrais beaucoup apprendre, je crois.

  • Speaker #1

    Écoute, on va essayer de programmer cette dissection prochainement. Merci beaucoup Myriam. Merci.

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