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Radio Coop Alim’

Épisode 4 : l'aide alimentaire en France, vers un changement structurel ?

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40min |16/01/2025
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Épisode 4 : l'aide alimentaire en France, vers un changement structurel ?

Épisode 4 : l'aide alimentaire en France, vers un changement structurel ?

40min |16/01/2025
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Description

Et si l’aide alimentaire disparaissait ? Place au débat ! Les associations de Coop Alim’ Occitanie et Éric Pélisson, commissaire à la prévention et à la lutte contre la pauvreté en Occitanie, projettent leur vision de l’aide alimentaire et son rôle dans la société actuelle. Liens entre le terrain et la politique sociale, fonds européen, ramasse en grande surface, stratégie d’achats, gestion des stocks et financement : vous saurez tout sur le fonctionnement qui permet à l’aide alimentaire d’exister.

Radio Coop Alim’ vous invite même à faire un bond dans le futur pour imaginer le devenir des associations de solidarité.


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Si vous aimez le podcast, nous vous invitons à le noter 5 étoiles sur votre plateforme d'écoute préférée.


👉💌 mailto:coopalimoccitanie@gmail.com

Une création originale Ekkry en partenariat avec VO2X

Texte et voix : Krystel Elisé et Coop Alim’ Occitanie

Habillage voix : Julien Vigier


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Radio Copalime, Radio Copalime,

  • Speaker #1

    le podcast de la plus grande coopération associative d'Occitanie.

  • Speaker #2

    Bonjour à toutes et à tous, je suis ravie de vous retrouver pour ce nouvel épisode de Radio Copalime. Dans l'épisode précédent, nous avons abordé l'histoire de l'aide alimentaire en France et je vous propose de continuer à l'explorer aujourd'hui. Les membres de Copalime Occitanie sont toujours avec moi. Autour de la table, vous commencez à les connaître. Bernard Cabrol, chargé de mission pour les banques alimentaires d'Occitanie. Jean-Louis Clément, président du GESMIP. Audrey Guéraud, chargé de projet accès digne à l'alimentation pour le secours catholique. Firas Jaidi, animateur réseau pour Andes. Maud Mouissé, chargé de mission soutien aux délégations Occitanie de la Croix-Rouge française. Louis Rouget, chargé de développement régional en Occitanie pour les Restos du Coeur et Ouria Tareb, secrétaire générale du Secours populaire Haute-Garonne. Nous accueillons aussi dans cet épisode Eric Pélisson, le commissaire à la prévention et la lutte contre la pauvreté de la région Occitanie. Messieurs, dames, bonjour !

  • Speaker #3

    Bonjour !

  • Speaker #2

    Ce matin, le débat est ouvert sur les enjeux actuels de l'aide alimentaire, ceux de 2025. Et je voulais commencer par vous, M. Pélisson. Je voulais savoir quelle est votre vision sur le sujet.

  • Speaker #0

    Si on fait le parallèle par rapport à aujourd'hui, moi je pense à deux remarques. La première, c'est qu'on a considéré avec le développement du libéralisme économique qu'il appartenait en fait à la société de s'organiser toute seule, et notamment donc aux entreprises de faire des propositions là où il y avait un besoin. On se rend compte que ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas suffisant du point de vue qualitatif notamment. Parce que le libéralisme qui a apporté en France, c'est vrai, la prospérité, la croissance, la paix, en même temps, il a apporté aussi beaucoup d'inégalités sociales. Et de ce fait, là aussi, puisque je parlais de la société philanthropique qui a fonctionné jusqu'au début des années 60, en fait, en réalité, l'aide alimentaire a commencé à se structurer avec les associations, d'abord dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le Secours populaire, etc. Et puis, effectivement, au milieu des années 80, avec notamment l'appel... l'appel de Coluche à créer les restos. Donc en fait, notre société ne produit pas en tant que telle un équilibre spontané si la puissance publique n'intervient pas. Et derrière la puissance publique, c'est ça que je trouve magique, c'est qu'au fond, un modèle dans lequel on imaginerait que l'administration règle tout, ça donne ce qu'on a vu dans les pays soviétiques par exemple. Je trouve que la magie, c'est aussi la capacité d'auto-organisation de la société avec des associations. Les pouvoirs publics pourraient faire le choix de gérer eux-mêmes. En fait, il y a une très belle alliance avec les associations qui respectent l'indépendance constitutionnelle des associations. Chaque association décide de ce qu'elle veut faire comme elle le veut et leur identité est très importante. C'est souvent une identité qui est marquée par un fondateur très fort. On peut penser au père Wresinski, par exemple, pour rater des carmondes sur un autre sujet, ou à Coluche, par exemple, pour les restos. Mais donc, tout cela pour dire que l'un des aspects très positifs des sociétés démocratiques, c'est justement la capacité de s'auto-organiser à l'échelle micro-locale. On aura l'occasion d'en reparler tout à l'heure sur les financements, mais aussi à l'échelle nationale. Et donc, ce sont des associations, évidemment, qui ont aussi un plaidoyer et qui font aussi pression pour faire évoluer les choses.

  • Speaker #2

    Et justement, en parlant, donc là, on est à une échelle nationale, mais en fait, l'aide alimentaire, elle s'organise à toutes, sur tous les territoires, à toutes les échelles. Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment ça marche, en fait, pour ceux qui ne connaissent pas ces échelons ?

  • Speaker #0

    Moi, j'ai la chance d'avoir connu ça, puisque j'ai commencé à faire de l'aide alimentaire en 84, avec la communauté Emmaüs de Longjumeau, dans le sud des Saônes. Et puis ensuite, avec d'autres associations, notamment dans la Croix-Rouge. L'aide alimentaire, en fait, moderne, elle est venue notamment, alors en dehors des implications associations dans la proximité, elle est venue notamment des surplus européens. En fait, on se souvient qu'en 1945, l'Europe est détruite à la suite de la guerre et que le plan Marshall crée en fait une inégalité. C'est-à-dire que les Américains sont très contents de pouvoir vendre leurs surplus. et donc dès que l'Union... européenne se crée, la première politique qui est créée en 1961, c'est la politique agricole commune. Et la politique agricole commune, elle a comme particularité de partir d'un énorme déficit alimentaire et donc d'avoir une approche quantitative. Et malheureusement, on en est encore là aujourd'hui. Cette approche quantitative, elle permet en fait, en 25 ans, à l'Europe de retrouver son autonomie alimentaire. et de commencer à exporter. La France, dans les années 80, est la deuxième puissance exportatrice mondiale. Sauf que l'Europe a promis aux agriculteurs que, quel que soit ce qu'ils produisent, on va leur racheter. Et leur racheter à des prix convenus d'avance. Et donc, on se retrouve en 1992, je me souviens bien du montant, avec 2 millions de tonnes de viande dans les congélateurs européens et 500 000 tonnes de beurre. Et évidemment, la question qu'on se pose à l'époque, qui est une mauvaise question, c'est qu'est-ce qu'on va en faire ? Et comme parallèlement, en 88, il y a eu l'amendement Coluche et que depuis le début des années 80, il y a eu le départ de l'aide alimentaire dite moderne, donc un redémarrage, on a fait un rapprochement entre les deux. Et donc l'Union européenne a commencé à écouler ses surplus dans l'aide alimentaire. Alors ça jusqu'en 2015. Et puis en 2015, il y a des pays qui ont dit mais c'est bien sympa, mais l'Union européenne, ça coûte de l'argent, elle n'a pas la compétence juridique. Et donc, à ce moment-là, il y a eu une grande inquiétude de se dire, mais au fond, est-ce que tout ça ne va pas s'arrêter ? Parce que malgré tout, ça rend un sacré service. Ça représente 90% des montants financiers que la France donne aux associations. En gros, c'est à peu près 600 millions d'euros d'aide alimentaire qui vient de l'Europe, puisque maintenant, ça ne vient plus sous forme de viande congelée ou de beurre. Ça vient effectivement sous forme financière. Et la France y rajoute, au titre de l'aide alimentaire, 60 millions. Après, la France y rajoute... d'autres crédits pour la transformation du modèle de l'aide alimentaire. Mais donc, l'aide alimentaire européenne, c'est 90%. Donc, en 2015, inquiétude de tous les acteurs de se dire que ça s'arrête demain. Et donc, l'Union européenne, effectivement, a pris la compétence, ça continue, et c'est une bonne chose. Mais le péché originel, il est dans cette idée que finalement, l'aide alimentaire, elle irait chercher les surplus, comme si les besoins alimentaires des personnes correspondaient, en fait, à ce que les autres ne veulent pas. Et c'est là où on a une difficulté. Et donc, deux problèmes de fond. Le problème quantitatif, il faut passer de quantitatif à du qualitatif. Et deuxièmement, peut-être désarticuler ce lien qu'on a fait entre les surplus, notamment des grandes surfaces, et les besoins nutritionnels des personnes.

  • Speaker #2

    Merci d'aborder le sujet de la qualité des aliments. C'est un sujet important et nous allons en parler juste après. Il existe deux lois qui fixent un cadre à l'aide alimentaire, la loi Garot et la loi Egalim. La loi Garot de 2016, qu'est-ce qu'elle a changé pour vous ? Bernard ?

  • Speaker #1

    La loi Garraud part d'un très bon sentiment, puisqu'elle n'oblige pas les grandes surfaces à donner les invendus à des associations qui font de l'aide alimentaire. Elles peuvent donner aussi pour de l'alimentation d'animaux, elles peuvent aussi donner pour de la méthanisation, mais ça reste prioritairement destiné à l'aide alimentaire des humains. Alors donc ça a eu un effet, ça devrait avoir un effet plutôt bénéfique. Mais les grandes surfaces se sont organisées et on a vu apparaître ce qu'ils appellent le sticking, c'est-à-dire qu'ils démarquent les produits jusqu'à pratiquement la date possible de consommation. Et tout ça, du coup, ça a échappé aux associations qui distribuent l'aide alimentaire. Et puis il faut reconnaître que la loi Garot, elle est instituée, mais... personne ne contrôle. Personne ne peut contrôler si elle est réellement appliquée. Moi, j'en avais discuté avec le préfet Dutarn à l'époque. Il m'a dit, effectivement, un jour, on vous donnera les réponses. Ça fait quelques années que j'attends la réponse, que je ne ne l'ai pas eue. Qui c'est qui doit contrôler ? Donc, pour nous, il y a du bon et du moins bon sur la loi Garot.

  • Speaker #2

    Je rappelle que la loi Garot, c'est la récupération des invendus devenu obligatoire. pour les grandes surfaces. Aurélien, vous voulez y réagir aussi ?

  • Speaker #3

    Je vais répéter un peu ce que disait Bernard. Les associations ont été collectées avant la loi Garot. Moi, j'ai toujours connu les collectes dans les magasins, dans l'association, et je pense que la banque alimentaire, tout ça, le faisait déjà. Et c'est vrai que la loi Garot, on n'a pas forcément consulté les associations sur cette question-là au départ. Et je pense que ça aurait été vraiment intéressant de le faire, parce que je pense qu'on aurait mieux Merci. ils auraient pu mieux accompagner les grandes surfaces, etc. et pas forcément l'imposer parce que finalement, c'est vrai qu'il n'y a pas de contrôle derrière et rien du tout. Et nous, on subit finalement tout ce qui est arrivé après, c'est-à-dire, je pense qu'on va en parler tout à l'heure, mais tous les phénix, enfin commerciaux, tous les intermédiaires qui se sont créés suite à cette loi Garot qui ont... empirer, je pense, ce qu'on a pu nous récupérer dans les grandes surfaces.

  • Speaker #2

    Vous nous expliquez qui est Phénix et qui est Comerso, pour ceux qui ne savent pas du coup ? Quels sont ces acteurs ?

  • Speaker #3

    Ce sont des intermédiaires de collecte qui se sont créés. Pour moi, c'est des start-up. Je les considère comme des start-up parce qu'elles ne sont pas à but non lucratif. Elles se font énormément d'argent sur le dos des pauvres, entre guillemets. Et elles ont proposé leur service au GMS. en leur expliquant qu'elles pourraient former leurs salariés sur une meilleure gestion des stocks, sur une meilleure trie, etc. Et d'ailleurs, c'est notamment ces intermédiaires qui ont proposé tout ce qu'on voit aujourd'hui à tête de gondole, les petits rayons où on trouve les produits à moins 40, moins 50, moins 70%. Donc c'est leurs idées.

  • Speaker #2

    Les frigos anti-gaspi quoi.

  • Speaker #3

    Tout à fait. Et nous, on récupère. Ce qui reste,

  • Speaker #2

    vous voulez dire après ce passage ?

  • Speaker #3

    Tout à fait.

  • Speaker #2

    Justement, je voulais aussi vous entendre sur ce point. On a souvent tendance à associer la lutte contre le gaspillage alimentaire à l'aide alimentaire. Je pense que vous êtes beaucoup pour dire que ce n'est pas le bon prisme. Qu'est-ce qu'il faudrait organiser pour justement améliorer la qualité de ce qu'on propose aux personnes concernées ? Monsieur Pélisson, je me tourne vers vous.

  • Speaker #0

    alors Tout d'abord, qu'est-ce que c'est que le gaspillage alimentaire ? Quand on dit 94 kilos par personne et par an, ça ne veut pas dire que ce sont les personnes qui sont le bout de la chaîne qui jetteraient 94 kilos d'aliments. Une bonne partie correspond à des déchets qui sont évidents, les coquilles d'œufs, les épluchures, etc. Donc ça, c'est normal et ça représente une partie de ce poids. Une autre partie, elle est perdue pendant la production, pendant le transport ou dans les magasins. Et donc la population ne perd qu'une... petite partie. Alors, on a certainement des progrès collectivement à faire par rapport à ça. C'est vrai, par exemple, qu'on le voit bien, on a tous une très mauvaise gestion de nos congélateurs. En fait, on remplit les congélateurs et puis on ne se pose pas la question de savoir quand on va consommer. On a sans doute à améliorer. Même chose pour les frigos. C'est-à-dire que le fait de mal ranger dans les étages du frigo, puis de mettre ce qu'on a acheté en premier au fond, fait qu'à un moment on se dit « Ah mince, les tomates sont abîmées ! » Évidemment que le consommateur, mais vous et moi, pas que les personnes en situation de pauvreté, on a amélioré des choses. Donc ça, c'est la question des déchets. Le problème, c'est que les différentes lois, notamment Garot et Egalim, demandant aux grandes surfaces de réduire leurs déchets, ce qui est une bonne chose, et associant ça à cela de la défiscalisation, le fameux amendement Coluche, les grandes surfaces se sont dit, c'est pratique, on va pouvoir donner aux associations des produits d'aide alimentaire. Et donc, les associations qui restent encore dans une approche quantitative sont très contentes d'aller chercher ça. Or, effectivement, les besoins alimentaires des personnes, ce n'est pas ça. C'est-à-dire qu'on sait, par exemple, que les personnes en situation de pauvreté consomment deux fois moins de fruits et de légumes par personne que les milieux favorisés. Et donc, évidemment, moi, je pousse à ce que, progressivement, on s'oriente vers une alimentation plus équilibrée. Et donc, là aussi, qu'on désarticule le lien. Entre ce qu'on appelle la ramasse, c'est-à-dire ce que les grandes surfaces veulent bien donner, en réalité elles ne le donnent pas, c'est nos impôts qui défiscalisent 66% de ces dons. Et donc en réalité elles font simplement renoncer à leur plus-value, à leur marge commerciale qui de manière générale est 30%. Et deuxièmement, les grandes surfaces sont en train de s'organiser pour réduire très fortement leurs propres déchets. avec des têtes de gondole, avec des dernières minutes, etc. Ce qui est une bonne chose. Mais de ce fait, une bonne partie de ce qui est donné, encore une fois, entre guillemets, puisque ce n'est pas un don, c'est bien la défiscalisation, c'est-à-dire nos impôts qui payent ça aux entreprises. Une bonne partie est ajoutée. Et dans le rapport de l'année dernière des Restos du Coeur, on a dit que c'est 16%. Les associations locales nous disent que c'est très variable. Par exemple, à Nîmes, Et le président des banques alimentaires du Gard me dit, moi, j'ai un magasin qui est à 80% à jeter. Je lui ai dit, prenez des photos, faites un état par un huissier, dites-le moi, et puis on va effectivement invoquer la convention qu'a l'aide alimentaire avec la grande distribution pour effectivement aller demander des comptes à ce gérant.

  • Speaker #2

    Et du coup, améliorer la qualité de ce qu'ils ont en stock. Est-ce que peut-être quelqu'un veut parler des achats ? Parce que ça, ce n'était pas forcément dans l'ADN des associations au départ de faire des achats pour justement compléter les denrées alimentaires qu'on peut mettre à disposition des personnes. Firas, est-ce que vous voulez bien nous en dire un mot ?

  • Speaker #4

    Absolument. Aujourd'hui, la gestion au sein des structures d'aide alimentaire des stocks, des denrées, pour proposer des denrées, il faut en avoir. Elle est extrêmement complexe et elle est devenue de plus en plus complexe. Bernard l'évoquait tout à l'heure, la qualité de la ramasse qui se fait auprès de la grande distribution laisse parfois à désirer, à la fois en termes de quantité, mais aussi de qualité et de diversité. Et ce qui oblige les structures à trouver d'autres moyens de s'approvisionner et notamment des achats. aujourd'hui on voit aussi C'est un mouvement de fond depuis quelques années qui s'est amplifié et qui a été en cours. pardon, encouragé par les services de l'État ces dernières années, une attention à la qualité de ces achats-là, à proposer des produits de saison, à proposer des produits sous label de qualité, des produits en circuit court, pour favoriser justement ce lien au monde agricole et ce lien au territoire sur lequel les structures se trouvent. Néanmoins, c'est un métier à part entière d'être acheteur. C'est un métier à part entière que de faire du sourcing de productrices et de producteurs. et ainsi de suite, que de faire le lien entre les besoins qui existent, les envies aussi des personnes qui fréquentent nos structures, leurs souhaits en termes de produits, et ce qui existe aussi sur le territoire. Et ça nous amène aussi, c'est le défi que l'on doit relever, nous, tête de réseau de l'aide alimentaire, à comment est-ce qu'on accompagne nos structures dans ces ambitions-là.

  • Speaker #2

    Et bien sûr, avec pour finalité toujours d'avoir cette dignité humaine, et donc de pouvoir proposer... une aide alimentaire de qualité, du choix, etc. Louis veut compléter ce que dit Firas. Comment ça se passe au Resto du Coeur aujourd'hui ?

  • Speaker #5

    Alors notre politique d'achat, précisément, il me semble qu'elle remonte aux années 90. La question se pose assez rapidement en fait, puisque même dans les statuts des Restos du Coeur tels qu'ils sont déposés, on est bien sur l'idée d'une insertion sociale des personnes. notamment via l'aide alimentaire, mais pas seulement. On est vraiment sur l'insertion sociale des personnes au sens large. Or, pour ça, très rapidement, on se dit qu'il faut sortir d'une aide alimentaire qui serait un peu une aide d'urgence, et rentrer sur une aide alimentaire beaucoup plus qualitative, en fait. Donc la loi Coluche, vous le savez, l'amendement Coluche a permis beaucoup de choses. On a d'abord eu des évolutions en termes de... de surplus agricoles et l'obligation de pouvoir les redistribuer aux personnes qui en ont besoin. Je ne reviendrai pas dessus, les collègues sont revenus dessus. Mais au-delà de ça, effectivement, très rapidement, les Restos du Coeur se posent la question de la politique d'achat à mener. Achat qui viendra en fait diversifier les repas qu'on peut servir. Puisqu'en fait, on le voit, l'aide alimentaire s'est construite un peu avec les restes, j'ai envie de dire. Sauf que les restes, ça constitue rarement un repas. Et très rapidement, nous, au niveau des Restos du Coeur, on se pose cette question-là. Comment on va apporter une alimentation équilibrée aux personnes qu'on accueille ? Et ça, ça se fait notamment à travers une politique d'achat. Aujourd'hui, sur les 147 000 tonnes qu'on a distribuées l'année passée, c'est 42 000 tonnes de dons, 42 000 tonnes d'achats. Donc on est au même niveau sur les dons et les achats. Donc ça représente une part significative aujourd'hui de ce qu'on peut distribuer et qui va vraiment apporter de la qualité au repas qu'on distribue.

  • Speaker #2

    Audrey, un commentaire ?

  • Speaker #6

    Peut-être oui, parler du fond mieux mangé pour tous, puisque l'État a quand même décidé de mettre... de l'argent auprès des associations pour nous permettre d'acheter, pour trois ans oui, mais on a grand espoir que ce soit renouvelé, trois ans supplémentaires, pour qu'on puisse faire des achats de qualité. Ça a permis notamment au Secours catholique de développer de nouvelles activités et d'impérimiser d'autres en lien avec les personnes.

  • Speaker #2

    J'aimerais que vous nous expliquiez qu'est-ce que c'est que ce fonds, M. Pélisson, à quoi il sert, comment est-ce qu'il fonctionne ?

  • Speaker #0

    Oui. Merci de la question parce qu'effectivement, c'est vrai qu'on l'a évoqué tout à l'heure, la question de l'aide alimentaire ne doit pas être une question quantitative, mais une question qualitative. On y reviendra si vous le voulez bien. En 2022, la première ministre de l'époque, Elisabeth Borne, a donc lancé ce Fonds Mieux Manger pour Tous, ce qu'on appelle aussi Fonds d'Aide Alimentaire Durable, avec effectivement l'idée qu'il faut améliorer la qualité nutritionnelle de l'aide alimentaire, qu'il faut réduire l'impact environnemental. Mais d'autres lois l'avaient dit avant, réduire les déchets. On est à 94 kilos par an et par personne, c'est-à-dire presque 2 kilos par semaine. Et puis qu'il faut également améliorer la participation des personnes. C'était le thème de la journée de lutte contre la précarité alimentaire de Nîmes. Et également l'accompagnement des personnes pour que l'aide alimentaire soit une porte d'entrée et qu'à partir de là, les personnes puissent être accompagnées vers des droits sociaux.

  • Speaker #2

    J'aimerais maintenant qu'on parle de la loi EGalim. La loi EGalim a été promue en 2018 et elle a notamment posé une nouvelle définition de l'aide alimentaire. Je vais vous la lire puisqu'elle est dans le Code de l'action sociale et des familles. L'aide alimentaire a pour objet la fourniture de denrées alimentaires aux personnes en situation de vulnérabilité économique et sociale assortie de la proposition d'un accompagnement. Est-ce que c'est quelque chose qui est venu enteriner une pratique qui se faisait déjà dans vos structures, c'est-à-dire d'aller au-delà de la distribution d'un repas, de faire de l'accompagnement social, ou est-ce que c'était quelque chose de nouveau finalement en 2018 ? Jean-Louis ?

  • Speaker #7

    Non, je dirais carrément non, parce que toutes les structures, qu'elles soient plus anciennes comme les récentes, ont eu à cœur... de développer d'autres services. d'accompagner les personnes au vu de leur situation globale et pas simplement d'un besoin alimentaire. Une culture s'est développée bien avant la loi EGalim. Cette loi vient enteriner quelque chose qui existait déjà.

  • Speaker #2

    Firas, vous vouliez ajouter quelque chose ?

  • Speaker #4

    C'est vrai que ce serait un peu réducteur que de considérer l'aide alimentaire comme simplement bouger des denrées d'un point A à un point B. Aujourd'hui, les structures qui font de l'aide alimentaire, qui pratiquent de l'aide alimentaire, qui proposent une aide alimentaire aux personnes qui en ont besoin font également beaucoup plus. Ce sont aussi parfois les premiers lieux où l'on raccroche le wagon pour sortir d'une situation difficile. C'est là où on va aller à la rencontre d'un travailleur social et l'alimentation est le premier point d'accès et parfois un prétexte. pour cette accompagnement social.

  • Speaker #2

    Audrey aussi veut ajouter un mot sur ça. Oui,

  • Speaker #6

    c'est 50% des personnes qui viennent rencontrer le Secours catholique qui viennent en affirmant une demande en aide alimentaire. Alors, vous avez compris, elles ne vont pas trouver une aide directe de denrées. Mais en attendant, c'est 50% des personnes qui viennent nous rencontrer, elles viennent parce qu'elles ont faim.

  • Speaker #2

    Donc l'aide alimentaire, c'est quoi aujourd'hui, Ourya ?

  • Speaker #3

    Moi je vais parler pour le secours populaire. Normalement l'aide alimentaire c'est une réponse à l'urgence. Elle doit être une réponse à l'urgence et pas liée à un moment donné, une difficulté que les personnes peuvent rencontrer. Et malheureusement c'est plus une réponse à l'urgence, c'est une aide qu'on va apporter sur 3, 4, 5 mois, voire un an pour certaines personnes. et c'est ça qui aujourd'hui... est difficile pour nous parce que l'aide alimentaire a pris une place très importante dans nos activités. Mais l'idée, c'est de permettre à la personne aussi de regagner son pouvoir d'agir et de regagner son autonomie, etc. C'est pour ça que la plupart des associations, on développe aujourd'hui. Il y a un accompagnement qui est fait quand ils viennent dans nos associations. Oui, il y a une réponse urgente à leur apporter, mais on sait bien qu'il y a... tellement d'autres problèmes derrière qui font qu'elle n'arrive pas à rebondir et à s'en sortir.

  • Speaker #2

    Et quelles seraient les solutions du coup ? Est-ce que quelqu'un d'autre veut ajouter un commentaire par rapport à ce qu'est l'aide alimentaire aujourd'hui ? Quels sont les enjeux et les freins que vous rencontrez ? Jean-Louis ?

  • Speaker #7

    Alors c'est un grand défi. J'avais envie de revenir un peu à l'origine. On a décrit un petit peu et raconté un peu l'histoire de l'aide alimentaire en partant du XIXe et puis de la société moyenne injuste. Mais je veux dire qu'auparavant, toute société, qu'elle soit théocratique, démocratique, monarchique, quelque part génère des injustices. En tout cas, génère des publics et des personnes, des catégories de personnes qui sont en difficulté. Alors, elles les génèrent parce que leur système est peut-être injuste. Elle les génère parce qu'il y a eu peut-être des famines, parce qu'il y a des guerres, parce qu'il y a des événements qui sont hors de contrôle et qui appauvrissent une certaine catégorie. Mais cette problématique, toute société doit l'affronter. Je suis vraiment juste comme ça pour finir l'histoire, mais vous prenez par exemple dans la Bible, dans l'Ancien Testament, la société s'organise déjà, organise déjà la générosité, la charité. en permettant plein de choses et des choses même très novatrices que l'on pourrait peut-être redécouvrir, comme le glanage, la mise à disposition de terres aussi pour des personnes en difficulté, la remise des dettes aussi tous les 7 ans, la remise de la propriété en question aussi tous les 50 ans. Et ce sont des choses qui datent d'il y a 5000 ans et qui trouvent leur accomplissement dans le Nouveau Testament, puisqu'il y a une parole qui est très forte qui dit ... mais faites aux autres ce que vous souhaiterez qu'ils fassent pour vous. Et aujourd'hui, notre société, capitaliste, démocratique, avec tous les hic qu'on peut y trouver, génère elle aussi ses propres difficultés et aussi cette problématique de l'aide alimentaire. Mais au-delà de ça, le défi qu'on a à relever, c'est de comment on envisage et on vit la solidarité, c'est-à-dire le partage. au jour d'aujourd'hui. On a bien conscience qu'à chaque époque, des défis sont nouveaux, d'autres malgré le progrès et avec le progrès, il y a d'autres façons de faire. Mais je dirais que dans la droite ligne du siècle des Lumières, qui s'est battu quand même pour que le droit...

  • Speaker #2

    Il y a un statut, oui.

  • Speaker #7

    Voilà, le droit de l'homme soit reconnu. L'alimentation, déjà, dans un premier temps, pourrait être reconnue et inscrite dans notre Constitution, ce qui n'est toujours pas le cas. Et là aussi, on a un défi pour que cette aide alimentaire qui a été déléguée, il y ait une autre approche aujourd'hui, peut-être moins émotive dans l'émotion d'une crise ou portée par... un personnage charismatique qui a toujours ses limites. Mais on a besoin aujourd'hui de réfléchir ensemble à trouver une solution globale à la précarité en considérant les besoins de la personne d'une façon globale et de mettre effectivement cette question de l'aide alimentaire au centre aussi et de la faire avancer.

  • Speaker #2

    D'avoir un changement systémique. Audrey, vous vouliez ajouter quelque chose ?

  • Speaker #6

    Alors il n'y a pas grand chose à ajouter, parce que ce que vient de dire Jean-Louis est quand même une analyse assez claire de la situation. J'ajouterais juste une petite chose, c'est que les personnes qu'on considère en précarité, en tout cas qui sont concernées directement par une question de précarité financière ou alimentaire, ne sont pas les seules à considérer. Dans ce que vient de dire Jean-Louis, il faut qu'on intègre tout un système, le système de production également. Les agriculteurs sont en pleine manifestation en ce moment. Ils font partie de cette crise, ils peuvent en être une solution, tout comme les associations de l'aide alimentaire sont prêtes à travailler et à faire des propositions pour que les choses s'améliorent durablement et que ce soit structurellement que les changements s'opèrent.

  • Speaker #2

    Bernard ?

  • Speaker #0

    Souligner, c'est que les associations qui œuvrent dans ce secteur y mettent beaucoup de cœur, mais elles ont aussi besoin d'être sécurisées, ces associations. Pour pouvoir vraiment travailler comme il faut, il faudrait qu'elles soient sécurisées. Or, toutes ces associations, chaque année, se demandent comment elles vont pouvoir boucler le budget de l'année qui va venir. Rappelez-vous l'an dernier, le cri d'alarme des Restos du cœur. Et ça, ça ne devrait pas exister dans notre société. Ça devrait être des enveloppes pluriannuelles où les associations puissent se projeter, avoir des projets un peu plus loin. Sinon, on va faire des projets au fur et à mesure des disponibilités qu'on va nous offrir avec des appels d'offres qui, d'ailleurs, sont hyper compliqués à remplir. C'est un cas, c'est peut-être administratif. Mais ça, ça rejoint la préoccupation de nombreux Français, de nombreuses entreprises ou associations. Mais je pense qu'il est important qu'au niveau des pouvoirs publics, on prenne en compte la sécurisation de ces associations. C'est très, très compliqué de ne pas savoir comment on va boucler le budget.

  • Speaker #1

    Je ne peux pas ne pas vous poser la question, M. Pélisson. Est-ce que vous avez des éléments ? concernant la politique de lutte contre la pauvreté à venir, que ce soit au niveau budgétaire ou au niveau de la philosophie de ce qui pourrait se passer.

  • Speaker #2

    Alors comme je n'ai pas emmené ma boule de cristal, il y a un certain nombre de choses que je ne peux pas dire. En revanche, bien entendu, ce qui est certain, c'est que dans le projet de loi de finances tel qu'il a été déposé par le gouvernement Attal, tel qu'il a été repris et modifié la marge par le gouvernement Barnier, Et tel que j'imagine qu'il va être repris et retravaillé à la marge par le gouvernement Bayrou, l'aide alimentaire est un point important. Il y a un certain nombre de sujets qui sont des sujets polémiques entre les partis politiques, même s'ils ont des approches différentes en matière de pauvreté. Je n'imagine pas évidemment que ce soit le sujet sur lequel les partis politiques vont s'écharper. Et donc globalement, nous devrions avoir à la fois bien entendu le maintien de ces 60... millions d'euros au titre de l'aide alimentaire, donc les 10% de ce que donne l'Europe. Nous devrions avoir également toujours ce programme Mieux Manger Pour Tous, qui devrait être renforcé encore de 10 millions d'euros de plus, et donc qui représente à peu près le même montant que celui que j'évoquais tout à l'heure. Donc ça représente un bon 120 millions d'euros, plus un certain nombre d'autres petites choses. Et donc l'aide alimentaire, en principe, ne devrait pas être pénalisée par les contraintes budgétaires. La difficulté que nous rencontrons aujourd'hui, c'est que la loi spéciale qui a été votée par le Parlement, elle permet de faire face aux difficultés, mais sans loi de finances. Effectivement, toutes les subventions habituelles aux associations, en dehors de celles qui sont conclues dans un cadre pluriannuel, pour le moment, tombent. Donc nous avons besoin de ce vote de la loi de finances pour pouvoir, effectivement, avoir les crédits et pouvoir le notifier aux associations. Donc nous sommes dans un entre-deux. inquiets, relativement confiants parce qu'on a confiance dans nos parlementaires qui vont finir effectivement par nous voter une loi de finances et dans le fait que l'aide alimentaire n'est pas un sujet de conflit entre eux et donc les choses devraient effectivement se faire. De manière plus générale, nous attendons aussi des augmentations sur le pacte des solidarités. Tout ça, c'est ce qu'on appelle le programme 304. Le budget de l'État est divisé en programmes. programme de lutte contre la pauvreté. Donc, le pacte de solidarité devrait, lui aussi, connaître un certain nombre d'augmentations de l'ordre d'une quarantaine de millions d'euros de mémoire.

  • Speaker #1

    Merci, M. Pélisson, pour votre réponse authentique et factuelle sur cette question. Vous m'avez parlé, Louis, hors antenne d'un rapport de projection des Restos du Coeur à 2035 qui est publié par l'association. De quoi s'agit-il ?

  • Speaker #3

    Alors, en fait, on... On essaye d'anticiper aussi l'avenir. Là, on est revenu sur l'histoire longue justement de l'aide alimentaire. C'est intéressant, on voit qu'elle a évolué. Le monde dans lequel on est, il évolue aussi. Il évolue peut-être plus rapidement qu'avant. Donc on a senti la nécessité, nous, de s'appuyer sur un rapport d'expertise qui pouvait nous aider. C'est un outil d'aide à la décision, tout simplement, qui pouvait nous aider à prendre des orientations au niveau de l'association en fonction des évolutions du contexte géopolitique, du contexte économique, du contexte social. Donc en fait, ont émergé quatre grands scénarii pour ce qu'on a appelé études Resto 2035, donc en termes de prospective, quatre scénarii. Il y a la question de la transition écologique. Si jamais la transition écologique devient un point important à l'agenda politique, elle devient même, on va dire, le socle premier des politiques publiques de demain, comment nous, Resto, on peut s'inscrire dedans ? Donc dedans, on a des projections en termes d'action. Nous, ce que ça veut dire, ça veut dire renforcer le circuit court. nous sommes pour l'instant déjà un petit peu dans cette politique-là. Mais l'idée, c'est que si demain, la transition écologique devient d'autant plus importante, comment nous, on peut s'inscrire dedans et renforcer nos efforts dessus ? Ensuite, il y a un axe... tenir bon, on l'a appelé. Ça, c'est l'axe où, en fait, on a un effondrement à la fois du système agricole, on peut avoir aussi un repli sur soi des États, peut-être un système beaucoup plus autoritaire. Et donc là, on est dans le tenir bon, c'est comment on continue de faire face à une aide alimentaire d'urgence, tout en apportant l'accompagnement social qui est nécessaire pour que les personnes s'en sortent. Donc ça, c'est le deuxième axe. On a un troisième axe, c'est si on rentre dans un New Deal social. Là, c'est l'idée que les pays européens se mettent d'accord et qu'en fait... On rentre dans un système comme au sortir de la guerre avec un fort investissement des pouvoirs publics. On ouvre les robinets en quelque sorte de l'argent public. Comment on les utilise au mieux ? Comment on utilise au mieux ces ressources publiques pour justement pouvoir aider les personnes qu'on accueille et comment les restos se transforment en fonction de ça ? Là, par exemple, ça serait le renforcement notamment de la place des personnes accueillies dans la réflexion pour éviter de reproduire des accueils qui ont pu être produits sur les New Deal précédents qui sont plutôt paternalistes et rentrer dans quelque chose où les personnes sont vraiment en situation d'être actrices des changements de la société. Et enfin, le dernier axe, c'est la question de l'effondrement de l'État-providence et même d'une balkanisation, on l'a appelé, au niveau européen. Donc c'est de dire chacun chez soi. Comment on se débrouille s'il y a un morcellement territorial, si par exemple l'Occitanie revendique son indépendance, mais sans pouvoir public en tant que tel, dans une forme d'isolement. Donc on est vraiment sur le repli sur soi communautaire quasiment. Et là, comment les restos pourraient s'inscrire dans cette chaîne-là et pouvoir... promouvoir quand même une aide alimentaire de qualité, donc par exemple en s'appuyant beaucoup plus sur le circuit court, circuit local, puisque les échanges internationaux dont on bénéficie aujourd'hui pourraient effectivement disparaître. Ce document il est intéressant puisque pour chaque scénario, mais je ne vais pas le détailler ici, on a posé plusieurs types d'actions et puis surtout des degrés en fonction de là on pourrait évoluer. En fait quand on regarde, on se situe dans l'actualité, on pourrait dire qu'on a des risques d'être engagé sur les quatre scénarios. pas forcément en allant jusqu'au terme que j'ai cité qui peut paraître catastrophiste, mais en tout cas, on a des glissements vers certains points et qui nous aident, nous, à placer le curseur en termes de décision et de ce qu'on peut apporter aux personnes accueillies.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup, c'est très intéressant. J'avais une dernière question pour vous, Louis. Est-ce que vous pensez qu'il est réaliste ou complètement utopique de se dire qu'un jour, on va éradiquer la précarité alimentaire ?

  • Speaker #3

    Alors... Pour nous, en tout cas, je sais que beaucoup de bénévoles l'appellent de leur vœu. La question, c'est si Coluche était encore là, il serait déçu qu'on soit là, il aimerait que le resto ait disparu, etc. Ça, on l'entend beaucoup quand on échange avec les bénévoles. C'est vrai qu'on pourrait poser un constat très pessimiste en se disant, quand on voit la situation actuelle, qu'on se dit que finalement, le temps où l'aide alimentaire disparaît, il est très loin et qu'il serait souhaitable aujourd'hui qu'il n'y ait plus cette forme de soutien. qui peut exister. Après, quand on regarde aussi, au-delà de l'aide alimentaire, c'est tous les services qui sont proposés par les associations. Nous, Resto, on avait posé, c'est dans Resto 2035, vous pouvez regarder, on a posé effectivement la question de se recentrer sur nos missions. L'aide alimentaire en fait partie. C'est une porte d'entrée, en fait, au Resto du Coeur, vers l'insertion sociale des personnes. Je l'ai rappelé statutairement, nous, on est là pour oeuvrer pour l'insertion sociale des personnes. Donc la question, c'est comment, au-delà de l'aide alimentaire, on fait. Et ça, il y aura toujours besoin, en quelque sorte. On aura toujours besoin que quelqu'un tende la main à un moment à une personne qui peut se retrouver en difficulté pour X raisons. On souhaite que l'accompagnement soit le plus court possible dans le temps, que la personne puisse rapidement retrouver une autonomie et puis aussi une vie bonne au sein de cette société. Et pour ça, nous, le côté aide alimentaire, on arrive à le dépasser en se projetant sur les activités d'aide à la personne qu'on mène déjà, qui sont très importantes et qui tiennent à cœur vraiment aux bénévoles dans l'accompagnement qui peuvent... proposé aux personnes accueillies.

  • Speaker #1

    Et pour vous, Jean-Louis, est-ce qu'il serait possible qu'il n'y ait plus de précarité alimentaire un jour ?

  • Speaker #4

    Alors, c'est bien ambitieux. Et je crois que, quelque part, je ne veux pas parler pour mes collègues, mais en tout cas, moi, je me le mets en objectif, vraiment, final. C'est vrai que la coopération, la mutualisation, telle qu'on la vit, ça sert à ça. On est hyper contents de se retrouver, c'est vrai, avec joie. pour avancer ensemble sur des sujets, pour se connaître, pour s'encourager. Mais c'est vrai que quelque part, l'éradication de la précarité, le fait d'avoir une société et de vivre une société plus juste, ça anime chacun de mes collègues ici. Et c'est ce qui est notre moteur. Et ce n'est pas près de s'éteindre, je ne crois pas.

  • Speaker #1

    Et ça passera forcément par un changement structurel. Au niveau des pouvoirs publics, Aurélien, vous vouliez ajouter peut-être un dernier mot ? Oui,

  • Speaker #5

    ce que je voulais ajouter, c'est que ce n'est pas normal aujourd'hui qu'il y ait des personnes qui n'aient pas de quoi faire au moins un repas par jour. Pour moi, ça ne devrait pas exister, surtout dans un pays comme la France. Donc j'espère qu'un jour, on n'aura plus de personnes qui vont venir nous solliciter pour une aide alimentaire, mais qui vont venir nous solliciter pour autre chose, pour créer du lien. J'espère que nous, on sera encore là. au secours populaire, mais pas forcément pour répondre à une aide qui est vitale, mais plutôt pour faire ce qu'on aime, c'est-à-dire le lien, le relationnel, rencontrer les gens, partager des choses ensemble. Parce qu'on le voit, nous, dans nos permanences, dans nos structures, c'est des personnes qui ont envie de s'en sortir, qui ont envie, qui ont énormément de compétences, qui ont envie de faire plein de choses. Et elles ont... Elles ne demandent qu'une chose, c'est finalement d'être comme tout le monde et de pouvoir vivre leur vie. Maud,

  • Speaker #1

    vous vouliez ajouter un dernier mot ?

  • Speaker #6

    Je voulais rebondir notamment sur la relation avec les agriculteurs. Il y a un enjeu aussi aujourd'hui sur lequel on s'attarde, j'ai l'impression, un petit peu plus. C'est aussi la qualité des aliments et de ce qu'on peut fournir aux personnes, parce que ça rentre totalement dans le cadre de la dignité humaine, de pouvoir aussi apporter des éléments, des denrées de qualité. Et donc aussi dans cette idée de changement structurel, d'empreintes carbone, de problèmes écologiques. Je ne veux pas non plus parler pour mes collègues, mais je sais que la Croix-Rouge est très attachée à une alimentation de qualité, un circuit court. C'est vraiment les enjeux qui vont s'ouvrir avant d'éradiquer le problème de la précarité alimentaire.

  • Speaker #1

    On arrive au terme de cette série sur l'histoire de l'aide alimentaire. Merci beaucoup à toutes et à tous d'avoir partagé vos témoignages. Je vous dis à bientôt. pour de nouvelles aventures dans Radio Copalim.

  • Speaker #2

    Merci.

  • Speaker #3

    Au revoir. A bientôt.

Description

Et si l’aide alimentaire disparaissait ? Place au débat ! Les associations de Coop Alim’ Occitanie et Éric Pélisson, commissaire à la prévention et à la lutte contre la pauvreté en Occitanie, projettent leur vision de l’aide alimentaire et son rôle dans la société actuelle. Liens entre le terrain et la politique sociale, fonds européen, ramasse en grande surface, stratégie d’achats, gestion des stocks et financement : vous saurez tout sur le fonctionnement qui permet à l’aide alimentaire d’exister.

Radio Coop Alim’ vous invite même à faire un bond dans le futur pour imaginer le devenir des associations de solidarité.


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Une création originale Ekkry en partenariat avec VO2X

Texte et voix : Krystel Elisé et Coop Alim’ Occitanie

Habillage voix : Julien Vigier


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Radio Copalime, Radio Copalime,

  • Speaker #1

    le podcast de la plus grande coopération associative d'Occitanie.

  • Speaker #2

    Bonjour à toutes et à tous, je suis ravie de vous retrouver pour ce nouvel épisode de Radio Copalime. Dans l'épisode précédent, nous avons abordé l'histoire de l'aide alimentaire en France et je vous propose de continuer à l'explorer aujourd'hui. Les membres de Copalime Occitanie sont toujours avec moi. Autour de la table, vous commencez à les connaître. Bernard Cabrol, chargé de mission pour les banques alimentaires d'Occitanie. Jean-Louis Clément, président du GESMIP. Audrey Guéraud, chargé de projet accès digne à l'alimentation pour le secours catholique. Firas Jaidi, animateur réseau pour Andes. Maud Mouissé, chargé de mission soutien aux délégations Occitanie de la Croix-Rouge française. Louis Rouget, chargé de développement régional en Occitanie pour les Restos du Coeur et Ouria Tareb, secrétaire générale du Secours populaire Haute-Garonne. Nous accueillons aussi dans cet épisode Eric Pélisson, le commissaire à la prévention et la lutte contre la pauvreté de la région Occitanie. Messieurs, dames, bonjour !

  • Speaker #3

    Bonjour !

  • Speaker #2

    Ce matin, le débat est ouvert sur les enjeux actuels de l'aide alimentaire, ceux de 2025. Et je voulais commencer par vous, M. Pélisson. Je voulais savoir quelle est votre vision sur le sujet.

  • Speaker #0

    Si on fait le parallèle par rapport à aujourd'hui, moi je pense à deux remarques. La première, c'est qu'on a considéré avec le développement du libéralisme économique qu'il appartenait en fait à la société de s'organiser toute seule, et notamment donc aux entreprises de faire des propositions là où il y avait un besoin. On se rend compte que ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas suffisant du point de vue qualitatif notamment. Parce que le libéralisme qui a apporté en France, c'est vrai, la prospérité, la croissance, la paix, en même temps, il a apporté aussi beaucoup d'inégalités sociales. Et de ce fait, là aussi, puisque je parlais de la société philanthropique qui a fonctionné jusqu'au début des années 60, en fait, en réalité, l'aide alimentaire a commencé à se structurer avec les associations, d'abord dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le Secours populaire, etc. Et puis, effectivement, au milieu des années 80, avec notamment l'appel... l'appel de Coluche à créer les restos. Donc en fait, notre société ne produit pas en tant que telle un équilibre spontané si la puissance publique n'intervient pas. Et derrière la puissance publique, c'est ça que je trouve magique, c'est qu'au fond, un modèle dans lequel on imaginerait que l'administration règle tout, ça donne ce qu'on a vu dans les pays soviétiques par exemple. Je trouve que la magie, c'est aussi la capacité d'auto-organisation de la société avec des associations. Les pouvoirs publics pourraient faire le choix de gérer eux-mêmes. En fait, il y a une très belle alliance avec les associations qui respectent l'indépendance constitutionnelle des associations. Chaque association décide de ce qu'elle veut faire comme elle le veut et leur identité est très importante. C'est souvent une identité qui est marquée par un fondateur très fort. On peut penser au père Wresinski, par exemple, pour rater des carmondes sur un autre sujet, ou à Coluche, par exemple, pour les restos. Mais donc, tout cela pour dire que l'un des aspects très positifs des sociétés démocratiques, c'est justement la capacité de s'auto-organiser à l'échelle micro-locale. On aura l'occasion d'en reparler tout à l'heure sur les financements, mais aussi à l'échelle nationale. Et donc, ce sont des associations, évidemment, qui ont aussi un plaidoyer et qui font aussi pression pour faire évoluer les choses.

  • Speaker #2

    Et justement, en parlant, donc là, on est à une échelle nationale, mais en fait, l'aide alimentaire, elle s'organise à toutes, sur tous les territoires, à toutes les échelles. Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment ça marche, en fait, pour ceux qui ne connaissent pas ces échelons ?

  • Speaker #0

    Moi, j'ai la chance d'avoir connu ça, puisque j'ai commencé à faire de l'aide alimentaire en 84, avec la communauté Emmaüs de Longjumeau, dans le sud des Saônes. Et puis ensuite, avec d'autres associations, notamment dans la Croix-Rouge. L'aide alimentaire, en fait, moderne, elle est venue notamment, alors en dehors des implications associations dans la proximité, elle est venue notamment des surplus européens. En fait, on se souvient qu'en 1945, l'Europe est détruite à la suite de la guerre et que le plan Marshall crée en fait une inégalité. C'est-à-dire que les Américains sont très contents de pouvoir vendre leurs surplus. et donc dès que l'Union... européenne se crée, la première politique qui est créée en 1961, c'est la politique agricole commune. Et la politique agricole commune, elle a comme particularité de partir d'un énorme déficit alimentaire et donc d'avoir une approche quantitative. Et malheureusement, on en est encore là aujourd'hui. Cette approche quantitative, elle permet en fait, en 25 ans, à l'Europe de retrouver son autonomie alimentaire. et de commencer à exporter. La France, dans les années 80, est la deuxième puissance exportatrice mondiale. Sauf que l'Europe a promis aux agriculteurs que, quel que soit ce qu'ils produisent, on va leur racheter. Et leur racheter à des prix convenus d'avance. Et donc, on se retrouve en 1992, je me souviens bien du montant, avec 2 millions de tonnes de viande dans les congélateurs européens et 500 000 tonnes de beurre. Et évidemment, la question qu'on se pose à l'époque, qui est une mauvaise question, c'est qu'est-ce qu'on va en faire ? Et comme parallèlement, en 88, il y a eu l'amendement Coluche et que depuis le début des années 80, il y a eu le départ de l'aide alimentaire dite moderne, donc un redémarrage, on a fait un rapprochement entre les deux. Et donc l'Union européenne a commencé à écouler ses surplus dans l'aide alimentaire. Alors ça jusqu'en 2015. Et puis en 2015, il y a des pays qui ont dit mais c'est bien sympa, mais l'Union européenne, ça coûte de l'argent, elle n'a pas la compétence juridique. Et donc, à ce moment-là, il y a eu une grande inquiétude de se dire, mais au fond, est-ce que tout ça ne va pas s'arrêter ? Parce que malgré tout, ça rend un sacré service. Ça représente 90% des montants financiers que la France donne aux associations. En gros, c'est à peu près 600 millions d'euros d'aide alimentaire qui vient de l'Europe, puisque maintenant, ça ne vient plus sous forme de viande congelée ou de beurre. Ça vient effectivement sous forme financière. Et la France y rajoute, au titre de l'aide alimentaire, 60 millions. Après, la France y rajoute... d'autres crédits pour la transformation du modèle de l'aide alimentaire. Mais donc, l'aide alimentaire européenne, c'est 90%. Donc, en 2015, inquiétude de tous les acteurs de se dire que ça s'arrête demain. Et donc, l'Union européenne, effectivement, a pris la compétence, ça continue, et c'est une bonne chose. Mais le péché originel, il est dans cette idée que finalement, l'aide alimentaire, elle irait chercher les surplus, comme si les besoins alimentaires des personnes correspondaient, en fait, à ce que les autres ne veulent pas. Et c'est là où on a une difficulté. Et donc, deux problèmes de fond. Le problème quantitatif, il faut passer de quantitatif à du qualitatif. Et deuxièmement, peut-être désarticuler ce lien qu'on a fait entre les surplus, notamment des grandes surfaces, et les besoins nutritionnels des personnes.

  • Speaker #2

    Merci d'aborder le sujet de la qualité des aliments. C'est un sujet important et nous allons en parler juste après. Il existe deux lois qui fixent un cadre à l'aide alimentaire, la loi Garot et la loi Egalim. La loi Garot de 2016, qu'est-ce qu'elle a changé pour vous ? Bernard ?

  • Speaker #1

    La loi Garraud part d'un très bon sentiment, puisqu'elle n'oblige pas les grandes surfaces à donner les invendus à des associations qui font de l'aide alimentaire. Elles peuvent donner aussi pour de l'alimentation d'animaux, elles peuvent aussi donner pour de la méthanisation, mais ça reste prioritairement destiné à l'aide alimentaire des humains. Alors donc ça a eu un effet, ça devrait avoir un effet plutôt bénéfique. Mais les grandes surfaces se sont organisées et on a vu apparaître ce qu'ils appellent le sticking, c'est-à-dire qu'ils démarquent les produits jusqu'à pratiquement la date possible de consommation. Et tout ça, du coup, ça a échappé aux associations qui distribuent l'aide alimentaire. Et puis il faut reconnaître que la loi Garot, elle est instituée, mais... personne ne contrôle. Personne ne peut contrôler si elle est réellement appliquée. Moi, j'en avais discuté avec le préfet Dutarn à l'époque. Il m'a dit, effectivement, un jour, on vous donnera les réponses. Ça fait quelques années que j'attends la réponse, que je ne ne l'ai pas eue. Qui c'est qui doit contrôler ? Donc, pour nous, il y a du bon et du moins bon sur la loi Garot.

  • Speaker #2

    Je rappelle que la loi Garot, c'est la récupération des invendus devenu obligatoire. pour les grandes surfaces. Aurélien, vous voulez y réagir aussi ?

  • Speaker #3

    Je vais répéter un peu ce que disait Bernard. Les associations ont été collectées avant la loi Garot. Moi, j'ai toujours connu les collectes dans les magasins, dans l'association, et je pense que la banque alimentaire, tout ça, le faisait déjà. Et c'est vrai que la loi Garot, on n'a pas forcément consulté les associations sur cette question-là au départ. Et je pense que ça aurait été vraiment intéressant de le faire, parce que je pense qu'on aurait mieux Merci. ils auraient pu mieux accompagner les grandes surfaces, etc. et pas forcément l'imposer parce que finalement, c'est vrai qu'il n'y a pas de contrôle derrière et rien du tout. Et nous, on subit finalement tout ce qui est arrivé après, c'est-à-dire, je pense qu'on va en parler tout à l'heure, mais tous les phénix, enfin commerciaux, tous les intermédiaires qui se sont créés suite à cette loi Garot qui ont... empirer, je pense, ce qu'on a pu nous récupérer dans les grandes surfaces.

  • Speaker #2

    Vous nous expliquez qui est Phénix et qui est Comerso, pour ceux qui ne savent pas du coup ? Quels sont ces acteurs ?

  • Speaker #3

    Ce sont des intermédiaires de collecte qui se sont créés. Pour moi, c'est des start-up. Je les considère comme des start-up parce qu'elles ne sont pas à but non lucratif. Elles se font énormément d'argent sur le dos des pauvres, entre guillemets. Et elles ont proposé leur service au GMS. en leur expliquant qu'elles pourraient former leurs salariés sur une meilleure gestion des stocks, sur une meilleure trie, etc. Et d'ailleurs, c'est notamment ces intermédiaires qui ont proposé tout ce qu'on voit aujourd'hui à tête de gondole, les petits rayons où on trouve les produits à moins 40, moins 50, moins 70%. Donc c'est leurs idées.

  • Speaker #2

    Les frigos anti-gaspi quoi.

  • Speaker #3

    Tout à fait. Et nous, on récupère. Ce qui reste,

  • Speaker #2

    vous voulez dire après ce passage ?

  • Speaker #3

    Tout à fait.

  • Speaker #2

    Justement, je voulais aussi vous entendre sur ce point. On a souvent tendance à associer la lutte contre le gaspillage alimentaire à l'aide alimentaire. Je pense que vous êtes beaucoup pour dire que ce n'est pas le bon prisme. Qu'est-ce qu'il faudrait organiser pour justement améliorer la qualité de ce qu'on propose aux personnes concernées ? Monsieur Pélisson, je me tourne vers vous.

  • Speaker #0

    alors Tout d'abord, qu'est-ce que c'est que le gaspillage alimentaire ? Quand on dit 94 kilos par personne et par an, ça ne veut pas dire que ce sont les personnes qui sont le bout de la chaîne qui jetteraient 94 kilos d'aliments. Une bonne partie correspond à des déchets qui sont évidents, les coquilles d'œufs, les épluchures, etc. Donc ça, c'est normal et ça représente une partie de ce poids. Une autre partie, elle est perdue pendant la production, pendant le transport ou dans les magasins. Et donc la population ne perd qu'une... petite partie. Alors, on a certainement des progrès collectivement à faire par rapport à ça. C'est vrai, par exemple, qu'on le voit bien, on a tous une très mauvaise gestion de nos congélateurs. En fait, on remplit les congélateurs et puis on ne se pose pas la question de savoir quand on va consommer. On a sans doute à améliorer. Même chose pour les frigos. C'est-à-dire que le fait de mal ranger dans les étages du frigo, puis de mettre ce qu'on a acheté en premier au fond, fait qu'à un moment on se dit « Ah mince, les tomates sont abîmées ! » Évidemment que le consommateur, mais vous et moi, pas que les personnes en situation de pauvreté, on a amélioré des choses. Donc ça, c'est la question des déchets. Le problème, c'est que les différentes lois, notamment Garot et Egalim, demandant aux grandes surfaces de réduire leurs déchets, ce qui est une bonne chose, et associant ça à cela de la défiscalisation, le fameux amendement Coluche, les grandes surfaces se sont dit, c'est pratique, on va pouvoir donner aux associations des produits d'aide alimentaire. Et donc, les associations qui restent encore dans une approche quantitative sont très contentes d'aller chercher ça. Or, effectivement, les besoins alimentaires des personnes, ce n'est pas ça. C'est-à-dire qu'on sait, par exemple, que les personnes en situation de pauvreté consomment deux fois moins de fruits et de légumes par personne que les milieux favorisés. Et donc, évidemment, moi, je pousse à ce que, progressivement, on s'oriente vers une alimentation plus équilibrée. Et donc, là aussi, qu'on désarticule le lien. Entre ce qu'on appelle la ramasse, c'est-à-dire ce que les grandes surfaces veulent bien donner, en réalité elles ne le donnent pas, c'est nos impôts qui défiscalisent 66% de ces dons. Et donc en réalité elles font simplement renoncer à leur plus-value, à leur marge commerciale qui de manière générale est 30%. Et deuxièmement, les grandes surfaces sont en train de s'organiser pour réduire très fortement leurs propres déchets. avec des têtes de gondole, avec des dernières minutes, etc. Ce qui est une bonne chose. Mais de ce fait, une bonne partie de ce qui est donné, encore une fois, entre guillemets, puisque ce n'est pas un don, c'est bien la défiscalisation, c'est-à-dire nos impôts qui payent ça aux entreprises. Une bonne partie est ajoutée. Et dans le rapport de l'année dernière des Restos du Coeur, on a dit que c'est 16%. Les associations locales nous disent que c'est très variable. Par exemple, à Nîmes, Et le président des banques alimentaires du Gard me dit, moi, j'ai un magasin qui est à 80% à jeter. Je lui ai dit, prenez des photos, faites un état par un huissier, dites-le moi, et puis on va effectivement invoquer la convention qu'a l'aide alimentaire avec la grande distribution pour effectivement aller demander des comptes à ce gérant.

  • Speaker #2

    Et du coup, améliorer la qualité de ce qu'ils ont en stock. Est-ce que peut-être quelqu'un veut parler des achats ? Parce que ça, ce n'était pas forcément dans l'ADN des associations au départ de faire des achats pour justement compléter les denrées alimentaires qu'on peut mettre à disposition des personnes. Firas, est-ce que vous voulez bien nous en dire un mot ?

  • Speaker #4

    Absolument. Aujourd'hui, la gestion au sein des structures d'aide alimentaire des stocks, des denrées, pour proposer des denrées, il faut en avoir. Elle est extrêmement complexe et elle est devenue de plus en plus complexe. Bernard l'évoquait tout à l'heure, la qualité de la ramasse qui se fait auprès de la grande distribution laisse parfois à désirer, à la fois en termes de quantité, mais aussi de qualité et de diversité. Et ce qui oblige les structures à trouver d'autres moyens de s'approvisionner et notamment des achats. aujourd'hui on voit aussi C'est un mouvement de fond depuis quelques années qui s'est amplifié et qui a été en cours. pardon, encouragé par les services de l'État ces dernières années, une attention à la qualité de ces achats-là, à proposer des produits de saison, à proposer des produits sous label de qualité, des produits en circuit court, pour favoriser justement ce lien au monde agricole et ce lien au territoire sur lequel les structures se trouvent. Néanmoins, c'est un métier à part entière d'être acheteur. C'est un métier à part entière que de faire du sourcing de productrices et de producteurs. et ainsi de suite, que de faire le lien entre les besoins qui existent, les envies aussi des personnes qui fréquentent nos structures, leurs souhaits en termes de produits, et ce qui existe aussi sur le territoire. Et ça nous amène aussi, c'est le défi que l'on doit relever, nous, tête de réseau de l'aide alimentaire, à comment est-ce qu'on accompagne nos structures dans ces ambitions-là.

  • Speaker #2

    Et bien sûr, avec pour finalité toujours d'avoir cette dignité humaine, et donc de pouvoir proposer... une aide alimentaire de qualité, du choix, etc. Louis veut compléter ce que dit Firas. Comment ça se passe au Resto du Coeur aujourd'hui ?

  • Speaker #5

    Alors notre politique d'achat, précisément, il me semble qu'elle remonte aux années 90. La question se pose assez rapidement en fait, puisque même dans les statuts des Restos du Coeur tels qu'ils sont déposés, on est bien sur l'idée d'une insertion sociale des personnes. notamment via l'aide alimentaire, mais pas seulement. On est vraiment sur l'insertion sociale des personnes au sens large. Or, pour ça, très rapidement, on se dit qu'il faut sortir d'une aide alimentaire qui serait un peu une aide d'urgence, et rentrer sur une aide alimentaire beaucoup plus qualitative, en fait. Donc la loi Coluche, vous le savez, l'amendement Coluche a permis beaucoup de choses. On a d'abord eu des évolutions en termes de... de surplus agricoles et l'obligation de pouvoir les redistribuer aux personnes qui en ont besoin. Je ne reviendrai pas dessus, les collègues sont revenus dessus. Mais au-delà de ça, effectivement, très rapidement, les Restos du Coeur se posent la question de la politique d'achat à mener. Achat qui viendra en fait diversifier les repas qu'on peut servir. Puisqu'en fait, on le voit, l'aide alimentaire s'est construite un peu avec les restes, j'ai envie de dire. Sauf que les restes, ça constitue rarement un repas. Et très rapidement, nous, au niveau des Restos du Coeur, on se pose cette question-là. Comment on va apporter une alimentation équilibrée aux personnes qu'on accueille ? Et ça, ça se fait notamment à travers une politique d'achat. Aujourd'hui, sur les 147 000 tonnes qu'on a distribuées l'année passée, c'est 42 000 tonnes de dons, 42 000 tonnes d'achats. Donc on est au même niveau sur les dons et les achats. Donc ça représente une part significative aujourd'hui de ce qu'on peut distribuer et qui va vraiment apporter de la qualité au repas qu'on distribue.

  • Speaker #2

    Audrey, un commentaire ?

  • Speaker #6

    Peut-être oui, parler du fond mieux mangé pour tous, puisque l'État a quand même décidé de mettre... de l'argent auprès des associations pour nous permettre d'acheter, pour trois ans oui, mais on a grand espoir que ce soit renouvelé, trois ans supplémentaires, pour qu'on puisse faire des achats de qualité. Ça a permis notamment au Secours catholique de développer de nouvelles activités et d'impérimiser d'autres en lien avec les personnes.

  • Speaker #2

    J'aimerais que vous nous expliquiez qu'est-ce que c'est que ce fonds, M. Pélisson, à quoi il sert, comment est-ce qu'il fonctionne ?

  • Speaker #0

    Oui. Merci de la question parce qu'effectivement, c'est vrai qu'on l'a évoqué tout à l'heure, la question de l'aide alimentaire ne doit pas être une question quantitative, mais une question qualitative. On y reviendra si vous le voulez bien. En 2022, la première ministre de l'époque, Elisabeth Borne, a donc lancé ce Fonds Mieux Manger pour Tous, ce qu'on appelle aussi Fonds d'Aide Alimentaire Durable, avec effectivement l'idée qu'il faut améliorer la qualité nutritionnelle de l'aide alimentaire, qu'il faut réduire l'impact environnemental. Mais d'autres lois l'avaient dit avant, réduire les déchets. On est à 94 kilos par an et par personne, c'est-à-dire presque 2 kilos par semaine. Et puis qu'il faut également améliorer la participation des personnes. C'était le thème de la journée de lutte contre la précarité alimentaire de Nîmes. Et également l'accompagnement des personnes pour que l'aide alimentaire soit une porte d'entrée et qu'à partir de là, les personnes puissent être accompagnées vers des droits sociaux.

  • Speaker #2

    J'aimerais maintenant qu'on parle de la loi EGalim. La loi EGalim a été promue en 2018 et elle a notamment posé une nouvelle définition de l'aide alimentaire. Je vais vous la lire puisqu'elle est dans le Code de l'action sociale et des familles. L'aide alimentaire a pour objet la fourniture de denrées alimentaires aux personnes en situation de vulnérabilité économique et sociale assortie de la proposition d'un accompagnement. Est-ce que c'est quelque chose qui est venu enteriner une pratique qui se faisait déjà dans vos structures, c'est-à-dire d'aller au-delà de la distribution d'un repas, de faire de l'accompagnement social, ou est-ce que c'était quelque chose de nouveau finalement en 2018 ? Jean-Louis ?

  • Speaker #7

    Non, je dirais carrément non, parce que toutes les structures, qu'elles soient plus anciennes comme les récentes, ont eu à cœur... de développer d'autres services. d'accompagner les personnes au vu de leur situation globale et pas simplement d'un besoin alimentaire. Une culture s'est développée bien avant la loi EGalim. Cette loi vient enteriner quelque chose qui existait déjà.

  • Speaker #2

    Firas, vous vouliez ajouter quelque chose ?

  • Speaker #4

    C'est vrai que ce serait un peu réducteur que de considérer l'aide alimentaire comme simplement bouger des denrées d'un point A à un point B. Aujourd'hui, les structures qui font de l'aide alimentaire, qui pratiquent de l'aide alimentaire, qui proposent une aide alimentaire aux personnes qui en ont besoin font également beaucoup plus. Ce sont aussi parfois les premiers lieux où l'on raccroche le wagon pour sortir d'une situation difficile. C'est là où on va aller à la rencontre d'un travailleur social et l'alimentation est le premier point d'accès et parfois un prétexte. pour cette accompagnement social.

  • Speaker #2

    Audrey aussi veut ajouter un mot sur ça. Oui,

  • Speaker #6

    c'est 50% des personnes qui viennent rencontrer le Secours catholique qui viennent en affirmant une demande en aide alimentaire. Alors, vous avez compris, elles ne vont pas trouver une aide directe de denrées. Mais en attendant, c'est 50% des personnes qui viennent nous rencontrer, elles viennent parce qu'elles ont faim.

  • Speaker #2

    Donc l'aide alimentaire, c'est quoi aujourd'hui, Ourya ?

  • Speaker #3

    Moi je vais parler pour le secours populaire. Normalement l'aide alimentaire c'est une réponse à l'urgence. Elle doit être une réponse à l'urgence et pas liée à un moment donné, une difficulté que les personnes peuvent rencontrer. Et malheureusement c'est plus une réponse à l'urgence, c'est une aide qu'on va apporter sur 3, 4, 5 mois, voire un an pour certaines personnes. et c'est ça qui aujourd'hui... est difficile pour nous parce que l'aide alimentaire a pris une place très importante dans nos activités. Mais l'idée, c'est de permettre à la personne aussi de regagner son pouvoir d'agir et de regagner son autonomie, etc. C'est pour ça que la plupart des associations, on développe aujourd'hui. Il y a un accompagnement qui est fait quand ils viennent dans nos associations. Oui, il y a une réponse urgente à leur apporter, mais on sait bien qu'il y a... tellement d'autres problèmes derrière qui font qu'elle n'arrive pas à rebondir et à s'en sortir.

  • Speaker #2

    Et quelles seraient les solutions du coup ? Est-ce que quelqu'un d'autre veut ajouter un commentaire par rapport à ce qu'est l'aide alimentaire aujourd'hui ? Quels sont les enjeux et les freins que vous rencontrez ? Jean-Louis ?

  • Speaker #7

    Alors c'est un grand défi. J'avais envie de revenir un peu à l'origine. On a décrit un petit peu et raconté un peu l'histoire de l'aide alimentaire en partant du XIXe et puis de la société moyenne injuste. Mais je veux dire qu'auparavant, toute société, qu'elle soit théocratique, démocratique, monarchique, quelque part génère des injustices. En tout cas, génère des publics et des personnes, des catégories de personnes qui sont en difficulté. Alors, elles les génèrent parce que leur système est peut-être injuste. Elle les génère parce qu'il y a eu peut-être des famines, parce qu'il y a des guerres, parce qu'il y a des événements qui sont hors de contrôle et qui appauvrissent une certaine catégorie. Mais cette problématique, toute société doit l'affronter. Je suis vraiment juste comme ça pour finir l'histoire, mais vous prenez par exemple dans la Bible, dans l'Ancien Testament, la société s'organise déjà, organise déjà la générosité, la charité. en permettant plein de choses et des choses même très novatrices que l'on pourrait peut-être redécouvrir, comme le glanage, la mise à disposition de terres aussi pour des personnes en difficulté, la remise des dettes aussi tous les 7 ans, la remise de la propriété en question aussi tous les 50 ans. Et ce sont des choses qui datent d'il y a 5000 ans et qui trouvent leur accomplissement dans le Nouveau Testament, puisqu'il y a une parole qui est très forte qui dit ... mais faites aux autres ce que vous souhaiterez qu'ils fassent pour vous. Et aujourd'hui, notre société, capitaliste, démocratique, avec tous les hic qu'on peut y trouver, génère elle aussi ses propres difficultés et aussi cette problématique de l'aide alimentaire. Mais au-delà de ça, le défi qu'on a à relever, c'est de comment on envisage et on vit la solidarité, c'est-à-dire le partage. au jour d'aujourd'hui. On a bien conscience qu'à chaque époque, des défis sont nouveaux, d'autres malgré le progrès et avec le progrès, il y a d'autres façons de faire. Mais je dirais que dans la droite ligne du siècle des Lumières, qui s'est battu quand même pour que le droit...

  • Speaker #2

    Il y a un statut, oui.

  • Speaker #7

    Voilà, le droit de l'homme soit reconnu. L'alimentation, déjà, dans un premier temps, pourrait être reconnue et inscrite dans notre Constitution, ce qui n'est toujours pas le cas. Et là aussi, on a un défi pour que cette aide alimentaire qui a été déléguée, il y ait une autre approche aujourd'hui, peut-être moins émotive dans l'émotion d'une crise ou portée par... un personnage charismatique qui a toujours ses limites. Mais on a besoin aujourd'hui de réfléchir ensemble à trouver une solution globale à la précarité en considérant les besoins de la personne d'une façon globale et de mettre effectivement cette question de l'aide alimentaire au centre aussi et de la faire avancer.

  • Speaker #2

    D'avoir un changement systémique. Audrey, vous vouliez ajouter quelque chose ?

  • Speaker #6

    Alors il n'y a pas grand chose à ajouter, parce que ce que vient de dire Jean-Louis est quand même une analyse assez claire de la situation. J'ajouterais juste une petite chose, c'est que les personnes qu'on considère en précarité, en tout cas qui sont concernées directement par une question de précarité financière ou alimentaire, ne sont pas les seules à considérer. Dans ce que vient de dire Jean-Louis, il faut qu'on intègre tout un système, le système de production également. Les agriculteurs sont en pleine manifestation en ce moment. Ils font partie de cette crise, ils peuvent en être une solution, tout comme les associations de l'aide alimentaire sont prêtes à travailler et à faire des propositions pour que les choses s'améliorent durablement et que ce soit structurellement que les changements s'opèrent.

  • Speaker #2

    Bernard ?

  • Speaker #0

    Souligner, c'est que les associations qui œuvrent dans ce secteur y mettent beaucoup de cœur, mais elles ont aussi besoin d'être sécurisées, ces associations. Pour pouvoir vraiment travailler comme il faut, il faudrait qu'elles soient sécurisées. Or, toutes ces associations, chaque année, se demandent comment elles vont pouvoir boucler le budget de l'année qui va venir. Rappelez-vous l'an dernier, le cri d'alarme des Restos du cœur. Et ça, ça ne devrait pas exister dans notre société. Ça devrait être des enveloppes pluriannuelles où les associations puissent se projeter, avoir des projets un peu plus loin. Sinon, on va faire des projets au fur et à mesure des disponibilités qu'on va nous offrir avec des appels d'offres qui, d'ailleurs, sont hyper compliqués à remplir. C'est un cas, c'est peut-être administratif. Mais ça, ça rejoint la préoccupation de nombreux Français, de nombreuses entreprises ou associations. Mais je pense qu'il est important qu'au niveau des pouvoirs publics, on prenne en compte la sécurisation de ces associations. C'est très, très compliqué de ne pas savoir comment on va boucler le budget.

  • Speaker #1

    Je ne peux pas ne pas vous poser la question, M. Pélisson. Est-ce que vous avez des éléments ? concernant la politique de lutte contre la pauvreté à venir, que ce soit au niveau budgétaire ou au niveau de la philosophie de ce qui pourrait se passer.

  • Speaker #2

    Alors comme je n'ai pas emmené ma boule de cristal, il y a un certain nombre de choses que je ne peux pas dire. En revanche, bien entendu, ce qui est certain, c'est que dans le projet de loi de finances tel qu'il a été déposé par le gouvernement Attal, tel qu'il a été repris et modifié la marge par le gouvernement Barnier, Et tel que j'imagine qu'il va être repris et retravaillé à la marge par le gouvernement Bayrou, l'aide alimentaire est un point important. Il y a un certain nombre de sujets qui sont des sujets polémiques entre les partis politiques, même s'ils ont des approches différentes en matière de pauvreté. Je n'imagine pas évidemment que ce soit le sujet sur lequel les partis politiques vont s'écharper. Et donc globalement, nous devrions avoir à la fois bien entendu le maintien de ces 60... millions d'euros au titre de l'aide alimentaire, donc les 10% de ce que donne l'Europe. Nous devrions avoir également toujours ce programme Mieux Manger Pour Tous, qui devrait être renforcé encore de 10 millions d'euros de plus, et donc qui représente à peu près le même montant que celui que j'évoquais tout à l'heure. Donc ça représente un bon 120 millions d'euros, plus un certain nombre d'autres petites choses. Et donc l'aide alimentaire, en principe, ne devrait pas être pénalisée par les contraintes budgétaires. La difficulté que nous rencontrons aujourd'hui, c'est que la loi spéciale qui a été votée par le Parlement, elle permet de faire face aux difficultés, mais sans loi de finances. Effectivement, toutes les subventions habituelles aux associations, en dehors de celles qui sont conclues dans un cadre pluriannuel, pour le moment, tombent. Donc nous avons besoin de ce vote de la loi de finances pour pouvoir, effectivement, avoir les crédits et pouvoir le notifier aux associations. Donc nous sommes dans un entre-deux. inquiets, relativement confiants parce qu'on a confiance dans nos parlementaires qui vont finir effectivement par nous voter une loi de finances et dans le fait que l'aide alimentaire n'est pas un sujet de conflit entre eux et donc les choses devraient effectivement se faire. De manière plus générale, nous attendons aussi des augmentations sur le pacte des solidarités. Tout ça, c'est ce qu'on appelle le programme 304. Le budget de l'État est divisé en programmes. programme de lutte contre la pauvreté. Donc, le pacte de solidarité devrait, lui aussi, connaître un certain nombre d'augmentations de l'ordre d'une quarantaine de millions d'euros de mémoire.

  • Speaker #1

    Merci, M. Pélisson, pour votre réponse authentique et factuelle sur cette question. Vous m'avez parlé, Louis, hors antenne d'un rapport de projection des Restos du Coeur à 2035 qui est publié par l'association. De quoi s'agit-il ?

  • Speaker #3

    Alors, en fait, on... On essaye d'anticiper aussi l'avenir. Là, on est revenu sur l'histoire longue justement de l'aide alimentaire. C'est intéressant, on voit qu'elle a évolué. Le monde dans lequel on est, il évolue aussi. Il évolue peut-être plus rapidement qu'avant. Donc on a senti la nécessité, nous, de s'appuyer sur un rapport d'expertise qui pouvait nous aider. C'est un outil d'aide à la décision, tout simplement, qui pouvait nous aider à prendre des orientations au niveau de l'association en fonction des évolutions du contexte géopolitique, du contexte économique, du contexte social. Donc en fait, ont émergé quatre grands scénarii pour ce qu'on a appelé études Resto 2035, donc en termes de prospective, quatre scénarii. Il y a la question de la transition écologique. Si jamais la transition écologique devient un point important à l'agenda politique, elle devient même, on va dire, le socle premier des politiques publiques de demain, comment nous, Resto, on peut s'inscrire dedans ? Donc dedans, on a des projections en termes d'action. Nous, ce que ça veut dire, ça veut dire renforcer le circuit court. nous sommes pour l'instant déjà un petit peu dans cette politique-là. Mais l'idée, c'est que si demain, la transition écologique devient d'autant plus importante, comment nous, on peut s'inscrire dedans et renforcer nos efforts dessus ? Ensuite, il y a un axe... tenir bon, on l'a appelé. Ça, c'est l'axe où, en fait, on a un effondrement à la fois du système agricole, on peut avoir aussi un repli sur soi des États, peut-être un système beaucoup plus autoritaire. Et donc là, on est dans le tenir bon, c'est comment on continue de faire face à une aide alimentaire d'urgence, tout en apportant l'accompagnement social qui est nécessaire pour que les personnes s'en sortent. Donc ça, c'est le deuxième axe. On a un troisième axe, c'est si on rentre dans un New Deal social. Là, c'est l'idée que les pays européens se mettent d'accord et qu'en fait... On rentre dans un système comme au sortir de la guerre avec un fort investissement des pouvoirs publics. On ouvre les robinets en quelque sorte de l'argent public. Comment on les utilise au mieux ? Comment on utilise au mieux ces ressources publiques pour justement pouvoir aider les personnes qu'on accueille et comment les restos se transforment en fonction de ça ? Là, par exemple, ça serait le renforcement notamment de la place des personnes accueillies dans la réflexion pour éviter de reproduire des accueils qui ont pu être produits sur les New Deal précédents qui sont plutôt paternalistes et rentrer dans quelque chose où les personnes sont vraiment en situation d'être actrices des changements de la société. Et enfin, le dernier axe, c'est la question de l'effondrement de l'État-providence et même d'une balkanisation, on l'a appelé, au niveau européen. Donc c'est de dire chacun chez soi. Comment on se débrouille s'il y a un morcellement territorial, si par exemple l'Occitanie revendique son indépendance, mais sans pouvoir public en tant que tel, dans une forme d'isolement. Donc on est vraiment sur le repli sur soi communautaire quasiment. Et là, comment les restos pourraient s'inscrire dans cette chaîne-là et pouvoir... promouvoir quand même une aide alimentaire de qualité, donc par exemple en s'appuyant beaucoup plus sur le circuit court, circuit local, puisque les échanges internationaux dont on bénéficie aujourd'hui pourraient effectivement disparaître. Ce document il est intéressant puisque pour chaque scénario, mais je ne vais pas le détailler ici, on a posé plusieurs types d'actions et puis surtout des degrés en fonction de là on pourrait évoluer. En fait quand on regarde, on se situe dans l'actualité, on pourrait dire qu'on a des risques d'être engagé sur les quatre scénarios. pas forcément en allant jusqu'au terme que j'ai cité qui peut paraître catastrophiste, mais en tout cas, on a des glissements vers certains points et qui nous aident, nous, à placer le curseur en termes de décision et de ce qu'on peut apporter aux personnes accueillies.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup, c'est très intéressant. J'avais une dernière question pour vous, Louis. Est-ce que vous pensez qu'il est réaliste ou complètement utopique de se dire qu'un jour, on va éradiquer la précarité alimentaire ?

  • Speaker #3

    Alors... Pour nous, en tout cas, je sais que beaucoup de bénévoles l'appellent de leur vœu. La question, c'est si Coluche était encore là, il serait déçu qu'on soit là, il aimerait que le resto ait disparu, etc. Ça, on l'entend beaucoup quand on échange avec les bénévoles. C'est vrai qu'on pourrait poser un constat très pessimiste en se disant, quand on voit la situation actuelle, qu'on se dit que finalement, le temps où l'aide alimentaire disparaît, il est très loin et qu'il serait souhaitable aujourd'hui qu'il n'y ait plus cette forme de soutien. qui peut exister. Après, quand on regarde aussi, au-delà de l'aide alimentaire, c'est tous les services qui sont proposés par les associations. Nous, Resto, on avait posé, c'est dans Resto 2035, vous pouvez regarder, on a posé effectivement la question de se recentrer sur nos missions. L'aide alimentaire en fait partie. C'est une porte d'entrée, en fait, au Resto du Coeur, vers l'insertion sociale des personnes. Je l'ai rappelé statutairement, nous, on est là pour oeuvrer pour l'insertion sociale des personnes. Donc la question, c'est comment, au-delà de l'aide alimentaire, on fait. Et ça, il y aura toujours besoin, en quelque sorte. On aura toujours besoin que quelqu'un tende la main à un moment à une personne qui peut se retrouver en difficulté pour X raisons. On souhaite que l'accompagnement soit le plus court possible dans le temps, que la personne puisse rapidement retrouver une autonomie et puis aussi une vie bonne au sein de cette société. Et pour ça, nous, le côté aide alimentaire, on arrive à le dépasser en se projetant sur les activités d'aide à la personne qu'on mène déjà, qui sont très importantes et qui tiennent à cœur vraiment aux bénévoles dans l'accompagnement qui peuvent... proposé aux personnes accueillies.

  • Speaker #1

    Et pour vous, Jean-Louis, est-ce qu'il serait possible qu'il n'y ait plus de précarité alimentaire un jour ?

  • Speaker #4

    Alors, c'est bien ambitieux. Et je crois que, quelque part, je ne veux pas parler pour mes collègues, mais en tout cas, moi, je me le mets en objectif, vraiment, final. C'est vrai que la coopération, la mutualisation, telle qu'on la vit, ça sert à ça. On est hyper contents de se retrouver, c'est vrai, avec joie. pour avancer ensemble sur des sujets, pour se connaître, pour s'encourager. Mais c'est vrai que quelque part, l'éradication de la précarité, le fait d'avoir une société et de vivre une société plus juste, ça anime chacun de mes collègues ici. Et c'est ce qui est notre moteur. Et ce n'est pas près de s'éteindre, je ne crois pas.

  • Speaker #1

    Et ça passera forcément par un changement structurel. Au niveau des pouvoirs publics, Aurélien, vous vouliez ajouter peut-être un dernier mot ? Oui,

  • Speaker #5

    ce que je voulais ajouter, c'est que ce n'est pas normal aujourd'hui qu'il y ait des personnes qui n'aient pas de quoi faire au moins un repas par jour. Pour moi, ça ne devrait pas exister, surtout dans un pays comme la France. Donc j'espère qu'un jour, on n'aura plus de personnes qui vont venir nous solliciter pour une aide alimentaire, mais qui vont venir nous solliciter pour autre chose, pour créer du lien. J'espère que nous, on sera encore là. au secours populaire, mais pas forcément pour répondre à une aide qui est vitale, mais plutôt pour faire ce qu'on aime, c'est-à-dire le lien, le relationnel, rencontrer les gens, partager des choses ensemble. Parce qu'on le voit, nous, dans nos permanences, dans nos structures, c'est des personnes qui ont envie de s'en sortir, qui ont envie, qui ont énormément de compétences, qui ont envie de faire plein de choses. Et elles ont... Elles ne demandent qu'une chose, c'est finalement d'être comme tout le monde et de pouvoir vivre leur vie. Maud,

  • Speaker #1

    vous vouliez ajouter un dernier mot ?

  • Speaker #6

    Je voulais rebondir notamment sur la relation avec les agriculteurs. Il y a un enjeu aussi aujourd'hui sur lequel on s'attarde, j'ai l'impression, un petit peu plus. C'est aussi la qualité des aliments et de ce qu'on peut fournir aux personnes, parce que ça rentre totalement dans le cadre de la dignité humaine, de pouvoir aussi apporter des éléments, des denrées de qualité. Et donc aussi dans cette idée de changement structurel, d'empreintes carbone, de problèmes écologiques. Je ne veux pas non plus parler pour mes collègues, mais je sais que la Croix-Rouge est très attachée à une alimentation de qualité, un circuit court. C'est vraiment les enjeux qui vont s'ouvrir avant d'éradiquer le problème de la précarité alimentaire.

  • Speaker #1

    On arrive au terme de cette série sur l'histoire de l'aide alimentaire. Merci beaucoup à toutes et à tous d'avoir partagé vos témoignages. Je vous dis à bientôt. pour de nouvelles aventures dans Radio Copalim.

  • Speaker #2

    Merci.

  • Speaker #3

    Au revoir. A bientôt.

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Description

Et si l’aide alimentaire disparaissait ? Place au débat ! Les associations de Coop Alim’ Occitanie et Éric Pélisson, commissaire à la prévention et à la lutte contre la pauvreté en Occitanie, projettent leur vision de l’aide alimentaire et son rôle dans la société actuelle. Liens entre le terrain et la politique sociale, fonds européen, ramasse en grande surface, stratégie d’achats, gestion des stocks et financement : vous saurez tout sur le fonctionnement qui permet à l’aide alimentaire d’exister.

Radio Coop Alim’ vous invite même à faire un bond dans le futur pour imaginer le devenir des associations de solidarité.


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Texte et voix : Krystel Elisé et Coop Alim’ Occitanie

Habillage voix : Julien Vigier


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Radio Copalime, Radio Copalime,

  • Speaker #1

    le podcast de la plus grande coopération associative d'Occitanie.

  • Speaker #2

    Bonjour à toutes et à tous, je suis ravie de vous retrouver pour ce nouvel épisode de Radio Copalime. Dans l'épisode précédent, nous avons abordé l'histoire de l'aide alimentaire en France et je vous propose de continuer à l'explorer aujourd'hui. Les membres de Copalime Occitanie sont toujours avec moi. Autour de la table, vous commencez à les connaître. Bernard Cabrol, chargé de mission pour les banques alimentaires d'Occitanie. Jean-Louis Clément, président du GESMIP. Audrey Guéraud, chargé de projet accès digne à l'alimentation pour le secours catholique. Firas Jaidi, animateur réseau pour Andes. Maud Mouissé, chargé de mission soutien aux délégations Occitanie de la Croix-Rouge française. Louis Rouget, chargé de développement régional en Occitanie pour les Restos du Coeur et Ouria Tareb, secrétaire générale du Secours populaire Haute-Garonne. Nous accueillons aussi dans cet épisode Eric Pélisson, le commissaire à la prévention et la lutte contre la pauvreté de la région Occitanie. Messieurs, dames, bonjour !

  • Speaker #3

    Bonjour !

  • Speaker #2

    Ce matin, le débat est ouvert sur les enjeux actuels de l'aide alimentaire, ceux de 2025. Et je voulais commencer par vous, M. Pélisson. Je voulais savoir quelle est votre vision sur le sujet.

  • Speaker #0

    Si on fait le parallèle par rapport à aujourd'hui, moi je pense à deux remarques. La première, c'est qu'on a considéré avec le développement du libéralisme économique qu'il appartenait en fait à la société de s'organiser toute seule, et notamment donc aux entreprises de faire des propositions là où il y avait un besoin. On se rend compte que ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas suffisant du point de vue qualitatif notamment. Parce que le libéralisme qui a apporté en France, c'est vrai, la prospérité, la croissance, la paix, en même temps, il a apporté aussi beaucoup d'inégalités sociales. Et de ce fait, là aussi, puisque je parlais de la société philanthropique qui a fonctionné jusqu'au début des années 60, en fait, en réalité, l'aide alimentaire a commencé à se structurer avec les associations, d'abord dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le Secours populaire, etc. Et puis, effectivement, au milieu des années 80, avec notamment l'appel... l'appel de Coluche à créer les restos. Donc en fait, notre société ne produit pas en tant que telle un équilibre spontané si la puissance publique n'intervient pas. Et derrière la puissance publique, c'est ça que je trouve magique, c'est qu'au fond, un modèle dans lequel on imaginerait que l'administration règle tout, ça donne ce qu'on a vu dans les pays soviétiques par exemple. Je trouve que la magie, c'est aussi la capacité d'auto-organisation de la société avec des associations. Les pouvoirs publics pourraient faire le choix de gérer eux-mêmes. En fait, il y a une très belle alliance avec les associations qui respectent l'indépendance constitutionnelle des associations. Chaque association décide de ce qu'elle veut faire comme elle le veut et leur identité est très importante. C'est souvent une identité qui est marquée par un fondateur très fort. On peut penser au père Wresinski, par exemple, pour rater des carmondes sur un autre sujet, ou à Coluche, par exemple, pour les restos. Mais donc, tout cela pour dire que l'un des aspects très positifs des sociétés démocratiques, c'est justement la capacité de s'auto-organiser à l'échelle micro-locale. On aura l'occasion d'en reparler tout à l'heure sur les financements, mais aussi à l'échelle nationale. Et donc, ce sont des associations, évidemment, qui ont aussi un plaidoyer et qui font aussi pression pour faire évoluer les choses.

  • Speaker #2

    Et justement, en parlant, donc là, on est à une échelle nationale, mais en fait, l'aide alimentaire, elle s'organise à toutes, sur tous les territoires, à toutes les échelles. Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment ça marche, en fait, pour ceux qui ne connaissent pas ces échelons ?

  • Speaker #0

    Moi, j'ai la chance d'avoir connu ça, puisque j'ai commencé à faire de l'aide alimentaire en 84, avec la communauté Emmaüs de Longjumeau, dans le sud des Saônes. Et puis ensuite, avec d'autres associations, notamment dans la Croix-Rouge. L'aide alimentaire, en fait, moderne, elle est venue notamment, alors en dehors des implications associations dans la proximité, elle est venue notamment des surplus européens. En fait, on se souvient qu'en 1945, l'Europe est détruite à la suite de la guerre et que le plan Marshall crée en fait une inégalité. C'est-à-dire que les Américains sont très contents de pouvoir vendre leurs surplus. et donc dès que l'Union... européenne se crée, la première politique qui est créée en 1961, c'est la politique agricole commune. Et la politique agricole commune, elle a comme particularité de partir d'un énorme déficit alimentaire et donc d'avoir une approche quantitative. Et malheureusement, on en est encore là aujourd'hui. Cette approche quantitative, elle permet en fait, en 25 ans, à l'Europe de retrouver son autonomie alimentaire. et de commencer à exporter. La France, dans les années 80, est la deuxième puissance exportatrice mondiale. Sauf que l'Europe a promis aux agriculteurs que, quel que soit ce qu'ils produisent, on va leur racheter. Et leur racheter à des prix convenus d'avance. Et donc, on se retrouve en 1992, je me souviens bien du montant, avec 2 millions de tonnes de viande dans les congélateurs européens et 500 000 tonnes de beurre. Et évidemment, la question qu'on se pose à l'époque, qui est une mauvaise question, c'est qu'est-ce qu'on va en faire ? Et comme parallèlement, en 88, il y a eu l'amendement Coluche et que depuis le début des années 80, il y a eu le départ de l'aide alimentaire dite moderne, donc un redémarrage, on a fait un rapprochement entre les deux. Et donc l'Union européenne a commencé à écouler ses surplus dans l'aide alimentaire. Alors ça jusqu'en 2015. Et puis en 2015, il y a des pays qui ont dit mais c'est bien sympa, mais l'Union européenne, ça coûte de l'argent, elle n'a pas la compétence juridique. Et donc, à ce moment-là, il y a eu une grande inquiétude de se dire, mais au fond, est-ce que tout ça ne va pas s'arrêter ? Parce que malgré tout, ça rend un sacré service. Ça représente 90% des montants financiers que la France donne aux associations. En gros, c'est à peu près 600 millions d'euros d'aide alimentaire qui vient de l'Europe, puisque maintenant, ça ne vient plus sous forme de viande congelée ou de beurre. Ça vient effectivement sous forme financière. Et la France y rajoute, au titre de l'aide alimentaire, 60 millions. Après, la France y rajoute... d'autres crédits pour la transformation du modèle de l'aide alimentaire. Mais donc, l'aide alimentaire européenne, c'est 90%. Donc, en 2015, inquiétude de tous les acteurs de se dire que ça s'arrête demain. Et donc, l'Union européenne, effectivement, a pris la compétence, ça continue, et c'est une bonne chose. Mais le péché originel, il est dans cette idée que finalement, l'aide alimentaire, elle irait chercher les surplus, comme si les besoins alimentaires des personnes correspondaient, en fait, à ce que les autres ne veulent pas. Et c'est là où on a une difficulté. Et donc, deux problèmes de fond. Le problème quantitatif, il faut passer de quantitatif à du qualitatif. Et deuxièmement, peut-être désarticuler ce lien qu'on a fait entre les surplus, notamment des grandes surfaces, et les besoins nutritionnels des personnes.

  • Speaker #2

    Merci d'aborder le sujet de la qualité des aliments. C'est un sujet important et nous allons en parler juste après. Il existe deux lois qui fixent un cadre à l'aide alimentaire, la loi Garot et la loi Egalim. La loi Garot de 2016, qu'est-ce qu'elle a changé pour vous ? Bernard ?

  • Speaker #1

    La loi Garraud part d'un très bon sentiment, puisqu'elle n'oblige pas les grandes surfaces à donner les invendus à des associations qui font de l'aide alimentaire. Elles peuvent donner aussi pour de l'alimentation d'animaux, elles peuvent aussi donner pour de la méthanisation, mais ça reste prioritairement destiné à l'aide alimentaire des humains. Alors donc ça a eu un effet, ça devrait avoir un effet plutôt bénéfique. Mais les grandes surfaces se sont organisées et on a vu apparaître ce qu'ils appellent le sticking, c'est-à-dire qu'ils démarquent les produits jusqu'à pratiquement la date possible de consommation. Et tout ça, du coup, ça a échappé aux associations qui distribuent l'aide alimentaire. Et puis il faut reconnaître que la loi Garot, elle est instituée, mais... personne ne contrôle. Personne ne peut contrôler si elle est réellement appliquée. Moi, j'en avais discuté avec le préfet Dutarn à l'époque. Il m'a dit, effectivement, un jour, on vous donnera les réponses. Ça fait quelques années que j'attends la réponse, que je ne ne l'ai pas eue. Qui c'est qui doit contrôler ? Donc, pour nous, il y a du bon et du moins bon sur la loi Garot.

  • Speaker #2

    Je rappelle que la loi Garot, c'est la récupération des invendus devenu obligatoire. pour les grandes surfaces. Aurélien, vous voulez y réagir aussi ?

  • Speaker #3

    Je vais répéter un peu ce que disait Bernard. Les associations ont été collectées avant la loi Garot. Moi, j'ai toujours connu les collectes dans les magasins, dans l'association, et je pense que la banque alimentaire, tout ça, le faisait déjà. Et c'est vrai que la loi Garot, on n'a pas forcément consulté les associations sur cette question-là au départ. Et je pense que ça aurait été vraiment intéressant de le faire, parce que je pense qu'on aurait mieux Merci. ils auraient pu mieux accompagner les grandes surfaces, etc. et pas forcément l'imposer parce que finalement, c'est vrai qu'il n'y a pas de contrôle derrière et rien du tout. Et nous, on subit finalement tout ce qui est arrivé après, c'est-à-dire, je pense qu'on va en parler tout à l'heure, mais tous les phénix, enfin commerciaux, tous les intermédiaires qui se sont créés suite à cette loi Garot qui ont... empirer, je pense, ce qu'on a pu nous récupérer dans les grandes surfaces.

  • Speaker #2

    Vous nous expliquez qui est Phénix et qui est Comerso, pour ceux qui ne savent pas du coup ? Quels sont ces acteurs ?

  • Speaker #3

    Ce sont des intermédiaires de collecte qui se sont créés. Pour moi, c'est des start-up. Je les considère comme des start-up parce qu'elles ne sont pas à but non lucratif. Elles se font énormément d'argent sur le dos des pauvres, entre guillemets. Et elles ont proposé leur service au GMS. en leur expliquant qu'elles pourraient former leurs salariés sur une meilleure gestion des stocks, sur une meilleure trie, etc. Et d'ailleurs, c'est notamment ces intermédiaires qui ont proposé tout ce qu'on voit aujourd'hui à tête de gondole, les petits rayons où on trouve les produits à moins 40, moins 50, moins 70%. Donc c'est leurs idées.

  • Speaker #2

    Les frigos anti-gaspi quoi.

  • Speaker #3

    Tout à fait. Et nous, on récupère. Ce qui reste,

  • Speaker #2

    vous voulez dire après ce passage ?

  • Speaker #3

    Tout à fait.

  • Speaker #2

    Justement, je voulais aussi vous entendre sur ce point. On a souvent tendance à associer la lutte contre le gaspillage alimentaire à l'aide alimentaire. Je pense que vous êtes beaucoup pour dire que ce n'est pas le bon prisme. Qu'est-ce qu'il faudrait organiser pour justement améliorer la qualité de ce qu'on propose aux personnes concernées ? Monsieur Pélisson, je me tourne vers vous.

  • Speaker #0

    alors Tout d'abord, qu'est-ce que c'est que le gaspillage alimentaire ? Quand on dit 94 kilos par personne et par an, ça ne veut pas dire que ce sont les personnes qui sont le bout de la chaîne qui jetteraient 94 kilos d'aliments. Une bonne partie correspond à des déchets qui sont évidents, les coquilles d'œufs, les épluchures, etc. Donc ça, c'est normal et ça représente une partie de ce poids. Une autre partie, elle est perdue pendant la production, pendant le transport ou dans les magasins. Et donc la population ne perd qu'une... petite partie. Alors, on a certainement des progrès collectivement à faire par rapport à ça. C'est vrai, par exemple, qu'on le voit bien, on a tous une très mauvaise gestion de nos congélateurs. En fait, on remplit les congélateurs et puis on ne se pose pas la question de savoir quand on va consommer. On a sans doute à améliorer. Même chose pour les frigos. C'est-à-dire que le fait de mal ranger dans les étages du frigo, puis de mettre ce qu'on a acheté en premier au fond, fait qu'à un moment on se dit « Ah mince, les tomates sont abîmées ! » Évidemment que le consommateur, mais vous et moi, pas que les personnes en situation de pauvreté, on a amélioré des choses. Donc ça, c'est la question des déchets. Le problème, c'est que les différentes lois, notamment Garot et Egalim, demandant aux grandes surfaces de réduire leurs déchets, ce qui est une bonne chose, et associant ça à cela de la défiscalisation, le fameux amendement Coluche, les grandes surfaces se sont dit, c'est pratique, on va pouvoir donner aux associations des produits d'aide alimentaire. Et donc, les associations qui restent encore dans une approche quantitative sont très contentes d'aller chercher ça. Or, effectivement, les besoins alimentaires des personnes, ce n'est pas ça. C'est-à-dire qu'on sait, par exemple, que les personnes en situation de pauvreté consomment deux fois moins de fruits et de légumes par personne que les milieux favorisés. Et donc, évidemment, moi, je pousse à ce que, progressivement, on s'oriente vers une alimentation plus équilibrée. Et donc, là aussi, qu'on désarticule le lien. Entre ce qu'on appelle la ramasse, c'est-à-dire ce que les grandes surfaces veulent bien donner, en réalité elles ne le donnent pas, c'est nos impôts qui défiscalisent 66% de ces dons. Et donc en réalité elles font simplement renoncer à leur plus-value, à leur marge commerciale qui de manière générale est 30%. Et deuxièmement, les grandes surfaces sont en train de s'organiser pour réduire très fortement leurs propres déchets. avec des têtes de gondole, avec des dernières minutes, etc. Ce qui est une bonne chose. Mais de ce fait, une bonne partie de ce qui est donné, encore une fois, entre guillemets, puisque ce n'est pas un don, c'est bien la défiscalisation, c'est-à-dire nos impôts qui payent ça aux entreprises. Une bonne partie est ajoutée. Et dans le rapport de l'année dernière des Restos du Coeur, on a dit que c'est 16%. Les associations locales nous disent que c'est très variable. Par exemple, à Nîmes, Et le président des banques alimentaires du Gard me dit, moi, j'ai un magasin qui est à 80% à jeter. Je lui ai dit, prenez des photos, faites un état par un huissier, dites-le moi, et puis on va effectivement invoquer la convention qu'a l'aide alimentaire avec la grande distribution pour effectivement aller demander des comptes à ce gérant.

  • Speaker #2

    Et du coup, améliorer la qualité de ce qu'ils ont en stock. Est-ce que peut-être quelqu'un veut parler des achats ? Parce que ça, ce n'était pas forcément dans l'ADN des associations au départ de faire des achats pour justement compléter les denrées alimentaires qu'on peut mettre à disposition des personnes. Firas, est-ce que vous voulez bien nous en dire un mot ?

  • Speaker #4

    Absolument. Aujourd'hui, la gestion au sein des structures d'aide alimentaire des stocks, des denrées, pour proposer des denrées, il faut en avoir. Elle est extrêmement complexe et elle est devenue de plus en plus complexe. Bernard l'évoquait tout à l'heure, la qualité de la ramasse qui se fait auprès de la grande distribution laisse parfois à désirer, à la fois en termes de quantité, mais aussi de qualité et de diversité. Et ce qui oblige les structures à trouver d'autres moyens de s'approvisionner et notamment des achats. aujourd'hui on voit aussi C'est un mouvement de fond depuis quelques années qui s'est amplifié et qui a été en cours. pardon, encouragé par les services de l'État ces dernières années, une attention à la qualité de ces achats-là, à proposer des produits de saison, à proposer des produits sous label de qualité, des produits en circuit court, pour favoriser justement ce lien au monde agricole et ce lien au territoire sur lequel les structures se trouvent. Néanmoins, c'est un métier à part entière d'être acheteur. C'est un métier à part entière que de faire du sourcing de productrices et de producteurs. et ainsi de suite, que de faire le lien entre les besoins qui existent, les envies aussi des personnes qui fréquentent nos structures, leurs souhaits en termes de produits, et ce qui existe aussi sur le territoire. Et ça nous amène aussi, c'est le défi que l'on doit relever, nous, tête de réseau de l'aide alimentaire, à comment est-ce qu'on accompagne nos structures dans ces ambitions-là.

  • Speaker #2

    Et bien sûr, avec pour finalité toujours d'avoir cette dignité humaine, et donc de pouvoir proposer... une aide alimentaire de qualité, du choix, etc. Louis veut compléter ce que dit Firas. Comment ça se passe au Resto du Coeur aujourd'hui ?

  • Speaker #5

    Alors notre politique d'achat, précisément, il me semble qu'elle remonte aux années 90. La question se pose assez rapidement en fait, puisque même dans les statuts des Restos du Coeur tels qu'ils sont déposés, on est bien sur l'idée d'une insertion sociale des personnes. notamment via l'aide alimentaire, mais pas seulement. On est vraiment sur l'insertion sociale des personnes au sens large. Or, pour ça, très rapidement, on se dit qu'il faut sortir d'une aide alimentaire qui serait un peu une aide d'urgence, et rentrer sur une aide alimentaire beaucoup plus qualitative, en fait. Donc la loi Coluche, vous le savez, l'amendement Coluche a permis beaucoup de choses. On a d'abord eu des évolutions en termes de... de surplus agricoles et l'obligation de pouvoir les redistribuer aux personnes qui en ont besoin. Je ne reviendrai pas dessus, les collègues sont revenus dessus. Mais au-delà de ça, effectivement, très rapidement, les Restos du Coeur se posent la question de la politique d'achat à mener. Achat qui viendra en fait diversifier les repas qu'on peut servir. Puisqu'en fait, on le voit, l'aide alimentaire s'est construite un peu avec les restes, j'ai envie de dire. Sauf que les restes, ça constitue rarement un repas. Et très rapidement, nous, au niveau des Restos du Coeur, on se pose cette question-là. Comment on va apporter une alimentation équilibrée aux personnes qu'on accueille ? Et ça, ça se fait notamment à travers une politique d'achat. Aujourd'hui, sur les 147 000 tonnes qu'on a distribuées l'année passée, c'est 42 000 tonnes de dons, 42 000 tonnes d'achats. Donc on est au même niveau sur les dons et les achats. Donc ça représente une part significative aujourd'hui de ce qu'on peut distribuer et qui va vraiment apporter de la qualité au repas qu'on distribue.

  • Speaker #2

    Audrey, un commentaire ?

  • Speaker #6

    Peut-être oui, parler du fond mieux mangé pour tous, puisque l'État a quand même décidé de mettre... de l'argent auprès des associations pour nous permettre d'acheter, pour trois ans oui, mais on a grand espoir que ce soit renouvelé, trois ans supplémentaires, pour qu'on puisse faire des achats de qualité. Ça a permis notamment au Secours catholique de développer de nouvelles activités et d'impérimiser d'autres en lien avec les personnes.

  • Speaker #2

    J'aimerais que vous nous expliquiez qu'est-ce que c'est que ce fonds, M. Pélisson, à quoi il sert, comment est-ce qu'il fonctionne ?

  • Speaker #0

    Oui. Merci de la question parce qu'effectivement, c'est vrai qu'on l'a évoqué tout à l'heure, la question de l'aide alimentaire ne doit pas être une question quantitative, mais une question qualitative. On y reviendra si vous le voulez bien. En 2022, la première ministre de l'époque, Elisabeth Borne, a donc lancé ce Fonds Mieux Manger pour Tous, ce qu'on appelle aussi Fonds d'Aide Alimentaire Durable, avec effectivement l'idée qu'il faut améliorer la qualité nutritionnelle de l'aide alimentaire, qu'il faut réduire l'impact environnemental. Mais d'autres lois l'avaient dit avant, réduire les déchets. On est à 94 kilos par an et par personne, c'est-à-dire presque 2 kilos par semaine. Et puis qu'il faut également améliorer la participation des personnes. C'était le thème de la journée de lutte contre la précarité alimentaire de Nîmes. Et également l'accompagnement des personnes pour que l'aide alimentaire soit une porte d'entrée et qu'à partir de là, les personnes puissent être accompagnées vers des droits sociaux.

  • Speaker #2

    J'aimerais maintenant qu'on parle de la loi EGalim. La loi EGalim a été promue en 2018 et elle a notamment posé une nouvelle définition de l'aide alimentaire. Je vais vous la lire puisqu'elle est dans le Code de l'action sociale et des familles. L'aide alimentaire a pour objet la fourniture de denrées alimentaires aux personnes en situation de vulnérabilité économique et sociale assortie de la proposition d'un accompagnement. Est-ce que c'est quelque chose qui est venu enteriner une pratique qui se faisait déjà dans vos structures, c'est-à-dire d'aller au-delà de la distribution d'un repas, de faire de l'accompagnement social, ou est-ce que c'était quelque chose de nouveau finalement en 2018 ? Jean-Louis ?

  • Speaker #7

    Non, je dirais carrément non, parce que toutes les structures, qu'elles soient plus anciennes comme les récentes, ont eu à cœur... de développer d'autres services. d'accompagner les personnes au vu de leur situation globale et pas simplement d'un besoin alimentaire. Une culture s'est développée bien avant la loi EGalim. Cette loi vient enteriner quelque chose qui existait déjà.

  • Speaker #2

    Firas, vous vouliez ajouter quelque chose ?

  • Speaker #4

    C'est vrai que ce serait un peu réducteur que de considérer l'aide alimentaire comme simplement bouger des denrées d'un point A à un point B. Aujourd'hui, les structures qui font de l'aide alimentaire, qui pratiquent de l'aide alimentaire, qui proposent une aide alimentaire aux personnes qui en ont besoin font également beaucoup plus. Ce sont aussi parfois les premiers lieux où l'on raccroche le wagon pour sortir d'une situation difficile. C'est là où on va aller à la rencontre d'un travailleur social et l'alimentation est le premier point d'accès et parfois un prétexte. pour cette accompagnement social.

  • Speaker #2

    Audrey aussi veut ajouter un mot sur ça. Oui,

  • Speaker #6

    c'est 50% des personnes qui viennent rencontrer le Secours catholique qui viennent en affirmant une demande en aide alimentaire. Alors, vous avez compris, elles ne vont pas trouver une aide directe de denrées. Mais en attendant, c'est 50% des personnes qui viennent nous rencontrer, elles viennent parce qu'elles ont faim.

  • Speaker #2

    Donc l'aide alimentaire, c'est quoi aujourd'hui, Ourya ?

  • Speaker #3

    Moi je vais parler pour le secours populaire. Normalement l'aide alimentaire c'est une réponse à l'urgence. Elle doit être une réponse à l'urgence et pas liée à un moment donné, une difficulté que les personnes peuvent rencontrer. Et malheureusement c'est plus une réponse à l'urgence, c'est une aide qu'on va apporter sur 3, 4, 5 mois, voire un an pour certaines personnes. et c'est ça qui aujourd'hui... est difficile pour nous parce que l'aide alimentaire a pris une place très importante dans nos activités. Mais l'idée, c'est de permettre à la personne aussi de regagner son pouvoir d'agir et de regagner son autonomie, etc. C'est pour ça que la plupart des associations, on développe aujourd'hui. Il y a un accompagnement qui est fait quand ils viennent dans nos associations. Oui, il y a une réponse urgente à leur apporter, mais on sait bien qu'il y a... tellement d'autres problèmes derrière qui font qu'elle n'arrive pas à rebondir et à s'en sortir.

  • Speaker #2

    Et quelles seraient les solutions du coup ? Est-ce que quelqu'un d'autre veut ajouter un commentaire par rapport à ce qu'est l'aide alimentaire aujourd'hui ? Quels sont les enjeux et les freins que vous rencontrez ? Jean-Louis ?

  • Speaker #7

    Alors c'est un grand défi. J'avais envie de revenir un peu à l'origine. On a décrit un petit peu et raconté un peu l'histoire de l'aide alimentaire en partant du XIXe et puis de la société moyenne injuste. Mais je veux dire qu'auparavant, toute société, qu'elle soit théocratique, démocratique, monarchique, quelque part génère des injustices. En tout cas, génère des publics et des personnes, des catégories de personnes qui sont en difficulté. Alors, elles les génèrent parce que leur système est peut-être injuste. Elle les génère parce qu'il y a eu peut-être des famines, parce qu'il y a des guerres, parce qu'il y a des événements qui sont hors de contrôle et qui appauvrissent une certaine catégorie. Mais cette problématique, toute société doit l'affronter. Je suis vraiment juste comme ça pour finir l'histoire, mais vous prenez par exemple dans la Bible, dans l'Ancien Testament, la société s'organise déjà, organise déjà la générosité, la charité. en permettant plein de choses et des choses même très novatrices que l'on pourrait peut-être redécouvrir, comme le glanage, la mise à disposition de terres aussi pour des personnes en difficulté, la remise des dettes aussi tous les 7 ans, la remise de la propriété en question aussi tous les 50 ans. Et ce sont des choses qui datent d'il y a 5000 ans et qui trouvent leur accomplissement dans le Nouveau Testament, puisqu'il y a une parole qui est très forte qui dit ... mais faites aux autres ce que vous souhaiterez qu'ils fassent pour vous. Et aujourd'hui, notre société, capitaliste, démocratique, avec tous les hic qu'on peut y trouver, génère elle aussi ses propres difficultés et aussi cette problématique de l'aide alimentaire. Mais au-delà de ça, le défi qu'on a à relever, c'est de comment on envisage et on vit la solidarité, c'est-à-dire le partage. au jour d'aujourd'hui. On a bien conscience qu'à chaque époque, des défis sont nouveaux, d'autres malgré le progrès et avec le progrès, il y a d'autres façons de faire. Mais je dirais que dans la droite ligne du siècle des Lumières, qui s'est battu quand même pour que le droit...

  • Speaker #2

    Il y a un statut, oui.

  • Speaker #7

    Voilà, le droit de l'homme soit reconnu. L'alimentation, déjà, dans un premier temps, pourrait être reconnue et inscrite dans notre Constitution, ce qui n'est toujours pas le cas. Et là aussi, on a un défi pour que cette aide alimentaire qui a été déléguée, il y ait une autre approche aujourd'hui, peut-être moins émotive dans l'émotion d'une crise ou portée par... un personnage charismatique qui a toujours ses limites. Mais on a besoin aujourd'hui de réfléchir ensemble à trouver une solution globale à la précarité en considérant les besoins de la personne d'une façon globale et de mettre effectivement cette question de l'aide alimentaire au centre aussi et de la faire avancer.

  • Speaker #2

    D'avoir un changement systémique. Audrey, vous vouliez ajouter quelque chose ?

  • Speaker #6

    Alors il n'y a pas grand chose à ajouter, parce que ce que vient de dire Jean-Louis est quand même une analyse assez claire de la situation. J'ajouterais juste une petite chose, c'est que les personnes qu'on considère en précarité, en tout cas qui sont concernées directement par une question de précarité financière ou alimentaire, ne sont pas les seules à considérer. Dans ce que vient de dire Jean-Louis, il faut qu'on intègre tout un système, le système de production également. Les agriculteurs sont en pleine manifestation en ce moment. Ils font partie de cette crise, ils peuvent en être une solution, tout comme les associations de l'aide alimentaire sont prêtes à travailler et à faire des propositions pour que les choses s'améliorent durablement et que ce soit structurellement que les changements s'opèrent.

  • Speaker #2

    Bernard ?

  • Speaker #0

    Souligner, c'est que les associations qui œuvrent dans ce secteur y mettent beaucoup de cœur, mais elles ont aussi besoin d'être sécurisées, ces associations. Pour pouvoir vraiment travailler comme il faut, il faudrait qu'elles soient sécurisées. Or, toutes ces associations, chaque année, se demandent comment elles vont pouvoir boucler le budget de l'année qui va venir. Rappelez-vous l'an dernier, le cri d'alarme des Restos du cœur. Et ça, ça ne devrait pas exister dans notre société. Ça devrait être des enveloppes pluriannuelles où les associations puissent se projeter, avoir des projets un peu plus loin. Sinon, on va faire des projets au fur et à mesure des disponibilités qu'on va nous offrir avec des appels d'offres qui, d'ailleurs, sont hyper compliqués à remplir. C'est un cas, c'est peut-être administratif. Mais ça, ça rejoint la préoccupation de nombreux Français, de nombreuses entreprises ou associations. Mais je pense qu'il est important qu'au niveau des pouvoirs publics, on prenne en compte la sécurisation de ces associations. C'est très, très compliqué de ne pas savoir comment on va boucler le budget.

  • Speaker #1

    Je ne peux pas ne pas vous poser la question, M. Pélisson. Est-ce que vous avez des éléments ? concernant la politique de lutte contre la pauvreté à venir, que ce soit au niveau budgétaire ou au niveau de la philosophie de ce qui pourrait se passer.

  • Speaker #2

    Alors comme je n'ai pas emmené ma boule de cristal, il y a un certain nombre de choses que je ne peux pas dire. En revanche, bien entendu, ce qui est certain, c'est que dans le projet de loi de finances tel qu'il a été déposé par le gouvernement Attal, tel qu'il a été repris et modifié la marge par le gouvernement Barnier, Et tel que j'imagine qu'il va être repris et retravaillé à la marge par le gouvernement Bayrou, l'aide alimentaire est un point important. Il y a un certain nombre de sujets qui sont des sujets polémiques entre les partis politiques, même s'ils ont des approches différentes en matière de pauvreté. Je n'imagine pas évidemment que ce soit le sujet sur lequel les partis politiques vont s'écharper. Et donc globalement, nous devrions avoir à la fois bien entendu le maintien de ces 60... millions d'euros au titre de l'aide alimentaire, donc les 10% de ce que donne l'Europe. Nous devrions avoir également toujours ce programme Mieux Manger Pour Tous, qui devrait être renforcé encore de 10 millions d'euros de plus, et donc qui représente à peu près le même montant que celui que j'évoquais tout à l'heure. Donc ça représente un bon 120 millions d'euros, plus un certain nombre d'autres petites choses. Et donc l'aide alimentaire, en principe, ne devrait pas être pénalisée par les contraintes budgétaires. La difficulté que nous rencontrons aujourd'hui, c'est que la loi spéciale qui a été votée par le Parlement, elle permet de faire face aux difficultés, mais sans loi de finances. Effectivement, toutes les subventions habituelles aux associations, en dehors de celles qui sont conclues dans un cadre pluriannuel, pour le moment, tombent. Donc nous avons besoin de ce vote de la loi de finances pour pouvoir, effectivement, avoir les crédits et pouvoir le notifier aux associations. Donc nous sommes dans un entre-deux. inquiets, relativement confiants parce qu'on a confiance dans nos parlementaires qui vont finir effectivement par nous voter une loi de finances et dans le fait que l'aide alimentaire n'est pas un sujet de conflit entre eux et donc les choses devraient effectivement se faire. De manière plus générale, nous attendons aussi des augmentations sur le pacte des solidarités. Tout ça, c'est ce qu'on appelle le programme 304. Le budget de l'État est divisé en programmes. programme de lutte contre la pauvreté. Donc, le pacte de solidarité devrait, lui aussi, connaître un certain nombre d'augmentations de l'ordre d'une quarantaine de millions d'euros de mémoire.

  • Speaker #1

    Merci, M. Pélisson, pour votre réponse authentique et factuelle sur cette question. Vous m'avez parlé, Louis, hors antenne d'un rapport de projection des Restos du Coeur à 2035 qui est publié par l'association. De quoi s'agit-il ?

  • Speaker #3

    Alors, en fait, on... On essaye d'anticiper aussi l'avenir. Là, on est revenu sur l'histoire longue justement de l'aide alimentaire. C'est intéressant, on voit qu'elle a évolué. Le monde dans lequel on est, il évolue aussi. Il évolue peut-être plus rapidement qu'avant. Donc on a senti la nécessité, nous, de s'appuyer sur un rapport d'expertise qui pouvait nous aider. C'est un outil d'aide à la décision, tout simplement, qui pouvait nous aider à prendre des orientations au niveau de l'association en fonction des évolutions du contexte géopolitique, du contexte économique, du contexte social. Donc en fait, ont émergé quatre grands scénarii pour ce qu'on a appelé études Resto 2035, donc en termes de prospective, quatre scénarii. Il y a la question de la transition écologique. Si jamais la transition écologique devient un point important à l'agenda politique, elle devient même, on va dire, le socle premier des politiques publiques de demain, comment nous, Resto, on peut s'inscrire dedans ? Donc dedans, on a des projections en termes d'action. Nous, ce que ça veut dire, ça veut dire renforcer le circuit court. nous sommes pour l'instant déjà un petit peu dans cette politique-là. Mais l'idée, c'est que si demain, la transition écologique devient d'autant plus importante, comment nous, on peut s'inscrire dedans et renforcer nos efforts dessus ? Ensuite, il y a un axe... tenir bon, on l'a appelé. Ça, c'est l'axe où, en fait, on a un effondrement à la fois du système agricole, on peut avoir aussi un repli sur soi des États, peut-être un système beaucoup plus autoritaire. Et donc là, on est dans le tenir bon, c'est comment on continue de faire face à une aide alimentaire d'urgence, tout en apportant l'accompagnement social qui est nécessaire pour que les personnes s'en sortent. Donc ça, c'est le deuxième axe. On a un troisième axe, c'est si on rentre dans un New Deal social. Là, c'est l'idée que les pays européens se mettent d'accord et qu'en fait... On rentre dans un système comme au sortir de la guerre avec un fort investissement des pouvoirs publics. On ouvre les robinets en quelque sorte de l'argent public. Comment on les utilise au mieux ? Comment on utilise au mieux ces ressources publiques pour justement pouvoir aider les personnes qu'on accueille et comment les restos se transforment en fonction de ça ? Là, par exemple, ça serait le renforcement notamment de la place des personnes accueillies dans la réflexion pour éviter de reproduire des accueils qui ont pu être produits sur les New Deal précédents qui sont plutôt paternalistes et rentrer dans quelque chose où les personnes sont vraiment en situation d'être actrices des changements de la société. Et enfin, le dernier axe, c'est la question de l'effondrement de l'État-providence et même d'une balkanisation, on l'a appelé, au niveau européen. Donc c'est de dire chacun chez soi. Comment on se débrouille s'il y a un morcellement territorial, si par exemple l'Occitanie revendique son indépendance, mais sans pouvoir public en tant que tel, dans une forme d'isolement. Donc on est vraiment sur le repli sur soi communautaire quasiment. Et là, comment les restos pourraient s'inscrire dans cette chaîne-là et pouvoir... promouvoir quand même une aide alimentaire de qualité, donc par exemple en s'appuyant beaucoup plus sur le circuit court, circuit local, puisque les échanges internationaux dont on bénéficie aujourd'hui pourraient effectivement disparaître. Ce document il est intéressant puisque pour chaque scénario, mais je ne vais pas le détailler ici, on a posé plusieurs types d'actions et puis surtout des degrés en fonction de là on pourrait évoluer. En fait quand on regarde, on se situe dans l'actualité, on pourrait dire qu'on a des risques d'être engagé sur les quatre scénarios. pas forcément en allant jusqu'au terme que j'ai cité qui peut paraître catastrophiste, mais en tout cas, on a des glissements vers certains points et qui nous aident, nous, à placer le curseur en termes de décision et de ce qu'on peut apporter aux personnes accueillies.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup, c'est très intéressant. J'avais une dernière question pour vous, Louis. Est-ce que vous pensez qu'il est réaliste ou complètement utopique de se dire qu'un jour, on va éradiquer la précarité alimentaire ?

  • Speaker #3

    Alors... Pour nous, en tout cas, je sais que beaucoup de bénévoles l'appellent de leur vœu. La question, c'est si Coluche était encore là, il serait déçu qu'on soit là, il aimerait que le resto ait disparu, etc. Ça, on l'entend beaucoup quand on échange avec les bénévoles. C'est vrai qu'on pourrait poser un constat très pessimiste en se disant, quand on voit la situation actuelle, qu'on se dit que finalement, le temps où l'aide alimentaire disparaît, il est très loin et qu'il serait souhaitable aujourd'hui qu'il n'y ait plus cette forme de soutien. qui peut exister. Après, quand on regarde aussi, au-delà de l'aide alimentaire, c'est tous les services qui sont proposés par les associations. Nous, Resto, on avait posé, c'est dans Resto 2035, vous pouvez regarder, on a posé effectivement la question de se recentrer sur nos missions. L'aide alimentaire en fait partie. C'est une porte d'entrée, en fait, au Resto du Coeur, vers l'insertion sociale des personnes. Je l'ai rappelé statutairement, nous, on est là pour oeuvrer pour l'insertion sociale des personnes. Donc la question, c'est comment, au-delà de l'aide alimentaire, on fait. Et ça, il y aura toujours besoin, en quelque sorte. On aura toujours besoin que quelqu'un tende la main à un moment à une personne qui peut se retrouver en difficulté pour X raisons. On souhaite que l'accompagnement soit le plus court possible dans le temps, que la personne puisse rapidement retrouver une autonomie et puis aussi une vie bonne au sein de cette société. Et pour ça, nous, le côté aide alimentaire, on arrive à le dépasser en se projetant sur les activités d'aide à la personne qu'on mène déjà, qui sont très importantes et qui tiennent à cœur vraiment aux bénévoles dans l'accompagnement qui peuvent... proposé aux personnes accueillies.

  • Speaker #1

    Et pour vous, Jean-Louis, est-ce qu'il serait possible qu'il n'y ait plus de précarité alimentaire un jour ?

  • Speaker #4

    Alors, c'est bien ambitieux. Et je crois que, quelque part, je ne veux pas parler pour mes collègues, mais en tout cas, moi, je me le mets en objectif, vraiment, final. C'est vrai que la coopération, la mutualisation, telle qu'on la vit, ça sert à ça. On est hyper contents de se retrouver, c'est vrai, avec joie. pour avancer ensemble sur des sujets, pour se connaître, pour s'encourager. Mais c'est vrai que quelque part, l'éradication de la précarité, le fait d'avoir une société et de vivre une société plus juste, ça anime chacun de mes collègues ici. Et c'est ce qui est notre moteur. Et ce n'est pas près de s'éteindre, je ne crois pas.

  • Speaker #1

    Et ça passera forcément par un changement structurel. Au niveau des pouvoirs publics, Aurélien, vous vouliez ajouter peut-être un dernier mot ? Oui,

  • Speaker #5

    ce que je voulais ajouter, c'est que ce n'est pas normal aujourd'hui qu'il y ait des personnes qui n'aient pas de quoi faire au moins un repas par jour. Pour moi, ça ne devrait pas exister, surtout dans un pays comme la France. Donc j'espère qu'un jour, on n'aura plus de personnes qui vont venir nous solliciter pour une aide alimentaire, mais qui vont venir nous solliciter pour autre chose, pour créer du lien. J'espère que nous, on sera encore là. au secours populaire, mais pas forcément pour répondre à une aide qui est vitale, mais plutôt pour faire ce qu'on aime, c'est-à-dire le lien, le relationnel, rencontrer les gens, partager des choses ensemble. Parce qu'on le voit, nous, dans nos permanences, dans nos structures, c'est des personnes qui ont envie de s'en sortir, qui ont envie, qui ont énormément de compétences, qui ont envie de faire plein de choses. Et elles ont... Elles ne demandent qu'une chose, c'est finalement d'être comme tout le monde et de pouvoir vivre leur vie. Maud,

  • Speaker #1

    vous vouliez ajouter un dernier mot ?

  • Speaker #6

    Je voulais rebondir notamment sur la relation avec les agriculteurs. Il y a un enjeu aussi aujourd'hui sur lequel on s'attarde, j'ai l'impression, un petit peu plus. C'est aussi la qualité des aliments et de ce qu'on peut fournir aux personnes, parce que ça rentre totalement dans le cadre de la dignité humaine, de pouvoir aussi apporter des éléments, des denrées de qualité. Et donc aussi dans cette idée de changement structurel, d'empreintes carbone, de problèmes écologiques. Je ne veux pas non plus parler pour mes collègues, mais je sais que la Croix-Rouge est très attachée à une alimentation de qualité, un circuit court. C'est vraiment les enjeux qui vont s'ouvrir avant d'éradiquer le problème de la précarité alimentaire.

  • Speaker #1

    On arrive au terme de cette série sur l'histoire de l'aide alimentaire. Merci beaucoup à toutes et à tous d'avoir partagé vos témoignages. Je vous dis à bientôt. pour de nouvelles aventures dans Radio Copalim.

  • Speaker #2

    Merci.

  • Speaker #3

    Au revoir. A bientôt.

Description

Et si l’aide alimentaire disparaissait ? Place au débat ! Les associations de Coop Alim’ Occitanie et Éric Pélisson, commissaire à la prévention et à la lutte contre la pauvreté en Occitanie, projettent leur vision de l’aide alimentaire et son rôle dans la société actuelle. Liens entre le terrain et la politique sociale, fonds européen, ramasse en grande surface, stratégie d’achats, gestion des stocks et financement : vous saurez tout sur le fonctionnement qui permet à l’aide alimentaire d’exister.

Radio Coop Alim’ vous invite même à faire un bond dans le futur pour imaginer le devenir des associations de solidarité.


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Une création originale Ekkry en partenariat avec VO2X

Texte et voix : Krystel Elisé et Coop Alim’ Occitanie

Habillage voix : Julien Vigier


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Radio Copalime, Radio Copalime,

  • Speaker #1

    le podcast de la plus grande coopération associative d'Occitanie.

  • Speaker #2

    Bonjour à toutes et à tous, je suis ravie de vous retrouver pour ce nouvel épisode de Radio Copalime. Dans l'épisode précédent, nous avons abordé l'histoire de l'aide alimentaire en France et je vous propose de continuer à l'explorer aujourd'hui. Les membres de Copalime Occitanie sont toujours avec moi. Autour de la table, vous commencez à les connaître. Bernard Cabrol, chargé de mission pour les banques alimentaires d'Occitanie. Jean-Louis Clément, président du GESMIP. Audrey Guéraud, chargé de projet accès digne à l'alimentation pour le secours catholique. Firas Jaidi, animateur réseau pour Andes. Maud Mouissé, chargé de mission soutien aux délégations Occitanie de la Croix-Rouge française. Louis Rouget, chargé de développement régional en Occitanie pour les Restos du Coeur et Ouria Tareb, secrétaire générale du Secours populaire Haute-Garonne. Nous accueillons aussi dans cet épisode Eric Pélisson, le commissaire à la prévention et la lutte contre la pauvreté de la région Occitanie. Messieurs, dames, bonjour !

  • Speaker #3

    Bonjour !

  • Speaker #2

    Ce matin, le débat est ouvert sur les enjeux actuels de l'aide alimentaire, ceux de 2025. Et je voulais commencer par vous, M. Pélisson. Je voulais savoir quelle est votre vision sur le sujet.

  • Speaker #0

    Si on fait le parallèle par rapport à aujourd'hui, moi je pense à deux remarques. La première, c'est qu'on a considéré avec le développement du libéralisme économique qu'il appartenait en fait à la société de s'organiser toute seule, et notamment donc aux entreprises de faire des propositions là où il y avait un besoin. On se rend compte que ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas suffisant du point de vue qualitatif notamment. Parce que le libéralisme qui a apporté en France, c'est vrai, la prospérité, la croissance, la paix, en même temps, il a apporté aussi beaucoup d'inégalités sociales. Et de ce fait, là aussi, puisque je parlais de la société philanthropique qui a fonctionné jusqu'au début des années 60, en fait, en réalité, l'aide alimentaire a commencé à se structurer avec les associations, d'abord dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le Secours populaire, etc. Et puis, effectivement, au milieu des années 80, avec notamment l'appel... l'appel de Coluche à créer les restos. Donc en fait, notre société ne produit pas en tant que telle un équilibre spontané si la puissance publique n'intervient pas. Et derrière la puissance publique, c'est ça que je trouve magique, c'est qu'au fond, un modèle dans lequel on imaginerait que l'administration règle tout, ça donne ce qu'on a vu dans les pays soviétiques par exemple. Je trouve que la magie, c'est aussi la capacité d'auto-organisation de la société avec des associations. Les pouvoirs publics pourraient faire le choix de gérer eux-mêmes. En fait, il y a une très belle alliance avec les associations qui respectent l'indépendance constitutionnelle des associations. Chaque association décide de ce qu'elle veut faire comme elle le veut et leur identité est très importante. C'est souvent une identité qui est marquée par un fondateur très fort. On peut penser au père Wresinski, par exemple, pour rater des carmondes sur un autre sujet, ou à Coluche, par exemple, pour les restos. Mais donc, tout cela pour dire que l'un des aspects très positifs des sociétés démocratiques, c'est justement la capacité de s'auto-organiser à l'échelle micro-locale. On aura l'occasion d'en reparler tout à l'heure sur les financements, mais aussi à l'échelle nationale. Et donc, ce sont des associations, évidemment, qui ont aussi un plaidoyer et qui font aussi pression pour faire évoluer les choses.

  • Speaker #2

    Et justement, en parlant, donc là, on est à une échelle nationale, mais en fait, l'aide alimentaire, elle s'organise à toutes, sur tous les territoires, à toutes les échelles. Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment ça marche, en fait, pour ceux qui ne connaissent pas ces échelons ?

  • Speaker #0

    Moi, j'ai la chance d'avoir connu ça, puisque j'ai commencé à faire de l'aide alimentaire en 84, avec la communauté Emmaüs de Longjumeau, dans le sud des Saônes. Et puis ensuite, avec d'autres associations, notamment dans la Croix-Rouge. L'aide alimentaire, en fait, moderne, elle est venue notamment, alors en dehors des implications associations dans la proximité, elle est venue notamment des surplus européens. En fait, on se souvient qu'en 1945, l'Europe est détruite à la suite de la guerre et que le plan Marshall crée en fait une inégalité. C'est-à-dire que les Américains sont très contents de pouvoir vendre leurs surplus. et donc dès que l'Union... européenne se crée, la première politique qui est créée en 1961, c'est la politique agricole commune. Et la politique agricole commune, elle a comme particularité de partir d'un énorme déficit alimentaire et donc d'avoir une approche quantitative. Et malheureusement, on en est encore là aujourd'hui. Cette approche quantitative, elle permet en fait, en 25 ans, à l'Europe de retrouver son autonomie alimentaire. et de commencer à exporter. La France, dans les années 80, est la deuxième puissance exportatrice mondiale. Sauf que l'Europe a promis aux agriculteurs que, quel que soit ce qu'ils produisent, on va leur racheter. Et leur racheter à des prix convenus d'avance. Et donc, on se retrouve en 1992, je me souviens bien du montant, avec 2 millions de tonnes de viande dans les congélateurs européens et 500 000 tonnes de beurre. Et évidemment, la question qu'on se pose à l'époque, qui est une mauvaise question, c'est qu'est-ce qu'on va en faire ? Et comme parallèlement, en 88, il y a eu l'amendement Coluche et que depuis le début des années 80, il y a eu le départ de l'aide alimentaire dite moderne, donc un redémarrage, on a fait un rapprochement entre les deux. Et donc l'Union européenne a commencé à écouler ses surplus dans l'aide alimentaire. Alors ça jusqu'en 2015. Et puis en 2015, il y a des pays qui ont dit mais c'est bien sympa, mais l'Union européenne, ça coûte de l'argent, elle n'a pas la compétence juridique. Et donc, à ce moment-là, il y a eu une grande inquiétude de se dire, mais au fond, est-ce que tout ça ne va pas s'arrêter ? Parce que malgré tout, ça rend un sacré service. Ça représente 90% des montants financiers que la France donne aux associations. En gros, c'est à peu près 600 millions d'euros d'aide alimentaire qui vient de l'Europe, puisque maintenant, ça ne vient plus sous forme de viande congelée ou de beurre. Ça vient effectivement sous forme financière. Et la France y rajoute, au titre de l'aide alimentaire, 60 millions. Après, la France y rajoute... d'autres crédits pour la transformation du modèle de l'aide alimentaire. Mais donc, l'aide alimentaire européenne, c'est 90%. Donc, en 2015, inquiétude de tous les acteurs de se dire que ça s'arrête demain. Et donc, l'Union européenne, effectivement, a pris la compétence, ça continue, et c'est une bonne chose. Mais le péché originel, il est dans cette idée que finalement, l'aide alimentaire, elle irait chercher les surplus, comme si les besoins alimentaires des personnes correspondaient, en fait, à ce que les autres ne veulent pas. Et c'est là où on a une difficulté. Et donc, deux problèmes de fond. Le problème quantitatif, il faut passer de quantitatif à du qualitatif. Et deuxièmement, peut-être désarticuler ce lien qu'on a fait entre les surplus, notamment des grandes surfaces, et les besoins nutritionnels des personnes.

  • Speaker #2

    Merci d'aborder le sujet de la qualité des aliments. C'est un sujet important et nous allons en parler juste après. Il existe deux lois qui fixent un cadre à l'aide alimentaire, la loi Garot et la loi Egalim. La loi Garot de 2016, qu'est-ce qu'elle a changé pour vous ? Bernard ?

  • Speaker #1

    La loi Garraud part d'un très bon sentiment, puisqu'elle n'oblige pas les grandes surfaces à donner les invendus à des associations qui font de l'aide alimentaire. Elles peuvent donner aussi pour de l'alimentation d'animaux, elles peuvent aussi donner pour de la méthanisation, mais ça reste prioritairement destiné à l'aide alimentaire des humains. Alors donc ça a eu un effet, ça devrait avoir un effet plutôt bénéfique. Mais les grandes surfaces se sont organisées et on a vu apparaître ce qu'ils appellent le sticking, c'est-à-dire qu'ils démarquent les produits jusqu'à pratiquement la date possible de consommation. Et tout ça, du coup, ça a échappé aux associations qui distribuent l'aide alimentaire. Et puis il faut reconnaître que la loi Garot, elle est instituée, mais... personne ne contrôle. Personne ne peut contrôler si elle est réellement appliquée. Moi, j'en avais discuté avec le préfet Dutarn à l'époque. Il m'a dit, effectivement, un jour, on vous donnera les réponses. Ça fait quelques années que j'attends la réponse, que je ne ne l'ai pas eue. Qui c'est qui doit contrôler ? Donc, pour nous, il y a du bon et du moins bon sur la loi Garot.

  • Speaker #2

    Je rappelle que la loi Garot, c'est la récupération des invendus devenu obligatoire. pour les grandes surfaces. Aurélien, vous voulez y réagir aussi ?

  • Speaker #3

    Je vais répéter un peu ce que disait Bernard. Les associations ont été collectées avant la loi Garot. Moi, j'ai toujours connu les collectes dans les magasins, dans l'association, et je pense que la banque alimentaire, tout ça, le faisait déjà. Et c'est vrai que la loi Garot, on n'a pas forcément consulté les associations sur cette question-là au départ. Et je pense que ça aurait été vraiment intéressant de le faire, parce que je pense qu'on aurait mieux Merci. ils auraient pu mieux accompagner les grandes surfaces, etc. et pas forcément l'imposer parce que finalement, c'est vrai qu'il n'y a pas de contrôle derrière et rien du tout. Et nous, on subit finalement tout ce qui est arrivé après, c'est-à-dire, je pense qu'on va en parler tout à l'heure, mais tous les phénix, enfin commerciaux, tous les intermédiaires qui se sont créés suite à cette loi Garot qui ont... empirer, je pense, ce qu'on a pu nous récupérer dans les grandes surfaces.

  • Speaker #2

    Vous nous expliquez qui est Phénix et qui est Comerso, pour ceux qui ne savent pas du coup ? Quels sont ces acteurs ?

  • Speaker #3

    Ce sont des intermédiaires de collecte qui se sont créés. Pour moi, c'est des start-up. Je les considère comme des start-up parce qu'elles ne sont pas à but non lucratif. Elles se font énormément d'argent sur le dos des pauvres, entre guillemets. Et elles ont proposé leur service au GMS. en leur expliquant qu'elles pourraient former leurs salariés sur une meilleure gestion des stocks, sur une meilleure trie, etc. Et d'ailleurs, c'est notamment ces intermédiaires qui ont proposé tout ce qu'on voit aujourd'hui à tête de gondole, les petits rayons où on trouve les produits à moins 40, moins 50, moins 70%. Donc c'est leurs idées.

  • Speaker #2

    Les frigos anti-gaspi quoi.

  • Speaker #3

    Tout à fait. Et nous, on récupère. Ce qui reste,

  • Speaker #2

    vous voulez dire après ce passage ?

  • Speaker #3

    Tout à fait.

  • Speaker #2

    Justement, je voulais aussi vous entendre sur ce point. On a souvent tendance à associer la lutte contre le gaspillage alimentaire à l'aide alimentaire. Je pense que vous êtes beaucoup pour dire que ce n'est pas le bon prisme. Qu'est-ce qu'il faudrait organiser pour justement améliorer la qualité de ce qu'on propose aux personnes concernées ? Monsieur Pélisson, je me tourne vers vous.

  • Speaker #0

    alors Tout d'abord, qu'est-ce que c'est que le gaspillage alimentaire ? Quand on dit 94 kilos par personne et par an, ça ne veut pas dire que ce sont les personnes qui sont le bout de la chaîne qui jetteraient 94 kilos d'aliments. Une bonne partie correspond à des déchets qui sont évidents, les coquilles d'œufs, les épluchures, etc. Donc ça, c'est normal et ça représente une partie de ce poids. Une autre partie, elle est perdue pendant la production, pendant le transport ou dans les magasins. Et donc la population ne perd qu'une... petite partie. Alors, on a certainement des progrès collectivement à faire par rapport à ça. C'est vrai, par exemple, qu'on le voit bien, on a tous une très mauvaise gestion de nos congélateurs. En fait, on remplit les congélateurs et puis on ne se pose pas la question de savoir quand on va consommer. On a sans doute à améliorer. Même chose pour les frigos. C'est-à-dire que le fait de mal ranger dans les étages du frigo, puis de mettre ce qu'on a acheté en premier au fond, fait qu'à un moment on se dit « Ah mince, les tomates sont abîmées ! » Évidemment que le consommateur, mais vous et moi, pas que les personnes en situation de pauvreté, on a amélioré des choses. Donc ça, c'est la question des déchets. Le problème, c'est que les différentes lois, notamment Garot et Egalim, demandant aux grandes surfaces de réduire leurs déchets, ce qui est une bonne chose, et associant ça à cela de la défiscalisation, le fameux amendement Coluche, les grandes surfaces se sont dit, c'est pratique, on va pouvoir donner aux associations des produits d'aide alimentaire. Et donc, les associations qui restent encore dans une approche quantitative sont très contentes d'aller chercher ça. Or, effectivement, les besoins alimentaires des personnes, ce n'est pas ça. C'est-à-dire qu'on sait, par exemple, que les personnes en situation de pauvreté consomment deux fois moins de fruits et de légumes par personne que les milieux favorisés. Et donc, évidemment, moi, je pousse à ce que, progressivement, on s'oriente vers une alimentation plus équilibrée. Et donc, là aussi, qu'on désarticule le lien. Entre ce qu'on appelle la ramasse, c'est-à-dire ce que les grandes surfaces veulent bien donner, en réalité elles ne le donnent pas, c'est nos impôts qui défiscalisent 66% de ces dons. Et donc en réalité elles font simplement renoncer à leur plus-value, à leur marge commerciale qui de manière générale est 30%. Et deuxièmement, les grandes surfaces sont en train de s'organiser pour réduire très fortement leurs propres déchets. avec des têtes de gondole, avec des dernières minutes, etc. Ce qui est une bonne chose. Mais de ce fait, une bonne partie de ce qui est donné, encore une fois, entre guillemets, puisque ce n'est pas un don, c'est bien la défiscalisation, c'est-à-dire nos impôts qui payent ça aux entreprises. Une bonne partie est ajoutée. Et dans le rapport de l'année dernière des Restos du Coeur, on a dit que c'est 16%. Les associations locales nous disent que c'est très variable. Par exemple, à Nîmes, Et le président des banques alimentaires du Gard me dit, moi, j'ai un magasin qui est à 80% à jeter. Je lui ai dit, prenez des photos, faites un état par un huissier, dites-le moi, et puis on va effectivement invoquer la convention qu'a l'aide alimentaire avec la grande distribution pour effectivement aller demander des comptes à ce gérant.

  • Speaker #2

    Et du coup, améliorer la qualité de ce qu'ils ont en stock. Est-ce que peut-être quelqu'un veut parler des achats ? Parce que ça, ce n'était pas forcément dans l'ADN des associations au départ de faire des achats pour justement compléter les denrées alimentaires qu'on peut mettre à disposition des personnes. Firas, est-ce que vous voulez bien nous en dire un mot ?

  • Speaker #4

    Absolument. Aujourd'hui, la gestion au sein des structures d'aide alimentaire des stocks, des denrées, pour proposer des denrées, il faut en avoir. Elle est extrêmement complexe et elle est devenue de plus en plus complexe. Bernard l'évoquait tout à l'heure, la qualité de la ramasse qui se fait auprès de la grande distribution laisse parfois à désirer, à la fois en termes de quantité, mais aussi de qualité et de diversité. Et ce qui oblige les structures à trouver d'autres moyens de s'approvisionner et notamment des achats. aujourd'hui on voit aussi C'est un mouvement de fond depuis quelques années qui s'est amplifié et qui a été en cours. pardon, encouragé par les services de l'État ces dernières années, une attention à la qualité de ces achats-là, à proposer des produits de saison, à proposer des produits sous label de qualité, des produits en circuit court, pour favoriser justement ce lien au monde agricole et ce lien au territoire sur lequel les structures se trouvent. Néanmoins, c'est un métier à part entière d'être acheteur. C'est un métier à part entière que de faire du sourcing de productrices et de producteurs. et ainsi de suite, que de faire le lien entre les besoins qui existent, les envies aussi des personnes qui fréquentent nos structures, leurs souhaits en termes de produits, et ce qui existe aussi sur le territoire. Et ça nous amène aussi, c'est le défi que l'on doit relever, nous, tête de réseau de l'aide alimentaire, à comment est-ce qu'on accompagne nos structures dans ces ambitions-là.

  • Speaker #2

    Et bien sûr, avec pour finalité toujours d'avoir cette dignité humaine, et donc de pouvoir proposer... une aide alimentaire de qualité, du choix, etc. Louis veut compléter ce que dit Firas. Comment ça se passe au Resto du Coeur aujourd'hui ?

  • Speaker #5

    Alors notre politique d'achat, précisément, il me semble qu'elle remonte aux années 90. La question se pose assez rapidement en fait, puisque même dans les statuts des Restos du Coeur tels qu'ils sont déposés, on est bien sur l'idée d'une insertion sociale des personnes. notamment via l'aide alimentaire, mais pas seulement. On est vraiment sur l'insertion sociale des personnes au sens large. Or, pour ça, très rapidement, on se dit qu'il faut sortir d'une aide alimentaire qui serait un peu une aide d'urgence, et rentrer sur une aide alimentaire beaucoup plus qualitative, en fait. Donc la loi Coluche, vous le savez, l'amendement Coluche a permis beaucoup de choses. On a d'abord eu des évolutions en termes de... de surplus agricoles et l'obligation de pouvoir les redistribuer aux personnes qui en ont besoin. Je ne reviendrai pas dessus, les collègues sont revenus dessus. Mais au-delà de ça, effectivement, très rapidement, les Restos du Coeur se posent la question de la politique d'achat à mener. Achat qui viendra en fait diversifier les repas qu'on peut servir. Puisqu'en fait, on le voit, l'aide alimentaire s'est construite un peu avec les restes, j'ai envie de dire. Sauf que les restes, ça constitue rarement un repas. Et très rapidement, nous, au niveau des Restos du Coeur, on se pose cette question-là. Comment on va apporter une alimentation équilibrée aux personnes qu'on accueille ? Et ça, ça se fait notamment à travers une politique d'achat. Aujourd'hui, sur les 147 000 tonnes qu'on a distribuées l'année passée, c'est 42 000 tonnes de dons, 42 000 tonnes d'achats. Donc on est au même niveau sur les dons et les achats. Donc ça représente une part significative aujourd'hui de ce qu'on peut distribuer et qui va vraiment apporter de la qualité au repas qu'on distribue.

  • Speaker #2

    Audrey, un commentaire ?

  • Speaker #6

    Peut-être oui, parler du fond mieux mangé pour tous, puisque l'État a quand même décidé de mettre... de l'argent auprès des associations pour nous permettre d'acheter, pour trois ans oui, mais on a grand espoir que ce soit renouvelé, trois ans supplémentaires, pour qu'on puisse faire des achats de qualité. Ça a permis notamment au Secours catholique de développer de nouvelles activités et d'impérimiser d'autres en lien avec les personnes.

  • Speaker #2

    J'aimerais que vous nous expliquiez qu'est-ce que c'est que ce fonds, M. Pélisson, à quoi il sert, comment est-ce qu'il fonctionne ?

  • Speaker #0

    Oui. Merci de la question parce qu'effectivement, c'est vrai qu'on l'a évoqué tout à l'heure, la question de l'aide alimentaire ne doit pas être une question quantitative, mais une question qualitative. On y reviendra si vous le voulez bien. En 2022, la première ministre de l'époque, Elisabeth Borne, a donc lancé ce Fonds Mieux Manger pour Tous, ce qu'on appelle aussi Fonds d'Aide Alimentaire Durable, avec effectivement l'idée qu'il faut améliorer la qualité nutritionnelle de l'aide alimentaire, qu'il faut réduire l'impact environnemental. Mais d'autres lois l'avaient dit avant, réduire les déchets. On est à 94 kilos par an et par personne, c'est-à-dire presque 2 kilos par semaine. Et puis qu'il faut également améliorer la participation des personnes. C'était le thème de la journée de lutte contre la précarité alimentaire de Nîmes. Et également l'accompagnement des personnes pour que l'aide alimentaire soit une porte d'entrée et qu'à partir de là, les personnes puissent être accompagnées vers des droits sociaux.

  • Speaker #2

    J'aimerais maintenant qu'on parle de la loi EGalim. La loi EGalim a été promue en 2018 et elle a notamment posé une nouvelle définition de l'aide alimentaire. Je vais vous la lire puisqu'elle est dans le Code de l'action sociale et des familles. L'aide alimentaire a pour objet la fourniture de denrées alimentaires aux personnes en situation de vulnérabilité économique et sociale assortie de la proposition d'un accompagnement. Est-ce que c'est quelque chose qui est venu enteriner une pratique qui se faisait déjà dans vos structures, c'est-à-dire d'aller au-delà de la distribution d'un repas, de faire de l'accompagnement social, ou est-ce que c'était quelque chose de nouveau finalement en 2018 ? Jean-Louis ?

  • Speaker #7

    Non, je dirais carrément non, parce que toutes les structures, qu'elles soient plus anciennes comme les récentes, ont eu à cœur... de développer d'autres services. d'accompagner les personnes au vu de leur situation globale et pas simplement d'un besoin alimentaire. Une culture s'est développée bien avant la loi EGalim. Cette loi vient enteriner quelque chose qui existait déjà.

  • Speaker #2

    Firas, vous vouliez ajouter quelque chose ?

  • Speaker #4

    C'est vrai que ce serait un peu réducteur que de considérer l'aide alimentaire comme simplement bouger des denrées d'un point A à un point B. Aujourd'hui, les structures qui font de l'aide alimentaire, qui pratiquent de l'aide alimentaire, qui proposent une aide alimentaire aux personnes qui en ont besoin font également beaucoup plus. Ce sont aussi parfois les premiers lieux où l'on raccroche le wagon pour sortir d'une situation difficile. C'est là où on va aller à la rencontre d'un travailleur social et l'alimentation est le premier point d'accès et parfois un prétexte. pour cette accompagnement social.

  • Speaker #2

    Audrey aussi veut ajouter un mot sur ça. Oui,

  • Speaker #6

    c'est 50% des personnes qui viennent rencontrer le Secours catholique qui viennent en affirmant une demande en aide alimentaire. Alors, vous avez compris, elles ne vont pas trouver une aide directe de denrées. Mais en attendant, c'est 50% des personnes qui viennent nous rencontrer, elles viennent parce qu'elles ont faim.

  • Speaker #2

    Donc l'aide alimentaire, c'est quoi aujourd'hui, Ourya ?

  • Speaker #3

    Moi je vais parler pour le secours populaire. Normalement l'aide alimentaire c'est une réponse à l'urgence. Elle doit être une réponse à l'urgence et pas liée à un moment donné, une difficulté que les personnes peuvent rencontrer. Et malheureusement c'est plus une réponse à l'urgence, c'est une aide qu'on va apporter sur 3, 4, 5 mois, voire un an pour certaines personnes. et c'est ça qui aujourd'hui... est difficile pour nous parce que l'aide alimentaire a pris une place très importante dans nos activités. Mais l'idée, c'est de permettre à la personne aussi de regagner son pouvoir d'agir et de regagner son autonomie, etc. C'est pour ça que la plupart des associations, on développe aujourd'hui. Il y a un accompagnement qui est fait quand ils viennent dans nos associations. Oui, il y a une réponse urgente à leur apporter, mais on sait bien qu'il y a... tellement d'autres problèmes derrière qui font qu'elle n'arrive pas à rebondir et à s'en sortir.

  • Speaker #2

    Et quelles seraient les solutions du coup ? Est-ce que quelqu'un d'autre veut ajouter un commentaire par rapport à ce qu'est l'aide alimentaire aujourd'hui ? Quels sont les enjeux et les freins que vous rencontrez ? Jean-Louis ?

  • Speaker #7

    Alors c'est un grand défi. J'avais envie de revenir un peu à l'origine. On a décrit un petit peu et raconté un peu l'histoire de l'aide alimentaire en partant du XIXe et puis de la société moyenne injuste. Mais je veux dire qu'auparavant, toute société, qu'elle soit théocratique, démocratique, monarchique, quelque part génère des injustices. En tout cas, génère des publics et des personnes, des catégories de personnes qui sont en difficulté. Alors, elles les génèrent parce que leur système est peut-être injuste. Elle les génère parce qu'il y a eu peut-être des famines, parce qu'il y a des guerres, parce qu'il y a des événements qui sont hors de contrôle et qui appauvrissent une certaine catégorie. Mais cette problématique, toute société doit l'affronter. Je suis vraiment juste comme ça pour finir l'histoire, mais vous prenez par exemple dans la Bible, dans l'Ancien Testament, la société s'organise déjà, organise déjà la générosité, la charité. en permettant plein de choses et des choses même très novatrices que l'on pourrait peut-être redécouvrir, comme le glanage, la mise à disposition de terres aussi pour des personnes en difficulté, la remise des dettes aussi tous les 7 ans, la remise de la propriété en question aussi tous les 50 ans. Et ce sont des choses qui datent d'il y a 5000 ans et qui trouvent leur accomplissement dans le Nouveau Testament, puisqu'il y a une parole qui est très forte qui dit ... mais faites aux autres ce que vous souhaiterez qu'ils fassent pour vous. Et aujourd'hui, notre société, capitaliste, démocratique, avec tous les hic qu'on peut y trouver, génère elle aussi ses propres difficultés et aussi cette problématique de l'aide alimentaire. Mais au-delà de ça, le défi qu'on a à relever, c'est de comment on envisage et on vit la solidarité, c'est-à-dire le partage. au jour d'aujourd'hui. On a bien conscience qu'à chaque époque, des défis sont nouveaux, d'autres malgré le progrès et avec le progrès, il y a d'autres façons de faire. Mais je dirais que dans la droite ligne du siècle des Lumières, qui s'est battu quand même pour que le droit...

  • Speaker #2

    Il y a un statut, oui.

  • Speaker #7

    Voilà, le droit de l'homme soit reconnu. L'alimentation, déjà, dans un premier temps, pourrait être reconnue et inscrite dans notre Constitution, ce qui n'est toujours pas le cas. Et là aussi, on a un défi pour que cette aide alimentaire qui a été déléguée, il y ait une autre approche aujourd'hui, peut-être moins émotive dans l'émotion d'une crise ou portée par... un personnage charismatique qui a toujours ses limites. Mais on a besoin aujourd'hui de réfléchir ensemble à trouver une solution globale à la précarité en considérant les besoins de la personne d'une façon globale et de mettre effectivement cette question de l'aide alimentaire au centre aussi et de la faire avancer.

  • Speaker #2

    D'avoir un changement systémique. Audrey, vous vouliez ajouter quelque chose ?

  • Speaker #6

    Alors il n'y a pas grand chose à ajouter, parce que ce que vient de dire Jean-Louis est quand même une analyse assez claire de la situation. J'ajouterais juste une petite chose, c'est que les personnes qu'on considère en précarité, en tout cas qui sont concernées directement par une question de précarité financière ou alimentaire, ne sont pas les seules à considérer. Dans ce que vient de dire Jean-Louis, il faut qu'on intègre tout un système, le système de production également. Les agriculteurs sont en pleine manifestation en ce moment. Ils font partie de cette crise, ils peuvent en être une solution, tout comme les associations de l'aide alimentaire sont prêtes à travailler et à faire des propositions pour que les choses s'améliorent durablement et que ce soit structurellement que les changements s'opèrent.

  • Speaker #2

    Bernard ?

  • Speaker #0

    Souligner, c'est que les associations qui œuvrent dans ce secteur y mettent beaucoup de cœur, mais elles ont aussi besoin d'être sécurisées, ces associations. Pour pouvoir vraiment travailler comme il faut, il faudrait qu'elles soient sécurisées. Or, toutes ces associations, chaque année, se demandent comment elles vont pouvoir boucler le budget de l'année qui va venir. Rappelez-vous l'an dernier, le cri d'alarme des Restos du cœur. Et ça, ça ne devrait pas exister dans notre société. Ça devrait être des enveloppes pluriannuelles où les associations puissent se projeter, avoir des projets un peu plus loin. Sinon, on va faire des projets au fur et à mesure des disponibilités qu'on va nous offrir avec des appels d'offres qui, d'ailleurs, sont hyper compliqués à remplir. C'est un cas, c'est peut-être administratif. Mais ça, ça rejoint la préoccupation de nombreux Français, de nombreuses entreprises ou associations. Mais je pense qu'il est important qu'au niveau des pouvoirs publics, on prenne en compte la sécurisation de ces associations. C'est très, très compliqué de ne pas savoir comment on va boucler le budget.

  • Speaker #1

    Je ne peux pas ne pas vous poser la question, M. Pélisson. Est-ce que vous avez des éléments ? concernant la politique de lutte contre la pauvreté à venir, que ce soit au niveau budgétaire ou au niveau de la philosophie de ce qui pourrait se passer.

  • Speaker #2

    Alors comme je n'ai pas emmené ma boule de cristal, il y a un certain nombre de choses que je ne peux pas dire. En revanche, bien entendu, ce qui est certain, c'est que dans le projet de loi de finances tel qu'il a été déposé par le gouvernement Attal, tel qu'il a été repris et modifié la marge par le gouvernement Barnier, Et tel que j'imagine qu'il va être repris et retravaillé à la marge par le gouvernement Bayrou, l'aide alimentaire est un point important. Il y a un certain nombre de sujets qui sont des sujets polémiques entre les partis politiques, même s'ils ont des approches différentes en matière de pauvreté. Je n'imagine pas évidemment que ce soit le sujet sur lequel les partis politiques vont s'écharper. Et donc globalement, nous devrions avoir à la fois bien entendu le maintien de ces 60... millions d'euros au titre de l'aide alimentaire, donc les 10% de ce que donne l'Europe. Nous devrions avoir également toujours ce programme Mieux Manger Pour Tous, qui devrait être renforcé encore de 10 millions d'euros de plus, et donc qui représente à peu près le même montant que celui que j'évoquais tout à l'heure. Donc ça représente un bon 120 millions d'euros, plus un certain nombre d'autres petites choses. Et donc l'aide alimentaire, en principe, ne devrait pas être pénalisée par les contraintes budgétaires. La difficulté que nous rencontrons aujourd'hui, c'est que la loi spéciale qui a été votée par le Parlement, elle permet de faire face aux difficultés, mais sans loi de finances. Effectivement, toutes les subventions habituelles aux associations, en dehors de celles qui sont conclues dans un cadre pluriannuel, pour le moment, tombent. Donc nous avons besoin de ce vote de la loi de finances pour pouvoir, effectivement, avoir les crédits et pouvoir le notifier aux associations. Donc nous sommes dans un entre-deux. inquiets, relativement confiants parce qu'on a confiance dans nos parlementaires qui vont finir effectivement par nous voter une loi de finances et dans le fait que l'aide alimentaire n'est pas un sujet de conflit entre eux et donc les choses devraient effectivement se faire. De manière plus générale, nous attendons aussi des augmentations sur le pacte des solidarités. Tout ça, c'est ce qu'on appelle le programme 304. Le budget de l'État est divisé en programmes. programme de lutte contre la pauvreté. Donc, le pacte de solidarité devrait, lui aussi, connaître un certain nombre d'augmentations de l'ordre d'une quarantaine de millions d'euros de mémoire.

  • Speaker #1

    Merci, M. Pélisson, pour votre réponse authentique et factuelle sur cette question. Vous m'avez parlé, Louis, hors antenne d'un rapport de projection des Restos du Coeur à 2035 qui est publié par l'association. De quoi s'agit-il ?

  • Speaker #3

    Alors, en fait, on... On essaye d'anticiper aussi l'avenir. Là, on est revenu sur l'histoire longue justement de l'aide alimentaire. C'est intéressant, on voit qu'elle a évolué. Le monde dans lequel on est, il évolue aussi. Il évolue peut-être plus rapidement qu'avant. Donc on a senti la nécessité, nous, de s'appuyer sur un rapport d'expertise qui pouvait nous aider. C'est un outil d'aide à la décision, tout simplement, qui pouvait nous aider à prendre des orientations au niveau de l'association en fonction des évolutions du contexte géopolitique, du contexte économique, du contexte social. Donc en fait, ont émergé quatre grands scénarii pour ce qu'on a appelé études Resto 2035, donc en termes de prospective, quatre scénarii. Il y a la question de la transition écologique. Si jamais la transition écologique devient un point important à l'agenda politique, elle devient même, on va dire, le socle premier des politiques publiques de demain, comment nous, Resto, on peut s'inscrire dedans ? Donc dedans, on a des projections en termes d'action. Nous, ce que ça veut dire, ça veut dire renforcer le circuit court. nous sommes pour l'instant déjà un petit peu dans cette politique-là. Mais l'idée, c'est que si demain, la transition écologique devient d'autant plus importante, comment nous, on peut s'inscrire dedans et renforcer nos efforts dessus ? Ensuite, il y a un axe... tenir bon, on l'a appelé. Ça, c'est l'axe où, en fait, on a un effondrement à la fois du système agricole, on peut avoir aussi un repli sur soi des États, peut-être un système beaucoup plus autoritaire. Et donc là, on est dans le tenir bon, c'est comment on continue de faire face à une aide alimentaire d'urgence, tout en apportant l'accompagnement social qui est nécessaire pour que les personnes s'en sortent. Donc ça, c'est le deuxième axe. On a un troisième axe, c'est si on rentre dans un New Deal social. Là, c'est l'idée que les pays européens se mettent d'accord et qu'en fait... On rentre dans un système comme au sortir de la guerre avec un fort investissement des pouvoirs publics. On ouvre les robinets en quelque sorte de l'argent public. Comment on les utilise au mieux ? Comment on utilise au mieux ces ressources publiques pour justement pouvoir aider les personnes qu'on accueille et comment les restos se transforment en fonction de ça ? Là, par exemple, ça serait le renforcement notamment de la place des personnes accueillies dans la réflexion pour éviter de reproduire des accueils qui ont pu être produits sur les New Deal précédents qui sont plutôt paternalistes et rentrer dans quelque chose où les personnes sont vraiment en situation d'être actrices des changements de la société. Et enfin, le dernier axe, c'est la question de l'effondrement de l'État-providence et même d'une balkanisation, on l'a appelé, au niveau européen. Donc c'est de dire chacun chez soi. Comment on se débrouille s'il y a un morcellement territorial, si par exemple l'Occitanie revendique son indépendance, mais sans pouvoir public en tant que tel, dans une forme d'isolement. Donc on est vraiment sur le repli sur soi communautaire quasiment. Et là, comment les restos pourraient s'inscrire dans cette chaîne-là et pouvoir... promouvoir quand même une aide alimentaire de qualité, donc par exemple en s'appuyant beaucoup plus sur le circuit court, circuit local, puisque les échanges internationaux dont on bénéficie aujourd'hui pourraient effectivement disparaître. Ce document il est intéressant puisque pour chaque scénario, mais je ne vais pas le détailler ici, on a posé plusieurs types d'actions et puis surtout des degrés en fonction de là on pourrait évoluer. En fait quand on regarde, on se situe dans l'actualité, on pourrait dire qu'on a des risques d'être engagé sur les quatre scénarios. pas forcément en allant jusqu'au terme que j'ai cité qui peut paraître catastrophiste, mais en tout cas, on a des glissements vers certains points et qui nous aident, nous, à placer le curseur en termes de décision et de ce qu'on peut apporter aux personnes accueillies.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup, c'est très intéressant. J'avais une dernière question pour vous, Louis. Est-ce que vous pensez qu'il est réaliste ou complètement utopique de se dire qu'un jour, on va éradiquer la précarité alimentaire ?

  • Speaker #3

    Alors... Pour nous, en tout cas, je sais que beaucoup de bénévoles l'appellent de leur vœu. La question, c'est si Coluche était encore là, il serait déçu qu'on soit là, il aimerait que le resto ait disparu, etc. Ça, on l'entend beaucoup quand on échange avec les bénévoles. C'est vrai qu'on pourrait poser un constat très pessimiste en se disant, quand on voit la situation actuelle, qu'on se dit que finalement, le temps où l'aide alimentaire disparaît, il est très loin et qu'il serait souhaitable aujourd'hui qu'il n'y ait plus cette forme de soutien. qui peut exister. Après, quand on regarde aussi, au-delà de l'aide alimentaire, c'est tous les services qui sont proposés par les associations. Nous, Resto, on avait posé, c'est dans Resto 2035, vous pouvez regarder, on a posé effectivement la question de se recentrer sur nos missions. L'aide alimentaire en fait partie. C'est une porte d'entrée, en fait, au Resto du Coeur, vers l'insertion sociale des personnes. Je l'ai rappelé statutairement, nous, on est là pour oeuvrer pour l'insertion sociale des personnes. Donc la question, c'est comment, au-delà de l'aide alimentaire, on fait. Et ça, il y aura toujours besoin, en quelque sorte. On aura toujours besoin que quelqu'un tende la main à un moment à une personne qui peut se retrouver en difficulté pour X raisons. On souhaite que l'accompagnement soit le plus court possible dans le temps, que la personne puisse rapidement retrouver une autonomie et puis aussi une vie bonne au sein de cette société. Et pour ça, nous, le côté aide alimentaire, on arrive à le dépasser en se projetant sur les activités d'aide à la personne qu'on mène déjà, qui sont très importantes et qui tiennent à cœur vraiment aux bénévoles dans l'accompagnement qui peuvent... proposé aux personnes accueillies.

  • Speaker #1

    Et pour vous, Jean-Louis, est-ce qu'il serait possible qu'il n'y ait plus de précarité alimentaire un jour ?

  • Speaker #4

    Alors, c'est bien ambitieux. Et je crois que, quelque part, je ne veux pas parler pour mes collègues, mais en tout cas, moi, je me le mets en objectif, vraiment, final. C'est vrai que la coopération, la mutualisation, telle qu'on la vit, ça sert à ça. On est hyper contents de se retrouver, c'est vrai, avec joie. pour avancer ensemble sur des sujets, pour se connaître, pour s'encourager. Mais c'est vrai que quelque part, l'éradication de la précarité, le fait d'avoir une société et de vivre une société plus juste, ça anime chacun de mes collègues ici. Et c'est ce qui est notre moteur. Et ce n'est pas près de s'éteindre, je ne crois pas.

  • Speaker #1

    Et ça passera forcément par un changement structurel. Au niveau des pouvoirs publics, Aurélien, vous vouliez ajouter peut-être un dernier mot ? Oui,

  • Speaker #5

    ce que je voulais ajouter, c'est que ce n'est pas normal aujourd'hui qu'il y ait des personnes qui n'aient pas de quoi faire au moins un repas par jour. Pour moi, ça ne devrait pas exister, surtout dans un pays comme la France. Donc j'espère qu'un jour, on n'aura plus de personnes qui vont venir nous solliciter pour une aide alimentaire, mais qui vont venir nous solliciter pour autre chose, pour créer du lien. J'espère que nous, on sera encore là. au secours populaire, mais pas forcément pour répondre à une aide qui est vitale, mais plutôt pour faire ce qu'on aime, c'est-à-dire le lien, le relationnel, rencontrer les gens, partager des choses ensemble. Parce qu'on le voit, nous, dans nos permanences, dans nos structures, c'est des personnes qui ont envie de s'en sortir, qui ont envie, qui ont énormément de compétences, qui ont envie de faire plein de choses. Et elles ont... Elles ne demandent qu'une chose, c'est finalement d'être comme tout le monde et de pouvoir vivre leur vie. Maud,

  • Speaker #1

    vous vouliez ajouter un dernier mot ?

  • Speaker #6

    Je voulais rebondir notamment sur la relation avec les agriculteurs. Il y a un enjeu aussi aujourd'hui sur lequel on s'attarde, j'ai l'impression, un petit peu plus. C'est aussi la qualité des aliments et de ce qu'on peut fournir aux personnes, parce que ça rentre totalement dans le cadre de la dignité humaine, de pouvoir aussi apporter des éléments, des denrées de qualité. Et donc aussi dans cette idée de changement structurel, d'empreintes carbone, de problèmes écologiques. Je ne veux pas non plus parler pour mes collègues, mais je sais que la Croix-Rouge est très attachée à une alimentation de qualité, un circuit court. C'est vraiment les enjeux qui vont s'ouvrir avant d'éradiquer le problème de la précarité alimentaire.

  • Speaker #1

    On arrive au terme de cette série sur l'histoire de l'aide alimentaire. Merci beaucoup à toutes et à tous d'avoir partagé vos témoignages. Je vous dis à bientôt. pour de nouvelles aventures dans Radio Copalim.

  • Speaker #2

    Merci.

  • Speaker #3

    Au revoir. A bientôt.

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