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ReGeneration Koraï

7. Économie et biodiversité : peut-on les concilier ? 1/2

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34min |24/06/2025
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Description

On parle souvent du climat, de l’empreinte carbone… mais la biodiversité reste, pour beaucoup, un concept flou. On sent que c’est important, vital, même, mais on peine à la définir, à la mesurer, et à comprendre concrètement ce que sa dégradation implique.

Dans cet épisode, je reçois Yves Chesnot, qui travaille à la CDC Biodiversité. Sa mission : développer des outils pour aider les collectivités, les entreprises, et autres structures à mieux prendre en compte la biodiversité dans leurs décisions.

Avec lui, on revient aux bases : qu’est-ce que la biodiversité, exactement ? En quoi les écosystèmes marins diffèrent-ils des écosystèmes terrestres ? Pourquoi est-il si complexe de mesurer notre impact sur la biodiversité, bien plus que pour le carbone ? Et quels sont les risques économiques liés à l’effondrement du vivant ?


Dans cet échange, on ne parle pas uniquement du monde marin. J’ai volontairement élargi le propos pour mieux mettre en perspective les spécificités de l’océan face aux autres écosystèmes.


Cet épisode est en deux parties. Aujourd’hui, on pose les fondations. Et dans 15 jours, vous découvrirez la suite, consacrée à une question centrale : le financement de la restauration de la biodiversité.


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📖 Pour aller plus loin : retrouvez nos articles et ressources sur notre blog : https://korai-africa.com/fr/lire/


Vous pouvez aussi me faire part de vos commentaires, retours ou idées de sujet en m'écrivant par mail : clarisse.gouby@korai-africa.com


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    En fait, quand on parle de biodiversité, il y a une image que j'aime bien, c'est celle d'un avion dont on enlèverait tous les boulons un par un. On sent qu'il y a un risque, parce que moins il y a de boulons, et plus je suis proche du crash de mon avion, mais je ne sais pas à partir de quel boulon tout va s'effondrer. Et en fait, les écosystèmes fonctionnent comme ça. Ils fonctionnent de manière non linéaire. C'est-à-dire qu'on ne sait pas quel est le point de rupture.

  • Speaker #1

    On parle beaucoup du climat, de l'impact carbone. Mais la biodiversité, elle reste un concept un petit peu flou. On sent que c'est important, vital même, mais on a souvent du mal à la définir, à la mesurer et à vraiment comprendre ce que sa dégradation implique. Dans cet épisode, j'ai rencontré Yves Chenot, qui travaille à la CDC Biodiversité. Sa mission ? Créer des outils pour aider les collectivités, les entreprises ou des plus petites structures à mieux intégrer la biodiversité dans leurs décisions. Avec lui, on est revenu au fondamental. C'est quoi exactement la biodiversité ? Sa définition ? en quoi les questions liées à la préservation des écosystèmes marins diffèrent de celles liées aux écosystèmes terrestres ? Pourquoi est-ce si difficile de mesurer notre impact sur un écosystème, bien plus que pour le carbone ? Ou quels sont les risques financiers liés à l'effondrement du vivant ? On a élargi un peu le propos au-delà du monde marin, justement pour mettre en perspective les liens et les différences entre la biodiversité terrestre et marine, et donc mieux comprendre les enjeux qui sont spécifiques à l'océan. J'ai découpé notre échange en deux parties, et dans 15 jours, vous entendrez donc la suite. où on abordera la question clé du financement. Comment financer la restauration de la biodiversité ? Je vous souhaite une bonne écoute !

  • Speaker #2

    Bon,

  • Speaker #1

    les chiffres sont là. 50% des récifs coralliens ont disparu en 30 ans. Un tiers des stocks de poissons sont surexploités. Et nos océans... se réchauffent à une vitesse alarmante. Notre économie est malade en fait. Elle a oublié sa plus grande alliée, la nature. Et parmi elles, les écosystèmes marins qui nous nourrissent, nous permettent de respirer et maintiennent l'équilibre de notre planète. Ok, on fait quoi ? Par où commencer ? Comment peut-on agir concrètement ? Je m'appelle Clarisse Goubi et je vous emmène à la rencontre de celles et ceux qui proposent des solutions et tentent de réintégrer la nature dans l'équation. Ici, c'est le podcast de Régénération Corail. Et ensemble, on passe à l'action.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est un souvenir qui est assez récent parce que je suis allé très peu à l'océan quand j'étais petit, mais je me suis mis à mes voiles après le Covid. Et la première fois que j'ai fait de la voile, j'ai trouvé ça horrible parce que c'était la Bretagne en novembre. Il faisait super froid et j'avais vraiment le merde fou. Mais à la fin de la première journée, vers 18h, il y a eu un super coucher de soleil. Je suis rachepé le délénant et ça, ça m'a complètement conquis. Et du coup, j'ai un rapport un peu à mon haine avec l'océan parce que j'ai toujours le mal de mer. Mais je sais qu'à chaque fois, je vais avoir ce petit moment de bonheur une fois que c'est passé. Et c'est ce que je recherche un peu systématiquement.

  • Speaker #2

    Moi, c'était pareil. Je détestais nager quand j'étais petite et pourtant maintenant, j'adore la mer et je traite dans le secteur de la conservation marine. Est-ce que tu pourrais commencer par présenter ton parcours ?

  • Speaker #0

    Alors du coup, moi, je m'appelle Yves. Je travaille chez CDC L'université, qui est une entreprise qui est spécialisée dans l'université. Mais à la base, je ne viens pas du tout de ce monde-là. Moi, j'ai fait des études de lettres. Au début, je fais une prépa littéraire. Et après, j'ai fait des études de finance commerce et des études de géographie, et notamment pas mal de géographie quantitative. Et c'est là où je me suis posé de plus en plus de questions sur l'environnement, avec au début un prisme qui était hyper carbone. Je fais des stages qui étaient beaucoup plus climat, data, carbone. Et puis, un jour, j'ai un collègue... À une pause déjeuner qui commence après l'université, j'avais un réflexe un peu bête de dire « Ah ouais, mais ça c'est quoi ? » Enfin, c'est les abeilles, quoi. J'ai senti le regard qui me jetait que j'avais vraiment même pas du tout compris la question et le sujet. Et il a commencé à me démontrer par A plus B que ce que je venais de dire était un peu débile. Ça m'a mis la puce à l'oreille. Et quand je suis mis à chercher un travail, j'avais entendu parler de cette entreprise, je me suis commencé à me poser pas mal de questions sur l'université. Et là, j'ai découvert un champ. sur lequel je travaille depuis deux ans et demi maintenant, et qui est extrêmement riche.

  • Speaker #2

    Donc du coup, tu travailles maintenant à la CDC Biodiversité. Est-ce que tu peux m'expliquer ce que tu fais et ce que fait la CDC ?

  • Speaker #0

    Alors la CDC, elle fait plusieurs choses depuis une quinzaine d'années. La biodiversité, c'est vraiment un sujet extrêmement large, et du coup, tous les métiers qui touchent à ce sujet sont aussi très différents. Globalement, on fait deux choses. On fait de la restauration à l'écosystème. Donc ça, c'est lié à un contexte réglementaire en France qui veut que... Quand une entreprise ou un projet a un impact sur un territoire, elle doit compenser cet impact et faire de la restauration ailleurs. Ça, c'est un peu l'activité historique. Et puis autour de ça est venu se tisser tout un tas de questionnements par lesquels on a répondu en créant différents outils. Il y en a un qui est assez connu qui s'appelle WBIB et WST-SCORE qui permet de mesurer son impact sur la biodiversité. Mais on en a créé tout plein d'autres et moi, mon travail et moi, au sein de la mission économique de la biodiversité qui est financée par la Caisse des Territoires et qui a une mission d'intérêt général, qui crée des outils pour nous, mais en fait pour tous ceux qui veulent s'en emparer derrière. c'est de créer de nouveaux outils pour aborder chaque question un peu précise que vient nous poser la université. Parce qu'on ne va pas aborder le sujet de la même façon selon l'échelle. On va aborder des sujets hyper locaux. Souvent, c'est en fait par ça qu'on connaît le prix de la nouvelle université. On va avoir le sujet d'une espèce donnée à tel endroit, d'un écosystème sur lequel on va avoir un impact. Et puis on va avoir aussi des questions qui sont hyper globales de « Je suis une grosse entreprise. » j'ai une chaîne de valeur qui va de l'Asie à l'Amérique du Nord en passant par l'Afrique, l'Amérique du Sud, tous les continents je touche à 1000 écosystèmes différents je ne sais même pas qui sont mes fournisseurs, etc je ne sais même pas forcément ce qu'il y a dans la fabrication de mes outils de mon matériel mais je vais aller chercher toutes ces informations et me poser la question de tous les différents impacts que je peux avoir sur ces écosystèmes et du coup là, les deux approches sont hyper différentes et ça c'est juste un exemple parce qu'on va avoir une approche qui est sur les espèces ou qui est plutôt centré sur les écosystèmes. On peut avoir une approche qui est hyper data, ou on peut avoir une approche qui est au contraire un peu plus sensible ou un peu plus locale. On peut avoir aussi des interlocuteurs vachement différents, parce que ça va être des très gros entreprises, souvent des entreprises du luxe ou de la tech, des tout petites structures, souvent des structures de l'agriculture par exemple. Une exploitation à l'école a très peu de moyens, du coup on ne va pas du tout répondre de la même manière, avec les mêmes outils qu'une grosse entreprise. Et du coup, en fait, le but... c'est de créer des outils pour accompagner tous ces gens-là. Les collectivités aussi, qui ont beaucoup de sujets sur la biodiversité. Et donc ça, contrairement au carbone, ça demande de déployer un peu toute notre imagination pour en y répondre un peu au cas par cas aux problématiques de chacun de ces vecteurs.

  • Speaker #2

    Peut-être qu'avant de rentrer dans l'aspect plus technique, tu pourrais me donner la définition, parce qu'on n'a jamais donné de ce que c'est la biodiversité, et peut-être aussi redonner un peu le cadre mondial qui est autour des enjeux.

  • Speaker #0

    Alors la biodiversité, c'est un mot valise qui a été inventé d'une manière assez récemment, je crois. Il me semble que ça émerge vraiment dans les années 80. Et en fait, ce terme valise va réussir à fédérer les acteurs au niveau international. C'est Biological Diversity, et qui est adopté pour désigner tout ce qui va concerner le vivant, de manière générale, avec la Convention de Rio, avec le Sommet de Rio et le début des COP. en 92, et donc ça en fait un objet au contour assez flou, ce qui fait qu'on a souvent parlé de nature à la place de biodiversité. Et cet objet, la meilleure manière de le décrire, c'est de le décrire de trois manières différentes. On parle soit de biodiversité des espèces, ça c'est un peu la biodiversité que vous voyez à la télé, c'est qu'on connaît de manière un peu sensible, de manière un peu plus intime, c'est qu'on identifie plus avec les grandes espèces un peu parapluies, comme les éléphants. qui vont être fortement liées de manière symbolique à un écosystème. Et puis, il y a la biodiversité des gènes, la biodiversité génétique, qui est un gros sujet au niveau international, parce qu'on retire beaucoup d'informations des espaces naturels, notamment pour le secteur de la chimie ou de la pharmacie, et donc il y a une question de partage de cette connaissance. Et puis, la troisième échelle, ça c'est peut-être celle dont on va le plus parler, c'est l'échelle des écosystèmes. La biodiversité fonctionnelle, c'est-à-dire comment est-ce que les écosystèmes fonctionne, qu'est-ce qui fait entre guillemets leur équilibre, même si un écosystème c'est pas quelque chose de très équilibré, c'est un truc un peu chaotique. Et du coup, ça c'est un peu l'échelon sur lequel on va le plus se concentrer, les politiques publiques, parce que ça vient un peu englober les échelons inférieurs de la génétique, et l'échelon supérieur qui est l'échelon des espaces émulants.

  • Speaker #2

    On a parlé du coup des trois différents types de biodiversité. Est-ce que tu différencies la biodiversité terrestre et marine ? ou elle est inclue dans cette définition que tu donnes, comme on parle beaucoup de biodiversité marine dans le podcast ?

  • Speaker #0

    On va les traiter forcément de manière différente. De toute façon, on va toujours traiter les choses un peu au cas par cas. Toutes les connaissances vont être extrêmement non-extraites. Et on va, de fait, là, vraiment les traiter différemment. Autant on peut avoir des approches qui sont réplicables entre des écotistènes terrestres, autant la biodiversité marine, on va vite considérer de manière assez pragmatique que c'est un autre monde, parce que déjà, c'est un monde qu'on connaît. très mal. Il y a une très grande part des océans qu'on connaît mal. Vous avez dû en parler plein de fois dans le podcast, mais en fonction des différentes zones océaniques, on connaît plus ou moins bien les zones littérales, mais on ne connaît pas le reste. On connaît assez mal les espèces et puis surtout en biologie universitaire, ce qu'on constate, c'est que c'est un peu une science des interactions. Tu as tes objets, super, il y a les écosystèmes, j'ai 26 chez mon objet, j'ai mes espèces. Mais en fait, ce qui va faire l'équilibre de tout ça ou le fonctionnement de tout ça, c'est les interactions entre les espèces. Et ces interactions-là, elles sont hyper difficiles à décrire, surtout dans un milieu comme le milieu marin, où on ne peut pas en permanence avoir des systèmes d'information comme on peut avoir sur les systèmes terrestres. Donc on a moins d'infos, et ça, ça va beaucoup influer la manière dont on traite ce sujet-là.

  • Speaker #2

    Et t'en parlais tout à l'heure, juste dans la question d'avant, tous les acteurs économiques que vous accompagnez avec la CDC, ils dépendent de la biodiversité en grande partie pour leurs activités. T'as travaillé sur les risques financiers liés à la préservation de la biodiversité. Est-ce que peut-être avant de parler justement des outils que vous développez, tu pourrais revenir sur quels sont les risques, les enjeux liés à la préservation de la biodiversité ? Dans la publication que tu m'avais donnée... Tu disais que la finance et biodiversité forment un mariage nécessaire mais contrarié. Donc, j'aimerais bien que tu reviennes un peu sur les enjeux et les risques liés à la biodiversité et sa préservation.

  • Speaker #0

    Carrément. Ça, quand on dit finance et biodiversité, comme ça, le lien n'est quand même pas tout de suite évident. En fait, il s'est beaucoup renforcé ces dernières années. Avec la COP15, il y a vraiment eu un appel vers les acteurs financiers en disant « ça devient votre problème à vous aussi » , parce qu'en fait, ça devient un problème de stabilité. De stabilité de l'économie, du coup, de stabilité hyper pragmatique. de vos actifs et de ce que vous avez dans vos portefeuilles. Et donc, si vous voulez avoir des actifs qui tiennent la route, qui sont encore à l'air de main, vous avez besoin d'une biodiversité fonctionnelle. Et du coup, on est allé essayer de chercher ces acteurs-là sur cet argumentaire, et notamment sur cet argumentaire du risque. Parce qu'en fait, les acteurs financiers, sur les questions d'environnement, on va souvent les chercher sur la question de l'information. Et souvent, c'est de l'information additionnelle. C'est un peu ce qu'on fait dans le secteur de l'ESG. Je viens ajouter des informations financières, des informations sur le taux de carbone, sur, en biodiversité, les écosystèmes impactés, sur les matériaux utilisés, les différents types de pollution qui peuvent avoir lieu à la suite de telle ou telle activité. Mais ça, c'est pas forcément très naturel pour le secteur financier d'y fournir ces informations, d'aller les chercher en plus de son activité. Alors que la question du risque, elle est déjà au cœur de ce qu'il fait. Et donc du coup, c'est un bon proxy pour venir poser des questions de biodiversité. au cœur de ce monde financier. C'est un peu une sorte de cheval de Troyes pour nous, pour venir parler d'écosystème et de stabilité d'écosystème. Il y a des acteurs financiers qui sont plus ou moins réceptifs à ces discours, et typiquement, les assurances, ça les intéresse vachement. Parce qu'on en a beaucoup eu sur le retrait et le gonflement des argiles, avec tout ce qui est à l'assurance habitation. Ça a eu un impact très fort sur le bilan de certaines assurances, et la même chose... avec les feux de forêt en Californie. Je crois que c'est State Farm, qui est une des plus grosses assurances californiennes, qui a retiré ses contrats d'assurance de certaines zones qui étaient trop proches des forêts de la Sierra qui brûlent régulièrement. Et donc là, on a une porte d'entrée très directe pour eux. La chose qui n'est pas évidente, c'est que ça reste quand même deux mondes qui sont hyper opposés. Quand on parle d'actifs financiers, en général, on a des métriques qui sont hyper connues. On mesure... En dollars, on mesure en habitants, on mesure sur des temps aussi qui sont assez courts. On a des historiques de données qui sont hyper forts. Tout ça, on n'a pas du tout avec la biodiversité. C'est vraiment un objet qui est... Enfin, des objets qui sont tellement différents qu'on a du mal à les réduire à des quantités d'informations qui sont bien manipulables par des acteurs financiers. Et en fait, même faire ça, dire un peu mainstreamer la biodiversité pour des acteurs financiers, ça peut nous induire en erreur dans ce qu'on cherche à faire. Parce que du coup, on va venir... écraser une complexité qui est nécessaire pour comprendre le problème et pour agir. Et donc, il y a une sorte de marge de raison, mais un peu contrariée, parce qu'à la fois on a besoin de ces acteurs financiers, et en même temps, on doit faire attention à la manière dont on leur parle, et à ne pas non plus trop vouloir épouser des codes, qui sont les codes de la finance, notamment en ce qui concerne l'information, et qui pourraient venir dénaturer la nature de cette information, et du coup la capacité à réveiller les actions de vie. Ici, on le voit beaucoup sur les risques.

  • Speaker #2

    J'ai l'impression qu'on parle plus de carbone facilement, d'impact carbone, mais de la biodiversité beaucoup moins. Est-ce que tu pourrais revenir sur les risques ? Est-ce que vous avez identifié des risques ? Est-ce qu'il y en a des concrets dont tu pourrais parler ?

  • Speaker #0

    La question du risque est intéressante parce qu'un peu comme sur le carbone, il y a quelque chose de relativement invisible sur le risque. En fait, quand on parle de biodiversité, il y a une image que j'aime bien, c'est celle d'un avion dont on enlèverait tous les boulons un par un. On sent qu'il y a un risque parce que, eh oui, moins il y a de boulons et plus je suis proche du crash de mon avion, mais je ne sais pas à partir de quel boulon tout va s'effondrer. Et en fait, les écosystèmes fonctionnent comme ça. Ils fonctionnent de manière non linéaire. C'est-à-dire qu'on ne sait pas quel est le point de rupture. On sait que plus on applique de pression sur ces écosystèmes, plus ils ont de chances à un moment de rompre, de plus être en capacité de s'autoréguler, enfin, ils se rétouraient l'une par l'autre, de fournir en tout cas les services écosystémiques qu'ils nous fournissent, c'est-à-dire de fournir de l'eau potable, de fournir des sols qui sont capables de supporter une agriculture à peu près fonctionnelle. Mais on ne sait pas où est le point de rupture. Et donc du coup, c'est un peu différent, là où il y a une grosse différence avec le carbone. Le carbone, on a des scénarios. On sait, même si on veut les revoir en ce moment, qu'il y a des points de rupture précis, à partir de, on a juste un EV, le EV, et qu'il faut suivre ces scénarios si on ne veut pas passer ces points de rupture. Avec les écosystèmes, c'est beaucoup plus difficile à identifier, et du coup, on avance vraiment à tâton. Et donc, on a du mal, et on peut reprendre le cas de la biodiversité marine, mais on est vraiment dans du pouls de sonde vis-à-vis du vivant. qui vont nous informer sur les effondrements à venir. Il y a un effondrement qui est un peu symptomatique, c'est la morue à Terre-Neuve. Entre les années 60 et 80, les pêcheries de Terre-Neuve se sont mises à surpêcher la morue et ont épuisé les stocks en suivant des informations un peu contradictoires sur ces stocks. Et plutôt prendre des hypothèses un peu conservatrices, de se dire, même si j'ai des informations différentes sur ces stocks, même si c'est difficile de les évaluer, il vaut mieux que je prenne mon information la moins disante. Parce que je ne sais pas où est le point de rupture pour ces populations que nous avons eues, du moment où d'un coup, d'une année sur l'autre, j'aurais tellement empêché que je n'en aurais plus, mais de manière drastique. Je m'aurais 10 fois moins que l'année dernière. Et en fait, à force de venir tester ce point de rupture, ils ont fini entre guillemets par le trouver, et les pêcheries de Terre-Neuve ont dû fermer. Alors qu'on a le même exemple de l'autre côté de l'Atlantique. En Norvège et en Lusie-Ferroé, on n'est pas allé jusqu'à ce point de rupture en prenant des informations plus conservatrices. Et donc ça, la question du risque, en biodiversité, on essaie de la fêter avec le peu d'informations qu'on a. Et donc en essayant de prendre les quelques coups de son disponibles, on essaie de bâtir des hypothèses un peu structurelles, un peu conservatrices, pour éviter d'aller trop loin.

  • Speaker #2

    Puisque j'imagine qu'il est complexe par rapport au carbone, c'est que c'est aussi assez localisé. Ça dépend de où est-ce qu'on se situe dans le monde, de quel écosystème on parle. C'est vrai que dans le cas de la pêche, j'imagine que c'est assez évident, parce que si on épuise, dans le secteur de la pêche, on épuise des ressources en poisson, il n'y aura plus de poisson, donc du coup, c'est assez clair le risque qu'il y a pour ce secteur-là. Est-ce que dans le cas de la biodiversité marine, il y a des secteurs qui ont été identifiés particulièrement, qui sont à risque plus que d'autres, plus dépendants ? Je ne sais pas si c'est quelque chose sur lequel vous avez pu travailler ou pas.

  • Speaker #0

    L'univers c'est marine, on est vraiment en début de vue. Du coup, on a développé un outil qui s'appelle le Global Biodiversity Score et qui peut être vachement utile pour calculer les risques auxquels est exposé un ordinateur financier. Et ça, ça fonctionne vachement bien sur les écosystèmes terrestres parce qu'on a des grosses bases de données dessus. Et là, aujourd'hui, on n'a pas encore développé l'équivalent pour la biodiversité marine. On est en train de le faire avec un consortium d'acteurs. Mais c'est vraiment, pour l'instant, à l'état de la recherche. et du développement vraiment chez nous, mais même chez les autres. Et il y a encore un manque de données un peu construites et globalisées, en tout cas de traitement de ces données par les acteurs économiques, sur ces questions de l'université marine. Ça marche pour le terrestre et pas encore tout à fait pour l'humain. Mais ça devrait être là dans des mois, années, années.

  • Speaker #2

    On espère, ça sera super. Est-ce que tu peux nous expliquer un peu plus, du coup, ce que c'est ce Global Biodiversity Score et comment est-ce que vous mesurez le pouls-impact des secteurs ? des acteurs économiques, j'imagine, sur la biodiversité ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis spécialiste de cet outil, qui est vraiment des voeux d'aide à plus d'une trentaine de collègues ici à Célice Biodiversité. C'est un outil qui est en open access et dont le but est de trouver autour d'une métrique synthétique, mais pas unique, une manière de calculer les impacts d'une organisation. C'est-à-dire qu'on va prendre les cinq grands facteurs de pression sur la biodiversité, donc le changement d'usage des sols, la surexploitation des ressources, le changement climatique, les espèces exotiques envahissantes, la pollution chimique, la lumineuse, etc. Donc on prend ces cinq grands facteurs et on va essayer de voir qu'est-ce qui, dans l'activité d'une organisation, impacte la biodiversité. Et du coup, on prend une métrique synthétique qui s'appelle le MSA km², qui est construite à partir de grandes bases de données sur l'ensemble des impacts qu'on a sur les écosystèmes dans le monde, qui vient nous dire, par exemple, le coton. Le coton utilise beaucoup d'eau, beaucoup de terres arables, et donc va avoir un impact général sur la biodiversité assez fort, parce qu'il y a une conversion d'espaces naturels en champs, par exemple. Et donc on va réussir à quantifier ça dans les grandes masses. et à dire à un acteur qui fabrique des t-shirts, de dire, ton empreinte de l'université, elle est à tant de pourcents due au coton, et elle représente l'équivalent de tant de kilomètres carrés de forêts vierges rasées. Et donc ça va lui donner un nombre de grandeur, et ça va faire comme une sorte de bilan carbone, et on pourra se dire, comment je vais lui ça ? Je suis à tant aujourd'hui, comment est-ce que je passe de 2 à 1 ? Et ça, ça permet de construire des trajectoires sur des grandes organisations.

  • Speaker #2

    Et est-ce qu'il y a des activités ou des secteurs qui ont plus d'impact sur la biodiversité que d'autres ?

  • Speaker #0

    Oui, il y a vraiment des secteurs qui sont identifiés comme des secteurs clés. Un de ces premiers secteurs, c'est l'agriculture, qui a vraiment un rôle pivot, parce qu'en plus, c'est un secteur qui a un gros potentiel de transition. Ça, on a développé, moi je suis responsable d'un outil qui s'appelle Agribest, qui aide les agriculteurs à... à changer leurs pratiques, comme pour avoir parlé. Il y a un autre secteur qui est la chimie, qui est vachement identifié là-dessus, parce que pareil, les pollutions chimiques, là on est vraiment aussi dans le flou de ce qu'on sait et de ce qu'on ne sait pas. On sait que globalement, il y a de la pollution chimique absolument partout maintenant, même au fin fond de l'Ouanda. On retrouve dans les lignes des chimpanzés jusqu'à 30 composants chimiques à l'intérieur des lignes. Très vache ! Donc il y a vraiment quelque chose d'incontrôlé qui vient... qui vient former des cocktails chimiques, on a un peu du mal à identifier. Et donc ça, c'est un vrai angle mort pour l'instant et qui est vraiment difficile à explorer. Et puis, il y a un troisième secteur, c'est celui de l'immobilier, qui a vraiment du foncier de manière générale et qui, là, est vraiment sur la question d'usage des terres. Une autre chose que je fais avec mon équipe, c'est une expérimentation avec l'ADEME sur l'objectif de zéro artificialisation nette. Les communes en France vont devoir stopper l'artificialisation. progressivement d'ici 2050. Et nous, on aide 22 territoires lauréats à trouver des outils pour « décroître » ou réduire fortement leur consommation de foncier.

  • Speaker #2

    Globalement, une fois que ces acteurs économiques, ces secteurs-là, ont pu identifier leur impact, qu'est-ce qu'ils peuvent faire ? Dans le cadre de la CDC Biodiversité et de ton travail, comment est-ce que vous pouvez les aider, déjà dans un premier temps, à réduire leur impact et quels sont les leviers qu'ils peuvent utiliser ?

  • Speaker #0

    Il y a un peu une recette magique en biodiversité, mais en environnement de manière générale, qui est ERC. C'est la Mitigation Hierarchy en anglais. Donc c'est j'évite et j'évite. C'est la première chose à faire. Et ensuite, une fois que j'ai évité et j'ai réduit au maximum, Et là, il y a un bloqué sur définition. Qu'est-ce que c'est que le maximum ? À quel point est-ce que je suis prêt à renoncer à des choses ou pas ? Qu'est-ce que c'est que cet engagement ? Alors là, je peux essayer de compenser ou de contribuer positivement. La compensation, c'est un sujet qui est assez central dans notre métier parce que c'est réglementairement une des choses qui est la plus forte en France. Mais en fait, dans le monde, il y a plein de pays dans lesquels il y a un système de compensation. Les outils qu'on a, ils cherchent à faire un peu ces trois choses. Nous, on a des outils pour éviter et réduire. Je te parlais de la Leibest à l'instant. C'est un outil qui permet à un agriculteur en 30 minutes de voir comment est-ce qu'il peut changer ses pratiques et aller vers des pratiques qui sont mieux disantes en termes de biodiversité. Typiquement, on va lui demander, de 0 à 5, où est-ce que tu en es sur la question des clés ? Les haies, c'est des vrais réservoirs de biodiversité sur les bords de champs. C'est relativement simple, un peu coûteux, mais pas si coûteux d'implanter. Il y a un plan A qui a été lancé par le gouvernement qui permet de financer ça aussi. Et du coup, nous, ce qu'on fait, c'est qu'on identifie, on aide l'agriculteur à identifier ce point-là en particulier. On le fait avec d'autres points. On dit, sur les phytosanitaires, où est-ce que tu en es ? 0 à 5. Sur les prées permanentes, où est-ce que tu en es ? Et donc, lui, ça lui permet de se dire, où est-ce que j'en suis ? Et qu'est-ce que je peux faire ensuite ? Parce que, par exemple, sur les laits, Mon niveau 0, c'est « j'ai pas de haies » . Mon niveau 1, c'est « j'ai tant de mètres linéaires de haies » . Et plus j'avance dans les niveaux, plus j'ai de mètres linéaires de haies, de haies de telle taille, de telle qualité, etc. Et donc, en fait, ça crée une sorte d'itinéraire pour lui. Il peut passer d'un niveau à un autre. Et donc, on crée ce genre d'outil qui permet de simplifier aussi un petit peu la donne pour des acteurs qui n'ont pas forcément à être des experts de la biodiversité. Comme c'est super complexe, il peut y avoir... sentiment de découragement quand on se...

  • Speaker #2

    Oui, oui, je dirais.

  • Speaker #0

    Dans ce sujet, et de se dire « Ah, mais je ne comprends rien, il y a une complicité des interactions, il y a plein d'éléments à regarder, déjà j'ai du mal à nommer... » les objets de biodiversité qui sont autour de moi, ensuite agir dessus, ça devient un bigé. Nous, un des angles qu'on prend pas mal avec mes collègues, c'est de se dire, bon bah ça, cette complexité, nous on prend en charge. C'est notre boulot. Par contre, vous, dans vos métiers, vous savez ce que vous faites de vos mains, chaque jour. Et donc on va vous aider à juste changer ce geste. Donc typiquement, les agriculteurs, on regarde un peu leur pratique. On leur dit pas, ah mais change complètement ton exploitation du jour au lendemain. On leur dit, bah voilà, tu peux y aller pas à pas. en changeant telle pratique, puis telle pratique, puis telle pratique, que tu as l'habitude de faire. Et en changeant des choses que tu as l'habitude de faire, tu vas progressivement vers ta transition à l'écologique.

  • Speaker #2

    Ça, c'est plus pour l'évitement. Vous développez des outils comme ça aussi, pour ce qui est plutôt à des secteurs maritimes ?

  • Speaker #0

    Alors, sur les secteurs maritimes, on ne va pas le faire directement. Mais par contre, ce qu'on fait sur les secteurs maritimes, c'est qu'on se pose beaucoup de questions sur comment est-ce qu'on peut faire de la renaturation. dans les milieux marins. Il y a beaucoup de questions sur la renaturation de manière générale sur les milieux terrestres, biodiversité. C'est quelque chose qui a beaucoup attiré l'attention ces derniers mois, slash, années, parce qu'il y a l'émergence d'un marché sur les crédits biodiversité. Et ça, c'est quelque chose qu'on retrouve aussi sur le marin, où on se pose la question des crédits biodiversité marins, qui sont plus rares pour l'instant. Mais du coup, nous, on est en train de se poser la question de qu'est-ce que ça veut dire, renaturer un milieu marin ? comment est-ce que on applique les règles qui sont vraies pour le terrestre sur le milieu marin, ce qui est vraiment différent, parce qu'autant sur un milieu terrestre on peut avoir une parcelle un peu close, avec des échanges certes importants mais plus ou moins limités, autant un milieu marin il est hyper interdépendant, il se joue à très grande échelle et c'est difficile de juste isoler un lieu et de dire moi je vais juste agir que sur ce lieu sans prendre en compte... la dynamique générale de la mer, l'océan, la baie, la minima dans laquelle ils se trouvent. Et donc ça redessine un peu les règles et c'est un peu ces règles-là qu'on essaie de regarder.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu as des exemples à me donner peut-être de renaturation dans le milieu marin ?

  • Speaker #0

    En fait, il y en a très peu. Je pense qu'il y a beaucoup de renaturation, typiquement ce que fait corail, sur des éléments marins assez précis, genre sur une housserie poisson, sur les algues, sur les coraux. mais vraiment des approches qui sont des approches d'écosystème, je pense que c'est un peu plus rare. Et notamment, c'est un peu plus rare en France. De manière générale, il y a un léger retard, je pense, en termes économiques, sur la biodiversité marine vis-à-vis de la biodiversité terrestre. Et ça se retrouve un petit peu sur ces enjeux-là aussi. Alors que pourtant, ça offre vachement d'opportunités, notamment parce qu'il me semble, si je ne me pas de l'étise, que la biodiversité marine a des capacités de régénération qui sont assez importantes. Et du coup, il y a un côté où... Il y a aussi un autre point important du point de vue économique, c'est que le foncier marin, on n'a pas forcément besoin de l'acheter. Ça, ça change beaucoup par rapport au théâtre. Et donc, restaurer les milieux marins, ça coûte. Ça peut coûter beaucoup plus cher en termes de technique, de main d'oeuvre, parce qu'il y a besoin de plongée, parce qu'il y a besoin d'équipements lourds. Par contre, a priori, ça peut aussi ne rien coûter du point de vue du foncier. Et ça, c'est une vraie économie d'échelle. Pas d'échelle, mais une vraie économie. Et donc, il y a une vraie opportunité là-dessus. mais je crois qu'aujourd'hui elle n'est pas encore faite à l'oeuvre.

  • Speaker #2

    Oui alors ce n'est pas tellement saisi Mais c'est vrai ce que tu dis, ce qui est plutôt positif avec la biodiversité marine, c'est qu'en effet, il y a une grosse capacité de régénération. Ça fonctionne très bien quand globalement, on fout la paix à un endroit dans l'océan et dans la mer. Ça peut se régénérer très vite. Et après, ça crée du débordement parce que, comme tu dis, c'est des écosystèmes qui sont larges et ce n'est pas localisé à un endroit. Il faut prendre ça dans sa globalité. Globalement, en préservant une partie plutôt restreinte de l'océan, ça peut ensuite avoir des... Un impact qui s'étend sur des zones beaucoup plus larges. Et du coup, quand tu parles de renaturation pour les écosystèmes terrestres, tu entends quoi exactement ? Est-ce que tu as des exemples plus précis aussi là-dessus ?

  • Speaker #0

    On peut parler de deux choses différentes. On peut dire, si on parle d'action positive sur l'écosystème, on va parler de renaturation ou de restauration. Il va y avoir des écoles un peu différentes de pensée. Globalement, l'idée, c'est que je prends une parcelle, un terrain, et la plupart du temps dégradée. Et je vais essayer d'augmenter la capacité d'accueil de la biodiversité et donc d'avoir un gain positif de biodiversité. Ça, c'est une notion qui est un peu clé, le gain positif, et notamment en milieu marin, parce que c'est ce qui va permettre de prouver la valeur de l'action qui a été faite sur le terrain. C'est un peu la notion pivot. Quand on le fait avec des nature-based solutions sur des crédits carbone, C'est relativement simple, même si c'est déjà très complexe, parce qu'on pourrait garder la capacité d'absorption du carbone. Et ça, on a les moyens assez concrets de le vérifier. On va garder la capacité de stockage du carbone des sols, ou alors on va avoir des équations qui vont nous permettre de nous dire, à partir du nombre d'arbres qui ont été plantés, quel est le potentiel de captation carbone. Avec la biodiversité, ma métrique est beaucoup plus complexe, pas juste le carbone. Et donc, comment est-ce que je calcule ce gain ? Qu'est-ce que je regarde dans calculer ce gain ? La manière de faire ce gain, elle est aussi vachement importante. C'est-à-dire, tu l'as dit tout à l'heure, une bonne manière de s'occuper de l'université, c'est parfois de ne rien faire. Et donc juste de prendre un terrain, de le laisser évoluer, et de le préserver dans un certain nombre d'impact. Ça, c'est déjà ce qu'on fait de manière un peu historique, dans les parcs nationaux, dans les parcs naturels régionaux, etc. Maintenant, sur certains terrains, il y a besoin d'aller plus loin. Parce qu'ils ont subi des pollutions qui sont très importantes. Parce qu'il y a des éléments, par exemple, c'est pas mal le cas dans le nord de la France, des écosystèmes avec des terrils qui sont venus recouvrir des eaux humides, ou alors des rivières qui ont été canalisées. Et donc, en fait, même si on laisse ces écosystèmes, entre guillemets, tels quels, on les a déjà amputés d'une fonction essentielle pour eux, qui était l'éméante de la rivière, qui gêne à alimenter tout l'ensemble d'un bassin versant. en eau, en nutriments, etc. Et donc, il y a besoin de temps en temps d'avoir une intervention humaine pour redonner un élan à cet écosystème. Et donc, typiquement, une des choses pour lesquelles cette décédée de l'université est connue, c'est pour avoir créé en 2008 ce qu'on appelle un site naturel de compensation. Aujourd'hui, c'est des sites naturels de compensation, de restauration et de rematuration. Une sorte de grande basket légale dans lequel on met un peu tout ce qui... correspond à la restauration slash renaturation en France. On a créé ce site dans le sud de la France et c'était un ancien verger. Comme ça, on se dit, un verger au niveau de l'université, c'est plutôt intéressant. Il doit y avoir plein de pollinateurs, etc. Sauf que ce verger, il était sur un endroit où on a plutôt des écosystèmes stépiques. C'est en fait un endroit où les oiseaux migrateurs vont particulièrement venir pour pondre. Et un oiseau, certes, ces populations d'oiseaux ont besoin d'avoir une visibilité à 360° assez loin. pour voir les prédateurs venir. Et donc pour avoir ces zones de ponte, ils ont besoin de voir loin, donc de ne pas avoir d'arbres, donc il ne faut pas de vergeux. On a fait quelque chose de très contre-intuitif, c'est-à-dire qu'on a coupé les arbres de ces vergers pour réinstaller une plaine, en l'occurrence la plaine necro, avec des moutons, une activité pastorale, pour entretenir une zone esthétique. Et donc ça, c'est un exemple de restauration d'écosystème, à qui on a redonné une trajectoire écologique qui est celle non pas... du coup du verger, mais plutôt de l'agro-pastoralisme et de la steppe.

  • Speaker #1

    Et comment vous avez déterminé que c'était cet écosystème-là qu'il fallait remettre en place, restaurer, plutôt que garder le verger ?

  • Speaker #0

    Ça, je pense que c'est venu de deux manières. Là, je réponds un peu à la place de mes collègues qui ont fait en 2008. Moi, je n'étais pas là. Mais je pense qu'ils auraient eu tendance à se dire deux choses. Un, il y avait des espèces sensibles, particulières, à préserver dans cette zone. et donc c'est à partir de ces espaces qu'ils ont construit cette trajectoire ici. Et deux, c'est un écosystème qui fait sens par rapport à l'ensemble de la géographie. Et donc, ils sont allés reproduire quelque chose qui existait auparavant et qui existait à côté. Et donc, ils voyaient que ça fonctionnait et qu'il y avait une cohérence à faire ça.

  • Speaker #1

    Et dans ce cadre, ça c'est un exemple de ce que vous avez mis en place avec la CDC. Qui s'occupe de financer ?

  • Speaker #0

    La question du financement, c'est vraiment la question centrale.

  • Speaker #2

    Merci d'avoir écouté cet épisode de Régénération Corail jusqu'au bout. J'espère qu'il vous aura donné envie de passer à l'action et que vous en ressortez mieux équipés pour faire partie de la génération qui agit. On écrit aussi des articles sur le site internet de Corail que vous pouvez consulter gratuitement pour aller plus loin. Si cet épisode vous a plu, abonnez-vous, partagez-le autour de vous et parlez-en. N'hésitez pas à laisser des petites étoiles et commentaires sur votre plateforme d'écoute. ou à nous écrire sur contact.scora-africa.com si vous voulez faire un retour. Enfin, si vous souhaitez soutenir concrètement le podcast, vous pouvez faire un bond défiscalisé sur Eloasso. Vous trouverez tous les liens dans la description de l'épisode. Et à très vite pour le prochain !

Description

On parle souvent du climat, de l’empreinte carbone… mais la biodiversité reste, pour beaucoup, un concept flou. On sent que c’est important, vital, même, mais on peine à la définir, à la mesurer, et à comprendre concrètement ce que sa dégradation implique.

Dans cet épisode, je reçois Yves Chesnot, qui travaille à la CDC Biodiversité. Sa mission : développer des outils pour aider les collectivités, les entreprises, et autres structures à mieux prendre en compte la biodiversité dans leurs décisions.

Avec lui, on revient aux bases : qu’est-ce que la biodiversité, exactement ? En quoi les écosystèmes marins diffèrent-ils des écosystèmes terrestres ? Pourquoi est-il si complexe de mesurer notre impact sur la biodiversité, bien plus que pour le carbone ? Et quels sont les risques économiques liés à l’effondrement du vivant ?


Dans cet échange, on ne parle pas uniquement du monde marin. J’ai volontairement élargi le propos pour mieux mettre en perspective les spécificités de l’océan face aux autres écosystèmes.


Cet épisode est en deux parties. Aujourd’hui, on pose les fondations. Et dans 15 jours, vous découvrirez la suite, consacrée à une question centrale : le financement de la restauration de la biodiversité.


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Transcription

  • Speaker #0

    En fait, quand on parle de biodiversité, il y a une image que j'aime bien, c'est celle d'un avion dont on enlèverait tous les boulons un par un. On sent qu'il y a un risque, parce que moins il y a de boulons, et plus je suis proche du crash de mon avion, mais je ne sais pas à partir de quel boulon tout va s'effondrer. Et en fait, les écosystèmes fonctionnent comme ça. Ils fonctionnent de manière non linéaire. C'est-à-dire qu'on ne sait pas quel est le point de rupture.

  • Speaker #1

    On parle beaucoup du climat, de l'impact carbone. Mais la biodiversité, elle reste un concept un petit peu flou. On sent que c'est important, vital même, mais on a souvent du mal à la définir, à la mesurer et à vraiment comprendre ce que sa dégradation implique. Dans cet épisode, j'ai rencontré Yves Chenot, qui travaille à la CDC Biodiversité. Sa mission ? Créer des outils pour aider les collectivités, les entreprises ou des plus petites structures à mieux intégrer la biodiversité dans leurs décisions. Avec lui, on est revenu au fondamental. C'est quoi exactement la biodiversité ? Sa définition ? en quoi les questions liées à la préservation des écosystèmes marins diffèrent de celles liées aux écosystèmes terrestres ? Pourquoi est-ce si difficile de mesurer notre impact sur un écosystème, bien plus que pour le carbone ? Ou quels sont les risques financiers liés à l'effondrement du vivant ? On a élargi un peu le propos au-delà du monde marin, justement pour mettre en perspective les liens et les différences entre la biodiversité terrestre et marine, et donc mieux comprendre les enjeux qui sont spécifiques à l'océan. J'ai découpé notre échange en deux parties, et dans 15 jours, vous entendrez donc la suite. où on abordera la question clé du financement. Comment financer la restauration de la biodiversité ? Je vous souhaite une bonne écoute !

  • Speaker #2

    Bon,

  • Speaker #1

    les chiffres sont là. 50% des récifs coralliens ont disparu en 30 ans. Un tiers des stocks de poissons sont surexploités. Et nos océans... se réchauffent à une vitesse alarmante. Notre économie est malade en fait. Elle a oublié sa plus grande alliée, la nature. Et parmi elles, les écosystèmes marins qui nous nourrissent, nous permettent de respirer et maintiennent l'équilibre de notre planète. Ok, on fait quoi ? Par où commencer ? Comment peut-on agir concrètement ? Je m'appelle Clarisse Goubi et je vous emmène à la rencontre de celles et ceux qui proposent des solutions et tentent de réintégrer la nature dans l'équation. Ici, c'est le podcast de Régénération Corail. Et ensemble, on passe à l'action.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est un souvenir qui est assez récent parce que je suis allé très peu à l'océan quand j'étais petit, mais je me suis mis à mes voiles après le Covid. Et la première fois que j'ai fait de la voile, j'ai trouvé ça horrible parce que c'était la Bretagne en novembre. Il faisait super froid et j'avais vraiment le merde fou. Mais à la fin de la première journée, vers 18h, il y a eu un super coucher de soleil. Je suis rachepé le délénant et ça, ça m'a complètement conquis. Et du coup, j'ai un rapport un peu à mon haine avec l'océan parce que j'ai toujours le mal de mer. Mais je sais qu'à chaque fois, je vais avoir ce petit moment de bonheur une fois que c'est passé. Et c'est ce que je recherche un peu systématiquement.

  • Speaker #2

    Moi, c'était pareil. Je détestais nager quand j'étais petite et pourtant maintenant, j'adore la mer et je traite dans le secteur de la conservation marine. Est-ce que tu pourrais commencer par présenter ton parcours ?

  • Speaker #0

    Alors du coup, moi, je m'appelle Yves. Je travaille chez CDC L'université, qui est une entreprise qui est spécialisée dans l'université. Mais à la base, je ne viens pas du tout de ce monde-là. Moi, j'ai fait des études de lettres. Au début, je fais une prépa littéraire. Et après, j'ai fait des études de finance commerce et des études de géographie, et notamment pas mal de géographie quantitative. Et c'est là où je me suis posé de plus en plus de questions sur l'environnement, avec au début un prisme qui était hyper carbone. Je fais des stages qui étaient beaucoup plus climat, data, carbone. Et puis, un jour, j'ai un collègue... À une pause déjeuner qui commence après l'université, j'avais un réflexe un peu bête de dire « Ah ouais, mais ça c'est quoi ? » Enfin, c'est les abeilles, quoi. J'ai senti le regard qui me jetait que j'avais vraiment même pas du tout compris la question et le sujet. Et il a commencé à me démontrer par A plus B que ce que je venais de dire était un peu débile. Ça m'a mis la puce à l'oreille. Et quand je suis mis à chercher un travail, j'avais entendu parler de cette entreprise, je me suis commencé à me poser pas mal de questions sur l'université. Et là, j'ai découvert un champ. sur lequel je travaille depuis deux ans et demi maintenant, et qui est extrêmement riche.

  • Speaker #2

    Donc du coup, tu travailles maintenant à la CDC Biodiversité. Est-ce que tu peux m'expliquer ce que tu fais et ce que fait la CDC ?

  • Speaker #0

    Alors la CDC, elle fait plusieurs choses depuis une quinzaine d'années. La biodiversité, c'est vraiment un sujet extrêmement large, et du coup, tous les métiers qui touchent à ce sujet sont aussi très différents. Globalement, on fait deux choses. On fait de la restauration à l'écosystème. Donc ça, c'est lié à un contexte réglementaire en France qui veut que... Quand une entreprise ou un projet a un impact sur un territoire, elle doit compenser cet impact et faire de la restauration ailleurs. Ça, c'est un peu l'activité historique. Et puis autour de ça est venu se tisser tout un tas de questionnements par lesquels on a répondu en créant différents outils. Il y en a un qui est assez connu qui s'appelle WBIB et WST-SCORE qui permet de mesurer son impact sur la biodiversité. Mais on en a créé tout plein d'autres et moi, mon travail et moi, au sein de la mission économique de la biodiversité qui est financée par la Caisse des Territoires et qui a une mission d'intérêt général, qui crée des outils pour nous, mais en fait pour tous ceux qui veulent s'en emparer derrière. c'est de créer de nouveaux outils pour aborder chaque question un peu précise que vient nous poser la université. Parce qu'on ne va pas aborder le sujet de la même façon selon l'échelle. On va aborder des sujets hyper locaux. Souvent, c'est en fait par ça qu'on connaît le prix de la nouvelle université. On va avoir le sujet d'une espèce donnée à tel endroit, d'un écosystème sur lequel on va avoir un impact. Et puis on va avoir aussi des questions qui sont hyper globales de « Je suis une grosse entreprise. » j'ai une chaîne de valeur qui va de l'Asie à l'Amérique du Nord en passant par l'Afrique, l'Amérique du Sud, tous les continents je touche à 1000 écosystèmes différents je ne sais même pas qui sont mes fournisseurs, etc je ne sais même pas forcément ce qu'il y a dans la fabrication de mes outils de mon matériel mais je vais aller chercher toutes ces informations et me poser la question de tous les différents impacts que je peux avoir sur ces écosystèmes et du coup là, les deux approches sont hyper différentes et ça c'est juste un exemple parce qu'on va avoir une approche qui est sur les espèces ou qui est plutôt centré sur les écosystèmes. On peut avoir une approche qui est hyper data, ou on peut avoir une approche qui est au contraire un peu plus sensible ou un peu plus locale. On peut avoir aussi des interlocuteurs vachement différents, parce que ça va être des très gros entreprises, souvent des entreprises du luxe ou de la tech, des tout petites structures, souvent des structures de l'agriculture par exemple. Une exploitation à l'école a très peu de moyens, du coup on ne va pas du tout répondre de la même manière, avec les mêmes outils qu'une grosse entreprise. Et du coup, en fait, le but... c'est de créer des outils pour accompagner tous ces gens-là. Les collectivités aussi, qui ont beaucoup de sujets sur la biodiversité. Et donc ça, contrairement au carbone, ça demande de déployer un peu toute notre imagination pour en y répondre un peu au cas par cas aux problématiques de chacun de ces vecteurs.

  • Speaker #2

    Peut-être qu'avant de rentrer dans l'aspect plus technique, tu pourrais me donner la définition, parce qu'on n'a jamais donné de ce que c'est la biodiversité, et peut-être aussi redonner un peu le cadre mondial qui est autour des enjeux.

  • Speaker #0

    Alors la biodiversité, c'est un mot valise qui a été inventé d'une manière assez récemment, je crois. Il me semble que ça émerge vraiment dans les années 80. Et en fait, ce terme valise va réussir à fédérer les acteurs au niveau international. C'est Biological Diversity, et qui est adopté pour désigner tout ce qui va concerner le vivant, de manière générale, avec la Convention de Rio, avec le Sommet de Rio et le début des COP. en 92, et donc ça en fait un objet au contour assez flou, ce qui fait qu'on a souvent parlé de nature à la place de biodiversité. Et cet objet, la meilleure manière de le décrire, c'est de le décrire de trois manières différentes. On parle soit de biodiversité des espèces, ça c'est un peu la biodiversité que vous voyez à la télé, c'est qu'on connaît de manière un peu sensible, de manière un peu plus intime, c'est qu'on identifie plus avec les grandes espèces un peu parapluies, comme les éléphants. qui vont être fortement liées de manière symbolique à un écosystème. Et puis, il y a la biodiversité des gènes, la biodiversité génétique, qui est un gros sujet au niveau international, parce qu'on retire beaucoup d'informations des espaces naturels, notamment pour le secteur de la chimie ou de la pharmacie, et donc il y a une question de partage de cette connaissance. Et puis, la troisième échelle, ça c'est peut-être celle dont on va le plus parler, c'est l'échelle des écosystèmes. La biodiversité fonctionnelle, c'est-à-dire comment est-ce que les écosystèmes fonctionne, qu'est-ce qui fait entre guillemets leur équilibre, même si un écosystème c'est pas quelque chose de très équilibré, c'est un truc un peu chaotique. Et du coup, ça c'est un peu l'échelon sur lequel on va le plus se concentrer, les politiques publiques, parce que ça vient un peu englober les échelons inférieurs de la génétique, et l'échelon supérieur qui est l'échelon des espaces émulants.

  • Speaker #2

    On a parlé du coup des trois différents types de biodiversité. Est-ce que tu différencies la biodiversité terrestre et marine ? ou elle est inclue dans cette définition que tu donnes, comme on parle beaucoup de biodiversité marine dans le podcast ?

  • Speaker #0

    On va les traiter forcément de manière différente. De toute façon, on va toujours traiter les choses un peu au cas par cas. Toutes les connaissances vont être extrêmement non-extraites. Et on va, de fait, là, vraiment les traiter différemment. Autant on peut avoir des approches qui sont réplicables entre des écotistènes terrestres, autant la biodiversité marine, on va vite considérer de manière assez pragmatique que c'est un autre monde, parce que déjà, c'est un monde qu'on connaît. très mal. Il y a une très grande part des océans qu'on connaît mal. Vous avez dû en parler plein de fois dans le podcast, mais en fonction des différentes zones océaniques, on connaît plus ou moins bien les zones littérales, mais on ne connaît pas le reste. On connaît assez mal les espèces et puis surtout en biologie universitaire, ce qu'on constate, c'est que c'est un peu une science des interactions. Tu as tes objets, super, il y a les écosystèmes, j'ai 26 chez mon objet, j'ai mes espèces. Mais en fait, ce qui va faire l'équilibre de tout ça ou le fonctionnement de tout ça, c'est les interactions entre les espèces. Et ces interactions-là, elles sont hyper difficiles à décrire, surtout dans un milieu comme le milieu marin, où on ne peut pas en permanence avoir des systèmes d'information comme on peut avoir sur les systèmes terrestres. Donc on a moins d'infos, et ça, ça va beaucoup influer la manière dont on traite ce sujet-là.

  • Speaker #2

    Et t'en parlais tout à l'heure, juste dans la question d'avant, tous les acteurs économiques que vous accompagnez avec la CDC, ils dépendent de la biodiversité en grande partie pour leurs activités. T'as travaillé sur les risques financiers liés à la préservation de la biodiversité. Est-ce que peut-être avant de parler justement des outils que vous développez, tu pourrais revenir sur quels sont les risques, les enjeux liés à la préservation de la biodiversité ? Dans la publication que tu m'avais donnée... Tu disais que la finance et biodiversité forment un mariage nécessaire mais contrarié. Donc, j'aimerais bien que tu reviennes un peu sur les enjeux et les risques liés à la biodiversité et sa préservation.

  • Speaker #0

    Carrément. Ça, quand on dit finance et biodiversité, comme ça, le lien n'est quand même pas tout de suite évident. En fait, il s'est beaucoup renforcé ces dernières années. Avec la COP15, il y a vraiment eu un appel vers les acteurs financiers en disant « ça devient votre problème à vous aussi » , parce qu'en fait, ça devient un problème de stabilité. De stabilité de l'économie, du coup, de stabilité hyper pragmatique. de vos actifs et de ce que vous avez dans vos portefeuilles. Et donc, si vous voulez avoir des actifs qui tiennent la route, qui sont encore à l'air de main, vous avez besoin d'une biodiversité fonctionnelle. Et du coup, on est allé essayer de chercher ces acteurs-là sur cet argumentaire, et notamment sur cet argumentaire du risque. Parce qu'en fait, les acteurs financiers, sur les questions d'environnement, on va souvent les chercher sur la question de l'information. Et souvent, c'est de l'information additionnelle. C'est un peu ce qu'on fait dans le secteur de l'ESG. Je viens ajouter des informations financières, des informations sur le taux de carbone, sur, en biodiversité, les écosystèmes impactés, sur les matériaux utilisés, les différents types de pollution qui peuvent avoir lieu à la suite de telle ou telle activité. Mais ça, c'est pas forcément très naturel pour le secteur financier d'y fournir ces informations, d'aller les chercher en plus de son activité. Alors que la question du risque, elle est déjà au cœur de ce qu'il fait. Et donc du coup, c'est un bon proxy pour venir poser des questions de biodiversité. au cœur de ce monde financier. C'est un peu une sorte de cheval de Troyes pour nous, pour venir parler d'écosystème et de stabilité d'écosystème. Il y a des acteurs financiers qui sont plus ou moins réceptifs à ces discours, et typiquement, les assurances, ça les intéresse vachement. Parce qu'on en a beaucoup eu sur le retrait et le gonflement des argiles, avec tout ce qui est à l'assurance habitation. Ça a eu un impact très fort sur le bilan de certaines assurances, et la même chose... avec les feux de forêt en Californie. Je crois que c'est State Farm, qui est une des plus grosses assurances californiennes, qui a retiré ses contrats d'assurance de certaines zones qui étaient trop proches des forêts de la Sierra qui brûlent régulièrement. Et donc là, on a une porte d'entrée très directe pour eux. La chose qui n'est pas évidente, c'est que ça reste quand même deux mondes qui sont hyper opposés. Quand on parle d'actifs financiers, en général, on a des métriques qui sont hyper connues. On mesure... En dollars, on mesure en habitants, on mesure sur des temps aussi qui sont assez courts. On a des historiques de données qui sont hyper forts. Tout ça, on n'a pas du tout avec la biodiversité. C'est vraiment un objet qui est... Enfin, des objets qui sont tellement différents qu'on a du mal à les réduire à des quantités d'informations qui sont bien manipulables par des acteurs financiers. Et en fait, même faire ça, dire un peu mainstreamer la biodiversité pour des acteurs financiers, ça peut nous induire en erreur dans ce qu'on cherche à faire. Parce que du coup, on va venir... écraser une complexité qui est nécessaire pour comprendre le problème et pour agir. Et donc, il y a une sorte de marge de raison, mais un peu contrariée, parce qu'à la fois on a besoin de ces acteurs financiers, et en même temps, on doit faire attention à la manière dont on leur parle, et à ne pas non plus trop vouloir épouser des codes, qui sont les codes de la finance, notamment en ce qui concerne l'information, et qui pourraient venir dénaturer la nature de cette information, et du coup la capacité à réveiller les actions de vie. Ici, on le voit beaucoup sur les risques.

  • Speaker #2

    J'ai l'impression qu'on parle plus de carbone facilement, d'impact carbone, mais de la biodiversité beaucoup moins. Est-ce que tu pourrais revenir sur les risques ? Est-ce que vous avez identifié des risques ? Est-ce qu'il y en a des concrets dont tu pourrais parler ?

  • Speaker #0

    La question du risque est intéressante parce qu'un peu comme sur le carbone, il y a quelque chose de relativement invisible sur le risque. En fait, quand on parle de biodiversité, il y a une image que j'aime bien, c'est celle d'un avion dont on enlèverait tous les boulons un par un. On sent qu'il y a un risque parce que, eh oui, moins il y a de boulons et plus je suis proche du crash de mon avion, mais je ne sais pas à partir de quel boulon tout va s'effondrer. Et en fait, les écosystèmes fonctionnent comme ça. Ils fonctionnent de manière non linéaire. C'est-à-dire qu'on ne sait pas quel est le point de rupture. On sait que plus on applique de pression sur ces écosystèmes, plus ils ont de chances à un moment de rompre, de plus être en capacité de s'autoréguler, enfin, ils se rétouraient l'une par l'autre, de fournir en tout cas les services écosystémiques qu'ils nous fournissent, c'est-à-dire de fournir de l'eau potable, de fournir des sols qui sont capables de supporter une agriculture à peu près fonctionnelle. Mais on ne sait pas où est le point de rupture. Et donc du coup, c'est un peu différent, là où il y a une grosse différence avec le carbone. Le carbone, on a des scénarios. On sait, même si on veut les revoir en ce moment, qu'il y a des points de rupture précis, à partir de, on a juste un EV, le EV, et qu'il faut suivre ces scénarios si on ne veut pas passer ces points de rupture. Avec les écosystèmes, c'est beaucoup plus difficile à identifier, et du coup, on avance vraiment à tâton. Et donc, on a du mal, et on peut reprendre le cas de la biodiversité marine, mais on est vraiment dans du pouls de sonde vis-à-vis du vivant. qui vont nous informer sur les effondrements à venir. Il y a un effondrement qui est un peu symptomatique, c'est la morue à Terre-Neuve. Entre les années 60 et 80, les pêcheries de Terre-Neuve se sont mises à surpêcher la morue et ont épuisé les stocks en suivant des informations un peu contradictoires sur ces stocks. Et plutôt prendre des hypothèses un peu conservatrices, de se dire, même si j'ai des informations différentes sur ces stocks, même si c'est difficile de les évaluer, il vaut mieux que je prenne mon information la moins disante. Parce que je ne sais pas où est le point de rupture pour ces populations que nous avons eues, du moment où d'un coup, d'une année sur l'autre, j'aurais tellement empêché que je n'en aurais plus, mais de manière drastique. Je m'aurais 10 fois moins que l'année dernière. Et en fait, à force de venir tester ce point de rupture, ils ont fini entre guillemets par le trouver, et les pêcheries de Terre-Neuve ont dû fermer. Alors qu'on a le même exemple de l'autre côté de l'Atlantique. En Norvège et en Lusie-Ferroé, on n'est pas allé jusqu'à ce point de rupture en prenant des informations plus conservatrices. Et donc ça, la question du risque, en biodiversité, on essaie de la fêter avec le peu d'informations qu'on a. Et donc en essayant de prendre les quelques coups de son disponibles, on essaie de bâtir des hypothèses un peu structurelles, un peu conservatrices, pour éviter d'aller trop loin.

  • Speaker #2

    Puisque j'imagine qu'il est complexe par rapport au carbone, c'est que c'est aussi assez localisé. Ça dépend de où est-ce qu'on se situe dans le monde, de quel écosystème on parle. C'est vrai que dans le cas de la pêche, j'imagine que c'est assez évident, parce que si on épuise, dans le secteur de la pêche, on épuise des ressources en poisson, il n'y aura plus de poisson, donc du coup, c'est assez clair le risque qu'il y a pour ce secteur-là. Est-ce que dans le cas de la biodiversité marine, il y a des secteurs qui ont été identifiés particulièrement, qui sont à risque plus que d'autres, plus dépendants ? Je ne sais pas si c'est quelque chose sur lequel vous avez pu travailler ou pas.

  • Speaker #0

    L'univers c'est marine, on est vraiment en début de vue. Du coup, on a développé un outil qui s'appelle le Global Biodiversity Score et qui peut être vachement utile pour calculer les risques auxquels est exposé un ordinateur financier. Et ça, ça fonctionne vachement bien sur les écosystèmes terrestres parce qu'on a des grosses bases de données dessus. Et là, aujourd'hui, on n'a pas encore développé l'équivalent pour la biodiversité marine. On est en train de le faire avec un consortium d'acteurs. Mais c'est vraiment, pour l'instant, à l'état de la recherche. et du développement vraiment chez nous, mais même chez les autres. Et il y a encore un manque de données un peu construites et globalisées, en tout cas de traitement de ces données par les acteurs économiques, sur ces questions de l'université marine. Ça marche pour le terrestre et pas encore tout à fait pour l'humain. Mais ça devrait être là dans des mois, années, années.

  • Speaker #2

    On espère, ça sera super. Est-ce que tu peux nous expliquer un peu plus, du coup, ce que c'est ce Global Biodiversity Score et comment est-ce que vous mesurez le pouls-impact des secteurs ? des acteurs économiques, j'imagine, sur la biodiversité ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis spécialiste de cet outil, qui est vraiment des voeux d'aide à plus d'une trentaine de collègues ici à Célice Biodiversité. C'est un outil qui est en open access et dont le but est de trouver autour d'une métrique synthétique, mais pas unique, une manière de calculer les impacts d'une organisation. C'est-à-dire qu'on va prendre les cinq grands facteurs de pression sur la biodiversité, donc le changement d'usage des sols, la surexploitation des ressources, le changement climatique, les espèces exotiques envahissantes, la pollution chimique, la lumineuse, etc. Donc on prend ces cinq grands facteurs et on va essayer de voir qu'est-ce qui, dans l'activité d'une organisation, impacte la biodiversité. Et du coup, on prend une métrique synthétique qui s'appelle le MSA km², qui est construite à partir de grandes bases de données sur l'ensemble des impacts qu'on a sur les écosystèmes dans le monde, qui vient nous dire, par exemple, le coton. Le coton utilise beaucoup d'eau, beaucoup de terres arables, et donc va avoir un impact général sur la biodiversité assez fort, parce qu'il y a une conversion d'espaces naturels en champs, par exemple. Et donc on va réussir à quantifier ça dans les grandes masses. et à dire à un acteur qui fabrique des t-shirts, de dire, ton empreinte de l'université, elle est à tant de pourcents due au coton, et elle représente l'équivalent de tant de kilomètres carrés de forêts vierges rasées. Et donc ça va lui donner un nombre de grandeur, et ça va faire comme une sorte de bilan carbone, et on pourra se dire, comment je vais lui ça ? Je suis à tant aujourd'hui, comment est-ce que je passe de 2 à 1 ? Et ça, ça permet de construire des trajectoires sur des grandes organisations.

  • Speaker #2

    Et est-ce qu'il y a des activités ou des secteurs qui ont plus d'impact sur la biodiversité que d'autres ?

  • Speaker #0

    Oui, il y a vraiment des secteurs qui sont identifiés comme des secteurs clés. Un de ces premiers secteurs, c'est l'agriculture, qui a vraiment un rôle pivot, parce qu'en plus, c'est un secteur qui a un gros potentiel de transition. Ça, on a développé, moi je suis responsable d'un outil qui s'appelle Agribest, qui aide les agriculteurs à... à changer leurs pratiques, comme pour avoir parlé. Il y a un autre secteur qui est la chimie, qui est vachement identifié là-dessus, parce que pareil, les pollutions chimiques, là on est vraiment aussi dans le flou de ce qu'on sait et de ce qu'on ne sait pas. On sait que globalement, il y a de la pollution chimique absolument partout maintenant, même au fin fond de l'Ouanda. On retrouve dans les lignes des chimpanzés jusqu'à 30 composants chimiques à l'intérieur des lignes. Très vache ! Donc il y a vraiment quelque chose d'incontrôlé qui vient... qui vient former des cocktails chimiques, on a un peu du mal à identifier. Et donc ça, c'est un vrai angle mort pour l'instant et qui est vraiment difficile à explorer. Et puis, il y a un troisième secteur, c'est celui de l'immobilier, qui a vraiment du foncier de manière générale et qui, là, est vraiment sur la question d'usage des terres. Une autre chose que je fais avec mon équipe, c'est une expérimentation avec l'ADEME sur l'objectif de zéro artificialisation nette. Les communes en France vont devoir stopper l'artificialisation. progressivement d'ici 2050. Et nous, on aide 22 territoires lauréats à trouver des outils pour « décroître » ou réduire fortement leur consommation de foncier.

  • Speaker #2

    Globalement, une fois que ces acteurs économiques, ces secteurs-là, ont pu identifier leur impact, qu'est-ce qu'ils peuvent faire ? Dans le cadre de la CDC Biodiversité et de ton travail, comment est-ce que vous pouvez les aider, déjà dans un premier temps, à réduire leur impact et quels sont les leviers qu'ils peuvent utiliser ?

  • Speaker #0

    Il y a un peu une recette magique en biodiversité, mais en environnement de manière générale, qui est ERC. C'est la Mitigation Hierarchy en anglais. Donc c'est j'évite et j'évite. C'est la première chose à faire. Et ensuite, une fois que j'ai évité et j'ai réduit au maximum, Et là, il y a un bloqué sur définition. Qu'est-ce que c'est que le maximum ? À quel point est-ce que je suis prêt à renoncer à des choses ou pas ? Qu'est-ce que c'est que cet engagement ? Alors là, je peux essayer de compenser ou de contribuer positivement. La compensation, c'est un sujet qui est assez central dans notre métier parce que c'est réglementairement une des choses qui est la plus forte en France. Mais en fait, dans le monde, il y a plein de pays dans lesquels il y a un système de compensation. Les outils qu'on a, ils cherchent à faire un peu ces trois choses. Nous, on a des outils pour éviter et réduire. Je te parlais de la Leibest à l'instant. C'est un outil qui permet à un agriculteur en 30 minutes de voir comment est-ce qu'il peut changer ses pratiques et aller vers des pratiques qui sont mieux disantes en termes de biodiversité. Typiquement, on va lui demander, de 0 à 5, où est-ce que tu en es sur la question des clés ? Les haies, c'est des vrais réservoirs de biodiversité sur les bords de champs. C'est relativement simple, un peu coûteux, mais pas si coûteux d'implanter. Il y a un plan A qui a été lancé par le gouvernement qui permet de financer ça aussi. Et du coup, nous, ce qu'on fait, c'est qu'on identifie, on aide l'agriculteur à identifier ce point-là en particulier. On le fait avec d'autres points. On dit, sur les phytosanitaires, où est-ce que tu en es ? 0 à 5. Sur les prées permanentes, où est-ce que tu en es ? Et donc, lui, ça lui permet de se dire, où est-ce que j'en suis ? Et qu'est-ce que je peux faire ensuite ? Parce que, par exemple, sur les laits, Mon niveau 0, c'est « j'ai pas de haies » . Mon niveau 1, c'est « j'ai tant de mètres linéaires de haies » . Et plus j'avance dans les niveaux, plus j'ai de mètres linéaires de haies, de haies de telle taille, de telle qualité, etc. Et donc, en fait, ça crée une sorte d'itinéraire pour lui. Il peut passer d'un niveau à un autre. Et donc, on crée ce genre d'outil qui permet de simplifier aussi un petit peu la donne pour des acteurs qui n'ont pas forcément à être des experts de la biodiversité. Comme c'est super complexe, il peut y avoir... sentiment de découragement quand on se...

  • Speaker #2

    Oui, oui, je dirais.

  • Speaker #0

    Dans ce sujet, et de se dire « Ah, mais je ne comprends rien, il y a une complicité des interactions, il y a plein d'éléments à regarder, déjà j'ai du mal à nommer... » les objets de biodiversité qui sont autour de moi, ensuite agir dessus, ça devient un bigé. Nous, un des angles qu'on prend pas mal avec mes collègues, c'est de se dire, bon bah ça, cette complexité, nous on prend en charge. C'est notre boulot. Par contre, vous, dans vos métiers, vous savez ce que vous faites de vos mains, chaque jour. Et donc on va vous aider à juste changer ce geste. Donc typiquement, les agriculteurs, on regarde un peu leur pratique. On leur dit pas, ah mais change complètement ton exploitation du jour au lendemain. On leur dit, bah voilà, tu peux y aller pas à pas. en changeant telle pratique, puis telle pratique, puis telle pratique, que tu as l'habitude de faire. Et en changeant des choses que tu as l'habitude de faire, tu vas progressivement vers ta transition à l'écologique.

  • Speaker #2

    Ça, c'est plus pour l'évitement. Vous développez des outils comme ça aussi, pour ce qui est plutôt à des secteurs maritimes ?

  • Speaker #0

    Alors, sur les secteurs maritimes, on ne va pas le faire directement. Mais par contre, ce qu'on fait sur les secteurs maritimes, c'est qu'on se pose beaucoup de questions sur comment est-ce qu'on peut faire de la renaturation. dans les milieux marins. Il y a beaucoup de questions sur la renaturation de manière générale sur les milieux terrestres, biodiversité. C'est quelque chose qui a beaucoup attiré l'attention ces derniers mois, slash, années, parce qu'il y a l'émergence d'un marché sur les crédits biodiversité. Et ça, c'est quelque chose qu'on retrouve aussi sur le marin, où on se pose la question des crédits biodiversité marins, qui sont plus rares pour l'instant. Mais du coup, nous, on est en train de se poser la question de qu'est-ce que ça veut dire, renaturer un milieu marin ? comment est-ce que on applique les règles qui sont vraies pour le terrestre sur le milieu marin, ce qui est vraiment différent, parce qu'autant sur un milieu terrestre on peut avoir une parcelle un peu close, avec des échanges certes importants mais plus ou moins limités, autant un milieu marin il est hyper interdépendant, il se joue à très grande échelle et c'est difficile de juste isoler un lieu et de dire moi je vais juste agir que sur ce lieu sans prendre en compte... la dynamique générale de la mer, l'océan, la baie, la minima dans laquelle ils se trouvent. Et donc ça redessine un peu les règles et c'est un peu ces règles-là qu'on essaie de regarder.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu as des exemples à me donner peut-être de renaturation dans le milieu marin ?

  • Speaker #0

    En fait, il y en a très peu. Je pense qu'il y a beaucoup de renaturation, typiquement ce que fait corail, sur des éléments marins assez précis, genre sur une housserie poisson, sur les algues, sur les coraux. mais vraiment des approches qui sont des approches d'écosystème, je pense que c'est un peu plus rare. Et notamment, c'est un peu plus rare en France. De manière générale, il y a un léger retard, je pense, en termes économiques, sur la biodiversité marine vis-à-vis de la biodiversité terrestre. Et ça se retrouve un petit peu sur ces enjeux-là aussi. Alors que pourtant, ça offre vachement d'opportunités, notamment parce qu'il me semble, si je ne me pas de l'étise, que la biodiversité marine a des capacités de régénération qui sont assez importantes. Et du coup, il y a un côté où... Il y a aussi un autre point important du point de vue économique, c'est que le foncier marin, on n'a pas forcément besoin de l'acheter. Ça, ça change beaucoup par rapport au théâtre. Et donc, restaurer les milieux marins, ça coûte. Ça peut coûter beaucoup plus cher en termes de technique, de main d'oeuvre, parce qu'il y a besoin de plongée, parce qu'il y a besoin d'équipements lourds. Par contre, a priori, ça peut aussi ne rien coûter du point de vue du foncier. Et ça, c'est une vraie économie d'échelle. Pas d'échelle, mais une vraie économie. Et donc, il y a une vraie opportunité là-dessus. mais je crois qu'aujourd'hui elle n'est pas encore faite à l'oeuvre.

  • Speaker #2

    Oui alors ce n'est pas tellement saisi Mais c'est vrai ce que tu dis, ce qui est plutôt positif avec la biodiversité marine, c'est qu'en effet, il y a une grosse capacité de régénération. Ça fonctionne très bien quand globalement, on fout la paix à un endroit dans l'océan et dans la mer. Ça peut se régénérer très vite. Et après, ça crée du débordement parce que, comme tu dis, c'est des écosystèmes qui sont larges et ce n'est pas localisé à un endroit. Il faut prendre ça dans sa globalité. Globalement, en préservant une partie plutôt restreinte de l'océan, ça peut ensuite avoir des... Un impact qui s'étend sur des zones beaucoup plus larges. Et du coup, quand tu parles de renaturation pour les écosystèmes terrestres, tu entends quoi exactement ? Est-ce que tu as des exemples plus précis aussi là-dessus ?

  • Speaker #0

    On peut parler de deux choses différentes. On peut dire, si on parle d'action positive sur l'écosystème, on va parler de renaturation ou de restauration. Il va y avoir des écoles un peu différentes de pensée. Globalement, l'idée, c'est que je prends une parcelle, un terrain, et la plupart du temps dégradée. Et je vais essayer d'augmenter la capacité d'accueil de la biodiversité et donc d'avoir un gain positif de biodiversité. Ça, c'est une notion qui est un peu clé, le gain positif, et notamment en milieu marin, parce que c'est ce qui va permettre de prouver la valeur de l'action qui a été faite sur le terrain. C'est un peu la notion pivot. Quand on le fait avec des nature-based solutions sur des crédits carbone, C'est relativement simple, même si c'est déjà très complexe, parce qu'on pourrait garder la capacité d'absorption du carbone. Et ça, on a les moyens assez concrets de le vérifier. On va garder la capacité de stockage du carbone des sols, ou alors on va avoir des équations qui vont nous permettre de nous dire, à partir du nombre d'arbres qui ont été plantés, quel est le potentiel de captation carbone. Avec la biodiversité, ma métrique est beaucoup plus complexe, pas juste le carbone. Et donc, comment est-ce que je calcule ce gain ? Qu'est-ce que je regarde dans calculer ce gain ? La manière de faire ce gain, elle est aussi vachement importante. C'est-à-dire, tu l'as dit tout à l'heure, une bonne manière de s'occuper de l'université, c'est parfois de ne rien faire. Et donc juste de prendre un terrain, de le laisser évoluer, et de le préserver dans un certain nombre d'impact. Ça, c'est déjà ce qu'on fait de manière un peu historique, dans les parcs nationaux, dans les parcs naturels régionaux, etc. Maintenant, sur certains terrains, il y a besoin d'aller plus loin. Parce qu'ils ont subi des pollutions qui sont très importantes. Parce qu'il y a des éléments, par exemple, c'est pas mal le cas dans le nord de la France, des écosystèmes avec des terrils qui sont venus recouvrir des eaux humides, ou alors des rivières qui ont été canalisées. Et donc, en fait, même si on laisse ces écosystèmes, entre guillemets, tels quels, on les a déjà amputés d'une fonction essentielle pour eux, qui était l'éméante de la rivière, qui gêne à alimenter tout l'ensemble d'un bassin versant. en eau, en nutriments, etc. Et donc, il y a besoin de temps en temps d'avoir une intervention humaine pour redonner un élan à cet écosystème. Et donc, typiquement, une des choses pour lesquelles cette décédée de l'université est connue, c'est pour avoir créé en 2008 ce qu'on appelle un site naturel de compensation. Aujourd'hui, c'est des sites naturels de compensation, de restauration et de rematuration. Une sorte de grande basket légale dans lequel on met un peu tout ce qui... correspond à la restauration slash renaturation en France. On a créé ce site dans le sud de la France et c'était un ancien verger. Comme ça, on se dit, un verger au niveau de l'université, c'est plutôt intéressant. Il doit y avoir plein de pollinateurs, etc. Sauf que ce verger, il était sur un endroit où on a plutôt des écosystèmes stépiques. C'est en fait un endroit où les oiseaux migrateurs vont particulièrement venir pour pondre. Et un oiseau, certes, ces populations d'oiseaux ont besoin d'avoir une visibilité à 360° assez loin. pour voir les prédateurs venir. Et donc pour avoir ces zones de ponte, ils ont besoin de voir loin, donc de ne pas avoir d'arbres, donc il ne faut pas de vergeux. On a fait quelque chose de très contre-intuitif, c'est-à-dire qu'on a coupé les arbres de ces vergers pour réinstaller une plaine, en l'occurrence la plaine necro, avec des moutons, une activité pastorale, pour entretenir une zone esthétique. Et donc ça, c'est un exemple de restauration d'écosystème, à qui on a redonné une trajectoire écologique qui est celle non pas... du coup du verger, mais plutôt de l'agro-pastoralisme et de la steppe.

  • Speaker #1

    Et comment vous avez déterminé que c'était cet écosystème-là qu'il fallait remettre en place, restaurer, plutôt que garder le verger ?

  • Speaker #0

    Ça, je pense que c'est venu de deux manières. Là, je réponds un peu à la place de mes collègues qui ont fait en 2008. Moi, je n'étais pas là. Mais je pense qu'ils auraient eu tendance à se dire deux choses. Un, il y avait des espèces sensibles, particulières, à préserver dans cette zone. et donc c'est à partir de ces espaces qu'ils ont construit cette trajectoire ici. Et deux, c'est un écosystème qui fait sens par rapport à l'ensemble de la géographie. Et donc, ils sont allés reproduire quelque chose qui existait auparavant et qui existait à côté. Et donc, ils voyaient que ça fonctionnait et qu'il y avait une cohérence à faire ça.

  • Speaker #1

    Et dans ce cadre, ça c'est un exemple de ce que vous avez mis en place avec la CDC. Qui s'occupe de financer ?

  • Speaker #0

    La question du financement, c'est vraiment la question centrale.

  • Speaker #2

    Merci d'avoir écouté cet épisode de Régénération Corail jusqu'au bout. J'espère qu'il vous aura donné envie de passer à l'action et que vous en ressortez mieux équipés pour faire partie de la génération qui agit. On écrit aussi des articles sur le site internet de Corail que vous pouvez consulter gratuitement pour aller plus loin. Si cet épisode vous a plu, abonnez-vous, partagez-le autour de vous et parlez-en. N'hésitez pas à laisser des petites étoiles et commentaires sur votre plateforme d'écoute. ou à nous écrire sur contact.scora-africa.com si vous voulez faire un retour. Enfin, si vous souhaitez soutenir concrètement le podcast, vous pouvez faire un bond défiscalisé sur Eloasso. Vous trouverez tous les liens dans la description de l'épisode. Et à très vite pour le prochain !

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Description

On parle souvent du climat, de l’empreinte carbone… mais la biodiversité reste, pour beaucoup, un concept flou. On sent que c’est important, vital, même, mais on peine à la définir, à la mesurer, et à comprendre concrètement ce que sa dégradation implique.

Dans cet épisode, je reçois Yves Chesnot, qui travaille à la CDC Biodiversité. Sa mission : développer des outils pour aider les collectivités, les entreprises, et autres structures à mieux prendre en compte la biodiversité dans leurs décisions.

Avec lui, on revient aux bases : qu’est-ce que la biodiversité, exactement ? En quoi les écosystèmes marins diffèrent-ils des écosystèmes terrestres ? Pourquoi est-il si complexe de mesurer notre impact sur la biodiversité, bien plus que pour le carbone ? Et quels sont les risques économiques liés à l’effondrement du vivant ?


Dans cet échange, on ne parle pas uniquement du monde marin. J’ai volontairement élargi le propos pour mieux mettre en perspective les spécificités de l’océan face aux autres écosystèmes.


Cet épisode est en deux parties. Aujourd’hui, on pose les fondations. Et dans 15 jours, vous découvrirez la suite, consacrée à une question centrale : le financement de la restauration de la biodiversité.


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📖 Pour aller plus loin : retrouvez nos articles et ressources sur notre blog : https://korai-africa.com/fr/lire/


Vous pouvez aussi me faire part de vos commentaires, retours ou idées de sujet en m'écrivant par mail : clarisse.gouby@korai-africa.com


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    En fait, quand on parle de biodiversité, il y a une image que j'aime bien, c'est celle d'un avion dont on enlèverait tous les boulons un par un. On sent qu'il y a un risque, parce que moins il y a de boulons, et plus je suis proche du crash de mon avion, mais je ne sais pas à partir de quel boulon tout va s'effondrer. Et en fait, les écosystèmes fonctionnent comme ça. Ils fonctionnent de manière non linéaire. C'est-à-dire qu'on ne sait pas quel est le point de rupture.

  • Speaker #1

    On parle beaucoup du climat, de l'impact carbone. Mais la biodiversité, elle reste un concept un petit peu flou. On sent que c'est important, vital même, mais on a souvent du mal à la définir, à la mesurer et à vraiment comprendre ce que sa dégradation implique. Dans cet épisode, j'ai rencontré Yves Chenot, qui travaille à la CDC Biodiversité. Sa mission ? Créer des outils pour aider les collectivités, les entreprises ou des plus petites structures à mieux intégrer la biodiversité dans leurs décisions. Avec lui, on est revenu au fondamental. C'est quoi exactement la biodiversité ? Sa définition ? en quoi les questions liées à la préservation des écosystèmes marins diffèrent de celles liées aux écosystèmes terrestres ? Pourquoi est-ce si difficile de mesurer notre impact sur un écosystème, bien plus que pour le carbone ? Ou quels sont les risques financiers liés à l'effondrement du vivant ? On a élargi un peu le propos au-delà du monde marin, justement pour mettre en perspective les liens et les différences entre la biodiversité terrestre et marine, et donc mieux comprendre les enjeux qui sont spécifiques à l'océan. J'ai découpé notre échange en deux parties, et dans 15 jours, vous entendrez donc la suite. où on abordera la question clé du financement. Comment financer la restauration de la biodiversité ? Je vous souhaite une bonne écoute !

  • Speaker #2

    Bon,

  • Speaker #1

    les chiffres sont là. 50% des récifs coralliens ont disparu en 30 ans. Un tiers des stocks de poissons sont surexploités. Et nos océans... se réchauffent à une vitesse alarmante. Notre économie est malade en fait. Elle a oublié sa plus grande alliée, la nature. Et parmi elles, les écosystèmes marins qui nous nourrissent, nous permettent de respirer et maintiennent l'équilibre de notre planète. Ok, on fait quoi ? Par où commencer ? Comment peut-on agir concrètement ? Je m'appelle Clarisse Goubi et je vous emmène à la rencontre de celles et ceux qui proposent des solutions et tentent de réintégrer la nature dans l'équation. Ici, c'est le podcast de Régénération Corail. Et ensemble, on passe à l'action.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est un souvenir qui est assez récent parce que je suis allé très peu à l'océan quand j'étais petit, mais je me suis mis à mes voiles après le Covid. Et la première fois que j'ai fait de la voile, j'ai trouvé ça horrible parce que c'était la Bretagne en novembre. Il faisait super froid et j'avais vraiment le merde fou. Mais à la fin de la première journée, vers 18h, il y a eu un super coucher de soleil. Je suis rachepé le délénant et ça, ça m'a complètement conquis. Et du coup, j'ai un rapport un peu à mon haine avec l'océan parce que j'ai toujours le mal de mer. Mais je sais qu'à chaque fois, je vais avoir ce petit moment de bonheur une fois que c'est passé. Et c'est ce que je recherche un peu systématiquement.

  • Speaker #2

    Moi, c'était pareil. Je détestais nager quand j'étais petite et pourtant maintenant, j'adore la mer et je traite dans le secteur de la conservation marine. Est-ce que tu pourrais commencer par présenter ton parcours ?

  • Speaker #0

    Alors du coup, moi, je m'appelle Yves. Je travaille chez CDC L'université, qui est une entreprise qui est spécialisée dans l'université. Mais à la base, je ne viens pas du tout de ce monde-là. Moi, j'ai fait des études de lettres. Au début, je fais une prépa littéraire. Et après, j'ai fait des études de finance commerce et des études de géographie, et notamment pas mal de géographie quantitative. Et c'est là où je me suis posé de plus en plus de questions sur l'environnement, avec au début un prisme qui était hyper carbone. Je fais des stages qui étaient beaucoup plus climat, data, carbone. Et puis, un jour, j'ai un collègue... À une pause déjeuner qui commence après l'université, j'avais un réflexe un peu bête de dire « Ah ouais, mais ça c'est quoi ? » Enfin, c'est les abeilles, quoi. J'ai senti le regard qui me jetait que j'avais vraiment même pas du tout compris la question et le sujet. Et il a commencé à me démontrer par A plus B que ce que je venais de dire était un peu débile. Ça m'a mis la puce à l'oreille. Et quand je suis mis à chercher un travail, j'avais entendu parler de cette entreprise, je me suis commencé à me poser pas mal de questions sur l'université. Et là, j'ai découvert un champ. sur lequel je travaille depuis deux ans et demi maintenant, et qui est extrêmement riche.

  • Speaker #2

    Donc du coup, tu travailles maintenant à la CDC Biodiversité. Est-ce que tu peux m'expliquer ce que tu fais et ce que fait la CDC ?

  • Speaker #0

    Alors la CDC, elle fait plusieurs choses depuis une quinzaine d'années. La biodiversité, c'est vraiment un sujet extrêmement large, et du coup, tous les métiers qui touchent à ce sujet sont aussi très différents. Globalement, on fait deux choses. On fait de la restauration à l'écosystème. Donc ça, c'est lié à un contexte réglementaire en France qui veut que... Quand une entreprise ou un projet a un impact sur un territoire, elle doit compenser cet impact et faire de la restauration ailleurs. Ça, c'est un peu l'activité historique. Et puis autour de ça est venu se tisser tout un tas de questionnements par lesquels on a répondu en créant différents outils. Il y en a un qui est assez connu qui s'appelle WBIB et WST-SCORE qui permet de mesurer son impact sur la biodiversité. Mais on en a créé tout plein d'autres et moi, mon travail et moi, au sein de la mission économique de la biodiversité qui est financée par la Caisse des Territoires et qui a une mission d'intérêt général, qui crée des outils pour nous, mais en fait pour tous ceux qui veulent s'en emparer derrière. c'est de créer de nouveaux outils pour aborder chaque question un peu précise que vient nous poser la université. Parce qu'on ne va pas aborder le sujet de la même façon selon l'échelle. On va aborder des sujets hyper locaux. Souvent, c'est en fait par ça qu'on connaît le prix de la nouvelle université. On va avoir le sujet d'une espèce donnée à tel endroit, d'un écosystème sur lequel on va avoir un impact. Et puis on va avoir aussi des questions qui sont hyper globales de « Je suis une grosse entreprise. » j'ai une chaîne de valeur qui va de l'Asie à l'Amérique du Nord en passant par l'Afrique, l'Amérique du Sud, tous les continents je touche à 1000 écosystèmes différents je ne sais même pas qui sont mes fournisseurs, etc je ne sais même pas forcément ce qu'il y a dans la fabrication de mes outils de mon matériel mais je vais aller chercher toutes ces informations et me poser la question de tous les différents impacts que je peux avoir sur ces écosystèmes et du coup là, les deux approches sont hyper différentes et ça c'est juste un exemple parce qu'on va avoir une approche qui est sur les espèces ou qui est plutôt centré sur les écosystèmes. On peut avoir une approche qui est hyper data, ou on peut avoir une approche qui est au contraire un peu plus sensible ou un peu plus locale. On peut avoir aussi des interlocuteurs vachement différents, parce que ça va être des très gros entreprises, souvent des entreprises du luxe ou de la tech, des tout petites structures, souvent des structures de l'agriculture par exemple. Une exploitation à l'école a très peu de moyens, du coup on ne va pas du tout répondre de la même manière, avec les mêmes outils qu'une grosse entreprise. Et du coup, en fait, le but... c'est de créer des outils pour accompagner tous ces gens-là. Les collectivités aussi, qui ont beaucoup de sujets sur la biodiversité. Et donc ça, contrairement au carbone, ça demande de déployer un peu toute notre imagination pour en y répondre un peu au cas par cas aux problématiques de chacun de ces vecteurs.

  • Speaker #2

    Peut-être qu'avant de rentrer dans l'aspect plus technique, tu pourrais me donner la définition, parce qu'on n'a jamais donné de ce que c'est la biodiversité, et peut-être aussi redonner un peu le cadre mondial qui est autour des enjeux.

  • Speaker #0

    Alors la biodiversité, c'est un mot valise qui a été inventé d'une manière assez récemment, je crois. Il me semble que ça émerge vraiment dans les années 80. Et en fait, ce terme valise va réussir à fédérer les acteurs au niveau international. C'est Biological Diversity, et qui est adopté pour désigner tout ce qui va concerner le vivant, de manière générale, avec la Convention de Rio, avec le Sommet de Rio et le début des COP. en 92, et donc ça en fait un objet au contour assez flou, ce qui fait qu'on a souvent parlé de nature à la place de biodiversité. Et cet objet, la meilleure manière de le décrire, c'est de le décrire de trois manières différentes. On parle soit de biodiversité des espèces, ça c'est un peu la biodiversité que vous voyez à la télé, c'est qu'on connaît de manière un peu sensible, de manière un peu plus intime, c'est qu'on identifie plus avec les grandes espèces un peu parapluies, comme les éléphants. qui vont être fortement liées de manière symbolique à un écosystème. Et puis, il y a la biodiversité des gènes, la biodiversité génétique, qui est un gros sujet au niveau international, parce qu'on retire beaucoup d'informations des espaces naturels, notamment pour le secteur de la chimie ou de la pharmacie, et donc il y a une question de partage de cette connaissance. Et puis, la troisième échelle, ça c'est peut-être celle dont on va le plus parler, c'est l'échelle des écosystèmes. La biodiversité fonctionnelle, c'est-à-dire comment est-ce que les écosystèmes fonctionne, qu'est-ce qui fait entre guillemets leur équilibre, même si un écosystème c'est pas quelque chose de très équilibré, c'est un truc un peu chaotique. Et du coup, ça c'est un peu l'échelon sur lequel on va le plus se concentrer, les politiques publiques, parce que ça vient un peu englober les échelons inférieurs de la génétique, et l'échelon supérieur qui est l'échelon des espaces émulants.

  • Speaker #2

    On a parlé du coup des trois différents types de biodiversité. Est-ce que tu différencies la biodiversité terrestre et marine ? ou elle est inclue dans cette définition que tu donnes, comme on parle beaucoup de biodiversité marine dans le podcast ?

  • Speaker #0

    On va les traiter forcément de manière différente. De toute façon, on va toujours traiter les choses un peu au cas par cas. Toutes les connaissances vont être extrêmement non-extraites. Et on va, de fait, là, vraiment les traiter différemment. Autant on peut avoir des approches qui sont réplicables entre des écotistènes terrestres, autant la biodiversité marine, on va vite considérer de manière assez pragmatique que c'est un autre monde, parce que déjà, c'est un monde qu'on connaît. très mal. Il y a une très grande part des océans qu'on connaît mal. Vous avez dû en parler plein de fois dans le podcast, mais en fonction des différentes zones océaniques, on connaît plus ou moins bien les zones littérales, mais on ne connaît pas le reste. On connaît assez mal les espèces et puis surtout en biologie universitaire, ce qu'on constate, c'est que c'est un peu une science des interactions. Tu as tes objets, super, il y a les écosystèmes, j'ai 26 chez mon objet, j'ai mes espèces. Mais en fait, ce qui va faire l'équilibre de tout ça ou le fonctionnement de tout ça, c'est les interactions entre les espèces. Et ces interactions-là, elles sont hyper difficiles à décrire, surtout dans un milieu comme le milieu marin, où on ne peut pas en permanence avoir des systèmes d'information comme on peut avoir sur les systèmes terrestres. Donc on a moins d'infos, et ça, ça va beaucoup influer la manière dont on traite ce sujet-là.

  • Speaker #2

    Et t'en parlais tout à l'heure, juste dans la question d'avant, tous les acteurs économiques que vous accompagnez avec la CDC, ils dépendent de la biodiversité en grande partie pour leurs activités. T'as travaillé sur les risques financiers liés à la préservation de la biodiversité. Est-ce que peut-être avant de parler justement des outils que vous développez, tu pourrais revenir sur quels sont les risques, les enjeux liés à la préservation de la biodiversité ? Dans la publication que tu m'avais donnée... Tu disais que la finance et biodiversité forment un mariage nécessaire mais contrarié. Donc, j'aimerais bien que tu reviennes un peu sur les enjeux et les risques liés à la biodiversité et sa préservation.

  • Speaker #0

    Carrément. Ça, quand on dit finance et biodiversité, comme ça, le lien n'est quand même pas tout de suite évident. En fait, il s'est beaucoup renforcé ces dernières années. Avec la COP15, il y a vraiment eu un appel vers les acteurs financiers en disant « ça devient votre problème à vous aussi » , parce qu'en fait, ça devient un problème de stabilité. De stabilité de l'économie, du coup, de stabilité hyper pragmatique. de vos actifs et de ce que vous avez dans vos portefeuilles. Et donc, si vous voulez avoir des actifs qui tiennent la route, qui sont encore à l'air de main, vous avez besoin d'une biodiversité fonctionnelle. Et du coup, on est allé essayer de chercher ces acteurs-là sur cet argumentaire, et notamment sur cet argumentaire du risque. Parce qu'en fait, les acteurs financiers, sur les questions d'environnement, on va souvent les chercher sur la question de l'information. Et souvent, c'est de l'information additionnelle. C'est un peu ce qu'on fait dans le secteur de l'ESG. Je viens ajouter des informations financières, des informations sur le taux de carbone, sur, en biodiversité, les écosystèmes impactés, sur les matériaux utilisés, les différents types de pollution qui peuvent avoir lieu à la suite de telle ou telle activité. Mais ça, c'est pas forcément très naturel pour le secteur financier d'y fournir ces informations, d'aller les chercher en plus de son activité. Alors que la question du risque, elle est déjà au cœur de ce qu'il fait. Et donc du coup, c'est un bon proxy pour venir poser des questions de biodiversité. au cœur de ce monde financier. C'est un peu une sorte de cheval de Troyes pour nous, pour venir parler d'écosystème et de stabilité d'écosystème. Il y a des acteurs financiers qui sont plus ou moins réceptifs à ces discours, et typiquement, les assurances, ça les intéresse vachement. Parce qu'on en a beaucoup eu sur le retrait et le gonflement des argiles, avec tout ce qui est à l'assurance habitation. Ça a eu un impact très fort sur le bilan de certaines assurances, et la même chose... avec les feux de forêt en Californie. Je crois que c'est State Farm, qui est une des plus grosses assurances californiennes, qui a retiré ses contrats d'assurance de certaines zones qui étaient trop proches des forêts de la Sierra qui brûlent régulièrement. Et donc là, on a une porte d'entrée très directe pour eux. La chose qui n'est pas évidente, c'est que ça reste quand même deux mondes qui sont hyper opposés. Quand on parle d'actifs financiers, en général, on a des métriques qui sont hyper connues. On mesure... En dollars, on mesure en habitants, on mesure sur des temps aussi qui sont assez courts. On a des historiques de données qui sont hyper forts. Tout ça, on n'a pas du tout avec la biodiversité. C'est vraiment un objet qui est... Enfin, des objets qui sont tellement différents qu'on a du mal à les réduire à des quantités d'informations qui sont bien manipulables par des acteurs financiers. Et en fait, même faire ça, dire un peu mainstreamer la biodiversité pour des acteurs financiers, ça peut nous induire en erreur dans ce qu'on cherche à faire. Parce que du coup, on va venir... écraser une complexité qui est nécessaire pour comprendre le problème et pour agir. Et donc, il y a une sorte de marge de raison, mais un peu contrariée, parce qu'à la fois on a besoin de ces acteurs financiers, et en même temps, on doit faire attention à la manière dont on leur parle, et à ne pas non plus trop vouloir épouser des codes, qui sont les codes de la finance, notamment en ce qui concerne l'information, et qui pourraient venir dénaturer la nature de cette information, et du coup la capacité à réveiller les actions de vie. Ici, on le voit beaucoup sur les risques.

  • Speaker #2

    J'ai l'impression qu'on parle plus de carbone facilement, d'impact carbone, mais de la biodiversité beaucoup moins. Est-ce que tu pourrais revenir sur les risques ? Est-ce que vous avez identifié des risques ? Est-ce qu'il y en a des concrets dont tu pourrais parler ?

  • Speaker #0

    La question du risque est intéressante parce qu'un peu comme sur le carbone, il y a quelque chose de relativement invisible sur le risque. En fait, quand on parle de biodiversité, il y a une image que j'aime bien, c'est celle d'un avion dont on enlèverait tous les boulons un par un. On sent qu'il y a un risque parce que, eh oui, moins il y a de boulons et plus je suis proche du crash de mon avion, mais je ne sais pas à partir de quel boulon tout va s'effondrer. Et en fait, les écosystèmes fonctionnent comme ça. Ils fonctionnent de manière non linéaire. C'est-à-dire qu'on ne sait pas quel est le point de rupture. On sait que plus on applique de pression sur ces écosystèmes, plus ils ont de chances à un moment de rompre, de plus être en capacité de s'autoréguler, enfin, ils se rétouraient l'une par l'autre, de fournir en tout cas les services écosystémiques qu'ils nous fournissent, c'est-à-dire de fournir de l'eau potable, de fournir des sols qui sont capables de supporter une agriculture à peu près fonctionnelle. Mais on ne sait pas où est le point de rupture. Et donc du coup, c'est un peu différent, là où il y a une grosse différence avec le carbone. Le carbone, on a des scénarios. On sait, même si on veut les revoir en ce moment, qu'il y a des points de rupture précis, à partir de, on a juste un EV, le EV, et qu'il faut suivre ces scénarios si on ne veut pas passer ces points de rupture. Avec les écosystèmes, c'est beaucoup plus difficile à identifier, et du coup, on avance vraiment à tâton. Et donc, on a du mal, et on peut reprendre le cas de la biodiversité marine, mais on est vraiment dans du pouls de sonde vis-à-vis du vivant. qui vont nous informer sur les effondrements à venir. Il y a un effondrement qui est un peu symptomatique, c'est la morue à Terre-Neuve. Entre les années 60 et 80, les pêcheries de Terre-Neuve se sont mises à surpêcher la morue et ont épuisé les stocks en suivant des informations un peu contradictoires sur ces stocks. Et plutôt prendre des hypothèses un peu conservatrices, de se dire, même si j'ai des informations différentes sur ces stocks, même si c'est difficile de les évaluer, il vaut mieux que je prenne mon information la moins disante. Parce que je ne sais pas où est le point de rupture pour ces populations que nous avons eues, du moment où d'un coup, d'une année sur l'autre, j'aurais tellement empêché que je n'en aurais plus, mais de manière drastique. Je m'aurais 10 fois moins que l'année dernière. Et en fait, à force de venir tester ce point de rupture, ils ont fini entre guillemets par le trouver, et les pêcheries de Terre-Neuve ont dû fermer. Alors qu'on a le même exemple de l'autre côté de l'Atlantique. En Norvège et en Lusie-Ferroé, on n'est pas allé jusqu'à ce point de rupture en prenant des informations plus conservatrices. Et donc ça, la question du risque, en biodiversité, on essaie de la fêter avec le peu d'informations qu'on a. Et donc en essayant de prendre les quelques coups de son disponibles, on essaie de bâtir des hypothèses un peu structurelles, un peu conservatrices, pour éviter d'aller trop loin.

  • Speaker #2

    Puisque j'imagine qu'il est complexe par rapport au carbone, c'est que c'est aussi assez localisé. Ça dépend de où est-ce qu'on se situe dans le monde, de quel écosystème on parle. C'est vrai que dans le cas de la pêche, j'imagine que c'est assez évident, parce que si on épuise, dans le secteur de la pêche, on épuise des ressources en poisson, il n'y aura plus de poisson, donc du coup, c'est assez clair le risque qu'il y a pour ce secteur-là. Est-ce que dans le cas de la biodiversité marine, il y a des secteurs qui ont été identifiés particulièrement, qui sont à risque plus que d'autres, plus dépendants ? Je ne sais pas si c'est quelque chose sur lequel vous avez pu travailler ou pas.

  • Speaker #0

    L'univers c'est marine, on est vraiment en début de vue. Du coup, on a développé un outil qui s'appelle le Global Biodiversity Score et qui peut être vachement utile pour calculer les risques auxquels est exposé un ordinateur financier. Et ça, ça fonctionne vachement bien sur les écosystèmes terrestres parce qu'on a des grosses bases de données dessus. Et là, aujourd'hui, on n'a pas encore développé l'équivalent pour la biodiversité marine. On est en train de le faire avec un consortium d'acteurs. Mais c'est vraiment, pour l'instant, à l'état de la recherche. et du développement vraiment chez nous, mais même chez les autres. Et il y a encore un manque de données un peu construites et globalisées, en tout cas de traitement de ces données par les acteurs économiques, sur ces questions de l'université marine. Ça marche pour le terrestre et pas encore tout à fait pour l'humain. Mais ça devrait être là dans des mois, années, années.

  • Speaker #2

    On espère, ça sera super. Est-ce que tu peux nous expliquer un peu plus, du coup, ce que c'est ce Global Biodiversity Score et comment est-ce que vous mesurez le pouls-impact des secteurs ? des acteurs économiques, j'imagine, sur la biodiversité ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis spécialiste de cet outil, qui est vraiment des voeux d'aide à plus d'une trentaine de collègues ici à Célice Biodiversité. C'est un outil qui est en open access et dont le but est de trouver autour d'une métrique synthétique, mais pas unique, une manière de calculer les impacts d'une organisation. C'est-à-dire qu'on va prendre les cinq grands facteurs de pression sur la biodiversité, donc le changement d'usage des sols, la surexploitation des ressources, le changement climatique, les espèces exotiques envahissantes, la pollution chimique, la lumineuse, etc. Donc on prend ces cinq grands facteurs et on va essayer de voir qu'est-ce qui, dans l'activité d'une organisation, impacte la biodiversité. Et du coup, on prend une métrique synthétique qui s'appelle le MSA km², qui est construite à partir de grandes bases de données sur l'ensemble des impacts qu'on a sur les écosystèmes dans le monde, qui vient nous dire, par exemple, le coton. Le coton utilise beaucoup d'eau, beaucoup de terres arables, et donc va avoir un impact général sur la biodiversité assez fort, parce qu'il y a une conversion d'espaces naturels en champs, par exemple. Et donc on va réussir à quantifier ça dans les grandes masses. et à dire à un acteur qui fabrique des t-shirts, de dire, ton empreinte de l'université, elle est à tant de pourcents due au coton, et elle représente l'équivalent de tant de kilomètres carrés de forêts vierges rasées. Et donc ça va lui donner un nombre de grandeur, et ça va faire comme une sorte de bilan carbone, et on pourra se dire, comment je vais lui ça ? Je suis à tant aujourd'hui, comment est-ce que je passe de 2 à 1 ? Et ça, ça permet de construire des trajectoires sur des grandes organisations.

  • Speaker #2

    Et est-ce qu'il y a des activités ou des secteurs qui ont plus d'impact sur la biodiversité que d'autres ?

  • Speaker #0

    Oui, il y a vraiment des secteurs qui sont identifiés comme des secteurs clés. Un de ces premiers secteurs, c'est l'agriculture, qui a vraiment un rôle pivot, parce qu'en plus, c'est un secteur qui a un gros potentiel de transition. Ça, on a développé, moi je suis responsable d'un outil qui s'appelle Agribest, qui aide les agriculteurs à... à changer leurs pratiques, comme pour avoir parlé. Il y a un autre secteur qui est la chimie, qui est vachement identifié là-dessus, parce que pareil, les pollutions chimiques, là on est vraiment aussi dans le flou de ce qu'on sait et de ce qu'on ne sait pas. On sait que globalement, il y a de la pollution chimique absolument partout maintenant, même au fin fond de l'Ouanda. On retrouve dans les lignes des chimpanzés jusqu'à 30 composants chimiques à l'intérieur des lignes. Très vache ! Donc il y a vraiment quelque chose d'incontrôlé qui vient... qui vient former des cocktails chimiques, on a un peu du mal à identifier. Et donc ça, c'est un vrai angle mort pour l'instant et qui est vraiment difficile à explorer. Et puis, il y a un troisième secteur, c'est celui de l'immobilier, qui a vraiment du foncier de manière générale et qui, là, est vraiment sur la question d'usage des terres. Une autre chose que je fais avec mon équipe, c'est une expérimentation avec l'ADEME sur l'objectif de zéro artificialisation nette. Les communes en France vont devoir stopper l'artificialisation. progressivement d'ici 2050. Et nous, on aide 22 territoires lauréats à trouver des outils pour « décroître » ou réduire fortement leur consommation de foncier.

  • Speaker #2

    Globalement, une fois que ces acteurs économiques, ces secteurs-là, ont pu identifier leur impact, qu'est-ce qu'ils peuvent faire ? Dans le cadre de la CDC Biodiversité et de ton travail, comment est-ce que vous pouvez les aider, déjà dans un premier temps, à réduire leur impact et quels sont les leviers qu'ils peuvent utiliser ?

  • Speaker #0

    Il y a un peu une recette magique en biodiversité, mais en environnement de manière générale, qui est ERC. C'est la Mitigation Hierarchy en anglais. Donc c'est j'évite et j'évite. C'est la première chose à faire. Et ensuite, une fois que j'ai évité et j'ai réduit au maximum, Et là, il y a un bloqué sur définition. Qu'est-ce que c'est que le maximum ? À quel point est-ce que je suis prêt à renoncer à des choses ou pas ? Qu'est-ce que c'est que cet engagement ? Alors là, je peux essayer de compenser ou de contribuer positivement. La compensation, c'est un sujet qui est assez central dans notre métier parce que c'est réglementairement une des choses qui est la plus forte en France. Mais en fait, dans le monde, il y a plein de pays dans lesquels il y a un système de compensation. Les outils qu'on a, ils cherchent à faire un peu ces trois choses. Nous, on a des outils pour éviter et réduire. Je te parlais de la Leibest à l'instant. C'est un outil qui permet à un agriculteur en 30 minutes de voir comment est-ce qu'il peut changer ses pratiques et aller vers des pratiques qui sont mieux disantes en termes de biodiversité. Typiquement, on va lui demander, de 0 à 5, où est-ce que tu en es sur la question des clés ? Les haies, c'est des vrais réservoirs de biodiversité sur les bords de champs. C'est relativement simple, un peu coûteux, mais pas si coûteux d'implanter. Il y a un plan A qui a été lancé par le gouvernement qui permet de financer ça aussi. Et du coup, nous, ce qu'on fait, c'est qu'on identifie, on aide l'agriculteur à identifier ce point-là en particulier. On le fait avec d'autres points. On dit, sur les phytosanitaires, où est-ce que tu en es ? 0 à 5. Sur les prées permanentes, où est-ce que tu en es ? Et donc, lui, ça lui permet de se dire, où est-ce que j'en suis ? Et qu'est-ce que je peux faire ensuite ? Parce que, par exemple, sur les laits, Mon niveau 0, c'est « j'ai pas de haies » . Mon niveau 1, c'est « j'ai tant de mètres linéaires de haies » . Et plus j'avance dans les niveaux, plus j'ai de mètres linéaires de haies, de haies de telle taille, de telle qualité, etc. Et donc, en fait, ça crée une sorte d'itinéraire pour lui. Il peut passer d'un niveau à un autre. Et donc, on crée ce genre d'outil qui permet de simplifier aussi un petit peu la donne pour des acteurs qui n'ont pas forcément à être des experts de la biodiversité. Comme c'est super complexe, il peut y avoir... sentiment de découragement quand on se...

  • Speaker #2

    Oui, oui, je dirais.

  • Speaker #0

    Dans ce sujet, et de se dire « Ah, mais je ne comprends rien, il y a une complicité des interactions, il y a plein d'éléments à regarder, déjà j'ai du mal à nommer... » les objets de biodiversité qui sont autour de moi, ensuite agir dessus, ça devient un bigé. Nous, un des angles qu'on prend pas mal avec mes collègues, c'est de se dire, bon bah ça, cette complexité, nous on prend en charge. C'est notre boulot. Par contre, vous, dans vos métiers, vous savez ce que vous faites de vos mains, chaque jour. Et donc on va vous aider à juste changer ce geste. Donc typiquement, les agriculteurs, on regarde un peu leur pratique. On leur dit pas, ah mais change complètement ton exploitation du jour au lendemain. On leur dit, bah voilà, tu peux y aller pas à pas. en changeant telle pratique, puis telle pratique, puis telle pratique, que tu as l'habitude de faire. Et en changeant des choses que tu as l'habitude de faire, tu vas progressivement vers ta transition à l'écologique.

  • Speaker #2

    Ça, c'est plus pour l'évitement. Vous développez des outils comme ça aussi, pour ce qui est plutôt à des secteurs maritimes ?

  • Speaker #0

    Alors, sur les secteurs maritimes, on ne va pas le faire directement. Mais par contre, ce qu'on fait sur les secteurs maritimes, c'est qu'on se pose beaucoup de questions sur comment est-ce qu'on peut faire de la renaturation. dans les milieux marins. Il y a beaucoup de questions sur la renaturation de manière générale sur les milieux terrestres, biodiversité. C'est quelque chose qui a beaucoup attiré l'attention ces derniers mois, slash, années, parce qu'il y a l'émergence d'un marché sur les crédits biodiversité. Et ça, c'est quelque chose qu'on retrouve aussi sur le marin, où on se pose la question des crédits biodiversité marins, qui sont plus rares pour l'instant. Mais du coup, nous, on est en train de se poser la question de qu'est-ce que ça veut dire, renaturer un milieu marin ? comment est-ce que on applique les règles qui sont vraies pour le terrestre sur le milieu marin, ce qui est vraiment différent, parce qu'autant sur un milieu terrestre on peut avoir une parcelle un peu close, avec des échanges certes importants mais plus ou moins limités, autant un milieu marin il est hyper interdépendant, il se joue à très grande échelle et c'est difficile de juste isoler un lieu et de dire moi je vais juste agir que sur ce lieu sans prendre en compte... la dynamique générale de la mer, l'océan, la baie, la minima dans laquelle ils se trouvent. Et donc ça redessine un peu les règles et c'est un peu ces règles-là qu'on essaie de regarder.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu as des exemples à me donner peut-être de renaturation dans le milieu marin ?

  • Speaker #0

    En fait, il y en a très peu. Je pense qu'il y a beaucoup de renaturation, typiquement ce que fait corail, sur des éléments marins assez précis, genre sur une housserie poisson, sur les algues, sur les coraux. mais vraiment des approches qui sont des approches d'écosystème, je pense que c'est un peu plus rare. Et notamment, c'est un peu plus rare en France. De manière générale, il y a un léger retard, je pense, en termes économiques, sur la biodiversité marine vis-à-vis de la biodiversité terrestre. Et ça se retrouve un petit peu sur ces enjeux-là aussi. Alors que pourtant, ça offre vachement d'opportunités, notamment parce qu'il me semble, si je ne me pas de l'étise, que la biodiversité marine a des capacités de régénération qui sont assez importantes. Et du coup, il y a un côté où... Il y a aussi un autre point important du point de vue économique, c'est que le foncier marin, on n'a pas forcément besoin de l'acheter. Ça, ça change beaucoup par rapport au théâtre. Et donc, restaurer les milieux marins, ça coûte. Ça peut coûter beaucoup plus cher en termes de technique, de main d'oeuvre, parce qu'il y a besoin de plongée, parce qu'il y a besoin d'équipements lourds. Par contre, a priori, ça peut aussi ne rien coûter du point de vue du foncier. Et ça, c'est une vraie économie d'échelle. Pas d'échelle, mais une vraie économie. Et donc, il y a une vraie opportunité là-dessus. mais je crois qu'aujourd'hui elle n'est pas encore faite à l'oeuvre.

  • Speaker #2

    Oui alors ce n'est pas tellement saisi Mais c'est vrai ce que tu dis, ce qui est plutôt positif avec la biodiversité marine, c'est qu'en effet, il y a une grosse capacité de régénération. Ça fonctionne très bien quand globalement, on fout la paix à un endroit dans l'océan et dans la mer. Ça peut se régénérer très vite. Et après, ça crée du débordement parce que, comme tu dis, c'est des écosystèmes qui sont larges et ce n'est pas localisé à un endroit. Il faut prendre ça dans sa globalité. Globalement, en préservant une partie plutôt restreinte de l'océan, ça peut ensuite avoir des... Un impact qui s'étend sur des zones beaucoup plus larges. Et du coup, quand tu parles de renaturation pour les écosystèmes terrestres, tu entends quoi exactement ? Est-ce que tu as des exemples plus précis aussi là-dessus ?

  • Speaker #0

    On peut parler de deux choses différentes. On peut dire, si on parle d'action positive sur l'écosystème, on va parler de renaturation ou de restauration. Il va y avoir des écoles un peu différentes de pensée. Globalement, l'idée, c'est que je prends une parcelle, un terrain, et la plupart du temps dégradée. Et je vais essayer d'augmenter la capacité d'accueil de la biodiversité et donc d'avoir un gain positif de biodiversité. Ça, c'est une notion qui est un peu clé, le gain positif, et notamment en milieu marin, parce que c'est ce qui va permettre de prouver la valeur de l'action qui a été faite sur le terrain. C'est un peu la notion pivot. Quand on le fait avec des nature-based solutions sur des crédits carbone, C'est relativement simple, même si c'est déjà très complexe, parce qu'on pourrait garder la capacité d'absorption du carbone. Et ça, on a les moyens assez concrets de le vérifier. On va garder la capacité de stockage du carbone des sols, ou alors on va avoir des équations qui vont nous permettre de nous dire, à partir du nombre d'arbres qui ont été plantés, quel est le potentiel de captation carbone. Avec la biodiversité, ma métrique est beaucoup plus complexe, pas juste le carbone. Et donc, comment est-ce que je calcule ce gain ? Qu'est-ce que je regarde dans calculer ce gain ? La manière de faire ce gain, elle est aussi vachement importante. C'est-à-dire, tu l'as dit tout à l'heure, une bonne manière de s'occuper de l'université, c'est parfois de ne rien faire. Et donc juste de prendre un terrain, de le laisser évoluer, et de le préserver dans un certain nombre d'impact. Ça, c'est déjà ce qu'on fait de manière un peu historique, dans les parcs nationaux, dans les parcs naturels régionaux, etc. Maintenant, sur certains terrains, il y a besoin d'aller plus loin. Parce qu'ils ont subi des pollutions qui sont très importantes. Parce qu'il y a des éléments, par exemple, c'est pas mal le cas dans le nord de la France, des écosystèmes avec des terrils qui sont venus recouvrir des eaux humides, ou alors des rivières qui ont été canalisées. Et donc, en fait, même si on laisse ces écosystèmes, entre guillemets, tels quels, on les a déjà amputés d'une fonction essentielle pour eux, qui était l'éméante de la rivière, qui gêne à alimenter tout l'ensemble d'un bassin versant. en eau, en nutriments, etc. Et donc, il y a besoin de temps en temps d'avoir une intervention humaine pour redonner un élan à cet écosystème. Et donc, typiquement, une des choses pour lesquelles cette décédée de l'université est connue, c'est pour avoir créé en 2008 ce qu'on appelle un site naturel de compensation. Aujourd'hui, c'est des sites naturels de compensation, de restauration et de rematuration. Une sorte de grande basket légale dans lequel on met un peu tout ce qui... correspond à la restauration slash renaturation en France. On a créé ce site dans le sud de la France et c'était un ancien verger. Comme ça, on se dit, un verger au niveau de l'université, c'est plutôt intéressant. Il doit y avoir plein de pollinateurs, etc. Sauf que ce verger, il était sur un endroit où on a plutôt des écosystèmes stépiques. C'est en fait un endroit où les oiseaux migrateurs vont particulièrement venir pour pondre. Et un oiseau, certes, ces populations d'oiseaux ont besoin d'avoir une visibilité à 360° assez loin. pour voir les prédateurs venir. Et donc pour avoir ces zones de ponte, ils ont besoin de voir loin, donc de ne pas avoir d'arbres, donc il ne faut pas de vergeux. On a fait quelque chose de très contre-intuitif, c'est-à-dire qu'on a coupé les arbres de ces vergers pour réinstaller une plaine, en l'occurrence la plaine necro, avec des moutons, une activité pastorale, pour entretenir une zone esthétique. Et donc ça, c'est un exemple de restauration d'écosystème, à qui on a redonné une trajectoire écologique qui est celle non pas... du coup du verger, mais plutôt de l'agro-pastoralisme et de la steppe.

  • Speaker #1

    Et comment vous avez déterminé que c'était cet écosystème-là qu'il fallait remettre en place, restaurer, plutôt que garder le verger ?

  • Speaker #0

    Ça, je pense que c'est venu de deux manières. Là, je réponds un peu à la place de mes collègues qui ont fait en 2008. Moi, je n'étais pas là. Mais je pense qu'ils auraient eu tendance à se dire deux choses. Un, il y avait des espèces sensibles, particulières, à préserver dans cette zone. et donc c'est à partir de ces espaces qu'ils ont construit cette trajectoire ici. Et deux, c'est un écosystème qui fait sens par rapport à l'ensemble de la géographie. Et donc, ils sont allés reproduire quelque chose qui existait auparavant et qui existait à côté. Et donc, ils voyaient que ça fonctionnait et qu'il y avait une cohérence à faire ça.

  • Speaker #1

    Et dans ce cadre, ça c'est un exemple de ce que vous avez mis en place avec la CDC. Qui s'occupe de financer ?

  • Speaker #0

    La question du financement, c'est vraiment la question centrale.

  • Speaker #2

    Merci d'avoir écouté cet épisode de Régénération Corail jusqu'au bout. J'espère qu'il vous aura donné envie de passer à l'action et que vous en ressortez mieux équipés pour faire partie de la génération qui agit. On écrit aussi des articles sur le site internet de Corail que vous pouvez consulter gratuitement pour aller plus loin. Si cet épisode vous a plu, abonnez-vous, partagez-le autour de vous et parlez-en. N'hésitez pas à laisser des petites étoiles et commentaires sur votre plateforme d'écoute. ou à nous écrire sur contact.scora-africa.com si vous voulez faire un retour. Enfin, si vous souhaitez soutenir concrètement le podcast, vous pouvez faire un bond défiscalisé sur Eloasso. Vous trouverez tous les liens dans la description de l'épisode. Et à très vite pour le prochain !

Description

On parle souvent du climat, de l’empreinte carbone… mais la biodiversité reste, pour beaucoup, un concept flou. On sent que c’est important, vital, même, mais on peine à la définir, à la mesurer, et à comprendre concrètement ce que sa dégradation implique.

Dans cet épisode, je reçois Yves Chesnot, qui travaille à la CDC Biodiversité. Sa mission : développer des outils pour aider les collectivités, les entreprises, et autres structures à mieux prendre en compte la biodiversité dans leurs décisions.

Avec lui, on revient aux bases : qu’est-ce que la biodiversité, exactement ? En quoi les écosystèmes marins diffèrent-ils des écosystèmes terrestres ? Pourquoi est-il si complexe de mesurer notre impact sur la biodiversité, bien plus que pour le carbone ? Et quels sont les risques économiques liés à l’effondrement du vivant ?


Dans cet échange, on ne parle pas uniquement du monde marin. J’ai volontairement élargi le propos pour mieux mettre en perspective les spécificités de l’océan face aux autres écosystèmes.


Cet épisode est en deux parties. Aujourd’hui, on pose les fondations. Et dans 15 jours, vous découvrirez la suite, consacrée à une question centrale : le financement de la restauration de la biodiversité.


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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    En fait, quand on parle de biodiversité, il y a une image que j'aime bien, c'est celle d'un avion dont on enlèverait tous les boulons un par un. On sent qu'il y a un risque, parce que moins il y a de boulons, et plus je suis proche du crash de mon avion, mais je ne sais pas à partir de quel boulon tout va s'effondrer. Et en fait, les écosystèmes fonctionnent comme ça. Ils fonctionnent de manière non linéaire. C'est-à-dire qu'on ne sait pas quel est le point de rupture.

  • Speaker #1

    On parle beaucoup du climat, de l'impact carbone. Mais la biodiversité, elle reste un concept un petit peu flou. On sent que c'est important, vital même, mais on a souvent du mal à la définir, à la mesurer et à vraiment comprendre ce que sa dégradation implique. Dans cet épisode, j'ai rencontré Yves Chenot, qui travaille à la CDC Biodiversité. Sa mission ? Créer des outils pour aider les collectivités, les entreprises ou des plus petites structures à mieux intégrer la biodiversité dans leurs décisions. Avec lui, on est revenu au fondamental. C'est quoi exactement la biodiversité ? Sa définition ? en quoi les questions liées à la préservation des écosystèmes marins diffèrent de celles liées aux écosystèmes terrestres ? Pourquoi est-ce si difficile de mesurer notre impact sur un écosystème, bien plus que pour le carbone ? Ou quels sont les risques financiers liés à l'effondrement du vivant ? On a élargi un peu le propos au-delà du monde marin, justement pour mettre en perspective les liens et les différences entre la biodiversité terrestre et marine, et donc mieux comprendre les enjeux qui sont spécifiques à l'océan. J'ai découpé notre échange en deux parties, et dans 15 jours, vous entendrez donc la suite. où on abordera la question clé du financement. Comment financer la restauration de la biodiversité ? Je vous souhaite une bonne écoute !

  • Speaker #2

    Bon,

  • Speaker #1

    les chiffres sont là. 50% des récifs coralliens ont disparu en 30 ans. Un tiers des stocks de poissons sont surexploités. Et nos océans... se réchauffent à une vitesse alarmante. Notre économie est malade en fait. Elle a oublié sa plus grande alliée, la nature. Et parmi elles, les écosystèmes marins qui nous nourrissent, nous permettent de respirer et maintiennent l'équilibre de notre planète. Ok, on fait quoi ? Par où commencer ? Comment peut-on agir concrètement ? Je m'appelle Clarisse Goubi et je vous emmène à la rencontre de celles et ceux qui proposent des solutions et tentent de réintégrer la nature dans l'équation. Ici, c'est le podcast de Régénération Corail. Et ensemble, on passe à l'action.

  • Speaker #0

    Je pense que c'est un souvenir qui est assez récent parce que je suis allé très peu à l'océan quand j'étais petit, mais je me suis mis à mes voiles après le Covid. Et la première fois que j'ai fait de la voile, j'ai trouvé ça horrible parce que c'était la Bretagne en novembre. Il faisait super froid et j'avais vraiment le merde fou. Mais à la fin de la première journée, vers 18h, il y a eu un super coucher de soleil. Je suis rachepé le délénant et ça, ça m'a complètement conquis. Et du coup, j'ai un rapport un peu à mon haine avec l'océan parce que j'ai toujours le mal de mer. Mais je sais qu'à chaque fois, je vais avoir ce petit moment de bonheur une fois que c'est passé. Et c'est ce que je recherche un peu systématiquement.

  • Speaker #2

    Moi, c'était pareil. Je détestais nager quand j'étais petite et pourtant maintenant, j'adore la mer et je traite dans le secteur de la conservation marine. Est-ce que tu pourrais commencer par présenter ton parcours ?

  • Speaker #0

    Alors du coup, moi, je m'appelle Yves. Je travaille chez CDC L'université, qui est une entreprise qui est spécialisée dans l'université. Mais à la base, je ne viens pas du tout de ce monde-là. Moi, j'ai fait des études de lettres. Au début, je fais une prépa littéraire. Et après, j'ai fait des études de finance commerce et des études de géographie, et notamment pas mal de géographie quantitative. Et c'est là où je me suis posé de plus en plus de questions sur l'environnement, avec au début un prisme qui était hyper carbone. Je fais des stages qui étaient beaucoup plus climat, data, carbone. Et puis, un jour, j'ai un collègue... À une pause déjeuner qui commence après l'université, j'avais un réflexe un peu bête de dire « Ah ouais, mais ça c'est quoi ? » Enfin, c'est les abeilles, quoi. J'ai senti le regard qui me jetait que j'avais vraiment même pas du tout compris la question et le sujet. Et il a commencé à me démontrer par A plus B que ce que je venais de dire était un peu débile. Ça m'a mis la puce à l'oreille. Et quand je suis mis à chercher un travail, j'avais entendu parler de cette entreprise, je me suis commencé à me poser pas mal de questions sur l'université. Et là, j'ai découvert un champ. sur lequel je travaille depuis deux ans et demi maintenant, et qui est extrêmement riche.

  • Speaker #2

    Donc du coup, tu travailles maintenant à la CDC Biodiversité. Est-ce que tu peux m'expliquer ce que tu fais et ce que fait la CDC ?

  • Speaker #0

    Alors la CDC, elle fait plusieurs choses depuis une quinzaine d'années. La biodiversité, c'est vraiment un sujet extrêmement large, et du coup, tous les métiers qui touchent à ce sujet sont aussi très différents. Globalement, on fait deux choses. On fait de la restauration à l'écosystème. Donc ça, c'est lié à un contexte réglementaire en France qui veut que... Quand une entreprise ou un projet a un impact sur un territoire, elle doit compenser cet impact et faire de la restauration ailleurs. Ça, c'est un peu l'activité historique. Et puis autour de ça est venu se tisser tout un tas de questionnements par lesquels on a répondu en créant différents outils. Il y en a un qui est assez connu qui s'appelle WBIB et WST-SCORE qui permet de mesurer son impact sur la biodiversité. Mais on en a créé tout plein d'autres et moi, mon travail et moi, au sein de la mission économique de la biodiversité qui est financée par la Caisse des Territoires et qui a une mission d'intérêt général, qui crée des outils pour nous, mais en fait pour tous ceux qui veulent s'en emparer derrière. c'est de créer de nouveaux outils pour aborder chaque question un peu précise que vient nous poser la université. Parce qu'on ne va pas aborder le sujet de la même façon selon l'échelle. On va aborder des sujets hyper locaux. Souvent, c'est en fait par ça qu'on connaît le prix de la nouvelle université. On va avoir le sujet d'une espèce donnée à tel endroit, d'un écosystème sur lequel on va avoir un impact. Et puis on va avoir aussi des questions qui sont hyper globales de « Je suis une grosse entreprise. » j'ai une chaîne de valeur qui va de l'Asie à l'Amérique du Nord en passant par l'Afrique, l'Amérique du Sud, tous les continents je touche à 1000 écosystèmes différents je ne sais même pas qui sont mes fournisseurs, etc je ne sais même pas forcément ce qu'il y a dans la fabrication de mes outils de mon matériel mais je vais aller chercher toutes ces informations et me poser la question de tous les différents impacts que je peux avoir sur ces écosystèmes et du coup là, les deux approches sont hyper différentes et ça c'est juste un exemple parce qu'on va avoir une approche qui est sur les espèces ou qui est plutôt centré sur les écosystèmes. On peut avoir une approche qui est hyper data, ou on peut avoir une approche qui est au contraire un peu plus sensible ou un peu plus locale. On peut avoir aussi des interlocuteurs vachement différents, parce que ça va être des très gros entreprises, souvent des entreprises du luxe ou de la tech, des tout petites structures, souvent des structures de l'agriculture par exemple. Une exploitation à l'école a très peu de moyens, du coup on ne va pas du tout répondre de la même manière, avec les mêmes outils qu'une grosse entreprise. Et du coup, en fait, le but... c'est de créer des outils pour accompagner tous ces gens-là. Les collectivités aussi, qui ont beaucoup de sujets sur la biodiversité. Et donc ça, contrairement au carbone, ça demande de déployer un peu toute notre imagination pour en y répondre un peu au cas par cas aux problématiques de chacun de ces vecteurs.

  • Speaker #2

    Peut-être qu'avant de rentrer dans l'aspect plus technique, tu pourrais me donner la définition, parce qu'on n'a jamais donné de ce que c'est la biodiversité, et peut-être aussi redonner un peu le cadre mondial qui est autour des enjeux.

  • Speaker #0

    Alors la biodiversité, c'est un mot valise qui a été inventé d'une manière assez récemment, je crois. Il me semble que ça émerge vraiment dans les années 80. Et en fait, ce terme valise va réussir à fédérer les acteurs au niveau international. C'est Biological Diversity, et qui est adopté pour désigner tout ce qui va concerner le vivant, de manière générale, avec la Convention de Rio, avec le Sommet de Rio et le début des COP. en 92, et donc ça en fait un objet au contour assez flou, ce qui fait qu'on a souvent parlé de nature à la place de biodiversité. Et cet objet, la meilleure manière de le décrire, c'est de le décrire de trois manières différentes. On parle soit de biodiversité des espèces, ça c'est un peu la biodiversité que vous voyez à la télé, c'est qu'on connaît de manière un peu sensible, de manière un peu plus intime, c'est qu'on identifie plus avec les grandes espèces un peu parapluies, comme les éléphants. qui vont être fortement liées de manière symbolique à un écosystème. Et puis, il y a la biodiversité des gènes, la biodiversité génétique, qui est un gros sujet au niveau international, parce qu'on retire beaucoup d'informations des espaces naturels, notamment pour le secteur de la chimie ou de la pharmacie, et donc il y a une question de partage de cette connaissance. Et puis, la troisième échelle, ça c'est peut-être celle dont on va le plus parler, c'est l'échelle des écosystèmes. La biodiversité fonctionnelle, c'est-à-dire comment est-ce que les écosystèmes fonctionne, qu'est-ce qui fait entre guillemets leur équilibre, même si un écosystème c'est pas quelque chose de très équilibré, c'est un truc un peu chaotique. Et du coup, ça c'est un peu l'échelon sur lequel on va le plus se concentrer, les politiques publiques, parce que ça vient un peu englober les échelons inférieurs de la génétique, et l'échelon supérieur qui est l'échelon des espaces émulants.

  • Speaker #2

    On a parlé du coup des trois différents types de biodiversité. Est-ce que tu différencies la biodiversité terrestre et marine ? ou elle est inclue dans cette définition que tu donnes, comme on parle beaucoup de biodiversité marine dans le podcast ?

  • Speaker #0

    On va les traiter forcément de manière différente. De toute façon, on va toujours traiter les choses un peu au cas par cas. Toutes les connaissances vont être extrêmement non-extraites. Et on va, de fait, là, vraiment les traiter différemment. Autant on peut avoir des approches qui sont réplicables entre des écotistènes terrestres, autant la biodiversité marine, on va vite considérer de manière assez pragmatique que c'est un autre monde, parce que déjà, c'est un monde qu'on connaît. très mal. Il y a une très grande part des océans qu'on connaît mal. Vous avez dû en parler plein de fois dans le podcast, mais en fonction des différentes zones océaniques, on connaît plus ou moins bien les zones littérales, mais on ne connaît pas le reste. On connaît assez mal les espèces et puis surtout en biologie universitaire, ce qu'on constate, c'est que c'est un peu une science des interactions. Tu as tes objets, super, il y a les écosystèmes, j'ai 26 chez mon objet, j'ai mes espèces. Mais en fait, ce qui va faire l'équilibre de tout ça ou le fonctionnement de tout ça, c'est les interactions entre les espèces. Et ces interactions-là, elles sont hyper difficiles à décrire, surtout dans un milieu comme le milieu marin, où on ne peut pas en permanence avoir des systèmes d'information comme on peut avoir sur les systèmes terrestres. Donc on a moins d'infos, et ça, ça va beaucoup influer la manière dont on traite ce sujet-là.

  • Speaker #2

    Et t'en parlais tout à l'heure, juste dans la question d'avant, tous les acteurs économiques que vous accompagnez avec la CDC, ils dépendent de la biodiversité en grande partie pour leurs activités. T'as travaillé sur les risques financiers liés à la préservation de la biodiversité. Est-ce que peut-être avant de parler justement des outils que vous développez, tu pourrais revenir sur quels sont les risques, les enjeux liés à la préservation de la biodiversité ? Dans la publication que tu m'avais donnée... Tu disais que la finance et biodiversité forment un mariage nécessaire mais contrarié. Donc, j'aimerais bien que tu reviennes un peu sur les enjeux et les risques liés à la biodiversité et sa préservation.

  • Speaker #0

    Carrément. Ça, quand on dit finance et biodiversité, comme ça, le lien n'est quand même pas tout de suite évident. En fait, il s'est beaucoup renforcé ces dernières années. Avec la COP15, il y a vraiment eu un appel vers les acteurs financiers en disant « ça devient votre problème à vous aussi » , parce qu'en fait, ça devient un problème de stabilité. De stabilité de l'économie, du coup, de stabilité hyper pragmatique. de vos actifs et de ce que vous avez dans vos portefeuilles. Et donc, si vous voulez avoir des actifs qui tiennent la route, qui sont encore à l'air de main, vous avez besoin d'une biodiversité fonctionnelle. Et du coup, on est allé essayer de chercher ces acteurs-là sur cet argumentaire, et notamment sur cet argumentaire du risque. Parce qu'en fait, les acteurs financiers, sur les questions d'environnement, on va souvent les chercher sur la question de l'information. Et souvent, c'est de l'information additionnelle. C'est un peu ce qu'on fait dans le secteur de l'ESG. Je viens ajouter des informations financières, des informations sur le taux de carbone, sur, en biodiversité, les écosystèmes impactés, sur les matériaux utilisés, les différents types de pollution qui peuvent avoir lieu à la suite de telle ou telle activité. Mais ça, c'est pas forcément très naturel pour le secteur financier d'y fournir ces informations, d'aller les chercher en plus de son activité. Alors que la question du risque, elle est déjà au cœur de ce qu'il fait. Et donc du coup, c'est un bon proxy pour venir poser des questions de biodiversité. au cœur de ce monde financier. C'est un peu une sorte de cheval de Troyes pour nous, pour venir parler d'écosystème et de stabilité d'écosystème. Il y a des acteurs financiers qui sont plus ou moins réceptifs à ces discours, et typiquement, les assurances, ça les intéresse vachement. Parce qu'on en a beaucoup eu sur le retrait et le gonflement des argiles, avec tout ce qui est à l'assurance habitation. Ça a eu un impact très fort sur le bilan de certaines assurances, et la même chose... avec les feux de forêt en Californie. Je crois que c'est State Farm, qui est une des plus grosses assurances californiennes, qui a retiré ses contrats d'assurance de certaines zones qui étaient trop proches des forêts de la Sierra qui brûlent régulièrement. Et donc là, on a une porte d'entrée très directe pour eux. La chose qui n'est pas évidente, c'est que ça reste quand même deux mondes qui sont hyper opposés. Quand on parle d'actifs financiers, en général, on a des métriques qui sont hyper connues. On mesure... En dollars, on mesure en habitants, on mesure sur des temps aussi qui sont assez courts. On a des historiques de données qui sont hyper forts. Tout ça, on n'a pas du tout avec la biodiversité. C'est vraiment un objet qui est... Enfin, des objets qui sont tellement différents qu'on a du mal à les réduire à des quantités d'informations qui sont bien manipulables par des acteurs financiers. Et en fait, même faire ça, dire un peu mainstreamer la biodiversité pour des acteurs financiers, ça peut nous induire en erreur dans ce qu'on cherche à faire. Parce que du coup, on va venir... écraser une complexité qui est nécessaire pour comprendre le problème et pour agir. Et donc, il y a une sorte de marge de raison, mais un peu contrariée, parce qu'à la fois on a besoin de ces acteurs financiers, et en même temps, on doit faire attention à la manière dont on leur parle, et à ne pas non plus trop vouloir épouser des codes, qui sont les codes de la finance, notamment en ce qui concerne l'information, et qui pourraient venir dénaturer la nature de cette information, et du coup la capacité à réveiller les actions de vie. Ici, on le voit beaucoup sur les risques.

  • Speaker #2

    J'ai l'impression qu'on parle plus de carbone facilement, d'impact carbone, mais de la biodiversité beaucoup moins. Est-ce que tu pourrais revenir sur les risques ? Est-ce que vous avez identifié des risques ? Est-ce qu'il y en a des concrets dont tu pourrais parler ?

  • Speaker #0

    La question du risque est intéressante parce qu'un peu comme sur le carbone, il y a quelque chose de relativement invisible sur le risque. En fait, quand on parle de biodiversité, il y a une image que j'aime bien, c'est celle d'un avion dont on enlèverait tous les boulons un par un. On sent qu'il y a un risque parce que, eh oui, moins il y a de boulons et plus je suis proche du crash de mon avion, mais je ne sais pas à partir de quel boulon tout va s'effondrer. Et en fait, les écosystèmes fonctionnent comme ça. Ils fonctionnent de manière non linéaire. C'est-à-dire qu'on ne sait pas quel est le point de rupture. On sait que plus on applique de pression sur ces écosystèmes, plus ils ont de chances à un moment de rompre, de plus être en capacité de s'autoréguler, enfin, ils se rétouraient l'une par l'autre, de fournir en tout cas les services écosystémiques qu'ils nous fournissent, c'est-à-dire de fournir de l'eau potable, de fournir des sols qui sont capables de supporter une agriculture à peu près fonctionnelle. Mais on ne sait pas où est le point de rupture. Et donc du coup, c'est un peu différent, là où il y a une grosse différence avec le carbone. Le carbone, on a des scénarios. On sait, même si on veut les revoir en ce moment, qu'il y a des points de rupture précis, à partir de, on a juste un EV, le EV, et qu'il faut suivre ces scénarios si on ne veut pas passer ces points de rupture. Avec les écosystèmes, c'est beaucoup plus difficile à identifier, et du coup, on avance vraiment à tâton. Et donc, on a du mal, et on peut reprendre le cas de la biodiversité marine, mais on est vraiment dans du pouls de sonde vis-à-vis du vivant. qui vont nous informer sur les effondrements à venir. Il y a un effondrement qui est un peu symptomatique, c'est la morue à Terre-Neuve. Entre les années 60 et 80, les pêcheries de Terre-Neuve se sont mises à surpêcher la morue et ont épuisé les stocks en suivant des informations un peu contradictoires sur ces stocks. Et plutôt prendre des hypothèses un peu conservatrices, de se dire, même si j'ai des informations différentes sur ces stocks, même si c'est difficile de les évaluer, il vaut mieux que je prenne mon information la moins disante. Parce que je ne sais pas où est le point de rupture pour ces populations que nous avons eues, du moment où d'un coup, d'une année sur l'autre, j'aurais tellement empêché que je n'en aurais plus, mais de manière drastique. Je m'aurais 10 fois moins que l'année dernière. Et en fait, à force de venir tester ce point de rupture, ils ont fini entre guillemets par le trouver, et les pêcheries de Terre-Neuve ont dû fermer. Alors qu'on a le même exemple de l'autre côté de l'Atlantique. En Norvège et en Lusie-Ferroé, on n'est pas allé jusqu'à ce point de rupture en prenant des informations plus conservatrices. Et donc ça, la question du risque, en biodiversité, on essaie de la fêter avec le peu d'informations qu'on a. Et donc en essayant de prendre les quelques coups de son disponibles, on essaie de bâtir des hypothèses un peu structurelles, un peu conservatrices, pour éviter d'aller trop loin.

  • Speaker #2

    Puisque j'imagine qu'il est complexe par rapport au carbone, c'est que c'est aussi assez localisé. Ça dépend de où est-ce qu'on se situe dans le monde, de quel écosystème on parle. C'est vrai que dans le cas de la pêche, j'imagine que c'est assez évident, parce que si on épuise, dans le secteur de la pêche, on épuise des ressources en poisson, il n'y aura plus de poisson, donc du coup, c'est assez clair le risque qu'il y a pour ce secteur-là. Est-ce que dans le cas de la biodiversité marine, il y a des secteurs qui ont été identifiés particulièrement, qui sont à risque plus que d'autres, plus dépendants ? Je ne sais pas si c'est quelque chose sur lequel vous avez pu travailler ou pas.

  • Speaker #0

    L'univers c'est marine, on est vraiment en début de vue. Du coup, on a développé un outil qui s'appelle le Global Biodiversity Score et qui peut être vachement utile pour calculer les risques auxquels est exposé un ordinateur financier. Et ça, ça fonctionne vachement bien sur les écosystèmes terrestres parce qu'on a des grosses bases de données dessus. Et là, aujourd'hui, on n'a pas encore développé l'équivalent pour la biodiversité marine. On est en train de le faire avec un consortium d'acteurs. Mais c'est vraiment, pour l'instant, à l'état de la recherche. et du développement vraiment chez nous, mais même chez les autres. Et il y a encore un manque de données un peu construites et globalisées, en tout cas de traitement de ces données par les acteurs économiques, sur ces questions de l'université marine. Ça marche pour le terrestre et pas encore tout à fait pour l'humain. Mais ça devrait être là dans des mois, années, années.

  • Speaker #2

    On espère, ça sera super. Est-ce que tu peux nous expliquer un peu plus, du coup, ce que c'est ce Global Biodiversity Score et comment est-ce que vous mesurez le pouls-impact des secteurs ? des acteurs économiques, j'imagine, sur la biodiversité ?

  • Speaker #0

    Moi, je suis spécialiste de cet outil, qui est vraiment des voeux d'aide à plus d'une trentaine de collègues ici à Célice Biodiversité. C'est un outil qui est en open access et dont le but est de trouver autour d'une métrique synthétique, mais pas unique, une manière de calculer les impacts d'une organisation. C'est-à-dire qu'on va prendre les cinq grands facteurs de pression sur la biodiversité, donc le changement d'usage des sols, la surexploitation des ressources, le changement climatique, les espèces exotiques envahissantes, la pollution chimique, la lumineuse, etc. Donc on prend ces cinq grands facteurs et on va essayer de voir qu'est-ce qui, dans l'activité d'une organisation, impacte la biodiversité. Et du coup, on prend une métrique synthétique qui s'appelle le MSA km², qui est construite à partir de grandes bases de données sur l'ensemble des impacts qu'on a sur les écosystèmes dans le monde, qui vient nous dire, par exemple, le coton. Le coton utilise beaucoup d'eau, beaucoup de terres arables, et donc va avoir un impact général sur la biodiversité assez fort, parce qu'il y a une conversion d'espaces naturels en champs, par exemple. Et donc on va réussir à quantifier ça dans les grandes masses. et à dire à un acteur qui fabrique des t-shirts, de dire, ton empreinte de l'université, elle est à tant de pourcents due au coton, et elle représente l'équivalent de tant de kilomètres carrés de forêts vierges rasées. Et donc ça va lui donner un nombre de grandeur, et ça va faire comme une sorte de bilan carbone, et on pourra se dire, comment je vais lui ça ? Je suis à tant aujourd'hui, comment est-ce que je passe de 2 à 1 ? Et ça, ça permet de construire des trajectoires sur des grandes organisations.

  • Speaker #2

    Et est-ce qu'il y a des activités ou des secteurs qui ont plus d'impact sur la biodiversité que d'autres ?

  • Speaker #0

    Oui, il y a vraiment des secteurs qui sont identifiés comme des secteurs clés. Un de ces premiers secteurs, c'est l'agriculture, qui a vraiment un rôle pivot, parce qu'en plus, c'est un secteur qui a un gros potentiel de transition. Ça, on a développé, moi je suis responsable d'un outil qui s'appelle Agribest, qui aide les agriculteurs à... à changer leurs pratiques, comme pour avoir parlé. Il y a un autre secteur qui est la chimie, qui est vachement identifié là-dessus, parce que pareil, les pollutions chimiques, là on est vraiment aussi dans le flou de ce qu'on sait et de ce qu'on ne sait pas. On sait que globalement, il y a de la pollution chimique absolument partout maintenant, même au fin fond de l'Ouanda. On retrouve dans les lignes des chimpanzés jusqu'à 30 composants chimiques à l'intérieur des lignes. Très vache ! Donc il y a vraiment quelque chose d'incontrôlé qui vient... qui vient former des cocktails chimiques, on a un peu du mal à identifier. Et donc ça, c'est un vrai angle mort pour l'instant et qui est vraiment difficile à explorer. Et puis, il y a un troisième secteur, c'est celui de l'immobilier, qui a vraiment du foncier de manière générale et qui, là, est vraiment sur la question d'usage des terres. Une autre chose que je fais avec mon équipe, c'est une expérimentation avec l'ADEME sur l'objectif de zéro artificialisation nette. Les communes en France vont devoir stopper l'artificialisation. progressivement d'ici 2050. Et nous, on aide 22 territoires lauréats à trouver des outils pour « décroître » ou réduire fortement leur consommation de foncier.

  • Speaker #2

    Globalement, une fois que ces acteurs économiques, ces secteurs-là, ont pu identifier leur impact, qu'est-ce qu'ils peuvent faire ? Dans le cadre de la CDC Biodiversité et de ton travail, comment est-ce que vous pouvez les aider, déjà dans un premier temps, à réduire leur impact et quels sont les leviers qu'ils peuvent utiliser ?

  • Speaker #0

    Il y a un peu une recette magique en biodiversité, mais en environnement de manière générale, qui est ERC. C'est la Mitigation Hierarchy en anglais. Donc c'est j'évite et j'évite. C'est la première chose à faire. Et ensuite, une fois que j'ai évité et j'ai réduit au maximum, Et là, il y a un bloqué sur définition. Qu'est-ce que c'est que le maximum ? À quel point est-ce que je suis prêt à renoncer à des choses ou pas ? Qu'est-ce que c'est que cet engagement ? Alors là, je peux essayer de compenser ou de contribuer positivement. La compensation, c'est un sujet qui est assez central dans notre métier parce que c'est réglementairement une des choses qui est la plus forte en France. Mais en fait, dans le monde, il y a plein de pays dans lesquels il y a un système de compensation. Les outils qu'on a, ils cherchent à faire un peu ces trois choses. Nous, on a des outils pour éviter et réduire. Je te parlais de la Leibest à l'instant. C'est un outil qui permet à un agriculteur en 30 minutes de voir comment est-ce qu'il peut changer ses pratiques et aller vers des pratiques qui sont mieux disantes en termes de biodiversité. Typiquement, on va lui demander, de 0 à 5, où est-ce que tu en es sur la question des clés ? Les haies, c'est des vrais réservoirs de biodiversité sur les bords de champs. C'est relativement simple, un peu coûteux, mais pas si coûteux d'implanter. Il y a un plan A qui a été lancé par le gouvernement qui permet de financer ça aussi. Et du coup, nous, ce qu'on fait, c'est qu'on identifie, on aide l'agriculteur à identifier ce point-là en particulier. On le fait avec d'autres points. On dit, sur les phytosanitaires, où est-ce que tu en es ? 0 à 5. Sur les prées permanentes, où est-ce que tu en es ? Et donc, lui, ça lui permet de se dire, où est-ce que j'en suis ? Et qu'est-ce que je peux faire ensuite ? Parce que, par exemple, sur les laits, Mon niveau 0, c'est « j'ai pas de haies » . Mon niveau 1, c'est « j'ai tant de mètres linéaires de haies » . Et plus j'avance dans les niveaux, plus j'ai de mètres linéaires de haies, de haies de telle taille, de telle qualité, etc. Et donc, en fait, ça crée une sorte d'itinéraire pour lui. Il peut passer d'un niveau à un autre. Et donc, on crée ce genre d'outil qui permet de simplifier aussi un petit peu la donne pour des acteurs qui n'ont pas forcément à être des experts de la biodiversité. Comme c'est super complexe, il peut y avoir... sentiment de découragement quand on se...

  • Speaker #2

    Oui, oui, je dirais.

  • Speaker #0

    Dans ce sujet, et de se dire « Ah, mais je ne comprends rien, il y a une complicité des interactions, il y a plein d'éléments à regarder, déjà j'ai du mal à nommer... » les objets de biodiversité qui sont autour de moi, ensuite agir dessus, ça devient un bigé. Nous, un des angles qu'on prend pas mal avec mes collègues, c'est de se dire, bon bah ça, cette complexité, nous on prend en charge. C'est notre boulot. Par contre, vous, dans vos métiers, vous savez ce que vous faites de vos mains, chaque jour. Et donc on va vous aider à juste changer ce geste. Donc typiquement, les agriculteurs, on regarde un peu leur pratique. On leur dit pas, ah mais change complètement ton exploitation du jour au lendemain. On leur dit, bah voilà, tu peux y aller pas à pas. en changeant telle pratique, puis telle pratique, puis telle pratique, que tu as l'habitude de faire. Et en changeant des choses que tu as l'habitude de faire, tu vas progressivement vers ta transition à l'écologique.

  • Speaker #2

    Ça, c'est plus pour l'évitement. Vous développez des outils comme ça aussi, pour ce qui est plutôt à des secteurs maritimes ?

  • Speaker #0

    Alors, sur les secteurs maritimes, on ne va pas le faire directement. Mais par contre, ce qu'on fait sur les secteurs maritimes, c'est qu'on se pose beaucoup de questions sur comment est-ce qu'on peut faire de la renaturation. dans les milieux marins. Il y a beaucoup de questions sur la renaturation de manière générale sur les milieux terrestres, biodiversité. C'est quelque chose qui a beaucoup attiré l'attention ces derniers mois, slash, années, parce qu'il y a l'émergence d'un marché sur les crédits biodiversité. Et ça, c'est quelque chose qu'on retrouve aussi sur le marin, où on se pose la question des crédits biodiversité marins, qui sont plus rares pour l'instant. Mais du coup, nous, on est en train de se poser la question de qu'est-ce que ça veut dire, renaturer un milieu marin ? comment est-ce que on applique les règles qui sont vraies pour le terrestre sur le milieu marin, ce qui est vraiment différent, parce qu'autant sur un milieu terrestre on peut avoir une parcelle un peu close, avec des échanges certes importants mais plus ou moins limités, autant un milieu marin il est hyper interdépendant, il se joue à très grande échelle et c'est difficile de juste isoler un lieu et de dire moi je vais juste agir que sur ce lieu sans prendre en compte... la dynamique générale de la mer, l'océan, la baie, la minima dans laquelle ils se trouvent. Et donc ça redessine un peu les règles et c'est un peu ces règles-là qu'on essaie de regarder.

  • Speaker #2

    Est-ce que tu as des exemples à me donner peut-être de renaturation dans le milieu marin ?

  • Speaker #0

    En fait, il y en a très peu. Je pense qu'il y a beaucoup de renaturation, typiquement ce que fait corail, sur des éléments marins assez précis, genre sur une housserie poisson, sur les algues, sur les coraux. mais vraiment des approches qui sont des approches d'écosystème, je pense que c'est un peu plus rare. Et notamment, c'est un peu plus rare en France. De manière générale, il y a un léger retard, je pense, en termes économiques, sur la biodiversité marine vis-à-vis de la biodiversité terrestre. Et ça se retrouve un petit peu sur ces enjeux-là aussi. Alors que pourtant, ça offre vachement d'opportunités, notamment parce qu'il me semble, si je ne me pas de l'étise, que la biodiversité marine a des capacités de régénération qui sont assez importantes. Et du coup, il y a un côté où... Il y a aussi un autre point important du point de vue économique, c'est que le foncier marin, on n'a pas forcément besoin de l'acheter. Ça, ça change beaucoup par rapport au théâtre. Et donc, restaurer les milieux marins, ça coûte. Ça peut coûter beaucoup plus cher en termes de technique, de main d'oeuvre, parce qu'il y a besoin de plongée, parce qu'il y a besoin d'équipements lourds. Par contre, a priori, ça peut aussi ne rien coûter du point de vue du foncier. Et ça, c'est une vraie économie d'échelle. Pas d'échelle, mais une vraie économie. Et donc, il y a une vraie opportunité là-dessus. mais je crois qu'aujourd'hui elle n'est pas encore faite à l'oeuvre.

  • Speaker #2

    Oui alors ce n'est pas tellement saisi Mais c'est vrai ce que tu dis, ce qui est plutôt positif avec la biodiversité marine, c'est qu'en effet, il y a une grosse capacité de régénération. Ça fonctionne très bien quand globalement, on fout la paix à un endroit dans l'océan et dans la mer. Ça peut se régénérer très vite. Et après, ça crée du débordement parce que, comme tu dis, c'est des écosystèmes qui sont larges et ce n'est pas localisé à un endroit. Il faut prendre ça dans sa globalité. Globalement, en préservant une partie plutôt restreinte de l'océan, ça peut ensuite avoir des... Un impact qui s'étend sur des zones beaucoup plus larges. Et du coup, quand tu parles de renaturation pour les écosystèmes terrestres, tu entends quoi exactement ? Est-ce que tu as des exemples plus précis aussi là-dessus ?

  • Speaker #0

    On peut parler de deux choses différentes. On peut dire, si on parle d'action positive sur l'écosystème, on va parler de renaturation ou de restauration. Il va y avoir des écoles un peu différentes de pensée. Globalement, l'idée, c'est que je prends une parcelle, un terrain, et la plupart du temps dégradée. Et je vais essayer d'augmenter la capacité d'accueil de la biodiversité et donc d'avoir un gain positif de biodiversité. Ça, c'est une notion qui est un peu clé, le gain positif, et notamment en milieu marin, parce que c'est ce qui va permettre de prouver la valeur de l'action qui a été faite sur le terrain. C'est un peu la notion pivot. Quand on le fait avec des nature-based solutions sur des crédits carbone, C'est relativement simple, même si c'est déjà très complexe, parce qu'on pourrait garder la capacité d'absorption du carbone. Et ça, on a les moyens assez concrets de le vérifier. On va garder la capacité de stockage du carbone des sols, ou alors on va avoir des équations qui vont nous permettre de nous dire, à partir du nombre d'arbres qui ont été plantés, quel est le potentiel de captation carbone. Avec la biodiversité, ma métrique est beaucoup plus complexe, pas juste le carbone. Et donc, comment est-ce que je calcule ce gain ? Qu'est-ce que je regarde dans calculer ce gain ? La manière de faire ce gain, elle est aussi vachement importante. C'est-à-dire, tu l'as dit tout à l'heure, une bonne manière de s'occuper de l'université, c'est parfois de ne rien faire. Et donc juste de prendre un terrain, de le laisser évoluer, et de le préserver dans un certain nombre d'impact. Ça, c'est déjà ce qu'on fait de manière un peu historique, dans les parcs nationaux, dans les parcs naturels régionaux, etc. Maintenant, sur certains terrains, il y a besoin d'aller plus loin. Parce qu'ils ont subi des pollutions qui sont très importantes. Parce qu'il y a des éléments, par exemple, c'est pas mal le cas dans le nord de la France, des écosystèmes avec des terrils qui sont venus recouvrir des eaux humides, ou alors des rivières qui ont été canalisées. Et donc, en fait, même si on laisse ces écosystèmes, entre guillemets, tels quels, on les a déjà amputés d'une fonction essentielle pour eux, qui était l'éméante de la rivière, qui gêne à alimenter tout l'ensemble d'un bassin versant. en eau, en nutriments, etc. Et donc, il y a besoin de temps en temps d'avoir une intervention humaine pour redonner un élan à cet écosystème. Et donc, typiquement, une des choses pour lesquelles cette décédée de l'université est connue, c'est pour avoir créé en 2008 ce qu'on appelle un site naturel de compensation. Aujourd'hui, c'est des sites naturels de compensation, de restauration et de rematuration. Une sorte de grande basket légale dans lequel on met un peu tout ce qui... correspond à la restauration slash renaturation en France. On a créé ce site dans le sud de la France et c'était un ancien verger. Comme ça, on se dit, un verger au niveau de l'université, c'est plutôt intéressant. Il doit y avoir plein de pollinateurs, etc. Sauf que ce verger, il était sur un endroit où on a plutôt des écosystèmes stépiques. C'est en fait un endroit où les oiseaux migrateurs vont particulièrement venir pour pondre. Et un oiseau, certes, ces populations d'oiseaux ont besoin d'avoir une visibilité à 360° assez loin. pour voir les prédateurs venir. Et donc pour avoir ces zones de ponte, ils ont besoin de voir loin, donc de ne pas avoir d'arbres, donc il ne faut pas de vergeux. On a fait quelque chose de très contre-intuitif, c'est-à-dire qu'on a coupé les arbres de ces vergers pour réinstaller une plaine, en l'occurrence la plaine necro, avec des moutons, une activité pastorale, pour entretenir une zone esthétique. Et donc ça, c'est un exemple de restauration d'écosystème, à qui on a redonné une trajectoire écologique qui est celle non pas... du coup du verger, mais plutôt de l'agro-pastoralisme et de la steppe.

  • Speaker #1

    Et comment vous avez déterminé que c'était cet écosystème-là qu'il fallait remettre en place, restaurer, plutôt que garder le verger ?

  • Speaker #0

    Ça, je pense que c'est venu de deux manières. Là, je réponds un peu à la place de mes collègues qui ont fait en 2008. Moi, je n'étais pas là. Mais je pense qu'ils auraient eu tendance à se dire deux choses. Un, il y avait des espèces sensibles, particulières, à préserver dans cette zone. et donc c'est à partir de ces espaces qu'ils ont construit cette trajectoire ici. Et deux, c'est un écosystème qui fait sens par rapport à l'ensemble de la géographie. Et donc, ils sont allés reproduire quelque chose qui existait auparavant et qui existait à côté. Et donc, ils voyaient que ça fonctionnait et qu'il y avait une cohérence à faire ça.

  • Speaker #1

    Et dans ce cadre, ça c'est un exemple de ce que vous avez mis en place avec la CDC. Qui s'occupe de financer ?

  • Speaker #0

    La question du financement, c'est vraiment la question centrale.

  • Speaker #2

    Merci d'avoir écouté cet épisode de Régénération Corail jusqu'au bout. J'espère qu'il vous aura donné envie de passer à l'action et que vous en ressortez mieux équipés pour faire partie de la génération qui agit. On écrit aussi des articles sur le site internet de Corail que vous pouvez consulter gratuitement pour aller plus loin. Si cet épisode vous a plu, abonnez-vous, partagez-le autour de vous et parlez-en. N'hésitez pas à laisser des petites étoiles et commentaires sur votre plateforme d'écoute. ou à nous écrire sur contact.scora-africa.com si vous voulez faire un retour. Enfin, si vous souhaitez soutenir concrètement le podcast, vous pouvez faire un bond défiscalisé sur Eloasso. Vous trouverez tous les liens dans la description de l'épisode. Et à très vite pour le prochain !

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