#18 - Le design responsable, avec Karl Pineau (Designers Éthiques) cover
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Un poil d'UX

#18 - Le design responsable, avec Karl Pineau (Designers Éthiques)

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37min |26/06/2024
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#18 - Le design responsable, avec Karl Pineau (Designers Éthiques)

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Description

Dans ce nouvel épisode, nous accueillons Karl Pineau !


Le sujet du jour est : Le design responsable (implications, enjeux, etc).


Au programme :


→ Le contexte dans lequel s’inscrit le design responsable.

→ Repenser les processus de conception pour réduire l'empreinte environnementale des produits et services.

→ Les enjeux du design persuasif et de l'attention.

→ Mesurer l'impact d'un projet design d'un point de vue responsable.


Retrouvez toute la discussion dans cet épisode !


Si l'épisode vous a plu, n'hésitez pas à attribuer 5 étoiles au podcast sur votre plateforme d'écoute.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et à toutes,

  • Speaker #1

    je suis Léa, merci de nous rejoindre pour ce nouvel épisode d'un poil du X en direct de l'agence Lagrandus. Aujourd'hui, nous accueillons Carl Pinault, membre de l'association Designer Éthique, avec qui nous allons parler des designs responsables, de la notion de design éthique et de ce que ces sujets impliquent dans les projets, les organisations et les équipes design. Merci de se joindre à nous aujourd'hui, Karl. Pour commencer, je te propose de te présenter en quelques mots.

  • Speaker #0

    Merci de m'accueillir. Je m'appelle Karl, je suis membre d'une association qui s'appelle Designer Ethic, qui est une association qui s'intéresse à la responsabilité numérique par le design à travers ses différents champs. Et par ailleurs, je suis enseignant-chercheur en sciences de l'information et de la communication.

  • Speaker #1

    Merci pour cette présentation. Alors pour débuter, il me semble que tu n'aimes pas vraiment parler de design éthique. même s'il s'agit d'un terme qui est de plus en plus répandu aujourd'hui. Est-ce que tu peux nous expliquer pourquoi ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est paradoxal parce que c'est le nom de l'association. Oui, alors c'est pas tel... Enfin, comment dire ? Le terme éthique, en fait, c'est un terme qui est très utilisé et très pratique, mais c'est un terme qui est souvent complexe parce qu'en fait, il est compris par tout le monde de manière différente. Et donc, effectivement, l'éthique, est-ce que c'est l'éthique philosophique classique avec la déontologie, le... L'éthique des vertus, le conséquentialisme, est-ce que c'est une sorte de bundle de toutes les problématiques qu'on peut trouver dans le numérique aujourd'hui, que ce soit l'accessibilité, l'éco-conception, la persuasion, etc. Tous ces sujets-là, ces différentes versions du terme éthique, ça crée souvent une confusion, voire des débats. Il y a beaucoup de gens aussi qui vont comprendre le terme éthique comme étant ce qui est bien. Donc c'est pas du tout comme ça qu'il faut comprendre ce qu'est l'éthique, c'est plutôt la recherche du bien, c'est le chemin vers le bien, ça prétend pas qu'on la trouve, c'est plutôt dire qu'on le cherche. Bref, du coup, précisément, le terme éthique va être vraiment sujet à de multiples définitions par plein de gens, ce qui fait que souvent on préfère, enfin moi je préfère ne pas l'utiliser, même si évidemment, voilà, il est... le nom de notre asso et on l'assume complètement. Et ça permet aussi de fédérer autour d'un concept qui est assez porteur. Mais effectivement, quand on rentre dans le détail de ce qu'on essaye de produire sur le numérique, moi, je préfère parler effectivement de responsabilité plus que d'éthique, qui me semble être un terme qui est plus intéressant en termes de justement de portée de ce que ça induit pour les personnes qui produisent le numérique.

  • Speaker #1

    D'accord, c'est très clair, merci. Comme tu viens de nous l'expliquer, tu préfères donc parler de design responsable. Est-ce que tu peux nous présenter ce qu'est le design responsable selon toi ?

  • Speaker #0

    Le terme responsable, je l'aime bien. C'est un débat d'ailleurs dans la communauté en ce moment, notamment avec Louis Dorac qui critique plutôt le terme responsable. Moi, le terme responsable, je l'aime bien parce que pour moi, la responsabilité, c'est une notion juridique. Et donc, quand on est responsable, on doit rendre des comptes des actions qu'on mène. Donc un numérique responsable par exemple, c'est un numérique qui doit rendre compte des problématiques qu'il induit pour le reste de la société ou pour l'environnement. Et donc finalement, le terme responsable, il me parle parce que c'est un terme qui nous engage. C'est-à-dire que souvent, d'ailleurs, le terme éthique est utilisé par... C'est une des critiques qui est formulée contre le terme éthique. C'est un terme qui est utilisé beaucoup par celles et ceux qui ne veulent pas de régulation, qui ne veulent pas de législation sur le numérique et qui disent Non, non, mais laissez le marché faire, on va développer nos propres éthiques et ça va bien se passer. Et en fait... très nombreux à considérer qu'il faut une régulation. Et en fait, cette régulation, elle passe justement, elle induit justement une posture de responsabilité, puisque une fois qu'il y a une régulation, si on veut se mettre en conformité avec cette régulation, il faut être responsable de ses actes devant la loi.

  • Speaker #1

    Ok. Et donc le design responsable, ça englobe au final pas mal de sous-catégories. Est-ce que tu peux nous en présenter en quelques mots certaines, et puis on reviendra plus en détail ensuite sur certaines de ces catégories ?

  • Speaker #0

    Ouais, en fait c'est assez compliqué de les lister toutes, parce que là encore, de la même manière finalement que le terme éthique, parler de responsabilité ou d'éthique de ce point de vue-là, à mon sens ça revient un peu à la même chose, le sujet c'est que produit le numérique sur les individus, sur notre société et sur l'environnement. Et donc en fait ça, ça va aller chercher plein de champs dehors d'enjeux de société. Il y a des enjeux qui sont particulièrement à la mode en ce moment. Tout le monde parle d'éco-conception numérique, des enjeux environnementaux, du numérique, etc. C'est un sujet qui est extrêmement porteur. Il y a des sujets, on va dire, historiques que sont celui de l'accessibilité. qui a été un des premiers à être normé, régulé, avec des normes d'accessibilité, des injonctions, des obligations des grandes entreprises à mettre en œuvre des pratiques d'accessibilité. Il y a des sujets qui sont, je ne sais pas si on peut les qualifier d'émergents, mais en tout cas qui font de plus en plus parler, que ce soit la question de l'attention, de la persuasion. Il y a un champ sur le design systémique qui est aussi de plus en plus... verbalisés, et après, il y a tout un autre, enfin, il y a tout un tas de chants qui sont plus ou moins... mise en valeur, mais qui gagnerait à l'aide, par exemple, je pense à tout ce qui est l'électronisme ou la place, l'injonction à l'utilisation des écrans ou des services numériques. Tous ces éléments-là, en fait, ce n'est pas forcément des choses qui vont être forcément directement mises dans le paquet design éthique, design responsable, mais ce sont des choses qui, potentiellement, ont vocation à l'être. En fait, l'idée, c'est... C'est de dire que la responsabilité par le design numérique, ce n'est pas une notion finie, ce n'est pas un champ d'expertise fini sur lequel on aurait déjà tout exploré. on se rend compte régulièrement que le numérique pose des enjeux pour telle ou telle raison, que ce soit sur le pouvoir des plateformes, que ce soit sur les travailleurs du clic, ce genre de choses. Et en fait, nous ce qu'on prône, c'est que quand on voit des enjeux de ce type-là émerger, il y a un sujet à ce que les designers se posent la question de leur responsabilité vis-à-vis de ça. On peut parler de l'inclusion, de l'intersectionnalité... il y a plein de sujets qu'on pourrait aborder à ce titre là

  • Speaker #1

    Aujourd'hui ces enjeux du design éthique sont de plus en plus présents dans les discussions et le paysage du design français comme tu as pu commencer à en parler dans quel contexte cela vient s'inscrire et quelle est la responsabilité des designers dans ce contexte selon toi ?

  • Speaker #0

    Alors ça c'est une grande question la responsabilité des designers et En fait, nous quand on a créé l'asso justement, c'était à un moment où on s'intéressait surtout à la question de l'attention et de la persuasion. Et c'est un moment où notamment Tristan Harris... américain, enfin pas designer, mais product designer, on va dire, de l'équipe de Gmail chez Google, commençait à faire beaucoup parler de lui et à pointer le vol du temps, de l'attention des utilisateurs, etc. Et donc, en fait, nous, on a créé l'assaut en partie pour traiter ces questions-là et voir quel était le rôle effectif des designers là-dedans. De fait, si les designers sont ceux qui mettent en œuvre les pratiques de persuasion, pour prendre ce cas précis, mais qui aussi mettent en œuvre en réalité les interfaces, les fonctionnalités qui peuvent être particulièrement problématiques en termes d'éco-conception ou d'accessibilité, etc. Si c'est ceux qui en fait font l'opérationnel, en réalité ce n'est pas forcément les designers qui ont un pouvoir de décision qui est particulièrement important ou qui sont responsables des choix qui sont opérés dans la conception des services numériques. Et donc ça, c'est presque une sorte de sous-sujet dans le sujet qui est le positionnement des designers vis-à-vis de leur propre discipline. D'une certaine manière, aujourd'hui, les designers se retrouvent à assumer... le terme design, on le retrouve partout, UX design, UI design, etc. Le terme design est massivement présent. Les designers sont d'une certaine manière les responsables, les porte-parole, ceux qui doivent justifier cette discipline. Mais en réalité, ce n'est pas forcément eux qui ont tout le temps la main sur les tenants et les aboutissants de cette discipline. Et donc ça, c'est en fait le principal sujet qui est en train de se poser. C'est comment est-ce que les designers... Une forme de dilemme, c'est les designers défendent leur discipline en disant, regardez, elle peut apporter plein de choses bien à la production de services numériques et pas que, notamment en termes d'utilisabilité, en termes d'expérience utilisateur, etc. Mais d'un autre côté, à l'inverse, ils doivent aussi se retrouver à justifier ou à défendre leur discipline quand elle est mobilisée pour des raisons qui sont plutôt négatives. Tout ce qui va être de l'ordre des dark patterns, pousser la consommation dans... plein de services de e-commerce, de pousser l'attention dans plein de médias sociaux qui dépendent d'une économie d'attention. Et donc ça, c'est plus compliqué. Et donc c'est un peu le grand dilemme des designers que de savoir où se placer vis-à-vis de ça. Il n'y a pas forcément, à mon sens, de solution particulièrement facile. On parle souvent en termes de solution de la place des designers dans les organisations et notamment de leur niveau hiérarchique. C'est sûr que c'est un enjeu. C'est un enjeu, mais par contre... c'est pas quelque chose qui va se régler d'un claquement de doigts et qui va te dire, en fait, il faudrait des head of design. ou des VP Design pour résoudre tous ces problèmes-là.

  • Speaker #1

    D'accord. Comme tu l'as précédemment cité, il y a plusieurs sujets qui constituent le paysage global du design responsable. Je te propose de revenir sur certains d'entre eux, en commençant par l'accessibilité et l'inclusion. Comment peut-on garantir aujourd'hui que ces principes sont intégrés dans toutes les étapes d'un processus de conception ? Quelles sont les meilleures pratiques pour s'assurer que les produits et services sont accessibles à tous, et quel que soit leur niveau d'habileté ou leurs besoins spécifiques ?

  • Speaker #0

    Ça, c'est une grande question aussi. Alors moi, je ne suis pas un expert de l'accessibilité et de l'inclusion, donc je ne vais pas... de faire comme si j'étais quelqu'un de particulièrement efficace là-dessus. Et d'ailleurs, ça fait même partie des sujets sur lesquels nous, on a du mal à être vraiment bon. Je pense aussi que c'est lié au fait que, enfin en tout cas, le fait que nous, on ait du mal à être particulièrement bon, c'est un sujet sur lequel les designers sont sous-formés, notamment dans les formations en design qui apparaissent extrêmement peu. Enfin, la question d'accessibilité, ou en tout cas, c'est souvent une sorte de... Il y a souvent une session de sensibilisation, mais ça ne va souvent pas vraiment au-delà. Je pense que ce serait plus intelligent de ma part de faire des recommandations de personnes qui sont pertinentes pour aller creuser ces sujets-là. Je pense que ces dernières années, c'est notamment autour des services numériques de l'État où il y a eu beaucoup d'avancées. Je pense à tout ce que fait la DINUM, à Anne-Sophie Tranchet, qui est par ailleurs membre de l'association Design Hérétique. autour de Design Accessible, un site web de ressources qui explique comment justement les designers peuvent prendre en compte ces questions d'accessibilité pour faire en sorte qu'elles soient bien traitées à l'échelle du service. Et en fait, j'ai l'impression que de ce point de vue-là, en termes d'écosystème, pour ne pas forcément aller dans les recommandations, mais plus pour parler d'écosystème, il y a un peu un enjeu, mine de rien, à ce que les designers se ressaisissent de cette question-là. C'est un peu le sujet historique de la responsabilité numérique, mais malheureusement, il est un peu souvent mis de côté. C'est vrai. Parce que j'ai l'impression, parfois vécu comme une contrainte créative par les designers, notamment d'un point de vue graphique. Et ça, c'est vraiment problématique. Donc, voilà. prenez garde à traiter ce sujet là les ressources principalement celles qui ont pu être produites par la DINUM, Design Accessible et puis après il y a plein d'agences ou de structures spécialisées dans l'accessibilité je pense à Access 42 notamment qui est particulièrement connu sur ce sujet là qui offre plein de ressources sur lesquelles on peut se former super,

  • Speaker #1

    merci pour ces conseils Un autre sujet clé dans une pratique de design responsable, c'est l'éco-conception, dont tu as mentionné le sujet au début. En tant que designer, comment pouvons-nous repenser nos processus de conception pour réduire l'empreinte environnementale des produits et services sur lesquels nous travaillons ?

  • Speaker #0

    C'est que des grandes questions que tu me poses. Sur l'éco-conception numérique, est-ce qu'à mon sens, là où il faut comprendre... Enfin, il n'y a pas... Il y a quelques grands principes qu'il faut avoir en tête. Le premier grand principe qu'il faut avoir en tête, c'est que ce qui représente l'écrasante majorité de l'empreinte environnementale du numérique, c'est les terminaux. Et donc, en fait, la priorité, ça doit être de faire en sorte de ralentir le taux de renouvellement de nos terminaux numériques, soit les ordinateurs ou les téléphones. Et donc, ça sous-entend lutter contre les différentes formes d'obsolescence qui peuvent avoir lieu sur ces terminaux, que ce soit l'obsolescence matérielle, donc typiquement un ordinateur qui... Un téléphone qui casse quand on laisse tomber son iPhone dans la rue et que paf, il a les grands cassés, il y a un enjeu à travailler sur la réparabilité plutôt que d'en changer. Ce n'est pas forcément là où les designers numériques ont la part d'action la plus évidente, à mon sens. C'est plutôt sur les deux autres facteurs d'obsolescence que sont l'obsolescence marketing, psychologique. qui va donc jouer sur le phénomène, l'envie de remplacer son terminal numérique, parce qu'il n'est plus à la mode, il n'a pas une tête très jolie, etc. Et donc ça, il y a un enjeu à rendre désirable le numérique, pas forcément high-tech. Et donc ça, c'est un vrai sujet, notamment pour tous ceux qui travaillent dans des domaines proches du marketing en design. Et puis, il y a un deuxième sujet, et c'est peut-être là le cœur de l'éco-conception numérique, qui est la question de l'obsolescence logicielle. Et donc, comment est-ce qu'on fait en sorte que les logiciels qu'on a sur nos ordinateurs, sur nos téléphones, soient relativement légers ? En fait, on se rend compte aujourd'hui que les personnes qui ont un téléphone qui a 10 ans, 8 ans, 10 ans, 12 ans, le principal facteur limitant d'usage de leur téléphone, c'est la compatibilité des applications sur le long terme. Le fait que si vous voulez par exemple réserver un billet de train, l'application d'achat de billets va vous dire Ah non désolé, on ne supporte plus ce téléphone, donc il faut que vous changiez de téléphone pour pouvoir scanner votre QR code quand vous arrivez sur la borne d'entrée dans le train. et donc c'est en fait pour cette raison que les gens changent de téléphone et donc c'est là où il y a un vrai enjeu à produire des applications qui soient dans la durée suffisamment compatibles avec les versions anciennes de téléphone et qui soient suffisamment légères pour ne pas faire fondre la batterie des téléphones ou laguer les vieux téléphones à mort et c'est là où on en arrive au réel intérêt du design parce qu'en fait souvent on a l'impression que c'est une question de développeurs, l'éco-conception qu'en fait il s'agit d'optimiser C'est sûr qu'optimiser du code, c'est une bonne pratique et qu'il faut le faire, mais il y a un vrai enjeu à définir quelles sont les fonctions qu'on veut voir sur un service numérique. Est-ce que ça sert à quelque chose de mettre en place une fonction qui va être utilisée peut-être par 5% des utilisateurs ? La question du périmètre fonctionnel des applications numériques, c'est un enjeu majeur de l'éco-coupure. conception numérique et c'est pour ça que les designers jouent un rôle prégnant parce que a priori c'est justement eux qui vont concevoir l'expérience utilisateur donc ils vont définir quelles sont les fonctionnalités à mettre en place sur le service et c'est là où les choix pertinents doivent se faire.

  • Speaker #1

    C'est très clair, merci beaucoup. Je te propose maintenant d'aborder une autre thématique très importante du design responsable, il s'agit des problématiques liées au design persuasif et au design de l'attention. D'abord, est-ce que tu peux nous expliquer ce qui se cache derrière ces termes ?

  • Speaker #0

    Alors, design de l'attention, c'est un terme qui a été particulièrement popularisé dans les années 2017-2018, notamment en lien avec l'économie de l'attention. C'est assez simple, c'est le fait de dire que tout un tas de services numériques ont un modèle économique basé sur la valorisation économique de notre attention. caractéristiques en ligne, c'est les médias sociaux qui vont diffuser de la publicité lorsque l'on scrolle sur nos files d'actualité. Et donc, c'est cette publicité qui génère de l'argent. Et donc, plus on passe de temps sur ces services, plus ça génère de publicité. Et donc, à partir du moment où l'enjeu, c'est de faire passer du temps à l'utilisateur sur le service numérique, ça devient un enjeu de design puisqu'on peut mettre tout un tas de mécanismes qui vont pousser l'utilisateur à rester. sur le service numérique. Et donc, c'est pour ça qu'on parle de design de l'attention. Alors moi, c'est une expression que je n'aime pas beaucoup parce qu'en fait, ça focalise sur l'attention et donc sur le temps passé, souvent, où parfois, on va dériver vers des, comment dire, des interprétations sociales ou en termes de santé qui me paraissent être beaucoup plus complexes à aborder alors qu'a priori, on n'a pas besoin d'aller sur ces aspects-là. traiter ce problème à mon sens, en tout cas ça ne veut pas dire que c'est un problème, mais pour les designers je pense que c'est plus simple de ne pas trop se saisir de cette question-là, et c'est pour ça que je parle plutôt de persuasion, parce qu'en fait ce qui est au cœur de ce sujet-là, c'est la façon dont les usages, enfin pardon, les interfaces... l'expérience utilisateur va modifier, va persuader, va modifier le comportement des utilisateurs des services numériques. Et donc ça aujourd'hui, c'est quelque chose qui est particulièrement présent dans nos applications. Il y a plein de mécanismes de persuasion, le plus connu étant le système des notifications, très souvent utilisé pour faire venir un utilisateur sur un service numérique. Et donc, ce qui est intéressant, c'est que c'est un sujet qui a été pendant très longtemps sous les radars de beaucoup de structures, mais qui aujourd'hui est de plus en plus mis en visibilité. Et ça, c'est notamment visible d'un point de vue législatif et réglementaire, parce que déjà, les autorités de régulation du numérique et du droit à la consommation se saisissent de plus en plus de ce sujet-là. Je pense à la GCCRF en France qui... On commence à s'intéresser à la façon dont les applications numériques peuvent enfreindre le droit à la consommation vis-à-vis du droit à la consommation existant. et donc à sanctionner des pratiques de design persuasif. Et puis surtout, depuis quelques mois, le DSA, le DMA, donc Digital Services Act, Digital Market Act, sont entrés en vigueur et en fait ils incluent tout un ensemble de dispositions qui viennent apposer un cadre réglementaire qui vont contraindre les pratiques de design persuasive. Et la dimension la plus marquante, c'est l'interdiction dans le cadre du DSA entre les deux. donc des dark patterns, les fameux dark patterns, même si en fait ça pose plein de sujets, parce que ça pose la question de comment est-ce qu'on est capable d'identifier un dark pattern, comment est-ce qu'on est capable de prouver la présence d'un dark pattern, est-ce qu'en fait un dark pattern c'est un élément d'interface, est-ce que c'est une expérience utilisateur sur le long terme, dans le temps, bref, en fait ça pose plein de questions très pratiques, mais c'est déjà un énorme pas en avant que de voir la reconnaissance du rôle des interfaces dans les problématiques qu'on peut avoir dans les services numériques. En fait, ce qui est vraiment important pour moi, c'est que depuis 20 ans, depuis que le numérique a émergé, tout le monde s'est focalisé sur le code, sur les algorithmes. Il y a même cette phrase qui dit le code, c'est la loi Alors, c'est vrai. Mais en fait, je pense que c'est hyper important d'intégrer le fait que l'interface aussi, joue un rôle extrêmement important dans la formalisation des habitudes des utilisateurs. Et ce n'est pas pour rien qu'on parle d'affordance, de friction, etc. L'interface est particulièrement importante et ça c'était assez invisibilisé jusqu'à présent, à mon avis pour des raisons de technosolutionnisme, où la technologie apparaît magique et le code fait plus techno que l'interface. Ce qui est vraiment bien, c'est qu'aujourd'hui les autorités de régulation se rendent compte que l'interface joue un rôle et donc commencent à la normaliser.

  • Speaker #1

    Et donc nous, en tant que designer, comment pouvons-nous concevoir de manière responsable à ce sujet-là pour encourager l'engagement et les interactions tout en respectant la liberté individuelle et en évitant les pièges du design persuasif excessif ?

  • Speaker #0

    Eh bien ça, c'est un vrai gros sujet. Il n'y a pas de réponse facile, il n'y a pas de réponse absolue aujourd'hui et surtout, c'est souvent pas une... problématique de design justement, ou en tout cas pas de design d'interface. En fait, je pense que ce qui est hyper important à comprendre, c'est qu'une même interface, un même composant, peut avoir une dimension extrêmement persuasive et problématique dans certains cas, et être particulièrement importante dans d'autres cas. Je pense que la notification, de ce point de vue-là, est l'exemple plus simple pour comprendre ce problème. Une notification... qui vient vous dire, on va citer LinkedIn aujourd'hui, vous avez quatre personnes qui ont visité votre profil, cliquez pour en savoir plus. On est complètement dans une dimension persuasive. L'objectif, c'est d'attirer l'utilisateur sur l'application pour le retenir dans une logique d'économie de l'attention. Et donc, c'est problématique. Par contre, si vous recevez une notification qui vous dit que vous avez un proche qui a besoin d'aide ou qu'il se passe un truc dans votre ville et qu'il faut que vous vous mettiez en sécurité, c'est une... interface qui est évidemment essentielle. Donc en fait, le problème, il n'est pas au niveau de l'interface, il est au niveau de ce qu'on en fait. Et donc c'est là où il faut se mettre des cadres, en fait, des règles sur la façon dont on peut utiliser ou pas ces interfaces et parfois aussi dans la façon dont on va vraiment concevoir le détail de ces interfaces. Et c'est là où, en fait, à mon sens, il faut élargir la focale, ne pas parler que d'expérience utilisateur. mais regarder aussi ce qui l'entoure. Et en fait, un exemple intéressant de ce point de vue-là, c'est ce qu'a mis en avant la fameuse commission sur les écrans qui a été demandée par Emmanuel Macron et qui a rendu son rapport il y a un mois. Et cette commission, elle parlait de produire des médias sociaux éthiques. Et là, c'est typiquement, je pense qu'un bon cas d'étude, parce que si on regarde les médias sociaux et qu'on cherche à produire des médias sociaux éthiques, en fait... de premier abord, de prime abord, on pourrait chercher à se focaliser uniquement sur l'interface. On pourrait dire, en fait, c'est simple, on va enlever les files d'actualité. C'est simple, on va enlever... les notifications. C'est simple, on va forcer l'arrêt de la pub et puis on va forcer des modérateurs. Sauf qu'en fait, si on y réfléchit un peu, on se rend compte assez vite que ça ne va pas marcher parce que ça va faire, ça va produire des services qui vont être particulièrement peu utilisables, on va avoir beaucoup de frictions indésirables, bref, en fait, on va produire une mauvaise expérience utilisateur et donc on va produire des mauvais médias sociaux et donc ça ne fonctionne pas. Donc en fait, parfois dans les services numériques, on a besoin de laisser de... des systèmes persuasifs sur le service pour faciliter son utilisabilité. Et donc c'est là où on en arrive justement à ces côtés side qui vont permettre de protéger ce service même s'il est persuasif. Et là c'est notamment par exemple les modèles de gouvernance. Et je pense que le design justement, il a plein de choses à apporter aux modèles de gouvernance des médias sociaux numériques. Si on réfléchit aujourd'hui à la façon dont... Comment fonctionnent les médias sociaux qu'on utilise ? En fait, c'est des médias qui sont monolithiques, qui dépendent d'une seule entreprise, qui sont totalement centralisés, pas du tout interopérables, etc. Et donc, il y a un enjeu assez fort à travailler avec. enfin, à travailler sur des modèles de gouvernance qui permettent d'avoir une gouvernance ouverte, partagée, qui permettent d'aller vers une forme de démocratie technique, en fait, qui, justement, ouvre le champ des possibles de la façon dont on utilise les médias sociaux pour en faire confiance. donner un exemple plus pratique. Je pense qu'aujourd'hui, ce qui se passe sur Mastodon, c'est particulièrement intéressant. Donc Mastodon, c'est un équivalent à Twitter, qui est un logiciel libre. Enfin, Mastodon est un logiciel libre, pas Twitter. Donc c'est un logiciel libre, ça fonctionne exactement comme Twitter. Mais là où c'est intéressant, c'est que c'est un logiciel, ce n'est pas un service. Autrement dit, chacun peut installer son instance de Mastodon et ensuite va pouvoir... se connecter aux autres instances existantes du média social. C'est ça qui va former le réseau. Et donc, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que chaque instance va pouvoir décider de ses propres règles de régulation. Et c'est ce qui se passe, par exemple, sur l'instance mastodon.design, qui est spécifiquement celle des designers, qui est aujourd'hui principalement gérée par un designer qui s'appelle Timothée Gaugli. Et en fait, c'est hyper intéressant ce qui se passe sur mastodon.design, parce qu'une instance de ce type... Mastodon, ça coûte super cher. Par exemple, sur Mastodon Design, on est 1000 utilisateurs inscrits, on est 300 utilisateurs actifs, ça coûte 500 euros par mois à produire. pour un service numérique qui est gratuit. Donc, en fait, ce n'est pas gratuit, justement. Et donc, la question qui se pose, c'est, ces 500 euros par mois, comment on les trouve, en fait ? Qui fait des dons pour venir alimenter l'utilisation du média social ? Et donc, justement, c'est ça qui se pose comme question. Timothée, tout régulièrement, il sollicite la communauté pour dire, est-ce que vous préférez, en fait, faire un système de dons ? Est-ce qu'on fait un système d'abonnement ? Est-ce que si on se donne tel budget, vous préférez... Enfin, voilà, est-ce que plutôt vous préférez qu'on... n'augmente le budget nécessaire et qu'en fait, je ne sais pas, il nous faut 500, 600, 700 euros par mois parce qu'en fait, la masse de messages a augmenté sur le service ou au contraire, est-ce que vous préférez qu'on bride la quantité d'historique qu'on peut conserver, la taille des images qu'on peut uploader, la longueur des files d'actualité parce qu'en fait, vous préférez payer moins cher et donc, il faut que le service, en conséquence, s'adapte. Et donc c'est là où on en revient sur des logiques de démocratie technique, parce qu'on se réapproprie à la fois les enjeux qui sont posés par les médias sociaux numériques en termes économiques et en termes d'infrastructures, mais on se réapproprie aussi la capacité des utilisateurs à co-décider ce qui s'y passe. et je pense que justement le design a plein de choses à apporter là-dedans alors que ce soit en termes d'interface mais aussi de modèle de gouvernance parce que voilà ce qu'on fait sur Mastodon Design en fait ça se fait de manière hyper organique sans qu'il y ait vraiment de dispositifs qui soient complètement faits mis en place pour gérer ce débat et cette discussion démocratique mais on pourrait complètement imaginer qu'il y ait des processus qui permettent de faire ça et donc en fait tout ça pour dire quoi ? tout ça pour dire que l'interface les systèmes persuasifs c'est que leur pointe émergeait de l'iceberg ce que nous on perçoit parce que ça nous impacte mais derrière ce qui est hyper important c'est de se ressaisir des enjeux démocratiques de ces systèmes qui impactent nos vies au quotidien ce que je dis souvent c'est nos villes nos états on n'imaginerait jamais que ce soit géré par des groupes privés sur lesquels on n'a aucun poids alors que nos médias sociaux nous ont fait qu'on voit, qu'on perçoit comme des agora numériques, ça ne nous pose aucun problème que ce soit un homme, Mark Zuckerberg, qui possède l'écrasante majorité de ces médias sociaux et qui ne laisse absolument aucune place à des formes de discussion sur la gouvernance. Tout à fait. Hyper intéressant comme sujet. Donc concrètement, comment peut-on mesurer l'impact d'un projet d'un point de vue responsable ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question. Nous, c'est un truc sur lequel on essaie de travailler depuis pas mal de temps à Design Ethic. Il y a notamment... En fait, ce dont on se rend compte aujourd'hui, c'est qu'il faut... pour aller vers cette mesure de la responsabilité, justement segmenter les champs. C'est un peu ce que je disais au début, quand on se dit que la responsabilité, ça peut être l'éco-conception, l'accessibilité, la persuasion, la systémie, etc. Ce qu'il faut, c'est segmenter les champs. Et donc après, ce qu'il faut, c'est développer des critères par champ. Et donc, en fait, ça, c'est en train d'arriver, puisque sur l'accessibilité, on va avoir le RG2A, sur le... L'éco-conception, on a le RGESN. Sur les questions de persuasion, il n'y a pas forcément encore de référentiel, mais il commence à y avoir des guides, on a pu le dire avec Design Hérétique. Il commence à y avoir justement les cadres réglementaires, des sites, etc. qui arrivent. Donc en fait, il y a un certain nombre de cadres. Et aujourd'hui, un des enjeux, c'est notamment de rassembler ces... cadres réglementaires pour en faire des sortes, alors je ne sais pas s'il faut dire des checklists, des guides, mais en fait le constat derrière c'est que c'est impossible d'être expert sur tous ces sujets-là. Enfin voilà, moi c'est un peu ce que je disais au début, je connais bien le sujet de la persuasion, je connais beaucoup moins bien le sujet de l'accessibilité, je pense que c'est impossible d'être pertinent dans tous les sujets. Et donc si on veut produire des systèmes responsables, alors soit on a des grosses équipes et on a une personne qui est spécialisée dans chaque domaine, on a de la chance. soit sinon il faut qu'on arrive à développer des services qui facilitent ce travail de mise en conformité des différents enjeux de responsabilité. Et donc ça c'est quelque chose qu'on essaie de faire, on a notamment publié il y a quelques mois un index de la conception responsable qui essaye de justement faire une synthèse des différentes normes de responsabilité. et différentes recommandations qui ont pu être formalisées. Il y a peut-être d'autres propositions à faire sur ce sujet-là, mais aujourd'hui, je pense que c'est effectivement... Enfin voilà, il n'y a pas de solution magique pour produire des services responsables. Il faut se plonger dans le sujet, il faut être expert de... de ces sous-catégories, de ces sujets-là. Aujourd'hui, les conconceptions, c'est de plus en plus le cas. Il y a de plus en plus de personnes qui sont formées, qui sont expertes ou référentes dans leurs structures. Et pour les sujets qui sont un peu moins mis en visibilité, il faut qu'on arrive à développer des services sur lesquels les designers peuvent s'accrocher.

  • Speaker #0

    Ok. Et donc, selon toi, quel est l'avenir du design responsable et quels sont les défis à surmonter pour sa généralisation ?

  • Speaker #1

    J'aurais tendance à dire qu'il est fort probable que... qu'il y ait de nouveaux enjeux qui apparaissent. Alors, quand on dit ça, tout le monde va penser à l'IA. Je ne sais pas si l'IA va vraiment se poser en enjeu de responsabilité numérique pour les designers, ça on verra dans les mois à venir. Mais au-delà de ça, je pense que la question de l'inclusivité est largement sous-traitée aujourd'hui par les designers. La question des minorités, de l'intersectionnalité est aussi assez peu traitée. donc voilà les droits des travailleurs aussi donc il y a pas mal d'enjeux sociaux qui sont assez ignorés en fait si on regarde avec le recul j'ai qu'on a plutôt focalisé jusqu'à présent à la fois sur les enjeux environnementaux et sur les enjeux individuels mais pas trop sur les enjeux sociaux du numérique donc moi j'aurais tendance à dire que dans les prochaines années c'est surtout sur ces aspects là que va focaliser la responsabilité par le design en tout cas qu'il y a un travail à mener euh Parce qu'avant d'en arriver à du RGESN qui est capable de dire, en fait, sur votre service numérique, il y a telle et telle et telle recommandation sur l'éco-conception numérique, en fait, il faut être capable de formaliser la problématique posée par les enjeux environnementaux et être capable de dire en quoi est-ce que le design peut apporter une réponse sur les enjeux de l'éco-responsabilité numérique. Et donc, c'est encore ce travail-là qui reste à faire. sur une bonne partie des sujets de société. Donc j'aurais tendance à dire qu'il y a déjà un premier point sur ça. Et après, ce qui est intéressant, c'est de voir que de plus en plus, nos sujets de responsabilité numérique sont l'objet. de réglementation, comme on disait tout à l'heure, réglementation européenne ou nationale. Et donc, en fait, à la fois, c'est une bonne chose, parce qu'en fait, ça veut dire que ça avance, mais il y a aussi peut-être un risque pour la créativité, enfin, je ne sais pas si vous voulez dire la créativité en design, mais en tout cas, il y a un enjeu qui va se poser assez fortement sur ce que les designers peuvent ou ne peuvent pas faire. Oui, je pense que le sujet RGPD a été particulièrement... Un particulièrement bon exemple de ce point de vue-là, il y a tout un tas de services numériques aujourd'hui où sur la front page institutionnelle du site, les mentions qui sont inscrites relèvent bien plus du service juridique que des équipes de design, parce qu'il faut que telle mention marketing soit affichée dans telle taille de pixel minimale, le bouton pour accepter ou refuser les cookies doit être situé à cet endroit-là et pas à tel endroit. Et en fait, ça a été balisé par les services juridiques et les designers ont, d'une certaine manière, un choix extrêmement limité dans la capacité à produire ces interfaces. Il y a un risque à ce que ça s'étende à d'autres interfaces que ces front pages institutionnelles ou les bandes RGPD, parce qu'en fait, à partir du moment où le DSA dit si vous faites un dark pattern, c'est 6% du chiffre d'affaires mondial de sanctions en fait, les enjeux économiques, ils sont extrêmement importants. Et donc, voilà, à mon sens, aujourd'hui, on est un peu dans cette zone d'entre-deux, où d'un côté, c'est bien que... tous ces sujets-là soient enfin pris au sérieux et enfin traités par les instances de régulation. Mais de l'autre côté, il ne faut pas que les designers se laissent dépasser sur les aspects réglementaires parce que sinon, effectivement, ils ne vont plus avoir la main sur les différents aspects et on va leur donner un jeu d'interface DSA ou DMA compatible avec lesquels ils auront le droit de jouer mais qui sera beaucoup plus limité que ce que ne permet de faire, par exemple, un design système actuel.

  • Speaker #0

    ok et dernière question avant de terminer est-ce que tu as des conseils à partager aux designers qui souhaitent intégrer les principes responsables dans leurs pratiques ?

  • Speaker #1

    je réfléchis rejoignez des designers pratiques non en fait c'est Il y a plusieurs enjeux de ce point de vue-là. Quand je dis rejoigner des designers éthiques, d'une certaine manière, c'est à la fois une blague et d'un autre côté, je pense que les différents types d'actions qu'on met en œuvre sont vraiment utiles de ce point de vue-là. Donc, même si vous ne voulez pas aller vers notre association, je pense que vous avez intérêt à faire ce qu'on propose de faire, c'est-à-dire, un, faire de la veille, regarder quelles sont les ressources qui sont produites au fur et à mesure sur ces sujets-là. pour suivre les évolutions du métier sur cette question, de rejoindre les communautés, pas forcément design neurétique, il y a plein de communautés qui s'intéressent à ces sujets-là, mais rejoindre les communautés, ça permet de voir aussi comment font d'autres designers sur ces questions, partager des bonnes pratiques, aller à des événements qui traitent de ces questions-là, et c'est super parce qu'on voit que de plus en plus d'événements traitent largement ces questions-là au sein du monde du design, je pense aux UX Days qui... La programmation en 2024 qui met largement, en tout cas qui met de plus en plus l'accent sur ces questions-là, et ce n'est pas la première année. Je pense à Paris Web qui, évidemment, depuis de nombreuses années, traite largement ces questions. Donc, aller dans les communautés pour rencontrer des personnes et faire des partages d'expériences, et puis se former. Bien sûr. C'est assez essentiel, parce qu'il est probable que vous n'ayez pas été forcément formé. aux enjeux d'éco-conception quand vous étiez en formation de design, peut-être pas non plus aux questions d'accessibilité, aux questions de persuasion, c'est assez sûr que non. Et donc en fait, aujourd'hui, c'est important de se former sur ces sujets-là pour être capable justement d'avoir les bons réflexes, les bons principes, même si on n'est pas forcément expert absolu, qu'on ne connaît pas le détail du RGESN, savoir que ce qui compte, c'est le renouvellement des terminaux numériques, c'est important quand même.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Merci beaucoup Carl pour toute cette discussion qui a été super riche et super intéressante et à bientôt j'espère Merci à tous de nous avoir suivis sur cet épisode du podcast Un poil du X de La Grande Ourse N'hésitez pas à vous abonner à réagir et à partager le lien de l'épisode sur vos réseaux Vous pouvez également retrouver de nombreux articles traitant du design UXUI et de nombreux autres sujets sur notre site lagrandeours.design section blog A bientôt ! Sous-titrage ST'501

Description

Dans ce nouvel épisode, nous accueillons Karl Pineau !


Le sujet du jour est : Le design responsable (implications, enjeux, etc).


Au programme :


→ Le contexte dans lequel s’inscrit le design responsable.

→ Repenser les processus de conception pour réduire l'empreinte environnementale des produits et services.

→ Les enjeux du design persuasif et de l'attention.

→ Mesurer l'impact d'un projet design d'un point de vue responsable.


Retrouvez toute la discussion dans cet épisode !


Si l'épisode vous a plu, n'hésitez pas à attribuer 5 étoiles au podcast sur votre plateforme d'écoute.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et à toutes,

  • Speaker #1

    je suis Léa, merci de nous rejoindre pour ce nouvel épisode d'un poil du X en direct de l'agence Lagrandus. Aujourd'hui, nous accueillons Carl Pinault, membre de l'association Designer Éthique, avec qui nous allons parler des designs responsables, de la notion de design éthique et de ce que ces sujets impliquent dans les projets, les organisations et les équipes design. Merci de se joindre à nous aujourd'hui, Karl. Pour commencer, je te propose de te présenter en quelques mots.

  • Speaker #0

    Merci de m'accueillir. Je m'appelle Karl, je suis membre d'une association qui s'appelle Designer Ethic, qui est une association qui s'intéresse à la responsabilité numérique par le design à travers ses différents champs. Et par ailleurs, je suis enseignant-chercheur en sciences de l'information et de la communication.

  • Speaker #1

    Merci pour cette présentation. Alors pour débuter, il me semble que tu n'aimes pas vraiment parler de design éthique. même s'il s'agit d'un terme qui est de plus en plus répandu aujourd'hui. Est-ce que tu peux nous expliquer pourquoi ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est paradoxal parce que c'est le nom de l'association. Oui, alors c'est pas tel... Enfin, comment dire ? Le terme éthique, en fait, c'est un terme qui est très utilisé et très pratique, mais c'est un terme qui est souvent complexe parce qu'en fait, il est compris par tout le monde de manière différente. Et donc, effectivement, l'éthique, est-ce que c'est l'éthique philosophique classique avec la déontologie, le... L'éthique des vertus, le conséquentialisme, est-ce que c'est une sorte de bundle de toutes les problématiques qu'on peut trouver dans le numérique aujourd'hui, que ce soit l'accessibilité, l'éco-conception, la persuasion, etc. Tous ces sujets-là, ces différentes versions du terme éthique, ça crée souvent une confusion, voire des débats. Il y a beaucoup de gens aussi qui vont comprendre le terme éthique comme étant ce qui est bien. Donc c'est pas du tout comme ça qu'il faut comprendre ce qu'est l'éthique, c'est plutôt la recherche du bien, c'est le chemin vers le bien, ça prétend pas qu'on la trouve, c'est plutôt dire qu'on le cherche. Bref, du coup, précisément, le terme éthique va être vraiment sujet à de multiples définitions par plein de gens, ce qui fait que souvent on préfère, enfin moi je préfère ne pas l'utiliser, même si évidemment, voilà, il est... le nom de notre asso et on l'assume complètement. Et ça permet aussi de fédérer autour d'un concept qui est assez porteur. Mais effectivement, quand on rentre dans le détail de ce qu'on essaye de produire sur le numérique, moi, je préfère parler effectivement de responsabilité plus que d'éthique, qui me semble être un terme qui est plus intéressant en termes de justement de portée de ce que ça induit pour les personnes qui produisent le numérique.

  • Speaker #1

    D'accord, c'est très clair, merci. Comme tu viens de nous l'expliquer, tu préfères donc parler de design responsable. Est-ce que tu peux nous présenter ce qu'est le design responsable selon toi ?

  • Speaker #0

    Le terme responsable, je l'aime bien. C'est un débat d'ailleurs dans la communauté en ce moment, notamment avec Louis Dorac qui critique plutôt le terme responsable. Moi, le terme responsable, je l'aime bien parce que pour moi, la responsabilité, c'est une notion juridique. Et donc, quand on est responsable, on doit rendre des comptes des actions qu'on mène. Donc un numérique responsable par exemple, c'est un numérique qui doit rendre compte des problématiques qu'il induit pour le reste de la société ou pour l'environnement. Et donc finalement, le terme responsable, il me parle parce que c'est un terme qui nous engage. C'est-à-dire que souvent, d'ailleurs, le terme éthique est utilisé par... C'est une des critiques qui est formulée contre le terme éthique. C'est un terme qui est utilisé beaucoup par celles et ceux qui ne veulent pas de régulation, qui ne veulent pas de législation sur le numérique et qui disent Non, non, mais laissez le marché faire, on va développer nos propres éthiques et ça va bien se passer. Et en fait... très nombreux à considérer qu'il faut une régulation. Et en fait, cette régulation, elle passe justement, elle induit justement une posture de responsabilité, puisque une fois qu'il y a une régulation, si on veut se mettre en conformité avec cette régulation, il faut être responsable de ses actes devant la loi.

  • Speaker #1

    Ok. Et donc le design responsable, ça englobe au final pas mal de sous-catégories. Est-ce que tu peux nous en présenter en quelques mots certaines, et puis on reviendra plus en détail ensuite sur certaines de ces catégories ?

  • Speaker #0

    Ouais, en fait c'est assez compliqué de les lister toutes, parce que là encore, de la même manière finalement que le terme éthique, parler de responsabilité ou d'éthique de ce point de vue-là, à mon sens ça revient un peu à la même chose, le sujet c'est que produit le numérique sur les individus, sur notre société et sur l'environnement. Et donc en fait ça, ça va aller chercher plein de champs dehors d'enjeux de société. Il y a des enjeux qui sont particulièrement à la mode en ce moment. Tout le monde parle d'éco-conception numérique, des enjeux environnementaux, du numérique, etc. C'est un sujet qui est extrêmement porteur. Il y a des sujets, on va dire, historiques que sont celui de l'accessibilité. qui a été un des premiers à être normé, régulé, avec des normes d'accessibilité, des injonctions, des obligations des grandes entreprises à mettre en œuvre des pratiques d'accessibilité. Il y a des sujets qui sont, je ne sais pas si on peut les qualifier d'émergents, mais en tout cas qui font de plus en plus parler, que ce soit la question de l'attention, de la persuasion. Il y a un champ sur le design systémique qui est aussi de plus en plus... verbalisés, et après, il y a tout un autre, enfin, il y a tout un tas de chants qui sont plus ou moins... mise en valeur, mais qui gagnerait à l'aide, par exemple, je pense à tout ce qui est l'électronisme ou la place, l'injonction à l'utilisation des écrans ou des services numériques. Tous ces éléments-là, en fait, ce n'est pas forcément des choses qui vont être forcément directement mises dans le paquet design éthique, design responsable, mais ce sont des choses qui, potentiellement, ont vocation à l'être. En fait, l'idée, c'est... C'est de dire que la responsabilité par le design numérique, ce n'est pas une notion finie, ce n'est pas un champ d'expertise fini sur lequel on aurait déjà tout exploré. on se rend compte régulièrement que le numérique pose des enjeux pour telle ou telle raison, que ce soit sur le pouvoir des plateformes, que ce soit sur les travailleurs du clic, ce genre de choses. Et en fait, nous ce qu'on prône, c'est que quand on voit des enjeux de ce type-là émerger, il y a un sujet à ce que les designers se posent la question de leur responsabilité vis-à-vis de ça. On peut parler de l'inclusion, de l'intersectionnalité... il y a plein de sujets qu'on pourrait aborder à ce titre là

  • Speaker #1

    Aujourd'hui ces enjeux du design éthique sont de plus en plus présents dans les discussions et le paysage du design français comme tu as pu commencer à en parler dans quel contexte cela vient s'inscrire et quelle est la responsabilité des designers dans ce contexte selon toi ?

  • Speaker #0

    Alors ça c'est une grande question la responsabilité des designers et En fait, nous quand on a créé l'asso justement, c'était à un moment où on s'intéressait surtout à la question de l'attention et de la persuasion. Et c'est un moment où notamment Tristan Harris... américain, enfin pas designer, mais product designer, on va dire, de l'équipe de Gmail chez Google, commençait à faire beaucoup parler de lui et à pointer le vol du temps, de l'attention des utilisateurs, etc. Et donc, en fait, nous, on a créé l'assaut en partie pour traiter ces questions-là et voir quel était le rôle effectif des designers là-dedans. De fait, si les designers sont ceux qui mettent en œuvre les pratiques de persuasion, pour prendre ce cas précis, mais qui aussi mettent en œuvre en réalité les interfaces, les fonctionnalités qui peuvent être particulièrement problématiques en termes d'éco-conception ou d'accessibilité, etc. Si c'est ceux qui en fait font l'opérationnel, en réalité ce n'est pas forcément les designers qui ont un pouvoir de décision qui est particulièrement important ou qui sont responsables des choix qui sont opérés dans la conception des services numériques. Et donc ça, c'est presque une sorte de sous-sujet dans le sujet qui est le positionnement des designers vis-à-vis de leur propre discipline. D'une certaine manière, aujourd'hui, les designers se retrouvent à assumer... le terme design, on le retrouve partout, UX design, UI design, etc. Le terme design est massivement présent. Les designers sont d'une certaine manière les responsables, les porte-parole, ceux qui doivent justifier cette discipline. Mais en réalité, ce n'est pas forcément eux qui ont tout le temps la main sur les tenants et les aboutissants de cette discipline. Et donc ça, c'est en fait le principal sujet qui est en train de se poser. C'est comment est-ce que les designers... Une forme de dilemme, c'est les designers défendent leur discipline en disant, regardez, elle peut apporter plein de choses bien à la production de services numériques et pas que, notamment en termes d'utilisabilité, en termes d'expérience utilisateur, etc. Mais d'un autre côté, à l'inverse, ils doivent aussi se retrouver à justifier ou à défendre leur discipline quand elle est mobilisée pour des raisons qui sont plutôt négatives. Tout ce qui va être de l'ordre des dark patterns, pousser la consommation dans... plein de services de e-commerce, de pousser l'attention dans plein de médias sociaux qui dépendent d'une économie d'attention. Et donc ça, c'est plus compliqué. Et donc c'est un peu le grand dilemme des designers que de savoir où se placer vis-à-vis de ça. Il n'y a pas forcément, à mon sens, de solution particulièrement facile. On parle souvent en termes de solution de la place des designers dans les organisations et notamment de leur niveau hiérarchique. C'est sûr que c'est un enjeu. C'est un enjeu, mais par contre... c'est pas quelque chose qui va se régler d'un claquement de doigts et qui va te dire, en fait, il faudrait des head of design. ou des VP Design pour résoudre tous ces problèmes-là.

  • Speaker #1

    D'accord. Comme tu l'as précédemment cité, il y a plusieurs sujets qui constituent le paysage global du design responsable. Je te propose de revenir sur certains d'entre eux, en commençant par l'accessibilité et l'inclusion. Comment peut-on garantir aujourd'hui que ces principes sont intégrés dans toutes les étapes d'un processus de conception ? Quelles sont les meilleures pratiques pour s'assurer que les produits et services sont accessibles à tous, et quel que soit leur niveau d'habileté ou leurs besoins spécifiques ?

  • Speaker #0

    Ça, c'est une grande question aussi. Alors moi, je ne suis pas un expert de l'accessibilité et de l'inclusion, donc je ne vais pas... de faire comme si j'étais quelqu'un de particulièrement efficace là-dessus. Et d'ailleurs, ça fait même partie des sujets sur lesquels nous, on a du mal à être vraiment bon. Je pense aussi que c'est lié au fait que, enfin en tout cas, le fait que nous, on ait du mal à être particulièrement bon, c'est un sujet sur lequel les designers sont sous-formés, notamment dans les formations en design qui apparaissent extrêmement peu. Enfin, la question d'accessibilité, ou en tout cas, c'est souvent une sorte de... Il y a souvent une session de sensibilisation, mais ça ne va souvent pas vraiment au-delà. Je pense que ce serait plus intelligent de ma part de faire des recommandations de personnes qui sont pertinentes pour aller creuser ces sujets-là. Je pense que ces dernières années, c'est notamment autour des services numériques de l'État où il y a eu beaucoup d'avancées. Je pense à tout ce que fait la DINUM, à Anne-Sophie Tranchet, qui est par ailleurs membre de l'association Design Hérétique. autour de Design Accessible, un site web de ressources qui explique comment justement les designers peuvent prendre en compte ces questions d'accessibilité pour faire en sorte qu'elles soient bien traitées à l'échelle du service. Et en fait, j'ai l'impression que de ce point de vue-là, en termes d'écosystème, pour ne pas forcément aller dans les recommandations, mais plus pour parler d'écosystème, il y a un peu un enjeu, mine de rien, à ce que les designers se ressaisissent de cette question-là. C'est un peu le sujet historique de la responsabilité numérique, mais malheureusement, il est un peu souvent mis de côté. C'est vrai. Parce que j'ai l'impression, parfois vécu comme une contrainte créative par les designers, notamment d'un point de vue graphique. Et ça, c'est vraiment problématique. Donc, voilà. prenez garde à traiter ce sujet là les ressources principalement celles qui ont pu être produites par la DINUM, Design Accessible et puis après il y a plein d'agences ou de structures spécialisées dans l'accessibilité je pense à Access 42 notamment qui est particulièrement connu sur ce sujet là qui offre plein de ressources sur lesquelles on peut se former super,

  • Speaker #1

    merci pour ces conseils Un autre sujet clé dans une pratique de design responsable, c'est l'éco-conception, dont tu as mentionné le sujet au début. En tant que designer, comment pouvons-nous repenser nos processus de conception pour réduire l'empreinte environnementale des produits et services sur lesquels nous travaillons ?

  • Speaker #0

    C'est que des grandes questions que tu me poses. Sur l'éco-conception numérique, est-ce qu'à mon sens, là où il faut comprendre... Enfin, il n'y a pas... Il y a quelques grands principes qu'il faut avoir en tête. Le premier grand principe qu'il faut avoir en tête, c'est que ce qui représente l'écrasante majorité de l'empreinte environnementale du numérique, c'est les terminaux. Et donc, en fait, la priorité, ça doit être de faire en sorte de ralentir le taux de renouvellement de nos terminaux numériques, soit les ordinateurs ou les téléphones. Et donc, ça sous-entend lutter contre les différentes formes d'obsolescence qui peuvent avoir lieu sur ces terminaux, que ce soit l'obsolescence matérielle, donc typiquement un ordinateur qui... Un téléphone qui casse quand on laisse tomber son iPhone dans la rue et que paf, il a les grands cassés, il y a un enjeu à travailler sur la réparabilité plutôt que d'en changer. Ce n'est pas forcément là où les designers numériques ont la part d'action la plus évidente, à mon sens. C'est plutôt sur les deux autres facteurs d'obsolescence que sont l'obsolescence marketing, psychologique. qui va donc jouer sur le phénomène, l'envie de remplacer son terminal numérique, parce qu'il n'est plus à la mode, il n'a pas une tête très jolie, etc. Et donc ça, il y a un enjeu à rendre désirable le numérique, pas forcément high-tech. Et donc ça, c'est un vrai sujet, notamment pour tous ceux qui travaillent dans des domaines proches du marketing en design. Et puis, il y a un deuxième sujet, et c'est peut-être là le cœur de l'éco-conception numérique, qui est la question de l'obsolescence logicielle. Et donc, comment est-ce qu'on fait en sorte que les logiciels qu'on a sur nos ordinateurs, sur nos téléphones, soient relativement légers ? En fait, on se rend compte aujourd'hui que les personnes qui ont un téléphone qui a 10 ans, 8 ans, 10 ans, 12 ans, le principal facteur limitant d'usage de leur téléphone, c'est la compatibilité des applications sur le long terme. Le fait que si vous voulez par exemple réserver un billet de train, l'application d'achat de billets va vous dire Ah non désolé, on ne supporte plus ce téléphone, donc il faut que vous changiez de téléphone pour pouvoir scanner votre QR code quand vous arrivez sur la borne d'entrée dans le train. et donc c'est en fait pour cette raison que les gens changent de téléphone et donc c'est là où il y a un vrai enjeu à produire des applications qui soient dans la durée suffisamment compatibles avec les versions anciennes de téléphone et qui soient suffisamment légères pour ne pas faire fondre la batterie des téléphones ou laguer les vieux téléphones à mort et c'est là où on en arrive au réel intérêt du design parce qu'en fait souvent on a l'impression que c'est une question de développeurs, l'éco-conception qu'en fait il s'agit d'optimiser C'est sûr qu'optimiser du code, c'est une bonne pratique et qu'il faut le faire, mais il y a un vrai enjeu à définir quelles sont les fonctions qu'on veut voir sur un service numérique. Est-ce que ça sert à quelque chose de mettre en place une fonction qui va être utilisée peut-être par 5% des utilisateurs ? La question du périmètre fonctionnel des applications numériques, c'est un enjeu majeur de l'éco-coupure. conception numérique et c'est pour ça que les designers jouent un rôle prégnant parce que a priori c'est justement eux qui vont concevoir l'expérience utilisateur donc ils vont définir quelles sont les fonctionnalités à mettre en place sur le service et c'est là où les choix pertinents doivent se faire.

  • Speaker #1

    C'est très clair, merci beaucoup. Je te propose maintenant d'aborder une autre thématique très importante du design responsable, il s'agit des problématiques liées au design persuasif et au design de l'attention. D'abord, est-ce que tu peux nous expliquer ce qui se cache derrière ces termes ?

  • Speaker #0

    Alors, design de l'attention, c'est un terme qui a été particulièrement popularisé dans les années 2017-2018, notamment en lien avec l'économie de l'attention. C'est assez simple, c'est le fait de dire que tout un tas de services numériques ont un modèle économique basé sur la valorisation économique de notre attention. caractéristiques en ligne, c'est les médias sociaux qui vont diffuser de la publicité lorsque l'on scrolle sur nos files d'actualité. Et donc, c'est cette publicité qui génère de l'argent. Et donc, plus on passe de temps sur ces services, plus ça génère de publicité. Et donc, à partir du moment où l'enjeu, c'est de faire passer du temps à l'utilisateur sur le service numérique, ça devient un enjeu de design puisqu'on peut mettre tout un tas de mécanismes qui vont pousser l'utilisateur à rester. sur le service numérique. Et donc, c'est pour ça qu'on parle de design de l'attention. Alors moi, c'est une expression que je n'aime pas beaucoup parce qu'en fait, ça focalise sur l'attention et donc sur le temps passé, souvent, où parfois, on va dériver vers des, comment dire, des interprétations sociales ou en termes de santé qui me paraissent être beaucoup plus complexes à aborder alors qu'a priori, on n'a pas besoin d'aller sur ces aspects-là. traiter ce problème à mon sens, en tout cas ça ne veut pas dire que c'est un problème, mais pour les designers je pense que c'est plus simple de ne pas trop se saisir de cette question-là, et c'est pour ça que je parle plutôt de persuasion, parce qu'en fait ce qui est au cœur de ce sujet-là, c'est la façon dont les usages, enfin pardon, les interfaces... l'expérience utilisateur va modifier, va persuader, va modifier le comportement des utilisateurs des services numériques. Et donc ça aujourd'hui, c'est quelque chose qui est particulièrement présent dans nos applications. Il y a plein de mécanismes de persuasion, le plus connu étant le système des notifications, très souvent utilisé pour faire venir un utilisateur sur un service numérique. Et donc, ce qui est intéressant, c'est que c'est un sujet qui a été pendant très longtemps sous les radars de beaucoup de structures, mais qui aujourd'hui est de plus en plus mis en visibilité. Et ça, c'est notamment visible d'un point de vue législatif et réglementaire, parce que déjà, les autorités de régulation du numérique et du droit à la consommation se saisissent de plus en plus de ce sujet-là. Je pense à la GCCRF en France qui... On commence à s'intéresser à la façon dont les applications numériques peuvent enfreindre le droit à la consommation vis-à-vis du droit à la consommation existant. et donc à sanctionner des pratiques de design persuasif. Et puis surtout, depuis quelques mois, le DSA, le DMA, donc Digital Services Act, Digital Market Act, sont entrés en vigueur et en fait ils incluent tout un ensemble de dispositions qui viennent apposer un cadre réglementaire qui vont contraindre les pratiques de design persuasive. Et la dimension la plus marquante, c'est l'interdiction dans le cadre du DSA entre les deux. donc des dark patterns, les fameux dark patterns, même si en fait ça pose plein de sujets, parce que ça pose la question de comment est-ce qu'on est capable d'identifier un dark pattern, comment est-ce qu'on est capable de prouver la présence d'un dark pattern, est-ce qu'en fait un dark pattern c'est un élément d'interface, est-ce que c'est une expérience utilisateur sur le long terme, dans le temps, bref, en fait ça pose plein de questions très pratiques, mais c'est déjà un énorme pas en avant que de voir la reconnaissance du rôle des interfaces dans les problématiques qu'on peut avoir dans les services numériques. En fait, ce qui est vraiment important pour moi, c'est que depuis 20 ans, depuis que le numérique a émergé, tout le monde s'est focalisé sur le code, sur les algorithmes. Il y a même cette phrase qui dit le code, c'est la loi Alors, c'est vrai. Mais en fait, je pense que c'est hyper important d'intégrer le fait que l'interface aussi, joue un rôle extrêmement important dans la formalisation des habitudes des utilisateurs. Et ce n'est pas pour rien qu'on parle d'affordance, de friction, etc. L'interface est particulièrement importante et ça c'était assez invisibilisé jusqu'à présent, à mon avis pour des raisons de technosolutionnisme, où la technologie apparaît magique et le code fait plus techno que l'interface. Ce qui est vraiment bien, c'est qu'aujourd'hui les autorités de régulation se rendent compte que l'interface joue un rôle et donc commencent à la normaliser.

  • Speaker #1

    Et donc nous, en tant que designer, comment pouvons-nous concevoir de manière responsable à ce sujet-là pour encourager l'engagement et les interactions tout en respectant la liberté individuelle et en évitant les pièges du design persuasif excessif ?

  • Speaker #0

    Eh bien ça, c'est un vrai gros sujet. Il n'y a pas de réponse facile, il n'y a pas de réponse absolue aujourd'hui et surtout, c'est souvent pas une... problématique de design justement, ou en tout cas pas de design d'interface. En fait, je pense que ce qui est hyper important à comprendre, c'est qu'une même interface, un même composant, peut avoir une dimension extrêmement persuasive et problématique dans certains cas, et être particulièrement importante dans d'autres cas. Je pense que la notification, de ce point de vue-là, est l'exemple plus simple pour comprendre ce problème. Une notification... qui vient vous dire, on va citer LinkedIn aujourd'hui, vous avez quatre personnes qui ont visité votre profil, cliquez pour en savoir plus. On est complètement dans une dimension persuasive. L'objectif, c'est d'attirer l'utilisateur sur l'application pour le retenir dans une logique d'économie de l'attention. Et donc, c'est problématique. Par contre, si vous recevez une notification qui vous dit que vous avez un proche qui a besoin d'aide ou qu'il se passe un truc dans votre ville et qu'il faut que vous vous mettiez en sécurité, c'est une... interface qui est évidemment essentielle. Donc en fait, le problème, il n'est pas au niveau de l'interface, il est au niveau de ce qu'on en fait. Et donc c'est là où il faut se mettre des cadres, en fait, des règles sur la façon dont on peut utiliser ou pas ces interfaces et parfois aussi dans la façon dont on va vraiment concevoir le détail de ces interfaces. Et c'est là où, en fait, à mon sens, il faut élargir la focale, ne pas parler que d'expérience utilisateur. mais regarder aussi ce qui l'entoure. Et en fait, un exemple intéressant de ce point de vue-là, c'est ce qu'a mis en avant la fameuse commission sur les écrans qui a été demandée par Emmanuel Macron et qui a rendu son rapport il y a un mois. Et cette commission, elle parlait de produire des médias sociaux éthiques. Et là, c'est typiquement, je pense qu'un bon cas d'étude, parce que si on regarde les médias sociaux et qu'on cherche à produire des médias sociaux éthiques, en fait... de premier abord, de prime abord, on pourrait chercher à se focaliser uniquement sur l'interface. On pourrait dire, en fait, c'est simple, on va enlever les files d'actualité. C'est simple, on va enlever... les notifications. C'est simple, on va forcer l'arrêt de la pub et puis on va forcer des modérateurs. Sauf qu'en fait, si on y réfléchit un peu, on se rend compte assez vite que ça ne va pas marcher parce que ça va faire, ça va produire des services qui vont être particulièrement peu utilisables, on va avoir beaucoup de frictions indésirables, bref, en fait, on va produire une mauvaise expérience utilisateur et donc on va produire des mauvais médias sociaux et donc ça ne fonctionne pas. Donc en fait, parfois dans les services numériques, on a besoin de laisser de... des systèmes persuasifs sur le service pour faciliter son utilisabilité. Et donc c'est là où on en arrive justement à ces côtés side qui vont permettre de protéger ce service même s'il est persuasif. Et là c'est notamment par exemple les modèles de gouvernance. Et je pense que le design justement, il a plein de choses à apporter aux modèles de gouvernance des médias sociaux numériques. Si on réfléchit aujourd'hui à la façon dont... Comment fonctionnent les médias sociaux qu'on utilise ? En fait, c'est des médias qui sont monolithiques, qui dépendent d'une seule entreprise, qui sont totalement centralisés, pas du tout interopérables, etc. Et donc, il y a un enjeu assez fort à travailler avec. enfin, à travailler sur des modèles de gouvernance qui permettent d'avoir une gouvernance ouverte, partagée, qui permettent d'aller vers une forme de démocratie technique, en fait, qui, justement, ouvre le champ des possibles de la façon dont on utilise les médias sociaux pour en faire confiance. donner un exemple plus pratique. Je pense qu'aujourd'hui, ce qui se passe sur Mastodon, c'est particulièrement intéressant. Donc Mastodon, c'est un équivalent à Twitter, qui est un logiciel libre. Enfin, Mastodon est un logiciel libre, pas Twitter. Donc c'est un logiciel libre, ça fonctionne exactement comme Twitter. Mais là où c'est intéressant, c'est que c'est un logiciel, ce n'est pas un service. Autrement dit, chacun peut installer son instance de Mastodon et ensuite va pouvoir... se connecter aux autres instances existantes du média social. C'est ça qui va former le réseau. Et donc, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que chaque instance va pouvoir décider de ses propres règles de régulation. Et c'est ce qui se passe, par exemple, sur l'instance mastodon.design, qui est spécifiquement celle des designers, qui est aujourd'hui principalement gérée par un designer qui s'appelle Timothée Gaugli. Et en fait, c'est hyper intéressant ce qui se passe sur mastodon.design, parce qu'une instance de ce type... Mastodon, ça coûte super cher. Par exemple, sur Mastodon Design, on est 1000 utilisateurs inscrits, on est 300 utilisateurs actifs, ça coûte 500 euros par mois à produire. pour un service numérique qui est gratuit. Donc, en fait, ce n'est pas gratuit, justement. Et donc, la question qui se pose, c'est, ces 500 euros par mois, comment on les trouve, en fait ? Qui fait des dons pour venir alimenter l'utilisation du média social ? Et donc, justement, c'est ça qui se pose comme question. Timothée, tout régulièrement, il sollicite la communauté pour dire, est-ce que vous préférez, en fait, faire un système de dons ? Est-ce qu'on fait un système d'abonnement ? Est-ce que si on se donne tel budget, vous préférez... Enfin, voilà, est-ce que plutôt vous préférez qu'on... n'augmente le budget nécessaire et qu'en fait, je ne sais pas, il nous faut 500, 600, 700 euros par mois parce qu'en fait, la masse de messages a augmenté sur le service ou au contraire, est-ce que vous préférez qu'on bride la quantité d'historique qu'on peut conserver, la taille des images qu'on peut uploader, la longueur des files d'actualité parce qu'en fait, vous préférez payer moins cher et donc, il faut que le service, en conséquence, s'adapte. Et donc c'est là où on en revient sur des logiques de démocratie technique, parce qu'on se réapproprie à la fois les enjeux qui sont posés par les médias sociaux numériques en termes économiques et en termes d'infrastructures, mais on se réapproprie aussi la capacité des utilisateurs à co-décider ce qui s'y passe. et je pense que justement le design a plein de choses à apporter là-dedans alors que ce soit en termes d'interface mais aussi de modèle de gouvernance parce que voilà ce qu'on fait sur Mastodon Design en fait ça se fait de manière hyper organique sans qu'il y ait vraiment de dispositifs qui soient complètement faits mis en place pour gérer ce débat et cette discussion démocratique mais on pourrait complètement imaginer qu'il y ait des processus qui permettent de faire ça et donc en fait tout ça pour dire quoi ? tout ça pour dire que l'interface les systèmes persuasifs c'est que leur pointe émergeait de l'iceberg ce que nous on perçoit parce que ça nous impacte mais derrière ce qui est hyper important c'est de se ressaisir des enjeux démocratiques de ces systèmes qui impactent nos vies au quotidien ce que je dis souvent c'est nos villes nos états on n'imaginerait jamais que ce soit géré par des groupes privés sur lesquels on n'a aucun poids alors que nos médias sociaux nous ont fait qu'on voit, qu'on perçoit comme des agora numériques, ça ne nous pose aucun problème que ce soit un homme, Mark Zuckerberg, qui possède l'écrasante majorité de ces médias sociaux et qui ne laisse absolument aucune place à des formes de discussion sur la gouvernance. Tout à fait. Hyper intéressant comme sujet. Donc concrètement, comment peut-on mesurer l'impact d'un projet d'un point de vue responsable ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question. Nous, c'est un truc sur lequel on essaie de travailler depuis pas mal de temps à Design Ethic. Il y a notamment... En fait, ce dont on se rend compte aujourd'hui, c'est qu'il faut... pour aller vers cette mesure de la responsabilité, justement segmenter les champs. C'est un peu ce que je disais au début, quand on se dit que la responsabilité, ça peut être l'éco-conception, l'accessibilité, la persuasion, la systémie, etc. Ce qu'il faut, c'est segmenter les champs. Et donc après, ce qu'il faut, c'est développer des critères par champ. Et donc, en fait, ça, c'est en train d'arriver, puisque sur l'accessibilité, on va avoir le RG2A, sur le... L'éco-conception, on a le RGESN. Sur les questions de persuasion, il n'y a pas forcément encore de référentiel, mais il commence à y avoir des guides, on a pu le dire avec Design Hérétique. Il commence à y avoir justement les cadres réglementaires, des sites, etc. qui arrivent. Donc en fait, il y a un certain nombre de cadres. Et aujourd'hui, un des enjeux, c'est notamment de rassembler ces... cadres réglementaires pour en faire des sortes, alors je ne sais pas s'il faut dire des checklists, des guides, mais en fait le constat derrière c'est que c'est impossible d'être expert sur tous ces sujets-là. Enfin voilà, moi c'est un peu ce que je disais au début, je connais bien le sujet de la persuasion, je connais beaucoup moins bien le sujet de l'accessibilité, je pense que c'est impossible d'être pertinent dans tous les sujets. Et donc si on veut produire des systèmes responsables, alors soit on a des grosses équipes et on a une personne qui est spécialisée dans chaque domaine, on a de la chance. soit sinon il faut qu'on arrive à développer des services qui facilitent ce travail de mise en conformité des différents enjeux de responsabilité. Et donc ça c'est quelque chose qu'on essaie de faire, on a notamment publié il y a quelques mois un index de la conception responsable qui essaye de justement faire une synthèse des différentes normes de responsabilité. et différentes recommandations qui ont pu être formalisées. Il y a peut-être d'autres propositions à faire sur ce sujet-là, mais aujourd'hui, je pense que c'est effectivement... Enfin voilà, il n'y a pas de solution magique pour produire des services responsables. Il faut se plonger dans le sujet, il faut être expert de... de ces sous-catégories, de ces sujets-là. Aujourd'hui, les conconceptions, c'est de plus en plus le cas. Il y a de plus en plus de personnes qui sont formées, qui sont expertes ou référentes dans leurs structures. Et pour les sujets qui sont un peu moins mis en visibilité, il faut qu'on arrive à développer des services sur lesquels les designers peuvent s'accrocher.

  • Speaker #0

    Ok. Et donc, selon toi, quel est l'avenir du design responsable et quels sont les défis à surmonter pour sa généralisation ?

  • Speaker #1

    J'aurais tendance à dire qu'il est fort probable que... qu'il y ait de nouveaux enjeux qui apparaissent. Alors, quand on dit ça, tout le monde va penser à l'IA. Je ne sais pas si l'IA va vraiment se poser en enjeu de responsabilité numérique pour les designers, ça on verra dans les mois à venir. Mais au-delà de ça, je pense que la question de l'inclusivité est largement sous-traitée aujourd'hui par les designers. La question des minorités, de l'intersectionnalité est aussi assez peu traitée. donc voilà les droits des travailleurs aussi donc il y a pas mal d'enjeux sociaux qui sont assez ignorés en fait si on regarde avec le recul j'ai qu'on a plutôt focalisé jusqu'à présent à la fois sur les enjeux environnementaux et sur les enjeux individuels mais pas trop sur les enjeux sociaux du numérique donc moi j'aurais tendance à dire que dans les prochaines années c'est surtout sur ces aspects là que va focaliser la responsabilité par le design en tout cas qu'il y a un travail à mener euh Parce qu'avant d'en arriver à du RGESN qui est capable de dire, en fait, sur votre service numérique, il y a telle et telle et telle recommandation sur l'éco-conception numérique, en fait, il faut être capable de formaliser la problématique posée par les enjeux environnementaux et être capable de dire en quoi est-ce que le design peut apporter une réponse sur les enjeux de l'éco-responsabilité numérique. Et donc, c'est encore ce travail-là qui reste à faire. sur une bonne partie des sujets de société. Donc j'aurais tendance à dire qu'il y a déjà un premier point sur ça. Et après, ce qui est intéressant, c'est de voir que de plus en plus, nos sujets de responsabilité numérique sont l'objet. de réglementation, comme on disait tout à l'heure, réglementation européenne ou nationale. Et donc, en fait, à la fois, c'est une bonne chose, parce qu'en fait, ça veut dire que ça avance, mais il y a aussi peut-être un risque pour la créativité, enfin, je ne sais pas si vous voulez dire la créativité en design, mais en tout cas, il y a un enjeu qui va se poser assez fortement sur ce que les designers peuvent ou ne peuvent pas faire. Oui, je pense que le sujet RGPD a été particulièrement... Un particulièrement bon exemple de ce point de vue-là, il y a tout un tas de services numériques aujourd'hui où sur la front page institutionnelle du site, les mentions qui sont inscrites relèvent bien plus du service juridique que des équipes de design, parce qu'il faut que telle mention marketing soit affichée dans telle taille de pixel minimale, le bouton pour accepter ou refuser les cookies doit être situé à cet endroit-là et pas à tel endroit. Et en fait, ça a été balisé par les services juridiques et les designers ont, d'une certaine manière, un choix extrêmement limité dans la capacité à produire ces interfaces. Il y a un risque à ce que ça s'étende à d'autres interfaces que ces front pages institutionnelles ou les bandes RGPD, parce qu'en fait, à partir du moment où le DSA dit si vous faites un dark pattern, c'est 6% du chiffre d'affaires mondial de sanctions en fait, les enjeux économiques, ils sont extrêmement importants. Et donc, voilà, à mon sens, aujourd'hui, on est un peu dans cette zone d'entre-deux, où d'un côté, c'est bien que... tous ces sujets-là soient enfin pris au sérieux et enfin traités par les instances de régulation. Mais de l'autre côté, il ne faut pas que les designers se laissent dépasser sur les aspects réglementaires parce que sinon, effectivement, ils ne vont plus avoir la main sur les différents aspects et on va leur donner un jeu d'interface DSA ou DMA compatible avec lesquels ils auront le droit de jouer mais qui sera beaucoup plus limité que ce que ne permet de faire, par exemple, un design système actuel.

  • Speaker #0

    ok et dernière question avant de terminer est-ce que tu as des conseils à partager aux designers qui souhaitent intégrer les principes responsables dans leurs pratiques ?

  • Speaker #1

    je réfléchis rejoignez des designers pratiques non en fait c'est Il y a plusieurs enjeux de ce point de vue-là. Quand je dis rejoigner des designers éthiques, d'une certaine manière, c'est à la fois une blague et d'un autre côté, je pense que les différents types d'actions qu'on met en œuvre sont vraiment utiles de ce point de vue-là. Donc, même si vous ne voulez pas aller vers notre association, je pense que vous avez intérêt à faire ce qu'on propose de faire, c'est-à-dire, un, faire de la veille, regarder quelles sont les ressources qui sont produites au fur et à mesure sur ces sujets-là. pour suivre les évolutions du métier sur cette question, de rejoindre les communautés, pas forcément design neurétique, il y a plein de communautés qui s'intéressent à ces sujets-là, mais rejoindre les communautés, ça permet de voir aussi comment font d'autres designers sur ces questions, partager des bonnes pratiques, aller à des événements qui traitent de ces questions-là, et c'est super parce qu'on voit que de plus en plus d'événements traitent largement ces questions-là au sein du monde du design, je pense aux UX Days qui... La programmation en 2024 qui met largement, en tout cas qui met de plus en plus l'accent sur ces questions-là, et ce n'est pas la première année. Je pense à Paris Web qui, évidemment, depuis de nombreuses années, traite largement ces questions. Donc, aller dans les communautés pour rencontrer des personnes et faire des partages d'expériences, et puis se former. Bien sûr. C'est assez essentiel, parce qu'il est probable que vous n'ayez pas été forcément formé. aux enjeux d'éco-conception quand vous étiez en formation de design, peut-être pas non plus aux questions d'accessibilité, aux questions de persuasion, c'est assez sûr que non. Et donc en fait, aujourd'hui, c'est important de se former sur ces sujets-là pour être capable justement d'avoir les bons réflexes, les bons principes, même si on n'est pas forcément expert absolu, qu'on ne connaît pas le détail du RGESN, savoir que ce qui compte, c'est le renouvellement des terminaux numériques, c'est important quand même.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Merci beaucoup Carl pour toute cette discussion qui a été super riche et super intéressante et à bientôt j'espère Merci à tous de nous avoir suivis sur cet épisode du podcast Un poil du X de La Grande Ourse N'hésitez pas à vous abonner à réagir et à partager le lien de l'épisode sur vos réseaux Vous pouvez également retrouver de nombreux articles traitant du design UXUI et de nombreux autres sujets sur notre site lagrandeours.design section blog A bientôt ! Sous-titrage ST'501

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Description

Dans ce nouvel épisode, nous accueillons Karl Pineau !


Le sujet du jour est : Le design responsable (implications, enjeux, etc).


Au programme :


→ Le contexte dans lequel s’inscrit le design responsable.

→ Repenser les processus de conception pour réduire l'empreinte environnementale des produits et services.

→ Les enjeux du design persuasif et de l'attention.

→ Mesurer l'impact d'un projet design d'un point de vue responsable.


Retrouvez toute la discussion dans cet épisode !


Si l'épisode vous a plu, n'hésitez pas à attribuer 5 étoiles au podcast sur votre plateforme d'écoute.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et à toutes,

  • Speaker #1

    je suis Léa, merci de nous rejoindre pour ce nouvel épisode d'un poil du X en direct de l'agence Lagrandus. Aujourd'hui, nous accueillons Carl Pinault, membre de l'association Designer Éthique, avec qui nous allons parler des designs responsables, de la notion de design éthique et de ce que ces sujets impliquent dans les projets, les organisations et les équipes design. Merci de se joindre à nous aujourd'hui, Karl. Pour commencer, je te propose de te présenter en quelques mots.

  • Speaker #0

    Merci de m'accueillir. Je m'appelle Karl, je suis membre d'une association qui s'appelle Designer Ethic, qui est une association qui s'intéresse à la responsabilité numérique par le design à travers ses différents champs. Et par ailleurs, je suis enseignant-chercheur en sciences de l'information et de la communication.

  • Speaker #1

    Merci pour cette présentation. Alors pour débuter, il me semble que tu n'aimes pas vraiment parler de design éthique. même s'il s'agit d'un terme qui est de plus en plus répandu aujourd'hui. Est-ce que tu peux nous expliquer pourquoi ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est paradoxal parce que c'est le nom de l'association. Oui, alors c'est pas tel... Enfin, comment dire ? Le terme éthique, en fait, c'est un terme qui est très utilisé et très pratique, mais c'est un terme qui est souvent complexe parce qu'en fait, il est compris par tout le monde de manière différente. Et donc, effectivement, l'éthique, est-ce que c'est l'éthique philosophique classique avec la déontologie, le... L'éthique des vertus, le conséquentialisme, est-ce que c'est une sorte de bundle de toutes les problématiques qu'on peut trouver dans le numérique aujourd'hui, que ce soit l'accessibilité, l'éco-conception, la persuasion, etc. Tous ces sujets-là, ces différentes versions du terme éthique, ça crée souvent une confusion, voire des débats. Il y a beaucoup de gens aussi qui vont comprendre le terme éthique comme étant ce qui est bien. Donc c'est pas du tout comme ça qu'il faut comprendre ce qu'est l'éthique, c'est plutôt la recherche du bien, c'est le chemin vers le bien, ça prétend pas qu'on la trouve, c'est plutôt dire qu'on le cherche. Bref, du coup, précisément, le terme éthique va être vraiment sujet à de multiples définitions par plein de gens, ce qui fait que souvent on préfère, enfin moi je préfère ne pas l'utiliser, même si évidemment, voilà, il est... le nom de notre asso et on l'assume complètement. Et ça permet aussi de fédérer autour d'un concept qui est assez porteur. Mais effectivement, quand on rentre dans le détail de ce qu'on essaye de produire sur le numérique, moi, je préfère parler effectivement de responsabilité plus que d'éthique, qui me semble être un terme qui est plus intéressant en termes de justement de portée de ce que ça induit pour les personnes qui produisent le numérique.

  • Speaker #1

    D'accord, c'est très clair, merci. Comme tu viens de nous l'expliquer, tu préfères donc parler de design responsable. Est-ce que tu peux nous présenter ce qu'est le design responsable selon toi ?

  • Speaker #0

    Le terme responsable, je l'aime bien. C'est un débat d'ailleurs dans la communauté en ce moment, notamment avec Louis Dorac qui critique plutôt le terme responsable. Moi, le terme responsable, je l'aime bien parce que pour moi, la responsabilité, c'est une notion juridique. Et donc, quand on est responsable, on doit rendre des comptes des actions qu'on mène. Donc un numérique responsable par exemple, c'est un numérique qui doit rendre compte des problématiques qu'il induit pour le reste de la société ou pour l'environnement. Et donc finalement, le terme responsable, il me parle parce que c'est un terme qui nous engage. C'est-à-dire que souvent, d'ailleurs, le terme éthique est utilisé par... C'est une des critiques qui est formulée contre le terme éthique. C'est un terme qui est utilisé beaucoup par celles et ceux qui ne veulent pas de régulation, qui ne veulent pas de législation sur le numérique et qui disent Non, non, mais laissez le marché faire, on va développer nos propres éthiques et ça va bien se passer. Et en fait... très nombreux à considérer qu'il faut une régulation. Et en fait, cette régulation, elle passe justement, elle induit justement une posture de responsabilité, puisque une fois qu'il y a une régulation, si on veut se mettre en conformité avec cette régulation, il faut être responsable de ses actes devant la loi.

  • Speaker #1

    Ok. Et donc le design responsable, ça englobe au final pas mal de sous-catégories. Est-ce que tu peux nous en présenter en quelques mots certaines, et puis on reviendra plus en détail ensuite sur certaines de ces catégories ?

  • Speaker #0

    Ouais, en fait c'est assez compliqué de les lister toutes, parce que là encore, de la même manière finalement que le terme éthique, parler de responsabilité ou d'éthique de ce point de vue-là, à mon sens ça revient un peu à la même chose, le sujet c'est que produit le numérique sur les individus, sur notre société et sur l'environnement. Et donc en fait ça, ça va aller chercher plein de champs dehors d'enjeux de société. Il y a des enjeux qui sont particulièrement à la mode en ce moment. Tout le monde parle d'éco-conception numérique, des enjeux environnementaux, du numérique, etc. C'est un sujet qui est extrêmement porteur. Il y a des sujets, on va dire, historiques que sont celui de l'accessibilité. qui a été un des premiers à être normé, régulé, avec des normes d'accessibilité, des injonctions, des obligations des grandes entreprises à mettre en œuvre des pratiques d'accessibilité. Il y a des sujets qui sont, je ne sais pas si on peut les qualifier d'émergents, mais en tout cas qui font de plus en plus parler, que ce soit la question de l'attention, de la persuasion. Il y a un champ sur le design systémique qui est aussi de plus en plus... verbalisés, et après, il y a tout un autre, enfin, il y a tout un tas de chants qui sont plus ou moins... mise en valeur, mais qui gagnerait à l'aide, par exemple, je pense à tout ce qui est l'électronisme ou la place, l'injonction à l'utilisation des écrans ou des services numériques. Tous ces éléments-là, en fait, ce n'est pas forcément des choses qui vont être forcément directement mises dans le paquet design éthique, design responsable, mais ce sont des choses qui, potentiellement, ont vocation à l'être. En fait, l'idée, c'est... C'est de dire que la responsabilité par le design numérique, ce n'est pas une notion finie, ce n'est pas un champ d'expertise fini sur lequel on aurait déjà tout exploré. on se rend compte régulièrement que le numérique pose des enjeux pour telle ou telle raison, que ce soit sur le pouvoir des plateformes, que ce soit sur les travailleurs du clic, ce genre de choses. Et en fait, nous ce qu'on prône, c'est que quand on voit des enjeux de ce type-là émerger, il y a un sujet à ce que les designers se posent la question de leur responsabilité vis-à-vis de ça. On peut parler de l'inclusion, de l'intersectionnalité... il y a plein de sujets qu'on pourrait aborder à ce titre là

  • Speaker #1

    Aujourd'hui ces enjeux du design éthique sont de plus en plus présents dans les discussions et le paysage du design français comme tu as pu commencer à en parler dans quel contexte cela vient s'inscrire et quelle est la responsabilité des designers dans ce contexte selon toi ?

  • Speaker #0

    Alors ça c'est une grande question la responsabilité des designers et En fait, nous quand on a créé l'asso justement, c'était à un moment où on s'intéressait surtout à la question de l'attention et de la persuasion. Et c'est un moment où notamment Tristan Harris... américain, enfin pas designer, mais product designer, on va dire, de l'équipe de Gmail chez Google, commençait à faire beaucoup parler de lui et à pointer le vol du temps, de l'attention des utilisateurs, etc. Et donc, en fait, nous, on a créé l'assaut en partie pour traiter ces questions-là et voir quel était le rôle effectif des designers là-dedans. De fait, si les designers sont ceux qui mettent en œuvre les pratiques de persuasion, pour prendre ce cas précis, mais qui aussi mettent en œuvre en réalité les interfaces, les fonctionnalités qui peuvent être particulièrement problématiques en termes d'éco-conception ou d'accessibilité, etc. Si c'est ceux qui en fait font l'opérationnel, en réalité ce n'est pas forcément les designers qui ont un pouvoir de décision qui est particulièrement important ou qui sont responsables des choix qui sont opérés dans la conception des services numériques. Et donc ça, c'est presque une sorte de sous-sujet dans le sujet qui est le positionnement des designers vis-à-vis de leur propre discipline. D'une certaine manière, aujourd'hui, les designers se retrouvent à assumer... le terme design, on le retrouve partout, UX design, UI design, etc. Le terme design est massivement présent. Les designers sont d'une certaine manière les responsables, les porte-parole, ceux qui doivent justifier cette discipline. Mais en réalité, ce n'est pas forcément eux qui ont tout le temps la main sur les tenants et les aboutissants de cette discipline. Et donc ça, c'est en fait le principal sujet qui est en train de se poser. C'est comment est-ce que les designers... Une forme de dilemme, c'est les designers défendent leur discipline en disant, regardez, elle peut apporter plein de choses bien à la production de services numériques et pas que, notamment en termes d'utilisabilité, en termes d'expérience utilisateur, etc. Mais d'un autre côté, à l'inverse, ils doivent aussi se retrouver à justifier ou à défendre leur discipline quand elle est mobilisée pour des raisons qui sont plutôt négatives. Tout ce qui va être de l'ordre des dark patterns, pousser la consommation dans... plein de services de e-commerce, de pousser l'attention dans plein de médias sociaux qui dépendent d'une économie d'attention. Et donc ça, c'est plus compliqué. Et donc c'est un peu le grand dilemme des designers que de savoir où se placer vis-à-vis de ça. Il n'y a pas forcément, à mon sens, de solution particulièrement facile. On parle souvent en termes de solution de la place des designers dans les organisations et notamment de leur niveau hiérarchique. C'est sûr que c'est un enjeu. C'est un enjeu, mais par contre... c'est pas quelque chose qui va se régler d'un claquement de doigts et qui va te dire, en fait, il faudrait des head of design. ou des VP Design pour résoudre tous ces problèmes-là.

  • Speaker #1

    D'accord. Comme tu l'as précédemment cité, il y a plusieurs sujets qui constituent le paysage global du design responsable. Je te propose de revenir sur certains d'entre eux, en commençant par l'accessibilité et l'inclusion. Comment peut-on garantir aujourd'hui que ces principes sont intégrés dans toutes les étapes d'un processus de conception ? Quelles sont les meilleures pratiques pour s'assurer que les produits et services sont accessibles à tous, et quel que soit leur niveau d'habileté ou leurs besoins spécifiques ?

  • Speaker #0

    Ça, c'est une grande question aussi. Alors moi, je ne suis pas un expert de l'accessibilité et de l'inclusion, donc je ne vais pas... de faire comme si j'étais quelqu'un de particulièrement efficace là-dessus. Et d'ailleurs, ça fait même partie des sujets sur lesquels nous, on a du mal à être vraiment bon. Je pense aussi que c'est lié au fait que, enfin en tout cas, le fait que nous, on ait du mal à être particulièrement bon, c'est un sujet sur lequel les designers sont sous-formés, notamment dans les formations en design qui apparaissent extrêmement peu. Enfin, la question d'accessibilité, ou en tout cas, c'est souvent une sorte de... Il y a souvent une session de sensibilisation, mais ça ne va souvent pas vraiment au-delà. Je pense que ce serait plus intelligent de ma part de faire des recommandations de personnes qui sont pertinentes pour aller creuser ces sujets-là. Je pense que ces dernières années, c'est notamment autour des services numériques de l'État où il y a eu beaucoup d'avancées. Je pense à tout ce que fait la DINUM, à Anne-Sophie Tranchet, qui est par ailleurs membre de l'association Design Hérétique. autour de Design Accessible, un site web de ressources qui explique comment justement les designers peuvent prendre en compte ces questions d'accessibilité pour faire en sorte qu'elles soient bien traitées à l'échelle du service. Et en fait, j'ai l'impression que de ce point de vue-là, en termes d'écosystème, pour ne pas forcément aller dans les recommandations, mais plus pour parler d'écosystème, il y a un peu un enjeu, mine de rien, à ce que les designers se ressaisissent de cette question-là. C'est un peu le sujet historique de la responsabilité numérique, mais malheureusement, il est un peu souvent mis de côté. C'est vrai. Parce que j'ai l'impression, parfois vécu comme une contrainte créative par les designers, notamment d'un point de vue graphique. Et ça, c'est vraiment problématique. Donc, voilà. prenez garde à traiter ce sujet là les ressources principalement celles qui ont pu être produites par la DINUM, Design Accessible et puis après il y a plein d'agences ou de structures spécialisées dans l'accessibilité je pense à Access 42 notamment qui est particulièrement connu sur ce sujet là qui offre plein de ressources sur lesquelles on peut se former super,

  • Speaker #1

    merci pour ces conseils Un autre sujet clé dans une pratique de design responsable, c'est l'éco-conception, dont tu as mentionné le sujet au début. En tant que designer, comment pouvons-nous repenser nos processus de conception pour réduire l'empreinte environnementale des produits et services sur lesquels nous travaillons ?

  • Speaker #0

    C'est que des grandes questions que tu me poses. Sur l'éco-conception numérique, est-ce qu'à mon sens, là où il faut comprendre... Enfin, il n'y a pas... Il y a quelques grands principes qu'il faut avoir en tête. Le premier grand principe qu'il faut avoir en tête, c'est que ce qui représente l'écrasante majorité de l'empreinte environnementale du numérique, c'est les terminaux. Et donc, en fait, la priorité, ça doit être de faire en sorte de ralentir le taux de renouvellement de nos terminaux numériques, soit les ordinateurs ou les téléphones. Et donc, ça sous-entend lutter contre les différentes formes d'obsolescence qui peuvent avoir lieu sur ces terminaux, que ce soit l'obsolescence matérielle, donc typiquement un ordinateur qui... Un téléphone qui casse quand on laisse tomber son iPhone dans la rue et que paf, il a les grands cassés, il y a un enjeu à travailler sur la réparabilité plutôt que d'en changer. Ce n'est pas forcément là où les designers numériques ont la part d'action la plus évidente, à mon sens. C'est plutôt sur les deux autres facteurs d'obsolescence que sont l'obsolescence marketing, psychologique. qui va donc jouer sur le phénomène, l'envie de remplacer son terminal numérique, parce qu'il n'est plus à la mode, il n'a pas une tête très jolie, etc. Et donc ça, il y a un enjeu à rendre désirable le numérique, pas forcément high-tech. Et donc ça, c'est un vrai sujet, notamment pour tous ceux qui travaillent dans des domaines proches du marketing en design. Et puis, il y a un deuxième sujet, et c'est peut-être là le cœur de l'éco-conception numérique, qui est la question de l'obsolescence logicielle. Et donc, comment est-ce qu'on fait en sorte que les logiciels qu'on a sur nos ordinateurs, sur nos téléphones, soient relativement légers ? En fait, on se rend compte aujourd'hui que les personnes qui ont un téléphone qui a 10 ans, 8 ans, 10 ans, 12 ans, le principal facteur limitant d'usage de leur téléphone, c'est la compatibilité des applications sur le long terme. Le fait que si vous voulez par exemple réserver un billet de train, l'application d'achat de billets va vous dire Ah non désolé, on ne supporte plus ce téléphone, donc il faut que vous changiez de téléphone pour pouvoir scanner votre QR code quand vous arrivez sur la borne d'entrée dans le train. et donc c'est en fait pour cette raison que les gens changent de téléphone et donc c'est là où il y a un vrai enjeu à produire des applications qui soient dans la durée suffisamment compatibles avec les versions anciennes de téléphone et qui soient suffisamment légères pour ne pas faire fondre la batterie des téléphones ou laguer les vieux téléphones à mort et c'est là où on en arrive au réel intérêt du design parce qu'en fait souvent on a l'impression que c'est une question de développeurs, l'éco-conception qu'en fait il s'agit d'optimiser C'est sûr qu'optimiser du code, c'est une bonne pratique et qu'il faut le faire, mais il y a un vrai enjeu à définir quelles sont les fonctions qu'on veut voir sur un service numérique. Est-ce que ça sert à quelque chose de mettre en place une fonction qui va être utilisée peut-être par 5% des utilisateurs ? La question du périmètre fonctionnel des applications numériques, c'est un enjeu majeur de l'éco-coupure. conception numérique et c'est pour ça que les designers jouent un rôle prégnant parce que a priori c'est justement eux qui vont concevoir l'expérience utilisateur donc ils vont définir quelles sont les fonctionnalités à mettre en place sur le service et c'est là où les choix pertinents doivent se faire.

  • Speaker #1

    C'est très clair, merci beaucoup. Je te propose maintenant d'aborder une autre thématique très importante du design responsable, il s'agit des problématiques liées au design persuasif et au design de l'attention. D'abord, est-ce que tu peux nous expliquer ce qui se cache derrière ces termes ?

  • Speaker #0

    Alors, design de l'attention, c'est un terme qui a été particulièrement popularisé dans les années 2017-2018, notamment en lien avec l'économie de l'attention. C'est assez simple, c'est le fait de dire que tout un tas de services numériques ont un modèle économique basé sur la valorisation économique de notre attention. caractéristiques en ligne, c'est les médias sociaux qui vont diffuser de la publicité lorsque l'on scrolle sur nos files d'actualité. Et donc, c'est cette publicité qui génère de l'argent. Et donc, plus on passe de temps sur ces services, plus ça génère de publicité. Et donc, à partir du moment où l'enjeu, c'est de faire passer du temps à l'utilisateur sur le service numérique, ça devient un enjeu de design puisqu'on peut mettre tout un tas de mécanismes qui vont pousser l'utilisateur à rester. sur le service numérique. Et donc, c'est pour ça qu'on parle de design de l'attention. Alors moi, c'est une expression que je n'aime pas beaucoup parce qu'en fait, ça focalise sur l'attention et donc sur le temps passé, souvent, où parfois, on va dériver vers des, comment dire, des interprétations sociales ou en termes de santé qui me paraissent être beaucoup plus complexes à aborder alors qu'a priori, on n'a pas besoin d'aller sur ces aspects-là. traiter ce problème à mon sens, en tout cas ça ne veut pas dire que c'est un problème, mais pour les designers je pense que c'est plus simple de ne pas trop se saisir de cette question-là, et c'est pour ça que je parle plutôt de persuasion, parce qu'en fait ce qui est au cœur de ce sujet-là, c'est la façon dont les usages, enfin pardon, les interfaces... l'expérience utilisateur va modifier, va persuader, va modifier le comportement des utilisateurs des services numériques. Et donc ça aujourd'hui, c'est quelque chose qui est particulièrement présent dans nos applications. Il y a plein de mécanismes de persuasion, le plus connu étant le système des notifications, très souvent utilisé pour faire venir un utilisateur sur un service numérique. Et donc, ce qui est intéressant, c'est que c'est un sujet qui a été pendant très longtemps sous les radars de beaucoup de structures, mais qui aujourd'hui est de plus en plus mis en visibilité. Et ça, c'est notamment visible d'un point de vue législatif et réglementaire, parce que déjà, les autorités de régulation du numérique et du droit à la consommation se saisissent de plus en plus de ce sujet-là. Je pense à la GCCRF en France qui... On commence à s'intéresser à la façon dont les applications numériques peuvent enfreindre le droit à la consommation vis-à-vis du droit à la consommation existant. et donc à sanctionner des pratiques de design persuasif. Et puis surtout, depuis quelques mois, le DSA, le DMA, donc Digital Services Act, Digital Market Act, sont entrés en vigueur et en fait ils incluent tout un ensemble de dispositions qui viennent apposer un cadre réglementaire qui vont contraindre les pratiques de design persuasive. Et la dimension la plus marquante, c'est l'interdiction dans le cadre du DSA entre les deux. donc des dark patterns, les fameux dark patterns, même si en fait ça pose plein de sujets, parce que ça pose la question de comment est-ce qu'on est capable d'identifier un dark pattern, comment est-ce qu'on est capable de prouver la présence d'un dark pattern, est-ce qu'en fait un dark pattern c'est un élément d'interface, est-ce que c'est une expérience utilisateur sur le long terme, dans le temps, bref, en fait ça pose plein de questions très pratiques, mais c'est déjà un énorme pas en avant que de voir la reconnaissance du rôle des interfaces dans les problématiques qu'on peut avoir dans les services numériques. En fait, ce qui est vraiment important pour moi, c'est que depuis 20 ans, depuis que le numérique a émergé, tout le monde s'est focalisé sur le code, sur les algorithmes. Il y a même cette phrase qui dit le code, c'est la loi Alors, c'est vrai. Mais en fait, je pense que c'est hyper important d'intégrer le fait que l'interface aussi, joue un rôle extrêmement important dans la formalisation des habitudes des utilisateurs. Et ce n'est pas pour rien qu'on parle d'affordance, de friction, etc. L'interface est particulièrement importante et ça c'était assez invisibilisé jusqu'à présent, à mon avis pour des raisons de technosolutionnisme, où la technologie apparaît magique et le code fait plus techno que l'interface. Ce qui est vraiment bien, c'est qu'aujourd'hui les autorités de régulation se rendent compte que l'interface joue un rôle et donc commencent à la normaliser.

  • Speaker #1

    Et donc nous, en tant que designer, comment pouvons-nous concevoir de manière responsable à ce sujet-là pour encourager l'engagement et les interactions tout en respectant la liberté individuelle et en évitant les pièges du design persuasif excessif ?

  • Speaker #0

    Eh bien ça, c'est un vrai gros sujet. Il n'y a pas de réponse facile, il n'y a pas de réponse absolue aujourd'hui et surtout, c'est souvent pas une... problématique de design justement, ou en tout cas pas de design d'interface. En fait, je pense que ce qui est hyper important à comprendre, c'est qu'une même interface, un même composant, peut avoir une dimension extrêmement persuasive et problématique dans certains cas, et être particulièrement importante dans d'autres cas. Je pense que la notification, de ce point de vue-là, est l'exemple plus simple pour comprendre ce problème. Une notification... qui vient vous dire, on va citer LinkedIn aujourd'hui, vous avez quatre personnes qui ont visité votre profil, cliquez pour en savoir plus. On est complètement dans une dimension persuasive. L'objectif, c'est d'attirer l'utilisateur sur l'application pour le retenir dans une logique d'économie de l'attention. Et donc, c'est problématique. Par contre, si vous recevez une notification qui vous dit que vous avez un proche qui a besoin d'aide ou qu'il se passe un truc dans votre ville et qu'il faut que vous vous mettiez en sécurité, c'est une... interface qui est évidemment essentielle. Donc en fait, le problème, il n'est pas au niveau de l'interface, il est au niveau de ce qu'on en fait. Et donc c'est là où il faut se mettre des cadres, en fait, des règles sur la façon dont on peut utiliser ou pas ces interfaces et parfois aussi dans la façon dont on va vraiment concevoir le détail de ces interfaces. Et c'est là où, en fait, à mon sens, il faut élargir la focale, ne pas parler que d'expérience utilisateur. mais regarder aussi ce qui l'entoure. Et en fait, un exemple intéressant de ce point de vue-là, c'est ce qu'a mis en avant la fameuse commission sur les écrans qui a été demandée par Emmanuel Macron et qui a rendu son rapport il y a un mois. Et cette commission, elle parlait de produire des médias sociaux éthiques. Et là, c'est typiquement, je pense qu'un bon cas d'étude, parce que si on regarde les médias sociaux et qu'on cherche à produire des médias sociaux éthiques, en fait... de premier abord, de prime abord, on pourrait chercher à se focaliser uniquement sur l'interface. On pourrait dire, en fait, c'est simple, on va enlever les files d'actualité. C'est simple, on va enlever... les notifications. C'est simple, on va forcer l'arrêt de la pub et puis on va forcer des modérateurs. Sauf qu'en fait, si on y réfléchit un peu, on se rend compte assez vite que ça ne va pas marcher parce que ça va faire, ça va produire des services qui vont être particulièrement peu utilisables, on va avoir beaucoup de frictions indésirables, bref, en fait, on va produire une mauvaise expérience utilisateur et donc on va produire des mauvais médias sociaux et donc ça ne fonctionne pas. Donc en fait, parfois dans les services numériques, on a besoin de laisser de... des systèmes persuasifs sur le service pour faciliter son utilisabilité. Et donc c'est là où on en arrive justement à ces côtés side qui vont permettre de protéger ce service même s'il est persuasif. Et là c'est notamment par exemple les modèles de gouvernance. Et je pense que le design justement, il a plein de choses à apporter aux modèles de gouvernance des médias sociaux numériques. Si on réfléchit aujourd'hui à la façon dont... Comment fonctionnent les médias sociaux qu'on utilise ? En fait, c'est des médias qui sont monolithiques, qui dépendent d'une seule entreprise, qui sont totalement centralisés, pas du tout interopérables, etc. Et donc, il y a un enjeu assez fort à travailler avec. enfin, à travailler sur des modèles de gouvernance qui permettent d'avoir une gouvernance ouverte, partagée, qui permettent d'aller vers une forme de démocratie technique, en fait, qui, justement, ouvre le champ des possibles de la façon dont on utilise les médias sociaux pour en faire confiance. donner un exemple plus pratique. Je pense qu'aujourd'hui, ce qui se passe sur Mastodon, c'est particulièrement intéressant. Donc Mastodon, c'est un équivalent à Twitter, qui est un logiciel libre. Enfin, Mastodon est un logiciel libre, pas Twitter. Donc c'est un logiciel libre, ça fonctionne exactement comme Twitter. Mais là où c'est intéressant, c'est que c'est un logiciel, ce n'est pas un service. Autrement dit, chacun peut installer son instance de Mastodon et ensuite va pouvoir... se connecter aux autres instances existantes du média social. C'est ça qui va former le réseau. Et donc, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que chaque instance va pouvoir décider de ses propres règles de régulation. Et c'est ce qui se passe, par exemple, sur l'instance mastodon.design, qui est spécifiquement celle des designers, qui est aujourd'hui principalement gérée par un designer qui s'appelle Timothée Gaugli. Et en fait, c'est hyper intéressant ce qui se passe sur mastodon.design, parce qu'une instance de ce type... Mastodon, ça coûte super cher. Par exemple, sur Mastodon Design, on est 1000 utilisateurs inscrits, on est 300 utilisateurs actifs, ça coûte 500 euros par mois à produire. pour un service numérique qui est gratuit. Donc, en fait, ce n'est pas gratuit, justement. Et donc, la question qui se pose, c'est, ces 500 euros par mois, comment on les trouve, en fait ? Qui fait des dons pour venir alimenter l'utilisation du média social ? Et donc, justement, c'est ça qui se pose comme question. Timothée, tout régulièrement, il sollicite la communauté pour dire, est-ce que vous préférez, en fait, faire un système de dons ? Est-ce qu'on fait un système d'abonnement ? Est-ce que si on se donne tel budget, vous préférez... Enfin, voilà, est-ce que plutôt vous préférez qu'on... n'augmente le budget nécessaire et qu'en fait, je ne sais pas, il nous faut 500, 600, 700 euros par mois parce qu'en fait, la masse de messages a augmenté sur le service ou au contraire, est-ce que vous préférez qu'on bride la quantité d'historique qu'on peut conserver, la taille des images qu'on peut uploader, la longueur des files d'actualité parce qu'en fait, vous préférez payer moins cher et donc, il faut que le service, en conséquence, s'adapte. Et donc c'est là où on en revient sur des logiques de démocratie technique, parce qu'on se réapproprie à la fois les enjeux qui sont posés par les médias sociaux numériques en termes économiques et en termes d'infrastructures, mais on se réapproprie aussi la capacité des utilisateurs à co-décider ce qui s'y passe. et je pense que justement le design a plein de choses à apporter là-dedans alors que ce soit en termes d'interface mais aussi de modèle de gouvernance parce que voilà ce qu'on fait sur Mastodon Design en fait ça se fait de manière hyper organique sans qu'il y ait vraiment de dispositifs qui soient complètement faits mis en place pour gérer ce débat et cette discussion démocratique mais on pourrait complètement imaginer qu'il y ait des processus qui permettent de faire ça et donc en fait tout ça pour dire quoi ? tout ça pour dire que l'interface les systèmes persuasifs c'est que leur pointe émergeait de l'iceberg ce que nous on perçoit parce que ça nous impacte mais derrière ce qui est hyper important c'est de se ressaisir des enjeux démocratiques de ces systèmes qui impactent nos vies au quotidien ce que je dis souvent c'est nos villes nos états on n'imaginerait jamais que ce soit géré par des groupes privés sur lesquels on n'a aucun poids alors que nos médias sociaux nous ont fait qu'on voit, qu'on perçoit comme des agora numériques, ça ne nous pose aucun problème que ce soit un homme, Mark Zuckerberg, qui possède l'écrasante majorité de ces médias sociaux et qui ne laisse absolument aucune place à des formes de discussion sur la gouvernance. Tout à fait. Hyper intéressant comme sujet. Donc concrètement, comment peut-on mesurer l'impact d'un projet d'un point de vue responsable ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question. Nous, c'est un truc sur lequel on essaie de travailler depuis pas mal de temps à Design Ethic. Il y a notamment... En fait, ce dont on se rend compte aujourd'hui, c'est qu'il faut... pour aller vers cette mesure de la responsabilité, justement segmenter les champs. C'est un peu ce que je disais au début, quand on se dit que la responsabilité, ça peut être l'éco-conception, l'accessibilité, la persuasion, la systémie, etc. Ce qu'il faut, c'est segmenter les champs. Et donc après, ce qu'il faut, c'est développer des critères par champ. Et donc, en fait, ça, c'est en train d'arriver, puisque sur l'accessibilité, on va avoir le RG2A, sur le... L'éco-conception, on a le RGESN. Sur les questions de persuasion, il n'y a pas forcément encore de référentiel, mais il commence à y avoir des guides, on a pu le dire avec Design Hérétique. Il commence à y avoir justement les cadres réglementaires, des sites, etc. qui arrivent. Donc en fait, il y a un certain nombre de cadres. Et aujourd'hui, un des enjeux, c'est notamment de rassembler ces... cadres réglementaires pour en faire des sortes, alors je ne sais pas s'il faut dire des checklists, des guides, mais en fait le constat derrière c'est que c'est impossible d'être expert sur tous ces sujets-là. Enfin voilà, moi c'est un peu ce que je disais au début, je connais bien le sujet de la persuasion, je connais beaucoup moins bien le sujet de l'accessibilité, je pense que c'est impossible d'être pertinent dans tous les sujets. Et donc si on veut produire des systèmes responsables, alors soit on a des grosses équipes et on a une personne qui est spécialisée dans chaque domaine, on a de la chance. soit sinon il faut qu'on arrive à développer des services qui facilitent ce travail de mise en conformité des différents enjeux de responsabilité. Et donc ça c'est quelque chose qu'on essaie de faire, on a notamment publié il y a quelques mois un index de la conception responsable qui essaye de justement faire une synthèse des différentes normes de responsabilité. et différentes recommandations qui ont pu être formalisées. Il y a peut-être d'autres propositions à faire sur ce sujet-là, mais aujourd'hui, je pense que c'est effectivement... Enfin voilà, il n'y a pas de solution magique pour produire des services responsables. Il faut se plonger dans le sujet, il faut être expert de... de ces sous-catégories, de ces sujets-là. Aujourd'hui, les conconceptions, c'est de plus en plus le cas. Il y a de plus en plus de personnes qui sont formées, qui sont expertes ou référentes dans leurs structures. Et pour les sujets qui sont un peu moins mis en visibilité, il faut qu'on arrive à développer des services sur lesquels les designers peuvent s'accrocher.

  • Speaker #0

    Ok. Et donc, selon toi, quel est l'avenir du design responsable et quels sont les défis à surmonter pour sa généralisation ?

  • Speaker #1

    J'aurais tendance à dire qu'il est fort probable que... qu'il y ait de nouveaux enjeux qui apparaissent. Alors, quand on dit ça, tout le monde va penser à l'IA. Je ne sais pas si l'IA va vraiment se poser en enjeu de responsabilité numérique pour les designers, ça on verra dans les mois à venir. Mais au-delà de ça, je pense que la question de l'inclusivité est largement sous-traitée aujourd'hui par les designers. La question des minorités, de l'intersectionnalité est aussi assez peu traitée. donc voilà les droits des travailleurs aussi donc il y a pas mal d'enjeux sociaux qui sont assez ignorés en fait si on regarde avec le recul j'ai qu'on a plutôt focalisé jusqu'à présent à la fois sur les enjeux environnementaux et sur les enjeux individuels mais pas trop sur les enjeux sociaux du numérique donc moi j'aurais tendance à dire que dans les prochaines années c'est surtout sur ces aspects là que va focaliser la responsabilité par le design en tout cas qu'il y a un travail à mener euh Parce qu'avant d'en arriver à du RGESN qui est capable de dire, en fait, sur votre service numérique, il y a telle et telle et telle recommandation sur l'éco-conception numérique, en fait, il faut être capable de formaliser la problématique posée par les enjeux environnementaux et être capable de dire en quoi est-ce que le design peut apporter une réponse sur les enjeux de l'éco-responsabilité numérique. Et donc, c'est encore ce travail-là qui reste à faire. sur une bonne partie des sujets de société. Donc j'aurais tendance à dire qu'il y a déjà un premier point sur ça. Et après, ce qui est intéressant, c'est de voir que de plus en plus, nos sujets de responsabilité numérique sont l'objet. de réglementation, comme on disait tout à l'heure, réglementation européenne ou nationale. Et donc, en fait, à la fois, c'est une bonne chose, parce qu'en fait, ça veut dire que ça avance, mais il y a aussi peut-être un risque pour la créativité, enfin, je ne sais pas si vous voulez dire la créativité en design, mais en tout cas, il y a un enjeu qui va se poser assez fortement sur ce que les designers peuvent ou ne peuvent pas faire. Oui, je pense que le sujet RGPD a été particulièrement... Un particulièrement bon exemple de ce point de vue-là, il y a tout un tas de services numériques aujourd'hui où sur la front page institutionnelle du site, les mentions qui sont inscrites relèvent bien plus du service juridique que des équipes de design, parce qu'il faut que telle mention marketing soit affichée dans telle taille de pixel minimale, le bouton pour accepter ou refuser les cookies doit être situé à cet endroit-là et pas à tel endroit. Et en fait, ça a été balisé par les services juridiques et les designers ont, d'une certaine manière, un choix extrêmement limité dans la capacité à produire ces interfaces. Il y a un risque à ce que ça s'étende à d'autres interfaces que ces front pages institutionnelles ou les bandes RGPD, parce qu'en fait, à partir du moment où le DSA dit si vous faites un dark pattern, c'est 6% du chiffre d'affaires mondial de sanctions en fait, les enjeux économiques, ils sont extrêmement importants. Et donc, voilà, à mon sens, aujourd'hui, on est un peu dans cette zone d'entre-deux, où d'un côté, c'est bien que... tous ces sujets-là soient enfin pris au sérieux et enfin traités par les instances de régulation. Mais de l'autre côté, il ne faut pas que les designers se laissent dépasser sur les aspects réglementaires parce que sinon, effectivement, ils ne vont plus avoir la main sur les différents aspects et on va leur donner un jeu d'interface DSA ou DMA compatible avec lesquels ils auront le droit de jouer mais qui sera beaucoup plus limité que ce que ne permet de faire, par exemple, un design système actuel.

  • Speaker #0

    ok et dernière question avant de terminer est-ce que tu as des conseils à partager aux designers qui souhaitent intégrer les principes responsables dans leurs pratiques ?

  • Speaker #1

    je réfléchis rejoignez des designers pratiques non en fait c'est Il y a plusieurs enjeux de ce point de vue-là. Quand je dis rejoigner des designers éthiques, d'une certaine manière, c'est à la fois une blague et d'un autre côté, je pense que les différents types d'actions qu'on met en œuvre sont vraiment utiles de ce point de vue-là. Donc, même si vous ne voulez pas aller vers notre association, je pense que vous avez intérêt à faire ce qu'on propose de faire, c'est-à-dire, un, faire de la veille, regarder quelles sont les ressources qui sont produites au fur et à mesure sur ces sujets-là. pour suivre les évolutions du métier sur cette question, de rejoindre les communautés, pas forcément design neurétique, il y a plein de communautés qui s'intéressent à ces sujets-là, mais rejoindre les communautés, ça permet de voir aussi comment font d'autres designers sur ces questions, partager des bonnes pratiques, aller à des événements qui traitent de ces questions-là, et c'est super parce qu'on voit que de plus en plus d'événements traitent largement ces questions-là au sein du monde du design, je pense aux UX Days qui... La programmation en 2024 qui met largement, en tout cas qui met de plus en plus l'accent sur ces questions-là, et ce n'est pas la première année. Je pense à Paris Web qui, évidemment, depuis de nombreuses années, traite largement ces questions. Donc, aller dans les communautés pour rencontrer des personnes et faire des partages d'expériences, et puis se former. Bien sûr. C'est assez essentiel, parce qu'il est probable que vous n'ayez pas été forcément formé. aux enjeux d'éco-conception quand vous étiez en formation de design, peut-être pas non plus aux questions d'accessibilité, aux questions de persuasion, c'est assez sûr que non. Et donc en fait, aujourd'hui, c'est important de se former sur ces sujets-là pour être capable justement d'avoir les bons réflexes, les bons principes, même si on n'est pas forcément expert absolu, qu'on ne connaît pas le détail du RGESN, savoir que ce qui compte, c'est le renouvellement des terminaux numériques, c'est important quand même.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Merci beaucoup Carl pour toute cette discussion qui a été super riche et super intéressante et à bientôt j'espère Merci à tous de nous avoir suivis sur cet épisode du podcast Un poil du X de La Grande Ourse N'hésitez pas à vous abonner à réagir et à partager le lien de l'épisode sur vos réseaux Vous pouvez également retrouver de nombreux articles traitant du design UXUI et de nombreux autres sujets sur notre site lagrandeours.design section blog A bientôt ! Sous-titrage ST'501

Description

Dans ce nouvel épisode, nous accueillons Karl Pineau !


Le sujet du jour est : Le design responsable (implications, enjeux, etc).


Au programme :


→ Le contexte dans lequel s’inscrit le design responsable.

→ Repenser les processus de conception pour réduire l'empreinte environnementale des produits et services.

→ Les enjeux du design persuasif et de l'attention.

→ Mesurer l'impact d'un projet design d'un point de vue responsable.


Retrouvez toute la discussion dans cet épisode !


Si l'épisode vous a plu, n'hésitez pas à attribuer 5 étoiles au podcast sur votre plateforme d'écoute.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et à toutes,

  • Speaker #1

    je suis Léa, merci de nous rejoindre pour ce nouvel épisode d'un poil du X en direct de l'agence Lagrandus. Aujourd'hui, nous accueillons Carl Pinault, membre de l'association Designer Éthique, avec qui nous allons parler des designs responsables, de la notion de design éthique et de ce que ces sujets impliquent dans les projets, les organisations et les équipes design. Merci de se joindre à nous aujourd'hui, Karl. Pour commencer, je te propose de te présenter en quelques mots.

  • Speaker #0

    Merci de m'accueillir. Je m'appelle Karl, je suis membre d'une association qui s'appelle Designer Ethic, qui est une association qui s'intéresse à la responsabilité numérique par le design à travers ses différents champs. Et par ailleurs, je suis enseignant-chercheur en sciences de l'information et de la communication.

  • Speaker #1

    Merci pour cette présentation. Alors pour débuter, il me semble que tu n'aimes pas vraiment parler de design éthique. même s'il s'agit d'un terme qui est de plus en plus répandu aujourd'hui. Est-ce que tu peux nous expliquer pourquoi ?

  • Speaker #0

    Oui, c'est paradoxal parce que c'est le nom de l'association. Oui, alors c'est pas tel... Enfin, comment dire ? Le terme éthique, en fait, c'est un terme qui est très utilisé et très pratique, mais c'est un terme qui est souvent complexe parce qu'en fait, il est compris par tout le monde de manière différente. Et donc, effectivement, l'éthique, est-ce que c'est l'éthique philosophique classique avec la déontologie, le... L'éthique des vertus, le conséquentialisme, est-ce que c'est une sorte de bundle de toutes les problématiques qu'on peut trouver dans le numérique aujourd'hui, que ce soit l'accessibilité, l'éco-conception, la persuasion, etc. Tous ces sujets-là, ces différentes versions du terme éthique, ça crée souvent une confusion, voire des débats. Il y a beaucoup de gens aussi qui vont comprendre le terme éthique comme étant ce qui est bien. Donc c'est pas du tout comme ça qu'il faut comprendre ce qu'est l'éthique, c'est plutôt la recherche du bien, c'est le chemin vers le bien, ça prétend pas qu'on la trouve, c'est plutôt dire qu'on le cherche. Bref, du coup, précisément, le terme éthique va être vraiment sujet à de multiples définitions par plein de gens, ce qui fait que souvent on préfère, enfin moi je préfère ne pas l'utiliser, même si évidemment, voilà, il est... le nom de notre asso et on l'assume complètement. Et ça permet aussi de fédérer autour d'un concept qui est assez porteur. Mais effectivement, quand on rentre dans le détail de ce qu'on essaye de produire sur le numérique, moi, je préfère parler effectivement de responsabilité plus que d'éthique, qui me semble être un terme qui est plus intéressant en termes de justement de portée de ce que ça induit pour les personnes qui produisent le numérique.

  • Speaker #1

    D'accord, c'est très clair, merci. Comme tu viens de nous l'expliquer, tu préfères donc parler de design responsable. Est-ce que tu peux nous présenter ce qu'est le design responsable selon toi ?

  • Speaker #0

    Le terme responsable, je l'aime bien. C'est un débat d'ailleurs dans la communauté en ce moment, notamment avec Louis Dorac qui critique plutôt le terme responsable. Moi, le terme responsable, je l'aime bien parce que pour moi, la responsabilité, c'est une notion juridique. Et donc, quand on est responsable, on doit rendre des comptes des actions qu'on mène. Donc un numérique responsable par exemple, c'est un numérique qui doit rendre compte des problématiques qu'il induit pour le reste de la société ou pour l'environnement. Et donc finalement, le terme responsable, il me parle parce que c'est un terme qui nous engage. C'est-à-dire que souvent, d'ailleurs, le terme éthique est utilisé par... C'est une des critiques qui est formulée contre le terme éthique. C'est un terme qui est utilisé beaucoup par celles et ceux qui ne veulent pas de régulation, qui ne veulent pas de législation sur le numérique et qui disent Non, non, mais laissez le marché faire, on va développer nos propres éthiques et ça va bien se passer. Et en fait... très nombreux à considérer qu'il faut une régulation. Et en fait, cette régulation, elle passe justement, elle induit justement une posture de responsabilité, puisque une fois qu'il y a une régulation, si on veut se mettre en conformité avec cette régulation, il faut être responsable de ses actes devant la loi.

  • Speaker #1

    Ok. Et donc le design responsable, ça englobe au final pas mal de sous-catégories. Est-ce que tu peux nous en présenter en quelques mots certaines, et puis on reviendra plus en détail ensuite sur certaines de ces catégories ?

  • Speaker #0

    Ouais, en fait c'est assez compliqué de les lister toutes, parce que là encore, de la même manière finalement que le terme éthique, parler de responsabilité ou d'éthique de ce point de vue-là, à mon sens ça revient un peu à la même chose, le sujet c'est que produit le numérique sur les individus, sur notre société et sur l'environnement. Et donc en fait ça, ça va aller chercher plein de champs dehors d'enjeux de société. Il y a des enjeux qui sont particulièrement à la mode en ce moment. Tout le monde parle d'éco-conception numérique, des enjeux environnementaux, du numérique, etc. C'est un sujet qui est extrêmement porteur. Il y a des sujets, on va dire, historiques que sont celui de l'accessibilité. qui a été un des premiers à être normé, régulé, avec des normes d'accessibilité, des injonctions, des obligations des grandes entreprises à mettre en œuvre des pratiques d'accessibilité. Il y a des sujets qui sont, je ne sais pas si on peut les qualifier d'émergents, mais en tout cas qui font de plus en plus parler, que ce soit la question de l'attention, de la persuasion. Il y a un champ sur le design systémique qui est aussi de plus en plus... verbalisés, et après, il y a tout un autre, enfin, il y a tout un tas de chants qui sont plus ou moins... mise en valeur, mais qui gagnerait à l'aide, par exemple, je pense à tout ce qui est l'électronisme ou la place, l'injonction à l'utilisation des écrans ou des services numériques. Tous ces éléments-là, en fait, ce n'est pas forcément des choses qui vont être forcément directement mises dans le paquet design éthique, design responsable, mais ce sont des choses qui, potentiellement, ont vocation à l'être. En fait, l'idée, c'est... C'est de dire que la responsabilité par le design numérique, ce n'est pas une notion finie, ce n'est pas un champ d'expertise fini sur lequel on aurait déjà tout exploré. on se rend compte régulièrement que le numérique pose des enjeux pour telle ou telle raison, que ce soit sur le pouvoir des plateformes, que ce soit sur les travailleurs du clic, ce genre de choses. Et en fait, nous ce qu'on prône, c'est que quand on voit des enjeux de ce type-là émerger, il y a un sujet à ce que les designers se posent la question de leur responsabilité vis-à-vis de ça. On peut parler de l'inclusion, de l'intersectionnalité... il y a plein de sujets qu'on pourrait aborder à ce titre là

  • Speaker #1

    Aujourd'hui ces enjeux du design éthique sont de plus en plus présents dans les discussions et le paysage du design français comme tu as pu commencer à en parler dans quel contexte cela vient s'inscrire et quelle est la responsabilité des designers dans ce contexte selon toi ?

  • Speaker #0

    Alors ça c'est une grande question la responsabilité des designers et En fait, nous quand on a créé l'asso justement, c'était à un moment où on s'intéressait surtout à la question de l'attention et de la persuasion. Et c'est un moment où notamment Tristan Harris... américain, enfin pas designer, mais product designer, on va dire, de l'équipe de Gmail chez Google, commençait à faire beaucoup parler de lui et à pointer le vol du temps, de l'attention des utilisateurs, etc. Et donc, en fait, nous, on a créé l'assaut en partie pour traiter ces questions-là et voir quel était le rôle effectif des designers là-dedans. De fait, si les designers sont ceux qui mettent en œuvre les pratiques de persuasion, pour prendre ce cas précis, mais qui aussi mettent en œuvre en réalité les interfaces, les fonctionnalités qui peuvent être particulièrement problématiques en termes d'éco-conception ou d'accessibilité, etc. Si c'est ceux qui en fait font l'opérationnel, en réalité ce n'est pas forcément les designers qui ont un pouvoir de décision qui est particulièrement important ou qui sont responsables des choix qui sont opérés dans la conception des services numériques. Et donc ça, c'est presque une sorte de sous-sujet dans le sujet qui est le positionnement des designers vis-à-vis de leur propre discipline. D'une certaine manière, aujourd'hui, les designers se retrouvent à assumer... le terme design, on le retrouve partout, UX design, UI design, etc. Le terme design est massivement présent. Les designers sont d'une certaine manière les responsables, les porte-parole, ceux qui doivent justifier cette discipline. Mais en réalité, ce n'est pas forcément eux qui ont tout le temps la main sur les tenants et les aboutissants de cette discipline. Et donc ça, c'est en fait le principal sujet qui est en train de se poser. C'est comment est-ce que les designers... Une forme de dilemme, c'est les designers défendent leur discipline en disant, regardez, elle peut apporter plein de choses bien à la production de services numériques et pas que, notamment en termes d'utilisabilité, en termes d'expérience utilisateur, etc. Mais d'un autre côté, à l'inverse, ils doivent aussi se retrouver à justifier ou à défendre leur discipline quand elle est mobilisée pour des raisons qui sont plutôt négatives. Tout ce qui va être de l'ordre des dark patterns, pousser la consommation dans... plein de services de e-commerce, de pousser l'attention dans plein de médias sociaux qui dépendent d'une économie d'attention. Et donc ça, c'est plus compliqué. Et donc c'est un peu le grand dilemme des designers que de savoir où se placer vis-à-vis de ça. Il n'y a pas forcément, à mon sens, de solution particulièrement facile. On parle souvent en termes de solution de la place des designers dans les organisations et notamment de leur niveau hiérarchique. C'est sûr que c'est un enjeu. C'est un enjeu, mais par contre... c'est pas quelque chose qui va se régler d'un claquement de doigts et qui va te dire, en fait, il faudrait des head of design. ou des VP Design pour résoudre tous ces problèmes-là.

  • Speaker #1

    D'accord. Comme tu l'as précédemment cité, il y a plusieurs sujets qui constituent le paysage global du design responsable. Je te propose de revenir sur certains d'entre eux, en commençant par l'accessibilité et l'inclusion. Comment peut-on garantir aujourd'hui que ces principes sont intégrés dans toutes les étapes d'un processus de conception ? Quelles sont les meilleures pratiques pour s'assurer que les produits et services sont accessibles à tous, et quel que soit leur niveau d'habileté ou leurs besoins spécifiques ?

  • Speaker #0

    Ça, c'est une grande question aussi. Alors moi, je ne suis pas un expert de l'accessibilité et de l'inclusion, donc je ne vais pas... de faire comme si j'étais quelqu'un de particulièrement efficace là-dessus. Et d'ailleurs, ça fait même partie des sujets sur lesquels nous, on a du mal à être vraiment bon. Je pense aussi que c'est lié au fait que, enfin en tout cas, le fait que nous, on ait du mal à être particulièrement bon, c'est un sujet sur lequel les designers sont sous-formés, notamment dans les formations en design qui apparaissent extrêmement peu. Enfin, la question d'accessibilité, ou en tout cas, c'est souvent une sorte de... Il y a souvent une session de sensibilisation, mais ça ne va souvent pas vraiment au-delà. Je pense que ce serait plus intelligent de ma part de faire des recommandations de personnes qui sont pertinentes pour aller creuser ces sujets-là. Je pense que ces dernières années, c'est notamment autour des services numériques de l'État où il y a eu beaucoup d'avancées. Je pense à tout ce que fait la DINUM, à Anne-Sophie Tranchet, qui est par ailleurs membre de l'association Design Hérétique. autour de Design Accessible, un site web de ressources qui explique comment justement les designers peuvent prendre en compte ces questions d'accessibilité pour faire en sorte qu'elles soient bien traitées à l'échelle du service. Et en fait, j'ai l'impression que de ce point de vue-là, en termes d'écosystème, pour ne pas forcément aller dans les recommandations, mais plus pour parler d'écosystème, il y a un peu un enjeu, mine de rien, à ce que les designers se ressaisissent de cette question-là. C'est un peu le sujet historique de la responsabilité numérique, mais malheureusement, il est un peu souvent mis de côté. C'est vrai. Parce que j'ai l'impression, parfois vécu comme une contrainte créative par les designers, notamment d'un point de vue graphique. Et ça, c'est vraiment problématique. Donc, voilà. prenez garde à traiter ce sujet là les ressources principalement celles qui ont pu être produites par la DINUM, Design Accessible et puis après il y a plein d'agences ou de structures spécialisées dans l'accessibilité je pense à Access 42 notamment qui est particulièrement connu sur ce sujet là qui offre plein de ressources sur lesquelles on peut se former super,

  • Speaker #1

    merci pour ces conseils Un autre sujet clé dans une pratique de design responsable, c'est l'éco-conception, dont tu as mentionné le sujet au début. En tant que designer, comment pouvons-nous repenser nos processus de conception pour réduire l'empreinte environnementale des produits et services sur lesquels nous travaillons ?

  • Speaker #0

    C'est que des grandes questions que tu me poses. Sur l'éco-conception numérique, est-ce qu'à mon sens, là où il faut comprendre... Enfin, il n'y a pas... Il y a quelques grands principes qu'il faut avoir en tête. Le premier grand principe qu'il faut avoir en tête, c'est que ce qui représente l'écrasante majorité de l'empreinte environnementale du numérique, c'est les terminaux. Et donc, en fait, la priorité, ça doit être de faire en sorte de ralentir le taux de renouvellement de nos terminaux numériques, soit les ordinateurs ou les téléphones. Et donc, ça sous-entend lutter contre les différentes formes d'obsolescence qui peuvent avoir lieu sur ces terminaux, que ce soit l'obsolescence matérielle, donc typiquement un ordinateur qui... Un téléphone qui casse quand on laisse tomber son iPhone dans la rue et que paf, il a les grands cassés, il y a un enjeu à travailler sur la réparabilité plutôt que d'en changer. Ce n'est pas forcément là où les designers numériques ont la part d'action la plus évidente, à mon sens. C'est plutôt sur les deux autres facteurs d'obsolescence que sont l'obsolescence marketing, psychologique. qui va donc jouer sur le phénomène, l'envie de remplacer son terminal numérique, parce qu'il n'est plus à la mode, il n'a pas une tête très jolie, etc. Et donc ça, il y a un enjeu à rendre désirable le numérique, pas forcément high-tech. Et donc ça, c'est un vrai sujet, notamment pour tous ceux qui travaillent dans des domaines proches du marketing en design. Et puis, il y a un deuxième sujet, et c'est peut-être là le cœur de l'éco-conception numérique, qui est la question de l'obsolescence logicielle. Et donc, comment est-ce qu'on fait en sorte que les logiciels qu'on a sur nos ordinateurs, sur nos téléphones, soient relativement légers ? En fait, on se rend compte aujourd'hui que les personnes qui ont un téléphone qui a 10 ans, 8 ans, 10 ans, 12 ans, le principal facteur limitant d'usage de leur téléphone, c'est la compatibilité des applications sur le long terme. Le fait que si vous voulez par exemple réserver un billet de train, l'application d'achat de billets va vous dire Ah non désolé, on ne supporte plus ce téléphone, donc il faut que vous changiez de téléphone pour pouvoir scanner votre QR code quand vous arrivez sur la borne d'entrée dans le train. et donc c'est en fait pour cette raison que les gens changent de téléphone et donc c'est là où il y a un vrai enjeu à produire des applications qui soient dans la durée suffisamment compatibles avec les versions anciennes de téléphone et qui soient suffisamment légères pour ne pas faire fondre la batterie des téléphones ou laguer les vieux téléphones à mort et c'est là où on en arrive au réel intérêt du design parce qu'en fait souvent on a l'impression que c'est une question de développeurs, l'éco-conception qu'en fait il s'agit d'optimiser C'est sûr qu'optimiser du code, c'est une bonne pratique et qu'il faut le faire, mais il y a un vrai enjeu à définir quelles sont les fonctions qu'on veut voir sur un service numérique. Est-ce que ça sert à quelque chose de mettre en place une fonction qui va être utilisée peut-être par 5% des utilisateurs ? La question du périmètre fonctionnel des applications numériques, c'est un enjeu majeur de l'éco-coupure. conception numérique et c'est pour ça que les designers jouent un rôle prégnant parce que a priori c'est justement eux qui vont concevoir l'expérience utilisateur donc ils vont définir quelles sont les fonctionnalités à mettre en place sur le service et c'est là où les choix pertinents doivent se faire.

  • Speaker #1

    C'est très clair, merci beaucoup. Je te propose maintenant d'aborder une autre thématique très importante du design responsable, il s'agit des problématiques liées au design persuasif et au design de l'attention. D'abord, est-ce que tu peux nous expliquer ce qui se cache derrière ces termes ?

  • Speaker #0

    Alors, design de l'attention, c'est un terme qui a été particulièrement popularisé dans les années 2017-2018, notamment en lien avec l'économie de l'attention. C'est assez simple, c'est le fait de dire que tout un tas de services numériques ont un modèle économique basé sur la valorisation économique de notre attention. caractéristiques en ligne, c'est les médias sociaux qui vont diffuser de la publicité lorsque l'on scrolle sur nos files d'actualité. Et donc, c'est cette publicité qui génère de l'argent. Et donc, plus on passe de temps sur ces services, plus ça génère de publicité. Et donc, à partir du moment où l'enjeu, c'est de faire passer du temps à l'utilisateur sur le service numérique, ça devient un enjeu de design puisqu'on peut mettre tout un tas de mécanismes qui vont pousser l'utilisateur à rester. sur le service numérique. Et donc, c'est pour ça qu'on parle de design de l'attention. Alors moi, c'est une expression que je n'aime pas beaucoup parce qu'en fait, ça focalise sur l'attention et donc sur le temps passé, souvent, où parfois, on va dériver vers des, comment dire, des interprétations sociales ou en termes de santé qui me paraissent être beaucoup plus complexes à aborder alors qu'a priori, on n'a pas besoin d'aller sur ces aspects-là. traiter ce problème à mon sens, en tout cas ça ne veut pas dire que c'est un problème, mais pour les designers je pense que c'est plus simple de ne pas trop se saisir de cette question-là, et c'est pour ça que je parle plutôt de persuasion, parce qu'en fait ce qui est au cœur de ce sujet-là, c'est la façon dont les usages, enfin pardon, les interfaces... l'expérience utilisateur va modifier, va persuader, va modifier le comportement des utilisateurs des services numériques. Et donc ça aujourd'hui, c'est quelque chose qui est particulièrement présent dans nos applications. Il y a plein de mécanismes de persuasion, le plus connu étant le système des notifications, très souvent utilisé pour faire venir un utilisateur sur un service numérique. Et donc, ce qui est intéressant, c'est que c'est un sujet qui a été pendant très longtemps sous les radars de beaucoup de structures, mais qui aujourd'hui est de plus en plus mis en visibilité. Et ça, c'est notamment visible d'un point de vue législatif et réglementaire, parce que déjà, les autorités de régulation du numérique et du droit à la consommation se saisissent de plus en plus de ce sujet-là. Je pense à la GCCRF en France qui... On commence à s'intéresser à la façon dont les applications numériques peuvent enfreindre le droit à la consommation vis-à-vis du droit à la consommation existant. et donc à sanctionner des pratiques de design persuasif. Et puis surtout, depuis quelques mois, le DSA, le DMA, donc Digital Services Act, Digital Market Act, sont entrés en vigueur et en fait ils incluent tout un ensemble de dispositions qui viennent apposer un cadre réglementaire qui vont contraindre les pratiques de design persuasive. Et la dimension la plus marquante, c'est l'interdiction dans le cadre du DSA entre les deux. donc des dark patterns, les fameux dark patterns, même si en fait ça pose plein de sujets, parce que ça pose la question de comment est-ce qu'on est capable d'identifier un dark pattern, comment est-ce qu'on est capable de prouver la présence d'un dark pattern, est-ce qu'en fait un dark pattern c'est un élément d'interface, est-ce que c'est une expérience utilisateur sur le long terme, dans le temps, bref, en fait ça pose plein de questions très pratiques, mais c'est déjà un énorme pas en avant que de voir la reconnaissance du rôle des interfaces dans les problématiques qu'on peut avoir dans les services numériques. En fait, ce qui est vraiment important pour moi, c'est que depuis 20 ans, depuis que le numérique a émergé, tout le monde s'est focalisé sur le code, sur les algorithmes. Il y a même cette phrase qui dit le code, c'est la loi Alors, c'est vrai. Mais en fait, je pense que c'est hyper important d'intégrer le fait que l'interface aussi, joue un rôle extrêmement important dans la formalisation des habitudes des utilisateurs. Et ce n'est pas pour rien qu'on parle d'affordance, de friction, etc. L'interface est particulièrement importante et ça c'était assez invisibilisé jusqu'à présent, à mon avis pour des raisons de technosolutionnisme, où la technologie apparaît magique et le code fait plus techno que l'interface. Ce qui est vraiment bien, c'est qu'aujourd'hui les autorités de régulation se rendent compte que l'interface joue un rôle et donc commencent à la normaliser.

  • Speaker #1

    Et donc nous, en tant que designer, comment pouvons-nous concevoir de manière responsable à ce sujet-là pour encourager l'engagement et les interactions tout en respectant la liberté individuelle et en évitant les pièges du design persuasif excessif ?

  • Speaker #0

    Eh bien ça, c'est un vrai gros sujet. Il n'y a pas de réponse facile, il n'y a pas de réponse absolue aujourd'hui et surtout, c'est souvent pas une... problématique de design justement, ou en tout cas pas de design d'interface. En fait, je pense que ce qui est hyper important à comprendre, c'est qu'une même interface, un même composant, peut avoir une dimension extrêmement persuasive et problématique dans certains cas, et être particulièrement importante dans d'autres cas. Je pense que la notification, de ce point de vue-là, est l'exemple plus simple pour comprendre ce problème. Une notification... qui vient vous dire, on va citer LinkedIn aujourd'hui, vous avez quatre personnes qui ont visité votre profil, cliquez pour en savoir plus. On est complètement dans une dimension persuasive. L'objectif, c'est d'attirer l'utilisateur sur l'application pour le retenir dans une logique d'économie de l'attention. Et donc, c'est problématique. Par contre, si vous recevez une notification qui vous dit que vous avez un proche qui a besoin d'aide ou qu'il se passe un truc dans votre ville et qu'il faut que vous vous mettiez en sécurité, c'est une... interface qui est évidemment essentielle. Donc en fait, le problème, il n'est pas au niveau de l'interface, il est au niveau de ce qu'on en fait. Et donc c'est là où il faut se mettre des cadres, en fait, des règles sur la façon dont on peut utiliser ou pas ces interfaces et parfois aussi dans la façon dont on va vraiment concevoir le détail de ces interfaces. Et c'est là où, en fait, à mon sens, il faut élargir la focale, ne pas parler que d'expérience utilisateur. mais regarder aussi ce qui l'entoure. Et en fait, un exemple intéressant de ce point de vue-là, c'est ce qu'a mis en avant la fameuse commission sur les écrans qui a été demandée par Emmanuel Macron et qui a rendu son rapport il y a un mois. Et cette commission, elle parlait de produire des médias sociaux éthiques. Et là, c'est typiquement, je pense qu'un bon cas d'étude, parce que si on regarde les médias sociaux et qu'on cherche à produire des médias sociaux éthiques, en fait... de premier abord, de prime abord, on pourrait chercher à se focaliser uniquement sur l'interface. On pourrait dire, en fait, c'est simple, on va enlever les files d'actualité. C'est simple, on va enlever... les notifications. C'est simple, on va forcer l'arrêt de la pub et puis on va forcer des modérateurs. Sauf qu'en fait, si on y réfléchit un peu, on se rend compte assez vite que ça ne va pas marcher parce que ça va faire, ça va produire des services qui vont être particulièrement peu utilisables, on va avoir beaucoup de frictions indésirables, bref, en fait, on va produire une mauvaise expérience utilisateur et donc on va produire des mauvais médias sociaux et donc ça ne fonctionne pas. Donc en fait, parfois dans les services numériques, on a besoin de laisser de... des systèmes persuasifs sur le service pour faciliter son utilisabilité. Et donc c'est là où on en arrive justement à ces côtés side qui vont permettre de protéger ce service même s'il est persuasif. Et là c'est notamment par exemple les modèles de gouvernance. Et je pense que le design justement, il a plein de choses à apporter aux modèles de gouvernance des médias sociaux numériques. Si on réfléchit aujourd'hui à la façon dont... Comment fonctionnent les médias sociaux qu'on utilise ? En fait, c'est des médias qui sont monolithiques, qui dépendent d'une seule entreprise, qui sont totalement centralisés, pas du tout interopérables, etc. Et donc, il y a un enjeu assez fort à travailler avec. enfin, à travailler sur des modèles de gouvernance qui permettent d'avoir une gouvernance ouverte, partagée, qui permettent d'aller vers une forme de démocratie technique, en fait, qui, justement, ouvre le champ des possibles de la façon dont on utilise les médias sociaux pour en faire confiance. donner un exemple plus pratique. Je pense qu'aujourd'hui, ce qui se passe sur Mastodon, c'est particulièrement intéressant. Donc Mastodon, c'est un équivalent à Twitter, qui est un logiciel libre. Enfin, Mastodon est un logiciel libre, pas Twitter. Donc c'est un logiciel libre, ça fonctionne exactement comme Twitter. Mais là où c'est intéressant, c'est que c'est un logiciel, ce n'est pas un service. Autrement dit, chacun peut installer son instance de Mastodon et ensuite va pouvoir... se connecter aux autres instances existantes du média social. C'est ça qui va former le réseau. Et donc, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que chaque instance va pouvoir décider de ses propres règles de régulation. Et c'est ce qui se passe, par exemple, sur l'instance mastodon.design, qui est spécifiquement celle des designers, qui est aujourd'hui principalement gérée par un designer qui s'appelle Timothée Gaugli. Et en fait, c'est hyper intéressant ce qui se passe sur mastodon.design, parce qu'une instance de ce type... Mastodon, ça coûte super cher. Par exemple, sur Mastodon Design, on est 1000 utilisateurs inscrits, on est 300 utilisateurs actifs, ça coûte 500 euros par mois à produire. pour un service numérique qui est gratuit. Donc, en fait, ce n'est pas gratuit, justement. Et donc, la question qui se pose, c'est, ces 500 euros par mois, comment on les trouve, en fait ? Qui fait des dons pour venir alimenter l'utilisation du média social ? Et donc, justement, c'est ça qui se pose comme question. Timothée, tout régulièrement, il sollicite la communauté pour dire, est-ce que vous préférez, en fait, faire un système de dons ? Est-ce qu'on fait un système d'abonnement ? Est-ce que si on se donne tel budget, vous préférez... Enfin, voilà, est-ce que plutôt vous préférez qu'on... n'augmente le budget nécessaire et qu'en fait, je ne sais pas, il nous faut 500, 600, 700 euros par mois parce qu'en fait, la masse de messages a augmenté sur le service ou au contraire, est-ce que vous préférez qu'on bride la quantité d'historique qu'on peut conserver, la taille des images qu'on peut uploader, la longueur des files d'actualité parce qu'en fait, vous préférez payer moins cher et donc, il faut que le service, en conséquence, s'adapte. Et donc c'est là où on en revient sur des logiques de démocratie technique, parce qu'on se réapproprie à la fois les enjeux qui sont posés par les médias sociaux numériques en termes économiques et en termes d'infrastructures, mais on se réapproprie aussi la capacité des utilisateurs à co-décider ce qui s'y passe. et je pense que justement le design a plein de choses à apporter là-dedans alors que ce soit en termes d'interface mais aussi de modèle de gouvernance parce que voilà ce qu'on fait sur Mastodon Design en fait ça se fait de manière hyper organique sans qu'il y ait vraiment de dispositifs qui soient complètement faits mis en place pour gérer ce débat et cette discussion démocratique mais on pourrait complètement imaginer qu'il y ait des processus qui permettent de faire ça et donc en fait tout ça pour dire quoi ? tout ça pour dire que l'interface les systèmes persuasifs c'est que leur pointe émergeait de l'iceberg ce que nous on perçoit parce que ça nous impacte mais derrière ce qui est hyper important c'est de se ressaisir des enjeux démocratiques de ces systèmes qui impactent nos vies au quotidien ce que je dis souvent c'est nos villes nos états on n'imaginerait jamais que ce soit géré par des groupes privés sur lesquels on n'a aucun poids alors que nos médias sociaux nous ont fait qu'on voit, qu'on perçoit comme des agora numériques, ça ne nous pose aucun problème que ce soit un homme, Mark Zuckerberg, qui possède l'écrasante majorité de ces médias sociaux et qui ne laisse absolument aucune place à des formes de discussion sur la gouvernance. Tout à fait. Hyper intéressant comme sujet. Donc concrètement, comment peut-on mesurer l'impact d'un projet d'un point de vue responsable ?

  • Speaker #1

    Ça, c'est une bonne question. Nous, c'est un truc sur lequel on essaie de travailler depuis pas mal de temps à Design Ethic. Il y a notamment... En fait, ce dont on se rend compte aujourd'hui, c'est qu'il faut... pour aller vers cette mesure de la responsabilité, justement segmenter les champs. C'est un peu ce que je disais au début, quand on se dit que la responsabilité, ça peut être l'éco-conception, l'accessibilité, la persuasion, la systémie, etc. Ce qu'il faut, c'est segmenter les champs. Et donc après, ce qu'il faut, c'est développer des critères par champ. Et donc, en fait, ça, c'est en train d'arriver, puisque sur l'accessibilité, on va avoir le RG2A, sur le... L'éco-conception, on a le RGESN. Sur les questions de persuasion, il n'y a pas forcément encore de référentiel, mais il commence à y avoir des guides, on a pu le dire avec Design Hérétique. Il commence à y avoir justement les cadres réglementaires, des sites, etc. qui arrivent. Donc en fait, il y a un certain nombre de cadres. Et aujourd'hui, un des enjeux, c'est notamment de rassembler ces... cadres réglementaires pour en faire des sortes, alors je ne sais pas s'il faut dire des checklists, des guides, mais en fait le constat derrière c'est que c'est impossible d'être expert sur tous ces sujets-là. Enfin voilà, moi c'est un peu ce que je disais au début, je connais bien le sujet de la persuasion, je connais beaucoup moins bien le sujet de l'accessibilité, je pense que c'est impossible d'être pertinent dans tous les sujets. Et donc si on veut produire des systèmes responsables, alors soit on a des grosses équipes et on a une personne qui est spécialisée dans chaque domaine, on a de la chance. soit sinon il faut qu'on arrive à développer des services qui facilitent ce travail de mise en conformité des différents enjeux de responsabilité. Et donc ça c'est quelque chose qu'on essaie de faire, on a notamment publié il y a quelques mois un index de la conception responsable qui essaye de justement faire une synthèse des différentes normes de responsabilité. et différentes recommandations qui ont pu être formalisées. Il y a peut-être d'autres propositions à faire sur ce sujet-là, mais aujourd'hui, je pense que c'est effectivement... Enfin voilà, il n'y a pas de solution magique pour produire des services responsables. Il faut se plonger dans le sujet, il faut être expert de... de ces sous-catégories, de ces sujets-là. Aujourd'hui, les conconceptions, c'est de plus en plus le cas. Il y a de plus en plus de personnes qui sont formées, qui sont expertes ou référentes dans leurs structures. Et pour les sujets qui sont un peu moins mis en visibilité, il faut qu'on arrive à développer des services sur lesquels les designers peuvent s'accrocher.

  • Speaker #0

    Ok. Et donc, selon toi, quel est l'avenir du design responsable et quels sont les défis à surmonter pour sa généralisation ?

  • Speaker #1

    J'aurais tendance à dire qu'il est fort probable que... qu'il y ait de nouveaux enjeux qui apparaissent. Alors, quand on dit ça, tout le monde va penser à l'IA. Je ne sais pas si l'IA va vraiment se poser en enjeu de responsabilité numérique pour les designers, ça on verra dans les mois à venir. Mais au-delà de ça, je pense que la question de l'inclusivité est largement sous-traitée aujourd'hui par les designers. La question des minorités, de l'intersectionnalité est aussi assez peu traitée. donc voilà les droits des travailleurs aussi donc il y a pas mal d'enjeux sociaux qui sont assez ignorés en fait si on regarde avec le recul j'ai qu'on a plutôt focalisé jusqu'à présent à la fois sur les enjeux environnementaux et sur les enjeux individuels mais pas trop sur les enjeux sociaux du numérique donc moi j'aurais tendance à dire que dans les prochaines années c'est surtout sur ces aspects là que va focaliser la responsabilité par le design en tout cas qu'il y a un travail à mener euh Parce qu'avant d'en arriver à du RGESN qui est capable de dire, en fait, sur votre service numérique, il y a telle et telle et telle recommandation sur l'éco-conception numérique, en fait, il faut être capable de formaliser la problématique posée par les enjeux environnementaux et être capable de dire en quoi est-ce que le design peut apporter une réponse sur les enjeux de l'éco-responsabilité numérique. Et donc, c'est encore ce travail-là qui reste à faire. sur une bonne partie des sujets de société. Donc j'aurais tendance à dire qu'il y a déjà un premier point sur ça. Et après, ce qui est intéressant, c'est de voir que de plus en plus, nos sujets de responsabilité numérique sont l'objet. de réglementation, comme on disait tout à l'heure, réglementation européenne ou nationale. Et donc, en fait, à la fois, c'est une bonne chose, parce qu'en fait, ça veut dire que ça avance, mais il y a aussi peut-être un risque pour la créativité, enfin, je ne sais pas si vous voulez dire la créativité en design, mais en tout cas, il y a un enjeu qui va se poser assez fortement sur ce que les designers peuvent ou ne peuvent pas faire. Oui, je pense que le sujet RGPD a été particulièrement... Un particulièrement bon exemple de ce point de vue-là, il y a tout un tas de services numériques aujourd'hui où sur la front page institutionnelle du site, les mentions qui sont inscrites relèvent bien plus du service juridique que des équipes de design, parce qu'il faut que telle mention marketing soit affichée dans telle taille de pixel minimale, le bouton pour accepter ou refuser les cookies doit être situé à cet endroit-là et pas à tel endroit. Et en fait, ça a été balisé par les services juridiques et les designers ont, d'une certaine manière, un choix extrêmement limité dans la capacité à produire ces interfaces. Il y a un risque à ce que ça s'étende à d'autres interfaces que ces front pages institutionnelles ou les bandes RGPD, parce qu'en fait, à partir du moment où le DSA dit si vous faites un dark pattern, c'est 6% du chiffre d'affaires mondial de sanctions en fait, les enjeux économiques, ils sont extrêmement importants. Et donc, voilà, à mon sens, aujourd'hui, on est un peu dans cette zone d'entre-deux, où d'un côté, c'est bien que... tous ces sujets-là soient enfin pris au sérieux et enfin traités par les instances de régulation. Mais de l'autre côté, il ne faut pas que les designers se laissent dépasser sur les aspects réglementaires parce que sinon, effectivement, ils ne vont plus avoir la main sur les différents aspects et on va leur donner un jeu d'interface DSA ou DMA compatible avec lesquels ils auront le droit de jouer mais qui sera beaucoup plus limité que ce que ne permet de faire, par exemple, un design système actuel.

  • Speaker #0

    ok et dernière question avant de terminer est-ce que tu as des conseils à partager aux designers qui souhaitent intégrer les principes responsables dans leurs pratiques ?

  • Speaker #1

    je réfléchis rejoignez des designers pratiques non en fait c'est Il y a plusieurs enjeux de ce point de vue-là. Quand je dis rejoigner des designers éthiques, d'une certaine manière, c'est à la fois une blague et d'un autre côté, je pense que les différents types d'actions qu'on met en œuvre sont vraiment utiles de ce point de vue-là. Donc, même si vous ne voulez pas aller vers notre association, je pense que vous avez intérêt à faire ce qu'on propose de faire, c'est-à-dire, un, faire de la veille, regarder quelles sont les ressources qui sont produites au fur et à mesure sur ces sujets-là. pour suivre les évolutions du métier sur cette question, de rejoindre les communautés, pas forcément design neurétique, il y a plein de communautés qui s'intéressent à ces sujets-là, mais rejoindre les communautés, ça permet de voir aussi comment font d'autres designers sur ces questions, partager des bonnes pratiques, aller à des événements qui traitent de ces questions-là, et c'est super parce qu'on voit que de plus en plus d'événements traitent largement ces questions-là au sein du monde du design, je pense aux UX Days qui... La programmation en 2024 qui met largement, en tout cas qui met de plus en plus l'accent sur ces questions-là, et ce n'est pas la première année. Je pense à Paris Web qui, évidemment, depuis de nombreuses années, traite largement ces questions. Donc, aller dans les communautés pour rencontrer des personnes et faire des partages d'expériences, et puis se former. Bien sûr. C'est assez essentiel, parce qu'il est probable que vous n'ayez pas été forcément formé. aux enjeux d'éco-conception quand vous étiez en formation de design, peut-être pas non plus aux questions d'accessibilité, aux questions de persuasion, c'est assez sûr que non. Et donc en fait, aujourd'hui, c'est important de se former sur ces sujets-là pour être capable justement d'avoir les bons réflexes, les bons principes, même si on n'est pas forcément expert absolu, qu'on ne connaît pas le détail du RGESN, savoir que ce qui compte, c'est le renouvellement des terminaux numériques, c'est important quand même.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Merci beaucoup Carl pour toute cette discussion qui a été super riche et super intéressante et à bientôt j'espère Merci à tous de nous avoir suivis sur cet épisode du podcast Un poil du X de La Grande Ourse N'hésitez pas à vous abonner à réagir et à partager le lien de l'épisode sur vos réseaux Vous pouvez également retrouver de nombreux articles traitant du design UXUI et de nombreux autres sujets sur notre site lagrandeours.design section blog A bientôt ! Sous-titrage ST'501

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