Speaker #0Ce podcast est une production de Scope4 Consulting, partenaire de la transition écologique des entreprises et collectivités. Bienvenue sur Vers horizon, le podcast de la transition écologique. Je suis Myriam Ausha. Tous les mercredis matins dès 7h, je vous donne rendez-vous pour 30 minutes de clarification et de partage. Comprendre les enjeux écologiques, c'est déjà agir dans le bon sens. Vers horizon, Myriam Ausha. Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode de Vert Horizon. Aujourd'hui, nous parlons d'un sujet qui fait débat, les marchés carbone. Comment fonctionnent-ils ? Sont-ils vraiment efficaces ? C'est ce que nous allons découvrir ensemble. Face au changement climatique, trois grandes réponses ont émergé. Réduire nos émissions. S'adapter aux changements ou encore tenter de modifier directement le climat. Aujourd'hui, nous allons nous concentrer sur la première approche et plus particulièrement sur les marchés carbone. Il y a deux marchés carbone. Le marché carbone réglementé ou officiel dont la valeur marchande qui s'échange sont des quotas carbone. L'autre marché est un marché volontaire de la compensation. Le marché carbone des quotas, c'est comme un grand jeu de monopolie climatique. Mais au lieu d'acheter des rues et des maisons, les entreprises échangent des quotas ou droits à polluer. Voyons comment marche le système d'échange de quotas. Imaginez une ville où chaque habitant reçoit un quota d'eau limité pendant une sécheresse. Ceux qui consomment moins peuvent vendre leur surplus à ceux qui en consomment plus. C'est exactement le principe du marché carbone. Une autorité centrale comme l'Union européenne fixe une limite globale au plafond d'émissions de CO2 autorisées. Cette limite diminue chaque année en vue d'atteindre l'objectif global de réduction des gaz à effet de serre en Europe. Cet objectif est de réduire de 62% les émissions des secteurs concernés entre 2005 et 2030. L'Union européenne distribue ensuite gratuitement des permis de polluer aux entreprises de ces secteurs comme l'industrie lourde. L'allocation gratuite préserve la compétitivité de l'industrie européenne par rapport aux zones du monde qui n'auraient pas de marché de quotas carbone. Ensuite, une entreprise qui émet plus que son quota doit acheter des permis supplémentaires. A l'inverse, si elle réduit ses émissions... Elle peut vendre ses permis excédentaires. Prenons l'exemple d'une cimenterie. Si elle reçoit 100 000 permis pour l'année, un permis égale un quota qui vaut une tonne de CO2. Si cette même entreprise émet 120 000 tonnes, elle doit acheter 20 000 permis pour son excédent de pollution. Si elle investit dans des technologies propres et n'émet finalement que 80 000 tonnes durant une année donnée, elle pourra revendre 20 000 permis. Le prix du permis fluctue selon l'offre et la demande. Aujourd'hui, en Europe, il est d'environ 80 euros la tonne. Cela crée une incitation financière forte à réduire les émissions. D'ailleurs, grâce au système d'échange des quotas carbone, les émissions de gaz à effet de serre pour les secteurs concernés, industrie lourde ou production d'électricité, ont baissé de 47% par rapport à 2005. Point d'attention toutefois, Certaines entreprises bénéficiant des quotas carbone peuvent parfois solliciter le marché parallèle de la compensation carbone pour payer leur trop-plein de pollution. Après les quotas carbone, voyons maintenant les marchés de compensation. Il vous est peut-être déjà arrivé de prendre l'avion pour aller en vacances. Vous savez que ce vol va émettre du CO2, mais vous ne pouvez pas l'éviter. Les marchés de compensation vous permettent de neutraliser ces émissions en finançant des projets qui réduisent les émissions ailleurs sur la planète. Concrètement, comment ça marche ? Une entreprise développe un projet, par exemple replanter quelques arbres en Amazonie. Des experts calculent combien de CO2 cette forêt va absorber. L'entreprise reçoit des crédits carbone qu'elle peut vendre. Et vous, vous achetez ces crédits pour compenser vos émissions lors de votre voyage en avion. Une compagnie aérienne propose à ses clients de compenser leur vol Paris-New York qui pèse environ une tonne de CO2 par passager en payant 10 euros supplémentaires. Cet argent finance un projet de reforestation en Indonésie. Le projet certifie que les arbres plantés absorberont 7 tonnes de CO2. De toute évidence, les calculs sur la capacité d'absorption de jeunes arbres à peine plantés présument de manière très optimiste de la durée de vie de ces arbres. Or, la compensation ne s'encombre pas d'objectif de réduction. Donc, ces mêmes arbres seront probablement abattus comme leurs aînés, pour fournir des terres dédiées aux activités comme l'élevage. Autre possibilité, l'emballement de la hausse de température terrestre crée des incendies en forêt qui fragilisent les projections des initiatives de compensation basées sur la reforestation. Ceci dit, l'idée de reforester reste une bonne idée. Seule celle de monétiser le fait d'avoir reforesté suscite le questionnement. Le marché de la compensation carbone laisse planer l'idée qu'elle permet d'annuler totalement l'impact de nos émissions. C'est malheureusement plus complexe. Si vous cassez un vase précieux, même en en achetant un nouveau, l'original reste brisé. Vous décidez simplement d'ignorer le problème. C'est pareil avec le CO2, parce qu'une fois émis, son impact ne peut pas être simplement effacé. Les équivalences présumées du marché de la compensation sont un vrai défi à la logique. Prenons un exemple. Votre entreprise émet une tonne de CO2 en brûlant en un mois du pétrole vieux de millions d'années. Pour compenser, vous financez la plantation d'arbres qui mettront 20 ans à absorber cette même quantité. Est-ce vraiment équivalent ? Cela suscite plusieurs remarques. D'abord, le CO2 fossile est nouveau dans l'atmosphère, contrairement au CO2 du cycle naturel. Puis, la séquestration par les arbres est temporaire et réversible, du fait des incendies ou des maladies qui peuvent atteindre ces arbres. Ensuite, l'impact climatique varie selon le moment et le lieu des émissions. Enfin, le mirage du prix juste, puisque qui dit marché dit prix de la marchandise. Aujourd'hui, la tonne de CO2 peut valoir 80 euros sur le marché européen, 5 euros en Chine et 15 euros sur le marché volontaire. Comment expliquer ces différences ? alors même que les projets de compensation couvrent le monde entier. Le problème est que le marché ne sait pas vraiment évaluer le coût des dommages climatiques. Ainsi, si une entreprise paye 80 euros pour émettre une tonne de CO2, mais que le coût réel des dégâts climatiques est estimé à plus de 200 euros par tonne, qui paye la différence entre 80 euros et 200 euros ? Nous tous, parce qu'à travers... les impacts du changement climatique qui touchent tout le monde, tout le monde est comptable du coût de la destruction du climat. L'expérience actuelle sur les marchés de compensation révèle leur inefficacité par rapport à la lutte contre le changement climatique. Selon la Commission européenne, 85% des projets de compensation Kyoto n'ont pas atteint leurs objectifs. Pour finir sur les marchés carbone, rappelons leurs impacts sociaux souvent ignorés. Il existe de nombreuses conséquences sur les populations locales. Des terres agricoles transformées en plantations pour la compensation, des communautés déplacées, des prix alimentaires qui augmentent et des droits traditionnels bafoués. Il est donc crucial de bien distinguer le marché des quotas carbone qui participent réellement à décarboner les industries lourdes européennes, des marchés volontaires de la compensation qui, de leur côté, pourraient créer plus de problèmes ailleurs sans résoudre la crise climatique. Alors quelles solutions et perspectives d'avenir ? Vous êtes nombreux à nous partager votre angoisse face à l'inaction climatique. Et si on attendait trop longtemps ? Et si les solutions proposées n'étaient pas les bonnes ? On vient de voir qu'il est possible de dépasser ces peurs et d'agir efficacement. Outre le marché des quotas carbone, Le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières imposera aux produits qui entrent dans le marché européen d'intégrer le prix du quota carbone européen. C'est une preuve qu'il est donc utile de repenser l'approche réglementaire. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, la réglementation directe peut être très efficace. Rappelons-nous l'exemple des normes automobiles. En imposant des limites strictes d'émission, en fixant un calendrier clair de transition, et en accompagnant les constructeurs et les consommateurs, les émissions moyennes de véhicules neufs ont baissé de 30% en 15 ans. C'est concret, mesurable et c'est très encourageant. Autre piste. La taxe carbone totalement repensée. Imaginez un système où la taxe carbone serait progressive selon les revenus, redistribuée aux citoyens sous forme de dividendes et accompagnée de solutions alternatives accessibles à tous. L'exemple canadien est éclairant à ce propos. Ils ont mis en place une taxe carbone qui augmente progressivement, avec 90% des revenus redistribués aux citoyens, des ménages modestes qui reçoivent plus qu'ils ne payent, Résultat, réduction des émissions sans impact social négatif. Troisième piste, l'approche territoriale et citoyenne. Les solutions locales montrent que des résultats sont possibles et sont prometteurs. Des projets de transition énergétique portés par les collectivités, l'implication directe des citoyens dans les décisions, des résultats visibles et mesurables localement. Enfin, cerise sur le gâteau, on peut même... grâce à l'approche territoriale, créer des emplois non délocalisables. L'exemple de la commune de Losanguel dans le Pas-de-Calais est assez parlant. Cette commune qui a transitionné d'une ville minière vers un modèle durable, en réduisant de 60% ses émissions de gaz à effet de serre en 15 ans et en créant plus de 1000 emplois verts est un exemple inspirant. En conclusion, nous arrivons à la fin de cet épisode et j'aimerais partager avec vous une conviction profonde. La lutte contre le changement climatique n'est pas qu'une question de mécanismes financiers ou de marchés complexes. C'est avant tout une histoire de choix collectifs, d'action citoyenne et aussi d'efficacité encadrée par l'autorité coercitive des institutions. Alors que pouvez-vous faire concrètement dès aujourd'hui ? Vous pouvez vous informer. Agir et vous connecter à ceux qui agissent déjà. Renseignez-vous sur les projets de transition dans votre territoire. Participez aux consultations publiques. Par exemple, les plans climat de vos communes seront bientôt révisés. Ce sera l'occasion d'être consulté. Rejoignez un projet citoyen de transition. Interpellez aussi vos élus sur ces questions. Parce que le changement climatique peut inquiéter, parce qu'il nous semble hors de contrôle. À titre personnel, j'ai rejoint deux associations. L'une porte un projet citoyen dans ma ville et l'autre association s'adresse davantage aux décideurs locaux. Des travaux de recherche leur sont fournis afin d'éclairer et d'encourager leur passage à l'action. Depuis, je perçois que la montagne de ce qui est à faire paraît moins impressionnante. Et je constate qu'ensemble, on peut vraiment agir dans le bon sens. Notre épisode est à présent terminé. Nous répondons à toutes vos questions dans l'espace commentaires sous ce podcast ou par mail à verhorizon.podcastaerobasegmail.com. Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à lui donner 5 étoiles et à vous abonner gratuitement sur votre plateforme préférée. Vous pouvez également rejoindre notre communauté Verhorizon Podcast sur tous les réseaux Facebook, TikTok, Instagram ou sur notre chaîne YouTube. Enfin, vous pouvez vous abonner à notre newsletter sur le site internet du podcast www.vert-horizon.net. Voilà pour aujourd'hui, on se retrouve mercredi prochain. D'ici là, prenez soin de vous et de votre environnement.