- Speaker #0
Bonjour à toutes et tous, bienvenue dans le podcast Viva Gen, je suis Claire Bonne.
- Speaker #1
Salut Claire, moi c'est Caroline Sarreau-Le Carpentier et toutes les deux nous sommes les fondatrices de Viva Gen, qui est le premier événement 100% dédié aux dynamiques intergénérationnelles en entreprise.
- Speaker #0
Et si la diversité des âges devenait votre plus grand atout, que vous soyez DRH, manager, responsable RSE, Viva Gen est fait pour vous. On vous donne rendez-vous le 29 avril 2025. pour une journée unique où nous ferons de la collaboration intergénérationnelle un véritable levier de performance. Bonjour à toutes et tous, bienvenue dans ce tout premier épisode de Viv'Agen et aujourd'hui avec Caroline on a reçu Philippe Pierre. Philippe Pierre c'est un sociologue, un amoureux des sciences humaines, vous allez le découvrir très rapidement, il a énormément de choses à transmettre. On s'est même regardé à mon mec Caroline en se disant c'est pas du tout de la sociologie, c'est de la philosophie, de la poésie, de la rencontre, vous allez voir, c'est absolument fabuleux. et tout ça, c'est cadeau. Bonne écoute. Bonjour Philippe.
- Speaker #2
Bonjour Claire. Bonjour Caroline.
- Speaker #1
Merci beaucoup, franchement, de venir, ça nous touche beaucoup.
- Speaker #0
C'est le premier épisode, on verra si on le diffuse en premier. En tout cas, vous êtes notre premier invité pour ce podcast Viva le Genne qui va traiter des relations et des dynamiques générationnelles en entreprise. On a créé ce podcast avec Caroline pour faire écho à notre événement qui aura lieu le 29 avril 2025 à Paris. Vous serez sur scène, vous serez speaker. Merci de nous faire aussi l'honneur de venir à notre micro pour parler aussi un petit peu de votre expertise, de votre passion. Et avant de commencer, est-ce que vous pouvez nous expliquer qui vous êtes en quelques mots ?
- Speaker #2
Oui, donc je m'appelle Philippe Pierre et oui, vous avez évoqué la passion. Moi, j'ai la passion en fait des rencontres. J'aime m'immerger dans des univers culturels qui sont différents, avec beaucoup, beaucoup de possibilités d'enrichissement mutuel. Voilà, donc je suis un homme de ressources humaines. J'écris une quinzaine d'ouvrages. Et une de mes passions, en effet, c'est la question de la gestion de tous les âges, sans aucune discrimination, et je sais que c'est quelque chose pour vous de très important.
- Speaker #1
Vous disiez tout à l'heure qu'il fallait faire très attention à ne pas segmenter l'intergénérationnel du reste. Est-ce que vous pouvez nous expliquer quels sont les autres paliers ? Comment est-ce que vous voyez ça ?
- Speaker #2
Oui, avec plaisir. Pour moi, l'intergénérationnel, c'est un prétexte. C'est un prétexte à la rencontre. Et une rencontre, ce n'est pas un rendez-vous. Un rendez-vous, ça se programme dans un agenda, puis on l'écarte. Une rencontre, c'est une posture d'accueil à l'inconnu. L'intergénérationnel, c'est une ambition. C'est celle de découvrir des personnes qui vont m'aider à changer en échangeant, sans me perdre ni me dénaturer. L'intergénérationnel, c'est vraiment une volonté aussi, une volonté de pouvoir s'ouvrir à d'autres types de comportements, d'autres sagesses aussi. Et donc, l'intergénérationnel, pour moi, c'est une des dimensions des parcours humains. C'est important de s'intéresser à cette dimension, mais il y en a d'autres. Il y a la classe sociale, il y a l'ordre dans la fratrie, il y a mon bassin d'emploi, il y a mes systèmes de pensée, mes croyances religieuses, il y a l'idée que je me fais de ma situation si je suis en situation de handicap, visible ou invisible. Donc l'intergénérationnel c'est un formidable prétexte pour penser en fait à ces dimensions qu'on pourrait superposer et qu'on va appeler l'unicité de la personne humaine, tout simplement.
- Speaker #0
Et avec votre recul et votre regard sur ce que vous étudiez depuis un certain nombre d'années, parce que d'ailleurs c'est pas votre métier d'origine. Si on peut juste revenir très rapidement.
- Speaker #2
Moi, je suis sociologue. En fait, j'ai fait une thèse de sociologie en même temps que j'étais praticien. C'est quelque chose en France qui est assez peu, je dirais, fréquent. Mais dans d'autres pays comme le Canada, c'est assez souvent qu'on voit ça. Et donc, mes travaux portaient sur l'expatriation. Comment, quand tu dépasses une frontière physique, tu emmènes avec toi tout un parcours et tu peux avoir des compétences pour pouvoir vivre des rencontres, justement, à l'étranger. Et donc ma thèse a été faite avec Renaud Saint-Solieu, oui, à Sciences Po, j'avais cette grande chance. Et en parallèle de ça, en fait, je travaillais comme RH. Et donc ensuite, j'ai travaillé pendant près de 13 ans chez L'Oréal comme RH. Mais j'ai toujours enseigné et j'ai toujours écrit des livres en parallèle. Et ça, pour moi, c'est très important. On a besoin de s'ouvrir, en fait, à des mondes qui ne nous ressemblent pas.
- Speaker #1
Vous recommandiez ça dans plusieurs de vos interviews, vous racontiez les... les impressions que vous aviez avec les questions de vos étudiants, qui étaient toujours surprenantes, qui vous permettaient de revenir au bureau et être mieux préparé à des remarques, à des réflexions ou à des demandes de vos propres collaborateurs.
- Speaker #2
Oui, ça c'est quelque chose auquel je suis très attaché. Pour moi, nous nous devons de saisir ce qui émerge. La jeunesse est présente dans les amphithéâtres, dans les associations, dans nos rues, dans nos quartiers. J'aime beaucoup cette phrase de Lévi-Strauss, pour être proche, il faut s'approcher.
- Speaker #0
Hum.
- Speaker #2
Et je crois que c'est tout le sens aussi de votre événement. J'adore !
- Speaker #1
Moi, j'adore !
- Speaker #0
Ça tombe bien, vous serez sur scène. Oui, il y a un point, j'aimerais bien que vous tissiez ce fil avec nous aujourd'hui. Le fil de la génération en entreprise, c'est pas nouveau. Depuis la naissance de l'entreprise, c'est là. En revanche, on sent quand même que c'est un sujet d'actualité, c'est un sujet qui est sur la table. Pourquoi c'est nouveau, finalement, dans la tête de certains dirigeants, certains DRH, certains responsables RSE ? Pourquoi cette nouveauté ?
- Speaker #2
Moi, je le rattache, cette question intergénérationnelle, je la rattache en fait à l'évolution de la centralité du travail dans nos vies. Il me semble que nous vivons depuis une bonne trentaine d'années une évolution d'un modèle culturel, qui est certainement le mien, moi dans ma jeunesse, mon adolescence, puis mes années de jeune adulte. Au centre de ma vie, il y avait trois grands piliers. Il y avait, ça dépendait des semaines d'ailleurs, il y avait ma famille, le travail et mes amis. Et ce modèle-là, dans mes travaux, dans mes livres, je l'ai appelé avec d'autres. le modèle de la centralité. Et puis pour diverses raisons sociologiques, qu'on aura peut-être l'occasion aussi de reprendre sur scène le 29 avril, pour diverses raisons, en fait, il y a de plus en plus autour de nous de personnes qui n'ont pas un centre, mais ces personnes ont des centres. Et moi j'y vois quand même une source d'enrichissement mutuel. Ce n'est pas du tout une catastrophe. Moi je veux défendre avec beaucoup d'autres l'optimisme de combat. On a absolument besoin, en fait, je dirais, d'aller à la rencontre, encore une fois, de gens qui ne nous ressemblent pas. Nous sommes en train de vivre depuis une trentaine d'années une remise en cause de ce modèle culturel. Mais ce n'est pas forcément une perte, c'est simplement une métamorphose. Dans une métamorphose, comme dans l'intergénérationnel, il n'y a pas de début, il n'y a pas de fin, qui sont calés pour toujours. C'est un perpétuel recommencement à condition d'avoir une certaine posture. Et moi, la posture, c'est l'étonnement volontaire. Il convient de savoir ouvrir son regard à des personnes qui ne nous ressemblent pas. Et la première chose, c'est suspendre son jugement. Suspendre son jugement. L'époque est grecque. la présence du doute. Donc la remise en cause de la centralité du travail dans nos vies, ça veut dire qu'on a autour de nous de plus en plus de personnes, pas simplement des jeunes, des personnes qui ont une très belle expérience, longue aussi, et qui veulent faire bifurcation, qui veulent réinventer leur vie, qui veulent avoir en fait, non pas une seule source d'autorité, mais plusieurs. Voilà, alors ça ouvre à des thématiques magnifiques comme les slasheurs, ça ouvre à des thématiques comme celles du mécénat de compétences, du mentorat. Voilà les différentes facettes du champ de l'intergénérationnel. Mais j'insiste là-dessus, l'étonnement volontaire. J'y suis extrêmement attaché. Et c'est trois choses. C'est suspendre son jugement, c'est distancier son regard. Et quand on travaille et qu'on transmet à des personnes d'un autre âge, on est obligé à un moment donné de distancier notre regard parce qu'elle ne fonctionne pas toujours comme nous. Puis la troisième chose, c'est expliquer à l'autre comment on a l'impression de fonctionner. Ce que j'appelle le mode d'emploi. Ça, c'est quelque chose qui me semble très important.
- Speaker #0
Ikea l'a bien compris.
- Speaker #2
Oui, il y a une kéa là. Et on vit des vies en kit. On est toutes et tous des armoires Billy. Voilà, on est tous des armoires Billy. Parfois,
- Speaker #0
il manque une vis, mais bon, on tient debout quand même.
- Speaker #2
Et moi, je pars de l'idée qu'on a différents modes d'emploi pour monter l'armoire Billy. Et de plus en plus. Tout d'un coup, nos enfants ne pensent pas la même chose que nous. Nos grands-parents aussi prennent la parole. Et dans cette coexistence qui n'existait pas il y a 50 ans, c'est pas vrai. Du fait de l'espérance de vie, il y a un croisement des regards. Et donc c'est important de tenter d'expliquer à l'autre son mode d'emploi. On ne peut pas en vouloir à quelqu'un de ne pas bien fonctionner avec nous si on ne prend pas le temps de lui expliquer comment on a l'impression de fonctionner. Ça me semble important.
- Speaker #0
Super intéressant.
- Speaker #1
C'est fascinant.
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
Et donc, Philippe, on vous a invité le 29 avril à faire le premier discours, la première intervention.
- Speaker #2
Merci.
- Speaker #1
Parce que vous êtes très inspirant et que vous ouvrez les débats en... Ne regardons pas le bout du doigt, mais bien la main entière, le quartier et le territoire. Donc, vous ouvrez bien plus que l'interjet. Et vous allez nous parler de la rencontre fertile, qui est justement le résultat de cette suspension du jugement. Est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu ?
- Speaker #2
Oui. Une rencontre, j'insiste là-dessus, c'est d'abord une posture choisie. C'est un acte volontaire. Travailler avec quelqu'un d'un autre âge, ça peut nous percuter sur le rapport au temps. Comment cette personne gère un retard, un délai qui s'allonge. Ça peut nous percuter aussi dans le rapport à l'espace. Serrer la main, ne pas serrer la main, regarder dans les yeux, ne pas regarder dans les yeux. Le 29 avril, quand je serai face à nos participants, je pense que nos participants vont me regarder. Mais de plus en plus, je rentre dans des amphithéâtres dans les pays où j'enseigne et j'ai personne qui me regarde. Donc là, il faut que je suspende mon jugement. Il faut que je me prépare psychologiquement à entrer en conversation avec des personnes qui ne partagent pas mes codes. Pour moi, c'est ça l'intergénérationnel. Ils n'ont pas mes normes de politesse, a priori, toujours, mes rites d'interaction. Je rentre, je me prépare, je me dis « vas-y Philippe, tu vas bien travailler avec eux, mais tu ne vas pas du tout travailler comme avec des personnes de ton âge ou d'un âge plus avancé. » Et je rentre dans l'amphi, à ce moment-là je leur dis « bonjour, je m'appelle Philippe Pierre, je n'ai pas la chance de vous avoir, le 29, je suis certain que vous m'aurez présenté, là je suis tout seul. » À ce moment-là, ils tapent mon nom sur Internet. Ensuite, il clique sur image. Et dans certains pays aujourd'hui, il clique Philippe Pierre vidéo, en même temps que mon cours. Là, j'ai besoin du coup d'adapter ma posture. Et voilà, c'est un point de départ, ce n'est pas un point de clôture. C'est très important. La rencontre, en fait, c'est une interrogation sur ce sur quoi je ne transige pas. C'est ça la question que je pose souvent aux dirigeants. Quels sont les deux ou trois points sur lesquels vous ne transigez pas ? Ça, c'est votre mode d'emploi. C'est juste une invitation à aller à la rencontre de... Ce que Martin Villajus et Michel Soquet appellent l'intelligence de l'autre. Moi je me considère comme être présent sur cette terre avant beaucoup de nos jeunes. J'ai donc dans un premier temps une responsabilité d'aller à leur rencontre. Puis ensuite, quand on décidera de travailler en commun, à ce moment-là, il faut poser un cap et un cadre. Les deux. Le cap c'est pourquoi on travaille ensemble, notre raison d'être. Et le cadre c'est comment tu fais. Et on a besoin du cap et du cadre. Je suis certain que beaucoup d'intervenants le 29 avril en fait reviendront sur cette dimension-là. L'intergénérationnel pour moi, ce n'est pas tolérer, c'est reconnaître. Tolérer, ça peut être vivre côte à côte sans vraiment se connaître dans nos parcours de vie. Non, reconnaître, c'est changer en échangeant sans se perdre ni se dénaturer. C'est une formule du philosophe Édouard Glissant que je trouve magnifique. Philosophie de la relation, de la rencontre.
- Speaker #0
J'ai envie d'ouvrir le chapitre de la philosophie.
- Speaker #1
Il y a une très belle phrase que j'aime beaucoup, que vous dites régulièrement, que je reprends dans mes conférences. qui justifie aussi cette posture permanente des générations face aux autres, le fait de se poser en s'opposant, que je trouve absolument génial, qui exprime tout. Je me pose pour m'opposer, par principe. Et donc, vous acceptez juste cette démarche-là.
- Speaker #2
Exactement. Et par exemple, quand je dis à mes étudiants en amphithéâtre, c'est assez impressionnant, prendre la parole, c'est quand même toujours un acte intéressant qui fait grandir. Je leur dis, lisez Michel Serres. C'est un homme qui, à 85 ou 86 ans, avait écrit Petite Poucette, un livre formidable sur l'intergénérationnel. Il faut l'écrire avec un C. C'est une réflexion sur des jeunes qui changent de monde en changeant d'écran avec leur pouce. Et je leur dis, le livre est sorti en 2012. À ce moment-là, ils lèvent le doigt dans l'amphi. Première interaction. Avant, ils m'ont écouté, ils vérifiaient ce que je disais et ils m'enregistrent. Et là, ils disent, Philippe, alors souvent c'est le tutoiement. Ce n'est pas 2012, c'est 2014. Là, j'ai intérêt à suspendre mon jugement, j'ai intérêt à distancier mon regard et j'ai intérêt à savoir ce sur quoi je m'appuie dans mes priorités. Et en fait, ce que j'observe, c'est qu'ils ne veulent pas me coincer, c'est ça qui est intéressant. Moi, j'ai grandi dans une lecture du monde où si tu disposes d'une information rare, on va te la prendre, on va te l'arracher des mains. Comme les pages dans certaines universités au moment des partiels que l'on arrachait. Je n'ai jamais fait ça, mais je l'ai constaté. Moi, je suis né dans ce monde du « où » . L'intergénérationnel, c'est une invitation à aller dans une société ou des entreprises, des organisations en archipel. La perspective du « et » . Et donc, ce sont des personnes, quand elles prennent la parole, en tout cas c'est comme ça que je l'interprète, elles veulent co-construire avec moi. Elles ne veulent pas qu'on leur impose quelque chose qui ne leur semble pas juste dans le creux de la main. Elles saisissent une information, elles la mettent au centre. Je crois que ces personnes veulent co-construire avec moi, en fait, et acquérir une forme de raisonnement un peu différente. C'est une forme d'idéalisme, mais que j'assume totalement. Et alors, si les choses se passent bien, il m'envoie une invitation pendant mon cours sur LinkedIn.
- Speaker #0
Ça, ça veut dire que c'est réussi.
- Speaker #2
Ça, ça veut dire que c'est réussi. J'ai même un collègue au Canada qui est un homme que je connais depuis longtemps et qui a une application qui vibre en fonction du type d'invitation qu'il reçoit pendant son cours.
- Speaker #0
Ah oui, ça va loin.
- Speaker #2
Ça va loin parce que vous voyez en quoi ça renouvelle en quelque sorte des considérations classiques sur la pédagogie. En l'occurrence parce que l'andragogie, la formation des adultes. Et donc il y a cinq canaux de communication quand on est face à ces jeunes. Il y a les mots, les images, la vidéo. Alors après on accepte ou pas, c'est toute la difficulté. Il y a les réseaux sociaux et la micro-conversation. Typiquement, ils m'envoient des invitations sur WhatsApp pour participer à des forums. C'est incroyable. Je travaille très bien avec eux, mais je ne travaille pas du tout de la même manière qu'avec d'autres publics. Et je voudrais insister sur un point, ces jeunes ne représentent absolument pas la totalité de la jeunesse. Je suis très attaché à ne jamais être y-cologue.
- Speaker #0
Ah voilà, je voulais en parler de ce moment-là.
- Speaker #2
Ça me semble important. C'est-à-dire que ce n'est pas parce que tu connais l'âge de quelqu'un que tu vas tout de suite avoir le bon mode d'emploi du meuble qu'on monte. Non, c'est juste un des calques que l'on doit superposer pour atteindre l'espace d'une rencontre. C'est toujours de la co-construction. L'intergénérationnel, c'est la possibilité de s'enrichir mutuellement. Mais à condition de ne pas tout accepter. Tout ne se vaut pas.
- Speaker #0
Moi, il y a quelque chose, je m'attache beaucoup à la prospective et qu'est-ce qu'on peut construire aujourd'hui pour influencer le demain. Et plus je vous écoute, plus je me dis que finalement, c'est une science du présent. Ça ne sert à rien d'imaginer quelque chose, ça ne sert à rien de revenir sur le passé. Ce qui compte, c'est aujourd'hui. Parce que les jeunes d'aujourd'hui que vous décrivez, sans les décrire et les mettre dans des cases, ce ne sont pas les jeunes de 20 ans ou 30 ans ? Non. Ce ne sont ni les jeunes d'il y a 30 ans ? Ce qui compte, c'est aujourd'hui ?
- Speaker #2
Oui, c'est important, cette dynamique du présent. C'est le surgissement de quelque chose, la dynamique du présent. C'est une forme aussi, chez moi, et ce n'est pas simple dans mon modèle culturel, de lâcher prise. Moi, j'ai été programmé culturellement pour être dans un rapport au temps séquentiel et linéaire. Une chose après l'autre, un rendez-vous après l'autre, et donc on m'a souvent décrit la société comme un peu anxieuse. Il faudra que tu deviennes propriétaire, il faudra que tu te sécurises, il ne faut pas faire confiance aux autres. En plus, je suis né et j'ai grandi à Paris, donc l'autre est... C'est une menace. Non, j'exagère un peu. Je force le trait. Mais dans mon amphithéâtre, c'est une invitation au présent pour reprendre vos termes. C'est-à-dire que je ne dois pas me recroqueviller. Je dois essayer de comprendre leur manière de fonctionner. Je dois ensuite co-construire en tenant toujours le cap et le cadre. Le cap, c'est pourquoi on travaille ensemble. Le cadre, c'est comment on va travailler ensemble. Je leur exprime. Donc, c'est quand même moi qui pilote. Puis ensuite, on monte sur le bateau et c'est un équipage commun. Mais c'est toujours moi qui ai la responsabilité de piloter le cours.
- Speaker #1
Oui, le cadre, ce sont les règles à respecter.
- Speaker #2
Oui, les règles. Et puis, l'explicitation de nos modes d'emploi. Ce sur quoi je ne transige pas.
- Speaker #1
Est-ce que c'est ça l'objectif ? les exigences.
- Speaker #2
C'est plutôt les exigences là. C'est plutôt un point de départ commun que je rappelle en plus. Si tu veux être entendu, la répétition fixe la notion. Donc je le répète, ça c'est un point qui me semble important. Et puis ensuite mon cours, je l'envisage comme une possibilité ensuite de travailler ensemble après. D'ailleurs à la fin d'un cours réussi pour moi, une partie de mes étudiants viennent à moi et à ce moment-là ils me posent des questions qui sont désarçonnantes dans certains pays. tout de suite combien vous gagnez monsieur donc là il faut que je suspende mon jugement ce que moi je viens d'un autre modèle culturel avec d'autres tabous d'autres interdits et puis ensuite une fois que ça s'est posé il donne la possibilité de continuer de réfléchir avec eux là je suis revenu d'un cours de deux jours en fait mes étudiants à peu près une 4 80 personnes avaient utilisé trois applications d'intelligence artificielle et donc il prenait les notes en commun il ya des modérateurs et ils m'ont fait ce qu'il ya de ils m'ont renvoyé sur ma boîte mail en fait la prise de notes collective. Vous imaginez là le progrès ? C'est ça l'intergénérationnel, c'est une possibilité d'intelligence collective dans des organisations qui deviennent apprenantes. Et donc j'ai ouvert le document, honnêtement j'ai été ému.
- Speaker #0
J'imagine,
- Speaker #2
c'est puissant 80 personnes. 80 personnes qui prennent les notes ensemble avec des modérateurs, c'est quasiment publiable à mes yeux. Ils m'ont rajouté des liens, des vidéos, une bibliographie référencée. C'est ça qui me semble très intéressant. Là,
- Speaker #1
on est dans la réciprocité.
- Speaker #2
Exactement.
- Speaker #1
Et en plus, c'est le donner, recevoir, rendre, parce qu'il rentre quelque chose qui n'existait pas au moment où vous l'avez donné. Exactement. Pas sous cette forme-là.
- Speaker #2
Pas sous cette forme-là. On est vraiment dans ce don, ce contre-don, cette réciprocité. Cette qualité de création de lien, on aura vécu dans un premier temps un rapport classique. J'entre dans l'amphi, je n'ai personne qui me regarde. On s'apprivoise mutuellement. Ils me regardent. Puis ensuite, ils rentrent dans le jeu. Et puis... J'essaie de leur donner le maximum de références, d'être présent aussi à la fin du cours. C'est un point qui me semble important. Il m'est arrivé d'avoir de l'admiration pour mes enseignants, mais je trouvais qu'ils partaient très vite après leur cours. Pour eux, c'est aussi important, ce temps de questionnement et de conversation. L'intergénérationnel, c'est un prétexte à la conversation. Je dis souvent qu'un enseignant, un partenaire social, un dirigeant, c'est quelqu'un qui doit créer des espaces de parole, volontairement, pour s'entendre dire des choses utiles qu'il n'a pas envie d'entendre. C'est ça, pour moi, ma définition. d'un dirigeant est particulièrement en contexte multigénérationnel. Quand au début, on n'a pas les codes. C'est quoi l'intergénérationnel ? C'est décoder, décrypter des systèmes d'attente, d'abord. Voilà ce que l'autre a en tête, que je n'ai pas moi, que parfois je ne le sais pas. pas il a évolué dans un autre pays un autre bassin d'emploi une autre manière d'être il me percute il me fait naître en moi une étrange étrangeté parfois de l'inconfort mais je vais décider je crois beaucoup à ça il faut vouloir vouloir d'yankélévitch je vais décider d'aller à la rencontre de oui de ce que je crois l'intelligence de l'autre Il y a à décider de présomption de compétences. Bon, mais ça, ça ne se fait pas facilement. Et quand je suis fatigué, je m'entoure toujours de gens qui me ressemblent. Bien entendu.
- Speaker #1
Exactement. Alors, j'ai deux petites questions.
- Speaker #0
Mais bien sûr, on est dans le timing.
- Speaker #1
J'aimerais que vous nous parliez quand même un peu du sujet qui vous occupe en ce moment, qui est l'interculturel. Oui. Et j'aimerais bien que vous nous donniez après ce que signifie pour vous Viva Gen. Vous commencez par celle que vous voulez.
- Speaker #2
Vivagen, moi, c'est avoir la possibilité d'aller à la rencontre de personnes avec qui je vais vivre de belles conversations. Ça, c'est le premier point. Et puis le deuxième point pour moi, Vivagen, c'est la possibilité de clarifier des outils avec le sens du bricolage, pas uniquement la boîte à outils, qui soit utile ensuite à nos territoires et qui fasse se rencontrer des personnes qui, au départ, n'avaient rien pour se rencontrer. Pour moi, c'est ça aussi le sens de votre événement le 29 avril. C'est donner au maximum la possibilité d'associer des personnes qui a priori ne se seraient pas rencontrées ou n'auraient pas été côte à côte dans les lieux que vous allez nous faire vivre et qui vont vivre plus qu'un rendez-vous, une vraie rencontre. Je crois à ça, moi. Et donc, en entendant, et je sais que ce sera le cas, des personnes qui vont être, je dirais, créatives, très inspirantes. J'ai eu connaissance du programme et ça me donne vraiment envie d'assister, je le ferai d'ailleurs toute la journée. Tout d'un coup il y a une possibilité de co-construction. Je vais même vous dire quelque chose qui nous tient à cœur, j'en suis sûr tous les trois. Un avenir est possible. Moi c'est pour ça aussi que j'enseigne. C'est pour à un moment donné créer en fait, peut-être pas une vocation, mais en tout cas, se dire pour moi aussi c'est possible. Mon origine sociale, ma situation actuelle. fait que j'ai quelques mécanismes d'autocensure à l'œuvre qui ne me donnent pas le droit d'aller à la rencontre de gens différents. Mais puisque vous m'avez donné la possibilité d'inventer mon futur, à ce moment-là, je franchis le premier pas. Et c'est là où on doit aider et soutenir. Vivagène, c'est ça, capitaliser les retours d'expérience.
- Speaker #1
C'est ça. Oui,
- Speaker #2
c'est ça.
- Speaker #0
On va vous donner les clés.
- Speaker #1
C'est pas comme ça, mais c'est ça.
- Speaker #2
Parce que l'horizon, c'est comme ça aussi. Moi, je suis très heureux de partager ça avec vous aussi. L'horizon, c'est quand même de faire grandir sur nos territoires des institutions, des entreprises publiques ou privées, des associations qui soient apprenantes. Et pour moi, il y a trois conditions. La première, c'est la formation de toutes et tous. Quel que soit le statut hiérarchique, quel que soit l'âge, quelles que soient nos couleurs de peau, nos adresses postales, on veut tous apprendre à apprendre. Si on sait bien nous le présenter, on est tous en volonté farouche d'avoir des grilles de questionnement du monde. Vive Agène, pour moi, c'est avoir des grilles nouvelles de questionnement du monde. Puis après, quand on travaille ensemble, en fait, une fois qu'on a été formé, il s'agit d'être aligné autour de ce qu'on affiche, de ce qu'on fait, et ce que les gens ressentent. Ça, c'est l'alignement nécessaire. Puis il y a une troisième perspective qui me passionne énormément, c'est la protection des personnes atypiques, singulières, pas comme nous, différentes. Voilà, et ça, moi, je les appelle des personnes talenteuses. Vive Agène, pour moi, ça serait ça. La création d'espaces où l'on protège des personnes qui au départ nous semblent peut-être un peu lointaines, un peu étranges, un peu bizarres, comme quand je rentre dans mon amphithéâtre. Mais à la fin d'un travail qu'on a fait en commun, là en l'occurrence ça sera une très belle journée, on aura envie de vivre ce que René Depest rappelle le métier à métisser. Vive Hagen, c'est un métier à métisser.
- Speaker #1
Sinon vous êtes directeur marketing ou pas ?
- Speaker #0
Oui c'est clair,
- Speaker #1
ou de programmation. D'essayer en diligence de plus.
- Speaker #2
Non mais ça veut dire que...
- Speaker #0
Partagez ça. On a sans doute fait bien notre travail parce que vous avez réussi à amener avec d'autres mots. Déjà, vous m'avez donné envie de venir à l'événement que j'organise. C'est comme de dire, j'ai envie d'être invitée à mon mariage quand ça se passe bien. Là, vous m'avez donné envie de venir.
- Speaker #1
C'est vrai.
- Speaker #0
Et ça a l'air génial. Non mais blague à part,
- Speaker #2
c'est fascinant. Ce qui est vraiment intéressant dans le programme que vous avez pu construire, c'est qu'il y a une croisée des disciplines aussi. On va parler forêt, nature, on va parler fonctionnement du cerveau, nos comportements. Donc ça, c'est tout à fait riche. Voilà, c'est une perspective transdisciplinaire. On n'en vit pas tant que ça dans une année. Et écoutez, moi, je suis ravi de pouvoir participer à ce bel événement.
- Speaker #0
C'est avec un grand plaisir qu'on vous aura sur scène pour démarrer et donner l'inspiration, le premier souffle à cet événement. Et on va accoucher de cet événement avec vous sur scène. ça va donner vraiment des belles perspectives, ça c'est sûr.
- Speaker #1
Et vous voulez nous donner un mot sur l'interculturel, parce que c'est quand même votre sujet du moment ?
- Speaker #2
L'interculturel, pour moi c'est le travail d'une vie. L'interculturel, pour le dire de manière très simple, j'aime beaucoup cette phrase de Lévi-Strauss, et ça sera à mon avis tout à fait en résonance avec Didagène, l'important dans la vie n'est pas d'ouvrir les autres à la raison, l'important est de s'ouvrir soi-même patiemment aux bonnes raisons des autres. Je crois que c'est tout à fait l'esprit de votre événement. Ne pas passer en force la ligne de front, elle est partout dans le monde actuel. Ne pas vouloir assimiler l'autre, le transformer en chose et la chose c'est moi. Courir le risque, mais c'est une opportunité en fait, d'expliquer comment on a l'impression de fonctionner, travaillant ensemble pour pouvoir déconstruire nos idées reçues. Et ensuite, s'ouvrir patiemment aux bonnes raisons des autres. C'est le travail d'une vie. Donc, Vivagène, pour moi, c'est juste le jalon d'une chaîne du savoir qui est beaucoup plus haute et plus ambitieuse encore. Et puis, vous allez croiser d'autres événements. C'est ça qui est beau. C'est ça le début de l'aventure.
- Speaker #1
Première édition.
- Speaker #2
Première édition. Du métier à métisser. René Dupest.
- Speaker #0
On va le rajouter à notre logo. Est-ce que vous avez un dernier mot à donner à des personnes qui vont entendre ce podcast et qui vont se dire est-ce que vraiment cet événement est fait pour moi ? Qu'est-ce que vous pourriez dire à ces RH, à ces gens responsables RSE ?
- Speaker #2
De lire deux livres. Parce que pour moi, la vérité est aussi dans les livres. Et un livre qu'on lit et qu'on apprécie donne envie ensuite d'aller vivre ce que l'on a pu lire. Michel Serres, Petite Poucette, c'est un ouvrage qui a quand même quelques années, mais que je trouve tout à fait vivifiant sur l'intergénérationnel, parce qu'il est dans l'optimisme de combat. Et la suite de Petite Poucette, c'est un ouvrage qui s'appelle C'était mieux avant. Écoutez, je pense qu'on a besoin en ce moment, face à... à l'actualité récente et à tous les comportements grincheux, d'avoir en fait beaucoup d'enthousiasme et d'énergie. C'est le sens aussi que je donne à ma présence. Merci infiniment de votre invitation, j'essaierai d'être à la hauteur. Je vous le saurai.
- Speaker #0
On pense pas à ceux qui passent après vous.
- Speaker #2
Merci.
- Speaker #1
C'est canon. Et merci Claire de m'offrir l'occasion parce que c'est quand même toi qui as la compétence podcast de m'offrir l'occasion de parler.
- Speaker #0
On va continuer la discussion. Et si on a bien compris, vous serez là pendant tout l'événement. Donc si des personnes présentes le jour J ont envie de discuter avec vous, il y aura des moments d'échange. On a prévu des breaks super sympas avec des partenaires. Je n'en dis pas plus, mais les pauses aussi seront inspirantes.
- Speaker #2
Oui, moi, je crois beaucoup à ça.
- Speaker #0
C'est hyper important. C'est une espèce de pause et de virgule d'inspiration dans ces événements.
- Speaker #2
Exactement, et de croisement des mots. Merci Claire, merci Caroline. Merci Philippe, merci à vous.
- Speaker #0
Je me réjouis. Allez, à bientôt. Viva Gen ! Et si la diversité des âges devenait votre plus grand atout ? Que vous soyez DRH, manager, responsable RSE, Vivagen est fait pour vous. On vous donne rendez-vous le 29 avril 2025 pour une journée unique où nous ferons de la collaboration intergénérationnelle un véritable levier de performance.
- Speaker #1
Complètement, parce que finalement, qu'est-ce qu'il reste à faire ? 1. Prendre ses billets pour l'événement Vivagen le 29 avril et 2. S'abonner à la chaîne podcast Vivagen pour ne rien louper des idées, des nouvelles tendances. et des idées sur l'interview.