- Teddy Bredelet
Bonjour, vous ĂȘtes en train d'Ă©couter l'Ă©pisode 55 de Vivant, La Dame en Noir, avec Mina Holville. Vivant, ce sont toutes les trois semaines des conversations ordinaires mais inspirantes, singuliĂšres et rassurantes pour rĂ©veiller votre conscience. Mes invitĂ©s ont acceptĂ© de partager leur histoire et avec eux, vous dĂ©couvrirez que parler de la mort, c'est avant tout parler de la vie. Ici Teddy Brodley de TranquillitĂ©.fr, je vous souhaite la bienvenue dans ce podcast vivant. Au premier abord, rien ne prĂ©destinait Mina Oldville Ă vivre une aventure dans le monde des ponts de funĂšbres, et pourtant, je vous emmĂšne avec moi dans le nord de la France pour un Ă©pisode spĂ©cial de Vivant, rencontrer la Dame en Noir. AprĂšs avoir vĂ©cu trois vies et une carriĂšre remarquĂ©es en tĂ©lĂ©vision, c'est un peu par hasard que Mina se retrouve nĂ©e Ă nĂ©e dans le monde du funĂ©raire. Alors pourquoi on l'appelle la Dame en Noir ? Est-ce que vous allez dĂ©couvrir dans cet Ă©pisode de Vivant ? Et ce n'est certainement pas pour les raisons auxquelles vous pensez. Mais je ne vous en dis pas plus et laisse place Ă mon Ă©change avec Mina Holville. Bonjour Mina, bienvenue dans Vivant, comment tu vas ?
- Minna Holleville
Salut Teddy, trĂšs bien, merci.
- Teddy Bredelet
Je suis trÚs content de t'accueillir. On va parler de toi, ton parcours, ton histoire. Avant ça, est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?
- Minna Holleville
Je m'appelle Mina, je suis la dirigeante des Pompes FunÚbres de la Liberté. Pomp Finable de la Liberté, Bruxelles-des-Lys, située à Abbeville dans la Somme, depuis maintenant 13 ans.
- Teddy Bredelet
On se connaßt bien, on a un peu discuté. Et ce qui m'a fasciné chez toi, c'est l'histoire qui t'a amené au monde du funéraire. Raconte-nous un petit peu comment tu as switché ta vie d'avant à ce monde merveilleux qu'est le funéraire. Quel funéraire !
- Minna Holleville
Eh bien, je suis originaire d'Abbeville. J'ai quittĂ© ma ville. TrĂšs trĂšs tĂŽt, puisque j'ai perdu ma maman Ă l'Ăąge de 14 ans, et je suis partie faire des Ă©tudes. Au dĂ©part, le cursus, c'Ă©tait la Sorbonne pour devenir prof d'allemand. Je suis partie ensuite Ă l'Ă©tranger pour mettre en pratique la langue germanique. Les Ă©tudes, pas mon truc, plus ĂȘtre sur le terrain. Je suis devenue au fil du temps traductrice. Puis ensuite, j'ai basculĂ© pour devenir hĂŽtesse de l'air.
- Teddy Bredelet
C'est vrai que c'est logique. Jusque là , ça va.
- Minna Holleville
Voilà , donc j'ai fait le tour du monde. J'étais jeune, j'étais enthousiaste. Et puis, je suis revenue ensuite sur Paris. J'ai débuté en région parisienne comme, on va dire, assistante de radio. J'ai bossé un petit peu pour RTL, Fun Radio, M6. Et puis, de fil en aiguille, les rencontres m'ont amenée à ... à développer ma personnalité et à faire un petit parcours dans les médias. Je suis devenue animatrice télé pour une chaßne musicale du Satellite pendant 12 ans.
- Teddy Bredelet
Quelle chaĂźne ? Que les gens aillent retrouver les trucs sur YouTube.
- Minna Holleville
Ăa s'appelle TĂ©lĂ© MĂ©lodie. TĂ©lĂ© MĂ©lodie, qui est une chaĂźne sur le Satellite, qui s'appelle aujourd'hui Vintage Forever.
- Teddy Bredelet
Oh,
- Minna Holleville
Forever. Forever. Et donc, j'ai eu la chance de cÎtoyer des personnes extraordinaires, avec pas mal de célébrités de ces années phares qu'étaient les Sixties, avec toute la bande de Salut les Copains. Et ça a été une expérience trÚs enrichissante d'un point de vue humain.
- Teddy Bredelet
Ăa a durĂ© combien de temps ?
- Minna Holleville
12 ans. Ouais. 12 ans. 12 ans, j'ai prĂ©sentĂ© l'Ă©mission qui s'appelle L'Agenda. Et puis Ă cĂŽtĂ©, j'ai fait quelques investissements dans le milieu de la nuit. J'ai travaillĂ© un petit peu sur Amiens, dans le milieu de la nuit, dans les discothĂšques. Et puis, une fois encore, beaucoup de rencontres, beaucoup de rĂ©flexions. Et j'ai toujours rĂ©agi de maniĂšre trĂšs spontanĂ©e, en faisant tout simplement ce qui me plaisait. Et dĂšs qu'il y avait quelque chose qui ne me plaisait plus, j'arrĂȘtais et je passais Ă autre chose. Et je suis arrivĂ©e Ă Abbeville, on est venu me chercher pour ouvrir un restaurant. Et c'est trĂšs, trĂšs, trĂšs rigolo dans le sens oĂč j'ai revu des personnes avec lesquelles j'avais grandi, les meilleurs moments de l'adolescence, les premiĂšres boum. Et j'ai rencontrĂ© un jeune homme avec lequel j'avais passĂ© de bons moments dans ma jeunesse et qui m'a fait part de son mĂ©tier. Et comme quoi, il Ă©tait pont funĂšbre. Et sur le coup, je lui ai dit mais c'est pas possible, tu peux pas ĂȘtre croque-mort.
- Teddy Bredelet
Mon Dieu.
- Minna Holleville
C'est affreux. Tu respires tellement la vie. Tu ne peux pas faire ce métier. Et il m'a dit, si, si, tu vas voir, demain, je vais venir avec un corbillard sur le parking de ton restaurant. Voilà . petit malaise et à la fin du compte on a fait un petit peu à l'époque c'était la mode de cette émission de télé qui s'appelait Vie ma vie donc en fait il est venu assister à une émission que j'ai enregistrée en studio et je lui dis bah écoute je suis venu un petit peu dans le milieu des médias Plumestrasse, Payette moi j'aimerais bien maintenant venir dans ton milieu un petit peu secret un petit peu interrogatif.
- Teddy Bredelet
C'Ă©tait quoi qui t'a motivĂ©e Ă dĂ©couvrir ce milieu-lĂ ? Au lieu du cĂŽtĂ© vie ma vie et t'inverses les rĂŽles Parce que quand on t'Ă©coute comme ça, la premiĂšre impression que t'as, c'est quand mĂȘme un truc glauque, lourd, dur.
- Minna Holleville
Tu sais, j'ai perdu ma maman, j'avais 14 ans, donc j'ai pas forcément gardé un trÚs trÚs bon souvenir des pompes funÚbres à l'époque. C'était à mien. C'est comme si j'avais encore ce sentiment-là en moi. hier, je me souviens exactement de l'odeur quand je suis rentrée dans ce funérarium. Je me souviens de l'apparence physique de ce croque-mort qui était trÚs étrayant, qui avait de la gomina dans les cheveux, qui avait un ourlet pas fait à son pantalon avec les chaussettes, je ne sais pas si tu te souviens à l'époque, tu sais, les chaussettes blanches avec les rayures ténites. Aucune élégance, il n'y avait aucune empathie. C'était froid. C'était les draps en velours sur les tables de registre. C'était affreux. Je me suis dit, ça ne correspond pas du tout à ma maman. Maman n'était pas comme ça. Maman était pétillante. Elle était classe. Elle respirait la joie de vivre. Elle était emportée par un cancer des intestins. Et puis, j'avais vraiment ce sentiment de malaise quand on me disait le mot pompe funérable.
- Teddy Bredelet
Oui, je comprends.
- Minna Holleville
Et donc je suis allĂ©e faire un stage de dĂ©couverte, c'est peut-ĂȘtre un bien grand mot, mais une petite journĂ©e d'immersion dans le milieu du funĂ©raire, donc au Pompfina de la LibertĂ©, pour le coup Ă Abbeville. Et ce jour-lĂ a Ă©tĂ© incroyable pour moi. Tu passes du milieu de la lumiĂšre oĂč tu effaces camĂ©ra, oĂč tu peux recommencer parce qu'on te dit non, la prise n'est pas bonne, t'as bafouillĂ©, t'es dans les plumes, les strass, les paillettes Et puis lĂ , en fait, t'effaces. A une famille en deuil, tu ne peux pas tricher, tu ne peux pas cacher tes sentiments. Tu dois ĂȘtre toi-mĂȘme, tu dois ĂȘtre transparente. Et Ă la fin du compte, on ressort une seule et mĂȘme impression, c'est l'amour qui ressort de toute cette expĂ©rience.
- Teddy Bredelet
Tu crois que ton expérience dans le milieu de la nuit a une influence dans ce que tu fais aujourd'hui, dans ton métier ?
- Minna Holleville
Je suis arrivĂ©e Ă la CollĂ©giale Saint-Wulfrand d'Aville, une trĂšs trĂšs grande cĂ©rĂ©monie, plus de 500 personnes. Et quatre bonhommes habillĂ©s tout en noir, un corbillard fourgon, pour le coup. Plein de fleurs, mais je ne sais pas combien de fleurs il y avait. C'Ă©tait hallucinant. Et donc, ces bras qui chargeaient les fleurs. Et puis, cette cĂ©rĂ©monie et la peine des gens. Et je me suis dit, je ne peux pas ĂȘtre lĂ en tant que simple spectatrice. Il faut que je les aide. Donc, tout naturellement, je suis allĂ©e au devant des familles. Et lĂ , il s'est passĂ© que... quelque chose, je ne sais pas, de maniĂšre tout Ă fait naturelle et spontanĂ©e. On a parlĂ© de la vie, on a parlĂ© de la maladie, on a parlĂ© de l'espoir, on a parlĂ© de la souffrance, on a parlĂ© de la prĂ©paration Ă la sĂ©paration. Et on les a accompagnĂ©s jusqu'au cimetiĂšre et Ă la sortie au cimetiĂšre, les personnes sont venues me remercier et m'ont dit ça fait bizarre de voir une femme C'est la premiĂšre fois ici par chez nous qu'on voit une femme. Vous faites partie de l'Ă©quipe ? Je dis non, non. Je suis seulement lĂ en dĂ©couverte. Ăcoutez, merci, madame. Et puis voilĂ , tu vois, pour moi, ça en Ă©tait restĂ© lĂ . Le lendemain, je retournais Ă Paris pour enregistrer mes Ă©missions de variĂ©tĂ©. J'avais une interview de prĂ©vue. Enfin, rien de particulier. Et donc, ce copain de collĂšge me passe un petit coup de fil, peut-ĂȘtre quoi, une dizaine de jours plus tard, et me dit, Ă©coute Mina, il faut que tu repasses Ă l'agence, Ă l'huile, tu reviens quand ? La famille qu'on a accompagnĂ©e est repassĂ©e. Ils t'ont amenĂ© un cadeau. J'ai un cadeau ? Je trouvais ça hallucinant. Il dit, bon d'ailleurs, je pense que c'est une boĂźte de chocolat. J'ai dit, ah ouais ? Et il me dit, ouais, ouais. Et ils m'ont dit, Ă©coutez, on a trouvĂ© ça super, le fait d'avoir une femme, de pouvoir Ă©changer avec elle. Elle Ă©tait trĂšs sympa, ça paraĂźt peut-ĂȘtre bizarre de dire le mot trĂšs sympa alors qu'on parle de l'une des railles. Et puis, le bouche-Ă -oreille s'est fait trĂšs rapidement. On est dans une petite ville et les personnes ont cru tout de suite que les Pompes FunĂšbres de la LibertĂ© avaient une dame qui faisait des cĂ©rĂ©monies. La Dame en Noir, c'est comme ça qu'on m'a appelĂ©e. C'Ă©tait trĂšs, trĂšs rigolo Ă l'Ă©poque. Et puis, ils m'ont recontactĂ©e peut-ĂȘtre un mois aprĂšs. en me disant Ă©coute on est en train de penser Ă quelque chose de complĂštement fou est-ce que tu aimerais bien rejoindre l'Ă©quipe des banques funĂšbres de la libertĂ© vous ĂȘtes complĂštement tarĂ© j'y connais rien moi votre milieu du funĂ©raire je dis moi mon job c'est de parler face Ă une camĂ©ra d'enregistrer des voix off pour des spots publicitaires pour la radio etc Non, non, mais Ă©coute, t'inquiĂšte pas. DĂ©jĂ , est-ce que l'aventure te tente ? Je dis oui, pourquoi pas ? Toujours, tu sais, curieuse et avide de nouvelles expĂ©riences. Je dis OK. Il dit, oui, mais par contre, il faut passer un diplĂŽme pour rentrer dans le milieu du funĂ©raire. Alors, je suis partie. Brave. J'avais un petit peu plus de 30 ans. Je suis partie en formation pour devenir conseillĂšre funĂ©raire et je suis arrivĂ©e dans un milieu fascinant, passionnant avec un maĂźtre de stage qui s'appelle Pierre ou s'appelait Pierre parce que je ne sais pas si Pierre est toujours de ce monde. Mais Ă l'Ă©poque, c'Ă©tait Pierre de FCA formation. Il est originaire de Marseille. Et il Ă©tait nĂ© le mĂȘme jour que moi. Alors, je ne sais pas si le fait d'ĂȘtre nĂ© le mĂȘme jour que toi... Ăa crĂ©e des liens. VoilĂ , ça crĂ©e des liens, comme tu dis. Et ça a bien matchĂ©. Et un autre regard, justement, j'ai pu porter au fil de cette formation. sur justement l'aspect du maĂźtre de cĂ©rĂ©monie. C'est-Ă -dire qu'on te met dans un cadre, on te fait une formation et Ă la fin du compte, moi, avec mes expĂ©riences passĂ©es, je me suis dit, mais on peut aller beaucoup plus loin que ça. Et beaucoup plus dans la personnalisation, en fait, de la cĂ©rĂ©monie et des obsĂšques. Et donc, de retour ici, je n'Ă©tais pas embauchĂ©e. Je leur ai dit, Ă©coutez, OK, vous voulez une maĂźtresse de cĂ©rĂ©monie. Moi, je veux bien tenter l'aventure. C'est une super nouvelle expĂ©rience pour moi. Ă une seule condition, c'est que c'est moi qui dĂ©cide de quand je travaille.
- Teddy Bredelet
Ok, c'est bien, c'est les choses qui se font.
- Minna Holleville
Voilà , donc en fait, chez Prestataire de Service, j'étais intermittente du spectacle, en fait. Donc en fait, je faisais mes factures, je disais, bon, bah ok, semaine prochaine, je peux venir sur Abbeville faire deux cérémonies ou bien trois, etc. Donc je jonglais, en fait, entre la télé et le milieu des pompes funÚbres, tout simplement. Et au fur et à mesure, de deux, j'en suis passée à trois, plus à cinq, puis maintenant à dix, voire douze cérémonies par semaine.
- Teddy Bredelet
T'as quelle vision du milieu du funéraire aujourd'hui ?
- Minna Holleville
Aujourd'hui, je pense qu'il faut Ă©normĂ©ment dĂ©poussiĂ©rer le milieu du funĂ©raire. Je suis ravie d'une chose, c'est qu'il y ait de plus en plus de femmes dans notre branche professionnelle. Je trouve que le regard d'une femme est essentiel pour l'Ă©volution des mentalitĂ©s, surtout dans le milieu du funĂ©raire. Il est vrai qu'une femme amĂšne une certaine sensibilitĂ© et un regard peut-ĂȘtre plus maternel. La compassion Ă©galement, la transparence. Alors je n'ai rien contre les hommes, loin de lĂ . Au contraire, on a besoin des hommes Ă©galement, puisqu'on se rend compte qu'au niveau du port de charge, c'est quand mĂȘme assez limitĂ© Ă©galement pour une femme. Quand j'ai dĂ©butĂ© au Pompfuneb de la LibertĂ©, c'Ă©tait une toute petite Ă©quipe, ils Ă©taient 7. Aujourd'hui on est 27, donc en 13 ans de temps. Donc l'Ă©volution, on le voit, c'est plutĂŽt bien bien passĂ© et surtout dans le bon sens, puisque de plus en plus de familles nous accordent leur confiance aujourd'hui, j'en suis trĂšs honorĂ©e. Et on a mis justement pas mal de choses en place. Aujourd'hui je suis ravie dans mon Ă©quipe, sur 27 salariĂ©s, d'avoir 12 femmes. Ce qui est plutĂŽt... pas mal au niveau de la paritĂ© et chacune et chacun de mes collaborateurs amĂšnent ce petit quelque chose qui fait que le maillon de la chaĂźne Ă la fin du compte il est solide et la plupart des familles sont ravies, satisfaites de nos prestations.
- Teddy Bredelet
C'est la premiĂšre fois que j'enregistre un podcast en vrai, habituellement c'est toujours Ă distance.
- Minna Holleville
C'est vrai ?
- Teddy Bredelet
Ouais je te promets et lĂ on est dans tes locaux, on est Ă l'agence Les gens ne voient pas, ne voient pas ce qui se passe, ne voient pas l'environnement, etc. Il y a un cĂŽtĂ© hyper chaleureux, hyper cosy, on n'a pas l'impression d'ĂȘtre dans une pompe funĂšbre, absolument pas. Ăa te vient d'oĂč cette envie de crĂ©er un environnement Ă part au sein mĂȘme de ton agence de pompe funĂšbre ? Parce que lĂ , on est dans une salle... ça pourrait ĂȘtre chez Habitat, ça pourrait ĂȘtre un truc hyper chaleureux.
- Minna Holleville
Alors on est dans la salle de convivialitĂ©, ici mĂȘme on reçoit les familles aprĂšs les obsĂšques pour partager ensemble ce traditionnel cafĂ© du souvenir. Et de toute façon cet endroit, je l'ai voulu complĂštement convivial, chaleureux. Je ne voulais pas, dans ma vision du funĂ©raire... qu'on ait ce souvenir, comme moi j'ai pu l'avoir du haut de mes 14 balais, de rentrer dans un endroit oĂč on se dit tout de suite avec l'apprĂ©hension, ça va sentir mauvais, ça va sentir la mort. Non, vraiment j'ai beaucoup travaillĂ© en collaboration avec mon Ă©poux pour que la plupart des personnes qui rentrent chez nous se sentent comme chez elles. VoilĂ , pour moi c'est essentiel. Sans qu'il y ait de... de signes de luxure. Je voulais avant tout que ça soit cosy, qu'on se sente ici comme Ă la maison. C'est idem pour le funĂ©rarium, c'est idem pour nos salles de cĂ©rĂ©monie. On a beaucoup rĂ©flĂ©chi ensemble sur l'accueil des familles et sur le vivre et souffrir ensemble.
- Teddy Bredelet
Aujourd'hui, c'est quoi ta vision du funĂ©raire, mais dans 15 ans ? Ăa doit aller vers quoi ? Ăa doit tendre vers quoi ? Vers ce que tu fais lĂ aujourd'hui, avec ce cĂŽtĂ© cosy, chaleureux, ou ça doit aller encore plus loin que ça ?
- Minna Holleville
Je n'ai pas la prĂ©tention de me dire que ma vision du funĂ©raire est celle du futur. Je pense qu'il faut avant tout Ă©changer avec ses collaborateurs et ses collaboratrices, parce qu'avant tout, c'est le bien-ĂȘtre au travail. qui fait qu'aujourd'hui, ton staff va donner le meilleur de soi-mĂȘme. Et si effectivement, ils ont des conditions de travail optimales, je pense qu'ils se donneront beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup pour ta sociĂ©tĂ©, pour ton bĂ©bĂ©. Donc dĂ©jĂ , pour moi, ça, c'est le premier point. Ensuite, il est vrai que par rapport au regard du funĂ©raire actuel en France, Il y a encore, pour moi, pas mal de boulot au niveau du cĂ©rĂ©monial, c'est clair. AprĂšs, on est aussi en France, il y a une culture, il y a la religion. Il faut respecter chaque choix de chacun. Mais il faut pouvoir aussi ĂȘtre neutre. C'est vrai que les gens me disent, mais d'oĂč viennent toutes ces idĂ©es au niveau de la dĂ©co, au niveau de votre accueil ? Je pense que la simplicitĂ©, Ă la fin du compte, avec quelques... Touche. parfois d'originalitĂ© mais surtout de personnalisation. Je pense que c'est ça en fait le match gagnant aujourd'hui. Dans cette sociĂ©tĂ© oĂč tu es considĂ©rĂ© comme un numĂ©ro, ici on t'accueille avec le sourire, mĂȘme si on t'a peut-ĂȘtre appris au moment de passer le diplĂŽme de conseillĂšre funĂ©raire qu'on ne devait pas dire bonjour. Enfin moi j'ai hallucinĂ©. Quand on m'a dit lors des premiers cours, alors surtout, surtout, ne dites pas bonjour, Bonjour, le terme bonjour Ă des familles qui rentrent dans votre agence de pompe funĂšbre, je dis mais vous ĂȘtes complĂštement...
- Teddy Bredelet
On dit quoi du coup ? On dit rien ?
- Minna Holleville
Non, on dit bonjour. Et tout se passe dans le regard, avec un petit sourire. AprĂšs voilĂ , les femmes ont peut-ĂȘtre plus cette facilitĂ© aussi Ă ĂȘtre tactiles que les hommes. C'est vrai qu'une femme va peut-ĂȘtre plus facilement poser sa main sur un poignet ou bien sur une Ă©paule qu'un homme. En plus avec tout ça... Ce qui se passe en ce moment, on sait trĂšs bien qu'il faut prendre le maximum de pincettes. Mais il ne faut pas tricher. Je pense qu'il ne faut pas tricher.
- Teddy Bredelet
Ăa serait le conseil que tu donnerais Ă des personnes qui nous Ă©coutent, qui sont en formation funĂ©raire ? Je sais que le podcast est vachement Ă©coutĂ© par des jeunes qui sont en formation de conseillers funĂ©raires, etc. Ăa serait le conseil que tu leur donnerais ?
- Minna Holleville
Oui, je pense qu'il ne faut pas tricher avec ces sentiments. En plus, je suppose que la plupart des personnes qui se dirigent... Dans le milieu des pompes funĂšbres, que ce soit une reconversion professionnelle ou bien tout simplement cette envie qui nous Ă©minime en notre nous intĂ©rieur. Parce qu'on a perdu un ĂȘtre cher et puis parce qu'on s'est projetĂ© et puis parce qu'on s'identifie certainement aussi Ă ce mĂ©tier quelque part. Donc non, il ne faut pas tricher. La souffrance, on la connaĂźt tous. On ne va pas se mentir. On a tous eu aussi un moment cette espĂ©rance de se dire. On peut dire que la personne, elle allait s'en sortir parce qu'il y a un traitement thĂ©rapeutique, parce qu'on nous a annoncĂ© une bonne nouvelle. Et puis d'un seul coup, c'est la dĂ©gringolade, c'est la descente aux enfers. Et puis, on a cette rĂ©alitĂ©, cette inĂ©luctable rĂ©alitĂ© qu'en fait, la mort, on va tous y passer.
- Teddy Bredelet
Oui, ça fait partie de la vie. Tu dirais quoi aux gens qui vivent un deuil, qui nous écoutent ? Tu aurais envie de leur dire un truc ?
- Minna Holleville
J'aimerais leur dire qu'il faut en parler. C'est pas parce que les morts ne font plus partie de nous, ne font plus partie de notre sociĂ©tĂ© actuelle, qu'on n'entend plus leur voix et qu'on ne les voit plus physiquement, qu'en fait, il ne faut pas hĂ©siter, il faut en parler. Il faut en parler. Il faut continuer justement Ă parler d'eux et Ă faire vivre ce souvenir. Et ne pas avoir honte de cacher sa souffrance. Parce que c'est ça le problĂšme aujourd'hui, c'est qu'Ă aucun moment tu vas oser dire, ne serait-ce Ă ton frĂšre, Ă ta soeur, Ă ton pĂšre, Ă ta mĂšre, ou mĂȘme ne serait-ce Ă ton collĂšgue de travail quand tu arrives le matin, mais mince, on a le droit de dire qu'aujourd'hui, ça ne va pas. Ăa ne va pas. Et c'est vrai que cette transparence, moi j'ai des collaborateurs, le matin, des fois quand j'arrive, j'ai passĂ© une sale nuit. ils le voient tout de suite et ils n'ont mĂȘme pas besoin de me poser la question. Je leur dis clairement, non, aujourd'hui, ce n'est pas mon jour, les gars. Ăa ne va pas. ArrĂȘtons de vouloir toujours ĂȘtre des super au top, machin, la banane, etc. Non, on a le droit aussi d'avoir des faiblesses dans cette sociĂ©tĂ©. Et lĂ , en plus, on en a Ă©tĂ© tĂ©moin durant ces derniers mois, aprĂšs le Covid. On a beaucoup, beaucoup pris sur nous. Tout le monde a pris... Beaucoup de dĂ©cĂšs, ça a Ă©tĂ© trĂšs compliquĂ© physiquement, moralement, psychologiquement. Non, Ă un moment, on a le droit de dire, Ă©coutez, les gars, lĂ , je sature, j'ai besoin de prendre l'air. HĂ©, on n'est pas des machines.
- Teddy Bredelet
Mais ça, tu le gĂšres comment Ă©motionnellement vis-Ă -vis d'une famille, dans des journĂ©es justement oĂč t'en as plein le dos ? Et il faut quand mĂȘme, en face des familles, ĂȘtre lĂ , gĂ©rer et essayer de masquer un peu ça pour pas que ça se voit, parce que c'est les familles d'abord.
- Minna Holleville
Alors sincĂšrement, par expĂ©rience, la plupart des familles comprennent. Je suis tout Ă fait consciente de ce que vous ĂȘtes en train de traverser. Si je fais ce mĂ©tier, ce n'est pas un hasard. Je suis dĂ©solĂ©e, aujourd'hui, c'est compliquĂ©. C'est compliquĂ© pour vous, pour moi aussi, c'est compliquĂ©. Je ne vais pas vous raconter ma vie, mais sachez que je vais tout mettre en Ćuvre. afin de vous aider et de vous accompagner dans cette Ă©preuve douloureuse. Tout simplement. Et je pense que la sincĂ©ritĂ©, surtout quand tu es dans cet Ă©tat de deuil, de faiblesse, de remise en question.
- Teddy Bredelet
Est-ce qu'il y avait un sujet que tu voulais aborder ?
- Minna Holleville
Oui, j'aimerais faire passer un message. Je suis assez prĂ©sente sur les rĂ©seaux sociaux. Je suis tĂ©moin de toutes ces publications dans les groupes, les Amis du funĂ©raire sur Facebook ou autres, les autres profils. Ce qui m'attriste le plus... C'est Ă chaque fois ce groupe d'entraide. Je ne le perçois pas comme une demande de conseil, mais comme une demande de solution. C'est-Ă -dire que la plupart des postes sont des personnes qui ne cherchent pas Ă personnaliser et Ă s'intĂ©resser Ă autrui. Je trouve qu'il y a beaucoup de personnes qui disent Ah ben voilĂ , je suis confrontĂ©e Ă une famille en deuil. DĂ©solĂ©e d'ĂȘtre aussi crue, mais ils ont perdu un bĂ©bĂ©. Qu'est-ce que je dois faire comme texte ? Ă un moment t'as envie de lui dire mais dĂ©merde-toi, parle aux gens ils ont besoin de ça ils ont besoin d'exprimer leur souffrance et toi c'est pas parce que tu fais le mĂ©tier de conseillĂšre funĂ©raire ou tu fais un ordinateur et tu vas faire ton devis rĂ©glementaire et tu vas leur vendre une prestation mais va plus loin que ça, pourquoi tu fais ce mĂ©tier au dĂ©part ? pourquoi ? Pour faire... du business, pour vendre un cercueil, pour faire du chiffre, ou vraiment parce que tu t'es dit du dĂ©part que tu allais aider ces gens-lĂ . Alors, arrĂȘte de poster sur les rĂ©seaux sociaux il me faudrait un texte pour ça, pour ça, pour ça IntĂ©resse-toi aux gens et Ă©cris. Ăcris ce que tu ressens. IntĂ©resse-toi Ă leur vie.
- Teddy Bredelet
J'aime bien demander à mes invités s'ils ont un livre, un docu, un film, enfin bref, quelque chose qu'ils aimeraient partager, en lien avec le funéraire ou pas d'ailleurs. Tu vois, ton livre de chevet.
- Minna Holleville
Mon livre de chevet ?
- Teddy Bredelet
Ton truc de chevet, qu'est-ce que c'est ?
- Minna Holleville
Mon livre de chevet actuellement, c'est l'histoire incroyable de Mathieu de Monchaux, qui est le maire de HĂ©din. J'ai fait la connaissance du maire Mathieu de Monchaux lors de l'acquisition des pompes funĂšbres caillerĂ©es que j'ai rachetĂ©es il y a un peu plus de six mois Ă HĂ©din, dans le Pas-de-Calais. Pompes funĂšbres qui partaient Ă la retraite. J'ai fait la connaissance du maire de la commune. Et le maire de la commune a une histoire incroyable. Il a failli passer de l'autre cĂŽtĂ© du miroir. Il a Ă©tĂ© victime de la grippe H1N1 et dans son livre DĂ©conne pas Mathieu Il fait part justement de son histoire, de son parcours, du coma, du ressenti de ses proches et de l'espoir. Et en fait, Mathieu, ils ont voulu le dĂ©brancher puisque c'Ă©tait terminĂ©. Il n'y avait plus aucun espoir. Et la veille, il s'est rĂ©veillĂ©. Et tu prends conscience, lors de la lecture de son livre, de l'impact des paroles. de la dĂ©monstration de l'amour d'une famille. Et Ă la fin du compte, il ne reste que ça. C'est mon livre de chevet actuellement. CĂŽtĂ© cinĂ©ma, c'est compliquĂ© ta question, parce que je suis une passionnĂ©e de cinĂ©ma. J'aime beaucoup Tim Burton. Je ne vais pas parler des noces funĂšbres, mĂȘme si c'est un classique et de l'Ă©trange NoĂ«l de Monsieur Jack. CĂŽtĂ© un petit peu enfantin, fantasmagorique. Big Fish ouais trop bien ce film j'adore Big Fish ouais voilĂ et puis bien sĂ»r Dirty Dancing qui est passĂ© qui est passĂ© lundi dernier sur TF bien sĂ»r parce qu'on ne laisse pas bĂ©bĂ© dans un coin t'es dit mais oui bien Ă©videmment mais
- Teddy Bredelet
on est d'accord on est d'accord voilĂ mais oui Mina, si je devais te laisser le mot de la fin, tu dirais quoi ?
- Minna Holleville
Ne laissons pas la fin arriver, prenons notre destin en main.
- Teddy Bredelet
Merci beaucoup Mina de ce temps passé ensemble. Bref, je t'aime d'amour.
- Minna Holleville
Merci Teddy, et bienvenue dans Ch'Nord.
- Teddy Bredelet
Bah ouais, c'est ça Biloute. Allez, prends soin de toi bientÎt, salut. Voilà , c'est fini pour aujourd'hui. J'espÚre que cet épisode vous a plu. Si c'est le cas, je vous invite à liker, commenter et partager ce podcast sur vos réseaux sociaux. Vous pouvez également noter Vivant sur 5 étoiles, sur Apple Podcasts. et Spotify, et éventuellement laisser un mot gentil, ça fait toujours plaisir. Je vous invite également à me rejoindre sur ma chaßne YouTube, vous cherchez Teddy Bredelet, T-E-D-E-Y, et Bredelet, B-R-E-D-E-L-E-T, et vous devriez me retrouver pour retrouver tous les épisodes de Vivant, et bien plus encore. Je vous donne rendez-vous dans trois semaines pour un nouvel épisode de Vivant. D'ici là , je vous souhaite le meilleur, et prenez soin de vous.