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30 ans de musiques actuelles à Strasbourg avec Valérie Bach

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18min |17/07/2024
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18min |17/07/2024
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Description

Valérie Bach est chargée de mission « musiques actuelles » à la ville et eurométropole de Strasbourg. Elle travaille pour la collectivité depuis 1990, et connaît donc fort bien l’histoire culturelle de la capitale de l’Alsace. Et, contrairement aux élu-es qui peuvent disparaître à chaque élection, elle est active sur la place depuis 34 ans sans discontinuer...

C’est en 1994 que naissent le Molodoï et la Laiterie. 30 ans plus tard, plongeons dans l’historique de ces deux lieux emblématiques et si différents de la culture régionale. Les débuts politiques du Molo sont plutôt originaux : des militants du futur Centre Autonome de la Jeunesse viennent voir l’adjoint à la culture, qui n’est pas là. Alors ils s’installent dans son bureau et séquestrent ses assistantes et posent un ultimatum : « On ne partira pas d’ici avant d’avoir l’engagement d’avoir un lieu pour tous et toutes ». On connaît la suite, une victoire associative pour le moins, sans subvention de fonctionnement, sous forme de bail emphytéotique de 20 ou 30 ans. Cette forme de location très particulière impose au locataire les charges du propriétaire, comme par exemple les travaux de réfection, d’entretien. Or l’asso Molodoï n’a pas les moyens d’entretenir le bâtiment lorsque de coûteux travaux sont nécessaires. Donc régulièrement, le bail est suspendu et la ville de Strasbourg redevient propriétaire « classique » le temps de réaliser les travaux indispensables à la bonne santé de cet « espace alternatif auto-géré ».

Mais il n’y a pas que la Laiterie et le Molodoï dans le petit monde des musiques actuelles de l’eurométropole de Strasbourg. D’ailleurs, n’y a-t-il trop de salles de spectacle dans l’agglomération ? Faut-il aller jusqu’en Allemagne pour en avoir toujours plus ? La capitale européenne qui finance les aéroports d’Entzheim et de Bâle pense-t-elle assez à la culture ? Le quartier Gare est-il l’avenir de Strasbourg ? Et autres questions plus ou moins culturelles….


Entretien réalisé par Jean-Luc pour Strasbourg Music Week le 22 mai 2024 à la Grenze, rue du rempart à Strasbourg.


Quelques liens pour aller plus loin :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Nous sommes le 22 mai 2024 à La Grenze, à Strasbourg, dans le cadre de Strasbourg Music Week, deuxième édition, en compagnie de Valérie Bach, chargée de mission musique actuelle à la ville de Strasbourg. Valérie, tu as vécu la naissance du rock'n'roll local, on va dire, la lettrerie, le mode d'œil. Si tu veux bien, on va faire un petit tour historique, se rappeler, se replonger dans les années 90. À l'époque, le rock, c'était un peu dangereux, mais Strasbourg était déjà une ville de gauche, avec Trottmann, maire. Peut-être revenir à la naissance du Moulodeuil qui fête ses 30 ans en 2024, et qui était parallèle à peu près à la naissance de la Lettrick. Comment ça s'est passé ? Le Molo d'Oeil par exemple, ils ont séquestré des fonctionnaires municipaux pour avoir droit à leur salle ? Tu peux nous raconter ça ?

  • Speaker #1

    Ça c'est canal historique, mais effectivement l'attribution de cette salle s'est faite un petit peu au forcing. Cette association, Molle d'Oil, qui voulait, avait des vues sur ce hall, est venue un jour dans le bureau de l'adjoint à la culture, qui n'était pas dans son bureau, et qui a plus ou moins séquestré les secrétaires de l'adjoint en disant Voilà, nous on part pas, on fait un siège jusqu'à ce qu'on nous attribue la salle. Je pense que dans la municipalité, de toute façon, il y avait une partie des adjoints qui étaient trop mollo d'œil et ça s'est fait dans le calme. Et c'est comme ça qu'ils ont eu la salle. Et ils l'ont eu à la condition qu'ils gèrent eux-mêmes le lieu avec leur budget et que ça devienne un bail amphithéotique d'une vingtaine, trentaine d'années qui leur conférait l'obligation de se comporter en fait... propriétaire et d'entretenir le bâtiment. Et au même moment, la litterie a été créée. C'était le Centre européen de la jeune création, géré par Jean Hurstel. De part et d'autre de la rue du Oval, il y avait un bâtiment qui devait servir de lieu de répétition pour toute la jeune création strasbourgeoise au niveau du spectacle vivant. Et du côté gauche, une salle de concert. Par la suite... il a été décidé que la salle de concert finalement serait détachée du centre européen de la jeune création et serait donnée en gestion à une association qui serait en capacité vraiment de produire, programmer des concerts dans la salle et donc il y a eu un appel à projet et c'est l'association qui s'appelait Rocofor qui faisait déjà des concerts sur Strasbourg dans différentes salles municipales dont notamment la Bourse, la Marseillaise, qui a décroché l'appel à projets, qui est encore en place aujourd'hui en fait, et qui s'appelle Artefact aujourd'hui, Artefact PRL, pour le rock local ou Poule Rock Local. Ça c'est l'origine des deux salles qui ont la même année et qui sont dirigées par les mêmes personnes depuis 30 ans.

  • Speaker #0

    Donc la laiterie a été inaugurée en octobre 1994. Alors ce qui est aussi assez rigolo, c'est que l'architecte de la laiterie, c'est Pierre Keiling, qui était membre de Catonoma. Catonoma qui a fait l'ouverture de la salle. Et aujourd'hui, avec l'ouverture de travaux l'été 2024 pour la laiterie, quel est l'architecte qui va ? retaper la laiterie à coup de millions ?

  • Speaker #1

    En fait, malgré un concours en bonne et due forme, c'est le projet déposé par Pierre Keiling, 30 ans plus tard, qui était peut-être à même de mieux se projeter sur cette salle qu'il avait créée à l'époque, qui a été retenue et qui va augmenter la jauge de la salle qui passera de 800 à 1164 places. En revanche, le club qui était dans la salle, il y avait la grande salle et le club, le club ira dans le hall des chars, dans l'autre partie du site, qui actuellement est occupé par le capteur et qui s'appelle maintenant l'Espace K. Et ils vont se partager le hall et il y aura une création de deux salles, le club et l'Espace K. Donc ça, c'est pour 2027.

  • Speaker #0

    Ce qui est aussi assez rigolo, puisqu'on a parlé d'un bail amphithéotique pour le mot de deuil. Le bail amphithéotique, ça veut dire en gros que le locataire a les charges du propriétaire. D'ailleurs, si le toit s'envole... C'est le locataire qui doit payer. Et donc, évidemment, le Molodeuil n'a pas les moyens de retaper la salle. Et donc, ce bail amphithéotique est suspendu régulièrement pour que la mairie redevienne propriétaire plein et entier pour pouvoir faire des travaux. C'est assez incroyable.

  • Speaker #1

    C'est incroyable, mais ça répond quand même au travail qui a été mené par Molodeuil depuis toutes ces années, qui s'est vraiment ouvert et qui apporte... apporter quelque chose pour le quartier. Donc, il s'ouvre aux associations du quartier, toujours sur le même principe de gratuité. L'attribution des salles se fait en Assemblée Générale et les occupants contribuent par un coup de main aux travaux d'entretien régulier de la salle et seulement une salle, au bout de 30 ans, ça s'use et... Au vu du travail social qu'ils mènent quand même sur le quartier, parce qu'ils accueillent aussi bien des associations à but humanitaire ou des sans-abri régulièrement pour leur distribuer des repas par le biais de l'association Abribus, qui s'ouvre aussi au centre socioculturel du fossé des 13 qui maintenant est installé, qui a une antenne sur le site de la laiterie. puisque ce site est devenu un quartier QPV, quartier prioritaire de la ville. Donc il y a des fonds politiques de la ville qui sont attribués pour des équipements qui ont un rôle social. Et de ce fait, ça a permis de faire des travaux pour sécuriser, parce qu'il faut quand même, même si cette structure était donnée en baille amphithéotique, on avait quand même une responsabilité par rapport au public qui est accueilli. pour une responsabilité, pour remettre aux normes ce bâtiment.

  • Speaker #0

    Les travaux de la laiterie démarrent l'été 2024. Pour 18 mois, avec ouverture de la salle en 2026, d'une nouvelle salle. Ça va ressembler à quoi, cette nouvelle salle ? Le nouveau quartier, rue du Brun-de-la-Roche, rue du Haut-Valgue ?

  • Speaker #1

    Alors, la grande salle va être agrandie et les gradins seront prolongés en hauteur. jusqu'à l'actuel espace du club, sur toute la longueur. L'entrée de la laiterie se fera rue du Mans de la Roche, à côté de l'entrée du Môle d'Oeil. De ce fait, on a décidé de créer un grand parvis qui va permettre d'accueillir et de sécuriser le public en file d'attente ou à la sortie des concerts, et dans l'idéal, devenir une zone piétonne en soirée. En perspective de l'ouverture du club en 2027, le parvis se prolongera jusqu'à l'entrée du club, qui sera également rue du Mont-de-la-Roche, de l'autre côté de la rue.

  • Speaker #0

    Le monodeuil et la lettrerie ont des fonctionnements radicalement différents, mais c'est loin d'être les seuls espaces dédiés à la culture urbaine, aux musiques actuelles aujourd'hui à Strasbourg. On peut faire un petit tour d'horizon de ce qui existe aujourd'hui à Strasbourg ?

  • Speaker #1

    Alors à Strasbourg, il y a beaucoup de cafés-concerts qui se sont créés. On peut en citer certains. La Péniche Mécanique, le Lab, le Blue Note Café et d'autres. Les noms m'échappent, mais il y en a quand même une petite dizaine, on va dire, qui peuvent accueillir des concerts. Autour de la ville, il y a aussi l'Eurométropole qui s'est dotée de... commune s'est dotée de belles salles bien avant, comme l'Iliade, le Point d'eau, le Préau, le Cheval Blanc, la Bricqueterie, des salles qui sont soutenues sur un budget euro-métropolitain pour que ces salles soient entretenues et considérant que de toute façon elles accueillent et le public strasbourgeois et que le public qui est accueillie dans les salles strass-branchoises, accueille du public eurométropolitain. Voilà. L'un dans l'autre, il y a un soutien des deux collectivités, de l'agglo et de la ville, pour toutes ces salles.

  • Speaker #0

    Mais n'y a-t-il pas trop de salles, trop d'équipements et pas forcément assez de public ou de budget pour les faire fonctionner ? Je me rappelle à ce Saïm dans le Haut-Rhin à la qualité de Mulhouse. On a créé, enfin la mairie a créé une salle de spectacle et après l'avoir faite, ils se sont demandé tiens qu'est ce qu'on pourrait faire avec quoi ? Est-ce que quand on a fait des ronds points partout, on fait peut-être une salle de spectacle ? Est-ce qu'il y en a pas trop ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense qu'il n'y en a jamais trop, parce qu'en fait, quand on regarde les jauges qui sont réalisés sur toutes les salles, il y a bien souvent des jauges complètes. Chaque salle est contente du public qui l'accueille. Alors, effectivement, dans certaines communes, peut-être la tentation aura été de créer une deuxième salle un peu trop ambitieuse. Mais du coup, à l'heure actuelle, ces salles sont louées. Ça permet à des associations de tous bords de produire à leur tour des spectacles. Par exemple, pendant les travaux de la laiterie, ils vont redéployer leur programmation. Une partie, certes, pas tout, parce qu'ils programmaient 120 soirées. par an et ils accueillaient 100 000 spectateurs, ils redéploieront une partie dans l'une ou l'autre de ces salles qui sont vraiment adaptées à des grandes jauges. Oswald, Schickheim, voilà, pourront accueillir des programmations de la laiterie pendant les travaux.

  • Speaker #0

    Alors Emmanuel Macron vient de passer à Strasbourg en ce mois de mai 2024 pour signer un fabuleux contrat triennal. de près de 300 millions d'euros pour trois ans, pour renforcer le rôle de Strasbourg, capitale européenne. Alors quand on regarde les budgets à l'intérieur, on s'aperçoit que c'est pour construire des routes, des autoroutes, le raccordement ferroviaire de l'Euro Airport à Bâle, est-ce que ça renforce vraiment le rôle européen de Strasbourg ? Aussi l'aéroport d'aide de Strasbourg-Einstein va être financé. Est-ce qu'il y a de la culture là-dedans, dans ce contrat triennal ? Est-ce qu'il y a une volonté culturelle ? Et c'est quoi ?

  • Speaker #1

    Je pense que le triennal est composé de budgets, mais qui existaient peut-être déjà, mais pas sous la forme d'un contrat triennal. Mais là, il est sanctuarisé et il y a un partenariat de l'État, de la région, de la collectivité européenne d'Alsace et de la ville et de l'euro-métropole sur la sanctuarisation des budgets pour créer de nouvelles infrastructures, ce qui permettra... Une meilleure accessibilité, ce qui est reproché quand même à Strasbourg par les parlementaires. Voilà, ça sera une ville peut-être plus accessible. On a commencé avec le TGB et Adrien Zeller avait déjà bien œuvré pour ça. Maintenant, ces infrastructures, oui, effectivement, il y aura un tram nord qui va desservir encore plus loin. Quand on regarde les grandes villes à l'heure actuelle, les transports en commun sont partout et c'est quand même un gain pour le public, l'attractivité. Alors le fonds culture, oui, la culture n'est pas du tout mise de côté. Elle dispose d'un budget important, donc sanctuarisé dans un fonds culture qui sera dédié à des projets. d'envergure européenne qui auront lieu à Strasbourg et qui feront rayonner la capitale et la mettre au niveau des autres grandes capitales ou même de l'autre capitale européenne.

  • Speaker #0

    Projet d'envergure européenne pour attirer des Strasbourgeois qui habitent à Kiel ? C'est quoi un projet d'envergure européenne ? Ça ressemble à quoi ? Il y a des exemples ?

  • Speaker #1

    En fait... Quand la ville se transforme, il y a quand même un nombre incroyable d'habitations qui sont créées depuis une dizaine d'années pour accueillir les habitants, pour éviter aussi l'étalement urbain vers les communes. Il y a peut-être un but de zéro artificiel. Les zones urbaines sont amenées à se développer. Strasbourg n'y échappe pas. En termes d'infrastructures, on accueille quand même des industries sur toute l'euro-métropole qui ont une envergure et qui favorisent le bassin d'emploi. Je pense que ça apporte quelque chose à la ville. Et cette prolongation qui, depuis toujours, est... Dans la cible, c'est de raccrocher Strasbourg à l'Allemagne, que la ville aille jusqu'aux portes de Kiel. Et le tram a été déjà financé par les fonds européens pour permettre cette circulation qui semble logique entre nos deux pays en termes d'attractivité. Alors aujourd'hui, on est à Strasbourg Music Week. Leur objectif, c'est de développer la mobilité des artistes sur le périmètre transfrontalier, sur l'euro-région Grand Est, qui en fait, si on regarde le périmètre de la région Grand Est, qui va jusque vers la Belgique, le Luxembourg, passant par l'Alsace, il y a l'Allemagne et la Suisse. Ça fait longtemps qu'on pourrait... profiter de cette situation et qu'on ne franchit pas les frontières, là, ce fonds culture peut être aussi l'occasion de débloquer les circulations de ces pays transfrontaliers pour faire une euro-région.

  • Speaker #0

    Encore plus d'habitants à Strasbourg, est-ce qu'on en a vraiment besoin ? Sinon peut-être pour terminer, nous y trouvons aujourd'hui à la Grenze, un lieu culturel plutôt sympathique et étonnant dans un environnement entre la gare et les voies ferrées. Les remparts, les arbres, est-ce qu'il y a d'autres lieux comme ça ? Est-ce que c'est des initiatives privées ou bien il y a une volonté politique de les accompagner, de les faire émerger aussi ?

  • Speaker #1

    En fait, là on est dans un quartier qui n'est pas très animé. Le soir, si on part d'ici, de la rue du Rempart jusqu'au quartier de la Lettrie, il y a un potentiel d'animation à faire puisque... Déjà l'arrivée du TGV, le projet de construction d'une gare à 360 degrés, où il y aura des parkings et des accès en 360 degrés, pas que depuis la place de la gare, mais bien aussi de ce côté avec une gare routière qui va être délocalisée à proximité et qui pourra potentiellement attirer. Des auberges de jeunesse, des lieux d'animation comme la Grenze, qui actuellement est hébergée dans les bâtiments de la SNCF, Poix-Ferré de France. Le parc du Glacis a aussi un rôle à jouer, pour qu'il y ait des circulations piétonnes, sécurisées, vertes. tous les publics pour ramener le quartier de Cronanbourg d'Haute-Pierre vers le centre. La Ceinture Verte, c'est un projet qui existe depuis longtemps, une des zones à réhabiliter justement pour qu'on puisse marcher d'ici jusqu'à l'Équai, jusqu'à l'Allemagne de nouveau. On a une belle ville, il y a un ring qui se crée pour les voies cyclables. En ce moment, le pont Matisse est en travaux parce qu'il réaménage. Je pense que c'est dans l'optique de faire une ville agréable à vivre.

  • Speaker #0

    Valérie Bach, chargée de mission musique actuelle à la ville de Strasbourg, on se donne rendez-vous en 2026 pour la reformation de Catonoma, pour l'inauguration de la nouvelle lettrerie. Bientôt et merci.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

Chapters

  • Molodoï, canal historique : la séquestration

    00:48

  • La Laiterie, alias Rock au Fort

    02:06

  • Pierre Keiling, architecte spécialisé en Laiterie depuis 30 ans

    03:21

  • Suspension de bail emphythéotique ???

    04:45

  • À quoi va ressembler la nouvelle Laiterie en 2026 ?

    06:57

  • Il n'y a pas que la Laiterie et le Molodoï dans la vie

    07:59

  • Trop de salles de spectacle dans l'Eurométropole ?

    09:28

  • Strasbourg capitale européenne, même pour la culture ?

    11:07

  • C'est quoi un projet d'envergure européenne ?

    13:17

  • Raccrocher Strasbourg à l'Allemagne

    14:20

  • Le futur du quartier Gare

    15:34

Description

Valérie Bach est chargée de mission « musiques actuelles » à la ville et eurométropole de Strasbourg. Elle travaille pour la collectivité depuis 1990, et connaît donc fort bien l’histoire culturelle de la capitale de l’Alsace. Et, contrairement aux élu-es qui peuvent disparaître à chaque élection, elle est active sur la place depuis 34 ans sans discontinuer...

C’est en 1994 que naissent le Molodoï et la Laiterie. 30 ans plus tard, plongeons dans l’historique de ces deux lieux emblématiques et si différents de la culture régionale. Les débuts politiques du Molo sont plutôt originaux : des militants du futur Centre Autonome de la Jeunesse viennent voir l’adjoint à la culture, qui n’est pas là. Alors ils s’installent dans son bureau et séquestrent ses assistantes et posent un ultimatum : « On ne partira pas d’ici avant d’avoir l’engagement d’avoir un lieu pour tous et toutes ». On connaît la suite, une victoire associative pour le moins, sans subvention de fonctionnement, sous forme de bail emphytéotique de 20 ou 30 ans. Cette forme de location très particulière impose au locataire les charges du propriétaire, comme par exemple les travaux de réfection, d’entretien. Or l’asso Molodoï n’a pas les moyens d’entretenir le bâtiment lorsque de coûteux travaux sont nécessaires. Donc régulièrement, le bail est suspendu et la ville de Strasbourg redevient propriétaire « classique » le temps de réaliser les travaux indispensables à la bonne santé de cet « espace alternatif auto-géré ».

Mais il n’y a pas que la Laiterie et le Molodoï dans le petit monde des musiques actuelles de l’eurométropole de Strasbourg. D’ailleurs, n’y a-t-il trop de salles de spectacle dans l’agglomération ? Faut-il aller jusqu’en Allemagne pour en avoir toujours plus ? La capitale européenne qui finance les aéroports d’Entzheim et de Bâle pense-t-elle assez à la culture ? Le quartier Gare est-il l’avenir de Strasbourg ? Et autres questions plus ou moins culturelles….


Entretien réalisé par Jean-Luc pour Strasbourg Music Week le 22 mai 2024 à la Grenze, rue du rempart à Strasbourg.


Quelques liens pour aller plus loin :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Nous sommes le 22 mai 2024 à La Grenze, à Strasbourg, dans le cadre de Strasbourg Music Week, deuxième édition, en compagnie de Valérie Bach, chargée de mission musique actuelle à la ville de Strasbourg. Valérie, tu as vécu la naissance du rock'n'roll local, on va dire, la lettrerie, le mode d'œil. Si tu veux bien, on va faire un petit tour historique, se rappeler, se replonger dans les années 90. À l'époque, le rock, c'était un peu dangereux, mais Strasbourg était déjà une ville de gauche, avec Trottmann, maire. Peut-être revenir à la naissance du Moulodeuil qui fête ses 30 ans en 2024, et qui était parallèle à peu près à la naissance de la Lettrick. Comment ça s'est passé ? Le Molo d'Oeil par exemple, ils ont séquestré des fonctionnaires municipaux pour avoir droit à leur salle ? Tu peux nous raconter ça ?

  • Speaker #1

    Ça c'est canal historique, mais effectivement l'attribution de cette salle s'est faite un petit peu au forcing. Cette association, Molle d'Oil, qui voulait, avait des vues sur ce hall, est venue un jour dans le bureau de l'adjoint à la culture, qui n'était pas dans son bureau, et qui a plus ou moins séquestré les secrétaires de l'adjoint en disant Voilà, nous on part pas, on fait un siège jusqu'à ce qu'on nous attribue la salle. Je pense que dans la municipalité, de toute façon, il y avait une partie des adjoints qui étaient trop mollo d'œil et ça s'est fait dans le calme. Et c'est comme ça qu'ils ont eu la salle. Et ils l'ont eu à la condition qu'ils gèrent eux-mêmes le lieu avec leur budget et que ça devienne un bail amphithéotique d'une vingtaine, trentaine d'années qui leur conférait l'obligation de se comporter en fait... propriétaire et d'entretenir le bâtiment. Et au même moment, la litterie a été créée. C'était le Centre européen de la jeune création, géré par Jean Hurstel. De part et d'autre de la rue du Oval, il y avait un bâtiment qui devait servir de lieu de répétition pour toute la jeune création strasbourgeoise au niveau du spectacle vivant. Et du côté gauche, une salle de concert. Par la suite... il a été décidé que la salle de concert finalement serait détachée du centre européen de la jeune création et serait donnée en gestion à une association qui serait en capacité vraiment de produire, programmer des concerts dans la salle et donc il y a eu un appel à projet et c'est l'association qui s'appelait Rocofor qui faisait déjà des concerts sur Strasbourg dans différentes salles municipales dont notamment la Bourse, la Marseillaise, qui a décroché l'appel à projets, qui est encore en place aujourd'hui en fait, et qui s'appelle Artefact aujourd'hui, Artefact PRL, pour le rock local ou Poule Rock Local. Ça c'est l'origine des deux salles qui ont la même année et qui sont dirigées par les mêmes personnes depuis 30 ans.

  • Speaker #0

    Donc la laiterie a été inaugurée en octobre 1994. Alors ce qui est aussi assez rigolo, c'est que l'architecte de la laiterie, c'est Pierre Keiling, qui était membre de Catonoma. Catonoma qui a fait l'ouverture de la salle. Et aujourd'hui, avec l'ouverture de travaux l'été 2024 pour la laiterie, quel est l'architecte qui va ? retaper la laiterie à coup de millions ?

  • Speaker #1

    En fait, malgré un concours en bonne et due forme, c'est le projet déposé par Pierre Keiling, 30 ans plus tard, qui était peut-être à même de mieux se projeter sur cette salle qu'il avait créée à l'époque, qui a été retenue et qui va augmenter la jauge de la salle qui passera de 800 à 1164 places. En revanche, le club qui était dans la salle, il y avait la grande salle et le club, le club ira dans le hall des chars, dans l'autre partie du site, qui actuellement est occupé par le capteur et qui s'appelle maintenant l'Espace K. Et ils vont se partager le hall et il y aura une création de deux salles, le club et l'Espace K. Donc ça, c'est pour 2027.

  • Speaker #0

    Ce qui est aussi assez rigolo, puisqu'on a parlé d'un bail amphithéotique pour le mot de deuil. Le bail amphithéotique, ça veut dire en gros que le locataire a les charges du propriétaire. D'ailleurs, si le toit s'envole... C'est le locataire qui doit payer. Et donc, évidemment, le Molodeuil n'a pas les moyens de retaper la salle. Et donc, ce bail amphithéotique est suspendu régulièrement pour que la mairie redevienne propriétaire plein et entier pour pouvoir faire des travaux. C'est assez incroyable.

  • Speaker #1

    C'est incroyable, mais ça répond quand même au travail qui a été mené par Molodeuil depuis toutes ces années, qui s'est vraiment ouvert et qui apporte... apporter quelque chose pour le quartier. Donc, il s'ouvre aux associations du quartier, toujours sur le même principe de gratuité. L'attribution des salles se fait en Assemblée Générale et les occupants contribuent par un coup de main aux travaux d'entretien régulier de la salle et seulement une salle, au bout de 30 ans, ça s'use et... Au vu du travail social qu'ils mènent quand même sur le quartier, parce qu'ils accueillent aussi bien des associations à but humanitaire ou des sans-abri régulièrement pour leur distribuer des repas par le biais de l'association Abribus, qui s'ouvre aussi au centre socioculturel du fossé des 13 qui maintenant est installé, qui a une antenne sur le site de la laiterie. puisque ce site est devenu un quartier QPV, quartier prioritaire de la ville. Donc il y a des fonds politiques de la ville qui sont attribués pour des équipements qui ont un rôle social. Et de ce fait, ça a permis de faire des travaux pour sécuriser, parce qu'il faut quand même, même si cette structure était donnée en baille amphithéotique, on avait quand même une responsabilité par rapport au public qui est accueilli. pour une responsabilité, pour remettre aux normes ce bâtiment.

  • Speaker #0

    Les travaux de la laiterie démarrent l'été 2024. Pour 18 mois, avec ouverture de la salle en 2026, d'une nouvelle salle. Ça va ressembler à quoi, cette nouvelle salle ? Le nouveau quartier, rue du Brun-de-la-Roche, rue du Haut-Valgue ?

  • Speaker #1

    Alors, la grande salle va être agrandie et les gradins seront prolongés en hauteur. jusqu'à l'actuel espace du club, sur toute la longueur. L'entrée de la laiterie se fera rue du Mans de la Roche, à côté de l'entrée du Môle d'Oeil. De ce fait, on a décidé de créer un grand parvis qui va permettre d'accueillir et de sécuriser le public en file d'attente ou à la sortie des concerts, et dans l'idéal, devenir une zone piétonne en soirée. En perspective de l'ouverture du club en 2027, le parvis se prolongera jusqu'à l'entrée du club, qui sera également rue du Mont-de-la-Roche, de l'autre côté de la rue.

  • Speaker #0

    Le monodeuil et la lettrerie ont des fonctionnements radicalement différents, mais c'est loin d'être les seuls espaces dédiés à la culture urbaine, aux musiques actuelles aujourd'hui à Strasbourg. On peut faire un petit tour d'horizon de ce qui existe aujourd'hui à Strasbourg ?

  • Speaker #1

    Alors à Strasbourg, il y a beaucoup de cafés-concerts qui se sont créés. On peut en citer certains. La Péniche Mécanique, le Lab, le Blue Note Café et d'autres. Les noms m'échappent, mais il y en a quand même une petite dizaine, on va dire, qui peuvent accueillir des concerts. Autour de la ville, il y a aussi l'Eurométropole qui s'est dotée de... commune s'est dotée de belles salles bien avant, comme l'Iliade, le Point d'eau, le Préau, le Cheval Blanc, la Bricqueterie, des salles qui sont soutenues sur un budget euro-métropolitain pour que ces salles soient entretenues et considérant que de toute façon elles accueillent et le public strasbourgeois et que le public qui est accueillie dans les salles strass-branchoises, accueille du public eurométropolitain. Voilà. L'un dans l'autre, il y a un soutien des deux collectivités, de l'agglo et de la ville, pour toutes ces salles.

  • Speaker #0

    Mais n'y a-t-il pas trop de salles, trop d'équipements et pas forcément assez de public ou de budget pour les faire fonctionner ? Je me rappelle à ce Saïm dans le Haut-Rhin à la qualité de Mulhouse. On a créé, enfin la mairie a créé une salle de spectacle et après l'avoir faite, ils se sont demandé tiens qu'est ce qu'on pourrait faire avec quoi ? Est-ce que quand on a fait des ronds points partout, on fait peut-être une salle de spectacle ? Est-ce qu'il y en a pas trop ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense qu'il n'y en a jamais trop, parce qu'en fait, quand on regarde les jauges qui sont réalisés sur toutes les salles, il y a bien souvent des jauges complètes. Chaque salle est contente du public qui l'accueille. Alors, effectivement, dans certaines communes, peut-être la tentation aura été de créer une deuxième salle un peu trop ambitieuse. Mais du coup, à l'heure actuelle, ces salles sont louées. Ça permet à des associations de tous bords de produire à leur tour des spectacles. Par exemple, pendant les travaux de la laiterie, ils vont redéployer leur programmation. Une partie, certes, pas tout, parce qu'ils programmaient 120 soirées. par an et ils accueillaient 100 000 spectateurs, ils redéploieront une partie dans l'une ou l'autre de ces salles qui sont vraiment adaptées à des grandes jauges. Oswald, Schickheim, voilà, pourront accueillir des programmations de la laiterie pendant les travaux.

  • Speaker #0

    Alors Emmanuel Macron vient de passer à Strasbourg en ce mois de mai 2024 pour signer un fabuleux contrat triennal. de près de 300 millions d'euros pour trois ans, pour renforcer le rôle de Strasbourg, capitale européenne. Alors quand on regarde les budgets à l'intérieur, on s'aperçoit que c'est pour construire des routes, des autoroutes, le raccordement ferroviaire de l'Euro Airport à Bâle, est-ce que ça renforce vraiment le rôle européen de Strasbourg ? Aussi l'aéroport d'aide de Strasbourg-Einstein va être financé. Est-ce qu'il y a de la culture là-dedans, dans ce contrat triennal ? Est-ce qu'il y a une volonté culturelle ? Et c'est quoi ?

  • Speaker #1

    Je pense que le triennal est composé de budgets, mais qui existaient peut-être déjà, mais pas sous la forme d'un contrat triennal. Mais là, il est sanctuarisé et il y a un partenariat de l'État, de la région, de la collectivité européenne d'Alsace et de la ville et de l'euro-métropole sur la sanctuarisation des budgets pour créer de nouvelles infrastructures, ce qui permettra... Une meilleure accessibilité, ce qui est reproché quand même à Strasbourg par les parlementaires. Voilà, ça sera une ville peut-être plus accessible. On a commencé avec le TGB et Adrien Zeller avait déjà bien œuvré pour ça. Maintenant, ces infrastructures, oui, effectivement, il y aura un tram nord qui va desservir encore plus loin. Quand on regarde les grandes villes à l'heure actuelle, les transports en commun sont partout et c'est quand même un gain pour le public, l'attractivité. Alors le fonds culture, oui, la culture n'est pas du tout mise de côté. Elle dispose d'un budget important, donc sanctuarisé dans un fonds culture qui sera dédié à des projets. d'envergure européenne qui auront lieu à Strasbourg et qui feront rayonner la capitale et la mettre au niveau des autres grandes capitales ou même de l'autre capitale européenne.

  • Speaker #0

    Projet d'envergure européenne pour attirer des Strasbourgeois qui habitent à Kiel ? C'est quoi un projet d'envergure européenne ? Ça ressemble à quoi ? Il y a des exemples ?

  • Speaker #1

    En fait... Quand la ville se transforme, il y a quand même un nombre incroyable d'habitations qui sont créées depuis une dizaine d'années pour accueillir les habitants, pour éviter aussi l'étalement urbain vers les communes. Il y a peut-être un but de zéro artificiel. Les zones urbaines sont amenées à se développer. Strasbourg n'y échappe pas. En termes d'infrastructures, on accueille quand même des industries sur toute l'euro-métropole qui ont une envergure et qui favorisent le bassin d'emploi. Je pense que ça apporte quelque chose à la ville. Et cette prolongation qui, depuis toujours, est... Dans la cible, c'est de raccrocher Strasbourg à l'Allemagne, que la ville aille jusqu'aux portes de Kiel. Et le tram a été déjà financé par les fonds européens pour permettre cette circulation qui semble logique entre nos deux pays en termes d'attractivité. Alors aujourd'hui, on est à Strasbourg Music Week. Leur objectif, c'est de développer la mobilité des artistes sur le périmètre transfrontalier, sur l'euro-région Grand Est, qui en fait, si on regarde le périmètre de la région Grand Est, qui va jusque vers la Belgique, le Luxembourg, passant par l'Alsace, il y a l'Allemagne et la Suisse. Ça fait longtemps qu'on pourrait... profiter de cette situation et qu'on ne franchit pas les frontières, là, ce fonds culture peut être aussi l'occasion de débloquer les circulations de ces pays transfrontaliers pour faire une euro-région.

  • Speaker #0

    Encore plus d'habitants à Strasbourg, est-ce qu'on en a vraiment besoin ? Sinon peut-être pour terminer, nous y trouvons aujourd'hui à la Grenze, un lieu culturel plutôt sympathique et étonnant dans un environnement entre la gare et les voies ferrées. Les remparts, les arbres, est-ce qu'il y a d'autres lieux comme ça ? Est-ce que c'est des initiatives privées ou bien il y a une volonté politique de les accompagner, de les faire émerger aussi ?

  • Speaker #1

    En fait, là on est dans un quartier qui n'est pas très animé. Le soir, si on part d'ici, de la rue du Rempart jusqu'au quartier de la Lettrie, il y a un potentiel d'animation à faire puisque... Déjà l'arrivée du TGV, le projet de construction d'une gare à 360 degrés, où il y aura des parkings et des accès en 360 degrés, pas que depuis la place de la gare, mais bien aussi de ce côté avec une gare routière qui va être délocalisée à proximité et qui pourra potentiellement attirer. Des auberges de jeunesse, des lieux d'animation comme la Grenze, qui actuellement est hébergée dans les bâtiments de la SNCF, Poix-Ferré de France. Le parc du Glacis a aussi un rôle à jouer, pour qu'il y ait des circulations piétonnes, sécurisées, vertes. tous les publics pour ramener le quartier de Cronanbourg d'Haute-Pierre vers le centre. La Ceinture Verte, c'est un projet qui existe depuis longtemps, une des zones à réhabiliter justement pour qu'on puisse marcher d'ici jusqu'à l'Équai, jusqu'à l'Allemagne de nouveau. On a une belle ville, il y a un ring qui se crée pour les voies cyclables. En ce moment, le pont Matisse est en travaux parce qu'il réaménage. Je pense que c'est dans l'optique de faire une ville agréable à vivre.

  • Speaker #0

    Valérie Bach, chargée de mission musique actuelle à la ville de Strasbourg, on se donne rendez-vous en 2026 pour la reformation de Catonoma, pour l'inauguration de la nouvelle lettrerie. Bientôt et merci.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

Chapters

  • Molodoï, canal historique : la séquestration

    00:48

  • La Laiterie, alias Rock au Fort

    02:06

  • Pierre Keiling, architecte spécialisé en Laiterie depuis 30 ans

    03:21

  • Suspension de bail emphythéotique ???

    04:45

  • À quoi va ressembler la nouvelle Laiterie en 2026 ?

    06:57

  • Il n'y a pas que la Laiterie et le Molodoï dans la vie

    07:59

  • Trop de salles de spectacle dans l'Eurométropole ?

    09:28

  • Strasbourg capitale européenne, même pour la culture ?

    11:07

  • C'est quoi un projet d'envergure européenne ?

    13:17

  • Raccrocher Strasbourg à l'Allemagne

    14:20

  • Le futur du quartier Gare

    15:34

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Description

Valérie Bach est chargée de mission « musiques actuelles » à la ville et eurométropole de Strasbourg. Elle travaille pour la collectivité depuis 1990, et connaît donc fort bien l’histoire culturelle de la capitale de l’Alsace. Et, contrairement aux élu-es qui peuvent disparaître à chaque élection, elle est active sur la place depuis 34 ans sans discontinuer...

C’est en 1994 que naissent le Molodoï et la Laiterie. 30 ans plus tard, plongeons dans l’historique de ces deux lieux emblématiques et si différents de la culture régionale. Les débuts politiques du Molo sont plutôt originaux : des militants du futur Centre Autonome de la Jeunesse viennent voir l’adjoint à la culture, qui n’est pas là. Alors ils s’installent dans son bureau et séquestrent ses assistantes et posent un ultimatum : « On ne partira pas d’ici avant d’avoir l’engagement d’avoir un lieu pour tous et toutes ». On connaît la suite, une victoire associative pour le moins, sans subvention de fonctionnement, sous forme de bail emphytéotique de 20 ou 30 ans. Cette forme de location très particulière impose au locataire les charges du propriétaire, comme par exemple les travaux de réfection, d’entretien. Or l’asso Molodoï n’a pas les moyens d’entretenir le bâtiment lorsque de coûteux travaux sont nécessaires. Donc régulièrement, le bail est suspendu et la ville de Strasbourg redevient propriétaire « classique » le temps de réaliser les travaux indispensables à la bonne santé de cet « espace alternatif auto-géré ».

Mais il n’y a pas que la Laiterie et le Molodoï dans le petit monde des musiques actuelles de l’eurométropole de Strasbourg. D’ailleurs, n’y a-t-il trop de salles de spectacle dans l’agglomération ? Faut-il aller jusqu’en Allemagne pour en avoir toujours plus ? La capitale européenne qui finance les aéroports d’Entzheim et de Bâle pense-t-elle assez à la culture ? Le quartier Gare est-il l’avenir de Strasbourg ? Et autres questions plus ou moins culturelles….


Entretien réalisé par Jean-Luc pour Strasbourg Music Week le 22 mai 2024 à la Grenze, rue du rempart à Strasbourg.


Quelques liens pour aller plus loin :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Nous sommes le 22 mai 2024 à La Grenze, à Strasbourg, dans le cadre de Strasbourg Music Week, deuxième édition, en compagnie de Valérie Bach, chargée de mission musique actuelle à la ville de Strasbourg. Valérie, tu as vécu la naissance du rock'n'roll local, on va dire, la lettrerie, le mode d'œil. Si tu veux bien, on va faire un petit tour historique, se rappeler, se replonger dans les années 90. À l'époque, le rock, c'était un peu dangereux, mais Strasbourg était déjà une ville de gauche, avec Trottmann, maire. Peut-être revenir à la naissance du Moulodeuil qui fête ses 30 ans en 2024, et qui était parallèle à peu près à la naissance de la Lettrick. Comment ça s'est passé ? Le Molo d'Oeil par exemple, ils ont séquestré des fonctionnaires municipaux pour avoir droit à leur salle ? Tu peux nous raconter ça ?

  • Speaker #1

    Ça c'est canal historique, mais effectivement l'attribution de cette salle s'est faite un petit peu au forcing. Cette association, Molle d'Oil, qui voulait, avait des vues sur ce hall, est venue un jour dans le bureau de l'adjoint à la culture, qui n'était pas dans son bureau, et qui a plus ou moins séquestré les secrétaires de l'adjoint en disant Voilà, nous on part pas, on fait un siège jusqu'à ce qu'on nous attribue la salle. Je pense que dans la municipalité, de toute façon, il y avait une partie des adjoints qui étaient trop mollo d'œil et ça s'est fait dans le calme. Et c'est comme ça qu'ils ont eu la salle. Et ils l'ont eu à la condition qu'ils gèrent eux-mêmes le lieu avec leur budget et que ça devienne un bail amphithéotique d'une vingtaine, trentaine d'années qui leur conférait l'obligation de se comporter en fait... propriétaire et d'entretenir le bâtiment. Et au même moment, la litterie a été créée. C'était le Centre européen de la jeune création, géré par Jean Hurstel. De part et d'autre de la rue du Oval, il y avait un bâtiment qui devait servir de lieu de répétition pour toute la jeune création strasbourgeoise au niveau du spectacle vivant. Et du côté gauche, une salle de concert. Par la suite... il a été décidé que la salle de concert finalement serait détachée du centre européen de la jeune création et serait donnée en gestion à une association qui serait en capacité vraiment de produire, programmer des concerts dans la salle et donc il y a eu un appel à projet et c'est l'association qui s'appelait Rocofor qui faisait déjà des concerts sur Strasbourg dans différentes salles municipales dont notamment la Bourse, la Marseillaise, qui a décroché l'appel à projets, qui est encore en place aujourd'hui en fait, et qui s'appelle Artefact aujourd'hui, Artefact PRL, pour le rock local ou Poule Rock Local. Ça c'est l'origine des deux salles qui ont la même année et qui sont dirigées par les mêmes personnes depuis 30 ans.

  • Speaker #0

    Donc la laiterie a été inaugurée en octobre 1994. Alors ce qui est aussi assez rigolo, c'est que l'architecte de la laiterie, c'est Pierre Keiling, qui était membre de Catonoma. Catonoma qui a fait l'ouverture de la salle. Et aujourd'hui, avec l'ouverture de travaux l'été 2024 pour la laiterie, quel est l'architecte qui va ? retaper la laiterie à coup de millions ?

  • Speaker #1

    En fait, malgré un concours en bonne et due forme, c'est le projet déposé par Pierre Keiling, 30 ans plus tard, qui était peut-être à même de mieux se projeter sur cette salle qu'il avait créée à l'époque, qui a été retenue et qui va augmenter la jauge de la salle qui passera de 800 à 1164 places. En revanche, le club qui était dans la salle, il y avait la grande salle et le club, le club ira dans le hall des chars, dans l'autre partie du site, qui actuellement est occupé par le capteur et qui s'appelle maintenant l'Espace K. Et ils vont se partager le hall et il y aura une création de deux salles, le club et l'Espace K. Donc ça, c'est pour 2027.

  • Speaker #0

    Ce qui est aussi assez rigolo, puisqu'on a parlé d'un bail amphithéotique pour le mot de deuil. Le bail amphithéotique, ça veut dire en gros que le locataire a les charges du propriétaire. D'ailleurs, si le toit s'envole... C'est le locataire qui doit payer. Et donc, évidemment, le Molodeuil n'a pas les moyens de retaper la salle. Et donc, ce bail amphithéotique est suspendu régulièrement pour que la mairie redevienne propriétaire plein et entier pour pouvoir faire des travaux. C'est assez incroyable.

  • Speaker #1

    C'est incroyable, mais ça répond quand même au travail qui a été mené par Molodeuil depuis toutes ces années, qui s'est vraiment ouvert et qui apporte... apporter quelque chose pour le quartier. Donc, il s'ouvre aux associations du quartier, toujours sur le même principe de gratuité. L'attribution des salles se fait en Assemblée Générale et les occupants contribuent par un coup de main aux travaux d'entretien régulier de la salle et seulement une salle, au bout de 30 ans, ça s'use et... Au vu du travail social qu'ils mènent quand même sur le quartier, parce qu'ils accueillent aussi bien des associations à but humanitaire ou des sans-abri régulièrement pour leur distribuer des repas par le biais de l'association Abribus, qui s'ouvre aussi au centre socioculturel du fossé des 13 qui maintenant est installé, qui a une antenne sur le site de la laiterie. puisque ce site est devenu un quartier QPV, quartier prioritaire de la ville. Donc il y a des fonds politiques de la ville qui sont attribués pour des équipements qui ont un rôle social. Et de ce fait, ça a permis de faire des travaux pour sécuriser, parce qu'il faut quand même, même si cette structure était donnée en baille amphithéotique, on avait quand même une responsabilité par rapport au public qui est accueilli. pour une responsabilité, pour remettre aux normes ce bâtiment.

  • Speaker #0

    Les travaux de la laiterie démarrent l'été 2024. Pour 18 mois, avec ouverture de la salle en 2026, d'une nouvelle salle. Ça va ressembler à quoi, cette nouvelle salle ? Le nouveau quartier, rue du Brun-de-la-Roche, rue du Haut-Valgue ?

  • Speaker #1

    Alors, la grande salle va être agrandie et les gradins seront prolongés en hauteur. jusqu'à l'actuel espace du club, sur toute la longueur. L'entrée de la laiterie se fera rue du Mans de la Roche, à côté de l'entrée du Môle d'Oeil. De ce fait, on a décidé de créer un grand parvis qui va permettre d'accueillir et de sécuriser le public en file d'attente ou à la sortie des concerts, et dans l'idéal, devenir une zone piétonne en soirée. En perspective de l'ouverture du club en 2027, le parvis se prolongera jusqu'à l'entrée du club, qui sera également rue du Mont-de-la-Roche, de l'autre côté de la rue.

  • Speaker #0

    Le monodeuil et la lettrerie ont des fonctionnements radicalement différents, mais c'est loin d'être les seuls espaces dédiés à la culture urbaine, aux musiques actuelles aujourd'hui à Strasbourg. On peut faire un petit tour d'horizon de ce qui existe aujourd'hui à Strasbourg ?

  • Speaker #1

    Alors à Strasbourg, il y a beaucoup de cafés-concerts qui se sont créés. On peut en citer certains. La Péniche Mécanique, le Lab, le Blue Note Café et d'autres. Les noms m'échappent, mais il y en a quand même une petite dizaine, on va dire, qui peuvent accueillir des concerts. Autour de la ville, il y a aussi l'Eurométropole qui s'est dotée de... commune s'est dotée de belles salles bien avant, comme l'Iliade, le Point d'eau, le Préau, le Cheval Blanc, la Bricqueterie, des salles qui sont soutenues sur un budget euro-métropolitain pour que ces salles soient entretenues et considérant que de toute façon elles accueillent et le public strasbourgeois et que le public qui est accueillie dans les salles strass-branchoises, accueille du public eurométropolitain. Voilà. L'un dans l'autre, il y a un soutien des deux collectivités, de l'agglo et de la ville, pour toutes ces salles.

  • Speaker #0

    Mais n'y a-t-il pas trop de salles, trop d'équipements et pas forcément assez de public ou de budget pour les faire fonctionner ? Je me rappelle à ce Saïm dans le Haut-Rhin à la qualité de Mulhouse. On a créé, enfin la mairie a créé une salle de spectacle et après l'avoir faite, ils se sont demandé tiens qu'est ce qu'on pourrait faire avec quoi ? Est-ce que quand on a fait des ronds points partout, on fait peut-être une salle de spectacle ? Est-ce qu'il y en a pas trop ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense qu'il n'y en a jamais trop, parce qu'en fait, quand on regarde les jauges qui sont réalisés sur toutes les salles, il y a bien souvent des jauges complètes. Chaque salle est contente du public qui l'accueille. Alors, effectivement, dans certaines communes, peut-être la tentation aura été de créer une deuxième salle un peu trop ambitieuse. Mais du coup, à l'heure actuelle, ces salles sont louées. Ça permet à des associations de tous bords de produire à leur tour des spectacles. Par exemple, pendant les travaux de la laiterie, ils vont redéployer leur programmation. Une partie, certes, pas tout, parce qu'ils programmaient 120 soirées. par an et ils accueillaient 100 000 spectateurs, ils redéploieront une partie dans l'une ou l'autre de ces salles qui sont vraiment adaptées à des grandes jauges. Oswald, Schickheim, voilà, pourront accueillir des programmations de la laiterie pendant les travaux.

  • Speaker #0

    Alors Emmanuel Macron vient de passer à Strasbourg en ce mois de mai 2024 pour signer un fabuleux contrat triennal. de près de 300 millions d'euros pour trois ans, pour renforcer le rôle de Strasbourg, capitale européenne. Alors quand on regarde les budgets à l'intérieur, on s'aperçoit que c'est pour construire des routes, des autoroutes, le raccordement ferroviaire de l'Euro Airport à Bâle, est-ce que ça renforce vraiment le rôle européen de Strasbourg ? Aussi l'aéroport d'aide de Strasbourg-Einstein va être financé. Est-ce qu'il y a de la culture là-dedans, dans ce contrat triennal ? Est-ce qu'il y a une volonté culturelle ? Et c'est quoi ?

  • Speaker #1

    Je pense que le triennal est composé de budgets, mais qui existaient peut-être déjà, mais pas sous la forme d'un contrat triennal. Mais là, il est sanctuarisé et il y a un partenariat de l'État, de la région, de la collectivité européenne d'Alsace et de la ville et de l'euro-métropole sur la sanctuarisation des budgets pour créer de nouvelles infrastructures, ce qui permettra... Une meilleure accessibilité, ce qui est reproché quand même à Strasbourg par les parlementaires. Voilà, ça sera une ville peut-être plus accessible. On a commencé avec le TGB et Adrien Zeller avait déjà bien œuvré pour ça. Maintenant, ces infrastructures, oui, effectivement, il y aura un tram nord qui va desservir encore plus loin. Quand on regarde les grandes villes à l'heure actuelle, les transports en commun sont partout et c'est quand même un gain pour le public, l'attractivité. Alors le fonds culture, oui, la culture n'est pas du tout mise de côté. Elle dispose d'un budget important, donc sanctuarisé dans un fonds culture qui sera dédié à des projets. d'envergure européenne qui auront lieu à Strasbourg et qui feront rayonner la capitale et la mettre au niveau des autres grandes capitales ou même de l'autre capitale européenne.

  • Speaker #0

    Projet d'envergure européenne pour attirer des Strasbourgeois qui habitent à Kiel ? C'est quoi un projet d'envergure européenne ? Ça ressemble à quoi ? Il y a des exemples ?

  • Speaker #1

    En fait... Quand la ville se transforme, il y a quand même un nombre incroyable d'habitations qui sont créées depuis une dizaine d'années pour accueillir les habitants, pour éviter aussi l'étalement urbain vers les communes. Il y a peut-être un but de zéro artificiel. Les zones urbaines sont amenées à se développer. Strasbourg n'y échappe pas. En termes d'infrastructures, on accueille quand même des industries sur toute l'euro-métropole qui ont une envergure et qui favorisent le bassin d'emploi. Je pense que ça apporte quelque chose à la ville. Et cette prolongation qui, depuis toujours, est... Dans la cible, c'est de raccrocher Strasbourg à l'Allemagne, que la ville aille jusqu'aux portes de Kiel. Et le tram a été déjà financé par les fonds européens pour permettre cette circulation qui semble logique entre nos deux pays en termes d'attractivité. Alors aujourd'hui, on est à Strasbourg Music Week. Leur objectif, c'est de développer la mobilité des artistes sur le périmètre transfrontalier, sur l'euro-région Grand Est, qui en fait, si on regarde le périmètre de la région Grand Est, qui va jusque vers la Belgique, le Luxembourg, passant par l'Alsace, il y a l'Allemagne et la Suisse. Ça fait longtemps qu'on pourrait... profiter de cette situation et qu'on ne franchit pas les frontières, là, ce fonds culture peut être aussi l'occasion de débloquer les circulations de ces pays transfrontaliers pour faire une euro-région.

  • Speaker #0

    Encore plus d'habitants à Strasbourg, est-ce qu'on en a vraiment besoin ? Sinon peut-être pour terminer, nous y trouvons aujourd'hui à la Grenze, un lieu culturel plutôt sympathique et étonnant dans un environnement entre la gare et les voies ferrées. Les remparts, les arbres, est-ce qu'il y a d'autres lieux comme ça ? Est-ce que c'est des initiatives privées ou bien il y a une volonté politique de les accompagner, de les faire émerger aussi ?

  • Speaker #1

    En fait, là on est dans un quartier qui n'est pas très animé. Le soir, si on part d'ici, de la rue du Rempart jusqu'au quartier de la Lettrie, il y a un potentiel d'animation à faire puisque... Déjà l'arrivée du TGV, le projet de construction d'une gare à 360 degrés, où il y aura des parkings et des accès en 360 degrés, pas que depuis la place de la gare, mais bien aussi de ce côté avec une gare routière qui va être délocalisée à proximité et qui pourra potentiellement attirer. Des auberges de jeunesse, des lieux d'animation comme la Grenze, qui actuellement est hébergée dans les bâtiments de la SNCF, Poix-Ferré de France. Le parc du Glacis a aussi un rôle à jouer, pour qu'il y ait des circulations piétonnes, sécurisées, vertes. tous les publics pour ramener le quartier de Cronanbourg d'Haute-Pierre vers le centre. La Ceinture Verte, c'est un projet qui existe depuis longtemps, une des zones à réhabiliter justement pour qu'on puisse marcher d'ici jusqu'à l'Équai, jusqu'à l'Allemagne de nouveau. On a une belle ville, il y a un ring qui se crée pour les voies cyclables. En ce moment, le pont Matisse est en travaux parce qu'il réaménage. Je pense que c'est dans l'optique de faire une ville agréable à vivre.

  • Speaker #0

    Valérie Bach, chargée de mission musique actuelle à la ville de Strasbourg, on se donne rendez-vous en 2026 pour la reformation de Catonoma, pour l'inauguration de la nouvelle lettrerie. Bientôt et merci.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

Chapters

  • Molodoï, canal historique : la séquestration

    00:48

  • La Laiterie, alias Rock au Fort

    02:06

  • Pierre Keiling, architecte spécialisé en Laiterie depuis 30 ans

    03:21

  • Suspension de bail emphythéotique ???

    04:45

  • À quoi va ressembler la nouvelle Laiterie en 2026 ?

    06:57

  • Il n'y a pas que la Laiterie et le Molodoï dans la vie

    07:59

  • Trop de salles de spectacle dans l'Eurométropole ?

    09:28

  • Strasbourg capitale européenne, même pour la culture ?

    11:07

  • C'est quoi un projet d'envergure européenne ?

    13:17

  • Raccrocher Strasbourg à l'Allemagne

    14:20

  • Le futur du quartier Gare

    15:34

Description

Valérie Bach est chargée de mission « musiques actuelles » à la ville et eurométropole de Strasbourg. Elle travaille pour la collectivité depuis 1990, et connaît donc fort bien l’histoire culturelle de la capitale de l’Alsace. Et, contrairement aux élu-es qui peuvent disparaître à chaque élection, elle est active sur la place depuis 34 ans sans discontinuer...

C’est en 1994 que naissent le Molodoï et la Laiterie. 30 ans plus tard, plongeons dans l’historique de ces deux lieux emblématiques et si différents de la culture régionale. Les débuts politiques du Molo sont plutôt originaux : des militants du futur Centre Autonome de la Jeunesse viennent voir l’adjoint à la culture, qui n’est pas là. Alors ils s’installent dans son bureau et séquestrent ses assistantes et posent un ultimatum : « On ne partira pas d’ici avant d’avoir l’engagement d’avoir un lieu pour tous et toutes ». On connaît la suite, une victoire associative pour le moins, sans subvention de fonctionnement, sous forme de bail emphytéotique de 20 ou 30 ans. Cette forme de location très particulière impose au locataire les charges du propriétaire, comme par exemple les travaux de réfection, d’entretien. Or l’asso Molodoï n’a pas les moyens d’entretenir le bâtiment lorsque de coûteux travaux sont nécessaires. Donc régulièrement, le bail est suspendu et la ville de Strasbourg redevient propriétaire « classique » le temps de réaliser les travaux indispensables à la bonne santé de cet « espace alternatif auto-géré ».

Mais il n’y a pas que la Laiterie et le Molodoï dans le petit monde des musiques actuelles de l’eurométropole de Strasbourg. D’ailleurs, n’y a-t-il trop de salles de spectacle dans l’agglomération ? Faut-il aller jusqu’en Allemagne pour en avoir toujours plus ? La capitale européenne qui finance les aéroports d’Entzheim et de Bâle pense-t-elle assez à la culture ? Le quartier Gare est-il l’avenir de Strasbourg ? Et autres questions plus ou moins culturelles….


Entretien réalisé par Jean-Luc pour Strasbourg Music Week le 22 mai 2024 à la Grenze, rue du rempart à Strasbourg.


Quelques liens pour aller plus loin :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Nous sommes le 22 mai 2024 à La Grenze, à Strasbourg, dans le cadre de Strasbourg Music Week, deuxième édition, en compagnie de Valérie Bach, chargée de mission musique actuelle à la ville de Strasbourg. Valérie, tu as vécu la naissance du rock'n'roll local, on va dire, la lettrerie, le mode d'œil. Si tu veux bien, on va faire un petit tour historique, se rappeler, se replonger dans les années 90. À l'époque, le rock, c'était un peu dangereux, mais Strasbourg était déjà une ville de gauche, avec Trottmann, maire. Peut-être revenir à la naissance du Moulodeuil qui fête ses 30 ans en 2024, et qui était parallèle à peu près à la naissance de la Lettrick. Comment ça s'est passé ? Le Molo d'Oeil par exemple, ils ont séquestré des fonctionnaires municipaux pour avoir droit à leur salle ? Tu peux nous raconter ça ?

  • Speaker #1

    Ça c'est canal historique, mais effectivement l'attribution de cette salle s'est faite un petit peu au forcing. Cette association, Molle d'Oil, qui voulait, avait des vues sur ce hall, est venue un jour dans le bureau de l'adjoint à la culture, qui n'était pas dans son bureau, et qui a plus ou moins séquestré les secrétaires de l'adjoint en disant Voilà, nous on part pas, on fait un siège jusqu'à ce qu'on nous attribue la salle. Je pense que dans la municipalité, de toute façon, il y avait une partie des adjoints qui étaient trop mollo d'œil et ça s'est fait dans le calme. Et c'est comme ça qu'ils ont eu la salle. Et ils l'ont eu à la condition qu'ils gèrent eux-mêmes le lieu avec leur budget et que ça devienne un bail amphithéotique d'une vingtaine, trentaine d'années qui leur conférait l'obligation de se comporter en fait... propriétaire et d'entretenir le bâtiment. Et au même moment, la litterie a été créée. C'était le Centre européen de la jeune création, géré par Jean Hurstel. De part et d'autre de la rue du Oval, il y avait un bâtiment qui devait servir de lieu de répétition pour toute la jeune création strasbourgeoise au niveau du spectacle vivant. Et du côté gauche, une salle de concert. Par la suite... il a été décidé que la salle de concert finalement serait détachée du centre européen de la jeune création et serait donnée en gestion à une association qui serait en capacité vraiment de produire, programmer des concerts dans la salle et donc il y a eu un appel à projet et c'est l'association qui s'appelait Rocofor qui faisait déjà des concerts sur Strasbourg dans différentes salles municipales dont notamment la Bourse, la Marseillaise, qui a décroché l'appel à projets, qui est encore en place aujourd'hui en fait, et qui s'appelle Artefact aujourd'hui, Artefact PRL, pour le rock local ou Poule Rock Local. Ça c'est l'origine des deux salles qui ont la même année et qui sont dirigées par les mêmes personnes depuis 30 ans.

  • Speaker #0

    Donc la laiterie a été inaugurée en octobre 1994. Alors ce qui est aussi assez rigolo, c'est que l'architecte de la laiterie, c'est Pierre Keiling, qui était membre de Catonoma. Catonoma qui a fait l'ouverture de la salle. Et aujourd'hui, avec l'ouverture de travaux l'été 2024 pour la laiterie, quel est l'architecte qui va ? retaper la laiterie à coup de millions ?

  • Speaker #1

    En fait, malgré un concours en bonne et due forme, c'est le projet déposé par Pierre Keiling, 30 ans plus tard, qui était peut-être à même de mieux se projeter sur cette salle qu'il avait créée à l'époque, qui a été retenue et qui va augmenter la jauge de la salle qui passera de 800 à 1164 places. En revanche, le club qui était dans la salle, il y avait la grande salle et le club, le club ira dans le hall des chars, dans l'autre partie du site, qui actuellement est occupé par le capteur et qui s'appelle maintenant l'Espace K. Et ils vont se partager le hall et il y aura une création de deux salles, le club et l'Espace K. Donc ça, c'est pour 2027.

  • Speaker #0

    Ce qui est aussi assez rigolo, puisqu'on a parlé d'un bail amphithéotique pour le mot de deuil. Le bail amphithéotique, ça veut dire en gros que le locataire a les charges du propriétaire. D'ailleurs, si le toit s'envole... C'est le locataire qui doit payer. Et donc, évidemment, le Molodeuil n'a pas les moyens de retaper la salle. Et donc, ce bail amphithéotique est suspendu régulièrement pour que la mairie redevienne propriétaire plein et entier pour pouvoir faire des travaux. C'est assez incroyable.

  • Speaker #1

    C'est incroyable, mais ça répond quand même au travail qui a été mené par Molodeuil depuis toutes ces années, qui s'est vraiment ouvert et qui apporte... apporter quelque chose pour le quartier. Donc, il s'ouvre aux associations du quartier, toujours sur le même principe de gratuité. L'attribution des salles se fait en Assemblée Générale et les occupants contribuent par un coup de main aux travaux d'entretien régulier de la salle et seulement une salle, au bout de 30 ans, ça s'use et... Au vu du travail social qu'ils mènent quand même sur le quartier, parce qu'ils accueillent aussi bien des associations à but humanitaire ou des sans-abri régulièrement pour leur distribuer des repas par le biais de l'association Abribus, qui s'ouvre aussi au centre socioculturel du fossé des 13 qui maintenant est installé, qui a une antenne sur le site de la laiterie. puisque ce site est devenu un quartier QPV, quartier prioritaire de la ville. Donc il y a des fonds politiques de la ville qui sont attribués pour des équipements qui ont un rôle social. Et de ce fait, ça a permis de faire des travaux pour sécuriser, parce qu'il faut quand même, même si cette structure était donnée en baille amphithéotique, on avait quand même une responsabilité par rapport au public qui est accueilli. pour une responsabilité, pour remettre aux normes ce bâtiment.

  • Speaker #0

    Les travaux de la laiterie démarrent l'été 2024. Pour 18 mois, avec ouverture de la salle en 2026, d'une nouvelle salle. Ça va ressembler à quoi, cette nouvelle salle ? Le nouveau quartier, rue du Brun-de-la-Roche, rue du Haut-Valgue ?

  • Speaker #1

    Alors, la grande salle va être agrandie et les gradins seront prolongés en hauteur. jusqu'à l'actuel espace du club, sur toute la longueur. L'entrée de la laiterie se fera rue du Mans de la Roche, à côté de l'entrée du Môle d'Oeil. De ce fait, on a décidé de créer un grand parvis qui va permettre d'accueillir et de sécuriser le public en file d'attente ou à la sortie des concerts, et dans l'idéal, devenir une zone piétonne en soirée. En perspective de l'ouverture du club en 2027, le parvis se prolongera jusqu'à l'entrée du club, qui sera également rue du Mont-de-la-Roche, de l'autre côté de la rue.

  • Speaker #0

    Le monodeuil et la lettrerie ont des fonctionnements radicalement différents, mais c'est loin d'être les seuls espaces dédiés à la culture urbaine, aux musiques actuelles aujourd'hui à Strasbourg. On peut faire un petit tour d'horizon de ce qui existe aujourd'hui à Strasbourg ?

  • Speaker #1

    Alors à Strasbourg, il y a beaucoup de cafés-concerts qui se sont créés. On peut en citer certains. La Péniche Mécanique, le Lab, le Blue Note Café et d'autres. Les noms m'échappent, mais il y en a quand même une petite dizaine, on va dire, qui peuvent accueillir des concerts. Autour de la ville, il y a aussi l'Eurométropole qui s'est dotée de... commune s'est dotée de belles salles bien avant, comme l'Iliade, le Point d'eau, le Préau, le Cheval Blanc, la Bricqueterie, des salles qui sont soutenues sur un budget euro-métropolitain pour que ces salles soient entretenues et considérant que de toute façon elles accueillent et le public strasbourgeois et que le public qui est accueillie dans les salles strass-branchoises, accueille du public eurométropolitain. Voilà. L'un dans l'autre, il y a un soutien des deux collectivités, de l'agglo et de la ville, pour toutes ces salles.

  • Speaker #0

    Mais n'y a-t-il pas trop de salles, trop d'équipements et pas forcément assez de public ou de budget pour les faire fonctionner ? Je me rappelle à ce Saïm dans le Haut-Rhin à la qualité de Mulhouse. On a créé, enfin la mairie a créé une salle de spectacle et après l'avoir faite, ils se sont demandé tiens qu'est ce qu'on pourrait faire avec quoi ? Est-ce que quand on a fait des ronds points partout, on fait peut-être une salle de spectacle ? Est-ce qu'il y en a pas trop ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense qu'il n'y en a jamais trop, parce qu'en fait, quand on regarde les jauges qui sont réalisés sur toutes les salles, il y a bien souvent des jauges complètes. Chaque salle est contente du public qui l'accueille. Alors, effectivement, dans certaines communes, peut-être la tentation aura été de créer une deuxième salle un peu trop ambitieuse. Mais du coup, à l'heure actuelle, ces salles sont louées. Ça permet à des associations de tous bords de produire à leur tour des spectacles. Par exemple, pendant les travaux de la laiterie, ils vont redéployer leur programmation. Une partie, certes, pas tout, parce qu'ils programmaient 120 soirées. par an et ils accueillaient 100 000 spectateurs, ils redéploieront une partie dans l'une ou l'autre de ces salles qui sont vraiment adaptées à des grandes jauges. Oswald, Schickheim, voilà, pourront accueillir des programmations de la laiterie pendant les travaux.

  • Speaker #0

    Alors Emmanuel Macron vient de passer à Strasbourg en ce mois de mai 2024 pour signer un fabuleux contrat triennal. de près de 300 millions d'euros pour trois ans, pour renforcer le rôle de Strasbourg, capitale européenne. Alors quand on regarde les budgets à l'intérieur, on s'aperçoit que c'est pour construire des routes, des autoroutes, le raccordement ferroviaire de l'Euro Airport à Bâle, est-ce que ça renforce vraiment le rôle européen de Strasbourg ? Aussi l'aéroport d'aide de Strasbourg-Einstein va être financé. Est-ce qu'il y a de la culture là-dedans, dans ce contrat triennal ? Est-ce qu'il y a une volonté culturelle ? Et c'est quoi ?

  • Speaker #1

    Je pense que le triennal est composé de budgets, mais qui existaient peut-être déjà, mais pas sous la forme d'un contrat triennal. Mais là, il est sanctuarisé et il y a un partenariat de l'État, de la région, de la collectivité européenne d'Alsace et de la ville et de l'euro-métropole sur la sanctuarisation des budgets pour créer de nouvelles infrastructures, ce qui permettra... Une meilleure accessibilité, ce qui est reproché quand même à Strasbourg par les parlementaires. Voilà, ça sera une ville peut-être plus accessible. On a commencé avec le TGB et Adrien Zeller avait déjà bien œuvré pour ça. Maintenant, ces infrastructures, oui, effectivement, il y aura un tram nord qui va desservir encore plus loin. Quand on regarde les grandes villes à l'heure actuelle, les transports en commun sont partout et c'est quand même un gain pour le public, l'attractivité. Alors le fonds culture, oui, la culture n'est pas du tout mise de côté. Elle dispose d'un budget important, donc sanctuarisé dans un fonds culture qui sera dédié à des projets. d'envergure européenne qui auront lieu à Strasbourg et qui feront rayonner la capitale et la mettre au niveau des autres grandes capitales ou même de l'autre capitale européenne.

  • Speaker #0

    Projet d'envergure européenne pour attirer des Strasbourgeois qui habitent à Kiel ? C'est quoi un projet d'envergure européenne ? Ça ressemble à quoi ? Il y a des exemples ?

  • Speaker #1

    En fait... Quand la ville se transforme, il y a quand même un nombre incroyable d'habitations qui sont créées depuis une dizaine d'années pour accueillir les habitants, pour éviter aussi l'étalement urbain vers les communes. Il y a peut-être un but de zéro artificiel. Les zones urbaines sont amenées à se développer. Strasbourg n'y échappe pas. En termes d'infrastructures, on accueille quand même des industries sur toute l'euro-métropole qui ont une envergure et qui favorisent le bassin d'emploi. Je pense que ça apporte quelque chose à la ville. Et cette prolongation qui, depuis toujours, est... Dans la cible, c'est de raccrocher Strasbourg à l'Allemagne, que la ville aille jusqu'aux portes de Kiel. Et le tram a été déjà financé par les fonds européens pour permettre cette circulation qui semble logique entre nos deux pays en termes d'attractivité. Alors aujourd'hui, on est à Strasbourg Music Week. Leur objectif, c'est de développer la mobilité des artistes sur le périmètre transfrontalier, sur l'euro-région Grand Est, qui en fait, si on regarde le périmètre de la région Grand Est, qui va jusque vers la Belgique, le Luxembourg, passant par l'Alsace, il y a l'Allemagne et la Suisse. Ça fait longtemps qu'on pourrait... profiter de cette situation et qu'on ne franchit pas les frontières, là, ce fonds culture peut être aussi l'occasion de débloquer les circulations de ces pays transfrontaliers pour faire une euro-région.

  • Speaker #0

    Encore plus d'habitants à Strasbourg, est-ce qu'on en a vraiment besoin ? Sinon peut-être pour terminer, nous y trouvons aujourd'hui à la Grenze, un lieu culturel plutôt sympathique et étonnant dans un environnement entre la gare et les voies ferrées. Les remparts, les arbres, est-ce qu'il y a d'autres lieux comme ça ? Est-ce que c'est des initiatives privées ou bien il y a une volonté politique de les accompagner, de les faire émerger aussi ?

  • Speaker #1

    En fait, là on est dans un quartier qui n'est pas très animé. Le soir, si on part d'ici, de la rue du Rempart jusqu'au quartier de la Lettrie, il y a un potentiel d'animation à faire puisque... Déjà l'arrivée du TGV, le projet de construction d'une gare à 360 degrés, où il y aura des parkings et des accès en 360 degrés, pas que depuis la place de la gare, mais bien aussi de ce côté avec une gare routière qui va être délocalisée à proximité et qui pourra potentiellement attirer. Des auberges de jeunesse, des lieux d'animation comme la Grenze, qui actuellement est hébergée dans les bâtiments de la SNCF, Poix-Ferré de France. Le parc du Glacis a aussi un rôle à jouer, pour qu'il y ait des circulations piétonnes, sécurisées, vertes. tous les publics pour ramener le quartier de Cronanbourg d'Haute-Pierre vers le centre. La Ceinture Verte, c'est un projet qui existe depuis longtemps, une des zones à réhabiliter justement pour qu'on puisse marcher d'ici jusqu'à l'Équai, jusqu'à l'Allemagne de nouveau. On a une belle ville, il y a un ring qui se crée pour les voies cyclables. En ce moment, le pont Matisse est en travaux parce qu'il réaménage. Je pense que c'est dans l'optique de faire une ville agréable à vivre.

  • Speaker #0

    Valérie Bach, chargée de mission musique actuelle à la ville de Strasbourg, on se donne rendez-vous en 2026 pour la reformation de Catonoma, pour l'inauguration de la nouvelle lettrerie. Bientôt et merci.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

Chapters

  • Molodoï, canal historique : la séquestration

    00:48

  • La Laiterie, alias Rock au Fort

    02:06

  • Pierre Keiling, architecte spécialisé en Laiterie depuis 30 ans

    03:21

  • Suspension de bail emphythéotique ???

    04:45

  • À quoi va ressembler la nouvelle Laiterie en 2026 ?

    06:57

  • Il n'y a pas que la Laiterie et le Molodoï dans la vie

    07:59

  • Trop de salles de spectacle dans l'Eurométropole ?

    09:28

  • Strasbourg capitale européenne, même pour la culture ?

    11:07

  • C'est quoi un projet d'envergure européenne ?

    13:17

  • Raccrocher Strasbourg à l'Allemagne

    14:20

  • Le futur du quartier Gare

    15:34

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