- Speaker #0
La part de risque, elle est toujours proportionnelle au succès. C'est-à-dire, plus on prend de risques, plus on a de la chance d'avoir un grand succès. Parce qu'en fait, se mettre en danger, c'est d'abord exister. Et moi, je répète toujours à mes équipes, c'est qu'on n'a pas l'obligation de réussir, mais on a l'obligation d'essayer.
- Speaker #1
Je crois qu'il existe, pour tous les vignerons français, des opportunités de croissance encore insoupçonnées. Accompagner les vignerons ambitieux pour relever les défis de demain et leur permettre d'augmenter leur chiffre d'affaires, C'est la mission que nous nous sommes fixées à l'agence Georges. Dans ce podcast, nous décryptons les méthodes marketing, de communication et de vente d'aujourd'hui qui vous rapprocheront de vos consommateurs cibles et assureront votre succès. Je suis Juliette Bory, fondatrice de l'agence Georges, et voici notre podcast. Bonjour Gérard, je suis très heureuse de vous accueillir pour le podcast de l'agence Georges. Aujourd'hui nous allons parler de votre incroyable parcours. Cela fait 37 ans que vous faites ce métier de vigneron, puisqu'en 87, après la disparition de votre papa, vous reprenez le domaine familial d'environ 60 hectares au château Ville-Majoux, en AOP Corbière. A 22 ans, vous jonglez donc entre les vignes de Ville-Majoux et votre carrière de rugbyman professionnel. Depuis, vous avez parcouru un chemin incroyable et créé une marque mondialement reconnue et disponible dans 180 pays. Vous exploitez plus de 1000 hectares de vignes en biodynamie. Vous réalisez un chiffre d'affaires de 200 millions d'euros en 2023 et vous êtes consacré meilleur vigneron du monde. Alors, est-ce que vous pouvez nous expliquer quel a été votre parcours et comment est-ce que vous avez fait pour en arriver là ?
- Speaker #0
Merci d'abord, Juliette, de m'accueillir dans votre podcast. Disons que si je devais vous faire une réponse complète, on en aurait pour toute la journée. Mais en essayant d'être synthétique, le plus important d'abord, ça a démarré par une formation, puisque j'ai fait mes premiers vendages à l'âge de 10 ans, en 1975. Et mon père, à la fin des vendanges, m'a dit, tu sais Gérard, tu as de la chance, parce que... Quand tu auras 50 ans, tu auras 40 ans d'expérience. Et moi j'avais 10 ans et je ne m'imaginais même pas avoir 50 ans. Et donc maintenant j'ai dépassé les 50 ans et j'ai 49 ans d'expérience dans la filière 20. Donc j'ai été formé par un homme qui était visionnaire, mon père, et qui m'a fait partager sa passion pour la région. et aussi son exigence pour la qualité des produits. Voilà, et donc de l'âge de 10 ans à l'âge de 22 ans, ça a été un cursus formateur, puisque je passais deux mois tous les étés avec ma sœur, six jours par semaine, de 5h du matin à 13h dans les vignes, et ensuite je passais 15 jours à la cave pendant les vendanges. Donc c'était une formation continue, qui ne nous faisait pas toujours marrer, parce que c'est dur, et puis parce qu'en fait... Il fallait se lever tôt, etc. Mais je lui rends hommage et puis ça me rend du service parce que ça m'a donné le goût du travail, le respect aussi des personnes qui bossent dur dans les vignes et aussi la compréhension du monde du vivant. Parce qu'en fait, si on veut faire des bons vins, voire des grands vins, tout démarre dans la vie avec le choix des parcelles, des cépages. ramasser les raisins à maturité, etc. Et mon père, il y a un moto qui répétait sans cesse, c'était le 20, c'est mille et un détails. Donc, il m'a fait partager cette exigence de qualité. Quand mon père est décédé accidentellement, j'avais 22 ans, j'étais au début de ma carrière de rugbyman. Alors à l'époque, le rugby n'était pas professionnel, mais je jouais au plus haut niveau, donc on avait un boulot. Et j'ai basculé dans un autre monde où je travaillais 70 heures par semaine. Et en plus, je faisais du rugby. Donc en fait, je vivais un peu comme un moine. Je profitais de la journée du samedi pour me reposer, pour pouvoir être en forme pour les matchs du dimanche. Et ça a été un peu mon rythme de vie pendant 8 ans, jusqu'à l'âge de 30 ans, où j'ai arrêté de jouer après avoir fini ma carrière au stade français, puisque j'ai fait 17 ans à Narbonne et 1 an à Paris. Et donc j'ai basculé dans un autre monde, c'est dans le monde, je dirais, à 100%. dédié à Auvin. Et voilà, donc ça a été un processus continu, exploratoire, où je suis passé d'abord d'une vision de producteur à une vision de metteur en marché. Et après, j'ai intégré aussi la partie marketing et communication et expérientiel. Ça s'est fait progressivement. Mais ma vision, qui était celle de mon père, mais qui était un peu trop avant-gardiste, c'était vraiment de rivaliser avec les meilleurs vins du monde. Il y a eu une rencontre aussi qui a été importante, enfin deux rencontres. La première avec Jean-Claude Berouet, qui a été un peu mon maître en vin. parce qu'il m'a appris l'exigence, le niveau du détail dans l'élevage des vins, dans la précision de l'assemblage. Et Mardu Bernet, qui était un peu l'altérego de mon papa, qui est toujours un oenologue très reconnu dans la région, le premier cabinet d'oenologie en Europe, et qui lui m'a fait partager un peu l'histoire de mon père dans cette région et quelle était sa vision du vin, et qui m'a aussi formé pour... pour faire des assemblages parce que mon vrai métier c'est d'abord de faire des assemblages et ensuite j'ai eu la chance de rencontrer Robert Mondavi en 1989 et j'avais donc 24 ans et Robert Mondavi qui a démarré sa carrière dans le vin à 55 ans, ce qui paraît assez incroyable m'a dit vous avez de la chance parce que si vous gardez la vision que vous avez Vous aurez du succès parce que moi j'ai démarré à 55 ans, il m'avait dit à l'époque. Et en fait, en revenant de ce voyage en Californie, je me suis rendu compte que j'avais compris ce que je voulais faire. C'est-à-dire faire le lien entre le vin, la gastronomie, la culture de la région et l'art sous toutes ses formes. Avec bien sûr la musique, la sculpture, la peinture, etc. Et ça, Robert Mondavi l'avait déjà mis en œuvre d'une manière un peu différente en Californie. Et bien sûr, en conceptualisant tout ça, je me suis dit aussi, l'Occitanie, c'est la Californie de l'Europe. C'est la plus belle région en Europe pour se réinventer. C'est aussi la plus grande région en termes de production de vin dans le monde et donc en Europe. Et voilà, donc j'ai eu cette vision que j'ai dû transformer après en stratégie, en plan d'action. un moyen et puis un objectif. Et ça, ça s'est implémenté au fil du temps.
- Speaker #1
Vous parlez très justement de votre vision et donc en cela, vous devincez ma prochaine question puisque pour nous, la vision, c'est quelque chose d'extrêmement important. Et à l'agence, nous expliquons à nos clients que l'essence d'une marque, c'est bien plus qu'une jolie étiquette et qu'un slogan bien tourné. C'est d'abord une vision portée par le chef d'entreprise et partagée par tous ses membres. Et si les anglo-saxons l'ont parfaitement intégrée, En France et particulièrement dans le monde des vins et spiritueux, ce n'est pas encore une évidence pour tout le monde, sauf pour vous, puisque vous vous portez au contraire une vision très forte, une vision pour ce groupe Gérard Bertrand qui porte votre nom. Cette vision, elle est aussi particulièrement ancrée dans la culture de votre entreprise. Alors, est-ce que vous pouvez nous expliquer en quoi elle consiste, cette vision, et comment faites-vous pour la diffuser largement ?
- Speaker #0
Oui, d'abord, il faut intégrer dans le vin le facteur. temps. Parce que quand on plante une vigne, ce n'est pas pour soi, ce n'est pas pour ses enfants, c'est pour ses petits-enfants dans l'absolu, pour qu'elle soit son optimum de maturité. Donc en fait, le temps, il peut se contracter ou se dilater en fonction des exercices qu'on a à faire. Ensuite, en fait, il faut viser loin et tirer court. C'est-à-dire qu'il faut avoir une vision à 20 ans ou à 30 ans et avoir un plan sur l'année. Et entre-temps, une stratégie sur 3 à 5 ans. Donc, il y a différents curseurs. Et ça aussi, c'est important, il faut l'intégrer. Et c'est un peu spécifique aussi à la filière 20. C'est pour ça que l'avantage de ça, c'est que dans le 20, personne ne peut avoir de succès immédiat. Parce qu'il faut intégrer tous ces paramètres. Et de notre côté aussi, pour avoir du succès, il faut vraiment avoir compris que dans une entreprise, Il y a des process de la méthodologie, d'une organisation, qui fait que quand on planifie des lancements de marques, il faut vraiment être très rigoureux sur toute cette période de phasage pour pouvoir avoir la chance de rencontrer le succès. Et puis après, il faut aussi bien sûr capter l'air du temps, parce que quand on est trop en avance, comme mon père, on ne rencontre pas forcément le succès. On a ce que j'appelle moi un succès d'estime. Mais je fais différente aussi, j'explique différentes façons d'avoir du succès. Il y a le succès d'estime, le succès commercial, et après il y a ce qui s'appelle le global branding. Ce sont des choses différentes. Donc, la vision c'est quelque chose qui doit être stable. On ne peut pas changer de vision tous les quatre matins, sinon c'est qu'on est perturbé. Donc ensuite, la stratégie, il faut vraiment qu'elle soit corrélée avec à la fois votre vision, mais aussi vos moyens, que ce soit des moyens financiers, des moyens techniques et bien sûr des moyens humains. Parce que sinon, s'il y a un décalage entre la vision et les moyens par rapport à la stratégie, ça ne fonctionne pas. Et ensuite, bien sûr, le plan d'action... Il faut vraiment le travailler parce qu'en fonction des pays, en fonction des marchés, il faut aussi faire des études. Par exemple, la Chine est tournée sur le vin rouge. Donc arriver avec des bulles ou avec du rosé, ça va être compliqué. En faire le cœur de marché là-bas, ça ne va pas fonctionner. Donc il faut aussi passer ça au filtre un peu des dix principaux marchés de la planète. Et puis après, il faut avoir une ambition, c'est-à-dire il faut avoir des objectifs élevés. Parce que pour faire rêver, que ce soit des équipes, ou que ce soit les distributeurs ou les partenaires, et même le consommateur, il faut se fixer une barre, il faut se fixer des challenges. Voilà, donc l'esprit du rugby m'a beaucoup aidé, puisque le rugby c'est l'esprit d'équipe, c'est aussi ne jamais renoncer, c'est la volonté d'aller plus loin. Donc ça a été important, parce que dans mon parcours professionnel, les gens disent oui, Gérard Bertrand, ça marche bien. Ce qui est très vrai aujourd'hui, mais pendant 25 ans, je n'ai pas gagné d'argent. Donc ça a été un long parcours de construction de soi, de l'entreprise, de consolider les équipes, d'avoir des leaders, et aussi d'avoir à un moment donné un game changer qui fait que, pour deux, trois raisons, justement, vous passez d'un succès d'estime à un succès commercial et que vous commencez à avoir deux, trois marques qui se deviennent ce qu'on appelle des pool brands, c'est-à-dire des marques... consommateurs désirent, comme Côte-des-Roses ou comme Gris-Blanc ou comme Château-l'Hospitalier pour les domaines par exemple.
- Speaker #1
Alors justement, je trouve qu'il y a quelque chose de très anglo-saxon dans la manière dont vous abordez votre vision et plus globalement dans l'approche que vous avez de l'entrepreneuriat. Je suis convaincue que la filière vin devrait s'inspirer davantage des grandes réussites de notre temps et particulièrement de celles qui se sont opérées en dehors du monde des boissons. afin notamment d'élargir sa vision et sa compréhension du marché global. Et en tout cas, c'est votre cas, c'est ce que vous avez fait, puisque vous avez su développer un sens aigu des affaires, et sans doute avez-vous été inspiré par vos rencontres avec d'autres grands entrepreneurs, à la fois français et américains. Je pense notamment à Robert Mondavi, ou à votre ancien président du racing, Max Guasini. Alors, puisque l'on parle d'inspiration, Prenons l'exemple de Jeff Bezos, le fondateur d'Amazon, qui entretient une culture très forte dans son entreprise. Et l'un des principes fondamentaux de son entreprise, c'est notamment d'encourager ce qu'il appelle les échecs réussis. Alors pouvez-vous nous dire si vous aussi, au sein de votre entreprise et du groupe Jérôme Bertrand, vous encouragez les expérimentations, quitte à essuyer des échecs ? Et est-ce que vous utilisez ces échecs, le cas échéant, comme étude de cas, pour vous permettre d'améliorer les performances de votre entreprise ?
- Speaker #0
Oui, en fait, celui qui n'a jamais connu d'échec, il n'a jamais connu le succès de toute façon, parce que ça n'existe pas. On peut aussi citer Oscar Wilde qui dit « L'expérience est le nom qu'on donne à ses erreurs » . Donc c'est sûr que Jeff Bezos est un disrupteur, donc c'est quelqu'un qui a créé un nouveau modèle. Donc nous, on a essayé dans l'industrie du vin qui est très traditionnelle, de dépoussiérer un peu le système, mais aussi... Comme on était dans une région qui n'avait pas acquis ses lettres de noblesse, il a fallu pousser fort et il a fallu aussi trouver des produits qui permettent de rentrer dans la compétition. Et grâce au rosé en particulier, ça nous a permis de capter une part de marché. Parce que le rosé, c'est quelque chose d'extraordinaire pour la France, c'est que dans l'esprit du monde entier, le rosé c'est le sud de la France. D'abord la Provence, puis le Languedoc, qui produit deux fois plus que la Provence en termes de volume. Et ensuite, c'est le Grenache. Et le Grenache, il est présent dans le Languedoc. Donc tout le monde sait qu'un bon rosé s'est fait avec du Grenache. Et le troisième point qui est fondamental, c'est que dans le Nouveau Monde, ils ne pourront jamais rivaliser avec la France pour le rosé, tout simplement parce que leur date de récolte intervient entre le mois de mars et le mois d'avril. Tout le monde va avoir le nouveau millésime au mois de janvier. Donc ils sont décalés par rapport à nous. Et ça c'est un avantage compétitif remarquable. La part de risque, elle est toujours proportionnelle au succès. C'est-à-dire, plus on prend de risques, plus on a de la chance d'avoir un grand succès. Parce qu'en fait, se mettre en danger, c'est d'abord exister. Et moi, je répète toujours à mes équipes, c'est qu'on n'a pas l'obligation de réussir, mais on a l'obligation d'essayer. Et oui, on a eu des échecs. Je me souviens qu'on a lancé une cuvée de cépages, à l'époque, tournée autour de la numérologie. avec des étiquettes des cépages de 1 à 9. Et en fait, on était allé voir Auchan parce que Gérard Mullier adore la numérologie. Et donc, ils ont lancé ces produits, que ce soit chez Auchan, chez Attaque, qui était une filiale du groupe Auchan. On les a mis dans tous les magasins, mais ça n'a pas du tout marché. Je suis sûr que si on le lançait aujourd'hui, ça marcherait. Mais c'était 20 ans en avance sur la modernité des cépages, etc. Et donc on s'est planté parce que c'était pas le bon moment quoi. Et ça nous a servi aussi puisque on s'est relancé en faisant un autre type d'étiquette, un peu plus conventionnel, pour ne pas perdre le consommateur. Parce qu'en fait, il faut toujours rencontrer ses consommateurs. Alors aujourd'hui c'est beaucoup plus facile parce que le marché est beaucoup plus ouvert qu'il y a 20 ans. Donc la vérité du succès c'est d'avoir un quart d'heure d'avance. Quand vous avez un quart d'heure d'avance, vous êtes le premier. Et le premier, il raflamise. C'est-à-dire que le premier, il a toujours 60 à 80% de part de marché sur un nouveau concept. Voilà, c'est ce qui nous est arrivé avec le bio, en particulier en France. C'est ce qui nous est arrivé avec les vins orange, parce qu'on a lancé il y a trois ans les vins orange. Aujourd'hui, Orange Gold, c'est la première marque mondiale. C'est ce qui nous est arrivé aussi avec les vins sans sulfite et sans additifs, qui sont aussi végan. donc quand on fait ça Pour que ça marche, il ne faut pas dire on va lancer ça parce que ça répond à l'air du temps. Non, il faut se dire ça répond sur des vraies valeurs de produits, ça répond aussi sur des besoins, parce qu'il y a 15% des gens dans le monde qui sont allergiques aux sulfites, donc ceux qui ont mal à la tête après avoir bu du vin. Donc ça repose sur des fondements et ça repose aussi sur une expérience qualitative. Et après, bien sûr, sur un marketing, sur un branding, sur une marque, sur un univers qui est en adéquation avec le produit et avec l'attente et la perception du consommateur. Donc tout ça, ça passe au filtre de différentes réflexions, de certains benchmarks. Mais quand une catégorie n'existe pas, vous ne pouvez pas la passer au filtre du marché. Donc vous la passez dans le filtre du ressenti, c'est-à-dire à un moment donné, vous vous forgez des convictions. Et ces convictions-là, elles vous amènent à lancer ça et à partager ça. Et on a toujours, nous, le top 10 des distributeurs dans le monde dont on sait qu'ils vont nous suivre parce qu'ils nous font confiance. Et ça aussi, ça permet d'avoir de suite une part de marché qui soit significative, qui nous permette d'agir et qui nous permette de mettre en place ces produits-là. Et quand ça fonctionne, derrière, on peut après agrandir le réseau et on peut aller plus loin.
- Speaker #1
Alors vous dites qu'il faut toujours être à l'écoute. et aller à la rencontre de ses consommateurs, ce qui est très vrai. Vous dites également qu'il est important d'avoir un quart d'heure d'avance, quart d'heure que vous avez vous-même toujours eu sur votre marché, et cela me fait penser à une initiative australienne qui a eu beaucoup de succès au début des années 2000. Il s'agit du lancement de la marque Yellowtail, et Casella Wine, quand il a lancé Yellowtail, avec ses fameuses étiquettes jaunes et son petit kangourou, eh bien pour avoir ce fameux quart d'heure d'avance sur le marché américain, Il s'est intéressé, non pas cette fois à ses consommateurs habituels, mais aux non-consommateurs de vin. Est-ce que c'est quelque chose que vous avez vous-même déjà expérimenté au sein du groupe Gérard Bertrand ?
- Speaker #0
Je me souviens très bien du lancement de Yellowtail, qui s'est fait en partenariat avec Bill Dutch, qui est un importateur, qui est un homme qui a une vraie vision du marché. En fait, Yellowtail n'a pas été tant disrupteur que ça sur la catégorie australienne. Il a été disrupteur sur le packaging. En fait, avant que Yellowtail arrive sur le marché, il y avait déjà Penfolds, qui était vraiment bien établi pour les vins australiens. Et il est arrivé avec un prix très agressif sur le marché et avec un packaging qui est vraiment... Pourquoi ça a marché, l'hôtel ? D'abord, parce qu'il y avait une très bonne idée marketing, qu'il y avait un packaging qui était adapté aux valeurs de l'Australie, parce que le kangourou et l'Australie, ça match, qu'il y avait une gamme de cépages, et ensuite parce qu'il y avait un réseau de distribution très puissant de cet importateur. qui a permis de le mettre partout et d'actionner une campagne de communication puissante. Et ensuite, comme le prix était là pour être en compétition avec les entrées de gamme de la Californie, ils ont de suite trouvé, avec un jus aussi où ils étaient partis sur des vins un peu sucrés, etc., une demande pour, oui vous avez raison, des gens qui ne sont pas des consommateurs du quotidien et qui aiment plutôt manger sucré, donc boire sucré. Les gens qui boivent aussi du Coca-Cola, pour parler ainsi. Mais ils ne se sont pas adressés aux gens qui ne boivent pas d'alcool. Ils se sont adressés à des gens qui en buvaient qu'occasionnellement, ce qui est un peu différent. Donc nous, quand on est dans le secteur premium, on a quand même une approche aussi un peu différente. C'est que même s'il y a des produits qui peuvent être mass market, ils ne sont pas là pour rivaliser avec les commodités. Et aujourd'hui, 70% du marché du vin dans le monde, c'est quand même des commodités, c'est-à-dire ce qu'on appelle... la catégorie populaire ou populaire premium. Nous, on démarre au premium, super premium, ultra premium et iconique. Donc, on est dans des secteurs légèrement différents qui demandent souvent un peu plus de temps que dans la catégorie en dessous.
- Speaker #1
Le paysage viticole français s'est historiquement construit autour des AOP et IGP, ces fameuses marques collectives qui ont pour vocation de valoriser à la fois la typicité des terroirs, le fameux critère naturel, et le travail de ces artisans vignerons qui ont su en tirer le meilleur parti. Alors vous qui êtes ancien rugbyman, vous êtes attaché à l'esprit d'équipe et vous l'avez dit, vous avez donc le sens du collectif. Aussi, comment voyez-vous l'impact du collectif sur la filière 20 aujourd'hui ? Pensez-vous qu'il s'agisse d'un tremplin pour ceux qui, comme vous l'avez brillamment fait, ont su sortir de la mêlée pour créer des marques individuelles fortes ? Ou peut-il au contraire représenter un carcan trop restrictif ? lorsque l'on a des institutions, des cahiers des charges, qui ne permettent pas à ces producteurs de s'adapter aussi vite aux évolutions du marché ?
- Speaker #0
C'est une question très complexe qui nécessitera une réponse différenciée. C'est-à-dire qu'il y a le temps court et le temps long. Je pense que dans le temps long, la France, l'Espagne, l'Italie, les pays classiques, producteurs de vins, on est les champions du monde de la norme. et aussi de la complexité des appellations. Et l'INAO est un organisme formidable parce que c'est un peu séculaire et que ça permet aussi de graver dans le marbre certains standards, certaines règles qui font que ça permet aussi aux vignerons de prendre le temps de se projeter. Et ça, c'est très important. Après, l'appellation n'est pas forcément une garantie de qualité. La qualité, c'est l'acte de chaque vigneron. Et pour moi, ça démarre bien sûr avec des sols vivants. Et avec le respect des sols vivants, ça veut dire de prendre soin du milieu. Mais en ce qui me concerne, c'est d'aller vers l'agriculture biologique et en ce qui nous concerne dans les vignobles, vers la biodynamie. Parce que ça nous permet de révéler le goût de quelque part, ce qu'on appelle en anglais « the sense of place » , qui permet d'être ce révélateur. Pour le temps long, pour les vins en appellation d'origine, il faut que le consommateur y repère une identité de goût qui est liée soit à l'appellation, soit à la sous-appellation, soit au domaine lui-même. Moi, mon premier domaine, Château-Ville-Majoux, on le repère parmi mille, parce que c'est des très vieilles vignes de Carignan qui ont plus de 100 ans, des vieux Grenages, des vieilles Syrahs, un peu de Mourvèdre, sur ce terroir de galets roulés qui fait qu'il y a ce côté féerique qu'on retrouve en bouche. qui fait qu'entre le carignan et ses sols, ça donne vraiment une typicité. Et cette typicité, elle est renforcée quand on prend soin de la vigne, quand on ramasse sa maturité, quand on a un élevage fin, etc. Ensuite, pour répondre aux besoins du marché, parfois en France, je pense que ce sont les vignerons qui se créent le plus de barrières. Parce qu'en fait, il ne faut pas oublier que les appellations d'origine contrôlée sont managées par des vignerons, et que les règles du jeu du vin en France, elles sont aussi souvent influencées par le milieu viticole et non pas par la distribution. Donc, comme les gens font bien ce qu'ils connaissent, qu'ils connaissent plutôt très bien l'amont et moins bien l'aval, il y a plutôt un tropisme pour que la filière soit influencée beaucoup trop par l'amont et pas assez par l'aval aujourd'hui. Aujourd'hui, c'est l'aval qui tire l'amont et pas le contraire. Donc... Moi, ce que je recommande, c'est qu'il y ait une ouverture beaucoup plus importante pour les metteurs en marché, mais surtout pour le négoce qui, lui, va porter la voie de la France plus loin et qui va dans 100, 150, 200 pays au monde pour à la fois influencer le marché, capter l'air du temps et revenir aussi avec des idées. Ce qui fait notre force aussi chez Gérard Bertrand, c'est que nous sommes exactement dans 175 pays, que nous avons donc... des ambassades dans les principaux marchés, des équipes commerciales qui nous remontent des informations, que mes équipes marketing et que moi-même, je visite beaucoup de marchés, et qui nous permet à la fois d'installer sur le long terme, je dirais, notre ADN, ce qui n'est pas négociable chez nous, c'est-à-dire nos standards, que sont les domaines, que sont les appellations, et qui nous permet aussi, sur les innovations, d'être réactifs. Parce qu'on anticipe un peu les choses. Là, on vient de lancer les 20 troubles, les Cloudy Wines, qui est une catégorie qu'on a créée, tout simplement parce qu'un jour, je me suis retrouvé avec mes équipes au Ritz à Tokyo. Et j'avais un dîner sur place et je demande au bartender de me servir un sake. Et il revient avec un sake qui était trouble. Et je lui pose la question, je lui dis, mais pourquoi vous me servez un sake qui est trouble ? Alors je le goûte et il me répond. Et il me dit, mais monsieur, 80% des sakés au Japon sont troubles. Donc ça veut dire qu'ils sont non filtrés. Et je goûte le saké. Et c'est vrai qu'il y avait une aspérité différente, qu'il y avait une verticalité un peu plus subtile et tout. Et je dis à mes équipes, comme ça, j'ai dit, c'est ça qu'il faudrait faire avec les vins. Donc ça nous a pris 18 mois pour mettre le process en place, pour que le vin n'a pas de troubles. Et on a lancé cette catégorie. Donc aujourd'hui, on ne sait pas où ça va nous mener. Mais par contre, dans le top 10 des gens qui nous sont fidèles, on l'a mis en place. Et c'est d'une part disrupteur, d'autre part ça crée un besoin. Ensuite, pour les barmans, c'est très intéressant parce que pour les bars aussi cocktails, ça permet d'avoir quelque chose d'intéressant et plus léger en alcool. Et puis, pour le consommateur, ça va lui donner une occasion d'avoir du fun. Parce qu'il y a les vins classiques. Les vins de mémoire, comme les appellations, les grands crus. Et ensuite, il y a les vins de tous les jours, où on doit prendre du plaisir et avoir le goût de quelque chose qui soit aussi intéressant. C'est la différence entre le goût de quelque chose et le goût de quelque part. Donc, on a une vraie vision comme ça, très segmentante, de ce qui est possible de faire, de ce qui existe, et de notre projection dans les prochaines années de ce qu'on a envie de créer.
- Speaker #1
Alors, je perçois une nuance dans votre discours. mais qui pour moi a son importance puisque vous parlez de catégorie et non de gamme et cette nuance me fait penser à l'approche plus globale des acteurs de l'industrie des boissons qui n'est pas celle que l'on retrouve habituellement chez les professionnels de la filière vin puisque le vin se considère généralement comme une catégorie à part qui répond à ses propres règles et qui existerait en dehors de l'industrie des beverage quelque part néanmoins j'ai l'impression que ce que ce n'est pas comme ça que vous voyez les choses. notamment compte tenu de votre recherche constante d'innovation et du regard un peu à 360 que vous portez sur le marché.
- Speaker #0
Le marché du vin, il y a sept catégories, et nous on a travaillé là-dessus et on a vraiment identifié les gens qui étaient des amoureux du vin, ce qu'on appelle les one lovers, les gens qui sont des disrupteurs, les gens qui sont des hipsters, les gens qui sont des classiques, et donc le marché du vin comme ça il est segmenté à quatre ou cinq catégories de consommateurs, qui ont tous leur intérêt mais qui ne recherchent pas la même chose. C'est-à-dire que celui qui veut prendre l'Hospitalitas, qui est un parcellaire, il va aller par exemple chez Nicolas ou chez Jacoindepot ou chez le Caviste à New York, chez Morels par exemple, pour le trouver. Celui qui veut boire un bon chardonnay le soir avec ses amis ou avec son compagnon ou sa compagne, il va aller au supermarché du coin où il va trouver ce qu'il a besoin, juste parce qu'il a un besoin. classiques, je dirais. Et ensuite, il y a ceux qui ont besoin d'être conseillés. Quand vous allez dans les bars aujourd'hui, dans les bars d'hôtels en particulier, c'est extraordinaire parce que vous avez des gens qui sont à même de vous conseiller. Quand je dis ça, c'est qu'il y a en consommation, on arrive dans un endroit, on a rendez-vous avec un ami ou une amie, on ne sait pas ce qu'on va boire. On sait qu'on va rencontrer quelqu'un. Et au milieu va interférer la personne qui va vous prendre la commande. Et si la personne fait bien son boulot, D'abord, elle va vous amener la carte des cocktails, la carte des jus de fruits et la carte des vins. Et le game changer, c'est que depuis trois ans, il y a des cocktails partout dans le monde. Ce qui n'était pas le cas il y a cinq ou dix ans. Les gens vont forcer sur les cocktails, pourquoi ? Parce que sur un cocktail, un bar à 95% de marge, il va le vendre plus cher qu'un verre de vin, et en même temps c'est fun pour le bartender de créer un cocktail. Et c'est sympa pour les jeunes, en particulier les Gen Z, les jeunes de la génération, de dire j'ai un cocktail. Et c'est là où la filière vin, il faut qu'on se remette en question, parce qu'en fait, à un moment donné, on est confronté à l'univers des spiritueux, des bières, des cocktails et des jus de fruits. Et les gens, ils ont le choix. Et moi, quand j'arrive quelque part, j'ai pas déjà l'idée de dire, tiens, je vais boire un verre de rosé. Non. J'ai rendez-vous avec telle personne, un ami, on va passer un bon moment. Et la magie de l'instant va faire la différence. Et le dernier maître, c'est celui qui coûte le plus cher. Parce qu'en fait, tout est prémédité. Parce que la carte des cocktails, par exemple, elle a été souvent mise en place par les grands magnitudes des spiritueux qui ont mis tout ça en place. Donc, il faut aussi développer les wine cocktails pour répondre à ses besoins. Et donc, il y a des moments où personnellement, j'ai envie de boire un jus de fruits, des moments où j'ai envie de boire un verre de rosé, des moments où je peux avoir envie, mais c'est plus rare, un cocktail, et souvent où j'ai envie de boire un verre du vin ou de sparkling ou de vin doux naturel, par exemple. Donc, c'est vraiment ce parcours et c'est la chance qu'a notre industrie, mais c'est aussi sa faiblesse. c'est que la remise en question, elle passe par le dernier maître. Comment on fait pour mettre en place des promoteurs dans les supermarchés qui vont vanter les mérites de vos produits ? Comment on fait dans les bars pour influencer les bartenders pour leur proposer des produits qui vont leur plaire ? Comment on va leur apporter des solutions sur leur base de cocktails, etc. ? Parce qu'aujourd'hui, on se rend compte qu'il y a de plus en plus de gens qui boivent du vin en dehors de chez eux, donc occasionnellement. Les consommateurs réguliers, c'est 20% en France, et c'est beaucoup moins à l'international. Donc le monde du vin a changé. Et c'est aussi pour ça que nous venons de lancer des rouges à boire frais, comme notre rouge clair, comme notre Côte des Roses léger, comme le Chouchou, créé par ma fille Emma. Pourquoi ? Tout simplement parce que si la consommation des vins rouges baisse, c'est que comme il fait plus chaud, quand il fait chaud, on ne boit pas du vin rouge. parce qu'on n'a pas l'habitude de mettre du vin rouge au frais. Et quand on met un rouge au frais, tous les cépages ne vont pas bien marcher avec le froid. Le grenache marche très bien parce que le grenache a cette douceur de tannin qui va bien prendre le froid. Certains cépages un peu plus tanniques vont moins bien le prendre. Donc tout ça aussi, ça fait partie d'un processus de réflexion pour être en phase aussi avec les besoins des consommateurs et des wine lovers.
- Speaker #1
Alors justement, puisque l'on parle marché et évolution des modes de consommation, on parle en ce moment beaucoup de la baisse de consommation des vins. Pourtant, cette baisse qui concerne l'ensemble du secteur des boissons et pas uniquement le vin, semble être davantage conjoncturelle que structurelle. Alors, pour répondre aux enjeux de cette baisse de consommation et d'alcool en général, la filière vin se tourne aujourd'hui vers de nouveaux produits et notamment les vins désalcoolisés. Vous qui avez pourtant toujours ce fameux quart d'heure d'avance sur votre marché, la voie de la désalcoolisation est une voie dans laquelle vous avez choisi de ne pas vous engager, en tout cas pour le moment. Alors, est-ce que vous voulez bien nous expliquer pourquoi ?
- Speaker #0
Oui, parce qu'en fait, je suis curieux et j'ai testé les vins sans alcool il y a 15 ans. Nous en avons fait. Nous avons fait un produit qui s'appelait le Muscato Musca Zero, parce qu'en fait, le Musca, c'est l'un des rares cépages qui, après désalcoolisation, ne perd pas ses estères, ses arômes. Parce que le muscat c'est un arôme très puissant et c'est le seul raisin qui a le goût du vin. Parce que souvent le raisin n'a pas trop de goût et développe ses arômes après fermentation. Le muscat lui, quand on le mange, on a déjà le goût du muscat. Donc on s'est dit on va essayer, ça n'avait pas marché, c'était peut-être un peu tôt. Mais aujourd'hui, sensoriellement, moi je reste sur ma faim. C'est-à-dire que je n'ai pas trouvé de plaisir déjà olfactif. et ensuite gustatif avec un verre d'un produit qu'on peut appeler du vin, si vous voulez, sans alcool ou désalcoolisé. Parce qu'en fait, l'alcool, ça amène les estères, ça amène aussi le gras, ça amène aussi la charpente, quand même, quelque part, du vin. Et quand on enlève tout ça, déjà, ça coûte cher, ça consomme aussi de l'énergie. Et ensuite, il faut que le plaisir soit au rendez-vous, parce qu'en fait, un vin sans alcool, ça rentre en compétition avec... Toutes les bases de produits sans alcool, c'est-à-dire les jus de fruits, les eaux minérales, les sirops, tous les produits qui sont sans alcool. Donc la question qu'il faut se poser c'est est-ce qu'on tient la promesse de cette catégorie ? Est-ce qu'on est dans le coup aussi en termes de prix ? Et est-ce que ce n'est pas un alibi ? C'est-à-dire se dire ok on a un chardonnay désalcoolisé, donc on va socialiser avec des gens. Sans avoir les effets qu'on peut dire qui ne seraient pas positifs éventuellement pour ceux qui le jugent comme ça de l'alcool. Mais à la fin, le vin, il y a une dimension aussi transcendante, c'est-à-dire que dès qu'on boit un peu de vin, ça désinhibe, et l'alcool a cet effet un peu désinhibateur qui fait qu'on socialise plus facilement et qu'on est dans une espèce de... On ouvre une porte un petit peu différente parce que dès qu'on commence à... à être deux, trois ou plusieurs autour d'une table qu'on traîne ensemble. Mais les gens commencent à discuter, le cœur s'ouvre. Et ça a été dit par plusieurs poètes et écrivains, c'est que le vin est une boisson qui apporte un message différent et qui permet d'ouvrir le cœur des gens. Donc voilà, je suis sur ma faim au niveau technique, je suis sur ma faim au niveau du goût. Et si jamais mes équipes arrivent à trouver une réponse, rassurez-vous, je saurai la porter avec enthousiasme. Mais pour le moment, moi personnellement, je ne ressens pas en tant que consommateur le besoin parce que je n'ai jamais trouvé de produit qui me procure un plaisir intense ou de l'émotion.
- Speaker #1
Alors j'aurais une dernière question à vous poser. Si vous deviez repartir de zéro demain, reprendre en main un domaine viticole, Est-ce que vous pouvez nous dire quelles seraient les premières actions que vous mettriez en place et comment feriez-vous pour faire connaître votre vin ?
- Speaker #0
C'est une bonne question parce que... Comme j'ai démarré il y a longtemps, le monde a changé. Donc si j'avais une baguette magique et que je revienne en arrière, d'ailleurs je n'en ai pas forcément envie, mais si admettons que je redémarre, il y a un facteur important, c'est le facteur temps. D'ailleurs moi j'ai eu la chance de démarrer quand j'avais 22 ans officiellement, donc la jeunesse est un facteur important à intégrer dans le processus de vigneron. Quand on démarre à la quarantaine ou à la cinquantaine, on n'a plus le temps. Donc on doit être dans le résultat. Ce qui met une certaine forme de pression. Déjà au niveau du vignoble. Parce qu'il faut avoir fait les bons choix de territoire, de terrain et de cépage. Quand vous avez 20 ans, vous pouvez arracher, replanter, avoir justement un plan à 20 ou 30 ans. Donc, si je démarrais aujourd'hui, et si j'avais l'âge que j'ai aujourd'hui, Donc je choisirai... Un grand terroir, c'est un terroir qui fait le lien entre l'adaptation, entre le sol, le climat et les cépages. Ça c'est la trilogie et ça c'est fondamental. La seule chose qu'on ne peut pas changer dans un choix de domaine, c'est le terroir. On peut changer les cépages, on peut changer les hommes ou les femmes, on peut changer et refaire la cave, la maison d'habitation, on ne peut pas changer le terroir. Donc le terroir. Ensuite, trouver des vieilles vignes. Parce que si on veut faire du grand vin, il vaut mieux avoir des vieilles vignes. Ensuite, repérer l'identité qu'on veut. veut avoir, et pour ça, visiter les voisins, voir s'il y a une certaine forme d'harmonie dans le cru, ou si au contraire il n'y en a pas, et si alors, il faut être disruptif, parce que s'il y a une forme d'harmonie, autant être dans une espèce quand même de continuité, en améliorant peut-être par rapport à ce que font les voisins, mais dans une espèce de continuité. Je m'explique, quand vous êtes par exemple à Pique-Saint-Loup, vous avez une continuité, vous avez 4-5 vignerons qui font des grands vins, tous autour quand même de la Syrah de manière notoire. Si vous allez à Châteauneuf, aujourd'hui le cahier d'échange fait que vous pouvez faire 100% de chaque cépage si vous en avez envie. Donc je dirais que c'est un peu différent. Donc regardez un petit peu l'écosystème autour et ensuite avoir une vraie vision de qualitative, c'est-à-dire je m'entoure des meilleurs experts. du cru, de la région. Je ne vais pas forcément chercher quelqu'un qui habite à demi kilomètre si c'est pour traiter des cépages locaux. Si c'est pour traiter des cépages internationaux, je prends par exemple pour le Merlot et le Cabernet Jean-Claude Berouet ou Michel Roland de Bordeaux et où je prends Kyriakos Kwanogopoulos de Bourgogne parce que c'est l'expert du Pinot pour moi, l'un des meilleurs. Et je leur dis voilà ma feuille de route c'est celle-là. Voilà, et si je veux faire du vin du cru, je vais voir Mathieu Duberné et je lui dis, voilà, je veux faire un vrai vin Langodossien, qu'est-ce que tu me conseilles ? Et après, je sais qu'il me faut trois ans pour trouver la pierre philosophale, si je suis très bon. C'est-à-dire que l'élevage se fait par l'eau et je fais l'assemblage qu'elle a fait, parce que je ne connais pas le potentiel de mes parcelles. Donc je vais attendre que chaque parcelle ait révélé sa vérité pour l'assembler. Et au bout de 3 ou 4 ans, quand j'ai bien compris, je peux assembler pour les rouges avant mise en barrique et puis faire l'élevage en suivant. Et après, forcément, je me fixe un idéal du prix que je veux vendre, des marchés que je veux aller chercher. Et surtout, si je ne suis pas du cru, si j'ai un certain âge, je prends... Allez, entre 15 et 30 hectares. Mais je ne m'embarque pas dans une aventure où je vais avoir 100 hectares de vignes, parce que je sais qu'au bout de 3 ans, je vais avoir 3 ans de stock. Alors que si j'ai 15 à 25 ou 30 hectares, je sais que je vais pouvoir avoir un nombre limité de produits. Je ne vais pas être obligé de faire 40 étiquettes, ce qui est terrible, parce que le consommateur ne s'y reconnaît pas. Ce qui marche dans ce métier, c'est de rester simple et de voir la possibilité. que chaque pays dans le monde puisse déguster la même bouteille. Donc, j'ai cette vision que je partage, parce qu'au début, je n'en ai pas, donc j'essaie d'avoir quelques conseillers aussi, des agences marketing, c'est très important, pour dire, voilà, moi, au niveau produit, je suis calé, mais passez du savoir-faire au faire au savoir, est-ce que vous pouvez m'aider pour définir un plan d'action ? Voilà, ma vision, c'est la mienne. Quelle est ma stratégie à trois ans ? Parce que maintenant, cinq ans, c'est trop loin. Et quel est le plan d'action et comment vous pouvez m'aider et comment aussi vous pouvez me faire rencontrer via des agences internationales, quelques pure players dans chaque pays que je vais aller visiter pour présenter mon concept et ensuite mes produits. Voilà, en sachant que quand on est excellent, il faut 3 à 4 ans pour réussir. Quand on est bon ou très bon, il faut 5 à 6 ans. Et quand on est juste moyen, il faut 10 ans. Il faut se dire qu'il faut entre 5 et 10 ans pour réussir, donc ça veut dire qu'il faut intégrer avec les banques ce processus de financement qui fait que pendant 5 à 10 ans, ça va être compliqué et qu'il va falloir travailler dur et qu'il va falloir aussi comprendre quels sont ces canaux de distribution, la channel strategy en anglais, pour se dire ok, est-ce que je vise plus la grande distribution ou est-ce que je vise plus les cavistes ou est-ce que je vise plus aussi ? La restauration premium, comment je veux travailler ? Parce que le marché du vin, il est très segmentant et donc il faut comprendre aussi, c'est pour ça qu'on a besoin de soutien d'agences de conseil pour éclairer un petit peu l'univers. Et le dernier point, c'est que si on ne lance pas un produit à un bon prix, on n'arrive jamais à rattraper le retard. Donc il faut vraiment comprendre, c'est qu'il faut partir du prix retail, du prix consommateur, faire la cascade en intégrant les marges. du retailer, les marges du distributeur, les marges de l'importateur et sa propre marge pour pouvoir aussi à terme gagner de l'argent.
- Speaker #1
En tout cas, on retiendra une chose, c'est que si vous deviez recommencer demain, ce serait toujours dans votre région de cœur, le Languedoc.
- Speaker #0
Oui, parce que mon histoire, elle est ici et que je suis un enfant des Corbières. Mon cœur est dans cette région. Donc voilà, ce qui ne m'empêche pas d'aller ailleurs, puisqu'aujourd'hui, on a acheté un domaine à Cahors, qu'on ne s'interdit rien. mais les... Je dirais que les 38 premières années de ma vie ont été ici, en Occitanie.
- Speaker #1
En tout cas, merci Gérard pour votre temps, et merci d'avoir bien voulu répondre à nos questions avec sincérité.
- Speaker #0
C'est un grand plaisir.
- Speaker #1
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