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À la rencontre des doctorant·es

Ep. 30 Les micropolluants émergents : de la contamination domestique à l'exposition humaine

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26min |13/10/2025
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Description

Dans ce podcast, Pierre Martinache, qui a effectué son doctorat au sein du Laboratoire Eau Environnement et Systèmes Urbains (LEESU), nous parle de ses recherches sur les biocides présents dans les produits du quotidien. À travers une méthodologie combinant enquêtes et prélèvements réalisés auprès de la population, il évalue la présence de ces contaminants dans nos logements et les risques associés à leur usage. Son objectif : proposer des solutions pour prévenir et limiter l'impact des biocides sur la santé humaine.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Là ça fonctionne.

  • Speaker #1

    1, 2,

  • Speaker #0

    3,

  • Speaker #1

    1,

  • Speaker #0

    2,

  • Speaker #1

    c'est un module. Ouais là c'est un module. Bonjour.

  • Speaker #0

    Oui, est-ce que vous m'entendez ? Ça va bien être bon.

  • Speaker #1

    On t'entend, c'est parfait. Je vais peut-être reprendre souvent, mais c'est pas grave.

  • Speaker #0

    Oui, il n'y a pas de souci.

  • Speaker #1

    Merci. Bonjour, aujourd'hui c'est Mahalia au micro. J'ai le plaisir d'accueillir Pierre Martinache, qui vient tout juste de terminer sa thèse au LESU, le Laboratoire Eau, Environnement et Système Urbain, une thèse qui porte sur les usages domestiques des substances biocides. Bonjour Pierre.

  • Speaker #0

    Bonjour Mahalia.

  • Speaker #1

    Pour commencer, explique-nous ce que sont les biocides et de quelle manière nous nous retrouvons exposés à eux dans notre vie quotidienne.

  • Speaker #0

    Alors les biocides, on peut avoir deux approches des biocides, une approche réglementaire et une approche étymologique. L'approche réglementaire, c'est de se dire que c'est en lien avec la réglementation de biocides et donc il y a des usages bien particuliers. Et l'approche étymologique, c'est tout simplement bio-écide qui signifie tuer le vivant. Et donc nous, avec mes encadrants et dans le cadre de ma thèse, on a voulu prendre la définition étymologique et donc définir les substances biocides comme étant des substances qui tuent la vie. Et donc c'est des substances qu'on retrouve dans plusieurs produits, à savoir des produits cosmétiques, des produits pour les médicaments, des produits phytosanitaires ou encore des produits vétérinaires. Et donc ces produits, on les utilise tous les jours et ils peuvent se retrouver dans des matrices environnementales comme les poussières ou encore l'air et les eaux grises. Les eaux grises, c'est...

  • Speaker #1

    Je voulais te poser la question, qu'est-ce que tu entends par eau grise ?

  • Speaker #0

    Les eaux grises, c'est des eaux domestiques. C'est la somme de toutes les eaux domestiques à l'exception des eaux vannes, qu'on considère comme étant les eaux de toilette. Dans le cadre de ma thèse, on s'intéresse à quatre types d'eaux grises différentes. Les eaux de douche, les eaux de vaisselle manuelle, de nettoyage des sols et de lave-linge.

  • Speaker #1

    D'accord, très bien. Dans ta thèse, tu t'interroges sur les usages domestiques des biocides. Donc du coup ça nécessite de réaliser des prélèvements à domicile, j'imagine. Du coup comment est-ce que tu as procédé pour recruter des volontaires ?

  • Speaker #0

    Juste, je pense qu'il faut qu'on refasse parce que j'ai pas parlé de la liste des substances. Donc à la limite, me poser une question sur la liste des substances.

  • Speaker #1

    Du coup tu as abordé les biocides et tu as dit qu'on les retrouvait dans notre quotidien. Est-ce que nous, par exemple, on peut essayer de les détecter nous-mêmes au supermarché ? Est-ce qu'il existe une liste de substances des biocides ?

  • Speaker #0

    Alors effectivement, à l'échelle européenne, et notamment dans la réglementation biocide, il y a à peu près 350 substances qui existent. C'est une liste qui est énorme, et donc dans le cadre de ma thèse, on a dû la réduire. Et précédemment, dans la thèse de Claudia Payens, qui a été soutenue en 2019, elle avait pu mettre en place une méthode de priorisation. Elle avait pu sortir une liste de 18 substances. Nous, à cette liste de substances, on a ajouté 11 autres substances en fonction de leurs utilisations, notamment en tant que lutte contre les nuisibles et en tant que désinfectant. Dans le cadre de ma thèse, on a une liste de 30 substances à peu près qui sont des substances biocides qu'on utilise tous les jours.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu peux citer quelques noms pour que les auditeurs puissent les repérer ?

  • Speaker #0

    Si jamais les gens vont dans les supermarchés et s'intéressent aux compositions, il y a la famille des isothiazolinones, ce sont des substances qui sont utilisées en tant que conservateurs, notamment dans les lessives ou encore de manière générale dans tous les produits liquides. On a aussi des ammoniums quaternaires comme les benzalconium chlorides qui eux sont des désinfectants, donc sont beaucoup utilisés pour nettoyer les sols et sont aussi utilisés dans les produits... pharmaceutiques pour toute la désinfection sur les plaies, etc. Et après, on a des substances comme les pyrétrinoïdes, qui, elles, sont des substances qui visent à lutter contre les nuisibles, donc les insectes, les fourmis, les araignées, etc.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Donc du coup, dans ta thèse, tu t'interroges sur les usages domestiques des biocides, ce qui nécessite de réaliser des prélèvements au domicile des personnes. Donc comment as-tu procédé pour recruter des volontaires ?

  • Speaker #0

    Alors ce qu'il faut savoir c'est que ma thèse s'inscrit dans un programme plus vaste qui s'appelle le projet Biocidatome. Et donc ce projet, il a été mis en place et porté par Adèle Brissi, qui est mon encadrante de thèse. Ce projet a commencé en 2021 et il a comme objectif d'étudier les biocides dans la sphère domestique de manière générale. Il y a plusieurs étapes. La première étape, c'est d'identifier et de caractériser les différents usages des substances biocides dans les logements. Ensuite, de faire des prélèvements et de vérifier à quel point les environnements intérieurs sont contaminés en substances biocides. Une troisième étape, c'est de voir s'il y a beaucoup d'émissions entre les logements. et le milieu récepteur, notamment via le ruissellement et via les émissions d'eau grise. Et ensuite, tout un pan sur plus les sciences humaines et sociales, où là l'objectif c'est de vérifier pour quelles raisons les gens utilisent ces substances biocides, est-ce qu'on peut induire des changements de pratiques auprès des habitants et quelles sont les méthodes de réduction à la source qui sont les plus efficaces. Notamment, on peut parler de la réduction à la source avec les interdictions réglementaires. ou alors avec les changements de pratiques pour les produits domestiques.

  • Speaker #1

    Comment est-ce que vous avez réussi à caractériser les différents usages des produits biocides ?

  • Speaker #0

    On s'est intéressé aux différents usages de différentes manières. On a tout d'abord voulu recueillir des bases de données, donc là plutôt des usages quantitatifs, sur les différentes réglementations. Il existe plusieurs bases de données qui recensent les ventes. de produits biocides dans la réglementation biocide, dans la réglementation phytopharmaceutique ou encore dans la réglementation pharmaceutique. Et là l'objectif c'était de recueillir des données chiffrées et ensuite de comparer les usages entre eux pour essayer de mettre en avant un usage majoritaire pour telle ou telle substance. Ensuite on a fait une étude plus qualitative où l'objectif c'était de vérifier quelles sont les substances qu'on peut retrouver dans les produits du quotidien. Et donc pour ça on est allé tout simplement dans les supermarchés. Et on a regardé les compositions des produits et on a créé une base de données d'environ 6000 produits, que ce soit des produits cosmétiques, des produits ménagers ou encore des produits de bricolage. Et là, on a pu en ressortir que les familles les plus souvent retrouvées dans les produits du quotidien, c'était la famille des isothiazolinones, donc les fameux conservateurs dont on parlait tout à l'heure, et les ammonium quaternaire, donc les désinfectants.

  • Speaker #1

    Très bien. Et du coup, pour recruter les volontaires, vous avez réalisé un questionnaire ?

  • Speaker #0

    Exactement, on a réalisé un questionnaire qui avait un double objectif. Tout d'abord, de recruter des volontaires pour faire les prélèvements, en leur présentant notre démarche, la volonté d'étudier les substances biocides chez les habitants en Ile-de-France. Et un deuxième aspect, où là l'objectif c'était de recueillir des informations sur les habitants en eux-mêmes. à savoir des informations sur le profil socio-économique des personnes, mais également sur leur perception des risques vis-à-vis des substances bécides et sur les différents usages qu'ils pouvaient faire de ces substances dans leur logement.

  • Speaker #1

    Pourquoi est-ce que vous vous êtes focalisé sur le profil socio-économique des volontaires ?

  • Speaker #0

    Parce que c'est un paramètre qui est très important lorsqu'on fait des études auprès de particuliers. C'est un paramètre qui est souvent mis en avant dans les études et qui peut avoir un impact sur la sensibilisation des gens sur les différents produits qu'ils peuvent utiliser. Et nous, en l'occurrence, l'objectif c'était vraiment d'avoir des profils socio-économiques variés dans un premier temps. Il s'est avéré que lorsqu'on a eu les réponses au questionnaire, on n'a pas pu avoir forcément la variabilité espérée, mais on a quand même pu avoir deux profils types qui émergeaient, un profil plus étudiant. et un profil plus cadre vers la cinquantaine, donc expérimenté.

  • Speaker #1

    Et vous avez réussi à obtenir à peu près combien de réponses, combien de volontaires ?

  • Speaker #0

    Sur ce questionnaire, on a obtenu à peu près 250 réponses qui a été diffusée dans toute la France, où l'objectif c'est d'avoir des profils de français un peu type. Et ensuite on a réduit pour avoir uniquement des réponses en Ile-de-France, donc là on était à 230. Et ensuite, parmi ces 230 personnes, on avait à peu près 70 personnes qui étaient intéressées par faire des prélèvements avec nous.

  • Speaker #1

    Donc quelle est la motivation première des personnes à ouvrir leurs portes ? pour être interrogé à cette étude, pour participer à cette étude ?

  • Speaker #0

    Alors la motivation, au début on ne pouvait pas la voir, parce qu'effectivement on avait juste la réponse des questionnaires. Mais quand on est allé chez les gens et qu'on a pu discuter directement avec eux, on s'est rendu compte qu'il y avait un peu de tout. Il y avait des gens qui étaient très sensibilisés sur ces sujets-là et qui voulaient vérifier si leur logement était contaminé ou non. Il y en avait d'autres qui étaient profanes. et qui n'avaient absolument aucune idée de ce que voulait dire le terme biocide et qui étaient juste très intrigués par nos recherches et voulaient participer. Donc on avait vraiment différents profils et ça a pu nous aider derrière par la suite pour avoir des résultats qui sont quand même assez représentatifs. Même si on n'a quand même que des étudiants et que des cadres, c'était quand même assez représentatif pour ces deux populations-là.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Donc une fois chez les participants... Quelle a été ta procédure pour le prélèvement des échantillons ?

  • Speaker #0

    Ce qu'il faut savoir, c'est que dans un premier temps, les échantillonnages, je les ai fait accompagner. J'encadrais des stagiaires qui ont pu m'aider à aller sur le terrain et à amener tout le matériel nécessaire. Et après, dans un second temps, on va dire que la deuxième moitié du temps, j'ai fait ces prélèvements seuls. Pourquoi c'est important ? C'est qu'il y a beaucoup de matériel à emmener. Et donc c'est pas forcément évident quand on est tout seul d'aller sur le terrain et d'amener tout un tas de glaciers, de bonbonnes de verre ou encore de pompes de prélèvement pour l'air. Et donc pour les prélèvements, ce qu'il faut savoir c'est qu'on s'est intéressé à trois matrices différentes. On s'est intéressé aux poussières, à l'air intérieur et aux eaux grises, dont on parlait tout à l'heure. Le prélèvement d'air, il consiste tout simplement à ramener une pompe de prélèvement chez les gens. Elle a laissé pendant une semaine faire le travail et ensuite on revient, on récupère l'échantillon et on l'amène en laboratoire.

  • Speaker #1

    Pour la pompe, elle prend beaucoup de place ou c'est une toute petite pompe à air ? Je n'arrive pas trop à visualiser sa taille parce qu'une semaine à domicile, c'est beaucoup.

  • Speaker #0

    C'est une très petite pompe qui fait à peu près 50 cm par 30 cm par 40 cm. Et justement, vu qu'on les laissait pendant une semaine chez les gens, ça a été aussi un de nos critères quand on a fait les commandes au tout début, c'était d'avoir la pompe la plus silencieuse possible. Parce que la plupart du temps, quand on fait des prélèvements d'air, c'est des prélèvements qui sont en extérieur, et donc on s'en fiche un peu d'avoir une pompe qui fait énormément de bruit. Par contre, là, l'objectif c'était de la laisser dans une salle de vie, donc soit un salon, soit une chambre, et donc on avait besoin d'avoir une pompe très silencieuse. Et donc là on a pu obtenir une pompe qui avait des décibels assez faibles et qui n'était quasiment pas perceptible à Louis. Et donc pas gênante pour les particuliers, que ce soit en termes de space, de volume et en termes sonores.

  • Speaker #1

    Très bien, je te laisse reprendre pour la suite.

  • Speaker #0

    Et donc pour les échantillons de poussière, c'était les échantillons le plus simple. L'objectif c'était vraiment de demander aux gens s'ils avaient un aspirateur avec sac. Et si c'était le cas, on récupérait le sac de poussière après un mois d'aspiration. Et on le récupérait directement pour l'amener en laboratoire et pour faire les différentes techniques de préparation d'échantillons et d'analyse. Et enfin, pour les eaux grises, là c'était un peu plus compliqué. Il fallait ramener beaucoup de matériel, notamment des... Enfin, ce qu'il faut savoir, c'est que les prélèvements d'eau grise sont faits par les particuliers. On leur amène tout le matériel, on leur fournit également un manuel pour leur expliquer comment faire. Ensuite, on revient une semaine après comme pour l'air et on récupère les échantillons d'air et les échantillons d'eau grise.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu peux nous décrire un petit peu le protocole à suivre pour les eaux grises s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Les échantillons d'eau grise, comme on l'a dit tout à l'heure, il y a quatre types d'eau grise différentes et le protocole varie en fonction du type d'eau. Pour les échantillons de douche, l'objectif c'était de demander aux utilisateurs de prendre une douche dans une baignoire en fermant l'évacuation d'eau. Donc l'objectif c'était vraiment de ne pas changer les habitudes, on leur a bien précisé à chaque fois que ce soit pour l'air ou pour les eaux grises et même pour les poussières, de garder les habitudes, de garder les mêmes produits qu'ils utilisent. Et donc pour les douches, après avoir bouché, ils prenaient toutes leurs... leur douche normalement. Et à la fin, on leur fournissait un gant pour homogénéiser la douche, pour la mélanger. Et ensuite, une bonbonne de verre qui était préalablement lavée en laboratoire et de faire un sous-échantillon d'un litre de cette eau. qui pouvait ensuite être fermé, enfin la bonbonne pouvait être fermée à l'aide d'un bouchon et ensuite d'identifier à l'aide d'une étiquette l'échantillon. Et ensuite du coup c'était pour les différents types d'eau. Pour les eaux de lave-linge, l'objectif était de récolter les eaux d'un cycle de lavage. Donc généralement on demandait aux personnes d'utiliser le cycle habituel de lavage et on récoltait toutes les eaux donc c'était... de manière générale à peu près 40 ou 50 litres dans une énorme bonbonne en verre et ensuite on faisait un sous-échantillon d'un litre également. Pour les eaux de nettoyage des sols, c'était tout simplement, on demandait aux gens de passer la serpillière avec leur seau et ensuite de récupérer un litre de l'eau du seau. Et pour les eaux de vaisselle manuelle, on leur demandait à peu près dans le même style que pour les douches, de boucher leur évier. de faire la vaisselle et ensuite de faire un souci d'échantillon d'un litre de cette eau.

  • Speaker #1

    D'accord, très bien. Et du coup, j'imagine que les personnes enquêtées ont dû avoir des anecdotes marrantes ou des retours intéressants. Est-ce que tu pourrais nous en partager quelques-uns ?

  • Speaker #0

    Je vais peut-être redire la question vu que je l'ai interrompue. Je ne sais pas. Non, c'est bon ? Ok. Du coup, pour les réactions, effectivement, il y a certaines personnes qui étaient étonnées déjà de nous voir, de leur demander de faire les prélèvements chez eux. Et ils ne s'attendaient pas à ce qu'on leur demande jusqu'aux eaux de douche. Après, ce qui était aussi intéressant, c'était d'avoir une discussion sur... sur les produits biocides avec eux, de savoir déjà est-ce qu'ils étaient sensibilisés à ces questions-là, est-ce qu'ils connaissaient ce terme. Et ce qui était aussi intéressant lors de nos échanges, c'est qu'une autre des missions d'aller sur le terrain et de fournir tout le matériel aux particuliers, c'était de recenser tous les produits qui pouvaient contenir des substances biocides. et donc Ce qui était intéressant, c'était de montrer aux gens que finalement, les produits biocides, ils étaient dans des produits dont ils n'avaient pas forcément idée qu'ils pouvaient contenir des substances biocides. Typiquement, la question que je posais aux gens directement, c'était de me montrer les produits qui contenaient selon eux des substances biocides. Et donc là, ils me sortaient généralement des produits ménagers et peut-être quelques produits de lutte contre les nuisibles. Et quand je leur disais dans un second temps que ces produits-là en contenaient, mais qu'on pouvait aussi en avoir dans les produits cosmétiques, dans les produits vétérinaires ou autres, ils étaient assez surpris. Et quand on regardait en effet la composition de ces produits, il est arrivé plusieurs fois qu'on retrouve une des substances que j'étudie. Donc voilà, c'est plutôt ces discussions-là qui étaient assez riches, que ce soit pour eux comme pour moi. qui ont rendu vraiment le terrain très passionnant.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'ils ont eu le réflexe de jeter leurs produits cosmétiques après aux vétérinaires ?

  • Speaker #0

    Alors effectivement, il y a eu énormément de gens qui sont venus me voir après en me demandant si tel ou tel produit était bon ou pas pour eux. La plupart du temps, ce que je leur répondais, c'était que l'important dans ces cas-là, c'est d'avoir des produits les plus simples possibles, entre guillemets. Et même si on ne connaît pas forcément la composition avec les différentes substances qui peuvent être dangereuses ou pas pour la santé et pour l'environnement, à partir du moment où on a des produits avec une liste de substances qui est courte, on part du principe que c'est mieux. Et typiquement, pour les produits ménagers qui est un bon exemple, moi ce que je leur conseille, c'est au lieu de prendre des produits avec des listes de composition très longues, de prendre des produits qui sont vraiment limite purs. Typiquement du vinaigre ménager, du savon noir. Ce sont des produits qui sont très connus, très simples d'utilisation et dont les risques pour la santé et pour l'environnement sont quand même assez faibles.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Est-ce que je pose la question ? Oui, vas-y. J'allais dire, on peut peut-être passer au résultat. Oui. Tu veux la partie laboratoire ?

  • Speaker #0

    Ah oui, la partie laboratoire.

  • Speaker #1

    Oui. Donc... Parlons maintenant de la partie laboratoire de tes recherches. Comment as-tu analysé les différents types d'échantillons, pour rappel eau grise, poussière et air ? Et quels protocoles spécifiques as-tu suivi pour chacun d'entre eux ?

  • Speaker #0

    Alors comme souvent, la première étape effectivement dans ces études-là, c'est de mettre en place des protocoles. Et donc les protocoles, en tout cas pour les eaux grises, étaient déjà développés au sein de mon laboratoire, qui est un laboratoire très axé sur l'eau. En ce qui concerne par contre les poussières et l'air, il n'y avait pas du tout de protocole qui avait été établi. Et donc, dans un premier temps, je me suis rapproché du CSTB, le Centre scientifique et technique du bâtiment, qui a une expertise sur ces deux matrices-là. Et donc, l'objectif, c'était d'avoir des discussions avec eux pour m'inspirer des protocoles qu'ils ont déjà pu mettre en place à l'échelle nationale. Et quand j'ai pu mettre en place tous ces protocoles, une deuxième étape a consisté à valider. les protocoles, donc à vérifier s'il n'y avait aucune contamination, que ce soit pendant le transport des échantillons ou pendant les phases de laboratoire. Et enfin, de vérifier si on n'avait aucune dégradation des échantillons et des bons rendements d'extraction. Et donc, une fois que les protocoles ont été validés, effectivement, après les prélèvements, on ramène les échantillons en laboratoire. Et la plupart du temps, on les met au froid, soit à 4 degrés pour les eaux grises et sinon à moins 18 degrés pour les poussières et pour l'air intérieur. Et donc, ces échantillons, ils sont préparés pour les poussières, on les tamise et pour les eaux grises, il y a une étape de filtration. Et ensuite, après la préparation, on extrait les substances biocides. Donc là, il y a différentes techniques d'extraction. Il y a l'extraction de surface solide pour les eaux. Il y a l'extraction par micro-ondes et l'extraction par ultrasons pour les poussières et pour l'air intérieur. Et quand on a extrait...

  • Speaker #1

    Excuse-moi, pourquoi faire une extraction par micro-ondes ou par... j'ai oublié...

  • Speaker #0

    Ultrasons ?

  • Speaker #1

    Ou par ultrasons ?

  • Speaker #0

    L'extraction par micro-ondes ou par ultrasons... L'extraction par micro-ondes, elle permet de faire une extraction sur des... sur des échantillons qui sont solides comme les poussières ou comme des filtres d'air intérieur. Ça nous permet d'avoir un mélange de solvants. Typiquement ici, on est sur du méthanol et sur du dichlorométhane qui extraient de manière très efficace les substances. En ce qui concerne l'extraction par ultrasons, là on est plus sur la phase gazeuse. des substances. Et notamment, là, on avait, en fait, dans notre pompe de prélèvement, on avait mis au bout une cartouche qui contenait un filtre et ensuite une mousse. Et c'est cette mousse qui allait capter les polluants dans l'air, dans la phase gazeuse. Et donc, c'est parce qu'on était en phase gazeuse et parce qu'on a testé aussi les deux extractions et qu'on a vu que les ultrasons étaient plus performants pour cette fraction qu'on a décidé d'utiliser cette technique.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Je te laisse reprendre.

  • Speaker #0

    Et donc, suite à l'extraction, l'objectif c'est ensuite d'avoir une étape de concentration des échantillons et on transfère les substances dans un autre solvant. Pourquoi on fait une étape de concentration, et c'est vrai que je n'en ai pas parlé tout à l'heure, c'est que là on est tout le temps avec ce qu'on appelle des micropolluants. Et donc c'est des polluants qui sont présents dans des quantités très faibles. et qui, même à ces quantités très faibles, peuvent être dangereux pour la santé et ou pour l'environnement et qui sont en partie dues aux activités humaines. Et donc, comme c'est des micropolluants, on est obligé de les concentrer pour pouvoir avoir des solutions in fine qui sont plus concentrées en micropolluants et qui seront donc plus facilement détectables. Parce que quand on concentre l'échantillon, on diminue la limite de détection. Et donc, ça m'amène effectivement à l'étape de quantification. qui est réalisé par chromatographie liquide et en spectrométrie de masse en tandem. La partie chromatographie liquide permet de séparer les différents micropolluants, et donc les différentes substances biocides, en fonction de leur taille, de leur masse, de leur charge et de leur polarité. A la sortie de la chromatographie liquide, ils vont être amenés dans la spectrométrie de masse, avec un temps de rétention qui diffère en fonction des substances. Et c'est cette spectrométrie qui va ensuite... quantifier la quantité de chaque substance après la chromatographie liquide. Et donc, à la fin, on obtient les concentrations pour chaque matrice avec une courbe d'étalonnage assez simple. Et voilà, le tour est joué.

  • Speaker #1

    Donc, à l'issue de ces prélèvements... de ces expériences. À l'issue de ces analyses, quels sont les principaux résultats marquants de ta thèse ?

  • Speaker #0

    Le premier résultat, et on avait commencé à en parler un peu tout à l'heure, c'est qu'on a pu comparer de manière quantitative des usages à l'aide de bases de données, et notamment les usages phytopharmaceutiques, biocides et pharmaceutiques. Et on a pu mettre en avant que les usages phytopharmaceutiques et biocides sont majoritaires comparés aux usages pharmaceutiques. sachant qu'on a une dizaine de familles chimiques différentes pour les 30 substances étudiées et que les usages principaux sont pour 5 familles les phytopharmaceutiques et pour les 5 autres les biocides. Ensuite on a pu, comme je l'ai dit aussi tout à l'heure, créer une base de données de 6000 produits qui s'intéressent à la composition en substances biocides pour les 30 substances et donc ça c'est quand même un résultat marquant qu'on va publier. dans des articles scientifiques d'ici peu.

  • Speaker #1

    Et du coup après, les bases de données seront accessibles au grand public ensuite ?

  • Speaker #0

    Tout à fait, l'objectif c'est dans un second temps de publier effectivement cette base de données, que ce soit à l'échelle nationale ou internationale, parce qu'à l'heure actuelle on a très peu d'informations sur ces substances et sur les produits qu'on utilise au quotidien. Et donc c'est aussi pour ça qu'on l'a créée, c'est pour pouvoir avoir des informations factuelles sur les produits qu'on utilise. Et ensuite, on a pu effectivement, après avoir étudié la contamination des logements, vérifier si l'être humain était exposé ou non dans les logements. Et si oui, à quelle concentration et est-ce que c'était dangereux pour la santé ? On a pu mettre en avant que les populations les plus vulnérables étaient, comme souvent dans ce genre d'études, les enfants et les bébés. et que les voies d'introduction majoritaires des substances dans ces bébés et dans ces enfants étaient les voies par ingestion et par voie cutanée, notamment pour deux substances, la terbutrine et le fipronil. La terbutrine qui est un herbicide qui est très utilisé dans le milieu des pesticides. Et le fipronil qui est un médicament insecticide, donc médicament utilisé souvent chez les animaux de compagnie et qui peut aussi être utilisé dans des produits de lutte contre les nuisibles dans la maison.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'après vous avez communiqué les résultats de ta thèse aux participants ?

  • Speaker #0

    Alors l'objectif c'était déjà de les convier à ma soutenance de thèse. Donc effectivement les 39 participants... ont été conviés et certains se sont connectés lors de la soutenance. Et dans un second temps, on va aussi faire un retour, parce qu'il y avait aussi un intérêt de ces participants à avoir un retour sur leur logement, savoir s'il était contaminé ou pas. Donc on va leur envoyer les résultats et on va aussi leur fournir une fiche qui recense un peu une sorte de guide de bonne pratique. que ce soit pour les produits ménagers, pour les produits cosmétiques, etc. Et l'objectif, ce n'est pas non plus de leur dicter tel produit, il faut utiliser telle marque ou quoi, mais c'est plus d'avoir des grandes lignes directrices de comment choisir ces produits et quelles sont les bonnes pratiques en termes de nettoyage chez eux.

  • Speaker #1

    Alors, en quoi penses-tu que tes recherches peuvent contribuer à l'élaboration des politiques publiques ?

  • Speaker #0

    Alors, ce qu'il faut savoir, c'est que durant ma thèse et de manière plus générale dans le cadre du projet Biocidatome, on a été amené à collaborer avec l'ENSES, l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire. Et l'intérêt de cette collaboration, c'était d'avoir l'avis de plusieurs experts sur comment on évalue l'exposition. des humains à des substances polluantes. Et donc, effectivement, ils ont pu nous apporter leur vision des choses, mais ce qu'il faut garder en tête, c'est que c'est une entité qui est vraiment réglementaire. Et donc, leur manière de penser est vraiment calquée sur la réglementation. Et comme je l'ai dit au tout début, on peut avoir une différente... définition du terme biocide si on s'intéresse à la réglementation ou d'un point de vue étymologique. Et eux, vu qu'ils sont vraiment très axés sur la réglementation, quand ils font une évaluation de dangerosité d'un produit, ils s'intéressent uniquement à un produit, un usage et une substance. Sauf que nous, on s'est rendu compte que les substances, elles étaient présentes dans différents types de produits. Et l'avantage qu'on a, c'est que nous, notre approche de l'exposition et des risques, elle prend vraiment en compte toutes les sources. En tout cas, les sources environnementales, parce qu'on n'a pas parlé de l'ingestion par l'alimentation ou par l'eau potable, mais toutes les sources environnementales sont prises en compte. Et par exemple, quand on a une quantité de polluants dans une poussière, on ne sait pas de quel produit il vient. On sait juste que le contaminant est là, à tel moment, et qu'il peut être potentiellement transmis à l'homme. Et donc, effectivement, l'ENSES était intéressée par ces données-là. Peut-être que dans un futur proche, ils pourront se reposer sur ces bases de données et sur les calculs d'exposition pour se dire que tel produit et telle substance est dangereuse pour la santé. Ils ne l'avaient pas forcément vu dans leur approche réglementaire. Donc, leur amener une autre vision des choses.

  • Speaker #1

    Comme tu l'as mentionné dans ce pot. Tu viens tout juste de terminer ta thèse. Que retires-tu de cette expérience enrichissante ?

  • Speaker #0

    La thèse, c'est effectivement, comme tu l'as dit, une expérience très enrichissante, très stimulante d'un point de vue intellectuel. On a l'avantage de côtoyer vraiment des experts dans la thématique dont on est responsable pendant trois ans. Surtout, l'avantage du LESU, c'est qu'on est vraiment un laboratoire qui est à l'interface entre l'école des ponts et l'université de Créteil. Et donc, on a vraiment une richesse qui est encore plus accrue des profils. Et ce que je retiens, c'est énormément de discussions intéressantes sur des thématiques qui sont plus ou moins liées à ma thèse, parce que c'est aussi important des fois de sortir de sa thèse. L'avantage aussi pendant la thèse de commencer à enseigner, c'est quelque chose de très riche. Et puis surtout la volonté de dépasser la limite de ce que l'on peut connaître dans la littérature scientifique, d'identifier les différents manques dans la connaissance actuelle et d'agir vraiment pour combler ces manques. C'est très stimulant. Et c'est d'ailleurs pour ça que je vais continuer dans la recherche avec un post-doctorat qui est toujours à l'école des ponts.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tu as réalisé des activités annexes en parallèle de ta thèse ? Tu parlais tout à l'heure de l'enseignement, mais est-ce que tu faisais autre chose ?

  • Speaker #0

    Oui, je me suis beaucoup investi dans la représentation des doctorants à différentes échelles. J'ai commencé au tout début de ma thèse par être représentant des doctorants dans mon laboratoire. Et cette activité m'a beaucoup plu. Et donc j'ai voulu continuer là-dedans. Donc après, pendant ma deuxième et ma troisième année, j'ai été représentant des doctorants auprès de l'école doctorale SIE, donc Science, Ingénierie, Environnement. Et j'ai aussi été représentant auprès du conseil de la formation doctorale de la COMUE. Ça m'a permis vraiment déjà d'avoir des informations sur comment se passait le doctorat, comment les formations étaient mises en place, et puis d'avoir un rôle à jouer sur... Faire remonter ce que les doctorants émettent comme critique sur les formations, proposer de nouvelles formations et identifier les manques. Typiquement, par exemple, je pense aux étudiants étrangers qui ont très peu de formation en anglais. Et donc, faire remonter tout ça à l'aide de questionnaires de satisfaction. Ça m'a vraiment plu et ça m'a tellement plu que j'ai voulu aller encore plus loin. Et donc, durant ma troisième année, j'ai créé une association. avec deux autres doctorantes de l'école doctorale CS et SVS, donc Culture et Société et Sciences de la Vie et de la Santé, si je ne me trompe pas. Et l'objectif de cette association, c'est de créer du lien entre les doctorants, de promouvoir la thèse auprès des licences et des masters, que ce soit de l'école des ponts, que ce soit de l'UPEC ou de l'UGE, et vraiment de mettre en place des événements. qui permettent aux doctorants d'améliorer leur confort de vie dans leur thèse parce que dans certains laboratoires ça se passe très bien, dans d'autres un peu moins. Et donc peut-être qu'en partageant un peu nos expériences, on pourra faciliter la vie en thèse. Et voilà, j'ai hâte de voir... L'association a été créée très récemment, en fin 2024, et donc lancée officiellement en 2025, donc tout récente. mais j'espère qu'elle va se prolonger et qu'il y aura plein d'événements à venir.

  • Speaker #1

    Et quel est le nom de votre association ?

  • Speaker #0

    L'association s'appelle l'ADEP, c'est l'association des doctorants de l'Est parisien. Voilà, c'est pas très original comme nom, mais c'est efficace.

  • Speaker #1

    C'est ça, c'est efficace. Bon, je te remercie beaucoup, Pierre. Nous arrivons déjà à la fin de ce podcast. Merci d'avoir participé.

  • Speaker #0

    Merci aussi. Et on peut aussi poser la question à la suite de la thèse. On n'en a pas parlé de ça. Ah, c'est bon, du coup ? Ah oui, tu l'as dit.

  • Speaker #1

    Je me suis demandé... Je me suis dit, t'as pas présenté ton parcours, ta formation, est-ce que tu veux le faire ?

  • Speaker #0

    Ah c'est vrai qu'on peut le faire, c'était pas dans la trame mais c'est vrai qu'on peut le faire.

  • Speaker #1

    Du coup, qu'est-ce qui t'a amené à réaliser cette thèse au sein du laboratoire, au sein du LESU ?

  • Speaker #0

    Alors, ce qu'il faut savoir c'est que j'ai eu pas mal de virages dans ma formation. J'ai commencé par faire une prépa BCPST. donc biologie, sciences physiques et sciences de la terre. Et suite à cette prépa, j'ai été accepté à l'UNTPE, donc c'est l'école nationale des travaux publics de l'État qui est basée à Lyon. Et cette école, elle reçoit pour moitié de la promo des élèves fonctionnaires. Et donc j'ai été admis en tant qu'élève fonctionnaire, donc rémunéré pendant ma formation de trois ans. Mais à la suite de ces trois ans, je dois huit ans à l'État. J'ai toujours voulu faire de la recherche et j'ai appris que l'État proposait chaque année 10 bourses pour des élèves fonctionnaires. Chaque année, il y a une liste d'une centaine de sujets de thèse qui sont remontés au ministère. J'ai regardé parmi cette liste de sujets et j'ai vu le sujet sur les substances biocides à l'école des ponts. Forcément, je connaissais l'école des ponts de nom. Donc déjà, ça m'intéressait. Et en plus, le sujet était vraiment très passionnant. Et j'ai fait un entretien avec Adèle et Régis, mes deux encadrants. Ça a tout de suite matché. Je me suis dit que ça pouvait faire une très belle thèse avec un encadrement qui avait l'air superbe et dans une école qui est quand même assez réputée. Et donc, c'est comme ça que je suis arrivé au laboratoire, au environnement, au système urbain.

  • Speaker #1

    Alors, nous arrivons déjà à la fin de ce podcast. Je te remercie, Pierre, d'avoir participé. Oui, OK. Quant à moi, je vous retrouve le mois prochain pour un nouvel épisode du podcast à la rencontre des doctorants, à retrouver sur la revue numérique de l'École nationale des ponts et chaussées. ingenius.ecoldepont.fr Je ne sais pas comment t'arriverais à le faire. C'est du parquet, on va voir. Je n'appuie pas. Non,

  • Speaker #0

    ce n'est pas grave.

  • Speaker #1

    La question sur la formation, on la mettra avant. Oui, oui.

  • Speaker #0

    Sur la suite de la thèse.

  • Speaker #1

    Oui, ok.

Description

Dans ce podcast, Pierre Martinache, qui a effectué son doctorat au sein du Laboratoire Eau Environnement et Systèmes Urbains (LEESU), nous parle de ses recherches sur les biocides présents dans les produits du quotidien. À travers une méthodologie combinant enquêtes et prélèvements réalisés auprès de la population, il évalue la présence de ces contaminants dans nos logements et les risques associés à leur usage. Son objectif : proposer des solutions pour prévenir et limiter l'impact des biocides sur la santé humaine.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Là ça fonctionne.

  • Speaker #1

    1, 2,

  • Speaker #0

    3,

  • Speaker #1

    1,

  • Speaker #0

    2,

  • Speaker #1

    c'est un module. Ouais là c'est un module. Bonjour.

  • Speaker #0

    Oui, est-ce que vous m'entendez ? Ça va bien être bon.

  • Speaker #1

    On t'entend, c'est parfait. Je vais peut-être reprendre souvent, mais c'est pas grave.

  • Speaker #0

    Oui, il n'y a pas de souci.

  • Speaker #1

    Merci. Bonjour, aujourd'hui c'est Mahalia au micro. J'ai le plaisir d'accueillir Pierre Martinache, qui vient tout juste de terminer sa thèse au LESU, le Laboratoire Eau, Environnement et Système Urbain, une thèse qui porte sur les usages domestiques des substances biocides. Bonjour Pierre.

  • Speaker #0

    Bonjour Mahalia.

  • Speaker #1

    Pour commencer, explique-nous ce que sont les biocides et de quelle manière nous nous retrouvons exposés à eux dans notre vie quotidienne.

  • Speaker #0

    Alors les biocides, on peut avoir deux approches des biocides, une approche réglementaire et une approche étymologique. L'approche réglementaire, c'est de se dire que c'est en lien avec la réglementation de biocides et donc il y a des usages bien particuliers. Et l'approche étymologique, c'est tout simplement bio-écide qui signifie tuer le vivant. Et donc nous, avec mes encadrants et dans le cadre de ma thèse, on a voulu prendre la définition étymologique et donc définir les substances biocides comme étant des substances qui tuent la vie. Et donc c'est des substances qu'on retrouve dans plusieurs produits, à savoir des produits cosmétiques, des produits pour les médicaments, des produits phytosanitaires ou encore des produits vétérinaires. Et donc ces produits, on les utilise tous les jours et ils peuvent se retrouver dans des matrices environnementales comme les poussières ou encore l'air et les eaux grises. Les eaux grises, c'est...

  • Speaker #1

    Je voulais te poser la question, qu'est-ce que tu entends par eau grise ?

  • Speaker #0

    Les eaux grises, c'est des eaux domestiques. C'est la somme de toutes les eaux domestiques à l'exception des eaux vannes, qu'on considère comme étant les eaux de toilette. Dans le cadre de ma thèse, on s'intéresse à quatre types d'eaux grises différentes. Les eaux de douche, les eaux de vaisselle manuelle, de nettoyage des sols et de lave-linge.

  • Speaker #1

    D'accord, très bien. Dans ta thèse, tu t'interroges sur les usages domestiques des biocides. Donc du coup ça nécessite de réaliser des prélèvements à domicile, j'imagine. Du coup comment est-ce que tu as procédé pour recruter des volontaires ?

  • Speaker #0

    Juste, je pense qu'il faut qu'on refasse parce que j'ai pas parlé de la liste des substances. Donc à la limite, me poser une question sur la liste des substances.

  • Speaker #1

    Du coup tu as abordé les biocides et tu as dit qu'on les retrouvait dans notre quotidien. Est-ce que nous, par exemple, on peut essayer de les détecter nous-mêmes au supermarché ? Est-ce qu'il existe une liste de substances des biocides ?

  • Speaker #0

    Alors effectivement, à l'échelle européenne, et notamment dans la réglementation biocide, il y a à peu près 350 substances qui existent. C'est une liste qui est énorme, et donc dans le cadre de ma thèse, on a dû la réduire. Et précédemment, dans la thèse de Claudia Payens, qui a été soutenue en 2019, elle avait pu mettre en place une méthode de priorisation. Elle avait pu sortir une liste de 18 substances. Nous, à cette liste de substances, on a ajouté 11 autres substances en fonction de leurs utilisations, notamment en tant que lutte contre les nuisibles et en tant que désinfectant. Dans le cadre de ma thèse, on a une liste de 30 substances à peu près qui sont des substances biocides qu'on utilise tous les jours.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu peux citer quelques noms pour que les auditeurs puissent les repérer ?

  • Speaker #0

    Si jamais les gens vont dans les supermarchés et s'intéressent aux compositions, il y a la famille des isothiazolinones, ce sont des substances qui sont utilisées en tant que conservateurs, notamment dans les lessives ou encore de manière générale dans tous les produits liquides. On a aussi des ammoniums quaternaires comme les benzalconium chlorides qui eux sont des désinfectants, donc sont beaucoup utilisés pour nettoyer les sols et sont aussi utilisés dans les produits... pharmaceutiques pour toute la désinfection sur les plaies, etc. Et après, on a des substances comme les pyrétrinoïdes, qui, elles, sont des substances qui visent à lutter contre les nuisibles, donc les insectes, les fourmis, les araignées, etc.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Donc du coup, dans ta thèse, tu t'interroges sur les usages domestiques des biocides, ce qui nécessite de réaliser des prélèvements au domicile des personnes. Donc comment as-tu procédé pour recruter des volontaires ?

  • Speaker #0

    Alors ce qu'il faut savoir c'est que ma thèse s'inscrit dans un programme plus vaste qui s'appelle le projet Biocidatome. Et donc ce projet, il a été mis en place et porté par Adèle Brissi, qui est mon encadrante de thèse. Ce projet a commencé en 2021 et il a comme objectif d'étudier les biocides dans la sphère domestique de manière générale. Il y a plusieurs étapes. La première étape, c'est d'identifier et de caractériser les différents usages des substances biocides dans les logements. Ensuite, de faire des prélèvements et de vérifier à quel point les environnements intérieurs sont contaminés en substances biocides. Une troisième étape, c'est de voir s'il y a beaucoup d'émissions entre les logements. et le milieu récepteur, notamment via le ruissellement et via les émissions d'eau grise. Et ensuite, tout un pan sur plus les sciences humaines et sociales, où là l'objectif c'est de vérifier pour quelles raisons les gens utilisent ces substances biocides, est-ce qu'on peut induire des changements de pratiques auprès des habitants et quelles sont les méthodes de réduction à la source qui sont les plus efficaces. Notamment, on peut parler de la réduction à la source avec les interdictions réglementaires. ou alors avec les changements de pratiques pour les produits domestiques.

  • Speaker #1

    Comment est-ce que vous avez réussi à caractériser les différents usages des produits biocides ?

  • Speaker #0

    On s'est intéressé aux différents usages de différentes manières. On a tout d'abord voulu recueillir des bases de données, donc là plutôt des usages quantitatifs, sur les différentes réglementations. Il existe plusieurs bases de données qui recensent les ventes. de produits biocides dans la réglementation biocide, dans la réglementation phytopharmaceutique ou encore dans la réglementation pharmaceutique. Et là l'objectif c'était de recueillir des données chiffrées et ensuite de comparer les usages entre eux pour essayer de mettre en avant un usage majoritaire pour telle ou telle substance. Ensuite on a fait une étude plus qualitative où l'objectif c'était de vérifier quelles sont les substances qu'on peut retrouver dans les produits du quotidien. Et donc pour ça on est allé tout simplement dans les supermarchés. Et on a regardé les compositions des produits et on a créé une base de données d'environ 6000 produits, que ce soit des produits cosmétiques, des produits ménagers ou encore des produits de bricolage. Et là, on a pu en ressortir que les familles les plus souvent retrouvées dans les produits du quotidien, c'était la famille des isothiazolinones, donc les fameux conservateurs dont on parlait tout à l'heure, et les ammonium quaternaire, donc les désinfectants.

  • Speaker #1

    Très bien. Et du coup, pour recruter les volontaires, vous avez réalisé un questionnaire ?

  • Speaker #0

    Exactement, on a réalisé un questionnaire qui avait un double objectif. Tout d'abord, de recruter des volontaires pour faire les prélèvements, en leur présentant notre démarche, la volonté d'étudier les substances biocides chez les habitants en Ile-de-France. Et un deuxième aspect, où là l'objectif c'était de recueillir des informations sur les habitants en eux-mêmes. à savoir des informations sur le profil socio-économique des personnes, mais également sur leur perception des risques vis-à-vis des substances bécides et sur les différents usages qu'ils pouvaient faire de ces substances dans leur logement.

  • Speaker #1

    Pourquoi est-ce que vous vous êtes focalisé sur le profil socio-économique des volontaires ?

  • Speaker #0

    Parce que c'est un paramètre qui est très important lorsqu'on fait des études auprès de particuliers. C'est un paramètre qui est souvent mis en avant dans les études et qui peut avoir un impact sur la sensibilisation des gens sur les différents produits qu'ils peuvent utiliser. Et nous, en l'occurrence, l'objectif c'était vraiment d'avoir des profils socio-économiques variés dans un premier temps. Il s'est avéré que lorsqu'on a eu les réponses au questionnaire, on n'a pas pu avoir forcément la variabilité espérée, mais on a quand même pu avoir deux profils types qui émergeaient, un profil plus étudiant. et un profil plus cadre vers la cinquantaine, donc expérimenté.

  • Speaker #1

    Et vous avez réussi à obtenir à peu près combien de réponses, combien de volontaires ?

  • Speaker #0

    Sur ce questionnaire, on a obtenu à peu près 250 réponses qui a été diffusée dans toute la France, où l'objectif c'est d'avoir des profils de français un peu type. Et ensuite on a réduit pour avoir uniquement des réponses en Ile-de-France, donc là on était à 230. Et ensuite, parmi ces 230 personnes, on avait à peu près 70 personnes qui étaient intéressées par faire des prélèvements avec nous.

  • Speaker #1

    Donc quelle est la motivation première des personnes à ouvrir leurs portes ? pour être interrogé à cette étude, pour participer à cette étude ?

  • Speaker #0

    Alors la motivation, au début on ne pouvait pas la voir, parce qu'effectivement on avait juste la réponse des questionnaires. Mais quand on est allé chez les gens et qu'on a pu discuter directement avec eux, on s'est rendu compte qu'il y avait un peu de tout. Il y avait des gens qui étaient très sensibilisés sur ces sujets-là et qui voulaient vérifier si leur logement était contaminé ou non. Il y en avait d'autres qui étaient profanes. et qui n'avaient absolument aucune idée de ce que voulait dire le terme biocide et qui étaient juste très intrigués par nos recherches et voulaient participer. Donc on avait vraiment différents profils et ça a pu nous aider derrière par la suite pour avoir des résultats qui sont quand même assez représentatifs. Même si on n'a quand même que des étudiants et que des cadres, c'était quand même assez représentatif pour ces deux populations-là.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Donc une fois chez les participants... Quelle a été ta procédure pour le prélèvement des échantillons ?

  • Speaker #0

    Ce qu'il faut savoir, c'est que dans un premier temps, les échantillonnages, je les ai fait accompagner. J'encadrais des stagiaires qui ont pu m'aider à aller sur le terrain et à amener tout le matériel nécessaire. Et après, dans un second temps, on va dire que la deuxième moitié du temps, j'ai fait ces prélèvements seuls. Pourquoi c'est important ? C'est qu'il y a beaucoup de matériel à emmener. Et donc c'est pas forcément évident quand on est tout seul d'aller sur le terrain et d'amener tout un tas de glaciers, de bonbonnes de verre ou encore de pompes de prélèvement pour l'air. Et donc pour les prélèvements, ce qu'il faut savoir c'est qu'on s'est intéressé à trois matrices différentes. On s'est intéressé aux poussières, à l'air intérieur et aux eaux grises, dont on parlait tout à l'heure. Le prélèvement d'air, il consiste tout simplement à ramener une pompe de prélèvement chez les gens. Elle a laissé pendant une semaine faire le travail et ensuite on revient, on récupère l'échantillon et on l'amène en laboratoire.

  • Speaker #1

    Pour la pompe, elle prend beaucoup de place ou c'est une toute petite pompe à air ? Je n'arrive pas trop à visualiser sa taille parce qu'une semaine à domicile, c'est beaucoup.

  • Speaker #0

    C'est une très petite pompe qui fait à peu près 50 cm par 30 cm par 40 cm. Et justement, vu qu'on les laissait pendant une semaine chez les gens, ça a été aussi un de nos critères quand on a fait les commandes au tout début, c'était d'avoir la pompe la plus silencieuse possible. Parce que la plupart du temps, quand on fait des prélèvements d'air, c'est des prélèvements qui sont en extérieur, et donc on s'en fiche un peu d'avoir une pompe qui fait énormément de bruit. Par contre, là, l'objectif c'était de la laisser dans une salle de vie, donc soit un salon, soit une chambre, et donc on avait besoin d'avoir une pompe très silencieuse. Et donc là on a pu obtenir une pompe qui avait des décibels assez faibles et qui n'était quasiment pas perceptible à Louis. Et donc pas gênante pour les particuliers, que ce soit en termes de space, de volume et en termes sonores.

  • Speaker #1

    Très bien, je te laisse reprendre pour la suite.

  • Speaker #0

    Et donc pour les échantillons de poussière, c'était les échantillons le plus simple. L'objectif c'était vraiment de demander aux gens s'ils avaient un aspirateur avec sac. Et si c'était le cas, on récupérait le sac de poussière après un mois d'aspiration. Et on le récupérait directement pour l'amener en laboratoire et pour faire les différentes techniques de préparation d'échantillons et d'analyse. Et enfin, pour les eaux grises, là c'était un peu plus compliqué. Il fallait ramener beaucoup de matériel, notamment des... Enfin, ce qu'il faut savoir, c'est que les prélèvements d'eau grise sont faits par les particuliers. On leur amène tout le matériel, on leur fournit également un manuel pour leur expliquer comment faire. Ensuite, on revient une semaine après comme pour l'air et on récupère les échantillons d'air et les échantillons d'eau grise.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu peux nous décrire un petit peu le protocole à suivre pour les eaux grises s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Les échantillons d'eau grise, comme on l'a dit tout à l'heure, il y a quatre types d'eau grise différentes et le protocole varie en fonction du type d'eau. Pour les échantillons de douche, l'objectif c'était de demander aux utilisateurs de prendre une douche dans une baignoire en fermant l'évacuation d'eau. Donc l'objectif c'était vraiment de ne pas changer les habitudes, on leur a bien précisé à chaque fois que ce soit pour l'air ou pour les eaux grises et même pour les poussières, de garder les habitudes, de garder les mêmes produits qu'ils utilisent. Et donc pour les douches, après avoir bouché, ils prenaient toutes leurs... leur douche normalement. Et à la fin, on leur fournissait un gant pour homogénéiser la douche, pour la mélanger. Et ensuite, une bonbonne de verre qui était préalablement lavée en laboratoire et de faire un sous-échantillon d'un litre de cette eau. qui pouvait ensuite être fermé, enfin la bonbonne pouvait être fermée à l'aide d'un bouchon et ensuite d'identifier à l'aide d'une étiquette l'échantillon. Et ensuite du coup c'était pour les différents types d'eau. Pour les eaux de lave-linge, l'objectif était de récolter les eaux d'un cycle de lavage. Donc généralement on demandait aux personnes d'utiliser le cycle habituel de lavage et on récoltait toutes les eaux donc c'était... de manière générale à peu près 40 ou 50 litres dans une énorme bonbonne en verre et ensuite on faisait un sous-échantillon d'un litre également. Pour les eaux de nettoyage des sols, c'était tout simplement, on demandait aux gens de passer la serpillière avec leur seau et ensuite de récupérer un litre de l'eau du seau. Et pour les eaux de vaisselle manuelle, on leur demandait à peu près dans le même style que pour les douches, de boucher leur évier. de faire la vaisselle et ensuite de faire un souci d'échantillon d'un litre de cette eau.

  • Speaker #1

    D'accord, très bien. Et du coup, j'imagine que les personnes enquêtées ont dû avoir des anecdotes marrantes ou des retours intéressants. Est-ce que tu pourrais nous en partager quelques-uns ?

  • Speaker #0

    Je vais peut-être redire la question vu que je l'ai interrompue. Je ne sais pas. Non, c'est bon ? Ok. Du coup, pour les réactions, effectivement, il y a certaines personnes qui étaient étonnées déjà de nous voir, de leur demander de faire les prélèvements chez eux. Et ils ne s'attendaient pas à ce qu'on leur demande jusqu'aux eaux de douche. Après, ce qui était aussi intéressant, c'était d'avoir une discussion sur... sur les produits biocides avec eux, de savoir déjà est-ce qu'ils étaient sensibilisés à ces questions-là, est-ce qu'ils connaissaient ce terme. Et ce qui était aussi intéressant lors de nos échanges, c'est qu'une autre des missions d'aller sur le terrain et de fournir tout le matériel aux particuliers, c'était de recenser tous les produits qui pouvaient contenir des substances biocides. et donc Ce qui était intéressant, c'était de montrer aux gens que finalement, les produits biocides, ils étaient dans des produits dont ils n'avaient pas forcément idée qu'ils pouvaient contenir des substances biocides. Typiquement, la question que je posais aux gens directement, c'était de me montrer les produits qui contenaient selon eux des substances biocides. Et donc là, ils me sortaient généralement des produits ménagers et peut-être quelques produits de lutte contre les nuisibles. Et quand je leur disais dans un second temps que ces produits-là en contenaient, mais qu'on pouvait aussi en avoir dans les produits cosmétiques, dans les produits vétérinaires ou autres, ils étaient assez surpris. Et quand on regardait en effet la composition de ces produits, il est arrivé plusieurs fois qu'on retrouve une des substances que j'étudie. Donc voilà, c'est plutôt ces discussions-là qui étaient assez riches, que ce soit pour eux comme pour moi. qui ont rendu vraiment le terrain très passionnant.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'ils ont eu le réflexe de jeter leurs produits cosmétiques après aux vétérinaires ?

  • Speaker #0

    Alors effectivement, il y a eu énormément de gens qui sont venus me voir après en me demandant si tel ou tel produit était bon ou pas pour eux. La plupart du temps, ce que je leur répondais, c'était que l'important dans ces cas-là, c'est d'avoir des produits les plus simples possibles, entre guillemets. Et même si on ne connaît pas forcément la composition avec les différentes substances qui peuvent être dangereuses ou pas pour la santé et pour l'environnement, à partir du moment où on a des produits avec une liste de substances qui est courte, on part du principe que c'est mieux. Et typiquement, pour les produits ménagers qui est un bon exemple, moi ce que je leur conseille, c'est au lieu de prendre des produits avec des listes de composition très longues, de prendre des produits qui sont vraiment limite purs. Typiquement du vinaigre ménager, du savon noir. Ce sont des produits qui sont très connus, très simples d'utilisation et dont les risques pour la santé et pour l'environnement sont quand même assez faibles.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Est-ce que je pose la question ? Oui, vas-y. J'allais dire, on peut peut-être passer au résultat. Oui. Tu veux la partie laboratoire ?

  • Speaker #0

    Ah oui, la partie laboratoire.

  • Speaker #1

    Oui. Donc... Parlons maintenant de la partie laboratoire de tes recherches. Comment as-tu analysé les différents types d'échantillons, pour rappel eau grise, poussière et air ? Et quels protocoles spécifiques as-tu suivi pour chacun d'entre eux ?

  • Speaker #0

    Alors comme souvent, la première étape effectivement dans ces études-là, c'est de mettre en place des protocoles. Et donc les protocoles, en tout cas pour les eaux grises, étaient déjà développés au sein de mon laboratoire, qui est un laboratoire très axé sur l'eau. En ce qui concerne par contre les poussières et l'air, il n'y avait pas du tout de protocole qui avait été établi. Et donc, dans un premier temps, je me suis rapproché du CSTB, le Centre scientifique et technique du bâtiment, qui a une expertise sur ces deux matrices-là. Et donc, l'objectif, c'était d'avoir des discussions avec eux pour m'inspirer des protocoles qu'ils ont déjà pu mettre en place à l'échelle nationale. Et quand j'ai pu mettre en place tous ces protocoles, une deuxième étape a consisté à valider. les protocoles, donc à vérifier s'il n'y avait aucune contamination, que ce soit pendant le transport des échantillons ou pendant les phases de laboratoire. Et enfin, de vérifier si on n'avait aucune dégradation des échantillons et des bons rendements d'extraction. Et donc, une fois que les protocoles ont été validés, effectivement, après les prélèvements, on ramène les échantillons en laboratoire. Et la plupart du temps, on les met au froid, soit à 4 degrés pour les eaux grises et sinon à moins 18 degrés pour les poussières et pour l'air intérieur. Et donc, ces échantillons, ils sont préparés pour les poussières, on les tamise et pour les eaux grises, il y a une étape de filtration. Et ensuite, après la préparation, on extrait les substances biocides. Donc là, il y a différentes techniques d'extraction. Il y a l'extraction de surface solide pour les eaux. Il y a l'extraction par micro-ondes et l'extraction par ultrasons pour les poussières et pour l'air intérieur. Et quand on a extrait...

  • Speaker #1

    Excuse-moi, pourquoi faire une extraction par micro-ondes ou par... j'ai oublié...

  • Speaker #0

    Ultrasons ?

  • Speaker #1

    Ou par ultrasons ?

  • Speaker #0

    L'extraction par micro-ondes ou par ultrasons... L'extraction par micro-ondes, elle permet de faire une extraction sur des... sur des échantillons qui sont solides comme les poussières ou comme des filtres d'air intérieur. Ça nous permet d'avoir un mélange de solvants. Typiquement ici, on est sur du méthanol et sur du dichlorométhane qui extraient de manière très efficace les substances. En ce qui concerne l'extraction par ultrasons, là on est plus sur la phase gazeuse. des substances. Et notamment, là, on avait, en fait, dans notre pompe de prélèvement, on avait mis au bout une cartouche qui contenait un filtre et ensuite une mousse. Et c'est cette mousse qui allait capter les polluants dans l'air, dans la phase gazeuse. Et donc, c'est parce qu'on était en phase gazeuse et parce qu'on a testé aussi les deux extractions et qu'on a vu que les ultrasons étaient plus performants pour cette fraction qu'on a décidé d'utiliser cette technique.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Je te laisse reprendre.

  • Speaker #0

    Et donc, suite à l'extraction, l'objectif c'est ensuite d'avoir une étape de concentration des échantillons et on transfère les substances dans un autre solvant. Pourquoi on fait une étape de concentration, et c'est vrai que je n'en ai pas parlé tout à l'heure, c'est que là on est tout le temps avec ce qu'on appelle des micropolluants. Et donc c'est des polluants qui sont présents dans des quantités très faibles. et qui, même à ces quantités très faibles, peuvent être dangereux pour la santé et ou pour l'environnement et qui sont en partie dues aux activités humaines. Et donc, comme c'est des micropolluants, on est obligé de les concentrer pour pouvoir avoir des solutions in fine qui sont plus concentrées en micropolluants et qui seront donc plus facilement détectables. Parce que quand on concentre l'échantillon, on diminue la limite de détection. Et donc, ça m'amène effectivement à l'étape de quantification. qui est réalisé par chromatographie liquide et en spectrométrie de masse en tandem. La partie chromatographie liquide permet de séparer les différents micropolluants, et donc les différentes substances biocides, en fonction de leur taille, de leur masse, de leur charge et de leur polarité. A la sortie de la chromatographie liquide, ils vont être amenés dans la spectrométrie de masse, avec un temps de rétention qui diffère en fonction des substances. Et c'est cette spectrométrie qui va ensuite... quantifier la quantité de chaque substance après la chromatographie liquide. Et donc, à la fin, on obtient les concentrations pour chaque matrice avec une courbe d'étalonnage assez simple. Et voilà, le tour est joué.

  • Speaker #1

    Donc, à l'issue de ces prélèvements... de ces expériences. À l'issue de ces analyses, quels sont les principaux résultats marquants de ta thèse ?

  • Speaker #0

    Le premier résultat, et on avait commencé à en parler un peu tout à l'heure, c'est qu'on a pu comparer de manière quantitative des usages à l'aide de bases de données, et notamment les usages phytopharmaceutiques, biocides et pharmaceutiques. Et on a pu mettre en avant que les usages phytopharmaceutiques et biocides sont majoritaires comparés aux usages pharmaceutiques. sachant qu'on a une dizaine de familles chimiques différentes pour les 30 substances étudiées et que les usages principaux sont pour 5 familles les phytopharmaceutiques et pour les 5 autres les biocides. Ensuite on a pu, comme je l'ai dit aussi tout à l'heure, créer une base de données de 6000 produits qui s'intéressent à la composition en substances biocides pour les 30 substances et donc ça c'est quand même un résultat marquant qu'on va publier. dans des articles scientifiques d'ici peu.

  • Speaker #1

    Et du coup après, les bases de données seront accessibles au grand public ensuite ?

  • Speaker #0

    Tout à fait, l'objectif c'est dans un second temps de publier effectivement cette base de données, que ce soit à l'échelle nationale ou internationale, parce qu'à l'heure actuelle on a très peu d'informations sur ces substances et sur les produits qu'on utilise au quotidien. Et donc c'est aussi pour ça qu'on l'a créée, c'est pour pouvoir avoir des informations factuelles sur les produits qu'on utilise. Et ensuite, on a pu effectivement, après avoir étudié la contamination des logements, vérifier si l'être humain était exposé ou non dans les logements. Et si oui, à quelle concentration et est-ce que c'était dangereux pour la santé ? On a pu mettre en avant que les populations les plus vulnérables étaient, comme souvent dans ce genre d'études, les enfants et les bébés. et que les voies d'introduction majoritaires des substances dans ces bébés et dans ces enfants étaient les voies par ingestion et par voie cutanée, notamment pour deux substances, la terbutrine et le fipronil. La terbutrine qui est un herbicide qui est très utilisé dans le milieu des pesticides. Et le fipronil qui est un médicament insecticide, donc médicament utilisé souvent chez les animaux de compagnie et qui peut aussi être utilisé dans des produits de lutte contre les nuisibles dans la maison.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'après vous avez communiqué les résultats de ta thèse aux participants ?

  • Speaker #0

    Alors l'objectif c'était déjà de les convier à ma soutenance de thèse. Donc effectivement les 39 participants... ont été conviés et certains se sont connectés lors de la soutenance. Et dans un second temps, on va aussi faire un retour, parce qu'il y avait aussi un intérêt de ces participants à avoir un retour sur leur logement, savoir s'il était contaminé ou pas. Donc on va leur envoyer les résultats et on va aussi leur fournir une fiche qui recense un peu une sorte de guide de bonne pratique. que ce soit pour les produits ménagers, pour les produits cosmétiques, etc. Et l'objectif, ce n'est pas non plus de leur dicter tel produit, il faut utiliser telle marque ou quoi, mais c'est plus d'avoir des grandes lignes directrices de comment choisir ces produits et quelles sont les bonnes pratiques en termes de nettoyage chez eux.

  • Speaker #1

    Alors, en quoi penses-tu que tes recherches peuvent contribuer à l'élaboration des politiques publiques ?

  • Speaker #0

    Alors, ce qu'il faut savoir, c'est que durant ma thèse et de manière plus générale dans le cadre du projet Biocidatome, on a été amené à collaborer avec l'ENSES, l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire. Et l'intérêt de cette collaboration, c'était d'avoir l'avis de plusieurs experts sur comment on évalue l'exposition. des humains à des substances polluantes. Et donc, effectivement, ils ont pu nous apporter leur vision des choses, mais ce qu'il faut garder en tête, c'est que c'est une entité qui est vraiment réglementaire. Et donc, leur manière de penser est vraiment calquée sur la réglementation. Et comme je l'ai dit au tout début, on peut avoir une différente... définition du terme biocide si on s'intéresse à la réglementation ou d'un point de vue étymologique. Et eux, vu qu'ils sont vraiment très axés sur la réglementation, quand ils font une évaluation de dangerosité d'un produit, ils s'intéressent uniquement à un produit, un usage et une substance. Sauf que nous, on s'est rendu compte que les substances, elles étaient présentes dans différents types de produits. Et l'avantage qu'on a, c'est que nous, notre approche de l'exposition et des risques, elle prend vraiment en compte toutes les sources. En tout cas, les sources environnementales, parce qu'on n'a pas parlé de l'ingestion par l'alimentation ou par l'eau potable, mais toutes les sources environnementales sont prises en compte. Et par exemple, quand on a une quantité de polluants dans une poussière, on ne sait pas de quel produit il vient. On sait juste que le contaminant est là, à tel moment, et qu'il peut être potentiellement transmis à l'homme. Et donc, effectivement, l'ENSES était intéressée par ces données-là. Peut-être que dans un futur proche, ils pourront se reposer sur ces bases de données et sur les calculs d'exposition pour se dire que tel produit et telle substance est dangereuse pour la santé. Ils ne l'avaient pas forcément vu dans leur approche réglementaire. Donc, leur amener une autre vision des choses.

  • Speaker #1

    Comme tu l'as mentionné dans ce pot. Tu viens tout juste de terminer ta thèse. Que retires-tu de cette expérience enrichissante ?

  • Speaker #0

    La thèse, c'est effectivement, comme tu l'as dit, une expérience très enrichissante, très stimulante d'un point de vue intellectuel. On a l'avantage de côtoyer vraiment des experts dans la thématique dont on est responsable pendant trois ans. Surtout, l'avantage du LESU, c'est qu'on est vraiment un laboratoire qui est à l'interface entre l'école des ponts et l'université de Créteil. Et donc, on a vraiment une richesse qui est encore plus accrue des profils. Et ce que je retiens, c'est énormément de discussions intéressantes sur des thématiques qui sont plus ou moins liées à ma thèse, parce que c'est aussi important des fois de sortir de sa thèse. L'avantage aussi pendant la thèse de commencer à enseigner, c'est quelque chose de très riche. Et puis surtout la volonté de dépasser la limite de ce que l'on peut connaître dans la littérature scientifique, d'identifier les différents manques dans la connaissance actuelle et d'agir vraiment pour combler ces manques. C'est très stimulant. Et c'est d'ailleurs pour ça que je vais continuer dans la recherche avec un post-doctorat qui est toujours à l'école des ponts.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tu as réalisé des activités annexes en parallèle de ta thèse ? Tu parlais tout à l'heure de l'enseignement, mais est-ce que tu faisais autre chose ?

  • Speaker #0

    Oui, je me suis beaucoup investi dans la représentation des doctorants à différentes échelles. J'ai commencé au tout début de ma thèse par être représentant des doctorants dans mon laboratoire. Et cette activité m'a beaucoup plu. Et donc j'ai voulu continuer là-dedans. Donc après, pendant ma deuxième et ma troisième année, j'ai été représentant des doctorants auprès de l'école doctorale SIE, donc Science, Ingénierie, Environnement. Et j'ai aussi été représentant auprès du conseil de la formation doctorale de la COMUE. Ça m'a permis vraiment déjà d'avoir des informations sur comment se passait le doctorat, comment les formations étaient mises en place, et puis d'avoir un rôle à jouer sur... Faire remonter ce que les doctorants émettent comme critique sur les formations, proposer de nouvelles formations et identifier les manques. Typiquement, par exemple, je pense aux étudiants étrangers qui ont très peu de formation en anglais. Et donc, faire remonter tout ça à l'aide de questionnaires de satisfaction. Ça m'a vraiment plu et ça m'a tellement plu que j'ai voulu aller encore plus loin. Et donc, durant ma troisième année, j'ai créé une association. avec deux autres doctorantes de l'école doctorale CS et SVS, donc Culture et Société et Sciences de la Vie et de la Santé, si je ne me trompe pas. Et l'objectif de cette association, c'est de créer du lien entre les doctorants, de promouvoir la thèse auprès des licences et des masters, que ce soit de l'école des ponts, que ce soit de l'UPEC ou de l'UGE, et vraiment de mettre en place des événements. qui permettent aux doctorants d'améliorer leur confort de vie dans leur thèse parce que dans certains laboratoires ça se passe très bien, dans d'autres un peu moins. Et donc peut-être qu'en partageant un peu nos expériences, on pourra faciliter la vie en thèse. Et voilà, j'ai hâte de voir... L'association a été créée très récemment, en fin 2024, et donc lancée officiellement en 2025, donc tout récente. mais j'espère qu'elle va se prolonger et qu'il y aura plein d'événements à venir.

  • Speaker #1

    Et quel est le nom de votre association ?

  • Speaker #0

    L'association s'appelle l'ADEP, c'est l'association des doctorants de l'Est parisien. Voilà, c'est pas très original comme nom, mais c'est efficace.

  • Speaker #1

    C'est ça, c'est efficace. Bon, je te remercie beaucoup, Pierre. Nous arrivons déjà à la fin de ce podcast. Merci d'avoir participé.

  • Speaker #0

    Merci aussi. Et on peut aussi poser la question à la suite de la thèse. On n'en a pas parlé de ça. Ah, c'est bon, du coup ? Ah oui, tu l'as dit.

  • Speaker #1

    Je me suis demandé... Je me suis dit, t'as pas présenté ton parcours, ta formation, est-ce que tu veux le faire ?

  • Speaker #0

    Ah c'est vrai qu'on peut le faire, c'était pas dans la trame mais c'est vrai qu'on peut le faire.

  • Speaker #1

    Du coup, qu'est-ce qui t'a amené à réaliser cette thèse au sein du laboratoire, au sein du LESU ?

  • Speaker #0

    Alors, ce qu'il faut savoir c'est que j'ai eu pas mal de virages dans ma formation. J'ai commencé par faire une prépa BCPST. donc biologie, sciences physiques et sciences de la terre. Et suite à cette prépa, j'ai été accepté à l'UNTPE, donc c'est l'école nationale des travaux publics de l'État qui est basée à Lyon. Et cette école, elle reçoit pour moitié de la promo des élèves fonctionnaires. Et donc j'ai été admis en tant qu'élève fonctionnaire, donc rémunéré pendant ma formation de trois ans. Mais à la suite de ces trois ans, je dois huit ans à l'État. J'ai toujours voulu faire de la recherche et j'ai appris que l'État proposait chaque année 10 bourses pour des élèves fonctionnaires. Chaque année, il y a une liste d'une centaine de sujets de thèse qui sont remontés au ministère. J'ai regardé parmi cette liste de sujets et j'ai vu le sujet sur les substances biocides à l'école des ponts. Forcément, je connaissais l'école des ponts de nom. Donc déjà, ça m'intéressait. Et en plus, le sujet était vraiment très passionnant. Et j'ai fait un entretien avec Adèle et Régis, mes deux encadrants. Ça a tout de suite matché. Je me suis dit que ça pouvait faire une très belle thèse avec un encadrement qui avait l'air superbe et dans une école qui est quand même assez réputée. Et donc, c'est comme ça que je suis arrivé au laboratoire, au environnement, au système urbain.

  • Speaker #1

    Alors, nous arrivons déjà à la fin de ce podcast. Je te remercie, Pierre, d'avoir participé. Oui, OK. Quant à moi, je vous retrouve le mois prochain pour un nouvel épisode du podcast à la rencontre des doctorants, à retrouver sur la revue numérique de l'École nationale des ponts et chaussées. ingenius.ecoldepont.fr Je ne sais pas comment t'arriverais à le faire. C'est du parquet, on va voir. Je n'appuie pas. Non,

  • Speaker #0

    ce n'est pas grave.

  • Speaker #1

    La question sur la formation, on la mettra avant. Oui, oui.

  • Speaker #0

    Sur la suite de la thèse.

  • Speaker #1

    Oui, ok.

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Description

Dans ce podcast, Pierre Martinache, qui a effectué son doctorat au sein du Laboratoire Eau Environnement et Systèmes Urbains (LEESU), nous parle de ses recherches sur les biocides présents dans les produits du quotidien. À travers une méthodologie combinant enquêtes et prélèvements réalisés auprès de la population, il évalue la présence de ces contaminants dans nos logements et les risques associés à leur usage. Son objectif : proposer des solutions pour prévenir et limiter l'impact des biocides sur la santé humaine.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Là ça fonctionne.

  • Speaker #1

    1, 2,

  • Speaker #0

    3,

  • Speaker #1

    1,

  • Speaker #0

    2,

  • Speaker #1

    c'est un module. Ouais là c'est un module. Bonjour.

  • Speaker #0

    Oui, est-ce que vous m'entendez ? Ça va bien être bon.

  • Speaker #1

    On t'entend, c'est parfait. Je vais peut-être reprendre souvent, mais c'est pas grave.

  • Speaker #0

    Oui, il n'y a pas de souci.

  • Speaker #1

    Merci. Bonjour, aujourd'hui c'est Mahalia au micro. J'ai le plaisir d'accueillir Pierre Martinache, qui vient tout juste de terminer sa thèse au LESU, le Laboratoire Eau, Environnement et Système Urbain, une thèse qui porte sur les usages domestiques des substances biocides. Bonjour Pierre.

  • Speaker #0

    Bonjour Mahalia.

  • Speaker #1

    Pour commencer, explique-nous ce que sont les biocides et de quelle manière nous nous retrouvons exposés à eux dans notre vie quotidienne.

  • Speaker #0

    Alors les biocides, on peut avoir deux approches des biocides, une approche réglementaire et une approche étymologique. L'approche réglementaire, c'est de se dire que c'est en lien avec la réglementation de biocides et donc il y a des usages bien particuliers. Et l'approche étymologique, c'est tout simplement bio-écide qui signifie tuer le vivant. Et donc nous, avec mes encadrants et dans le cadre de ma thèse, on a voulu prendre la définition étymologique et donc définir les substances biocides comme étant des substances qui tuent la vie. Et donc c'est des substances qu'on retrouve dans plusieurs produits, à savoir des produits cosmétiques, des produits pour les médicaments, des produits phytosanitaires ou encore des produits vétérinaires. Et donc ces produits, on les utilise tous les jours et ils peuvent se retrouver dans des matrices environnementales comme les poussières ou encore l'air et les eaux grises. Les eaux grises, c'est...

  • Speaker #1

    Je voulais te poser la question, qu'est-ce que tu entends par eau grise ?

  • Speaker #0

    Les eaux grises, c'est des eaux domestiques. C'est la somme de toutes les eaux domestiques à l'exception des eaux vannes, qu'on considère comme étant les eaux de toilette. Dans le cadre de ma thèse, on s'intéresse à quatre types d'eaux grises différentes. Les eaux de douche, les eaux de vaisselle manuelle, de nettoyage des sols et de lave-linge.

  • Speaker #1

    D'accord, très bien. Dans ta thèse, tu t'interroges sur les usages domestiques des biocides. Donc du coup ça nécessite de réaliser des prélèvements à domicile, j'imagine. Du coup comment est-ce que tu as procédé pour recruter des volontaires ?

  • Speaker #0

    Juste, je pense qu'il faut qu'on refasse parce que j'ai pas parlé de la liste des substances. Donc à la limite, me poser une question sur la liste des substances.

  • Speaker #1

    Du coup tu as abordé les biocides et tu as dit qu'on les retrouvait dans notre quotidien. Est-ce que nous, par exemple, on peut essayer de les détecter nous-mêmes au supermarché ? Est-ce qu'il existe une liste de substances des biocides ?

  • Speaker #0

    Alors effectivement, à l'échelle européenne, et notamment dans la réglementation biocide, il y a à peu près 350 substances qui existent. C'est une liste qui est énorme, et donc dans le cadre de ma thèse, on a dû la réduire. Et précédemment, dans la thèse de Claudia Payens, qui a été soutenue en 2019, elle avait pu mettre en place une méthode de priorisation. Elle avait pu sortir une liste de 18 substances. Nous, à cette liste de substances, on a ajouté 11 autres substances en fonction de leurs utilisations, notamment en tant que lutte contre les nuisibles et en tant que désinfectant. Dans le cadre de ma thèse, on a une liste de 30 substances à peu près qui sont des substances biocides qu'on utilise tous les jours.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu peux citer quelques noms pour que les auditeurs puissent les repérer ?

  • Speaker #0

    Si jamais les gens vont dans les supermarchés et s'intéressent aux compositions, il y a la famille des isothiazolinones, ce sont des substances qui sont utilisées en tant que conservateurs, notamment dans les lessives ou encore de manière générale dans tous les produits liquides. On a aussi des ammoniums quaternaires comme les benzalconium chlorides qui eux sont des désinfectants, donc sont beaucoup utilisés pour nettoyer les sols et sont aussi utilisés dans les produits... pharmaceutiques pour toute la désinfection sur les plaies, etc. Et après, on a des substances comme les pyrétrinoïdes, qui, elles, sont des substances qui visent à lutter contre les nuisibles, donc les insectes, les fourmis, les araignées, etc.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Donc du coup, dans ta thèse, tu t'interroges sur les usages domestiques des biocides, ce qui nécessite de réaliser des prélèvements au domicile des personnes. Donc comment as-tu procédé pour recruter des volontaires ?

  • Speaker #0

    Alors ce qu'il faut savoir c'est que ma thèse s'inscrit dans un programme plus vaste qui s'appelle le projet Biocidatome. Et donc ce projet, il a été mis en place et porté par Adèle Brissi, qui est mon encadrante de thèse. Ce projet a commencé en 2021 et il a comme objectif d'étudier les biocides dans la sphère domestique de manière générale. Il y a plusieurs étapes. La première étape, c'est d'identifier et de caractériser les différents usages des substances biocides dans les logements. Ensuite, de faire des prélèvements et de vérifier à quel point les environnements intérieurs sont contaminés en substances biocides. Une troisième étape, c'est de voir s'il y a beaucoup d'émissions entre les logements. et le milieu récepteur, notamment via le ruissellement et via les émissions d'eau grise. Et ensuite, tout un pan sur plus les sciences humaines et sociales, où là l'objectif c'est de vérifier pour quelles raisons les gens utilisent ces substances biocides, est-ce qu'on peut induire des changements de pratiques auprès des habitants et quelles sont les méthodes de réduction à la source qui sont les plus efficaces. Notamment, on peut parler de la réduction à la source avec les interdictions réglementaires. ou alors avec les changements de pratiques pour les produits domestiques.

  • Speaker #1

    Comment est-ce que vous avez réussi à caractériser les différents usages des produits biocides ?

  • Speaker #0

    On s'est intéressé aux différents usages de différentes manières. On a tout d'abord voulu recueillir des bases de données, donc là plutôt des usages quantitatifs, sur les différentes réglementations. Il existe plusieurs bases de données qui recensent les ventes. de produits biocides dans la réglementation biocide, dans la réglementation phytopharmaceutique ou encore dans la réglementation pharmaceutique. Et là l'objectif c'était de recueillir des données chiffrées et ensuite de comparer les usages entre eux pour essayer de mettre en avant un usage majoritaire pour telle ou telle substance. Ensuite on a fait une étude plus qualitative où l'objectif c'était de vérifier quelles sont les substances qu'on peut retrouver dans les produits du quotidien. Et donc pour ça on est allé tout simplement dans les supermarchés. Et on a regardé les compositions des produits et on a créé une base de données d'environ 6000 produits, que ce soit des produits cosmétiques, des produits ménagers ou encore des produits de bricolage. Et là, on a pu en ressortir que les familles les plus souvent retrouvées dans les produits du quotidien, c'était la famille des isothiazolinones, donc les fameux conservateurs dont on parlait tout à l'heure, et les ammonium quaternaire, donc les désinfectants.

  • Speaker #1

    Très bien. Et du coup, pour recruter les volontaires, vous avez réalisé un questionnaire ?

  • Speaker #0

    Exactement, on a réalisé un questionnaire qui avait un double objectif. Tout d'abord, de recruter des volontaires pour faire les prélèvements, en leur présentant notre démarche, la volonté d'étudier les substances biocides chez les habitants en Ile-de-France. Et un deuxième aspect, où là l'objectif c'était de recueillir des informations sur les habitants en eux-mêmes. à savoir des informations sur le profil socio-économique des personnes, mais également sur leur perception des risques vis-à-vis des substances bécides et sur les différents usages qu'ils pouvaient faire de ces substances dans leur logement.

  • Speaker #1

    Pourquoi est-ce que vous vous êtes focalisé sur le profil socio-économique des volontaires ?

  • Speaker #0

    Parce que c'est un paramètre qui est très important lorsqu'on fait des études auprès de particuliers. C'est un paramètre qui est souvent mis en avant dans les études et qui peut avoir un impact sur la sensibilisation des gens sur les différents produits qu'ils peuvent utiliser. Et nous, en l'occurrence, l'objectif c'était vraiment d'avoir des profils socio-économiques variés dans un premier temps. Il s'est avéré que lorsqu'on a eu les réponses au questionnaire, on n'a pas pu avoir forcément la variabilité espérée, mais on a quand même pu avoir deux profils types qui émergeaient, un profil plus étudiant. et un profil plus cadre vers la cinquantaine, donc expérimenté.

  • Speaker #1

    Et vous avez réussi à obtenir à peu près combien de réponses, combien de volontaires ?

  • Speaker #0

    Sur ce questionnaire, on a obtenu à peu près 250 réponses qui a été diffusée dans toute la France, où l'objectif c'est d'avoir des profils de français un peu type. Et ensuite on a réduit pour avoir uniquement des réponses en Ile-de-France, donc là on était à 230. Et ensuite, parmi ces 230 personnes, on avait à peu près 70 personnes qui étaient intéressées par faire des prélèvements avec nous.

  • Speaker #1

    Donc quelle est la motivation première des personnes à ouvrir leurs portes ? pour être interrogé à cette étude, pour participer à cette étude ?

  • Speaker #0

    Alors la motivation, au début on ne pouvait pas la voir, parce qu'effectivement on avait juste la réponse des questionnaires. Mais quand on est allé chez les gens et qu'on a pu discuter directement avec eux, on s'est rendu compte qu'il y avait un peu de tout. Il y avait des gens qui étaient très sensibilisés sur ces sujets-là et qui voulaient vérifier si leur logement était contaminé ou non. Il y en avait d'autres qui étaient profanes. et qui n'avaient absolument aucune idée de ce que voulait dire le terme biocide et qui étaient juste très intrigués par nos recherches et voulaient participer. Donc on avait vraiment différents profils et ça a pu nous aider derrière par la suite pour avoir des résultats qui sont quand même assez représentatifs. Même si on n'a quand même que des étudiants et que des cadres, c'était quand même assez représentatif pour ces deux populations-là.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Donc une fois chez les participants... Quelle a été ta procédure pour le prélèvement des échantillons ?

  • Speaker #0

    Ce qu'il faut savoir, c'est que dans un premier temps, les échantillonnages, je les ai fait accompagner. J'encadrais des stagiaires qui ont pu m'aider à aller sur le terrain et à amener tout le matériel nécessaire. Et après, dans un second temps, on va dire que la deuxième moitié du temps, j'ai fait ces prélèvements seuls. Pourquoi c'est important ? C'est qu'il y a beaucoup de matériel à emmener. Et donc c'est pas forcément évident quand on est tout seul d'aller sur le terrain et d'amener tout un tas de glaciers, de bonbonnes de verre ou encore de pompes de prélèvement pour l'air. Et donc pour les prélèvements, ce qu'il faut savoir c'est qu'on s'est intéressé à trois matrices différentes. On s'est intéressé aux poussières, à l'air intérieur et aux eaux grises, dont on parlait tout à l'heure. Le prélèvement d'air, il consiste tout simplement à ramener une pompe de prélèvement chez les gens. Elle a laissé pendant une semaine faire le travail et ensuite on revient, on récupère l'échantillon et on l'amène en laboratoire.

  • Speaker #1

    Pour la pompe, elle prend beaucoup de place ou c'est une toute petite pompe à air ? Je n'arrive pas trop à visualiser sa taille parce qu'une semaine à domicile, c'est beaucoup.

  • Speaker #0

    C'est une très petite pompe qui fait à peu près 50 cm par 30 cm par 40 cm. Et justement, vu qu'on les laissait pendant une semaine chez les gens, ça a été aussi un de nos critères quand on a fait les commandes au tout début, c'était d'avoir la pompe la plus silencieuse possible. Parce que la plupart du temps, quand on fait des prélèvements d'air, c'est des prélèvements qui sont en extérieur, et donc on s'en fiche un peu d'avoir une pompe qui fait énormément de bruit. Par contre, là, l'objectif c'était de la laisser dans une salle de vie, donc soit un salon, soit une chambre, et donc on avait besoin d'avoir une pompe très silencieuse. Et donc là on a pu obtenir une pompe qui avait des décibels assez faibles et qui n'était quasiment pas perceptible à Louis. Et donc pas gênante pour les particuliers, que ce soit en termes de space, de volume et en termes sonores.

  • Speaker #1

    Très bien, je te laisse reprendre pour la suite.

  • Speaker #0

    Et donc pour les échantillons de poussière, c'était les échantillons le plus simple. L'objectif c'était vraiment de demander aux gens s'ils avaient un aspirateur avec sac. Et si c'était le cas, on récupérait le sac de poussière après un mois d'aspiration. Et on le récupérait directement pour l'amener en laboratoire et pour faire les différentes techniques de préparation d'échantillons et d'analyse. Et enfin, pour les eaux grises, là c'était un peu plus compliqué. Il fallait ramener beaucoup de matériel, notamment des... Enfin, ce qu'il faut savoir, c'est que les prélèvements d'eau grise sont faits par les particuliers. On leur amène tout le matériel, on leur fournit également un manuel pour leur expliquer comment faire. Ensuite, on revient une semaine après comme pour l'air et on récupère les échantillons d'air et les échantillons d'eau grise.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu peux nous décrire un petit peu le protocole à suivre pour les eaux grises s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Les échantillons d'eau grise, comme on l'a dit tout à l'heure, il y a quatre types d'eau grise différentes et le protocole varie en fonction du type d'eau. Pour les échantillons de douche, l'objectif c'était de demander aux utilisateurs de prendre une douche dans une baignoire en fermant l'évacuation d'eau. Donc l'objectif c'était vraiment de ne pas changer les habitudes, on leur a bien précisé à chaque fois que ce soit pour l'air ou pour les eaux grises et même pour les poussières, de garder les habitudes, de garder les mêmes produits qu'ils utilisent. Et donc pour les douches, après avoir bouché, ils prenaient toutes leurs... leur douche normalement. Et à la fin, on leur fournissait un gant pour homogénéiser la douche, pour la mélanger. Et ensuite, une bonbonne de verre qui était préalablement lavée en laboratoire et de faire un sous-échantillon d'un litre de cette eau. qui pouvait ensuite être fermé, enfin la bonbonne pouvait être fermée à l'aide d'un bouchon et ensuite d'identifier à l'aide d'une étiquette l'échantillon. Et ensuite du coup c'était pour les différents types d'eau. Pour les eaux de lave-linge, l'objectif était de récolter les eaux d'un cycle de lavage. Donc généralement on demandait aux personnes d'utiliser le cycle habituel de lavage et on récoltait toutes les eaux donc c'était... de manière générale à peu près 40 ou 50 litres dans une énorme bonbonne en verre et ensuite on faisait un sous-échantillon d'un litre également. Pour les eaux de nettoyage des sols, c'était tout simplement, on demandait aux gens de passer la serpillière avec leur seau et ensuite de récupérer un litre de l'eau du seau. Et pour les eaux de vaisselle manuelle, on leur demandait à peu près dans le même style que pour les douches, de boucher leur évier. de faire la vaisselle et ensuite de faire un souci d'échantillon d'un litre de cette eau.

  • Speaker #1

    D'accord, très bien. Et du coup, j'imagine que les personnes enquêtées ont dû avoir des anecdotes marrantes ou des retours intéressants. Est-ce que tu pourrais nous en partager quelques-uns ?

  • Speaker #0

    Je vais peut-être redire la question vu que je l'ai interrompue. Je ne sais pas. Non, c'est bon ? Ok. Du coup, pour les réactions, effectivement, il y a certaines personnes qui étaient étonnées déjà de nous voir, de leur demander de faire les prélèvements chez eux. Et ils ne s'attendaient pas à ce qu'on leur demande jusqu'aux eaux de douche. Après, ce qui était aussi intéressant, c'était d'avoir une discussion sur... sur les produits biocides avec eux, de savoir déjà est-ce qu'ils étaient sensibilisés à ces questions-là, est-ce qu'ils connaissaient ce terme. Et ce qui était aussi intéressant lors de nos échanges, c'est qu'une autre des missions d'aller sur le terrain et de fournir tout le matériel aux particuliers, c'était de recenser tous les produits qui pouvaient contenir des substances biocides. et donc Ce qui était intéressant, c'était de montrer aux gens que finalement, les produits biocides, ils étaient dans des produits dont ils n'avaient pas forcément idée qu'ils pouvaient contenir des substances biocides. Typiquement, la question que je posais aux gens directement, c'était de me montrer les produits qui contenaient selon eux des substances biocides. Et donc là, ils me sortaient généralement des produits ménagers et peut-être quelques produits de lutte contre les nuisibles. Et quand je leur disais dans un second temps que ces produits-là en contenaient, mais qu'on pouvait aussi en avoir dans les produits cosmétiques, dans les produits vétérinaires ou autres, ils étaient assez surpris. Et quand on regardait en effet la composition de ces produits, il est arrivé plusieurs fois qu'on retrouve une des substances que j'étudie. Donc voilà, c'est plutôt ces discussions-là qui étaient assez riches, que ce soit pour eux comme pour moi. qui ont rendu vraiment le terrain très passionnant.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'ils ont eu le réflexe de jeter leurs produits cosmétiques après aux vétérinaires ?

  • Speaker #0

    Alors effectivement, il y a eu énormément de gens qui sont venus me voir après en me demandant si tel ou tel produit était bon ou pas pour eux. La plupart du temps, ce que je leur répondais, c'était que l'important dans ces cas-là, c'est d'avoir des produits les plus simples possibles, entre guillemets. Et même si on ne connaît pas forcément la composition avec les différentes substances qui peuvent être dangereuses ou pas pour la santé et pour l'environnement, à partir du moment où on a des produits avec une liste de substances qui est courte, on part du principe que c'est mieux. Et typiquement, pour les produits ménagers qui est un bon exemple, moi ce que je leur conseille, c'est au lieu de prendre des produits avec des listes de composition très longues, de prendre des produits qui sont vraiment limite purs. Typiquement du vinaigre ménager, du savon noir. Ce sont des produits qui sont très connus, très simples d'utilisation et dont les risques pour la santé et pour l'environnement sont quand même assez faibles.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Est-ce que je pose la question ? Oui, vas-y. J'allais dire, on peut peut-être passer au résultat. Oui. Tu veux la partie laboratoire ?

  • Speaker #0

    Ah oui, la partie laboratoire.

  • Speaker #1

    Oui. Donc... Parlons maintenant de la partie laboratoire de tes recherches. Comment as-tu analysé les différents types d'échantillons, pour rappel eau grise, poussière et air ? Et quels protocoles spécifiques as-tu suivi pour chacun d'entre eux ?

  • Speaker #0

    Alors comme souvent, la première étape effectivement dans ces études-là, c'est de mettre en place des protocoles. Et donc les protocoles, en tout cas pour les eaux grises, étaient déjà développés au sein de mon laboratoire, qui est un laboratoire très axé sur l'eau. En ce qui concerne par contre les poussières et l'air, il n'y avait pas du tout de protocole qui avait été établi. Et donc, dans un premier temps, je me suis rapproché du CSTB, le Centre scientifique et technique du bâtiment, qui a une expertise sur ces deux matrices-là. Et donc, l'objectif, c'était d'avoir des discussions avec eux pour m'inspirer des protocoles qu'ils ont déjà pu mettre en place à l'échelle nationale. Et quand j'ai pu mettre en place tous ces protocoles, une deuxième étape a consisté à valider. les protocoles, donc à vérifier s'il n'y avait aucune contamination, que ce soit pendant le transport des échantillons ou pendant les phases de laboratoire. Et enfin, de vérifier si on n'avait aucune dégradation des échantillons et des bons rendements d'extraction. Et donc, une fois que les protocoles ont été validés, effectivement, après les prélèvements, on ramène les échantillons en laboratoire. Et la plupart du temps, on les met au froid, soit à 4 degrés pour les eaux grises et sinon à moins 18 degrés pour les poussières et pour l'air intérieur. Et donc, ces échantillons, ils sont préparés pour les poussières, on les tamise et pour les eaux grises, il y a une étape de filtration. Et ensuite, après la préparation, on extrait les substances biocides. Donc là, il y a différentes techniques d'extraction. Il y a l'extraction de surface solide pour les eaux. Il y a l'extraction par micro-ondes et l'extraction par ultrasons pour les poussières et pour l'air intérieur. Et quand on a extrait...

  • Speaker #1

    Excuse-moi, pourquoi faire une extraction par micro-ondes ou par... j'ai oublié...

  • Speaker #0

    Ultrasons ?

  • Speaker #1

    Ou par ultrasons ?

  • Speaker #0

    L'extraction par micro-ondes ou par ultrasons... L'extraction par micro-ondes, elle permet de faire une extraction sur des... sur des échantillons qui sont solides comme les poussières ou comme des filtres d'air intérieur. Ça nous permet d'avoir un mélange de solvants. Typiquement ici, on est sur du méthanol et sur du dichlorométhane qui extraient de manière très efficace les substances. En ce qui concerne l'extraction par ultrasons, là on est plus sur la phase gazeuse. des substances. Et notamment, là, on avait, en fait, dans notre pompe de prélèvement, on avait mis au bout une cartouche qui contenait un filtre et ensuite une mousse. Et c'est cette mousse qui allait capter les polluants dans l'air, dans la phase gazeuse. Et donc, c'est parce qu'on était en phase gazeuse et parce qu'on a testé aussi les deux extractions et qu'on a vu que les ultrasons étaient plus performants pour cette fraction qu'on a décidé d'utiliser cette technique.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Je te laisse reprendre.

  • Speaker #0

    Et donc, suite à l'extraction, l'objectif c'est ensuite d'avoir une étape de concentration des échantillons et on transfère les substances dans un autre solvant. Pourquoi on fait une étape de concentration, et c'est vrai que je n'en ai pas parlé tout à l'heure, c'est que là on est tout le temps avec ce qu'on appelle des micropolluants. Et donc c'est des polluants qui sont présents dans des quantités très faibles. et qui, même à ces quantités très faibles, peuvent être dangereux pour la santé et ou pour l'environnement et qui sont en partie dues aux activités humaines. Et donc, comme c'est des micropolluants, on est obligé de les concentrer pour pouvoir avoir des solutions in fine qui sont plus concentrées en micropolluants et qui seront donc plus facilement détectables. Parce que quand on concentre l'échantillon, on diminue la limite de détection. Et donc, ça m'amène effectivement à l'étape de quantification. qui est réalisé par chromatographie liquide et en spectrométrie de masse en tandem. La partie chromatographie liquide permet de séparer les différents micropolluants, et donc les différentes substances biocides, en fonction de leur taille, de leur masse, de leur charge et de leur polarité. A la sortie de la chromatographie liquide, ils vont être amenés dans la spectrométrie de masse, avec un temps de rétention qui diffère en fonction des substances. Et c'est cette spectrométrie qui va ensuite... quantifier la quantité de chaque substance après la chromatographie liquide. Et donc, à la fin, on obtient les concentrations pour chaque matrice avec une courbe d'étalonnage assez simple. Et voilà, le tour est joué.

  • Speaker #1

    Donc, à l'issue de ces prélèvements... de ces expériences. À l'issue de ces analyses, quels sont les principaux résultats marquants de ta thèse ?

  • Speaker #0

    Le premier résultat, et on avait commencé à en parler un peu tout à l'heure, c'est qu'on a pu comparer de manière quantitative des usages à l'aide de bases de données, et notamment les usages phytopharmaceutiques, biocides et pharmaceutiques. Et on a pu mettre en avant que les usages phytopharmaceutiques et biocides sont majoritaires comparés aux usages pharmaceutiques. sachant qu'on a une dizaine de familles chimiques différentes pour les 30 substances étudiées et que les usages principaux sont pour 5 familles les phytopharmaceutiques et pour les 5 autres les biocides. Ensuite on a pu, comme je l'ai dit aussi tout à l'heure, créer une base de données de 6000 produits qui s'intéressent à la composition en substances biocides pour les 30 substances et donc ça c'est quand même un résultat marquant qu'on va publier. dans des articles scientifiques d'ici peu.

  • Speaker #1

    Et du coup après, les bases de données seront accessibles au grand public ensuite ?

  • Speaker #0

    Tout à fait, l'objectif c'est dans un second temps de publier effectivement cette base de données, que ce soit à l'échelle nationale ou internationale, parce qu'à l'heure actuelle on a très peu d'informations sur ces substances et sur les produits qu'on utilise au quotidien. Et donc c'est aussi pour ça qu'on l'a créée, c'est pour pouvoir avoir des informations factuelles sur les produits qu'on utilise. Et ensuite, on a pu effectivement, après avoir étudié la contamination des logements, vérifier si l'être humain était exposé ou non dans les logements. Et si oui, à quelle concentration et est-ce que c'était dangereux pour la santé ? On a pu mettre en avant que les populations les plus vulnérables étaient, comme souvent dans ce genre d'études, les enfants et les bébés. et que les voies d'introduction majoritaires des substances dans ces bébés et dans ces enfants étaient les voies par ingestion et par voie cutanée, notamment pour deux substances, la terbutrine et le fipronil. La terbutrine qui est un herbicide qui est très utilisé dans le milieu des pesticides. Et le fipronil qui est un médicament insecticide, donc médicament utilisé souvent chez les animaux de compagnie et qui peut aussi être utilisé dans des produits de lutte contre les nuisibles dans la maison.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'après vous avez communiqué les résultats de ta thèse aux participants ?

  • Speaker #0

    Alors l'objectif c'était déjà de les convier à ma soutenance de thèse. Donc effectivement les 39 participants... ont été conviés et certains se sont connectés lors de la soutenance. Et dans un second temps, on va aussi faire un retour, parce qu'il y avait aussi un intérêt de ces participants à avoir un retour sur leur logement, savoir s'il était contaminé ou pas. Donc on va leur envoyer les résultats et on va aussi leur fournir une fiche qui recense un peu une sorte de guide de bonne pratique. que ce soit pour les produits ménagers, pour les produits cosmétiques, etc. Et l'objectif, ce n'est pas non plus de leur dicter tel produit, il faut utiliser telle marque ou quoi, mais c'est plus d'avoir des grandes lignes directrices de comment choisir ces produits et quelles sont les bonnes pratiques en termes de nettoyage chez eux.

  • Speaker #1

    Alors, en quoi penses-tu que tes recherches peuvent contribuer à l'élaboration des politiques publiques ?

  • Speaker #0

    Alors, ce qu'il faut savoir, c'est que durant ma thèse et de manière plus générale dans le cadre du projet Biocidatome, on a été amené à collaborer avec l'ENSES, l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire. Et l'intérêt de cette collaboration, c'était d'avoir l'avis de plusieurs experts sur comment on évalue l'exposition. des humains à des substances polluantes. Et donc, effectivement, ils ont pu nous apporter leur vision des choses, mais ce qu'il faut garder en tête, c'est que c'est une entité qui est vraiment réglementaire. Et donc, leur manière de penser est vraiment calquée sur la réglementation. Et comme je l'ai dit au tout début, on peut avoir une différente... définition du terme biocide si on s'intéresse à la réglementation ou d'un point de vue étymologique. Et eux, vu qu'ils sont vraiment très axés sur la réglementation, quand ils font une évaluation de dangerosité d'un produit, ils s'intéressent uniquement à un produit, un usage et une substance. Sauf que nous, on s'est rendu compte que les substances, elles étaient présentes dans différents types de produits. Et l'avantage qu'on a, c'est que nous, notre approche de l'exposition et des risques, elle prend vraiment en compte toutes les sources. En tout cas, les sources environnementales, parce qu'on n'a pas parlé de l'ingestion par l'alimentation ou par l'eau potable, mais toutes les sources environnementales sont prises en compte. Et par exemple, quand on a une quantité de polluants dans une poussière, on ne sait pas de quel produit il vient. On sait juste que le contaminant est là, à tel moment, et qu'il peut être potentiellement transmis à l'homme. Et donc, effectivement, l'ENSES était intéressée par ces données-là. Peut-être que dans un futur proche, ils pourront se reposer sur ces bases de données et sur les calculs d'exposition pour se dire que tel produit et telle substance est dangereuse pour la santé. Ils ne l'avaient pas forcément vu dans leur approche réglementaire. Donc, leur amener une autre vision des choses.

  • Speaker #1

    Comme tu l'as mentionné dans ce pot. Tu viens tout juste de terminer ta thèse. Que retires-tu de cette expérience enrichissante ?

  • Speaker #0

    La thèse, c'est effectivement, comme tu l'as dit, une expérience très enrichissante, très stimulante d'un point de vue intellectuel. On a l'avantage de côtoyer vraiment des experts dans la thématique dont on est responsable pendant trois ans. Surtout, l'avantage du LESU, c'est qu'on est vraiment un laboratoire qui est à l'interface entre l'école des ponts et l'université de Créteil. Et donc, on a vraiment une richesse qui est encore plus accrue des profils. Et ce que je retiens, c'est énormément de discussions intéressantes sur des thématiques qui sont plus ou moins liées à ma thèse, parce que c'est aussi important des fois de sortir de sa thèse. L'avantage aussi pendant la thèse de commencer à enseigner, c'est quelque chose de très riche. Et puis surtout la volonté de dépasser la limite de ce que l'on peut connaître dans la littérature scientifique, d'identifier les différents manques dans la connaissance actuelle et d'agir vraiment pour combler ces manques. C'est très stimulant. Et c'est d'ailleurs pour ça que je vais continuer dans la recherche avec un post-doctorat qui est toujours à l'école des ponts.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tu as réalisé des activités annexes en parallèle de ta thèse ? Tu parlais tout à l'heure de l'enseignement, mais est-ce que tu faisais autre chose ?

  • Speaker #0

    Oui, je me suis beaucoup investi dans la représentation des doctorants à différentes échelles. J'ai commencé au tout début de ma thèse par être représentant des doctorants dans mon laboratoire. Et cette activité m'a beaucoup plu. Et donc j'ai voulu continuer là-dedans. Donc après, pendant ma deuxième et ma troisième année, j'ai été représentant des doctorants auprès de l'école doctorale SIE, donc Science, Ingénierie, Environnement. Et j'ai aussi été représentant auprès du conseil de la formation doctorale de la COMUE. Ça m'a permis vraiment déjà d'avoir des informations sur comment se passait le doctorat, comment les formations étaient mises en place, et puis d'avoir un rôle à jouer sur... Faire remonter ce que les doctorants émettent comme critique sur les formations, proposer de nouvelles formations et identifier les manques. Typiquement, par exemple, je pense aux étudiants étrangers qui ont très peu de formation en anglais. Et donc, faire remonter tout ça à l'aide de questionnaires de satisfaction. Ça m'a vraiment plu et ça m'a tellement plu que j'ai voulu aller encore plus loin. Et donc, durant ma troisième année, j'ai créé une association. avec deux autres doctorantes de l'école doctorale CS et SVS, donc Culture et Société et Sciences de la Vie et de la Santé, si je ne me trompe pas. Et l'objectif de cette association, c'est de créer du lien entre les doctorants, de promouvoir la thèse auprès des licences et des masters, que ce soit de l'école des ponts, que ce soit de l'UPEC ou de l'UGE, et vraiment de mettre en place des événements. qui permettent aux doctorants d'améliorer leur confort de vie dans leur thèse parce que dans certains laboratoires ça se passe très bien, dans d'autres un peu moins. Et donc peut-être qu'en partageant un peu nos expériences, on pourra faciliter la vie en thèse. Et voilà, j'ai hâte de voir... L'association a été créée très récemment, en fin 2024, et donc lancée officiellement en 2025, donc tout récente. mais j'espère qu'elle va se prolonger et qu'il y aura plein d'événements à venir.

  • Speaker #1

    Et quel est le nom de votre association ?

  • Speaker #0

    L'association s'appelle l'ADEP, c'est l'association des doctorants de l'Est parisien. Voilà, c'est pas très original comme nom, mais c'est efficace.

  • Speaker #1

    C'est ça, c'est efficace. Bon, je te remercie beaucoup, Pierre. Nous arrivons déjà à la fin de ce podcast. Merci d'avoir participé.

  • Speaker #0

    Merci aussi. Et on peut aussi poser la question à la suite de la thèse. On n'en a pas parlé de ça. Ah, c'est bon, du coup ? Ah oui, tu l'as dit.

  • Speaker #1

    Je me suis demandé... Je me suis dit, t'as pas présenté ton parcours, ta formation, est-ce que tu veux le faire ?

  • Speaker #0

    Ah c'est vrai qu'on peut le faire, c'était pas dans la trame mais c'est vrai qu'on peut le faire.

  • Speaker #1

    Du coup, qu'est-ce qui t'a amené à réaliser cette thèse au sein du laboratoire, au sein du LESU ?

  • Speaker #0

    Alors, ce qu'il faut savoir c'est que j'ai eu pas mal de virages dans ma formation. J'ai commencé par faire une prépa BCPST. donc biologie, sciences physiques et sciences de la terre. Et suite à cette prépa, j'ai été accepté à l'UNTPE, donc c'est l'école nationale des travaux publics de l'État qui est basée à Lyon. Et cette école, elle reçoit pour moitié de la promo des élèves fonctionnaires. Et donc j'ai été admis en tant qu'élève fonctionnaire, donc rémunéré pendant ma formation de trois ans. Mais à la suite de ces trois ans, je dois huit ans à l'État. J'ai toujours voulu faire de la recherche et j'ai appris que l'État proposait chaque année 10 bourses pour des élèves fonctionnaires. Chaque année, il y a une liste d'une centaine de sujets de thèse qui sont remontés au ministère. J'ai regardé parmi cette liste de sujets et j'ai vu le sujet sur les substances biocides à l'école des ponts. Forcément, je connaissais l'école des ponts de nom. Donc déjà, ça m'intéressait. Et en plus, le sujet était vraiment très passionnant. Et j'ai fait un entretien avec Adèle et Régis, mes deux encadrants. Ça a tout de suite matché. Je me suis dit que ça pouvait faire une très belle thèse avec un encadrement qui avait l'air superbe et dans une école qui est quand même assez réputée. Et donc, c'est comme ça que je suis arrivé au laboratoire, au environnement, au système urbain.

  • Speaker #1

    Alors, nous arrivons déjà à la fin de ce podcast. Je te remercie, Pierre, d'avoir participé. Oui, OK. Quant à moi, je vous retrouve le mois prochain pour un nouvel épisode du podcast à la rencontre des doctorants, à retrouver sur la revue numérique de l'École nationale des ponts et chaussées. ingenius.ecoldepont.fr Je ne sais pas comment t'arriverais à le faire. C'est du parquet, on va voir. Je n'appuie pas. Non,

  • Speaker #0

    ce n'est pas grave.

  • Speaker #1

    La question sur la formation, on la mettra avant. Oui, oui.

  • Speaker #0

    Sur la suite de la thèse.

  • Speaker #1

    Oui, ok.

Description

Dans ce podcast, Pierre Martinache, qui a effectué son doctorat au sein du Laboratoire Eau Environnement et Systèmes Urbains (LEESU), nous parle de ses recherches sur les biocides présents dans les produits du quotidien. À travers une méthodologie combinant enquêtes et prélèvements réalisés auprès de la population, il évalue la présence de ces contaminants dans nos logements et les risques associés à leur usage. Son objectif : proposer des solutions pour prévenir et limiter l'impact des biocides sur la santé humaine.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Là ça fonctionne.

  • Speaker #1

    1, 2,

  • Speaker #0

    3,

  • Speaker #1

    1,

  • Speaker #0

    2,

  • Speaker #1

    c'est un module. Ouais là c'est un module. Bonjour.

  • Speaker #0

    Oui, est-ce que vous m'entendez ? Ça va bien être bon.

  • Speaker #1

    On t'entend, c'est parfait. Je vais peut-être reprendre souvent, mais c'est pas grave.

  • Speaker #0

    Oui, il n'y a pas de souci.

  • Speaker #1

    Merci. Bonjour, aujourd'hui c'est Mahalia au micro. J'ai le plaisir d'accueillir Pierre Martinache, qui vient tout juste de terminer sa thèse au LESU, le Laboratoire Eau, Environnement et Système Urbain, une thèse qui porte sur les usages domestiques des substances biocides. Bonjour Pierre.

  • Speaker #0

    Bonjour Mahalia.

  • Speaker #1

    Pour commencer, explique-nous ce que sont les biocides et de quelle manière nous nous retrouvons exposés à eux dans notre vie quotidienne.

  • Speaker #0

    Alors les biocides, on peut avoir deux approches des biocides, une approche réglementaire et une approche étymologique. L'approche réglementaire, c'est de se dire que c'est en lien avec la réglementation de biocides et donc il y a des usages bien particuliers. Et l'approche étymologique, c'est tout simplement bio-écide qui signifie tuer le vivant. Et donc nous, avec mes encadrants et dans le cadre de ma thèse, on a voulu prendre la définition étymologique et donc définir les substances biocides comme étant des substances qui tuent la vie. Et donc c'est des substances qu'on retrouve dans plusieurs produits, à savoir des produits cosmétiques, des produits pour les médicaments, des produits phytosanitaires ou encore des produits vétérinaires. Et donc ces produits, on les utilise tous les jours et ils peuvent se retrouver dans des matrices environnementales comme les poussières ou encore l'air et les eaux grises. Les eaux grises, c'est...

  • Speaker #1

    Je voulais te poser la question, qu'est-ce que tu entends par eau grise ?

  • Speaker #0

    Les eaux grises, c'est des eaux domestiques. C'est la somme de toutes les eaux domestiques à l'exception des eaux vannes, qu'on considère comme étant les eaux de toilette. Dans le cadre de ma thèse, on s'intéresse à quatre types d'eaux grises différentes. Les eaux de douche, les eaux de vaisselle manuelle, de nettoyage des sols et de lave-linge.

  • Speaker #1

    D'accord, très bien. Dans ta thèse, tu t'interroges sur les usages domestiques des biocides. Donc du coup ça nécessite de réaliser des prélèvements à domicile, j'imagine. Du coup comment est-ce que tu as procédé pour recruter des volontaires ?

  • Speaker #0

    Juste, je pense qu'il faut qu'on refasse parce que j'ai pas parlé de la liste des substances. Donc à la limite, me poser une question sur la liste des substances.

  • Speaker #1

    Du coup tu as abordé les biocides et tu as dit qu'on les retrouvait dans notre quotidien. Est-ce que nous, par exemple, on peut essayer de les détecter nous-mêmes au supermarché ? Est-ce qu'il existe une liste de substances des biocides ?

  • Speaker #0

    Alors effectivement, à l'échelle européenne, et notamment dans la réglementation biocide, il y a à peu près 350 substances qui existent. C'est une liste qui est énorme, et donc dans le cadre de ma thèse, on a dû la réduire. Et précédemment, dans la thèse de Claudia Payens, qui a été soutenue en 2019, elle avait pu mettre en place une méthode de priorisation. Elle avait pu sortir une liste de 18 substances. Nous, à cette liste de substances, on a ajouté 11 autres substances en fonction de leurs utilisations, notamment en tant que lutte contre les nuisibles et en tant que désinfectant. Dans le cadre de ma thèse, on a une liste de 30 substances à peu près qui sont des substances biocides qu'on utilise tous les jours.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu peux citer quelques noms pour que les auditeurs puissent les repérer ?

  • Speaker #0

    Si jamais les gens vont dans les supermarchés et s'intéressent aux compositions, il y a la famille des isothiazolinones, ce sont des substances qui sont utilisées en tant que conservateurs, notamment dans les lessives ou encore de manière générale dans tous les produits liquides. On a aussi des ammoniums quaternaires comme les benzalconium chlorides qui eux sont des désinfectants, donc sont beaucoup utilisés pour nettoyer les sols et sont aussi utilisés dans les produits... pharmaceutiques pour toute la désinfection sur les plaies, etc. Et après, on a des substances comme les pyrétrinoïdes, qui, elles, sont des substances qui visent à lutter contre les nuisibles, donc les insectes, les fourmis, les araignées, etc.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Donc du coup, dans ta thèse, tu t'interroges sur les usages domestiques des biocides, ce qui nécessite de réaliser des prélèvements au domicile des personnes. Donc comment as-tu procédé pour recruter des volontaires ?

  • Speaker #0

    Alors ce qu'il faut savoir c'est que ma thèse s'inscrit dans un programme plus vaste qui s'appelle le projet Biocidatome. Et donc ce projet, il a été mis en place et porté par Adèle Brissi, qui est mon encadrante de thèse. Ce projet a commencé en 2021 et il a comme objectif d'étudier les biocides dans la sphère domestique de manière générale. Il y a plusieurs étapes. La première étape, c'est d'identifier et de caractériser les différents usages des substances biocides dans les logements. Ensuite, de faire des prélèvements et de vérifier à quel point les environnements intérieurs sont contaminés en substances biocides. Une troisième étape, c'est de voir s'il y a beaucoup d'émissions entre les logements. et le milieu récepteur, notamment via le ruissellement et via les émissions d'eau grise. Et ensuite, tout un pan sur plus les sciences humaines et sociales, où là l'objectif c'est de vérifier pour quelles raisons les gens utilisent ces substances biocides, est-ce qu'on peut induire des changements de pratiques auprès des habitants et quelles sont les méthodes de réduction à la source qui sont les plus efficaces. Notamment, on peut parler de la réduction à la source avec les interdictions réglementaires. ou alors avec les changements de pratiques pour les produits domestiques.

  • Speaker #1

    Comment est-ce que vous avez réussi à caractériser les différents usages des produits biocides ?

  • Speaker #0

    On s'est intéressé aux différents usages de différentes manières. On a tout d'abord voulu recueillir des bases de données, donc là plutôt des usages quantitatifs, sur les différentes réglementations. Il existe plusieurs bases de données qui recensent les ventes. de produits biocides dans la réglementation biocide, dans la réglementation phytopharmaceutique ou encore dans la réglementation pharmaceutique. Et là l'objectif c'était de recueillir des données chiffrées et ensuite de comparer les usages entre eux pour essayer de mettre en avant un usage majoritaire pour telle ou telle substance. Ensuite on a fait une étude plus qualitative où l'objectif c'était de vérifier quelles sont les substances qu'on peut retrouver dans les produits du quotidien. Et donc pour ça on est allé tout simplement dans les supermarchés. Et on a regardé les compositions des produits et on a créé une base de données d'environ 6000 produits, que ce soit des produits cosmétiques, des produits ménagers ou encore des produits de bricolage. Et là, on a pu en ressortir que les familles les plus souvent retrouvées dans les produits du quotidien, c'était la famille des isothiazolinones, donc les fameux conservateurs dont on parlait tout à l'heure, et les ammonium quaternaire, donc les désinfectants.

  • Speaker #1

    Très bien. Et du coup, pour recruter les volontaires, vous avez réalisé un questionnaire ?

  • Speaker #0

    Exactement, on a réalisé un questionnaire qui avait un double objectif. Tout d'abord, de recruter des volontaires pour faire les prélèvements, en leur présentant notre démarche, la volonté d'étudier les substances biocides chez les habitants en Ile-de-France. Et un deuxième aspect, où là l'objectif c'était de recueillir des informations sur les habitants en eux-mêmes. à savoir des informations sur le profil socio-économique des personnes, mais également sur leur perception des risques vis-à-vis des substances bécides et sur les différents usages qu'ils pouvaient faire de ces substances dans leur logement.

  • Speaker #1

    Pourquoi est-ce que vous vous êtes focalisé sur le profil socio-économique des volontaires ?

  • Speaker #0

    Parce que c'est un paramètre qui est très important lorsqu'on fait des études auprès de particuliers. C'est un paramètre qui est souvent mis en avant dans les études et qui peut avoir un impact sur la sensibilisation des gens sur les différents produits qu'ils peuvent utiliser. Et nous, en l'occurrence, l'objectif c'était vraiment d'avoir des profils socio-économiques variés dans un premier temps. Il s'est avéré que lorsqu'on a eu les réponses au questionnaire, on n'a pas pu avoir forcément la variabilité espérée, mais on a quand même pu avoir deux profils types qui émergeaient, un profil plus étudiant. et un profil plus cadre vers la cinquantaine, donc expérimenté.

  • Speaker #1

    Et vous avez réussi à obtenir à peu près combien de réponses, combien de volontaires ?

  • Speaker #0

    Sur ce questionnaire, on a obtenu à peu près 250 réponses qui a été diffusée dans toute la France, où l'objectif c'est d'avoir des profils de français un peu type. Et ensuite on a réduit pour avoir uniquement des réponses en Ile-de-France, donc là on était à 230. Et ensuite, parmi ces 230 personnes, on avait à peu près 70 personnes qui étaient intéressées par faire des prélèvements avec nous.

  • Speaker #1

    Donc quelle est la motivation première des personnes à ouvrir leurs portes ? pour être interrogé à cette étude, pour participer à cette étude ?

  • Speaker #0

    Alors la motivation, au début on ne pouvait pas la voir, parce qu'effectivement on avait juste la réponse des questionnaires. Mais quand on est allé chez les gens et qu'on a pu discuter directement avec eux, on s'est rendu compte qu'il y avait un peu de tout. Il y avait des gens qui étaient très sensibilisés sur ces sujets-là et qui voulaient vérifier si leur logement était contaminé ou non. Il y en avait d'autres qui étaient profanes. et qui n'avaient absolument aucune idée de ce que voulait dire le terme biocide et qui étaient juste très intrigués par nos recherches et voulaient participer. Donc on avait vraiment différents profils et ça a pu nous aider derrière par la suite pour avoir des résultats qui sont quand même assez représentatifs. Même si on n'a quand même que des étudiants et que des cadres, c'était quand même assez représentatif pour ces deux populations-là.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Donc une fois chez les participants... Quelle a été ta procédure pour le prélèvement des échantillons ?

  • Speaker #0

    Ce qu'il faut savoir, c'est que dans un premier temps, les échantillonnages, je les ai fait accompagner. J'encadrais des stagiaires qui ont pu m'aider à aller sur le terrain et à amener tout le matériel nécessaire. Et après, dans un second temps, on va dire que la deuxième moitié du temps, j'ai fait ces prélèvements seuls. Pourquoi c'est important ? C'est qu'il y a beaucoup de matériel à emmener. Et donc c'est pas forcément évident quand on est tout seul d'aller sur le terrain et d'amener tout un tas de glaciers, de bonbonnes de verre ou encore de pompes de prélèvement pour l'air. Et donc pour les prélèvements, ce qu'il faut savoir c'est qu'on s'est intéressé à trois matrices différentes. On s'est intéressé aux poussières, à l'air intérieur et aux eaux grises, dont on parlait tout à l'heure. Le prélèvement d'air, il consiste tout simplement à ramener une pompe de prélèvement chez les gens. Elle a laissé pendant une semaine faire le travail et ensuite on revient, on récupère l'échantillon et on l'amène en laboratoire.

  • Speaker #1

    Pour la pompe, elle prend beaucoup de place ou c'est une toute petite pompe à air ? Je n'arrive pas trop à visualiser sa taille parce qu'une semaine à domicile, c'est beaucoup.

  • Speaker #0

    C'est une très petite pompe qui fait à peu près 50 cm par 30 cm par 40 cm. Et justement, vu qu'on les laissait pendant une semaine chez les gens, ça a été aussi un de nos critères quand on a fait les commandes au tout début, c'était d'avoir la pompe la plus silencieuse possible. Parce que la plupart du temps, quand on fait des prélèvements d'air, c'est des prélèvements qui sont en extérieur, et donc on s'en fiche un peu d'avoir une pompe qui fait énormément de bruit. Par contre, là, l'objectif c'était de la laisser dans une salle de vie, donc soit un salon, soit une chambre, et donc on avait besoin d'avoir une pompe très silencieuse. Et donc là on a pu obtenir une pompe qui avait des décibels assez faibles et qui n'était quasiment pas perceptible à Louis. Et donc pas gênante pour les particuliers, que ce soit en termes de space, de volume et en termes sonores.

  • Speaker #1

    Très bien, je te laisse reprendre pour la suite.

  • Speaker #0

    Et donc pour les échantillons de poussière, c'était les échantillons le plus simple. L'objectif c'était vraiment de demander aux gens s'ils avaient un aspirateur avec sac. Et si c'était le cas, on récupérait le sac de poussière après un mois d'aspiration. Et on le récupérait directement pour l'amener en laboratoire et pour faire les différentes techniques de préparation d'échantillons et d'analyse. Et enfin, pour les eaux grises, là c'était un peu plus compliqué. Il fallait ramener beaucoup de matériel, notamment des... Enfin, ce qu'il faut savoir, c'est que les prélèvements d'eau grise sont faits par les particuliers. On leur amène tout le matériel, on leur fournit également un manuel pour leur expliquer comment faire. Ensuite, on revient une semaine après comme pour l'air et on récupère les échantillons d'air et les échantillons d'eau grise.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu peux nous décrire un petit peu le protocole à suivre pour les eaux grises s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Les échantillons d'eau grise, comme on l'a dit tout à l'heure, il y a quatre types d'eau grise différentes et le protocole varie en fonction du type d'eau. Pour les échantillons de douche, l'objectif c'était de demander aux utilisateurs de prendre une douche dans une baignoire en fermant l'évacuation d'eau. Donc l'objectif c'était vraiment de ne pas changer les habitudes, on leur a bien précisé à chaque fois que ce soit pour l'air ou pour les eaux grises et même pour les poussières, de garder les habitudes, de garder les mêmes produits qu'ils utilisent. Et donc pour les douches, après avoir bouché, ils prenaient toutes leurs... leur douche normalement. Et à la fin, on leur fournissait un gant pour homogénéiser la douche, pour la mélanger. Et ensuite, une bonbonne de verre qui était préalablement lavée en laboratoire et de faire un sous-échantillon d'un litre de cette eau. qui pouvait ensuite être fermé, enfin la bonbonne pouvait être fermée à l'aide d'un bouchon et ensuite d'identifier à l'aide d'une étiquette l'échantillon. Et ensuite du coup c'était pour les différents types d'eau. Pour les eaux de lave-linge, l'objectif était de récolter les eaux d'un cycle de lavage. Donc généralement on demandait aux personnes d'utiliser le cycle habituel de lavage et on récoltait toutes les eaux donc c'était... de manière générale à peu près 40 ou 50 litres dans une énorme bonbonne en verre et ensuite on faisait un sous-échantillon d'un litre également. Pour les eaux de nettoyage des sols, c'était tout simplement, on demandait aux gens de passer la serpillière avec leur seau et ensuite de récupérer un litre de l'eau du seau. Et pour les eaux de vaisselle manuelle, on leur demandait à peu près dans le même style que pour les douches, de boucher leur évier. de faire la vaisselle et ensuite de faire un souci d'échantillon d'un litre de cette eau.

  • Speaker #1

    D'accord, très bien. Et du coup, j'imagine que les personnes enquêtées ont dû avoir des anecdotes marrantes ou des retours intéressants. Est-ce que tu pourrais nous en partager quelques-uns ?

  • Speaker #0

    Je vais peut-être redire la question vu que je l'ai interrompue. Je ne sais pas. Non, c'est bon ? Ok. Du coup, pour les réactions, effectivement, il y a certaines personnes qui étaient étonnées déjà de nous voir, de leur demander de faire les prélèvements chez eux. Et ils ne s'attendaient pas à ce qu'on leur demande jusqu'aux eaux de douche. Après, ce qui était aussi intéressant, c'était d'avoir une discussion sur... sur les produits biocides avec eux, de savoir déjà est-ce qu'ils étaient sensibilisés à ces questions-là, est-ce qu'ils connaissaient ce terme. Et ce qui était aussi intéressant lors de nos échanges, c'est qu'une autre des missions d'aller sur le terrain et de fournir tout le matériel aux particuliers, c'était de recenser tous les produits qui pouvaient contenir des substances biocides. et donc Ce qui était intéressant, c'était de montrer aux gens que finalement, les produits biocides, ils étaient dans des produits dont ils n'avaient pas forcément idée qu'ils pouvaient contenir des substances biocides. Typiquement, la question que je posais aux gens directement, c'était de me montrer les produits qui contenaient selon eux des substances biocides. Et donc là, ils me sortaient généralement des produits ménagers et peut-être quelques produits de lutte contre les nuisibles. Et quand je leur disais dans un second temps que ces produits-là en contenaient, mais qu'on pouvait aussi en avoir dans les produits cosmétiques, dans les produits vétérinaires ou autres, ils étaient assez surpris. Et quand on regardait en effet la composition de ces produits, il est arrivé plusieurs fois qu'on retrouve une des substances que j'étudie. Donc voilà, c'est plutôt ces discussions-là qui étaient assez riches, que ce soit pour eux comme pour moi. qui ont rendu vraiment le terrain très passionnant.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'ils ont eu le réflexe de jeter leurs produits cosmétiques après aux vétérinaires ?

  • Speaker #0

    Alors effectivement, il y a eu énormément de gens qui sont venus me voir après en me demandant si tel ou tel produit était bon ou pas pour eux. La plupart du temps, ce que je leur répondais, c'était que l'important dans ces cas-là, c'est d'avoir des produits les plus simples possibles, entre guillemets. Et même si on ne connaît pas forcément la composition avec les différentes substances qui peuvent être dangereuses ou pas pour la santé et pour l'environnement, à partir du moment où on a des produits avec une liste de substances qui est courte, on part du principe que c'est mieux. Et typiquement, pour les produits ménagers qui est un bon exemple, moi ce que je leur conseille, c'est au lieu de prendre des produits avec des listes de composition très longues, de prendre des produits qui sont vraiment limite purs. Typiquement du vinaigre ménager, du savon noir. Ce sont des produits qui sont très connus, très simples d'utilisation et dont les risques pour la santé et pour l'environnement sont quand même assez faibles.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Est-ce que je pose la question ? Oui, vas-y. J'allais dire, on peut peut-être passer au résultat. Oui. Tu veux la partie laboratoire ?

  • Speaker #0

    Ah oui, la partie laboratoire.

  • Speaker #1

    Oui. Donc... Parlons maintenant de la partie laboratoire de tes recherches. Comment as-tu analysé les différents types d'échantillons, pour rappel eau grise, poussière et air ? Et quels protocoles spécifiques as-tu suivi pour chacun d'entre eux ?

  • Speaker #0

    Alors comme souvent, la première étape effectivement dans ces études-là, c'est de mettre en place des protocoles. Et donc les protocoles, en tout cas pour les eaux grises, étaient déjà développés au sein de mon laboratoire, qui est un laboratoire très axé sur l'eau. En ce qui concerne par contre les poussières et l'air, il n'y avait pas du tout de protocole qui avait été établi. Et donc, dans un premier temps, je me suis rapproché du CSTB, le Centre scientifique et technique du bâtiment, qui a une expertise sur ces deux matrices-là. Et donc, l'objectif, c'était d'avoir des discussions avec eux pour m'inspirer des protocoles qu'ils ont déjà pu mettre en place à l'échelle nationale. Et quand j'ai pu mettre en place tous ces protocoles, une deuxième étape a consisté à valider. les protocoles, donc à vérifier s'il n'y avait aucune contamination, que ce soit pendant le transport des échantillons ou pendant les phases de laboratoire. Et enfin, de vérifier si on n'avait aucune dégradation des échantillons et des bons rendements d'extraction. Et donc, une fois que les protocoles ont été validés, effectivement, après les prélèvements, on ramène les échantillons en laboratoire. Et la plupart du temps, on les met au froid, soit à 4 degrés pour les eaux grises et sinon à moins 18 degrés pour les poussières et pour l'air intérieur. Et donc, ces échantillons, ils sont préparés pour les poussières, on les tamise et pour les eaux grises, il y a une étape de filtration. Et ensuite, après la préparation, on extrait les substances biocides. Donc là, il y a différentes techniques d'extraction. Il y a l'extraction de surface solide pour les eaux. Il y a l'extraction par micro-ondes et l'extraction par ultrasons pour les poussières et pour l'air intérieur. Et quand on a extrait...

  • Speaker #1

    Excuse-moi, pourquoi faire une extraction par micro-ondes ou par... j'ai oublié...

  • Speaker #0

    Ultrasons ?

  • Speaker #1

    Ou par ultrasons ?

  • Speaker #0

    L'extraction par micro-ondes ou par ultrasons... L'extraction par micro-ondes, elle permet de faire une extraction sur des... sur des échantillons qui sont solides comme les poussières ou comme des filtres d'air intérieur. Ça nous permet d'avoir un mélange de solvants. Typiquement ici, on est sur du méthanol et sur du dichlorométhane qui extraient de manière très efficace les substances. En ce qui concerne l'extraction par ultrasons, là on est plus sur la phase gazeuse. des substances. Et notamment, là, on avait, en fait, dans notre pompe de prélèvement, on avait mis au bout une cartouche qui contenait un filtre et ensuite une mousse. Et c'est cette mousse qui allait capter les polluants dans l'air, dans la phase gazeuse. Et donc, c'est parce qu'on était en phase gazeuse et parce qu'on a testé aussi les deux extractions et qu'on a vu que les ultrasons étaient plus performants pour cette fraction qu'on a décidé d'utiliser cette technique.

  • Speaker #1

    Très bien, merci. Je te laisse reprendre.

  • Speaker #0

    Et donc, suite à l'extraction, l'objectif c'est ensuite d'avoir une étape de concentration des échantillons et on transfère les substances dans un autre solvant. Pourquoi on fait une étape de concentration, et c'est vrai que je n'en ai pas parlé tout à l'heure, c'est que là on est tout le temps avec ce qu'on appelle des micropolluants. Et donc c'est des polluants qui sont présents dans des quantités très faibles. et qui, même à ces quantités très faibles, peuvent être dangereux pour la santé et ou pour l'environnement et qui sont en partie dues aux activités humaines. Et donc, comme c'est des micropolluants, on est obligé de les concentrer pour pouvoir avoir des solutions in fine qui sont plus concentrées en micropolluants et qui seront donc plus facilement détectables. Parce que quand on concentre l'échantillon, on diminue la limite de détection. Et donc, ça m'amène effectivement à l'étape de quantification. qui est réalisé par chromatographie liquide et en spectrométrie de masse en tandem. La partie chromatographie liquide permet de séparer les différents micropolluants, et donc les différentes substances biocides, en fonction de leur taille, de leur masse, de leur charge et de leur polarité. A la sortie de la chromatographie liquide, ils vont être amenés dans la spectrométrie de masse, avec un temps de rétention qui diffère en fonction des substances. Et c'est cette spectrométrie qui va ensuite... quantifier la quantité de chaque substance après la chromatographie liquide. Et donc, à la fin, on obtient les concentrations pour chaque matrice avec une courbe d'étalonnage assez simple. Et voilà, le tour est joué.

  • Speaker #1

    Donc, à l'issue de ces prélèvements... de ces expériences. À l'issue de ces analyses, quels sont les principaux résultats marquants de ta thèse ?

  • Speaker #0

    Le premier résultat, et on avait commencé à en parler un peu tout à l'heure, c'est qu'on a pu comparer de manière quantitative des usages à l'aide de bases de données, et notamment les usages phytopharmaceutiques, biocides et pharmaceutiques. Et on a pu mettre en avant que les usages phytopharmaceutiques et biocides sont majoritaires comparés aux usages pharmaceutiques. sachant qu'on a une dizaine de familles chimiques différentes pour les 30 substances étudiées et que les usages principaux sont pour 5 familles les phytopharmaceutiques et pour les 5 autres les biocides. Ensuite on a pu, comme je l'ai dit aussi tout à l'heure, créer une base de données de 6000 produits qui s'intéressent à la composition en substances biocides pour les 30 substances et donc ça c'est quand même un résultat marquant qu'on va publier. dans des articles scientifiques d'ici peu.

  • Speaker #1

    Et du coup après, les bases de données seront accessibles au grand public ensuite ?

  • Speaker #0

    Tout à fait, l'objectif c'est dans un second temps de publier effectivement cette base de données, que ce soit à l'échelle nationale ou internationale, parce qu'à l'heure actuelle on a très peu d'informations sur ces substances et sur les produits qu'on utilise au quotidien. Et donc c'est aussi pour ça qu'on l'a créée, c'est pour pouvoir avoir des informations factuelles sur les produits qu'on utilise. Et ensuite, on a pu effectivement, après avoir étudié la contamination des logements, vérifier si l'être humain était exposé ou non dans les logements. Et si oui, à quelle concentration et est-ce que c'était dangereux pour la santé ? On a pu mettre en avant que les populations les plus vulnérables étaient, comme souvent dans ce genre d'études, les enfants et les bébés. et que les voies d'introduction majoritaires des substances dans ces bébés et dans ces enfants étaient les voies par ingestion et par voie cutanée, notamment pour deux substances, la terbutrine et le fipronil. La terbutrine qui est un herbicide qui est très utilisé dans le milieu des pesticides. Et le fipronil qui est un médicament insecticide, donc médicament utilisé souvent chez les animaux de compagnie et qui peut aussi être utilisé dans des produits de lutte contre les nuisibles dans la maison.

  • Speaker #1

    Et est-ce qu'après vous avez communiqué les résultats de ta thèse aux participants ?

  • Speaker #0

    Alors l'objectif c'était déjà de les convier à ma soutenance de thèse. Donc effectivement les 39 participants... ont été conviés et certains se sont connectés lors de la soutenance. Et dans un second temps, on va aussi faire un retour, parce qu'il y avait aussi un intérêt de ces participants à avoir un retour sur leur logement, savoir s'il était contaminé ou pas. Donc on va leur envoyer les résultats et on va aussi leur fournir une fiche qui recense un peu une sorte de guide de bonne pratique. que ce soit pour les produits ménagers, pour les produits cosmétiques, etc. Et l'objectif, ce n'est pas non plus de leur dicter tel produit, il faut utiliser telle marque ou quoi, mais c'est plus d'avoir des grandes lignes directrices de comment choisir ces produits et quelles sont les bonnes pratiques en termes de nettoyage chez eux.

  • Speaker #1

    Alors, en quoi penses-tu que tes recherches peuvent contribuer à l'élaboration des politiques publiques ?

  • Speaker #0

    Alors, ce qu'il faut savoir, c'est que durant ma thèse et de manière plus générale dans le cadre du projet Biocidatome, on a été amené à collaborer avec l'ENSES, l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire. Et l'intérêt de cette collaboration, c'était d'avoir l'avis de plusieurs experts sur comment on évalue l'exposition. des humains à des substances polluantes. Et donc, effectivement, ils ont pu nous apporter leur vision des choses, mais ce qu'il faut garder en tête, c'est que c'est une entité qui est vraiment réglementaire. Et donc, leur manière de penser est vraiment calquée sur la réglementation. Et comme je l'ai dit au tout début, on peut avoir une différente... définition du terme biocide si on s'intéresse à la réglementation ou d'un point de vue étymologique. Et eux, vu qu'ils sont vraiment très axés sur la réglementation, quand ils font une évaluation de dangerosité d'un produit, ils s'intéressent uniquement à un produit, un usage et une substance. Sauf que nous, on s'est rendu compte que les substances, elles étaient présentes dans différents types de produits. Et l'avantage qu'on a, c'est que nous, notre approche de l'exposition et des risques, elle prend vraiment en compte toutes les sources. En tout cas, les sources environnementales, parce qu'on n'a pas parlé de l'ingestion par l'alimentation ou par l'eau potable, mais toutes les sources environnementales sont prises en compte. Et par exemple, quand on a une quantité de polluants dans une poussière, on ne sait pas de quel produit il vient. On sait juste que le contaminant est là, à tel moment, et qu'il peut être potentiellement transmis à l'homme. Et donc, effectivement, l'ENSES était intéressée par ces données-là. Peut-être que dans un futur proche, ils pourront se reposer sur ces bases de données et sur les calculs d'exposition pour se dire que tel produit et telle substance est dangereuse pour la santé. Ils ne l'avaient pas forcément vu dans leur approche réglementaire. Donc, leur amener une autre vision des choses.

  • Speaker #1

    Comme tu l'as mentionné dans ce pot. Tu viens tout juste de terminer ta thèse. Que retires-tu de cette expérience enrichissante ?

  • Speaker #0

    La thèse, c'est effectivement, comme tu l'as dit, une expérience très enrichissante, très stimulante d'un point de vue intellectuel. On a l'avantage de côtoyer vraiment des experts dans la thématique dont on est responsable pendant trois ans. Surtout, l'avantage du LESU, c'est qu'on est vraiment un laboratoire qui est à l'interface entre l'école des ponts et l'université de Créteil. Et donc, on a vraiment une richesse qui est encore plus accrue des profils. Et ce que je retiens, c'est énormément de discussions intéressantes sur des thématiques qui sont plus ou moins liées à ma thèse, parce que c'est aussi important des fois de sortir de sa thèse. L'avantage aussi pendant la thèse de commencer à enseigner, c'est quelque chose de très riche. Et puis surtout la volonté de dépasser la limite de ce que l'on peut connaître dans la littérature scientifique, d'identifier les différents manques dans la connaissance actuelle et d'agir vraiment pour combler ces manques. C'est très stimulant. Et c'est d'ailleurs pour ça que je vais continuer dans la recherche avec un post-doctorat qui est toujours à l'école des ponts.

  • Speaker #1

    Et est-ce que tu as réalisé des activités annexes en parallèle de ta thèse ? Tu parlais tout à l'heure de l'enseignement, mais est-ce que tu faisais autre chose ?

  • Speaker #0

    Oui, je me suis beaucoup investi dans la représentation des doctorants à différentes échelles. J'ai commencé au tout début de ma thèse par être représentant des doctorants dans mon laboratoire. Et cette activité m'a beaucoup plu. Et donc j'ai voulu continuer là-dedans. Donc après, pendant ma deuxième et ma troisième année, j'ai été représentant des doctorants auprès de l'école doctorale SIE, donc Science, Ingénierie, Environnement. Et j'ai aussi été représentant auprès du conseil de la formation doctorale de la COMUE. Ça m'a permis vraiment déjà d'avoir des informations sur comment se passait le doctorat, comment les formations étaient mises en place, et puis d'avoir un rôle à jouer sur... Faire remonter ce que les doctorants émettent comme critique sur les formations, proposer de nouvelles formations et identifier les manques. Typiquement, par exemple, je pense aux étudiants étrangers qui ont très peu de formation en anglais. Et donc, faire remonter tout ça à l'aide de questionnaires de satisfaction. Ça m'a vraiment plu et ça m'a tellement plu que j'ai voulu aller encore plus loin. Et donc, durant ma troisième année, j'ai créé une association. avec deux autres doctorantes de l'école doctorale CS et SVS, donc Culture et Société et Sciences de la Vie et de la Santé, si je ne me trompe pas. Et l'objectif de cette association, c'est de créer du lien entre les doctorants, de promouvoir la thèse auprès des licences et des masters, que ce soit de l'école des ponts, que ce soit de l'UPEC ou de l'UGE, et vraiment de mettre en place des événements. qui permettent aux doctorants d'améliorer leur confort de vie dans leur thèse parce que dans certains laboratoires ça se passe très bien, dans d'autres un peu moins. Et donc peut-être qu'en partageant un peu nos expériences, on pourra faciliter la vie en thèse. Et voilà, j'ai hâte de voir... L'association a été créée très récemment, en fin 2024, et donc lancée officiellement en 2025, donc tout récente. mais j'espère qu'elle va se prolonger et qu'il y aura plein d'événements à venir.

  • Speaker #1

    Et quel est le nom de votre association ?

  • Speaker #0

    L'association s'appelle l'ADEP, c'est l'association des doctorants de l'Est parisien. Voilà, c'est pas très original comme nom, mais c'est efficace.

  • Speaker #1

    C'est ça, c'est efficace. Bon, je te remercie beaucoup, Pierre. Nous arrivons déjà à la fin de ce podcast. Merci d'avoir participé.

  • Speaker #0

    Merci aussi. Et on peut aussi poser la question à la suite de la thèse. On n'en a pas parlé de ça. Ah, c'est bon, du coup ? Ah oui, tu l'as dit.

  • Speaker #1

    Je me suis demandé... Je me suis dit, t'as pas présenté ton parcours, ta formation, est-ce que tu veux le faire ?

  • Speaker #0

    Ah c'est vrai qu'on peut le faire, c'était pas dans la trame mais c'est vrai qu'on peut le faire.

  • Speaker #1

    Du coup, qu'est-ce qui t'a amené à réaliser cette thèse au sein du laboratoire, au sein du LESU ?

  • Speaker #0

    Alors, ce qu'il faut savoir c'est que j'ai eu pas mal de virages dans ma formation. J'ai commencé par faire une prépa BCPST. donc biologie, sciences physiques et sciences de la terre. Et suite à cette prépa, j'ai été accepté à l'UNTPE, donc c'est l'école nationale des travaux publics de l'État qui est basée à Lyon. Et cette école, elle reçoit pour moitié de la promo des élèves fonctionnaires. Et donc j'ai été admis en tant qu'élève fonctionnaire, donc rémunéré pendant ma formation de trois ans. Mais à la suite de ces trois ans, je dois huit ans à l'État. J'ai toujours voulu faire de la recherche et j'ai appris que l'État proposait chaque année 10 bourses pour des élèves fonctionnaires. Chaque année, il y a une liste d'une centaine de sujets de thèse qui sont remontés au ministère. J'ai regardé parmi cette liste de sujets et j'ai vu le sujet sur les substances biocides à l'école des ponts. Forcément, je connaissais l'école des ponts de nom. Donc déjà, ça m'intéressait. Et en plus, le sujet était vraiment très passionnant. Et j'ai fait un entretien avec Adèle et Régis, mes deux encadrants. Ça a tout de suite matché. Je me suis dit que ça pouvait faire une très belle thèse avec un encadrement qui avait l'air superbe et dans une école qui est quand même assez réputée. Et donc, c'est comme ça que je suis arrivé au laboratoire, au environnement, au système urbain.

  • Speaker #1

    Alors, nous arrivons déjà à la fin de ce podcast. Je te remercie, Pierre, d'avoir participé. Oui, OK. Quant à moi, je vous retrouve le mois prochain pour un nouvel épisode du podcast à la rencontre des doctorants, à retrouver sur la revue numérique de l'École nationale des ponts et chaussées. ingenius.ecoldepont.fr Je ne sais pas comment t'arriverais à le faire. C'est du parquet, on va voir. Je n'appuie pas. Non,

  • Speaker #0

    ce n'est pas grave.

  • Speaker #1

    La question sur la formation, on la mettra avant. Oui, oui.

  • Speaker #0

    Sur la suite de la thèse.

  • Speaker #1

    Oui, ok.

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