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L'heure du bilan : faire face

Ép. 1 - Faire face à ses contradictions : engagement, émotions et politique

Ép. 1 - Faire face à ses contradictions : engagement, émotions et politique

1h03 |06/05/2025
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Description

Dans ce nouvel épisode de L’heure du bilan : faire face, nous recevons Alexandre Florentin, ingénieur spécialisé en énergie-climat, directeur de la formation chez Carbone 4, membre de Génération Écologie et conseiller à la Ville de Paris, fondateur de l’Académie du Climat.

Nous abordons avec lui les tensions intimes et politiques de l'engagement écologique : comment conjuguer convictions profondes et réalité de la vie personnelle ? Peut-on prôner la réduction du trafic aérien tout en prenant l’avion pour rejoindre un proche à l’autre bout du monde ? Quel est le rôle des élus dans un système politique souvent figé, voire paralysé ? Quelle marge d’action réelle reste-t-il à ceux qui veulent changer les choses de l’intérieur ?

Entre récit personnel, critique institutionnelle et réflexions stratégiques, Alexandre partage à tous un témoignage lucide et nuancé sur ce que signifie aujourd’hui "faire face" dans un monde fini.

Un échange sincère qui interroge autant les trajectoires individuelles que les structures collectives.

🎧 À écouter dans la continuité de l’épisode précédent, consacré à la circularité des nutriments et à l’agroécologie, pour une plongée dans les multiples dimensions des basculements nécessaires et approfondir “notre capacité à faire”.


Épisode enregistré le 26 novembre 2024

Intervieweur : David Tixier


Pour en savoir plus sur Alexandre Florentin : 


Mission Paris 50°C en 2min - Mairie de Paris : https://youtu.be/ziWCWAAdLZ4?feature=shared


Le Rapport de la Mission Paris 50°C - Mairie de Paris :https://cdn.paris.fr/paris/2023/04/21/paris_a_50_c-le_rapport-Jc4H.pdf 


Lancement 10 avril 2025 de "Nos Villes à 50°C" (généralisation de Paris 50°C):

https://www.linfodurable.fr/climat/le-collectif-des-villes-50degc-en-quete-de-solutions-contre-les-chaleurs-extremes-50354


Alexandre Florentin chez "Plan(s) B", Cyrus Farhangi (1h) : https://youtu.be/r_nbWykbomo?si=kj08gRyAmJjSdd_B


Nouvelle Séquence - Alexandre Florentin - Mission 50°C (1h30) :

https://youtu.be/pekqQBPhbQQ?si=Twj8Z_617ELOX7LP


Alexandre Florentin chez Green Letter Club - Paris à 50°C (1h30) :

https://youtu.be/4b4ToyDuLNU?si=uqoTFOzRivUuOJub


Rejoignez et adhérez à l'association Adrastia :

https://www.adrastia.org/adherer-a-adrastia-fr134.html


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous et bienvenue sur le podcast de l'association Adrastia, l'heure du bilan, faire face. Nous sommes ravis que vous nous écoutiez. Nous allons parcourir ensemble les nouvelles pistes d'adaptation face aux altérations profondes et durables du milieu terrestre qui fragilisent tant nos sociétés que le vivant dans son ensemble. En 2024, la concentration en CO2 dans l'atmosphère continue d'augmenter. Les records de température, détendu des feux de forêt, de durée de sécheresse et de gravité des inondations tombent les uns après les autres. Les désordres écologiques, politiques et sociaux actuels ne sont pas des crises passagères, mais peut-être les premiers symptômes d'effondrement des sociétés industrielles mondialisées. Il est temps de faire le bilan de notre gestion collective des risques globaux et systémiques, parce que si sans maîtrise nous filons droit vers l'abîme, l'illusion de contrôle nous y précipiterait plus vite encore. Dans ce podcast, nous donnerons la parole au lanceur d'alerte aux scientifiques, aux acteurs de terrain, aux transitionneurs et aux penseurs de l'avenir écologique. L'heure du bilan nous confronte à la réalité à venir, la nécessité de l'adaptation, parfois radicale, au regard du risque d'échec ou d'insuffisance de la ténuation. Adrasia est une association de citoyens et de citoyennes qui informe et alerte depuis 2014 sur le risque d'effondrement de nos sociétés, dans le but d'éviter une dégradation trop importante ou brutale de leur structure vitale. et de préserver les meilleures conditions de vie possibles pour le plus grand nombre. Le podcast de l'association Adrasia est une production collective. L'intervieweur ou l'intervieweuse pourra être différent à chaque épisode. Ne vous en mettez pas. Les interviews sont disponibles sur les plateformes habituelles de diffusion. N'oubliez pas de vous abonner. Vous retrouverez également une page Internet dédiée au podcast sur le site Internet adrasia.org. Dans l'heure du bilan, faire face... Nous explorons pendant 60 minutes comment apprendre à nous adapter au monde tel qu'il est, non tel que nous croyons le maîtriser. Et maintenant, place à l'épisode. Bonne écoute

  • Speaker #1

    Alexandre Florentin, bonjour. Merci beaucoup de nous faire le plaisir et l'honneur d'être dans cet épisode du podcast Adrastia. J'espère que tu vas bien, déjà pour commencer.

  • Speaker #2

    Oui, bonjour. Merci de m'avoir invité. Oui, je vais très bien.

  • Speaker #1

    Super. Alors, je vais brièvement m'introduire, mais très très rapidement. Je m'appelle David Tixier, je suis le VP, le vice-président de l'association Adrastia. Dans le cadre du podcast qui nous rassemble aujourd'hui. On va davantage parler d'Alexandre que de Florentin. Et on va faire un petit récapitulatif des dix dernières années, puisque comme tu l'as peut-être appris l'association a dix ans cette année. Et on va regarder dans le rétro ensemble sur ce qui s'est passé sur ces dix dernières années d'un point de vue environnemental, mais pas que pour faire très vite. On va commencer par peut-être une définition du personnage qu'on accueille aujourd'hui, c'est-à-dire toi. Si tu devais présenter un de tes traits de caractère, celui qui te... qui te va le mieux, qui te scie le mieux Je ne sais pas, ça peut être quelque chose qui conditionne ton obstination sur les sujets harassants du quotidien, ou pas. Ou une capacité à encaisser les chocs. Lequel est-ce que tu mettrais le plus en avant

  • Speaker #2

    Déjà, bon anniversaire.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Ensuite, je pense que... Je pense que je suis quelqu'un d'assez pugnace et que cette pugnacité, elle tient dans le temps parce que j'arrive à l'équilibrer avec une capacité que j'essaie vraiment de travailler et que je pourrais qualifier de capacité à s'émerveiller.

  • Speaker #1

    Ok, je trouve que c'est une question importante puisque tu vas le voir par rapport au sujet qu'on va aborder par la suite. Ça annonce un petit peu la couleur sur comment est-ce que tu as pu continuer à te situer dans tous les sujets qu'on va aborder durant l'interview. Est-ce que naturellement tu as un lien avec l'environnement, la nature, peu importe le terme que tu voudras utiliser Ou est-ce que c'est quelque chose qui est arrivé plus tard, au cours de tes études, suite à ton premier emploi Voilà.

  • Speaker #2

    Mes parents, alors moi j'en ai pas de souvenir direct, c'est un souvenir indirect, mais mes parents ils m'ont toujours dit que quand j'étais petit, quelque part autour de 5-8 ans, que je voulais être garde forestier. Mais bon, j'en ai pas de souvenir propre. Ça m'étonne d'autant plus que je suis né à Paris, mais j'ai grandi en Seine-Saint-Denis, dans une zone... Hyper urbaine et que... Enfin, mon quotidien, on ne peut pas dire qu'il n'y avait pas beaucoup de forêt. Donc c'est peut-être ce décalage-là. Et j'ai des souvenirs de vacances à la montagne, à la mer. Mais rien de... Rien de... Pas un moment clé comme ça, d'émerveillement, ou je sais pas quoi. Là, je me suis dit... Et en fait, après, c'est plutôt... Pendant mes études en école d'ingénieur, j'étais complètement perdu et assez triste. Je ne mettais pas ces mots-là à l'époque, mais peut-être qu'il y avait une forme de blues un peu avancé. C'est-à-dire que je ne comprenais pas pourquoi, je ne comprenais plus au bout d'un moment. C'est-à-dire que je suis entré dans des études scientifiques et techniques par curiosité, par envie de résoudre des problèmes. Il y avait ce côté challenge intellectuel qui était très fort. Et puis, jeune adulte, en fait, je me suis rendu compte que je ne comprenais plus pourquoi je faisais ça. Donc, je n'étais pas... Asidu du tout, pendant mes études en école d'ingé, j'ai failli redoubler ou me faire virer, je ne sais plus. Du coup, je me suis dit qu'il fallait que j'arrive à finir ce truc-là que j'ai commencé. Et j'ai fait une année de césure. Et c'est là, notamment dans un stage à Lille. ITZ, qui est un des labos de recherche du CEA, qui mêle les questions techniques et économiques. Je fais un stage de six mois et c'est là que j'ai un peu découvert les questions environnementales comme trame de fond. Parce que dans l'école dans laquelle j'étais, je travaillais quand même pas mal sur les questions énergétiques qui m'intéressaient le plus. Mais là, d'un seul coup, l'environnement, ça donnait un pourquoi à tout ça. Donc j'ai commencé à m'y intéresser sérieusement à ce moment-là. Donc c'était en 2007, si je ne me trompe pas, ou 2008, je crois. Oui, c'est ça, 2008-2009. Et après, j'ai été envoyé dans un... en troisième année, dans une option que je n'avais pas du tout choisie, parce que j'avais des résultats catastrophiques, donc je crois que j'étais avant-dernier de promo, donc je n'avais pas le choix. Et du coup, après, j'ai choisi de prolonger mes études avec un double diplôme à Sciences Po et Jussieu, qui s'appelait Sciences et politiques de l'environnement, qui était une création de Feu Bruno Latour, notamment une de ses idées, d'avoir des gens avec un pied dans les sciences dites dures et dans les sciences sociales. Et ça a été une révolution intellectuelle majeure qui continue de m'accompagner. C'est la première fois que j'ai entendu parler de décroissance, de Jean Covici, de Gramsci. J'ai eu comme prof des gens comme Grégory Kenney, comme Arnaud Gossement, Bruno Latour, Laurence Tubiana, François Gemmene, Hervé Le Treut. Lucas Badi, et dans les sciences sociales, et dans les sciences dures, des gens qui maintenant sont beaucoup plus reconnus dans leurs travaux. D'accord.

  • Speaker #1

    C'est une question que j'allais te poser juste après, mais je pense que ta réponse l'annonce plutôt bien. Ton oh shit moment ce que nous on caractérise comme étant le moment où on prend conscience, on dira, il arrive à ce moment-là C'est avant, c'est après Et seconde question qui pour moi va avec, est-ce que tu es plutôt prise de conscience ou crise de conscience

  • Speaker #2

    Alors, c'est sûr qu'il y a eu plusieurs phases dans ma compréhension du problème. Je dirais que ça restait, comme à l'époque, c'est comme encore beaucoup maintenant, et je pense que c'est une grave erreur de le faire comme ça, mais c'était beaucoup présenté comme des questions de fin du siècle ou 2050. je voyais beaucoup les courbes du GIEC dans toutes les matières que j'étudiais mais il y avait du coup une distance Une distance que je qualifierais d'émotionnelle, jusqu'à ce que je participe à un jeu de rôle vraiment grandeur nature, c'est-à-dire qu'on était une centaine d'élèves, préparation pendant six mois, six mois de jeu de rôle, puis une semaine complète, dont une nuit à Sciences Po, où en fait on rejouait les négociations de Copenhague. Et là j'ai eu, non pas un oh shit moment, mais plutôt c'est passé de la tête au trip. en disant, mais en fait, ces courbes-là, je vais les vivre. Statistiquement parlant, je vais les vivre. Ça, c'était le premier gros choc. Je pense que je mettais de la distance pour me protéger. Donc là, je me rends compte que je vais les vivre, que je vais devoir choisir à quelle courbe je participe. Donc là, un choix éthique. Et... Et notamment que, parce qu'à l'époque je prenais beaucoup l'avion, j'étais dans une association européenne qui en gros organisait des petits Erasmus dans toute l'Europe. J'étais vraiment très impliqué encore à ce moment-là. Et je me dis, parce que j'avais quelques ordres de grandeur, mais je n'avais jamais fait mon bilan carbone personnel. Et là je me dis, ok, en fait là, ce qu'on a fait dans le jeu de rôle, c'est super réaliste. Et... Je ne suis pas du bon côté de la barrière, d'une certaine manière. Au fur et à mesure des années, je pense que je me suis de plus en plus rendu compte qu'on était tellement en retard qu'il y allait avoir des phénomènes de crise, puis de permacrise, qui est... Le mot pour dire que les crises ne s'enchaînent pas tranquillement en nous laissant une capacité à reprendre un souffle, mais en fait elles s'enchaînent vite, voire elles se superposent. Et que nos sociétés ne sont pas préparées à ça. J'en ai une conscience plus aiguë. je pense, mais progressive entre 2015 et 2020, très aiguë en entrant en politique, en disant c'est quand même ça le niveau de compréhension et d'anticipation surtout. Donc c'est là où je me suis dit, ok là il faut vraiment que j'oeuvre au fait qu'une partie de la classe politique comprenne le moment de bascule dans lequel on est. Et j'ai complètement oublié la deuxième partie de ta question. C'était prise de conscience. Qu'est-ce que tu entends par crise de conscience

  • Speaker #1

    Crise de conscience, c'est-à-dire que tu te rends compte de l'ampleur d'un phénomène qui en fait ne te quitte plus du tout

  • Speaker #2

    Ah oui, ça oui. ça me quitte plus du tout et c'est un... À chaque fois que j'ouvre la presse, c'est quasiment une décision consciente de... Est-ce que j'ai la force aujourd'hui de lire la presse Comment est-ce que je vais faire pour cultiver ma capacité à trouver de la joie dans ce que je fais Qu'est-ce que ça veut dire dans ma vie de couple, dans ma vie familiale C'est quotidien. J'ai passé la phase où je vois du bilan carbone partout Je me concentre sur d'autres choses Et ma capacité à m'émerveiller Je la travaille beaucoup par rapport à la biodiversité Donc je m'éloigne aussi des questions climat Parce que C'est en tout cas de la partie baisse des émissions, atténuation, parce qu'en fait, c'est un poids qui est beaucoup trop lourd à porter.

  • Speaker #1

    C'est peut-être pas assez palpable

  • Speaker #2

    Ouais, c'est trop lointain, on voit pas les effets de ce qu'on fait, donc je fais d'autres choses. Dans mon quotidien, je m'intéresse beaucoup plus au fait d'apprendre à faire des choses moi-même, de cuisiner, de travailler mon rapport au temps, à l'information. Le fait de ne pas me retrouver dans la roue du hamster, ce qui est extrêmement facile, compte tenu du fait que j'ai un métier passion d'un côté et la politique de l'autre avec une forme d'hystérisation collective permanente. Donc il faut prendre beaucoup de distance.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #2

    Donc j'essaye en tout cas.

  • Speaker #1

    Je reviendrai sur ce point-là juste après. Je préfère te le dire parce que c'est important de le... préciser, je pense. En gros, là, notre échange, il va tourner autour de quatre gros morceaux. Donc là, c'était celui qui était introductif, d'où on part. Là, j'ai encore une dernière question là-dessus. On ira après sur ton profil à toi, plutôt technique et politique. Ensuite, on aura un gros morceau sur toi, précisément, en dehors de toutes tes activités, ton profil professionnel ou politique. Vraiment, toi, comment est-ce que tu perçois le sujet en tant que citoyen Et on fera un petit bilan à la fin de tout ce qu'on a pu se dire jusque là. La dernière question par rapport à cette partie introductive que j'ai, c'est... Pour moi, il y a, à nouveau, c'est une considération personnelle, mais il y a un très gros sujet qui est celui de la dissonance collective autour de tous les éléments dont tu as déjà pu parler jusqu'à maintenant. Et alors, comme beaucoup de monde, tu as un jour... parler d'une proposition qui a été de, je te cite, la première chose à faire est d'arrêter de prendre l'avion. On en a parlé d'ailleurs à l'instant. Comment est-ce que concrètement on peut faire ça, sachant que le modèle de désirabilité actuelle repose principalement sur le fait de pouvoir bouger à peu près quand on veut pour un prix dérisoire, que c'est une mesure qui est hautement considérée comme liberticide, même si je vais totalement dans ton sens. C'est des questionnements, je pense, qu'on a au quotidien. Et qu'aussi, il y a finalement une question de potentiel financier. Aujourd'hui, on ne fait pas les choses parce qu'elles sont mauvaises, on les fait parce qu'on peut les faire, économiquement parlant. Si on ne peut pas les faire, on ne les fait pas. Mais si on peut le faire, c'est forcément bien. Et j'ai un exemple en tête qui va illustrer tout ça. On l'a vu ces deux, trois dernières années, avec les forts incendies qu'il y a eu en Grèce, durant les périodes estivales, on avait des photos de touristes qui fuyaient les zones, les resorts où ils s'étaient installés. On avait des flammes. qui était en arrière-fond, où les habitants, pour le coup, eux, essayaient d'éteindre l'incendie, et les touristes essayaient absolument de rentrer chez eux. Comment est-ce que, toi, tu vois ça, cette dissonance collective, et le fait qu'on n'arrive pas à en sortir

  • Speaker #2

    Déjà, je l'ai vécu. Je l'ai vécu, et là, je suis dans une autre phase. Donc, déjà, cette question de l'aérien, mais comme tout le reste, il faut être... très vigilants sur le fait de ne pas chercher à faire reposer sur l'individu l'immense poids du changement. Et en même temps, on a aussi une part individuelle de responsabilité dans les choix qu'on fait les uns les autres. Et par ailleurs, on est toutes et tous pris dans une technostructure. qui nous entoure et dont on est interdépendant. Donc il y a des choses sur lesquelles on n'a pas de levier, parce que vous n'avez pas de levier à un moment donné. Pour être plus précis, tu vois, et le dernier point qui est quand même important à rappeler, mais je pense que, je vais le dire très vite, parce que je pense que les personnes qui nous écouteront, elles sont un peu au courant. Mais pour le coup, sur l'aérien, ça a été extrêmement bien détaillé, le fait que, certes, l'aérien a divisé par deux, enfin a augmenté par deux son efficacité énergétique sur les dernières années, donc ramener au passager c'est plus efficace, mais le nombre de voyageurs a tellement augmenté, le nombre de trajets a tellement augmenté que... Que les émissions de l'aérien augmentent et de grandeur c'est comme un grand pays. C'est genre le Japon il me semble, du style un milliard de tonnes par an. Donc c'est pas rien. Et si on actionne tous les leviers technologiques, ça ne fait pas le job. Même en poussant tous les traits de la diffusion, parce qu'entre une technologie qui existe et une technologie qui est diffusée, il faut du temps. Et même avec tout ça, on n'y arrive pas. Donc à un moment, il faut jouer sur le nombre de passagers-kilomètres, c'est ça l'unité, qu'il faut faire baisser. Quand on est au niveau individuel, il faut se poser la question de pourquoi je voyage Qu'est-ce que je cherche Et c'est sûr que c'est toujours compliqué de dire après moi, c'est un peu comme les nouveaux migrants qui ensuite disent je vais fermer la porte derrière de la migration. Moi, c'est arrivé jusqu'à un stade où la dernière fois où j'ai fait un voyage professionnel en avion, j'ai eu la nausée pendant tout le voyage. Parce que j'étais de l'autre côté de la dissonance cognitive. C'est-à-dire que je n'arrivais plus à me protéger par mon déni. J'avais déjà bien réduit et là je fais ce grand voyage atlantique et je me dis oh la vache, j'étais pas bien, j'ai cru que j'allais vomir alors que j'avais déjà pris plein de fois l'avion. Et ce moment là, jusqu'où je me dis en fait c'est bon, je vais réussir à ne plus pouvoir prendre l'avion de ma vie. Entre le moment où je me suis dit et le moment où je l'ai fait, donc avec la baisse et tout, ça a pris 8 ans je crois. 5 ans progressif et au début j'ai fait l'erreur de surtout vouloir dire aux autres d'arrêter plutôt que juste arrêter de le faire et ça a été beaucoup plus puissant par rapport à mes proches qui au début certains qui comprennent d'autres qui ne comprenaient pas. Forcément, c'est des choix forts parce que je me suis fait des amis incroyables en Europe et c'était plus compliqué. Mais c'est aussi un moment où je suis passé à la journée de quatre jours. Donc, j'avais plus de temps. J'utilisais pour voyager en Europe en restant sur le sol. Et puis, il y a... Donc, moi, j'étais parti pour une vie sans avion, mais avec des réflexions. profondes parce que par exemple mon père il est vietnamien et je suis jamais allé au vietnam avec lui et je me suis toujours demandé est ce que est ce que je le fais ou est ce que je le fais pas et c'est donc je suis pas du tout à côté de la plaque par rapport à ce que des dilemmes que des gens se posent c'est pour ça qu'il faut pas faire reposer trop le truc sur l'individu c'est C'est ignoble de faire reposer ces choix-là sur un individu. Et puis là, ma situation personnelle a vachement changé parce que je suis tombé amoureux d'une personne brésilienne qui habite à Paris. qui pendant un moment a dû rentrer au Brésil. Donc j'ai fait le choix d'aller la voir là-bas, parce que j'étais fou amoureux. Et là, on va se marier. Et je refais le choix d'aller là-bas, cinq semaines, pour me marier là-bas et passer du temps avec ma belle famille. C'est des choix qui me coûtent. C'est des choix qui me coûtent parce que je me dis, bon, après avoir prêché autant la baisse de l'aérien, comment je fais et d'une certaine manière j'ai l'impression en tout cas autour de moi que par rapport à des gens qui seraient hyper durs sur la vitesse de baisse etc etc d'une certaine manière ça me réhumanise en disant ouais ok lui aussi il a du mal lui aussi il essaye, lui aussi il en parle et par contre pour le coup j'utilise aussi beaucoup ma posture en tant qu'élu élus pour avoir avancé ce sujet-là. Et ça n'a pas fait beaucoup de bruit, mais j'ai réussi à faire en sorte que la ville de Paris, dans ses documents de planification officielle, donc en l'occurrence le plan climat, dise, la ville de Paris, première ville touristique, première destination touristique au monde, demande à l'État de faire baisser le nombre de créneaux de décollage et d'atterrissage des quatre aéroports franciliens. Énorme victoire politique qui n'a pas été beaucoup relayée et qui en 2020, l'année de l'élection, était inimaginable, y compris dans les rangs d'Europe Ecologie-Les Verts qui sont un peu... un peu mes camarades de jeu dans la famille écologiste.

  • Speaker #1

    C'est une remarque intéressante, le fait qu'on soit pris en tenaille par nos paramètres personnels, familiaux ou pas d'ailleurs. Je me permets de rebondir sur ton exemple. Moi, ma femme est d'origine antillaise, et on a déjà eu cette discussion avec la partie de sa famille qui est de Guadeloupe. Et concrètement, moi, je veux rentrer chez moi. Je sais que depuis X générations, on est en Normandie. Je suis chez moi. Je vois ma famille. C'est une place qui me parle. Ces gens-là, qui sont originaires d'un département ultramarin, chez eux, au sens propre, la terre où ils ont grandi, c'est ailleurs. C'est pas ici. Et de quel droit est-ce que moi, finalement, est-ce que j'ai le droit de les priver La réponse est non, d'ailleurs. De rentrer chez eux à des récurrences qui sont les leurs, peu importe. C'est une question très... très délicates, finalement. Ça touche à l'identité, je pense que c'est là aussi où on touche parfois du doigt les limites de tous les raisonnements, si on comptabilise et qu'on raisonne uniquement d'un point de vue carbone, comme tu le disais tout à l'heure. C'est une dimension particulière. Voilà.

  • Speaker #2

    Et moi, ça m'a justement donné envie d'être encore plus, entre guillemets, radical sur le fait de t'arrêter les autres voyages. En me disant, ok, en fait, je vois bien que celui-là, il est beaucoup plus important que ce que je faisais avant. Et par contre, moi, dans mon couple, très rapidement, ma femme, elle a compris qu'on ne prendrait jamais l'avion pour voyager en Europe. Que c'était juste impensable. Et que les fois où on allait au Brésil... Ce serait longtemps. Par contre, l'effort, il a l'air de se dire comment est-ce qu'on fait pour aller 5, 6 semaines là-bas, de prendre des congés, de travailler à distance quand c'est possible, je ne sais pas quoi, mais de se dire, en fait, la partie sacrifice, la partie effort, elle est sur cette dimension. Comment est-ce qu'on va s'organiser pour pouvoir partir longtemps Et voilà.

  • Speaker #1

    Ça pose aussi la question des aménagements liés au travail. Je veux dire, prendre cinq semaines, tout le monde ne peut pas. Bien sûr. C'est des questionnements qui dépendent de critères assez externes. Je ne l'ai pas précisé, donc on va survoler très rapidement ton profil. Tu as un profil d'ingénieur, tu es spécialisé sur les questions énergie et climat, ça tu en as parlé. Tu es directeur de la formation chez Carbone 4, je ne dis pas de bêtises, super. Aussi membre de Génération Ecologie, ça aussi tu en as parlé, et tu es conseiller à la mairie de Paris. J'ai une question simple pour commencer, tu verras c'est une boutade. Pourquoi ça marche pas tout ça Plus sérieusement, quel regard est-ce que tu portes sur, on dira, l'immobilisme ambiant pour faire très vite, et sur les blocages qui existent tant sur les partis institutionnels, politiques ou citoyens On a un petit peu parlé là, mais j'aimerais qu'on creuse davantage ce sujet-là maintenant.

  • Speaker #2

    Vaste question. Alors de nouveau c'est vu de ma fenêtre, donc déjà pour que les gens comprennent, j'ai été élu aux élections municipales. Paris comme Lyon et Marseille en fait vous êtes élu par un arrondissement. Et il y a une partie de ces élus-là qui vont dans ce qu'on appelle le Conseil de Paris, qui est une sorte de petite assemblée nationale, mais à l'échelle parisienne. Et on est 163 à siéger là-bas. Et la première chose qu'on fait, c'est qu'entre nous, entre ces 163 personnes, on vote pour le ou la maire. En fait, le ou la maire à Paris, c'est une élection indirecte. Donc c'est un peu comme si j'étais grand électeur, c'est un mot dont on entend parler avec les États-Unis. Ça fonctionne comme ça. Et pendant longtemps, le Conseil de Paris, je crois que c'est plus trop le cas, mais c'était considéré comme... une sorte de marche-pied national ou une espèce de mini-assemblée nationale. Il y avait des fonctionnements qui étaient calqués sur cette assemblée. Et pour revenir à ta question, déjà, moi, j'ai l'impression qu'il y a un effet clanique qui est hyper fort. Mon début de mandat, c'est l'affaire Christophe Girard. L'affaire Christophe Girard, c'est quoi C'est un élu dans la liste socialiste qui s'appelle Christophe Girard, qui s'apprête à être nommé, qui va être nommé, qui a été nommé, pas très longtemps, mais il a quand même été nommé adjoint à la culture. Et quelques mois avant, vous avez une femme qui s'appelle Vanessa Springora, qui sort un livre qui s'appelle Le consentement, qui raconte... son adolescence et la relation qu'elle a eue avec un qui s'appelle Gabriel Maznev auteur pédocriminel qui a dédié sa propre version comme il écrivait sur ce genre de relation qu'il avait il a écrit un livre qui s'appelle La prunelle de mes yeux et ce livre est dédié Donc ce livre raconte son histoire avec Vanessa Springrois, et ce livre est dédicacé à Christophe Girard, le mec qui vient de se faire élire et qui... Et donc là, je passe les détails, mais il y a une guerre incroyable à l'hôtel de ville entre les socialistes et les écologistes, avec notamment deux élus, que sont Raphaël Rémy Leleu et Alice Coffin, qui... son vent debout contre sa nomination en tant qu'adjoint à la culture. Vous pouvez regarder, c'est hyper bien documenté sur ce qui s'est passé. Mais à ce moment-là, quand je vois qu'il y a des gens dans la majorité, grâce à laquelle j'ai été élu, qui ne se rendent pas compte...

  • Speaker #0

    du problème parce que à minima, moi ce qui m'a choqué c'est que Christophe Girard, quand il a rencontré le groupe écologiste, il a parlé des amours de Maznef. C'est comme ça qu'il qualifiait les relations entre Maznef et des adolescentes de 13, 14, 15 ans. Et là je me suis dit c'est dingue. Je mentionne ce truc là, cette affaire là, parce qu'en fait ça a été hyper fort dans ma... On va dire déjà c'était ma... Je débarquais complètement en politique, l'ingénieur, pour parler de questions énergie-climat, et là j'ai des décisions très fortes à prendre. sur un truc qui n'a rien à voir, et je ne sais pas comment je vais juger de cette question, je me pose beaucoup de questions. Et c'est juste, c'est notamment cette phrase de, quand il parle des amours de Maznev, ça me choque tellement, je me dis... Là, ça me choque en tant que citoyen, en tant qu'humain, en tant qu'homme. Je me dis, mais ce n'est pas possible de le qualifier comme ça. Si ça se trouve, OK, Girard, il n'a jamais rien fait de mal de sa vie, mais parler de cette relation-là comme ça, c'est une faute politique. Et là, je me rends compte que, en fait, tout le monde se tient par les coucougnettes dans cette histoire, par la barbichette pour être plus poli. Désolé. Et en fait, n'arrive plus à penser de manière autonome. Et ça, je pense que c'est un facteur. Parce qu'en fait, ils doivent tous leur place à quelqu'un dans cette histoire. Parce qu'il n'y a que deux manières d'entrer en politique. Soit vous pariez sur le bon cheval, vous êtes dans la bonne motion, dans le bon parti. Quelqu'un vous embarque dans sa conquête du pouvoir, soit vous existez par vous-même. Par exemple, demain, si Jean-Marc Lancovici décide d'entrer en politique, il n'a pas besoin d'un parti. Il n'a pas besoin que quelqu'un l'adoube. Il est tellement connu à l'extérieur qu'il peut juste débarquer dans le truc. Et comme ce n'est pas souvent le cas, les gens se tiennent et donc ils ont du mal à... Et ça, ça explique énormément... Cet effet clanique explique énormément l'inertie. parce que du coup, vous êtes un peu piégé par les décisions que d'autres que vous-même ont pris. Mais parce que ça a été des alliés, parce qu'il y a des mécanismes, des cordes de rappel qui sont extrêmement fortes. Un autre exemple, moi je suis complètement contre la manière dont on a géré le chantier de rénovation de la gare d'Austerlitz, qui est un énorme chantier. à côté de ça, je m'entends bien avec le... Donc j'ai des désaccords avec le maire du 13ème là-dessus. Par contre, je trouve qu'il a d'énormes qualités par ailleurs. On discute beaucoup de la question de l'adaptation. Moi, je trouve que c'est quelqu'un qui est véritablement convaincu d'une sorte d'humanisme, on va dire. Mais on n'est pas d'accord sur ce projet-là. Eh bien, il aurait... C'est parce qu'on arrive à s'entendre par ailleurs qu'on a réussi à se mettre d'accord qu'on n'est pas d'accord sur ce projet-là. Mais c'est hyper rare dans l'univers politique d'arriver à se mettre d'accord qu'on n'est pas d'accord. Sinon, il y a des manières de mettre de la pression qui sont dingues. Et pendant la mission Paris à 50 degrés que j'ai présidée... l'appareil a utilisé des manières de me faire rentrer dans le rang, de me mettre la pression pour bien me faire sentir que je n'avais pas le contrôle, pour essayer. C'était hallucinant. Et j'ai très peu de pouvoir. Je ne suis pas adjoint. Je ne commande pas l'administration, je ne pilote pas de budget, je n'ai pas d'équipe. Je suis vraiment assez bas dans la chaîne alimentaire. Et pourtant, tout de suite, je pense qu'il y a un côté un peu dressage, c'est-à-dire que les nouveaux arrivants, tout de suite, il faut les dresser. S'il y en a un qui commence à...

  • Speaker #1

    Comment est-ce qu'elle naît cette mission Paris 50° C'était la grande question que je voulais te poser là-dessus, parce que je trouve que c'est quelque chose qui est très rattaché à toi en tant que conseiller. C'est quoi le contexte de la création de la mission. Et elle touche à différentes typologies. Donc il y a les mentions des infrastructures existantes, de l'approvisionnement énergétique, de la question de l'eau. Il me semble également qu'il y a une partie sur l'agriculture, si je ne dis pas de bêtises, ou du moins l'alimentation. Comment est-ce que tu arrives à présenter un... Un projet si large, dont les conséquences peuvent être terribles, quand on parle de Paris à 50 degrés, moi j'ai une amie qui travaille notamment sur la gestion des infrastructures ferroviaires, elle m'expliquait qu'aux alentours de 40 degrés, tu as beaucoup de défaillance du matériel, je crois que tu as travaillé également sur ce sujet, du matériel qui permet aux trains de circuler. Dans une ville... Ou par exemple, le rapport Utopie dit Paris a moins de 2% d'autonomie alimentaire. 50 degrés, ça veut dire quoi pour tout ça, en termes de risque Et comment est-ce que les résultats de tes travaux sont accueillis par tes collègues à ce moment-là

  • Speaker #0

    Alors, je vais d'abord parler de comment ça a été lancé. Oui, bien sûr. Et après, on reviendra sur la suite. Déjà, moi j'arrive, je suis élu en 2020. Mais avant... En 2017, il y a un papier de Météo France qui sort, qui dit qu'on peut avoir entre 50 et 55 degrés en France métropolitaine dans la deuxième moitié du siècle. Et c'est un papier que mes collègues chez Carbone 4 diffusent. C'est comme ça que j'ai accès. J'ai appris par la suite que... Et ce papier, il me choque. Il me choque au sens... Je pensais pas... Pendant mes études, j'avais jamais entendu parler de température comme ça. Je me dis, comment c'est physiquement possible, même avec des scénarios de réchauffement importants Et quand je suis élu, par ailleurs, je me rends compte que la ville de Paris ne découvre pas du tout ces sujets-là. C'est-à-dire qu'il y a déjà un plan climat qui est historiquement ancien, avec un volet adaptation. La canicule de 2003 a été un choc, il y a eu des mesures et tout. Mais c'est de la prospective en regardant le rétroviseur. C'est-à-dire que sans vraiment le dire, en fait ce qu'on est en train de faire c'est se préparer à un retour de la canicule de 2003. Et j'ai un conseil de Delphine Bateau qui me dit Trouve-toi un couloir de nage et avance. Donc, d'un côté, j'essaie gentiment de... Et moi, je sais faire deux choses, atténuation, adaptation. Donc, côté atténuation, je me dis qu'il y a déjà pas mal de choses qui sont faites quand même à Paris. Sauf sur le tourisme aérien. Mais je n'arrive pas à faire avancer le sujet. Il n'y a que quatre ans plus tard que j'arrive à le faire avancer. Et je me dis, par contre, sur l'adaptation quand même... C'est pas folichon, quoi. Il y a des petits trucs, mais c'est vraiment hyper ponctuel. Il y a tellement de décisions contraires à l'adaptation qui sont prises, c'est que c'est pas entré dans les mentalités. Il n'y a pas un réflexe adaptation qui s'est développé. Donc j'en parle au groupe écologiste, qui, du fait de toutes les batailles autour de l'affaire Girard avant, disent, ok, il faut que... La mission, parce qu'on n'en a qu'une seule, pendant tout le groupe écologiste peut en déclencher qu'une seule, il faut que ce soit sur un sujet environnemental. Et donc le groupe écolo est convaincu, mais juste, je fais mon consultant, j'ai mon PowerPoint, j'explique pourquoi physiquement il faut se préparer, qu'est-ce qui peut arriver, je parle des trucs, des rails, SNCF, parce que ça c'était déjà assez bien documenté à l'époque. Je fais une analyse politique aussi en disant en fait l'adaptation c'est un vocabulaire de la protection, de la sécurité, de la sûreté etc. De la gestion de crise et donc la droite peut s'en saisir, les droites peuvent s'en saisir. Et donc ils peuvent aussi, si on ne le fait pas, ils vont s'en saisir et ils vont le faire d'une manière qui peut-être ne conviendra pas. Et donc il faut occuper ce terrain. Et donc ça, je le dis en 2020, et tout le monde est d'accord. Et après, il faut deux ans pour que ça se lance vraiment. Mais c'est ça le point de départ. Un mélange, il y a une base scientifique, une intuition personnelle qu'en fait, ce sujet-là peut prendre aussi. Parce que dans tous les phénomènes environnementaux, quand on habite à Paris... les vagues de chaleur, c'est le truc le plus perceptible, le plus sensible. Et donc je me dis, c'est intéressant d'essayer d'entrer par la porte de l'adaptation pour faire bouger les gens. Et pour l'instant, ça marche. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des écueils possibles en entrant par l'adaptation, qu'ensuite les gens peuvent oublier l'atténuation ou d'autres choses, mais comme le pourquoi de l'action, il est plus clair, ça crée moins de résistance. Si tu commences à dire à des gens on va travailler pour mieux vivre les canicules, et ensuite tu glisses des choses pour que ce soit des solutions simples, robustes, et assez vite tu comprends que tu ne pourras pas tout adapter à n'importe quoi, et donc il faut aller vers des modes de vie plus simples, et que ça va faire l'atténuation. le raisonnement est beaucoup plus facile à comprendre. Dans ma pratique, depuis que la mission est sortie, parce que j'en ai énormément parlé, j'ai rencontré énormément de publics différents, dans toute la France et à l'étranger, c'est un chemin qui est plus fluide.

  • Speaker #1

    Aussi parce que c'est quelque chose de plus palpable. C'est peut-être aussi pour ça qu'ils perçoivent tout de suite les risques. Quand tu pars d'île de chaleur, c'est quelque chose qui est déjà ressenti maintenant.

  • Speaker #0

    Voilà, quelle que soit la classe d'âge, quelle que soit la sociologie, quelles que soient les valeurs aussi parce que c'est du réel et donc il ya au moins il n'y a pas cette barrière à l'entrée parce que pas se mentir quand même entre le barbec et la canicule il ya quand même quelques étapes et il faut avoir le temps, il faut avoir le il faut accepter des postures scientifiques. Tandis que si on fait le raisonnement dans l'autre sens, ça a l'air, en tout cas pour l'instant, ça a l'air plus simple. Et un truc aussi, c'est que maintenant, je lis de moins en moins de trucs de climatologie. mais beaucoup plus de sciences sociales et notamment d'études sur la communication. Et on m'avait toujours dit, on parlait de 2050, on est une espèce adaptative, on attendra que ça arrive pour... Je me suis dit, bon, là c'est le bon moment, parce que ça commence déjà bien, c'est déjà bien palpable. Je crois qu'il y a 7 Français sur 10 qui disent qu'ils ont vu une manifestation du changement climatique sur leur territoire. Et du coup, je me dis, il ne faut pas que j'appelle ça Paris 2050 ou Paris 2100 ou Paris plus 4 degrés, qui n'était pas une terminologie très bien acceptée à l'époque, puisqu'en fait, il n'y avait pas encore eu le travail. Au moment où je lance tout ça, il n'y avait pas encore eu le plan national d'adaptation, Christophe Béchut qui parle de plus 4 degrés, France, etc. Et du coup, moi, je suis là avec mon étude Météo France en main et je me dis, est-ce que j'ose Appeler la mission Paris à 50°. Et ça a été une énorme hésitation. Parce que je savais que ça avait du sens scientifique. Mais je me suis dit, est-ce qu'on va me pointer du doigt comme un cassandre Le chef de service... Vous essayez juste de nous faire peur, etc. Et en fait, ça a fait 50% du job. Parce que derrière, c'est... très théâtral, mais vous avez l'unité de lieu et vous avez quasiment l'intrigue qui est dans ce titre, Paris à 50 degrés. Et après, il y avait d'autres choses à faire, parce que c'était une mission transpartisane. Mais ça, j'en ai déjà beaucoup parlé par ailleurs sur comment gérer ce côté transpartisan, comment embarquer les autres forces politiques qui ont été très motrices pendant la mission. Tu me demandais les effets, donc je saute l'étape, qu'est-ce qui s'est passé, de quoi on a parlé et tout. Là aussi j'en ai parlé déjà plein de fois, mais en fait dans les effets, il y a déjà le fait que la classe politique parisienne maintenant parle d'habitabilité. On parle plus de confort d'été. On parle... Avant on parlait juste de transition. Maintenant... Le vocabulaire de l'adaptation commence à rentrer et surtout, ça parle la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui est quand même une femme extrêmement courageuse, pugnace et qui a beaucoup fait avancer les thématiques écologistes. Parce qu'on peut dire ce qu'on veut sur le fait que oui, tout ça, c'était des idées qui venaient des arcs de la pensée écologiste. Mais à un moment, si la chef n'est pas convaincue elle-même. Elle ne fait pas autant de choses. Donc, elle l'a fait, mais maintenant, elle parle beaucoup de canicule. C'est-à-dire que la manière de parler des choses a changé. Et c'est important parce qu'en politique, une partie du temps, ce n'est pas sans inconvénients, mais une partie du temps, le verbe est performatif. C'est-à-dire que si le politique dit quelque chose, l'administration commence à suivre. L'administration commence à regarder les projets différemment. Et moi, j'ai eu des échos de l'administration dans ce sens-là. Il y a des réflexes, ça y est, c'est venu. De nouveau, c'était pas sur une base, on partait pas d'un désert, mais simplement, c'était assez facile de perdre des arbitrages, de se dire, oui, bon, cet arbre-là, on peut le couper pour construire tel truc, ou bien là, bon, ça coûte quand même un peu plus cher de mettre tel isolant biosourcé à l'extérieur, donc on va faire plutôt un truc à l'intérieur, mais ça va être bien pour le froid, bah oui, mais... Des fois, on fait des trucs bien pour le froid qui ne sont pas bien pour le chaud. Donc, il faut trouver des trucs qui sont bien pour le chaud et pour le froid. Et il y avait des projets qui étaient exemplaires, mais il y avait aussi des projets qui étaient catastrophiques. Et là, ce qu'on me dit, puisque de nouveau, je ne suis pas dans l'exécutif, donc je n'ai pas une ligne directe avec toute une partie de l'administration. Donc, c'est parce que je me suis fait repérer par la mission que j'ai des canaux d'écoute. Et on me dit que la nature des projets a déjà changé. Et par ailleurs, la semaine dernière, la semaine précédente de notre enregistrement, 4 plans ont été votés, le plan climat, le plan santé, résilience et le plan local d'urbanisme. Et c'est une victoire totale de la mission transpartisane Paris à 50 degrés parce que non seulement les préconisations sont reprises, mais la philosophie aussi est reprise. Alors ça ne fait pas tout d'avoir des plans. Il y a une question financière derrière, il y a une question de priorité. Mais franchement, le cap est donné. Et l'étape d'après, elle est aussi sur le fait de ne pas juste avoir un plan A. Parce que là, ça y est, on a un plan A. Et quand on réfléchit en termes de permacrise, il faut des plans B, C, D. Et il faut travailler, à mon sens, beaucoup des questions de quasi... Moi je me pose des questions de comment me préparer d'un point de vue philosophique, éthique, moral, à devoir prendre des décisions de plus en plus difficiles avec le temps qui passe pour au moins 30 ans. Parce que je me projette dans l'univers politique. Il y a plein de côtés très... c'est un coût émotionnel énorme pour moi. Si on n'a pas assez de gens dans l'univers politique qui ont compris la nature, notamment le fait que ce n'est pas une crise comme un truc ponctuel, mais que c'est une rupture dans l'histoire de l'humanité, on ne s'en sortira pas. Et un des facteurs d'effondrement identifiés par Jared Diamond, c'est des élites pédurées.

  • Speaker #1

    qui est très important pour leur mise en place, c'est l'acceptabilité sociale de ces plans, le fait qu'ils soient plus ou moins contestés, voire pas du tout. Quand tu cites Christophe Béchut qui dit qu'il faut se préparer à une France à plus 4 degrés, moi j'ai une question, c'est comment est-ce que... Tu mets ça au regard des injonctions au positivisme qui sont aujourd'hui d'actualité, c'est-à-dire il faut absolument avoir un récit désirable, il faut vendre ça aux gens, il faut qu'ils soient convaincus par le fait qu'il y a de la désirabilité derrière. Comment est-ce qu'il est possible de conjuguer Cette parole, il faut se préparer à une France à plus 4 degrés, et derrière d'appliquer un schéma qui soit propre à la désirabilité. Est-ce que c'est possible

  • Speaker #0

    Alors, j'essaie toujours d'avoir une prise de parole qui équilibre lucidité et enthousiasme. Parce que si tu dis que tout est foutu, ok, on va ensemble aux Antilles, et puis c'est... T'y ponche... T'y ponchez plage, quoi. Et après nous, l'enfer. Par contre, faut pas se raconter d'histoires sur qu'est-ce qui peut être sauvé. Il y a une partie de la biodiversité qui ne peut plus être sauvée. Il y a déjà des effondrements. Il y a au moins un effondrement de la biodiversité qui est documenté. Par contre, je vois... Il n'y a pas de raison en fait que dans un monde qui serait plus contraint, plus chaotique, on ait moins d'histoire d'amour, moins d'histoire d'amitié, moins de fourrir. Et il y a énormément de preuves aussi que quand on a moins de choses, il y a plus de solidarité, plus de liens. Et que... Par ailleurs, on est dans un système de hamster qui court vers la croissance infinie, où en fait, pour pouvoir jouer ce jeu-là, il faut être déprimé. Le système nous force à être déprimé. Le burn-out, c'est clairement une maladie de la croissance infinie dans un monde fini. Donc si on arrête de vouloir jouer à ce jeu-là, je ne vois pas pourquoi il y a tout un tas de choses qui n'arriveraient pas à s'améliorer dans notre quotidien au travers du lien social. Mais par contre, c'est sûr que... la vie va être très très très très très différente. Donc si tu veux, après, en fait, c'est un peu comme la question sur l'optimisme, c'est pas une question d'optimisme, il y a une question de volonté, et puis il y a une question de juste de se raccrocher à des trucs très simples. Et les trucs très simples, oui c'est carrément possible qu'ils continuent. Le fait de pouvoir partager des bons moments dans sa famille, avec ses proches, ses amis, avec ses voisins, on peut quand même le faire dans un monde plus chahuté. Tout est une question de... Tout est une question de quelle est la quantité de gens qu'on va laisser à la rue, soit à la rue au sens dans nos rues ou à la rue en dehors de nos frontières, parce qu'il va quand même y avoir un sacré bordel aussi en termes de migration, puisqu'il y a des zones qu'on est en train de rendre inhabitables. Une fois que j'ai dit ça, je n'ai pas dit grand-chose en termes d'action politique. Moi, le travail que j'ai cherché à faire avec Paris à 50 degrés, il se prolonge à l'heure actuelle avec des scénaristes, des scénaristes de films, des scénaristes de BD, des scénaristes de séries. Parce qu'en fait, il y a des histoires incroyablement joyeuses, romantiques, pas bisounours. à raconter dans ce contexte-là. Mais ne nous voilons pas la face, la seule manière de rendre l'adaptation possible, c'est d'avoir l'atténuation en temps et en heure. Parce que oui, j'arrive à imaginer des scénarios dans lesquels la taille de l'humanité est extrêmement diminuée d'ici la fin du siècle. Mais bon, c'est pas ça qui... En fait, je les mets de côté dans ma tête parce que sinon... C'est le fameux optimisme de la volonté.

  • Speaker #1

    On créera autre chose. Finalement, ce qui est intéressant, et c'est une chose dont on parle beaucoup dans les sphères de l'association, c'est le pouvoir de la culture. Comment est-ce que la culture s'approprie tout ça, que ce soit les scénarios ou la convivialité même. Le principe de créer des contre-récits, finalement, ça passe aussi par ça. C'est le fait d'imaginer des choses ensemble. Comme je te l'ai précisé en introduction, je vois que l'heure tourne. C'est les 10 ans de l'association cette année. Où est-ce que toi tu étais il y a 10 ans Est-ce qu'il y a un point sur lequel... tu veux rebondir, qui t'a marqué sur ces dix dernières années, c'était quoi tes aspirations C'était quoi tes craintes Et éventuellement tout à l'heure tu as parlé de vie familiale, je ne sais pas si tu as des enfants, c'est quoi les grands plans que toi tu fais, pour, parlons des dix prochaines années, imaginons, dans ta vie personnelle

  • Speaker #0

    Alors il y a dix ans je rentrais du Brésil, où j'ai travaillé deux ans là-bas sur le plan climat d'un état. Et je choisissais de revenir en France parce que je ne me voyais pas vivre là-bas, parce que c'est un pays trop violent. Et parce que ma nièce venait de naître et je me disais, je ne me vois pas faire énormément d'aller-retour France-Brésil. Et ça me faisait mal au cœur de me dire que je n'allais pas l'avoir qu'en dire. Donc, je suis rentré et assez rapidement, je suis passé. C'est là que j'ai intégré Carbone 4. Assez rapidement, je suis passé à la semaine de quatre jours et j'ai commencé à faire de l'ébénisterie à côté de ça. Alors maintenant, je suis dans un moment de ma vie très différent parce que je suis toujours au 4-5ème chez Carbone 4. En parallèle de mon mandat, j'ai créé la Carbone 4 Academy, dont... et je vais arrêter d'être le directeur à la fin de l'année. Et c'est Juliette Day qui va reprendre les rênes, parce que j'ai envie de faire autre chose. Et donc au moment où a lieu cette interview, je suis dans une grande incertitude. Parce qu'à la fois, je pense qu'il manque un centre d'excellence en France et en Europe sur l'adaptation et les territoires, alors que c'est une porte d'entrée incroyable pour faire de la politique. Ça, c'est le premier point. Ensuite, d'un point de vue personnel, non, je n'ai pas d'enfant. Et c'est une discussion. C'est une discussion qui n'est pas simple, qui n'est pas résolue. Je ne sais pas du tout de quel côté elle va se résoudre. Ensuite, on est quand même à un moment où ce n'est pas parce qu'on veut qu'on peut.

  • Speaker #1

    Et puis, est-ce que c'est le cœur ou la tête qui décide Ce n'est pas la même chose non plus.

  • Speaker #0

    Oui, et puis... La politique c'est du calcul, l'amour c'est un élan. Faut arrêter de faire du calcul dans ces moments-là. Et ça c'est aussi quelque chose sur lequel je travaille. C'est-à-dire que les gens avec qui je travaille, notamment Juliette que je salue si elle écoute ce podcast, elle me dit que je suis assez pression. En fait j'ai pas mal d'intuition sur ce qui... peut se passer ou pas dans les organisations dans lesquelles on a travaillé ensemble et tout. Enfin, Paris à 50°, c'est aussi une émanation de ce côté-là, parce que tout ça, c'est quand même été pensé avant qu'il y ait autant de gens qui parlent d'adaptation. C'était avant Béchut, alors maintenant il y a une explosion sur l'adaptation, mais Paris à 50°, c'est imaginé en 2020. Donc bon, il y a une part de moi aussi qui travaille au fait d'apprendre à danser avec l'incertitude. Je dis danser parce qu'en fait, il y a aussi ce côté plus relax, plus fun, plus joyeux, plus léger. Je ne contrôle pas tout, donc j'essaie de faire ce que je peux dans ce bordel ambiant et trouver du plaisir sur des petites choses. Puis on verra où tout ça me mène. Je suis de plus en plus sollicité. Pour me représenter, et pour me représenter en montant en grade, donc plutôt pour des postes d'adjoint.

  • Speaker #1

    Tu es plutôt favorable

  • Speaker #0

    Ça va dépendre des conditions en fait. Et là, on est dans un brouillard politique qui est énormissime. Avec, au moment où je te parle, ce matin même, la maire de Paris a annoncé qu'elle ne se... Madame Hidalgo a annoncé qu'elle ne se représenterait pas. De plus en plus de gens ont écologisé leur matrice idéologique, mais ils ne sont pas encore dans une logique de décroissance-résilience. Je te donne un exemple très simple. Il y a beaucoup de socialistes qui ont fait énormément de progrès sur leur compréhension de cette question. Ils ne sont pas prêts à remettre en cause la place du tourisme aérien. et les conséquences que ça aurait sur le tissu économique, et donc les finances de la ville, et donc notre capacité à faire d'autres politiques. Moi, je n'ai pas la réponse, parce que je n'ai pas réussi, en ayant un job au 4-5e entrepreneurial, à agglomérer suffisamment de forces vives autour de moi, parce qu'il ne suffit pas d'avoir des gens qui lèvent la main, en fait, après, il faut les coordonner, pour... construire la réponse intellectuelle avec ce que je disais des plans A, B, C et D. Parce que par exemple, les élections municipales, c'est en 2026. Il faut avoir un plan à Paris si c'est le RN qui passe en 2027. Parce que si c'est une majorité sur le périmètre actuel, donc socialiste, communiste, écologiste, qui gagne, Le Rassemblement National voudra en faire un contre-exemple. Et donc on aura le gouvernement contre nous. Comment tu fais ça Comment tu gouvernes dans une situation pareille Avec très concrètement des gens qui seront pris pour cible. Je ne parle pas d'élus, je parle des gens dans la population, parce qu'ils sont comme ci, comme ça, ils vont être pris pour cible. Des associations, comment tu les protèges ? Qu'est-ce que tu fais ? Comment tu entres en résistance dans ton propre pays par rapport à une idéologie et des pratiques fascistes ? Mais ça c'est valable aussi si... Et je ne suis pas du tout dans un truc genre le bien contre le mal. C'est beaucoup plus compliqué que ça comme réflexion. Il faut se poser la question de pourquoi il y a des gens qui votent RN. C'est parce que globalement, à ma lecture, elle est très écologiste. C'est parce qu'en fait, comme on n'arrive pas à faire une croissance infinie dans un monde fini, ça a des conséquences sociales, ça a des conséquences environnementales, et notamment les conséquences sociales, les gens en ont marre. Et donc, ils votent. pour quelqu'un qui propose de retourner la table et de faire payer les élites. C'est aussi ce qui se passe du côté des États-Unis, d'une certaine manière. Vous avez d'un côté les perdants de la mondialisation qui se rebiffent. Et en face, la réponse écologiste qui consisterait à atterrir et à proposer un contre-modèle, elle n'est pas du tout mature. Et par contre, je ne me vois pas en porte-drapeau de ça, parce que les gens qui peuvent prétendre à un défi pareil, il faut être à un autre niveau en politique. Parce que, comme je le disais, par exemple, je n'ai pas de collaborateurs ou collaboratrices qui ne travaillent que pour moi. Alors que tous les gens qui visent très haut en politique, ils ont déjà des équipes qui bossent. Donc là, on est quand même sur un nœud que je n'arrive pas à résoudre. Et puis là, j'ai mon arc par R50° qui se finit un petit peu. Là, j'ai besoin de reprendre du souffle. Et on va voir ce qui se passe en début 2025. Mais en tout cas, ce que je remarque, c'est que cette pensée-là, qui, je pense, nous lie entre les membres d'Adrastia et moi, qui suis avec un pied chez Carbon4, un pied chez Génération Ecologie. En fait, l'histoire est en train de nous donner raison, mais par contre, je pense qu'on n'est pas assez coordonnés pour peser dans le jeu politique.

  • Speaker #1

    Écoute, ça me paraît être une très belle conclusion et je garderai comme phrase de fin la part de l'incertitude dans la définition des nouveaux imaginaires. Merci beaucoup, Alexandre.

  • Speaker #0

    Merci. Et encore bon anniversaire. Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Vous venez d'écouter le podcast de l'association Adrastia, le podcast qui fait le bilan sur les risques globaux et les perspectives, afin de faire face tous ensemble. Retrouvez toutes les actualités du podcast et de l'association sur le site internet adrastia.org et sur l'ensemble des réseaux sociaux. L'heure du bilan, faire face, 60 minutes pour apprendre à nous adapter au monde tel qu'il est, non tel que nous croyons le maîtriser.

Description

Dans ce nouvel épisode de L’heure du bilan : faire face, nous recevons Alexandre Florentin, ingénieur spécialisé en énergie-climat, directeur de la formation chez Carbone 4, membre de Génération Écologie et conseiller à la Ville de Paris, fondateur de l’Académie du Climat.

Nous abordons avec lui les tensions intimes et politiques de l'engagement écologique : comment conjuguer convictions profondes et réalité de la vie personnelle ? Peut-on prôner la réduction du trafic aérien tout en prenant l’avion pour rejoindre un proche à l’autre bout du monde ? Quel est le rôle des élus dans un système politique souvent figé, voire paralysé ? Quelle marge d’action réelle reste-t-il à ceux qui veulent changer les choses de l’intérieur ?

Entre récit personnel, critique institutionnelle et réflexions stratégiques, Alexandre partage à tous un témoignage lucide et nuancé sur ce que signifie aujourd’hui "faire face" dans un monde fini.

Un échange sincère qui interroge autant les trajectoires individuelles que les structures collectives.

🎧 À écouter dans la continuité de l’épisode précédent, consacré à la circularité des nutriments et à l’agroécologie, pour une plongée dans les multiples dimensions des basculements nécessaires et approfondir “notre capacité à faire”.


Épisode enregistré le 26 novembre 2024

Intervieweur : David Tixier


Pour en savoir plus sur Alexandre Florentin : 


Mission Paris 50°C en 2min - Mairie de Paris : https://youtu.be/ziWCWAAdLZ4?feature=shared


Le Rapport de la Mission Paris 50°C - Mairie de Paris :https://cdn.paris.fr/paris/2023/04/21/paris_a_50_c-le_rapport-Jc4H.pdf 


Lancement 10 avril 2025 de "Nos Villes à 50°C" (généralisation de Paris 50°C):

https://www.linfodurable.fr/climat/le-collectif-des-villes-50degc-en-quete-de-solutions-contre-les-chaleurs-extremes-50354


Alexandre Florentin chez "Plan(s) B", Cyrus Farhangi (1h) : https://youtu.be/r_nbWykbomo?si=kj08gRyAmJjSdd_B


Nouvelle Séquence - Alexandre Florentin - Mission 50°C (1h30) :

https://youtu.be/pekqQBPhbQQ?si=Twj8Z_617ELOX7LP


Alexandre Florentin chez Green Letter Club - Paris à 50°C (1h30) :

https://youtu.be/4b4ToyDuLNU?si=uqoTFOzRivUuOJub


Rejoignez et adhérez à l'association Adrastia :

https://www.adrastia.org/adherer-a-adrastia-fr134.html


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous et bienvenue sur le podcast de l'association Adrastia, l'heure du bilan, faire face. Nous sommes ravis que vous nous écoutiez. Nous allons parcourir ensemble les nouvelles pistes d'adaptation face aux altérations profondes et durables du milieu terrestre qui fragilisent tant nos sociétés que le vivant dans son ensemble. En 2024, la concentration en CO2 dans l'atmosphère continue d'augmenter. Les records de température, détendu des feux de forêt, de durée de sécheresse et de gravité des inondations tombent les uns après les autres. Les désordres écologiques, politiques et sociaux actuels ne sont pas des crises passagères, mais peut-être les premiers symptômes d'effondrement des sociétés industrielles mondialisées. Il est temps de faire le bilan de notre gestion collective des risques globaux et systémiques, parce que si sans maîtrise nous filons droit vers l'abîme, l'illusion de contrôle nous y précipiterait plus vite encore. Dans ce podcast, nous donnerons la parole au lanceur d'alerte aux scientifiques, aux acteurs de terrain, aux transitionneurs et aux penseurs de l'avenir écologique. L'heure du bilan nous confronte à la réalité à venir, la nécessité de l'adaptation, parfois radicale, au regard du risque d'échec ou d'insuffisance de la ténuation. Adrasia est une association de citoyens et de citoyennes qui informe et alerte depuis 2014 sur le risque d'effondrement de nos sociétés, dans le but d'éviter une dégradation trop importante ou brutale de leur structure vitale. et de préserver les meilleures conditions de vie possibles pour le plus grand nombre. Le podcast de l'association Adrasia est une production collective. L'intervieweur ou l'intervieweuse pourra être différent à chaque épisode. Ne vous en mettez pas. Les interviews sont disponibles sur les plateformes habituelles de diffusion. N'oubliez pas de vous abonner. Vous retrouverez également une page Internet dédiée au podcast sur le site Internet adrasia.org. Dans l'heure du bilan, faire face... Nous explorons pendant 60 minutes comment apprendre à nous adapter au monde tel qu'il est, non tel que nous croyons le maîtriser. Et maintenant, place à l'épisode. Bonne écoute

  • Speaker #1

    Alexandre Florentin, bonjour. Merci beaucoup de nous faire le plaisir et l'honneur d'être dans cet épisode du podcast Adrastia. J'espère que tu vas bien, déjà pour commencer.

  • Speaker #2

    Oui, bonjour. Merci de m'avoir invité. Oui, je vais très bien.

  • Speaker #1

    Super. Alors, je vais brièvement m'introduire, mais très très rapidement. Je m'appelle David Tixier, je suis le VP, le vice-président de l'association Adrastia. Dans le cadre du podcast qui nous rassemble aujourd'hui. On va davantage parler d'Alexandre que de Florentin. Et on va faire un petit récapitulatif des dix dernières années, puisque comme tu l'as peut-être appris l'association a dix ans cette année. Et on va regarder dans le rétro ensemble sur ce qui s'est passé sur ces dix dernières années d'un point de vue environnemental, mais pas que pour faire très vite. On va commencer par peut-être une définition du personnage qu'on accueille aujourd'hui, c'est-à-dire toi. Si tu devais présenter un de tes traits de caractère, celui qui te... qui te va le mieux, qui te scie le mieux Je ne sais pas, ça peut être quelque chose qui conditionne ton obstination sur les sujets harassants du quotidien, ou pas. Ou une capacité à encaisser les chocs. Lequel est-ce que tu mettrais le plus en avant

  • Speaker #2

    Déjà, bon anniversaire.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Ensuite, je pense que... Je pense que je suis quelqu'un d'assez pugnace et que cette pugnacité, elle tient dans le temps parce que j'arrive à l'équilibrer avec une capacité que j'essaie vraiment de travailler et que je pourrais qualifier de capacité à s'émerveiller.

  • Speaker #1

    Ok, je trouve que c'est une question importante puisque tu vas le voir par rapport au sujet qu'on va aborder par la suite. Ça annonce un petit peu la couleur sur comment est-ce que tu as pu continuer à te situer dans tous les sujets qu'on va aborder durant l'interview. Est-ce que naturellement tu as un lien avec l'environnement, la nature, peu importe le terme que tu voudras utiliser Ou est-ce que c'est quelque chose qui est arrivé plus tard, au cours de tes études, suite à ton premier emploi Voilà.

  • Speaker #2

    Mes parents, alors moi j'en ai pas de souvenir direct, c'est un souvenir indirect, mais mes parents ils m'ont toujours dit que quand j'étais petit, quelque part autour de 5-8 ans, que je voulais être garde forestier. Mais bon, j'en ai pas de souvenir propre. Ça m'étonne d'autant plus que je suis né à Paris, mais j'ai grandi en Seine-Saint-Denis, dans une zone... Hyper urbaine et que... Enfin, mon quotidien, on ne peut pas dire qu'il n'y avait pas beaucoup de forêt. Donc c'est peut-être ce décalage-là. Et j'ai des souvenirs de vacances à la montagne, à la mer. Mais rien de... Rien de... Pas un moment clé comme ça, d'émerveillement, ou je sais pas quoi. Là, je me suis dit... Et en fait, après, c'est plutôt... Pendant mes études en école d'ingénieur, j'étais complètement perdu et assez triste. Je ne mettais pas ces mots-là à l'époque, mais peut-être qu'il y avait une forme de blues un peu avancé. C'est-à-dire que je ne comprenais pas pourquoi, je ne comprenais plus au bout d'un moment. C'est-à-dire que je suis entré dans des études scientifiques et techniques par curiosité, par envie de résoudre des problèmes. Il y avait ce côté challenge intellectuel qui était très fort. Et puis, jeune adulte, en fait, je me suis rendu compte que je ne comprenais plus pourquoi je faisais ça. Donc, je n'étais pas... Asidu du tout, pendant mes études en école d'ingé, j'ai failli redoubler ou me faire virer, je ne sais plus. Du coup, je me suis dit qu'il fallait que j'arrive à finir ce truc-là que j'ai commencé. Et j'ai fait une année de césure. Et c'est là, notamment dans un stage à Lille. ITZ, qui est un des labos de recherche du CEA, qui mêle les questions techniques et économiques. Je fais un stage de six mois et c'est là que j'ai un peu découvert les questions environnementales comme trame de fond. Parce que dans l'école dans laquelle j'étais, je travaillais quand même pas mal sur les questions énergétiques qui m'intéressaient le plus. Mais là, d'un seul coup, l'environnement, ça donnait un pourquoi à tout ça. Donc j'ai commencé à m'y intéresser sérieusement à ce moment-là. Donc c'était en 2007, si je ne me trompe pas, ou 2008, je crois. Oui, c'est ça, 2008-2009. Et après, j'ai été envoyé dans un... en troisième année, dans une option que je n'avais pas du tout choisie, parce que j'avais des résultats catastrophiques, donc je crois que j'étais avant-dernier de promo, donc je n'avais pas le choix. Et du coup, après, j'ai choisi de prolonger mes études avec un double diplôme à Sciences Po et Jussieu, qui s'appelait Sciences et politiques de l'environnement, qui était une création de Feu Bruno Latour, notamment une de ses idées, d'avoir des gens avec un pied dans les sciences dites dures et dans les sciences sociales. Et ça a été une révolution intellectuelle majeure qui continue de m'accompagner. C'est la première fois que j'ai entendu parler de décroissance, de Jean Covici, de Gramsci. J'ai eu comme prof des gens comme Grégory Kenney, comme Arnaud Gossement, Bruno Latour, Laurence Tubiana, François Gemmene, Hervé Le Treut. Lucas Badi, et dans les sciences sociales, et dans les sciences dures, des gens qui maintenant sont beaucoup plus reconnus dans leurs travaux. D'accord.

  • Speaker #1

    C'est une question que j'allais te poser juste après, mais je pense que ta réponse l'annonce plutôt bien. Ton oh shit moment ce que nous on caractérise comme étant le moment où on prend conscience, on dira, il arrive à ce moment-là C'est avant, c'est après Et seconde question qui pour moi va avec, est-ce que tu es plutôt prise de conscience ou crise de conscience

  • Speaker #2

    Alors, c'est sûr qu'il y a eu plusieurs phases dans ma compréhension du problème. Je dirais que ça restait, comme à l'époque, c'est comme encore beaucoup maintenant, et je pense que c'est une grave erreur de le faire comme ça, mais c'était beaucoup présenté comme des questions de fin du siècle ou 2050. je voyais beaucoup les courbes du GIEC dans toutes les matières que j'étudiais mais il y avait du coup une distance Une distance que je qualifierais d'émotionnelle, jusqu'à ce que je participe à un jeu de rôle vraiment grandeur nature, c'est-à-dire qu'on était une centaine d'élèves, préparation pendant six mois, six mois de jeu de rôle, puis une semaine complète, dont une nuit à Sciences Po, où en fait on rejouait les négociations de Copenhague. Et là j'ai eu, non pas un oh shit moment, mais plutôt c'est passé de la tête au trip. en disant, mais en fait, ces courbes-là, je vais les vivre. Statistiquement parlant, je vais les vivre. Ça, c'était le premier gros choc. Je pense que je mettais de la distance pour me protéger. Donc là, je me rends compte que je vais les vivre, que je vais devoir choisir à quelle courbe je participe. Donc là, un choix éthique. Et... Et notamment que, parce qu'à l'époque je prenais beaucoup l'avion, j'étais dans une association européenne qui en gros organisait des petits Erasmus dans toute l'Europe. J'étais vraiment très impliqué encore à ce moment-là. Et je me dis, parce que j'avais quelques ordres de grandeur, mais je n'avais jamais fait mon bilan carbone personnel. Et là je me dis, ok, en fait là, ce qu'on a fait dans le jeu de rôle, c'est super réaliste. Et... Je ne suis pas du bon côté de la barrière, d'une certaine manière. Au fur et à mesure des années, je pense que je me suis de plus en plus rendu compte qu'on était tellement en retard qu'il y allait avoir des phénomènes de crise, puis de permacrise, qui est... Le mot pour dire que les crises ne s'enchaînent pas tranquillement en nous laissant une capacité à reprendre un souffle, mais en fait elles s'enchaînent vite, voire elles se superposent. Et que nos sociétés ne sont pas préparées à ça. J'en ai une conscience plus aiguë. je pense, mais progressive entre 2015 et 2020, très aiguë en entrant en politique, en disant c'est quand même ça le niveau de compréhension et d'anticipation surtout. Donc c'est là où je me suis dit, ok là il faut vraiment que j'oeuvre au fait qu'une partie de la classe politique comprenne le moment de bascule dans lequel on est. Et j'ai complètement oublié la deuxième partie de ta question. C'était prise de conscience. Qu'est-ce que tu entends par crise de conscience

  • Speaker #1

    Crise de conscience, c'est-à-dire que tu te rends compte de l'ampleur d'un phénomène qui en fait ne te quitte plus du tout

  • Speaker #2

    Ah oui, ça oui. ça me quitte plus du tout et c'est un... À chaque fois que j'ouvre la presse, c'est quasiment une décision consciente de... Est-ce que j'ai la force aujourd'hui de lire la presse Comment est-ce que je vais faire pour cultiver ma capacité à trouver de la joie dans ce que je fais Qu'est-ce que ça veut dire dans ma vie de couple, dans ma vie familiale C'est quotidien. J'ai passé la phase où je vois du bilan carbone partout Je me concentre sur d'autres choses Et ma capacité à m'émerveiller Je la travaille beaucoup par rapport à la biodiversité Donc je m'éloigne aussi des questions climat Parce que C'est en tout cas de la partie baisse des émissions, atténuation, parce qu'en fait, c'est un poids qui est beaucoup trop lourd à porter.

  • Speaker #1

    C'est peut-être pas assez palpable

  • Speaker #2

    Ouais, c'est trop lointain, on voit pas les effets de ce qu'on fait, donc je fais d'autres choses. Dans mon quotidien, je m'intéresse beaucoup plus au fait d'apprendre à faire des choses moi-même, de cuisiner, de travailler mon rapport au temps, à l'information. Le fait de ne pas me retrouver dans la roue du hamster, ce qui est extrêmement facile, compte tenu du fait que j'ai un métier passion d'un côté et la politique de l'autre avec une forme d'hystérisation collective permanente. Donc il faut prendre beaucoup de distance.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #2

    Donc j'essaye en tout cas.

  • Speaker #1

    Je reviendrai sur ce point-là juste après. Je préfère te le dire parce que c'est important de le... préciser, je pense. En gros, là, notre échange, il va tourner autour de quatre gros morceaux. Donc là, c'était celui qui était introductif, d'où on part. Là, j'ai encore une dernière question là-dessus. On ira après sur ton profil à toi, plutôt technique et politique. Ensuite, on aura un gros morceau sur toi, précisément, en dehors de toutes tes activités, ton profil professionnel ou politique. Vraiment, toi, comment est-ce que tu perçois le sujet en tant que citoyen Et on fera un petit bilan à la fin de tout ce qu'on a pu se dire jusque là. La dernière question par rapport à cette partie introductive que j'ai, c'est... Pour moi, il y a, à nouveau, c'est une considération personnelle, mais il y a un très gros sujet qui est celui de la dissonance collective autour de tous les éléments dont tu as déjà pu parler jusqu'à maintenant. Et alors, comme beaucoup de monde, tu as un jour... parler d'une proposition qui a été de, je te cite, la première chose à faire est d'arrêter de prendre l'avion. On en a parlé d'ailleurs à l'instant. Comment est-ce que concrètement on peut faire ça, sachant que le modèle de désirabilité actuelle repose principalement sur le fait de pouvoir bouger à peu près quand on veut pour un prix dérisoire, que c'est une mesure qui est hautement considérée comme liberticide, même si je vais totalement dans ton sens. C'est des questionnements, je pense, qu'on a au quotidien. Et qu'aussi, il y a finalement une question de potentiel financier. Aujourd'hui, on ne fait pas les choses parce qu'elles sont mauvaises, on les fait parce qu'on peut les faire, économiquement parlant. Si on ne peut pas les faire, on ne les fait pas. Mais si on peut le faire, c'est forcément bien. Et j'ai un exemple en tête qui va illustrer tout ça. On l'a vu ces deux, trois dernières années, avec les forts incendies qu'il y a eu en Grèce, durant les périodes estivales, on avait des photos de touristes qui fuyaient les zones, les resorts où ils s'étaient installés. On avait des flammes. qui était en arrière-fond, où les habitants, pour le coup, eux, essayaient d'éteindre l'incendie, et les touristes essayaient absolument de rentrer chez eux. Comment est-ce que, toi, tu vois ça, cette dissonance collective, et le fait qu'on n'arrive pas à en sortir

  • Speaker #2

    Déjà, je l'ai vécu. Je l'ai vécu, et là, je suis dans une autre phase. Donc, déjà, cette question de l'aérien, mais comme tout le reste, il faut être... très vigilants sur le fait de ne pas chercher à faire reposer sur l'individu l'immense poids du changement. Et en même temps, on a aussi une part individuelle de responsabilité dans les choix qu'on fait les uns les autres. Et par ailleurs, on est toutes et tous pris dans une technostructure. qui nous entoure et dont on est interdépendant. Donc il y a des choses sur lesquelles on n'a pas de levier, parce que vous n'avez pas de levier à un moment donné. Pour être plus précis, tu vois, et le dernier point qui est quand même important à rappeler, mais je pense que, je vais le dire très vite, parce que je pense que les personnes qui nous écouteront, elles sont un peu au courant. Mais pour le coup, sur l'aérien, ça a été extrêmement bien détaillé, le fait que, certes, l'aérien a divisé par deux, enfin a augmenté par deux son efficacité énergétique sur les dernières années, donc ramener au passager c'est plus efficace, mais le nombre de voyageurs a tellement augmenté, le nombre de trajets a tellement augmenté que... Que les émissions de l'aérien augmentent et de grandeur c'est comme un grand pays. C'est genre le Japon il me semble, du style un milliard de tonnes par an. Donc c'est pas rien. Et si on actionne tous les leviers technologiques, ça ne fait pas le job. Même en poussant tous les traits de la diffusion, parce qu'entre une technologie qui existe et une technologie qui est diffusée, il faut du temps. Et même avec tout ça, on n'y arrive pas. Donc à un moment, il faut jouer sur le nombre de passagers-kilomètres, c'est ça l'unité, qu'il faut faire baisser. Quand on est au niveau individuel, il faut se poser la question de pourquoi je voyage Qu'est-ce que je cherche Et c'est sûr que c'est toujours compliqué de dire après moi, c'est un peu comme les nouveaux migrants qui ensuite disent je vais fermer la porte derrière de la migration. Moi, c'est arrivé jusqu'à un stade où la dernière fois où j'ai fait un voyage professionnel en avion, j'ai eu la nausée pendant tout le voyage. Parce que j'étais de l'autre côté de la dissonance cognitive. C'est-à-dire que je n'arrivais plus à me protéger par mon déni. J'avais déjà bien réduit et là je fais ce grand voyage atlantique et je me dis oh la vache, j'étais pas bien, j'ai cru que j'allais vomir alors que j'avais déjà pris plein de fois l'avion. Et ce moment là, jusqu'où je me dis en fait c'est bon, je vais réussir à ne plus pouvoir prendre l'avion de ma vie. Entre le moment où je me suis dit et le moment où je l'ai fait, donc avec la baisse et tout, ça a pris 8 ans je crois. 5 ans progressif et au début j'ai fait l'erreur de surtout vouloir dire aux autres d'arrêter plutôt que juste arrêter de le faire et ça a été beaucoup plus puissant par rapport à mes proches qui au début certains qui comprennent d'autres qui ne comprenaient pas. Forcément, c'est des choix forts parce que je me suis fait des amis incroyables en Europe et c'était plus compliqué. Mais c'est aussi un moment où je suis passé à la journée de quatre jours. Donc, j'avais plus de temps. J'utilisais pour voyager en Europe en restant sur le sol. Et puis, il y a... Donc, moi, j'étais parti pour une vie sans avion, mais avec des réflexions. profondes parce que par exemple mon père il est vietnamien et je suis jamais allé au vietnam avec lui et je me suis toujours demandé est ce que est ce que je le fais ou est ce que je le fais pas et c'est donc je suis pas du tout à côté de la plaque par rapport à ce que des dilemmes que des gens se posent c'est pour ça qu'il faut pas faire reposer trop le truc sur l'individu c'est C'est ignoble de faire reposer ces choix-là sur un individu. Et puis là, ma situation personnelle a vachement changé parce que je suis tombé amoureux d'une personne brésilienne qui habite à Paris. qui pendant un moment a dû rentrer au Brésil. Donc j'ai fait le choix d'aller la voir là-bas, parce que j'étais fou amoureux. Et là, on va se marier. Et je refais le choix d'aller là-bas, cinq semaines, pour me marier là-bas et passer du temps avec ma belle famille. C'est des choix qui me coûtent. C'est des choix qui me coûtent parce que je me dis, bon, après avoir prêché autant la baisse de l'aérien, comment je fais et d'une certaine manière j'ai l'impression en tout cas autour de moi que par rapport à des gens qui seraient hyper durs sur la vitesse de baisse etc etc d'une certaine manière ça me réhumanise en disant ouais ok lui aussi il a du mal lui aussi il essaye, lui aussi il en parle et par contre pour le coup j'utilise aussi beaucoup ma posture en tant qu'élu élus pour avoir avancé ce sujet-là. Et ça n'a pas fait beaucoup de bruit, mais j'ai réussi à faire en sorte que la ville de Paris, dans ses documents de planification officielle, donc en l'occurrence le plan climat, dise, la ville de Paris, première ville touristique, première destination touristique au monde, demande à l'État de faire baisser le nombre de créneaux de décollage et d'atterrissage des quatre aéroports franciliens. Énorme victoire politique qui n'a pas été beaucoup relayée et qui en 2020, l'année de l'élection, était inimaginable, y compris dans les rangs d'Europe Ecologie-Les Verts qui sont un peu... un peu mes camarades de jeu dans la famille écologiste.

  • Speaker #1

    C'est une remarque intéressante, le fait qu'on soit pris en tenaille par nos paramètres personnels, familiaux ou pas d'ailleurs. Je me permets de rebondir sur ton exemple. Moi, ma femme est d'origine antillaise, et on a déjà eu cette discussion avec la partie de sa famille qui est de Guadeloupe. Et concrètement, moi, je veux rentrer chez moi. Je sais que depuis X générations, on est en Normandie. Je suis chez moi. Je vois ma famille. C'est une place qui me parle. Ces gens-là, qui sont originaires d'un département ultramarin, chez eux, au sens propre, la terre où ils ont grandi, c'est ailleurs. C'est pas ici. Et de quel droit est-ce que moi, finalement, est-ce que j'ai le droit de les priver La réponse est non, d'ailleurs. De rentrer chez eux à des récurrences qui sont les leurs, peu importe. C'est une question très... très délicates, finalement. Ça touche à l'identité, je pense que c'est là aussi où on touche parfois du doigt les limites de tous les raisonnements, si on comptabilise et qu'on raisonne uniquement d'un point de vue carbone, comme tu le disais tout à l'heure. C'est une dimension particulière. Voilà.

  • Speaker #2

    Et moi, ça m'a justement donné envie d'être encore plus, entre guillemets, radical sur le fait de t'arrêter les autres voyages. En me disant, ok, en fait, je vois bien que celui-là, il est beaucoup plus important que ce que je faisais avant. Et par contre, moi, dans mon couple, très rapidement, ma femme, elle a compris qu'on ne prendrait jamais l'avion pour voyager en Europe. Que c'était juste impensable. Et que les fois où on allait au Brésil... Ce serait longtemps. Par contre, l'effort, il a l'air de se dire comment est-ce qu'on fait pour aller 5, 6 semaines là-bas, de prendre des congés, de travailler à distance quand c'est possible, je ne sais pas quoi, mais de se dire, en fait, la partie sacrifice, la partie effort, elle est sur cette dimension. Comment est-ce qu'on va s'organiser pour pouvoir partir longtemps Et voilà.

  • Speaker #1

    Ça pose aussi la question des aménagements liés au travail. Je veux dire, prendre cinq semaines, tout le monde ne peut pas. Bien sûr. C'est des questionnements qui dépendent de critères assez externes. Je ne l'ai pas précisé, donc on va survoler très rapidement ton profil. Tu as un profil d'ingénieur, tu es spécialisé sur les questions énergie et climat, ça tu en as parlé. Tu es directeur de la formation chez Carbone 4, je ne dis pas de bêtises, super. Aussi membre de Génération Ecologie, ça aussi tu en as parlé, et tu es conseiller à la mairie de Paris. J'ai une question simple pour commencer, tu verras c'est une boutade. Pourquoi ça marche pas tout ça Plus sérieusement, quel regard est-ce que tu portes sur, on dira, l'immobilisme ambiant pour faire très vite, et sur les blocages qui existent tant sur les partis institutionnels, politiques ou citoyens On a un petit peu parlé là, mais j'aimerais qu'on creuse davantage ce sujet-là maintenant.

  • Speaker #2

    Vaste question. Alors de nouveau c'est vu de ma fenêtre, donc déjà pour que les gens comprennent, j'ai été élu aux élections municipales. Paris comme Lyon et Marseille en fait vous êtes élu par un arrondissement. Et il y a une partie de ces élus-là qui vont dans ce qu'on appelle le Conseil de Paris, qui est une sorte de petite assemblée nationale, mais à l'échelle parisienne. Et on est 163 à siéger là-bas. Et la première chose qu'on fait, c'est qu'entre nous, entre ces 163 personnes, on vote pour le ou la maire. En fait, le ou la maire à Paris, c'est une élection indirecte. Donc c'est un peu comme si j'étais grand électeur, c'est un mot dont on entend parler avec les États-Unis. Ça fonctionne comme ça. Et pendant longtemps, le Conseil de Paris, je crois que c'est plus trop le cas, mais c'était considéré comme... une sorte de marche-pied national ou une espèce de mini-assemblée nationale. Il y avait des fonctionnements qui étaient calqués sur cette assemblée. Et pour revenir à ta question, déjà, moi, j'ai l'impression qu'il y a un effet clanique qui est hyper fort. Mon début de mandat, c'est l'affaire Christophe Girard. L'affaire Christophe Girard, c'est quoi C'est un élu dans la liste socialiste qui s'appelle Christophe Girard, qui s'apprête à être nommé, qui va être nommé, qui a été nommé, pas très longtemps, mais il a quand même été nommé adjoint à la culture. Et quelques mois avant, vous avez une femme qui s'appelle Vanessa Springora, qui sort un livre qui s'appelle Le consentement, qui raconte... son adolescence et la relation qu'elle a eue avec un qui s'appelle Gabriel Maznev auteur pédocriminel qui a dédié sa propre version comme il écrivait sur ce genre de relation qu'il avait il a écrit un livre qui s'appelle La prunelle de mes yeux et ce livre est dédié Donc ce livre raconte son histoire avec Vanessa Springrois, et ce livre est dédicacé à Christophe Girard, le mec qui vient de se faire élire et qui... Et donc là, je passe les détails, mais il y a une guerre incroyable à l'hôtel de ville entre les socialistes et les écologistes, avec notamment deux élus, que sont Raphaël Rémy Leleu et Alice Coffin, qui... son vent debout contre sa nomination en tant qu'adjoint à la culture. Vous pouvez regarder, c'est hyper bien documenté sur ce qui s'est passé. Mais à ce moment-là, quand je vois qu'il y a des gens dans la majorité, grâce à laquelle j'ai été élu, qui ne se rendent pas compte...

  • Speaker #0

    du problème parce que à minima, moi ce qui m'a choqué c'est que Christophe Girard, quand il a rencontré le groupe écologiste, il a parlé des amours de Maznef. C'est comme ça qu'il qualifiait les relations entre Maznef et des adolescentes de 13, 14, 15 ans. Et là je me suis dit c'est dingue. Je mentionne ce truc là, cette affaire là, parce qu'en fait ça a été hyper fort dans ma... On va dire déjà c'était ma... Je débarquais complètement en politique, l'ingénieur, pour parler de questions énergie-climat, et là j'ai des décisions très fortes à prendre. sur un truc qui n'a rien à voir, et je ne sais pas comment je vais juger de cette question, je me pose beaucoup de questions. Et c'est juste, c'est notamment cette phrase de, quand il parle des amours de Maznev, ça me choque tellement, je me dis... Là, ça me choque en tant que citoyen, en tant qu'humain, en tant qu'homme. Je me dis, mais ce n'est pas possible de le qualifier comme ça. Si ça se trouve, OK, Girard, il n'a jamais rien fait de mal de sa vie, mais parler de cette relation-là comme ça, c'est une faute politique. Et là, je me rends compte que, en fait, tout le monde se tient par les coucougnettes dans cette histoire, par la barbichette pour être plus poli. Désolé. Et en fait, n'arrive plus à penser de manière autonome. Et ça, je pense que c'est un facteur. Parce qu'en fait, ils doivent tous leur place à quelqu'un dans cette histoire. Parce qu'il n'y a que deux manières d'entrer en politique. Soit vous pariez sur le bon cheval, vous êtes dans la bonne motion, dans le bon parti. Quelqu'un vous embarque dans sa conquête du pouvoir, soit vous existez par vous-même. Par exemple, demain, si Jean-Marc Lancovici décide d'entrer en politique, il n'a pas besoin d'un parti. Il n'a pas besoin que quelqu'un l'adoube. Il est tellement connu à l'extérieur qu'il peut juste débarquer dans le truc. Et comme ce n'est pas souvent le cas, les gens se tiennent et donc ils ont du mal à... Et ça, ça explique énormément... Cet effet clanique explique énormément l'inertie. parce que du coup, vous êtes un peu piégé par les décisions que d'autres que vous-même ont pris. Mais parce que ça a été des alliés, parce qu'il y a des mécanismes, des cordes de rappel qui sont extrêmement fortes. Un autre exemple, moi je suis complètement contre la manière dont on a géré le chantier de rénovation de la gare d'Austerlitz, qui est un énorme chantier. à côté de ça, je m'entends bien avec le... Donc j'ai des désaccords avec le maire du 13ème là-dessus. Par contre, je trouve qu'il a d'énormes qualités par ailleurs. On discute beaucoup de la question de l'adaptation. Moi, je trouve que c'est quelqu'un qui est véritablement convaincu d'une sorte d'humanisme, on va dire. Mais on n'est pas d'accord sur ce projet-là. Eh bien, il aurait... C'est parce qu'on arrive à s'entendre par ailleurs qu'on a réussi à se mettre d'accord qu'on n'est pas d'accord sur ce projet-là. Mais c'est hyper rare dans l'univers politique d'arriver à se mettre d'accord qu'on n'est pas d'accord. Sinon, il y a des manières de mettre de la pression qui sont dingues. Et pendant la mission Paris à 50 degrés que j'ai présidée... l'appareil a utilisé des manières de me faire rentrer dans le rang, de me mettre la pression pour bien me faire sentir que je n'avais pas le contrôle, pour essayer. C'était hallucinant. Et j'ai très peu de pouvoir. Je ne suis pas adjoint. Je ne commande pas l'administration, je ne pilote pas de budget, je n'ai pas d'équipe. Je suis vraiment assez bas dans la chaîne alimentaire. Et pourtant, tout de suite, je pense qu'il y a un côté un peu dressage, c'est-à-dire que les nouveaux arrivants, tout de suite, il faut les dresser. S'il y en a un qui commence à...

  • Speaker #1

    Comment est-ce qu'elle naît cette mission Paris 50° C'était la grande question que je voulais te poser là-dessus, parce que je trouve que c'est quelque chose qui est très rattaché à toi en tant que conseiller. C'est quoi le contexte de la création de la mission. Et elle touche à différentes typologies. Donc il y a les mentions des infrastructures existantes, de l'approvisionnement énergétique, de la question de l'eau. Il me semble également qu'il y a une partie sur l'agriculture, si je ne dis pas de bêtises, ou du moins l'alimentation. Comment est-ce que tu arrives à présenter un... Un projet si large, dont les conséquences peuvent être terribles, quand on parle de Paris à 50 degrés, moi j'ai une amie qui travaille notamment sur la gestion des infrastructures ferroviaires, elle m'expliquait qu'aux alentours de 40 degrés, tu as beaucoup de défaillance du matériel, je crois que tu as travaillé également sur ce sujet, du matériel qui permet aux trains de circuler. Dans une ville... Ou par exemple, le rapport Utopie dit Paris a moins de 2% d'autonomie alimentaire. 50 degrés, ça veut dire quoi pour tout ça, en termes de risque Et comment est-ce que les résultats de tes travaux sont accueillis par tes collègues à ce moment-là

  • Speaker #0

    Alors, je vais d'abord parler de comment ça a été lancé. Oui, bien sûr. Et après, on reviendra sur la suite. Déjà, moi j'arrive, je suis élu en 2020. Mais avant... En 2017, il y a un papier de Météo France qui sort, qui dit qu'on peut avoir entre 50 et 55 degrés en France métropolitaine dans la deuxième moitié du siècle. Et c'est un papier que mes collègues chez Carbone 4 diffusent. C'est comme ça que j'ai accès. J'ai appris par la suite que... Et ce papier, il me choque. Il me choque au sens... Je pensais pas... Pendant mes études, j'avais jamais entendu parler de température comme ça. Je me dis, comment c'est physiquement possible, même avec des scénarios de réchauffement importants Et quand je suis élu, par ailleurs, je me rends compte que la ville de Paris ne découvre pas du tout ces sujets-là. C'est-à-dire qu'il y a déjà un plan climat qui est historiquement ancien, avec un volet adaptation. La canicule de 2003 a été un choc, il y a eu des mesures et tout. Mais c'est de la prospective en regardant le rétroviseur. C'est-à-dire que sans vraiment le dire, en fait ce qu'on est en train de faire c'est se préparer à un retour de la canicule de 2003. Et j'ai un conseil de Delphine Bateau qui me dit Trouve-toi un couloir de nage et avance. Donc, d'un côté, j'essaie gentiment de... Et moi, je sais faire deux choses, atténuation, adaptation. Donc, côté atténuation, je me dis qu'il y a déjà pas mal de choses qui sont faites quand même à Paris. Sauf sur le tourisme aérien. Mais je n'arrive pas à faire avancer le sujet. Il n'y a que quatre ans plus tard que j'arrive à le faire avancer. Et je me dis, par contre, sur l'adaptation quand même... C'est pas folichon, quoi. Il y a des petits trucs, mais c'est vraiment hyper ponctuel. Il y a tellement de décisions contraires à l'adaptation qui sont prises, c'est que c'est pas entré dans les mentalités. Il n'y a pas un réflexe adaptation qui s'est développé. Donc j'en parle au groupe écologiste, qui, du fait de toutes les batailles autour de l'affaire Girard avant, disent, ok, il faut que... La mission, parce qu'on n'en a qu'une seule, pendant tout le groupe écologiste peut en déclencher qu'une seule, il faut que ce soit sur un sujet environnemental. Et donc le groupe écolo est convaincu, mais juste, je fais mon consultant, j'ai mon PowerPoint, j'explique pourquoi physiquement il faut se préparer, qu'est-ce qui peut arriver, je parle des trucs, des rails, SNCF, parce que ça c'était déjà assez bien documenté à l'époque. Je fais une analyse politique aussi en disant en fait l'adaptation c'est un vocabulaire de la protection, de la sécurité, de la sûreté etc. De la gestion de crise et donc la droite peut s'en saisir, les droites peuvent s'en saisir. Et donc ils peuvent aussi, si on ne le fait pas, ils vont s'en saisir et ils vont le faire d'une manière qui peut-être ne conviendra pas. Et donc il faut occuper ce terrain. Et donc ça, je le dis en 2020, et tout le monde est d'accord. Et après, il faut deux ans pour que ça se lance vraiment. Mais c'est ça le point de départ. Un mélange, il y a une base scientifique, une intuition personnelle qu'en fait, ce sujet-là peut prendre aussi. Parce que dans tous les phénomènes environnementaux, quand on habite à Paris... les vagues de chaleur, c'est le truc le plus perceptible, le plus sensible. Et donc je me dis, c'est intéressant d'essayer d'entrer par la porte de l'adaptation pour faire bouger les gens. Et pour l'instant, ça marche. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des écueils possibles en entrant par l'adaptation, qu'ensuite les gens peuvent oublier l'atténuation ou d'autres choses, mais comme le pourquoi de l'action, il est plus clair, ça crée moins de résistance. Si tu commences à dire à des gens on va travailler pour mieux vivre les canicules, et ensuite tu glisses des choses pour que ce soit des solutions simples, robustes, et assez vite tu comprends que tu ne pourras pas tout adapter à n'importe quoi, et donc il faut aller vers des modes de vie plus simples, et que ça va faire l'atténuation. le raisonnement est beaucoup plus facile à comprendre. Dans ma pratique, depuis que la mission est sortie, parce que j'en ai énormément parlé, j'ai rencontré énormément de publics différents, dans toute la France et à l'étranger, c'est un chemin qui est plus fluide.

  • Speaker #1

    Aussi parce que c'est quelque chose de plus palpable. C'est peut-être aussi pour ça qu'ils perçoivent tout de suite les risques. Quand tu pars d'île de chaleur, c'est quelque chose qui est déjà ressenti maintenant.

  • Speaker #0

    Voilà, quelle que soit la classe d'âge, quelle que soit la sociologie, quelles que soient les valeurs aussi parce que c'est du réel et donc il ya au moins il n'y a pas cette barrière à l'entrée parce que pas se mentir quand même entre le barbec et la canicule il ya quand même quelques étapes et il faut avoir le temps, il faut avoir le il faut accepter des postures scientifiques. Tandis que si on fait le raisonnement dans l'autre sens, ça a l'air, en tout cas pour l'instant, ça a l'air plus simple. Et un truc aussi, c'est que maintenant, je lis de moins en moins de trucs de climatologie. mais beaucoup plus de sciences sociales et notamment d'études sur la communication. Et on m'avait toujours dit, on parlait de 2050, on est une espèce adaptative, on attendra que ça arrive pour... Je me suis dit, bon, là c'est le bon moment, parce que ça commence déjà bien, c'est déjà bien palpable. Je crois qu'il y a 7 Français sur 10 qui disent qu'ils ont vu une manifestation du changement climatique sur leur territoire. Et du coup, je me dis, il ne faut pas que j'appelle ça Paris 2050 ou Paris 2100 ou Paris plus 4 degrés, qui n'était pas une terminologie très bien acceptée à l'époque, puisqu'en fait, il n'y avait pas encore eu le travail. Au moment où je lance tout ça, il n'y avait pas encore eu le plan national d'adaptation, Christophe Béchut qui parle de plus 4 degrés, France, etc. Et du coup, moi, je suis là avec mon étude Météo France en main et je me dis, est-ce que j'ose Appeler la mission Paris à 50°. Et ça a été une énorme hésitation. Parce que je savais que ça avait du sens scientifique. Mais je me suis dit, est-ce qu'on va me pointer du doigt comme un cassandre Le chef de service... Vous essayez juste de nous faire peur, etc. Et en fait, ça a fait 50% du job. Parce que derrière, c'est... très théâtral, mais vous avez l'unité de lieu et vous avez quasiment l'intrigue qui est dans ce titre, Paris à 50 degrés. Et après, il y avait d'autres choses à faire, parce que c'était une mission transpartisane. Mais ça, j'en ai déjà beaucoup parlé par ailleurs sur comment gérer ce côté transpartisan, comment embarquer les autres forces politiques qui ont été très motrices pendant la mission. Tu me demandais les effets, donc je saute l'étape, qu'est-ce qui s'est passé, de quoi on a parlé et tout. Là aussi j'en ai parlé déjà plein de fois, mais en fait dans les effets, il y a déjà le fait que la classe politique parisienne maintenant parle d'habitabilité. On parle plus de confort d'été. On parle... Avant on parlait juste de transition. Maintenant... Le vocabulaire de l'adaptation commence à rentrer et surtout, ça parle la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui est quand même une femme extrêmement courageuse, pugnace et qui a beaucoup fait avancer les thématiques écologistes. Parce qu'on peut dire ce qu'on veut sur le fait que oui, tout ça, c'était des idées qui venaient des arcs de la pensée écologiste. Mais à un moment, si la chef n'est pas convaincue elle-même. Elle ne fait pas autant de choses. Donc, elle l'a fait, mais maintenant, elle parle beaucoup de canicule. C'est-à-dire que la manière de parler des choses a changé. Et c'est important parce qu'en politique, une partie du temps, ce n'est pas sans inconvénients, mais une partie du temps, le verbe est performatif. C'est-à-dire que si le politique dit quelque chose, l'administration commence à suivre. L'administration commence à regarder les projets différemment. Et moi, j'ai eu des échos de l'administration dans ce sens-là. Il y a des réflexes, ça y est, c'est venu. De nouveau, c'était pas sur une base, on partait pas d'un désert, mais simplement, c'était assez facile de perdre des arbitrages, de se dire, oui, bon, cet arbre-là, on peut le couper pour construire tel truc, ou bien là, bon, ça coûte quand même un peu plus cher de mettre tel isolant biosourcé à l'extérieur, donc on va faire plutôt un truc à l'intérieur, mais ça va être bien pour le froid, bah oui, mais... Des fois, on fait des trucs bien pour le froid qui ne sont pas bien pour le chaud. Donc, il faut trouver des trucs qui sont bien pour le chaud et pour le froid. Et il y avait des projets qui étaient exemplaires, mais il y avait aussi des projets qui étaient catastrophiques. Et là, ce qu'on me dit, puisque de nouveau, je ne suis pas dans l'exécutif, donc je n'ai pas une ligne directe avec toute une partie de l'administration. Donc, c'est parce que je me suis fait repérer par la mission que j'ai des canaux d'écoute. Et on me dit que la nature des projets a déjà changé. Et par ailleurs, la semaine dernière, la semaine précédente de notre enregistrement, 4 plans ont été votés, le plan climat, le plan santé, résilience et le plan local d'urbanisme. Et c'est une victoire totale de la mission transpartisane Paris à 50 degrés parce que non seulement les préconisations sont reprises, mais la philosophie aussi est reprise. Alors ça ne fait pas tout d'avoir des plans. Il y a une question financière derrière, il y a une question de priorité. Mais franchement, le cap est donné. Et l'étape d'après, elle est aussi sur le fait de ne pas juste avoir un plan A. Parce que là, ça y est, on a un plan A. Et quand on réfléchit en termes de permacrise, il faut des plans B, C, D. Et il faut travailler, à mon sens, beaucoup des questions de quasi... Moi je me pose des questions de comment me préparer d'un point de vue philosophique, éthique, moral, à devoir prendre des décisions de plus en plus difficiles avec le temps qui passe pour au moins 30 ans. Parce que je me projette dans l'univers politique. Il y a plein de côtés très... c'est un coût émotionnel énorme pour moi. Si on n'a pas assez de gens dans l'univers politique qui ont compris la nature, notamment le fait que ce n'est pas une crise comme un truc ponctuel, mais que c'est une rupture dans l'histoire de l'humanité, on ne s'en sortira pas. Et un des facteurs d'effondrement identifiés par Jared Diamond, c'est des élites pédurées.

  • Speaker #1

    qui est très important pour leur mise en place, c'est l'acceptabilité sociale de ces plans, le fait qu'ils soient plus ou moins contestés, voire pas du tout. Quand tu cites Christophe Béchut qui dit qu'il faut se préparer à une France à plus 4 degrés, moi j'ai une question, c'est comment est-ce que... Tu mets ça au regard des injonctions au positivisme qui sont aujourd'hui d'actualité, c'est-à-dire il faut absolument avoir un récit désirable, il faut vendre ça aux gens, il faut qu'ils soient convaincus par le fait qu'il y a de la désirabilité derrière. Comment est-ce qu'il est possible de conjuguer Cette parole, il faut se préparer à une France à plus 4 degrés, et derrière d'appliquer un schéma qui soit propre à la désirabilité. Est-ce que c'est possible

  • Speaker #0

    Alors, j'essaie toujours d'avoir une prise de parole qui équilibre lucidité et enthousiasme. Parce que si tu dis que tout est foutu, ok, on va ensemble aux Antilles, et puis c'est... T'y ponche... T'y ponchez plage, quoi. Et après nous, l'enfer. Par contre, faut pas se raconter d'histoires sur qu'est-ce qui peut être sauvé. Il y a une partie de la biodiversité qui ne peut plus être sauvée. Il y a déjà des effondrements. Il y a au moins un effondrement de la biodiversité qui est documenté. Par contre, je vois... Il n'y a pas de raison en fait que dans un monde qui serait plus contraint, plus chaotique, on ait moins d'histoire d'amour, moins d'histoire d'amitié, moins de fourrir. Et il y a énormément de preuves aussi que quand on a moins de choses, il y a plus de solidarité, plus de liens. Et que... Par ailleurs, on est dans un système de hamster qui court vers la croissance infinie, où en fait, pour pouvoir jouer ce jeu-là, il faut être déprimé. Le système nous force à être déprimé. Le burn-out, c'est clairement une maladie de la croissance infinie dans un monde fini. Donc si on arrête de vouloir jouer à ce jeu-là, je ne vois pas pourquoi il y a tout un tas de choses qui n'arriveraient pas à s'améliorer dans notre quotidien au travers du lien social. Mais par contre, c'est sûr que... la vie va être très très très très très différente. Donc si tu veux, après, en fait, c'est un peu comme la question sur l'optimisme, c'est pas une question d'optimisme, il y a une question de volonté, et puis il y a une question de juste de se raccrocher à des trucs très simples. Et les trucs très simples, oui c'est carrément possible qu'ils continuent. Le fait de pouvoir partager des bons moments dans sa famille, avec ses proches, ses amis, avec ses voisins, on peut quand même le faire dans un monde plus chahuté. Tout est une question de... Tout est une question de quelle est la quantité de gens qu'on va laisser à la rue, soit à la rue au sens dans nos rues ou à la rue en dehors de nos frontières, parce qu'il va quand même y avoir un sacré bordel aussi en termes de migration, puisqu'il y a des zones qu'on est en train de rendre inhabitables. Une fois que j'ai dit ça, je n'ai pas dit grand-chose en termes d'action politique. Moi, le travail que j'ai cherché à faire avec Paris à 50 degrés, il se prolonge à l'heure actuelle avec des scénaristes, des scénaristes de films, des scénaristes de BD, des scénaristes de séries. Parce qu'en fait, il y a des histoires incroyablement joyeuses, romantiques, pas bisounours. à raconter dans ce contexte-là. Mais ne nous voilons pas la face, la seule manière de rendre l'adaptation possible, c'est d'avoir l'atténuation en temps et en heure. Parce que oui, j'arrive à imaginer des scénarios dans lesquels la taille de l'humanité est extrêmement diminuée d'ici la fin du siècle. Mais bon, c'est pas ça qui... En fait, je les mets de côté dans ma tête parce que sinon... C'est le fameux optimisme de la volonté.

  • Speaker #1

    On créera autre chose. Finalement, ce qui est intéressant, et c'est une chose dont on parle beaucoup dans les sphères de l'association, c'est le pouvoir de la culture. Comment est-ce que la culture s'approprie tout ça, que ce soit les scénarios ou la convivialité même. Le principe de créer des contre-récits, finalement, ça passe aussi par ça. C'est le fait d'imaginer des choses ensemble. Comme je te l'ai précisé en introduction, je vois que l'heure tourne. C'est les 10 ans de l'association cette année. Où est-ce que toi tu étais il y a 10 ans Est-ce qu'il y a un point sur lequel... tu veux rebondir, qui t'a marqué sur ces dix dernières années, c'était quoi tes aspirations C'était quoi tes craintes Et éventuellement tout à l'heure tu as parlé de vie familiale, je ne sais pas si tu as des enfants, c'est quoi les grands plans que toi tu fais, pour, parlons des dix prochaines années, imaginons, dans ta vie personnelle

  • Speaker #0

    Alors il y a dix ans je rentrais du Brésil, où j'ai travaillé deux ans là-bas sur le plan climat d'un état. Et je choisissais de revenir en France parce que je ne me voyais pas vivre là-bas, parce que c'est un pays trop violent. Et parce que ma nièce venait de naître et je me disais, je ne me vois pas faire énormément d'aller-retour France-Brésil. Et ça me faisait mal au cœur de me dire que je n'allais pas l'avoir qu'en dire. Donc, je suis rentré et assez rapidement, je suis passé. C'est là que j'ai intégré Carbone 4. Assez rapidement, je suis passé à la semaine de quatre jours et j'ai commencé à faire de l'ébénisterie à côté de ça. Alors maintenant, je suis dans un moment de ma vie très différent parce que je suis toujours au 4-5ème chez Carbone 4. En parallèle de mon mandat, j'ai créé la Carbone 4 Academy, dont... et je vais arrêter d'être le directeur à la fin de l'année. Et c'est Juliette Day qui va reprendre les rênes, parce que j'ai envie de faire autre chose. Et donc au moment où a lieu cette interview, je suis dans une grande incertitude. Parce qu'à la fois, je pense qu'il manque un centre d'excellence en France et en Europe sur l'adaptation et les territoires, alors que c'est une porte d'entrée incroyable pour faire de la politique. Ça, c'est le premier point. Ensuite, d'un point de vue personnel, non, je n'ai pas d'enfant. Et c'est une discussion. C'est une discussion qui n'est pas simple, qui n'est pas résolue. Je ne sais pas du tout de quel côté elle va se résoudre. Ensuite, on est quand même à un moment où ce n'est pas parce qu'on veut qu'on peut.

  • Speaker #1

    Et puis, est-ce que c'est le cœur ou la tête qui décide Ce n'est pas la même chose non plus.

  • Speaker #0

    Oui, et puis... La politique c'est du calcul, l'amour c'est un élan. Faut arrêter de faire du calcul dans ces moments-là. Et ça c'est aussi quelque chose sur lequel je travaille. C'est-à-dire que les gens avec qui je travaille, notamment Juliette que je salue si elle écoute ce podcast, elle me dit que je suis assez pression. En fait j'ai pas mal d'intuition sur ce qui... peut se passer ou pas dans les organisations dans lesquelles on a travaillé ensemble et tout. Enfin, Paris à 50°, c'est aussi une émanation de ce côté-là, parce que tout ça, c'est quand même été pensé avant qu'il y ait autant de gens qui parlent d'adaptation. C'était avant Béchut, alors maintenant il y a une explosion sur l'adaptation, mais Paris à 50°, c'est imaginé en 2020. Donc bon, il y a une part de moi aussi qui travaille au fait d'apprendre à danser avec l'incertitude. Je dis danser parce qu'en fait, il y a aussi ce côté plus relax, plus fun, plus joyeux, plus léger. Je ne contrôle pas tout, donc j'essaie de faire ce que je peux dans ce bordel ambiant et trouver du plaisir sur des petites choses. Puis on verra où tout ça me mène. Je suis de plus en plus sollicité. Pour me représenter, et pour me représenter en montant en grade, donc plutôt pour des postes d'adjoint.

  • Speaker #1

    Tu es plutôt favorable

  • Speaker #0

    Ça va dépendre des conditions en fait. Et là, on est dans un brouillard politique qui est énormissime. Avec, au moment où je te parle, ce matin même, la maire de Paris a annoncé qu'elle ne se... Madame Hidalgo a annoncé qu'elle ne se représenterait pas. De plus en plus de gens ont écologisé leur matrice idéologique, mais ils ne sont pas encore dans une logique de décroissance-résilience. Je te donne un exemple très simple. Il y a beaucoup de socialistes qui ont fait énormément de progrès sur leur compréhension de cette question. Ils ne sont pas prêts à remettre en cause la place du tourisme aérien. et les conséquences que ça aurait sur le tissu économique, et donc les finances de la ville, et donc notre capacité à faire d'autres politiques. Moi, je n'ai pas la réponse, parce que je n'ai pas réussi, en ayant un job au 4-5e entrepreneurial, à agglomérer suffisamment de forces vives autour de moi, parce qu'il ne suffit pas d'avoir des gens qui lèvent la main, en fait, après, il faut les coordonner, pour... construire la réponse intellectuelle avec ce que je disais des plans A, B, C et D. Parce que par exemple, les élections municipales, c'est en 2026. Il faut avoir un plan à Paris si c'est le RN qui passe en 2027. Parce que si c'est une majorité sur le périmètre actuel, donc socialiste, communiste, écologiste, qui gagne, Le Rassemblement National voudra en faire un contre-exemple. Et donc on aura le gouvernement contre nous. Comment tu fais ça Comment tu gouvernes dans une situation pareille Avec très concrètement des gens qui seront pris pour cible. Je ne parle pas d'élus, je parle des gens dans la population, parce qu'ils sont comme ci, comme ça, ils vont être pris pour cible. Des associations, comment tu les protèges ? Qu'est-ce que tu fais ? Comment tu entres en résistance dans ton propre pays par rapport à une idéologie et des pratiques fascistes ? Mais ça c'est valable aussi si... Et je ne suis pas du tout dans un truc genre le bien contre le mal. C'est beaucoup plus compliqué que ça comme réflexion. Il faut se poser la question de pourquoi il y a des gens qui votent RN. C'est parce que globalement, à ma lecture, elle est très écologiste. C'est parce qu'en fait, comme on n'arrive pas à faire une croissance infinie dans un monde fini, ça a des conséquences sociales, ça a des conséquences environnementales, et notamment les conséquences sociales, les gens en ont marre. Et donc, ils votent. pour quelqu'un qui propose de retourner la table et de faire payer les élites. C'est aussi ce qui se passe du côté des États-Unis, d'une certaine manière. Vous avez d'un côté les perdants de la mondialisation qui se rebiffent. Et en face, la réponse écologiste qui consisterait à atterrir et à proposer un contre-modèle, elle n'est pas du tout mature. Et par contre, je ne me vois pas en porte-drapeau de ça, parce que les gens qui peuvent prétendre à un défi pareil, il faut être à un autre niveau en politique. Parce que, comme je le disais, par exemple, je n'ai pas de collaborateurs ou collaboratrices qui ne travaillent que pour moi. Alors que tous les gens qui visent très haut en politique, ils ont déjà des équipes qui bossent. Donc là, on est quand même sur un nœud que je n'arrive pas à résoudre. Et puis là, j'ai mon arc par R50° qui se finit un petit peu. Là, j'ai besoin de reprendre du souffle. Et on va voir ce qui se passe en début 2025. Mais en tout cas, ce que je remarque, c'est que cette pensée-là, qui, je pense, nous lie entre les membres d'Adrastia et moi, qui suis avec un pied chez Carbon4, un pied chez Génération Ecologie. En fait, l'histoire est en train de nous donner raison, mais par contre, je pense qu'on n'est pas assez coordonnés pour peser dans le jeu politique.

  • Speaker #1

    Écoute, ça me paraît être une très belle conclusion et je garderai comme phrase de fin la part de l'incertitude dans la définition des nouveaux imaginaires. Merci beaucoup, Alexandre.

  • Speaker #0

    Merci. Et encore bon anniversaire. Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Vous venez d'écouter le podcast de l'association Adrastia, le podcast qui fait le bilan sur les risques globaux et les perspectives, afin de faire face tous ensemble. Retrouvez toutes les actualités du podcast et de l'association sur le site internet adrastia.org et sur l'ensemble des réseaux sociaux. L'heure du bilan, faire face, 60 minutes pour apprendre à nous adapter au monde tel qu'il est, non tel que nous croyons le maîtriser.

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Description

Dans ce nouvel épisode de L’heure du bilan : faire face, nous recevons Alexandre Florentin, ingénieur spécialisé en énergie-climat, directeur de la formation chez Carbone 4, membre de Génération Écologie et conseiller à la Ville de Paris, fondateur de l’Académie du Climat.

Nous abordons avec lui les tensions intimes et politiques de l'engagement écologique : comment conjuguer convictions profondes et réalité de la vie personnelle ? Peut-on prôner la réduction du trafic aérien tout en prenant l’avion pour rejoindre un proche à l’autre bout du monde ? Quel est le rôle des élus dans un système politique souvent figé, voire paralysé ? Quelle marge d’action réelle reste-t-il à ceux qui veulent changer les choses de l’intérieur ?

Entre récit personnel, critique institutionnelle et réflexions stratégiques, Alexandre partage à tous un témoignage lucide et nuancé sur ce que signifie aujourd’hui "faire face" dans un monde fini.

Un échange sincère qui interroge autant les trajectoires individuelles que les structures collectives.

🎧 À écouter dans la continuité de l’épisode précédent, consacré à la circularité des nutriments et à l’agroécologie, pour une plongée dans les multiples dimensions des basculements nécessaires et approfondir “notre capacité à faire”.


Épisode enregistré le 26 novembre 2024

Intervieweur : David Tixier


Pour en savoir plus sur Alexandre Florentin : 


Mission Paris 50°C en 2min - Mairie de Paris : https://youtu.be/ziWCWAAdLZ4?feature=shared


Le Rapport de la Mission Paris 50°C - Mairie de Paris :https://cdn.paris.fr/paris/2023/04/21/paris_a_50_c-le_rapport-Jc4H.pdf 


Lancement 10 avril 2025 de "Nos Villes à 50°C" (généralisation de Paris 50°C):

https://www.linfodurable.fr/climat/le-collectif-des-villes-50degc-en-quete-de-solutions-contre-les-chaleurs-extremes-50354


Alexandre Florentin chez "Plan(s) B", Cyrus Farhangi (1h) : https://youtu.be/r_nbWykbomo?si=kj08gRyAmJjSdd_B


Nouvelle Séquence - Alexandre Florentin - Mission 50°C (1h30) :

https://youtu.be/pekqQBPhbQQ?si=Twj8Z_617ELOX7LP


Alexandre Florentin chez Green Letter Club - Paris à 50°C (1h30) :

https://youtu.be/4b4ToyDuLNU?si=uqoTFOzRivUuOJub


Rejoignez et adhérez à l'association Adrastia :

https://www.adrastia.org/adherer-a-adrastia-fr134.html


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous et bienvenue sur le podcast de l'association Adrastia, l'heure du bilan, faire face. Nous sommes ravis que vous nous écoutiez. Nous allons parcourir ensemble les nouvelles pistes d'adaptation face aux altérations profondes et durables du milieu terrestre qui fragilisent tant nos sociétés que le vivant dans son ensemble. En 2024, la concentration en CO2 dans l'atmosphère continue d'augmenter. Les records de température, détendu des feux de forêt, de durée de sécheresse et de gravité des inondations tombent les uns après les autres. Les désordres écologiques, politiques et sociaux actuels ne sont pas des crises passagères, mais peut-être les premiers symptômes d'effondrement des sociétés industrielles mondialisées. Il est temps de faire le bilan de notre gestion collective des risques globaux et systémiques, parce que si sans maîtrise nous filons droit vers l'abîme, l'illusion de contrôle nous y précipiterait plus vite encore. Dans ce podcast, nous donnerons la parole au lanceur d'alerte aux scientifiques, aux acteurs de terrain, aux transitionneurs et aux penseurs de l'avenir écologique. L'heure du bilan nous confronte à la réalité à venir, la nécessité de l'adaptation, parfois radicale, au regard du risque d'échec ou d'insuffisance de la ténuation. Adrasia est une association de citoyens et de citoyennes qui informe et alerte depuis 2014 sur le risque d'effondrement de nos sociétés, dans le but d'éviter une dégradation trop importante ou brutale de leur structure vitale. et de préserver les meilleures conditions de vie possibles pour le plus grand nombre. Le podcast de l'association Adrasia est une production collective. L'intervieweur ou l'intervieweuse pourra être différent à chaque épisode. Ne vous en mettez pas. Les interviews sont disponibles sur les plateformes habituelles de diffusion. N'oubliez pas de vous abonner. Vous retrouverez également une page Internet dédiée au podcast sur le site Internet adrasia.org. Dans l'heure du bilan, faire face... Nous explorons pendant 60 minutes comment apprendre à nous adapter au monde tel qu'il est, non tel que nous croyons le maîtriser. Et maintenant, place à l'épisode. Bonne écoute

  • Speaker #1

    Alexandre Florentin, bonjour. Merci beaucoup de nous faire le plaisir et l'honneur d'être dans cet épisode du podcast Adrastia. J'espère que tu vas bien, déjà pour commencer.

  • Speaker #2

    Oui, bonjour. Merci de m'avoir invité. Oui, je vais très bien.

  • Speaker #1

    Super. Alors, je vais brièvement m'introduire, mais très très rapidement. Je m'appelle David Tixier, je suis le VP, le vice-président de l'association Adrastia. Dans le cadre du podcast qui nous rassemble aujourd'hui. On va davantage parler d'Alexandre que de Florentin. Et on va faire un petit récapitulatif des dix dernières années, puisque comme tu l'as peut-être appris l'association a dix ans cette année. Et on va regarder dans le rétro ensemble sur ce qui s'est passé sur ces dix dernières années d'un point de vue environnemental, mais pas que pour faire très vite. On va commencer par peut-être une définition du personnage qu'on accueille aujourd'hui, c'est-à-dire toi. Si tu devais présenter un de tes traits de caractère, celui qui te... qui te va le mieux, qui te scie le mieux Je ne sais pas, ça peut être quelque chose qui conditionne ton obstination sur les sujets harassants du quotidien, ou pas. Ou une capacité à encaisser les chocs. Lequel est-ce que tu mettrais le plus en avant

  • Speaker #2

    Déjà, bon anniversaire.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Ensuite, je pense que... Je pense que je suis quelqu'un d'assez pugnace et que cette pugnacité, elle tient dans le temps parce que j'arrive à l'équilibrer avec une capacité que j'essaie vraiment de travailler et que je pourrais qualifier de capacité à s'émerveiller.

  • Speaker #1

    Ok, je trouve que c'est une question importante puisque tu vas le voir par rapport au sujet qu'on va aborder par la suite. Ça annonce un petit peu la couleur sur comment est-ce que tu as pu continuer à te situer dans tous les sujets qu'on va aborder durant l'interview. Est-ce que naturellement tu as un lien avec l'environnement, la nature, peu importe le terme que tu voudras utiliser Ou est-ce que c'est quelque chose qui est arrivé plus tard, au cours de tes études, suite à ton premier emploi Voilà.

  • Speaker #2

    Mes parents, alors moi j'en ai pas de souvenir direct, c'est un souvenir indirect, mais mes parents ils m'ont toujours dit que quand j'étais petit, quelque part autour de 5-8 ans, que je voulais être garde forestier. Mais bon, j'en ai pas de souvenir propre. Ça m'étonne d'autant plus que je suis né à Paris, mais j'ai grandi en Seine-Saint-Denis, dans une zone... Hyper urbaine et que... Enfin, mon quotidien, on ne peut pas dire qu'il n'y avait pas beaucoup de forêt. Donc c'est peut-être ce décalage-là. Et j'ai des souvenirs de vacances à la montagne, à la mer. Mais rien de... Rien de... Pas un moment clé comme ça, d'émerveillement, ou je sais pas quoi. Là, je me suis dit... Et en fait, après, c'est plutôt... Pendant mes études en école d'ingénieur, j'étais complètement perdu et assez triste. Je ne mettais pas ces mots-là à l'époque, mais peut-être qu'il y avait une forme de blues un peu avancé. C'est-à-dire que je ne comprenais pas pourquoi, je ne comprenais plus au bout d'un moment. C'est-à-dire que je suis entré dans des études scientifiques et techniques par curiosité, par envie de résoudre des problèmes. Il y avait ce côté challenge intellectuel qui était très fort. Et puis, jeune adulte, en fait, je me suis rendu compte que je ne comprenais plus pourquoi je faisais ça. Donc, je n'étais pas... Asidu du tout, pendant mes études en école d'ingé, j'ai failli redoubler ou me faire virer, je ne sais plus. Du coup, je me suis dit qu'il fallait que j'arrive à finir ce truc-là que j'ai commencé. Et j'ai fait une année de césure. Et c'est là, notamment dans un stage à Lille. ITZ, qui est un des labos de recherche du CEA, qui mêle les questions techniques et économiques. Je fais un stage de six mois et c'est là que j'ai un peu découvert les questions environnementales comme trame de fond. Parce que dans l'école dans laquelle j'étais, je travaillais quand même pas mal sur les questions énergétiques qui m'intéressaient le plus. Mais là, d'un seul coup, l'environnement, ça donnait un pourquoi à tout ça. Donc j'ai commencé à m'y intéresser sérieusement à ce moment-là. Donc c'était en 2007, si je ne me trompe pas, ou 2008, je crois. Oui, c'est ça, 2008-2009. Et après, j'ai été envoyé dans un... en troisième année, dans une option que je n'avais pas du tout choisie, parce que j'avais des résultats catastrophiques, donc je crois que j'étais avant-dernier de promo, donc je n'avais pas le choix. Et du coup, après, j'ai choisi de prolonger mes études avec un double diplôme à Sciences Po et Jussieu, qui s'appelait Sciences et politiques de l'environnement, qui était une création de Feu Bruno Latour, notamment une de ses idées, d'avoir des gens avec un pied dans les sciences dites dures et dans les sciences sociales. Et ça a été une révolution intellectuelle majeure qui continue de m'accompagner. C'est la première fois que j'ai entendu parler de décroissance, de Jean Covici, de Gramsci. J'ai eu comme prof des gens comme Grégory Kenney, comme Arnaud Gossement, Bruno Latour, Laurence Tubiana, François Gemmene, Hervé Le Treut. Lucas Badi, et dans les sciences sociales, et dans les sciences dures, des gens qui maintenant sont beaucoup plus reconnus dans leurs travaux. D'accord.

  • Speaker #1

    C'est une question que j'allais te poser juste après, mais je pense que ta réponse l'annonce plutôt bien. Ton oh shit moment ce que nous on caractérise comme étant le moment où on prend conscience, on dira, il arrive à ce moment-là C'est avant, c'est après Et seconde question qui pour moi va avec, est-ce que tu es plutôt prise de conscience ou crise de conscience

  • Speaker #2

    Alors, c'est sûr qu'il y a eu plusieurs phases dans ma compréhension du problème. Je dirais que ça restait, comme à l'époque, c'est comme encore beaucoup maintenant, et je pense que c'est une grave erreur de le faire comme ça, mais c'était beaucoup présenté comme des questions de fin du siècle ou 2050. je voyais beaucoup les courbes du GIEC dans toutes les matières que j'étudiais mais il y avait du coup une distance Une distance que je qualifierais d'émotionnelle, jusqu'à ce que je participe à un jeu de rôle vraiment grandeur nature, c'est-à-dire qu'on était une centaine d'élèves, préparation pendant six mois, six mois de jeu de rôle, puis une semaine complète, dont une nuit à Sciences Po, où en fait on rejouait les négociations de Copenhague. Et là j'ai eu, non pas un oh shit moment, mais plutôt c'est passé de la tête au trip. en disant, mais en fait, ces courbes-là, je vais les vivre. Statistiquement parlant, je vais les vivre. Ça, c'était le premier gros choc. Je pense que je mettais de la distance pour me protéger. Donc là, je me rends compte que je vais les vivre, que je vais devoir choisir à quelle courbe je participe. Donc là, un choix éthique. Et... Et notamment que, parce qu'à l'époque je prenais beaucoup l'avion, j'étais dans une association européenne qui en gros organisait des petits Erasmus dans toute l'Europe. J'étais vraiment très impliqué encore à ce moment-là. Et je me dis, parce que j'avais quelques ordres de grandeur, mais je n'avais jamais fait mon bilan carbone personnel. Et là je me dis, ok, en fait là, ce qu'on a fait dans le jeu de rôle, c'est super réaliste. Et... Je ne suis pas du bon côté de la barrière, d'une certaine manière. Au fur et à mesure des années, je pense que je me suis de plus en plus rendu compte qu'on était tellement en retard qu'il y allait avoir des phénomènes de crise, puis de permacrise, qui est... Le mot pour dire que les crises ne s'enchaînent pas tranquillement en nous laissant une capacité à reprendre un souffle, mais en fait elles s'enchaînent vite, voire elles se superposent. Et que nos sociétés ne sont pas préparées à ça. J'en ai une conscience plus aiguë. je pense, mais progressive entre 2015 et 2020, très aiguë en entrant en politique, en disant c'est quand même ça le niveau de compréhension et d'anticipation surtout. Donc c'est là où je me suis dit, ok là il faut vraiment que j'oeuvre au fait qu'une partie de la classe politique comprenne le moment de bascule dans lequel on est. Et j'ai complètement oublié la deuxième partie de ta question. C'était prise de conscience. Qu'est-ce que tu entends par crise de conscience

  • Speaker #1

    Crise de conscience, c'est-à-dire que tu te rends compte de l'ampleur d'un phénomène qui en fait ne te quitte plus du tout

  • Speaker #2

    Ah oui, ça oui. ça me quitte plus du tout et c'est un... À chaque fois que j'ouvre la presse, c'est quasiment une décision consciente de... Est-ce que j'ai la force aujourd'hui de lire la presse Comment est-ce que je vais faire pour cultiver ma capacité à trouver de la joie dans ce que je fais Qu'est-ce que ça veut dire dans ma vie de couple, dans ma vie familiale C'est quotidien. J'ai passé la phase où je vois du bilan carbone partout Je me concentre sur d'autres choses Et ma capacité à m'émerveiller Je la travaille beaucoup par rapport à la biodiversité Donc je m'éloigne aussi des questions climat Parce que C'est en tout cas de la partie baisse des émissions, atténuation, parce qu'en fait, c'est un poids qui est beaucoup trop lourd à porter.

  • Speaker #1

    C'est peut-être pas assez palpable

  • Speaker #2

    Ouais, c'est trop lointain, on voit pas les effets de ce qu'on fait, donc je fais d'autres choses. Dans mon quotidien, je m'intéresse beaucoup plus au fait d'apprendre à faire des choses moi-même, de cuisiner, de travailler mon rapport au temps, à l'information. Le fait de ne pas me retrouver dans la roue du hamster, ce qui est extrêmement facile, compte tenu du fait que j'ai un métier passion d'un côté et la politique de l'autre avec une forme d'hystérisation collective permanente. Donc il faut prendre beaucoup de distance.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #2

    Donc j'essaye en tout cas.

  • Speaker #1

    Je reviendrai sur ce point-là juste après. Je préfère te le dire parce que c'est important de le... préciser, je pense. En gros, là, notre échange, il va tourner autour de quatre gros morceaux. Donc là, c'était celui qui était introductif, d'où on part. Là, j'ai encore une dernière question là-dessus. On ira après sur ton profil à toi, plutôt technique et politique. Ensuite, on aura un gros morceau sur toi, précisément, en dehors de toutes tes activités, ton profil professionnel ou politique. Vraiment, toi, comment est-ce que tu perçois le sujet en tant que citoyen Et on fera un petit bilan à la fin de tout ce qu'on a pu se dire jusque là. La dernière question par rapport à cette partie introductive que j'ai, c'est... Pour moi, il y a, à nouveau, c'est une considération personnelle, mais il y a un très gros sujet qui est celui de la dissonance collective autour de tous les éléments dont tu as déjà pu parler jusqu'à maintenant. Et alors, comme beaucoup de monde, tu as un jour... parler d'une proposition qui a été de, je te cite, la première chose à faire est d'arrêter de prendre l'avion. On en a parlé d'ailleurs à l'instant. Comment est-ce que concrètement on peut faire ça, sachant que le modèle de désirabilité actuelle repose principalement sur le fait de pouvoir bouger à peu près quand on veut pour un prix dérisoire, que c'est une mesure qui est hautement considérée comme liberticide, même si je vais totalement dans ton sens. C'est des questionnements, je pense, qu'on a au quotidien. Et qu'aussi, il y a finalement une question de potentiel financier. Aujourd'hui, on ne fait pas les choses parce qu'elles sont mauvaises, on les fait parce qu'on peut les faire, économiquement parlant. Si on ne peut pas les faire, on ne les fait pas. Mais si on peut le faire, c'est forcément bien. Et j'ai un exemple en tête qui va illustrer tout ça. On l'a vu ces deux, trois dernières années, avec les forts incendies qu'il y a eu en Grèce, durant les périodes estivales, on avait des photos de touristes qui fuyaient les zones, les resorts où ils s'étaient installés. On avait des flammes. qui était en arrière-fond, où les habitants, pour le coup, eux, essayaient d'éteindre l'incendie, et les touristes essayaient absolument de rentrer chez eux. Comment est-ce que, toi, tu vois ça, cette dissonance collective, et le fait qu'on n'arrive pas à en sortir

  • Speaker #2

    Déjà, je l'ai vécu. Je l'ai vécu, et là, je suis dans une autre phase. Donc, déjà, cette question de l'aérien, mais comme tout le reste, il faut être... très vigilants sur le fait de ne pas chercher à faire reposer sur l'individu l'immense poids du changement. Et en même temps, on a aussi une part individuelle de responsabilité dans les choix qu'on fait les uns les autres. Et par ailleurs, on est toutes et tous pris dans une technostructure. qui nous entoure et dont on est interdépendant. Donc il y a des choses sur lesquelles on n'a pas de levier, parce que vous n'avez pas de levier à un moment donné. Pour être plus précis, tu vois, et le dernier point qui est quand même important à rappeler, mais je pense que, je vais le dire très vite, parce que je pense que les personnes qui nous écouteront, elles sont un peu au courant. Mais pour le coup, sur l'aérien, ça a été extrêmement bien détaillé, le fait que, certes, l'aérien a divisé par deux, enfin a augmenté par deux son efficacité énergétique sur les dernières années, donc ramener au passager c'est plus efficace, mais le nombre de voyageurs a tellement augmenté, le nombre de trajets a tellement augmenté que... Que les émissions de l'aérien augmentent et de grandeur c'est comme un grand pays. C'est genre le Japon il me semble, du style un milliard de tonnes par an. Donc c'est pas rien. Et si on actionne tous les leviers technologiques, ça ne fait pas le job. Même en poussant tous les traits de la diffusion, parce qu'entre une technologie qui existe et une technologie qui est diffusée, il faut du temps. Et même avec tout ça, on n'y arrive pas. Donc à un moment, il faut jouer sur le nombre de passagers-kilomètres, c'est ça l'unité, qu'il faut faire baisser. Quand on est au niveau individuel, il faut se poser la question de pourquoi je voyage Qu'est-ce que je cherche Et c'est sûr que c'est toujours compliqué de dire après moi, c'est un peu comme les nouveaux migrants qui ensuite disent je vais fermer la porte derrière de la migration. Moi, c'est arrivé jusqu'à un stade où la dernière fois où j'ai fait un voyage professionnel en avion, j'ai eu la nausée pendant tout le voyage. Parce que j'étais de l'autre côté de la dissonance cognitive. C'est-à-dire que je n'arrivais plus à me protéger par mon déni. J'avais déjà bien réduit et là je fais ce grand voyage atlantique et je me dis oh la vache, j'étais pas bien, j'ai cru que j'allais vomir alors que j'avais déjà pris plein de fois l'avion. Et ce moment là, jusqu'où je me dis en fait c'est bon, je vais réussir à ne plus pouvoir prendre l'avion de ma vie. Entre le moment où je me suis dit et le moment où je l'ai fait, donc avec la baisse et tout, ça a pris 8 ans je crois. 5 ans progressif et au début j'ai fait l'erreur de surtout vouloir dire aux autres d'arrêter plutôt que juste arrêter de le faire et ça a été beaucoup plus puissant par rapport à mes proches qui au début certains qui comprennent d'autres qui ne comprenaient pas. Forcément, c'est des choix forts parce que je me suis fait des amis incroyables en Europe et c'était plus compliqué. Mais c'est aussi un moment où je suis passé à la journée de quatre jours. Donc, j'avais plus de temps. J'utilisais pour voyager en Europe en restant sur le sol. Et puis, il y a... Donc, moi, j'étais parti pour une vie sans avion, mais avec des réflexions. profondes parce que par exemple mon père il est vietnamien et je suis jamais allé au vietnam avec lui et je me suis toujours demandé est ce que est ce que je le fais ou est ce que je le fais pas et c'est donc je suis pas du tout à côté de la plaque par rapport à ce que des dilemmes que des gens se posent c'est pour ça qu'il faut pas faire reposer trop le truc sur l'individu c'est C'est ignoble de faire reposer ces choix-là sur un individu. Et puis là, ma situation personnelle a vachement changé parce que je suis tombé amoureux d'une personne brésilienne qui habite à Paris. qui pendant un moment a dû rentrer au Brésil. Donc j'ai fait le choix d'aller la voir là-bas, parce que j'étais fou amoureux. Et là, on va se marier. Et je refais le choix d'aller là-bas, cinq semaines, pour me marier là-bas et passer du temps avec ma belle famille. C'est des choix qui me coûtent. C'est des choix qui me coûtent parce que je me dis, bon, après avoir prêché autant la baisse de l'aérien, comment je fais et d'une certaine manière j'ai l'impression en tout cas autour de moi que par rapport à des gens qui seraient hyper durs sur la vitesse de baisse etc etc d'une certaine manière ça me réhumanise en disant ouais ok lui aussi il a du mal lui aussi il essaye, lui aussi il en parle et par contre pour le coup j'utilise aussi beaucoup ma posture en tant qu'élu élus pour avoir avancé ce sujet-là. Et ça n'a pas fait beaucoup de bruit, mais j'ai réussi à faire en sorte que la ville de Paris, dans ses documents de planification officielle, donc en l'occurrence le plan climat, dise, la ville de Paris, première ville touristique, première destination touristique au monde, demande à l'État de faire baisser le nombre de créneaux de décollage et d'atterrissage des quatre aéroports franciliens. Énorme victoire politique qui n'a pas été beaucoup relayée et qui en 2020, l'année de l'élection, était inimaginable, y compris dans les rangs d'Europe Ecologie-Les Verts qui sont un peu... un peu mes camarades de jeu dans la famille écologiste.

  • Speaker #1

    C'est une remarque intéressante, le fait qu'on soit pris en tenaille par nos paramètres personnels, familiaux ou pas d'ailleurs. Je me permets de rebondir sur ton exemple. Moi, ma femme est d'origine antillaise, et on a déjà eu cette discussion avec la partie de sa famille qui est de Guadeloupe. Et concrètement, moi, je veux rentrer chez moi. Je sais que depuis X générations, on est en Normandie. Je suis chez moi. Je vois ma famille. C'est une place qui me parle. Ces gens-là, qui sont originaires d'un département ultramarin, chez eux, au sens propre, la terre où ils ont grandi, c'est ailleurs. C'est pas ici. Et de quel droit est-ce que moi, finalement, est-ce que j'ai le droit de les priver La réponse est non, d'ailleurs. De rentrer chez eux à des récurrences qui sont les leurs, peu importe. C'est une question très... très délicates, finalement. Ça touche à l'identité, je pense que c'est là aussi où on touche parfois du doigt les limites de tous les raisonnements, si on comptabilise et qu'on raisonne uniquement d'un point de vue carbone, comme tu le disais tout à l'heure. C'est une dimension particulière. Voilà.

  • Speaker #2

    Et moi, ça m'a justement donné envie d'être encore plus, entre guillemets, radical sur le fait de t'arrêter les autres voyages. En me disant, ok, en fait, je vois bien que celui-là, il est beaucoup plus important que ce que je faisais avant. Et par contre, moi, dans mon couple, très rapidement, ma femme, elle a compris qu'on ne prendrait jamais l'avion pour voyager en Europe. Que c'était juste impensable. Et que les fois où on allait au Brésil... Ce serait longtemps. Par contre, l'effort, il a l'air de se dire comment est-ce qu'on fait pour aller 5, 6 semaines là-bas, de prendre des congés, de travailler à distance quand c'est possible, je ne sais pas quoi, mais de se dire, en fait, la partie sacrifice, la partie effort, elle est sur cette dimension. Comment est-ce qu'on va s'organiser pour pouvoir partir longtemps Et voilà.

  • Speaker #1

    Ça pose aussi la question des aménagements liés au travail. Je veux dire, prendre cinq semaines, tout le monde ne peut pas. Bien sûr. C'est des questionnements qui dépendent de critères assez externes. Je ne l'ai pas précisé, donc on va survoler très rapidement ton profil. Tu as un profil d'ingénieur, tu es spécialisé sur les questions énergie et climat, ça tu en as parlé. Tu es directeur de la formation chez Carbone 4, je ne dis pas de bêtises, super. Aussi membre de Génération Ecologie, ça aussi tu en as parlé, et tu es conseiller à la mairie de Paris. J'ai une question simple pour commencer, tu verras c'est une boutade. Pourquoi ça marche pas tout ça Plus sérieusement, quel regard est-ce que tu portes sur, on dira, l'immobilisme ambiant pour faire très vite, et sur les blocages qui existent tant sur les partis institutionnels, politiques ou citoyens On a un petit peu parlé là, mais j'aimerais qu'on creuse davantage ce sujet-là maintenant.

  • Speaker #2

    Vaste question. Alors de nouveau c'est vu de ma fenêtre, donc déjà pour que les gens comprennent, j'ai été élu aux élections municipales. Paris comme Lyon et Marseille en fait vous êtes élu par un arrondissement. Et il y a une partie de ces élus-là qui vont dans ce qu'on appelle le Conseil de Paris, qui est une sorte de petite assemblée nationale, mais à l'échelle parisienne. Et on est 163 à siéger là-bas. Et la première chose qu'on fait, c'est qu'entre nous, entre ces 163 personnes, on vote pour le ou la maire. En fait, le ou la maire à Paris, c'est une élection indirecte. Donc c'est un peu comme si j'étais grand électeur, c'est un mot dont on entend parler avec les États-Unis. Ça fonctionne comme ça. Et pendant longtemps, le Conseil de Paris, je crois que c'est plus trop le cas, mais c'était considéré comme... une sorte de marche-pied national ou une espèce de mini-assemblée nationale. Il y avait des fonctionnements qui étaient calqués sur cette assemblée. Et pour revenir à ta question, déjà, moi, j'ai l'impression qu'il y a un effet clanique qui est hyper fort. Mon début de mandat, c'est l'affaire Christophe Girard. L'affaire Christophe Girard, c'est quoi C'est un élu dans la liste socialiste qui s'appelle Christophe Girard, qui s'apprête à être nommé, qui va être nommé, qui a été nommé, pas très longtemps, mais il a quand même été nommé adjoint à la culture. Et quelques mois avant, vous avez une femme qui s'appelle Vanessa Springora, qui sort un livre qui s'appelle Le consentement, qui raconte... son adolescence et la relation qu'elle a eue avec un qui s'appelle Gabriel Maznev auteur pédocriminel qui a dédié sa propre version comme il écrivait sur ce genre de relation qu'il avait il a écrit un livre qui s'appelle La prunelle de mes yeux et ce livre est dédié Donc ce livre raconte son histoire avec Vanessa Springrois, et ce livre est dédicacé à Christophe Girard, le mec qui vient de se faire élire et qui... Et donc là, je passe les détails, mais il y a une guerre incroyable à l'hôtel de ville entre les socialistes et les écologistes, avec notamment deux élus, que sont Raphaël Rémy Leleu et Alice Coffin, qui... son vent debout contre sa nomination en tant qu'adjoint à la culture. Vous pouvez regarder, c'est hyper bien documenté sur ce qui s'est passé. Mais à ce moment-là, quand je vois qu'il y a des gens dans la majorité, grâce à laquelle j'ai été élu, qui ne se rendent pas compte...

  • Speaker #0

    du problème parce que à minima, moi ce qui m'a choqué c'est que Christophe Girard, quand il a rencontré le groupe écologiste, il a parlé des amours de Maznef. C'est comme ça qu'il qualifiait les relations entre Maznef et des adolescentes de 13, 14, 15 ans. Et là je me suis dit c'est dingue. Je mentionne ce truc là, cette affaire là, parce qu'en fait ça a été hyper fort dans ma... On va dire déjà c'était ma... Je débarquais complètement en politique, l'ingénieur, pour parler de questions énergie-climat, et là j'ai des décisions très fortes à prendre. sur un truc qui n'a rien à voir, et je ne sais pas comment je vais juger de cette question, je me pose beaucoup de questions. Et c'est juste, c'est notamment cette phrase de, quand il parle des amours de Maznev, ça me choque tellement, je me dis... Là, ça me choque en tant que citoyen, en tant qu'humain, en tant qu'homme. Je me dis, mais ce n'est pas possible de le qualifier comme ça. Si ça se trouve, OK, Girard, il n'a jamais rien fait de mal de sa vie, mais parler de cette relation-là comme ça, c'est une faute politique. Et là, je me rends compte que, en fait, tout le monde se tient par les coucougnettes dans cette histoire, par la barbichette pour être plus poli. Désolé. Et en fait, n'arrive plus à penser de manière autonome. Et ça, je pense que c'est un facteur. Parce qu'en fait, ils doivent tous leur place à quelqu'un dans cette histoire. Parce qu'il n'y a que deux manières d'entrer en politique. Soit vous pariez sur le bon cheval, vous êtes dans la bonne motion, dans le bon parti. Quelqu'un vous embarque dans sa conquête du pouvoir, soit vous existez par vous-même. Par exemple, demain, si Jean-Marc Lancovici décide d'entrer en politique, il n'a pas besoin d'un parti. Il n'a pas besoin que quelqu'un l'adoube. Il est tellement connu à l'extérieur qu'il peut juste débarquer dans le truc. Et comme ce n'est pas souvent le cas, les gens se tiennent et donc ils ont du mal à... Et ça, ça explique énormément... Cet effet clanique explique énormément l'inertie. parce que du coup, vous êtes un peu piégé par les décisions que d'autres que vous-même ont pris. Mais parce que ça a été des alliés, parce qu'il y a des mécanismes, des cordes de rappel qui sont extrêmement fortes. Un autre exemple, moi je suis complètement contre la manière dont on a géré le chantier de rénovation de la gare d'Austerlitz, qui est un énorme chantier. à côté de ça, je m'entends bien avec le... Donc j'ai des désaccords avec le maire du 13ème là-dessus. Par contre, je trouve qu'il a d'énormes qualités par ailleurs. On discute beaucoup de la question de l'adaptation. Moi, je trouve que c'est quelqu'un qui est véritablement convaincu d'une sorte d'humanisme, on va dire. Mais on n'est pas d'accord sur ce projet-là. Eh bien, il aurait... C'est parce qu'on arrive à s'entendre par ailleurs qu'on a réussi à se mettre d'accord qu'on n'est pas d'accord sur ce projet-là. Mais c'est hyper rare dans l'univers politique d'arriver à se mettre d'accord qu'on n'est pas d'accord. Sinon, il y a des manières de mettre de la pression qui sont dingues. Et pendant la mission Paris à 50 degrés que j'ai présidée... l'appareil a utilisé des manières de me faire rentrer dans le rang, de me mettre la pression pour bien me faire sentir que je n'avais pas le contrôle, pour essayer. C'était hallucinant. Et j'ai très peu de pouvoir. Je ne suis pas adjoint. Je ne commande pas l'administration, je ne pilote pas de budget, je n'ai pas d'équipe. Je suis vraiment assez bas dans la chaîne alimentaire. Et pourtant, tout de suite, je pense qu'il y a un côté un peu dressage, c'est-à-dire que les nouveaux arrivants, tout de suite, il faut les dresser. S'il y en a un qui commence à...

  • Speaker #1

    Comment est-ce qu'elle naît cette mission Paris 50° C'était la grande question que je voulais te poser là-dessus, parce que je trouve que c'est quelque chose qui est très rattaché à toi en tant que conseiller. C'est quoi le contexte de la création de la mission. Et elle touche à différentes typologies. Donc il y a les mentions des infrastructures existantes, de l'approvisionnement énergétique, de la question de l'eau. Il me semble également qu'il y a une partie sur l'agriculture, si je ne dis pas de bêtises, ou du moins l'alimentation. Comment est-ce que tu arrives à présenter un... Un projet si large, dont les conséquences peuvent être terribles, quand on parle de Paris à 50 degrés, moi j'ai une amie qui travaille notamment sur la gestion des infrastructures ferroviaires, elle m'expliquait qu'aux alentours de 40 degrés, tu as beaucoup de défaillance du matériel, je crois que tu as travaillé également sur ce sujet, du matériel qui permet aux trains de circuler. Dans une ville... Ou par exemple, le rapport Utopie dit Paris a moins de 2% d'autonomie alimentaire. 50 degrés, ça veut dire quoi pour tout ça, en termes de risque Et comment est-ce que les résultats de tes travaux sont accueillis par tes collègues à ce moment-là

  • Speaker #0

    Alors, je vais d'abord parler de comment ça a été lancé. Oui, bien sûr. Et après, on reviendra sur la suite. Déjà, moi j'arrive, je suis élu en 2020. Mais avant... En 2017, il y a un papier de Météo France qui sort, qui dit qu'on peut avoir entre 50 et 55 degrés en France métropolitaine dans la deuxième moitié du siècle. Et c'est un papier que mes collègues chez Carbone 4 diffusent. C'est comme ça que j'ai accès. J'ai appris par la suite que... Et ce papier, il me choque. Il me choque au sens... Je pensais pas... Pendant mes études, j'avais jamais entendu parler de température comme ça. Je me dis, comment c'est physiquement possible, même avec des scénarios de réchauffement importants Et quand je suis élu, par ailleurs, je me rends compte que la ville de Paris ne découvre pas du tout ces sujets-là. C'est-à-dire qu'il y a déjà un plan climat qui est historiquement ancien, avec un volet adaptation. La canicule de 2003 a été un choc, il y a eu des mesures et tout. Mais c'est de la prospective en regardant le rétroviseur. C'est-à-dire que sans vraiment le dire, en fait ce qu'on est en train de faire c'est se préparer à un retour de la canicule de 2003. Et j'ai un conseil de Delphine Bateau qui me dit Trouve-toi un couloir de nage et avance. Donc, d'un côté, j'essaie gentiment de... Et moi, je sais faire deux choses, atténuation, adaptation. Donc, côté atténuation, je me dis qu'il y a déjà pas mal de choses qui sont faites quand même à Paris. Sauf sur le tourisme aérien. Mais je n'arrive pas à faire avancer le sujet. Il n'y a que quatre ans plus tard que j'arrive à le faire avancer. Et je me dis, par contre, sur l'adaptation quand même... C'est pas folichon, quoi. Il y a des petits trucs, mais c'est vraiment hyper ponctuel. Il y a tellement de décisions contraires à l'adaptation qui sont prises, c'est que c'est pas entré dans les mentalités. Il n'y a pas un réflexe adaptation qui s'est développé. Donc j'en parle au groupe écologiste, qui, du fait de toutes les batailles autour de l'affaire Girard avant, disent, ok, il faut que... La mission, parce qu'on n'en a qu'une seule, pendant tout le groupe écologiste peut en déclencher qu'une seule, il faut que ce soit sur un sujet environnemental. Et donc le groupe écolo est convaincu, mais juste, je fais mon consultant, j'ai mon PowerPoint, j'explique pourquoi physiquement il faut se préparer, qu'est-ce qui peut arriver, je parle des trucs, des rails, SNCF, parce que ça c'était déjà assez bien documenté à l'époque. Je fais une analyse politique aussi en disant en fait l'adaptation c'est un vocabulaire de la protection, de la sécurité, de la sûreté etc. De la gestion de crise et donc la droite peut s'en saisir, les droites peuvent s'en saisir. Et donc ils peuvent aussi, si on ne le fait pas, ils vont s'en saisir et ils vont le faire d'une manière qui peut-être ne conviendra pas. Et donc il faut occuper ce terrain. Et donc ça, je le dis en 2020, et tout le monde est d'accord. Et après, il faut deux ans pour que ça se lance vraiment. Mais c'est ça le point de départ. Un mélange, il y a une base scientifique, une intuition personnelle qu'en fait, ce sujet-là peut prendre aussi. Parce que dans tous les phénomènes environnementaux, quand on habite à Paris... les vagues de chaleur, c'est le truc le plus perceptible, le plus sensible. Et donc je me dis, c'est intéressant d'essayer d'entrer par la porte de l'adaptation pour faire bouger les gens. Et pour l'instant, ça marche. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des écueils possibles en entrant par l'adaptation, qu'ensuite les gens peuvent oublier l'atténuation ou d'autres choses, mais comme le pourquoi de l'action, il est plus clair, ça crée moins de résistance. Si tu commences à dire à des gens on va travailler pour mieux vivre les canicules, et ensuite tu glisses des choses pour que ce soit des solutions simples, robustes, et assez vite tu comprends que tu ne pourras pas tout adapter à n'importe quoi, et donc il faut aller vers des modes de vie plus simples, et que ça va faire l'atténuation. le raisonnement est beaucoup plus facile à comprendre. Dans ma pratique, depuis que la mission est sortie, parce que j'en ai énormément parlé, j'ai rencontré énormément de publics différents, dans toute la France et à l'étranger, c'est un chemin qui est plus fluide.

  • Speaker #1

    Aussi parce que c'est quelque chose de plus palpable. C'est peut-être aussi pour ça qu'ils perçoivent tout de suite les risques. Quand tu pars d'île de chaleur, c'est quelque chose qui est déjà ressenti maintenant.

  • Speaker #0

    Voilà, quelle que soit la classe d'âge, quelle que soit la sociologie, quelles que soient les valeurs aussi parce que c'est du réel et donc il ya au moins il n'y a pas cette barrière à l'entrée parce que pas se mentir quand même entre le barbec et la canicule il ya quand même quelques étapes et il faut avoir le temps, il faut avoir le il faut accepter des postures scientifiques. Tandis que si on fait le raisonnement dans l'autre sens, ça a l'air, en tout cas pour l'instant, ça a l'air plus simple. Et un truc aussi, c'est que maintenant, je lis de moins en moins de trucs de climatologie. mais beaucoup plus de sciences sociales et notamment d'études sur la communication. Et on m'avait toujours dit, on parlait de 2050, on est une espèce adaptative, on attendra que ça arrive pour... Je me suis dit, bon, là c'est le bon moment, parce que ça commence déjà bien, c'est déjà bien palpable. Je crois qu'il y a 7 Français sur 10 qui disent qu'ils ont vu une manifestation du changement climatique sur leur territoire. Et du coup, je me dis, il ne faut pas que j'appelle ça Paris 2050 ou Paris 2100 ou Paris plus 4 degrés, qui n'était pas une terminologie très bien acceptée à l'époque, puisqu'en fait, il n'y avait pas encore eu le travail. Au moment où je lance tout ça, il n'y avait pas encore eu le plan national d'adaptation, Christophe Béchut qui parle de plus 4 degrés, France, etc. Et du coup, moi, je suis là avec mon étude Météo France en main et je me dis, est-ce que j'ose Appeler la mission Paris à 50°. Et ça a été une énorme hésitation. Parce que je savais que ça avait du sens scientifique. Mais je me suis dit, est-ce qu'on va me pointer du doigt comme un cassandre Le chef de service... Vous essayez juste de nous faire peur, etc. Et en fait, ça a fait 50% du job. Parce que derrière, c'est... très théâtral, mais vous avez l'unité de lieu et vous avez quasiment l'intrigue qui est dans ce titre, Paris à 50 degrés. Et après, il y avait d'autres choses à faire, parce que c'était une mission transpartisane. Mais ça, j'en ai déjà beaucoup parlé par ailleurs sur comment gérer ce côté transpartisan, comment embarquer les autres forces politiques qui ont été très motrices pendant la mission. Tu me demandais les effets, donc je saute l'étape, qu'est-ce qui s'est passé, de quoi on a parlé et tout. Là aussi j'en ai parlé déjà plein de fois, mais en fait dans les effets, il y a déjà le fait que la classe politique parisienne maintenant parle d'habitabilité. On parle plus de confort d'été. On parle... Avant on parlait juste de transition. Maintenant... Le vocabulaire de l'adaptation commence à rentrer et surtout, ça parle la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui est quand même une femme extrêmement courageuse, pugnace et qui a beaucoup fait avancer les thématiques écologistes. Parce qu'on peut dire ce qu'on veut sur le fait que oui, tout ça, c'était des idées qui venaient des arcs de la pensée écologiste. Mais à un moment, si la chef n'est pas convaincue elle-même. Elle ne fait pas autant de choses. Donc, elle l'a fait, mais maintenant, elle parle beaucoup de canicule. C'est-à-dire que la manière de parler des choses a changé. Et c'est important parce qu'en politique, une partie du temps, ce n'est pas sans inconvénients, mais une partie du temps, le verbe est performatif. C'est-à-dire que si le politique dit quelque chose, l'administration commence à suivre. L'administration commence à regarder les projets différemment. Et moi, j'ai eu des échos de l'administration dans ce sens-là. Il y a des réflexes, ça y est, c'est venu. De nouveau, c'était pas sur une base, on partait pas d'un désert, mais simplement, c'était assez facile de perdre des arbitrages, de se dire, oui, bon, cet arbre-là, on peut le couper pour construire tel truc, ou bien là, bon, ça coûte quand même un peu plus cher de mettre tel isolant biosourcé à l'extérieur, donc on va faire plutôt un truc à l'intérieur, mais ça va être bien pour le froid, bah oui, mais... Des fois, on fait des trucs bien pour le froid qui ne sont pas bien pour le chaud. Donc, il faut trouver des trucs qui sont bien pour le chaud et pour le froid. Et il y avait des projets qui étaient exemplaires, mais il y avait aussi des projets qui étaient catastrophiques. Et là, ce qu'on me dit, puisque de nouveau, je ne suis pas dans l'exécutif, donc je n'ai pas une ligne directe avec toute une partie de l'administration. Donc, c'est parce que je me suis fait repérer par la mission que j'ai des canaux d'écoute. Et on me dit que la nature des projets a déjà changé. Et par ailleurs, la semaine dernière, la semaine précédente de notre enregistrement, 4 plans ont été votés, le plan climat, le plan santé, résilience et le plan local d'urbanisme. Et c'est une victoire totale de la mission transpartisane Paris à 50 degrés parce que non seulement les préconisations sont reprises, mais la philosophie aussi est reprise. Alors ça ne fait pas tout d'avoir des plans. Il y a une question financière derrière, il y a une question de priorité. Mais franchement, le cap est donné. Et l'étape d'après, elle est aussi sur le fait de ne pas juste avoir un plan A. Parce que là, ça y est, on a un plan A. Et quand on réfléchit en termes de permacrise, il faut des plans B, C, D. Et il faut travailler, à mon sens, beaucoup des questions de quasi... Moi je me pose des questions de comment me préparer d'un point de vue philosophique, éthique, moral, à devoir prendre des décisions de plus en plus difficiles avec le temps qui passe pour au moins 30 ans. Parce que je me projette dans l'univers politique. Il y a plein de côtés très... c'est un coût émotionnel énorme pour moi. Si on n'a pas assez de gens dans l'univers politique qui ont compris la nature, notamment le fait que ce n'est pas une crise comme un truc ponctuel, mais que c'est une rupture dans l'histoire de l'humanité, on ne s'en sortira pas. Et un des facteurs d'effondrement identifiés par Jared Diamond, c'est des élites pédurées.

  • Speaker #1

    qui est très important pour leur mise en place, c'est l'acceptabilité sociale de ces plans, le fait qu'ils soient plus ou moins contestés, voire pas du tout. Quand tu cites Christophe Béchut qui dit qu'il faut se préparer à une France à plus 4 degrés, moi j'ai une question, c'est comment est-ce que... Tu mets ça au regard des injonctions au positivisme qui sont aujourd'hui d'actualité, c'est-à-dire il faut absolument avoir un récit désirable, il faut vendre ça aux gens, il faut qu'ils soient convaincus par le fait qu'il y a de la désirabilité derrière. Comment est-ce qu'il est possible de conjuguer Cette parole, il faut se préparer à une France à plus 4 degrés, et derrière d'appliquer un schéma qui soit propre à la désirabilité. Est-ce que c'est possible

  • Speaker #0

    Alors, j'essaie toujours d'avoir une prise de parole qui équilibre lucidité et enthousiasme. Parce que si tu dis que tout est foutu, ok, on va ensemble aux Antilles, et puis c'est... T'y ponche... T'y ponchez plage, quoi. Et après nous, l'enfer. Par contre, faut pas se raconter d'histoires sur qu'est-ce qui peut être sauvé. Il y a une partie de la biodiversité qui ne peut plus être sauvée. Il y a déjà des effondrements. Il y a au moins un effondrement de la biodiversité qui est documenté. Par contre, je vois... Il n'y a pas de raison en fait que dans un monde qui serait plus contraint, plus chaotique, on ait moins d'histoire d'amour, moins d'histoire d'amitié, moins de fourrir. Et il y a énormément de preuves aussi que quand on a moins de choses, il y a plus de solidarité, plus de liens. Et que... Par ailleurs, on est dans un système de hamster qui court vers la croissance infinie, où en fait, pour pouvoir jouer ce jeu-là, il faut être déprimé. Le système nous force à être déprimé. Le burn-out, c'est clairement une maladie de la croissance infinie dans un monde fini. Donc si on arrête de vouloir jouer à ce jeu-là, je ne vois pas pourquoi il y a tout un tas de choses qui n'arriveraient pas à s'améliorer dans notre quotidien au travers du lien social. Mais par contre, c'est sûr que... la vie va être très très très très très différente. Donc si tu veux, après, en fait, c'est un peu comme la question sur l'optimisme, c'est pas une question d'optimisme, il y a une question de volonté, et puis il y a une question de juste de se raccrocher à des trucs très simples. Et les trucs très simples, oui c'est carrément possible qu'ils continuent. Le fait de pouvoir partager des bons moments dans sa famille, avec ses proches, ses amis, avec ses voisins, on peut quand même le faire dans un monde plus chahuté. Tout est une question de... Tout est une question de quelle est la quantité de gens qu'on va laisser à la rue, soit à la rue au sens dans nos rues ou à la rue en dehors de nos frontières, parce qu'il va quand même y avoir un sacré bordel aussi en termes de migration, puisqu'il y a des zones qu'on est en train de rendre inhabitables. Une fois que j'ai dit ça, je n'ai pas dit grand-chose en termes d'action politique. Moi, le travail que j'ai cherché à faire avec Paris à 50 degrés, il se prolonge à l'heure actuelle avec des scénaristes, des scénaristes de films, des scénaristes de BD, des scénaristes de séries. Parce qu'en fait, il y a des histoires incroyablement joyeuses, romantiques, pas bisounours. à raconter dans ce contexte-là. Mais ne nous voilons pas la face, la seule manière de rendre l'adaptation possible, c'est d'avoir l'atténuation en temps et en heure. Parce que oui, j'arrive à imaginer des scénarios dans lesquels la taille de l'humanité est extrêmement diminuée d'ici la fin du siècle. Mais bon, c'est pas ça qui... En fait, je les mets de côté dans ma tête parce que sinon... C'est le fameux optimisme de la volonté.

  • Speaker #1

    On créera autre chose. Finalement, ce qui est intéressant, et c'est une chose dont on parle beaucoup dans les sphères de l'association, c'est le pouvoir de la culture. Comment est-ce que la culture s'approprie tout ça, que ce soit les scénarios ou la convivialité même. Le principe de créer des contre-récits, finalement, ça passe aussi par ça. C'est le fait d'imaginer des choses ensemble. Comme je te l'ai précisé en introduction, je vois que l'heure tourne. C'est les 10 ans de l'association cette année. Où est-ce que toi tu étais il y a 10 ans Est-ce qu'il y a un point sur lequel... tu veux rebondir, qui t'a marqué sur ces dix dernières années, c'était quoi tes aspirations C'était quoi tes craintes Et éventuellement tout à l'heure tu as parlé de vie familiale, je ne sais pas si tu as des enfants, c'est quoi les grands plans que toi tu fais, pour, parlons des dix prochaines années, imaginons, dans ta vie personnelle

  • Speaker #0

    Alors il y a dix ans je rentrais du Brésil, où j'ai travaillé deux ans là-bas sur le plan climat d'un état. Et je choisissais de revenir en France parce que je ne me voyais pas vivre là-bas, parce que c'est un pays trop violent. Et parce que ma nièce venait de naître et je me disais, je ne me vois pas faire énormément d'aller-retour France-Brésil. Et ça me faisait mal au cœur de me dire que je n'allais pas l'avoir qu'en dire. Donc, je suis rentré et assez rapidement, je suis passé. C'est là que j'ai intégré Carbone 4. Assez rapidement, je suis passé à la semaine de quatre jours et j'ai commencé à faire de l'ébénisterie à côté de ça. Alors maintenant, je suis dans un moment de ma vie très différent parce que je suis toujours au 4-5ème chez Carbone 4. En parallèle de mon mandat, j'ai créé la Carbone 4 Academy, dont... et je vais arrêter d'être le directeur à la fin de l'année. Et c'est Juliette Day qui va reprendre les rênes, parce que j'ai envie de faire autre chose. Et donc au moment où a lieu cette interview, je suis dans une grande incertitude. Parce qu'à la fois, je pense qu'il manque un centre d'excellence en France et en Europe sur l'adaptation et les territoires, alors que c'est une porte d'entrée incroyable pour faire de la politique. Ça, c'est le premier point. Ensuite, d'un point de vue personnel, non, je n'ai pas d'enfant. Et c'est une discussion. C'est une discussion qui n'est pas simple, qui n'est pas résolue. Je ne sais pas du tout de quel côté elle va se résoudre. Ensuite, on est quand même à un moment où ce n'est pas parce qu'on veut qu'on peut.

  • Speaker #1

    Et puis, est-ce que c'est le cœur ou la tête qui décide Ce n'est pas la même chose non plus.

  • Speaker #0

    Oui, et puis... La politique c'est du calcul, l'amour c'est un élan. Faut arrêter de faire du calcul dans ces moments-là. Et ça c'est aussi quelque chose sur lequel je travaille. C'est-à-dire que les gens avec qui je travaille, notamment Juliette que je salue si elle écoute ce podcast, elle me dit que je suis assez pression. En fait j'ai pas mal d'intuition sur ce qui... peut se passer ou pas dans les organisations dans lesquelles on a travaillé ensemble et tout. Enfin, Paris à 50°, c'est aussi une émanation de ce côté-là, parce que tout ça, c'est quand même été pensé avant qu'il y ait autant de gens qui parlent d'adaptation. C'était avant Béchut, alors maintenant il y a une explosion sur l'adaptation, mais Paris à 50°, c'est imaginé en 2020. Donc bon, il y a une part de moi aussi qui travaille au fait d'apprendre à danser avec l'incertitude. Je dis danser parce qu'en fait, il y a aussi ce côté plus relax, plus fun, plus joyeux, plus léger. Je ne contrôle pas tout, donc j'essaie de faire ce que je peux dans ce bordel ambiant et trouver du plaisir sur des petites choses. Puis on verra où tout ça me mène. Je suis de plus en plus sollicité. Pour me représenter, et pour me représenter en montant en grade, donc plutôt pour des postes d'adjoint.

  • Speaker #1

    Tu es plutôt favorable

  • Speaker #0

    Ça va dépendre des conditions en fait. Et là, on est dans un brouillard politique qui est énormissime. Avec, au moment où je te parle, ce matin même, la maire de Paris a annoncé qu'elle ne se... Madame Hidalgo a annoncé qu'elle ne se représenterait pas. De plus en plus de gens ont écologisé leur matrice idéologique, mais ils ne sont pas encore dans une logique de décroissance-résilience. Je te donne un exemple très simple. Il y a beaucoup de socialistes qui ont fait énormément de progrès sur leur compréhension de cette question. Ils ne sont pas prêts à remettre en cause la place du tourisme aérien. et les conséquences que ça aurait sur le tissu économique, et donc les finances de la ville, et donc notre capacité à faire d'autres politiques. Moi, je n'ai pas la réponse, parce que je n'ai pas réussi, en ayant un job au 4-5e entrepreneurial, à agglomérer suffisamment de forces vives autour de moi, parce qu'il ne suffit pas d'avoir des gens qui lèvent la main, en fait, après, il faut les coordonner, pour... construire la réponse intellectuelle avec ce que je disais des plans A, B, C et D. Parce que par exemple, les élections municipales, c'est en 2026. Il faut avoir un plan à Paris si c'est le RN qui passe en 2027. Parce que si c'est une majorité sur le périmètre actuel, donc socialiste, communiste, écologiste, qui gagne, Le Rassemblement National voudra en faire un contre-exemple. Et donc on aura le gouvernement contre nous. Comment tu fais ça Comment tu gouvernes dans une situation pareille Avec très concrètement des gens qui seront pris pour cible. Je ne parle pas d'élus, je parle des gens dans la population, parce qu'ils sont comme ci, comme ça, ils vont être pris pour cible. Des associations, comment tu les protèges ? Qu'est-ce que tu fais ? Comment tu entres en résistance dans ton propre pays par rapport à une idéologie et des pratiques fascistes ? Mais ça c'est valable aussi si... Et je ne suis pas du tout dans un truc genre le bien contre le mal. C'est beaucoup plus compliqué que ça comme réflexion. Il faut se poser la question de pourquoi il y a des gens qui votent RN. C'est parce que globalement, à ma lecture, elle est très écologiste. C'est parce qu'en fait, comme on n'arrive pas à faire une croissance infinie dans un monde fini, ça a des conséquences sociales, ça a des conséquences environnementales, et notamment les conséquences sociales, les gens en ont marre. Et donc, ils votent. pour quelqu'un qui propose de retourner la table et de faire payer les élites. C'est aussi ce qui se passe du côté des États-Unis, d'une certaine manière. Vous avez d'un côté les perdants de la mondialisation qui se rebiffent. Et en face, la réponse écologiste qui consisterait à atterrir et à proposer un contre-modèle, elle n'est pas du tout mature. Et par contre, je ne me vois pas en porte-drapeau de ça, parce que les gens qui peuvent prétendre à un défi pareil, il faut être à un autre niveau en politique. Parce que, comme je le disais, par exemple, je n'ai pas de collaborateurs ou collaboratrices qui ne travaillent que pour moi. Alors que tous les gens qui visent très haut en politique, ils ont déjà des équipes qui bossent. Donc là, on est quand même sur un nœud que je n'arrive pas à résoudre. Et puis là, j'ai mon arc par R50° qui se finit un petit peu. Là, j'ai besoin de reprendre du souffle. Et on va voir ce qui se passe en début 2025. Mais en tout cas, ce que je remarque, c'est que cette pensée-là, qui, je pense, nous lie entre les membres d'Adrastia et moi, qui suis avec un pied chez Carbon4, un pied chez Génération Ecologie. En fait, l'histoire est en train de nous donner raison, mais par contre, je pense qu'on n'est pas assez coordonnés pour peser dans le jeu politique.

  • Speaker #1

    Écoute, ça me paraît être une très belle conclusion et je garderai comme phrase de fin la part de l'incertitude dans la définition des nouveaux imaginaires. Merci beaucoup, Alexandre.

  • Speaker #0

    Merci. Et encore bon anniversaire. Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Vous venez d'écouter le podcast de l'association Adrastia, le podcast qui fait le bilan sur les risques globaux et les perspectives, afin de faire face tous ensemble. Retrouvez toutes les actualités du podcast et de l'association sur le site internet adrastia.org et sur l'ensemble des réseaux sociaux. L'heure du bilan, faire face, 60 minutes pour apprendre à nous adapter au monde tel qu'il est, non tel que nous croyons le maîtriser.

Description

Dans ce nouvel épisode de L’heure du bilan : faire face, nous recevons Alexandre Florentin, ingénieur spécialisé en énergie-climat, directeur de la formation chez Carbone 4, membre de Génération Écologie et conseiller à la Ville de Paris, fondateur de l’Académie du Climat.

Nous abordons avec lui les tensions intimes et politiques de l'engagement écologique : comment conjuguer convictions profondes et réalité de la vie personnelle ? Peut-on prôner la réduction du trafic aérien tout en prenant l’avion pour rejoindre un proche à l’autre bout du monde ? Quel est le rôle des élus dans un système politique souvent figé, voire paralysé ? Quelle marge d’action réelle reste-t-il à ceux qui veulent changer les choses de l’intérieur ?

Entre récit personnel, critique institutionnelle et réflexions stratégiques, Alexandre partage à tous un témoignage lucide et nuancé sur ce que signifie aujourd’hui "faire face" dans un monde fini.

Un échange sincère qui interroge autant les trajectoires individuelles que les structures collectives.

🎧 À écouter dans la continuité de l’épisode précédent, consacré à la circularité des nutriments et à l’agroécologie, pour une plongée dans les multiples dimensions des basculements nécessaires et approfondir “notre capacité à faire”.


Épisode enregistré le 26 novembre 2024

Intervieweur : David Tixier


Pour en savoir plus sur Alexandre Florentin : 


Mission Paris 50°C en 2min - Mairie de Paris : https://youtu.be/ziWCWAAdLZ4?feature=shared


Le Rapport de la Mission Paris 50°C - Mairie de Paris :https://cdn.paris.fr/paris/2023/04/21/paris_a_50_c-le_rapport-Jc4H.pdf 


Lancement 10 avril 2025 de "Nos Villes à 50°C" (généralisation de Paris 50°C):

https://www.linfodurable.fr/climat/le-collectif-des-villes-50degc-en-quete-de-solutions-contre-les-chaleurs-extremes-50354


Alexandre Florentin chez "Plan(s) B", Cyrus Farhangi (1h) : https://youtu.be/r_nbWykbomo?si=kj08gRyAmJjSdd_B


Nouvelle Séquence - Alexandre Florentin - Mission 50°C (1h30) :

https://youtu.be/pekqQBPhbQQ?si=Twj8Z_617ELOX7LP


Alexandre Florentin chez Green Letter Club - Paris à 50°C (1h30) :

https://youtu.be/4b4ToyDuLNU?si=uqoTFOzRivUuOJub


Rejoignez et adhérez à l'association Adrastia :

https://www.adrastia.org/adherer-a-adrastia-fr134.html


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous et bienvenue sur le podcast de l'association Adrastia, l'heure du bilan, faire face. Nous sommes ravis que vous nous écoutiez. Nous allons parcourir ensemble les nouvelles pistes d'adaptation face aux altérations profondes et durables du milieu terrestre qui fragilisent tant nos sociétés que le vivant dans son ensemble. En 2024, la concentration en CO2 dans l'atmosphère continue d'augmenter. Les records de température, détendu des feux de forêt, de durée de sécheresse et de gravité des inondations tombent les uns après les autres. Les désordres écologiques, politiques et sociaux actuels ne sont pas des crises passagères, mais peut-être les premiers symptômes d'effondrement des sociétés industrielles mondialisées. Il est temps de faire le bilan de notre gestion collective des risques globaux et systémiques, parce que si sans maîtrise nous filons droit vers l'abîme, l'illusion de contrôle nous y précipiterait plus vite encore. Dans ce podcast, nous donnerons la parole au lanceur d'alerte aux scientifiques, aux acteurs de terrain, aux transitionneurs et aux penseurs de l'avenir écologique. L'heure du bilan nous confronte à la réalité à venir, la nécessité de l'adaptation, parfois radicale, au regard du risque d'échec ou d'insuffisance de la ténuation. Adrasia est une association de citoyens et de citoyennes qui informe et alerte depuis 2014 sur le risque d'effondrement de nos sociétés, dans le but d'éviter une dégradation trop importante ou brutale de leur structure vitale. et de préserver les meilleures conditions de vie possibles pour le plus grand nombre. Le podcast de l'association Adrasia est une production collective. L'intervieweur ou l'intervieweuse pourra être différent à chaque épisode. Ne vous en mettez pas. Les interviews sont disponibles sur les plateformes habituelles de diffusion. N'oubliez pas de vous abonner. Vous retrouverez également une page Internet dédiée au podcast sur le site Internet adrasia.org. Dans l'heure du bilan, faire face... Nous explorons pendant 60 minutes comment apprendre à nous adapter au monde tel qu'il est, non tel que nous croyons le maîtriser. Et maintenant, place à l'épisode. Bonne écoute

  • Speaker #1

    Alexandre Florentin, bonjour. Merci beaucoup de nous faire le plaisir et l'honneur d'être dans cet épisode du podcast Adrastia. J'espère que tu vas bien, déjà pour commencer.

  • Speaker #2

    Oui, bonjour. Merci de m'avoir invité. Oui, je vais très bien.

  • Speaker #1

    Super. Alors, je vais brièvement m'introduire, mais très très rapidement. Je m'appelle David Tixier, je suis le VP, le vice-président de l'association Adrastia. Dans le cadre du podcast qui nous rassemble aujourd'hui. On va davantage parler d'Alexandre que de Florentin. Et on va faire un petit récapitulatif des dix dernières années, puisque comme tu l'as peut-être appris l'association a dix ans cette année. Et on va regarder dans le rétro ensemble sur ce qui s'est passé sur ces dix dernières années d'un point de vue environnemental, mais pas que pour faire très vite. On va commencer par peut-être une définition du personnage qu'on accueille aujourd'hui, c'est-à-dire toi. Si tu devais présenter un de tes traits de caractère, celui qui te... qui te va le mieux, qui te scie le mieux Je ne sais pas, ça peut être quelque chose qui conditionne ton obstination sur les sujets harassants du quotidien, ou pas. Ou une capacité à encaisser les chocs. Lequel est-ce que tu mettrais le plus en avant

  • Speaker #2

    Déjà, bon anniversaire.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Ensuite, je pense que... Je pense que je suis quelqu'un d'assez pugnace et que cette pugnacité, elle tient dans le temps parce que j'arrive à l'équilibrer avec une capacité que j'essaie vraiment de travailler et que je pourrais qualifier de capacité à s'émerveiller.

  • Speaker #1

    Ok, je trouve que c'est une question importante puisque tu vas le voir par rapport au sujet qu'on va aborder par la suite. Ça annonce un petit peu la couleur sur comment est-ce que tu as pu continuer à te situer dans tous les sujets qu'on va aborder durant l'interview. Est-ce que naturellement tu as un lien avec l'environnement, la nature, peu importe le terme que tu voudras utiliser Ou est-ce que c'est quelque chose qui est arrivé plus tard, au cours de tes études, suite à ton premier emploi Voilà.

  • Speaker #2

    Mes parents, alors moi j'en ai pas de souvenir direct, c'est un souvenir indirect, mais mes parents ils m'ont toujours dit que quand j'étais petit, quelque part autour de 5-8 ans, que je voulais être garde forestier. Mais bon, j'en ai pas de souvenir propre. Ça m'étonne d'autant plus que je suis né à Paris, mais j'ai grandi en Seine-Saint-Denis, dans une zone... Hyper urbaine et que... Enfin, mon quotidien, on ne peut pas dire qu'il n'y avait pas beaucoup de forêt. Donc c'est peut-être ce décalage-là. Et j'ai des souvenirs de vacances à la montagne, à la mer. Mais rien de... Rien de... Pas un moment clé comme ça, d'émerveillement, ou je sais pas quoi. Là, je me suis dit... Et en fait, après, c'est plutôt... Pendant mes études en école d'ingénieur, j'étais complètement perdu et assez triste. Je ne mettais pas ces mots-là à l'époque, mais peut-être qu'il y avait une forme de blues un peu avancé. C'est-à-dire que je ne comprenais pas pourquoi, je ne comprenais plus au bout d'un moment. C'est-à-dire que je suis entré dans des études scientifiques et techniques par curiosité, par envie de résoudre des problèmes. Il y avait ce côté challenge intellectuel qui était très fort. Et puis, jeune adulte, en fait, je me suis rendu compte que je ne comprenais plus pourquoi je faisais ça. Donc, je n'étais pas... Asidu du tout, pendant mes études en école d'ingé, j'ai failli redoubler ou me faire virer, je ne sais plus. Du coup, je me suis dit qu'il fallait que j'arrive à finir ce truc-là que j'ai commencé. Et j'ai fait une année de césure. Et c'est là, notamment dans un stage à Lille. ITZ, qui est un des labos de recherche du CEA, qui mêle les questions techniques et économiques. Je fais un stage de six mois et c'est là que j'ai un peu découvert les questions environnementales comme trame de fond. Parce que dans l'école dans laquelle j'étais, je travaillais quand même pas mal sur les questions énergétiques qui m'intéressaient le plus. Mais là, d'un seul coup, l'environnement, ça donnait un pourquoi à tout ça. Donc j'ai commencé à m'y intéresser sérieusement à ce moment-là. Donc c'était en 2007, si je ne me trompe pas, ou 2008, je crois. Oui, c'est ça, 2008-2009. Et après, j'ai été envoyé dans un... en troisième année, dans une option que je n'avais pas du tout choisie, parce que j'avais des résultats catastrophiques, donc je crois que j'étais avant-dernier de promo, donc je n'avais pas le choix. Et du coup, après, j'ai choisi de prolonger mes études avec un double diplôme à Sciences Po et Jussieu, qui s'appelait Sciences et politiques de l'environnement, qui était une création de Feu Bruno Latour, notamment une de ses idées, d'avoir des gens avec un pied dans les sciences dites dures et dans les sciences sociales. Et ça a été une révolution intellectuelle majeure qui continue de m'accompagner. C'est la première fois que j'ai entendu parler de décroissance, de Jean Covici, de Gramsci. J'ai eu comme prof des gens comme Grégory Kenney, comme Arnaud Gossement, Bruno Latour, Laurence Tubiana, François Gemmene, Hervé Le Treut. Lucas Badi, et dans les sciences sociales, et dans les sciences dures, des gens qui maintenant sont beaucoup plus reconnus dans leurs travaux. D'accord.

  • Speaker #1

    C'est une question que j'allais te poser juste après, mais je pense que ta réponse l'annonce plutôt bien. Ton oh shit moment ce que nous on caractérise comme étant le moment où on prend conscience, on dira, il arrive à ce moment-là C'est avant, c'est après Et seconde question qui pour moi va avec, est-ce que tu es plutôt prise de conscience ou crise de conscience

  • Speaker #2

    Alors, c'est sûr qu'il y a eu plusieurs phases dans ma compréhension du problème. Je dirais que ça restait, comme à l'époque, c'est comme encore beaucoup maintenant, et je pense que c'est une grave erreur de le faire comme ça, mais c'était beaucoup présenté comme des questions de fin du siècle ou 2050. je voyais beaucoup les courbes du GIEC dans toutes les matières que j'étudiais mais il y avait du coup une distance Une distance que je qualifierais d'émotionnelle, jusqu'à ce que je participe à un jeu de rôle vraiment grandeur nature, c'est-à-dire qu'on était une centaine d'élèves, préparation pendant six mois, six mois de jeu de rôle, puis une semaine complète, dont une nuit à Sciences Po, où en fait on rejouait les négociations de Copenhague. Et là j'ai eu, non pas un oh shit moment, mais plutôt c'est passé de la tête au trip. en disant, mais en fait, ces courbes-là, je vais les vivre. Statistiquement parlant, je vais les vivre. Ça, c'était le premier gros choc. Je pense que je mettais de la distance pour me protéger. Donc là, je me rends compte que je vais les vivre, que je vais devoir choisir à quelle courbe je participe. Donc là, un choix éthique. Et... Et notamment que, parce qu'à l'époque je prenais beaucoup l'avion, j'étais dans une association européenne qui en gros organisait des petits Erasmus dans toute l'Europe. J'étais vraiment très impliqué encore à ce moment-là. Et je me dis, parce que j'avais quelques ordres de grandeur, mais je n'avais jamais fait mon bilan carbone personnel. Et là je me dis, ok, en fait là, ce qu'on a fait dans le jeu de rôle, c'est super réaliste. Et... Je ne suis pas du bon côté de la barrière, d'une certaine manière. Au fur et à mesure des années, je pense que je me suis de plus en plus rendu compte qu'on était tellement en retard qu'il y allait avoir des phénomènes de crise, puis de permacrise, qui est... Le mot pour dire que les crises ne s'enchaînent pas tranquillement en nous laissant une capacité à reprendre un souffle, mais en fait elles s'enchaînent vite, voire elles se superposent. Et que nos sociétés ne sont pas préparées à ça. J'en ai une conscience plus aiguë. je pense, mais progressive entre 2015 et 2020, très aiguë en entrant en politique, en disant c'est quand même ça le niveau de compréhension et d'anticipation surtout. Donc c'est là où je me suis dit, ok là il faut vraiment que j'oeuvre au fait qu'une partie de la classe politique comprenne le moment de bascule dans lequel on est. Et j'ai complètement oublié la deuxième partie de ta question. C'était prise de conscience. Qu'est-ce que tu entends par crise de conscience

  • Speaker #1

    Crise de conscience, c'est-à-dire que tu te rends compte de l'ampleur d'un phénomène qui en fait ne te quitte plus du tout

  • Speaker #2

    Ah oui, ça oui. ça me quitte plus du tout et c'est un... À chaque fois que j'ouvre la presse, c'est quasiment une décision consciente de... Est-ce que j'ai la force aujourd'hui de lire la presse Comment est-ce que je vais faire pour cultiver ma capacité à trouver de la joie dans ce que je fais Qu'est-ce que ça veut dire dans ma vie de couple, dans ma vie familiale C'est quotidien. J'ai passé la phase où je vois du bilan carbone partout Je me concentre sur d'autres choses Et ma capacité à m'émerveiller Je la travaille beaucoup par rapport à la biodiversité Donc je m'éloigne aussi des questions climat Parce que C'est en tout cas de la partie baisse des émissions, atténuation, parce qu'en fait, c'est un poids qui est beaucoup trop lourd à porter.

  • Speaker #1

    C'est peut-être pas assez palpable

  • Speaker #2

    Ouais, c'est trop lointain, on voit pas les effets de ce qu'on fait, donc je fais d'autres choses. Dans mon quotidien, je m'intéresse beaucoup plus au fait d'apprendre à faire des choses moi-même, de cuisiner, de travailler mon rapport au temps, à l'information. Le fait de ne pas me retrouver dans la roue du hamster, ce qui est extrêmement facile, compte tenu du fait que j'ai un métier passion d'un côté et la politique de l'autre avec une forme d'hystérisation collective permanente. Donc il faut prendre beaucoup de distance.

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #2

    Donc j'essaye en tout cas.

  • Speaker #1

    Je reviendrai sur ce point-là juste après. Je préfère te le dire parce que c'est important de le... préciser, je pense. En gros, là, notre échange, il va tourner autour de quatre gros morceaux. Donc là, c'était celui qui était introductif, d'où on part. Là, j'ai encore une dernière question là-dessus. On ira après sur ton profil à toi, plutôt technique et politique. Ensuite, on aura un gros morceau sur toi, précisément, en dehors de toutes tes activités, ton profil professionnel ou politique. Vraiment, toi, comment est-ce que tu perçois le sujet en tant que citoyen Et on fera un petit bilan à la fin de tout ce qu'on a pu se dire jusque là. La dernière question par rapport à cette partie introductive que j'ai, c'est... Pour moi, il y a, à nouveau, c'est une considération personnelle, mais il y a un très gros sujet qui est celui de la dissonance collective autour de tous les éléments dont tu as déjà pu parler jusqu'à maintenant. Et alors, comme beaucoup de monde, tu as un jour... parler d'une proposition qui a été de, je te cite, la première chose à faire est d'arrêter de prendre l'avion. On en a parlé d'ailleurs à l'instant. Comment est-ce que concrètement on peut faire ça, sachant que le modèle de désirabilité actuelle repose principalement sur le fait de pouvoir bouger à peu près quand on veut pour un prix dérisoire, que c'est une mesure qui est hautement considérée comme liberticide, même si je vais totalement dans ton sens. C'est des questionnements, je pense, qu'on a au quotidien. Et qu'aussi, il y a finalement une question de potentiel financier. Aujourd'hui, on ne fait pas les choses parce qu'elles sont mauvaises, on les fait parce qu'on peut les faire, économiquement parlant. Si on ne peut pas les faire, on ne les fait pas. Mais si on peut le faire, c'est forcément bien. Et j'ai un exemple en tête qui va illustrer tout ça. On l'a vu ces deux, trois dernières années, avec les forts incendies qu'il y a eu en Grèce, durant les périodes estivales, on avait des photos de touristes qui fuyaient les zones, les resorts où ils s'étaient installés. On avait des flammes. qui était en arrière-fond, où les habitants, pour le coup, eux, essayaient d'éteindre l'incendie, et les touristes essayaient absolument de rentrer chez eux. Comment est-ce que, toi, tu vois ça, cette dissonance collective, et le fait qu'on n'arrive pas à en sortir

  • Speaker #2

    Déjà, je l'ai vécu. Je l'ai vécu, et là, je suis dans une autre phase. Donc, déjà, cette question de l'aérien, mais comme tout le reste, il faut être... très vigilants sur le fait de ne pas chercher à faire reposer sur l'individu l'immense poids du changement. Et en même temps, on a aussi une part individuelle de responsabilité dans les choix qu'on fait les uns les autres. Et par ailleurs, on est toutes et tous pris dans une technostructure. qui nous entoure et dont on est interdépendant. Donc il y a des choses sur lesquelles on n'a pas de levier, parce que vous n'avez pas de levier à un moment donné. Pour être plus précis, tu vois, et le dernier point qui est quand même important à rappeler, mais je pense que, je vais le dire très vite, parce que je pense que les personnes qui nous écouteront, elles sont un peu au courant. Mais pour le coup, sur l'aérien, ça a été extrêmement bien détaillé, le fait que, certes, l'aérien a divisé par deux, enfin a augmenté par deux son efficacité énergétique sur les dernières années, donc ramener au passager c'est plus efficace, mais le nombre de voyageurs a tellement augmenté, le nombre de trajets a tellement augmenté que... Que les émissions de l'aérien augmentent et de grandeur c'est comme un grand pays. C'est genre le Japon il me semble, du style un milliard de tonnes par an. Donc c'est pas rien. Et si on actionne tous les leviers technologiques, ça ne fait pas le job. Même en poussant tous les traits de la diffusion, parce qu'entre une technologie qui existe et une technologie qui est diffusée, il faut du temps. Et même avec tout ça, on n'y arrive pas. Donc à un moment, il faut jouer sur le nombre de passagers-kilomètres, c'est ça l'unité, qu'il faut faire baisser. Quand on est au niveau individuel, il faut se poser la question de pourquoi je voyage Qu'est-ce que je cherche Et c'est sûr que c'est toujours compliqué de dire après moi, c'est un peu comme les nouveaux migrants qui ensuite disent je vais fermer la porte derrière de la migration. Moi, c'est arrivé jusqu'à un stade où la dernière fois où j'ai fait un voyage professionnel en avion, j'ai eu la nausée pendant tout le voyage. Parce que j'étais de l'autre côté de la dissonance cognitive. C'est-à-dire que je n'arrivais plus à me protéger par mon déni. J'avais déjà bien réduit et là je fais ce grand voyage atlantique et je me dis oh la vache, j'étais pas bien, j'ai cru que j'allais vomir alors que j'avais déjà pris plein de fois l'avion. Et ce moment là, jusqu'où je me dis en fait c'est bon, je vais réussir à ne plus pouvoir prendre l'avion de ma vie. Entre le moment où je me suis dit et le moment où je l'ai fait, donc avec la baisse et tout, ça a pris 8 ans je crois. 5 ans progressif et au début j'ai fait l'erreur de surtout vouloir dire aux autres d'arrêter plutôt que juste arrêter de le faire et ça a été beaucoup plus puissant par rapport à mes proches qui au début certains qui comprennent d'autres qui ne comprenaient pas. Forcément, c'est des choix forts parce que je me suis fait des amis incroyables en Europe et c'était plus compliqué. Mais c'est aussi un moment où je suis passé à la journée de quatre jours. Donc, j'avais plus de temps. J'utilisais pour voyager en Europe en restant sur le sol. Et puis, il y a... Donc, moi, j'étais parti pour une vie sans avion, mais avec des réflexions. profondes parce que par exemple mon père il est vietnamien et je suis jamais allé au vietnam avec lui et je me suis toujours demandé est ce que est ce que je le fais ou est ce que je le fais pas et c'est donc je suis pas du tout à côté de la plaque par rapport à ce que des dilemmes que des gens se posent c'est pour ça qu'il faut pas faire reposer trop le truc sur l'individu c'est C'est ignoble de faire reposer ces choix-là sur un individu. Et puis là, ma situation personnelle a vachement changé parce que je suis tombé amoureux d'une personne brésilienne qui habite à Paris. qui pendant un moment a dû rentrer au Brésil. Donc j'ai fait le choix d'aller la voir là-bas, parce que j'étais fou amoureux. Et là, on va se marier. Et je refais le choix d'aller là-bas, cinq semaines, pour me marier là-bas et passer du temps avec ma belle famille. C'est des choix qui me coûtent. C'est des choix qui me coûtent parce que je me dis, bon, après avoir prêché autant la baisse de l'aérien, comment je fais et d'une certaine manière j'ai l'impression en tout cas autour de moi que par rapport à des gens qui seraient hyper durs sur la vitesse de baisse etc etc d'une certaine manière ça me réhumanise en disant ouais ok lui aussi il a du mal lui aussi il essaye, lui aussi il en parle et par contre pour le coup j'utilise aussi beaucoup ma posture en tant qu'élu élus pour avoir avancé ce sujet-là. Et ça n'a pas fait beaucoup de bruit, mais j'ai réussi à faire en sorte que la ville de Paris, dans ses documents de planification officielle, donc en l'occurrence le plan climat, dise, la ville de Paris, première ville touristique, première destination touristique au monde, demande à l'État de faire baisser le nombre de créneaux de décollage et d'atterrissage des quatre aéroports franciliens. Énorme victoire politique qui n'a pas été beaucoup relayée et qui en 2020, l'année de l'élection, était inimaginable, y compris dans les rangs d'Europe Ecologie-Les Verts qui sont un peu... un peu mes camarades de jeu dans la famille écologiste.

  • Speaker #1

    C'est une remarque intéressante, le fait qu'on soit pris en tenaille par nos paramètres personnels, familiaux ou pas d'ailleurs. Je me permets de rebondir sur ton exemple. Moi, ma femme est d'origine antillaise, et on a déjà eu cette discussion avec la partie de sa famille qui est de Guadeloupe. Et concrètement, moi, je veux rentrer chez moi. Je sais que depuis X générations, on est en Normandie. Je suis chez moi. Je vois ma famille. C'est une place qui me parle. Ces gens-là, qui sont originaires d'un département ultramarin, chez eux, au sens propre, la terre où ils ont grandi, c'est ailleurs. C'est pas ici. Et de quel droit est-ce que moi, finalement, est-ce que j'ai le droit de les priver La réponse est non, d'ailleurs. De rentrer chez eux à des récurrences qui sont les leurs, peu importe. C'est une question très... très délicates, finalement. Ça touche à l'identité, je pense que c'est là aussi où on touche parfois du doigt les limites de tous les raisonnements, si on comptabilise et qu'on raisonne uniquement d'un point de vue carbone, comme tu le disais tout à l'heure. C'est une dimension particulière. Voilà.

  • Speaker #2

    Et moi, ça m'a justement donné envie d'être encore plus, entre guillemets, radical sur le fait de t'arrêter les autres voyages. En me disant, ok, en fait, je vois bien que celui-là, il est beaucoup plus important que ce que je faisais avant. Et par contre, moi, dans mon couple, très rapidement, ma femme, elle a compris qu'on ne prendrait jamais l'avion pour voyager en Europe. Que c'était juste impensable. Et que les fois où on allait au Brésil... Ce serait longtemps. Par contre, l'effort, il a l'air de se dire comment est-ce qu'on fait pour aller 5, 6 semaines là-bas, de prendre des congés, de travailler à distance quand c'est possible, je ne sais pas quoi, mais de se dire, en fait, la partie sacrifice, la partie effort, elle est sur cette dimension. Comment est-ce qu'on va s'organiser pour pouvoir partir longtemps Et voilà.

  • Speaker #1

    Ça pose aussi la question des aménagements liés au travail. Je veux dire, prendre cinq semaines, tout le monde ne peut pas. Bien sûr. C'est des questionnements qui dépendent de critères assez externes. Je ne l'ai pas précisé, donc on va survoler très rapidement ton profil. Tu as un profil d'ingénieur, tu es spécialisé sur les questions énergie et climat, ça tu en as parlé. Tu es directeur de la formation chez Carbone 4, je ne dis pas de bêtises, super. Aussi membre de Génération Ecologie, ça aussi tu en as parlé, et tu es conseiller à la mairie de Paris. J'ai une question simple pour commencer, tu verras c'est une boutade. Pourquoi ça marche pas tout ça Plus sérieusement, quel regard est-ce que tu portes sur, on dira, l'immobilisme ambiant pour faire très vite, et sur les blocages qui existent tant sur les partis institutionnels, politiques ou citoyens On a un petit peu parlé là, mais j'aimerais qu'on creuse davantage ce sujet-là maintenant.

  • Speaker #2

    Vaste question. Alors de nouveau c'est vu de ma fenêtre, donc déjà pour que les gens comprennent, j'ai été élu aux élections municipales. Paris comme Lyon et Marseille en fait vous êtes élu par un arrondissement. Et il y a une partie de ces élus-là qui vont dans ce qu'on appelle le Conseil de Paris, qui est une sorte de petite assemblée nationale, mais à l'échelle parisienne. Et on est 163 à siéger là-bas. Et la première chose qu'on fait, c'est qu'entre nous, entre ces 163 personnes, on vote pour le ou la maire. En fait, le ou la maire à Paris, c'est une élection indirecte. Donc c'est un peu comme si j'étais grand électeur, c'est un mot dont on entend parler avec les États-Unis. Ça fonctionne comme ça. Et pendant longtemps, le Conseil de Paris, je crois que c'est plus trop le cas, mais c'était considéré comme... une sorte de marche-pied national ou une espèce de mini-assemblée nationale. Il y avait des fonctionnements qui étaient calqués sur cette assemblée. Et pour revenir à ta question, déjà, moi, j'ai l'impression qu'il y a un effet clanique qui est hyper fort. Mon début de mandat, c'est l'affaire Christophe Girard. L'affaire Christophe Girard, c'est quoi C'est un élu dans la liste socialiste qui s'appelle Christophe Girard, qui s'apprête à être nommé, qui va être nommé, qui a été nommé, pas très longtemps, mais il a quand même été nommé adjoint à la culture. Et quelques mois avant, vous avez une femme qui s'appelle Vanessa Springora, qui sort un livre qui s'appelle Le consentement, qui raconte... son adolescence et la relation qu'elle a eue avec un qui s'appelle Gabriel Maznev auteur pédocriminel qui a dédié sa propre version comme il écrivait sur ce genre de relation qu'il avait il a écrit un livre qui s'appelle La prunelle de mes yeux et ce livre est dédié Donc ce livre raconte son histoire avec Vanessa Springrois, et ce livre est dédicacé à Christophe Girard, le mec qui vient de se faire élire et qui... Et donc là, je passe les détails, mais il y a une guerre incroyable à l'hôtel de ville entre les socialistes et les écologistes, avec notamment deux élus, que sont Raphaël Rémy Leleu et Alice Coffin, qui... son vent debout contre sa nomination en tant qu'adjoint à la culture. Vous pouvez regarder, c'est hyper bien documenté sur ce qui s'est passé. Mais à ce moment-là, quand je vois qu'il y a des gens dans la majorité, grâce à laquelle j'ai été élu, qui ne se rendent pas compte...

  • Speaker #0

    du problème parce que à minima, moi ce qui m'a choqué c'est que Christophe Girard, quand il a rencontré le groupe écologiste, il a parlé des amours de Maznef. C'est comme ça qu'il qualifiait les relations entre Maznef et des adolescentes de 13, 14, 15 ans. Et là je me suis dit c'est dingue. Je mentionne ce truc là, cette affaire là, parce qu'en fait ça a été hyper fort dans ma... On va dire déjà c'était ma... Je débarquais complètement en politique, l'ingénieur, pour parler de questions énergie-climat, et là j'ai des décisions très fortes à prendre. sur un truc qui n'a rien à voir, et je ne sais pas comment je vais juger de cette question, je me pose beaucoup de questions. Et c'est juste, c'est notamment cette phrase de, quand il parle des amours de Maznev, ça me choque tellement, je me dis... Là, ça me choque en tant que citoyen, en tant qu'humain, en tant qu'homme. Je me dis, mais ce n'est pas possible de le qualifier comme ça. Si ça se trouve, OK, Girard, il n'a jamais rien fait de mal de sa vie, mais parler de cette relation-là comme ça, c'est une faute politique. Et là, je me rends compte que, en fait, tout le monde se tient par les coucougnettes dans cette histoire, par la barbichette pour être plus poli. Désolé. Et en fait, n'arrive plus à penser de manière autonome. Et ça, je pense que c'est un facteur. Parce qu'en fait, ils doivent tous leur place à quelqu'un dans cette histoire. Parce qu'il n'y a que deux manières d'entrer en politique. Soit vous pariez sur le bon cheval, vous êtes dans la bonne motion, dans le bon parti. Quelqu'un vous embarque dans sa conquête du pouvoir, soit vous existez par vous-même. Par exemple, demain, si Jean-Marc Lancovici décide d'entrer en politique, il n'a pas besoin d'un parti. Il n'a pas besoin que quelqu'un l'adoube. Il est tellement connu à l'extérieur qu'il peut juste débarquer dans le truc. Et comme ce n'est pas souvent le cas, les gens se tiennent et donc ils ont du mal à... Et ça, ça explique énormément... Cet effet clanique explique énormément l'inertie. parce que du coup, vous êtes un peu piégé par les décisions que d'autres que vous-même ont pris. Mais parce que ça a été des alliés, parce qu'il y a des mécanismes, des cordes de rappel qui sont extrêmement fortes. Un autre exemple, moi je suis complètement contre la manière dont on a géré le chantier de rénovation de la gare d'Austerlitz, qui est un énorme chantier. à côté de ça, je m'entends bien avec le... Donc j'ai des désaccords avec le maire du 13ème là-dessus. Par contre, je trouve qu'il a d'énormes qualités par ailleurs. On discute beaucoup de la question de l'adaptation. Moi, je trouve que c'est quelqu'un qui est véritablement convaincu d'une sorte d'humanisme, on va dire. Mais on n'est pas d'accord sur ce projet-là. Eh bien, il aurait... C'est parce qu'on arrive à s'entendre par ailleurs qu'on a réussi à se mettre d'accord qu'on n'est pas d'accord sur ce projet-là. Mais c'est hyper rare dans l'univers politique d'arriver à se mettre d'accord qu'on n'est pas d'accord. Sinon, il y a des manières de mettre de la pression qui sont dingues. Et pendant la mission Paris à 50 degrés que j'ai présidée... l'appareil a utilisé des manières de me faire rentrer dans le rang, de me mettre la pression pour bien me faire sentir que je n'avais pas le contrôle, pour essayer. C'était hallucinant. Et j'ai très peu de pouvoir. Je ne suis pas adjoint. Je ne commande pas l'administration, je ne pilote pas de budget, je n'ai pas d'équipe. Je suis vraiment assez bas dans la chaîne alimentaire. Et pourtant, tout de suite, je pense qu'il y a un côté un peu dressage, c'est-à-dire que les nouveaux arrivants, tout de suite, il faut les dresser. S'il y en a un qui commence à...

  • Speaker #1

    Comment est-ce qu'elle naît cette mission Paris 50° C'était la grande question que je voulais te poser là-dessus, parce que je trouve que c'est quelque chose qui est très rattaché à toi en tant que conseiller. C'est quoi le contexte de la création de la mission. Et elle touche à différentes typologies. Donc il y a les mentions des infrastructures existantes, de l'approvisionnement énergétique, de la question de l'eau. Il me semble également qu'il y a une partie sur l'agriculture, si je ne dis pas de bêtises, ou du moins l'alimentation. Comment est-ce que tu arrives à présenter un... Un projet si large, dont les conséquences peuvent être terribles, quand on parle de Paris à 50 degrés, moi j'ai une amie qui travaille notamment sur la gestion des infrastructures ferroviaires, elle m'expliquait qu'aux alentours de 40 degrés, tu as beaucoup de défaillance du matériel, je crois que tu as travaillé également sur ce sujet, du matériel qui permet aux trains de circuler. Dans une ville... Ou par exemple, le rapport Utopie dit Paris a moins de 2% d'autonomie alimentaire. 50 degrés, ça veut dire quoi pour tout ça, en termes de risque Et comment est-ce que les résultats de tes travaux sont accueillis par tes collègues à ce moment-là

  • Speaker #0

    Alors, je vais d'abord parler de comment ça a été lancé. Oui, bien sûr. Et après, on reviendra sur la suite. Déjà, moi j'arrive, je suis élu en 2020. Mais avant... En 2017, il y a un papier de Météo France qui sort, qui dit qu'on peut avoir entre 50 et 55 degrés en France métropolitaine dans la deuxième moitié du siècle. Et c'est un papier que mes collègues chez Carbone 4 diffusent. C'est comme ça que j'ai accès. J'ai appris par la suite que... Et ce papier, il me choque. Il me choque au sens... Je pensais pas... Pendant mes études, j'avais jamais entendu parler de température comme ça. Je me dis, comment c'est physiquement possible, même avec des scénarios de réchauffement importants Et quand je suis élu, par ailleurs, je me rends compte que la ville de Paris ne découvre pas du tout ces sujets-là. C'est-à-dire qu'il y a déjà un plan climat qui est historiquement ancien, avec un volet adaptation. La canicule de 2003 a été un choc, il y a eu des mesures et tout. Mais c'est de la prospective en regardant le rétroviseur. C'est-à-dire que sans vraiment le dire, en fait ce qu'on est en train de faire c'est se préparer à un retour de la canicule de 2003. Et j'ai un conseil de Delphine Bateau qui me dit Trouve-toi un couloir de nage et avance. Donc, d'un côté, j'essaie gentiment de... Et moi, je sais faire deux choses, atténuation, adaptation. Donc, côté atténuation, je me dis qu'il y a déjà pas mal de choses qui sont faites quand même à Paris. Sauf sur le tourisme aérien. Mais je n'arrive pas à faire avancer le sujet. Il n'y a que quatre ans plus tard que j'arrive à le faire avancer. Et je me dis, par contre, sur l'adaptation quand même... C'est pas folichon, quoi. Il y a des petits trucs, mais c'est vraiment hyper ponctuel. Il y a tellement de décisions contraires à l'adaptation qui sont prises, c'est que c'est pas entré dans les mentalités. Il n'y a pas un réflexe adaptation qui s'est développé. Donc j'en parle au groupe écologiste, qui, du fait de toutes les batailles autour de l'affaire Girard avant, disent, ok, il faut que... La mission, parce qu'on n'en a qu'une seule, pendant tout le groupe écologiste peut en déclencher qu'une seule, il faut que ce soit sur un sujet environnemental. Et donc le groupe écolo est convaincu, mais juste, je fais mon consultant, j'ai mon PowerPoint, j'explique pourquoi physiquement il faut se préparer, qu'est-ce qui peut arriver, je parle des trucs, des rails, SNCF, parce que ça c'était déjà assez bien documenté à l'époque. Je fais une analyse politique aussi en disant en fait l'adaptation c'est un vocabulaire de la protection, de la sécurité, de la sûreté etc. De la gestion de crise et donc la droite peut s'en saisir, les droites peuvent s'en saisir. Et donc ils peuvent aussi, si on ne le fait pas, ils vont s'en saisir et ils vont le faire d'une manière qui peut-être ne conviendra pas. Et donc il faut occuper ce terrain. Et donc ça, je le dis en 2020, et tout le monde est d'accord. Et après, il faut deux ans pour que ça se lance vraiment. Mais c'est ça le point de départ. Un mélange, il y a une base scientifique, une intuition personnelle qu'en fait, ce sujet-là peut prendre aussi. Parce que dans tous les phénomènes environnementaux, quand on habite à Paris... les vagues de chaleur, c'est le truc le plus perceptible, le plus sensible. Et donc je me dis, c'est intéressant d'essayer d'entrer par la porte de l'adaptation pour faire bouger les gens. Et pour l'instant, ça marche. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des écueils possibles en entrant par l'adaptation, qu'ensuite les gens peuvent oublier l'atténuation ou d'autres choses, mais comme le pourquoi de l'action, il est plus clair, ça crée moins de résistance. Si tu commences à dire à des gens on va travailler pour mieux vivre les canicules, et ensuite tu glisses des choses pour que ce soit des solutions simples, robustes, et assez vite tu comprends que tu ne pourras pas tout adapter à n'importe quoi, et donc il faut aller vers des modes de vie plus simples, et que ça va faire l'atténuation. le raisonnement est beaucoup plus facile à comprendre. Dans ma pratique, depuis que la mission est sortie, parce que j'en ai énormément parlé, j'ai rencontré énormément de publics différents, dans toute la France et à l'étranger, c'est un chemin qui est plus fluide.

  • Speaker #1

    Aussi parce que c'est quelque chose de plus palpable. C'est peut-être aussi pour ça qu'ils perçoivent tout de suite les risques. Quand tu pars d'île de chaleur, c'est quelque chose qui est déjà ressenti maintenant.

  • Speaker #0

    Voilà, quelle que soit la classe d'âge, quelle que soit la sociologie, quelles que soient les valeurs aussi parce que c'est du réel et donc il ya au moins il n'y a pas cette barrière à l'entrée parce que pas se mentir quand même entre le barbec et la canicule il ya quand même quelques étapes et il faut avoir le temps, il faut avoir le il faut accepter des postures scientifiques. Tandis que si on fait le raisonnement dans l'autre sens, ça a l'air, en tout cas pour l'instant, ça a l'air plus simple. Et un truc aussi, c'est que maintenant, je lis de moins en moins de trucs de climatologie. mais beaucoup plus de sciences sociales et notamment d'études sur la communication. Et on m'avait toujours dit, on parlait de 2050, on est une espèce adaptative, on attendra que ça arrive pour... Je me suis dit, bon, là c'est le bon moment, parce que ça commence déjà bien, c'est déjà bien palpable. Je crois qu'il y a 7 Français sur 10 qui disent qu'ils ont vu une manifestation du changement climatique sur leur territoire. Et du coup, je me dis, il ne faut pas que j'appelle ça Paris 2050 ou Paris 2100 ou Paris plus 4 degrés, qui n'était pas une terminologie très bien acceptée à l'époque, puisqu'en fait, il n'y avait pas encore eu le travail. Au moment où je lance tout ça, il n'y avait pas encore eu le plan national d'adaptation, Christophe Béchut qui parle de plus 4 degrés, France, etc. Et du coup, moi, je suis là avec mon étude Météo France en main et je me dis, est-ce que j'ose Appeler la mission Paris à 50°. Et ça a été une énorme hésitation. Parce que je savais que ça avait du sens scientifique. Mais je me suis dit, est-ce qu'on va me pointer du doigt comme un cassandre Le chef de service... Vous essayez juste de nous faire peur, etc. Et en fait, ça a fait 50% du job. Parce que derrière, c'est... très théâtral, mais vous avez l'unité de lieu et vous avez quasiment l'intrigue qui est dans ce titre, Paris à 50 degrés. Et après, il y avait d'autres choses à faire, parce que c'était une mission transpartisane. Mais ça, j'en ai déjà beaucoup parlé par ailleurs sur comment gérer ce côté transpartisan, comment embarquer les autres forces politiques qui ont été très motrices pendant la mission. Tu me demandais les effets, donc je saute l'étape, qu'est-ce qui s'est passé, de quoi on a parlé et tout. Là aussi j'en ai parlé déjà plein de fois, mais en fait dans les effets, il y a déjà le fait que la classe politique parisienne maintenant parle d'habitabilité. On parle plus de confort d'été. On parle... Avant on parlait juste de transition. Maintenant... Le vocabulaire de l'adaptation commence à rentrer et surtout, ça parle la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui est quand même une femme extrêmement courageuse, pugnace et qui a beaucoup fait avancer les thématiques écologistes. Parce qu'on peut dire ce qu'on veut sur le fait que oui, tout ça, c'était des idées qui venaient des arcs de la pensée écologiste. Mais à un moment, si la chef n'est pas convaincue elle-même. Elle ne fait pas autant de choses. Donc, elle l'a fait, mais maintenant, elle parle beaucoup de canicule. C'est-à-dire que la manière de parler des choses a changé. Et c'est important parce qu'en politique, une partie du temps, ce n'est pas sans inconvénients, mais une partie du temps, le verbe est performatif. C'est-à-dire que si le politique dit quelque chose, l'administration commence à suivre. L'administration commence à regarder les projets différemment. Et moi, j'ai eu des échos de l'administration dans ce sens-là. Il y a des réflexes, ça y est, c'est venu. De nouveau, c'était pas sur une base, on partait pas d'un désert, mais simplement, c'était assez facile de perdre des arbitrages, de se dire, oui, bon, cet arbre-là, on peut le couper pour construire tel truc, ou bien là, bon, ça coûte quand même un peu plus cher de mettre tel isolant biosourcé à l'extérieur, donc on va faire plutôt un truc à l'intérieur, mais ça va être bien pour le froid, bah oui, mais... Des fois, on fait des trucs bien pour le froid qui ne sont pas bien pour le chaud. Donc, il faut trouver des trucs qui sont bien pour le chaud et pour le froid. Et il y avait des projets qui étaient exemplaires, mais il y avait aussi des projets qui étaient catastrophiques. Et là, ce qu'on me dit, puisque de nouveau, je ne suis pas dans l'exécutif, donc je n'ai pas une ligne directe avec toute une partie de l'administration. Donc, c'est parce que je me suis fait repérer par la mission que j'ai des canaux d'écoute. Et on me dit que la nature des projets a déjà changé. Et par ailleurs, la semaine dernière, la semaine précédente de notre enregistrement, 4 plans ont été votés, le plan climat, le plan santé, résilience et le plan local d'urbanisme. Et c'est une victoire totale de la mission transpartisane Paris à 50 degrés parce que non seulement les préconisations sont reprises, mais la philosophie aussi est reprise. Alors ça ne fait pas tout d'avoir des plans. Il y a une question financière derrière, il y a une question de priorité. Mais franchement, le cap est donné. Et l'étape d'après, elle est aussi sur le fait de ne pas juste avoir un plan A. Parce que là, ça y est, on a un plan A. Et quand on réfléchit en termes de permacrise, il faut des plans B, C, D. Et il faut travailler, à mon sens, beaucoup des questions de quasi... Moi je me pose des questions de comment me préparer d'un point de vue philosophique, éthique, moral, à devoir prendre des décisions de plus en plus difficiles avec le temps qui passe pour au moins 30 ans. Parce que je me projette dans l'univers politique. Il y a plein de côtés très... c'est un coût émotionnel énorme pour moi. Si on n'a pas assez de gens dans l'univers politique qui ont compris la nature, notamment le fait que ce n'est pas une crise comme un truc ponctuel, mais que c'est une rupture dans l'histoire de l'humanité, on ne s'en sortira pas. Et un des facteurs d'effondrement identifiés par Jared Diamond, c'est des élites pédurées.

  • Speaker #1

    qui est très important pour leur mise en place, c'est l'acceptabilité sociale de ces plans, le fait qu'ils soient plus ou moins contestés, voire pas du tout. Quand tu cites Christophe Béchut qui dit qu'il faut se préparer à une France à plus 4 degrés, moi j'ai une question, c'est comment est-ce que... Tu mets ça au regard des injonctions au positivisme qui sont aujourd'hui d'actualité, c'est-à-dire il faut absolument avoir un récit désirable, il faut vendre ça aux gens, il faut qu'ils soient convaincus par le fait qu'il y a de la désirabilité derrière. Comment est-ce qu'il est possible de conjuguer Cette parole, il faut se préparer à une France à plus 4 degrés, et derrière d'appliquer un schéma qui soit propre à la désirabilité. Est-ce que c'est possible

  • Speaker #0

    Alors, j'essaie toujours d'avoir une prise de parole qui équilibre lucidité et enthousiasme. Parce que si tu dis que tout est foutu, ok, on va ensemble aux Antilles, et puis c'est... T'y ponche... T'y ponchez plage, quoi. Et après nous, l'enfer. Par contre, faut pas se raconter d'histoires sur qu'est-ce qui peut être sauvé. Il y a une partie de la biodiversité qui ne peut plus être sauvée. Il y a déjà des effondrements. Il y a au moins un effondrement de la biodiversité qui est documenté. Par contre, je vois... Il n'y a pas de raison en fait que dans un monde qui serait plus contraint, plus chaotique, on ait moins d'histoire d'amour, moins d'histoire d'amitié, moins de fourrir. Et il y a énormément de preuves aussi que quand on a moins de choses, il y a plus de solidarité, plus de liens. Et que... Par ailleurs, on est dans un système de hamster qui court vers la croissance infinie, où en fait, pour pouvoir jouer ce jeu-là, il faut être déprimé. Le système nous force à être déprimé. Le burn-out, c'est clairement une maladie de la croissance infinie dans un monde fini. Donc si on arrête de vouloir jouer à ce jeu-là, je ne vois pas pourquoi il y a tout un tas de choses qui n'arriveraient pas à s'améliorer dans notre quotidien au travers du lien social. Mais par contre, c'est sûr que... la vie va être très très très très très différente. Donc si tu veux, après, en fait, c'est un peu comme la question sur l'optimisme, c'est pas une question d'optimisme, il y a une question de volonté, et puis il y a une question de juste de se raccrocher à des trucs très simples. Et les trucs très simples, oui c'est carrément possible qu'ils continuent. Le fait de pouvoir partager des bons moments dans sa famille, avec ses proches, ses amis, avec ses voisins, on peut quand même le faire dans un monde plus chahuté. Tout est une question de... Tout est une question de quelle est la quantité de gens qu'on va laisser à la rue, soit à la rue au sens dans nos rues ou à la rue en dehors de nos frontières, parce qu'il va quand même y avoir un sacré bordel aussi en termes de migration, puisqu'il y a des zones qu'on est en train de rendre inhabitables. Une fois que j'ai dit ça, je n'ai pas dit grand-chose en termes d'action politique. Moi, le travail que j'ai cherché à faire avec Paris à 50 degrés, il se prolonge à l'heure actuelle avec des scénaristes, des scénaristes de films, des scénaristes de BD, des scénaristes de séries. Parce qu'en fait, il y a des histoires incroyablement joyeuses, romantiques, pas bisounours. à raconter dans ce contexte-là. Mais ne nous voilons pas la face, la seule manière de rendre l'adaptation possible, c'est d'avoir l'atténuation en temps et en heure. Parce que oui, j'arrive à imaginer des scénarios dans lesquels la taille de l'humanité est extrêmement diminuée d'ici la fin du siècle. Mais bon, c'est pas ça qui... En fait, je les mets de côté dans ma tête parce que sinon... C'est le fameux optimisme de la volonté.

  • Speaker #1

    On créera autre chose. Finalement, ce qui est intéressant, et c'est une chose dont on parle beaucoup dans les sphères de l'association, c'est le pouvoir de la culture. Comment est-ce que la culture s'approprie tout ça, que ce soit les scénarios ou la convivialité même. Le principe de créer des contre-récits, finalement, ça passe aussi par ça. C'est le fait d'imaginer des choses ensemble. Comme je te l'ai précisé en introduction, je vois que l'heure tourne. C'est les 10 ans de l'association cette année. Où est-ce que toi tu étais il y a 10 ans Est-ce qu'il y a un point sur lequel... tu veux rebondir, qui t'a marqué sur ces dix dernières années, c'était quoi tes aspirations C'était quoi tes craintes Et éventuellement tout à l'heure tu as parlé de vie familiale, je ne sais pas si tu as des enfants, c'est quoi les grands plans que toi tu fais, pour, parlons des dix prochaines années, imaginons, dans ta vie personnelle

  • Speaker #0

    Alors il y a dix ans je rentrais du Brésil, où j'ai travaillé deux ans là-bas sur le plan climat d'un état. Et je choisissais de revenir en France parce que je ne me voyais pas vivre là-bas, parce que c'est un pays trop violent. Et parce que ma nièce venait de naître et je me disais, je ne me vois pas faire énormément d'aller-retour France-Brésil. Et ça me faisait mal au cœur de me dire que je n'allais pas l'avoir qu'en dire. Donc, je suis rentré et assez rapidement, je suis passé. C'est là que j'ai intégré Carbone 4. Assez rapidement, je suis passé à la semaine de quatre jours et j'ai commencé à faire de l'ébénisterie à côté de ça. Alors maintenant, je suis dans un moment de ma vie très différent parce que je suis toujours au 4-5ème chez Carbone 4. En parallèle de mon mandat, j'ai créé la Carbone 4 Academy, dont... et je vais arrêter d'être le directeur à la fin de l'année. Et c'est Juliette Day qui va reprendre les rênes, parce que j'ai envie de faire autre chose. Et donc au moment où a lieu cette interview, je suis dans une grande incertitude. Parce qu'à la fois, je pense qu'il manque un centre d'excellence en France et en Europe sur l'adaptation et les territoires, alors que c'est une porte d'entrée incroyable pour faire de la politique. Ça, c'est le premier point. Ensuite, d'un point de vue personnel, non, je n'ai pas d'enfant. Et c'est une discussion. C'est une discussion qui n'est pas simple, qui n'est pas résolue. Je ne sais pas du tout de quel côté elle va se résoudre. Ensuite, on est quand même à un moment où ce n'est pas parce qu'on veut qu'on peut.

  • Speaker #1

    Et puis, est-ce que c'est le cœur ou la tête qui décide Ce n'est pas la même chose non plus.

  • Speaker #0

    Oui, et puis... La politique c'est du calcul, l'amour c'est un élan. Faut arrêter de faire du calcul dans ces moments-là. Et ça c'est aussi quelque chose sur lequel je travaille. C'est-à-dire que les gens avec qui je travaille, notamment Juliette que je salue si elle écoute ce podcast, elle me dit que je suis assez pression. En fait j'ai pas mal d'intuition sur ce qui... peut se passer ou pas dans les organisations dans lesquelles on a travaillé ensemble et tout. Enfin, Paris à 50°, c'est aussi une émanation de ce côté-là, parce que tout ça, c'est quand même été pensé avant qu'il y ait autant de gens qui parlent d'adaptation. C'était avant Béchut, alors maintenant il y a une explosion sur l'adaptation, mais Paris à 50°, c'est imaginé en 2020. Donc bon, il y a une part de moi aussi qui travaille au fait d'apprendre à danser avec l'incertitude. Je dis danser parce qu'en fait, il y a aussi ce côté plus relax, plus fun, plus joyeux, plus léger. Je ne contrôle pas tout, donc j'essaie de faire ce que je peux dans ce bordel ambiant et trouver du plaisir sur des petites choses. Puis on verra où tout ça me mène. Je suis de plus en plus sollicité. Pour me représenter, et pour me représenter en montant en grade, donc plutôt pour des postes d'adjoint.

  • Speaker #1

    Tu es plutôt favorable

  • Speaker #0

    Ça va dépendre des conditions en fait. Et là, on est dans un brouillard politique qui est énormissime. Avec, au moment où je te parle, ce matin même, la maire de Paris a annoncé qu'elle ne se... Madame Hidalgo a annoncé qu'elle ne se représenterait pas. De plus en plus de gens ont écologisé leur matrice idéologique, mais ils ne sont pas encore dans une logique de décroissance-résilience. Je te donne un exemple très simple. Il y a beaucoup de socialistes qui ont fait énormément de progrès sur leur compréhension de cette question. Ils ne sont pas prêts à remettre en cause la place du tourisme aérien. et les conséquences que ça aurait sur le tissu économique, et donc les finances de la ville, et donc notre capacité à faire d'autres politiques. Moi, je n'ai pas la réponse, parce que je n'ai pas réussi, en ayant un job au 4-5e entrepreneurial, à agglomérer suffisamment de forces vives autour de moi, parce qu'il ne suffit pas d'avoir des gens qui lèvent la main, en fait, après, il faut les coordonner, pour... construire la réponse intellectuelle avec ce que je disais des plans A, B, C et D. Parce que par exemple, les élections municipales, c'est en 2026. Il faut avoir un plan à Paris si c'est le RN qui passe en 2027. Parce que si c'est une majorité sur le périmètre actuel, donc socialiste, communiste, écologiste, qui gagne, Le Rassemblement National voudra en faire un contre-exemple. Et donc on aura le gouvernement contre nous. Comment tu fais ça Comment tu gouvernes dans une situation pareille Avec très concrètement des gens qui seront pris pour cible. Je ne parle pas d'élus, je parle des gens dans la population, parce qu'ils sont comme ci, comme ça, ils vont être pris pour cible. Des associations, comment tu les protèges ? Qu'est-ce que tu fais ? Comment tu entres en résistance dans ton propre pays par rapport à une idéologie et des pratiques fascistes ? Mais ça c'est valable aussi si... Et je ne suis pas du tout dans un truc genre le bien contre le mal. C'est beaucoup plus compliqué que ça comme réflexion. Il faut se poser la question de pourquoi il y a des gens qui votent RN. C'est parce que globalement, à ma lecture, elle est très écologiste. C'est parce qu'en fait, comme on n'arrive pas à faire une croissance infinie dans un monde fini, ça a des conséquences sociales, ça a des conséquences environnementales, et notamment les conséquences sociales, les gens en ont marre. Et donc, ils votent. pour quelqu'un qui propose de retourner la table et de faire payer les élites. C'est aussi ce qui se passe du côté des États-Unis, d'une certaine manière. Vous avez d'un côté les perdants de la mondialisation qui se rebiffent. Et en face, la réponse écologiste qui consisterait à atterrir et à proposer un contre-modèle, elle n'est pas du tout mature. Et par contre, je ne me vois pas en porte-drapeau de ça, parce que les gens qui peuvent prétendre à un défi pareil, il faut être à un autre niveau en politique. Parce que, comme je le disais, par exemple, je n'ai pas de collaborateurs ou collaboratrices qui ne travaillent que pour moi. Alors que tous les gens qui visent très haut en politique, ils ont déjà des équipes qui bossent. Donc là, on est quand même sur un nœud que je n'arrive pas à résoudre. Et puis là, j'ai mon arc par R50° qui se finit un petit peu. Là, j'ai besoin de reprendre du souffle. Et on va voir ce qui se passe en début 2025. Mais en tout cas, ce que je remarque, c'est que cette pensée-là, qui, je pense, nous lie entre les membres d'Adrastia et moi, qui suis avec un pied chez Carbon4, un pied chez Génération Ecologie. En fait, l'histoire est en train de nous donner raison, mais par contre, je pense qu'on n'est pas assez coordonnés pour peser dans le jeu politique.

  • Speaker #1

    Écoute, ça me paraît être une très belle conclusion et je garderai comme phrase de fin la part de l'incertitude dans la définition des nouveaux imaginaires. Merci beaucoup, Alexandre.

  • Speaker #0

    Merci. Et encore bon anniversaire. Merci beaucoup.

  • Speaker #2

    Vous venez d'écouter le podcast de l'association Adrastia, le podcast qui fait le bilan sur les risques globaux et les perspectives, afin de faire face tous ensemble. Retrouvez toutes les actualités du podcast et de l'association sur le site internet adrastia.org et sur l'ensemble des réseaux sociaux. L'heure du bilan, faire face, 60 minutes pour apprendre à nous adapter au monde tel qu'il est, non tel que nous croyons le maîtriser.

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