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Episode 6 - Mesures anticorruption PME-ETI cover
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Cap Intégrité, le podcast de l'Agence Française Anticorruption

Episode 6 - Mesures anticorruption PME-ETI

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11min |17/10/2024
Play
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Description

82% des PME et petites ETI ayant répondu au diagnostic national 2022 de l’AFA  ont déclaré avoir mis en œuvre des mesures anticorruption, bien qu’elles n’aient pas l’obligation de le faire.

Alors, quelles mesures ? Dans quel but ? Et avec quels bénéfices pour l’entreprise ? Paul Krembel, chargé d'appui aux acteurs économique à l'Agence française anticorruption (AFA) va répondre à nos questions.


Pour en savoir plus sur ce sujet, consultez nos guides associés : https://www.agence-francaise-anticorruption.gouv.fr/fr/guides-et-fiches-pratiques


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Florent

    La corruption, on est une PME qui ne brasse pas des milliards. Je n'ai vraiment pas le sentiment que ce soit un sujet pour ma petite entreprise.

  • Gilles Halais

    Bonjour, c'est Gilles Halais. Des mesures de prévention contre la corruption, pas un sujet pour les PME, et bien détrompez-vous, car 82% des PME et petites ETI qui ont répondu au Diagnostic National 2022 de l'AFA ont déclaré avoir mis en œuvre des mesures anti-corruption, bien qu'elles n'aient pas l'obligation de le faire. Alors, quel type de mesures, dans quel but, et avec quels bénéfices pour l'entreprise, c'est ce que l'on va voir directement au siège de l'AFA, où j'arrive à l'instant. Bonjour Paul Krembel.

  • Paul Krembel

    Bonjour Gilles.

  • Gilles Halais

    Vous êtes chargé d'appui aux acteurs économiques à l'AFA. Rien n'oblige en effet une petite entreprise à mettre en place des mesures anticorruption.

  • Paul Krembel

    Non en effet, une PME ou une petite ETI n'a pas l'obligation légale de le faire. Cette obligation ne concerne que les entreprises employant au moins 500 salariés qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 100 millions d'euros et dont la société mère a son siège en France. Elles doivent mettre en place 8 mesures destinées à prévenir et à détecter les faits de corruption ou de trafic d'influence visés à l'Article 17 de la Loi Sapin II. Mais comme vous venez de le souligner, rien n'empêche les autres entreprises, même les PME et les petites ETI, de le faire également.

  • Gilles Halais

    Alors quel est leur intérêt si ce n'est pas obligatoire ?

  • Paul Krembel

    Il y en a plusieurs en réalité. D'abord, cela permet à l'entreprise de se positionner de façon plus favorable auprès de ses clients. Au titre de l'Article 17, les grandes entreprises ont l'obligation d'évaluer l'intégrité de leurs partenaires, de toute taille, et peuvent demander à cette occasion s'ils ont mis en place des mesures anticorruption. Parfois, ces grandes entreprises exigent même l'insertion d'une clause anticorruption dans le contrat qui les lie avec une PME. Ensuite, les banques et les assureurs évaluent aussi l'intégrité de leurs clients, de même que les investisseurs évaluent les entreprises dans lesquelles ils prennent des participations. Une entreprise a donc plus de chances d'obtenir un financement ou une assurance à l'export si elle a mis en place des mesures anticorruption. De telles mesures participent également à la prévention d'autres infractions, relevant davantage de la fraude, permettant ainsi à l'entreprise de protéger ses actifs et sa réputation. Enfin, et surtout, mettre en place un dispositif anticorruption leur permet de se protéger des conséquences négatives d'un acte de corruption qui viendrait de l'un de leurs collaborateurs ou d'un partenaire commercial et qui les concernerait au premier chef.

  • Gilles Halais

    J'ai pourtant l'impression que les affaires de corruption qui font la une des médias concernent surtout les grands groupes qui opèrent, on va dire, sous d'autres latitudes. Mais la corruption pourrait donc aussi frapper les petites entreprises.

  • Paul Krembel

    Absolument. Dans le Diagnostic National 2022 de l'AFA, sur les dispositifs anticorruption dans les entreprises, 24% des entreprises interrogées ont déclaré avoir été confrontées à un cas de corruption. Un tiers de ces entreprises étaient des PME ou des petits ETI. Les conséquences sont nombreuses pour une entreprise poursuivie ou condamnée pour corruption. Il faut savoir que le Code pénal ne fait pas de distinction de taille. En cas de corruption ou de trafic d'influence, l'entreprise encourt jusqu'à 5 millions d'euros d'amende ou le double du produit qu'elle a retiré de l'infraction. Elle encourt aussi des peines complémentaires. telles que la fermeture, la dissolution ou encore l'exclusion des marchés publics. Et comme en droit français, l'engagement de la responsabilité pénale de la personne morale s'accompagne nécessairement de celle de ses dirigeants, ils risquent eux jusqu'à 10 ans de prison, 1 million d'euros d'amende, voire l'interdiction d'exercer.

  • Gilles Halais

    Et déjà des conséquences pour l'entreprise dès le stade du soupçon de corruption.

  • Paul Krembel

    Elle peut déjà faire face à des conséquences réputationnelles, une dégradation de son image auprès de ses clients, de ses partenaires, de ses investisseurs ou même de son personnel. Et par voie de conséquence, une perte de confiance. envers l'entreprise et une baisse de son carnet de commandes.

  • Gilles Halais

    Je comprends mieux pourquoi certaines PME ou ETI ont donc mis en place des mesures anticorruption, et pour les autres, par où commencer ?

  • Paul Krembel

    Alors plusieurs étapes. Première étape et préalable essentielle, l'engagement du dirigeant. Par engagement, on entend une attitude exemplaire : porter la démarche, s'impliquer personnellement dans le suivi de sa mise en œuvre. Et puis, il faut qu'il mette dans la mesure du possible des moyens financiers et humains suffisants pour le déploiement des mesures anticorruption. Sans un dirigeant qui affirme et qui applique au quotidien une démarche de tolérance zéro, il est peu probable d'avoir des mesures efficaces de prévention de la corruption.

  • Gilles Halais

    Je voudrais justement vous faire écouter un témoignage, Paul. C'est celui de Florent. Il a 52 ans. Il dirige une PME de 92 salariés dans le secteur des travaux publics. Il intervient principalement dans la construction de réseaux ferrés pour des lignes de métro ou de tram.

  • Florent

    Franchement, on est une PME qui ne brasse pas des milliards. Je fais surtout de la sous-traitance pour des mastodontes du BTP. Donc ce n'est pas moi qui est le client final en relation directe. Et puis en plus, je fais totalement confiance à mon équipe commerciale qui élabore les réponses aux appels d'offres. Je fais confiance totale à mes acheteurs et bien sûr à mes conducteurs de travaux. Franchement, pour moi, c'est risque zéro. La corruption, je n'ai vraiment pas le sentiment que ce soit un sujet pour ma petite entreprise.

  • Gilles Halais

    Réaction à ce témoignage, Paul, est-ce que Florent est dans le vrai ou bien il se trompe ?

  • Paul Krembel

    Alors il est vrai que quand l'AFA mène des actions de sensibilisation auprès des PME, c'est souvent ce type de réaction qu'on entend. Pour autant, dès lors qu'on les interroge sur leurs activités, les partenaires avec qui elles travaillent ou les pays dans lesquels elles exportent, on arrive assez vite à dessiner des risques de corruption auxquels elle pourrait être confrontée dans l'absolu. Cette réflexion, c'est justement la deuxième étape du déploiement de mesures anticorruption.

  • Gilles Halais

    Oui, quand vous leur conseillez de faire une sorte de diagnostic à partir de critères bien précis.

  • Paul Krembel

    Exactement, un recensement point par point. D'abord, des structures et des personnes avec lesquelles elles sont en relation, les clients, les fournisseurs, les intermédiaires. Puis, un recensement des situations à risque qui pourraient se produire avec ces structures ou ces personnes. Afin d'imaginer le plus de situations possibles, on peut se poser différentes questions. Par exemple, est-ce que l'entreprise a des interactions avec des agents publics ? Est-ce qu'elle travaille dans certains pays à risque ? Est-ce qu'elle a recours à des intermédiaires pour entrer sur de nouveaux marchés ou distribuer des produits ou des services ? Et enfin, un recensement des mesures de prévention déjà en place, telles que l'existence d'une procédure achat formalisée, une politique cadeau et invitation définissant des plafonds de montant, des actions de formation des salariés, des mécanismes de revue de la bonne application de ces politiques et procédures, etc. Cet exercice conduit rapidement l'entreprise à identifier les risques de corruption auxquels elle est exposée et à déterminer les scénarios associés les plus probables. Sur la base de ce constat, elle peut donc proposer la mise en place de mesures complémentaires pour maîtriser les risques qui ne le sont pas suffisamment.

  • Gilles Halais

    Vous parlez de mesures complémentaires, Paul, est-ce qu'on peut prendre quelques exemples concrets ?

  • Paul Krembel

    Oui, l'AFA recommande la mise en place de 8 mesures, parmi lesquelles 3 mesures de prévention des risques. Premièrement, l'entreprise peut rédiger un code de conduite ou une charte éthique pour les personnels. Dans ce document, elle va rappeler qu'elle ne tolère pas la corruption. Elle va expliquer très concrètement et de façon illustrée les situations dangereuses auxquelles les salariés pourraient être confrontés et les comportements interdits. Par exemple, pour les cas d'invitation ou les situations de conflit d'intérêt.

  • Gilles Halais

    Deuxième mesure recommandée par la FA.

  • Paul Krembel

    L'entreprise peut prévoir de sensibiliser l'ensemble de ses salariés et de former ceux qu'elle estime être le plus exposés au risque. Par exemple, les dirigeants, les commerciaux, les acheteurs, etc. Le but, c'est de leur permettre d'identifier les situations à risque d'en mesurer les dangers pour eux-mêmes et pour l'entreprise, et de comprendre comment s'en prémunir. Par exemple, la formation peut indiquer comment un salarié devrait réagir s'il reçoit une demande inappropriée d'un client à l'étranger.

  • Gilles Halais

    Et enfin, troisième mesure,

  • Paul Krembel

    l'entreprise peut évaluer simplement l'exposition au risque de corruption de ses partenaires, c'est-à-dire vérifier qu'elle travaille avec des partenaires dont la mission, la situation ou la réputation ne présentent pas un risque anormal. En pratique, un fournisseur de mobilier implanté en Russie ne présentera pas le même risque qu'un prestataire de services logistiques allemand. L'entreprise rassemble alors les informations pertinentes afin de se faire une opinion sur ce niveau de risque et de décider d'entrer ou non en relation avec un partenaire, de poursuivre cette relation ou d'y mettre un terme.

  • Gilles Halais

    À travers ces mesures, l'entreprise peut donc prévenir les éventuels risques de corruption, mais existent-ils des mesures pour détecter ces risques ?

  • Paul Krembel

    Oui, il en existe et la fin en recommande trois.

  • Gilles Halais

    Alors voyons-les dans le détail.

  • Paul Krembel

    L'entreprise peut mettre en place un dispositif d'alerte qui permettra à tout salarié de faire remonter en toute confidentialité une situation ou un comportement pouvant présenter un risque pour l'entreprise. Si l'entreprise compte plus de 50 salariés, elle en a d'ailleurs l'obligation légale.

  • Gilles Halais

    Deuxième mesure...

  • Paul Krembel

    Une comptabilité rigoureusement tenue est un élément indispensable à la prévention de la corruption. En complément, il est utile que l'entreprise s'assure du renforcement des contrôles comptables sur les situations à risque identifiées précédemment. Il s'agira par exemple de contrôle comptable sur des opérations exceptionnelles ou à enjeu, des opérations réalisées dans des pays sensibles, des comptes sensibles, comme les comptes de caisse, de banque, ce concernant les cadeaux à la clientèle, les dépenses courantes relatives aux notes de frais, etc.

  • Gilles Halais

    Enfin, et peut-être surtout,

  • Paul Krembel

    elle peut mettre sous contrôle les processus essentiels de son activité, par exemple les ventes, les achats, le recrutement, la paie ou la trésorerie, en s'assurant d'avoir d'une part des procédures formalisées et connues de ceux qui doivent les appliquer, et d'autre part une organisation respectant le principe de séparation des tâches. A titre d'exemple, la sélection d'un fournisseur, la validation d'une commande, la réception de celle-ci, puis son règlement ne doivent pas être effectués par une seule et même personne. Si la taille de l'entreprise ne permet pas de confier ses tâches à des salariés différents, il convient qu'elle fasse l'objet d'une validation et d'un contrôle par un salarié différent ou par un supérieur hiérarchique qui peut être l'un des dirigeants.

  • Gilles Halais

    Très bien, mais dans les plus petites structures, avec des moyens limités, la mise en place de l'ensemble de ces mesures me semble assez difficile. Est-ce qu'il y a certaines mesures ou certaines actions qui sont véritablement prioritaires.

  • Paul Krembel

    J'en vois trois. D'abord, identifier les activités de l'entreprise qui pourraient présenter des risques. Par exemple, l'export, la soumission au marché public ou l'obtention d'autorisations administratives. Ensuite, mettre en place des consignes pour encadrer ces activités à risque et les relations avec ses partenaires, notamment en matière de cadeaux et invitations ou de conflits d'intérêts. Et enfin, se renseigner sur les principaux partenaires afin de vérifier qu'ils ne présentent pas un risque anormal, particulièrement si l'entreprise fait appel à des agents commerciaux. Pour finir, il s'agit de contrôler effectivement la bonne application des consignes et des procédures mises en œuvre dans l'entreprise.

  • Gilles Halais

    Est-ce que l'agent est seul dans la mise en œuvre et le suivi de ses mesures ?

  • Paul Krembel

    Il peut tout à fait choisir de piloter lui-même la mise en œuvre opérationnelle en s'appuyant sur ses proches collaborateurs, tels que le responsable administratif et financier, le responsable juridique, le responsable des ressources humaines, etc. Un travail d'équipe permettra de mettre en place des mesures adaptées aux spécificités de l'entreprise, mais le dirigeant peut également choisir de déléguer le pilotage de ce projet à une autre personne ou à un service dédié, notamment si la taille, les ressources et le profil de risque de corruption de l'entreprise le justifient. Cette mission pourra lui être affectée en temps plein ou en complément de ses fonctions actuelles.

  • Gilles Halais

    Merci Paul Krembel pour ces explications très claires. Vous dirigez une PME ou une ETI, vous voulez en savoir plus ? Rendez-vous sur le site de l'AFA : agence-francaise-anticorruption.gouv.fr. Vous allez pouvoir télécharger gratuitement le guide pratique anticorruption à destination des PME et petites ETI. Il a été rédigé avec la CPME et le METI pour vous accompagner de façon très pédagogique et illustrée. On y trouve des fiches pratiques avec des exemples, les bonnes pratiques à mettre en œuvre et même un flyer qui résume les points essentiels. Si vous avez une question concrète concernant votre entreprise, vous pouvez la poser directement par mail à l'adresse suivante afa@afa.gouv.fr. Et comme toujours, n'hésitez pas à partager, à commenter ce podcast et puis à écouter l'intégralité de la collection désormais en ligne. Merci de votre concours précieux à la lutte anticorruption et à très bientôt.

  • Paul Krembel

    Cap Intégrité. Le podcast de l'Agence Française Anticorruption.

Description

82% des PME et petites ETI ayant répondu au diagnostic national 2022 de l’AFA  ont déclaré avoir mis en œuvre des mesures anticorruption, bien qu’elles n’aient pas l’obligation de le faire.

Alors, quelles mesures ? Dans quel but ? Et avec quels bénéfices pour l’entreprise ? Paul Krembel, chargé d'appui aux acteurs économique à l'Agence française anticorruption (AFA) va répondre à nos questions.


Pour en savoir plus sur ce sujet, consultez nos guides associés : https://www.agence-francaise-anticorruption.gouv.fr/fr/guides-et-fiches-pratiques


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Florent

    La corruption, on est une PME qui ne brasse pas des milliards. Je n'ai vraiment pas le sentiment que ce soit un sujet pour ma petite entreprise.

  • Gilles Halais

    Bonjour, c'est Gilles Halais. Des mesures de prévention contre la corruption, pas un sujet pour les PME, et bien détrompez-vous, car 82% des PME et petites ETI qui ont répondu au Diagnostic National 2022 de l'AFA ont déclaré avoir mis en œuvre des mesures anti-corruption, bien qu'elles n'aient pas l'obligation de le faire. Alors, quel type de mesures, dans quel but, et avec quels bénéfices pour l'entreprise, c'est ce que l'on va voir directement au siège de l'AFA, où j'arrive à l'instant. Bonjour Paul Krembel.

  • Paul Krembel

    Bonjour Gilles.

  • Gilles Halais

    Vous êtes chargé d'appui aux acteurs économiques à l'AFA. Rien n'oblige en effet une petite entreprise à mettre en place des mesures anticorruption.

  • Paul Krembel

    Non en effet, une PME ou une petite ETI n'a pas l'obligation légale de le faire. Cette obligation ne concerne que les entreprises employant au moins 500 salariés qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 100 millions d'euros et dont la société mère a son siège en France. Elles doivent mettre en place 8 mesures destinées à prévenir et à détecter les faits de corruption ou de trafic d'influence visés à l'Article 17 de la Loi Sapin II. Mais comme vous venez de le souligner, rien n'empêche les autres entreprises, même les PME et les petites ETI, de le faire également.

  • Gilles Halais

    Alors quel est leur intérêt si ce n'est pas obligatoire ?

  • Paul Krembel

    Il y en a plusieurs en réalité. D'abord, cela permet à l'entreprise de se positionner de façon plus favorable auprès de ses clients. Au titre de l'Article 17, les grandes entreprises ont l'obligation d'évaluer l'intégrité de leurs partenaires, de toute taille, et peuvent demander à cette occasion s'ils ont mis en place des mesures anticorruption. Parfois, ces grandes entreprises exigent même l'insertion d'une clause anticorruption dans le contrat qui les lie avec une PME. Ensuite, les banques et les assureurs évaluent aussi l'intégrité de leurs clients, de même que les investisseurs évaluent les entreprises dans lesquelles ils prennent des participations. Une entreprise a donc plus de chances d'obtenir un financement ou une assurance à l'export si elle a mis en place des mesures anticorruption. De telles mesures participent également à la prévention d'autres infractions, relevant davantage de la fraude, permettant ainsi à l'entreprise de protéger ses actifs et sa réputation. Enfin, et surtout, mettre en place un dispositif anticorruption leur permet de se protéger des conséquences négatives d'un acte de corruption qui viendrait de l'un de leurs collaborateurs ou d'un partenaire commercial et qui les concernerait au premier chef.

  • Gilles Halais

    J'ai pourtant l'impression que les affaires de corruption qui font la une des médias concernent surtout les grands groupes qui opèrent, on va dire, sous d'autres latitudes. Mais la corruption pourrait donc aussi frapper les petites entreprises.

  • Paul Krembel

    Absolument. Dans le Diagnostic National 2022 de l'AFA, sur les dispositifs anticorruption dans les entreprises, 24% des entreprises interrogées ont déclaré avoir été confrontées à un cas de corruption. Un tiers de ces entreprises étaient des PME ou des petits ETI. Les conséquences sont nombreuses pour une entreprise poursuivie ou condamnée pour corruption. Il faut savoir que le Code pénal ne fait pas de distinction de taille. En cas de corruption ou de trafic d'influence, l'entreprise encourt jusqu'à 5 millions d'euros d'amende ou le double du produit qu'elle a retiré de l'infraction. Elle encourt aussi des peines complémentaires. telles que la fermeture, la dissolution ou encore l'exclusion des marchés publics. Et comme en droit français, l'engagement de la responsabilité pénale de la personne morale s'accompagne nécessairement de celle de ses dirigeants, ils risquent eux jusqu'à 10 ans de prison, 1 million d'euros d'amende, voire l'interdiction d'exercer.

  • Gilles Halais

    Et déjà des conséquences pour l'entreprise dès le stade du soupçon de corruption.

  • Paul Krembel

    Elle peut déjà faire face à des conséquences réputationnelles, une dégradation de son image auprès de ses clients, de ses partenaires, de ses investisseurs ou même de son personnel. Et par voie de conséquence, une perte de confiance. envers l'entreprise et une baisse de son carnet de commandes.

  • Gilles Halais

    Je comprends mieux pourquoi certaines PME ou ETI ont donc mis en place des mesures anticorruption, et pour les autres, par où commencer ?

  • Paul Krembel

    Alors plusieurs étapes. Première étape et préalable essentielle, l'engagement du dirigeant. Par engagement, on entend une attitude exemplaire : porter la démarche, s'impliquer personnellement dans le suivi de sa mise en œuvre. Et puis, il faut qu'il mette dans la mesure du possible des moyens financiers et humains suffisants pour le déploiement des mesures anticorruption. Sans un dirigeant qui affirme et qui applique au quotidien une démarche de tolérance zéro, il est peu probable d'avoir des mesures efficaces de prévention de la corruption.

  • Gilles Halais

    Je voudrais justement vous faire écouter un témoignage, Paul. C'est celui de Florent. Il a 52 ans. Il dirige une PME de 92 salariés dans le secteur des travaux publics. Il intervient principalement dans la construction de réseaux ferrés pour des lignes de métro ou de tram.

  • Florent

    Franchement, on est une PME qui ne brasse pas des milliards. Je fais surtout de la sous-traitance pour des mastodontes du BTP. Donc ce n'est pas moi qui est le client final en relation directe. Et puis en plus, je fais totalement confiance à mon équipe commerciale qui élabore les réponses aux appels d'offres. Je fais confiance totale à mes acheteurs et bien sûr à mes conducteurs de travaux. Franchement, pour moi, c'est risque zéro. La corruption, je n'ai vraiment pas le sentiment que ce soit un sujet pour ma petite entreprise.

  • Gilles Halais

    Réaction à ce témoignage, Paul, est-ce que Florent est dans le vrai ou bien il se trompe ?

  • Paul Krembel

    Alors il est vrai que quand l'AFA mène des actions de sensibilisation auprès des PME, c'est souvent ce type de réaction qu'on entend. Pour autant, dès lors qu'on les interroge sur leurs activités, les partenaires avec qui elles travaillent ou les pays dans lesquels elles exportent, on arrive assez vite à dessiner des risques de corruption auxquels elle pourrait être confrontée dans l'absolu. Cette réflexion, c'est justement la deuxième étape du déploiement de mesures anticorruption.

  • Gilles Halais

    Oui, quand vous leur conseillez de faire une sorte de diagnostic à partir de critères bien précis.

  • Paul Krembel

    Exactement, un recensement point par point. D'abord, des structures et des personnes avec lesquelles elles sont en relation, les clients, les fournisseurs, les intermédiaires. Puis, un recensement des situations à risque qui pourraient se produire avec ces structures ou ces personnes. Afin d'imaginer le plus de situations possibles, on peut se poser différentes questions. Par exemple, est-ce que l'entreprise a des interactions avec des agents publics ? Est-ce qu'elle travaille dans certains pays à risque ? Est-ce qu'elle a recours à des intermédiaires pour entrer sur de nouveaux marchés ou distribuer des produits ou des services ? Et enfin, un recensement des mesures de prévention déjà en place, telles que l'existence d'une procédure achat formalisée, une politique cadeau et invitation définissant des plafonds de montant, des actions de formation des salariés, des mécanismes de revue de la bonne application de ces politiques et procédures, etc. Cet exercice conduit rapidement l'entreprise à identifier les risques de corruption auxquels elle est exposée et à déterminer les scénarios associés les plus probables. Sur la base de ce constat, elle peut donc proposer la mise en place de mesures complémentaires pour maîtriser les risques qui ne le sont pas suffisamment.

  • Gilles Halais

    Vous parlez de mesures complémentaires, Paul, est-ce qu'on peut prendre quelques exemples concrets ?

  • Paul Krembel

    Oui, l'AFA recommande la mise en place de 8 mesures, parmi lesquelles 3 mesures de prévention des risques. Premièrement, l'entreprise peut rédiger un code de conduite ou une charte éthique pour les personnels. Dans ce document, elle va rappeler qu'elle ne tolère pas la corruption. Elle va expliquer très concrètement et de façon illustrée les situations dangereuses auxquelles les salariés pourraient être confrontés et les comportements interdits. Par exemple, pour les cas d'invitation ou les situations de conflit d'intérêt.

  • Gilles Halais

    Deuxième mesure recommandée par la FA.

  • Paul Krembel

    L'entreprise peut prévoir de sensibiliser l'ensemble de ses salariés et de former ceux qu'elle estime être le plus exposés au risque. Par exemple, les dirigeants, les commerciaux, les acheteurs, etc. Le but, c'est de leur permettre d'identifier les situations à risque d'en mesurer les dangers pour eux-mêmes et pour l'entreprise, et de comprendre comment s'en prémunir. Par exemple, la formation peut indiquer comment un salarié devrait réagir s'il reçoit une demande inappropriée d'un client à l'étranger.

  • Gilles Halais

    Et enfin, troisième mesure,

  • Paul Krembel

    l'entreprise peut évaluer simplement l'exposition au risque de corruption de ses partenaires, c'est-à-dire vérifier qu'elle travaille avec des partenaires dont la mission, la situation ou la réputation ne présentent pas un risque anormal. En pratique, un fournisseur de mobilier implanté en Russie ne présentera pas le même risque qu'un prestataire de services logistiques allemand. L'entreprise rassemble alors les informations pertinentes afin de se faire une opinion sur ce niveau de risque et de décider d'entrer ou non en relation avec un partenaire, de poursuivre cette relation ou d'y mettre un terme.

  • Gilles Halais

    À travers ces mesures, l'entreprise peut donc prévenir les éventuels risques de corruption, mais existent-ils des mesures pour détecter ces risques ?

  • Paul Krembel

    Oui, il en existe et la fin en recommande trois.

  • Gilles Halais

    Alors voyons-les dans le détail.

  • Paul Krembel

    L'entreprise peut mettre en place un dispositif d'alerte qui permettra à tout salarié de faire remonter en toute confidentialité une situation ou un comportement pouvant présenter un risque pour l'entreprise. Si l'entreprise compte plus de 50 salariés, elle en a d'ailleurs l'obligation légale.

  • Gilles Halais

    Deuxième mesure...

  • Paul Krembel

    Une comptabilité rigoureusement tenue est un élément indispensable à la prévention de la corruption. En complément, il est utile que l'entreprise s'assure du renforcement des contrôles comptables sur les situations à risque identifiées précédemment. Il s'agira par exemple de contrôle comptable sur des opérations exceptionnelles ou à enjeu, des opérations réalisées dans des pays sensibles, des comptes sensibles, comme les comptes de caisse, de banque, ce concernant les cadeaux à la clientèle, les dépenses courantes relatives aux notes de frais, etc.

  • Gilles Halais

    Enfin, et peut-être surtout,

  • Paul Krembel

    elle peut mettre sous contrôle les processus essentiels de son activité, par exemple les ventes, les achats, le recrutement, la paie ou la trésorerie, en s'assurant d'avoir d'une part des procédures formalisées et connues de ceux qui doivent les appliquer, et d'autre part une organisation respectant le principe de séparation des tâches. A titre d'exemple, la sélection d'un fournisseur, la validation d'une commande, la réception de celle-ci, puis son règlement ne doivent pas être effectués par une seule et même personne. Si la taille de l'entreprise ne permet pas de confier ses tâches à des salariés différents, il convient qu'elle fasse l'objet d'une validation et d'un contrôle par un salarié différent ou par un supérieur hiérarchique qui peut être l'un des dirigeants.

  • Gilles Halais

    Très bien, mais dans les plus petites structures, avec des moyens limités, la mise en place de l'ensemble de ces mesures me semble assez difficile. Est-ce qu'il y a certaines mesures ou certaines actions qui sont véritablement prioritaires.

  • Paul Krembel

    J'en vois trois. D'abord, identifier les activités de l'entreprise qui pourraient présenter des risques. Par exemple, l'export, la soumission au marché public ou l'obtention d'autorisations administratives. Ensuite, mettre en place des consignes pour encadrer ces activités à risque et les relations avec ses partenaires, notamment en matière de cadeaux et invitations ou de conflits d'intérêts. Et enfin, se renseigner sur les principaux partenaires afin de vérifier qu'ils ne présentent pas un risque anormal, particulièrement si l'entreprise fait appel à des agents commerciaux. Pour finir, il s'agit de contrôler effectivement la bonne application des consignes et des procédures mises en œuvre dans l'entreprise.

  • Gilles Halais

    Est-ce que l'agent est seul dans la mise en œuvre et le suivi de ses mesures ?

  • Paul Krembel

    Il peut tout à fait choisir de piloter lui-même la mise en œuvre opérationnelle en s'appuyant sur ses proches collaborateurs, tels que le responsable administratif et financier, le responsable juridique, le responsable des ressources humaines, etc. Un travail d'équipe permettra de mettre en place des mesures adaptées aux spécificités de l'entreprise, mais le dirigeant peut également choisir de déléguer le pilotage de ce projet à une autre personne ou à un service dédié, notamment si la taille, les ressources et le profil de risque de corruption de l'entreprise le justifient. Cette mission pourra lui être affectée en temps plein ou en complément de ses fonctions actuelles.

  • Gilles Halais

    Merci Paul Krembel pour ces explications très claires. Vous dirigez une PME ou une ETI, vous voulez en savoir plus ? Rendez-vous sur le site de l'AFA : agence-francaise-anticorruption.gouv.fr. Vous allez pouvoir télécharger gratuitement le guide pratique anticorruption à destination des PME et petites ETI. Il a été rédigé avec la CPME et le METI pour vous accompagner de façon très pédagogique et illustrée. On y trouve des fiches pratiques avec des exemples, les bonnes pratiques à mettre en œuvre et même un flyer qui résume les points essentiels. Si vous avez une question concrète concernant votre entreprise, vous pouvez la poser directement par mail à l'adresse suivante afa@afa.gouv.fr. Et comme toujours, n'hésitez pas à partager, à commenter ce podcast et puis à écouter l'intégralité de la collection désormais en ligne. Merci de votre concours précieux à la lutte anticorruption et à très bientôt.

  • Paul Krembel

    Cap Intégrité. Le podcast de l'Agence Française Anticorruption.

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82% des PME et petites ETI ayant répondu au diagnostic national 2022 de l’AFA  ont déclaré avoir mis en œuvre des mesures anticorruption, bien qu’elles n’aient pas l’obligation de le faire.

Alors, quelles mesures ? Dans quel but ? Et avec quels bénéfices pour l’entreprise ? Paul Krembel, chargé d'appui aux acteurs économique à l'Agence française anticorruption (AFA) va répondre à nos questions.


Pour en savoir plus sur ce sujet, consultez nos guides associés : https://www.agence-francaise-anticorruption.gouv.fr/fr/guides-et-fiches-pratiques


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Florent

    La corruption, on est une PME qui ne brasse pas des milliards. Je n'ai vraiment pas le sentiment que ce soit un sujet pour ma petite entreprise.

  • Gilles Halais

    Bonjour, c'est Gilles Halais. Des mesures de prévention contre la corruption, pas un sujet pour les PME, et bien détrompez-vous, car 82% des PME et petites ETI qui ont répondu au Diagnostic National 2022 de l'AFA ont déclaré avoir mis en œuvre des mesures anti-corruption, bien qu'elles n'aient pas l'obligation de le faire. Alors, quel type de mesures, dans quel but, et avec quels bénéfices pour l'entreprise, c'est ce que l'on va voir directement au siège de l'AFA, où j'arrive à l'instant. Bonjour Paul Krembel.

  • Paul Krembel

    Bonjour Gilles.

  • Gilles Halais

    Vous êtes chargé d'appui aux acteurs économiques à l'AFA. Rien n'oblige en effet une petite entreprise à mettre en place des mesures anticorruption.

  • Paul Krembel

    Non en effet, une PME ou une petite ETI n'a pas l'obligation légale de le faire. Cette obligation ne concerne que les entreprises employant au moins 500 salariés qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 100 millions d'euros et dont la société mère a son siège en France. Elles doivent mettre en place 8 mesures destinées à prévenir et à détecter les faits de corruption ou de trafic d'influence visés à l'Article 17 de la Loi Sapin II. Mais comme vous venez de le souligner, rien n'empêche les autres entreprises, même les PME et les petites ETI, de le faire également.

  • Gilles Halais

    Alors quel est leur intérêt si ce n'est pas obligatoire ?

  • Paul Krembel

    Il y en a plusieurs en réalité. D'abord, cela permet à l'entreprise de se positionner de façon plus favorable auprès de ses clients. Au titre de l'Article 17, les grandes entreprises ont l'obligation d'évaluer l'intégrité de leurs partenaires, de toute taille, et peuvent demander à cette occasion s'ils ont mis en place des mesures anticorruption. Parfois, ces grandes entreprises exigent même l'insertion d'une clause anticorruption dans le contrat qui les lie avec une PME. Ensuite, les banques et les assureurs évaluent aussi l'intégrité de leurs clients, de même que les investisseurs évaluent les entreprises dans lesquelles ils prennent des participations. Une entreprise a donc plus de chances d'obtenir un financement ou une assurance à l'export si elle a mis en place des mesures anticorruption. De telles mesures participent également à la prévention d'autres infractions, relevant davantage de la fraude, permettant ainsi à l'entreprise de protéger ses actifs et sa réputation. Enfin, et surtout, mettre en place un dispositif anticorruption leur permet de se protéger des conséquences négatives d'un acte de corruption qui viendrait de l'un de leurs collaborateurs ou d'un partenaire commercial et qui les concernerait au premier chef.

  • Gilles Halais

    J'ai pourtant l'impression que les affaires de corruption qui font la une des médias concernent surtout les grands groupes qui opèrent, on va dire, sous d'autres latitudes. Mais la corruption pourrait donc aussi frapper les petites entreprises.

  • Paul Krembel

    Absolument. Dans le Diagnostic National 2022 de l'AFA, sur les dispositifs anticorruption dans les entreprises, 24% des entreprises interrogées ont déclaré avoir été confrontées à un cas de corruption. Un tiers de ces entreprises étaient des PME ou des petits ETI. Les conséquences sont nombreuses pour une entreprise poursuivie ou condamnée pour corruption. Il faut savoir que le Code pénal ne fait pas de distinction de taille. En cas de corruption ou de trafic d'influence, l'entreprise encourt jusqu'à 5 millions d'euros d'amende ou le double du produit qu'elle a retiré de l'infraction. Elle encourt aussi des peines complémentaires. telles que la fermeture, la dissolution ou encore l'exclusion des marchés publics. Et comme en droit français, l'engagement de la responsabilité pénale de la personne morale s'accompagne nécessairement de celle de ses dirigeants, ils risquent eux jusqu'à 10 ans de prison, 1 million d'euros d'amende, voire l'interdiction d'exercer.

  • Gilles Halais

    Et déjà des conséquences pour l'entreprise dès le stade du soupçon de corruption.

  • Paul Krembel

    Elle peut déjà faire face à des conséquences réputationnelles, une dégradation de son image auprès de ses clients, de ses partenaires, de ses investisseurs ou même de son personnel. Et par voie de conséquence, une perte de confiance. envers l'entreprise et une baisse de son carnet de commandes.

  • Gilles Halais

    Je comprends mieux pourquoi certaines PME ou ETI ont donc mis en place des mesures anticorruption, et pour les autres, par où commencer ?

  • Paul Krembel

    Alors plusieurs étapes. Première étape et préalable essentielle, l'engagement du dirigeant. Par engagement, on entend une attitude exemplaire : porter la démarche, s'impliquer personnellement dans le suivi de sa mise en œuvre. Et puis, il faut qu'il mette dans la mesure du possible des moyens financiers et humains suffisants pour le déploiement des mesures anticorruption. Sans un dirigeant qui affirme et qui applique au quotidien une démarche de tolérance zéro, il est peu probable d'avoir des mesures efficaces de prévention de la corruption.

  • Gilles Halais

    Je voudrais justement vous faire écouter un témoignage, Paul. C'est celui de Florent. Il a 52 ans. Il dirige une PME de 92 salariés dans le secteur des travaux publics. Il intervient principalement dans la construction de réseaux ferrés pour des lignes de métro ou de tram.

  • Florent

    Franchement, on est une PME qui ne brasse pas des milliards. Je fais surtout de la sous-traitance pour des mastodontes du BTP. Donc ce n'est pas moi qui est le client final en relation directe. Et puis en plus, je fais totalement confiance à mon équipe commerciale qui élabore les réponses aux appels d'offres. Je fais confiance totale à mes acheteurs et bien sûr à mes conducteurs de travaux. Franchement, pour moi, c'est risque zéro. La corruption, je n'ai vraiment pas le sentiment que ce soit un sujet pour ma petite entreprise.

  • Gilles Halais

    Réaction à ce témoignage, Paul, est-ce que Florent est dans le vrai ou bien il se trompe ?

  • Paul Krembel

    Alors il est vrai que quand l'AFA mène des actions de sensibilisation auprès des PME, c'est souvent ce type de réaction qu'on entend. Pour autant, dès lors qu'on les interroge sur leurs activités, les partenaires avec qui elles travaillent ou les pays dans lesquels elles exportent, on arrive assez vite à dessiner des risques de corruption auxquels elle pourrait être confrontée dans l'absolu. Cette réflexion, c'est justement la deuxième étape du déploiement de mesures anticorruption.

  • Gilles Halais

    Oui, quand vous leur conseillez de faire une sorte de diagnostic à partir de critères bien précis.

  • Paul Krembel

    Exactement, un recensement point par point. D'abord, des structures et des personnes avec lesquelles elles sont en relation, les clients, les fournisseurs, les intermédiaires. Puis, un recensement des situations à risque qui pourraient se produire avec ces structures ou ces personnes. Afin d'imaginer le plus de situations possibles, on peut se poser différentes questions. Par exemple, est-ce que l'entreprise a des interactions avec des agents publics ? Est-ce qu'elle travaille dans certains pays à risque ? Est-ce qu'elle a recours à des intermédiaires pour entrer sur de nouveaux marchés ou distribuer des produits ou des services ? Et enfin, un recensement des mesures de prévention déjà en place, telles que l'existence d'une procédure achat formalisée, une politique cadeau et invitation définissant des plafonds de montant, des actions de formation des salariés, des mécanismes de revue de la bonne application de ces politiques et procédures, etc. Cet exercice conduit rapidement l'entreprise à identifier les risques de corruption auxquels elle est exposée et à déterminer les scénarios associés les plus probables. Sur la base de ce constat, elle peut donc proposer la mise en place de mesures complémentaires pour maîtriser les risques qui ne le sont pas suffisamment.

  • Gilles Halais

    Vous parlez de mesures complémentaires, Paul, est-ce qu'on peut prendre quelques exemples concrets ?

  • Paul Krembel

    Oui, l'AFA recommande la mise en place de 8 mesures, parmi lesquelles 3 mesures de prévention des risques. Premièrement, l'entreprise peut rédiger un code de conduite ou une charte éthique pour les personnels. Dans ce document, elle va rappeler qu'elle ne tolère pas la corruption. Elle va expliquer très concrètement et de façon illustrée les situations dangereuses auxquelles les salariés pourraient être confrontés et les comportements interdits. Par exemple, pour les cas d'invitation ou les situations de conflit d'intérêt.

  • Gilles Halais

    Deuxième mesure recommandée par la FA.

  • Paul Krembel

    L'entreprise peut prévoir de sensibiliser l'ensemble de ses salariés et de former ceux qu'elle estime être le plus exposés au risque. Par exemple, les dirigeants, les commerciaux, les acheteurs, etc. Le but, c'est de leur permettre d'identifier les situations à risque d'en mesurer les dangers pour eux-mêmes et pour l'entreprise, et de comprendre comment s'en prémunir. Par exemple, la formation peut indiquer comment un salarié devrait réagir s'il reçoit une demande inappropriée d'un client à l'étranger.

  • Gilles Halais

    Et enfin, troisième mesure,

  • Paul Krembel

    l'entreprise peut évaluer simplement l'exposition au risque de corruption de ses partenaires, c'est-à-dire vérifier qu'elle travaille avec des partenaires dont la mission, la situation ou la réputation ne présentent pas un risque anormal. En pratique, un fournisseur de mobilier implanté en Russie ne présentera pas le même risque qu'un prestataire de services logistiques allemand. L'entreprise rassemble alors les informations pertinentes afin de se faire une opinion sur ce niveau de risque et de décider d'entrer ou non en relation avec un partenaire, de poursuivre cette relation ou d'y mettre un terme.

  • Gilles Halais

    À travers ces mesures, l'entreprise peut donc prévenir les éventuels risques de corruption, mais existent-ils des mesures pour détecter ces risques ?

  • Paul Krembel

    Oui, il en existe et la fin en recommande trois.

  • Gilles Halais

    Alors voyons-les dans le détail.

  • Paul Krembel

    L'entreprise peut mettre en place un dispositif d'alerte qui permettra à tout salarié de faire remonter en toute confidentialité une situation ou un comportement pouvant présenter un risque pour l'entreprise. Si l'entreprise compte plus de 50 salariés, elle en a d'ailleurs l'obligation légale.

  • Gilles Halais

    Deuxième mesure...

  • Paul Krembel

    Une comptabilité rigoureusement tenue est un élément indispensable à la prévention de la corruption. En complément, il est utile que l'entreprise s'assure du renforcement des contrôles comptables sur les situations à risque identifiées précédemment. Il s'agira par exemple de contrôle comptable sur des opérations exceptionnelles ou à enjeu, des opérations réalisées dans des pays sensibles, des comptes sensibles, comme les comptes de caisse, de banque, ce concernant les cadeaux à la clientèle, les dépenses courantes relatives aux notes de frais, etc.

  • Gilles Halais

    Enfin, et peut-être surtout,

  • Paul Krembel

    elle peut mettre sous contrôle les processus essentiels de son activité, par exemple les ventes, les achats, le recrutement, la paie ou la trésorerie, en s'assurant d'avoir d'une part des procédures formalisées et connues de ceux qui doivent les appliquer, et d'autre part une organisation respectant le principe de séparation des tâches. A titre d'exemple, la sélection d'un fournisseur, la validation d'une commande, la réception de celle-ci, puis son règlement ne doivent pas être effectués par une seule et même personne. Si la taille de l'entreprise ne permet pas de confier ses tâches à des salariés différents, il convient qu'elle fasse l'objet d'une validation et d'un contrôle par un salarié différent ou par un supérieur hiérarchique qui peut être l'un des dirigeants.

  • Gilles Halais

    Très bien, mais dans les plus petites structures, avec des moyens limités, la mise en place de l'ensemble de ces mesures me semble assez difficile. Est-ce qu'il y a certaines mesures ou certaines actions qui sont véritablement prioritaires.

  • Paul Krembel

    J'en vois trois. D'abord, identifier les activités de l'entreprise qui pourraient présenter des risques. Par exemple, l'export, la soumission au marché public ou l'obtention d'autorisations administratives. Ensuite, mettre en place des consignes pour encadrer ces activités à risque et les relations avec ses partenaires, notamment en matière de cadeaux et invitations ou de conflits d'intérêts. Et enfin, se renseigner sur les principaux partenaires afin de vérifier qu'ils ne présentent pas un risque anormal, particulièrement si l'entreprise fait appel à des agents commerciaux. Pour finir, il s'agit de contrôler effectivement la bonne application des consignes et des procédures mises en œuvre dans l'entreprise.

  • Gilles Halais

    Est-ce que l'agent est seul dans la mise en œuvre et le suivi de ses mesures ?

  • Paul Krembel

    Il peut tout à fait choisir de piloter lui-même la mise en œuvre opérationnelle en s'appuyant sur ses proches collaborateurs, tels que le responsable administratif et financier, le responsable juridique, le responsable des ressources humaines, etc. Un travail d'équipe permettra de mettre en place des mesures adaptées aux spécificités de l'entreprise, mais le dirigeant peut également choisir de déléguer le pilotage de ce projet à une autre personne ou à un service dédié, notamment si la taille, les ressources et le profil de risque de corruption de l'entreprise le justifient. Cette mission pourra lui être affectée en temps plein ou en complément de ses fonctions actuelles.

  • Gilles Halais

    Merci Paul Krembel pour ces explications très claires. Vous dirigez une PME ou une ETI, vous voulez en savoir plus ? Rendez-vous sur le site de l'AFA : agence-francaise-anticorruption.gouv.fr. Vous allez pouvoir télécharger gratuitement le guide pratique anticorruption à destination des PME et petites ETI. Il a été rédigé avec la CPME et le METI pour vous accompagner de façon très pédagogique et illustrée. On y trouve des fiches pratiques avec des exemples, les bonnes pratiques à mettre en œuvre et même un flyer qui résume les points essentiels. Si vous avez une question concrète concernant votre entreprise, vous pouvez la poser directement par mail à l'adresse suivante afa@afa.gouv.fr. Et comme toujours, n'hésitez pas à partager, à commenter ce podcast et puis à écouter l'intégralité de la collection désormais en ligne. Merci de votre concours précieux à la lutte anticorruption et à très bientôt.

  • Paul Krembel

    Cap Intégrité. Le podcast de l'Agence Française Anticorruption.

Description

82% des PME et petites ETI ayant répondu au diagnostic national 2022 de l’AFA  ont déclaré avoir mis en œuvre des mesures anticorruption, bien qu’elles n’aient pas l’obligation de le faire.

Alors, quelles mesures ? Dans quel but ? Et avec quels bénéfices pour l’entreprise ? Paul Krembel, chargé d'appui aux acteurs économique à l'Agence française anticorruption (AFA) va répondre à nos questions.


Pour en savoir plus sur ce sujet, consultez nos guides associés : https://www.agence-francaise-anticorruption.gouv.fr/fr/guides-et-fiches-pratiques


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Florent

    La corruption, on est une PME qui ne brasse pas des milliards. Je n'ai vraiment pas le sentiment que ce soit un sujet pour ma petite entreprise.

  • Gilles Halais

    Bonjour, c'est Gilles Halais. Des mesures de prévention contre la corruption, pas un sujet pour les PME, et bien détrompez-vous, car 82% des PME et petites ETI qui ont répondu au Diagnostic National 2022 de l'AFA ont déclaré avoir mis en œuvre des mesures anti-corruption, bien qu'elles n'aient pas l'obligation de le faire. Alors, quel type de mesures, dans quel but, et avec quels bénéfices pour l'entreprise, c'est ce que l'on va voir directement au siège de l'AFA, où j'arrive à l'instant. Bonjour Paul Krembel.

  • Paul Krembel

    Bonjour Gilles.

  • Gilles Halais

    Vous êtes chargé d'appui aux acteurs économiques à l'AFA. Rien n'oblige en effet une petite entreprise à mettre en place des mesures anticorruption.

  • Paul Krembel

    Non en effet, une PME ou une petite ETI n'a pas l'obligation légale de le faire. Cette obligation ne concerne que les entreprises employant au moins 500 salariés qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 100 millions d'euros et dont la société mère a son siège en France. Elles doivent mettre en place 8 mesures destinées à prévenir et à détecter les faits de corruption ou de trafic d'influence visés à l'Article 17 de la Loi Sapin II. Mais comme vous venez de le souligner, rien n'empêche les autres entreprises, même les PME et les petites ETI, de le faire également.

  • Gilles Halais

    Alors quel est leur intérêt si ce n'est pas obligatoire ?

  • Paul Krembel

    Il y en a plusieurs en réalité. D'abord, cela permet à l'entreprise de se positionner de façon plus favorable auprès de ses clients. Au titre de l'Article 17, les grandes entreprises ont l'obligation d'évaluer l'intégrité de leurs partenaires, de toute taille, et peuvent demander à cette occasion s'ils ont mis en place des mesures anticorruption. Parfois, ces grandes entreprises exigent même l'insertion d'une clause anticorruption dans le contrat qui les lie avec une PME. Ensuite, les banques et les assureurs évaluent aussi l'intégrité de leurs clients, de même que les investisseurs évaluent les entreprises dans lesquelles ils prennent des participations. Une entreprise a donc plus de chances d'obtenir un financement ou une assurance à l'export si elle a mis en place des mesures anticorruption. De telles mesures participent également à la prévention d'autres infractions, relevant davantage de la fraude, permettant ainsi à l'entreprise de protéger ses actifs et sa réputation. Enfin, et surtout, mettre en place un dispositif anticorruption leur permet de se protéger des conséquences négatives d'un acte de corruption qui viendrait de l'un de leurs collaborateurs ou d'un partenaire commercial et qui les concernerait au premier chef.

  • Gilles Halais

    J'ai pourtant l'impression que les affaires de corruption qui font la une des médias concernent surtout les grands groupes qui opèrent, on va dire, sous d'autres latitudes. Mais la corruption pourrait donc aussi frapper les petites entreprises.

  • Paul Krembel

    Absolument. Dans le Diagnostic National 2022 de l'AFA, sur les dispositifs anticorruption dans les entreprises, 24% des entreprises interrogées ont déclaré avoir été confrontées à un cas de corruption. Un tiers de ces entreprises étaient des PME ou des petits ETI. Les conséquences sont nombreuses pour une entreprise poursuivie ou condamnée pour corruption. Il faut savoir que le Code pénal ne fait pas de distinction de taille. En cas de corruption ou de trafic d'influence, l'entreprise encourt jusqu'à 5 millions d'euros d'amende ou le double du produit qu'elle a retiré de l'infraction. Elle encourt aussi des peines complémentaires. telles que la fermeture, la dissolution ou encore l'exclusion des marchés publics. Et comme en droit français, l'engagement de la responsabilité pénale de la personne morale s'accompagne nécessairement de celle de ses dirigeants, ils risquent eux jusqu'à 10 ans de prison, 1 million d'euros d'amende, voire l'interdiction d'exercer.

  • Gilles Halais

    Et déjà des conséquences pour l'entreprise dès le stade du soupçon de corruption.

  • Paul Krembel

    Elle peut déjà faire face à des conséquences réputationnelles, une dégradation de son image auprès de ses clients, de ses partenaires, de ses investisseurs ou même de son personnel. Et par voie de conséquence, une perte de confiance. envers l'entreprise et une baisse de son carnet de commandes.

  • Gilles Halais

    Je comprends mieux pourquoi certaines PME ou ETI ont donc mis en place des mesures anticorruption, et pour les autres, par où commencer ?

  • Paul Krembel

    Alors plusieurs étapes. Première étape et préalable essentielle, l'engagement du dirigeant. Par engagement, on entend une attitude exemplaire : porter la démarche, s'impliquer personnellement dans le suivi de sa mise en œuvre. Et puis, il faut qu'il mette dans la mesure du possible des moyens financiers et humains suffisants pour le déploiement des mesures anticorruption. Sans un dirigeant qui affirme et qui applique au quotidien une démarche de tolérance zéro, il est peu probable d'avoir des mesures efficaces de prévention de la corruption.

  • Gilles Halais

    Je voudrais justement vous faire écouter un témoignage, Paul. C'est celui de Florent. Il a 52 ans. Il dirige une PME de 92 salariés dans le secteur des travaux publics. Il intervient principalement dans la construction de réseaux ferrés pour des lignes de métro ou de tram.

  • Florent

    Franchement, on est une PME qui ne brasse pas des milliards. Je fais surtout de la sous-traitance pour des mastodontes du BTP. Donc ce n'est pas moi qui est le client final en relation directe. Et puis en plus, je fais totalement confiance à mon équipe commerciale qui élabore les réponses aux appels d'offres. Je fais confiance totale à mes acheteurs et bien sûr à mes conducteurs de travaux. Franchement, pour moi, c'est risque zéro. La corruption, je n'ai vraiment pas le sentiment que ce soit un sujet pour ma petite entreprise.

  • Gilles Halais

    Réaction à ce témoignage, Paul, est-ce que Florent est dans le vrai ou bien il se trompe ?

  • Paul Krembel

    Alors il est vrai que quand l'AFA mène des actions de sensibilisation auprès des PME, c'est souvent ce type de réaction qu'on entend. Pour autant, dès lors qu'on les interroge sur leurs activités, les partenaires avec qui elles travaillent ou les pays dans lesquels elles exportent, on arrive assez vite à dessiner des risques de corruption auxquels elle pourrait être confrontée dans l'absolu. Cette réflexion, c'est justement la deuxième étape du déploiement de mesures anticorruption.

  • Gilles Halais

    Oui, quand vous leur conseillez de faire une sorte de diagnostic à partir de critères bien précis.

  • Paul Krembel

    Exactement, un recensement point par point. D'abord, des structures et des personnes avec lesquelles elles sont en relation, les clients, les fournisseurs, les intermédiaires. Puis, un recensement des situations à risque qui pourraient se produire avec ces structures ou ces personnes. Afin d'imaginer le plus de situations possibles, on peut se poser différentes questions. Par exemple, est-ce que l'entreprise a des interactions avec des agents publics ? Est-ce qu'elle travaille dans certains pays à risque ? Est-ce qu'elle a recours à des intermédiaires pour entrer sur de nouveaux marchés ou distribuer des produits ou des services ? Et enfin, un recensement des mesures de prévention déjà en place, telles que l'existence d'une procédure achat formalisée, une politique cadeau et invitation définissant des plafonds de montant, des actions de formation des salariés, des mécanismes de revue de la bonne application de ces politiques et procédures, etc. Cet exercice conduit rapidement l'entreprise à identifier les risques de corruption auxquels elle est exposée et à déterminer les scénarios associés les plus probables. Sur la base de ce constat, elle peut donc proposer la mise en place de mesures complémentaires pour maîtriser les risques qui ne le sont pas suffisamment.

  • Gilles Halais

    Vous parlez de mesures complémentaires, Paul, est-ce qu'on peut prendre quelques exemples concrets ?

  • Paul Krembel

    Oui, l'AFA recommande la mise en place de 8 mesures, parmi lesquelles 3 mesures de prévention des risques. Premièrement, l'entreprise peut rédiger un code de conduite ou une charte éthique pour les personnels. Dans ce document, elle va rappeler qu'elle ne tolère pas la corruption. Elle va expliquer très concrètement et de façon illustrée les situations dangereuses auxquelles les salariés pourraient être confrontés et les comportements interdits. Par exemple, pour les cas d'invitation ou les situations de conflit d'intérêt.

  • Gilles Halais

    Deuxième mesure recommandée par la FA.

  • Paul Krembel

    L'entreprise peut prévoir de sensibiliser l'ensemble de ses salariés et de former ceux qu'elle estime être le plus exposés au risque. Par exemple, les dirigeants, les commerciaux, les acheteurs, etc. Le but, c'est de leur permettre d'identifier les situations à risque d'en mesurer les dangers pour eux-mêmes et pour l'entreprise, et de comprendre comment s'en prémunir. Par exemple, la formation peut indiquer comment un salarié devrait réagir s'il reçoit une demande inappropriée d'un client à l'étranger.

  • Gilles Halais

    Et enfin, troisième mesure,

  • Paul Krembel

    l'entreprise peut évaluer simplement l'exposition au risque de corruption de ses partenaires, c'est-à-dire vérifier qu'elle travaille avec des partenaires dont la mission, la situation ou la réputation ne présentent pas un risque anormal. En pratique, un fournisseur de mobilier implanté en Russie ne présentera pas le même risque qu'un prestataire de services logistiques allemand. L'entreprise rassemble alors les informations pertinentes afin de se faire une opinion sur ce niveau de risque et de décider d'entrer ou non en relation avec un partenaire, de poursuivre cette relation ou d'y mettre un terme.

  • Gilles Halais

    À travers ces mesures, l'entreprise peut donc prévenir les éventuels risques de corruption, mais existent-ils des mesures pour détecter ces risques ?

  • Paul Krembel

    Oui, il en existe et la fin en recommande trois.

  • Gilles Halais

    Alors voyons-les dans le détail.

  • Paul Krembel

    L'entreprise peut mettre en place un dispositif d'alerte qui permettra à tout salarié de faire remonter en toute confidentialité une situation ou un comportement pouvant présenter un risque pour l'entreprise. Si l'entreprise compte plus de 50 salariés, elle en a d'ailleurs l'obligation légale.

  • Gilles Halais

    Deuxième mesure...

  • Paul Krembel

    Une comptabilité rigoureusement tenue est un élément indispensable à la prévention de la corruption. En complément, il est utile que l'entreprise s'assure du renforcement des contrôles comptables sur les situations à risque identifiées précédemment. Il s'agira par exemple de contrôle comptable sur des opérations exceptionnelles ou à enjeu, des opérations réalisées dans des pays sensibles, des comptes sensibles, comme les comptes de caisse, de banque, ce concernant les cadeaux à la clientèle, les dépenses courantes relatives aux notes de frais, etc.

  • Gilles Halais

    Enfin, et peut-être surtout,

  • Paul Krembel

    elle peut mettre sous contrôle les processus essentiels de son activité, par exemple les ventes, les achats, le recrutement, la paie ou la trésorerie, en s'assurant d'avoir d'une part des procédures formalisées et connues de ceux qui doivent les appliquer, et d'autre part une organisation respectant le principe de séparation des tâches. A titre d'exemple, la sélection d'un fournisseur, la validation d'une commande, la réception de celle-ci, puis son règlement ne doivent pas être effectués par une seule et même personne. Si la taille de l'entreprise ne permet pas de confier ses tâches à des salariés différents, il convient qu'elle fasse l'objet d'une validation et d'un contrôle par un salarié différent ou par un supérieur hiérarchique qui peut être l'un des dirigeants.

  • Gilles Halais

    Très bien, mais dans les plus petites structures, avec des moyens limités, la mise en place de l'ensemble de ces mesures me semble assez difficile. Est-ce qu'il y a certaines mesures ou certaines actions qui sont véritablement prioritaires.

  • Paul Krembel

    J'en vois trois. D'abord, identifier les activités de l'entreprise qui pourraient présenter des risques. Par exemple, l'export, la soumission au marché public ou l'obtention d'autorisations administratives. Ensuite, mettre en place des consignes pour encadrer ces activités à risque et les relations avec ses partenaires, notamment en matière de cadeaux et invitations ou de conflits d'intérêts. Et enfin, se renseigner sur les principaux partenaires afin de vérifier qu'ils ne présentent pas un risque anormal, particulièrement si l'entreprise fait appel à des agents commerciaux. Pour finir, il s'agit de contrôler effectivement la bonne application des consignes et des procédures mises en œuvre dans l'entreprise.

  • Gilles Halais

    Est-ce que l'agent est seul dans la mise en œuvre et le suivi de ses mesures ?

  • Paul Krembel

    Il peut tout à fait choisir de piloter lui-même la mise en œuvre opérationnelle en s'appuyant sur ses proches collaborateurs, tels que le responsable administratif et financier, le responsable juridique, le responsable des ressources humaines, etc. Un travail d'équipe permettra de mettre en place des mesures adaptées aux spécificités de l'entreprise, mais le dirigeant peut également choisir de déléguer le pilotage de ce projet à une autre personne ou à un service dédié, notamment si la taille, les ressources et le profil de risque de corruption de l'entreprise le justifient. Cette mission pourra lui être affectée en temps plein ou en complément de ses fonctions actuelles.

  • Gilles Halais

    Merci Paul Krembel pour ces explications très claires. Vous dirigez une PME ou une ETI, vous voulez en savoir plus ? Rendez-vous sur le site de l'AFA : agence-francaise-anticorruption.gouv.fr. Vous allez pouvoir télécharger gratuitement le guide pratique anticorruption à destination des PME et petites ETI. Il a été rédigé avec la CPME et le METI pour vous accompagner de façon très pédagogique et illustrée. On y trouve des fiches pratiques avec des exemples, les bonnes pratiques à mettre en œuvre et même un flyer qui résume les points essentiels. Si vous avez une question concrète concernant votre entreprise, vous pouvez la poser directement par mail à l'adresse suivante afa@afa.gouv.fr. Et comme toujours, n'hésitez pas à partager, à commenter ce podcast et puis à écouter l'intégralité de la collection désormais en ligne. Merci de votre concours précieux à la lutte anticorruption et à très bientôt.

  • Paul Krembel

    Cap Intégrité. Le podcast de l'Agence Française Anticorruption.

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