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Antidot - Le podcast qui interroge notre rapport au conflit

3. La médiation transformative : une approche non directive du conflit avec Olivier Chambert-Loir, Médiateur, accompagnateur et formateur

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1h03 |10/01/2024
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3. La médiation transformative : une approche non directive du conflit avec Olivier Chambert-Loir, Médiateur, accompagnateur et formateur

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Description

Dans ce troisième épisode du podcast, je reçois Olivier Chambert-Loir, médiateur, formateur et animateur du réseau francophone de médiation transformative.


Olivier nous partage :


  • Son parcours professionnel dans lequel il a évolué d’une posture d’expert puis de facilitateur venant accompagner un processus de décision en le structurant, vers une posture non directive, de non-sachant à travers celle de médiateur,


  • La lecture de l’approche transformative du conflit popularisé par Robert A. Baruch BUSH et Joseph P. FOLFER et ses impacts sur les personnes,


  • La proposition d’accompagner un phénomène naturel où le médiateur transformatif vient, en restant dans le sillage immédiat des personnes, leur donner un coup de pouce pour transformer une interaction conflictuelle en un dialogue redevenu constructif,


  • Sa conviction que les êtres humains ont la motivation et la capacité d’inverser la tendance et qu’il s’agit de soutenir des mouvements naturels leur permettant de reconquérir une autonomie personnelle et leurs pleines capacités de décisions,


  • La posture du médiateur transformative, la peur de la violence en médiation et l’engagement du médiateur,


  • La technique du reflet en médiation et son effet régulant sur la conversation.


À tous les professionnels du conflit et notamment les avocats, prenez le temps d’écouter cet échange qui pourra vous faire appréhender différemment les situations conflictuelles qui vous sont présentées !


Bonne écoute,

Émilie


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Retrouvez Olivier Chambert-Loir sur Linkedin

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En attendant de se retrouver le 10 de chaque mois pour un nouvel épisode, je vous invite à vous abonner au podcast et à laisser 5 étoiles sur votre plateforme d’écoute préférée.


Si vous souhaitez continuer la discussion autour de la médiation, retrouvez-moi sur mon compte Linkedin Emilie Thivet-Grivel.


Et si vous souhaitez en savoir plus sur le cabinet ETG Avocats et nos services de médiation, rendez-vous ici.


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Crédits :

Antidot est un podcast d’Emilie Thivet-Grivel.
Stratégie : Mélanie Hong.
Montage et mixage : Morgane Bouchiba.
Designer graphique (vignette) : Emma Wise.
Musique  : Aberdeen, Greg McKay.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, vous écoutez Antidote, le podcast qui nourrit la réflexion des professionnels du conflit. Je m'appelle Émilie Thivet-Grivel, je suis avocate et médiatrice, fondatrice du cabinet ETG Avocats, et chaque mois je vais à la rencontre de professionnels qui apportent un éclairage à nos questions. Comment dépasser ces conflits qui entravent nos vies ? Comment rétablir un dialogue avec cet autre avec lequel on doit faire ? C'est l'objet de ce podcast que de vous partager mes rencontres et outils de réflexion pour changer de regard sur la conflictualité et l'organiser autrement. Aujourd'hui, je reçois Olivier Chamberloir. Médiateur, formateur et superviseur en médiation, Olivier, tu es un des représentants en France du courant de médiation transformative. Tu as d'ailleurs traduit de l'américain au français l'ouvrage de référence de Bush et Folger, alors il s'agit de Robert Barour Bush, pas d'une autre famille, sous le nom La médiation transformative, une approche non directive des conflits aux éditions RS. Tu animes le réseau francophone faisant connaître cette approche. Tu as aussi une casquette de coach puisque tu as fondé il y a quelques années une société de coaching et de formation. Après une formation initiale d'ingénieur, puis un parcours professionnel de consultant au sein d'entreprises de conseil. Comment tu es venu à la médiation et est-ce que tu te souviens plus particulièrement ce qui t'a fait te dire que c'était vraiment dans cette posture de tiers et en particulier de non-sachant que tu te sentais le mieux ?

  • Speaker #1

    Pour répondre à ta question, c'est venu la médiation un petit peu progressivement, parce que comme tu l'as rappelé, j'ai commencé ma carrière comme consultant en organisation et management. Ce qui voulait dire accompagner des entreprises, des dirigeants et leurs équipes sur des projets de réorganisation par exemple. Et donc ça impliquait, c'était un travail de tiers, mais qui impliquait beaucoup de conseils, de suggestions, de travail d'experts, de sachants. Bien sûr de la facilitation du dialogue et de la prise de décision commune. mais avec toujours une idée derrière la tête, des orientations vers lesquelles emmener les gens, etc. Et des convictions à afficher, un avis sur toute chose. Je caricature un peu peut-être, mais c'est ce qui était attendu. C'est pour ça que les clients payaient mon cabinet. Je dois dire que j'étais pas forcément à l'aise avec cette posture, en particulier quand j'étais tout jeune, et face à des dirigeants assez capés qui pouvaient m'impressionner un peu, et d'être propulsé comme ça, y compris d'ailleurs dans des situations parfois à transmettre un savoir que je venais d'acquérir au sein du cabinet, et d'être propulsé comme ça, comme un expert ou comme un sachant sur un certain nombre de choses sur lesquelles j'étais pourtant assez débutant. J'étais pas forcément très à l'aise avec ça. Je m'en suis accommodé. Après, j'ai continué ce métier-là. Au bout de quelques années, je me suis mis en indépendant. Donc, j'ai continué à faire ce métier-là.

  • Speaker #0

    C'était ma question parce que je me souviens plus si tu étais salarié au départ.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai commencé.

  • Speaker #0

    Salarié de boîte qui prestait du conseil, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Exactement, un cabinet de conseil qui était assez connu, qui s'appelait Bossard Consultant, qui a été absorbé depuis par le groupe Capgemini. Voilà, et à un peu moins de 30 ans, je me suis mis à mon compte, et j'ai continué à faire la même chose en tant qu'indépendant. Et du coup, petit à petit, un peu plus à ma manière, je me suis un peu réaligné avec la façon dont j'entendais procéder, pour être plus confortable. Et donc, dans une posture que j'ai cherché à rendre de moins en moins, justement, sachant toute directive, d'être plus à l'écoute, de laisser plus les gens prendre leurs décisions par eux-mêmes. Et donc je suis allé dans cette direction de la facilitation, sachant que dans le mot facilitation, il y a quand même cette idée de structurer un process de discussion ou de décision, de l'outiller avec des méthodes, etc. Et ça aussi, c'est pour ça que je dis que ça a été progressif, j'ai finalement cherché à m'en libérer de plus en plus. Et bref, quand je me suis rendu compte que dans mes interactions avec mes clients, je faisais des choses qui s'apparentaient au coaching, c'est-à-dire accompagner les gens dans leurs réflexions sur la façon dont ils fonctionnent eux-mêmes et en interaction avec leur environnement. Quand je me suis rendu compte que je faisais aussi quelque chose qui pouvait s'approcher de la médiation, c'est-à-dire aider des gens dans leurs efforts pour dialoguer, pour prendre des décisions ensemble, j'ai cherché justement à me raccrocher à des écoles de médiation notamment, à voir quelles formations complémentaires je pouvais suivre, dans quel courant je pouvais m'inscrire, etc. Et j'ai eu un peu de mal parce qu'en fait j'ai trouvé... J'ai trouvé beaucoup de choses qui ressemblaient pas mal à cette facilitation que je pratiquais déjà, c'est-à-dire, encore une fois, l'accompagnement assez structuré dans des processus de dialogue et de décision, avec des méthodes et des outils que pour la plupart j'avais déjà pratiqués, comme le problem solving ou la négociation raisonnée, ou d'autres méthodes de créativité, etc.

  • Speaker #0

    Des approches ou non ? encore très interventionniste en fait. C'est un peu ça ?

  • Speaker #1

    Oui, en tout cas en tant qu'aujourd'hui que médiateur transformatif, je considère comme très interventionniste, assez structurante. Moi,

  • Speaker #0

    c'est ce qui m'a frappé quand j'ai regardé ton parcours dans le détail, c'est qu'on a l'impression que tu es allé vers quelque chose de plus en plus épuré finalement.

  • Speaker #1

    Exactement. Je suis vraiment toujours dans cette quête-là et c'est ça que j'aime dans l'approche transformative, c'est qu'en fait, on est amené à se questionner en permanence dans le travail réflexif qu'on fait comme tout professionnel de l'accompagnement. Quand on s'interroge sur... Sur ce qu'on fait, ce qu'on a fait, pourquoi on l'a fait comme si, comment on aurait pu le faire autrement, c'est qu'on est toujours en train de s'interroger sur où est-ce qu'on a mis le curseur en termes d'interventionnisme et de directivité. Est-ce que c'était pour de bonnes ou de mauvaises raisons ? Est-ce que c'était pour se rassurer soi-même ou pour se montrer utile, pour se convaincre que soi-même on était utile ? Ou bien est-ce que c'est parce qu'il y en avait vraiment besoin ? J'ai cherché et j'ai fini par trouver l'approche transformative qui correspond justement à cette quête du geste épuré de l'accompagnement du dialogue.

  • Speaker #0

    Je voulais que tu puisses un peu nous décrire la particularité de ce process de médiation. et pour ceux qui ne la connaissent pas et peut-être aussi déjà lever un malentendu parce qu'on pourrait se dire que Transformative il s'agit de transformer les gens et non il s'agit de travailler sur le conflit Bonne remarque C'était ton sujet, si tu peux décrire

  • Speaker #1

    Déjà Transformative c'est un peu un anglicisme, c'est la traduction qui nous est parvenue via le Québec du mot en l'état anglais, enfin américain. Donc certains disent transformatrice ou transformante, etc. Mais comme tu l'as suggéré, ce qu'on cherche à transformer ou à aider à transformer, la transformation qu'on cherche à soutenir quand on fait de la médiation transformative, c'est celle de l'interaction conflictuelle, c'est pas celle des gens eux-mêmes. Après, d'aucuns te diront que dès lors que tu participes à un processus comme ça de dialogue, ou que tu es accompagné par quelqu'un dans quelque chose, d'une manière ou d'une autre, ça te fait bouger, ça te transforme, mais c'est pas l'objet. L'idée là, c'est de dire, le conflit, c'est une crise de l'interaction entre des êtres humains, et c'est une crise que la plupart du temps, d'ailleurs, les êtres humains arrivent à transformer eux-mêmes, c'est-à-dire à... à rétablir leur interaction en quelque chose de plus constructif. Mais effectivement, de temps à autre, ils peuvent avoir besoin d'un tiers pour les soutenir dans cet effort. Et donc la transformation dont on parle, c'est la transformation de l'interaction conflictuelle en un dialogue. devenu ou redevenu constructif. Quelque chose que les gens, encore une fois, a priori, savent faire par eux-mêmes, simplement par leur humanité et leur dimension sociale, et qui est un processus naturel dans lequel on leur donne un coup de pouce en tant que médiateur.

  • Speaker #0

    Alors, un coup de pouce pour reconquérir une autonomie personnelle. C'est ce qui m'avait vraiment plu. Je trouvais très responsabilisant, parce que ce que j'ai retenu de ton intervention qui avait marqué les esprits au CNAM, c'est qu'on est vraiment dans une logique où on va essayer de les aider à retrouver en eux des ressources pour retrouver... ce calme qui fait complètement défaut pendant ce moment de grande crise donc c'est quelque chose qui est très exactement c'est vraiment je ne trouve pas les mots mais c'est l'empowerment shift si j'en parle correctement alors l'empowerment shift c'est effectivement les

  • Speaker #1

    mouvements que les gens opèrent pour reprendre le contrôle d'eux-mêmes et c'est ce à quoi on est le plus attentif en médiation transformative et effectivement tu as complètement raison c'est central c'est à dire que Quand on fait de la médiation transformative, on met un petit peu de côté la recherche de solutions, en considérant que les personnes sont, ça c'est assez classique de le dire, les meilleurs experts de leurs solutions et de leurs problèmes, et les plus à même de trouver leurs solutions. Dès lors... qu'elles retrouveront leur capacité à dialoguer de façon constructive. Et donc on considère la solution comme, on va dire, un bénéfice collatéral, ou un bénéfice de second niveau par rapport à une interaction transformée, justement, qui a retrouvé son caractère constructif. De même, on considère que... la fameuse reconnaissance mutuelle qu'on peut attendre des personnes en conflit, est quelque chose qui ne peut pas être forcé.

  • Speaker #0

    qu'elle doit être volontaire et elle doit découler d'une décision des personnes de se réouvrir l'une à l'autre et donc d'une capacité retrouvée de chacune à prendre cette décision. Et donc on en vient à cette histoire d'empowerment, c'est-à-dire de dire ce qui est central dans tout ça, c'est que les personnes retrouvent... leur pleine capacité cognitive, on va dire, et leur pleine capacité à décider ce qu'elles veulent faire et comment elles veulent le faire. notamment de se réouvrir à l'autre. Et donc le mot empowerment, qu'on n'a d'ailleurs pas traduit, on l'a gardé comme ça, on pourrait le traduire comme étant reprise de pouvoir sur soi, ou certains disent regain de pouvoir en soi, mais c'est finalement une reprise de contrôle sur soi-même, c'est-à-dire le fait de, petit à petit, par petits mouvements, justement les fameux empowerment shifts, Euh... retrouver en fait une forme de calme, d'une forme de clarté, de lucidité et une forme de justement capacité à décider ce qu'on veut faire, notamment de l'interaction avec l'autre.

  • Speaker #1

    Moi ce que j'aime bien dans cette approche, et pour l'avoir vécu, à titre perso dans des conflits, c'est que quelque part on prend en compte le conflit comme... Une force en soi, c'est presque le troisième personnage dans la pièce, et que c'est ce conflit qui bouleverse les gens, qui les fait se transformer aussi, mais dans ce qu'ils ne sont pas habituellement, parce qu'on a de la colère, on a de la déception, on est attaqué dans des choses très intimes, et donc il y a cette version un peu démoniaque, là je me souviens de tes petits dessins. Et cette spirale du conflit qui appelle le conflit, etc. Et d'ailleurs qui nous emmène dans le pire qu'on voit actuellement. Et c'est assez... déculpabilisant, dédiabolisant, en même temps très humain, parce que tout le monde peut se retrouver dans ces phases-là. Je trouve qu'on sort en plus, enfin, du schéma binaire. Où on attend que le problème, c'est forcément l'autre, et l'autre est un diabolique. Nous, on n'a rien à se reprocher. Alors qu'en réalité, l'un, l'autre, c'est un truc qui s'auto-alimente. Il s'agit du coup d'inverser, je me rappelle bien de tes mouvements, d'ailleurs j'ai retrouvé dans mes notes, de spirales. Il s'agit de changer la logique de la spirale du conflit qui s'auto-alimente, où on devient de plus en plus... Et ça, dans nos conflits, moi en tant qu'avocate aussi, en matière familiale, je ne vois que ça. C'est-à-dire que le truc s'auto-alimente, la radicalité va s'entretenir, s'auto-alimenter, voilà, c'est exacerbé.

  • Speaker #0

    Et c'est tout à fait ça, c'est-à-dire que tout ce qu'on vient de dire, ou de commencer à dire... sur ce à quoi on s'intéresse en tant que médiateur transformatif et la façon dont on procède, découle de cette approche, ce regard du conflit que tu viens de résumer, c'est-à-dire de regarder le conflit comme cette crise d'interaction humaine qui a des effets sur les personnes qui sont aux prises avec ce conflit et ces effets qu'on résume. de la façon suivante, en disant que finalement le conflit vient déstabiliser la personne dans ce qu'elle est, c'est-à-dire qu'elle devient confuse, elle est submergée par des émotions généralement désagréables, qui viennent, ces émotions incidentes venant, comment dire... réduire ses capacités cognitives, en fait, et sa capacité à regarder les choses d'une façon lucide, mesurée, calmement, et sa capacité également à exprimer clairement ce qui est important pour elle. Et la deuxième chose qui est consécutive à cette déstabilisation, c'est... la perte de sa capacité naturelle d'ouverture à l'autre. Et donc ce qu'on appelle, les américains disent self-absorption, mais nous en français on a résumé ça par fermeture, c'est-à-dire qu'étant déstabilisé, Je me replie petit à petit sur moi-même. J'ai du mal à considérer l'autre simplement dans sa différence, pour ce qu'il est dans sa différence. Et je vais soit l'éviter, soit l'attaquer, le dénigrer, le diaboliser.

  • Speaker #1

    Ça c'est tellement courant.

  • Speaker #0

    Et ces deux choses-là en plus, c'est là que tu l'as évoqué plusieurs fois, ce cercle vicieux ou cette spirale, c'est-à-dire que ces deux choses-là se renforcent l'une l'autre. C'est-à-dire que le plus je suis déstabilisé, le plus je me ferme à toi. et le plus je me ferme à toi, le plus ça te déstabilise à ton tour et renforce aussi ta dynamique de fermeture à mon égard et ça boucle aussi en interne à chacun c'est à dire que le plus je me comporte on va dire, de façon consécutive à ce repli sur moi, c'est-à-dire que je t'évite ou que je t'attaque, le plus ça me déstabilise moi-même, dans le sens où je ne suis pas fier, ça peut même me répugner si je prends trois secondes de recul, la façon dont je suis en train de me comporter vis-à-vis de toi, quand bien même je suis en train de te détester et de te diaboliser.

  • Speaker #1

    C'est peut-être pour ça que je tiens à ce que cette approche, qu'elle soit... elle soit diffusée, connue, parce qu'on a cette tendance, en tout cas, quand on a l'impression qu'on découvre les gens, dans les phrases qu'on entend, on découvre les gens au moment des séparations, typiquement. Oui et non, parce que c'est le moment de la crise, donc la crise révèle une facette de soi, mais qui n'est... Est-ce que c'est vraiment soi ? Tu vois ?

  • Speaker #0

    L'idée c'est que ça ne fait plus tellement soi en fait

  • Speaker #1

    On n'est plus soi-même Et je trouve qu'on gagnerait aussi en pédagogie avec nos clients Si on arrivait à leur expliquer que ça Parce que nous quand on les récupère Ils sont en crise totale Donc voilà Ça participe des ressources que j'essaie d'exploiter, mais pour leur faire faire ce travail sur l'autre qui n'est peut-être pas le diable, il y a tout un travail de remise en confiance, d'apporter un peu de repères dans ce moment de grande perte de repères, qu'il s'agisse d'une crise qui touche la vie professionnelle ou d'une crise familiale.

  • Speaker #0

    Tout à fait. D'ailleurs, on parlait de médiation, mais on fait aussi de l'accompagnement individuel de personnes qui sont en situation de conflit. Ça se rapproche peut-être de ce que pourrait faire un avocat qui est sensibilisé à la médiation, ou qui est même médiateur, qui est plutôt que de prendre en charge, par délégation on va dire, les manifestations de la fermeture à l'autre, c'est-à-dire une forme de défense, d'attaque, etc. par délégation de son client. plutôt de l'aider à prendre du recul, de reprendre le pouvoir sur lui-même pour réfléchir à des façons peut-être alternatives de gérer la situation.

  • Speaker #1

    Là, il y aurait un gros boulot à faire dans les écoles d'avocats, en fait. Parce que nous, on appuie au contraire. L'avocat qui reçoit la personne, s'il appuie. pas d'autres repères que ceux de base du contentieux, on va presque le conforter dans sa certitude que l'autre est le diable, qu'il est ceci, qu'il est cela, on va lui donner de l'empathie. Donc on ne va pas l'aider à sortir de sa croyance du moment.

  • Speaker #0

    Alors pour fréquenter pas mal d'avocats formés à la médiation,

  • Speaker #1

    ou avocats médiateurs,

  • Speaker #0

    je constate qu'effectivement, ça modifie souvent en profondeur leur façon d'exercer leur métier d'avocat.

  • Speaker #1

    Bien sûr, on ne fait plus le même premier entretien, ça je te confirme. Ah bah oui, du jour où tu commences à avoir un vrai changement de paradigme, ton premier entretien avec ton client n'est plus du tout le même. Ce n'est pas que tes intentions ne sont pas les mêmes, mais tu as une approche qui est beaucoup plus riche et qui est plus utile surtout. Qui est plus utile, parce que tu n'apportes pas moins de soutien, mais tu fais un accompagnement différent. Je m'éloigne un peu là.

  • Speaker #0

    Tu as dit un truc tout à l'heure sur lequel je ne suis pas revenu, qui est le fait de, je ne sais pas comment tu as dit ça, de dédramatiser le conflit. de le présenter ou de l'aborder comme quelque chose qui fait partie du quotidien.

  • Speaker #1

    C'est même un troisième personnage. J'aime bien cette idée, je l'ai retrouvée dans le livre de Gary Friedman, qui, je pense, y a évoqué encore quelqu'un, un autre formateur, qui, en séance, jouait la personne un peu diabolique qui murmure à l'oreille de l'un en disant Mais non, t'es en train de te faire arnaquer ! Tu vois, comme cette image qu'on voit des fois dans les BD, avec une bulle de quelqu'un qui... qui te suggèrent des intentions hyper négatives. C'est ça, le côté diabolique. Je ne sais pas si on l'a dans Astérix ou je ne sais pas dans quel BD, mais c'est vraiment ça. Parce qu'on est en permanence dans ce mouvement d'avoir des pensées où tu as envie d'en découdre et quelqu'un presque te les suggère. Donc le conflit est presque une force autonome.

  • Speaker #0

    Oui, et alors ce qui est intéressant, c'est que justement, je trouve que finalement c'est quelque chose qui est assez familier Pour les gens, l'idée c'est d'élargir un petit peu la vision qu'on a du conflit, c'est-à-dire que nous on est très comme ça en transformatif, c'est-à-dire que ce fameux cercle vicieux qu'on a décrit, de déstabilisation et de fermeture progressive qui s'auto-entretiennent, c'est quelque chose qu'on expérimente quasi quotidiennement dans nos vies, avec des niveaux d'intensité divers. Dès que finalement on interagit avec l'autre et qu'on est confronté à sa différence de sensibilité, de point de vue, d'opinion, etc. On peut voir se mettre en route. Ce phénomène où on est un peu déstabilisé par ce que dit l'autre, parce qu'on le comprend mal, qu'il y a un malentendu, qu'on y décèle un procès d'intention ou une attaque, ou que tout simplement on trouve qu'il est complètement à côté de la plaque par rapport à un sujet de société, etc. Et on voit se mettre en route cette mécanique. Et ce qui est très... Je voudrais être assez optimiste là-dessus, c'est-à-dire que ça nourrit chez nous la conviction qu'étant familiarisé à ce phénomène, on est également entraîné pour le transformer. Et donc cette fameuse inversion de la spirale que tu as évoquée tout à l'heure, on le fait en permanence, c'est-à-dire qu'on se réajuste dans une interaction avec l'autre quand on sent que c'est en train de déraper du côté de ce cercle vicieux. et on prend une décision justement, on reprend du pouvoir sur soi-même. par rapport à ce début d'agacement, etc. On s'est dit, non, quand même, ce serait trop bête de s'embrouiller pour cette histoire, etc. Et on fait un petit effort, on demande une clarification, on reprend un mot dont on a compris qu'il était peut-être perturbant pour l'autre, etc. Et donc, en fait, on sait faire ça, on le pratique quotidiennement.

  • Speaker #1

    Alors oui, on le pratique d'autant plus qu'on aura un entourage. pour le coup, bienveillants, qui vous confortent dans cette dynamique-là, ce qui n'est pas du tout courant. Alors, moi, j'ai un conseil là-dessus. Plus on s'entoure de médiateurs, plus on a des gens quand même qui sont habitués à faire cette balance et à ne pas penser en binaire. Et ce n'est pas fréquent. Tu vois, surtout même dans tes relations en général, les amis, ils sont pros, quoi. Ils sont pros, ils vont dans ton sens. C'est pas donner à tout le monde de dire, oui, mais attends, ça, c'est ta vision. Peut-être que l'autre, il a une autre vision. Tu vois, c'est quand même quelque chose. Moi, je vois que je suis hyper aussi influencée par les paroles bienveillantes de certains qui peuvent vraiment... agir, me faire redescendre, ouvrir quelque chose, une forme d'acceptation. Pour le coup, c'est plutôt vers des personnes comme ça que je vais aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Mais tu vois, c'est intéressant parce que dans ce que tu dis, effectivement, il y a l'idée d'avoir une forme de culture du dialogue ou une forme de vigilance sur la qualité des interactions qu'on a avec les uns et les autres.

  • Speaker #1

    C'est pas que ça, c'est pas que la culture du dialogue, c'est plutôt l'acceptation. de l'autre dans sa vraie différence. Tout à fait. Et tu vois, parce que le dialogue, sur le papier, on a tous la culture du dialogue, parce qu'on va te dire je suis pro-guerré Mais c'est plutôt, est-ce que tu l'acceptes, même dans sa bizarrerie, tu vois, dans sa façon d'être qui heurte des fois des choses profondes. C'est pas du tout évident, surtout en ce moment. L'ouverture, c'est compliqué de la cultiver. Quand tu vois des prises de position qui peuvent heurter des choses...

  • Speaker #0

    Bien sûr, pour des sujets qui sont graves.

  • Speaker #1

    Des sujets graves, là, on se fait en plein dedans.

  • Speaker #0

    Mais si on revient à des situations beaucoup plus anodines du quotidien, moi, j'ai pour coutume de dire que les personnes avec lesquelles on s'engage le plus souvent dans cette spirale négative de l'interaction conflictuelle, c'est les personnes avec lesquelles on est le plus proche et avec lesquelles on interagit le plus fréquemment. C'est-à-dire que si tu passes 24 heures en tête-à-tête avec quelqu'un, avec ton conjoint, avec un enfant de ta famille, etc., et que tu parles de choses, ou tu es amené à donner des avis, etc., tu as toujours potentiellement cette mécanique qui se met en route. Et tu as toujours, quel que soit le background de chacune des personnes, sa formation, sa sensibilité justement à... la nécessité ou l'utilité d'être ouvert à l'autre, y compris dans sa bizarrerie, ou dans ses positions, ses points de vue qui sont différents. Tu as toujours ces mécanismes de rappel qui se mettent en route. Parce que, ok, on a envie d'être soi-même et de s'affirmer dans sa différence, mais en même temps, on a consciemment ou inconsciemment l'envie, le besoin d'interagir avec l'autre. Et c'est ces deux choses-là qui se nourrissent d'ailleurs. on devient soi-même ou on est vraiment soi-même qu'en interaction avec les autres parce que c'est ça qui nous amène à affirmer notre identité c'est ça qui nous amène à l'enrichir aussi par influence successive, par comparaison, etc. Et donc ce qui est super important pour nous en médiation transformative c'est d'être profondément convaincu que intrinsèquement, les êtres humains, y compris quand ils sont partis assez loin dans cette spirale négative, ont à la fois la motivation et la capacité d'inverser la tendance. Parce qu'ils ont ce besoin d'une part de clarifier ce qui est important pour eux et d'affirmer leur singularité, et d'autre part de rester connecté à l'autre.

  • Speaker #1

    Oui, quand il y a une volonté, voilà, il n'y a pas toujours de volonté.

  • Speaker #0

    Pas toujours. Mais c'est vrai que quand même très très souvent...

  • Speaker #1

    Une volonté de rester en lien, tu vois.

  • Speaker #0

    Bien sûr, tu peux ne pas avoir la volonté de rester en lien, et il peut même être salvateur pour tout le monde de rompre la relation. Mais ce que je veux dire, c'est qu'au quotidien, on passe son temps à partir dans des dynamiques conflictuelles. et à les inverser, à les transformer, y compris quand on se fâche assez fort, et que derrière, sur l'initiative de l'un ou l'autre, on rentre dans un processus de clarification et de réconciliation. On se dit, tiens, il faudrait qu'on se parle du truc, etc.

  • Speaker #1

    Comment ça se manifeste, cette approche transformative ? On a parlé de la réflexion sur le conflit. Moi, ce que j'avais bien retenu, c'est la non-directivité, le fait que c'est très responsabilisant pour les parties qui sont seules maîtres à bord. Et ça va jusqu'à leur dire qu'en gros, elles décident presque des règles du jeu de ce moment. Ce que j'ai vraiment, et d'ailleurs, j'ai relu le petit retour que tu avais fait sur... une séance de formation là au CNAM, qui était complètement raptée de mon côté, mais que tu avais analysée, tu avais eu la gentillesse de me faire des retours, c'est la posture basse. Alors ça, c'est vraiment, je trouve, hyper important et je trouve qu'on a besoin de faire connaître quand même cette... Cette approche-là, le fait qu'il y a vraiment une volonté d'humilité, de rester en soutien, d'être non-sachant, je t'avais un peu interrogé au départ là-dessus, c'est quand même aussi un des écueils assez fréquemment rencontrés en médiation, je trouve. Cette problématique de posture, on n'en se met pas au même niveau que les personnes. Et c'est aussi, je pense, peut-être une des clés des échecs possibles de médiation, non ? Non.

  • Speaker #0

    Après, tout dépend de ce qu'on appelle médiation, tout dépend de ce qu'on poursuit comme objectif. Mais effectivement, nous, comme justement notre idée, c'est d'accompagner et de soutenir ce phénomène naturel, j'insiste sur naturel, de transformation de l'interaction. en quelque chose de plus positif et de constructif. Il est hyper essentiel, et que du coup, ce qu'on attend, ce qu'on observe, c'est essentiellement ces fameux mouvements d'empowerment que tu as évoqués au début, c'est-à-dire ces mouvements de reprise de pouvoir sur soi-même que peuvent opérer chacun des participants. On va se garder absolument. de prendre des décisions à leur place. On considère que c'est en prenant des décisions, même microscopiques, que les acteurs, petit à petit, reprennent du poil de la bête, si j'ose dire. On dit que c'est en forgeant qu'on devient forgeron, c'est en décidant qu'on retrouve sa capacité à prendre des décisions et qu'on reprend le contrôle. Et donc on va s'interdire absolument de se mettre en surplomb par rapport aux participants. et de les devancer, ça c'est très important, c'est qu'on dit en transformative, on reste toujours dans le sillage immédiat des personnes et de leur conversation, mais jamais on ne les précède, c'est-à-dire qu'on n'a pas de projet pour eux. Et encore moins de choses à leur imposer. Et donc tu as évoqué par exemple les règles.

  • Speaker #1

    De l'échange, donc de la conversation.

  • Speaker #0

    De l'échange, de la conversation. C'est vrai que souvent en médiation, il est de coutume d'entendre que les participants ont la main sur le contenu de leur échange et que le médiateur contrôle le process. Nous, on ne contrôle pas le process. On considère que contrôler le process, c'est déjà prendre des décisions à la place des participants. Et donc, finalement, sans le dire... considérer qu'ils ne sont pas capables de le faire, et surtout les empêcher de se remettre à le faire. Et donc, d'une part, la conversation, on va considérer, on dit qu'elle est... qu'elle est libre, qu'elle est ouverte et qu'elle engendre sa propre structure, c'est-à-dire qu'elle n'est pas supposée suivre un processus prévu à l'avance, c'est les participants qui l'inventent, comme dans la vraie vie. Parce qu'encore une fois, on vient juste donner un coup de pouce à quelque chose qui est supposé se passer en autonomie dans la vraie vie. Et qu'il se passe exactement, qu'il n'arrive plus à se passer à ce moment particulier, sur tel sujet particulier, etc. Mais en plus, effectivement, on se garde absolument de leur donner des règles. C'est-à-dire qu'on considère que de dire aux personnes... Voilà, comment ça doit se passer, il faut s'écouter jusqu'au bout, et puis il faut se respecter, employer un langage, etc.

  • Speaker #1

    C'est impotentilisant.

  • Speaker #0

    C'est très impotentilisant, c'est une approche surplombante, paternaliste, et donc c'est une manière de leur dire, vous n'êtes pas capable de vous contrôler vous-même, donc on va le faire à votre place. Je caricature un peu, hein ?

  • Speaker #1

    Non, mais je suis pas tout à fait d'accord.

  • Speaker #0

    Et par ailleurs, en plus, qui on est nous pour décréter comment ces personnes-là ont envie de se parler ? Quel langage elles s'autorisent à employer ?

  • Speaker #1

    Après tout, s'ils ont envie de s'interrompre. Et parfois, c'est nécessaire. Ce n'est pas possible, c'est insupportable d'entendre. Donc voilà, il faut que ça sorte. C'est aussi le côté naturel du process. S'il y a des choses à purger, tu ne peux pas juste réguler l'échange comme un match de tennis où tu vas compter les points et tu vas siffler la fin de la récré. Ce n'est pas possible.

  • Speaker #0

    Et tu vois, par exemple, pour la question du respect, Qu'est-ce que ça veut dire le respect ? J'ai mon filtre pour savoir ce que c'est que le respect, mais eux, c'est peut-être pas le même. Et par ailleurs, c'est un très bon sujet de conversation qui est souvent au cœur de leurs problèmes d'interaction. Et d'ailleurs, quand on pose la question, parce que c'est comme ça qu'on procède dans la... Les remarques introductives d'une séance de médiation, quand on leur demande s'ils éprouvent le besoin de se donner des règles sur la façon dont cette conversation pourrait se dérouler.

  • Speaker #1

    Oui, c'est plus suggestif du coup, la façon dont tu poses le cadre.

  • Speaker #0

    On leur offre la possibilité de se donner des règles. Alors quelquefois, ils vont te dire, non, je ne vois pas, c'est quoi le problème ? Oui. Donc très bien, et là on va leur dire, écoutez, si effectivement dans le cours de la conversation, vous avez besoin de revenir là-dessus pour que ce soit confortable pour vous, vous n'hésitez pas à le faire. Et puis quelquefois, ils embrayent sur cette question des règles en disant, moi j'aimerais qu'ils me parlent de façon plus respectueuse, ou qu'ils ne m'insultent pas, ou qu'ils m'écoutent un peu parce que jamais ils m'écoutent. Et ça c'est de l'or, parce que c'est une entrée de plein pied dans la conversation à propos de leur relation. qu'est-ce que l'un ou l'autre estime comme étant respectueux ou pas, quel est le besoin de l'un ou de l'autre en termes d'écoute par la personne d'en face, etc. Et du coup, ça démarre la conversation.

  • Speaker #1

    Ça ouvre des portes de conversation. Je me demandais s'il n'y avait pas un moindre engagement du médiateur dans cette approche-là. Hier soir, en posant la question, parce qu'après tout, ce n'est pas dans ce que j'ai lu, ce n'est pas le sujet. Le médiateur, son rapport à ses émotions, sa connaissance de soi, sa subjectivité. Autant en médiation humaniste, c'est vraiment le cœur du sujet. C'est un chemin de connaissance de soi, on va dire la porte d'entrée vers la médiation humaniste. Autant je lis pas grand chose sur le sujet sur la personne du médiateur mais finalement à t'écouter je me dis il faut vachement de confiance pour y aller avec le minimum en disant allons-y quoi, c'est un peu vous qui fixez les règles faut quand même avoir une sacrée foi donc c'est du coup nécessairement la nécessité d'ancrer dans quelque chose de bien poser quand même Dans ce sens là ça converge pas mal avec l'approche humaniste

  • Speaker #0

    Et l'engagement, j'ai envie de dire, il est total en fait. C'est-à-dire que...

  • Speaker #1

    Tu ne peux pas faire autrement en fait.

  • Speaker #0

    D'abord, tu as évoqué plusieurs choses. La première, c'est effectivement une forme de confiance, de conviction dans ces mécanismes. C'est-à-dire que tout ce qu'on a dit précédemment sur la capacité des gens à faire par eux-mêmes, sur cette motivation et cette capacité inhérente à s'affirmer tout en... en restant ouvert à l'autre et à sa différence, il faut y croire profondément. pour s'interdire, y compris quand ça chauffe fort, de reprendre le contrôle et d'inviter au calme, et de revenir un petit peu directif.

  • Speaker #1

    Et tu as une crainte, toi, par rapport à ça ? Parce que c'est quand même un des sujets. Plus j'avance dans le monde de la médiation, plus je vois que c'est une peur assez largement répandue que de se confronter à la violence en médiation. Alors la violence verbale, le plus souvent, mais c'est quand même un de nos gros enjeux, puisqu'on va au cœur du conflit. Donc là, ça sera les questions d'après.

  • Speaker #0

    Alors effectivement, c'est un vertige.

  • Speaker #1

    Tu te mets au bord de ça, donc toi-même, ça quand même...

  • Speaker #0

    Alors effectivement, ça te percute. Et effectivement, ça fait partie des sujets qu'on travaille beaucoup quand on fait de la formation à l'approche transformative. C'est cette capacité à se confronter à une conflictualité intense, à l'expression intense des émotions et potentiellement à quelque chose qui peut se rapprocher de la violence, de s'interdire une forme de régulation trop directive. et de maîtriser également les échos, les impacts que ça peut avoir sur soi-même.

  • Speaker #1

    Alors comment tu te prépares, toi, pour une séance de médiation transformative ?

  • Speaker #0

    Écoute, je ne me prépare pas plus que ça. Je m'offre, on va dire, 5 minutes de calme, si je peux, avant le démarrage. Ça peut paraître paradoxal, mais en fait, comme... On n'est pas vraiment entré dans le détail de ce qu'on faisait, ce qu'on ne faisait pas, etc. Mais pour revenir à ce que tu disais précédemment sur l'engagement, l'engagement je disais qu'il est plein et entier parce que, en fait, comme on ne précède pas les participants qu'on n'a pas de projet pour eux, la contrepartie c'est qu'on est pleinement présent dans l'instant à ce qu'ils expriment, ce qu'ils donnent à voir.

  • Speaker #1

    Tu poses un limite de temps toi dans tes réunions par exemple ?

  • Speaker #0

    Alors on se donne un créneau en général, oui, pour que tout le monde ait une bonne gestion de son agenda.

  • Speaker #1

    Mais de quel ordre ? Parce que c'est pareil, ça aussi, t'as des écoles différentes. T'en as qui vont te dire, moi, ça peut durer trois heures. 4 heures, 5 heures ?

  • Speaker #0

    Écoute, quand c'est de l'interpersonnel, que c'est deux personnes, ou quand c'est éventuellement trois, je fais rarement plus de deux heures. En général, je fixe un créneau de deux heures. Enfin, on fixe ensemble un créneau de deux heures et ils ont toujours la possibilité de s'arrêter plus tôt.

  • Speaker #1

    Ah oui, c'est plus tôt de s'arrêter ?

  • Speaker #0

    Oui, parce que prolonger, encore faut-il que les gens soient disponibles, y compris moi-même. Oui, bien sûr. Et quand on arrive au... Au bout du créneau, c'est toujours eux qui décident ce qu'ils veulent faire après. Merci.

  • Speaker #1

    Alors justement, dans quel domaine en particulier toi tu interviens en médiation ? C'est vrai que je ne sais pas comment c'est par là, tu vois j'ai fait de la non-directivité.

  • Speaker #0

    Il faudra qu'on revienne après je pense à l'histoire de la présence, de l'engagement, de la préparation, etc. Écoute, moi comme mon terrain de jeu initial on va dire c'était l'entreprise, ou les organisations on va dire, j'ai commencé à faire de la médiation dans ce type de contexte, donc de la médiation sur le lieu de travail on va dire. Et puis en fait, il y a maintenant 5-6 ans, j'ai eu l'opportunité de glisser vers des contextes familiaux. D'abord sur des sujets de succession ou d'anticipation de succession. Donc voilà, des familles, des fratries et leurs parents, avec ou sans leurs parents on va dire. C'est un univers qui me plaît bien parce que c'est effectivement très intime, très intense. Justement, je pense que quand on est médiateur transformatif, pour revenir à un point que tu abordais tout à l'heure, Il y a un moment donné où finalement on se met, alors il ne faudrait pas que ce soit mal perçu, mais à aimer ça en fait, l'expression intense des émotions. C'est-à-dire que ça fait plus peur, on le considère comme étant de l'or, un matériau riche, c'est de la vérité, c'est des choses qui ont besoin de sortir et qui ont besoin d'être mises en valeur, etc.

  • Speaker #1

    C'est l'authentique.

  • Speaker #0

    Voilà, donc c'est très authentique.

  • Speaker #1

    On enlève les masques.

  • Speaker #0

    Dans le familial, on a vraiment cette dimension-là.

  • Speaker #1

    Une famille de plusieurs générations, c'est la particularité quand même.

  • Speaker #0

    Plusieurs générations ou bien parfois simplement au sein d'une fratrie.

  • Speaker #1

    Dans des contextes de succession patrimoniale, je crois.

  • Speaker #0

    Voilà, prise en charge de la dépendance d'un parent, des décisions difficiles à prendre entre frères et sœurs qui se parlent plus ou moins ou plus ou moins bien depuis un certain temps, etc. sur la dépendance de leurs parents, mais sur aussi la façon de gérer telle ou telle partie de patrimoine commun, une indivision, que sais-je.

  • Speaker #1

    Il y a un tel besoin dans ce domaine.

  • Speaker #0

    Voilà, toutes ces choses-là. Voilà, et puis du coup, je me suis mis aussi à accompagner des couples, soit... Des couples qui ne sont pas dans une dynamique de séparation, mais qui identifient qu'ils ont du mal à aborder des sujets difficiles et que ça peut les aider d'être soutenus ponctuellement comme ça dans des efforts de dialogue. Ou bien au contraire, des couples divorcés, séparés, qui mesurent l'intérêt de retrouver le chemin du dialogue pour... on va dire vivre cette relation qui de toute façon continuera, en particulier quand ils ont des enfants, de la vivre sereinement, justement, en sortant de la déstabilisation et de la fermeture l'un à l'autre, voilà, pour de nouveau peut-être pas forcément se fréquenter de manière étroite, mais au moins se croiser de façon sereine et constructive.

  • Speaker #1

    Je t'ai interrompu tout à l'heure, justement, sur... Le questionnement personnel, la préparation, tu m'as dit que tu voulais revenir là-dessus.

  • Speaker #0

    Oui, tu parlais de l'engagement du médiateur transformatif et aussi de sa... de sa tolérance à la violence qui peut s'exprimer en médiation.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est la peur de la violence qui m'interpelle ? Je le vois quand même assez fréquemment.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est un vertige pour beaucoup de médiateurs débutants. Et c'est aussi justement une des raisons pour lesquelles on peut revenir, même si on n'en avait pas l'intention, à des réflexes très directifs. Oui, c'est un vrai épreuve. En transformative, on gère ça plutôt bien, puisque l'intervention principale, le type d'intervention majeure qu'on utilise en médiation transformative, c'est ce qu'on appelle le reflet. et donc comme son nom l'indique ça consiste à refléter fidèlement ce que les personnes expriment, chacune d'entre elles au moment où elles l'expriment et quand je dis fidèlement c'est en employant le même champ lexical, les mêmes mots, les mêmes expressions clés, signifiantes celles qui sont chargées justement de déstabilisation et de fermeture donc dès qu'il y a de l'émotion forte, dès qu'il y a des procès d'intention Et dès qu'il y a des mots chargés, on les reprend. Et on reprend également l'énergie avec laquelle ils sont exprimés.

  • Speaker #1

    Je me souviens du reflet joufflu, donc.

  • Speaker #0

    Notamment on dit joufflu ou charnu, c'est-à-dire que...

  • Speaker #1

    C'est riche comme reflet.

  • Speaker #0

    Voilà, c'est pas juste un petit miroir qui reprend les trois derniers mots de la personne. Ça,

  • Speaker #1

    c'est la version médiation humaniste où effectivement, tu as une phrase clé. Je sens la tristesse, je sens la colère, etc.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Voilà. Tu es dans aussi quelque chose d'assez pur et assez court.

  • Speaker #0

    Oui, alors là, quand on offre un reflet, on l'offre assez complet. Tu disais joue plus effectivement, c'est un mot qui me vient de mon mentor John Peter Weldon en la matière. C'est-à-dire qu'on lui donne, on donne à voir, et c'est là que je voulais en venir, on donne à voir à la personne qui vient de s'exprimer. de manière brute et la plus complète possible ce qu'elle vient d'envoyer.

  • Speaker #1

    C'est la même intention du coup que le miroir.

  • Speaker #0

    Pour qu'elle puisse se rendre compte, parce que comme on a dit, la personne elle est déstabilisée, elle est confuse, elle manque de lucidité puisqu'elle est aux prises avec ce conflit et ses effets incapacitants. elle ne se rend pas forcément compte de ce qu'elle envoie. La première fonction de ce reflet, c'est de lui donner à voir ce qu'elle a envoyé, pour qu'elle puisse décider, on en revient à l'idée de décider, si oui ou non c'était ça qu'elle voulait envoyer. Et donc décider si elle veut... le réaffirmer, le compléter, le corriger, le nuancer. Si elle décide de le nuancer, notamment, on va considérer qu'en plus d'être un mouvement d'empowerment, c'est-à-dire une décision de modification de ce qu'elle a voulu exprimer, c'est un mouvement dit de reconnaissance, c'est-à-dire un mouvement d'ouverture ou d'attention à l'autre, parce que si je reprends un mot dont je me suis rendu compte qu'il était trop violent à ton égard, C'est une manière de prendre soin de toi et de me réouvrir à toi.

  • Speaker #1

    Donc tu ne vas pas dans de la reformulation ?

  • Speaker #0

    Ah non, il n'y a pas de partage, il n'y a pas de recherche de valeur ajoutée.

  • Speaker #1

    Je suis pas à l'aise avec la reformulation là-dessus. Je trouve que toujours cet aspect perroquet me dérange. Et puis en plus tu vas t'être presque dans l'interprétation si tu reformules c'est pas les bons termes, bah non j'ai pas dit ça j'ai dit ça, ça veut pas dire la même chose

  • Speaker #0

    Alors c'est marrant parce que le fait que ce soit très fidèle justement quand on forme des médiateurs transformatifs ils ont peur ils peuvent avoir peur que qu'il soit pris pour des perroquets. Parce que comme on va reprendre les mêmes mots, les mêmes expressions clés, alors on ne va pas redire les choses forcément dans le même ordre, mais en fait cet effet perroquet, il peut être perçu éventuellement par un observateur externe qui regarderait une vidéo ou quoi, mais pour les personnes qui sont aux prises avec le conflit, en fait elles sont très contentes d'entendre ce qu'elles ont dit, et d'ailleurs si elles ne retrouvent pas ce qu'elles ont dit, soit parce qu'on était à côté de la plaque, soit parce qu'elles ne se rendaient pas compte de ce qu'elles disaient, elles vont encore une fois nous corriger, et on est très content d'être corrigés parce que c'est un mouvement d'empowerment de leur part, elles trouvent la ressource et la force et elles prennent la décision de te corriger toi le médiateur, qui n'est pas une entité surplombante, bref elles ont ce mouvement là. Voilà, elles ne se rendent pas compte qu'on fait le perroquet, puisqu'elles...

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas un perroquet, là, je corrige, ce n'était pas mon propos de dire... C'est par rapport à de la reformulation basique telle que tu peux la prendre en approche collaborative, ça fait partie du truc, reformuler, et la reformulation même, elle est croisée, c'est-à-dire qu'on travaille à quatre, les deux avocats, les deux clients, et l'avocat de l'autre va reformuler ce qui va être dit. Et c'est dans l'approche... un peu puriste, systématique. Donc tu peux avoir des entretiens qui vont durer hyper longtemps avec un fort aspect reformulation, mais qui est neutre. Et bon, moi, la petite critique que je fais, c'est que des retours de gens qui l'ont vécu ont eu cet aspect perroquet un peu agaçant. et qui en plus leur a fait perdre de l'attention. Tu vois, là, de ce que j'ai compris du reflet joufflu, donc c'est qu'il y a... Oui, c'est vraiment la miroir. Tu mimes même avec le geste, la façon dont les choses... Il y a presque un truc corporel aussi. Tu vas bouger en disant, toi, pour toi, c'est comme ci, c'est comme ça. Tu vois, tu vas restreindre les émotions. Et quelque part, on a besoin de ça quand on est en médiation, d'être entendu. et peut-être aussi d'être entendus dans nos émotions, dans l'indignation que tu peux exprimer à un instant T. Donc je crois que c'est plutôt...

  • Speaker #0

    Principalement...

  • Speaker #1

    C'est appétant pour la personne qui le vit.

  • Speaker #0

    Et ça va nous permettre de revenir sur l'idée de la violence, entre guillemets, ou en tout cas au moins de la violence verbale. C'est-à-dire que... Bon, effectivement, le reflet n'est pas systématique, mais on l'offre, on le produit quand on arrive à se glisser dans la conversation, bien sûr, y compris d'ailleurs de manière un peu volontariste. Quelquefois, il faut se faire un petit peu de la place sans brusquer les gens. On l'offre en priorité quand on a été soi-même percuté, impacté dans son empathie qu'on a quand on écoute chacun des participants. par justement les manifestations de cette déstabilisation et de fermeture. C'est-à-dire qu'on va offrir des reflets en priorité quand les gens expriment des émotions fortes, expriment leur désarroi, expriment leur confusion, ou en tout cas la montrent, et également quand elles expriment leur fermeture à l'autre, c'est-à-dire principalement, puisqu'on va parler de violence, leur hostilité, leur procès d'intention, leurs attaques, etc. Et on va aller justement essentiellement là-dessus. On ne va pas refléter des trucs qui ne sont pas chargés.

  • Speaker #1

    C'est l'expression de besoin, l'émotion. En même temps, c'est que tu as touché à des choses fortes. Derrière, il y a des valeurs, etc.

  • Speaker #0

    Exactement. Justement dans cette idée de leur donner à voir ce qu'elles ont exprimé, et en même temps de donner aussi à voir à l'autre ce que la personne qu'on reflète vient d'essayer d'exprimer, on leur offre la possibilité de prendre conscience de ce qui est exprimé et d'en faire quelque chose, de faire des choix. Et donc pour en revenir à quand c'est violent, Si les gens deviennent effectivement très agressifs, très violents, voire même se lèvent de leur chaise en esquissant un mouvement qui pourrait dégénérer vers une vraie violence physique, on ne va pas leur dire calmez-vous, ça ne se fait pas On va leur donner en reflet la même violence. Et en fait, ça n'est pas directif, ça n'est pas censeur, mais en revanche, ça a un effet de régulation qui est extrêmement puissant parce que la personne est confrontée de manière brute à ce qu'elle vient d'envoyer. Et là, elle peut se dire, peut-être que je suis un peu à côté de la plaque, que ce n'est pas exactement ça ou que je ne suis pas dans la bonne mesure. Et donc ça peut concourir à cette fameuse reprise de contrôle sur elle-même et cet ajustement à l'autre dans leur expression.

  • Speaker #1

    Je me dis qu'on a tous besoin de reflets joufflus, mais c'est vrai, puisqu'on n'a pas forcément conscience de ce qu'on envoie.

  • Speaker #0

    Exactement. Et le plus tu es embringué dans cette spirale négative, le moins tu as conscience de ce que tu envoies. et donc c'est vraiment le truc le truc majeur un jour ma fille qui avait

  • Speaker #1

    4-5 ans je lui fais gros yeux, j'étais hyper fâchée contre elle elle me dit mais tu me fais peur t'as l'air d'un loup ça me cassait le feedback d'un gamin ça me fait bien alors là on va pas le dire mais ça a un peu la même fonction

  • Speaker #0

    elle te renvoie à ce moment là ma posture d'adulte etc il y avait exactement et du coup si tu veux pour faire ça ce qui est en général ce qu'on va faire principalement quand vraiment les gens sont aux prises avec ces effets déstabilisants du conflit pour faire ça t'as pas besoin d'avoir anticipé quoi que ce soit ou de préparer à quoi que ce soit la seule préparation que tu dois avoir C'est celle dont tu as besoin, et ça dépend peut-être des gens, pour être pleinement disponible à ce qui survient dans l'instant T. Et donc pour pouvoir donner cette empathie, cette écoute pleine et entière, cette pleine présence à chacun de tes participants, à chaque instant de la conversation, sans faire des plans sur la comète de ce qu'on pourrait faire après, et sans se prendre la tête non plus sur ce qui s'est passé avant. Ce qui est important, c'est ce qui se passe dans l'instant. Tu restes dans le sillage immédiat et tu leur donnes à voir ce que tu as ressenti finalement dans ton empathie comme étant important pour eux dans cette conversation qui se déroule sous tes yeux.

  • Speaker #1

    Donc je te rejoins, la disponibilité qui est nécessaire, ça me paraît compliqué de l'avoir en étant seule en plus parce que tu n'es pas en commédiation là, sur une période plus longue que deux heures. Parce que déjà physiquement on est... On n'est pas fait pour ça, avoir une attention aussi importante. Ça me paraît...

  • Speaker #0

    J'avais pas fini d'être répondu à ta question tout à l'heure. Le plus d'heures, c'est effectivement mon max pour l'interpersonnel. En revanche, quand on est dans du collectif qui a plus de monde, moi, je fonctionne plutôt par demi-journée, 3h, 3h et demi.

  • Speaker #1

    Bien sûr, bien sûr.

  • Speaker #0

    Et quand ils sont nombreux, c'est vrai que d'être en commédiation peut être effectivement utile.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu as réfléchi à ce que cela t'apportait à titre personnel ?

  • Speaker #0

    Ah bah oui oui, et c'est très lié à ce qu'on vient d'évoquer, c'est-à-dire que pour bien faire ce job-là, je dirais que finalement les techniques, les méthodes, les quelques interventions qu'on n'a pas forcément détaillées mais on est revenu sur le reflet, ce qui est le principal, c'est une chose, c'est important, c'est utile, mais ce qui est le plus important c'est son savoir-être, c'est la gestion de soi-même. C'est-à-dire que d'ailleurs idéalement... c'est un peu notre graal, c'est de dire, mais moi je suis assez convaincu de ça, on pourrait ne rien faire et ne rien dire. C'est-à-dire que dès lors que, je ne pense pas qu'on aura forcément le temps de revenir là-dessus, mais que les conditions ont été réunies pour que les personnes acceptent de se rencontrer, elles ont déjà pris des premières décisions qui les mettent sur le chemin de cet empowerment. Et donc... il y a de grandes chances qu'elles arrivent à opérer cette transformation de leur interaction, comme on l'a évoqué plein de fois. Dès lors, si moi je suis là, que j'incarne cet espace de dialogue, et que, en plus, je leur donne à voir moi-même ce qu'eux cherchent à retrouver, c'est-à-dire le calme et l'ouverture, Euh... L'essentiel du job est fait. Et donc, je vais revenir à ta question, ça veut dire que ce que je vais cultiver moi, je le dis souvent aux étudiants, aux stagiaires, la première chose à faire, c'est de s'occuper de vous-même en tant que médiateur. Arrêtez de vous prendre la tête avec ce que vous devriez faire ou pas pour prendre soin ou pour prendre en charge ces personnes. Occupez-vous déjà vous-même, d'être pleinement présent à ce qu'ils vont vous montrer et d'être vous-même en pleine possession de vos moyens calme, serein, lucide, et vous-même, pleinement ouvert à la différence des autres, et à leur particularité.

  • Speaker #1

    Donc c'est très vertueux.

  • Speaker #0

    Et donc en fait, de cultiver ça, pour revenir à qu'est-ce que ça m'apporte, j'ai tendance à penser qu'effectivement ça me fait progresser, ou ça développe mes compétences émotionnelles et relationnelles. Donc ma capacité de réguler Régulation émotionnelle, alors ça c'est un autre sujet, je ne sais pas s'il faut rentrer vers ça. Mais voilà, mes propres capacités de régulation émotionnelle, c'est-à-dire de maîtriser ce qui me traverse, pas forcément de le maîtriser, mais de l'accepter et de le laisser passer comme un méditant, comme quelqu'un qui fait de la pleine conscience. Ça développe également la capacité à donner de l'empathie à quiconque, quand bien même ça peut être des personnes. qu'on aurait on va dire tendance à détester parce qu'on rencontre pas que des gens avec lesquels on se sent pleinement en harmonie parmi les participants qu'on a dans les médiations et donc voilà je pense que ça m'apporte sur tout ça et aussi cette une discipline alors aussi un effort parce que c'est un effort l'ouverture oui oui oui alors il y a Il y a de la discipline et de l'effort sur deux choses à mon avis. Effectivement, d'abord l'attention, le contrôle attentionnel, c'est-à-dire le fait de ramener toujours son attention à ce qui se passe dans l'instant, plutôt que de se laisser perturber outre mesure par... on va dire toutes les pensées perturbantes par lesquelles on peut être traversé, toutes les émotions perturbantes par lesquelles on peut être traversé, etc. Et donc cette capacité à ramener son attention sur ce qui se passe là et ce sur quoi on a décidé de se focaliser, c'est-à-dire ce qu'expriment les gens dans l'instant. Et effectivement, la deuxième est consécutive, dès lors que je suis pleinement attentif. et que je ne prends pas d'avance sur le processus et que je ne me laisse pas non plus garder en arrière par ce qui s'est passé avant, que j'ai éventuellement raté. Je ne suis plus disponible pour accueillir l'autre, quel que soit ce qu'il a à donner, et avec tout ce qu'on dit quand on est médiateur, sans jugement, etc. Sans jugement. le jugement on l'a toujours mais encore une fois il faut l'accepter comme étant quelque chose qui est si on en est conscient et dès lors qu'on est conscient on le laisse passer et on se recale sur ce que la personne cherche à exprimer

  • Speaker #1

    Quel est ton rapport au conflit ? Tu l'as interrogé, est-ce que t'es fly ? fight ou freeze ?

  • Speaker #0

    Je pense que par nature, je serais plutôt flight, donc la fuite, l'évitement. Je pense qu'on est pas mal de médiateurs dans ce cas-là. J'ai souvent cette réponse. On est allé vers ça parce que finalement, on n'aime pas ça. Et vous,

  • Speaker #1

    oui.

  • Speaker #0

    Et en même temps, et je pense en particulier grâce à l'approche transformative, Je pense qu'il y a une forme d'apprivoisement de ça et tout ce qu'on vient de dire sur le fait de se colter, de se... confronté volontairement au conflit, et d'autant plus quand il est intense, ma petite aptitude fait mesurer la valeur de ce qui s'exprime dans l'interaction conflictuelle et la façon dont on peut l'utiliser pour transformer les choses d'une manière plus positive. Et donc ça veut dire que je pense que dans ma vie de tous les jours, je suis en train de faire des choses J'ai maintenant... On se refait pas, hein, mais j'ai davantage de capacité à... à faire face au conflit en fait, et à essayer de mobiliser tout ce que j'ai appris, même si c'est les cordonniers les plus mal chaussés, pour justement prendre à bras le corps les interactions conflictuelles et essayer de les transformer.

  • Speaker #1

    Ok, écoute, je te remercie Olivier,

  • Speaker #0

    c'était un échange, un plaisir,

  • Speaker #1

    j'espère qu'on a donné envie aux gens qui nous écoutent de découvrir la médiation transformative, où est-ce qu'on peut les envoyer ? Vous voyez justement, si on veut se former, sur ta page LinkedIn, il y a quelques infos, des formations, il y a cet institut.

  • Speaker #0

    Il y a un institut américain auquel je suis affilié, dont je suis un fellow, comme on dit, qui s'appelle l'ISCT, Institute for the Study of Conflict Transformation, qui se trouve... Adresse web transformativemediation.org, tout attaché. D'accord. Transformativemediation.org. Mais c'est en anglais.

  • Speaker #1

    Si on veut se former, on se conçoit d'ailleurs au médiateur, parce que ces interactions, c'est aussi très, très utile en tant que conseil.

  • Speaker #0

    On peut prendre contact avec moi, tout simplement, parce que c'est plus simple. Sur la page LinkedIn ? Sur la page LinkedIn, par exemple. C'est parfait.

  • Speaker #1

    Eh bien, allez-y. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci à toi, Émilie. C'était un plaisir.

  • Speaker #1

    À bientôt. Au revoir. Merci d'avoir écouté cet échange. N'hésitez pas à me faire part de vos remarques via mon site www.etg-avocat.com Vous pouvez également me suivre sur LinkedIn. A bientôt !

Description

Dans ce troisième épisode du podcast, je reçois Olivier Chambert-Loir, médiateur, formateur et animateur du réseau francophone de médiation transformative.


Olivier nous partage :


  • Son parcours professionnel dans lequel il a évolué d’une posture d’expert puis de facilitateur venant accompagner un processus de décision en le structurant, vers une posture non directive, de non-sachant à travers celle de médiateur,


  • La lecture de l’approche transformative du conflit popularisé par Robert A. Baruch BUSH et Joseph P. FOLFER et ses impacts sur les personnes,


  • La proposition d’accompagner un phénomène naturel où le médiateur transformatif vient, en restant dans le sillage immédiat des personnes, leur donner un coup de pouce pour transformer une interaction conflictuelle en un dialogue redevenu constructif,


  • Sa conviction que les êtres humains ont la motivation et la capacité d’inverser la tendance et qu’il s’agit de soutenir des mouvements naturels leur permettant de reconquérir une autonomie personnelle et leurs pleines capacités de décisions,


  • La posture du médiateur transformative, la peur de la violence en médiation et l’engagement du médiateur,


  • La technique du reflet en médiation et son effet régulant sur la conversation.


À tous les professionnels du conflit et notamment les avocats, prenez le temps d’écouter cet échange qui pourra vous faire appréhender différemment les situations conflictuelles qui vous sont présentées !


Bonne écoute,

Émilie


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Retrouvez Olivier Chambert-Loir sur Linkedin

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En attendant de se retrouver le 10 de chaque mois pour un nouvel épisode, je vous invite à vous abonner au podcast et à laisser 5 étoiles sur votre plateforme d’écoute préférée.


Si vous souhaitez continuer la discussion autour de la médiation, retrouvez-moi sur mon compte Linkedin Emilie Thivet-Grivel.


Et si vous souhaitez en savoir plus sur le cabinet ETG Avocats et nos services de médiation, rendez-vous ici.


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Crédits :

Antidot est un podcast d’Emilie Thivet-Grivel.
Stratégie : Mélanie Hong.
Montage et mixage : Morgane Bouchiba.
Designer graphique (vignette) : Emma Wise.
Musique  : Aberdeen, Greg McKay.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, vous écoutez Antidote, le podcast qui nourrit la réflexion des professionnels du conflit. Je m'appelle Émilie Thivet-Grivel, je suis avocate et médiatrice, fondatrice du cabinet ETG Avocats, et chaque mois je vais à la rencontre de professionnels qui apportent un éclairage à nos questions. Comment dépasser ces conflits qui entravent nos vies ? Comment rétablir un dialogue avec cet autre avec lequel on doit faire ? C'est l'objet de ce podcast que de vous partager mes rencontres et outils de réflexion pour changer de regard sur la conflictualité et l'organiser autrement. Aujourd'hui, je reçois Olivier Chamberloir. Médiateur, formateur et superviseur en médiation, Olivier, tu es un des représentants en France du courant de médiation transformative. Tu as d'ailleurs traduit de l'américain au français l'ouvrage de référence de Bush et Folger, alors il s'agit de Robert Barour Bush, pas d'une autre famille, sous le nom La médiation transformative, une approche non directive des conflits aux éditions RS. Tu animes le réseau francophone faisant connaître cette approche. Tu as aussi une casquette de coach puisque tu as fondé il y a quelques années une société de coaching et de formation. Après une formation initiale d'ingénieur, puis un parcours professionnel de consultant au sein d'entreprises de conseil. Comment tu es venu à la médiation et est-ce que tu te souviens plus particulièrement ce qui t'a fait te dire que c'était vraiment dans cette posture de tiers et en particulier de non-sachant que tu te sentais le mieux ?

  • Speaker #1

    Pour répondre à ta question, c'est venu la médiation un petit peu progressivement, parce que comme tu l'as rappelé, j'ai commencé ma carrière comme consultant en organisation et management. Ce qui voulait dire accompagner des entreprises, des dirigeants et leurs équipes sur des projets de réorganisation par exemple. Et donc ça impliquait, c'était un travail de tiers, mais qui impliquait beaucoup de conseils, de suggestions, de travail d'experts, de sachants. Bien sûr de la facilitation du dialogue et de la prise de décision commune. mais avec toujours une idée derrière la tête, des orientations vers lesquelles emmener les gens, etc. Et des convictions à afficher, un avis sur toute chose. Je caricature un peu peut-être, mais c'est ce qui était attendu. C'est pour ça que les clients payaient mon cabinet. Je dois dire que j'étais pas forcément à l'aise avec cette posture, en particulier quand j'étais tout jeune, et face à des dirigeants assez capés qui pouvaient m'impressionner un peu, et d'être propulsé comme ça, y compris d'ailleurs dans des situations parfois à transmettre un savoir que je venais d'acquérir au sein du cabinet, et d'être propulsé comme ça, comme un expert ou comme un sachant sur un certain nombre de choses sur lesquelles j'étais pourtant assez débutant. J'étais pas forcément très à l'aise avec ça. Je m'en suis accommodé. Après, j'ai continué ce métier-là. Au bout de quelques années, je me suis mis en indépendant. Donc, j'ai continué à faire ce métier-là.

  • Speaker #0

    C'était ma question parce que je me souviens plus si tu étais salarié au départ.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai commencé.

  • Speaker #0

    Salarié de boîte qui prestait du conseil, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Exactement, un cabinet de conseil qui était assez connu, qui s'appelait Bossard Consultant, qui a été absorbé depuis par le groupe Capgemini. Voilà, et à un peu moins de 30 ans, je me suis mis à mon compte, et j'ai continué à faire la même chose en tant qu'indépendant. Et du coup, petit à petit, un peu plus à ma manière, je me suis un peu réaligné avec la façon dont j'entendais procéder, pour être plus confortable. Et donc, dans une posture que j'ai cherché à rendre de moins en moins, justement, sachant toute directive, d'être plus à l'écoute, de laisser plus les gens prendre leurs décisions par eux-mêmes. Et donc je suis allé dans cette direction de la facilitation, sachant que dans le mot facilitation, il y a quand même cette idée de structurer un process de discussion ou de décision, de l'outiller avec des méthodes, etc. Et ça aussi, c'est pour ça que je dis que ça a été progressif, j'ai finalement cherché à m'en libérer de plus en plus. Et bref, quand je me suis rendu compte que dans mes interactions avec mes clients, je faisais des choses qui s'apparentaient au coaching, c'est-à-dire accompagner les gens dans leurs réflexions sur la façon dont ils fonctionnent eux-mêmes et en interaction avec leur environnement. Quand je me suis rendu compte que je faisais aussi quelque chose qui pouvait s'approcher de la médiation, c'est-à-dire aider des gens dans leurs efforts pour dialoguer, pour prendre des décisions ensemble, j'ai cherché justement à me raccrocher à des écoles de médiation notamment, à voir quelles formations complémentaires je pouvais suivre, dans quel courant je pouvais m'inscrire, etc. Et j'ai eu un peu de mal parce qu'en fait j'ai trouvé... J'ai trouvé beaucoup de choses qui ressemblaient pas mal à cette facilitation que je pratiquais déjà, c'est-à-dire, encore une fois, l'accompagnement assez structuré dans des processus de dialogue et de décision, avec des méthodes et des outils que pour la plupart j'avais déjà pratiqués, comme le problem solving ou la négociation raisonnée, ou d'autres méthodes de créativité, etc.

  • Speaker #0

    Des approches ou non ? encore très interventionniste en fait. C'est un peu ça ?

  • Speaker #1

    Oui, en tout cas en tant qu'aujourd'hui que médiateur transformatif, je considère comme très interventionniste, assez structurante. Moi,

  • Speaker #0

    c'est ce qui m'a frappé quand j'ai regardé ton parcours dans le détail, c'est qu'on a l'impression que tu es allé vers quelque chose de plus en plus épuré finalement.

  • Speaker #1

    Exactement. Je suis vraiment toujours dans cette quête-là et c'est ça que j'aime dans l'approche transformative, c'est qu'en fait, on est amené à se questionner en permanence dans le travail réflexif qu'on fait comme tout professionnel de l'accompagnement. Quand on s'interroge sur... Sur ce qu'on fait, ce qu'on a fait, pourquoi on l'a fait comme si, comment on aurait pu le faire autrement, c'est qu'on est toujours en train de s'interroger sur où est-ce qu'on a mis le curseur en termes d'interventionnisme et de directivité. Est-ce que c'était pour de bonnes ou de mauvaises raisons ? Est-ce que c'était pour se rassurer soi-même ou pour se montrer utile, pour se convaincre que soi-même on était utile ? Ou bien est-ce que c'est parce qu'il y en avait vraiment besoin ? J'ai cherché et j'ai fini par trouver l'approche transformative qui correspond justement à cette quête du geste épuré de l'accompagnement du dialogue.

  • Speaker #0

    Je voulais que tu puisses un peu nous décrire la particularité de ce process de médiation. et pour ceux qui ne la connaissent pas et peut-être aussi déjà lever un malentendu parce qu'on pourrait se dire que Transformative il s'agit de transformer les gens et non il s'agit de travailler sur le conflit Bonne remarque C'était ton sujet, si tu peux décrire

  • Speaker #1

    Déjà Transformative c'est un peu un anglicisme, c'est la traduction qui nous est parvenue via le Québec du mot en l'état anglais, enfin américain. Donc certains disent transformatrice ou transformante, etc. Mais comme tu l'as suggéré, ce qu'on cherche à transformer ou à aider à transformer, la transformation qu'on cherche à soutenir quand on fait de la médiation transformative, c'est celle de l'interaction conflictuelle, c'est pas celle des gens eux-mêmes. Après, d'aucuns te diront que dès lors que tu participes à un processus comme ça de dialogue, ou que tu es accompagné par quelqu'un dans quelque chose, d'une manière ou d'une autre, ça te fait bouger, ça te transforme, mais c'est pas l'objet. L'idée là, c'est de dire, le conflit, c'est une crise de l'interaction entre des êtres humains, et c'est une crise que la plupart du temps, d'ailleurs, les êtres humains arrivent à transformer eux-mêmes, c'est-à-dire à... à rétablir leur interaction en quelque chose de plus constructif. Mais effectivement, de temps à autre, ils peuvent avoir besoin d'un tiers pour les soutenir dans cet effort. Et donc la transformation dont on parle, c'est la transformation de l'interaction conflictuelle en un dialogue. devenu ou redevenu constructif. Quelque chose que les gens, encore une fois, a priori, savent faire par eux-mêmes, simplement par leur humanité et leur dimension sociale, et qui est un processus naturel dans lequel on leur donne un coup de pouce en tant que médiateur.

  • Speaker #0

    Alors, un coup de pouce pour reconquérir une autonomie personnelle. C'est ce qui m'avait vraiment plu. Je trouvais très responsabilisant, parce que ce que j'ai retenu de ton intervention qui avait marqué les esprits au CNAM, c'est qu'on est vraiment dans une logique où on va essayer de les aider à retrouver en eux des ressources pour retrouver... ce calme qui fait complètement défaut pendant ce moment de grande crise donc c'est quelque chose qui est très exactement c'est vraiment je ne trouve pas les mots mais c'est l'empowerment shift si j'en parle correctement alors l'empowerment shift c'est effectivement les

  • Speaker #1

    mouvements que les gens opèrent pour reprendre le contrôle d'eux-mêmes et c'est ce à quoi on est le plus attentif en médiation transformative et effectivement tu as complètement raison c'est central c'est à dire que Quand on fait de la médiation transformative, on met un petit peu de côté la recherche de solutions, en considérant que les personnes sont, ça c'est assez classique de le dire, les meilleurs experts de leurs solutions et de leurs problèmes, et les plus à même de trouver leurs solutions. Dès lors... qu'elles retrouveront leur capacité à dialoguer de façon constructive. Et donc on considère la solution comme, on va dire, un bénéfice collatéral, ou un bénéfice de second niveau par rapport à une interaction transformée, justement, qui a retrouvé son caractère constructif. De même, on considère que... la fameuse reconnaissance mutuelle qu'on peut attendre des personnes en conflit, est quelque chose qui ne peut pas être forcé.

  • Speaker #0

    qu'elle doit être volontaire et elle doit découler d'une décision des personnes de se réouvrir l'une à l'autre et donc d'une capacité retrouvée de chacune à prendre cette décision. Et donc on en vient à cette histoire d'empowerment, c'est-à-dire de dire ce qui est central dans tout ça, c'est que les personnes retrouvent... leur pleine capacité cognitive, on va dire, et leur pleine capacité à décider ce qu'elles veulent faire et comment elles veulent le faire. notamment de se réouvrir à l'autre. Et donc le mot empowerment, qu'on n'a d'ailleurs pas traduit, on l'a gardé comme ça, on pourrait le traduire comme étant reprise de pouvoir sur soi, ou certains disent regain de pouvoir en soi, mais c'est finalement une reprise de contrôle sur soi-même, c'est-à-dire le fait de, petit à petit, par petits mouvements, justement les fameux empowerment shifts, Euh... retrouver en fait une forme de calme, d'une forme de clarté, de lucidité et une forme de justement capacité à décider ce qu'on veut faire, notamment de l'interaction avec l'autre.

  • Speaker #1

    Moi ce que j'aime bien dans cette approche, et pour l'avoir vécu, à titre perso dans des conflits, c'est que quelque part on prend en compte le conflit comme... Une force en soi, c'est presque le troisième personnage dans la pièce, et que c'est ce conflit qui bouleverse les gens, qui les fait se transformer aussi, mais dans ce qu'ils ne sont pas habituellement, parce qu'on a de la colère, on a de la déception, on est attaqué dans des choses très intimes, et donc il y a cette version un peu démoniaque, là je me souviens de tes petits dessins. Et cette spirale du conflit qui appelle le conflit, etc. Et d'ailleurs qui nous emmène dans le pire qu'on voit actuellement. Et c'est assez... déculpabilisant, dédiabolisant, en même temps très humain, parce que tout le monde peut se retrouver dans ces phases-là. Je trouve qu'on sort en plus, enfin, du schéma binaire. Où on attend que le problème, c'est forcément l'autre, et l'autre est un diabolique. Nous, on n'a rien à se reprocher. Alors qu'en réalité, l'un, l'autre, c'est un truc qui s'auto-alimente. Il s'agit du coup d'inverser, je me rappelle bien de tes mouvements, d'ailleurs j'ai retrouvé dans mes notes, de spirales. Il s'agit de changer la logique de la spirale du conflit qui s'auto-alimente, où on devient de plus en plus... Et ça, dans nos conflits, moi en tant qu'avocate aussi, en matière familiale, je ne vois que ça. C'est-à-dire que le truc s'auto-alimente, la radicalité va s'entretenir, s'auto-alimenter, voilà, c'est exacerbé.

  • Speaker #0

    Et c'est tout à fait ça, c'est-à-dire que tout ce qu'on vient de dire, ou de commencer à dire... sur ce à quoi on s'intéresse en tant que médiateur transformatif et la façon dont on procède, découle de cette approche, ce regard du conflit que tu viens de résumer, c'est-à-dire de regarder le conflit comme cette crise d'interaction humaine qui a des effets sur les personnes qui sont aux prises avec ce conflit et ces effets qu'on résume. de la façon suivante, en disant que finalement le conflit vient déstabiliser la personne dans ce qu'elle est, c'est-à-dire qu'elle devient confuse, elle est submergée par des émotions généralement désagréables, qui viennent, ces émotions incidentes venant, comment dire... réduire ses capacités cognitives, en fait, et sa capacité à regarder les choses d'une façon lucide, mesurée, calmement, et sa capacité également à exprimer clairement ce qui est important pour elle. Et la deuxième chose qui est consécutive à cette déstabilisation, c'est... la perte de sa capacité naturelle d'ouverture à l'autre. Et donc ce qu'on appelle, les américains disent self-absorption, mais nous en français on a résumé ça par fermeture, c'est-à-dire qu'étant déstabilisé, Je me replie petit à petit sur moi-même. J'ai du mal à considérer l'autre simplement dans sa différence, pour ce qu'il est dans sa différence. Et je vais soit l'éviter, soit l'attaquer, le dénigrer, le diaboliser.

  • Speaker #1

    Ça c'est tellement courant.

  • Speaker #0

    Et ces deux choses-là en plus, c'est là que tu l'as évoqué plusieurs fois, ce cercle vicieux ou cette spirale, c'est-à-dire que ces deux choses-là se renforcent l'une l'autre. C'est-à-dire que le plus je suis déstabilisé, le plus je me ferme à toi. et le plus je me ferme à toi, le plus ça te déstabilise à ton tour et renforce aussi ta dynamique de fermeture à mon égard et ça boucle aussi en interne à chacun c'est à dire que le plus je me comporte on va dire, de façon consécutive à ce repli sur moi, c'est-à-dire que je t'évite ou que je t'attaque, le plus ça me déstabilise moi-même, dans le sens où je ne suis pas fier, ça peut même me répugner si je prends trois secondes de recul, la façon dont je suis en train de me comporter vis-à-vis de toi, quand bien même je suis en train de te détester et de te diaboliser.

  • Speaker #1

    C'est peut-être pour ça que je tiens à ce que cette approche, qu'elle soit... elle soit diffusée, connue, parce qu'on a cette tendance, en tout cas, quand on a l'impression qu'on découvre les gens, dans les phrases qu'on entend, on découvre les gens au moment des séparations, typiquement. Oui et non, parce que c'est le moment de la crise, donc la crise révèle une facette de soi, mais qui n'est... Est-ce que c'est vraiment soi ? Tu vois ?

  • Speaker #0

    L'idée c'est que ça ne fait plus tellement soi en fait

  • Speaker #1

    On n'est plus soi-même Et je trouve qu'on gagnerait aussi en pédagogie avec nos clients Si on arrivait à leur expliquer que ça Parce que nous quand on les récupère Ils sont en crise totale Donc voilà Ça participe des ressources que j'essaie d'exploiter, mais pour leur faire faire ce travail sur l'autre qui n'est peut-être pas le diable, il y a tout un travail de remise en confiance, d'apporter un peu de repères dans ce moment de grande perte de repères, qu'il s'agisse d'une crise qui touche la vie professionnelle ou d'une crise familiale.

  • Speaker #0

    Tout à fait. D'ailleurs, on parlait de médiation, mais on fait aussi de l'accompagnement individuel de personnes qui sont en situation de conflit. Ça se rapproche peut-être de ce que pourrait faire un avocat qui est sensibilisé à la médiation, ou qui est même médiateur, qui est plutôt que de prendre en charge, par délégation on va dire, les manifestations de la fermeture à l'autre, c'est-à-dire une forme de défense, d'attaque, etc. par délégation de son client. plutôt de l'aider à prendre du recul, de reprendre le pouvoir sur lui-même pour réfléchir à des façons peut-être alternatives de gérer la situation.

  • Speaker #1

    Là, il y aurait un gros boulot à faire dans les écoles d'avocats, en fait. Parce que nous, on appuie au contraire. L'avocat qui reçoit la personne, s'il appuie. pas d'autres repères que ceux de base du contentieux, on va presque le conforter dans sa certitude que l'autre est le diable, qu'il est ceci, qu'il est cela, on va lui donner de l'empathie. Donc on ne va pas l'aider à sortir de sa croyance du moment.

  • Speaker #0

    Alors pour fréquenter pas mal d'avocats formés à la médiation,

  • Speaker #1

    ou avocats médiateurs,

  • Speaker #0

    je constate qu'effectivement, ça modifie souvent en profondeur leur façon d'exercer leur métier d'avocat.

  • Speaker #1

    Bien sûr, on ne fait plus le même premier entretien, ça je te confirme. Ah bah oui, du jour où tu commences à avoir un vrai changement de paradigme, ton premier entretien avec ton client n'est plus du tout le même. Ce n'est pas que tes intentions ne sont pas les mêmes, mais tu as une approche qui est beaucoup plus riche et qui est plus utile surtout. Qui est plus utile, parce que tu n'apportes pas moins de soutien, mais tu fais un accompagnement différent. Je m'éloigne un peu là.

  • Speaker #0

    Tu as dit un truc tout à l'heure sur lequel je ne suis pas revenu, qui est le fait de, je ne sais pas comment tu as dit ça, de dédramatiser le conflit. de le présenter ou de l'aborder comme quelque chose qui fait partie du quotidien.

  • Speaker #1

    C'est même un troisième personnage. J'aime bien cette idée, je l'ai retrouvée dans le livre de Gary Friedman, qui, je pense, y a évoqué encore quelqu'un, un autre formateur, qui, en séance, jouait la personne un peu diabolique qui murmure à l'oreille de l'un en disant Mais non, t'es en train de te faire arnaquer ! Tu vois, comme cette image qu'on voit des fois dans les BD, avec une bulle de quelqu'un qui... qui te suggèrent des intentions hyper négatives. C'est ça, le côté diabolique. Je ne sais pas si on l'a dans Astérix ou je ne sais pas dans quel BD, mais c'est vraiment ça. Parce qu'on est en permanence dans ce mouvement d'avoir des pensées où tu as envie d'en découdre et quelqu'un presque te les suggère. Donc le conflit est presque une force autonome.

  • Speaker #0

    Oui, et alors ce qui est intéressant, c'est que justement, je trouve que finalement c'est quelque chose qui est assez familier Pour les gens, l'idée c'est d'élargir un petit peu la vision qu'on a du conflit, c'est-à-dire que nous on est très comme ça en transformatif, c'est-à-dire que ce fameux cercle vicieux qu'on a décrit, de déstabilisation et de fermeture progressive qui s'auto-entretiennent, c'est quelque chose qu'on expérimente quasi quotidiennement dans nos vies, avec des niveaux d'intensité divers. Dès que finalement on interagit avec l'autre et qu'on est confronté à sa différence de sensibilité, de point de vue, d'opinion, etc. On peut voir se mettre en route. Ce phénomène où on est un peu déstabilisé par ce que dit l'autre, parce qu'on le comprend mal, qu'il y a un malentendu, qu'on y décèle un procès d'intention ou une attaque, ou que tout simplement on trouve qu'il est complètement à côté de la plaque par rapport à un sujet de société, etc. Et on voit se mettre en route cette mécanique. Et ce qui est très... Je voudrais être assez optimiste là-dessus, c'est-à-dire que ça nourrit chez nous la conviction qu'étant familiarisé à ce phénomène, on est également entraîné pour le transformer. Et donc cette fameuse inversion de la spirale que tu as évoquée tout à l'heure, on le fait en permanence, c'est-à-dire qu'on se réajuste dans une interaction avec l'autre quand on sent que c'est en train de déraper du côté de ce cercle vicieux. et on prend une décision justement, on reprend du pouvoir sur soi-même. par rapport à ce début d'agacement, etc. On s'est dit, non, quand même, ce serait trop bête de s'embrouiller pour cette histoire, etc. Et on fait un petit effort, on demande une clarification, on reprend un mot dont on a compris qu'il était peut-être perturbant pour l'autre, etc. Et donc, en fait, on sait faire ça, on le pratique quotidiennement.

  • Speaker #1

    Alors oui, on le pratique d'autant plus qu'on aura un entourage. pour le coup, bienveillants, qui vous confortent dans cette dynamique-là, ce qui n'est pas du tout courant. Alors, moi, j'ai un conseil là-dessus. Plus on s'entoure de médiateurs, plus on a des gens quand même qui sont habitués à faire cette balance et à ne pas penser en binaire. Et ce n'est pas fréquent. Tu vois, surtout même dans tes relations en général, les amis, ils sont pros, quoi. Ils sont pros, ils vont dans ton sens. C'est pas donner à tout le monde de dire, oui, mais attends, ça, c'est ta vision. Peut-être que l'autre, il a une autre vision. Tu vois, c'est quand même quelque chose. Moi, je vois que je suis hyper aussi influencée par les paroles bienveillantes de certains qui peuvent vraiment... agir, me faire redescendre, ouvrir quelque chose, une forme d'acceptation. Pour le coup, c'est plutôt vers des personnes comme ça que je vais aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Mais tu vois, c'est intéressant parce que dans ce que tu dis, effectivement, il y a l'idée d'avoir une forme de culture du dialogue ou une forme de vigilance sur la qualité des interactions qu'on a avec les uns et les autres.

  • Speaker #1

    C'est pas que ça, c'est pas que la culture du dialogue, c'est plutôt l'acceptation. de l'autre dans sa vraie différence. Tout à fait. Et tu vois, parce que le dialogue, sur le papier, on a tous la culture du dialogue, parce qu'on va te dire je suis pro-guerré Mais c'est plutôt, est-ce que tu l'acceptes, même dans sa bizarrerie, tu vois, dans sa façon d'être qui heurte des fois des choses profondes. C'est pas du tout évident, surtout en ce moment. L'ouverture, c'est compliqué de la cultiver. Quand tu vois des prises de position qui peuvent heurter des choses...

  • Speaker #0

    Bien sûr, pour des sujets qui sont graves.

  • Speaker #1

    Des sujets graves, là, on se fait en plein dedans.

  • Speaker #0

    Mais si on revient à des situations beaucoup plus anodines du quotidien, moi, j'ai pour coutume de dire que les personnes avec lesquelles on s'engage le plus souvent dans cette spirale négative de l'interaction conflictuelle, c'est les personnes avec lesquelles on est le plus proche et avec lesquelles on interagit le plus fréquemment. C'est-à-dire que si tu passes 24 heures en tête-à-tête avec quelqu'un, avec ton conjoint, avec un enfant de ta famille, etc., et que tu parles de choses, ou tu es amené à donner des avis, etc., tu as toujours potentiellement cette mécanique qui se met en route. Et tu as toujours, quel que soit le background de chacune des personnes, sa formation, sa sensibilité justement à... la nécessité ou l'utilité d'être ouvert à l'autre, y compris dans sa bizarrerie, ou dans ses positions, ses points de vue qui sont différents. Tu as toujours ces mécanismes de rappel qui se mettent en route. Parce que, ok, on a envie d'être soi-même et de s'affirmer dans sa différence, mais en même temps, on a consciemment ou inconsciemment l'envie, le besoin d'interagir avec l'autre. Et c'est ces deux choses-là qui se nourrissent d'ailleurs. on devient soi-même ou on est vraiment soi-même qu'en interaction avec les autres parce que c'est ça qui nous amène à affirmer notre identité c'est ça qui nous amène à l'enrichir aussi par influence successive, par comparaison, etc. Et donc ce qui est super important pour nous en médiation transformative c'est d'être profondément convaincu que intrinsèquement, les êtres humains, y compris quand ils sont partis assez loin dans cette spirale négative, ont à la fois la motivation et la capacité d'inverser la tendance. Parce qu'ils ont ce besoin d'une part de clarifier ce qui est important pour eux et d'affirmer leur singularité, et d'autre part de rester connecté à l'autre.

  • Speaker #1

    Oui, quand il y a une volonté, voilà, il n'y a pas toujours de volonté.

  • Speaker #0

    Pas toujours. Mais c'est vrai que quand même très très souvent...

  • Speaker #1

    Une volonté de rester en lien, tu vois.

  • Speaker #0

    Bien sûr, tu peux ne pas avoir la volonté de rester en lien, et il peut même être salvateur pour tout le monde de rompre la relation. Mais ce que je veux dire, c'est qu'au quotidien, on passe son temps à partir dans des dynamiques conflictuelles. et à les inverser, à les transformer, y compris quand on se fâche assez fort, et que derrière, sur l'initiative de l'un ou l'autre, on rentre dans un processus de clarification et de réconciliation. On se dit, tiens, il faudrait qu'on se parle du truc, etc.

  • Speaker #1

    Comment ça se manifeste, cette approche transformative ? On a parlé de la réflexion sur le conflit. Moi, ce que j'avais bien retenu, c'est la non-directivité, le fait que c'est très responsabilisant pour les parties qui sont seules maîtres à bord. Et ça va jusqu'à leur dire qu'en gros, elles décident presque des règles du jeu de ce moment. Ce que j'ai vraiment, et d'ailleurs, j'ai relu le petit retour que tu avais fait sur... une séance de formation là au CNAM, qui était complètement raptée de mon côté, mais que tu avais analysée, tu avais eu la gentillesse de me faire des retours, c'est la posture basse. Alors ça, c'est vraiment, je trouve, hyper important et je trouve qu'on a besoin de faire connaître quand même cette... Cette approche-là, le fait qu'il y a vraiment une volonté d'humilité, de rester en soutien, d'être non-sachant, je t'avais un peu interrogé au départ là-dessus, c'est quand même aussi un des écueils assez fréquemment rencontrés en médiation, je trouve. Cette problématique de posture, on n'en se met pas au même niveau que les personnes. Et c'est aussi, je pense, peut-être une des clés des échecs possibles de médiation, non ? Non.

  • Speaker #0

    Après, tout dépend de ce qu'on appelle médiation, tout dépend de ce qu'on poursuit comme objectif. Mais effectivement, nous, comme justement notre idée, c'est d'accompagner et de soutenir ce phénomène naturel, j'insiste sur naturel, de transformation de l'interaction. en quelque chose de plus positif et de constructif. Il est hyper essentiel, et que du coup, ce qu'on attend, ce qu'on observe, c'est essentiellement ces fameux mouvements d'empowerment que tu as évoqués au début, c'est-à-dire ces mouvements de reprise de pouvoir sur soi-même que peuvent opérer chacun des participants. On va se garder absolument. de prendre des décisions à leur place. On considère que c'est en prenant des décisions, même microscopiques, que les acteurs, petit à petit, reprennent du poil de la bête, si j'ose dire. On dit que c'est en forgeant qu'on devient forgeron, c'est en décidant qu'on retrouve sa capacité à prendre des décisions et qu'on reprend le contrôle. Et donc on va s'interdire absolument de se mettre en surplomb par rapport aux participants. et de les devancer, ça c'est très important, c'est qu'on dit en transformative, on reste toujours dans le sillage immédiat des personnes et de leur conversation, mais jamais on ne les précède, c'est-à-dire qu'on n'a pas de projet pour eux. Et encore moins de choses à leur imposer. Et donc tu as évoqué par exemple les règles.

  • Speaker #1

    De l'échange, donc de la conversation.

  • Speaker #0

    De l'échange, de la conversation. C'est vrai que souvent en médiation, il est de coutume d'entendre que les participants ont la main sur le contenu de leur échange et que le médiateur contrôle le process. Nous, on ne contrôle pas le process. On considère que contrôler le process, c'est déjà prendre des décisions à la place des participants. Et donc, finalement, sans le dire... considérer qu'ils ne sont pas capables de le faire, et surtout les empêcher de se remettre à le faire. Et donc, d'une part, la conversation, on va considérer, on dit qu'elle est... qu'elle est libre, qu'elle est ouverte et qu'elle engendre sa propre structure, c'est-à-dire qu'elle n'est pas supposée suivre un processus prévu à l'avance, c'est les participants qui l'inventent, comme dans la vraie vie. Parce qu'encore une fois, on vient juste donner un coup de pouce à quelque chose qui est supposé se passer en autonomie dans la vraie vie. Et qu'il se passe exactement, qu'il n'arrive plus à se passer à ce moment particulier, sur tel sujet particulier, etc. Mais en plus, effectivement, on se garde absolument de leur donner des règles. C'est-à-dire qu'on considère que de dire aux personnes... Voilà, comment ça doit se passer, il faut s'écouter jusqu'au bout, et puis il faut se respecter, employer un langage, etc.

  • Speaker #1

    C'est impotentilisant.

  • Speaker #0

    C'est très impotentilisant, c'est une approche surplombante, paternaliste, et donc c'est une manière de leur dire, vous n'êtes pas capable de vous contrôler vous-même, donc on va le faire à votre place. Je caricature un peu, hein ?

  • Speaker #1

    Non, mais je suis pas tout à fait d'accord.

  • Speaker #0

    Et par ailleurs, en plus, qui on est nous pour décréter comment ces personnes-là ont envie de se parler ? Quel langage elles s'autorisent à employer ?

  • Speaker #1

    Après tout, s'ils ont envie de s'interrompre. Et parfois, c'est nécessaire. Ce n'est pas possible, c'est insupportable d'entendre. Donc voilà, il faut que ça sorte. C'est aussi le côté naturel du process. S'il y a des choses à purger, tu ne peux pas juste réguler l'échange comme un match de tennis où tu vas compter les points et tu vas siffler la fin de la récré. Ce n'est pas possible.

  • Speaker #0

    Et tu vois, par exemple, pour la question du respect, Qu'est-ce que ça veut dire le respect ? J'ai mon filtre pour savoir ce que c'est que le respect, mais eux, c'est peut-être pas le même. Et par ailleurs, c'est un très bon sujet de conversation qui est souvent au cœur de leurs problèmes d'interaction. Et d'ailleurs, quand on pose la question, parce que c'est comme ça qu'on procède dans la... Les remarques introductives d'une séance de médiation, quand on leur demande s'ils éprouvent le besoin de se donner des règles sur la façon dont cette conversation pourrait se dérouler.

  • Speaker #1

    Oui, c'est plus suggestif du coup, la façon dont tu poses le cadre.

  • Speaker #0

    On leur offre la possibilité de se donner des règles. Alors quelquefois, ils vont te dire, non, je ne vois pas, c'est quoi le problème ? Oui. Donc très bien, et là on va leur dire, écoutez, si effectivement dans le cours de la conversation, vous avez besoin de revenir là-dessus pour que ce soit confortable pour vous, vous n'hésitez pas à le faire. Et puis quelquefois, ils embrayent sur cette question des règles en disant, moi j'aimerais qu'ils me parlent de façon plus respectueuse, ou qu'ils ne m'insultent pas, ou qu'ils m'écoutent un peu parce que jamais ils m'écoutent. Et ça c'est de l'or, parce que c'est une entrée de plein pied dans la conversation à propos de leur relation. qu'est-ce que l'un ou l'autre estime comme étant respectueux ou pas, quel est le besoin de l'un ou de l'autre en termes d'écoute par la personne d'en face, etc. Et du coup, ça démarre la conversation.

  • Speaker #1

    Ça ouvre des portes de conversation. Je me demandais s'il n'y avait pas un moindre engagement du médiateur dans cette approche-là. Hier soir, en posant la question, parce qu'après tout, ce n'est pas dans ce que j'ai lu, ce n'est pas le sujet. Le médiateur, son rapport à ses émotions, sa connaissance de soi, sa subjectivité. Autant en médiation humaniste, c'est vraiment le cœur du sujet. C'est un chemin de connaissance de soi, on va dire la porte d'entrée vers la médiation humaniste. Autant je lis pas grand chose sur le sujet sur la personne du médiateur mais finalement à t'écouter je me dis il faut vachement de confiance pour y aller avec le minimum en disant allons-y quoi, c'est un peu vous qui fixez les règles faut quand même avoir une sacrée foi donc c'est du coup nécessairement la nécessité d'ancrer dans quelque chose de bien poser quand même Dans ce sens là ça converge pas mal avec l'approche humaniste

  • Speaker #0

    Et l'engagement, j'ai envie de dire, il est total en fait. C'est-à-dire que...

  • Speaker #1

    Tu ne peux pas faire autrement en fait.

  • Speaker #0

    D'abord, tu as évoqué plusieurs choses. La première, c'est effectivement une forme de confiance, de conviction dans ces mécanismes. C'est-à-dire que tout ce qu'on a dit précédemment sur la capacité des gens à faire par eux-mêmes, sur cette motivation et cette capacité inhérente à s'affirmer tout en... en restant ouvert à l'autre et à sa différence, il faut y croire profondément. pour s'interdire, y compris quand ça chauffe fort, de reprendre le contrôle et d'inviter au calme, et de revenir un petit peu directif.

  • Speaker #1

    Et tu as une crainte, toi, par rapport à ça ? Parce que c'est quand même un des sujets. Plus j'avance dans le monde de la médiation, plus je vois que c'est une peur assez largement répandue que de se confronter à la violence en médiation. Alors la violence verbale, le plus souvent, mais c'est quand même un de nos gros enjeux, puisqu'on va au cœur du conflit. Donc là, ça sera les questions d'après.

  • Speaker #0

    Alors effectivement, c'est un vertige.

  • Speaker #1

    Tu te mets au bord de ça, donc toi-même, ça quand même...

  • Speaker #0

    Alors effectivement, ça te percute. Et effectivement, ça fait partie des sujets qu'on travaille beaucoup quand on fait de la formation à l'approche transformative. C'est cette capacité à se confronter à une conflictualité intense, à l'expression intense des émotions et potentiellement à quelque chose qui peut se rapprocher de la violence, de s'interdire une forme de régulation trop directive. et de maîtriser également les échos, les impacts que ça peut avoir sur soi-même.

  • Speaker #1

    Alors comment tu te prépares, toi, pour une séance de médiation transformative ?

  • Speaker #0

    Écoute, je ne me prépare pas plus que ça. Je m'offre, on va dire, 5 minutes de calme, si je peux, avant le démarrage. Ça peut paraître paradoxal, mais en fait, comme... On n'est pas vraiment entré dans le détail de ce qu'on faisait, ce qu'on ne faisait pas, etc. Mais pour revenir à ce que tu disais précédemment sur l'engagement, l'engagement je disais qu'il est plein et entier parce que, en fait, comme on ne précède pas les participants qu'on n'a pas de projet pour eux, la contrepartie c'est qu'on est pleinement présent dans l'instant à ce qu'ils expriment, ce qu'ils donnent à voir.

  • Speaker #1

    Tu poses un limite de temps toi dans tes réunions par exemple ?

  • Speaker #0

    Alors on se donne un créneau en général, oui, pour que tout le monde ait une bonne gestion de son agenda.

  • Speaker #1

    Mais de quel ordre ? Parce que c'est pareil, ça aussi, t'as des écoles différentes. T'en as qui vont te dire, moi, ça peut durer trois heures. 4 heures, 5 heures ?

  • Speaker #0

    Écoute, quand c'est de l'interpersonnel, que c'est deux personnes, ou quand c'est éventuellement trois, je fais rarement plus de deux heures. En général, je fixe un créneau de deux heures. Enfin, on fixe ensemble un créneau de deux heures et ils ont toujours la possibilité de s'arrêter plus tôt.

  • Speaker #1

    Ah oui, c'est plus tôt de s'arrêter ?

  • Speaker #0

    Oui, parce que prolonger, encore faut-il que les gens soient disponibles, y compris moi-même. Oui, bien sûr. Et quand on arrive au... Au bout du créneau, c'est toujours eux qui décident ce qu'ils veulent faire après. Merci.

  • Speaker #1

    Alors justement, dans quel domaine en particulier toi tu interviens en médiation ? C'est vrai que je ne sais pas comment c'est par là, tu vois j'ai fait de la non-directivité.

  • Speaker #0

    Il faudra qu'on revienne après je pense à l'histoire de la présence, de l'engagement, de la préparation, etc. Écoute, moi comme mon terrain de jeu initial on va dire c'était l'entreprise, ou les organisations on va dire, j'ai commencé à faire de la médiation dans ce type de contexte, donc de la médiation sur le lieu de travail on va dire. Et puis en fait, il y a maintenant 5-6 ans, j'ai eu l'opportunité de glisser vers des contextes familiaux. D'abord sur des sujets de succession ou d'anticipation de succession. Donc voilà, des familles, des fratries et leurs parents, avec ou sans leurs parents on va dire. C'est un univers qui me plaît bien parce que c'est effectivement très intime, très intense. Justement, je pense que quand on est médiateur transformatif, pour revenir à un point que tu abordais tout à l'heure, Il y a un moment donné où finalement on se met, alors il ne faudrait pas que ce soit mal perçu, mais à aimer ça en fait, l'expression intense des émotions. C'est-à-dire que ça fait plus peur, on le considère comme étant de l'or, un matériau riche, c'est de la vérité, c'est des choses qui ont besoin de sortir et qui ont besoin d'être mises en valeur, etc.

  • Speaker #1

    C'est l'authentique.

  • Speaker #0

    Voilà, donc c'est très authentique.

  • Speaker #1

    On enlève les masques.

  • Speaker #0

    Dans le familial, on a vraiment cette dimension-là.

  • Speaker #1

    Une famille de plusieurs générations, c'est la particularité quand même.

  • Speaker #0

    Plusieurs générations ou bien parfois simplement au sein d'une fratrie.

  • Speaker #1

    Dans des contextes de succession patrimoniale, je crois.

  • Speaker #0

    Voilà, prise en charge de la dépendance d'un parent, des décisions difficiles à prendre entre frères et sœurs qui se parlent plus ou moins ou plus ou moins bien depuis un certain temps, etc. sur la dépendance de leurs parents, mais sur aussi la façon de gérer telle ou telle partie de patrimoine commun, une indivision, que sais-je.

  • Speaker #1

    Il y a un tel besoin dans ce domaine.

  • Speaker #0

    Voilà, toutes ces choses-là. Voilà, et puis du coup, je me suis mis aussi à accompagner des couples, soit... Des couples qui ne sont pas dans une dynamique de séparation, mais qui identifient qu'ils ont du mal à aborder des sujets difficiles et que ça peut les aider d'être soutenus ponctuellement comme ça dans des efforts de dialogue. Ou bien au contraire, des couples divorcés, séparés, qui mesurent l'intérêt de retrouver le chemin du dialogue pour... on va dire vivre cette relation qui de toute façon continuera, en particulier quand ils ont des enfants, de la vivre sereinement, justement, en sortant de la déstabilisation et de la fermeture l'un à l'autre, voilà, pour de nouveau peut-être pas forcément se fréquenter de manière étroite, mais au moins se croiser de façon sereine et constructive.

  • Speaker #1

    Je t'ai interrompu tout à l'heure, justement, sur... Le questionnement personnel, la préparation, tu m'as dit que tu voulais revenir là-dessus.

  • Speaker #0

    Oui, tu parlais de l'engagement du médiateur transformatif et aussi de sa... de sa tolérance à la violence qui peut s'exprimer en médiation.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est la peur de la violence qui m'interpelle ? Je le vois quand même assez fréquemment.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est un vertige pour beaucoup de médiateurs débutants. Et c'est aussi justement une des raisons pour lesquelles on peut revenir, même si on n'en avait pas l'intention, à des réflexes très directifs. Oui, c'est un vrai épreuve. En transformative, on gère ça plutôt bien, puisque l'intervention principale, le type d'intervention majeure qu'on utilise en médiation transformative, c'est ce qu'on appelle le reflet. et donc comme son nom l'indique ça consiste à refléter fidèlement ce que les personnes expriment, chacune d'entre elles au moment où elles l'expriment et quand je dis fidèlement c'est en employant le même champ lexical, les mêmes mots, les mêmes expressions clés, signifiantes celles qui sont chargées justement de déstabilisation et de fermeture donc dès qu'il y a de l'émotion forte, dès qu'il y a des procès d'intention Et dès qu'il y a des mots chargés, on les reprend. Et on reprend également l'énergie avec laquelle ils sont exprimés.

  • Speaker #1

    Je me souviens du reflet joufflu, donc.

  • Speaker #0

    Notamment on dit joufflu ou charnu, c'est-à-dire que...

  • Speaker #1

    C'est riche comme reflet.

  • Speaker #0

    Voilà, c'est pas juste un petit miroir qui reprend les trois derniers mots de la personne. Ça,

  • Speaker #1

    c'est la version médiation humaniste où effectivement, tu as une phrase clé. Je sens la tristesse, je sens la colère, etc.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Voilà. Tu es dans aussi quelque chose d'assez pur et assez court.

  • Speaker #0

    Oui, alors là, quand on offre un reflet, on l'offre assez complet. Tu disais joue plus effectivement, c'est un mot qui me vient de mon mentor John Peter Weldon en la matière. C'est-à-dire qu'on lui donne, on donne à voir, et c'est là que je voulais en venir, on donne à voir à la personne qui vient de s'exprimer. de manière brute et la plus complète possible ce qu'elle vient d'envoyer.

  • Speaker #1

    C'est la même intention du coup que le miroir.

  • Speaker #0

    Pour qu'elle puisse se rendre compte, parce que comme on a dit, la personne elle est déstabilisée, elle est confuse, elle manque de lucidité puisqu'elle est aux prises avec ce conflit et ses effets incapacitants. elle ne se rend pas forcément compte de ce qu'elle envoie. La première fonction de ce reflet, c'est de lui donner à voir ce qu'elle a envoyé, pour qu'elle puisse décider, on en revient à l'idée de décider, si oui ou non c'était ça qu'elle voulait envoyer. Et donc décider si elle veut... le réaffirmer, le compléter, le corriger, le nuancer. Si elle décide de le nuancer, notamment, on va considérer qu'en plus d'être un mouvement d'empowerment, c'est-à-dire une décision de modification de ce qu'elle a voulu exprimer, c'est un mouvement dit de reconnaissance, c'est-à-dire un mouvement d'ouverture ou d'attention à l'autre, parce que si je reprends un mot dont je me suis rendu compte qu'il était trop violent à ton égard, C'est une manière de prendre soin de toi et de me réouvrir à toi.

  • Speaker #1

    Donc tu ne vas pas dans de la reformulation ?

  • Speaker #0

    Ah non, il n'y a pas de partage, il n'y a pas de recherche de valeur ajoutée.

  • Speaker #1

    Je suis pas à l'aise avec la reformulation là-dessus. Je trouve que toujours cet aspect perroquet me dérange. Et puis en plus tu vas t'être presque dans l'interprétation si tu reformules c'est pas les bons termes, bah non j'ai pas dit ça j'ai dit ça, ça veut pas dire la même chose

  • Speaker #0

    Alors c'est marrant parce que le fait que ce soit très fidèle justement quand on forme des médiateurs transformatifs ils ont peur ils peuvent avoir peur que qu'il soit pris pour des perroquets. Parce que comme on va reprendre les mêmes mots, les mêmes expressions clés, alors on ne va pas redire les choses forcément dans le même ordre, mais en fait cet effet perroquet, il peut être perçu éventuellement par un observateur externe qui regarderait une vidéo ou quoi, mais pour les personnes qui sont aux prises avec le conflit, en fait elles sont très contentes d'entendre ce qu'elles ont dit, et d'ailleurs si elles ne retrouvent pas ce qu'elles ont dit, soit parce qu'on était à côté de la plaque, soit parce qu'elles ne se rendaient pas compte de ce qu'elles disaient, elles vont encore une fois nous corriger, et on est très content d'être corrigés parce que c'est un mouvement d'empowerment de leur part, elles trouvent la ressource et la force et elles prennent la décision de te corriger toi le médiateur, qui n'est pas une entité surplombante, bref elles ont ce mouvement là. Voilà, elles ne se rendent pas compte qu'on fait le perroquet, puisqu'elles...

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas un perroquet, là, je corrige, ce n'était pas mon propos de dire... C'est par rapport à de la reformulation basique telle que tu peux la prendre en approche collaborative, ça fait partie du truc, reformuler, et la reformulation même, elle est croisée, c'est-à-dire qu'on travaille à quatre, les deux avocats, les deux clients, et l'avocat de l'autre va reformuler ce qui va être dit. Et c'est dans l'approche... un peu puriste, systématique. Donc tu peux avoir des entretiens qui vont durer hyper longtemps avec un fort aspect reformulation, mais qui est neutre. Et bon, moi, la petite critique que je fais, c'est que des retours de gens qui l'ont vécu ont eu cet aspect perroquet un peu agaçant. et qui en plus leur a fait perdre de l'attention. Tu vois, là, de ce que j'ai compris du reflet joufflu, donc c'est qu'il y a... Oui, c'est vraiment la miroir. Tu mimes même avec le geste, la façon dont les choses... Il y a presque un truc corporel aussi. Tu vas bouger en disant, toi, pour toi, c'est comme ci, c'est comme ça. Tu vois, tu vas restreindre les émotions. Et quelque part, on a besoin de ça quand on est en médiation, d'être entendu. et peut-être aussi d'être entendus dans nos émotions, dans l'indignation que tu peux exprimer à un instant T. Donc je crois que c'est plutôt...

  • Speaker #0

    Principalement...

  • Speaker #1

    C'est appétant pour la personne qui le vit.

  • Speaker #0

    Et ça va nous permettre de revenir sur l'idée de la violence, entre guillemets, ou en tout cas au moins de la violence verbale. C'est-à-dire que... Bon, effectivement, le reflet n'est pas systématique, mais on l'offre, on le produit quand on arrive à se glisser dans la conversation, bien sûr, y compris d'ailleurs de manière un peu volontariste. Quelquefois, il faut se faire un petit peu de la place sans brusquer les gens. On l'offre en priorité quand on a été soi-même percuté, impacté dans son empathie qu'on a quand on écoute chacun des participants. par justement les manifestations de cette déstabilisation et de fermeture. C'est-à-dire qu'on va offrir des reflets en priorité quand les gens expriment des émotions fortes, expriment leur désarroi, expriment leur confusion, ou en tout cas la montrent, et également quand elles expriment leur fermeture à l'autre, c'est-à-dire principalement, puisqu'on va parler de violence, leur hostilité, leur procès d'intention, leurs attaques, etc. Et on va aller justement essentiellement là-dessus. On ne va pas refléter des trucs qui ne sont pas chargés.

  • Speaker #1

    C'est l'expression de besoin, l'émotion. En même temps, c'est que tu as touché à des choses fortes. Derrière, il y a des valeurs, etc.

  • Speaker #0

    Exactement. Justement dans cette idée de leur donner à voir ce qu'elles ont exprimé, et en même temps de donner aussi à voir à l'autre ce que la personne qu'on reflète vient d'essayer d'exprimer, on leur offre la possibilité de prendre conscience de ce qui est exprimé et d'en faire quelque chose, de faire des choix. Et donc pour en revenir à quand c'est violent, Si les gens deviennent effectivement très agressifs, très violents, voire même se lèvent de leur chaise en esquissant un mouvement qui pourrait dégénérer vers une vraie violence physique, on ne va pas leur dire calmez-vous, ça ne se fait pas On va leur donner en reflet la même violence. Et en fait, ça n'est pas directif, ça n'est pas censeur, mais en revanche, ça a un effet de régulation qui est extrêmement puissant parce que la personne est confrontée de manière brute à ce qu'elle vient d'envoyer. Et là, elle peut se dire, peut-être que je suis un peu à côté de la plaque, que ce n'est pas exactement ça ou que je ne suis pas dans la bonne mesure. Et donc ça peut concourir à cette fameuse reprise de contrôle sur elle-même et cet ajustement à l'autre dans leur expression.

  • Speaker #1

    Je me dis qu'on a tous besoin de reflets joufflus, mais c'est vrai, puisqu'on n'a pas forcément conscience de ce qu'on envoie.

  • Speaker #0

    Exactement. Et le plus tu es embringué dans cette spirale négative, le moins tu as conscience de ce que tu envoies. et donc c'est vraiment le truc le truc majeur un jour ma fille qui avait

  • Speaker #1

    4-5 ans je lui fais gros yeux, j'étais hyper fâchée contre elle elle me dit mais tu me fais peur t'as l'air d'un loup ça me cassait le feedback d'un gamin ça me fait bien alors là on va pas le dire mais ça a un peu la même fonction

  • Speaker #0

    elle te renvoie à ce moment là ma posture d'adulte etc il y avait exactement et du coup si tu veux pour faire ça ce qui est en général ce qu'on va faire principalement quand vraiment les gens sont aux prises avec ces effets déstabilisants du conflit pour faire ça t'as pas besoin d'avoir anticipé quoi que ce soit ou de préparer à quoi que ce soit la seule préparation que tu dois avoir C'est celle dont tu as besoin, et ça dépend peut-être des gens, pour être pleinement disponible à ce qui survient dans l'instant T. Et donc pour pouvoir donner cette empathie, cette écoute pleine et entière, cette pleine présence à chacun de tes participants, à chaque instant de la conversation, sans faire des plans sur la comète de ce qu'on pourrait faire après, et sans se prendre la tête non plus sur ce qui s'est passé avant. Ce qui est important, c'est ce qui se passe dans l'instant. Tu restes dans le sillage immédiat et tu leur donnes à voir ce que tu as ressenti finalement dans ton empathie comme étant important pour eux dans cette conversation qui se déroule sous tes yeux.

  • Speaker #1

    Donc je te rejoins, la disponibilité qui est nécessaire, ça me paraît compliqué de l'avoir en étant seule en plus parce que tu n'es pas en commédiation là, sur une période plus longue que deux heures. Parce que déjà physiquement on est... On n'est pas fait pour ça, avoir une attention aussi importante. Ça me paraît...

  • Speaker #0

    J'avais pas fini d'être répondu à ta question tout à l'heure. Le plus d'heures, c'est effectivement mon max pour l'interpersonnel. En revanche, quand on est dans du collectif qui a plus de monde, moi, je fonctionne plutôt par demi-journée, 3h, 3h et demi.

  • Speaker #1

    Bien sûr, bien sûr.

  • Speaker #0

    Et quand ils sont nombreux, c'est vrai que d'être en commédiation peut être effectivement utile.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu as réfléchi à ce que cela t'apportait à titre personnel ?

  • Speaker #0

    Ah bah oui oui, et c'est très lié à ce qu'on vient d'évoquer, c'est-à-dire que pour bien faire ce job-là, je dirais que finalement les techniques, les méthodes, les quelques interventions qu'on n'a pas forcément détaillées mais on est revenu sur le reflet, ce qui est le principal, c'est une chose, c'est important, c'est utile, mais ce qui est le plus important c'est son savoir-être, c'est la gestion de soi-même. C'est-à-dire que d'ailleurs idéalement... c'est un peu notre graal, c'est de dire, mais moi je suis assez convaincu de ça, on pourrait ne rien faire et ne rien dire. C'est-à-dire que dès lors que, je ne pense pas qu'on aura forcément le temps de revenir là-dessus, mais que les conditions ont été réunies pour que les personnes acceptent de se rencontrer, elles ont déjà pris des premières décisions qui les mettent sur le chemin de cet empowerment. Et donc... il y a de grandes chances qu'elles arrivent à opérer cette transformation de leur interaction, comme on l'a évoqué plein de fois. Dès lors, si moi je suis là, que j'incarne cet espace de dialogue, et que, en plus, je leur donne à voir moi-même ce qu'eux cherchent à retrouver, c'est-à-dire le calme et l'ouverture, Euh... L'essentiel du job est fait. Et donc, je vais revenir à ta question, ça veut dire que ce que je vais cultiver moi, je le dis souvent aux étudiants, aux stagiaires, la première chose à faire, c'est de s'occuper de vous-même en tant que médiateur. Arrêtez de vous prendre la tête avec ce que vous devriez faire ou pas pour prendre soin ou pour prendre en charge ces personnes. Occupez-vous déjà vous-même, d'être pleinement présent à ce qu'ils vont vous montrer et d'être vous-même en pleine possession de vos moyens calme, serein, lucide, et vous-même, pleinement ouvert à la différence des autres, et à leur particularité.

  • Speaker #1

    Donc c'est très vertueux.

  • Speaker #0

    Et donc en fait, de cultiver ça, pour revenir à qu'est-ce que ça m'apporte, j'ai tendance à penser qu'effectivement ça me fait progresser, ou ça développe mes compétences émotionnelles et relationnelles. Donc ma capacité de réguler Régulation émotionnelle, alors ça c'est un autre sujet, je ne sais pas s'il faut rentrer vers ça. Mais voilà, mes propres capacités de régulation émotionnelle, c'est-à-dire de maîtriser ce qui me traverse, pas forcément de le maîtriser, mais de l'accepter et de le laisser passer comme un méditant, comme quelqu'un qui fait de la pleine conscience. Ça développe également la capacité à donner de l'empathie à quiconque, quand bien même ça peut être des personnes. qu'on aurait on va dire tendance à détester parce qu'on rencontre pas que des gens avec lesquels on se sent pleinement en harmonie parmi les participants qu'on a dans les médiations et donc voilà je pense que ça m'apporte sur tout ça et aussi cette une discipline alors aussi un effort parce que c'est un effort l'ouverture oui oui oui alors il y a Il y a de la discipline et de l'effort sur deux choses à mon avis. Effectivement, d'abord l'attention, le contrôle attentionnel, c'est-à-dire le fait de ramener toujours son attention à ce qui se passe dans l'instant, plutôt que de se laisser perturber outre mesure par... on va dire toutes les pensées perturbantes par lesquelles on peut être traversé, toutes les émotions perturbantes par lesquelles on peut être traversé, etc. Et donc cette capacité à ramener son attention sur ce qui se passe là et ce sur quoi on a décidé de se focaliser, c'est-à-dire ce qu'expriment les gens dans l'instant. Et effectivement, la deuxième est consécutive, dès lors que je suis pleinement attentif. et que je ne prends pas d'avance sur le processus et que je ne me laisse pas non plus garder en arrière par ce qui s'est passé avant, que j'ai éventuellement raté. Je ne suis plus disponible pour accueillir l'autre, quel que soit ce qu'il a à donner, et avec tout ce qu'on dit quand on est médiateur, sans jugement, etc. Sans jugement. le jugement on l'a toujours mais encore une fois il faut l'accepter comme étant quelque chose qui est si on en est conscient et dès lors qu'on est conscient on le laisse passer et on se recale sur ce que la personne cherche à exprimer

  • Speaker #1

    Quel est ton rapport au conflit ? Tu l'as interrogé, est-ce que t'es fly ? fight ou freeze ?

  • Speaker #0

    Je pense que par nature, je serais plutôt flight, donc la fuite, l'évitement. Je pense qu'on est pas mal de médiateurs dans ce cas-là. J'ai souvent cette réponse. On est allé vers ça parce que finalement, on n'aime pas ça. Et vous,

  • Speaker #1

    oui.

  • Speaker #0

    Et en même temps, et je pense en particulier grâce à l'approche transformative, Je pense qu'il y a une forme d'apprivoisement de ça et tout ce qu'on vient de dire sur le fait de se colter, de se... confronté volontairement au conflit, et d'autant plus quand il est intense, ma petite aptitude fait mesurer la valeur de ce qui s'exprime dans l'interaction conflictuelle et la façon dont on peut l'utiliser pour transformer les choses d'une manière plus positive. Et donc ça veut dire que je pense que dans ma vie de tous les jours, je suis en train de faire des choses J'ai maintenant... On se refait pas, hein, mais j'ai davantage de capacité à... à faire face au conflit en fait, et à essayer de mobiliser tout ce que j'ai appris, même si c'est les cordonniers les plus mal chaussés, pour justement prendre à bras le corps les interactions conflictuelles et essayer de les transformer.

  • Speaker #1

    Ok, écoute, je te remercie Olivier,

  • Speaker #0

    c'était un échange, un plaisir,

  • Speaker #1

    j'espère qu'on a donné envie aux gens qui nous écoutent de découvrir la médiation transformative, où est-ce qu'on peut les envoyer ? Vous voyez justement, si on veut se former, sur ta page LinkedIn, il y a quelques infos, des formations, il y a cet institut.

  • Speaker #0

    Il y a un institut américain auquel je suis affilié, dont je suis un fellow, comme on dit, qui s'appelle l'ISCT, Institute for the Study of Conflict Transformation, qui se trouve... Adresse web transformativemediation.org, tout attaché. D'accord. Transformativemediation.org. Mais c'est en anglais.

  • Speaker #1

    Si on veut se former, on se conçoit d'ailleurs au médiateur, parce que ces interactions, c'est aussi très, très utile en tant que conseil.

  • Speaker #0

    On peut prendre contact avec moi, tout simplement, parce que c'est plus simple. Sur la page LinkedIn ? Sur la page LinkedIn, par exemple. C'est parfait.

  • Speaker #1

    Eh bien, allez-y. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci à toi, Émilie. C'était un plaisir.

  • Speaker #1

    À bientôt. Au revoir. Merci d'avoir écouté cet échange. N'hésitez pas à me faire part de vos remarques via mon site www.etg-avocat.com Vous pouvez également me suivre sur LinkedIn. A bientôt !

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Description

Dans ce troisième épisode du podcast, je reçois Olivier Chambert-Loir, médiateur, formateur et animateur du réseau francophone de médiation transformative.


Olivier nous partage :


  • Son parcours professionnel dans lequel il a évolué d’une posture d’expert puis de facilitateur venant accompagner un processus de décision en le structurant, vers une posture non directive, de non-sachant à travers celle de médiateur,


  • La lecture de l’approche transformative du conflit popularisé par Robert A. Baruch BUSH et Joseph P. FOLFER et ses impacts sur les personnes,


  • La proposition d’accompagner un phénomène naturel où le médiateur transformatif vient, en restant dans le sillage immédiat des personnes, leur donner un coup de pouce pour transformer une interaction conflictuelle en un dialogue redevenu constructif,


  • Sa conviction que les êtres humains ont la motivation et la capacité d’inverser la tendance et qu’il s’agit de soutenir des mouvements naturels leur permettant de reconquérir une autonomie personnelle et leurs pleines capacités de décisions,


  • La posture du médiateur transformative, la peur de la violence en médiation et l’engagement du médiateur,


  • La technique du reflet en médiation et son effet régulant sur la conversation.


À tous les professionnels du conflit et notamment les avocats, prenez le temps d’écouter cet échange qui pourra vous faire appréhender différemment les situations conflictuelles qui vous sont présentées !


Bonne écoute,

Émilie


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Retrouvez Olivier Chambert-Loir sur Linkedin

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En attendant de se retrouver le 10 de chaque mois pour un nouvel épisode, je vous invite à vous abonner au podcast et à laisser 5 étoiles sur votre plateforme d’écoute préférée.


Si vous souhaitez continuer la discussion autour de la médiation, retrouvez-moi sur mon compte Linkedin Emilie Thivet-Grivel.


Et si vous souhaitez en savoir plus sur le cabinet ETG Avocats et nos services de médiation, rendez-vous ici.


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Crédits :

Antidot est un podcast d’Emilie Thivet-Grivel.
Stratégie : Mélanie Hong.
Montage et mixage : Morgane Bouchiba.
Designer graphique (vignette) : Emma Wise.
Musique  : Aberdeen, Greg McKay.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, vous écoutez Antidote, le podcast qui nourrit la réflexion des professionnels du conflit. Je m'appelle Émilie Thivet-Grivel, je suis avocate et médiatrice, fondatrice du cabinet ETG Avocats, et chaque mois je vais à la rencontre de professionnels qui apportent un éclairage à nos questions. Comment dépasser ces conflits qui entravent nos vies ? Comment rétablir un dialogue avec cet autre avec lequel on doit faire ? C'est l'objet de ce podcast que de vous partager mes rencontres et outils de réflexion pour changer de regard sur la conflictualité et l'organiser autrement. Aujourd'hui, je reçois Olivier Chamberloir. Médiateur, formateur et superviseur en médiation, Olivier, tu es un des représentants en France du courant de médiation transformative. Tu as d'ailleurs traduit de l'américain au français l'ouvrage de référence de Bush et Folger, alors il s'agit de Robert Barour Bush, pas d'une autre famille, sous le nom La médiation transformative, une approche non directive des conflits aux éditions RS. Tu animes le réseau francophone faisant connaître cette approche. Tu as aussi une casquette de coach puisque tu as fondé il y a quelques années une société de coaching et de formation. Après une formation initiale d'ingénieur, puis un parcours professionnel de consultant au sein d'entreprises de conseil. Comment tu es venu à la médiation et est-ce que tu te souviens plus particulièrement ce qui t'a fait te dire que c'était vraiment dans cette posture de tiers et en particulier de non-sachant que tu te sentais le mieux ?

  • Speaker #1

    Pour répondre à ta question, c'est venu la médiation un petit peu progressivement, parce que comme tu l'as rappelé, j'ai commencé ma carrière comme consultant en organisation et management. Ce qui voulait dire accompagner des entreprises, des dirigeants et leurs équipes sur des projets de réorganisation par exemple. Et donc ça impliquait, c'était un travail de tiers, mais qui impliquait beaucoup de conseils, de suggestions, de travail d'experts, de sachants. Bien sûr de la facilitation du dialogue et de la prise de décision commune. mais avec toujours une idée derrière la tête, des orientations vers lesquelles emmener les gens, etc. Et des convictions à afficher, un avis sur toute chose. Je caricature un peu peut-être, mais c'est ce qui était attendu. C'est pour ça que les clients payaient mon cabinet. Je dois dire que j'étais pas forcément à l'aise avec cette posture, en particulier quand j'étais tout jeune, et face à des dirigeants assez capés qui pouvaient m'impressionner un peu, et d'être propulsé comme ça, y compris d'ailleurs dans des situations parfois à transmettre un savoir que je venais d'acquérir au sein du cabinet, et d'être propulsé comme ça, comme un expert ou comme un sachant sur un certain nombre de choses sur lesquelles j'étais pourtant assez débutant. J'étais pas forcément très à l'aise avec ça. Je m'en suis accommodé. Après, j'ai continué ce métier-là. Au bout de quelques années, je me suis mis en indépendant. Donc, j'ai continué à faire ce métier-là.

  • Speaker #0

    C'était ma question parce que je me souviens plus si tu étais salarié au départ.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai commencé.

  • Speaker #0

    Salarié de boîte qui prestait du conseil, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Exactement, un cabinet de conseil qui était assez connu, qui s'appelait Bossard Consultant, qui a été absorbé depuis par le groupe Capgemini. Voilà, et à un peu moins de 30 ans, je me suis mis à mon compte, et j'ai continué à faire la même chose en tant qu'indépendant. Et du coup, petit à petit, un peu plus à ma manière, je me suis un peu réaligné avec la façon dont j'entendais procéder, pour être plus confortable. Et donc, dans une posture que j'ai cherché à rendre de moins en moins, justement, sachant toute directive, d'être plus à l'écoute, de laisser plus les gens prendre leurs décisions par eux-mêmes. Et donc je suis allé dans cette direction de la facilitation, sachant que dans le mot facilitation, il y a quand même cette idée de structurer un process de discussion ou de décision, de l'outiller avec des méthodes, etc. Et ça aussi, c'est pour ça que je dis que ça a été progressif, j'ai finalement cherché à m'en libérer de plus en plus. Et bref, quand je me suis rendu compte que dans mes interactions avec mes clients, je faisais des choses qui s'apparentaient au coaching, c'est-à-dire accompagner les gens dans leurs réflexions sur la façon dont ils fonctionnent eux-mêmes et en interaction avec leur environnement. Quand je me suis rendu compte que je faisais aussi quelque chose qui pouvait s'approcher de la médiation, c'est-à-dire aider des gens dans leurs efforts pour dialoguer, pour prendre des décisions ensemble, j'ai cherché justement à me raccrocher à des écoles de médiation notamment, à voir quelles formations complémentaires je pouvais suivre, dans quel courant je pouvais m'inscrire, etc. Et j'ai eu un peu de mal parce qu'en fait j'ai trouvé... J'ai trouvé beaucoup de choses qui ressemblaient pas mal à cette facilitation que je pratiquais déjà, c'est-à-dire, encore une fois, l'accompagnement assez structuré dans des processus de dialogue et de décision, avec des méthodes et des outils que pour la plupart j'avais déjà pratiqués, comme le problem solving ou la négociation raisonnée, ou d'autres méthodes de créativité, etc.

  • Speaker #0

    Des approches ou non ? encore très interventionniste en fait. C'est un peu ça ?

  • Speaker #1

    Oui, en tout cas en tant qu'aujourd'hui que médiateur transformatif, je considère comme très interventionniste, assez structurante. Moi,

  • Speaker #0

    c'est ce qui m'a frappé quand j'ai regardé ton parcours dans le détail, c'est qu'on a l'impression que tu es allé vers quelque chose de plus en plus épuré finalement.

  • Speaker #1

    Exactement. Je suis vraiment toujours dans cette quête-là et c'est ça que j'aime dans l'approche transformative, c'est qu'en fait, on est amené à se questionner en permanence dans le travail réflexif qu'on fait comme tout professionnel de l'accompagnement. Quand on s'interroge sur... Sur ce qu'on fait, ce qu'on a fait, pourquoi on l'a fait comme si, comment on aurait pu le faire autrement, c'est qu'on est toujours en train de s'interroger sur où est-ce qu'on a mis le curseur en termes d'interventionnisme et de directivité. Est-ce que c'était pour de bonnes ou de mauvaises raisons ? Est-ce que c'était pour se rassurer soi-même ou pour se montrer utile, pour se convaincre que soi-même on était utile ? Ou bien est-ce que c'est parce qu'il y en avait vraiment besoin ? J'ai cherché et j'ai fini par trouver l'approche transformative qui correspond justement à cette quête du geste épuré de l'accompagnement du dialogue.

  • Speaker #0

    Je voulais que tu puisses un peu nous décrire la particularité de ce process de médiation. et pour ceux qui ne la connaissent pas et peut-être aussi déjà lever un malentendu parce qu'on pourrait se dire que Transformative il s'agit de transformer les gens et non il s'agit de travailler sur le conflit Bonne remarque C'était ton sujet, si tu peux décrire

  • Speaker #1

    Déjà Transformative c'est un peu un anglicisme, c'est la traduction qui nous est parvenue via le Québec du mot en l'état anglais, enfin américain. Donc certains disent transformatrice ou transformante, etc. Mais comme tu l'as suggéré, ce qu'on cherche à transformer ou à aider à transformer, la transformation qu'on cherche à soutenir quand on fait de la médiation transformative, c'est celle de l'interaction conflictuelle, c'est pas celle des gens eux-mêmes. Après, d'aucuns te diront que dès lors que tu participes à un processus comme ça de dialogue, ou que tu es accompagné par quelqu'un dans quelque chose, d'une manière ou d'une autre, ça te fait bouger, ça te transforme, mais c'est pas l'objet. L'idée là, c'est de dire, le conflit, c'est une crise de l'interaction entre des êtres humains, et c'est une crise que la plupart du temps, d'ailleurs, les êtres humains arrivent à transformer eux-mêmes, c'est-à-dire à... à rétablir leur interaction en quelque chose de plus constructif. Mais effectivement, de temps à autre, ils peuvent avoir besoin d'un tiers pour les soutenir dans cet effort. Et donc la transformation dont on parle, c'est la transformation de l'interaction conflictuelle en un dialogue. devenu ou redevenu constructif. Quelque chose que les gens, encore une fois, a priori, savent faire par eux-mêmes, simplement par leur humanité et leur dimension sociale, et qui est un processus naturel dans lequel on leur donne un coup de pouce en tant que médiateur.

  • Speaker #0

    Alors, un coup de pouce pour reconquérir une autonomie personnelle. C'est ce qui m'avait vraiment plu. Je trouvais très responsabilisant, parce que ce que j'ai retenu de ton intervention qui avait marqué les esprits au CNAM, c'est qu'on est vraiment dans une logique où on va essayer de les aider à retrouver en eux des ressources pour retrouver... ce calme qui fait complètement défaut pendant ce moment de grande crise donc c'est quelque chose qui est très exactement c'est vraiment je ne trouve pas les mots mais c'est l'empowerment shift si j'en parle correctement alors l'empowerment shift c'est effectivement les

  • Speaker #1

    mouvements que les gens opèrent pour reprendre le contrôle d'eux-mêmes et c'est ce à quoi on est le plus attentif en médiation transformative et effectivement tu as complètement raison c'est central c'est à dire que Quand on fait de la médiation transformative, on met un petit peu de côté la recherche de solutions, en considérant que les personnes sont, ça c'est assez classique de le dire, les meilleurs experts de leurs solutions et de leurs problèmes, et les plus à même de trouver leurs solutions. Dès lors... qu'elles retrouveront leur capacité à dialoguer de façon constructive. Et donc on considère la solution comme, on va dire, un bénéfice collatéral, ou un bénéfice de second niveau par rapport à une interaction transformée, justement, qui a retrouvé son caractère constructif. De même, on considère que... la fameuse reconnaissance mutuelle qu'on peut attendre des personnes en conflit, est quelque chose qui ne peut pas être forcé.

  • Speaker #0

    qu'elle doit être volontaire et elle doit découler d'une décision des personnes de se réouvrir l'une à l'autre et donc d'une capacité retrouvée de chacune à prendre cette décision. Et donc on en vient à cette histoire d'empowerment, c'est-à-dire de dire ce qui est central dans tout ça, c'est que les personnes retrouvent... leur pleine capacité cognitive, on va dire, et leur pleine capacité à décider ce qu'elles veulent faire et comment elles veulent le faire. notamment de se réouvrir à l'autre. Et donc le mot empowerment, qu'on n'a d'ailleurs pas traduit, on l'a gardé comme ça, on pourrait le traduire comme étant reprise de pouvoir sur soi, ou certains disent regain de pouvoir en soi, mais c'est finalement une reprise de contrôle sur soi-même, c'est-à-dire le fait de, petit à petit, par petits mouvements, justement les fameux empowerment shifts, Euh... retrouver en fait une forme de calme, d'une forme de clarté, de lucidité et une forme de justement capacité à décider ce qu'on veut faire, notamment de l'interaction avec l'autre.

  • Speaker #1

    Moi ce que j'aime bien dans cette approche, et pour l'avoir vécu, à titre perso dans des conflits, c'est que quelque part on prend en compte le conflit comme... Une force en soi, c'est presque le troisième personnage dans la pièce, et que c'est ce conflit qui bouleverse les gens, qui les fait se transformer aussi, mais dans ce qu'ils ne sont pas habituellement, parce qu'on a de la colère, on a de la déception, on est attaqué dans des choses très intimes, et donc il y a cette version un peu démoniaque, là je me souviens de tes petits dessins. Et cette spirale du conflit qui appelle le conflit, etc. Et d'ailleurs qui nous emmène dans le pire qu'on voit actuellement. Et c'est assez... déculpabilisant, dédiabolisant, en même temps très humain, parce que tout le monde peut se retrouver dans ces phases-là. Je trouve qu'on sort en plus, enfin, du schéma binaire. Où on attend que le problème, c'est forcément l'autre, et l'autre est un diabolique. Nous, on n'a rien à se reprocher. Alors qu'en réalité, l'un, l'autre, c'est un truc qui s'auto-alimente. Il s'agit du coup d'inverser, je me rappelle bien de tes mouvements, d'ailleurs j'ai retrouvé dans mes notes, de spirales. Il s'agit de changer la logique de la spirale du conflit qui s'auto-alimente, où on devient de plus en plus... Et ça, dans nos conflits, moi en tant qu'avocate aussi, en matière familiale, je ne vois que ça. C'est-à-dire que le truc s'auto-alimente, la radicalité va s'entretenir, s'auto-alimenter, voilà, c'est exacerbé.

  • Speaker #0

    Et c'est tout à fait ça, c'est-à-dire que tout ce qu'on vient de dire, ou de commencer à dire... sur ce à quoi on s'intéresse en tant que médiateur transformatif et la façon dont on procède, découle de cette approche, ce regard du conflit que tu viens de résumer, c'est-à-dire de regarder le conflit comme cette crise d'interaction humaine qui a des effets sur les personnes qui sont aux prises avec ce conflit et ces effets qu'on résume. de la façon suivante, en disant que finalement le conflit vient déstabiliser la personne dans ce qu'elle est, c'est-à-dire qu'elle devient confuse, elle est submergée par des émotions généralement désagréables, qui viennent, ces émotions incidentes venant, comment dire... réduire ses capacités cognitives, en fait, et sa capacité à regarder les choses d'une façon lucide, mesurée, calmement, et sa capacité également à exprimer clairement ce qui est important pour elle. Et la deuxième chose qui est consécutive à cette déstabilisation, c'est... la perte de sa capacité naturelle d'ouverture à l'autre. Et donc ce qu'on appelle, les américains disent self-absorption, mais nous en français on a résumé ça par fermeture, c'est-à-dire qu'étant déstabilisé, Je me replie petit à petit sur moi-même. J'ai du mal à considérer l'autre simplement dans sa différence, pour ce qu'il est dans sa différence. Et je vais soit l'éviter, soit l'attaquer, le dénigrer, le diaboliser.

  • Speaker #1

    Ça c'est tellement courant.

  • Speaker #0

    Et ces deux choses-là en plus, c'est là que tu l'as évoqué plusieurs fois, ce cercle vicieux ou cette spirale, c'est-à-dire que ces deux choses-là se renforcent l'une l'autre. C'est-à-dire que le plus je suis déstabilisé, le plus je me ferme à toi. et le plus je me ferme à toi, le plus ça te déstabilise à ton tour et renforce aussi ta dynamique de fermeture à mon égard et ça boucle aussi en interne à chacun c'est à dire que le plus je me comporte on va dire, de façon consécutive à ce repli sur moi, c'est-à-dire que je t'évite ou que je t'attaque, le plus ça me déstabilise moi-même, dans le sens où je ne suis pas fier, ça peut même me répugner si je prends trois secondes de recul, la façon dont je suis en train de me comporter vis-à-vis de toi, quand bien même je suis en train de te détester et de te diaboliser.

  • Speaker #1

    C'est peut-être pour ça que je tiens à ce que cette approche, qu'elle soit... elle soit diffusée, connue, parce qu'on a cette tendance, en tout cas, quand on a l'impression qu'on découvre les gens, dans les phrases qu'on entend, on découvre les gens au moment des séparations, typiquement. Oui et non, parce que c'est le moment de la crise, donc la crise révèle une facette de soi, mais qui n'est... Est-ce que c'est vraiment soi ? Tu vois ?

  • Speaker #0

    L'idée c'est que ça ne fait plus tellement soi en fait

  • Speaker #1

    On n'est plus soi-même Et je trouve qu'on gagnerait aussi en pédagogie avec nos clients Si on arrivait à leur expliquer que ça Parce que nous quand on les récupère Ils sont en crise totale Donc voilà Ça participe des ressources que j'essaie d'exploiter, mais pour leur faire faire ce travail sur l'autre qui n'est peut-être pas le diable, il y a tout un travail de remise en confiance, d'apporter un peu de repères dans ce moment de grande perte de repères, qu'il s'agisse d'une crise qui touche la vie professionnelle ou d'une crise familiale.

  • Speaker #0

    Tout à fait. D'ailleurs, on parlait de médiation, mais on fait aussi de l'accompagnement individuel de personnes qui sont en situation de conflit. Ça se rapproche peut-être de ce que pourrait faire un avocat qui est sensibilisé à la médiation, ou qui est même médiateur, qui est plutôt que de prendre en charge, par délégation on va dire, les manifestations de la fermeture à l'autre, c'est-à-dire une forme de défense, d'attaque, etc. par délégation de son client. plutôt de l'aider à prendre du recul, de reprendre le pouvoir sur lui-même pour réfléchir à des façons peut-être alternatives de gérer la situation.

  • Speaker #1

    Là, il y aurait un gros boulot à faire dans les écoles d'avocats, en fait. Parce que nous, on appuie au contraire. L'avocat qui reçoit la personne, s'il appuie. pas d'autres repères que ceux de base du contentieux, on va presque le conforter dans sa certitude que l'autre est le diable, qu'il est ceci, qu'il est cela, on va lui donner de l'empathie. Donc on ne va pas l'aider à sortir de sa croyance du moment.

  • Speaker #0

    Alors pour fréquenter pas mal d'avocats formés à la médiation,

  • Speaker #1

    ou avocats médiateurs,

  • Speaker #0

    je constate qu'effectivement, ça modifie souvent en profondeur leur façon d'exercer leur métier d'avocat.

  • Speaker #1

    Bien sûr, on ne fait plus le même premier entretien, ça je te confirme. Ah bah oui, du jour où tu commences à avoir un vrai changement de paradigme, ton premier entretien avec ton client n'est plus du tout le même. Ce n'est pas que tes intentions ne sont pas les mêmes, mais tu as une approche qui est beaucoup plus riche et qui est plus utile surtout. Qui est plus utile, parce que tu n'apportes pas moins de soutien, mais tu fais un accompagnement différent. Je m'éloigne un peu là.

  • Speaker #0

    Tu as dit un truc tout à l'heure sur lequel je ne suis pas revenu, qui est le fait de, je ne sais pas comment tu as dit ça, de dédramatiser le conflit. de le présenter ou de l'aborder comme quelque chose qui fait partie du quotidien.

  • Speaker #1

    C'est même un troisième personnage. J'aime bien cette idée, je l'ai retrouvée dans le livre de Gary Friedman, qui, je pense, y a évoqué encore quelqu'un, un autre formateur, qui, en séance, jouait la personne un peu diabolique qui murmure à l'oreille de l'un en disant Mais non, t'es en train de te faire arnaquer ! Tu vois, comme cette image qu'on voit des fois dans les BD, avec une bulle de quelqu'un qui... qui te suggèrent des intentions hyper négatives. C'est ça, le côté diabolique. Je ne sais pas si on l'a dans Astérix ou je ne sais pas dans quel BD, mais c'est vraiment ça. Parce qu'on est en permanence dans ce mouvement d'avoir des pensées où tu as envie d'en découdre et quelqu'un presque te les suggère. Donc le conflit est presque une force autonome.

  • Speaker #0

    Oui, et alors ce qui est intéressant, c'est que justement, je trouve que finalement c'est quelque chose qui est assez familier Pour les gens, l'idée c'est d'élargir un petit peu la vision qu'on a du conflit, c'est-à-dire que nous on est très comme ça en transformatif, c'est-à-dire que ce fameux cercle vicieux qu'on a décrit, de déstabilisation et de fermeture progressive qui s'auto-entretiennent, c'est quelque chose qu'on expérimente quasi quotidiennement dans nos vies, avec des niveaux d'intensité divers. Dès que finalement on interagit avec l'autre et qu'on est confronté à sa différence de sensibilité, de point de vue, d'opinion, etc. On peut voir se mettre en route. Ce phénomène où on est un peu déstabilisé par ce que dit l'autre, parce qu'on le comprend mal, qu'il y a un malentendu, qu'on y décèle un procès d'intention ou une attaque, ou que tout simplement on trouve qu'il est complètement à côté de la plaque par rapport à un sujet de société, etc. Et on voit se mettre en route cette mécanique. Et ce qui est très... Je voudrais être assez optimiste là-dessus, c'est-à-dire que ça nourrit chez nous la conviction qu'étant familiarisé à ce phénomène, on est également entraîné pour le transformer. Et donc cette fameuse inversion de la spirale que tu as évoquée tout à l'heure, on le fait en permanence, c'est-à-dire qu'on se réajuste dans une interaction avec l'autre quand on sent que c'est en train de déraper du côté de ce cercle vicieux. et on prend une décision justement, on reprend du pouvoir sur soi-même. par rapport à ce début d'agacement, etc. On s'est dit, non, quand même, ce serait trop bête de s'embrouiller pour cette histoire, etc. Et on fait un petit effort, on demande une clarification, on reprend un mot dont on a compris qu'il était peut-être perturbant pour l'autre, etc. Et donc, en fait, on sait faire ça, on le pratique quotidiennement.

  • Speaker #1

    Alors oui, on le pratique d'autant plus qu'on aura un entourage. pour le coup, bienveillants, qui vous confortent dans cette dynamique-là, ce qui n'est pas du tout courant. Alors, moi, j'ai un conseil là-dessus. Plus on s'entoure de médiateurs, plus on a des gens quand même qui sont habitués à faire cette balance et à ne pas penser en binaire. Et ce n'est pas fréquent. Tu vois, surtout même dans tes relations en général, les amis, ils sont pros, quoi. Ils sont pros, ils vont dans ton sens. C'est pas donner à tout le monde de dire, oui, mais attends, ça, c'est ta vision. Peut-être que l'autre, il a une autre vision. Tu vois, c'est quand même quelque chose. Moi, je vois que je suis hyper aussi influencée par les paroles bienveillantes de certains qui peuvent vraiment... agir, me faire redescendre, ouvrir quelque chose, une forme d'acceptation. Pour le coup, c'est plutôt vers des personnes comme ça que je vais aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Mais tu vois, c'est intéressant parce que dans ce que tu dis, effectivement, il y a l'idée d'avoir une forme de culture du dialogue ou une forme de vigilance sur la qualité des interactions qu'on a avec les uns et les autres.

  • Speaker #1

    C'est pas que ça, c'est pas que la culture du dialogue, c'est plutôt l'acceptation. de l'autre dans sa vraie différence. Tout à fait. Et tu vois, parce que le dialogue, sur le papier, on a tous la culture du dialogue, parce qu'on va te dire je suis pro-guerré Mais c'est plutôt, est-ce que tu l'acceptes, même dans sa bizarrerie, tu vois, dans sa façon d'être qui heurte des fois des choses profondes. C'est pas du tout évident, surtout en ce moment. L'ouverture, c'est compliqué de la cultiver. Quand tu vois des prises de position qui peuvent heurter des choses...

  • Speaker #0

    Bien sûr, pour des sujets qui sont graves.

  • Speaker #1

    Des sujets graves, là, on se fait en plein dedans.

  • Speaker #0

    Mais si on revient à des situations beaucoup plus anodines du quotidien, moi, j'ai pour coutume de dire que les personnes avec lesquelles on s'engage le plus souvent dans cette spirale négative de l'interaction conflictuelle, c'est les personnes avec lesquelles on est le plus proche et avec lesquelles on interagit le plus fréquemment. C'est-à-dire que si tu passes 24 heures en tête-à-tête avec quelqu'un, avec ton conjoint, avec un enfant de ta famille, etc., et que tu parles de choses, ou tu es amené à donner des avis, etc., tu as toujours potentiellement cette mécanique qui se met en route. Et tu as toujours, quel que soit le background de chacune des personnes, sa formation, sa sensibilité justement à... la nécessité ou l'utilité d'être ouvert à l'autre, y compris dans sa bizarrerie, ou dans ses positions, ses points de vue qui sont différents. Tu as toujours ces mécanismes de rappel qui se mettent en route. Parce que, ok, on a envie d'être soi-même et de s'affirmer dans sa différence, mais en même temps, on a consciemment ou inconsciemment l'envie, le besoin d'interagir avec l'autre. Et c'est ces deux choses-là qui se nourrissent d'ailleurs. on devient soi-même ou on est vraiment soi-même qu'en interaction avec les autres parce que c'est ça qui nous amène à affirmer notre identité c'est ça qui nous amène à l'enrichir aussi par influence successive, par comparaison, etc. Et donc ce qui est super important pour nous en médiation transformative c'est d'être profondément convaincu que intrinsèquement, les êtres humains, y compris quand ils sont partis assez loin dans cette spirale négative, ont à la fois la motivation et la capacité d'inverser la tendance. Parce qu'ils ont ce besoin d'une part de clarifier ce qui est important pour eux et d'affirmer leur singularité, et d'autre part de rester connecté à l'autre.

  • Speaker #1

    Oui, quand il y a une volonté, voilà, il n'y a pas toujours de volonté.

  • Speaker #0

    Pas toujours. Mais c'est vrai que quand même très très souvent...

  • Speaker #1

    Une volonté de rester en lien, tu vois.

  • Speaker #0

    Bien sûr, tu peux ne pas avoir la volonté de rester en lien, et il peut même être salvateur pour tout le monde de rompre la relation. Mais ce que je veux dire, c'est qu'au quotidien, on passe son temps à partir dans des dynamiques conflictuelles. et à les inverser, à les transformer, y compris quand on se fâche assez fort, et que derrière, sur l'initiative de l'un ou l'autre, on rentre dans un processus de clarification et de réconciliation. On se dit, tiens, il faudrait qu'on se parle du truc, etc.

  • Speaker #1

    Comment ça se manifeste, cette approche transformative ? On a parlé de la réflexion sur le conflit. Moi, ce que j'avais bien retenu, c'est la non-directivité, le fait que c'est très responsabilisant pour les parties qui sont seules maîtres à bord. Et ça va jusqu'à leur dire qu'en gros, elles décident presque des règles du jeu de ce moment. Ce que j'ai vraiment, et d'ailleurs, j'ai relu le petit retour que tu avais fait sur... une séance de formation là au CNAM, qui était complètement raptée de mon côté, mais que tu avais analysée, tu avais eu la gentillesse de me faire des retours, c'est la posture basse. Alors ça, c'est vraiment, je trouve, hyper important et je trouve qu'on a besoin de faire connaître quand même cette... Cette approche-là, le fait qu'il y a vraiment une volonté d'humilité, de rester en soutien, d'être non-sachant, je t'avais un peu interrogé au départ là-dessus, c'est quand même aussi un des écueils assez fréquemment rencontrés en médiation, je trouve. Cette problématique de posture, on n'en se met pas au même niveau que les personnes. Et c'est aussi, je pense, peut-être une des clés des échecs possibles de médiation, non ? Non.

  • Speaker #0

    Après, tout dépend de ce qu'on appelle médiation, tout dépend de ce qu'on poursuit comme objectif. Mais effectivement, nous, comme justement notre idée, c'est d'accompagner et de soutenir ce phénomène naturel, j'insiste sur naturel, de transformation de l'interaction. en quelque chose de plus positif et de constructif. Il est hyper essentiel, et que du coup, ce qu'on attend, ce qu'on observe, c'est essentiellement ces fameux mouvements d'empowerment que tu as évoqués au début, c'est-à-dire ces mouvements de reprise de pouvoir sur soi-même que peuvent opérer chacun des participants. On va se garder absolument. de prendre des décisions à leur place. On considère que c'est en prenant des décisions, même microscopiques, que les acteurs, petit à petit, reprennent du poil de la bête, si j'ose dire. On dit que c'est en forgeant qu'on devient forgeron, c'est en décidant qu'on retrouve sa capacité à prendre des décisions et qu'on reprend le contrôle. Et donc on va s'interdire absolument de se mettre en surplomb par rapport aux participants. et de les devancer, ça c'est très important, c'est qu'on dit en transformative, on reste toujours dans le sillage immédiat des personnes et de leur conversation, mais jamais on ne les précède, c'est-à-dire qu'on n'a pas de projet pour eux. Et encore moins de choses à leur imposer. Et donc tu as évoqué par exemple les règles.

  • Speaker #1

    De l'échange, donc de la conversation.

  • Speaker #0

    De l'échange, de la conversation. C'est vrai que souvent en médiation, il est de coutume d'entendre que les participants ont la main sur le contenu de leur échange et que le médiateur contrôle le process. Nous, on ne contrôle pas le process. On considère que contrôler le process, c'est déjà prendre des décisions à la place des participants. Et donc, finalement, sans le dire... considérer qu'ils ne sont pas capables de le faire, et surtout les empêcher de se remettre à le faire. Et donc, d'une part, la conversation, on va considérer, on dit qu'elle est... qu'elle est libre, qu'elle est ouverte et qu'elle engendre sa propre structure, c'est-à-dire qu'elle n'est pas supposée suivre un processus prévu à l'avance, c'est les participants qui l'inventent, comme dans la vraie vie. Parce qu'encore une fois, on vient juste donner un coup de pouce à quelque chose qui est supposé se passer en autonomie dans la vraie vie. Et qu'il se passe exactement, qu'il n'arrive plus à se passer à ce moment particulier, sur tel sujet particulier, etc. Mais en plus, effectivement, on se garde absolument de leur donner des règles. C'est-à-dire qu'on considère que de dire aux personnes... Voilà, comment ça doit se passer, il faut s'écouter jusqu'au bout, et puis il faut se respecter, employer un langage, etc.

  • Speaker #1

    C'est impotentilisant.

  • Speaker #0

    C'est très impotentilisant, c'est une approche surplombante, paternaliste, et donc c'est une manière de leur dire, vous n'êtes pas capable de vous contrôler vous-même, donc on va le faire à votre place. Je caricature un peu, hein ?

  • Speaker #1

    Non, mais je suis pas tout à fait d'accord.

  • Speaker #0

    Et par ailleurs, en plus, qui on est nous pour décréter comment ces personnes-là ont envie de se parler ? Quel langage elles s'autorisent à employer ?

  • Speaker #1

    Après tout, s'ils ont envie de s'interrompre. Et parfois, c'est nécessaire. Ce n'est pas possible, c'est insupportable d'entendre. Donc voilà, il faut que ça sorte. C'est aussi le côté naturel du process. S'il y a des choses à purger, tu ne peux pas juste réguler l'échange comme un match de tennis où tu vas compter les points et tu vas siffler la fin de la récré. Ce n'est pas possible.

  • Speaker #0

    Et tu vois, par exemple, pour la question du respect, Qu'est-ce que ça veut dire le respect ? J'ai mon filtre pour savoir ce que c'est que le respect, mais eux, c'est peut-être pas le même. Et par ailleurs, c'est un très bon sujet de conversation qui est souvent au cœur de leurs problèmes d'interaction. Et d'ailleurs, quand on pose la question, parce que c'est comme ça qu'on procède dans la... Les remarques introductives d'une séance de médiation, quand on leur demande s'ils éprouvent le besoin de se donner des règles sur la façon dont cette conversation pourrait se dérouler.

  • Speaker #1

    Oui, c'est plus suggestif du coup, la façon dont tu poses le cadre.

  • Speaker #0

    On leur offre la possibilité de se donner des règles. Alors quelquefois, ils vont te dire, non, je ne vois pas, c'est quoi le problème ? Oui. Donc très bien, et là on va leur dire, écoutez, si effectivement dans le cours de la conversation, vous avez besoin de revenir là-dessus pour que ce soit confortable pour vous, vous n'hésitez pas à le faire. Et puis quelquefois, ils embrayent sur cette question des règles en disant, moi j'aimerais qu'ils me parlent de façon plus respectueuse, ou qu'ils ne m'insultent pas, ou qu'ils m'écoutent un peu parce que jamais ils m'écoutent. Et ça c'est de l'or, parce que c'est une entrée de plein pied dans la conversation à propos de leur relation. qu'est-ce que l'un ou l'autre estime comme étant respectueux ou pas, quel est le besoin de l'un ou de l'autre en termes d'écoute par la personne d'en face, etc. Et du coup, ça démarre la conversation.

  • Speaker #1

    Ça ouvre des portes de conversation. Je me demandais s'il n'y avait pas un moindre engagement du médiateur dans cette approche-là. Hier soir, en posant la question, parce qu'après tout, ce n'est pas dans ce que j'ai lu, ce n'est pas le sujet. Le médiateur, son rapport à ses émotions, sa connaissance de soi, sa subjectivité. Autant en médiation humaniste, c'est vraiment le cœur du sujet. C'est un chemin de connaissance de soi, on va dire la porte d'entrée vers la médiation humaniste. Autant je lis pas grand chose sur le sujet sur la personne du médiateur mais finalement à t'écouter je me dis il faut vachement de confiance pour y aller avec le minimum en disant allons-y quoi, c'est un peu vous qui fixez les règles faut quand même avoir une sacrée foi donc c'est du coup nécessairement la nécessité d'ancrer dans quelque chose de bien poser quand même Dans ce sens là ça converge pas mal avec l'approche humaniste

  • Speaker #0

    Et l'engagement, j'ai envie de dire, il est total en fait. C'est-à-dire que...

  • Speaker #1

    Tu ne peux pas faire autrement en fait.

  • Speaker #0

    D'abord, tu as évoqué plusieurs choses. La première, c'est effectivement une forme de confiance, de conviction dans ces mécanismes. C'est-à-dire que tout ce qu'on a dit précédemment sur la capacité des gens à faire par eux-mêmes, sur cette motivation et cette capacité inhérente à s'affirmer tout en... en restant ouvert à l'autre et à sa différence, il faut y croire profondément. pour s'interdire, y compris quand ça chauffe fort, de reprendre le contrôle et d'inviter au calme, et de revenir un petit peu directif.

  • Speaker #1

    Et tu as une crainte, toi, par rapport à ça ? Parce que c'est quand même un des sujets. Plus j'avance dans le monde de la médiation, plus je vois que c'est une peur assez largement répandue que de se confronter à la violence en médiation. Alors la violence verbale, le plus souvent, mais c'est quand même un de nos gros enjeux, puisqu'on va au cœur du conflit. Donc là, ça sera les questions d'après.

  • Speaker #0

    Alors effectivement, c'est un vertige.

  • Speaker #1

    Tu te mets au bord de ça, donc toi-même, ça quand même...

  • Speaker #0

    Alors effectivement, ça te percute. Et effectivement, ça fait partie des sujets qu'on travaille beaucoup quand on fait de la formation à l'approche transformative. C'est cette capacité à se confronter à une conflictualité intense, à l'expression intense des émotions et potentiellement à quelque chose qui peut se rapprocher de la violence, de s'interdire une forme de régulation trop directive. et de maîtriser également les échos, les impacts que ça peut avoir sur soi-même.

  • Speaker #1

    Alors comment tu te prépares, toi, pour une séance de médiation transformative ?

  • Speaker #0

    Écoute, je ne me prépare pas plus que ça. Je m'offre, on va dire, 5 minutes de calme, si je peux, avant le démarrage. Ça peut paraître paradoxal, mais en fait, comme... On n'est pas vraiment entré dans le détail de ce qu'on faisait, ce qu'on ne faisait pas, etc. Mais pour revenir à ce que tu disais précédemment sur l'engagement, l'engagement je disais qu'il est plein et entier parce que, en fait, comme on ne précède pas les participants qu'on n'a pas de projet pour eux, la contrepartie c'est qu'on est pleinement présent dans l'instant à ce qu'ils expriment, ce qu'ils donnent à voir.

  • Speaker #1

    Tu poses un limite de temps toi dans tes réunions par exemple ?

  • Speaker #0

    Alors on se donne un créneau en général, oui, pour que tout le monde ait une bonne gestion de son agenda.

  • Speaker #1

    Mais de quel ordre ? Parce que c'est pareil, ça aussi, t'as des écoles différentes. T'en as qui vont te dire, moi, ça peut durer trois heures. 4 heures, 5 heures ?

  • Speaker #0

    Écoute, quand c'est de l'interpersonnel, que c'est deux personnes, ou quand c'est éventuellement trois, je fais rarement plus de deux heures. En général, je fixe un créneau de deux heures. Enfin, on fixe ensemble un créneau de deux heures et ils ont toujours la possibilité de s'arrêter plus tôt.

  • Speaker #1

    Ah oui, c'est plus tôt de s'arrêter ?

  • Speaker #0

    Oui, parce que prolonger, encore faut-il que les gens soient disponibles, y compris moi-même. Oui, bien sûr. Et quand on arrive au... Au bout du créneau, c'est toujours eux qui décident ce qu'ils veulent faire après. Merci.

  • Speaker #1

    Alors justement, dans quel domaine en particulier toi tu interviens en médiation ? C'est vrai que je ne sais pas comment c'est par là, tu vois j'ai fait de la non-directivité.

  • Speaker #0

    Il faudra qu'on revienne après je pense à l'histoire de la présence, de l'engagement, de la préparation, etc. Écoute, moi comme mon terrain de jeu initial on va dire c'était l'entreprise, ou les organisations on va dire, j'ai commencé à faire de la médiation dans ce type de contexte, donc de la médiation sur le lieu de travail on va dire. Et puis en fait, il y a maintenant 5-6 ans, j'ai eu l'opportunité de glisser vers des contextes familiaux. D'abord sur des sujets de succession ou d'anticipation de succession. Donc voilà, des familles, des fratries et leurs parents, avec ou sans leurs parents on va dire. C'est un univers qui me plaît bien parce que c'est effectivement très intime, très intense. Justement, je pense que quand on est médiateur transformatif, pour revenir à un point que tu abordais tout à l'heure, Il y a un moment donné où finalement on se met, alors il ne faudrait pas que ce soit mal perçu, mais à aimer ça en fait, l'expression intense des émotions. C'est-à-dire que ça fait plus peur, on le considère comme étant de l'or, un matériau riche, c'est de la vérité, c'est des choses qui ont besoin de sortir et qui ont besoin d'être mises en valeur, etc.

  • Speaker #1

    C'est l'authentique.

  • Speaker #0

    Voilà, donc c'est très authentique.

  • Speaker #1

    On enlève les masques.

  • Speaker #0

    Dans le familial, on a vraiment cette dimension-là.

  • Speaker #1

    Une famille de plusieurs générations, c'est la particularité quand même.

  • Speaker #0

    Plusieurs générations ou bien parfois simplement au sein d'une fratrie.

  • Speaker #1

    Dans des contextes de succession patrimoniale, je crois.

  • Speaker #0

    Voilà, prise en charge de la dépendance d'un parent, des décisions difficiles à prendre entre frères et sœurs qui se parlent plus ou moins ou plus ou moins bien depuis un certain temps, etc. sur la dépendance de leurs parents, mais sur aussi la façon de gérer telle ou telle partie de patrimoine commun, une indivision, que sais-je.

  • Speaker #1

    Il y a un tel besoin dans ce domaine.

  • Speaker #0

    Voilà, toutes ces choses-là. Voilà, et puis du coup, je me suis mis aussi à accompagner des couples, soit... Des couples qui ne sont pas dans une dynamique de séparation, mais qui identifient qu'ils ont du mal à aborder des sujets difficiles et que ça peut les aider d'être soutenus ponctuellement comme ça dans des efforts de dialogue. Ou bien au contraire, des couples divorcés, séparés, qui mesurent l'intérêt de retrouver le chemin du dialogue pour... on va dire vivre cette relation qui de toute façon continuera, en particulier quand ils ont des enfants, de la vivre sereinement, justement, en sortant de la déstabilisation et de la fermeture l'un à l'autre, voilà, pour de nouveau peut-être pas forcément se fréquenter de manière étroite, mais au moins se croiser de façon sereine et constructive.

  • Speaker #1

    Je t'ai interrompu tout à l'heure, justement, sur... Le questionnement personnel, la préparation, tu m'as dit que tu voulais revenir là-dessus.

  • Speaker #0

    Oui, tu parlais de l'engagement du médiateur transformatif et aussi de sa... de sa tolérance à la violence qui peut s'exprimer en médiation.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est la peur de la violence qui m'interpelle ? Je le vois quand même assez fréquemment.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est un vertige pour beaucoup de médiateurs débutants. Et c'est aussi justement une des raisons pour lesquelles on peut revenir, même si on n'en avait pas l'intention, à des réflexes très directifs. Oui, c'est un vrai épreuve. En transformative, on gère ça plutôt bien, puisque l'intervention principale, le type d'intervention majeure qu'on utilise en médiation transformative, c'est ce qu'on appelle le reflet. et donc comme son nom l'indique ça consiste à refléter fidèlement ce que les personnes expriment, chacune d'entre elles au moment où elles l'expriment et quand je dis fidèlement c'est en employant le même champ lexical, les mêmes mots, les mêmes expressions clés, signifiantes celles qui sont chargées justement de déstabilisation et de fermeture donc dès qu'il y a de l'émotion forte, dès qu'il y a des procès d'intention Et dès qu'il y a des mots chargés, on les reprend. Et on reprend également l'énergie avec laquelle ils sont exprimés.

  • Speaker #1

    Je me souviens du reflet joufflu, donc.

  • Speaker #0

    Notamment on dit joufflu ou charnu, c'est-à-dire que...

  • Speaker #1

    C'est riche comme reflet.

  • Speaker #0

    Voilà, c'est pas juste un petit miroir qui reprend les trois derniers mots de la personne. Ça,

  • Speaker #1

    c'est la version médiation humaniste où effectivement, tu as une phrase clé. Je sens la tristesse, je sens la colère, etc.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Voilà. Tu es dans aussi quelque chose d'assez pur et assez court.

  • Speaker #0

    Oui, alors là, quand on offre un reflet, on l'offre assez complet. Tu disais joue plus effectivement, c'est un mot qui me vient de mon mentor John Peter Weldon en la matière. C'est-à-dire qu'on lui donne, on donne à voir, et c'est là que je voulais en venir, on donne à voir à la personne qui vient de s'exprimer. de manière brute et la plus complète possible ce qu'elle vient d'envoyer.

  • Speaker #1

    C'est la même intention du coup que le miroir.

  • Speaker #0

    Pour qu'elle puisse se rendre compte, parce que comme on a dit, la personne elle est déstabilisée, elle est confuse, elle manque de lucidité puisqu'elle est aux prises avec ce conflit et ses effets incapacitants. elle ne se rend pas forcément compte de ce qu'elle envoie. La première fonction de ce reflet, c'est de lui donner à voir ce qu'elle a envoyé, pour qu'elle puisse décider, on en revient à l'idée de décider, si oui ou non c'était ça qu'elle voulait envoyer. Et donc décider si elle veut... le réaffirmer, le compléter, le corriger, le nuancer. Si elle décide de le nuancer, notamment, on va considérer qu'en plus d'être un mouvement d'empowerment, c'est-à-dire une décision de modification de ce qu'elle a voulu exprimer, c'est un mouvement dit de reconnaissance, c'est-à-dire un mouvement d'ouverture ou d'attention à l'autre, parce que si je reprends un mot dont je me suis rendu compte qu'il était trop violent à ton égard, C'est une manière de prendre soin de toi et de me réouvrir à toi.

  • Speaker #1

    Donc tu ne vas pas dans de la reformulation ?

  • Speaker #0

    Ah non, il n'y a pas de partage, il n'y a pas de recherche de valeur ajoutée.

  • Speaker #1

    Je suis pas à l'aise avec la reformulation là-dessus. Je trouve que toujours cet aspect perroquet me dérange. Et puis en plus tu vas t'être presque dans l'interprétation si tu reformules c'est pas les bons termes, bah non j'ai pas dit ça j'ai dit ça, ça veut pas dire la même chose

  • Speaker #0

    Alors c'est marrant parce que le fait que ce soit très fidèle justement quand on forme des médiateurs transformatifs ils ont peur ils peuvent avoir peur que qu'il soit pris pour des perroquets. Parce que comme on va reprendre les mêmes mots, les mêmes expressions clés, alors on ne va pas redire les choses forcément dans le même ordre, mais en fait cet effet perroquet, il peut être perçu éventuellement par un observateur externe qui regarderait une vidéo ou quoi, mais pour les personnes qui sont aux prises avec le conflit, en fait elles sont très contentes d'entendre ce qu'elles ont dit, et d'ailleurs si elles ne retrouvent pas ce qu'elles ont dit, soit parce qu'on était à côté de la plaque, soit parce qu'elles ne se rendaient pas compte de ce qu'elles disaient, elles vont encore une fois nous corriger, et on est très content d'être corrigés parce que c'est un mouvement d'empowerment de leur part, elles trouvent la ressource et la force et elles prennent la décision de te corriger toi le médiateur, qui n'est pas une entité surplombante, bref elles ont ce mouvement là. Voilà, elles ne se rendent pas compte qu'on fait le perroquet, puisqu'elles...

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas un perroquet, là, je corrige, ce n'était pas mon propos de dire... C'est par rapport à de la reformulation basique telle que tu peux la prendre en approche collaborative, ça fait partie du truc, reformuler, et la reformulation même, elle est croisée, c'est-à-dire qu'on travaille à quatre, les deux avocats, les deux clients, et l'avocat de l'autre va reformuler ce qui va être dit. Et c'est dans l'approche... un peu puriste, systématique. Donc tu peux avoir des entretiens qui vont durer hyper longtemps avec un fort aspect reformulation, mais qui est neutre. Et bon, moi, la petite critique que je fais, c'est que des retours de gens qui l'ont vécu ont eu cet aspect perroquet un peu agaçant. et qui en plus leur a fait perdre de l'attention. Tu vois, là, de ce que j'ai compris du reflet joufflu, donc c'est qu'il y a... Oui, c'est vraiment la miroir. Tu mimes même avec le geste, la façon dont les choses... Il y a presque un truc corporel aussi. Tu vas bouger en disant, toi, pour toi, c'est comme ci, c'est comme ça. Tu vois, tu vas restreindre les émotions. Et quelque part, on a besoin de ça quand on est en médiation, d'être entendu. et peut-être aussi d'être entendus dans nos émotions, dans l'indignation que tu peux exprimer à un instant T. Donc je crois que c'est plutôt...

  • Speaker #0

    Principalement...

  • Speaker #1

    C'est appétant pour la personne qui le vit.

  • Speaker #0

    Et ça va nous permettre de revenir sur l'idée de la violence, entre guillemets, ou en tout cas au moins de la violence verbale. C'est-à-dire que... Bon, effectivement, le reflet n'est pas systématique, mais on l'offre, on le produit quand on arrive à se glisser dans la conversation, bien sûr, y compris d'ailleurs de manière un peu volontariste. Quelquefois, il faut se faire un petit peu de la place sans brusquer les gens. On l'offre en priorité quand on a été soi-même percuté, impacté dans son empathie qu'on a quand on écoute chacun des participants. par justement les manifestations de cette déstabilisation et de fermeture. C'est-à-dire qu'on va offrir des reflets en priorité quand les gens expriment des émotions fortes, expriment leur désarroi, expriment leur confusion, ou en tout cas la montrent, et également quand elles expriment leur fermeture à l'autre, c'est-à-dire principalement, puisqu'on va parler de violence, leur hostilité, leur procès d'intention, leurs attaques, etc. Et on va aller justement essentiellement là-dessus. On ne va pas refléter des trucs qui ne sont pas chargés.

  • Speaker #1

    C'est l'expression de besoin, l'émotion. En même temps, c'est que tu as touché à des choses fortes. Derrière, il y a des valeurs, etc.

  • Speaker #0

    Exactement. Justement dans cette idée de leur donner à voir ce qu'elles ont exprimé, et en même temps de donner aussi à voir à l'autre ce que la personne qu'on reflète vient d'essayer d'exprimer, on leur offre la possibilité de prendre conscience de ce qui est exprimé et d'en faire quelque chose, de faire des choix. Et donc pour en revenir à quand c'est violent, Si les gens deviennent effectivement très agressifs, très violents, voire même se lèvent de leur chaise en esquissant un mouvement qui pourrait dégénérer vers une vraie violence physique, on ne va pas leur dire calmez-vous, ça ne se fait pas On va leur donner en reflet la même violence. Et en fait, ça n'est pas directif, ça n'est pas censeur, mais en revanche, ça a un effet de régulation qui est extrêmement puissant parce que la personne est confrontée de manière brute à ce qu'elle vient d'envoyer. Et là, elle peut se dire, peut-être que je suis un peu à côté de la plaque, que ce n'est pas exactement ça ou que je ne suis pas dans la bonne mesure. Et donc ça peut concourir à cette fameuse reprise de contrôle sur elle-même et cet ajustement à l'autre dans leur expression.

  • Speaker #1

    Je me dis qu'on a tous besoin de reflets joufflus, mais c'est vrai, puisqu'on n'a pas forcément conscience de ce qu'on envoie.

  • Speaker #0

    Exactement. Et le plus tu es embringué dans cette spirale négative, le moins tu as conscience de ce que tu envoies. et donc c'est vraiment le truc le truc majeur un jour ma fille qui avait

  • Speaker #1

    4-5 ans je lui fais gros yeux, j'étais hyper fâchée contre elle elle me dit mais tu me fais peur t'as l'air d'un loup ça me cassait le feedback d'un gamin ça me fait bien alors là on va pas le dire mais ça a un peu la même fonction

  • Speaker #0

    elle te renvoie à ce moment là ma posture d'adulte etc il y avait exactement et du coup si tu veux pour faire ça ce qui est en général ce qu'on va faire principalement quand vraiment les gens sont aux prises avec ces effets déstabilisants du conflit pour faire ça t'as pas besoin d'avoir anticipé quoi que ce soit ou de préparer à quoi que ce soit la seule préparation que tu dois avoir C'est celle dont tu as besoin, et ça dépend peut-être des gens, pour être pleinement disponible à ce qui survient dans l'instant T. Et donc pour pouvoir donner cette empathie, cette écoute pleine et entière, cette pleine présence à chacun de tes participants, à chaque instant de la conversation, sans faire des plans sur la comète de ce qu'on pourrait faire après, et sans se prendre la tête non plus sur ce qui s'est passé avant. Ce qui est important, c'est ce qui se passe dans l'instant. Tu restes dans le sillage immédiat et tu leur donnes à voir ce que tu as ressenti finalement dans ton empathie comme étant important pour eux dans cette conversation qui se déroule sous tes yeux.

  • Speaker #1

    Donc je te rejoins, la disponibilité qui est nécessaire, ça me paraît compliqué de l'avoir en étant seule en plus parce que tu n'es pas en commédiation là, sur une période plus longue que deux heures. Parce que déjà physiquement on est... On n'est pas fait pour ça, avoir une attention aussi importante. Ça me paraît...

  • Speaker #0

    J'avais pas fini d'être répondu à ta question tout à l'heure. Le plus d'heures, c'est effectivement mon max pour l'interpersonnel. En revanche, quand on est dans du collectif qui a plus de monde, moi, je fonctionne plutôt par demi-journée, 3h, 3h et demi.

  • Speaker #1

    Bien sûr, bien sûr.

  • Speaker #0

    Et quand ils sont nombreux, c'est vrai que d'être en commédiation peut être effectivement utile.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu as réfléchi à ce que cela t'apportait à titre personnel ?

  • Speaker #0

    Ah bah oui oui, et c'est très lié à ce qu'on vient d'évoquer, c'est-à-dire que pour bien faire ce job-là, je dirais que finalement les techniques, les méthodes, les quelques interventions qu'on n'a pas forcément détaillées mais on est revenu sur le reflet, ce qui est le principal, c'est une chose, c'est important, c'est utile, mais ce qui est le plus important c'est son savoir-être, c'est la gestion de soi-même. C'est-à-dire que d'ailleurs idéalement... c'est un peu notre graal, c'est de dire, mais moi je suis assez convaincu de ça, on pourrait ne rien faire et ne rien dire. C'est-à-dire que dès lors que, je ne pense pas qu'on aura forcément le temps de revenir là-dessus, mais que les conditions ont été réunies pour que les personnes acceptent de se rencontrer, elles ont déjà pris des premières décisions qui les mettent sur le chemin de cet empowerment. Et donc... il y a de grandes chances qu'elles arrivent à opérer cette transformation de leur interaction, comme on l'a évoqué plein de fois. Dès lors, si moi je suis là, que j'incarne cet espace de dialogue, et que, en plus, je leur donne à voir moi-même ce qu'eux cherchent à retrouver, c'est-à-dire le calme et l'ouverture, Euh... L'essentiel du job est fait. Et donc, je vais revenir à ta question, ça veut dire que ce que je vais cultiver moi, je le dis souvent aux étudiants, aux stagiaires, la première chose à faire, c'est de s'occuper de vous-même en tant que médiateur. Arrêtez de vous prendre la tête avec ce que vous devriez faire ou pas pour prendre soin ou pour prendre en charge ces personnes. Occupez-vous déjà vous-même, d'être pleinement présent à ce qu'ils vont vous montrer et d'être vous-même en pleine possession de vos moyens calme, serein, lucide, et vous-même, pleinement ouvert à la différence des autres, et à leur particularité.

  • Speaker #1

    Donc c'est très vertueux.

  • Speaker #0

    Et donc en fait, de cultiver ça, pour revenir à qu'est-ce que ça m'apporte, j'ai tendance à penser qu'effectivement ça me fait progresser, ou ça développe mes compétences émotionnelles et relationnelles. Donc ma capacité de réguler Régulation émotionnelle, alors ça c'est un autre sujet, je ne sais pas s'il faut rentrer vers ça. Mais voilà, mes propres capacités de régulation émotionnelle, c'est-à-dire de maîtriser ce qui me traverse, pas forcément de le maîtriser, mais de l'accepter et de le laisser passer comme un méditant, comme quelqu'un qui fait de la pleine conscience. Ça développe également la capacité à donner de l'empathie à quiconque, quand bien même ça peut être des personnes. qu'on aurait on va dire tendance à détester parce qu'on rencontre pas que des gens avec lesquels on se sent pleinement en harmonie parmi les participants qu'on a dans les médiations et donc voilà je pense que ça m'apporte sur tout ça et aussi cette une discipline alors aussi un effort parce que c'est un effort l'ouverture oui oui oui alors il y a Il y a de la discipline et de l'effort sur deux choses à mon avis. Effectivement, d'abord l'attention, le contrôle attentionnel, c'est-à-dire le fait de ramener toujours son attention à ce qui se passe dans l'instant, plutôt que de se laisser perturber outre mesure par... on va dire toutes les pensées perturbantes par lesquelles on peut être traversé, toutes les émotions perturbantes par lesquelles on peut être traversé, etc. Et donc cette capacité à ramener son attention sur ce qui se passe là et ce sur quoi on a décidé de se focaliser, c'est-à-dire ce qu'expriment les gens dans l'instant. Et effectivement, la deuxième est consécutive, dès lors que je suis pleinement attentif. et que je ne prends pas d'avance sur le processus et que je ne me laisse pas non plus garder en arrière par ce qui s'est passé avant, que j'ai éventuellement raté. Je ne suis plus disponible pour accueillir l'autre, quel que soit ce qu'il a à donner, et avec tout ce qu'on dit quand on est médiateur, sans jugement, etc. Sans jugement. le jugement on l'a toujours mais encore une fois il faut l'accepter comme étant quelque chose qui est si on en est conscient et dès lors qu'on est conscient on le laisse passer et on se recale sur ce que la personne cherche à exprimer

  • Speaker #1

    Quel est ton rapport au conflit ? Tu l'as interrogé, est-ce que t'es fly ? fight ou freeze ?

  • Speaker #0

    Je pense que par nature, je serais plutôt flight, donc la fuite, l'évitement. Je pense qu'on est pas mal de médiateurs dans ce cas-là. J'ai souvent cette réponse. On est allé vers ça parce que finalement, on n'aime pas ça. Et vous,

  • Speaker #1

    oui.

  • Speaker #0

    Et en même temps, et je pense en particulier grâce à l'approche transformative, Je pense qu'il y a une forme d'apprivoisement de ça et tout ce qu'on vient de dire sur le fait de se colter, de se... confronté volontairement au conflit, et d'autant plus quand il est intense, ma petite aptitude fait mesurer la valeur de ce qui s'exprime dans l'interaction conflictuelle et la façon dont on peut l'utiliser pour transformer les choses d'une manière plus positive. Et donc ça veut dire que je pense que dans ma vie de tous les jours, je suis en train de faire des choses J'ai maintenant... On se refait pas, hein, mais j'ai davantage de capacité à... à faire face au conflit en fait, et à essayer de mobiliser tout ce que j'ai appris, même si c'est les cordonniers les plus mal chaussés, pour justement prendre à bras le corps les interactions conflictuelles et essayer de les transformer.

  • Speaker #1

    Ok, écoute, je te remercie Olivier,

  • Speaker #0

    c'était un échange, un plaisir,

  • Speaker #1

    j'espère qu'on a donné envie aux gens qui nous écoutent de découvrir la médiation transformative, où est-ce qu'on peut les envoyer ? Vous voyez justement, si on veut se former, sur ta page LinkedIn, il y a quelques infos, des formations, il y a cet institut.

  • Speaker #0

    Il y a un institut américain auquel je suis affilié, dont je suis un fellow, comme on dit, qui s'appelle l'ISCT, Institute for the Study of Conflict Transformation, qui se trouve... Adresse web transformativemediation.org, tout attaché. D'accord. Transformativemediation.org. Mais c'est en anglais.

  • Speaker #1

    Si on veut se former, on se conçoit d'ailleurs au médiateur, parce que ces interactions, c'est aussi très, très utile en tant que conseil.

  • Speaker #0

    On peut prendre contact avec moi, tout simplement, parce que c'est plus simple. Sur la page LinkedIn ? Sur la page LinkedIn, par exemple. C'est parfait.

  • Speaker #1

    Eh bien, allez-y. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci à toi, Émilie. C'était un plaisir.

  • Speaker #1

    À bientôt. Au revoir. Merci d'avoir écouté cet échange. N'hésitez pas à me faire part de vos remarques via mon site www.etg-avocat.com Vous pouvez également me suivre sur LinkedIn. A bientôt !

Description

Dans ce troisième épisode du podcast, je reçois Olivier Chambert-Loir, médiateur, formateur et animateur du réseau francophone de médiation transformative.


Olivier nous partage :


  • Son parcours professionnel dans lequel il a évolué d’une posture d’expert puis de facilitateur venant accompagner un processus de décision en le structurant, vers une posture non directive, de non-sachant à travers celle de médiateur,


  • La lecture de l’approche transformative du conflit popularisé par Robert A. Baruch BUSH et Joseph P. FOLFER et ses impacts sur les personnes,


  • La proposition d’accompagner un phénomène naturel où le médiateur transformatif vient, en restant dans le sillage immédiat des personnes, leur donner un coup de pouce pour transformer une interaction conflictuelle en un dialogue redevenu constructif,


  • Sa conviction que les êtres humains ont la motivation et la capacité d’inverser la tendance et qu’il s’agit de soutenir des mouvements naturels leur permettant de reconquérir une autonomie personnelle et leurs pleines capacités de décisions,


  • La posture du médiateur transformative, la peur de la violence en médiation et l’engagement du médiateur,


  • La technique du reflet en médiation et son effet régulant sur la conversation.


À tous les professionnels du conflit et notamment les avocats, prenez le temps d’écouter cet échange qui pourra vous faire appréhender différemment les situations conflictuelles qui vous sont présentées !


Bonne écoute,

Émilie


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Retrouvez Olivier Chambert-Loir sur Linkedin

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En attendant de se retrouver le 10 de chaque mois pour un nouvel épisode, je vous invite à vous abonner au podcast et à laisser 5 étoiles sur votre plateforme d’écoute préférée.


Si vous souhaitez continuer la discussion autour de la médiation, retrouvez-moi sur mon compte Linkedin Emilie Thivet-Grivel.


Et si vous souhaitez en savoir plus sur le cabinet ETG Avocats et nos services de médiation, rendez-vous ici.


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Crédits :

Antidot est un podcast d’Emilie Thivet-Grivel.
Stratégie : Mélanie Hong.
Montage et mixage : Morgane Bouchiba.
Designer graphique (vignette) : Emma Wise.
Musique  : Aberdeen, Greg McKay.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, vous écoutez Antidote, le podcast qui nourrit la réflexion des professionnels du conflit. Je m'appelle Émilie Thivet-Grivel, je suis avocate et médiatrice, fondatrice du cabinet ETG Avocats, et chaque mois je vais à la rencontre de professionnels qui apportent un éclairage à nos questions. Comment dépasser ces conflits qui entravent nos vies ? Comment rétablir un dialogue avec cet autre avec lequel on doit faire ? C'est l'objet de ce podcast que de vous partager mes rencontres et outils de réflexion pour changer de regard sur la conflictualité et l'organiser autrement. Aujourd'hui, je reçois Olivier Chamberloir. Médiateur, formateur et superviseur en médiation, Olivier, tu es un des représentants en France du courant de médiation transformative. Tu as d'ailleurs traduit de l'américain au français l'ouvrage de référence de Bush et Folger, alors il s'agit de Robert Barour Bush, pas d'une autre famille, sous le nom La médiation transformative, une approche non directive des conflits aux éditions RS. Tu animes le réseau francophone faisant connaître cette approche. Tu as aussi une casquette de coach puisque tu as fondé il y a quelques années une société de coaching et de formation. Après une formation initiale d'ingénieur, puis un parcours professionnel de consultant au sein d'entreprises de conseil. Comment tu es venu à la médiation et est-ce que tu te souviens plus particulièrement ce qui t'a fait te dire que c'était vraiment dans cette posture de tiers et en particulier de non-sachant que tu te sentais le mieux ?

  • Speaker #1

    Pour répondre à ta question, c'est venu la médiation un petit peu progressivement, parce que comme tu l'as rappelé, j'ai commencé ma carrière comme consultant en organisation et management. Ce qui voulait dire accompagner des entreprises, des dirigeants et leurs équipes sur des projets de réorganisation par exemple. Et donc ça impliquait, c'était un travail de tiers, mais qui impliquait beaucoup de conseils, de suggestions, de travail d'experts, de sachants. Bien sûr de la facilitation du dialogue et de la prise de décision commune. mais avec toujours une idée derrière la tête, des orientations vers lesquelles emmener les gens, etc. Et des convictions à afficher, un avis sur toute chose. Je caricature un peu peut-être, mais c'est ce qui était attendu. C'est pour ça que les clients payaient mon cabinet. Je dois dire que j'étais pas forcément à l'aise avec cette posture, en particulier quand j'étais tout jeune, et face à des dirigeants assez capés qui pouvaient m'impressionner un peu, et d'être propulsé comme ça, y compris d'ailleurs dans des situations parfois à transmettre un savoir que je venais d'acquérir au sein du cabinet, et d'être propulsé comme ça, comme un expert ou comme un sachant sur un certain nombre de choses sur lesquelles j'étais pourtant assez débutant. J'étais pas forcément très à l'aise avec ça. Je m'en suis accommodé. Après, j'ai continué ce métier-là. Au bout de quelques années, je me suis mis en indépendant. Donc, j'ai continué à faire ce métier-là.

  • Speaker #0

    C'était ma question parce que je me souviens plus si tu étais salarié au départ.

  • Speaker #1

    Oui, j'ai commencé.

  • Speaker #0

    Salarié de boîte qui prestait du conseil, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Exactement, un cabinet de conseil qui était assez connu, qui s'appelait Bossard Consultant, qui a été absorbé depuis par le groupe Capgemini. Voilà, et à un peu moins de 30 ans, je me suis mis à mon compte, et j'ai continué à faire la même chose en tant qu'indépendant. Et du coup, petit à petit, un peu plus à ma manière, je me suis un peu réaligné avec la façon dont j'entendais procéder, pour être plus confortable. Et donc, dans une posture que j'ai cherché à rendre de moins en moins, justement, sachant toute directive, d'être plus à l'écoute, de laisser plus les gens prendre leurs décisions par eux-mêmes. Et donc je suis allé dans cette direction de la facilitation, sachant que dans le mot facilitation, il y a quand même cette idée de structurer un process de discussion ou de décision, de l'outiller avec des méthodes, etc. Et ça aussi, c'est pour ça que je dis que ça a été progressif, j'ai finalement cherché à m'en libérer de plus en plus. Et bref, quand je me suis rendu compte que dans mes interactions avec mes clients, je faisais des choses qui s'apparentaient au coaching, c'est-à-dire accompagner les gens dans leurs réflexions sur la façon dont ils fonctionnent eux-mêmes et en interaction avec leur environnement. Quand je me suis rendu compte que je faisais aussi quelque chose qui pouvait s'approcher de la médiation, c'est-à-dire aider des gens dans leurs efforts pour dialoguer, pour prendre des décisions ensemble, j'ai cherché justement à me raccrocher à des écoles de médiation notamment, à voir quelles formations complémentaires je pouvais suivre, dans quel courant je pouvais m'inscrire, etc. Et j'ai eu un peu de mal parce qu'en fait j'ai trouvé... J'ai trouvé beaucoup de choses qui ressemblaient pas mal à cette facilitation que je pratiquais déjà, c'est-à-dire, encore une fois, l'accompagnement assez structuré dans des processus de dialogue et de décision, avec des méthodes et des outils que pour la plupart j'avais déjà pratiqués, comme le problem solving ou la négociation raisonnée, ou d'autres méthodes de créativité, etc.

  • Speaker #0

    Des approches ou non ? encore très interventionniste en fait. C'est un peu ça ?

  • Speaker #1

    Oui, en tout cas en tant qu'aujourd'hui que médiateur transformatif, je considère comme très interventionniste, assez structurante. Moi,

  • Speaker #0

    c'est ce qui m'a frappé quand j'ai regardé ton parcours dans le détail, c'est qu'on a l'impression que tu es allé vers quelque chose de plus en plus épuré finalement.

  • Speaker #1

    Exactement. Je suis vraiment toujours dans cette quête-là et c'est ça que j'aime dans l'approche transformative, c'est qu'en fait, on est amené à se questionner en permanence dans le travail réflexif qu'on fait comme tout professionnel de l'accompagnement. Quand on s'interroge sur... Sur ce qu'on fait, ce qu'on a fait, pourquoi on l'a fait comme si, comment on aurait pu le faire autrement, c'est qu'on est toujours en train de s'interroger sur où est-ce qu'on a mis le curseur en termes d'interventionnisme et de directivité. Est-ce que c'était pour de bonnes ou de mauvaises raisons ? Est-ce que c'était pour se rassurer soi-même ou pour se montrer utile, pour se convaincre que soi-même on était utile ? Ou bien est-ce que c'est parce qu'il y en avait vraiment besoin ? J'ai cherché et j'ai fini par trouver l'approche transformative qui correspond justement à cette quête du geste épuré de l'accompagnement du dialogue.

  • Speaker #0

    Je voulais que tu puisses un peu nous décrire la particularité de ce process de médiation. et pour ceux qui ne la connaissent pas et peut-être aussi déjà lever un malentendu parce qu'on pourrait se dire que Transformative il s'agit de transformer les gens et non il s'agit de travailler sur le conflit Bonne remarque C'était ton sujet, si tu peux décrire

  • Speaker #1

    Déjà Transformative c'est un peu un anglicisme, c'est la traduction qui nous est parvenue via le Québec du mot en l'état anglais, enfin américain. Donc certains disent transformatrice ou transformante, etc. Mais comme tu l'as suggéré, ce qu'on cherche à transformer ou à aider à transformer, la transformation qu'on cherche à soutenir quand on fait de la médiation transformative, c'est celle de l'interaction conflictuelle, c'est pas celle des gens eux-mêmes. Après, d'aucuns te diront que dès lors que tu participes à un processus comme ça de dialogue, ou que tu es accompagné par quelqu'un dans quelque chose, d'une manière ou d'une autre, ça te fait bouger, ça te transforme, mais c'est pas l'objet. L'idée là, c'est de dire, le conflit, c'est une crise de l'interaction entre des êtres humains, et c'est une crise que la plupart du temps, d'ailleurs, les êtres humains arrivent à transformer eux-mêmes, c'est-à-dire à... à rétablir leur interaction en quelque chose de plus constructif. Mais effectivement, de temps à autre, ils peuvent avoir besoin d'un tiers pour les soutenir dans cet effort. Et donc la transformation dont on parle, c'est la transformation de l'interaction conflictuelle en un dialogue. devenu ou redevenu constructif. Quelque chose que les gens, encore une fois, a priori, savent faire par eux-mêmes, simplement par leur humanité et leur dimension sociale, et qui est un processus naturel dans lequel on leur donne un coup de pouce en tant que médiateur.

  • Speaker #0

    Alors, un coup de pouce pour reconquérir une autonomie personnelle. C'est ce qui m'avait vraiment plu. Je trouvais très responsabilisant, parce que ce que j'ai retenu de ton intervention qui avait marqué les esprits au CNAM, c'est qu'on est vraiment dans une logique où on va essayer de les aider à retrouver en eux des ressources pour retrouver... ce calme qui fait complètement défaut pendant ce moment de grande crise donc c'est quelque chose qui est très exactement c'est vraiment je ne trouve pas les mots mais c'est l'empowerment shift si j'en parle correctement alors l'empowerment shift c'est effectivement les

  • Speaker #1

    mouvements que les gens opèrent pour reprendre le contrôle d'eux-mêmes et c'est ce à quoi on est le plus attentif en médiation transformative et effectivement tu as complètement raison c'est central c'est à dire que Quand on fait de la médiation transformative, on met un petit peu de côté la recherche de solutions, en considérant que les personnes sont, ça c'est assez classique de le dire, les meilleurs experts de leurs solutions et de leurs problèmes, et les plus à même de trouver leurs solutions. Dès lors... qu'elles retrouveront leur capacité à dialoguer de façon constructive. Et donc on considère la solution comme, on va dire, un bénéfice collatéral, ou un bénéfice de second niveau par rapport à une interaction transformée, justement, qui a retrouvé son caractère constructif. De même, on considère que... la fameuse reconnaissance mutuelle qu'on peut attendre des personnes en conflit, est quelque chose qui ne peut pas être forcé.

  • Speaker #0

    qu'elle doit être volontaire et elle doit découler d'une décision des personnes de se réouvrir l'une à l'autre et donc d'une capacité retrouvée de chacune à prendre cette décision. Et donc on en vient à cette histoire d'empowerment, c'est-à-dire de dire ce qui est central dans tout ça, c'est que les personnes retrouvent... leur pleine capacité cognitive, on va dire, et leur pleine capacité à décider ce qu'elles veulent faire et comment elles veulent le faire. notamment de se réouvrir à l'autre. Et donc le mot empowerment, qu'on n'a d'ailleurs pas traduit, on l'a gardé comme ça, on pourrait le traduire comme étant reprise de pouvoir sur soi, ou certains disent regain de pouvoir en soi, mais c'est finalement une reprise de contrôle sur soi-même, c'est-à-dire le fait de, petit à petit, par petits mouvements, justement les fameux empowerment shifts, Euh... retrouver en fait une forme de calme, d'une forme de clarté, de lucidité et une forme de justement capacité à décider ce qu'on veut faire, notamment de l'interaction avec l'autre.

  • Speaker #1

    Moi ce que j'aime bien dans cette approche, et pour l'avoir vécu, à titre perso dans des conflits, c'est que quelque part on prend en compte le conflit comme... Une force en soi, c'est presque le troisième personnage dans la pièce, et que c'est ce conflit qui bouleverse les gens, qui les fait se transformer aussi, mais dans ce qu'ils ne sont pas habituellement, parce qu'on a de la colère, on a de la déception, on est attaqué dans des choses très intimes, et donc il y a cette version un peu démoniaque, là je me souviens de tes petits dessins. Et cette spirale du conflit qui appelle le conflit, etc. Et d'ailleurs qui nous emmène dans le pire qu'on voit actuellement. Et c'est assez... déculpabilisant, dédiabolisant, en même temps très humain, parce que tout le monde peut se retrouver dans ces phases-là. Je trouve qu'on sort en plus, enfin, du schéma binaire. Où on attend que le problème, c'est forcément l'autre, et l'autre est un diabolique. Nous, on n'a rien à se reprocher. Alors qu'en réalité, l'un, l'autre, c'est un truc qui s'auto-alimente. Il s'agit du coup d'inverser, je me rappelle bien de tes mouvements, d'ailleurs j'ai retrouvé dans mes notes, de spirales. Il s'agit de changer la logique de la spirale du conflit qui s'auto-alimente, où on devient de plus en plus... Et ça, dans nos conflits, moi en tant qu'avocate aussi, en matière familiale, je ne vois que ça. C'est-à-dire que le truc s'auto-alimente, la radicalité va s'entretenir, s'auto-alimenter, voilà, c'est exacerbé.

  • Speaker #0

    Et c'est tout à fait ça, c'est-à-dire que tout ce qu'on vient de dire, ou de commencer à dire... sur ce à quoi on s'intéresse en tant que médiateur transformatif et la façon dont on procède, découle de cette approche, ce regard du conflit que tu viens de résumer, c'est-à-dire de regarder le conflit comme cette crise d'interaction humaine qui a des effets sur les personnes qui sont aux prises avec ce conflit et ces effets qu'on résume. de la façon suivante, en disant que finalement le conflit vient déstabiliser la personne dans ce qu'elle est, c'est-à-dire qu'elle devient confuse, elle est submergée par des émotions généralement désagréables, qui viennent, ces émotions incidentes venant, comment dire... réduire ses capacités cognitives, en fait, et sa capacité à regarder les choses d'une façon lucide, mesurée, calmement, et sa capacité également à exprimer clairement ce qui est important pour elle. Et la deuxième chose qui est consécutive à cette déstabilisation, c'est... la perte de sa capacité naturelle d'ouverture à l'autre. Et donc ce qu'on appelle, les américains disent self-absorption, mais nous en français on a résumé ça par fermeture, c'est-à-dire qu'étant déstabilisé, Je me replie petit à petit sur moi-même. J'ai du mal à considérer l'autre simplement dans sa différence, pour ce qu'il est dans sa différence. Et je vais soit l'éviter, soit l'attaquer, le dénigrer, le diaboliser.

  • Speaker #1

    Ça c'est tellement courant.

  • Speaker #0

    Et ces deux choses-là en plus, c'est là que tu l'as évoqué plusieurs fois, ce cercle vicieux ou cette spirale, c'est-à-dire que ces deux choses-là se renforcent l'une l'autre. C'est-à-dire que le plus je suis déstabilisé, le plus je me ferme à toi. et le plus je me ferme à toi, le plus ça te déstabilise à ton tour et renforce aussi ta dynamique de fermeture à mon égard et ça boucle aussi en interne à chacun c'est à dire que le plus je me comporte on va dire, de façon consécutive à ce repli sur moi, c'est-à-dire que je t'évite ou que je t'attaque, le plus ça me déstabilise moi-même, dans le sens où je ne suis pas fier, ça peut même me répugner si je prends trois secondes de recul, la façon dont je suis en train de me comporter vis-à-vis de toi, quand bien même je suis en train de te détester et de te diaboliser.

  • Speaker #1

    C'est peut-être pour ça que je tiens à ce que cette approche, qu'elle soit... elle soit diffusée, connue, parce qu'on a cette tendance, en tout cas, quand on a l'impression qu'on découvre les gens, dans les phrases qu'on entend, on découvre les gens au moment des séparations, typiquement. Oui et non, parce que c'est le moment de la crise, donc la crise révèle une facette de soi, mais qui n'est... Est-ce que c'est vraiment soi ? Tu vois ?

  • Speaker #0

    L'idée c'est que ça ne fait plus tellement soi en fait

  • Speaker #1

    On n'est plus soi-même Et je trouve qu'on gagnerait aussi en pédagogie avec nos clients Si on arrivait à leur expliquer que ça Parce que nous quand on les récupère Ils sont en crise totale Donc voilà Ça participe des ressources que j'essaie d'exploiter, mais pour leur faire faire ce travail sur l'autre qui n'est peut-être pas le diable, il y a tout un travail de remise en confiance, d'apporter un peu de repères dans ce moment de grande perte de repères, qu'il s'agisse d'une crise qui touche la vie professionnelle ou d'une crise familiale.

  • Speaker #0

    Tout à fait. D'ailleurs, on parlait de médiation, mais on fait aussi de l'accompagnement individuel de personnes qui sont en situation de conflit. Ça se rapproche peut-être de ce que pourrait faire un avocat qui est sensibilisé à la médiation, ou qui est même médiateur, qui est plutôt que de prendre en charge, par délégation on va dire, les manifestations de la fermeture à l'autre, c'est-à-dire une forme de défense, d'attaque, etc. par délégation de son client. plutôt de l'aider à prendre du recul, de reprendre le pouvoir sur lui-même pour réfléchir à des façons peut-être alternatives de gérer la situation.

  • Speaker #1

    Là, il y aurait un gros boulot à faire dans les écoles d'avocats, en fait. Parce que nous, on appuie au contraire. L'avocat qui reçoit la personne, s'il appuie. pas d'autres repères que ceux de base du contentieux, on va presque le conforter dans sa certitude que l'autre est le diable, qu'il est ceci, qu'il est cela, on va lui donner de l'empathie. Donc on ne va pas l'aider à sortir de sa croyance du moment.

  • Speaker #0

    Alors pour fréquenter pas mal d'avocats formés à la médiation,

  • Speaker #1

    ou avocats médiateurs,

  • Speaker #0

    je constate qu'effectivement, ça modifie souvent en profondeur leur façon d'exercer leur métier d'avocat.

  • Speaker #1

    Bien sûr, on ne fait plus le même premier entretien, ça je te confirme. Ah bah oui, du jour où tu commences à avoir un vrai changement de paradigme, ton premier entretien avec ton client n'est plus du tout le même. Ce n'est pas que tes intentions ne sont pas les mêmes, mais tu as une approche qui est beaucoup plus riche et qui est plus utile surtout. Qui est plus utile, parce que tu n'apportes pas moins de soutien, mais tu fais un accompagnement différent. Je m'éloigne un peu là.

  • Speaker #0

    Tu as dit un truc tout à l'heure sur lequel je ne suis pas revenu, qui est le fait de, je ne sais pas comment tu as dit ça, de dédramatiser le conflit. de le présenter ou de l'aborder comme quelque chose qui fait partie du quotidien.

  • Speaker #1

    C'est même un troisième personnage. J'aime bien cette idée, je l'ai retrouvée dans le livre de Gary Friedman, qui, je pense, y a évoqué encore quelqu'un, un autre formateur, qui, en séance, jouait la personne un peu diabolique qui murmure à l'oreille de l'un en disant Mais non, t'es en train de te faire arnaquer ! Tu vois, comme cette image qu'on voit des fois dans les BD, avec une bulle de quelqu'un qui... qui te suggèrent des intentions hyper négatives. C'est ça, le côté diabolique. Je ne sais pas si on l'a dans Astérix ou je ne sais pas dans quel BD, mais c'est vraiment ça. Parce qu'on est en permanence dans ce mouvement d'avoir des pensées où tu as envie d'en découdre et quelqu'un presque te les suggère. Donc le conflit est presque une force autonome.

  • Speaker #0

    Oui, et alors ce qui est intéressant, c'est que justement, je trouve que finalement c'est quelque chose qui est assez familier Pour les gens, l'idée c'est d'élargir un petit peu la vision qu'on a du conflit, c'est-à-dire que nous on est très comme ça en transformatif, c'est-à-dire que ce fameux cercle vicieux qu'on a décrit, de déstabilisation et de fermeture progressive qui s'auto-entretiennent, c'est quelque chose qu'on expérimente quasi quotidiennement dans nos vies, avec des niveaux d'intensité divers. Dès que finalement on interagit avec l'autre et qu'on est confronté à sa différence de sensibilité, de point de vue, d'opinion, etc. On peut voir se mettre en route. Ce phénomène où on est un peu déstabilisé par ce que dit l'autre, parce qu'on le comprend mal, qu'il y a un malentendu, qu'on y décèle un procès d'intention ou une attaque, ou que tout simplement on trouve qu'il est complètement à côté de la plaque par rapport à un sujet de société, etc. Et on voit se mettre en route cette mécanique. Et ce qui est très... Je voudrais être assez optimiste là-dessus, c'est-à-dire que ça nourrit chez nous la conviction qu'étant familiarisé à ce phénomène, on est également entraîné pour le transformer. Et donc cette fameuse inversion de la spirale que tu as évoquée tout à l'heure, on le fait en permanence, c'est-à-dire qu'on se réajuste dans une interaction avec l'autre quand on sent que c'est en train de déraper du côté de ce cercle vicieux. et on prend une décision justement, on reprend du pouvoir sur soi-même. par rapport à ce début d'agacement, etc. On s'est dit, non, quand même, ce serait trop bête de s'embrouiller pour cette histoire, etc. Et on fait un petit effort, on demande une clarification, on reprend un mot dont on a compris qu'il était peut-être perturbant pour l'autre, etc. Et donc, en fait, on sait faire ça, on le pratique quotidiennement.

  • Speaker #1

    Alors oui, on le pratique d'autant plus qu'on aura un entourage. pour le coup, bienveillants, qui vous confortent dans cette dynamique-là, ce qui n'est pas du tout courant. Alors, moi, j'ai un conseil là-dessus. Plus on s'entoure de médiateurs, plus on a des gens quand même qui sont habitués à faire cette balance et à ne pas penser en binaire. Et ce n'est pas fréquent. Tu vois, surtout même dans tes relations en général, les amis, ils sont pros, quoi. Ils sont pros, ils vont dans ton sens. C'est pas donner à tout le monde de dire, oui, mais attends, ça, c'est ta vision. Peut-être que l'autre, il a une autre vision. Tu vois, c'est quand même quelque chose. Moi, je vois que je suis hyper aussi influencée par les paroles bienveillantes de certains qui peuvent vraiment... agir, me faire redescendre, ouvrir quelque chose, une forme d'acceptation. Pour le coup, c'est plutôt vers des personnes comme ça que je vais aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Mais tu vois, c'est intéressant parce que dans ce que tu dis, effectivement, il y a l'idée d'avoir une forme de culture du dialogue ou une forme de vigilance sur la qualité des interactions qu'on a avec les uns et les autres.

  • Speaker #1

    C'est pas que ça, c'est pas que la culture du dialogue, c'est plutôt l'acceptation. de l'autre dans sa vraie différence. Tout à fait. Et tu vois, parce que le dialogue, sur le papier, on a tous la culture du dialogue, parce qu'on va te dire je suis pro-guerré Mais c'est plutôt, est-ce que tu l'acceptes, même dans sa bizarrerie, tu vois, dans sa façon d'être qui heurte des fois des choses profondes. C'est pas du tout évident, surtout en ce moment. L'ouverture, c'est compliqué de la cultiver. Quand tu vois des prises de position qui peuvent heurter des choses...

  • Speaker #0

    Bien sûr, pour des sujets qui sont graves.

  • Speaker #1

    Des sujets graves, là, on se fait en plein dedans.

  • Speaker #0

    Mais si on revient à des situations beaucoup plus anodines du quotidien, moi, j'ai pour coutume de dire que les personnes avec lesquelles on s'engage le plus souvent dans cette spirale négative de l'interaction conflictuelle, c'est les personnes avec lesquelles on est le plus proche et avec lesquelles on interagit le plus fréquemment. C'est-à-dire que si tu passes 24 heures en tête-à-tête avec quelqu'un, avec ton conjoint, avec un enfant de ta famille, etc., et que tu parles de choses, ou tu es amené à donner des avis, etc., tu as toujours potentiellement cette mécanique qui se met en route. Et tu as toujours, quel que soit le background de chacune des personnes, sa formation, sa sensibilité justement à... la nécessité ou l'utilité d'être ouvert à l'autre, y compris dans sa bizarrerie, ou dans ses positions, ses points de vue qui sont différents. Tu as toujours ces mécanismes de rappel qui se mettent en route. Parce que, ok, on a envie d'être soi-même et de s'affirmer dans sa différence, mais en même temps, on a consciemment ou inconsciemment l'envie, le besoin d'interagir avec l'autre. Et c'est ces deux choses-là qui se nourrissent d'ailleurs. on devient soi-même ou on est vraiment soi-même qu'en interaction avec les autres parce que c'est ça qui nous amène à affirmer notre identité c'est ça qui nous amène à l'enrichir aussi par influence successive, par comparaison, etc. Et donc ce qui est super important pour nous en médiation transformative c'est d'être profondément convaincu que intrinsèquement, les êtres humains, y compris quand ils sont partis assez loin dans cette spirale négative, ont à la fois la motivation et la capacité d'inverser la tendance. Parce qu'ils ont ce besoin d'une part de clarifier ce qui est important pour eux et d'affirmer leur singularité, et d'autre part de rester connecté à l'autre.

  • Speaker #1

    Oui, quand il y a une volonté, voilà, il n'y a pas toujours de volonté.

  • Speaker #0

    Pas toujours. Mais c'est vrai que quand même très très souvent...

  • Speaker #1

    Une volonté de rester en lien, tu vois.

  • Speaker #0

    Bien sûr, tu peux ne pas avoir la volonté de rester en lien, et il peut même être salvateur pour tout le monde de rompre la relation. Mais ce que je veux dire, c'est qu'au quotidien, on passe son temps à partir dans des dynamiques conflictuelles. et à les inverser, à les transformer, y compris quand on se fâche assez fort, et que derrière, sur l'initiative de l'un ou l'autre, on rentre dans un processus de clarification et de réconciliation. On se dit, tiens, il faudrait qu'on se parle du truc, etc.

  • Speaker #1

    Comment ça se manifeste, cette approche transformative ? On a parlé de la réflexion sur le conflit. Moi, ce que j'avais bien retenu, c'est la non-directivité, le fait que c'est très responsabilisant pour les parties qui sont seules maîtres à bord. Et ça va jusqu'à leur dire qu'en gros, elles décident presque des règles du jeu de ce moment. Ce que j'ai vraiment, et d'ailleurs, j'ai relu le petit retour que tu avais fait sur... une séance de formation là au CNAM, qui était complètement raptée de mon côté, mais que tu avais analysée, tu avais eu la gentillesse de me faire des retours, c'est la posture basse. Alors ça, c'est vraiment, je trouve, hyper important et je trouve qu'on a besoin de faire connaître quand même cette... Cette approche-là, le fait qu'il y a vraiment une volonté d'humilité, de rester en soutien, d'être non-sachant, je t'avais un peu interrogé au départ là-dessus, c'est quand même aussi un des écueils assez fréquemment rencontrés en médiation, je trouve. Cette problématique de posture, on n'en se met pas au même niveau que les personnes. Et c'est aussi, je pense, peut-être une des clés des échecs possibles de médiation, non ? Non.

  • Speaker #0

    Après, tout dépend de ce qu'on appelle médiation, tout dépend de ce qu'on poursuit comme objectif. Mais effectivement, nous, comme justement notre idée, c'est d'accompagner et de soutenir ce phénomène naturel, j'insiste sur naturel, de transformation de l'interaction. en quelque chose de plus positif et de constructif. Il est hyper essentiel, et que du coup, ce qu'on attend, ce qu'on observe, c'est essentiellement ces fameux mouvements d'empowerment que tu as évoqués au début, c'est-à-dire ces mouvements de reprise de pouvoir sur soi-même que peuvent opérer chacun des participants. On va se garder absolument. de prendre des décisions à leur place. On considère que c'est en prenant des décisions, même microscopiques, que les acteurs, petit à petit, reprennent du poil de la bête, si j'ose dire. On dit que c'est en forgeant qu'on devient forgeron, c'est en décidant qu'on retrouve sa capacité à prendre des décisions et qu'on reprend le contrôle. Et donc on va s'interdire absolument de se mettre en surplomb par rapport aux participants. et de les devancer, ça c'est très important, c'est qu'on dit en transformative, on reste toujours dans le sillage immédiat des personnes et de leur conversation, mais jamais on ne les précède, c'est-à-dire qu'on n'a pas de projet pour eux. Et encore moins de choses à leur imposer. Et donc tu as évoqué par exemple les règles.

  • Speaker #1

    De l'échange, donc de la conversation.

  • Speaker #0

    De l'échange, de la conversation. C'est vrai que souvent en médiation, il est de coutume d'entendre que les participants ont la main sur le contenu de leur échange et que le médiateur contrôle le process. Nous, on ne contrôle pas le process. On considère que contrôler le process, c'est déjà prendre des décisions à la place des participants. Et donc, finalement, sans le dire... considérer qu'ils ne sont pas capables de le faire, et surtout les empêcher de se remettre à le faire. Et donc, d'une part, la conversation, on va considérer, on dit qu'elle est... qu'elle est libre, qu'elle est ouverte et qu'elle engendre sa propre structure, c'est-à-dire qu'elle n'est pas supposée suivre un processus prévu à l'avance, c'est les participants qui l'inventent, comme dans la vraie vie. Parce qu'encore une fois, on vient juste donner un coup de pouce à quelque chose qui est supposé se passer en autonomie dans la vraie vie. Et qu'il se passe exactement, qu'il n'arrive plus à se passer à ce moment particulier, sur tel sujet particulier, etc. Mais en plus, effectivement, on se garde absolument de leur donner des règles. C'est-à-dire qu'on considère que de dire aux personnes... Voilà, comment ça doit se passer, il faut s'écouter jusqu'au bout, et puis il faut se respecter, employer un langage, etc.

  • Speaker #1

    C'est impotentilisant.

  • Speaker #0

    C'est très impotentilisant, c'est une approche surplombante, paternaliste, et donc c'est une manière de leur dire, vous n'êtes pas capable de vous contrôler vous-même, donc on va le faire à votre place. Je caricature un peu, hein ?

  • Speaker #1

    Non, mais je suis pas tout à fait d'accord.

  • Speaker #0

    Et par ailleurs, en plus, qui on est nous pour décréter comment ces personnes-là ont envie de se parler ? Quel langage elles s'autorisent à employer ?

  • Speaker #1

    Après tout, s'ils ont envie de s'interrompre. Et parfois, c'est nécessaire. Ce n'est pas possible, c'est insupportable d'entendre. Donc voilà, il faut que ça sorte. C'est aussi le côté naturel du process. S'il y a des choses à purger, tu ne peux pas juste réguler l'échange comme un match de tennis où tu vas compter les points et tu vas siffler la fin de la récré. Ce n'est pas possible.

  • Speaker #0

    Et tu vois, par exemple, pour la question du respect, Qu'est-ce que ça veut dire le respect ? J'ai mon filtre pour savoir ce que c'est que le respect, mais eux, c'est peut-être pas le même. Et par ailleurs, c'est un très bon sujet de conversation qui est souvent au cœur de leurs problèmes d'interaction. Et d'ailleurs, quand on pose la question, parce que c'est comme ça qu'on procède dans la... Les remarques introductives d'une séance de médiation, quand on leur demande s'ils éprouvent le besoin de se donner des règles sur la façon dont cette conversation pourrait se dérouler.

  • Speaker #1

    Oui, c'est plus suggestif du coup, la façon dont tu poses le cadre.

  • Speaker #0

    On leur offre la possibilité de se donner des règles. Alors quelquefois, ils vont te dire, non, je ne vois pas, c'est quoi le problème ? Oui. Donc très bien, et là on va leur dire, écoutez, si effectivement dans le cours de la conversation, vous avez besoin de revenir là-dessus pour que ce soit confortable pour vous, vous n'hésitez pas à le faire. Et puis quelquefois, ils embrayent sur cette question des règles en disant, moi j'aimerais qu'ils me parlent de façon plus respectueuse, ou qu'ils ne m'insultent pas, ou qu'ils m'écoutent un peu parce que jamais ils m'écoutent. Et ça c'est de l'or, parce que c'est une entrée de plein pied dans la conversation à propos de leur relation. qu'est-ce que l'un ou l'autre estime comme étant respectueux ou pas, quel est le besoin de l'un ou de l'autre en termes d'écoute par la personne d'en face, etc. Et du coup, ça démarre la conversation.

  • Speaker #1

    Ça ouvre des portes de conversation. Je me demandais s'il n'y avait pas un moindre engagement du médiateur dans cette approche-là. Hier soir, en posant la question, parce qu'après tout, ce n'est pas dans ce que j'ai lu, ce n'est pas le sujet. Le médiateur, son rapport à ses émotions, sa connaissance de soi, sa subjectivité. Autant en médiation humaniste, c'est vraiment le cœur du sujet. C'est un chemin de connaissance de soi, on va dire la porte d'entrée vers la médiation humaniste. Autant je lis pas grand chose sur le sujet sur la personne du médiateur mais finalement à t'écouter je me dis il faut vachement de confiance pour y aller avec le minimum en disant allons-y quoi, c'est un peu vous qui fixez les règles faut quand même avoir une sacrée foi donc c'est du coup nécessairement la nécessité d'ancrer dans quelque chose de bien poser quand même Dans ce sens là ça converge pas mal avec l'approche humaniste

  • Speaker #0

    Et l'engagement, j'ai envie de dire, il est total en fait. C'est-à-dire que...

  • Speaker #1

    Tu ne peux pas faire autrement en fait.

  • Speaker #0

    D'abord, tu as évoqué plusieurs choses. La première, c'est effectivement une forme de confiance, de conviction dans ces mécanismes. C'est-à-dire que tout ce qu'on a dit précédemment sur la capacité des gens à faire par eux-mêmes, sur cette motivation et cette capacité inhérente à s'affirmer tout en... en restant ouvert à l'autre et à sa différence, il faut y croire profondément. pour s'interdire, y compris quand ça chauffe fort, de reprendre le contrôle et d'inviter au calme, et de revenir un petit peu directif.

  • Speaker #1

    Et tu as une crainte, toi, par rapport à ça ? Parce que c'est quand même un des sujets. Plus j'avance dans le monde de la médiation, plus je vois que c'est une peur assez largement répandue que de se confronter à la violence en médiation. Alors la violence verbale, le plus souvent, mais c'est quand même un de nos gros enjeux, puisqu'on va au cœur du conflit. Donc là, ça sera les questions d'après.

  • Speaker #0

    Alors effectivement, c'est un vertige.

  • Speaker #1

    Tu te mets au bord de ça, donc toi-même, ça quand même...

  • Speaker #0

    Alors effectivement, ça te percute. Et effectivement, ça fait partie des sujets qu'on travaille beaucoup quand on fait de la formation à l'approche transformative. C'est cette capacité à se confronter à une conflictualité intense, à l'expression intense des émotions et potentiellement à quelque chose qui peut se rapprocher de la violence, de s'interdire une forme de régulation trop directive. et de maîtriser également les échos, les impacts que ça peut avoir sur soi-même.

  • Speaker #1

    Alors comment tu te prépares, toi, pour une séance de médiation transformative ?

  • Speaker #0

    Écoute, je ne me prépare pas plus que ça. Je m'offre, on va dire, 5 minutes de calme, si je peux, avant le démarrage. Ça peut paraître paradoxal, mais en fait, comme... On n'est pas vraiment entré dans le détail de ce qu'on faisait, ce qu'on ne faisait pas, etc. Mais pour revenir à ce que tu disais précédemment sur l'engagement, l'engagement je disais qu'il est plein et entier parce que, en fait, comme on ne précède pas les participants qu'on n'a pas de projet pour eux, la contrepartie c'est qu'on est pleinement présent dans l'instant à ce qu'ils expriment, ce qu'ils donnent à voir.

  • Speaker #1

    Tu poses un limite de temps toi dans tes réunions par exemple ?

  • Speaker #0

    Alors on se donne un créneau en général, oui, pour que tout le monde ait une bonne gestion de son agenda.

  • Speaker #1

    Mais de quel ordre ? Parce que c'est pareil, ça aussi, t'as des écoles différentes. T'en as qui vont te dire, moi, ça peut durer trois heures. 4 heures, 5 heures ?

  • Speaker #0

    Écoute, quand c'est de l'interpersonnel, que c'est deux personnes, ou quand c'est éventuellement trois, je fais rarement plus de deux heures. En général, je fixe un créneau de deux heures. Enfin, on fixe ensemble un créneau de deux heures et ils ont toujours la possibilité de s'arrêter plus tôt.

  • Speaker #1

    Ah oui, c'est plus tôt de s'arrêter ?

  • Speaker #0

    Oui, parce que prolonger, encore faut-il que les gens soient disponibles, y compris moi-même. Oui, bien sûr. Et quand on arrive au... Au bout du créneau, c'est toujours eux qui décident ce qu'ils veulent faire après. Merci.

  • Speaker #1

    Alors justement, dans quel domaine en particulier toi tu interviens en médiation ? C'est vrai que je ne sais pas comment c'est par là, tu vois j'ai fait de la non-directivité.

  • Speaker #0

    Il faudra qu'on revienne après je pense à l'histoire de la présence, de l'engagement, de la préparation, etc. Écoute, moi comme mon terrain de jeu initial on va dire c'était l'entreprise, ou les organisations on va dire, j'ai commencé à faire de la médiation dans ce type de contexte, donc de la médiation sur le lieu de travail on va dire. Et puis en fait, il y a maintenant 5-6 ans, j'ai eu l'opportunité de glisser vers des contextes familiaux. D'abord sur des sujets de succession ou d'anticipation de succession. Donc voilà, des familles, des fratries et leurs parents, avec ou sans leurs parents on va dire. C'est un univers qui me plaît bien parce que c'est effectivement très intime, très intense. Justement, je pense que quand on est médiateur transformatif, pour revenir à un point que tu abordais tout à l'heure, Il y a un moment donné où finalement on se met, alors il ne faudrait pas que ce soit mal perçu, mais à aimer ça en fait, l'expression intense des émotions. C'est-à-dire que ça fait plus peur, on le considère comme étant de l'or, un matériau riche, c'est de la vérité, c'est des choses qui ont besoin de sortir et qui ont besoin d'être mises en valeur, etc.

  • Speaker #1

    C'est l'authentique.

  • Speaker #0

    Voilà, donc c'est très authentique.

  • Speaker #1

    On enlève les masques.

  • Speaker #0

    Dans le familial, on a vraiment cette dimension-là.

  • Speaker #1

    Une famille de plusieurs générations, c'est la particularité quand même.

  • Speaker #0

    Plusieurs générations ou bien parfois simplement au sein d'une fratrie.

  • Speaker #1

    Dans des contextes de succession patrimoniale, je crois.

  • Speaker #0

    Voilà, prise en charge de la dépendance d'un parent, des décisions difficiles à prendre entre frères et sœurs qui se parlent plus ou moins ou plus ou moins bien depuis un certain temps, etc. sur la dépendance de leurs parents, mais sur aussi la façon de gérer telle ou telle partie de patrimoine commun, une indivision, que sais-je.

  • Speaker #1

    Il y a un tel besoin dans ce domaine.

  • Speaker #0

    Voilà, toutes ces choses-là. Voilà, et puis du coup, je me suis mis aussi à accompagner des couples, soit... Des couples qui ne sont pas dans une dynamique de séparation, mais qui identifient qu'ils ont du mal à aborder des sujets difficiles et que ça peut les aider d'être soutenus ponctuellement comme ça dans des efforts de dialogue. Ou bien au contraire, des couples divorcés, séparés, qui mesurent l'intérêt de retrouver le chemin du dialogue pour... on va dire vivre cette relation qui de toute façon continuera, en particulier quand ils ont des enfants, de la vivre sereinement, justement, en sortant de la déstabilisation et de la fermeture l'un à l'autre, voilà, pour de nouveau peut-être pas forcément se fréquenter de manière étroite, mais au moins se croiser de façon sereine et constructive.

  • Speaker #1

    Je t'ai interrompu tout à l'heure, justement, sur... Le questionnement personnel, la préparation, tu m'as dit que tu voulais revenir là-dessus.

  • Speaker #0

    Oui, tu parlais de l'engagement du médiateur transformatif et aussi de sa... de sa tolérance à la violence qui peut s'exprimer en médiation.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est la peur de la violence qui m'interpelle ? Je le vois quand même assez fréquemment.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est un vertige pour beaucoup de médiateurs débutants. Et c'est aussi justement une des raisons pour lesquelles on peut revenir, même si on n'en avait pas l'intention, à des réflexes très directifs. Oui, c'est un vrai épreuve. En transformative, on gère ça plutôt bien, puisque l'intervention principale, le type d'intervention majeure qu'on utilise en médiation transformative, c'est ce qu'on appelle le reflet. et donc comme son nom l'indique ça consiste à refléter fidèlement ce que les personnes expriment, chacune d'entre elles au moment où elles l'expriment et quand je dis fidèlement c'est en employant le même champ lexical, les mêmes mots, les mêmes expressions clés, signifiantes celles qui sont chargées justement de déstabilisation et de fermeture donc dès qu'il y a de l'émotion forte, dès qu'il y a des procès d'intention Et dès qu'il y a des mots chargés, on les reprend. Et on reprend également l'énergie avec laquelle ils sont exprimés.

  • Speaker #1

    Je me souviens du reflet joufflu, donc.

  • Speaker #0

    Notamment on dit joufflu ou charnu, c'est-à-dire que...

  • Speaker #1

    C'est riche comme reflet.

  • Speaker #0

    Voilà, c'est pas juste un petit miroir qui reprend les trois derniers mots de la personne. Ça,

  • Speaker #1

    c'est la version médiation humaniste où effectivement, tu as une phrase clé. Je sens la tristesse, je sens la colère, etc.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Voilà. Tu es dans aussi quelque chose d'assez pur et assez court.

  • Speaker #0

    Oui, alors là, quand on offre un reflet, on l'offre assez complet. Tu disais joue plus effectivement, c'est un mot qui me vient de mon mentor John Peter Weldon en la matière. C'est-à-dire qu'on lui donne, on donne à voir, et c'est là que je voulais en venir, on donne à voir à la personne qui vient de s'exprimer. de manière brute et la plus complète possible ce qu'elle vient d'envoyer.

  • Speaker #1

    C'est la même intention du coup que le miroir.

  • Speaker #0

    Pour qu'elle puisse se rendre compte, parce que comme on a dit, la personne elle est déstabilisée, elle est confuse, elle manque de lucidité puisqu'elle est aux prises avec ce conflit et ses effets incapacitants. elle ne se rend pas forcément compte de ce qu'elle envoie. La première fonction de ce reflet, c'est de lui donner à voir ce qu'elle a envoyé, pour qu'elle puisse décider, on en revient à l'idée de décider, si oui ou non c'était ça qu'elle voulait envoyer. Et donc décider si elle veut... le réaffirmer, le compléter, le corriger, le nuancer. Si elle décide de le nuancer, notamment, on va considérer qu'en plus d'être un mouvement d'empowerment, c'est-à-dire une décision de modification de ce qu'elle a voulu exprimer, c'est un mouvement dit de reconnaissance, c'est-à-dire un mouvement d'ouverture ou d'attention à l'autre, parce que si je reprends un mot dont je me suis rendu compte qu'il était trop violent à ton égard, C'est une manière de prendre soin de toi et de me réouvrir à toi.

  • Speaker #1

    Donc tu ne vas pas dans de la reformulation ?

  • Speaker #0

    Ah non, il n'y a pas de partage, il n'y a pas de recherche de valeur ajoutée.

  • Speaker #1

    Je suis pas à l'aise avec la reformulation là-dessus. Je trouve que toujours cet aspect perroquet me dérange. Et puis en plus tu vas t'être presque dans l'interprétation si tu reformules c'est pas les bons termes, bah non j'ai pas dit ça j'ai dit ça, ça veut pas dire la même chose

  • Speaker #0

    Alors c'est marrant parce que le fait que ce soit très fidèle justement quand on forme des médiateurs transformatifs ils ont peur ils peuvent avoir peur que qu'il soit pris pour des perroquets. Parce que comme on va reprendre les mêmes mots, les mêmes expressions clés, alors on ne va pas redire les choses forcément dans le même ordre, mais en fait cet effet perroquet, il peut être perçu éventuellement par un observateur externe qui regarderait une vidéo ou quoi, mais pour les personnes qui sont aux prises avec le conflit, en fait elles sont très contentes d'entendre ce qu'elles ont dit, et d'ailleurs si elles ne retrouvent pas ce qu'elles ont dit, soit parce qu'on était à côté de la plaque, soit parce qu'elles ne se rendaient pas compte de ce qu'elles disaient, elles vont encore une fois nous corriger, et on est très content d'être corrigés parce que c'est un mouvement d'empowerment de leur part, elles trouvent la ressource et la force et elles prennent la décision de te corriger toi le médiateur, qui n'est pas une entité surplombante, bref elles ont ce mouvement là. Voilà, elles ne se rendent pas compte qu'on fait le perroquet, puisqu'elles...

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas un perroquet, là, je corrige, ce n'était pas mon propos de dire... C'est par rapport à de la reformulation basique telle que tu peux la prendre en approche collaborative, ça fait partie du truc, reformuler, et la reformulation même, elle est croisée, c'est-à-dire qu'on travaille à quatre, les deux avocats, les deux clients, et l'avocat de l'autre va reformuler ce qui va être dit. Et c'est dans l'approche... un peu puriste, systématique. Donc tu peux avoir des entretiens qui vont durer hyper longtemps avec un fort aspect reformulation, mais qui est neutre. Et bon, moi, la petite critique que je fais, c'est que des retours de gens qui l'ont vécu ont eu cet aspect perroquet un peu agaçant. et qui en plus leur a fait perdre de l'attention. Tu vois, là, de ce que j'ai compris du reflet joufflu, donc c'est qu'il y a... Oui, c'est vraiment la miroir. Tu mimes même avec le geste, la façon dont les choses... Il y a presque un truc corporel aussi. Tu vas bouger en disant, toi, pour toi, c'est comme ci, c'est comme ça. Tu vois, tu vas restreindre les émotions. Et quelque part, on a besoin de ça quand on est en médiation, d'être entendu. et peut-être aussi d'être entendus dans nos émotions, dans l'indignation que tu peux exprimer à un instant T. Donc je crois que c'est plutôt...

  • Speaker #0

    Principalement...

  • Speaker #1

    C'est appétant pour la personne qui le vit.

  • Speaker #0

    Et ça va nous permettre de revenir sur l'idée de la violence, entre guillemets, ou en tout cas au moins de la violence verbale. C'est-à-dire que... Bon, effectivement, le reflet n'est pas systématique, mais on l'offre, on le produit quand on arrive à se glisser dans la conversation, bien sûr, y compris d'ailleurs de manière un peu volontariste. Quelquefois, il faut se faire un petit peu de la place sans brusquer les gens. On l'offre en priorité quand on a été soi-même percuté, impacté dans son empathie qu'on a quand on écoute chacun des participants. par justement les manifestations de cette déstabilisation et de fermeture. C'est-à-dire qu'on va offrir des reflets en priorité quand les gens expriment des émotions fortes, expriment leur désarroi, expriment leur confusion, ou en tout cas la montrent, et également quand elles expriment leur fermeture à l'autre, c'est-à-dire principalement, puisqu'on va parler de violence, leur hostilité, leur procès d'intention, leurs attaques, etc. Et on va aller justement essentiellement là-dessus. On ne va pas refléter des trucs qui ne sont pas chargés.

  • Speaker #1

    C'est l'expression de besoin, l'émotion. En même temps, c'est que tu as touché à des choses fortes. Derrière, il y a des valeurs, etc.

  • Speaker #0

    Exactement. Justement dans cette idée de leur donner à voir ce qu'elles ont exprimé, et en même temps de donner aussi à voir à l'autre ce que la personne qu'on reflète vient d'essayer d'exprimer, on leur offre la possibilité de prendre conscience de ce qui est exprimé et d'en faire quelque chose, de faire des choix. Et donc pour en revenir à quand c'est violent, Si les gens deviennent effectivement très agressifs, très violents, voire même se lèvent de leur chaise en esquissant un mouvement qui pourrait dégénérer vers une vraie violence physique, on ne va pas leur dire calmez-vous, ça ne se fait pas On va leur donner en reflet la même violence. Et en fait, ça n'est pas directif, ça n'est pas censeur, mais en revanche, ça a un effet de régulation qui est extrêmement puissant parce que la personne est confrontée de manière brute à ce qu'elle vient d'envoyer. Et là, elle peut se dire, peut-être que je suis un peu à côté de la plaque, que ce n'est pas exactement ça ou que je ne suis pas dans la bonne mesure. Et donc ça peut concourir à cette fameuse reprise de contrôle sur elle-même et cet ajustement à l'autre dans leur expression.

  • Speaker #1

    Je me dis qu'on a tous besoin de reflets joufflus, mais c'est vrai, puisqu'on n'a pas forcément conscience de ce qu'on envoie.

  • Speaker #0

    Exactement. Et le plus tu es embringué dans cette spirale négative, le moins tu as conscience de ce que tu envoies. et donc c'est vraiment le truc le truc majeur un jour ma fille qui avait

  • Speaker #1

    4-5 ans je lui fais gros yeux, j'étais hyper fâchée contre elle elle me dit mais tu me fais peur t'as l'air d'un loup ça me cassait le feedback d'un gamin ça me fait bien alors là on va pas le dire mais ça a un peu la même fonction

  • Speaker #0

    elle te renvoie à ce moment là ma posture d'adulte etc il y avait exactement et du coup si tu veux pour faire ça ce qui est en général ce qu'on va faire principalement quand vraiment les gens sont aux prises avec ces effets déstabilisants du conflit pour faire ça t'as pas besoin d'avoir anticipé quoi que ce soit ou de préparer à quoi que ce soit la seule préparation que tu dois avoir C'est celle dont tu as besoin, et ça dépend peut-être des gens, pour être pleinement disponible à ce qui survient dans l'instant T. Et donc pour pouvoir donner cette empathie, cette écoute pleine et entière, cette pleine présence à chacun de tes participants, à chaque instant de la conversation, sans faire des plans sur la comète de ce qu'on pourrait faire après, et sans se prendre la tête non plus sur ce qui s'est passé avant. Ce qui est important, c'est ce qui se passe dans l'instant. Tu restes dans le sillage immédiat et tu leur donnes à voir ce que tu as ressenti finalement dans ton empathie comme étant important pour eux dans cette conversation qui se déroule sous tes yeux.

  • Speaker #1

    Donc je te rejoins, la disponibilité qui est nécessaire, ça me paraît compliqué de l'avoir en étant seule en plus parce que tu n'es pas en commédiation là, sur une période plus longue que deux heures. Parce que déjà physiquement on est... On n'est pas fait pour ça, avoir une attention aussi importante. Ça me paraît...

  • Speaker #0

    J'avais pas fini d'être répondu à ta question tout à l'heure. Le plus d'heures, c'est effectivement mon max pour l'interpersonnel. En revanche, quand on est dans du collectif qui a plus de monde, moi, je fonctionne plutôt par demi-journée, 3h, 3h et demi.

  • Speaker #1

    Bien sûr, bien sûr.

  • Speaker #0

    Et quand ils sont nombreux, c'est vrai que d'être en commédiation peut être effectivement utile.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu as réfléchi à ce que cela t'apportait à titre personnel ?

  • Speaker #0

    Ah bah oui oui, et c'est très lié à ce qu'on vient d'évoquer, c'est-à-dire que pour bien faire ce job-là, je dirais que finalement les techniques, les méthodes, les quelques interventions qu'on n'a pas forcément détaillées mais on est revenu sur le reflet, ce qui est le principal, c'est une chose, c'est important, c'est utile, mais ce qui est le plus important c'est son savoir-être, c'est la gestion de soi-même. C'est-à-dire que d'ailleurs idéalement... c'est un peu notre graal, c'est de dire, mais moi je suis assez convaincu de ça, on pourrait ne rien faire et ne rien dire. C'est-à-dire que dès lors que, je ne pense pas qu'on aura forcément le temps de revenir là-dessus, mais que les conditions ont été réunies pour que les personnes acceptent de se rencontrer, elles ont déjà pris des premières décisions qui les mettent sur le chemin de cet empowerment. Et donc... il y a de grandes chances qu'elles arrivent à opérer cette transformation de leur interaction, comme on l'a évoqué plein de fois. Dès lors, si moi je suis là, que j'incarne cet espace de dialogue, et que, en plus, je leur donne à voir moi-même ce qu'eux cherchent à retrouver, c'est-à-dire le calme et l'ouverture, Euh... L'essentiel du job est fait. Et donc, je vais revenir à ta question, ça veut dire que ce que je vais cultiver moi, je le dis souvent aux étudiants, aux stagiaires, la première chose à faire, c'est de s'occuper de vous-même en tant que médiateur. Arrêtez de vous prendre la tête avec ce que vous devriez faire ou pas pour prendre soin ou pour prendre en charge ces personnes. Occupez-vous déjà vous-même, d'être pleinement présent à ce qu'ils vont vous montrer et d'être vous-même en pleine possession de vos moyens calme, serein, lucide, et vous-même, pleinement ouvert à la différence des autres, et à leur particularité.

  • Speaker #1

    Donc c'est très vertueux.

  • Speaker #0

    Et donc en fait, de cultiver ça, pour revenir à qu'est-ce que ça m'apporte, j'ai tendance à penser qu'effectivement ça me fait progresser, ou ça développe mes compétences émotionnelles et relationnelles. Donc ma capacité de réguler Régulation émotionnelle, alors ça c'est un autre sujet, je ne sais pas s'il faut rentrer vers ça. Mais voilà, mes propres capacités de régulation émotionnelle, c'est-à-dire de maîtriser ce qui me traverse, pas forcément de le maîtriser, mais de l'accepter et de le laisser passer comme un méditant, comme quelqu'un qui fait de la pleine conscience. Ça développe également la capacité à donner de l'empathie à quiconque, quand bien même ça peut être des personnes. qu'on aurait on va dire tendance à détester parce qu'on rencontre pas que des gens avec lesquels on se sent pleinement en harmonie parmi les participants qu'on a dans les médiations et donc voilà je pense que ça m'apporte sur tout ça et aussi cette une discipline alors aussi un effort parce que c'est un effort l'ouverture oui oui oui alors il y a Il y a de la discipline et de l'effort sur deux choses à mon avis. Effectivement, d'abord l'attention, le contrôle attentionnel, c'est-à-dire le fait de ramener toujours son attention à ce qui se passe dans l'instant, plutôt que de se laisser perturber outre mesure par... on va dire toutes les pensées perturbantes par lesquelles on peut être traversé, toutes les émotions perturbantes par lesquelles on peut être traversé, etc. Et donc cette capacité à ramener son attention sur ce qui se passe là et ce sur quoi on a décidé de se focaliser, c'est-à-dire ce qu'expriment les gens dans l'instant. Et effectivement, la deuxième est consécutive, dès lors que je suis pleinement attentif. et que je ne prends pas d'avance sur le processus et que je ne me laisse pas non plus garder en arrière par ce qui s'est passé avant, que j'ai éventuellement raté. Je ne suis plus disponible pour accueillir l'autre, quel que soit ce qu'il a à donner, et avec tout ce qu'on dit quand on est médiateur, sans jugement, etc. Sans jugement. le jugement on l'a toujours mais encore une fois il faut l'accepter comme étant quelque chose qui est si on en est conscient et dès lors qu'on est conscient on le laisse passer et on se recale sur ce que la personne cherche à exprimer

  • Speaker #1

    Quel est ton rapport au conflit ? Tu l'as interrogé, est-ce que t'es fly ? fight ou freeze ?

  • Speaker #0

    Je pense que par nature, je serais plutôt flight, donc la fuite, l'évitement. Je pense qu'on est pas mal de médiateurs dans ce cas-là. J'ai souvent cette réponse. On est allé vers ça parce que finalement, on n'aime pas ça. Et vous,

  • Speaker #1

    oui.

  • Speaker #0

    Et en même temps, et je pense en particulier grâce à l'approche transformative, Je pense qu'il y a une forme d'apprivoisement de ça et tout ce qu'on vient de dire sur le fait de se colter, de se... confronté volontairement au conflit, et d'autant plus quand il est intense, ma petite aptitude fait mesurer la valeur de ce qui s'exprime dans l'interaction conflictuelle et la façon dont on peut l'utiliser pour transformer les choses d'une manière plus positive. Et donc ça veut dire que je pense que dans ma vie de tous les jours, je suis en train de faire des choses J'ai maintenant... On se refait pas, hein, mais j'ai davantage de capacité à... à faire face au conflit en fait, et à essayer de mobiliser tout ce que j'ai appris, même si c'est les cordonniers les plus mal chaussés, pour justement prendre à bras le corps les interactions conflictuelles et essayer de les transformer.

  • Speaker #1

    Ok, écoute, je te remercie Olivier,

  • Speaker #0

    c'était un échange, un plaisir,

  • Speaker #1

    j'espère qu'on a donné envie aux gens qui nous écoutent de découvrir la médiation transformative, où est-ce qu'on peut les envoyer ? Vous voyez justement, si on veut se former, sur ta page LinkedIn, il y a quelques infos, des formations, il y a cet institut.

  • Speaker #0

    Il y a un institut américain auquel je suis affilié, dont je suis un fellow, comme on dit, qui s'appelle l'ISCT, Institute for the Study of Conflict Transformation, qui se trouve... Adresse web transformativemediation.org, tout attaché. D'accord. Transformativemediation.org. Mais c'est en anglais.

  • Speaker #1

    Si on veut se former, on se conçoit d'ailleurs au médiateur, parce que ces interactions, c'est aussi très, très utile en tant que conseil.

  • Speaker #0

    On peut prendre contact avec moi, tout simplement, parce que c'est plus simple. Sur la page LinkedIn ? Sur la page LinkedIn, par exemple. C'est parfait.

  • Speaker #1

    Eh bien, allez-y. Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci à toi, Émilie. C'était un plaisir.

  • Speaker #1

    À bientôt. Au revoir. Merci d'avoir écouté cet échange. N'hésitez pas à me faire part de vos remarques via mon site www.etg-avocat.com Vous pouvez également me suivre sur LinkedIn. A bientôt !

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