- Speaker #0
Moi j'avais entendu un jour à quelqu'un qui disait bah en oncologie on est déjà au 21e siècle alors que en psychiatrie on travaille comme encore comme si on était au 19e siècle. Bienvenue dans Bien dans ma tech, le podcast qui explore les technologies qui prennent soin de notre santé mentale. Je suis Arnaud et dans chaque épisode je donne la parole à celles et ceux qui inventent le futur du bien-être. Oh Bonjour Guillaume, du coup, bienvenue dans le podcast. Est-ce que tu peux un peu expliquer à nos auditeurs qui tu es ?
- Speaker #1
Merci de l'invitation Arnaud, je suis très content d'être là et puis j'espère qu'on va échanger et que je pourrais transmettre un peu des messages autour de la santé numérique et la santé mentale. Donc moi je suis pharmacien de formation, donc pharmacien officinal au départ.
- Speaker #0
Est-ce que tu peux dire un peu ce que c'est du coup, pharmacien officinal ?
- Speaker #1
En fait, il y a trois grandes options quand on fait pharmacie. Il y a l'option officine, c'est-à-dire qu'on travaille en pharmacie classique. Il y a l'option industrie, où là, on se dirige plutôt vers des métiers dans l'industrie pharmaceutique, que ce soit les métiers de qualité de production ou des métiers un peu plus business. Et puis, on a la troisième branche, qui est la branche, on va dire, hôpital, avec tout ce qui est biologie. ou la délivrance de médicaments à l'hôpital, qui est un peu plus complexe qu'en officine, on va dire. Donc moi, j'ai choisi cette branche officinale, au départ parce que je trouvais ça intéressant d'être au contact des patients et puis de voir différentes pathologies, différentes manières de traiter ces pathologies, et pouvoir travailler aussi dans différentes officines, que ce soit des officines rurales, des officines de ville, des officines plus, on va dire, dans stations balnéaires, donc plus de saisons. et Et puis avec différents métiers, parce que chaque officine a son propre patron. J'étais déjà un petit peu dans le monde de l'entrepreneuriat, on va dire. Et donc, c'est la manière de faire, de travailler avec aussi des équipes d'autres pharmaciens ou de préparateurs. Donc ça, c'était le démarrage. Ensuite, j'ai rejoint l'industrie pharmaceutique, parce que j'ai toujours eu envie de faire des choses très différentes dans ma vie, dans ma carrière. Donc, ça me semblait intéressant de rentrer dans l'industrie pharmaceutique. Donc, j'ai commencé surtout par des projets, on va dire, OTC, donc over-the-counter, c'est-à-dire des médicaments qu'on peut acheter sans ordonnance, plutôt du conseil. Et puis, j'ai démarré dans une société d'études de marché, donc pas directement dans un laboratoire, donc d'études de marché qui s'appelle Stethos, donc où on réalisait des études qualitatives et quantitatives pour les laboratoires. notamment, surtout à viser marketing pour comprendre l'image des médicaments, comment les médicaments étaient prescrits par les médecins, comment on pouvait positionner d'un point de vue marketing ces médicaments ou des nouveautés qui allaient sortir. Et c'est là que j'ai découvert tout l'univers du marketing, de la vente sur prescription, et ça m'a donné envie du coup de rejoindre un laboratoire dans ce domaine-là, où je suis entré chez Roche. Allez ! où je travaillais aux études de marché et aux prospectives donc on commençait à travailler sur la business intelligence et puis à l'époque j'ai travaillé sur un projet hyper intéressant sur la satisfaction client donc c'était assez nouveau à l'époque je parle des années 2000 quoi à peu près et donc j'ai travaillé sur un projet de ce type là où on commençait à prendre en compte l'expérience des professionnels et d'aller un peu plus loin dans le côté marketing Ensuite, je suis rentré dans un laboratoire qui s'appelait à l'époque Schwarz Pharma, qui a été racheté par UCB Pharma. Je me suis occupé de business intelligence et de business development, c'est-à-dire pouvoir gérer le portefeuille de médicaments, de produits du laboratoire. C'est-à-dire qu'on peut céder des molécules ou acquérir des nouvelles molécules. On peut aussi créer des partenariats avec d'autres laboratoires. C'était hyper intéressant. Mais il me manquait un peu l'expérience, on va dire, la relation terrain. C'était un peu une expérience que j'avais eue jusqu'à présent, un peu dans les bureaux, on va dire. Et j'avais envie de me frotter un petit peu au terrain, c'est-à-dire rencontrer des hospitaliers, rencontrer des médecins généralistes, rencontrer des spécialistes. Et donc, j'ai changé un petit peu de métier où je suis devenu visiteur médical. Et puis après, j'ai pris en... En main, en management, une équipe de visite médicale dans l'Est de la France. C'est là que j'ai rejoint Lyon, où j'habite déjà depuis une vingtaine d'années.
- Speaker #0
Alors, petite question du coup, pour revenir au tout départ de ça. Qu'est-ce qui t'a attiré de base dans la santé ? Qu'est-ce qui a fait que tu as voulu faire de la santé ?
- Speaker #1
Un peu par hasard, je dirais, parce que moi, je suis plutôt d'une famille où on est un petit peu dans l'ingénieur. Voilà, mon papa a fait polytechnique, mon grand-père aussi. Enfin voilà, on est un petit peu dans cette lignée-là. Puis j'ai plein de cousins qui ont fait ingénieur. Et donc voilà, je me destinais à ça. Et quand on fait ingénieur, on doit passer par les classes préparées. Notamment, on doit être très fort en maths. C'était pas forcément, je veux dire, pas mauvais, mais c'était pas forcément ma meilleure matière. J'étais plutôt fort en physique, en sciences naturelles à l'époque. Et donc, je me suis dit que ça m'intéresse, en fait, ce côté-là. Et puis après, il y a eu le choix entre faire médecine ou faire pharmacie. Et puis, là encore, c'était vraiment par hasard. Je me suis dit, tiens, pharmacie, c'est un peu plus varié comme étude. On voit à la fois le côté médical, le côté pharmacologie, le côté chimie. Je trouvais ça, voilà, ça me correspondait plus en termes de perspective.
- Speaker #0
OK. Et qu'est-ce qui fait que c'est important pour toi, le fait qu'il y ait... plusieurs activités, plusieurs choses à faire et ça va un peu diriger un de nos sujets dont on va parler avec le multimodal mais du coup qu'est-ce qui fait que pour toi c'est important de faire plein de choses différentes ?
- Speaker #1
C'est un petit peu un fonctionnement personnel que j'ai, une curiosité finalement et un désir d'apprendre toujours. Et donc faire des choses très différentes, ça permet d'être toujours, on va dire, actif, je trouve, et ne pas s'ennuyer. En tout cas, dans ma vie professionnelle, ce que j'ai toujours cherché à faire, c'est ne pas m'ennuyer et essayer d'avoir toujours quelque chose d'intéressant à faire qui me nourrisse.
- Speaker #0
Donc là, tu quittes l'industrie pharmaceutique. pour devenir prescripteur ?
- Speaker #1
Non, je deviens visiteur médical, donc je gère une équipe de visiteurs médicaux qui vont promouvoir finalement les médicaments auprès des médecins. Donc ça, j'ai fait ça assez longtemps, 8 ans. Et puis, après une quinzaine d'années à peu près dans l'industrie pharmaceutique au sens large, j'avais un peu ce sentiment qu'il y a une grosse inertie dans les laboratoires. on dirait C'est assez... les prises de décisions sont assez très étudiées, donc voilà, ça prend un peu de temps tout ça. Et puis je voyais, déjà à l'époque je m'intéressais à tout ce qui était numérique, je voyais le digital, le numérique qui arrivait, je me suis intéressé à différentes choses en parallèle de mon métier, parce que ça m'intéresse toujours d'apprendre. Et là je me suis dit, mais en fait il y a tellement de choses à faire dans le digital pour la santé. que je veux vraiment faire partie de cette dynamique-là. Et donc, j'ai saisi l'opportunité d'un plan social, économique, comme il y en a beaucoup dans les labos, pour faire un exécutif MBA et vraiment changer de carrière, pour aller vers le digital, l'intelligence artificielle en santé. Et donc, j'ai fait cet exécutif MBA qui m'a fait rencontrer des gens qui venaient de la tech, des gens qui venaient de l'automobile, donc ouvrir aussi mon esprit à d'autres secteurs. et puis apprendre aussi comment on fait de l'innovation. Parce qu'en fait, il y a énormément de recherches sur comment fait-on de l'innovation, comment on arrive à transformer une idée en entreprise. Et le MNion, pour ça, a des super formations, vraiment super. Et donc, en parallèle, quand on change de carrière, c'est un peu, on saute dans une piscine qu'on ne connaît pas. Donc, il faut réapprendre à nager, on va dire, même si on commence à avoir de l'expérience. Et donc, je me suis dit, je repars de zéro. Donc, il faut que j'apprenne comment on fait pour partir d'une idée. et la transformer en entreprise. Et avec aussi une vision, c'est amener du digital dans la psychiatrie. Parce qu'il se trouve que personnellement, j'ai ma maman qui souffre d'un trouble psychiatrique assez lourd, on va dire. Et donc je savais de l'intérieur que c'était assez complexe, en fait. de trouver le bon traitement, d'accompagner ce type de troubles. Et puis, j'avais aussi travaillé dans l'industrie pharmaceutique avec des psychiatres. Donc, je savais aussi que côté médecin, ce n'était pas si simple. Il y avait beaucoup d'enjeux à la fois humains, à la fois de traitement. Il y a beaucoup de difficultés aussi à trouver les bons diagnostics. Et donc, je me suis dit qu'il y a sûrement, dans le numérique, des solutions pour aider à la fois les patients. et les professionnels dans leur métier.
- Speaker #0
Et du coup, tu avais les étoiles plein les yeux, tu as découvert ce monde, tu avais déjà une petite patte entrepreneur, mais là, c'était l'occasion de l'exploiter pour de bon. Et qu'est-ce que ça a donné du coup ? Qu'est-ce que tu as fait pour transformer cette idée en quelque chose de plus concret ?
- Speaker #1
Je me suis frotté à la réalité. C'est-à-dire qu'au départ, j'ai travaillé dans ce qu'on appelle un startup studio sur Lyon. Alors, c'est quoi un startup studio ? On pense souvent que c'est un incubateur ou un accélérateur. On a ces mots en tête. En fait, c'est un peu différent. C'est-à-dire que le startup studio, il va, en quelque sorte, industrialiser la manière, justement, de passer d'une idée à une entreprise. Pourquoi ? Parce que le but, c'est d'aider des grands groupes. à sortir un petit peu de leur activité principale et à tester les nouvelles idées et à voir si ces idées, justement, peuvent devenir des business. Parce qu'en fait, le mythe de l'entrepreneur qui sait tout faire, qui a une idée et qui crée une entreprise, en fait, ça n'existe pas. Et d'ailleurs, ça ne fonctionne pas. Et d'ailleurs, les statistiques, c'est en gros 9 entreprises, 9 startups sur 10 qui ne passent pas les 5 ans, à peu près. Donc voilà, ça veut dire qu'il y a des méthodologies qui existent et surtout, il y a besoin de compétences très différentes qui ne sont pas possibles de centraliser entre guillemets sur la même personne. Et donc dans ce Startup Studio, justement, on met des gens et des compétences différentes pour passer de l'idée à un premier concept, tester ce concept avec le marché et voir justement si on peut trouver un modèle économique autour de ça et créer une entreprise avec une autre équipe. qui va justement développer la startup et en faire un business stable. J'ai travaillé sur des projets pour un groupe qui s'appelle Valeo, qui est dans le domaine automobile, où justement, ils voulaient voir s'ils pouvaient créer des services autour de la santé, au sein de l'habitacle, on va dire, de l'automobile, parce que finalement, on passe beaucoup de temps dans sa voiture. Et donc, l'idée, c'était ça. Et puis, j'ai travaillé également à structurer un startup studio dans le domaine de la santé, là, pour le coup. avec deux fonds d'investissement. Et donc, ça m'a appris aussi à travailler avec les fonds d'investissement que je ne connaissais pas du tout et de comprendre un petit peu comment ils réfléchissaient. Et en parallèle de ça, j'ai toujours fait beaucoup de choses, j'étudiais justement des technologies qui étaient développées en laboratoire par des chercheurs qui étaient transférables dans le monde économique. Donc, toujours des technologies au niveau numérique et intelligence artificielle. Et donc ça, il y a un réseau en France qui s'appelle les réseaux des SAT, les sociétés d'accélération de transfert de technologies, il y en a une dizaine, un peu plus d'une dizaine en France, qui sont chargés d'aller dans les laboratoires et détecter justement des technologies assez matures pour être transférables dans le monde économique, soit sous forme de start-up, soit intégrer des grands groupes parce qu'ils veulent acquérir de la recherche solide pour développer leurs activités. J'ai étudié grâce à cette SAT qui s'appelle Pulsalis à Lyon-Saint-Étienne, deux technologies, une première application qui a été développée par une neuropsychologue pour aider les patients en psychiatrie et une autre technologie, une autre application pour justement détecter les troubles cognitifs, notamment les troubles du neurodéveloppement chez les jeunes enfants et puis à l'autre bout de la... la chaîne, les troubles cognitifs des personnes âgées, par exemple. Voilà, et donc j'ai étudié ces deux technologies en parallèle de ce Startup Studio. Donc là encore, j'ai appris beaucoup de choses sur comment justement on discute avec des chercheurs qui ont des idées, qui ont fait des preuves de concepts et qui souhaitent, on va dire, se frotter un petit peu au monde économique, au monde des entreprises.
- Speaker #0
Ok, donc là, tu as amassé plein de compétences diverses et variées, tout en du coup continuant à faire des recherches sur les sujets que tu intéressais. Et du coup, aujourd'hui, tu en es où par rapport à ça ?
- Speaker #1
Eh bien, justement, j'ai créé une première startup sur la base de ces algorithmes autour de la détection des troubles cognitifs. Donc, l'application pour la schizophrénie, malheureusement, quand je l'ai étudiée, j'ai vu que le modèle économique allait être compliqué. Donc, j'ai préféré ne pas me lancer. Et puis, pour la seconde technologie, on a créé une startup qui s'appelait malheureusement Sibius pour développer justement ce qu'on appelle un marqueur digital. qui permettait justement de faire cette détection de troubles cognitifs de manière très simple pour pouvoir la mettre à disposition même d'un cabinet de médecine générale, voire même on a fait des essais dans des crèches pour détecter justement des troubles cognitifs assez tôt pour orienter après ces enfants vers des examens un peu plus poussés.
- Speaker #0
Donc si je comprends bien ce que tu me dis, en gros c'était un outil Merci. qui permettait du coup de détecter en amont qu'il y ait des crises ou des symptômes, que la personne était potentiellement à risque ou il y avait possibilité de développement de troubles, histoire de l'orienter en amont, sachant que c'est super important pour le rétablissement et qu'il y a beaucoup de personnes du coup qui sont prises en charge très tard, ce qui retarde le soin et augmente le développement des troubles.
- Speaker #1
Exactement. Et si je rentre un petit peu dans le détail, la technologie était issue d'une approche qu'on connaît déjà depuis longtemps en laboratoire de recherche, qui est l'eye tracking. L'eye tracking, c'est de détecter le parcours de l'œil quand il est confronté à des images. Et ce qui est assez intéressant, c'est qu'en fait, le parcours de l'œil d'un enfant ou d'un adulte est assez stéréotypé. C'est-à-dire que pour un adulte, ce qu'on appelle, ou un enfant qui est neurotypique, Si on lui propose des images, chaque enfant va faire à peu près le même parcours d'exploration de l'image. Et quand il y a des troubles cognitifs, par contre, ce parcours est perturbé. Et donc, sur la base de ça, l'idée, c'était de créer un algorithme sur la base d'une application où on pouvait détecter le parcours de l'œil sur des tablettes tactiles. Et donc, en proposant un des sets d'images sur cette tablette, on pouvait enregistrer très facilement le parcours de l'œil. Si j'explique dans le détail, c'est assez malin. C'est-à-dire qu'au lieu de suivre l'œil, parce que c'est assez compliqué, il faudrait qu'il y ait une caméra qui soit bien standardisée, il faut que l'enfant ne bouge pas la tête, etc. Ils avaient à imaginer, ces chercheurs, d'utiliser la fonction tactile de la tablette et de proposer des images floutées. Et quand l'enfant posait le doigt, comme un petit jeu, posait le doigt sur l'écran, ça créait une zone de netteté. qui est exactement la zone circulaire de la fovea. Et donc, pour explorer l'image de manière assez spontanée, l'enfant déplace son doigt sur l'image pour explorer, on va dire, déflouter les parties floues. Et en fait, ils ont démontré que ce parcours qui est fait avec le doigt guidé par l'œil était superposable au parcours de l'œil directement via des eye trackers classiques. Donc du coup, ça, c'est fabuleux parce que de manière très simple, et ça a été une partie de mon travail, On peut enregistrer des dizaines, voire des centaines de parcours, très simplement, d'enfants neuroatypiques, pour justement enregistrer des données et entraîner des algorithmes à détecter, à classer un petit peu les parcours entre des parcours neurotypiques et des parcours atypiques. Et donc une partie de mon travail, ça a été justement de mettre en place ces tablettes dans différents CMP, dans différents services, de travailler avec des crèches pour justement enregistrer ces données.
- Speaker #0
Petite pause pour vous demander de laisser un avis si le podcast vous plaît et suggérez-moi des invités en commentaire pour de futurs épisodes ça m'aide vraiment, on reprend C'est pas un sujet dont on a parlé mais je trouve ça assez intéressant du coup quand un projet de ce genre là n'est pas viable économiquement qu'est-ce qu'on en fait ? Est-ce qu'on le jette à la poubelle ? Est-ce qu'on le met sur GitHub par exemple pour que ce soit accessible à tout le monde ? Qu'est-ce qu'on en fait du coup ?
- Speaker #1
C'est une bonne question, malheureusement ça reste un on va dire un objet de recherche C'est-à-dire qu'on va l'utiliser comme solution de recherche, faire des publications autour de la solution pour renforcer sa crédibilité. Et puis après, les choses évoluent. C'est-à-dire que moi à l'époque, quand j'ai démarré dans la santé mentale, on n'en parlait pas beaucoup du numérique en santé mentale. Il n'y avait pas forcément des fonds d'investissement qui avaient envie d'investir dans ce domaine-là. Et puis maintenant, on voit bien, la santé mentale est devenue cause nationale. Il y a des fonds d'investissement qui sont dessus. Donc, je vais dire, c'est un petit peu des cycles. Moi, à l'époque, j'étais vraiment au début d'un cycle. Et c'est vrai qu'il n'y avait pas vraiment d'argent pour développer ce type de solution. Maintenant, ça a un peu changé. Et puis, l'accessibilité aussi au marché via la prescription de ce qu'on appelle les DTX, les Digital Therapeutics Solutions. Donc, du coup, les thérapies digitales qui peuvent être prescrites en Allemagne, en France, en Belgique. Voilà, c'est une réalité aujourd'hui. Donc, les choses évoluent.
- Speaker #0
Ok, donc dans le bon sens, a priori, d'après ce que tu me dis. Et du coup, maintenant, tu fais quoi ?
- Speaker #1
Alors, j'ai développé cette startup. Et j'ai travaillé aussi après cette expérience de startup qui ne s'est malheureusement pas bien finie, comme beaucoup de startups, malheureusement. J'ai travaillé toujours dans le domaine de la pédopsychiatrie pour deux projets. Une société qui s'appelle Teladoc, qui est un acteur de la télémédecine. pour les aider à structurer une offre de télémédecine pour faire du suivi et du diagnostic de troubles de neurodéveloppement à distance via des pédopsychiatres à distance. Parce que l'enjeu en pédopsychiatrie, on le sait, il y a de moins en moins de pédopsychiatres, de plus en plus de besoins. Et donc l'idée, c'est de mettre en lien les déserts médicaux de pédopsychiatres avec des pédopsychiatres à distance pour aider à faire le diagnostic, pour aider à faire le suivi. Et puis j'ai travaillé pour une autre startup qui, pour le coup, était basée à Marseille. qui commercialisait entre guillemets des ateliers de programmation de robots sur tablette. En gros, les enfants programmaient des parcours de robots sur leur tablette et après, le robot devait suivre ce parcours. Ils m'avaient demandé de travailler avec une neuropsychologue et une psychomotricienne pour essayer de concevoir des ateliers pour des enfants avec des troubles du neurodéveloppement, des offrandistes, des enfants TDAH, pour justement voir si ça apportait déjà quelque chose, s'ils arrivaient par exemple à mieux se concentrer, s'ils arrivaient à acquérir des compétences qu'ils n'arrivaient pas à développer dans le milieu scolaire. Et puis également l'idée, c'était, l'objectif, il y avait un projet de recherche aussi en parallèle, c'était de capter des informations. d'utilisation de la tablette, par exemple. Est-ce que le doigt va vite ? Est-ce que les yeux se focalisent sur telle ou telle information ? Et puis de faire aussi un peu des questionnaires pour essayer d'aider les parents à mieux comprendre les forces et les faiblesses cognitives de leur enfant pour adapter un petit peu plus l'accompagnement à la maison. Et également, l'objectif, c'était d'aider les enseignants à aussi mieux comprendre certains de leurs élèves pour adapter autant que faire se peut. l'enseignement. Donc voilà, je dirais que j'étais un petit peu comme ça un consultant pour ces deux types de projets, même si j'avais quand même une fonction assez opérationnelle, parce que moi j'ai toujours aimé être au contact du terrain. Et donc après ça, j'avais toujours la fibre entrepreneuriale, et donc j'ai remonté une autre startup, donc là j'étais pas tout seul, contrairement à la première, on était cinq. Et un peu différemment, dans un autre domaine que la psychiatrie, c'est le domaine de l'expérience patient. C'est-à-dire comment on peut aider les hôpitaux à mieux comprendre l'expérience patient pour améliorer les parcours de soins, pour améliorer l'accueil à l'hôpital, pour améliorer la prise en charge. Et on a démarré la from scratch, c'est-à-dire qu'on n'avait pas de technologie issue d'un labo. On est parti d'une idée, là, pour le coup. Et l'objectif, c'était justement de développer... une plateforme permettant d'analyser toute l'expérience patient qui n'était pas des questionnaires, c'est-à-dire des questionnaires cases à cocher, mais toutes les parties où les patients écrivaient, soit sur les avis Google, par exemple, soit dans des questionnaires de satisfaction où il y a toujours des questions ouvertes où le patient peut écrire ce qu'il souhaite. Et donc, malheureusement, jusqu'à il y a quelques années, ces parties qu'on appelle en free text n'étaient pas analysables parce qu'en fait, c'est des masses de phrases Et pour un service qualité d'un hôpital, c'était impossible à gérer humainement. Et donc l'objectif, c'était de créer une plateforme d'intelligence artificielle, de NLP, Natural Language Processing, pour analyser de manière automatique ce free text et en faire des tableaux de bord qui permettaient de guider les services qualité dans leur approche et aussi de répondre aux enjeux de la HAS, puisque la Haute Autorité de Santé certifie la qualité des établissements sur un certain nombre de critères. et dans ces critères il y a des critères sur le recueil, l'analyse et les plans d'action autour de l'expérience patient. Donc ça fait partie des obligations réglementaires d'un hôpital. Et donc c'est un peu comme ça qu'on a construit notre projet. Donc au départ, on est allé voir les hôpitaux. On leur a dit, écoutez, on veut vous aider à analyser ce free text que vous avez dans des fichiers Excel, par exemple. Et ils nous ont dit, ah oui, c'est intéressant. Donc pour ça, on va construire ce logiciel, cette plateforme. Mais on a besoin pour ça des données. pour entraîner les algorithmes, les données que vous avez. On a besoin aussi de professionnels pour tester les écrans, les tableaux de bord, voir si c'est utile et les adapter. Et puis, on a besoin d'argent parce qu'on démarre. Et donc, on s'est dit, on n'avait pas créé l'entreprise, mais on s'est dit, s'il y a des hôpitaux qui acceptent de nous partager leurs données, nous partager du temps de professionnels et nous payer, si on en a trois qui signent ça, on crée la boîte parce que ça veut dire qu'il y a un enjeu à la fois Il y a un enjeu financier aussi, on a un modèle économique possible. Et donc en fait, on a eu neuf hôpitaux qui ont signé ça. Et surtout des hôpitaux de différents formats, c'est-à-dire qu'on avait des CHU, on avait des ESPIC, on avait un ESPIC, pardon, on avait des CHG, un CHG, on avait une clinique privée, et puis on avait des centres de lutte contre le cancer. Et donc voilà, quand on a neuf hôpitaux qui sont capables de signer pour un logiciel et de payer pour un logiciel qui n'existe pas encore... On s'est dit, OK, on y va. Et donc, on a co-construit ce logiciel et entraîné ces algorithmes avec ces neuf hôpitaux. Et après, on a démarré la commercialisation de cette plateforme SAS, Software as a Service, pour les hôpitaux. Et en un an et demi, on avait une trentaine de clients, d'hôpitaux clients sur cette plateforme. Donc, je dirais que là, on est parti vraiment d'une idée pour aboutir à un modèle économique qui a un impact sur les patients parce que L'objectif, c'était ça au final. C'était d'impacter la satisfaction et le mieux-être des patients dans l'hôpital.
- Speaker #0
Et du coup, qu'est-ce que ça a donné ce projet ? Est-ce que tu y es encore ? Est-ce que ça a été économiquement fiable ?
- Speaker #1
C'est un projet qui existe toujours. Tu poses la bonne question. Est-ce que c'était économiquement ? On faisait du chiffre d'affaires, mais malheureusement pas assez pour à la fois maintenir la solution et répondre aux évolutions que demandaient nos clients. Et en même temps, on n'avait pas assez d'argent pour se payer nous, donc on ne pouvait pas continuer. Et puis sont arrivés en même temps les LLM, les modèles de langage. Ça s'est un peu percuté, c'est-à-dire que nous, on avait développé nos propres algorithmes de traitement automatique du langage, et puis sont arrivés des algorithmes quasiment tout près. Donc on a aussi commencé à adapter la plateforme avec ces nouveaux algorithmes. Et donc voilà, des enjeux technologiques, des enjeux économiques qui nous ont poussé à se dire « Ok, il faut une sortie pour cette plateforme » . Et donc, on a... On a revendu, cédé la plateforme à une autre startup qui était plus avancée, qui avait des fonds et qui cherchait entre guillemets un produit tout fait, tout prêt pour développer une autre branche d'activité. Et par contre, la société existe toujours et évolue vers un service puisqu'en fait, on a construit une image très forte d'expertise, de l'expérience patient et du partenariat patient avec l'équipe qu'on avait. Et aujourd'hui, la société développe, moi je ne suis plus de manière opérationnelle, mais la société développe justement des services autour du partenariat et de l'expérience spatiale.
- Speaker #0
Et du coup, toi ensuite, comment tu as rebondi suite à ce départ ?
- Speaker #1
Alors voilà, quand on ne pouvait pas se payer, évidemment, il faut trouver du travail. je vais combattre une idée reçue quand on crée des startups on ne devient pas riche du tout, enfin c'est rarement le cas donc on perd plutôt de l'argent et donc voilà à un moment donné il faut se rendre compte qu'économiquement il faut faire chauffer la marmite on va dire et donc je suis et je voulais rester dans l'intelligence artificielle et numérique donc je suis rentré dans une société qui s'appelle Okin qui est une société ce qu'on appelle une scale-up C'est-à-dire que ce n'est plus une start-up, c'est une société qui a 350 personnes et qui évolue très vite, et dont le métier est de travailler sur la recherche, c'est-à-dire d'aider les chercheurs grâce à l'intelligence artificielle et l'analyse des données patients, à trouver des nouvelles cibles thérapeutiques, à mieux sélectionner les patients pour faire de la médecine de précision et à terme de la médecine un peu plus personnalisée. Donc c'est ça l'objectif de Docky. Alors, ils travaillent beaucoup en oncologie parce qu'une des particularités de KIN, c'est de faire des analyses et d'utiliser l'intelligence artificielle pour des données multimodales.
- Speaker #0
Est-ce que tu peux nous expliquer ce que c'est ? Parce que c'est un sujet qui est important pour toi et qui est important pour l'IA de manière générale, notamment en santé.
- Speaker #1
Tout à fait. Ce qu'on appelle les données patients multimodales. Alors, tu vas me dire, oui, toutes les données patients sont multimodales. parce que par exemple les données cliniques il y a Il y a l'entretien patient, il y a les données biologiques quand on en a, etc. C'est exactement ça, mais à plus grande échelle. Parce qu'en oncologie, on a beaucoup de technologies pour à la fois recueillir les données cliniques, évidemment, mais aussi d'autres données, type les lames d'histopathologie, où le laboratoire d'anatomopathologie va détecter des cellules cancéreuses. Et puis, on a aussi tout ce qui est l'arsenal de technologies omiques, pouvoir trouver des signatures des signatures moléculaires, des signatures ARN, et donc de faire ce type d'analyse. Donc tout ça génère énormément de données, et l'enjeu c'est de corréler ces données ensemble, c'est-à-dire de pouvoir avoir pour un patient l'ensemble des données qui peuvent expliquer le cancer, qui peuvent expliquer la biologie autour du cancer. Donc voilà, c'est possible pour l'oncologie, parce qu'on génère des données très importantes, mais malheureusement ce n'est pas encore possible pour la psychiatrie. c'est pour ça que j'avais entendu un jour quelqu'un qui disait en oncologie on est déjà au 21ème siècle alors qu'en psychiatrie on travaille encore comme si on était au 19ème siècle dans le sens où en psychiatrie c'est vraiment l'entretien clinique qui majoritairement va guider la décision on commence à avoir de l'imagerie de l'ECG, des analyses génétiques mais c'est quand même pas aujourd'hui fait en pratique courante et donc Tout l'enjeu justement c'est d'arriver à avoir des données multimodales pour la psychiatrie pour faire de la médecine plus personnalisée.
- Speaker #0
Donc si je reviens le côté multimodal, c'est que avant, enfin du coup c'est toujours le cas en psychiatrie, mais donc dans l'oncologie avant, entre guillemets, il y avait du coup plein de données qui disaient par exemple qu'on a détecté des molécules, qu'il se passe ça dans le corps, mais du coup c'était pas corrélé pour avoir une vision d'ensemble du phénomène, c'est ça ?
- Speaker #1
Tout à fait, et puis surtout c'était pas utilisable pour des algorithmes, pour faire de l'intelligence artificielle, c'est-à-dire qu'il faut savoir que dans les hôpitaux, les données sont silotées. C'est-à-dire que d'un côté, on a par exemple le médecin qui va recueillir, faire des entretiens avec le patient, je parle en oncologie, et puis il va mettre ça dans un dossier. De l'autre côté, on a fait une biopsie par exemple, et la biopsie part dans le département d'Anapat pour faire les lames d'Anapat et en tirer des conclusions. Et puis de l'autre côté, on a des échantillons qui partent pour faire de la biologie moléculaire, pour générer des données omiques. dans le service de biologie moléculaire. Et donc toutes ces données, finalement, même si elles servent à la décision au final, elles ne sont pas utilisables en tant que telles pour faire de l'intelligence artificielle. Et donc on oublie souvent, et ce n'est pas parce que ce n'est pas le côté reluisant de l'intelligence artificielle, c'est qu'il y a tout un travail entre ces données que je dirais brutes et des données utilisables en intelligence artificielle. Parce qu'il faut les mettre en qualité, les corréler, les mettre en qualité. Et après, les data scientists, peuvent les utiliser.
- Speaker #0
Parce que beaucoup de personnes ont l'idée reçue qu'une IA, c'est juste qu'on lui envoie plein de données et ensuite c'est elle qui gère, mais c'est pas du tout comme ça que ça fonctionne. Il faut des données de qualité, il faut des objectifs précis, et c'est comme ça qu'on avance. Et du coup, toi, comment est-ce que tu imagines de pouvoir apporter du coup ce que t'as fait en oncologie, de le faire en psychiatrie ? Qu'est-ce qui serait nécessaire pour faire ça, par exemple ?
- Speaker #1
Alors moi, je fais pas de la data science chez Hawking, juste pour précision, je m'occupe justement de l'accès aux données, c'est-à-dire comment on gère un réseau d'hôpitaux qui travaille avec O'Keean, comment on les contacte pour identifier des données d'intérêt, et puis comment on met en place la structure contractuelle qui va permettre d'utiliser les données des hôpitaux pour des projets d'IA d'O'Keean. Donc je suis directement en contact avec des médecins, avec des services légaux, du... des PO, des services d'innovation, des services financiers aussi pour la partie financière. Et donc, moi je dirais que l'avenir de la psychiatrie justement, c'est de pouvoir faire du multimodal. Je prends par exemple l'exemple de la startup Sibius, où on a essayé de développer un marqueur digital lié au parcours de l'œil. Mais ça, c'est on va dire une donnée, c'est une modalité de donnée. Et on voit bien qu'une seule modalité de données, toute seule, peut aider à faire des choses, mais ne peut pas faire un diagnostic. Il faut pouvoir avoir d'autres données, par exemple l'examen clinique, par exemple des données de CEG, des données génétiques, toutes ces données qui sont aujourd'hui possibles en psychiatrie, mais qui ne sont pas dans les soins courants. L'enjeu, c'est justement déjà de faire comprendre que toutes ces données ont de la valeur, de les permettre de les recueillir et de les structurer, parce qu'aujourd'hui, on est capable d'analyser des comptes rendus écrits ou enregistrés grâce justement au LLM, au traitement automatique du langage. On est capable de les analyser automatiquement, d'en tirer la substantifique moelle, et on est capable aussi de générer, ce que je disais, des données moins subjectives que l'entretien clinique, donc des données un peu plus factuelles. actuelles, structurées, qu'on appelle les données structurées, comme des marqueurs biologiques, comme l'EEG, de l'imagerie et peut-être de la génétique plus tard. Et donc c'est cette multimodalité qui va pouvoir permettre de segmenter mieux les patients. Et d'ailleurs, il y a déjà, par exemple, au Danemark, il y a des registres, ils sont très forts dans les registres, justement, dans structurer le recueil des données à grand volume. Et ils ont ils sont capables, déjà il y a des publications qui sont sorties, de segmenter par exemple différents types de dépression, de segmenter différents types de schizophrénie, des sous-types qui ne réagissent pas forcément de la même manière aux différents traitements. Et c'est ça l'avenir, c'est de pouvoir passer de grandes cases, même si je ne sais pas ce terme-là, mais de diagnostics un peu larges à des diagnostics plus personnalisés, en tout cas plus précis, sous-segmentés. et de permettre justement des traitements adaptés et plus efficaces qu'aujourd'hui.
- Speaker #0
Ce que tu dis, c'est super intéressant parce qu'un des gros soucis avec la psychiatrie, c'était le... Toujours, puisque ce n'est pas encore développé suffisamment, le manque de données objectives, ce qui rendait le domaine assez compliqué à numériser, à rendre accessible avec des outils IA. Mais du coup, le multimodal pourrait permettre de donner cette possibilité en regroupant les données, de créer des choses plus objectives et toujours de faire de la personnalisation parce que c'est ça aussi une des grandes forces de l'IA, c'est pouvoir personnaliser que ce soit les traitements, les diagnostics ou ce genre de choses. et c'est super important du coup de voir que cette avancée est possible et j'espère que ce chemin sera pris, notamment du coup parce que ça peut permettre un truc dont on a parlé quand on a préparé le podcast qui est la prévention des troubles avec la détection du coup en amont c'est un peu déjà ce que tu faisais pour l'autisme
- Speaker #1
Ouais tout à fait, ça c'est un de mes grands chevaux de bataille, c'est de détecter précocement et de prendre en charge précocement, malheureusement trop souvent Tu en parlais, il y a une errance, entre guillemets, diagnostique qui peut durer des années. Il y a aussi le fait que, justement, on n'a pas assez de marqueurs digitaux, donc forcément, on n'arrive pas à détecter tôt. Et puis, en plus, on a le fait qu'on prend en général, entre guillemets, trop tard. C'est-à-dire que le système, aujourd'hui, en psychiatrie, est très orienté sur la prise en soin. Donc, il faut qu'il y ait un élément déclencheur qui fait que, OK, on prend en charge le patient et là, on fait le diagnostic. Donc, on est un petit peu... C'est pas que la psychiatrie. De manière générale, le système de santé en France fonctionne de cette manière-là. Mais le problème en psychiatrie, c'est que les événements, quand on commence à avoir des symptômes graves et qu'on est pris en charge, c'est déjà que la pathologie a commencé à faire son œuvre. Donc, moi, mon cheval de bataille, c'est de dire qu'on sait qu'on peut détecter plus tôt Même, on sait que 50% des troubles de la santé mentale démarrent avant l'âge de 15 ans. Et donc, en détectant plus tôt, en prenant en charge plus tôt, on va pouvoir améliorer justement l'insertion sociale, on va pouvoir améliorer le confort aussi de l'entourage, puisque en psychiatrie, l'impact sur l'entourage est quand même majeur, et puis améliorer l'avenir de ces patients ou de ces enfants, puisqu'on parle là d'adolescents, d'enfants, qui pourraient être pris en charge beaucoup plus tôt. Donc ça, c'est vraiment l'enjeu. Et je dirais que le numérique a vraiment un rôle à jouer majeur. Je parlais de Sibius, ce marqueur digital. Mais aujourd'hui, il y a des projets qui travaillent, par exemple, sur la voix. C'est-à-dire comment on peut détecter au travers de la voix et anticiper des symptômes dépressifs, une rechute dépressive, par exemple. Donc voilà, tous ces marqueurs digitaux qui arrivent, il y a des marqueurs aussi autour des émotions. Moi, j'ai travaillé pour une startup qui s'appelle Emophase à Grenoble, et justement, qui utilisait une tablette avec des avatars pour améliorer la compréhension des émotions dans des situations où, par exemple, dans l'autisme, on a des difficultés à lire les émotions, donc pour s'entraîner à lire. Et, issu de ça, ils avaient créé un score d'intelligence émotionnelle, on va dire, ou de compétences psychosociales. qui permettait justement de voir la progression et donc de partir d'un score X pour arriver à un score Y et donc d'aider justement les orthophonistes, les psychomotriciennes à mieux suivre l'évolution des enfants. Parce qu'en pratique, quand le suivi d'un enfant qui est pris en charge, c'est en gros le paramédical qui va dire aux parents « Alors, ça va mieux ? » Et les parents, ils disent « Oui, non, oui… » Là encore, on n'a pas de marqueur objectif.
- Speaker #0
Et comment est-ce que tu imagines ce déploiement de cette technologie de détection ? Et comment tu la vois ancrée dans le quotidien, dans un futur plus ou moins proche ?
- Speaker #1
Je dirais qu'un des enjeux, c'est que ça reste quelque chose qui s'insère déjà dans le workflow du médecin. C'est-à-dire que, voire même dans les tests qui sont faits, déjà par exemple en crèche, ou vraiment, de que ça fasse partie, au même titre que de suivre la courbe de poids, de suivre la courbe de taille, de suivre un certain nombre d'éléments de développement, que ça fasse partie des critères qu'il faut aussi prendre en compte dans le développement de l'enfant et de l'adolescent. Donc, une fois qu'on aura... Alors, avant d'arriver à ça et d'avoir cette capacité de prévenir, finalement, il faut un certain nombre de passages. Et souvent, je dis aux chercheurs, mode. vous avez fait une preuve de concept, mais en fait c'est que le début de l'histoire. Parce que pour avoir un marqueur qui s'insère dans le suivi d'un enfant, il va falloir l'entraîner sur des données de qualité et des données suffisamment multicentriques pour éviter de mettre des biais dans l'algorithme. Ensuite, il va falloir valider cet algorithme scientifiquement sur d'autres jeux de données pour montrer qu'il est valable. et puis il va falloir aussi travailler sur le... le retour pour les patients et pour le médecin. C'est-à-dire que l'algorithme y travaille, mais je dirais que l'algorithme, c'est souvent la partie immergée de l'iceberg, puisque ce qui va intéresser les médecins, par exemple, c'est le résultat. L'algorithme, il s'en fiche un peu. C'est quel résultat j'ai, comment je les interprète, comment je les communique aux patients pour que ça aide la consultation et la prise de décision.
- Speaker #0
Et du coup, selon toi, qu'est-ce qui manque aujourd'hui par rapport à ça ? Est-ce qu'on ne pourrait pas, par exemple, du coup, dès maintenant, essayer de trouver des données utilisables et faire en sorte que tous les jeunes, à partir, par exemple, de 5 ans, et que ce soit ancré dans le système, comme tu disais, sur le poids ou la taille, pour plus tard utiliser ces données pour pouvoir calibrer des choses ?
- Speaker #1
Comment on fait ? C'est l'ère de la guerre. c'est... C'est à la fois des équipes qui veulent développer ce type d'outils et puis de l'argent, parce qu'aujourd'hui on ne peut pas développer ce type d'outils sans avoir suffisamment de capacité financière pour des projets de long terme, parce que là on parle de projets sur 2, 3 ans, 4 ans. Parce qu'entre le moment où on a cette idée et la preuve de concept, et le moment où la solution est marquée réglementairement et validée scientifiquement pour être utilisable, en général il se passe quand même plusieurs années. Donc c'est pas comme un médicament, c'est pas 9 ans, mais on est quand même sur 3-4 ans de travail. Et donc ça, ça se finance. Et donc aujourd'hui, c'est une capacité financière, parce qu'aujourd'hui, au niveau réglementaire, on sait le parcours qu'il faut faire. Au niveau technologique, on a les outils pour le faire. Au niveau des données, il y a encore du travail, mais on peut le faire, on peut faire ce travail. Et après, c'est une volonté, un enjeu financier. Et d'ailleurs, quand on regarde un petit peu l'historique de ce qui s'est passé en oncologie, je crois que c'était Chirac qui, à un moment, a dit « il faut faire un plan cancer » . Et du coup, il y a eu un influx d'équipes et de finances pour faire ce plan. Et c'est là qu'on a eu le développement de toutes les technologies diagnostiques autour du cancer. S'il n'y avait pas eu, on va dire, une volonté et des capacités financières, on n'en serait pas là aujourd'hui.
- Speaker #0
Est-ce que tu estimes que, du coup, le fait de... Faire de la santé mentale la cause de l'année, est-ce que c'est un peu comme ce qui s'est passé en oncologie ?
- Speaker #1
Ça peut aider, ce plan santé mentale est vraiment, pour moi, quelque chose d'important, parce qu'il faut une volonté politique, si on veut avancer. Et puis après, il faut aussi qu'il y ait de l'argent derrière. Alors, il y a le plan France 2030, il y a des aides aussi au niveau européen. Et tout ça va contribuer aussi à ce que les investisseurs ou également les laboratoires pharmaceutiques ou des biotech, par exemple, qui développent des nouveaux traitements dans le domaine de la santé mentale, se réintéressent de manière concrète à ces enjeux-là. donc moi j'y crois beaucoup je crois tu sais je parlais de cycle en début de en début de podcast et là je crois effectivement qu'on est dans un cycle en tout cas on a On a un certain nombre d'indicateurs qui sont ouverts pour la santé mentale. Donc voilà, tous les entrepreneurs, en tout cas j'exhorte les entrepreneurs qui ont des belles idées et qui ont des capacités à ne pas lâcher parce que c'est un parcours de résilience et puis à continuer à avancer dans ce domaine-là pour les patients et pour les professionnels et pour la santé mentale en général.
- Speaker #0
Donc là, le podcast, l'épisode va toucher à sa fin. Est-ce qu'il y a des Merci. points clés qui te semblent importants que les gens retiennent de cette conversation ?
- Speaker #1
Moi, j'ai un premier point, c'est autour des données. Je pense qu'il y a quand même encore des blocages sur l'accès aux données, des blocages qui ne sont pas que réglementaires, il y a des blocages aussi dogmatiques sur le fait, ah oui, partager des données, c'est dangereux, les patients ne veulent pas, alors que ça, c'est un a priori, parce que quand on interroge les patients, sur le fait de donner la capacité, donner l'accord pour utiliser les données pour faire de la recherche, ils sont tout à fait d'accord. Et moi, ce que je prône, c'est qu'un peu comme pour les greffes d'organes, il y ait un accord a priori et que si le patient n'est pas d'accord, il doit le dire. Parce que ça, ça ouvrirait quand même, ça permettrait quand même de collecter beaucoup plus de données, beaucoup plus facilement. Et puis après, il y a tout ce qui est, ce que je disais autour des silos, c'est de pouvoir briser ces silos pour rendre les données multimodales et pouvoir ensuite les utiliser pour des projets d'IA. La deuxième chose, c'est tout ce qui est la validation scientifique des approches IA, donc de permettre à la fois, en respectant la sécurité des patients, de pouvoir valider scientifiquement ces approches. Et donc ça, c'est encore lié aux données. Moi, je suis sûr que tout part des données, donc comme on disait, des données de qualité. des données qui sont suffisamment multicentriques pour éviter les biais, et donc d'avoir justement des outils qui, by design, sont configurés pour être validés scientifiquement. Et puis ensuite, il y a quelque chose qui est très important, c'est l'adoption par les professionnels. Parce qu'on peut développer les meilleures solutions du monde, si elles ne sont pas utilisées, ça ne servira à rien. Donc il faut aussi éduquer les professionnels, leur donner confiance dans ces outils, et que ces outils soient suffisamment ergonomiques pour eux, pour qu'ils soient simples d'utilisation. Et enfin, c'est un peu le nerf de la guerre, c'est développer des modèles économiques viables, soit par le remboursement, soit par d'autres moyens, je ne sais pas, par des financements spécifiques, pour justement qu'il y ait dès le départ un futur économique, en tout cas une stabilité économique qui soit possible pour ces solutions.
- Speaker #0
Merci beaucoup pour cet entretien, c'était vraiment super intéressant. Qu'est-ce que tu en as pensé, toi, en tant qu'interviewee ?
- Speaker #1
C'est un entretien qui s'est déroulé de manière très naturelle. J'appréhendais, pour être transparent, le podcast, parce que c'est toujours un peu compliqué de se dire « Ah, en une heure, il va falloir faire passer un certain nombre de messages. » Mais j'ai beaucoup apprécié ton approche et les questions pertinentes. Et j'espère que ça va pouvoir servir à d'autres et qu'il y aura une écoute importante, et en tout cas, longue vie à ton podcast. parce que je pense que c'est majeur aussi, ça fait partie de comme on disait, de l'éducation de la formation aujourd'hui beaucoup de formation passe par ce média et donc c'est majeur que tu puisses continuer ce podcast, en tout cas longue vie à ton podcast merci beaucoup,
- Speaker #0
merci à vous c'est déjà la fin de cet épisode merci de l'avoir écouté jusqu'au bout vous pouvez nous soutenir en mettant 5 étoiles sur le podcast et en nous proposant des idées d'invités en commentaire.