- Speaker #0
Si vous n'étiez pas mère, vous n'étiez pas une vraie femme. Je suis assez gêné moi de voir cette nouvelle mode où ces politiciens ne pas avoir d'enfants.
- Speaker #1
Les intérêts totaux de la chose. Vous êtes plutôt jeune vous deux. Qu'est-ce que vous attendez ? Vous étiez boudis avant 40 ans vraiment. Aujourd'hui vous êtes 60 ans. Vous êtes de nouveau enceinte. Cela ne nous regarde pas.
- Speaker #0
C'est pourquoi ? C'est pourquoi ? C'est pourquoi ? Alors ? C'est pourquoi... Il y a une scène dans Sex and the City qui m'a marquée. Samantha, l'une des héroïnes, prend la parole lors d'une levée de fond pour soutenir les femmes atteintes de cancer. En plein discours, gênée par une bouffée de chaleur et la sueur qui perle sur son front, elle interrompt son pitch léthargique et reprend les choses en main. Et si vous avez des flashs chauds comme moi,
- Speaker #1
vous avez un medal.
- Speaker #0
Elle enlève sa perruque pour révéler son crâne rasé. Ce geste provoque un élan de solidarité immédiat. D'autres femmes dans la salle retirent aussi leur perruque. Pourquoi je vous parle de cette scène ? Parce que l'invitée d'aujourd'hui incarne elle aussi cette parole courageuse, celle qui libère, qui fait du bien à dire et à entendre. Elle repousse les limites de ce qu'on ose exprimer. Je reçois Solveig Lepichon. Elle va nous parler de son parcours d'avocate internationale, de ses maternités, du cancer et surtout de ce message essentiel. Non, nous ne sommes pas condamnés à souffrir en silence. Bonjour Solveig.
- Speaker #1
Bonjour Octavia.
- Speaker #0
Pour commencer, je propose qu'on parle un petit peu de ton parcours professionnel. Toi, tu as fait de brillantes études à Henri IV et puis tu as fait une double maîtrise en droit français et en anglais. avant d'intégrer l'un des plus grands cabinets d'avocats anglais au monde en fusion-acquisition. Déjà, ça pose un peu le personnage. Est-ce que tu peux nous raconter à quoi ressemblait ton quotidien dans ce milieu exigeant ? C'était quoi les rythmes, les codes, les attentes ?
- Speaker #1
Donc, ce n'était pas comme Samantha, même si je travaillais pour des clients qui étaient des fonds d'investissement, donc il y avait des levées de fonds. Donc, merci. En tout cas, j'ai trouvé la scène que tu as prise très rigolote.
- Speaker #0
Merci.
- Speaker #1
Moi, j'ai commencé assez jeune, après des études en Angleterre et puis en France, dans un gros cabinet anglais, effectivement. Juste après mes études, on faisait des horaires de dingue. Tous dans la pyramide, en fait, on avait tous ces horaires-là. Certains encore plus que d'autres, parce qu'il y a un paquet de workaholics, tu vois, qui faisaient partie dans ce type de structure. On commençait pas trop tôt le matin, en fait. Les avocats ne sont pas des lève-tôt, ce sont vraiment des couches tard et pas des lève-tôt, donc vers 10h du matin. Mais ensuite, après, on travaillait au moins, je ne sais pas, souvent 70h ou plus. Et puis, il y avait aussi des nuits blanches, beaucoup de boulot aussi les week-ends. Donc, c'était vraiment extrêmement prenant, avec beaucoup de pression, beaucoup de stress. Et puis, on va dire un management avec des gens qui sont ce qu'ils sont. On est dans la performance, la compétition, mais il y avait aussi une ambiance très déconne.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Parce que c'était aussi, tout était fait, donc c'était vraiment très très malin, mais tout était fait aussi pour qu'on reste le plus longtemps possible au travail. Typiquement, en fait, les remarques qu'on recevait, tu vois, d'associés quand on partait à 8h, c'était « attends, mais tu travailles à mi-temps ? »
- Speaker #0
À 20h, quand tu partais
- Speaker #1
Donc 20h c'était assez rare C'est quand on avait plus grand chose à faire Et qu'on avait fait un gros closing Et qu'on était en train de faire C'était les vacances Donc il y avait quand même beaucoup de présentéisme Mais on s'amusait quand même beaucoup Tout ça justement pour faire en sorte Qu'on reste le plus longtemps possible et donc... On s'amusait bien dans les couleurs. Il y avait tout le temps beaucoup de blagues, aussi pour faire relâcher la pression. Il y avait des sorties, des pots tous les mois. Une grosse soirée l'été, à Noël, etc. Toujours sans conjoint.
- Speaker #0
Oui, d'accord.
- Speaker #1
On crée, en fait, tout était créé pour qu'il y ait une bulle.
- Speaker #0
C'est intéressant, ça, quand même. Et du coup, dans ce milieu que tu nous décris, de grands avocats, de grands cabinets, etc. Comment, d'ailleurs, dès que tu es rentrée, dès que tu as intégré ces cabinets, comment la maternité, elle est perçue dans ce type d'environnement ? Est-ce que tu avais un peu des modèles, des figures inspirantes ? Pas, d'ailleurs. Quel est le rapport à la famille, à la vie privée dans ce genre de lieu ?
- Speaker #1
Dans ce type de cabinet, alors après, ça dépend des structures. Là où j'ai commencé, ce sont des métiers, en tout cas, où il y a beaucoup de femmes en avocate junior.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Et ensuite, plus on monte dans les échelons. et moins il y en a. Et typiquement, moi, dans ma spécialité, tu vois, en fusion-acquisition, dans le cabinet dans lequel j'étais, au début, il n'y en avait aucune. Et dans le deuxième cabinet dans lequel j'étais, là, qui était un cabinet plus français, il y en avait une. En fait, tout ça, c'est des non-dits, mais enfin, en réalité, le métier, ce type de métier, ne correspond pas du tout à une vie de famille. Quand tu fais des nuits blanches, quand de toute façon, en fait... On dit les réunions avant 18h, c'est pas possible. A peu près toutes les réunions étaient après 18h. Enfin, tu vois, c'était ou bien très tôt le matin, avec des négociations qui duraient toute la nuit. Et puis, avec aucune possibilité de faire du télétravail. Enfin, tu vois, c'était... En tout cas, à l'époque, c'était juste un impensé, mais comme dans beaucoup de métiers, à cette époque-là. Et ensuite, en termes de mentalité... Rien n'était dit sur les femmes, bien évidemment. Sur le côté féminin, dans les cabinets, le premier cabinet dans lequel j'étais, il y avait vraiment un même accès. Hommes, femmes, on était tous jeunes, à la même enseigne. Donc on travaillait tous comme des fous, on avait accès au même dossier. En revanche, il y avait quand même... Peu de femmes qui étaient mamans, si on parle de la maternité, on avait entendu parler, si tu veux, de femmes dans d'autres cabinets qui ont pu être virées en revenant de conclure les maternités.
- Speaker #0
Virées ou mises au placard ?
- Speaker #1
Ou mises au placard, etc. Tu as aussi ça. En réalité, il y a beaucoup de départs dans ce type de structure. En fait, tu as des paliers. Il y avait beaucoup de départs, on va dire, en gros, autour de 2, 5, 7 ans. Oui. Et les femmes partaient souvent après deux ou cinq ans d'expérience pour fonder une famille, pour avoir une vie beaucoup plus flexible et souvent partaient plutôt en entreprise. Les hommes, eux, en revanche, partaient plutôt pour être associés dans un autre cabinet. Le rapport à la maternité était plus bon, ok, mais pas chez nous.
- Speaker #0
Mais pas ici. Ce que vous voulez, mais pas ici.
- Speaker #1
Parce qu'il y avait quand même certaines femmes qui avaient des enfants. Et s'il y avait des rôles modèles et des femmes qui étaient inspirantes, en réalité, du coup, c'était plutôt l'inverse. Et ça, je me souviens très bien qu'à un moment, j'étais jeune avocate et je partageais le bureau. Parce qu'en fait, on partage du bureau avec des avocates dits seniors ou avec des associés de manière à se former. C'est très malin comme système. Ça marche beaucoup, tu vois. Et cette femme-là, que je ne juge absolument pas, mais c'est vrai que pour moi en tant qu'avocate jeune ça m'interpellait beaucoup tous les jours elle appelait sa nounou pour parler avec son enfant et elle pleurait c'est horrible et moi j'avais une peine incroyable déjà de l'avoir pleurée et puis en même temps pourquoi elle s'inflige ça ?
- Speaker #0
c'est vrai quand même vivre extérieur ça pose la question de pourquoi Qu'est-ce... pourquoi tu ne pars pas ?
- Speaker #1
Pourquoi tu ne pars pas ? Pourquoi tu ne pars pas dans un cabinet, si tu veux devenir associée, mais tu vas dans un cabinet qui te permet, en fait, d'être une mère ? Ou bien de changer de job ? Mais c'est vrai que son ambition, c'était vraiment d'être avocate dans ce tube de structure. Et voilà, en fait, elle était prête à tout. de sacrifier des choses parce qu'ensuite après tu peux dire ok mais très bien tu vois c'est chouette aussi d'avoir d'avoir cette ambition là oui d'autres d'ailleurs l'assumé plus d'accord donc avait un rapport en fait beaucoup plus distancié avec la maternité bon bah ça c'était ok mais du
- Speaker #0
coup c'est vrai que c'était pour moi c'était pas des c'était pas des figures inspirant mais c'est vrai que ça pose ça pose mille questions aussi parce que on se dit il faut aussi des femmes qui sont Si on veut un peu briser les plafonds de verre, encore est-ce que c'est faisable ? Mais il faut aussi des femmes avec ces ambitions un peu fortes pour pouvoir aller taper du point. Bref, c'est un débat philosophique.
- Speaker #1
Oui, c'est un débat qui est très intéressant.
- Speaker #0
Et qui est important, en réalité, parce qu'en fait, les entreprises sont quand même globalement, et on le voit dans le CAC 40, notamment, je crois, il y a trois femmes dirigeantes d'entreprises du CAC 40, si je ne me trompe pas. Les gens qui dirigent sont ceux qui prennent les décisions, tant que ce sont uniquement des hommes de 50 ans ou plus, blancs. Voilà, bon bah, ça veut dire que la diversité des possibilités de vie... ne sont pas représentées. En fait, les problématiques de la plupart des gens ne sont pas représentées dans les entreprises. Et c'est vrai que ça pose mille questions. Alors du coup, revenons-en à toi. Quand tu es tombée enceinte de ton premier enfant, comment... Donc tu travaillais à ce moment-là justement en cabinet. Comment tu as vécu l'idée d'annoncer la nouvelle à ton entourage professionnel ? Est-ce que tu as ressenti de la pression ?
- Speaker #1
À ce moment-là, j'étais en cabine d'avocat, effectivement, et j'avais changé de cabinet. L'annonce, je ne m'en souviens vraiment pas beaucoup, voire pas du tout. En revanche, pression, oui, sans doute. Ce dont je me souviens, c'est que j'ai attendu pas mal pour l'annoncer. Je me demande si je n'ai pas attendu trois mois. Vraiment, le... Le max du max du max, parce que ça commençait à se voir beaucoup. En tout cas, je l'avais beaucoup caché jusque-là. Comme toutes les femmes, tu mets des vêtements amples, tu changes ta garde-robe. Ça, c'est sûr que voilà. J'avais parlé, j'avais dit que dans certaines structures, on se faisait virer après retour de congé maternité. Et ça, je n'avais pas peur de ça. Tu me parlais de pression. Je pense que dans d'autres structures, oui, je pense que j'aurais eu peur de ça. En revanche, dans ce type de milieu. Alors, peut-être pas tant, en fait, dans ce cabinet-là, mais c'était sur l'après. C'était de se dire, comment je vais être traitée une fois que je serai avocate, maman et mère, sur le traitement. Est-ce que je vais me retrouver dans une voie de garage ? Est-ce qu'on va me donner des dossiers ?
- Speaker #0
Voie de garage ?
- Speaker #1
Quel type de client ?
- Speaker #0
Comme placard, quand tu dis voie de garage. C'est un peu le truc où on te met de côté.
- Speaker #1
En fait, soit on te donne beaucoup moins de dossiers ou des clients beaucoup moins prestigieux ou bien le type de dossier que tu as à traiter sont les dossiers qu'en gros, pas grand monde veut faire parce que c'est beaucoup plus... En fait, dans le métier, moi, c'est ce qui me plaisait vachement d'avocate en fusion acquisition, c'est que tu as beaucoup de négo et tu as beaucoup d'adrénaline. Même si c'était très dur et tout ça, c'est un peu un show.
- Speaker #0
Tu as mené ta grossesse à terme. Est-ce que tu peux nous raconter comment s'est passé ton retour au bureau, justement, suite à cette première grossesse ? Est-ce que tes craintes se sont confirmées ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
- Speaker #1
Mes craintes, oui. Oui, c'est vrai qu'en fait, il y avait une différence entre avocate et avocate et avocate et mère. Donc, j'ai dû me battre. Oui, c'est vrai que ça, ça a été plus un combat, justement, pour garder ma place.
- Speaker #0
Ok, tu as dû lutter quand même.
- Speaker #1
Oui, parce qu'en fait, il y avait une tendance naturelle à dire, maintenant que tu es mère, il faut que tu prennes soin de toi.
- Speaker #0
Oui. Tu vois,
- Speaker #1
c'est une injonction.
- Speaker #0
Oui, c'est ça. Tu n'es plus vraiment à ta place dans un truc de combat et d'adrénaline.
- Speaker #1
C'était plus une injonction. Et pourtant, c'était tourné comme si... Ce n'était pas vraiment pour prendre soin de toi. C'était plus te dire,
- Speaker #0
merci de laisser la place.
- Speaker #1
C'est ça. Donc ça, on pourra en parler éventuellement. Donc il y avait un collègue en particulier qui était très fort. Donc la première grossesse, c'était plutôt bien passé. Le congé maternité, ça avait été un enfer pour moi.
- Speaker #0
Ok.
- Speaker #1
Parce que je m'ennuyais.
- Speaker #0
Tu t'étais retrouvée seule à la maison avec le nouveau-né, le bébé.
- Speaker #1
Oui, et moi, en fait, je n'étais pas très câblée bébé. J'aimais beaucoup mon enfant, mais c'est vrai que je trouvais ça très ennuyeux. Et j'étais hyper contente de revenir au travail.
- Speaker #0
Il y a beaucoup de femmes qui disent ça aussi. C'est vrai. Il y en a beaucoup.
- Speaker #1
Et ça, c'est vrai que c'est bien de l'assumer. parce que... Parce que c'est vrai que voilà, en fait, certaines personnes adorent les bébés, d'autres c'est beaucoup moins leur truc. Et puis en plus, il y a le côté extrêmement flippant. C'est une toute petite vie fragile,
- Speaker #0
fragile.
- Speaker #1
Pas de mode d'emploi. Donc, il y a le côté très excitant, merveilleux. Et bien sûr que c'est merveilleux et puis en même temps complètement flippant. Et puis, il y avait une routine terrible. Enfin, en tout cas, moi, que je vous dirais comme terrible.
- Speaker #0
Il y avait moins d'adrénaline. Tu avais de l'adrénaline quand même, mais différente.
- Speaker #1
C'est ça, exactement. Et ça, c'était vraiment plutôt du cortisol. Tu vois, c'était vraiment de la peur, du stress. Vraiment le stress, stress, tu vois. Puis avec des flashs dans ma tête, tu vois, quand je le portais. Ça y est, je vais tomber.
- Speaker #0
Comme une infusion, ça. Ah oui, c'est vrai ? Oui, il y a beaucoup de mer.
- Speaker #1
C'était vraiment horrible. Ça m'arrivait tout le temps, Et puis ensuite, après aussi, en revenant au travail, ce qui s'est passé, c'est que mon enfant, qui faisait très bien ses nuits, s'est remis à dévisser. Moi, je pense qu'il m'en voulait. Mon mari n'est pas du tout d'accord là-dessus. Parce que j'ai vu un changement, en tout cas, c'était ma perception, un changement de comportement de mon bébé entre, tu vois, j'ai repris, il avait trois mois et demi. Ou d'une part, en fait, il faisait ses nuits, après il faisait plus ses nuits, à nouveau. Et puis deux, il me faisait la tête. Ça, j'ai vraiment senti comme ça. Quand on rentrait, en fait, il tournait la tête. Et ça, c'était vraiment super dur. Ah,
- Speaker #0
tu m'étonnes. Ouais.
- Speaker #1
Et par ailleurs, en fait, ce qui m'est arrivé, c'est que j'ai fait un postpartum. D'accord.
- Speaker #0
Peut-être les phobies d'impulsion dont tu parles, les flashs et tout. En tout cas, c'est parfois associé aux dépressions postpartum.
- Speaker #1
Ah oui, peut-être. Tu vois, et moi, je ne m'en rendais absolument pas compte. Et celle qui s'en est rendue compte, c'est la pédiatre de mon fils, qui, lors de visites de routine, parce qu'il y en a beaucoup avec le nouveau-né, et qui un jour me dit ce qu'elle ne faisait pas, qui me dit « Et madame, vous, comment allez-vous ? » Donc elle avait bien senti. Moi, je n'ai pas du tout compris de la question, si tu veux qu'elle ait senti quoi que ce soit. Et donc je commence ma phrase en disant « Ben oui, moi ça va très bien ! » et c'est comme ça que ça s'est passé et après voilà en bonne professionnelle elle m'a guidée vers un psychiatre et ça en réalité ça a été l'ACATA parce que le psychiatre m'a mis sous antidépresseur donc mes dames qui m'écoutaient vraiment faites attention à la personne à y avoir confiance dans le traitement si on n'est pas sûr d'avoir un second avis, ça c'est vraiment important aussi, ça m'est conseillé
- Speaker #0
Merci beaucoup Solveig. Alors du coup, pour poursuivre un peu dans ton histoire perso pro, tu as eu un deuxième enfant trois ans plus tard, une grossesse arrêtée à nouveau trois ans plus tard. Donc tu as quand même eu un parcours jalonné régulièrement de grossesse. À ce moment-là, tu travailles toujours en cabinet d'avocat. On va revenir justement sur la grossesse arrêtée, si tu le veux bien. comment tu as vécu cette épreuve dans un contexte toujours très difficile comme on l'a dit au début de cabinet d'avocats international fusion acquisition, combat, la guerre adrénaline,
- Speaker #1
tout ça ça fait envie, ça je te remercie Octavia en fait de me donner la possibilité de parler de ça, de ma grossesse arrêtée parce que j'en ai jamais parlé j'en ai jamais parlé parce qu'à l'époque ça ne se faisait pas Euh... Et effectivement, ça fait partie de mes combats. Petit combat à mon niveau de libérer la parole sur tout un tas de sujets. J'ai été enceinte une troisième fois, on était absolument ravis. Comme je n'avais pas eu de problème avec les deux précédentes grossesses, on l'a annoncé très rapidement, au bout d'un mois, à famille et belle famille. Je projetais énormément, pour différentes raisons, à cette époque-là, sur cet enfant. Et un jour, en revenant de réunion avec une collègue, j'ai senti un liquide couler le long de ma jambe.
- Speaker #0
Voilà, ouais.
- Speaker #1
Et donc, c'était du sang qui coulait et je m'en suis rendue compte très rapidement. Je ne l'ai pas dit à la collègue. Je suis partie vite. Et je ne l'ai jamais dit ni à cette collègue-là, ni à d'autres collègues. Et pourtant, j'avais vraiment des collègues vraiment très, très proches. Parce que je ne l'avais pas dit non plus. Que j'étais enceinte à cette époque-là. Jusqu'à très récemment, j'ai revu cette collègue et je lui ai dit, dans mon processus actuel de libération de la parole, et je trouve que c'est vraiment dommage parce que ce sont des événements qui sont extrêmement traumatisants, à la fois physiquement, parce qu'on prend un cachet, mais ensuite après, il a fallu aller plus loin, et puis psychiquement, bien évidemment. C'est un deuil Voilà exactement, on vit un deuil Deuil périnatal Donc mon mari a été un soutien énorme Mais j'ai mis beaucoup beaucoup de temps à m'en remettre et ça a changé après beaucoup de choses J'ai changé de parcours professionnel J'ai quitté mon cabinet C'est un déclic quelque part aussi. Oui, parce que c'était quelque part, en fait, bon, ok, je n'ai pas de troisième enfant, mais en fait, je pars sur un nouveau départ, tu vois, donc tu vois, quelque part, en fait.
- Speaker #0
Tu veux recommencer quelque chose, quoi. Ça reste, malgré tout, je pense, même si, comme tu dis, la parole, c'est un peu libéré, ça reste des sujets quand même relativement tabous, notamment, comme tu le mentionnes, dans l'entreprise. Puisque tant qu'on n'a pas parlé d'une grossesse, aller parler justement d'une grossesse arrêtée, ça semble aussi peut-être quelque part, enfin je ne sais pas, mais une forme de je ne vous ai pas tout dit. Donc, il n'y a pas un truc un peu ambivalent aussi vis-à-vis de ça ?
- Speaker #1
Oui, oui, je pense. Et c'est vrai que c'est peut-être la raison pour laquelle, tu vois, à l'époque, et puis à l'époque, j'étais aussi jeune, j'étais pas encore complètement, tu vois, tu le disais en fait, j'ai eu plusieurs grossesses. et pour lequel, en fait, il y avait eu un impact, tu vois, professionnel.
- Speaker #0
Ah d'accord, quand même. Donc, six ans après, tu avais les conséquences quand même sur ton emploi, de ces grossesses,
- Speaker #1
etc. Ça allait mieux, justement, en fait, si tu veux. Les conséquences sur mon emploi étaient... Il y a eu un creux énorme entre 2008 et 2011. Ça a commencé à monter un petit peu en 2011. Ensuite, après 2011, deuxième grossesse, là, recreux. que j'ai remonté en fait rapidement, mais c'est parce que j'avais aussi développé une résilience et aussi j'avais fait des alliances en interne. Très importantes, ça, les alliances, qui étaient absolument clés, et notamment avec une femme exceptionnelle, si elle nous écoute, c'est exactement de qui je parle, et où on avait fait une alliance, et c'est ça en fait qui nous a permis aussi, toutes les deux, de nous aider à titre personnel, mais surtout à titre professionnel, pour nous hisser toutes les deux professionnellement. Et donc, en 2014, tout ce travail, j'avais créé aussi d'autres alliances avec tout un tas de gens, et donc j'allais avoir une promotion.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
que je crois j'ai eu l'année suivante ou quelque chose comme ça, et je suis partie juste après. Mais en fait, c'est vrai que du coup, cette grossesse arrivait dans ce flux ascendant, dans cette direction ascendante. Et je ne l'ai pas dit parce que ça allait stopper ça en fait.
- Speaker #0
Ça allait quand même bloquer l'ascension.
- Speaker #1
Et donc, quand ça s'est arrêté, je me suis dit, ok, très bien. Donc là, c'est peut-être un signe du destin. Ok, je continue sur cette pente-là. Donc, ok, j'ai ma promotion, mais de toute façon, tout ça, ce n'est pas pour moi. Donc, je pars. Et puis, c'est un peu aussi un pied de nez, tu vois.
- Speaker #0
Oui, c'est vrai. C'est toujours un pied de nez quand ça se passe comme ça, finalement. C'est aussi une reprise en main de son propre...
- Speaker #1
Oui, et ça, en fait, pour les femmes, c'est vraiment extrêmement important. c'est de toute cette... idée d'être acteur, en tout cas le plus possible, d'essayer de reprendre le contrôle, même si je reviendrai en fait à un moment sur ces histoires de contrôle, parce que moi je suis plutôt tendance perfectionniste, donc ça c'est vraiment des sujets...
- Speaker #0
On ne peut pas non plus tout contrôler. Voilà,
- Speaker #1
mais oui, et ça c'est important. Donc on ne peut pas tout contrôler, et ça c'est important d'accepter, on a du mal à l'accepter, en tout cas moi j'ai beau... Il y a des choses qu'on peut contrôler et les choses qu'on peut contrôler, c'est important justement de devenir acteur de ça. Et donc de développer des ressources en soi et de développer des ressources avec les autres. Donc de mailler et d'où l'importance des alliances, des communautés d'entraide qui permettent tout ça.
- Speaker #0
C'est passionnant. Il me semble que, pour faire une petite parenthèse sur les alliances dont tu parles, je crois que c'était des femmes qui travaillaient pour le cabinet d'Obama qui avaient fait ça aussi. Je ne sais pas combien elles étaient, peut-être cinq, six. Et elles s'étaient alliées pour se soutenir les unes les autres face à d'autres, notamment hommes, qui essayaient de grappiller des choses, de gravir des échelons et tout. Et elles ont réussi à imposer leur style quand même en faisant ça.
- Speaker #1
Oui, oui. Et ça, c'est vrai que c'est des choses. Alors moi, ce qui est important, c'est d'avoir des alliances. C'est d'avoir des alliances. C'est vrai que souvent, en tant que femme, on trouve plus facilement des alliances avec des femmes, mais des alliances avec des hommes également.
- Speaker #0
Tout aussi, bien sûr.
- Speaker #1
Extrêmement importantes. Et au contraire, parce qu'on ne peut jamais faire sans les hommes, il faut en faire avec. On a besoin tous les uns des autres. Et ça permet en fait de... justement, de remonter beaucoup plus rapidement parce que c'est...
- Speaker #0
Et plus haut parfois.
- Speaker #1
Et plus haut parfois parce que c'est plus inclusif. Bien sûr. Et chacun y trouve son compte. Et ce côté essayer de dépasser le plafond de verre, en fait, ça c'est avec les hommes aussi. On a besoin de créer des alliances avec les hommes, c'est extrêmement important.
- Speaker #0
Merci de le rappeler, Solveig. Du coup, toi, au travail, tu m'as dit ça quand on préparait l'échange, tu as eu des remarques Une fois que tu as eu tes deux enfants du style, justement on en parlait un petit peu tout à l'heure, il faut que tu lèves le pied maintenant que tu es mère. Qu'est-ce que ça t'a fait d'entendre des remarques comme ça ?
- Speaker #1
J'étais furieuse, j'étais furieuse et frustrée. Ça venait d'un collègue qui, s'il entend ce podcast, saura que c'est lui également. de... C'est une remarque complètement sexiste. Complètement sexiste. Et que j'avais bien compris comme telle sous un couvert de je veux être... Je dis ça pour ton bien. Donc il y avait à la fois le côté sexisme et puis sous une tonalité extrêmement fallacieuse, trompeuse qui était encore plus... Moi, je trouvais ça extrêmement méprisant. Vraiment. Donc, j'étais absolument furieuse. Et donc, je lui ai dit, parce que ce type de remarques, j'en ai eu plusieurs fois de ce collègue-là. Et puis ensuite, après, ça pouvait être un peu plus insidieux.
- Speaker #0
Sous un vernis de bienveillance, comme tu disais. C'est insidieux, c'est qu'il ne peut pas réagir vraiment, parce qu'en plus, c'est présenté comme une gentillesse. Oui,
- Speaker #1
voilà. Et donc, ma réaction était du même acabit. C'était de dire, je te remercie pour ta bienveillance et de penser à moi. Je suis ravie. Merci. Cela étant, ce n'est pas du tout mon objectif. Je suis ravie en tant que métier d'avocate en fusion-acquisition. Et donc, c'est ce que je veux continuer. Et je pense que je vais réussir à m'organiser comme les hommes qui sont papas.
- Speaker #0
Tu m'as dit que le rôle de ton mari a été déterminant pendant toute cette période qu'on vient de décrire, de grossesse, de grossesse arrêtée, d'un emploi quand même prenant, etc. En quoi, justement, le soutien de ton mari a été essentiel pendant cette période ?
- Speaker #1
Avec mon mari, on est vraiment une team et je voudrais lui rendre hommage. Ça va faire 26 ans qu'on est ensemble et là, en fait, notre vingtaine... 20 ans de mariage.
- Speaker #0
Incroyable !
- Speaker #1
Et malgré tout ça, le rythme de fou en tant qu'avocate, j'ai été avocate pendant 14 ans, il a toujours été là. Alors lui, il n'est pas du tout avocat.
- Speaker #0
Ok.
- Speaker #1
Et ce rythme-là, il ne l'acceptait pas, enfin, il ne le comprenait pas. Donc ce n'était pas du tout, tu vois, lui dans son modèle. Et malgré tout, il est resté et il l'a accepté parce que c'était important pour moi à cette époque-là. Toutes les difficultés que j'ai pu avoir, il a toujours été là. Donc, il a été d'un soutien moral exceptionnel. Et ensuite, sur les sujets de maternité, ça a été un soutien logistique. Bien évidemment, on est deux dans le couple. mais aussi, lui, un bien meilleur papa pour nos enfants petits que moi, j'étais une bonne mère. Bonne, je mets des guillemets en fait, on ne le voit pas, c'est la radio. Avocate, je rentrais à 20h minimum. Et ensuite, après, j'ai été responsable juridique dans différents gros groupes. pendant 5-6 ans. Et là, pareil, je rentrais tard aussi. Il était rare que je dîne avec mes enfants. Je les voyais le week-end et les enfants petits, c'était mon mari qui... Je jouais avec mes enfants, mais lui, je les voyais plus, il jouait plus avec eux. Tous les dimanches matins, il les emmenait au musée pendant que moi, je dormais.
- Speaker #0
Il a été un père présent. Oui,
- Speaker #1
un père beaucoup plus présent qu'en tout cas... pour les enfants petits que moi je n'étais présente et quand les enfants étaient petits et qu'ils se faisaient mal
- Speaker #0
ils appelaient plutôt papa que maman.
- Speaker #1
C'est intéressant. Moi, je trouve ça trop cool.
- Speaker #0
C'était complètement inhabituel, parce que la société, en fait, on se dit toujours c'est la mère, la mère, etc. Pourquoi pas le père ?
- Speaker #1
Et pourquoi pas ? On est complètement.
- Speaker #0
Et ça, on était vraiment beaucoup là-dedans. Et en même temps, avec les injonctions de la société, et puis moi, en fait, ce côté aussi perfectionniste, ça me fendait le cœur. C'est-à-dire que j'avais... J'avais à la fois une blessure d'ego et puis une blessure vraiment, tu vois, personnelle forte de... Ah, mais en fait, c'est là où je me rendais compte à quel point, en fait, peut-être, voilà, j'étais une mauvaise mère et je ne l'assumais pas, en fait. Et donc, ça me faisait du mal, en fait, quand mes enfants... Quand je me rendais compte que mes enfants, petits, étaient plus proches de leur papa. Et c'était bien normal, ils ne le voyaient plus, ils créaient beaucoup plus de liens. C'est vrai que c'est un schéma qui est moins traditionnel. Et en même temps, c'est un schéma qui est important. Essentiel.
- Speaker #1
Essentiel. Et j'espère que dans les années à venir, ça va être de plus en plus comme ça, que ça va fonctionner dans les couples. Mais tu poses une question intéressante aussi dans ce que tu dis. Finalement, est-ce qu'en tant que mère, si on n'est pas la number one, est-ce que ça veut dire qu'on est une mauvaise mère ?
- Speaker #0
Alors ça, c'est une question qui est passionnante. Et ce n'est pas du tout le cas, en fait, en réalité. Ah ben non.
- Speaker #1
Non, on est d'accord.
- Speaker #0
Mais ça, c'était ce côté, en fait, que j'ai et sur lequel on pourrait y revenir, mais justement, d'accepter ça. Accepter qu'on est la number two. Parce que la société fait que la mère est censée être la number one et le père le number two.
- Speaker #1
Voilà, de toute façon, tout est créé pour ça.
- Speaker #0
C'est ça. Et ça, c'est insensé.
- Speaker #1
C'est insensé.
- Speaker #0
Je veux dire, en même temps, ce sont des constructions sociétales, ce sont des constructions anthropologiques depuis des siècles, mais sinon, qui correspondent à rien sauf à des choix, d'individus. Alors certes, si c'est par choix, ok, très bien. Mais voilà, il faut que ce soit un choix, de dire je veux être la number one, je mets tout pour être la number one et donc... Donc je rentre plus tôt, je donne le bain, je fais des dîners. Et puis si on ne fait pas ça, c'est parce qu'on l'a choisi. Moi, je l'avais choisi. Et donc dans ce cas-là, il faut assumer d'être la number two, ce que je n'assumais pas.
- Speaker #1
Voilà, donc c'était quand même une souffrance quelque part aussi.
- Speaker #0
Quelque part, voilà. Et donc c'est là où je... Et aussi parce que c'était une souffrance parce que... Je n'avais pas assez fait de travail sur moi, sur ce que je voulais, qui j'étais. Je n'étais peut-être pas complètement au clair. Oui,
- Speaker #1
je dirais, parce que c'est vrai que souvent, on a tendance à justifier nos propres problématiques. Mais c'est aussi un truc de société, comme tu le dis très bien. C'est-à-dire que c'est une injonction globale faite aux femmes. C'est-à-dire que si tu es mère, tu dois être la number one. Donc, si tu n'es pas la number one, alors ça sous-entend que tu es probablement une mauvaise mère. Et donc, je pense qu'il y a aussi ce truc-là que forcément t'intériorise. Et finalement, oui, maintenant, je pense qu'on commence à un petit peu, à commencer à ouvrir un peu quelque chose là-dedans.
- Speaker #0
Oui, et en fait, et là où ce qui est intéressant, parce qu'effectivement, pour aller plus loin, tu vois, moi, je parlais de number two, mais effectivement, se dire que si on est la number two, ça ne veut pas dire qu'on est une mauvaise mère.
- Speaker #1
Ben non, au contraire, en plus, puisqu'on confie ses enfants à un papa génial, qui sait très bien s'en occuper, on sait qu'ils sont bien. Et nous, on ramène aussi l'argent. Enfin, ça compte aussi. En vrai, ça ne veut pas dire du tout qu'on a une mauvaise mère. Au contraire, quoi.
- Speaker #0
Oui, en fait, parce que c'est des choix de couple. Ou bien ensuite, après, souvent, ce qui peut être les cas aussi, ça peut être des choix selon les périodes de la vie. C'est-à-dire que tu te retrouves number one à un moment, number two à un autre moment, number one à nouveau, tu vois. En fonction du parcours professionnel de chacun dans le couple.
- Speaker #1
Bien sûr, oui. Oui, oui, c'est ça.
- Speaker #0
Et ça, c'est quelque chose, tu vois, ce continuum, et pas de voir ça de manière hyper figée, est vraiment important. Et ensuite, ce que je trouve aussi difficile pour les hommes, si on prend le point de vue des hommes, c'est de se dire, la société dit, ok, injonction pour la mère, d'être la number one, il faut qu'on ait, sinon on est une nouvelle mère. Et puis quelque part aussi, l'inconvénient pour les hommes, c'est... Ouais, mais de toute façon, tu seras toujours number two, parce que la number one, en fait, c'est la mère. Et ça, c'est vachement douloureux aussi pour un père, parce que tu te dis... Ben non, moi, mes enfants, c'est vachement important. Moi, j'aime bien passer du temps avec nos enfants. Je n'ai pas forcément envie d'être le workaholic, de rester au bureau tout le temps. Pourquoi est-ce que je n'ai pas droit à ça ? Et c'est vrai que ça, je sais que mon mari m'a souvent dit ça, que quand lui prenait une place, et je vais te donner un exemple, parce que c'est vrai que c'était assez marquant. Donc, je venais d'accoucher de mon premier enfant. Et mon mari, en fait, tenait à aller. C'était un rendez-vous, tu vois, avec les mères qui venaient d'accoucher pour avoir les conseils sur les premiers soins, etc. Et mon mari avait tenu à y aller.
- Speaker #1
Trop bien.
- Speaker #0
Et moi, j'étais restée avec notre bébé. Oui, mais en fait, il m'a dit qu'il n'avait pas bien été accepté.
- Speaker #1
Ah tiens.
- Speaker #0
Parce que lui voyait ça, si tu veux, comme un gynécée de femmes qui était... qui le regardait.
- Speaker #1
Ah, qui voulait être entre elles, quelque part. Qui ne s'était pas à l'aise.
- Speaker #0
Donc, il ne s'était pas senti inclus, tu vois, du tout. Et donc, il avait trouvé ça vraiment dommage et peut-être qu'il l'avait un petit peu mal vécu. Moi, j'ai essayé de lui dire que peut-être, alors, effectivement, ça pouvait peut-être être ça, je n'y étais pas, donc je ne pouvais pas dire. Ensuite, il y avait peut-être une autre explication qui était que les femmes qui viennent d'accoucher, tu vois, tu n'es pas à ton prime, en fait, comme disent les jeunes. donc t'as peut-être envie si tu veux de voir un homme où on a toujours ce regard de la société où toi t'es face à un homme en fait il faut être bien sapé maquillé etc donc là elle l'était pas du tout et donc c'était peut-être plus une gêne elle de leur part plus qu'un rejet en fait d'un élément masculin je sais pas mais en tout cas son ressenti lui s'était senti peut-être pas rejeté en tout cas bikes pas tout à fait accepté.
- Speaker #1
C'est en ça que c'est intéressant, c'est qu'effectivement, les structures aussi un peu de la société telle qu'elle est faite actuellement, il y a 10-20 ans, font que aussi, en fait, on est obligé de suivre certains rôles. Parce que sinon, à un moment, ça se passe mal. De toute façon, le congé paternité, actuellement, c'est 30 jours, je crois. Un mois.
- Speaker #0
Oui, ça a été allongé il y a pas mal de 11 jours, et c'est passé.
- Speaker #1
Un mois, donc 11 jours, alors là, c'était... pardon mais ridicule, bon 30 jours, enfin un mois, on se dit que c'est pas non plus suffisant, en fait c'est pas autant que la mer donc encore une fois ils sont invités à retourner bosser messieurs s'il vous plaît ramenez l'argent et mesdames occupez-vous des enfants, enfin voilà, et donc il y a des rails quand même qui sont un peu là et qu'on est invité à suivre en tout cas si on veut pas avoir trop de difficultés derrière et c'est vrai que tu vois moi je suis moitié norvégienne
- Speaker #0
Et dans la culture nordique, en fait, il y a beaucoup plus de partage. Donc, c'est peut-être ça aussi qui explique, tu vois, que l'on a cette...
- Speaker #1
Que le 6 soit un petit peu plus moderne.
- Speaker #0
Voilà. En tout cas, on est moins dans des schémas. Et typiquement, en fait, le congé maternité peut être splité. Le congé maternité, déjà là-bas, c'est un an.
- Speaker #1
C'est énorme.
- Speaker #0
Mais il y a... il y a une... beaucoup plus de partage. Donc, ils ont un congé paternité qui est beaucoup plus long et qui est pratiquement obligatoire. Et où on peut utiliser du temps pour avoir un peu du temps, je crois, du congé maternité pour le mettre sur le père. Oui,
- Speaker #1
tu peux répartir entre les parents. C'est un peu un congé parental à répartir. Ça, c'est top.
- Speaker #0
C'est vachement intéressant.
- Speaker #1
Même pour les employeurs et tout. qui que t'embauche, tu sais pas si peut-être qu'il y aura un congé parental à un moment, voilà, point. C'est vrai que c'est des solutions qui semblent pourtant assez claires. Pour en revenir à toi justement, autour de tes 40 ans, t'as fait face à une épreuve majeure. On t'a annoncé un cancer. Comment est-ce que tu as appris cette nouvelle et qu'est-ce que tu gardes comme souvenir de ce moment ?
- Speaker #0
Le cancer, ça avait été quelque chose d'extrêmement sournois et ça explique ensuite la réaction à l'annonce. J'ai eu pendant huit mois des démangeaisons qui ont été progressives jusqu'à devenir constantes. Donc matin et soir et nuit sur tout le corps.
- Speaker #1
L'horreur totale, quoi.
- Speaker #0
C'était vraiment un enfer. Ça a été vraiment un enfer, et avec en plus une errance médicale, parce que les médecins s'étaient mis sur la piste de la gale, et j'ai fait différents traitements, ce qui a en plus augmenté mes démangeaisons, parce que je ne pouvais plus rien mettre, j'avais la peau à vie, c'était absolument infernal. Et donc, je vivais vraiment une période extrêmement difficile. Donc, c'était vraiment un enfer. Puis en plus, au boulot, j'avais plein de... J'avais un gros poste. Lancement d'activités, lancement d'équipe.
- Speaker #1
Ouais, ok.
- Speaker #0
Plutôt construction d'équipe. Donc, le combo infernal. Et donc, pendant toute cette période-là, c'était affreux parce que j'étais sous somnifère. Parce que je n'arrivais pas à dormir à cause de mes démangeaisons et ça ne marchait pas. Parce que ça marche en fait que si on se démange pas, ça me démangeait tout le temps. Donc je dormais peu, je maigrissais à vue d'œil, ce qui faisait aussi partie de mon cancer. Et donc en réalité, quand il a été découvert le cancer, grâce à une médecin, une de mes amies médecins gynécologues, que je remercie, mais tant et tant, ça a été à la fois un énorme choc. Bien sûr.
- Speaker #1
On imagine.
- Speaker #0
Bien sûr, un énorme choc et un soulagement incroyable. Parce que enfin, parce que dans mon errance médicale, les médecins, au bout de six mois à peu près, cinq, six mois, m'ont dit que c'était dans ma tête. Comme les traitements pour la gale ne marchaient pas, c'était dans ma tête. J'étais trop cortiquée, disait-il. Soit disant, en fait, c'était sous forme de compliment, m'avait-il expliqué. J'étais une intellectuelle et donc, voilà. Je réfléchissais trop, quoi.
- Speaker #1
Oui, et puis quand on réfléchit trop, du coup, on a des démangeaisons qui sont insupportables. C'est bien connu.
- Speaker #0
Sauf qu'il les pose à son corps. Mais ça avait été quand même extrêmement dur. Parce que quand ils m'ont dit ça, si tu veux, moi, je me suis dit... C'était en janvier 2019. Je me suis dit, moi, je suis folle à lire.
- Speaker #1
On ne t'a pas cru, quoi. On n'a pas cru ta souffrance,
- Speaker #0
ta parole. Non, je n'ai pas été entendue. Non, vraiment, je n'ai pas été entendue. D'autant que... Ce que je leur exprimais, c'était les différents symptômes que j'avais et qui Ausha toutes les cases du cancer que j'avais. Et donc, je me sentais vraiment folle alliée. Mais l'annonce a été tout de même, dans ce contexte-là, a été un soulagement parce que du coup, je pouvais me mettre en mode combat. Au moins, je le savais. J'avais un ennemi. Je savais quel ennemi. J'avais un traitement. J'avais demandé un deuxième avis. Et donc ensuite, on se met en mode... On met son filet de parachute. C'est parti. Et on y va.
- Speaker #1
Là encore, vie professionnelle, c'est aussi un peu notre fil rouge aujourd'hui. Comment ça s'est passé dans ta vie professionnelle ? Face au combat aussi contre ce cancer, est-ce que tu as eu du soutien dans ton boulot ?
- Speaker #0
Et j'ai fait du coup ce que je n'avais pas fait pour ma grossesse arrêtée. J'en ai parlé. Tout de suite ? J'en ai parlé tout de suite.
- Speaker #1
Ah ouais ?
- Speaker #0
Oui, j'en ai parlé tout de suite. Super. Ça avait été... Oui, mais en fait, à l'époque, tu vois, c'était presque une... C'était une nécessité, tu vois. C'est ce que je te disais. Ça avait vraiment été quelque chose d'absolument nécessaire parce que souffrir en silence, je ne pouvais pas. Ou je ne pouvais plus.
- Speaker #1
Tu ne pouvais plus parce que tu l'as fait. Parce que je l'avais fait. Apparemment.
- Speaker #0
Je ne pouvais plus. Et puis, comme... Plusieurs fois quand même dans ma carrière, il y avait aussi ce côté d'ego, de dire, parce que j'avais entendu un de mes supérieurs hiérarchiques le dire au sujet d'une femme qui était partie pendant longtemps, puis qui était revenue, et puis après qui était repartie longtemps et qui était revenue. Donc on suspectait bien, si tu veux, qu'elle était malade. Le dire qu'elle était fragile. Et ça, j'avais trouvé ça odieux.
- Speaker #1
Ouais, le mot t'avait...
- Speaker #0
On m'avait vraiment transpercé et je m'étais dit non, je ne suis pas fragile. Je vis un moment de vulnérabilité, ça c'est évident. Et je suis vulnérable, ça c'est évident. Parce qu'on me dit des choses, ça me blesse. Mais je ne suis pas fragile. Et donc je l'ai dit. Tu vas me dire, non, c'est pas ça la maladie. C'est pas parce qu'on est fragile, ça nous tombe dessus, c'est un coup de bambou. Je n'étais jamais malade, moi, avant. Donc, je l'ai dit. Je l'ai dit très tôt et je l'ai dit à ma hiérarchie. Je l'ai dit à mes collègues. Je l'ai dit à mon équipe. Je l'ai dit à mes clients. Et ça se faisait très peu.
- Speaker #1
Oui, c'est quand même, ça se fait encore. Peu. J'imagine qu'il y a beaucoup de gens qui traversent des choses en entreprise, on n'entend pas parler, on ne sait pas.
- Speaker #0
Exactement. D'où aussi mon combat pour libérer la parole sur ces sujets. Parce que souffrir en silence est tellement dur. Et encore une fois, c'est l'importance d'être et de se sentir soutenue. Et du soutien, oui, j'en ai eu. j'ai eu beaucoup de soutien surtout de personnes qui étaient qui avait vécu la maladie. ou un décès, donc qui, eux, avaient vécu la maladie ou qui avaient vu des proches traverser un deuil, traverser la maladie de proches. Donc, traverser des événements assez marquants qui les avaient sensibilisés sur ces sujets et qui aussi savaient comment réagir. Et donc, notamment, il y avait un moment très, très beau où un de mes collègues, dont à l'époque, je n'étais pas si proche. qui m'a pris dans ses bras. Ça, c'était merveilleux.
- Speaker #1
Oui, c'est vrai, c'est magnifique.
- Speaker #0
C'est vraiment magnifique. Je ne m'y attendais absolument pas. Et ensuite, après, on est venu proche. Enfin, tu vois, ça a créé un lien fort. Et en même temps, il y a eu beaucoup de soutien et puis aussi beaucoup d'incompréhension. Ça, c'est évident parce que, comme ça ne se disait pas, il y a beaucoup de gêne. Oui, c'est vrai. Moi, j'en parlais peut-être pas bien non plus. mais les gens en fait et ça c'est quelque chose que je ne juge pas en tout cas que j'ai appris à pas juger très rapidement parce que beaucoup je voyais en fait étaient extrêmement gênés, beaucoup de gens ne savaient pas du tout comment agir et du coup soit étaient extrêmement maladroits ou fuyaient. J'ai eu beaucoup de gens en fait comme ça que j'ai arrêté de voir parce que face à la maladie qui nous renvoie à la mort, on a tous un rapport très personnel et très différent les uns des autres. Et en fait, ça parle de soi.
- Speaker #1
En fait, les sujets sont tellement tabous qu'on nous en parle jamais que donc, quand il y a quelqu'un qui nous annonce un cancer, un deuil, on se retrouve vraiment... Qu'est-ce que je lui dis ? Enfin, voilà. Et plus on en parle, et plus on ose dire les choses, et plus on est fluide. vis-à-vis de ça. Oui,
- Speaker #0
exactement.
- Speaker #1
C'est pour ça que c'est important. Ce n'est pas obligatoire,
- Speaker #0
mais c'est important. C'est pour ça que maintenant, dans mon activité professionnelle, tu vois, c'est des choses sur lesquelles je forme.
- Speaker #1
Est-ce que tu peux nous dire justement ton activité professionnelle en quelques mots ? Comment tu accompagnes, etc. sur ces sujets-là ?
- Speaker #0
Oui, en quelques mots. J'ai complètement changé d'activité suite au cancer. J'ai repris des études. en école de commerce, de manière à m'aider, à me lancer dans l'entrepreneuriat. Et donc là, j'ai créé il y a un an et demi un cabinet de conseil et de formation qui s'appelle People Mind et qui est spécialisé dans l'accompagnement des entreprises autour de sujets de santé mentale de manière générale ou de prévention des risques psychosociaux.
- Speaker #1
Donc cette épreuve, elle a modifié tes priorités, ta manière de voir la vie, j'imagine le travail, peut-être même la maternité ?
- Speaker #0
Ça m'a transformée. Et du coup, j'ai complètement changé ma vie depuis. Le travail avait une place, c'est ce qu'on a vu, c'est un peu le fil rouge, avait une place beaucoup trop importante dans ma vie. J'ai tout, j'ai remis, on va dire, les priorités au bon endroit. Donc avec ma famille, ma famille avant. avant mon travail. Donc ça, c'était une bonne chose. Parce que ce n'était pas soutenable non plus, compte tenu que j'avais cette ambition, mais en même temps, je n'assumais pas. Oui, il y avait quelque chose d'ambivalent. Il y avait quelque chose de très ambivalent. Et donc ça, ce n'était pas soutenable en fait, à terme. Et donc maintenant, je suis complètement sortie de ça. Donc comme je disais, en fait, maintenant, voilà, je... J'ai ce cabinet. Et puis maintenant aussi, je passe beaucoup plus de temps avec mes enfants. J'ai du temps de qualité et je suis là pour eux. Et en plus, c'est des âges que j'adore. J'ai des enfants ados. C'est des âges qui sont absolument passionnants. Et maintenant, je fais aussi pas mal de bénévolat. J'ai beaucoup d'engagement en lien avec... Vraiment deux sujets qui m'animent énormément, c'est la santé de manière globale, donc physique, mentale, bien évidemment, et puis sociale et la planète. Et l'éducation. Ça, c'est vraiment mes deux piliers.
- Speaker #1
Quand on a préparé cet échange, tu m'as dit, j'ai trouvé ça très beau, très intéressant. Tu m'as dit, quand on est mère, il faut accepter d'être imparfaite. Qu'est-ce que cette phrase signifie pour toi aujourd'hui ? Et justement... Pour revenir un peu là-dessus, comment la maladie t'a permis de changer ton regard sur toi-même ? Peut-être d'être plus bienveillante, plus indulgente ?
- Speaker #0
Oui, c'est vrai que la maladie change beaucoup, en tout cas moi-même beaucoup transformée. Mais comme j'imagine, enfin, c'est pas que j'imagine, je sais, tu vois, tous les grands événements de la vie, décès de proches, séparation et maternité. parce qu'on se découvre en tant que mère, beaucoup transformée, un regard sur moi qui est plus bienveillant, déjà, sur moi. Exigeant toujours, mais pas intransigeant. Et donc, un regard aussi sur les autres, et avec peut-être moins aussi, tu vois, de carcan. dans ma tête sur quand on est majeur, il faut faire comme si, quand on est mère, en fait, il faut faire comme ça.
- Speaker #1
Oui, les petites cases à cocher et tout ça.
- Speaker #0
Oui, les petites cases à cocher, tu vois, dans lesquelles elles s'enferment. Donc, la maladie, en fait, je sais, ça n'a pas changé la vision que j'ai de la maternité, en tout cas, mon approche, oui, beaucoup, parce que le contrôle, j'y reviens. J'avais cette ambition, en fait, très forte. et puis cette volonté d'être peut-être surtout mais cette volonté c'était pas je me le conscientisais pas comme ça mais en fait donc j'essayais d'être là avec la carrière d'avoir tout, la carrière mère parfaite et puis femme, enfin épouse parfaite etc. de cocher toutes les cases je voyais bien que je pouvais pas cocher toutes les cases parce que mes enfants je les voyais pas beaucoup Donc voilà. Et donc, ça crée beaucoup d'ambivalence. C'est ce qu'on disait. Donc là, maintenant, j'essaye beaucoup plus de lâcher prise. Mais sur le côté mère imparfaite ou femme imparfaite, pour revenir à ta question, oui, c'est ça. Non, il ne faut pas chercher la perfection. Il ne faut pas faire comme moi. Il ne faut pas essayer de cocher toutes les cases. C'est tout à fait OK. On ne peut pas être parfait. Et puis aussi, en tant que mère, être imparfait, c'est normal. C'est juste une normalité. Mais c'est vraiment mon message pour les femmes et les hommes. Assumez et acceptez d'être imparfait. Faites de votre mieux, c'est déjà très bien. Et pour vos enfants, ne leur apprenez pas, et surtout vos filles, ne leur apprenez pas à être parfait, mais à être... courageux, empathique, à oser, à tenter, à toutes ces choses-là.
- Speaker #1
Trop bien. Merci beaucoup Solveig, déjà pour ton témoignage, pour aussi PeopleMind, qui accompagne les entreprises sur vraiment beaucoup de sujets assez clés, dont on a parlé aujourd'hui justement. Et moi, je vous dis que si cet épisode vous a touché, pensez bien à vous abonner sur votre plateforme d'écoute préférée et à laisser 5 étoiles, c'est précieux pour faire connaître le podcast. Je vous remercie, à très vite.
- Speaker #0
Merci beaucoup Octavien.
- Speaker #1
Le sujet vous intéresse ? Vous avez des questions, des suggestions concernant le podcast ? Ça se passe sur Instagram, sur le compte Alors C, la lettre C pour quand ? Tout attaché. Alors C pour quand ? Tout attaché. Je vous mets le lien dans le descriptif de l'épisode. A bientôt !