undefined cover
undefined cover
DRH, Managers... : Le télétravail est-il vraiment responsable de vos problèmes ? cover
DRH, Managers... : Le télétravail est-il vraiment responsable de vos problèmes ? cover
Capital Humain

DRH, Managers... : Le télétravail est-il vraiment responsable de vos problèmes ?

DRH, Managers... : Le télétravail est-il vraiment responsable de vos problèmes ?

29min |15/04/2025
Play
undefined cover
undefined cover
DRH, Managers... : Le télétravail est-il vraiment responsable de vos problèmes ? cover
DRH, Managers... : Le télétravail est-il vraiment responsable de vos problèmes ? cover
Capital Humain

DRH, Managers... : Le télétravail est-il vraiment responsable de vos problèmes ?

DRH, Managers... : Le télétravail est-il vraiment responsable de vos problèmes ?

29min |15/04/2025
Play

Description

Dans cet épisode de Capital Humain, Magaly Siméon reçoit Stéphanie Fraise, DRH au parcours atypique, pour parler d’un sujet brûlant : le télétravail et la flexibilité. Ensemble, elles décortiquent les vraies questions que doivent se poser les entreprises aujourd’hui. Est-ce le bureau qui manque, ou le cadre managérial ? Stéphanie partage sa vision exigeante et humaniste de la flexibilité : pas un confort, mais un engagement vers plus de rigueur, de clarté et d’organisation. Elle revient aussi sur l’importance des rituels managériaux, de la culture de l’écrit, du rôle critique des managers et de l’impact sur la santé mentale. Un échange riche, pragmatique et sans langue de bois, pour repenser le travail hybride au service de la performance et de l’engagement.


Quelques extraits :

  • "Le présentiel autorise une certaine flemmardise managériale."

  • "Le télétravail, c’est juste du travail... mais bien fait."

  • "Le lien social, ça ne se décrète pas. Ça se construit."


"Capital Humain" est un podcast de Magaly Siméon, experte QVT, charge mentale et conciliation, produit par Lily facilite la vie.

Si vous aimez le podcast, abonnez-vous et parlez-en et donnez-nous la note maximale sur votre plateforme d’écoute.

Et si vous souhaitez soutenir Lily facilite la vie, n’hésitez pas à vous abonner à notre programme d’aide aux salariés. Vous y trouverez des conseils, des programmes d’accompagnement, un pool d’experts à votre service et bien plus encore.

Pour ne rater aucune actualité, suivez-nous ! 🌸


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Magaly

    Vous en avez assez du télétravail ? Vous aimeriez bien qu'ils reviennent au bureau, voire au travail. Vous vous demandez ce qu'ils font ? Quand ils sont chez eux, ils se sont les salariés de vos entreprises. Alors cet épisode est fait pour vous. Je reçois Stéphanie Fraise qui nous explique pourquoi le télétravail soulève autant d'interrogations et génère même de l'inconfort. Et la réponse est un peu étonnante, mais finalement pas si compliquée à comprendre. Je vous souhaite une très bonne écoute. Bonjour Stéphanie.

  • Stéphanie Fraise

    Et bien bonjour Magaly.

  • Magaly

    Stéphanie, je suis très heureuse de ce moment qu'on va passer ensemble. Moi, je te connais, mais pas forcément tout le monde, même si tu es une DRH très visible. Est-ce que tu veux bien nous raconter un peu ton parcours ?

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr, merci beaucoup en tout cas d'avoir pensé à moi Magaly. Donc, je m'appelle Stéphanie. J'ai d'abord fait de nombreuses années dans le marketing, dans des grands groupes, d'abord chez Orange, qui ne s'appelait pas Orange à l'époque puis Canal+. J'ai eu la chance chez Canal+, de déjà changer de métier. Je suis quelqu'un qui a fait plusieurs métiers. Je suis passée sur des fonctions commerciales pendant assez longtemps, d'animation de force commerciale, très terrain, très orientée sur les magasins. Et ensuite, j'ai eu depuis 8 ans maintenant la chance de faire un changement pour le coup un peu plus drastique de métier, où je suis devenue en effet DRH. J'ai pu faire ce move en restant dans le même groupe, qui était donc le groupe Vivendi. Et je suis passée de Canal+, à Dailymotion, ce qui a été un saut dans le vide parce que j'ai quitté un environnement très franco-français, retail, dans le commercial, à DRH, dans la tech et le digital, et dans un environnement international. Donc ça a été un saut dans le vide, donc j'ai vraiment fait mes armes chez Dailymotion. Et ensuite, j'ai eu la chance d'évoluer dans les métiers RH, dans différents environnements de la tech. Je suis passée chez Blablacar, chez Mastéos, et depuis un an et demi, je suis chez OpenClassrooms. Et pour ceux qui ne connaissent pas... Open Classrooms, nous sommes une école en ligne, on est le leader de la formation en ligne, on a un gros focus sur le reskilling et le développement de l'apprentissage et de l'alternance. Notre mission, c'est de rendre l'éducation accessible, donc on a un ancrage très fort sur une approche par compétences et on accompagne nos étudiants, quelles que soient leurs origines, vers, en général, un changement de métier, une évolution de métier.

  • Magaly

    Passer de marketing à DRH, c'est quand même assez rare. Qu'est-ce que le marketing t'a apporté dans tes fonctions RH ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors je dirais que c'est et le marketing et le commerce, c'est toutes ces fonctions un peu généralistes qui m'ont essentiellement donné un angle très fort qui est un angle business. C'est-à-dire que je ne conçois absolument pas mon métier autrement qu'en comprenant les besoins des opérationnels pour qui je travaille parce que je suis là pour être à leur service et les doter de tout ce dont ils ont besoin pour réussir à atteindre leurs objectifs. Et en fait, cette envie de faire ce métier m'est venue parce que j'ai rencontré une DRH dans mon parcours. en particulier quand j'étais directrice des ventes, qui m'a montré à quel point les RH pouvaient apporter de la valeur. J'avais un énorme projet de transformation à conduire. C'était très gros, c'était un changement complet de métier, de façon de travailler pour les vendeurs. Il fallait les former, il a fallu accompagner le changement, il a fallu convaincre les organisations syndicales. C'était un très gros projet et en fait elle est venue en ne partant pas du tout d'une posture RH mais en partant complètement de quel était mon besoin. Quel était l'objectif que je voulais atteindre ? Et quels étaient les outils, les process, les accompagnements qu'elle allait pouvoir mettre à ma disposition pour m'aider ? Et c'est grâce à elle que j'ai réussi ce projet. Et là, je me suis dit, mais c'est dingue, les RH, ils ont un pouvoir, une capacité à impacter le business qui est énorme et je n'avais jamais imaginé que c'était possible. Et comme je m'intéresse beaucoup à l'humain, parce qu'évidemment, dans mes rôles de manager, ce qui me faisait le plus kiffer, c'était d'accompagner les gens. Je me rendais compte que plus que le résultat business, c'était de voir les gens être heureux et s'épanouir dans les projets qu'on pouvait conduire ensemble. Et c'est la conciliation de ces deux trucs-là où je me suis dit, je veux être RH. Et je l'aborde sous cet angle-là, exactement avec cette approche-là. En tout cas, j'essaye. Parfois, j'oublie un peu en chemin, donc j'essaye de me souvenir que rien de ce que je fais n'a d'intérêt si ça ne vient pas servir à un besoin business.

  • Magaly

    D'accord, donc en fait, tu fais partie des gens, alors j'allais dire des rares, en tout cas, j'en connais pas beaucoup, qui sont devenus DRH en ayant une idée assez précise de l'impact que tu voulais avoir sur les entreprises où tu travaillais, en matière de business.

  • Stéphanie Fraise

    Exactement, et c'est ce qui fait d'ailleurs que j'aime beaucoup travailler dans des entreprises dont je comprends parfaitement le métier et où je peux avoir un point de vue et une valeur ajoutée. Parce que sinon, c'est compliqué pour moi d'aider mes pairs, d'aider les gens du marketing, du commerce, de la tech, du produit, si je ne comprends pas ce qu'ils font et à quoi ça sert. Donc c'est un critère assez important pour moi. C'est pour ça qu'évidemment, une entreprise comme Openclassrooms, qui s'attache à développer les compétences, ça me parle beaucoup. Je comprends ce qu'on fait, je comprends ce que les équipes font. Et oui, j'ai cette conviction que les RH peuvent avoir un impact énorme sur le business. C'est pour ça que j'ai tendance à réagir assez fortement sur la façon dont les entreprises positionnent ce rôle, parce que je fais partie de celles et ceux qui ont la conviction qu'il faut positionner ce rôle au même niveau que peut l'être n'importe quelle autre fonction de l'entreprise, parce qu'on peut avoir un impact aussi important si tant est qu'on s'en donne les moyens.

  • Magaly

    Bien sûr. Aujourd'hui, on ne va pas parler de télétravail, on ne va pas parler hybride. Aujourd'hui, on va parler flexibilité, parce que les échanges qu'on a eus ensemble et en amont de cet épisode, m'ont montré que tu avais une vision du sujet qui était une vision justement plus ouverte que combien de jours de télétravail ou combien de jours de présentiel. Est-ce que déjà, toi, comment tu définis la flexibilité ? Et est-ce que cette définition, parce que c'est un sujet qui est devenu très mainstream post-Covid, est-ce que ta vision du sujet a changé entre avant l'obligation de télétravail de 2020 et après ?

  • Stéphanie Fraise

    C'est évident qu'il y a eu un avant-après, j'ai envie de dire pour le meilleur, dans le sens où je pense que c'est une époque qui nous a permis de comprendre que l'importance n'était pas tant, si on se réfère à l'aspect présentiel télétravail, sur un besoin de présence physique, mais avant tout sur une exigence, en matière d'organisation du travail. Qu'est-ce que je veux dire par là ? Ce que je veux dire par là, c'est qu'à distance, la vision que j'ai toujours défendue, c'est que pour moi, le télétravail n'est rien d'autre qu'un travail en présentiel, mais où tu mets tous tes curseurs de l'exigence au niveau maximal. Exemple, quand il s'agit de fixer des objectifs à un collaborateur et en tant que manager, par exemple, de t'assurer de façon très régulière, on essaye de demander, nous, à nos managers, de le faire de façon minima mensuelle. Est-ce que tu as pu atteindre les objectifs qu'on s'était fixés ensemble ? Si ce n'est pas le cas, qu'est-ce qui a pu te manquer ? Le présentiel nous autorise parfois à une forme de... j'ai le mot de "flemmardise" qui me vient. Non, mais parce que, c'est plus facile d'avoir des conversations informelles par lesquelles tu vas avoir cette discussion. Quand tu es en distanciel, tu ne peux pas te permettre. Tu es obligé de formaliser cette conversation et tu es obligé de forcer cette conversation. Parce que tu n'as pas l'opportunité de l'avoir de façon informelle. D'accord ? Alors, on y reviendra, il y a plein d'autres travers. Je ne fais pas du tout partie de ceux qui considèrent que tel travail est la solution absolument parfaite à tous les environnements et toutes les équipes, bien au contraire. Mais par contre, ce que je crois vraiment, c'est que ça t'oblige à une forme d'excellence. C'est-à-dire que tu te dois de traiter l'ensemble des sujets que tu traiterais en présentiel plus ou moins bien ou en y faisant plus ou moins attention, de façon beaucoup plus rigoureuse. C'est d'ailleurs pour ça que pour moi, le télétravail n'est en rien une nouvelle façon de travailler. C'est exactement la même façon dont on devrait tous travailler, qu'on soit en présentiel ou en distanciel. Mais simplement en distanciel, tu n'as pas le choix que de le faire et que de le faire bien. Tu n'as pas le droit à l'erreur. Qu'il s'agisse de fixer des objectifs, qu'il s'agisse de gérer le collectif de ton équipe et leur engagement, qu'il s'agisse de t'assurer que tes collaborateurs ont un bon niveau de santé mentale, qui est un sujet dont on parle fréquemment. Tous les sujets que tu gères, d'un point de vue managérial, collectif, sans t'assurer que tes équipes comprennent où va l'entreprise, où est-ce qu'elle en est, en quoi notre équipe, et toi, en tant qu'individu, tu contribues à ça. Toutes ces conversations-là, tous ces enjeux-là, ils sont encore plus importants et critiques quand tu es en distanciel.

  • Magaly

    Donc finalement, parce que moi, souvent, j'entends des dirigeants dire « Je vais les faire revenir au travail » . Donc déjà, je corrige en disant « vous allez les faire revenir au bureau ». Déjà, ce n'est pas exactement la même chose. Et souvent, j'ai cette question en disant « Mais est-ce que finalement, vous ne fantasmez pas une vie au bureau où tout le monde était efficace ? » Et c'est un peu ce que tu dis, c'est-à-dire quand on est au bureau, les gens sont là. Ok, mais est-ce que ça veut dire qu'on travaille mieux ? La réponse, c'est que ce n'est pas gagné, ce n'est pas sûr.

  • Stéphanie Fraise

    Pour moi, la question que tu poses, c'est la question de quel est le problème que tu essayes de résoudre.

  • Magaly

    Oui, bien sûr.

  • Stéphanie Fraise

    Ce qui est dangereux, c'est si tu considères que tu résous tous tes problèmes en indiquant que tout le monde va revenir et tu as raison, non pas au travail, mais au bureau. Tout dépend de la nature du problème que tu essayes de résoudre et tout dépend des raisons pour lesquelles tu avais mis en place le télétravail. Aujourd'hui c'est souvent un sujet qui n'est pas abordé de la bonne façon. Il me semble. Je n'ai évidemment accès qu'à la vision un peu raccourcie de ce qu'on peut lire dans les médias, sur LinkedIn ou autre. Quand des entreprises font des grandes annonces, souvent, on ne sait pas vraiment ce qui se passe derrière. Ce qui est sûr, c'est que je crois vraiment que si tu te poses les questions de la bonne façon, alors peut-être qu'un retour en présentiel va régler une partie de ce problème. Si c'est un problème de performance, c'est beaucoup ce qu'on entend. On entend beaucoup performance, productivité. Il est évident que la performance, elle ne dépend pas d'un lieu. Elle va dépendre de ta capacité à travailler efficacement et à t'organiser efficacement, mais c'est pas parce que tu es en distanciel que tu as un problème, c'est pas parce que tu es en présentiel que tu vas le résoudre, mais par contre, tu as sans doute un autre problème qui est comment le travail est organisé, comment la communication est organisée, comment les priorités sont adressées, est-ce que les décisions d'entreprise sont cascadées, redescendues au bon niveau, etc. Il y a plein de facteurs à regarder et à résoudre parce que sinon tu vas prendre les mêmes problèmes et tu vas les transférer du distanciel en présentiel et tu n'auras rien résolu. Ce que tu vas résoudre, on le sait tous, c'est que le problème majeur que tu as dans le distanciel, c'est le collectif. C'est le lien à l'autre. Et ça, il ne faut pas se mentir, c'est une évidence qu'il y a un problème de distanciel. Il y a un problème dans le distanciel sur la création de ce lien parce qu'il ne se fait pas de façon informelle. Il faut être très vigilant, il faut l'organiser. Par exemple, nous on a ce qu'on appelle des random coffee, ce qui veut dire que tu es apairé de façon aléatoire avec quelqu'un, ça crée des occasions. Tout ça est un peu forcé, mais ça crée quand même les occasions, ça crée quand même ces conversations. Donc c'est génial, c'est ce genre d'initiative. Nous, on couple tout ça évidemment avec des temps en présentiel, parce qu'on considère que c'est important que les équipes se réunissent. Bien sûr, ça a des impacts budgétaires, donc il faut l'anticiper, le prévoir. Et parfois, dans des temps difficiles, ce n'est pas toujours simple de les maintenir. Mais il est indéniable que ça ne remplace pas la force d'un collectif qui est tous les jours présent au bureau, qui peut avoir X conversations informelles. Mais il se trouve que le monde a changé, notre environnement a changé. Il y a une attente en matière de flexibilité d'organisation de son temps qui est très forte, qui était latente, je pense. Il y a des générations qui arrivent sur le marché qui sont très en attente de cet équilibre de vie, de cette flexibilité de cette organisation-là. Moi, je travaille dans des environnements où la moyenne d'âge est évidemment très centrée sur ces générations-là. Donc, ça serait compliqué de leur proposer quelque chose qui n'offre pas cette flexibilité. Et donc, je dirais que notre responsabilité aujourd'hui, en tant qu'RH et entreprise, c'est plutôt de nous adapter en essayant de tirer le meilleur de tous les mondes.

  • Magaly

    Avant ma question suivante, je vais juste ajouter quelque chose. Tu vois, quand tu dis que le random coffee, c'est un peu obligatoire, moi, à l'époque où je travaillais dans des entreprises où il y avait une machine à café, tu ne choisis pas toujours sur qui tu tombes à la machine à café. Et à part être totalement grossier, tu as l'échange minimum que tu es obligé de faire et où tu peux te rendre compte que finalement, il n'est pas si désagréable que ça. Ça, c'est la première chose. Et puis la deuxième chose, pour avoir travaillé dans des grands groupes, sur cette histoire de collectif, moi j'ai connu des entreprises où toutes les portes étaient fermées.

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr.

  • Magaly

    Ce collectif, il vient aussi d'une intention des dirigeants, sinon présentiel ou distanciel. Le collectif n'est pas spontané. Il nécessite dans tous les cas d'avoir une intention et une action.

  • Stéphanie Fraise

    Il faut inclure les entreprises avec les portes fermées aussi, tu as raison. Oui.

  • Magaly

    C'est souvent les mêmes qui disent on va les faire revenir au travail. Moi, j'aimerais bien qu'on parle un peu de performance, c'est-à-dire qu'est-ce qu'en tant que DRH, ça peut arriver de revenir sur un modèle d'hybridation pour une équipe qui aurait besoin d'un peu plus de pêche, d'un peu plus de recadrage pour l'arrivée d'un nouveau boss. Est-ce que des fois, ce sont des choses qui sont un peu évolutives au niveau d'une équipe ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors au niveau d'une équipe ou au niveau d'un temps dans l'entreprise, j'en ai pas parlé mais par exemple nous on essaye dans la mesure du possible que les onboarding se fassent en présentiel parce que quand tu débarques complètement dans une entreprise, c'est quand même important de démarrer en ayant ce contact là. Moi j'encourage aussi dans la phase de recrutement d'avoir au moins un entretien avec le collaborateur concerné, le candidat concerné en présentiel, en physique, donc une fois encore c'est pas du tout blanc, pas du tout noir, je crois qu'il faut savoir s'adapter donc je te le disais, je pense que c'est important d'avoir un temps d'onboarding où tu as ce temps ensemble donc voilà donc ça peut être une question de temps ça peut être des questions de moments dans la vie d'une entreprise tu peux avoir des moments où tu as besoin de remettre les équipes toutes ensemble tu peux avoir en effet des problématiques propres à certaines équipes nous on parle beaucoup en ce moment de nos équipes commerciales parce que d'avoir une équipe commerciale qui est sur place ensemble, ça crée une émulation un peu différente.

  • Magaly

    Ça nécessite de l'énergie.

  • Stéphanie Fraise

    Voilà, tu crées une énergie, une émulation qui en effet est très propre au présentiel, qui est un peu plus compliqué à recréer en distanciel, où on est chacun derrière son ordinateur. Donc ça peut être des moments, ça peut être des équipes. Je pense que c'est là où il faut avoir de la flexibilité et de l'intelligence situationnelle, à partir du moment où il y a un sens, des arguments, une explication. qui permet de répondre à un besoin spécifique. J'en reviens à mon point de caler le problème que tu essayes de résoudre. Est-ce que le présentiel va être la bonne réponse et va en effet te permettre de résoudre ton problème ou pas ?

  • Magaly

    Est-ce que chez OpenClassrooms, vous avez investi spécifiquement dans l'accompagnement des managers pour la gestion d'équipes en mode hybride ? Parce que souvent, ce n'est pas le cas. Et donc, les managers se retrouvent un peu au cœur des plans divers et variés. Est-ce que chez Open Classroom, vous avez fait des choses ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors, oui et non. Et je vais te dire pourquoi oui et non. La première réponse, c'est non. C'est-à-dire que nous n'avons pas fait de formation spécifique au fait d'être en remote. Par contre, comme je te le disais tout à l'heure, mon point de vue, c'est que quand tu manages en distanciel, tu dois être exemplaire dans tes rituels managériaux. On a investi massivement dans la formation des managers. On a fait d'abord un truc très basique, c'est qu'on a écrit un modèle managérial. Ça veut dire quoi manager chez Openclassrooms ? Qu'est-ce qu'on entend de toi ? Donc on a défini un certain nombre de compétences, on a défini à quoi ressemblaient les comportements managériaux sur chacune des compétences, selon que tu es au niveau, on va dire basique, intermédiaire et plus haut niveau, pour qu'on soit extrêmement concret là-dessus. Et ensuite, on s'est associé avec un partenaire qui nous a accompagné dans la mise en œuvre d'une formation que nous avons fait en présentiel et en distanciel. On a testé les deux. On a fait deux sessions en présentiel d'une journée complète et une session en distanciel qui a duré une très grosse demi-journée sur laquelle on a eu une dynamique absolument incroyable. On a été les premiers surpris du niveau de dynamique qu'on a réussi à créer sur cette session à distance. On était quand même 60 ou 70 managers connectés. Et donc, qu'est-ce qu'on a fait au travers de cette formation ? On a formé nos managers aux rituels managériaux qu'on pense être primordiaux et absolument nécessaires d'ancrer pour justement être capables de gérer leur équipe à distance. Que ça soit, j'y reviens, dans des enjeux de performance, de développement de carrière, de santé mentale, de création du lien individuel et avec l'équipe, de redescente et de cascade d'informations, on attache aussi beaucoup d'importance à ça. Voilà, donc c'est pour ça que je te disais oui et non. Voilà.

  • Magaly

    Mais ça boucle avec ton propos de départ avec lequel je suis 100% d'accord, c'est-à-dire que finalement le télétravail a pointé nos carences organisationnelles dans nos entreprises, c'est-à-dire que ce qui tourne quand le manager au bout du bout va te taper sur l'épaule parce qu'il n'est pas loin ou va finir une nocturne parce qu'il faut terminer et qui ne fonctionne plus quand on est en télétravail, c'est juste parce que le cadre managérial n'était pas bien défini non plus. Merci pour cet exemple Stéphanie parce que c'est exactement ça, c'est-à-dire que finalement, le télétravail demande à ce qu'on manage, mais contrairement à ce qu'on a imaginé au XXe siècle, le présentiel l'aurait demandé aussi.

  • Stéphanie Fraise

    Le télétravail, il vient mettre la loupe sur ce que tu fais bien et ce que tu fais moins bien. C'est-à-dire qu'il va déformer, accentuer, ça rejoint le sujet de l'exigence dont je parlais tout à l'heure, il va venir accentuer ce qui marche ou ce qui ne marche pas. Maintenant, il faut être très clair, je l'ai un peu dit tout à l'heure, moi je ne crois pas que le télétravail puisse fonctionner partout. Ce n'est pas une recette miracle qui marche pour 100% des boîtes ou des postes. Il y a des postes dont l'activité requiert du présentiel, il y a des environnements, des organisations, des cultures qui ne sont pas propices au télétravail, parce que, pour que ça puisse fonctionner... Tu as tout un tas de prérequis. On vient de parler de la formation des managers, c'est un prérequis énorme. Il y a un autre prérequis dont on n'a pas encore beaucoup parlé qui est par exemple la culture de l'écrit. Parce que le présentiel te permet une énorme souplesse par rapport à ça. Parce qu'il y a beaucoup d'informel et beaucoup d'oral. Quand tu es en télétravail, en distanciel, tu ne peux pas. Donc en fait, tu as besoin d'avoir une culture de l'écrit, ce qui est assez contraignant par ailleurs. Mais ça t'oblige à documenter, il faut avoir les outils pour le faire, d'accord ? Il faut avoir des outils. Nous, par exemple, on travaille avec Notion, notamment, qui est notre base de connaissances. On utilise évidemment des outils de messagerie instantanée. Je pense que toutes les entreprises ont ça maintenant. Mais il faut que tu aies une gouvernance qui fonctionne. Il faut que tu aies des relevés de décision. Il faut que ces décisions, tu sois capable de garantir qu'elles sont cascadées correctement aux bonnes personnes. Il faut que tout le monde ait un instant T dans l'entreprise qui, auparavant, aurait peut-être eu accès de façon informel à ce débrief, à cette information sur cette décision. Là, il faut que tu t'assures que ça cascade. Si tu coches pas toutes ces cases-là avant et que tu ne t'es pas assuré avant que tes managers sont correctement formés, que tu as les bons outils, que tu as la bonne gouvernance, que tu as la bonne culture de l'écrit et que tout ça est capable de fonctionner efficacement, c'est sûr que c'est voué à l'échec.

  • Magaly

    Oui, mais tu l'as dit toi-même, tu as dit finalement le présentiel old-fashioned pouvait assurer que peut-être ça cascade et tout est dans le peut-être. C'est-à-dire que moi, j'ai un peu l'impression qu'on fantasme des entreprises qui, quand elles étaient en 100% présentiel, tout était fluide. Et combien de fois, toi et moi, on a pris une décision au détour d'un couloir, on a pris une décision, mais après coup, combien de fois on a raté une réunion et le relevé de décision n'était pas clair. Donc, moi, je trouve qu'il y a une espèce de, tu sais, le « c'était mieux avant ». Et alors que je trouve que tu le dis très bien, je t'en remercie, c'est que finalement, le travail hybride pointe que là où on pouvait être un peu amateur en organisation, maintenant, il faut que dans toutes les boîtes, on soit très professionnel sur l'information, sur la formation, sur les rituels. Et c'est positif, en fait.

  • Stéphanie Fraise

    Moi, je trouve ça, parce que je le vois comme une fois encore, une exigence, une excellence. Et c'est ce qu'on essaye de faire. Alors, c'est long. Je vais te dire, même nous qui sommes chez Open Classrooms, c'est une entreprise qui, historiquement, est en remote first. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que tous les salariés s'organisent comme ils veulent. On a des bureaux à Paris, ils viennent s'ils veulent. On invite, on fait en sorte de donner une expérience agréable au bureau, parce qu'évidemment, ça nous fait plaisir que les gens soient là. Mais on va devoir fonctionner en hybride, puisqu'on a une grosse partie de nos effectifs sont répartis partout en France. Accessoirement, on oublie souvent de dire que des entreprises peuvent avoir une activité internationale. Donc, je peux avoir un manager en France qui manage des équipes à l'étranger, on ne se pose pas la question là. On est dans du distanciel. D'accord, donc du coup, tu te retrouves dans une situation qui, par ailleurs, présente plein d'autres problèmes et de biais. C'est que tu vas créer un lien plus fort avec les gens que tu as sous la main, proche de toi. À l'inverse, tu vas avoir un lien beaucoup plus distant avec les autres. Donc, c'est important aussi de le considérer et de t'assurer que tu vas traiter tout le monde de façon extrêmement équitable et non biaisée par cette proximité, parce que c'est très vite fait. Et donc, oui, la réalité, c'est que c'est que des entreprises qui ont cette empreinte internationale fonctionne avec du distanciel, et donc s'assurer que tu as mis en place cette culture de l'écrit, des objectifs qui sont clairs, qui sont rigoureusement suivis, c'est très important, on est en plein dans le sujet du management par les objectifs versus le management par la présence, que tu as cette gouvernance qui fonctionne, il ne faut pas oublier les enjeux de santé mentale, on en a parlé tout à l'heure un peu rapidement, c'est quand même une réalité aussi, avec laquelle il faut être très lucide, c'est que tu peux de mon point de vue, avoir un peu plus de risques en matière de santé mentale, pour deux raisons. La première, c'est qu'on le sait, les environnements deviennent beaucoup plus poreux entre le pro et le perso. Donc tu as des gens qui ont plus de mal à avoir des garde-fous et une organisation saine, et à avoir un temps de travail dédié et un temps personnel dédié. Et de l'autre, tu as un peu plus de difficultés à capter des signaux faibles. Donc c'est là où les managers qui doivent voir leurs équipes idéalement toutes les semaines, avoir un one-on-one toutes les semaines, jouent un rôle extrêmement important parce que c'est eux qui vont être en capacité à détecter les signes faibles de quelqu'un qui commence à ne pas être bien. Donc ça, je pense que c'est quand même extrêmement important de le garder en tête et de l'inclure, nous c'est inclus dans notre modèle managérial, par exemple, ce sujet-là.

  • Magaly

    Oui, nous, dans notre règlement intérieur, on a mis l'obligation d'avoir la caméra ON pour toutes les visios. Parce que déjà, si tu vois les gens, Voilà, c'est pas parfait, mais de toute façon, rien n'est parfait. Mais déjà, si tu vois les gens, c'est mieux que si tu les vois pas. Les réunions, tu les vois pas, tu les entends pas. Sur des équipes de 8-10 personnes, tu peux vraiment passer à côté.

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr que tu peux passer à côté, c'est très important. Et il faut les aider, les managers, parce qu'ils sont pas forcément équipés pour ça non plus. On leur demande beaucoup. Moi, je dis souvent, les managers, ils ont quand même un rôle qui est difficile, parce que ils sont un peu cette cheville ouvrière entre l'entreprise, ses décisions, sa stratégie, ses priorités. Ils doivent emmener en collectif eux, qui est leur équipe, qui va contribuer à ses objectifs, qui va délivrer. Et ils doivent donner du sens à tout ça. Ils doivent assurer la redescente des infos, la remontée des infos du terrain. C'est un rôle qui n'est pas évident. On leur demande beaucoup de casquettes au manager.

  • Magaly

    J'ai une dernière question pour toi, Stéphanie. Faisons de la science-fiction. Imaginons que... On est quel jour ? On est lundi. Demain, tu arrives au bureau et tu fais un message en disant à partir de lundi prochain, chez OpenClassrooms, tout le monde revient en 100% présentiel. D'après toi, c'est quoi la réaction des équipes ? Qu'est-ce qui se passe, tu penses ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors, nous, déjà, on a au moins la moitié de nos équipes qui ne sont pas à Paris et on n'a que des bureaux à Paris. Alors, on a un contrat avec des espaces de co-working qui permettent à nos collaborateurs de se retrouver. Donc, on a des espèces de mini-hubs régionaux où ils peuvent ponctuellement aller. Donc déjà, ça voudrait dire qu'il faudrait au préalable qu'on ait recréé des espaces de bureaux en région pour que nos collaborateurs puissent avoir un lieu. Parce que sinon, ça veut dire que tu as un traitement complètement inférieur, complètement injuste, dans lequel tu obliges tes Parisiens à revenir au bureau à Paris et les autres, non. Bon. Donc déjà, la première réaction, c'est ça. C'est de dire OK, c'est bien gentil, mais ça ne concerne que la moitié de l'entreprise. Je donne les chiffres un peu au hasard, mais on n'est pas très bien au premier moment. Deuxièmement, Tu viens renoncer à ce qui a constitué quasiment l'ADN de ton entreprise. Donc, tu romps une partie de ton contrat. Tu renonces à une partie de ton contrat parce que les collaborateurs sont venus chez OpenCastRooms, entre autres pour cette raison-là. Notre mission attire beaucoup nos collaborateurs, mais la flexibilité est un argument majeur. Qu'est-ce qui se passe ? Tu génères beaucoup d'insatisfaction, c'est une évidence. Ton NPS chute, voilà. Est-ce que les gens s'en vont ? Je n'en sais rien. C'est ça la question que tu pourrais assez légitimement te poser, c'est de te dire « Ok, est-ce que tu as créé beaucoup d'insatisfaction ? Tu as créé une perte de confiance ? » C'est déjà énorme, je pense, d'un point de vue de l'engagement.

  • Magaly

    Logiquement une altération de votre culture interne.

  • Stéphanie Fraise

    Voilà, et donc la question c'est quel est l'impact de ça sur leur capacité à être suffisamment engagée pour délivrer, être motivé dans leur quotidien et atteindre les objectifs que tu leur donnes. Je pense que c'est très chahuté pendant un certain temps. Est-ce que tu réussis à reconstruire là-dessus, à repartir suffisamment ? Je ne sais pas. Est-ce que tu crées un churn et un taux de départ important ? Je ne sais pas.

  • Magaly

    Bon, écoute, de toute façon, on ne se le souhaite pas, c'était la science-fiction, mais je pense que l'impact sur la culture est forcément réel et je le vois. La seule fois où je l'ai envisagé dans mon équipe, mon équipe manageriale complète m'a dit « on est venu ici pour le télétravail ». Alors, ils n'ont pas dit qu'ils repartaient, ils ont dit « on est venu ici pour le télétravail ». Donc, oui, tout à fait. Merci beaucoup.

  • Stéphanie Fraise

    Non, j'allais dire dans un paysage où le télétravail est un avantage qui petit à petit est en train d'être remis en cause par un certain nombre d'entreprises, il est évident que le fait de le maintenir va devenir pour le coup un avantage compétitif négligeable. Mais une fois encore, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas faire attention et se donner les clés de succès telles qu'on les a décrites. Mais je pense que ça va devenir un avantage compétitif.

  • Magaly

    Ça sera la conclusion, c'est que le télétravail, ça demande du travail.

  • Stéphanie Fraise

    Merci, Magaly..

  • Magaly

    Merci. Voilà, vous l'avez compris, le télétravail, ça se travaille. Et les plantes qui naissent autour du télétravail ne sont juste que, finalement, la prise de conscience de ce qui ne fonctionne pas toujours dans nos organisations. Oui, il faut manager, oui, il faut donner des objectifs, oui, il faut faire cascader l'information. Et ça, ça n'est pas vrai quand on télétravaille, c'est toujours vrai et ça mérite d'être travaillé.

Description

Dans cet épisode de Capital Humain, Magaly Siméon reçoit Stéphanie Fraise, DRH au parcours atypique, pour parler d’un sujet brûlant : le télétravail et la flexibilité. Ensemble, elles décortiquent les vraies questions que doivent se poser les entreprises aujourd’hui. Est-ce le bureau qui manque, ou le cadre managérial ? Stéphanie partage sa vision exigeante et humaniste de la flexibilité : pas un confort, mais un engagement vers plus de rigueur, de clarté et d’organisation. Elle revient aussi sur l’importance des rituels managériaux, de la culture de l’écrit, du rôle critique des managers et de l’impact sur la santé mentale. Un échange riche, pragmatique et sans langue de bois, pour repenser le travail hybride au service de la performance et de l’engagement.


Quelques extraits :

  • "Le présentiel autorise une certaine flemmardise managériale."

  • "Le télétravail, c’est juste du travail... mais bien fait."

  • "Le lien social, ça ne se décrète pas. Ça se construit."


"Capital Humain" est un podcast de Magaly Siméon, experte QVT, charge mentale et conciliation, produit par Lily facilite la vie.

Si vous aimez le podcast, abonnez-vous et parlez-en et donnez-nous la note maximale sur votre plateforme d’écoute.

Et si vous souhaitez soutenir Lily facilite la vie, n’hésitez pas à vous abonner à notre programme d’aide aux salariés. Vous y trouverez des conseils, des programmes d’accompagnement, un pool d’experts à votre service et bien plus encore.

Pour ne rater aucune actualité, suivez-nous ! 🌸


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Magaly

    Vous en avez assez du télétravail ? Vous aimeriez bien qu'ils reviennent au bureau, voire au travail. Vous vous demandez ce qu'ils font ? Quand ils sont chez eux, ils se sont les salariés de vos entreprises. Alors cet épisode est fait pour vous. Je reçois Stéphanie Fraise qui nous explique pourquoi le télétravail soulève autant d'interrogations et génère même de l'inconfort. Et la réponse est un peu étonnante, mais finalement pas si compliquée à comprendre. Je vous souhaite une très bonne écoute. Bonjour Stéphanie.

  • Stéphanie Fraise

    Et bien bonjour Magaly.

  • Magaly

    Stéphanie, je suis très heureuse de ce moment qu'on va passer ensemble. Moi, je te connais, mais pas forcément tout le monde, même si tu es une DRH très visible. Est-ce que tu veux bien nous raconter un peu ton parcours ?

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr, merci beaucoup en tout cas d'avoir pensé à moi Magaly. Donc, je m'appelle Stéphanie. J'ai d'abord fait de nombreuses années dans le marketing, dans des grands groupes, d'abord chez Orange, qui ne s'appelait pas Orange à l'époque puis Canal+. J'ai eu la chance chez Canal+, de déjà changer de métier. Je suis quelqu'un qui a fait plusieurs métiers. Je suis passée sur des fonctions commerciales pendant assez longtemps, d'animation de force commerciale, très terrain, très orientée sur les magasins. Et ensuite, j'ai eu depuis 8 ans maintenant la chance de faire un changement pour le coup un peu plus drastique de métier, où je suis devenue en effet DRH. J'ai pu faire ce move en restant dans le même groupe, qui était donc le groupe Vivendi. Et je suis passée de Canal+, à Dailymotion, ce qui a été un saut dans le vide parce que j'ai quitté un environnement très franco-français, retail, dans le commercial, à DRH, dans la tech et le digital, et dans un environnement international. Donc ça a été un saut dans le vide, donc j'ai vraiment fait mes armes chez Dailymotion. Et ensuite, j'ai eu la chance d'évoluer dans les métiers RH, dans différents environnements de la tech. Je suis passée chez Blablacar, chez Mastéos, et depuis un an et demi, je suis chez OpenClassrooms. Et pour ceux qui ne connaissent pas... Open Classrooms, nous sommes une école en ligne, on est le leader de la formation en ligne, on a un gros focus sur le reskilling et le développement de l'apprentissage et de l'alternance. Notre mission, c'est de rendre l'éducation accessible, donc on a un ancrage très fort sur une approche par compétences et on accompagne nos étudiants, quelles que soient leurs origines, vers, en général, un changement de métier, une évolution de métier.

  • Magaly

    Passer de marketing à DRH, c'est quand même assez rare. Qu'est-ce que le marketing t'a apporté dans tes fonctions RH ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors je dirais que c'est et le marketing et le commerce, c'est toutes ces fonctions un peu généralistes qui m'ont essentiellement donné un angle très fort qui est un angle business. C'est-à-dire que je ne conçois absolument pas mon métier autrement qu'en comprenant les besoins des opérationnels pour qui je travaille parce que je suis là pour être à leur service et les doter de tout ce dont ils ont besoin pour réussir à atteindre leurs objectifs. Et en fait, cette envie de faire ce métier m'est venue parce que j'ai rencontré une DRH dans mon parcours. en particulier quand j'étais directrice des ventes, qui m'a montré à quel point les RH pouvaient apporter de la valeur. J'avais un énorme projet de transformation à conduire. C'était très gros, c'était un changement complet de métier, de façon de travailler pour les vendeurs. Il fallait les former, il a fallu accompagner le changement, il a fallu convaincre les organisations syndicales. C'était un très gros projet et en fait elle est venue en ne partant pas du tout d'une posture RH mais en partant complètement de quel était mon besoin. Quel était l'objectif que je voulais atteindre ? Et quels étaient les outils, les process, les accompagnements qu'elle allait pouvoir mettre à ma disposition pour m'aider ? Et c'est grâce à elle que j'ai réussi ce projet. Et là, je me suis dit, mais c'est dingue, les RH, ils ont un pouvoir, une capacité à impacter le business qui est énorme et je n'avais jamais imaginé que c'était possible. Et comme je m'intéresse beaucoup à l'humain, parce qu'évidemment, dans mes rôles de manager, ce qui me faisait le plus kiffer, c'était d'accompagner les gens. Je me rendais compte que plus que le résultat business, c'était de voir les gens être heureux et s'épanouir dans les projets qu'on pouvait conduire ensemble. Et c'est la conciliation de ces deux trucs-là où je me suis dit, je veux être RH. Et je l'aborde sous cet angle-là, exactement avec cette approche-là. En tout cas, j'essaye. Parfois, j'oublie un peu en chemin, donc j'essaye de me souvenir que rien de ce que je fais n'a d'intérêt si ça ne vient pas servir à un besoin business.

  • Magaly

    D'accord, donc en fait, tu fais partie des gens, alors j'allais dire des rares, en tout cas, j'en connais pas beaucoup, qui sont devenus DRH en ayant une idée assez précise de l'impact que tu voulais avoir sur les entreprises où tu travaillais, en matière de business.

  • Stéphanie Fraise

    Exactement, et c'est ce qui fait d'ailleurs que j'aime beaucoup travailler dans des entreprises dont je comprends parfaitement le métier et où je peux avoir un point de vue et une valeur ajoutée. Parce que sinon, c'est compliqué pour moi d'aider mes pairs, d'aider les gens du marketing, du commerce, de la tech, du produit, si je ne comprends pas ce qu'ils font et à quoi ça sert. Donc c'est un critère assez important pour moi. C'est pour ça qu'évidemment, une entreprise comme Openclassrooms, qui s'attache à développer les compétences, ça me parle beaucoup. Je comprends ce qu'on fait, je comprends ce que les équipes font. Et oui, j'ai cette conviction que les RH peuvent avoir un impact énorme sur le business. C'est pour ça que j'ai tendance à réagir assez fortement sur la façon dont les entreprises positionnent ce rôle, parce que je fais partie de celles et ceux qui ont la conviction qu'il faut positionner ce rôle au même niveau que peut l'être n'importe quelle autre fonction de l'entreprise, parce qu'on peut avoir un impact aussi important si tant est qu'on s'en donne les moyens.

  • Magaly

    Bien sûr. Aujourd'hui, on ne va pas parler de télétravail, on ne va pas parler hybride. Aujourd'hui, on va parler flexibilité, parce que les échanges qu'on a eus ensemble et en amont de cet épisode, m'ont montré que tu avais une vision du sujet qui était une vision justement plus ouverte que combien de jours de télétravail ou combien de jours de présentiel. Est-ce que déjà, toi, comment tu définis la flexibilité ? Et est-ce que cette définition, parce que c'est un sujet qui est devenu très mainstream post-Covid, est-ce que ta vision du sujet a changé entre avant l'obligation de télétravail de 2020 et après ?

  • Stéphanie Fraise

    C'est évident qu'il y a eu un avant-après, j'ai envie de dire pour le meilleur, dans le sens où je pense que c'est une époque qui nous a permis de comprendre que l'importance n'était pas tant, si on se réfère à l'aspect présentiel télétravail, sur un besoin de présence physique, mais avant tout sur une exigence, en matière d'organisation du travail. Qu'est-ce que je veux dire par là ? Ce que je veux dire par là, c'est qu'à distance, la vision que j'ai toujours défendue, c'est que pour moi, le télétravail n'est rien d'autre qu'un travail en présentiel, mais où tu mets tous tes curseurs de l'exigence au niveau maximal. Exemple, quand il s'agit de fixer des objectifs à un collaborateur et en tant que manager, par exemple, de t'assurer de façon très régulière, on essaye de demander, nous, à nos managers, de le faire de façon minima mensuelle. Est-ce que tu as pu atteindre les objectifs qu'on s'était fixés ensemble ? Si ce n'est pas le cas, qu'est-ce qui a pu te manquer ? Le présentiel nous autorise parfois à une forme de... j'ai le mot de "flemmardise" qui me vient. Non, mais parce que, c'est plus facile d'avoir des conversations informelles par lesquelles tu vas avoir cette discussion. Quand tu es en distanciel, tu ne peux pas te permettre. Tu es obligé de formaliser cette conversation et tu es obligé de forcer cette conversation. Parce que tu n'as pas l'opportunité de l'avoir de façon informelle. D'accord ? Alors, on y reviendra, il y a plein d'autres travers. Je ne fais pas du tout partie de ceux qui considèrent que tel travail est la solution absolument parfaite à tous les environnements et toutes les équipes, bien au contraire. Mais par contre, ce que je crois vraiment, c'est que ça t'oblige à une forme d'excellence. C'est-à-dire que tu te dois de traiter l'ensemble des sujets que tu traiterais en présentiel plus ou moins bien ou en y faisant plus ou moins attention, de façon beaucoup plus rigoureuse. C'est d'ailleurs pour ça que pour moi, le télétravail n'est en rien une nouvelle façon de travailler. C'est exactement la même façon dont on devrait tous travailler, qu'on soit en présentiel ou en distanciel. Mais simplement en distanciel, tu n'as pas le choix que de le faire et que de le faire bien. Tu n'as pas le droit à l'erreur. Qu'il s'agisse de fixer des objectifs, qu'il s'agisse de gérer le collectif de ton équipe et leur engagement, qu'il s'agisse de t'assurer que tes collaborateurs ont un bon niveau de santé mentale, qui est un sujet dont on parle fréquemment. Tous les sujets que tu gères, d'un point de vue managérial, collectif, sans t'assurer que tes équipes comprennent où va l'entreprise, où est-ce qu'elle en est, en quoi notre équipe, et toi, en tant qu'individu, tu contribues à ça. Toutes ces conversations-là, tous ces enjeux-là, ils sont encore plus importants et critiques quand tu es en distanciel.

  • Magaly

    Donc finalement, parce que moi, souvent, j'entends des dirigeants dire « Je vais les faire revenir au travail » . Donc déjà, je corrige en disant « vous allez les faire revenir au bureau ». Déjà, ce n'est pas exactement la même chose. Et souvent, j'ai cette question en disant « Mais est-ce que finalement, vous ne fantasmez pas une vie au bureau où tout le monde était efficace ? » Et c'est un peu ce que tu dis, c'est-à-dire quand on est au bureau, les gens sont là. Ok, mais est-ce que ça veut dire qu'on travaille mieux ? La réponse, c'est que ce n'est pas gagné, ce n'est pas sûr.

  • Stéphanie Fraise

    Pour moi, la question que tu poses, c'est la question de quel est le problème que tu essayes de résoudre.

  • Magaly

    Oui, bien sûr.

  • Stéphanie Fraise

    Ce qui est dangereux, c'est si tu considères que tu résous tous tes problèmes en indiquant que tout le monde va revenir et tu as raison, non pas au travail, mais au bureau. Tout dépend de la nature du problème que tu essayes de résoudre et tout dépend des raisons pour lesquelles tu avais mis en place le télétravail. Aujourd'hui c'est souvent un sujet qui n'est pas abordé de la bonne façon. Il me semble. Je n'ai évidemment accès qu'à la vision un peu raccourcie de ce qu'on peut lire dans les médias, sur LinkedIn ou autre. Quand des entreprises font des grandes annonces, souvent, on ne sait pas vraiment ce qui se passe derrière. Ce qui est sûr, c'est que je crois vraiment que si tu te poses les questions de la bonne façon, alors peut-être qu'un retour en présentiel va régler une partie de ce problème. Si c'est un problème de performance, c'est beaucoup ce qu'on entend. On entend beaucoup performance, productivité. Il est évident que la performance, elle ne dépend pas d'un lieu. Elle va dépendre de ta capacité à travailler efficacement et à t'organiser efficacement, mais c'est pas parce que tu es en distanciel que tu as un problème, c'est pas parce que tu es en présentiel que tu vas le résoudre, mais par contre, tu as sans doute un autre problème qui est comment le travail est organisé, comment la communication est organisée, comment les priorités sont adressées, est-ce que les décisions d'entreprise sont cascadées, redescendues au bon niveau, etc. Il y a plein de facteurs à regarder et à résoudre parce que sinon tu vas prendre les mêmes problèmes et tu vas les transférer du distanciel en présentiel et tu n'auras rien résolu. Ce que tu vas résoudre, on le sait tous, c'est que le problème majeur que tu as dans le distanciel, c'est le collectif. C'est le lien à l'autre. Et ça, il ne faut pas se mentir, c'est une évidence qu'il y a un problème de distanciel. Il y a un problème dans le distanciel sur la création de ce lien parce qu'il ne se fait pas de façon informelle. Il faut être très vigilant, il faut l'organiser. Par exemple, nous on a ce qu'on appelle des random coffee, ce qui veut dire que tu es apairé de façon aléatoire avec quelqu'un, ça crée des occasions. Tout ça est un peu forcé, mais ça crée quand même les occasions, ça crée quand même ces conversations. Donc c'est génial, c'est ce genre d'initiative. Nous, on couple tout ça évidemment avec des temps en présentiel, parce qu'on considère que c'est important que les équipes se réunissent. Bien sûr, ça a des impacts budgétaires, donc il faut l'anticiper, le prévoir. Et parfois, dans des temps difficiles, ce n'est pas toujours simple de les maintenir. Mais il est indéniable que ça ne remplace pas la force d'un collectif qui est tous les jours présent au bureau, qui peut avoir X conversations informelles. Mais il se trouve que le monde a changé, notre environnement a changé. Il y a une attente en matière de flexibilité d'organisation de son temps qui est très forte, qui était latente, je pense. Il y a des générations qui arrivent sur le marché qui sont très en attente de cet équilibre de vie, de cette flexibilité de cette organisation-là. Moi, je travaille dans des environnements où la moyenne d'âge est évidemment très centrée sur ces générations-là. Donc, ça serait compliqué de leur proposer quelque chose qui n'offre pas cette flexibilité. Et donc, je dirais que notre responsabilité aujourd'hui, en tant qu'RH et entreprise, c'est plutôt de nous adapter en essayant de tirer le meilleur de tous les mondes.

  • Magaly

    Avant ma question suivante, je vais juste ajouter quelque chose. Tu vois, quand tu dis que le random coffee, c'est un peu obligatoire, moi, à l'époque où je travaillais dans des entreprises où il y avait une machine à café, tu ne choisis pas toujours sur qui tu tombes à la machine à café. Et à part être totalement grossier, tu as l'échange minimum que tu es obligé de faire et où tu peux te rendre compte que finalement, il n'est pas si désagréable que ça. Ça, c'est la première chose. Et puis la deuxième chose, pour avoir travaillé dans des grands groupes, sur cette histoire de collectif, moi j'ai connu des entreprises où toutes les portes étaient fermées.

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr.

  • Magaly

    Ce collectif, il vient aussi d'une intention des dirigeants, sinon présentiel ou distanciel. Le collectif n'est pas spontané. Il nécessite dans tous les cas d'avoir une intention et une action.

  • Stéphanie Fraise

    Il faut inclure les entreprises avec les portes fermées aussi, tu as raison. Oui.

  • Magaly

    C'est souvent les mêmes qui disent on va les faire revenir au travail. Moi, j'aimerais bien qu'on parle un peu de performance, c'est-à-dire qu'est-ce qu'en tant que DRH, ça peut arriver de revenir sur un modèle d'hybridation pour une équipe qui aurait besoin d'un peu plus de pêche, d'un peu plus de recadrage pour l'arrivée d'un nouveau boss. Est-ce que des fois, ce sont des choses qui sont un peu évolutives au niveau d'une équipe ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors au niveau d'une équipe ou au niveau d'un temps dans l'entreprise, j'en ai pas parlé mais par exemple nous on essaye dans la mesure du possible que les onboarding se fassent en présentiel parce que quand tu débarques complètement dans une entreprise, c'est quand même important de démarrer en ayant ce contact là. Moi j'encourage aussi dans la phase de recrutement d'avoir au moins un entretien avec le collaborateur concerné, le candidat concerné en présentiel, en physique, donc une fois encore c'est pas du tout blanc, pas du tout noir, je crois qu'il faut savoir s'adapter donc je te le disais, je pense que c'est important d'avoir un temps d'onboarding où tu as ce temps ensemble donc voilà donc ça peut être une question de temps ça peut être des questions de moments dans la vie d'une entreprise tu peux avoir des moments où tu as besoin de remettre les équipes toutes ensemble tu peux avoir en effet des problématiques propres à certaines équipes nous on parle beaucoup en ce moment de nos équipes commerciales parce que d'avoir une équipe commerciale qui est sur place ensemble, ça crée une émulation un peu différente.

  • Magaly

    Ça nécessite de l'énergie.

  • Stéphanie Fraise

    Voilà, tu crées une énergie, une émulation qui en effet est très propre au présentiel, qui est un peu plus compliqué à recréer en distanciel, où on est chacun derrière son ordinateur. Donc ça peut être des moments, ça peut être des équipes. Je pense que c'est là où il faut avoir de la flexibilité et de l'intelligence situationnelle, à partir du moment où il y a un sens, des arguments, une explication. qui permet de répondre à un besoin spécifique. J'en reviens à mon point de caler le problème que tu essayes de résoudre. Est-ce que le présentiel va être la bonne réponse et va en effet te permettre de résoudre ton problème ou pas ?

  • Magaly

    Est-ce que chez OpenClassrooms, vous avez investi spécifiquement dans l'accompagnement des managers pour la gestion d'équipes en mode hybride ? Parce que souvent, ce n'est pas le cas. Et donc, les managers se retrouvent un peu au cœur des plans divers et variés. Est-ce que chez Open Classroom, vous avez fait des choses ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors, oui et non. Et je vais te dire pourquoi oui et non. La première réponse, c'est non. C'est-à-dire que nous n'avons pas fait de formation spécifique au fait d'être en remote. Par contre, comme je te le disais tout à l'heure, mon point de vue, c'est que quand tu manages en distanciel, tu dois être exemplaire dans tes rituels managériaux. On a investi massivement dans la formation des managers. On a fait d'abord un truc très basique, c'est qu'on a écrit un modèle managérial. Ça veut dire quoi manager chez Openclassrooms ? Qu'est-ce qu'on entend de toi ? Donc on a défini un certain nombre de compétences, on a défini à quoi ressemblaient les comportements managériaux sur chacune des compétences, selon que tu es au niveau, on va dire basique, intermédiaire et plus haut niveau, pour qu'on soit extrêmement concret là-dessus. Et ensuite, on s'est associé avec un partenaire qui nous a accompagné dans la mise en œuvre d'une formation que nous avons fait en présentiel et en distanciel. On a testé les deux. On a fait deux sessions en présentiel d'une journée complète et une session en distanciel qui a duré une très grosse demi-journée sur laquelle on a eu une dynamique absolument incroyable. On a été les premiers surpris du niveau de dynamique qu'on a réussi à créer sur cette session à distance. On était quand même 60 ou 70 managers connectés. Et donc, qu'est-ce qu'on a fait au travers de cette formation ? On a formé nos managers aux rituels managériaux qu'on pense être primordiaux et absolument nécessaires d'ancrer pour justement être capables de gérer leur équipe à distance. Que ça soit, j'y reviens, dans des enjeux de performance, de développement de carrière, de santé mentale, de création du lien individuel et avec l'équipe, de redescente et de cascade d'informations, on attache aussi beaucoup d'importance à ça. Voilà, donc c'est pour ça que je te disais oui et non. Voilà.

  • Magaly

    Mais ça boucle avec ton propos de départ avec lequel je suis 100% d'accord, c'est-à-dire que finalement le télétravail a pointé nos carences organisationnelles dans nos entreprises, c'est-à-dire que ce qui tourne quand le manager au bout du bout va te taper sur l'épaule parce qu'il n'est pas loin ou va finir une nocturne parce qu'il faut terminer et qui ne fonctionne plus quand on est en télétravail, c'est juste parce que le cadre managérial n'était pas bien défini non plus. Merci pour cet exemple Stéphanie parce que c'est exactement ça, c'est-à-dire que finalement, le télétravail demande à ce qu'on manage, mais contrairement à ce qu'on a imaginé au XXe siècle, le présentiel l'aurait demandé aussi.

  • Stéphanie Fraise

    Le télétravail, il vient mettre la loupe sur ce que tu fais bien et ce que tu fais moins bien. C'est-à-dire qu'il va déformer, accentuer, ça rejoint le sujet de l'exigence dont je parlais tout à l'heure, il va venir accentuer ce qui marche ou ce qui ne marche pas. Maintenant, il faut être très clair, je l'ai un peu dit tout à l'heure, moi je ne crois pas que le télétravail puisse fonctionner partout. Ce n'est pas une recette miracle qui marche pour 100% des boîtes ou des postes. Il y a des postes dont l'activité requiert du présentiel, il y a des environnements, des organisations, des cultures qui ne sont pas propices au télétravail, parce que, pour que ça puisse fonctionner... Tu as tout un tas de prérequis. On vient de parler de la formation des managers, c'est un prérequis énorme. Il y a un autre prérequis dont on n'a pas encore beaucoup parlé qui est par exemple la culture de l'écrit. Parce que le présentiel te permet une énorme souplesse par rapport à ça. Parce qu'il y a beaucoup d'informel et beaucoup d'oral. Quand tu es en télétravail, en distanciel, tu ne peux pas. Donc en fait, tu as besoin d'avoir une culture de l'écrit, ce qui est assez contraignant par ailleurs. Mais ça t'oblige à documenter, il faut avoir les outils pour le faire, d'accord ? Il faut avoir des outils. Nous, par exemple, on travaille avec Notion, notamment, qui est notre base de connaissances. On utilise évidemment des outils de messagerie instantanée. Je pense que toutes les entreprises ont ça maintenant. Mais il faut que tu aies une gouvernance qui fonctionne. Il faut que tu aies des relevés de décision. Il faut que ces décisions, tu sois capable de garantir qu'elles sont cascadées correctement aux bonnes personnes. Il faut que tout le monde ait un instant T dans l'entreprise qui, auparavant, aurait peut-être eu accès de façon informel à ce débrief, à cette information sur cette décision. Là, il faut que tu t'assures que ça cascade. Si tu coches pas toutes ces cases-là avant et que tu ne t'es pas assuré avant que tes managers sont correctement formés, que tu as les bons outils, que tu as la bonne gouvernance, que tu as la bonne culture de l'écrit et que tout ça est capable de fonctionner efficacement, c'est sûr que c'est voué à l'échec.

  • Magaly

    Oui, mais tu l'as dit toi-même, tu as dit finalement le présentiel old-fashioned pouvait assurer que peut-être ça cascade et tout est dans le peut-être. C'est-à-dire que moi, j'ai un peu l'impression qu'on fantasme des entreprises qui, quand elles étaient en 100% présentiel, tout était fluide. Et combien de fois, toi et moi, on a pris une décision au détour d'un couloir, on a pris une décision, mais après coup, combien de fois on a raté une réunion et le relevé de décision n'était pas clair. Donc, moi, je trouve qu'il y a une espèce de, tu sais, le « c'était mieux avant ». Et alors que je trouve que tu le dis très bien, je t'en remercie, c'est que finalement, le travail hybride pointe que là où on pouvait être un peu amateur en organisation, maintenant, il faut que dans toutes les boîtes, on soit très professionnel sur l'information, sur la formation, sur les rituels. Et c'est positif, en fait.

  • Stéphanie Fraise

    Moi, je trouve ça, parce que je le vois comme une fois encore, une exigence, une excellence. Et c'est ce qu'on essaye de faire. Alors, c'est long. Je vais te dire, même nous qui sommes chez Open Classrooms, c'est une entreprise qui, historiquement, est en remote first. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que tous les salariés s'organisent comme ils veulent. On a des bureaux à Paris, ils viennent s'ils veulent. On invite, on fait en sorte de donner une expérience agréable au bureau, parce qu'évidemment, ça nous fait plaisir que les gens soient là. Mais on va devoir fonctionner en hybride, puisqu'on a une grosse partie de nos effectifs sont répartis partout en France. Accessoirement, on oublie souvent de dire que des entreprises peuvent avoir une activité internationale. Donc, je peux avoir un manager en France qui manage des équipes à l'étranger, on ne se pose pas la question là. On est dans du distanciel. D'accord, donc du coup, tu te retrouves dans une situation qui, par ailleurs, présente plein d'autres problèmes et de biais. C'est que tu vas créer un lien plus fort avec les gens que tu as sous la main, proche de toi. À l'inverse, tu vas avoir un lien beaucoup plus distant avec les autres. Donc, c'est important aussi de le considérer et de t'assurer que tu vas traiter tout le monde de façon extrêmement équitable et non biaisée par cette proximité, parce que c'est très vite fait. Et donc, oui, la réalité, c'est que c'est que des entreprises qui ont cette empreinte internationale fonctionne avec du distanciel, et donc s'assurer que tu as mis en place cette culture de l'écrit, des objectifs qui sont clairs, qui sont rigoureusement suivis, c'est très important, on est en plein dans le sujet du management par les objectifs versus le management par la présence, que tu as cette gouvernance qui fonctionne, il ne faut pas oublier les enjeux de santé mentale, on en a parlé tout à l'heure un peu rapidement, c'est quand même une réalité aussi, avec laquelle il faut être très lucide, c'est que tu peux de mon point de vue, avoir un peu plus de risques en matière de santé mentale, pour deux raisons. La première, c'est qu'on le sait, les environnements deviennent beaucoup plus poreux entre le pro et le perso. Donc tu as des gens qui ont plus de mal à avoir des garde-fous et une organisation saine, et à avoir un temps de travail dédié et un temps personnel dédié. Et de l'autre, tu as un peu plus de difficultés à capter des signaux faibles. Donc c'est là où les managers qui doivent voir leurs équipes idéalement toutes les semaines, avoir un one-on-one toutes les semaines, jouent un rôle extrêmement important parce que c'est eux qui vont être en capacité à détecter les signes faibles de quelqu'un qui commence à ne pas être bien. Donc ça, je pense que c'est quand même extrêmement important de le garder en tête et de l'inclure, nous c'est inclus dans notre modèle managérial, par exemple, ce sujet-là.

  • Magaly

    Oui, nous, dans notre règlement intérieur, on a mis l'obligation d'avoir la caméra ON pour toutes les visios. Parce que déjà, si tu vois les gens, Voilà, c'est pas parfait, mais de toute façon, rien n'est parfait. Mais déjà, si tu vois les gens, c'est mieux que si tu les vois pas. Les réunions, tu les vois pas, tu les entends pas. Sur des équipes de 8-10 personnes, tu peux vraiment passer à côté.

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr que tu peux passer à côté, c'est très important. Et il faut les aider, les managers, parce qu'ils sont pas forcément équipés pour ça non plus. On leur demande beaucoup. Moi, je dis souvent, les managers, ils ont quand même un rôle qui est difficile, parce que ils sont un peu cette cheville ouvrière entre l'entreprise, ses décisions, sa stratégie, ses priorités. Ils doivent emmener en collectif eux, qui est leur équipe, qui va contribuer à ses objectifs, qui va délivrer. Et ils doivent donner du sens à tout ça. Ils doivent assurer la redescente des infos, la remontée des infos du terrain. C'est un rôle qui n'est pas évident. On leur demande beaucoup de casquettes au manager.

  • Magaly

    J'ai une dernière question pour toi, Stéphanie. Faisons de la science-fiction. Imaginons que... On est quel jour ? On est lundi. Demain, tu arrives au bureau et tu fais un message en disant à partir de lundi prochain, chez OpenClassrooms, tout le monde revient en 100% présentiel. D'après toi, c'est quoi la réaction des équipes ? Qu'est-ce qui se passe, tu penses ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors, nous, déjà, on a au moins la moitié de nos équipes qui ne sont pas à Paris et on n'a que des bureaux à Paris. Alors, on a un contrat avec des espaces de co-working qui permettent à nos collaborateurs de se retrouver. Donc, on a des espèces de mini-hubs régionaux où ils peuvent ponctuellement aller. Donc déjà, ça voudrait dire qu'il faudrait au préalable qu'on ait recréé des espaces de bureaux en région pour que nos collaborateurs puissent avoir un lieu. Parce que sinon, ça veut dire que tu as un traitement complètement inférieur, complètement injuste, dans lequel tu obliges tes Parisiens à revenir au bureau à Paris et les autres, non. Bon. Donc déjà, la première réaction, c'est ça. C'est de dire OK, c'est bien gentil, mais ça ne concerne que la moitié de l'entreprise. Je donne les chiffres un peu au hasard, mais on n'est pas très bien au premier moment. Deuxièmement, Tu viens renoncer à ce qui a constitué quasiment l'ADN de ton entreprise. Donc, tu romps une partie de ton contrat. Tu renonces à une partie de ton contrat parce que les collaborateurs sont venus chez OpenCastRooms, entre autres pour cette raison-là. Notre mission attire beaucoup nos collaborateurs, mais la flexibilité est un argument majeur. Qu'est-ce qui se passe ? Tu génères beaucoup d'insatisfaction, c'est une évidence. Ton NPS chute, voilà. Est-ce que les gens s'en vont ? Je n'en sais rien. C'est ça la question que tu pourrais assez légitimement te poser, c'est de te dire « Ok, est-ce que tu as créé beaucoup d'insatisfaction ? Tu as créé une perte de confiance ? » C'est déjà énorme, je pense, d'un point de vue de l'engagement.

  • Magaly

    Logiquement une altération de votre culture interne.

  • Stéphanie Fraise

    Voilà, et donc la question c'est quel est l'impact de ça sur leur capacité à être suffisamment engagée pour délivrer, être motivé dans leur quotidien et atteindre les objectifs que tu leur donnes. Je pense que c'est très chahuté pendant un certain temps. Est-ce que tu réussis à reconstruire là-dessus, à repartir suffisamment ? Je ne sais pas. Est-ce que tu crées un churn et un taux de départ important ? Je ne sais pas.

  • Magaly

    Bon, écoute, de toute façon, on ne se le souhaite pas, c'était la science-fiction, mais je pense que l'impact sur la culture est forcément réel et je le vois. La seule fois où je l'ai envisagé dans mon équipe, mon équipe manageriale complète m'a dit « on est venu ici pour le télétravail ». Alors, ils n'ont pas dit qu'ils repartaient, ils ont dit « on est venu ici pour le télétravail ». Donc, oui, tout à fait. Merci beaucoup.

  • Stéphanie Fraise

    Non, j'allais dire dans un paysage où le télétravail est un avantage qui petit à petit est en train d'être remis en cause par un certain nombre d'entreprises, il est évident que le fait de le maintenir va devenir pour le coup un avantage compétitif négligeable. Mais une fois encore, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas faire attention et se donner les clés de succès telles qu'on les a décrites. Mais je pense que ça va devenir un avantage compétitif.

  • Magaly

    Ça sera la conclusion, c'est que le télétravail, ça demande du travail.

  • Stéphanie Fraise

    Merci, Magaly..

  • Magaly

    Merci. Voilà, vous l'avez compris, le télétravail, ça se travaille. Et les plantes qui naissent autour du télétravail ne sont juste que, finalement, la prise de conscience de ce qui ne fonctionne pas toujours dans nos organisations. Oui, il faut manager, oui, il faut donner des objectifs, oui, il faut faire cascader l'information. Et ça, ça n'est pas vrai quand on télétravaille, c'est toujours vrai et ça mérite d'être travaillé.

Share

Embed

You may also like

Description

Dans cet épisode de Capital Humain, Magaly Siméon reçoit Stéphanie Fraise, DRH au parcours atypique, pour parler d’un sujet brûlant : le télétravail et la flexibilité. Ensemble, elles décortiquent les vraies questions que doivent se poser les entreprises aujourd’hui. Est-ce le bureau qui manque, ou le cadre managérial ? Stéphanie partage sa vision exigeante et humaniste de la flexibilité : pas un confort, mais un engagement vers plus de rigueur, de clarté et d’organisation. Elle revient aussi sur l’importance des rituels managériaux, de la culture de l’écrit, du rôle critique des managers et de l’impact sur la santé mentale. Un échange riche, pragmatique et sans langue de bois, pour repenser le travail hybride au service de la performance et de l’engagement.


Quelques extraits :

  • "Le présentiel autorise une certaine flemmardise managériale."

  • "Le télétravail, c’est juste du travail... mais bien fait."

  • "Le lien social, ça ne se décrète pas. Ça se construit."


"Capital Humain" est un podcast de Magaly Siméon, experte QVT, charge mentale et conciliation, produit par Lily facilite la vie.

Si vous aimez le podcast, abonnez-vous et parlez-en et donnez-nous la note maximale sur votre plateforme d’écoute.

Et si vous souhaitez soutenir Lily facilite la vie, n’hésitez pas à vous abonner à notre programme d’aide aux salariés. Vous y trouverez des conseils, des programmes d’accompagnement, un pool d’experts à votre service et bien plus encore.

Pour ne rater aucune actualité, suivez-nous ! 🌸


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Magaly

    Vous en avez assez du télétravail ? Vous aimeriez bien qu'ils reviennent au bureau, voire au travail. Vous vous demandez ce qu'ils font ? Quand ils sont chez eux, ils se sont les salariés de vos entreprises. Alors cet épisode est fait pour vous. Je reçois Stéphanie Fraise qui nous explique pourquoi le télétravail soulève autant d'interrogations et génère même de l'inconfort. Et la réponse est un peu étonnante, mais finalement pas si compliquée à comprendre. Je vous souhaite une très bonne écoute. Bonjour Stéphanie.

  • Stéphanie Fraise

    Et bien bonjour Magaly.

  • Magaly

    Stéphanie, je suis très heureuse de ce moment qu'on va passer ensemble. Moi, je te connais, mais pas forcément tout le monde, même si tu es une DRH très visible. Est-ce que tu veux bien nous raconter un peu ton parcours ?

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr, merci beaucoup en tout cas d'avoir pensé à moi Magaly. Donc, je m'appelle Stéphanie. J'ai d'abord fait de nombreuses années dans le marketing, dans des grands groupes, d'abord chez Orange, qui ne s'appelait pas Orange à l'époque puis Canal+. J'ai eu la chance chez Canal+, de déjà changer de métier. Je suis quelqu'un qui a fait plusieurs métiers. Je suis passée sur des fonctions commerciales pendant assez longtemps, d'animation de force commerciale, très terrain, très orientée sur les magasins. Et ensuite, j'ai eu depuis 8 ans maintenant la chance de faire un changement pour le coup un peu plus drastique de métier, où je suis devenue en effet DRH. J'ai pu faire ce move en restant dans le même groupe, qui était donc le groupe Vivendi. Et je suis passée de Canal+, à Dailymotion, ce qui a été un saut dans le vide parce que j'ai quitté un environnement très franco-français, retail, dans le commercial, à DRH, dans la tech et le digital, et dans un environnement international. Donc ça a été un saut dans le vide, donc j'ai vraiment fait mes armes chez Dailymotion. Et ensuite, j'ai eu la chance d'évoluer dans les métiers RH, dans différents environnements de la tech. Je suis passée chez Blablacar, chez Mastéos, et depuis un an et demi, je suis chez OpenClassrooms. Et pour ceux qui ne connaissent pas... Open Classrooms, nous sommes une école en ligne, on est le leader de la formation en ligne, on a un gros focus sur le reskilling et le développement de l'apprentissage et de l'alternance. Notre mission, c'est de rendre l'éducation accessible, donc on a un ancrage très fort sur une approche par compétences et on accompagne nos étudiants, quelles que soient leurs origines, vers, en général, un changement de métier, une évolution de métier.

  • Magaly

    Passer de marketing à DRH, c'est quand même assez rare. Qu'est-ce que le marketing t'a apporté dans tes fonctions RH ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors je dirais que c'est et le marketing et le commerce, c'est toutes ces fonctions un peu généralistes qui m'ont essentiellement donné un angle très fort qui est un angle business. C'est-à-dire que je ne conçois absolument pas mon métier autrement qu'en comprenant les besoins des opérationnels pour qui je travaille parce que je suis là pour être à leur service et les doter de tout ce dont ils ont besoin pour réussir à atteindre leurs objectifs. Et en fait, cette envie de faire ce métier m'est venue parce que j'ai rencontré une DRH dans mon parcours. en particulier quand j'étais directrice des ventes, qui m'a montré à quel point les RH pouvaient apporter de la valeur. J'avais un énorme projet de transformation à conduire. C'était très gros, c'était un changement complet de métier, de façon de travailler pour les vendeurs. Il fallait les former, il a fallu accompagner le changement, il a fallu convaincre les organisations syndicales. C'était un très gros projet et en fait elle est venue en ne partant pas du tout d'une posture RH mais en partant complètement de quel était mon besoin. Quel était l'objectif que je voulais atteindre ? Et quels étaient les outils, les process, les accompagnements qu'elle allait pouvoir mettre à ma disposition pour m'aider ? Et c'est grâce à elle que j'ai réussi ce projet. Et là, je me suis dit, mais c'est dingue, les RH, ils ont un pouvoir, une capacité à impacter le business qui est énorme et je n'avais jamais imaginé que c'était possible. Et comme je m'intéresse beaucoup à l'humain, parce qu'évidemment, dans mes rôles de manager, ce qui me faisait le plus kiffer, c'était d'accompagner les gens. Je me rendais compte que plus que le résultat business, c'était de voir les gens être heureux et s'épanouir dans les projets qu'on pouvait conduire ensemble. Et c'est la conciliation de ces deux trucs-là où je me suis dit, je veux être RH. Et je l'aborde sous cet angle-là, exactement avec cette approche-là. En tout cas, j'essaye. Parfois, j'oublie un peu en chemin, donc j'essaye de me souvenir que rien de ce que je fais n'a d'intérêt si ça ne vient pas servir à un besoin business.

  • Magaly

    D'accord, donc en fait, tu fais partie des gens, alors j'allais dire des rares, en tout cas, j'en connais pas beaucoup, qui sont devenus DRH en ayant une idée assez précise de l'impact que tu voulais avoir sur les entreprises où tu travaillais, en matière de business.

  • Stéphanie Fraise

    Exactement, et c'est ce qui fait d'ailleurs que j'aime beaucoup travailler dans des entreprises dont je comprends parfaitement le métier et où je peux avoir un point de vue et une valeur ajoutée. Parce que sinon, c'est compliqué pour moi d'aider mes pairs, d'aider les gens du marketing, du commerce, de la tech, du produit, si je ne comprends pas ce qu'ils font et à quoi ça sert. Donc c'est un critère assez important pour moi. C'est pour ça qu'évidemment, une entreprise comme Openclassrooms, qui s'attache à développer les compétences, ça me parle beaucoup. Je comprends ce qu'on fait, je comprends ce que les équipes font. Et oui, j'ai cette conviction que les RH peuvent avoir un impact énorme sur le business. C'est pour ça que j'ai tendance à réagir assez fortement sur la façon dont les entreprises positionnent ce rôle, parce que je fais partie de celles et ceux qui ont la conviction qu'il faut positionner ce rôle au même niveau que peut l'être n'importe quelle autre fonction de l'entreprise, parce qu'on peut avoir un impact aussi important si tant est qu'on s'en donne les moyens.

  • Magaly

    Bien sûr. Aujourd'hui, on ne va pas parler de télétravail, on ne va pas parler hybride. Aujourd'hui, on va parler flexibilité, parce que les échanges qu'on a eus ensemble et en amont de cet épisode, m'ont montré que tu avais une vision du sujet qui était une vision justement plus ouverte que combien de jours de télétravail ou combien de jours de présentiel. Est-ce que déjà, toi, comment tu définis la flexibilité ? Et est-ce que cette définition, parce que c'est un sujet qui est devenu très mainstream post-Covid, est-ce que ta vision du sujet a changé entre avant l'obligation de télétravail de 2020 et après ?

  • Stéphanie Fraise

    C'est évident qu'il y a eu un avant-après, j'ai envie de dire pour le meilleur, dans le sens où je pense que c'est une époque qui nous a permis de comprendre que l'importance n'était pas tant, si on se réfère à l'aspect présentiel télétravail, sur un besoin de présence physique, mais avant tout sur une exigence, en matière d'organisation du travail. Qu'est-ce que je veux dire par là ? Ce que je veux dire par là, c'est qu'à distance, la vision que j'ai toujours défendue, c'est que pour moi, le télétravail n'est rien d'autre qu'un travail en présentiel, mais où tu mets tous tes curseurs de l'exigence au niveau maximal. Exemple, quand il s'agit de fixer des objectifs à un collaborateur et en tant que manager, par exemple, de t'assurer de façon très régulière, on essaye de demander, nous, à nos managers, de le faire de façon minima mensuelle. Est-ce que tu as pu atteindre les objectifs qu'on s'était fixés ensemble ? Si ce n'est pas le cas, qu'est-ce qui a pu te manquer ? Le présentiel nous autorise parfois à une forme de... j'ai le mot de "flemmardise" qui me vient. Non, mais parce que, c'est plus facile d'avoir des conversations informelles par lesquelles tu vas avoir cette discussion. Quand tu es en distanciel, tu ne peux pas te permettre. Tu es obligé de formaliser cette conversation et tu es obligé de forcer cette conversation. Parce que tu n'as pas l'opportunité de l'avoir de façon informelle. D'accord ? Alors, on y reviendra, il y a plein d'autres travers. Je ne fais pas du tout partie de ceux qui considèrent que tel travail est la solution absolument parfaite à tous les environnements et toutes les équipes, bien au contraire. Mais par contre, ce que je crois vraiment, c'est que ça t'oblige à une forme d'excellence. C'est-à-dire que tu te dois de traiter l'ensemble des sujets que tu traiterais en présentiel plus ou moins bien ou en y faisant plus ou moins attention, de façon beaucoup plus rigoureuse. C'est d'ailleurs pour ça que pour moi, le télétravail n'est en rien une nouvelle façon de travailler. C'est exactement la même façon dont on devrait tous travailler, qu'on soit en présentiel ou en distanciel. Mais simplement en distanciel, tu n'as pas le choix que de le faire et que de le faire bien. Tu n'as pas le droit à l'erreur. Qu'il s'agisse de fixer des objectifs, qu'il s'agisse de gérer le collectif de ton équipe et leur engagement, qu'il s'agisse de t'assurer que tes collaborateurs ont un bon niveau de santé mentale, qui est un sujet dont on parle fréquemment. Tous les sujets que tu gères, d'un point de vue managérial, collectif, sans t'assurer que tes équipes comprennent où va l'entreprise, où est-ce qu'elle en est, en quoi notre équipe, et toi, en tant qu'individu, tu contribues à ça. Toutes ces conversations-là, tous ces enjeux-là, ils sont encore plus importants et critiques quand tu es en distanciel.

  • Magaly

    Donc finalement, parce que moi, souvent, j'entends des dirigeants dire « Je vais les faire revenir au travail » . Donc déjà, je corrige en disant « vous allez les faire revenir au bureau ». Déjà, ce n'est pas exactement la même chose. Et souvent, j'ai cette question en disant « Mais est-ce que finalement, vous ne fantasmez pas une vie au bureau où tout le monde était efficace ? » Et c'est un peu ce que tu dis, c'est-à-dire quand on est au bureau, les gens sont là. Ok, mais est-ce que ça veut dire qu'on travaille mieux ? La réponse, c'est que ce n'est pas gagné, ce n'est pas sûr.

  • Stéphanie Fraise

    Pour moi, la question que tu poses, c'est la question de quel est le problème que tu essayes de résoudre.

  • Magaly

    Oui, bien sûr.

  • Stéphanie Fraise

    Ce qui est dangereux, c'est si tu considères que tu résous tous tes problèmes en indiquant que tout le monde va revenir et tu as raison, non pas au travail, mais au bureau. Tout dépend de la nature du problème que tu essayes de résoudre et tout dépend des raisons pour lesquelles tu avais mis en place le télétravail. Aujourd'hui c'est souvent un sujet qui n'est pas abordé de la bonne façon. Il me semble. Je n'ai évidemment accès qu'à la vision un peu raccourcie de ce qu'on peut lire dans les médias, sur LinkedIn ou autre. Quand des entreprises font des grandes annonces, souvent, on ne sait pas vraiment ce qui se passe derrière. Ce qui est sûr, c'est que je crois vraiment que si tu te poses les questions de la bonne façon, alors peut-être qu'un retour en présentiel va régler une partie de ce problème. Si c'est un problème de performance, c'est beaucoup ce qu'on entend. On entend beaucoup performance, productivité. Il est évident que la performance, elle ne dépend pas d'un lieu. Elle va dépendre de ta capacité à travailler efficacement et à t'organiser efficacement, mais c'est pas parce que tu es en distanciel que tu as un problème, c'est pas parce que tu es en présentiel que tu vas le résoudre, mais par contre, tu as sans doute un autre problème qui est comment le travail est organisé, comment la communication est organisée, comment les priorités sont adressées, est-ce que les décisions d'entreprise sont cascadées, redescendues au bon niveau, etc. Il y a plein de facteurs à regarder et à résoudre parce que sinon tu vas prendre les mêmes problèmes et tu vas les transférer du distanciel en présentiel et tu n'auras rien résolu. Ce que tu vas résoudre, on le sait tous, c'est que le problème majeur que tu as dans le distanciel, c'est le collectif. C'est le lien à l'autre. Et ça, il ne faut pas se mentir, c'est une évidence qu'il y a un problème de distanciel. Il y a un problème dans le distanciel sur la création de ce lien parce qu'il ne se fait pas de façon informelle. Il faut être très vigilant, il faut l'organiser. Par exemple, nous on a ce qu'on appelle des random coffee, ce qui veut dire que tu es apairé de façon aléatoire avec quelqu'un, ça crée des occasions. Tout ça est un peu forcé, mais ça crée quand même les occasions, ça crée quand même ces conversations. Donc c'est génial, c'est ce genre d'initiative. Nous, on couple tout ça évidemment avec des temps en présentiel, parce qu'on considère que c'est important que les équipes se réunissent. Bien sûr, ça a des impacts budgétaires, donc il faut l'anticiper, le prévoir. Et parfois, dans des temps difficiles, ce n'est pas toujours simple de les maintenir. Mais il est indéniable que ça ne remplace pas la force d'un collectif qui est tous les jours présent au bureau, qui peut avoir X conversations informelles. Mais il se trouve que le monde a changé, notre environnement a changé. Il y a une attente en matière de flexibilité d'organisation de son temps qui est très forte, qui était latente, je pense. Il y a des générations qui arrivent sur le marché qui sont très en attente de cet équilibre de vie, de cette flexibilité de cette organisation-là. Moi, je travaille dans des environnements où la moyenne d'âge est évidemment très centrée sur ces générations-là. Donc, ça serait compliqué de leur proposer quelque chose qui n'offre pas cette flexibilité. Et donc, je dirais que notre responsabilité aujourd'hui, en tant qu'RH et entreprise, c'est plutôt de nous adapter en essayant de tirer le meilleur de tous les mondes.

  • Magaly

    Avant ma question suivante, je vais juste ajouter quelque chose. Tu vois, quand tu dis que le random coffee, c'est un peu obligatoire, moi, à l'époque où je travaillais dans des entreprises où il y avait une machine à café, tu ne choisis pas toujours sur qui tu tombes à la machine à café. Et à part être totalement grossier, tu as l'échange minimum que tu es obligé de faire et où tu peux te rendre compte que finalement, il n'est pas si désagréable que ça. Ça, c'est la première chose. Et puis la deuxième chose, pour avoir travaillé dans des grands groupes, sur cette histoire de collectif, moi j'ai connu des entreprises où toutes les portes étaient fermées.

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr.

  • Magaly

    Ce collectif, il vient aussi d'une intention des dirigeants, sinon présentiel ou distanciel. Le collectif n'est pas spontané. Il nécessite dans tous les cas d'avoir une intention et une action.

  • Stéphanie Fraise

    Il faut inclure les entreprises avec les portes fermées aussi, tu as raison. Oui.

  • Magaly

    C'est souvent les mêmes qui disent on va les faire revenir au travail. Moi, j'aimerais bien qu'on parle un peu de performance, c'est-à-dire qu'est-ce qu'en tant que DRH, ça peut arriver de revenir sur un modèle d'hybridation pour une équipe qui aurait besoin d'un peu plus de pêche, d'un peu plus de recadrage pour l'arrivée d'un nouveau boss. Est-ce que des fois, ce sont des choses qui sont un peu évolutives au niveau d'une équipe ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors au niveau d'une équipe ou au niveau d'un temps dans l'entreprise, j'en ai pas parlé mais par exemple nous on essaye dans la mesure du possible que les onboarding se fassent en présentiel parce que quand tu débarques complètement dans une entreprise, c'est quand même important de démarrer en ayant ce contact là. Moi j'encourage aussi dans la phase de recrutement d'avoir au moins un entretien avec le collaborateur concerné, le candidat concerné en présentiel, en physique, donc une fois encore c'est pas du tout blanc, pas du tout noir, je crois qu'il faut savoir s'adapter donc je te le disais, je pense que c'est important d'avoir un temps d'onboarding où tu as ce temps ensemble donc voilà donc ça peut être une question de temps ça peut être des questions de moments dans la vie d'une entreprise tu peux avoir des moments où tu as besoin de remettre les équipes toutes ensemble tu peux avoir en effet des problématiques propres à certaines équipes nous on parle beaucoup en ce moment de nos équipes commerciales parce que d'avoir une équipe commerciale qui est sur place ensemble, ça crée une émulation un peu différente.

  • Magaly

    Ça nécessite de l'énergie.

  • Stéphanie Fraise

    Voilà, tu crées une énergie, une émulation qui en effet est très propre au présentiel, qui est un peu plus compliqué à recréer en distanciel, où on est chacun derrière son ordinateur. Donc ça peut être des moments, ça peut être des équipes. Je pense que c'est là où il faut avoir de la flexibilité et de l'intelligence situationnelle, à partir du moment où il y a un sens, des arguments, une explication. qui permet de répondre à un besoin spécifique. J'en reviens à mon point de caler le problème que tu essayes de résoudre. Est-ce que le présentiel va être la bonne réponse et va en effet te permettre de résoudre ton problème ou pas ?

  • Magaly

    Est-ce que chez OpenClassrooms, vous avez investi spécifiquement dans l'accompagnement des managers pour la gestion d'équipes en mode hybride ? Parce que souvent, ce n'est pas le cas. Et donc, les managers se retrouvent un peu au cœur des plans divers et variés. Est-ce que chez Open Classroom, vous avez fait des choses ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors, oui et non. Et je vais te dire pourquoi oui et non. La première réponse, c'est non. C'est-à-dire que nous n'avons pas fait de formation spécifique au fait d'être en remote. Par contre, comme je te le disais tout à l'heure, mon point de vue, c'est que quand tu manages en distanciel, tu dois être exemplaire dans tes rituels managériaux. On a investi massivement dans la formation des managers. On a fait d'abord un truc très basique, c'est qu'on a écrit un modèle managérial. Ça veut dire quoi manager chez Openclassrooms ? Qu'est-ce qu'on entend de toi ? Donc on a défini un certain nombre de compétences, on a défini à quoi ressemblaient les comportements managériaux sur chacune des compétences, selon que tu es au niveau, on va dire basique, intermédiaire et plus haut niveau, pour qu'on soit extrêmement concret là-dessus. Et ensuite, on s'est associé avec un partenaire qui nous a accompagné dans la mise en œuvre d'une formation que nous avons fait en présentiel et en distanciel. On a testé les deux. On a fait deux sessions en présentiel d'une journée complète et une session en distanciel qui a duré une très grosse demi-journée sur laquelle on a eu une dynamique absolument incroyable. On a été les premiers surpris du niveau de dynamique qu'on a réussi à créer sur cette session à distance. On était quand même 60 ou 70 managers connectés. Et donc, qu'est-ce qu'on a fait au travers de cette formation ? On a formé nos managers aux rituels managériaux qu'on pense être primordiaux et absolument nécessaires d'ancrer pour justement être capables de gérer leur équipe à distance. Que ça soit, j'y reviens, dans des enjeux de performance, de développement de carrière, de santé mentale, de création du lien individuel et avec l'équipe, de redescente et de cascade d'informations, on attache aussi beaucoup d'importance à ça. Voilà, donc c'est pour ça que je te disais oui et non. Voilà.

  • Magaly

    Mais ça boucle avec ton propos de départ avec lequel je suis 100% d'accord, c'est-à-dire que finalement le télétravail a pointé nos carences organisationnelles dans nos entreprises, c'est-à-dire que ce qui tourne quand le manager au bout du bout va te taper sur l'épaule parce qu'il n'est pas loin ou va finir une nocturne parce qu'il faut terminer et qui ne fonctionne plus quand on est en télétravail, c'est juste parce que le cadre managérial n'était pas bien défini non plus. Merci pour cet exemple Stéphanie parce que c'est exactement ça, c'est-à-dire que finalement, le télétravail demande à ce qu'on manage, mais contrairement à ce qu'on a imaginé au XXe siècle, le présentiel l'aurait demandé aussi.

  • Stéphanie Fraise

    Le télétravail, il vient mettre la loupe sur ce que tu fais bien et ce que tu fais moins bien. C'est-à-dire qu'il va déformer, accentuer, ça rejoint le sujet de l'exigence dont je parlais tout à l'heure, il va venir accentuer ce qui marche ou ce qui ne marche pas. Maintenant, il faut être très clair, je l'ai un peu dit tout à l'heure, moi je ne crois pas que le télétravail puisse fonctionner partout. Ce n'est pas une recette miracle qui marche pour 100% des boîtes ou des postes. Il y a des postes dont l'activité requiert du présentiel, il y a des environnements, des organisations, des cultures qui ne sont pas propices au télétravail, parce que, pour que ça puisse fonctionner... Tu as tout un tas de prérequis. On vient de parler de la formation des managers, c'est un prérequis énorme. Il y a un autre prérequis dont on n'a pas encore beaucoup parlé qui est par exemple la culture de l'écrit. Parce que le présentiel te permet une énorme souplesse par rapport à ça. Parce qu'il y a beaucoup d'informel et beaucoup d'oral. Quand tu es en télétravail, en distanciel, tu ne peux pas. Donc en fait, tu as besoin d'avoir une culture de l'écrit, ce qui est assez contraignant par ailleurs. Mais ça t'oblige à documenter, il faut avoir les outils pour le faire, d'accord ? Il faut avoir des outils. Nous, par exemple, on travaille avec Notion, notamment, qui est notre base de connaissances. On utilise évidemment des outils de messagerie instantanée. Je pense que toutes les entreprises ont ça maintenant. Mais il faut que tu aies une gouvernance qui fonctionne. Il faut que tu aies des relevés de décision. Il faut que ces décisions, tu sois capable de garantir qu'elles sont cascadées correctement aux bonnes personnes. Il faut que tout le monde ait un instant T dans l'entreprise qui, auparavant, aurait peut-être eu accès de façon informel à ce débrief, à cette information sur cette décision. Là, il faut que tu t'assures que ça cascade. Si tu coches pas toutes ces cases-là avant et que tu ne t'es pas assuré avant que tes managers sont correctement formés, que tu as les bons outils, que tu as la bonne gouvernance, que tu as la bonne culture de l'écrit et que tout ça est capable de fonctionner efficacement, c'est sûr que c'est voué à l'échec.

  • Magaly

    Oui, mais tu l'as dit toi-même, tu as dit finalement le présentiel old-fashioned pouvait assurer que peut-être ça cascade et tout est dans le peut-être. C'est-à-dire que moi, j'ai un peu l'impression qu'on fantasme des entreprises qui, quand elles étaient en 100% présentiel, tout était fluide. Et combien de fois, toi et moi, on a pris une décision au détour d'un couloir, on a pris une décision, mais après coup, combien de fois on a raté une réunion et le relevé de décision n'était pas clair. Donc, moi, je trouve qu'il y a une espèce de, tu sais, le « c'était mieux avant ». Et alors que je trouve que tu le dis très bien, je t'en remercie, c'est que finalement, le travail hybride pointe que là où on pouvait être un peu amateur en organisation, maintenant, il faut que dans toutes les boîtes, on soit très professionnel sur l'information, sur la formation, sur les rituels. Et c'est positif, en fait.

  • Stéphanie Fraise

    Moi, je trouve ça, parce que je le vois comme une fois encore, une exigence, une excellence. Et c'est ce qu'on essaye de faire. Alors, c'est long. Je vais te dire, même nous qui sommes chez Open Classrooms, c'est une entreprise qui, historiquement, est en remote first. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que tous les salariés s'organisent comme ils veulent. On a des bureaux à Paris, ils viennent s'ils veulent. On invite, on fait en sorte de donner une expérience agréable au bureau, parce qu'évidemment, ça nous fait plaisir que les gens soient là. Mais on va devoir fonctionner en hybride, puisqu'on a une grosse partie de nos effectifs sont répartis partout en France. Accessoirement, on oublie souvent de dire que des entreprises peuvent avoir une activité internationale. Donc, je peux avoir un manager en France qui manage des équipes à l'étranger, on ne se pose pas la question là. On est dans du distanciel. D'accord, donc du coup, tu te retrouves dans une situation qui, par ailleurs, présente plein d'autres problèmes et de biais. C'est que tu vas créer un lien plus fort avec les gens que tu as sous la main, proche de toi. À l'inverse, tu vas avoir un lien beaucoup plus distant avec les autres. Donc, c'est important aussi de le considérer et de t'assurer que tu vas traiter tout le monde de façon extrêmement équitable et non biaisée par cette proximité, parce que c'est très vite fait. Et donc, oui, la réalité, c'est que c'est que des entreprises qui ont cette empreinte internationale fonctionne avec du distanciel, et donc s'assurer que tu as mis en place cette culture de l'écrit, des objectifs qui sont clairs, qui sont rigoureusement suivis, c'est très important, on est en plein dans le sujet du management par les objectifs versus le management par la présence, que tu as cette gouvernance qui fonctionne, il ne faut pas oublier les enjeux de santé mentale, on en a parlé tout à l'heure un peu rapidement, c'est quand même une réalité aussi, avec laquelle il faut être très lucide, c'est que tu peux de mon point de vue, avoir un peu plus de risques en matière de santé mentale, pour deux raisons. La première, c'est qu'on le sait, les environnements deviennent beaucoup plus poreux entre le pro et le perso. Donc tu as des gens qui ont plus de mal à avoir des garde-fous et une organisation saine, et à avoir un temps de travail dédié et un temps personnel dédié. Et de l'autre, tu as un peu plus de difficultés à capter des signaux faibles. Donc c'est là où les managers qui doivent voir leurs équipes idéalement toutes les semaines, avoir un one-on-one toutes les semaines, jouent un rôle extrêmement important parce que c'est eux qui vont être en capacité à détecter les signes faibles de quelqu'un qui commence à ne pas être bien. Donc ça, je pense que c'est quand même extrêmement important de le garder en tête et de l'inclure, nous c'est inclus dans notre modèle managérial, par exemple, ce sujet-là.

  • Magaly

    Oui, nous, dans notre règlement intérieur, on a mis l'obligation d'avoir la caméra ON pour toutes les visios. Parce que déjà, si tu vois les gens, Voilà, c'est pas parfait, mais de toute façon, rien n'est parfait. Mais déjà, si tu vois les gens, c'est mieux que si tu les vois pas. Les réunions, tu les vois pas, tu les entends pas. Sur des équipes de 8-10 personnes, tu peux vraiment passer à côté.

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr que tu peux passer à côté, c'est très important. Et il faut les aider, les managers, parce qu'ils sont pas forcément équipés pour ça non plus. On leur demande beaucoup. Moi, je dis souvent, les managers, ils ont quand même un rôle qui est difficile, parce que ils sont un peu cette cheville ouvrière entre l'entreprise, ses décisions, sa stratégie, ses priorités. Ils doivent emmener en collectif eux, qui est leur équipe, qui va contribuer à ses objectifs, qui va délivrer. Et ils doivent donner du sens à tout ça. Ils doivent assurer la redescente des infos, la remontée des infos du terrain. C'est un rôle qui n'est pas évident. On leur demande beaucoup de casquettes au manager.

  • Magaly

    J'ai une dernière question pour toi, Stéphanie. Faisons de la science-fiction. Imaginons que... On est quel jour ? On est lundi. Demain, tu arrives au bureau et tu fais un message en disant à partir de lundi prochain, chez OpenClassrooms, tout le monde revient en 100% présentiel. D'après toi, c'est quoi la réaction des équipes ? Qu'est-ce qui se passe, tu penses ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors, nous, déjà, on a au moins la moitié de nos équipes qui ne sont pas à Paris et on n'a que des bureaux à Paris. Alors, on a un contrat avec des espaces de co-working qui permettent à nos collaborateurs de se retrouver. Donc, on a des espèces de mini-hubs régionaux où ils peuvent ponctuellement aller. Donc déjà, ça voudrait dire qu'il faudrait au préalable qu'on ait recréé des espaces de bureaux en région pour que nos collaborateurs puissent avoir un lieu. Parce que sinon, ça veut dire que tu as un traitement complètement inférieur, complètement injuste, dans lequel tu obliges tes Parisiens à revenir au bureau à Paris et les autres, non. Bon. Donc déjà, la première réaction, c'est ça. C'est de dire OK, c'est bien gentil, mais ça ne concerne que la moitié de l'entreprise. Je donne les chiffres un peu au hasard, mais on n'est pas très bien au premier moment. Deuxièmement, Tu viens renoncer à ce qui a constitué quasiment l'ADN de ton entreprise. Donc, tu romps une partie de ton contrat. Tu renonces à une partie de ton contrat parce que les collaborateurs sont venus chez OpenCastRooms, entre autres pour cette raison-là. Notre mission attire beaucoup nos collaborateurs, mais la flexibilité est un argument majeur. Qu'est-ce qui se passe ? Tu génères beaucoup d'insatisfaction, c'est une évidence. Ton NPS chute, voilà. Est-ce que les gens s'en vont ? Je n'en sais rien. C'est ça la question que tu pourrais assez légitimement te poser, c'est de te dire « Ok, est-ce que tu as créé beaucoup d'insatisfaction ? Tu as créé une perte de confiance ? » C'est déjà énorme, je pense, d'un point de vue de l'engagement.

  • Magaly

    Logiquement une altération de votre culture interne.

  • Stéphanie Fraise

    Voilà, et donc la question c'est quel est l'impact de ça sur leur capacité à être suffisamment engagée pour délivrer, être motivé dans leur quotidien et atteindre les objectifs que tu leur donnes. Je pense que c'est très chahuté pendant un certain temps. Est-ce que tu réussis à reconstruire là-dessus, à repartir suffisamment ? Je ne sais pas. Est-ce que tu crées un churn et un taux de départ important ? Je ne sais pas.

  • Magaly

    Bon, écoute, de toute façon, on ne se le souhaite pas, c'était la science-fiction, mais je pense que l'impact sur la culture est forcément réel et je le vois. La seule fois où je l'ai envisagé dans mon équipe, mon équipe manageriale complète m'a dit « on est venu ici pour le télétravail ». Alors, ils n'ont pas dit qu'ils repartaient, ils ont dit « on est venu ici pour le télétravail ». Donc, oui, tout à fait. Merci beaucoup.

  • Stéphanie Fraise

    Non, j'allais dire dans un paysage où le télétravail est un avantage qui petit à petit est en train d'être remis en cause par un certain nombre d'entreprises, il est évident que le fait de le maintenir va devenir pour le coup un avantage compétitif négligeable. Mais une fois encore, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas faire attention et se donner les clés de succès telles qu'on les a décrites. Mais je pense que ça va devenir un avantage compétitif.

  • Magaly

    Ça sera la conclusion, c'est que le télétravail, ça demande du travail.

  • Stéphanie Fraise

    Merci, Magaly..

  • Magaly

    Merci. Voilà, vous l'avez compris, le télétravail, ça se travaille. Et les plantes qui naissent autour du télétravail ne sont juste que, finalement, la prise de conscience de ce qui ne fonctionne pas toujours dans nos organisations. Oui, il faut manager, oui, il faut donner des objectifs, oui, il faut faire cascader l'information. Et ça, ça n'est pas vrai quand on télétravaille, c'est toujours vrai et ça mérite d'être travaillé.

Description

Dans cet épisode de Capital Humain, Magaly Siméon reçoit Stéphanie Fraise, DRH au parcours atypique, pour parler d’un sujet brûlant : le télétravail et la flexibilité. Ensemble, elles décortiquent les vraies questions que doivent se poser les entreprises aujourd’hui. Est-ce le bureau qui manque, ou le cadre managérial ? Stéphanie partage sa vision exigeante et humaniste de la flexibilité : pas un confort, mais un engagement vers plus de rigueur, de clarté et d’organisation. Elle revient aussi sur l’importance des rituels managériaux, de la culture de l’écrit, du rôle critique des managers et de l’impact sur la santé mentale. Un échange riche, pragmatique et sans langue de bois, pour repenser le travail hybride au service de la performance et de l’engagement.


Quelques extraits :

  • "Le présentiel autorise une certaine flemmardise managériale."

  • "Le télétravail, c’est juste du travail... mais bien fait."

  • "Le lien social, ça ne se décrète pas. Ça se construit."


"Capital Humain" est un podcast de Magaly Siméon, experte QVT, charge mentale et conciliation, produit par Lily facilite la vie.

Si vous aimez le podcast, abonnez-vous et parlez-en et donnez-nous la note maximale sur votre plateforme d’écoute.

Et si vous souhaitez soutenir Lily facilite la vie, n’hésitez pas à vous abonner à notre programme d’aide aux salariés. Vous y trouverez des conseils, des programmes d’accompagnement, un pool d’experts à votre service et bien plus encore.

Pour ne rater aucune actualité, suivez-nous ! 🌸


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Magaly

    Vous en avez assez du télétravail ? Vous aimeriez bien qu'ils reviennent au bureau, voire au travail. Vous vous demandez ce qu'ils font ? Quand ils sont chez eux, ils se sont les salariés de vos entreprises. Alors cet épisode est fait pour vous. Je reçois Stéphanie Fraise qui nous explique pourquoi le télétravail soulève autant d'interrogations et génère même de l'inconfort. Et la réponse est un peu étonnante, mais finalement pas si compliquée à comprendre. Je vous souhaite une très bonne écoute. Bonjour Stéphanie.

  • Stéphanie Fraise

    Et bien bonjour Magaly.

  • Magaly

    Stéphanie, je suis très heureuse de ce moment qu'on va passer ensemble. Moi, je te connais, mais pas forcément tout le monde, même si tu es une DRH très visible. Est-ce que tu veux bien nous raconter un peu ton parcours ?

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr, merci beaucoup en tout cas d'avoir pensé à moi Magaly. Donc, je m'appelle Stéphanie. J'ai d'abord fait de nombreuses années dans le marketing, dans des grands groupes, d'abord chez Orange, qui ne s'appelait pas Orange à l'époque puis Canal+. J'ai eu la chance chez Canal+, de déjà changer de métier. Je suis quelqu'un qui a fait plusieurs métiers. Je suis passée sur des fonctions commerciales pendant assez longtemps, d'animation de force commerciale, très terrain, très orientée sur les magasins. Et ensuite, j'ai eu depuis 8 ans maintenant la chance de faire un changement pour le coup un peu plus drastique de métier, où je suis devenue en effet DRH. J'ai pu faire ce move en restant dans le même groupe, qui était donc le groupe Vivendi. Et je suis passée de Canal+, à Dailymotion, ce qui a été un saut dans le vide parce que j'ai quitté un environnement très franco-français, retail, dans le commercial, à DRH, dans la tech et le digital, et dans un environnement international. Donc ça a été un saut dans le vide, donc j'ai vraiment fait mes armes chez Dailymotion. Et ensuite, j'ai eu la chance d'évoluer dans les métiers RH, dans différents environnements de la tech. Je suis passée chez Blablacar, chez Mastéos, et depuis un an et demi, je suis chez OpenClassrooms. Et pour ceux qui ne connaissent pas... Open Classrooms, nous sommes une école en ligne, on est le leader de la formation en ligne, on a un gros focus sur le reskilling et le développement de l'apprentissage et de l'alternance. Notre mission, c'est de rendre l'éducation accessible, donc on a un ancrage très fort sur une approche par compétences et on accompagne nos étudiants, quelles que soient leurs origines, vers, en général, un changement de métier, une évolution de métier.

  • Magaly

    Passer de marketing à DRH, c'est quand même assez rare. Qu'est-ce que le marketing t'a apporté dans tes fonctions RH ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors je dirais que c'est et le marketing et le commerce, c'est toutes ces fonctions un peu généralistes qui m'ont essentiellement donné un angle très fort qui est un angle business. C'est-à-dire que je ne conçois absolument pas mon métier autrement qu'en comprenant les besoins des opérationnels pour qui je travaille parce que je suis là pour être à leur service et les doter de tout ce dont ils ont besoin pour réussir à atteindre leurs objectifs. Et en fait, cette envie de faire ce métier m'est venue parce que j'ai rencontré une DRH dans mon parcours. en particulier quand j'étais directrice des ventes, qui m'a montré à quel point les RH pouvaient apporter de la valeur. J'avais un énorme projet de transformation à conduire. C'était très gros, c'était un changement complet de métier, de façon de travailler pour les vendeurs. Il fallait les former, il a fallu accompagner le changement, il a fallu convaincre les organisations syndicales. C'était un très gros projet et en fait elle est venue en ne partant pas du tout d'une posture RH mais en partant complètement de quel était mon besoin. Quel était l'objectif que je voulais atteindre ? Et quels étaient les outils, les process, les accompagnements qu'elle allait pouvoir mettre à ma disposition pour m'aider ? Et c'est grâce à elle que j'ai réussi ce projet. Et là, je me suis dit, mais c'est dingue, les RH, ils ont un pouvoir, une capacité à impacter le business qui est énorme et je n'avais jamais imaginé que c'était possible. Et comme je m'intéresse beaucoup à l'humain, parce qu'évidemment, dans mes rôles de manager, ce qui me faisait le plus kiffer, c'était d'accompagner les gens. Je me rendais compte que plus que le résultat business, c'était de voir les gens être heureux et s'épanouir dans les projets qu'on pouvait conduire ensemble. Et c'est la conciliation de ces deux trucs-là où je me suis dit, je veux être RH. Et je l'aborde sous cet angle-là, exactement avec cette approche-là. En tout cas, j'essaye. Parfois, j'oublie un peu en chemin, donc j'essaye de me souvenir que rien de ce que je fais n'a d'intérêt si ça ne vient pas servir à un besoin business.

  • Magaly

    D'accord, donc en fait, tu fais partie des gens, alors j'allais dire des rares, en tout cas, j'en connais pas beaucoup, qui sont devenus DRH en ayant une idée assez précise de l'impact que tu voulais avoir sur les entreprises où tu travaillais, en matière de business.

  • Stéphanie Fraise

    Exactement, et c'est ce qui fait d'ailleurs que j'aime beaucoup travailler dans des entreprises dont je comprends parfaitement le métier et où je peux avoir un point de vue et une valeur ajoutée. Parce que sinon, c'est compliqué pour moi d'aider mes pairs, d'aider les gens du marketing, du commerce, de la tech, du produit, si je ne comprends pas ce qu'ils font et à quoi ça sert. Donc c'est un critère assez important pour moi. C'est pour ça qu'évidemment, une entreprise comme Openclassrooms, qui s'attache à développer les compétences, ça me parle beaucoup. Je comprends ce qu'on fait, je comprends ce que les équipes font. Et oui, j'ai cette conviction que les RH peuvent avoir un impact énorme sur le business. C'est pour ça que j'ai tendance à réagir assez fortement sur la façon dont les entreprises positionnent ce rôle, parce que je fais partie de celles et ceux qui ont la conviction qu'il faut positionner ce rôle au même niveau que peut l'être n'importe quelle autre fonction de l'entreprise, parce qu'on peut avoir un impact aussi important si tant est qu'on s'en donne les moyens.

  • Magaly

    Bien sûr. Aujourd'hui, on ne va pas parler de télétravail, on ne va pas parler hybride. Aujourd'hui, on va parler flexibilité, parce que les échanges qu'on a eus ensemble et en amont de cet épisode, m'ont montré que tu avais une vision du sujet qui était une vision justement plus ouverte que combien de jours de télétravail ou combien de jours de présentiel. Est-ce que déjà, toi, comment tu définis la flexibilité ? Et est-ce que cette définition, parce que c'est un sujet qui est devenu très mainstream post-Covid, est-ce que ta vision du sujet a changé entre avant l'obligation de télétravail de 2020 et après ?

  • Stéphanie Fraise

    C'est évident qu'il y a eu un avant-après, j'ai envie de dire pour le meilleur, dans le sens où je pense que c'est une époque qui nous a permis de comprendre que l'importance n'était pas tant, si on se réfère à l'aspect présentiel télétravail, sur un besoin de présence physique, mais avant tout sur une exigence, en matière d'organisation du travail. Qu'est-ce que je veux dire par là ? Ce que je veux dire par là, c'est qu'à distance, la vision que j'ai toujours défendue, c'est que pour moi, le télétravail n'est rien d'autre qu'un travail en présentiel, mais où tu mets tous tes curseurs de l'exigence au niveau maximal. Exemple, quand il s'agit de fixer des objectifs à un collaborateur et en tant que manager, par exemple, de t'assurer de façon très régulière, on essaye de demander, nous, à nos managers, de le faire de façon minima mensuelle. Est-ce que tu as pu atteindre les objectifs qu'on s'était fixés ensemble ? Si ce n'est pas le cas, qu'est-ce qui a pu te manquer ? Le présentiel nous autorise parfois à une forme de... j'ai le mot de "flemmardise" qui me vient. Non, mais parce que, c'est plus facile d'avoir des conversations informelles par lesquelles tu vas avoir cette discussion. Quand tu es en distanciel, tu ne peux pas te permettre. Tu es obligé de formaliser cette conversation et tu es obligé de forcer cette conversation. Parce que tu n'as pas l'opportunité de l'avoir de façon informelle. D'accord ? Alors, on y reviendra, il y a plein d'autres travers. Je ne fais pas du tout partie de ceux qui considèrent que tel travail est la solution absolument parfaite à tous les environnements et toutes les équipes, bien au contraire. Mais par contre, ce que je crois vraiment, c'est que ça t'oblige à une forme d'excellence. C'est-à-dire que tu te dois de traiter l'ensemble des sujets que tu traiterais en présentiel plus ou moins bien ou en y faisant plus ou moins attention, de façon beaucoup plus rigoureuse. C'est d'ailleurs pour ça que pour moi, le télétravail n'est en rien une nouvelle façon de travailler. C'est exactement la même façon dont on devrait tous travailler, qu'on soit en présentiel ou en distanciel. Mais simplement en distanciel, tu n'as pas le choix que de le faire et que de le faire bien. Tu n'as pas le droit à l'erreur. Qu'il s'agisse de fixer des objectifs, qu'il s'agisse de gérer le collectif de ton équipe et leur engagement, qu'il s'agisse de t'assurer que tes collaborateurs ont un bon niveau de santé mentale, qui est un sujet dont on parle fréquemment. Tous les sujets que tu gères, d'un point de vue managérial, collectif, sans t'assurer que tes équipes comprennent où va l'entreprise, où est-ce qu'elle en est, en quoi notre équipe, et toi, en tant qu'individu, tu contribues à ça. Toutes ces conversations-là, tous ces enjeux-là, ils sont encore plus importants et critiques quand tu es en distanciel.

  • Magaly

    Donc finalement, parce que moi, souvent, j'entends des dirigeants dire « Je vais les faire revenir au travail » . Donc déjà, je corrige en disant « vous allez les faire revenir au bureau ». Déjà, ce n'est pas exactement la même chose. Et souvent, j'ai cette question en disant « Mais est-ce que finalement, vous ne fantasmez pas une vie au bureau où tout le monde était efficace ? » Et c'est un peu ce que tu dis, c'est-à-dire quand on est au bureau, les gens sont là. Ok, mais est-ce que ça veut dire qu'on travaille mieux ? La réponse, c'est que ce n'est pas gagné, ce n'est pas sûr.

  • Stéphanie Fraise

    Pour moi, la question que tu poses, c'est la question de quel est le problème que tu essayes de résoudre.

  • Magaly

    Oui, bien sûr.

  • Stéphanie Fraise

    Ce qui est dangereux, c'est si tu considères que tu résous tous tes problèmes en indiquant que tout le monde va revenir et tu as raison, non pas au travail, mais au bureau. Tout dépend de la nature du problème que tu essayes de résoudre et tout dépend des raisons pour lesquelles tu avais mis en place le télétravail. Aujourd'hui c'est souvent un sujet qui n'est pas abordé de la bonne façon. Il me semble. Je n'ai évidemment accès qu'à la vision un peu raccourcie de ce qu'on peut lire dans les médias, sur LinkedIn ou autre. Quand des entreprises font des grandes annonces, souvent, on ne sait pas vraiment ce qui se passe derrière. Ce qui est sûr, c'est que je crois vraiment que si tu te poses les questions de la bonne façon, alors peut-être qu'un retour en présentiel va régler une partie de ce problème. Si c'est un problème de performance, c'est beaucoup ce qu'on entend. On entend beaucoup performance, productivité. Il est évident que la performance, elle ne dépend pas d'un lieu. Elle va dépendre de ta capacité à travailler efficacement et à t'organiser efficacement, mais c'est pas parce que tu es en distanciel que tu as un problème, c'est pas parce que tu es en présentiel que tu vas le résoudre, mais par contre, tu as sans doute un autre problème qui est comment le travail est organisé, comment la communication est organisée, comment les priorités sont adressées, est-ce que les décisions d'entreprise sont cascadées, redescendues au bon niveau, etc. Il y a plein de facteurs à regarder et à résoudre parce que sinon tu vas prendre les mêmes problèmes et tu vas les transférer du distanciel en présentiel et tu n'auras rien résolu. Ce que tu vas résoudre, on le sait tous, c'est que le problème majeur que tu as dans le distanciel, c'est le collectif. C'est le lien à l'autre. Et ça, il ne faut pas se mentir, c'est une évidence qu'il y a un problème de distanciel. Il y a un problème dans le distanciel sur la création de ce lien parce qu'il ne se fait pas de façon informelle. Il faut être très vigilant, il faut l'organiser. Par exemple, nous on a ce qu'on appelle des random coffee, ce qui veut dire que tu es apairé de façon aléatoire avec quelqu'un, ça crée des occasions. Tout ça est un peu forcé, mais ça crée quand même les occasions, ça crée quand même ces conversations. Donc c'est génial, c'est ce genre d'initiative. Nous, on couple tout ça évidemment avec des temps en présentiel, parce qu'on considère que c'est important que les équipes se réunissent. Bien sûr, ça a des impacts budgétaires, donc il faut l'anticiper, le prévoir. Et parfois, dans des temps difficiles, ce n'est pas toujours simple de les maintenir. Mais il est indéniable que ça ne remplace pas la force d'un collectif qui est tous les jours présent au bureau, qui peut avoir X conversations informelles. Mais il se trouve que le monde a changé, notre environnement a changé. Il y a une attente en matière de flexibilité d'organisation de son temps qui est très forte, qui était latente, je pense. Il y a des générations qui arrivent sur le marché qui sont très en attente de cet équilibre de vie, de cette flexibilité de cette organisation-là. Moi, je travaille dans des environnements où la moyenne d'âge est évidemment très centrée sur ces générations-là. Donc, ça serait compliqué de leur proposer quelque chose qui n'offre pas cette flexibilité. Et donc, je dirais que notre responsabilité aujourd'hui, en tant qu'RH et entreprise, c'est plutôt de nous adapter en essayant de tirer le meilleur de tous les mondes.

  • Magaly

    Avant ma question suivante, je vais juste ajouter quelque chose. Tu vois, quand tu dis que le random coffee, c'est un peu obligatoire, moi, à l'époque où je travaillais dans des entreprises où il y avait une machine à café, tu ne choisis pas toujours sur qui tu tombes à la machine à café. Et à part être totalement grossier, tu as l'échange minimum que tu es obligé de faire et où tu peux te rendre compte que finalement, il n'est pas si désagréable que ça. Ça, c'est la première chose. Et puis la deuxième chose, pour avoir travaillé dans des grands groupes, sur cette histoire de collectif, moi j'ai connu des entreprises où toutes les portes étaient fermées.

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr.

  • Magaly

    Ce collectif, il vient aussi d'une intention des dirigeants, sinon présentiel ou distanciel. Le collectif n'est pas spontané. Il nécessite dans tous les cas d'avoir une intention et une action.

  • Stéphanie Fraise

    Il faut inclure les entreprises avec les portes fermées aussi, tu as raison. Oui.

  • Magaly

    C'est souvent les mêmes qui disent on va les faire revenir au travail. Moi, j'aimerais bien qu'on parle un peu de performance, c'est-à-dire qu'est-ce qu'en tant que DRH, ça peut arriver de revenir sur un modèle d'hybridation pour une équipe qui aurait besoin d'un peu plus de pêche, d'un peu plus de recadrage pour l'arrivée d'un nouveau boss. Est-ce que des fois, ce sont des choses qui sont un peu évolutives au niveau d'une équipe ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors au niveau d'une équipe ou au niveau d'un temps dans l'entreprise, j'en ai pas parlé mais par exemple nous on essaye dans la mesure du possible que les onboarding se fassent en présentiel parce que quand tu débarques complètement dans une entreprise, c'est quand même important de démarrer en ayant ce contact là. Moi j'encourage aussi dans la phase de recrutement d'avoir au moins un entretien avec le collaborateur concerné, le candidat concerné en présentiel, en physique, donc une fois encore c'est pas du tout blanc, pas du tout noir, je crois qu'il faut savoir s'adapter donc je te le disais, je pense que c'est important d'avoir un temps d'onboarding où tu as ce temps ensemble donc voilà donc ça peut être une question de temps ça peut être des questions de moments dans la vie d'une entreprise tu peux avoir des moments où tu as besoin de remettre les équipes toutes ensemble tu peux avoir en effet des problématiques propres à certaines équipes nous on parle beaucoup en ce moment de nos équipes commerciales parce que d'avoir une équipe commerciale qui est sur place ensemble, ça crée une émulation un peu différente.

  • Magaly

    Ça nécessite de l'énergie.

  • Stéphanie Fraise

    Voilà, tu crées une énergie, une émulation qui en effet est très propre au présentiel, qui est un peu plus compliqué à recréer en distanciel, où on est chacun derrière son ordinateur. Donc ça peut être des moments, ça peut être des équipes. Je pense que c'est là où il faut avoir de la flexibilité et de l'intelligence situationnelle, à partir du moment où il y a un sens, des arguments, une explication. qui permet de répondre à un besoin spécifique. J'en reviens à mon point de caler le problème que tu essayes de résoudre. Est-ce que le présentiel va être la bonne réponse et va en effet te permettre de résoudre ton problème ou pas ?

  • Magaly

    Est-ce que chez OpenClassrooms, vous avez investi spécifiquement dans l'accompagnement des managers pour la gestion d'équipes en mode hybride ? Parce que souvent, ce n'est pas le cas. Et donc, les managers se retrouvent un peu au cœur des plans divers et variés. Est-ce que chez Open Classroom, vous avez fait des choses ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors, oui et non. Et je vais te dire pourquoi oui et non. La première réponse, c'est non. C'est-à-dire que nous n'avons pas fait de formation spécifique au fait d'être en remote. Par contre, comme je te le disais tout à l'heure, mon point de vue, c'est que quand tu manages en distanciel, tu dois être exemplaire dans tes rituels managériaux. On a investi massivement dans la formation des managers. On a fait d'abord un truc très basique, c'est qu'on a écrit un modèle managérial. Ça veut dire quoi manager chez Openclassrooms ? Qu'est-ce qu'on entend de toi ? Donc on a défini un certain nombre de compétences, on a défini à quoi ressemblaient les comportements managériaux sur chacune des compétences, selon que tu es au niveau, on va dire basique, intermédiaire et plus haut niveau, pour qu'on soit extrêmement concret là-dessus. Et ensuite, on s'est associé avec un partenaire qui nous a accompagné dans la mise en œuvre d'une formation que nous avons fait en présentiel et en distanciel. On a testé les deux. On a fait deux sessions en présentiel d'une journée complète et une session en distanciel qui a duré une très grosse demi-journée sur laquelle on a eu une dynamique absolument incroyable. On a été les premiers surpris du niveau de dynamique qu'on a réussi à créer sur cette session à distance. On était quand même 60 ou 70 managers connectés. Et donc, qu'est-ce qu'on a fait au travers de cette formation ? On a formé nos managers aux rituels managériaux qu'on pense être primordiaux et absolument nécessaires d'ancrer pour justement être capables de gérer leur équipe à distance. Que ça soit, j'y reviens, dans des enjeux de performance, de développement de carrière, de santé mentale, de création du lien individuel et avec l'équipe, de redescente et de cascade d'informations, on attache aussi beaucoup d'importance à ça. Voilà, donc c'est pour ça que je te disais oui et non. Voilà.

  • Magaly

    Mais ça boucle avec ton propos de départ avec lequel je suis 100% d'accord, c'est-à-dire que finalement le télétravail a pointé nos carences organisationnelles dans nos entreprises, c'est-à-dire que ce qui tourne quand le manager au bout du bout va te taper sur l'épaule parce qu'il n'est pas loin ou va finir une nocturne parce qu'il faut terminer et qui ne fonctionne plus quand on est en télétravail, c'est juste parce que le cadre managérial n'était pas bien défini non plus. Merci pour cet exemple Stéphanie parce que c'est exactement ça, c'est-à-dire que finalement, le télétravail demande à ce qu'on manage, mais contrairement à ce qu'on a imaginé au XXe siècle, le présentiel l'aurait demandé aussi.

  • Stéphanie Fraise

    Le télétravail, il vient mettre la loupe sur ce que tu fais bien et ce que tu fais moins bien. C'est-à-dire qu'il va déformer, accentuer, ça rejoint le sujet de l'exigence dont je parlais tout à l'heure, il va venir accentuer ce qui marche ou ce qui ne marche pas. Maintenant, il faut être très clair, je l'ai un peu dit tout à l'heure, moi je ne crois pas que le télétravail puisse fonctionner partout. Ce n'est pas une recette miracle qui marche pour 100% des boîtes ou des postes. Il y a des postes dont l'activité requiert du présentiel, il y a des environnements, des organisations, des cultures qui ne sont pas propices au télétravail, parce que, pour que ça puisse fonctionner... Tu as tout un tas de prérequis. On vient de parler de la formation des managers, c'est un prérequis énorme. Il y a un autre prérequis dont on n'a pas encore beaucoup parlé qui est par exemple la culture de l'écrit. Parce que le présentiel te permet une énorme souplesse par rapport à ça. Parce qu'il y a beaucoup d'informel et beaucoup d'oral. Quand tu es en télétravail, en distanciel, tu ne peux pas. Donc en fait, tu as besoin d'avoir une culture de l'écrit, ce qui est assez contraignant par ailleurs. Mais ça t'oblige à documenter, il faut avoir les outils pour le faire, d'accord ? Il faut avoir des outils. Nous, par exemple, on travaille avec Notion, notamment, qui est notre base de connaissances. On utilise évidemment des outils de messagerie instantanée. Je pense que toutes les entreprises ont ça maintenant. Mais il faut que tu aies une gouvernance qui fonctionne. Il faut que tu aies des relevés de décision. Il faut que ces décisions, tu sois capable de garantir qu'elles sont cascadées correctement aux bonnes personnes. Il faut que tout le monde ait un instant T dans l'entreprise qui, auparavant, aurait peut-être eu accès de façon informel à ce débrief, à cette information sur cette décision. Là, il faut que tu t'assures que ça cascade. Si tu coches pas toutes ces cases-là avant et que tu ne t'es pas assuré avant que tes managers sont correctement formés, que tu as les bons outils, que tu as la bonne gouvernance, que tu as la bonne culture de l'écrit et que tout ça est capable de fonctionner efficacement, c'est sûr que c'est voué à l'échec.

  • Magaly

    Oui, mais tu l'as dit toi-même, tu as dit finalement le présentiel old-fashioned pouvait assurer que peut-être ça cascade et tout est dans le peut-être. C'est-à-dire que moi, j'ai un peu l'impression qu'on fantasme des entreprises qui, quand elles étaient en 100% présentiel, tout était fluide. Et combien de fois, toi et moi, on a pris une décision au détour d'un couloir, on a pris une décision, mais après coup, combien de fois on a raté une réunion et le relevé de décision n'était pas clair. Donc, moi, je trouve qu'il y a une espèce de, tu sais, le « c'était mieux avant ». Et alors que je trouve que tu le dis très bien, je t'en remercie, c'est que finalement, le travail hybride pointe que là où on pouvait être un peu amateur en organisation, maintenant, il faut que dans toutes les boîtes, on soit très professionnel sur l'information, sur la formation, sur les rituels. Et c'est positif, en fait.

  • Stéphanie Fraise

    Moi, je trouve ça, parce que je le vois comme une fois encore, une exigence, une excellence. Et c'est ce qu'on essaye de faire. Alors, c'est long. Je vais te dire, même nous qui sommes chez Open Classrooms, c'est une entreprise qui, historiquement, est en remote first. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que tous les salariés s'organisent comme ils veulent. On a des bureaux à Paris, ils viennent s'ils veulent. On invite, on fait en sorte de donner une expérience agréable au bureau, parce qu'évidemment, ça nous fait plaisir que les gens soient là. Mais on va devoir fonctionner en hybride, puisqu'on a une grosse partie de nos effectifs sont répartis partout en France. Accessoirement, on oublie souvent de dire que des entreprises peuvent avoir une activité internationale. Donc, je peux avoir un manager en France qui manage des équipes à l'étranger, on ne se pose pas la question là. On est dans du distanciel. D'accord, donc du coup, tu te retrouves dans une situation qui, par ailleurs, présente plein d'autres problèmes et de biais. C'est que tu vas créer un lien plus fort avec les gens que tu as sous la main, proche de toi. À l'inverse, tu vas avoir un lien beaucoup plus distant avec les autres. Donc, c'est important aussi de le considérer et de t'assurer que tu vas traiter tout le monde de façon extrêmement équitable et non biaisée par cette proximité, parce que c'est très vite fait. Et donc, oui, la réalité, c'est que c'est que des entreprises qui ont cette empreinte internationale fonctionne avec du distanciel, et donc s'assurer que tu as mis en place cette culture de l'écrit, des objectifs qui sont clairs, qui sont rigoureusement suivis, c'est très important, on est en plein dans le sujet du management par les objectifs versus le management par la présence, que tu as cette gouvernance qui fonctionne, il ne faut pas oublier les enjeux de santé mentale, on en a parlé tout à l'heure un peu rapidement, c'est quand même une réalité aussi, avec laquelle il faut être très lucide, c'est que tu peux de mon point de vue, avoir un peu plus de risques en matière de santé mentale, pour deux raisons. La première, c'est qu'on le sait, les environnements deviennent beaucoup plus poreux entre le pro et le perso. Donc tu as des gens qui ont plus de mal à avoir des garde-fous et une organisation saine, et à avoir un temps de travail dédié et un temps personnel dédié. Et de l'autre, tu as un peu plus de difficultés à capter des signaux faibles. Donc c'est là où les managers qui doivent voir leurs équipes idéalement toutes les semaines, avoir un one-on-one toutes les semaines, jouent un rôle extrêmement important parce que c'est eux qui vont être en capacité à détecter les signes faibles de quelqu'un qui commence à ne pas être bien. Donc ça, je pense que c'est quand même extrêmement important de le garder en tête et de l'inclure, nous c'est inclus dans notre modèle managérial, par exemple, ce sujet-là.

  • Magaly

    Oui, nous, dans notre règlement intérieur, on a mis l'obligation d'avoir la caméra ON pour toutes les visios. Parce que déjà, si tu vois les gens, Voilà, c'est pas parfait, mais de toute façon, rien n'est parfait. Mais déjà, si tu vois les gens, c'est mieux que si tu les vois pas. Les réunions, tu les vois pas, tu les entends pas. Sur des équipes de 8-10 personnes, tu peux vraiment passer à côté.

  • Stéphanie Fraise

    Bien sûr que tu peux passer à côté, c'est très important. Et il faut les aider, les managers, parce qu'ils sont pas forcément équipés pour ça non plus. On leur demande beaucoup. Moi, je dis souvent, les managers, ils ont quand même un rôle qui est difficile, parce que ils sont un peu cette cheville ouvrière entre l'entreprise, ses décisions, sa stratégie, ses priorités. Ils doivent emmener en collectif eux, qui est leur équipe, qui va contribuer à ses objectifs, qui va délivrer. Et ils doivent donner du sens à tout ça. Ils doivent assurer la redescente des infos, la remontée des infos du terrain. C'est un rôle qui n'est pas évident. On leur demande beaucoup de casquettes au manager.

  • Magaly

    J'ai une dernière question pour toi, Stéphanie. Faisons de la science-fiction. Imaginons que... On est quel jour ? On est lundi. Demain, tu arrives au bureau et tu fais un message en disant à partir de lundi prochain, chez OpenClassrooms, tout le monde revient en 100% présentiel. D'après toi, c'est quoi la réaction des équipes ? Qu'est-ce qui se passe, tu penses ?

  • Stéphanie Fraise

    Alors, nous, déjà, on a au moins la moitié de nos équipes qui ne sont pas à Paris et on n'a que des bureaux à Paris. Alors, on a un contrat avec des espaces de co-working qui permettent à nos collaborateurs de se retrouver. Donc, on a des espèces de mini-hubs régionaux où ils peuvent ponctuellement aller. Donc déjà, ça voudrait dire qu'il faudrait au préalable qu'on ait recréé des espaces de bureaux en région pour que nos collaborateurs puissent avoir un lieu. Parce que sinon, ça veut dire que tu as un traitement complètement inférieur, complètement injuste, dans lequel tu obliges tes Parisiens à revenir au bureau à Paris et les autres, non. Bon. Donc déjà, la première réaction, c'est ça. C'est de dire OK, c'est bien gentil, mais ça ne concerne que la moitié de l'entreprise. Je donne les chiffres un peu au hasard, mais on n'est pas très bien au premier moment. Deuxièmement, Tu viens renoncer à ce qui a constitué quasiment l'ADN de ton entreprise. Donc, tu romps une partie de ton contrat. Tu renonces à une partie de ton contrat parce que les collaborateurs sont venus chez OpenCastRooms, entre autres pour cette raison-là. Notre mission attire beaucoup nos collaborateurs, mais la flexibilité est un argument majeur. Qu'est-ce qui se passe ? Tu génères beaucoup d'insatisfaction, c'est une évidence. Ton NPS chute, voilà. Est-ce que les gens s'en vont ? Je n'en sais rien. C'est ça la question que tu pourrais assez légitimement te poser, c'est de te dire « Ok, est-ce que tu as créé beaucoup d'insatisfaction ? Tu as créé une perte de confiance ? » C'est déjà énorme, je pense, d'un point de vue de l'engagement.

  • Magaly

    Logiquement une altération de votre culture interne.

  • Stéphanie Fraise

    Voilà, et donc la question c'est quel est l'impact de ça sur leur capacité à être suffisamment engagée pour délivrer, être motivé dans leur quotidien et atteindre les objectifs que tu leur donnes. Je pense que c'est très chahuté pendant un certain temps. Est-ce que tu réussis à reconstruire là-dessus, à repartir suffisamment ? Je ne sais pas. Est-ce que tu crées un churn et un taux de départ important ? Je ne sais pas.

  • Magaly

    Bon, écoute, de toute façon, on ne se le souhaite pas, c'était la science-fiction, mais je pense que l'impact sur la culture est forcément réel et je le vois. La seule fois où je l'ai envisagé dans mon équipe, mon équipe manageriale complète m'a dit « on est venu ici pour le télétravail ». Alors, ils n'ont pas dit qu'ils repartaient, ils ont dit « on est venu ici pour le télétravail ». Donc, oui, tout à fait. Merci beaucoup.

  • Stéphanie Fraise

    Non, j'allais dire dans un paysage où le télétravail est un avantage qui petit à petit est en train d'être remis en cause par un certain nombre d'entreprises, il est évident que le fait de le maintenir va devenir pour le coup un avantage compétitif négligeable. Mais une fois encore, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas faire attention et se donner les clés de succès telles qu'on les a décrites. Mais je pense que ça va devenir un avantage compétitif.

  • Magaly

    Ça sera la conclusion, c'est que le télétravail, ça demande du travail.

  • Stéphanie Fraise

    Merci, Magaly..

  • Magaly

    Merci. Voilà, vous l'avez compris, le télétravail, ça se travaille. Et les plantes qui naissent autour du télétravail ne sont juste que, finalement, la prise de conscience de ce qui ne fonctionne pas toujours dans nos organisations. Oui, il faut manager, oui, il faut donner des objectifs, oui, il faut faire cascader l'information. Et ça, ça n'est pas vrai quand on télétravaille, c'est toujours vrai et ça mérite d'être travaillé.

Share

Embed

You may also like