- Magaly
Si l'IA vous fait peur, un peu, beaucoup, passionnément, si vous vous dites qu'elle peut peut-être vous remplacer ou si vous vous demandez encore à quoi ça peut bien vous servir en tant qu'RH, alors cet épisode est fait pour vous, pour comprendre de façon simple et très explicite qu'on a tous un peu peur, on ne sait pas tous très bien faire, mais qu'il y a quand même des solutions pour être aidé. Bonne écoute ! Bonjour Lobna !
- Lobna Calleja
Bonjour Magaly !
- Magaly
Lobna, pour commencer, est-ce que tu veux bien raconter ton parcours qui est très riche pour nos auditrices et nos auditeurs ?
- Lobna Calleja
Avec grand plaisir. Et la bonne nouvelle, c'est que j'ai appris à le pitcher assez rapidement. Je m'appelle Lobna, je suis DRH, ex-DRH depuis peu. Et en fait, j'ai exercé la fonction de DRH pendant un peu plus de 15 ans. Et ce qui caractérise mon parcours, que je vais pitcher en quatre items importants, en fait, le premier, c'est que j'ai un parcours de généraliste, puisque j'ai toujours occupé le spectre RH en mode 360 degrés. D'abord, à des niveaux très opérationnels, puis petit à petit, en prenant des fonctions de direction, tout simplement, avec toujours des opérations et de la stratégie. Ça, pour moi, c'est important. Le deuxième élément fondateur de mon parcours, c'est le côté plurisectoriel. Ça se fait un petit peu par la force des choses, mais j'ai eu la chance de travailler dans le retail chez Geox et Calvin Klein, dans les cosmétiques, chez Revlon. J'ai travaillé dans la restauration pour le groupe Compass, puis dans la tech et la com chez Ogilvy Paris, Schoolab et Mappy.com, pour ceux qui se souviennent. J'étais aux manettes RH à l'époque où Mappy a explosé. Donc, le côté plurisectoriel, pour moi, est important, puisque ça me permet d'avoir une vision, là encore, 360 de la fonction. Le troisième élément important de mon parcours, ce sont les typologies d'entreprise. J'ai eu la chance de travailler dans des grands groupes, dans des PME, dans des startups, dans des assos, dans un syndicat. Donc, assez intéressant de voir l'approche RH selon la typologie d'entreprise. Et enfin, pour finir, ce qui me caractérise le plus et ce qui caractérise le plus mon parcours, c'est toute la partie liée à l'innovation et à la créativité que j'intègre vraiment dans tout ce que je fais d'un point de vue RH. Je l'ai fait longtemps de façon inconsciente. Et en 2018, j'ai eu une révélation. J'y reviendrai plus tard. Mais voilà, donc 2018 était un peu l'année de la concrétisation et de ma prise de conscience de mon côté créatif que j'ai mis du temps à assumer. Et c'est aussi ce qui m'a menée, à côté de la créativité et de l'innovation, à monter ma boîte et accompagner les équipes RH et les entreprises sur leurs questions liées à l'intelligence artificielle. Parce que quoi de plus créatif et de plus innovant aujourd'hui que l'IA ? Je ne sais pas trop.
- Magaly
Alors on reviendra à ce créatif et innovant, parce qu'à mon avis, tous ceux qui écoutent ne partagent pas forcément. Alors, innovant, bien sûr, créatif, on va réexpliquer. Mais comment une DRH décide de se consacrer à l'IA ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
- Lobna Calleja
Alors, je n'ai pas décidé, j'ai subi au départ et décidé de faire de cette menace une opportunité. En fait, j'ai toujours eu un petit peu l'âme entrepreneuriale et je me suis dit que je me lancerais quand j'aurais un vrai élément différenciant. Ma créativité, ma sensibilité à l'innovation, je trouvais que ce n'était pas suffisant. Et là, l'IA était un vrai révélateur pour moi. Début 2023, je suis DRH d'une grosse agence de com qui s'appelle Ogilvy Paris. Et je découvre, je ne dirais pas par hasard, mais presque depuis six mois, que j'ai beaucoup de personnes au sein de l'agence qui utilisent les IA génératives. C'est arrivé par l'un de nos directeurs de création, très geek, qui a découvert Midjourney très, très tôt. Et il a commencé à utiliser, il s'est rendu compte que c'était quand même assez puissant comme outil. Il en a parlé à des collègues, il en a parlé à son manager et ça a fait une espèce d'effet boule de neige. Donc beaucoup de personnes des équipes créatives utilisaient Midjourney. Et quand ChatGPT est arrivé, ils se sont dit tiens, ça peut aussi intéresser les équipes Social, et d'autres équipes. Ils en ont parlé, ils ont fait des lunch and learn, les choses se sont faites de façon très informelle entre eux. Et en fait, ça arrivait sur mon bureau, on était début 2023, et on m'a dit, tiens, on a quand même un petit sujet. On a les équipes qui utilisent un outil qui est super, mais quid du RGPD, quid de la propriété intellectuelle, à qui appartiennent en gros les visuels concrets, à nous, aux clients, aux équipes. Et pour finir, et là, ce n'était pas une question qui m'était posée à moi, mais que l'on s'est posée collectivement au sein du COMEX, c'est que ces outils remettaient clairement en question notre business model et l'info est très vite remontée au groupe qui a pris les choses très au sérieux et très rapidement le groupe nous a accompagné, à nous filiales mais à l'ensemble du groupe, dans l'adoption des IA génératives de façon très sécurisée en investissant dans un outil interne. Donc très rapidement on a pu mettre en place plein de choses poussées par le groupe de façon assez macro mais aussi de façon plus locale au sein de l'agence où on a organisé des lunch and learn, des conférences, des partages de cas d'usage, de best practices. Et quelque chose dont je parle souvent, parce que pour le coup, on parle souvent des choses qui marchent, mais pas des choses qui ne marchent pas. Je vais parler d'un gros flop. On a recruté un super consultant qui était brillant, un consultant IA qui travaillait sur nos missions clients. Et on voulait qu'il dégage un petit peu de temps pour accompagner les fonctions de support parce qu'on voulait que les fonctions support soient au même niveau d'information et d'acculturation que les autres. Sauf que je me suis rendue compte très vite de la limite de cet accompagnement par des professionnels qui maîtrisent l'IA, mais qui ne maîtrisent pas les métiers. Et c'est là que je me suis dit, un, ma montée en compétences, elle va être difficile. J'ai 45 ans, je ne suis pas geek, j'ai peu de bandes passantes et ça me fait peur. Et néanmoins, toutes les équipes utilisent ces outils, je ne peux pas m'offrir le luxe de ne pas y aller. Et j'ai trouvé que c'était très compliqué en tant que DRH d'y aller, mais je n'ai pas eu le choix. Donc, j'ai fait mon petit chemin et c'est tout simplement ce qui m'a amenée petit à petit à me mettre à mon compte en me disant, il y a un vrai sujet, il y a d'autres DRH qui vont se retrouver dans les mêmes difficultés que moi. Et comme j'ai déjà un petit peu essuyé les plâtres, je vais être ravie de les accompagner.
- Magaly
Tu as prononcé un mot que tout le monde ne prononce pas et qui pourtant est dans beaucoup de têtes, et je le vois moi y compris dans mon équipe, tu as dit, et ça me fait peur. Qu'est-ce qui te faisait peur et comment tu as dépassé cette peur ?
- Lobna Calleja
Alors le comment je l'ai dépassé je pense que c'est l'instinct de survie j'ai pas eu le choix c'était déjà dans mon entreprise, je peux pas me dire DRH créative et innovante et ne pas m'approprier ce type de solution et je peux pas non plus être en décalage par rapport à des équipes dans lesquelles on a beaucoup de geeks, beaucoup de jeunes techs. Donc il faut accompagner une culture et il faut incarner cette culture. Donc j'ai dû m'y mettre un peu par la force des choses. Et ça me faisait peur parce qu'on était au tout début, on était début 2023, il y avait beaucoup beaucoup moins de littérature qu'aujourd'hui. Les cas d'usages il a fallu se les créer, comprendre un petit peu ce que c'est, comment ça marche, les risques en termes de RGPD. les risques en termes de biais. On se pose mille et une questions et quand on est DRH, on ne se donne pas le droit à l'erreur. Donc on se dit, si j'utilise un outil et que je me plante, les conséquences peuvent être plus, je ne vais pas dire dramatiques parce que ça ne fait pas couler la boîte non plus, mais ça peut quand même être gênant. Et j'avais peur parce que j'avais 45 ans et que j'avais peur d'être dépassée par d'autres RH plus jeunes, plus geeks qui se seraient appropriés cette solution, ils auraient fait mon job mieux que moi.
- Magaly
Je vois.
- Lobna Calleja
C'est la peur qui m'a fait y aller. Et la peur est toujours là aujourd'hui. Je ne peux pas, et je suis très transparente dessus, sauf que maintenant, je sais de quoi j'ai peur. Et au moins, vous savez, quand on a peur, on entend un bruit, alors est-ce qu'on va avoir, on ouvre la porte ou pas ? Je n'ai pas eu le choix, donc j'ai ouvert la porte, mais au moins, je sais de quoi j'ai peur. Et ça me permet aussi d'agir en conséquence.
- Magaly
Quand tu dis « je sais de quoi j'ai peur », ça veut dire que tu sais ce qu'il y a derrière la porte, ou tu sais ce qui te fait peur à toi, ou les deux.
- Lobna Calleja
Un peu les deux. Maintenant que je sais ce qu'il y a derrière la porte, ça me permet aussi d'être un peu plus sereine parce que j'ai identifié mon ennemi ou j'ai identifié la bête. Donc, je sais quelles sont mes armes. Et mes armes, c'est tout simplement mon libre arbitre. C'est la capacité que j'ai à ne pas prendre pour argent comptant ce qu'une IA générative va me proposer. C'est le fait de me dire que son travail, ce que va me proposer une IA générative, dépend de ce que moi, je vais lui demander en entrée. J'ai la main dessus, c'est ça que je veux dire donc j'ai des arguments pour maîtriser la bête, voilà donc si je maîtrise mon job je sais que je vais pouvoir être critique à l'égard de ce qu'elle me propose parce que j'ai l'expertise métier, l'IA va pas me remplacer tout de suite, elle me remplacera peut-être dans quelques années mais ça me laisse encore un petit peu de temps.
- Magaly
Et alors justement, t'as parlé de biais, je sais que tu parles souvent d'éthique et d'IA ... Avant qu'on commence à parler des use cases pour les DRH et ce que ça peut leur apporter, qu'est-ce que tu peux nous recommander pour que notre utilisation de l'IA soit éthique ? Alors éthique c'est un grand mot, mais en tout cas toi tu fais quoi pour te dire que ce que tu fais garde son sens et garde une contribution à un impact positif au monde ?
- Lobna Calleja
C'est une grande question et ton podcast, il dure 20 minutes, Magaly.
- Magaly
C'est pour ça que j'ai enlevé éthique, j'ai essayé de restreindre un peu. Dit autrement, c'est comment tu utilises l'IA, toi, en te disant, OK, je suis alignée et cohérente, congruente, j'aime bien ce mot, je suis congruente avec ce que je fais. Ça tient à quoi ?
- Lobna Calleja
En fait, il y a beaucoup de choses, mais je vais commencer par l'essentiel, c'est que... Déjà, je sais que ça consomme beaucoup les ressources de la planète, donc je choisis là où j'utilise l'IA et là où je ne l'utilise pas l'IA. Quand on regarde la chaîne de valeur RH depuis le sourcing jusqu'à l'offboarding, l'ensemble de la chaîne de valeur RH, et pareil pour tous les autres métiers, l'ensemble de la chaîne de valeur RH est concernée par l'intégration de l'IA. Après, l'idée, ce n'est pas d'en mettre partout. Il y a des tâches qui sont, ce que j'appelle des tâches iaisables, ce sont des tâches qui sont récurrentes, qui prennent du temps, qui ont peu de valeur ajoutée. C'est celles-là dont on peut se délester au profit de tâches plus centrées vers nos collaborateurs, les candidats, l'extérieur. Donc déjà, il faut se dire, je n'en mets pas partout. Et quand j'en mets, et ça pour moi, c'est un fondamental, la question que je me pose, ce n'est pas juste là où ça va me faire gagner du temps. Moi, je me dis, il faut que ça me fasse gagner du temps, certes, de la productivité, mais je veux que ça augmente mon efficacité opérationnelle et je veux que ça crée de la valeur pour moi en tant qu'utilisateur, mais aussi pour mes clients internes, que ce soit mes managers, mes clients, mes candidats, mon comex. Donc le côté productiviste de l'IA, moi, me fait peur si on le décorrèle de la création de valeur. Et on aborde souvent la question de l'IA par l'outil et par la productivité. Et moi, en tant que collaborateur, on parle de productivité, je ne me sens pas concernée. En revanche, on me parle du développement de mon employabilité, de mon efficacité opérationnelle. Je vais pouvoir faire mon travail, le faire mieux, plus vite, avec plus d'impact et moins d'effort. Là, ça me parle et j'ai envie d'y aller. En revanche, on me dit que je vais être productive. Honnêtement, je ne suis pas sûre que ce soit ça mon driver. Donc, utiliser l'IA, oui, mais continuer à utiliser effectivement Google, limiter l'utilisation des vidéos, des images. En ce moment, alors j'ai dit que je pars en guerre, ce n'est pas vrai, mais le starter pack de LinkedIn, je trouve ça rigolo. Mais c'est bien quand on est premier. Moi, le premier que j'ai vu, c'est Aurélien Fenard et j'ai trouvé ça génial. Bon, depuis, on a eu 50. Voilà, c'est bien quand on est le premier. Après, à un moment donné, ça suffit, ça consomme. Je veux bien consommer les ressources de la planète, mais il faut que ça apporte quelque chose.
- Magaly
Oui, je comprends.
- Lobna Calleja
Voilà, juste pour divertir, moi, ça me fait un peu mal au cœur.
- Magaly
Oui, je suis d'accord. Hier, je discutais avec mon fils et on avait une question, on n'avait pas la réponse, mais un truc bête. Et il m'a dit, je vais demander à ChatGPT. Et je lui ai dit, non, non, non, tu demandes à Google, mais pas à ChatGPT. Donc, il m'a dit, pourquoi ? Donc, on est allé comparer. Et effectivement, alors de mémoire, il y a quatre fois plus de consommation sur ChatGPT que sur Google, qui est déjà… Et donc, oui, on a besoin, y compris dans nos entourages et auprès de nos jeunes, de rappeler que ce n'est pas juste fun. et qu'il faut faire attention. Tu as parlé de la chaîne de valeur de RH, donc du sourcing jusqu'à l'offboarding. Et après, on parlera de comment tu accompagnes tes clients RH sur ces sujets-là. Où est-ce que tu penses qu'il y a le plus d'apports sur cette chaîne de valeur ?
- Lobna Calleja
Comme je te disais tout à l'heure, je pense que les tâches qui sont récurrentes, qui sont répétitives et sans valeur ajoutée, alors après, tout est porteur à confusion, débat, mais c'est assumé. Quand on parle de tri de CV, je pense que l'IA est un vrai plus parce que bien souvent, un humain, quel qu'il soit, ne peut pas aller étudier tous les CV. Après, là où il faut faire le... Là, vous faites vigilant, mais on en parlera peut-être tout à l'heure. C'est sûr, effectivement, les biais, la discrimination, toutes ces questions-là. Ou l'IA Act apporte de vraies réponses. Donc, je veux bien prendre deux minutes après, si tu veux, pour en parler. Mais voilà, la présélection de CV peut être un vrai sujet. Donc, sur la partie, le matching de CV avec une offre, ça, ce n'est pas nouveau. Les réponses automatiques aux candidats, là encore, ce n'est pas nouveau. Mais là, on peut faire des choses un peu plus… plus personnalisé. Donc là on monte quand même d'un cran et on arrête les candidatures qui restent sans réponse. Sur la partie administration du personnel, on peut faire des contrats en trois secondes, pareil pour les avenants, on peut rédiger des lettres, des attestations. Il y a plein de choses qu'on peut automatiser avec ou sans IA générative. Il y a des choses qui ne sont pas nouvelles. L'IA est juste un accélérateur mais l'automatisation il y a déjà. plein de choses qui se font sans IA. C'est aussi important de le rappeler. On peut aussi faire la partie formation, toute la partie pédagogique, créer des courses, des use cases. Ce sont des choses auxquelles on ne pense pas. Moi, ce que je trouve assez puissant, c'est la création d'assistants IA qui sont personnalisés. Et là, pour moi, c'est game changer. Ça nécessite juste un petit peu de technicité pour se créer ses propres assistants et je ne parle pas d'agents volontairement, mais quand vous avez des assistants IA qui répondent à 80% des questions de vos collaborateurs ou aux questions de niveau 1 posées par les candidats, c'est de la charge mentale en moins, c'est de l'efficacité en plus. Ça, pour moi, c'est Game Changer. Et après, on peut, en tant que RH, recruteur, gestionnaire paie, se créer ses propres assistants en fonction des tâches qui sont récurrentes, en fait. Si par exemple dans le podcast dont on parlait tout à l'heure que j'ai réalisé avec Perrine Vincey Soulier, elle parle étape par étape de comment faire sa veille le temps qu'on prend aujourd'hui à faire de la veille ça c'est game changer pour moi c'est un use case après ça nécessite un petit peu de technicité comme je disais pour paramétrer son assistant mais on peut tous le faire. Il suffit d'avoir les bons tips pour être sûr qu'il ne va pas nous inventer des jurisprudences ou des choses comme ça. Mais ça, c'est un vrai use case. Et là encore, on peut en mettre partout. Après, il faut en mettre là où ça crée de la valeur et pas que là où il y a des gains de productivité.
- Magaly
On reviendra sur les assistants. Oui, je veux bien que tu nous parles un petit peu des biais, de comment on utilise l'IA et en se disant qu'on n'est pas en train de reproduire un monde qui n'est pas forcément le monde qui nous correspondait.
- Lobna Calleja
Alors, si j'avais une réponse et que ma réponse était satisfaisante, je crois que ce serait beaucoup plus facile pour tout le monde. Alors, les biais, ils sont là. Il faut juste en avoir conscience. Alors, on crie à qui veut bien l'entendre que l'IA a des biais, etc. Mais nous, humains, nous, recruteurs, on a aussi des biais. Donc, est-ce que l'IA accentue, pérennise ces biais ? Je ne sais pas. En tout cas, ils sont là. Et malgré tout, le recrutement, qu'on le veuille ou non, on peut standardiser, on peut enlever toute la partie subjective qu'on veut, les biais seront toujours là. Après, il faut en avoir conscience. Là où je suis relativement rassurée, et je m'y rassure entre guillemets, c'est que l'IA Act vient mettre vraiment du cadre dans les outils qu'on utilise qui vont permettre de sécuriser un petit peu plus les décisions qui sont impactées, enfin, les décisions pour lesquelles on cède d'outils d'IA. Quand on parle de mobilité, par exemple, ou de gestion des compétences, pour arrêter l'exemple du recrutement parce qu'on n'en a trop entendu parler, on a des solutions d'IA aujourd'hui qui nous aident à identifier les compétences, identifier les éventuelles promotions, etc. Là où c'est dangereux, c'est quand c'est l'IA qui propose des promotions à des collaborateurs. Non, l'IA doit nous prémâcher le travail, grâce à la data qui est propre, qui est claire, et la data que va nous fournir l'IA, enfin que l'on va fournir à l'IA mais qu'elle va retravailler, va nous permettre de prendre des décisions. La décision finale doit toujours appartenir à un humain. Si un jour on m'avait dit que je parlerais d'humains en parlant de RH, ça m'aurait fait doucement sourire. Mais voilà, l'IA Act met du cadre. Elle va imposer des normes à nos prestataires et à ceux en interne qui produisent ces solutions, si on fait ça en interne. Donc elle va imposer des normes avec des garanties, avec de la documentation à fournir qui vont concerner les données d'entraînement, les algorithmes. Et ce sont des garanties que nous, recruteurs et RH, on devra leur demander, et ce qui va aussi sécuriser un petit peu plus, éviter les biais, la discrimination, etc. De là à dire que l'IA Act va résoudre le problème, je ne sais pas. En tout cas, elle met un cadre qui nous contraint tous, mais dans l'intérêt de tous également.
- Magaly
Oui, bien sûr. Donc, tu nous as dit, je n'appelle pas ça un agent, j'appelle ça un assistant. Donc, je veux bien que tu nous dises quelle différence tu fais, et surtout... J'aimerais que tu nous dises comment est-ce qu'un DRH peut commencer ? Et je sais que toi, entre autres, tu proposes des solutions. Donc, est-ce que tu peux nous en dire un peu plus pour les premiers pas sécurisés dans ce nouvel univers ? Donc, agent, assistant et comment je commence ?
- Lobna Calleja
Alors, on a beaucoup confondu chatbot, assistant, agent. Je ne reviens pas sur le chatbot, mais il y a une vraie différence qu'il faut avoir en tête aujourd'hui entre l'assistant IA et l'agent IA. L'assistant, c'est un chatbot plus plus plus, d'accord, qui est paramétré et pour lequel on a créé une demande spécifique par rapport à un besoin et dans lequel on peut mettre de la donnée, c'est-à-dire on peut aller mettre nos ressources, nos bases documentaires, nos accords, notre règlement intérieur, nos trames diverses et variées, et il va nous apporter des réponses très personnalisées par rapport à notre besoin et notre contexte mais il n'agit pas, il nous dit comment faire. La différence avec un agent, c'est que l'agent, et ça arrive tout juste, là il y a des tests, ce n'est pas encore là, mais l'agent va faire les choses pour nous. Pour donner un exemple qui n'est pas RH, mais qui est l'exemple le plus parlant, aujourd'hui, si on demande à un assistant ou à une IA de nous dire comment réserver un billet de train, elle va nous dire, tu vas sur tel site, tu choisis la date, le lieu, la carte, etc. Et c'est tout. Tu vas, toi, après, aller faire le travail. L'agent, tu vas lui dire, je veux réserver un billet pour aller à tel endroit, à telle date, tout seul. L'agent va aller sur le site, va ouvrir le site de la SNCF, va aller choisir des dates, des options. Il va peut-être te solliciter en te disant, tiens, j'ai trouvé deux, trois options, laquelle tu choisis, tu dis, je veux ça. Il va aller retourner sur le site de la SNCF. S'il a tes coordonnées bancaires, l'agent va tout naturellement saisir tes coordonnées bancaires et acheter le billet à ta place. Donc, l'assistant IA et l'IA telle qu'on la connaît aujourd'hui nous donne des idées, nous dit comment faire. Et l'agent va plus loin, fait les choses pour nous. Et c'est là où je dis que ça me fait encore plus peur. Mais on va refermer la parenthèse. Donc ça, c'est le premier, la différence entre l'assistant et l'agent. C'est un gros raccourci. Alors, les techos qui m'écoutent risquent de faire des bonds, mais c'est un raccourci. Néanmoins, c'est ça. Et en ce qui concerne le… Comment mettre les pieds à l'étrier quand on est DRH ? Moi, j'ai trouvé que c'était très, très compliqué. Et vraiment, j'ai souffert parce qu'on était au tout début. Je n'ai pas trouvé, au tout début de ma recherche, j'avais besoin de quelqu'un qui comprenne mon métier et qui maîtrise les IA pour que ce soit fluide et qu'il connaisse mes contraintes. Je n'ai pas trouvé ça, donc j'ai commencé par me former et j'ai été super bien accompagnée par AI Forward. C'est un organisme de formation qui fait de la culturation à l'IA. Et quand j'ai voulu aller un petit peu plus loin, j'ai regardé beaucoup de tutos, j'ai testé plein de choses. Et petit à petit, des RH sont arrivés, comme Pierre Monclos, comme j'ai rencontré Perrine Vincey Soulier, qui fait aussi partie des premiers DRH à s'être approprié cette techno. J'ai suivi un parcours certifiant, IARH. Plus récemment, je me suis formée pour être formateur en IA. J'ai eu besoin d'avoir des garanties en disant, là, c'est bon, tu as le niveau, tu es sûre. Mais la passerelle entre IA et IA appliquée aux RH, elle n'a pas été ça. Et c'est aussi ce que je propose aujourd'hui, où j'ai créé une formation sur mesure, donc avec Perrine Vincey Soulier, qui est une ancienne DRH de filiale de chez Free. On a vraiment créé un bootcamp de deux jours, pensé par les RH pour les RH et les avocats, les juristes et les métiers connexes. Et en fait, on part sur deux jours et on commence par le niveau zéro. Et très vite, on monte en puissance. On aborde beaucoup de sujets théoriques. La transfo, les enjeux pour les RH, les audits métiers, l'IA, les risques, etc. Et on aborde aussi beaucoup les questions opérationnelles par les cas d'usages, mais surtout par des cas d'usages de nos participants. Nous, on les accompagne là où eux ont envie d'aller. Et ils partent du J1, où ils ont des connaissances, tout le monde n'est pas complètement néophyte. Donc, on aligne tout le monde sur le J1 et le niveau 2, J2, ils repartent de là, ils ont créé leurs assistants, personnalisés à leurs besoins et là, on a eu la dernière session mercredi et jeudi dernier. On n'arrête pas de recevoir des petits messages et on est en train de tester des choses et tout et c'est juste génial et ça me conforte dans mon parti pris qu'il faut connaître les métiers pour vraiment pouvoir accompagner les métiers. Je n'irai pas accompagner des équipes marketing ou financière, par exemple. Voilà.
- Magaly
Merci beaucoup, Lobna. Pour ceux qui écoutent Lobna Calleja, vous la trouvez sur LinkedIn où elle est très active. Donc, n'hésitez pas, si vous êtes intéressé par son bootcamp, à prendre contact avec elle. Elle n'en a pas parlé non plus, mais Lobna a un podcast qui est vraiment spécialisé de façon très pédagogique au sujet de l'IA et dont le titre est "Besoin de rien, envie d'IA" , c'est tout un programme donc n'hésitez pas à aller l'écouter vous trouverez le lien en dessous et je vous dis à bientôt, merci Lobna.
- Lobna Calleja
Merci beaucoup Magaly pour l'invitation.
- Magaly
Voilà, l'IA en fait quand on sait ce qu'il y a derrière la porte ça fait moins peur et quand on s'organise et qu'on se fait aider pour passer derrière la porte et commencer à pratiquer parce qu'on parle de pratique et bien les choses changent la peur peut être toujours là. Mais la peur n'évite pas le danger, n'est-ce pas ? Alors, il va falloir y aller.