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#2 Assumer sa personnalité et revendiquer sa place à travers le vêtement, avec Emmanuel Diela Nkita, Danseur Classique (Opéra de la Monnaie) cover
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Des Habits et Vous - Le Podcast qui effeuille les looks des créatifs

#2 Assumer sa personnalité et revendiquer sa place à travers le vêtement, avec Emmanuel Diela Nkita, Danseur Classique (Opéra de la Monnaie)

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57min |12/05/2024
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#2 Assumer sa personnalité et revendiquer sa place à travers le vêtement, avec Emmanuel Diela Nkita, Danseur Classique (Opéra de la Monnaie)

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57min |12/05/2024
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Description

Pour ce deuxième épisode, je t’emmène à la rencontre d'Emmanuel Diela Nkita, un danseur classique afro-descendant aux racines congolaises qui a su s'imposer sur la scène artistique et créative afropéenne bruxelloise.


Né à Bruxelles avec un métissage culturel profond, Emmanuel est un danseur complet, maîtrisant aussi bien le classique que le contemporain, le moderne et le néoclassique.


Au cours de notre échange, on explore la relation intime entre les vêtements et l'identité personnelle.

À travers ses choix vestimentaires, il exprime son humeur, ses émotions et son état d'esprit. Les vêtements sont pour lui une seconde peau, un reflet de son intérieur et un moyen de revendiquer sa place dans le monde.


Il raconte comment ses vêtements, choisis avec soin, reflètent son parcours de vie, ses origines africaines et son expérience dans le milieu de la danse classique, souvent dominé par des standards esthétiques éloignés de sa réalité de jeune homme noir.


Sans langue de bois, Emmanuel partage son histoire, le racisme subi en école de danse, l’affirmation de son identité à travers les vêtements qu’il porte et comment il se positionne en tant que modèle pour inspirer les générations afro-descendantes futures à oser.


Belle écoute 🎧

Samia


-

Vous pouvez retrouver Emmanuel Diela Nkita sur Instagram


-

En attendant de nous retrouver pour un prochain épisode, je t’invite invite à t’abonner au podcast et à laisser 5 étoiles et un mot doux sur ta plateforme d’écoute préférée 💌


Si tu souhaites continuer la discussion et découvrir les coulisses de DHV, retrouve-moi au quotidien sur Instagram à @samiabouhjar


👗 Pour aller plus loin et découvrir mes prestations de Directrice Artistique, Styliste et Costumière pour la Télévision et le monde du Spectacle, rendez-vous sur https://samiabouhjar.com


Des bises,

Samia


-

Crédits :

Production & Présentation : Samia Bouhjar.

Montage et mixage : Alice des Belles Fréquences.

Consulting et coordination : Laëtitia, Podcast Manager.

Direction Artistique : Samia Bouhjar, Amélie Breuil et Jennifer Boruchowitch.

Musique originale de Maéva Fiston.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    S'habiller ou ne pas s'habiller, ça dit quelque chose de chaque personne.

  • Speaker #1

    Déshabillez-vous.

  • Speaker #0

    H.V.

  • Speaker #1

    Déshabillez-vous.

  • Speaker #0

    Quand t'es bien habillé, que tu te trouves frais ou fraîche quand tu te regardes, et bien en fait, ça te permet de sécréter des endorphines. Déshabillez-vous. Salut, moi c'est Samia Boujard et tu t'apprêtes à écouter Déshabillez-vous avec Emmanuel Diela Hitta. Salut Manu.

  • Speaker #1

    Salut.

  • Speaker #0

    Ça va ?

  • Speaker #1

    Ça va très bien et toi ? Bien.

  • Speaker #0

    On ne se connaît pas beaucoup. Est-ce que tu veux que je te présente du peu que je sais de toi ou tu te présentes toi-même ?

  • Speaker #1

    Ah bah tu peux, ça m'intéresse. Ok.

  • Speaker #0

    De voir un petit peu. Et tu complèteras ?

  • Speaker #1

    Et je compléterai, oui.

  • Speaker #0

    Ok. Alors, Emmanuel Diela Nkita, danseur classique à l'Opéra de la Monnaie, jeune homme afro-descendant dont les parents sont originaires du Congo. Donc un jeune homme noir, tu es très grand, tu es très beau, tu as fait du mannequinat, tu fréquentes la scène artistique et créative afropéenne bruxelloise. Voilà, c'est tout ce que je sais de toi, de manière plus ou moins sûre. Le reste, je te laisse compléter. Voilà,

  • Speaker #1

    donc oui, effectivement, je suis danseur, donc j'ai une formation classique. Mais je n'avais pas seulement du classique, je fais aussi du contemporain, du moderne, du néoclassique. Je fais aussi du commercial, puis j'enseigne aussi la danse. Et en ce moment, je suis effectivement sur une production à l'Opéra de la Monnaie. Là, c'est une chorégraphie de l'ordre de la danse contemporaine dans une production qui s'appelle Das Rheingold, qui est mise en scène par Romeo Castellucci et chorégraphiée par une chorégraphe contemporaine, Cindy Van Acker. Et pour les détails concernant d'où je viens, en termes... D'origine, oui, je viens du Congo et en détail de la région du Kassai, du Kassai occidental.

  • Speaker #0

    Tu es né là-bas ?

  • Speaker #1

    Je suis né ici à Bruxelles. Donc j'ai ce métissage culturel, mais je suis déjà parti au Congo une fois quand j'avais 6 ans, une fois quand j'avais 12 ans. Donc oui, j'ai ce métissage culturel en moi.

  • Speaker #0

    Ok. On va parler de toi plus en détail et plus profondément au travers de tes habits. C'est mon sujet de prédilection, c'est ce qui me passionne dans la vie, c'est les habits et ce que ça raconte sur les gens. Donc, on va parler de ça ensemble. Ma première question, c'est d'où vient tout ce que tu portes aujourd'hui ? Alors, je vais décrire parce qu'on n'a pas de vidéo. On aura quelques photos qui vont... Illustrer notre rencontre d'aujourd'hui, tu portes un pull en laine côtelée, vert sapin, une ceinture en coton tressé, un pantalon vintage si je ne me trompe pas, en laine, une couleur que je qualifierais de grège, tu portes des chaussures en cuir, c'est des bottines, des bottines en cuir. Elles sont complètement en cuir, même la semelle est cousue, dont j'ignore la marque, mais en tout cas, ça a l'air d'être une très belle façon.

  • Speaker #1

    Haechung.

  • Speaker #0

    Haechung, je ne connais pas du tout. Pourquoi ce look aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Pourquoi ce look aujourd'hui ? Alors déjà, parce qu'il fait froid.

  • Speaker #0

    Ça explique la laine.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, parce qu'il fait froid, parce qu'il pleut. Et aussi pour le côté, déjà de pratique, mais aussi pour le côté confortable. Oui, confort et pratique. Esthétique, oui, d'une certaine manière. Apprêté, désapprêté, si on peut dire ça comme ça.

  • Speaker #0

    J'aime bien cette manière de dire apprêté, désapprêté, parce que je te trouve particulièrement bien mis, bien habillé, parce que les couleurs vont bien ensemble, parce que ça te donne quand même une belle allure. Quand tu choisis tes vêtements, est-ce que tu les choisis ? Tu y réfléchis la veille, par exemple, quand tu sais que tu dois aller quelque part rencontrer quelqu'un ? Ou est-ce que c'est vraiment quelque chose que tu choisis sur le moment même ? Donc le matin, quand tu dois aller quelque part, ou l'après-midi, ou le soir, peu importe le moment ?

  • Speaker #1

    Oui et non. Ça dépend aussi un petit peu de mon humeur. Par exemple, si je dois aller à un événement, que ce soit par rapport au travail, une soirée ou quoi, ça peut m'arriver que j'ai déjà une idée de ce que je vais porter dans la tête la veille. Et puis ensuite, j'ai toujours une pièce en tête, une pièce de base en tête. Et puis après, le reste, ça vient sur le moment même, au feeling. Je mets un petit peu de musique et puis après, je vois un petit peu qu'est-ce que ça me procure comme émotion, comme sensation. Puis... Donc voilà, c'est un petit peu comme ça que je fonctionne. préparé, oui. Donc, il y a une idée de base principale. Et puis après, le reste, c'est au coup de cœur, aux sensations.

  • Speaker #0

    Tu as dit, ça dépend de mes sensations et de mes émotions. Oui. Donc, est-ce qu'on peut dire que... ce que tu portes reflète ton état d'esprit intérieur ? Est-ce que d'abord tu le choisis en fonction de toi ou en fonction de l'extérieur justement, de où tu vas et qui tu vas rencontrer ?

  • Speaker #1

    Alors oui, effectivement, en fonction de là où je vais aller, mais aussi avant tout par rapport à mon propre confort aussi. Parce que j'aime bien me sentir bien dans mes vêtements. je pense que ça serait un petit peu dommage de ne pas se sentir bien dans ses vêtements parce que c'est quand même une seconde peau. Donc, mettre sur soi une peau avec laquelle on ne se sent pas bien, c'est quand même assez triste, c'est quand même assez dommage. Donc, comment dirais-je ? Est-ce que c'est le reflet de mon intérieur ? Oui, quelque part, oui, ça peut être le reflet de mon intérieur, oui.

  • Speaker #0

    Et... quelle importance a pour toi le vêtement ? Est-ce que le vêtement a une importance dans le milieu dans lequel tu évolues ? Par exemple, moi j'adore les vêtements de danse. Oui. Parce qu'une de mes séries préférées quand j'étais jeune, c'était Fame. J'adorais.

  • Speaker #1

    I wanna live forever.

  • Speaker #0

    I wanna live forever. Je rêverais de monter comme ça avec des chevilles sur une voiture, en dansant avec un juste au corps, ce qui est juste impossible. À cause de... Enfin bref. Mais... Est-ce que... C'est quoi la particularité du vêtement de danse ? Qu'est-ce qu'il représente pour toi ? Comment est-ce que toi, tu fais plusieurs questions en une. Oui. Comment tu t'habilles quand tu danses, par exemple ?

  • Speaker #1

    Comment je m'habille quand je danse ? Alors, ça dépend encore une fois de mon humeur. Alors, ça peut aller à... Donc, je vais mettre quelque chose qui est assez proche du corps où je vais pouvoir voir les lignes de mon corps, pouvoir corriger ce qui est à corriger en termes de mouvement. Comme ça peut être quelque chose d'assez ample où j'ai juste envie d'être... dans la chaleur corporelle et pas dans le côté esthétique si ça te fait sens donc ça dépend de comment tu vas danser ça dépend plutôt de comment est-ce que je vais me sentir et aussi ça dépend de avec quel mindset est-ce que je vais approcher le cours en fait aussi avec quel mindset est-ce que je vais approcher la journée de travail de répétition si maintenant le but de Mon entraînement va être basé sur les lignes. Donc, je vais plutôt mettre quelque chose qui va favoriser justement la vision de ces lignes dans le miroir. Si maintenant, c'est un travail qui va être plus porté sur le côté émotionnel. Du coup, je vais un petit peu moins faire attention à la couleur ou quoi. Je vais plutôt mettre quelque chose de très, très, très confortable. Comme ça, je peux vraiment aller chercher à l'intérieur et pas aller... sur quelque chose de visuel, plutôt de l'ordre du ressenti.

  • Speaker #0

    À quel âge tu as commencé la danse ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que j'ai toujours dansé, mais on va dire d'une manière sérieuse, sérieuse, sérieuse. En école de danse, j'ai commencé à l'âge de 16-17 ans.

  • Speaker #0

    C'est tard, non, pour la danse classique ?

  • Speaker #1

    C'est tard, oui.

  • Speaker #0

    Quel âge tu as ?

  • Speaker #1

    Là maintenant j'ai 31 ans, bientôt 32. Donc oui effectivement c'est tard, mais j'avais déjà fait d'autres sports avant, j'avais déjà bougé mon corps en passant par la natation, le judo, j'avais fait aussi un petit peu d'équitation, bon là c'est plutôt le cheval qui fait tout le travail. Mais bon, puis aussi du football.

  • Speaker #0

    Donc bouger ton corps, c'est pas quelque chose d'inconnu. Et alors la danse classique, l'image... classiques qu'on en a, c'est des jeunes femmes blanches en tutu.

  • Speaker #1

    N'est-ce pas ?

  • Speaker #0

    Tu es un grand garçon noir qui ne porte pas de tutu, je pense, quand tu danses.

  • Speaker #1

    Pas quand je danse.

  • Speaker #0

    Peut-être quand tu danses, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Non, non, non, je ne porte pas de tutu.

  • Speaker #0

    Ok, d'accord.

  • Speaker #1

    Je ne porte pas de tutu. C'est très, très mignon sur les autres, mais bon, sur moi, I don't know.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que Parce que les miroirs sont omniprésents quand on danse.

  • Speaker #1

    Tout à fait, oui.

  • Speaker #0

    Comme tu dis, on choisit ses vêtements en fonction de la musique sur laquelle on danse, de la chorégraphie qu'on est en train de travailler. Quelle importance a eu le vêtement dans la manière dont tu as créé, construit, imposé, montré ton identité de jeune homme noir faisant de la danse classique ?

  • Speaker #1

    C'est oser se montrer, déjà. Oui, c'est oser se montrer parce que... Donc c'est... un impact quand même assez fort sur ma manière de bouger. Au début, quand j'ai commencé, je mettais toujours un pantalon noir avec un t-shirt oversize.

  • Speaker #0

    Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Parce que je n'aimais pas forcément mon corps à 100%. Parce que dû aux critiques que j'en ai pris... par rapport à mon physique, qui ne ressemblait pas au physique des autres personnes en classe.

  • Speaker #0

    Tu peux donner plus de détails par rapport aux reproches qui t'ont été faits par rapport à ton physique ?

  • Speaker #1

    En tant que danseur noir, c'était surtout au niveau des pieds. Donc, je mettais des pantalons qui descendaient jusqu'à ses... bas, qui couvrait pratiquement mes pieds, parce qu'en fait, recevoir souvent des remarques, tu as pas un beau pied, rentre tes fesses, tu as les fesses qui ressortent.

  • Speaker #0

    Et ça, c'est de l'ordre de... Tu peux pas gérer, c'est pas quelque chose sur lequel tu peux travailler, la forme de tes pieds.

  • Speaker #1

    On peut le travailler d'une manière musculaire, mais c'est vrai que j'ai une forme de pied de... de base, donc du coup ça ne va pas nécessairement ressembler à un pied caucasien, si il faut dire les choses.

  • Speaker #0

    Mais donc tu veux dire qu'un pied africain n'a pas la même forme qu'un pied caucasien ?

  • Speaker #1

    Disons que le pied noir est un pied un peu plus... En tout cas, pour moi, est un pied un peu plus dur à travailler. Il n'est pas facilement cassable et pliable. OK. Donc...

  • Speaker #0

    Donc tu le couvrais volontairement ? Je le couvrais volontairement,

  • Speaker #1

    parce qu'on disait que ça allait... Enfin, je veux dire qu'ils étaient pas à beau et que du coup,

  • Speaker #0

    il y avait rien à faire. Ok, ok. Et donc comment est-ce que t'as... avancer avec ça. Donc au début tu te couvrais.

  • Speaker #1

    Je me couvrais et puis après à un moment donné j'en ai eu assez. À un moment donné j'en ai eu assez et puis je me suis dit je vais travailler sur ce qu'on dit qui sont mes défauts et en fait je me suis rendu compte que c'était complètement démonstreux. qu'en fait, j'ai de beaux pieds.

  • Speaker #0

    Et de belles fesses.

  • Speaker #1

    Et j'ai de belles fesses aussi. J'ai de beaux pieds, j'ai de belles fesses, j'ai de beaux bras. Et tout ça, tout ça, quoi.

  • Speaker #0

    Et est-ce que quand on danse, aujourd'hui, alors, qu'est-ce que tu dis de toi quand tu t'habilles pour aller danser ? Parce que quand tu danses en studio, quand tu es en entraînement ou en répétition, est-ce que tu dis quelque chose de toi lorsque tu t'habilles ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai le droit d'être là.

  • Speaker #0

    C'est ça que tu dis ? Oui. En portant des choses qui ne couvrent pas tes pieds, qui ne couvrent pas tes fesses.

  • Speaker #1

    Mais en fait, j'ai le droit d'être là, j'ai aussi le droit de travailler, de corriger, peut-être pas corriger, d'améliorer.

  • Speaker #0

    Elle a nuancé quand même.

  • Speaker #1

    J'ai le droit aussi... d'améliorer ce qui est déjà là, même si ça pourrait gêner certaines personnes. Parce que justement... c'est quelque chose qui est arrivé souvent dans mes oreilles, c'est que Oh mon Dieu, j'ai jamais eu un garçon comme toi

  • Speaker #0

    Ça veut dire quoi ?

  • Speaker #1

    Justement, ça veut à la fois tout dire et rien dire à la fois.

  • Speaker #0

    On t'a déjà dit ce que ça voulait dire ? Toi, tu as une idée de ce que ça veut dire ? Un garçon comme toi, c'est quoi ? C'est un garçon noir dans des compagnies, sur des scènes en Belgique ?

  • Speaker #1

    Un garçon noir, un garçon aussi grand ?

  • Speaker #0

    Combien tu mesures ?

  • Speaker #1

    1m85.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est grand.

  • Speaker #1

    Mais après, en tant que réflexion du genre, oui, tu as un corps qui est difficile. difficile peut-être, mais peut-être pas nécessairement pour d'autres. Je ne pense pas avoir un corps difficile, je pense que j'ai un corps très simple, mais je pense que la simplicité, ça devient difficile pour certaines personnes.

  • Speaker #0

    Et donc, aujourd'hui, ce n'est plus un problème pour toi d'être... devant un miroir avec d'autres danseurs, d'autres danseuses et de choisir ce que tu portes. Tu ne te caches plus.

  • Speaker #1

    Dire que c'est plus difficile, ça serait mentir. C'est un travail. C'est un travail, que ce soit avec ou sans danseurs autour de moi, déjà se regarder dans le miroir et... Et apprécier, accepter, aimer ce que l'on voit, c'est un travail difficile, qui peut paraître difficile. Pourquoi ? Parce qu'on ne nous a pas appris à aimer ce que l'on voit de nous. On nous a toujours comparé.

  • Speaker #0

    Qui ça, nous ?

  • Speaker #1

    En tout cas, je vais plutôt parler pour moi. On m'a souvent et toujours comparé aux autres. regarde, c'est bien, regarde comment un tel fait, pourquoi est-ce que tu ne fais pas pareil.

  • Speaker #0

    Dans la danse ?

  • Speaker #1

    Que ce soit dans la danse ou d'une manière générale. Pour moi, ma danse, c'est un petit peu... un reflet de la vie qu'il y a quelque part. Parce que c'est quand même une mini société, si on peut dire ça comme ça. J'avais une prof de danse, elle m'a dit que quand elle était à l'école de danse, elle entendait des remarques. Ah, tu vois cette fille, la hauteur à laquelle elle lève sa jambe ? Ah ben, toi, tu dois lever ta jambe un peu plus haut. Donc du coup, ce que tu fais, c'est que tu... c'est que tu te compares. Donc, on t'amène à te comparer à l'autre et on t'amène à être dans un mindset où ce que tu vois de toi dans le miroir n'est pas assez.

  • Speaker #0

    Donc, ça, c'est à la scène, on va dire. Oui. Et dans ta vie, en dehors de la musique, de la barre, des studios et des miroirs, est-ce que c'est la même chose ? Est-ce qu'il y a aussi cet exercice de comparaison

  • Speaker #1

    Hum. Ça peut arriver.

  • Speaker #0

    Plus souvent, tu es dans quelle démarche, tu vois, par rapport à ton image, par rapport aux autres, par rapport au monde, en fait ?

  • Speaker #1

    Alors moi, mon image à moi, par rapport aux autres, que ce soit par rapport aux vêtements ou que ce soit par rapport à ma manière d'être, en fait, je ne me compare pas nécessairement. Ma première approche ne va pas justement être de me comparer à l'autre, de me dire, oui, je suis. Je suis mieux que toi, je vais t'écraser ou quoi. Non, parce qu'en fait, je me rends compte que dès qu'on commence à rentrer dans cette démarche-là, en tout cas pour moi, il y a quelque chose d'assez sale, d'assez dégueulasse à l'intérieur qui commence à pousser. et qui ne fait pas nécessairement du bien en fait, parce que du coup on sent vraiment qu'il y a une sorte de poison qui se crée à l'intérieur, et donc du coup ça entraîne un comportement avec autrui qui est de l'ordre du... Oui, qui est très néfaste, qui est très sombre, qui est très... Ça me donne presque la chair de poule à force d'y penser. Ça n'a rien de sain, ça n'a rien de joli, ça n'apporte rien de constructif à autrui.

  • Speaker #0

    Ça veut dire que sur les deux tableaux, autant à la scène qu'à la ville, tu t'habilles d'abord pour toi, en fonction de ton humeur, de tes émotions et de tes objectifs. Là, il fait froid, donc tu t'habilles chaudement parce que tu n'aimes pas avoir froid. Quand tu es en studio... tu choisis en fonction de ce que tu vas faire comme travail où est-ce que tu t'habilles ?

  • Speaker #1

    alors donc je m'habille dans la meilleure friperie du monde je veux savoir la garde-robe de mon père mais non il ne va pas m'aimer sinon non en fait je veux dire par là que lorsque je regarde des photos photos de mon père parce qu'en fait, il faut dire quand même que si je dois avoir des idéaux de beauté, ce sont quand même mes parents. Parce que, waouh, ils sont juste magnifiques. Ils sont beaux.

  • Speaker #0

    C'était pas mal non plus, d'entendre.

  • Speaker #1

    Merci, c'était beau. Quand je dis la garde-robe de mon père, c'est parce qu'en fait, quand je regarde des photos des années 70, il avait un look mais absolument, il a toujours un look que...

  • Speaker #0

    Ok, je comprends un peu plus la vibe d'aujourd'hui parce qu'effectivement, il y a un petit... Il y a un petit twist 70's dans les couleurs. Le pantalon, il n'est pas très pas de def aujourd'hui, mais tu l'as.

  • Speaker #1

    Donc, il y a toujours un petit peu ce côté évasé, toujours assez proche du corps. Donc, quelque chose qui épouse le corps sans trop l'épouser non plus, mais avec un côté assez confortable. Donc, quelque chose qui tombe sur le corps et qui prend la forme du corps. qui ne soit pas trop découpé d'une manière où on ne sait pas ce qui va pouvoir rentrer dedans. OK.

  • Speaker #0

    Et donc, tu t'inspires de la garde-robe de ton père ou tu vas vraiment prendre ses pulls ?

  • Speaker #1

    Non, non, non. Je m'inspire de la garde-robe de mon père, oui.

  • Speaker #0

    Et après, tu vas chercher où, alors, les pièces qui restent ?

  • Speaker #1

    Du coup, je vais en friperie. Je vais en friperie ou bien... Parce qu'en fait, j'ai un petit peu du mal à les prendre. En boutique de première main ? Si je vais en boutique de première main, c'est vraiment pour prendre des petits basiques, comme une chemise ou quoi, et encore, en fait. Parce que je trouve que les vêtements de l'époque, je dis de l'époque comme si c'était il y a hyper longtemps, mais c'était il n'y a pas si longtemps que ça, en fait. Je trouve qu'ils avaient une certaine... du caractère en fait, une âme, quelque chose qui vit. Ou bien chez des créateurs.

  • Speaker #0

    Ah ouais ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #0

    Alors, quel est ton top 3 des friperies à Bruxelles ? Ouf. Ou alors ta best friperie à Bruxelles ?

  • Speaker #1

    Oh my god.

  • Speaker #0

    Là où t'as acheté le plus de pièces. Ou celle où tu trouves des dingueries.

  • Speaker #1

    Bah du coup, des dingueries, je dirais pas. Mais là où j'ai acheté le plus de pièces, je dirais plutôt épisodes.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Ouais. Puis là où j'ai trouvé des dingueries. Je n'en ai pas encore trouvé de dinguerie.

  • Speaker #0

    Ok. Écoute, on va faire des petites promenades ensemble.

  • Speaker #1

    Voilà.

  • Speaker #0

    Tu peux trouver des dingueries.

  • Speaker #1

    Super.

  • Speaker #0

    Et comment est-ce que tu choisis ? Un vêtement que tu décides...

  • Speaker #1

    Au coup de cœur.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi qui t'accroche en général ?

  • Speaker #1

    En général, c'est une matière.

  • Speaker #0

    Tu la vois ou tu la touches ? Ou tu la touches d'abord et ensuite tu l'observes ?

  • Speaker #1

    Je la touche. En fait, oui, je vois la couleur et puis ensuite la matière, je la touche. Et puis surtout, déjà, comment est-ce que le tissu tombe ?

  • Speaker #0

    Donc, tu vois la couleur ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    J'essaye de déterminer un peu ton processus de sélection de la pièce vintage. Tu vois une couleur, tu t'approches, tu détermines un petit peu la matière, tu touches la matière, tu sors le vêtement, et puis tu regardes comment il tombe déjà sur le cintre. Et puis de là, tu sais si tu vas l'essayer ou pas. Et donc quand tu passes à l'essayage. qu'est-ce qui doit se passer à l'essayage pour que tu continues l'aventure jusqu'à la caisse ?

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qui va être de l'ordre du ressenti et qui va attention, ça doit procurer ceci. Ah !

  • Speaker #0

    Ah oui ! Oui. Donc un soulagement, une satisfaction. Oui. C'est ce que je comprends dans ton...

  • Speaker #1

    Ah ! Oui, donc c'est vraiment un... Ah oui, ok.

  • Speaker #0

    Une évidence.

  • Speaker #1

    Oui, une évidence. Quelque chose qui est comme un gant, en fait.

  • Speaker #0

    Ok. Tu parlais de seconde peau tout à l'heure.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Oui.

  • Speaker #0

    Donc une seconde peau.

  • Speaker #1

    Quelque chose qui est juste.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Et arriver à trouver quelque chose de juste, c'est pas facile.

  • Speaker #0

    Ouais, donc tu tombes pas régulièrement sur...

  • Speaker #1

    Donc c'est pour ça que je dis que je n'ai pas encore trouvé de dinguerie, tu vois.

  • Speaker #0

    Ouais, ouais. Après, t'es pas venu souvent chez moi. Ah,

  • Speaker #1

    voilà.

  • Speaker #0

    Tu sais que je collectionne des dingueries. Ah,

  • Speaker #1

    ah.

  • Speaker #0

    On va se revoir.

  • Speaker #1

    On va se revoir.

  • Speaker #0

    Alors, ok, donc, sélection en fripes. Donc c'est de là que je vois que t'as des belles qualités sur toi, des belles matières sur toi. Et puis t'as dit que tu t'habilles aussi des designers.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    quel designer, comment tu les choisis, comment tu fais aussi pour te les payer, parce que je pense que beaucoup de gens, dont moi, on aime les designers, connus, inconnus, surtout on a un amour pour les belles pièces, bien coupées, dans de belles matières, mais que tout ça, ça a un certain coût, et que c'est difficile. de se dire qu'on va consacrer plusieurs centaines d'euros dans un vêtement alors qu'on pourrait avoir quelque chose de similaire, dix fois moins cher dans un magasin de distribution. Et puis alors, ça veut dire que si tu payes un vêtement dix fois plus cher, tu vas pouvoir en acheter qu'un peut-être, au lieu de t'en acheter dix différents. Ça, c'est la logique de la fast fashion. Est-ce que tu as déconstruit cette logique de la fast fashion ?

  • Speaker #1

    Alors moi je vais plutôt dans la qualité plutôt que dans la quantité.

  • Speaker #0

    Amen !

  • Speaker #1

    Donc du coup oui, quand je dis designer, après je ne dis pas que j'ai tout un dressing qui est rempli de vêtements de designer, mais je veux dire lorsque je tombe sur une pièce et que la matière elle me plaît, et que sur le moment j'ai l'opportunité de me l'offrir, je le fais.

  • Speaker #0

    Ok, ce n'est pas un frein.

  • Speaker #1

    Donc non, ce n'est pas un frein. Enfin, je veux dire, je ne vis pas au-dessus de mes moyens non plus. Donc que ça, on entend bien.

  • Speaker #0

    Et quels sont tes designers préférés ? ce que tout le monde connaît ? Et peut-être que ton designer ou tes designers préférés ne sont pas connus du grand public ?

  • Speaker #1

    En fait, il y a un designer en particulier avec qui j'ai déjà travaillé, avec qui je travaille encore en ce moment. Il s'appelle Koualé. Il a reçu le prix du fashion design, si je ne dis pas de bêtises, du MAD. Et en fait, il a créé toute une... La collection est en rapport avec un métissage culturel, parce qu'en fait il est roi rwandais et qui a grandi ici en Belgique. Donc toute sa collection se prête sur ce métissage culturel, que ce soit au niveau du drapé, du tissu, au niveau de l'imprimé du tissu, des différentes matières. Il a d'ailleurs créé quelques pièces sur moi.

  • Speaker #0

    Tu es une muse ! Manu est une muse de la mode !

  • Speaker #1

    Donc il a déjà créé quelques pièces sur moi et je dois dire que c'est aussi un honneur et un privilège de pouvoir avoir un vêtement qui a été fait sur mesure par un jeune créateur. C'est un talent !

  • Speaker #0

    Et les pièces que tu as de Koalé, tu les portes pour quelles occasions ?

  • Speaker #1

    Je les porte pour des occasions. Déjà, il faut dire aussi que dans le travail de Koalé, c'est un travail qui met en avant... toute la gloire et la royauté du tissu africain. Parce que c'est quand même un tissu noble, une matière noble qui est portée de façon noble. par des personnes. Les robes, là. Appelons un chat un chat. Donc du coup, je vais vraiment aller honorer ces créations, honorer ces vêtements dans des événements qui s'y prêtent, dans des endroits qui s'y prêtent, que ça soit un mariage ou bien un vernissage, que ça soit à une soirée d'ouverture, à une réception.

  • Speaker #0

    plus pour des événements que pour la vie quotidienne ?

  • Speaker #1

    En tout cas, moi, ce sont vraiment les endroits où je vais les honorer parce qu'aussi, vu la météo que nous avons aussi à Bruxelles, parfois c'est un petit peu compliqué de savoir, ok, telle matière, est-ce que ça serait adéquat pour tel météo ? Donc oui, plutôt pour des... dans des endroits qui se prêtent à leur glorification.

  • Speaker #0

    Et comment tu te sens quand tu portes ces vêtements-là qui visiblement t'apportent de l'empouvoirment ? Je dis en français. En français. Parce que j'aime le français. L'empowerment. Qu'est-ce que tu ressens dans ces étoffes, dans ces pièces dont tu connais le créateur, dont tu connais... l'histoire, le processus créatif, parce que visiblement tu y as contribué, puisque tu as été le modèle, le mannequin sur lequel certaines pièces ont été conçues. Qu'est-ce que toi, ça t'apporte ? Qu'est-ce que toi, ça te raconte ? Et en les portant, qu'est-ce que tu racontes au monde ?

  • Speaker #1

    Déjà, de un, ça sonne juste. Qu'est-ce que ça raconte au monde ? Encore une fois, c'est que j'ai le droit d'être là dans toute ma splendeur.

  • Speaker #0

    Alors moi tu sais je vais mettre les pieds dans le plat dans toute ton africanité dans toute ta noiritude je viens d'inventer un mot tu l'as dit à ma place je l'ai dit à ta place génial au moins je ne t'ai pas je craignais quand même de te croisser parce que c'est important peut-être on fait un petit peu On n'en est qu'au début de ce podcast, donc on ne sait pas encore on, je dis on parce que je parle de moi et tous mes colloques dans ma tête. On ne sait pas encore quel ton vraiment on va donner, on va avoir, mais on voudrait vraiment pouvoir parler sans langue de bois. Et donc, quand je dis que ça te permet de t'exprimer dans toute ta noirétude, c'est parce que tu évolues dans un milieu qui est essentiellement blanc, assez aisé, et que tu fais tâche de temps. N'est-ce pas ? Une jolie tâche, hein ? Une jolie petite tâche. Ce que j'ai compris et ce que je comprends, c'est que c'est un peu une revendication.

  • Speaker #1

    Oui, quand même, parce qu'il ne faut quand même pas oublier le passé colonial que la Belgique a avec le Congo. Parce qu'encore une fois, je suis Congolais, du Kassai occidental, né ici en Belgique, à Bruxelles. donc j'ai dû rentrer dans des cases justement pour ne pas faire trop tâche justement donc bien parler, bien se tenir bien s'habiller c'est pour ça que quelque part mon éducation a aussi une grande influence sur la manière dont je m'habille aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Qui est différente d'il y a quelque temps, ou d'avant ? Tout à l'heure, tu as dit que maintenant, tu as envie de ne plus t'excuser. Oui. Ça veut dire que je suppose qu'avant, tu t'excusais et que tu t'habillais en fonction de comment est-ce que tu pensais qu'on attendait, qu'on souhaitait que tu sois habillé.

  • Speaker #1

    Par exemple, oui.

  • Speaker #0

    Mais qu'aujourd'hui, tu te réappropries ton identité, entre autres, au travers de ce que tu choisis de porter. Et quand tu es... dans un studio de danse, et quand tu vas en représentation dans des événements en tant que danseur, et puis en tant que toi, Emmanuel, citoyen belge, de parents congolais, qui eux sont nés au Congo, toi ici, dans un pays qui a une histoire assez longue, assez lourde, avec le pays d'origine de tes parents. Oui. Est-ce que... tu as déjà pensé que c'est une revendication, que les choix que tu fais de, par exemple, porter exclusivement des vêtements d'un designer aussi afrodescendant qui crée des vêtements que je qualifierais aussi d'afropéens, parce que c'est des vêtements inspirés de techniques, de vêtements traditionnels rwandais, mais ce sont des vêtements occidentaux. Est-ce que c'est une manière de revendiquer que tu es un afrodescendant vivant en Europe, en Occident, mais qui n'oublie pas d'où il vient ? Je vais loin quand même.

  • Speaker #1

    Oui, quand même. Est-ce que je vais trop loin ? Je dirais que les créations de Kuali, ce ne sont pas des techniques rwandaises, c'est plutôt une technique africaine noire dans son ensemble. Ça rassemble plusieurs pays d'Afrique noire. Donc, on va plutôt dire ça comme ça pour avoir ensuite une esthétique qui a un métissage européen et africain. ok et ça ça te définit ça te qualifie mieux est-ce que c'est ben oui quelque part je peux dire ça comme ça parce que j'ai ce métissage en moi de toute manière j'ai ce métissage européen et afrique noire oui oui oui donc oui ça sonne juste pour moi peut-être que je me trompe mais Je n'en ai pas l'impression. Parce que lorsque je porte le vêtement, je me sens bien dedans, je me sens à l'aise, ce sont des couleurs qui mettent en avant ma personnalité. Quand je dis qu'ils mettent en avant ma personnalité, ce sont des couleurs vives, joyeuses, qui ont une histoire, comme tout le monde. Tout le monde a une histoire, mais par rapport, encore une fois... Par rapport à toute ma noiritude. Voilà, c'est...

  • Speaker #0

    On va la garder celle-là. La noiritude.

  • Speaker #1

    Donc oui, c'est plein de vie, c'est chaud, c'est...

  • Speaker #0

    Ça, c'est des adjectifs qui pourraient te qualifier toi en tant que personne ?

  • Speaker #1

    Oui, oui, oui, oui. Sans aucune prétention.

  • Speaker #0

    Tu penses que, de manière générale, on choisit ses vêtements comme on... pourrait définir sa personnalité ?

  • Speaker #1

    Oui. Je me souviens lorsque j'étais à l'école secondaire, il y avait une école en particulier où je ne me sentais pas très bien, voire même pas bien du tout d'ailleurs. Et je me souviens qu'en fait, mon outfit, c'était un long t-shirt oversize, avec un jeans très oversize, avec des baskets, et avec un hoodie sur la tête.

  • Speaker #0

    C'est ce que tu portais ? Oui.

  • Speaker #1

    Donc, ça a été à chaque fois des choses très, très, très, très, très, très amples où je pouvais me cacher, en fait.

  • Speaker #0

    Et pourquoi est-ce que tu voulais te cacher ?

  • Speaker #1

    Parce que, justement, je remarquais que je n'étais pas nécessairement comme les autres enfants de cette école-là, avec une personnalité complètement différente, avec un mindset complètement différent. avec une manière d'être, une manière de me voir complètement différente. J'avais tout le temps mes mains dans les poches, j'avais la tête baissée, je ne parlais pas.

  • Speaker #0

    Mais tu as toujours été aussi grand ? Cette question peut paraître bizarre, mais je veux dire, parfois on a des poussées de...

  • Speaker #1

    J'ai eu une poussée de croissance. J'étais resté petit pendant quand même assez longtemps. Puis ensuite, en un été, j'ai pris 11 centimètres. Oh, waouh ! Oui, en un été.

  • Speaker #0

    Je pense que je n'ai jamais autant grandi.

  • Speaker #1

    du coup voilà donc j'ai pris 11 centimètres en une fois et du coup voilà donc on va dire que oui je donc là tu te sentais pas bien donc tu portais des vêtements dans lesquels tu t'effaçais oui et

  • Speaker #0

    à quel moment est-ce que tu t'es sentie mieux, suffisamment mieux pour ne plus t'effacer mais plutôt t'affirmer est-ce que c'est arrivé ?

  • Speaker #1

    oui c'est arrivé d'une certaine manière quand je suis arrivé à l'école de danse ah oui

  • Speaker #0

    donc malgré le fait que donc c'était t'as fait ça par étapes peut-être je sais pas je viens d'avoir une image comme ça qui m'est venue à la tête qui m'est passée par la tête c'est de toi en train d'éclore comme ça donc ça veut dire que l'éclosion a commencé quand t'as commencé la danse donc à t'habiller un petit peu plus en fonction de comment tu pouvais définir ta personnalité et puis tout à l'heure tu disais que c'est un travail de tous les jours que de pouvoir affirmer qui on est au travers de ces vêtements et pour toi en particulier lorsque tu es en studio parce que tu es un homme noir faisant de la danse classique Première étape de l'éclosion, c'est après l'école secondaire, quand tu commences à faire de la danse classique. Comment ça s'est exprimé ? Comment est-ce que tu es passé du hoodie, t-shirt oversize, jean oversize, main dans les poches, à quoi après ? C'était quoi après ?

  • Speaker #1

    On va dire que c'était des choses un petit peu moins oversize.

  • Speaker #0

    Tu as fait des trucs un peu moins grands. Tu as commencé à porter des vêtements un peu moins larges.

  • Speaker #1

    Un peu moins larges. Juste un t-shirt, on va dire d'une taille régulière qui va juste être à ma taille. Et puis après, un pantalon pas trop ample non plus, mais juste avec une coupe droite où on peut quand même voir les lignes de mon corps.

  • Speaker #0

    Et à quel moment est-ce que tu es passé à ce look-là que tu as aujourd'hui ? ce look un peu d'un spy 70's comme ton papa qui avait la classe et qu'il a encore une classe mais incroyable à quel moment justement t'as fait ce switch alors de passer de vêtements juste à ta taille pas pour te cacher mais juste pour t'habiller à ce look que t'as aujourd'hui qui est quand même un peu marqué tu vois t'as quand même une identité stylistique que teinté d'élégance, à quel moment tu t'es autorisé ça ?

  • Speaker #1

    Est-ce que je vais avoir une réponse correcte par rapport à cette question ? Je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Toutes tes réponses sont des bonnes réponses.

  • Speaker #1

    À quel moment est-ce que c'est arrivé ? C'est arrivé...

  • Speaker #0

    Peut-être que c'est arrivé progressivement.

  • Speaker #1

    C'est arrivé un petit peu comme ça, je pense. Oui, ça a été arrivé assez progressivement. C'est arrivé au moment où où en fait, je pense que ça va être un petit peu redondant ce que je vais dire, mais c'est arrivé à un moment où dans ma tête, c'est moi, c'est comme ça, c'est comme ça que j'aime bien m'habiller, c'est comme ça que je me sens, c'est apprendre ou à laisser, that's it.

  • Speaker #0

    ok et je reviens un petit peu sur ce qu'on disait juste avant quand tu expliquais que tu portais des vêtements de créateur et de ce créateur afrodescendant Koale Akiza Pourquoi est-ce que pour toi c'est important ? Parce que tu as dit que tu portais ces pièces pas dans la vie de tous les jours, mais pour des performances, pour des vernissages, lors d'événements, quand tu vas vraiment un peu te montrer. Est-ce que c'est plus important pour toi de porter ces vêtements à ces moments-là qu'à d'autres ? Et si oui, pourquoi ?

  • Speaker #1

    Pourquoi ? Parce que déjà, dans le milieu, nous ne sommes pas beaucoup.

  • Speaker #0

    Quel milieu ?

  • Speaker #1

    Dans le milieu créatif, dans le milieu artistique.

  • Speaker #0

    Et c'est qui nous ?

  • Speaker #1

    Donc nous, les noirs.

  • Speaker #0

    Ok. Appelons un chat un chat et un noir un noir.

  • Speaker #1

    Appelons un chat un chat et un noir un noir. Bon,

  • Speaker #0

    aujourd'hui, parce qu'en fait, oui, enfin, on ne doit pas forcément... Ce n'est pas ce qui définit une personne, mais dans certaines circonstances, ça fait la différence. Donc ok, c'est pour...

  • Speaker #1

    C'est pour... vas-y pas de l'homme de bois oui mais en fait je cherche vraiment les mots justes pour que ça sorte de la bonne manière et pour que ça soit surtout entendu de la bonne manière c'est pas juste pour montrer que nous sommes là, oui les gens nous voient que nous sommes là mais c'est pour nous montrer nous, pour nous voir nous pas juste une image qu'on veut nous coller pas juste euh le petit noir dans le coin de la salle qui est très reconnaissant parce qu'il a eu une petite place, pas juste le noir dans la salle qui occupait à servir les coupes de champagne, mais qui garde l'uniforme du colonisateur, si je peux dire ça comme ça. Donc c'est encore une fois revendiquer sa place. C'est ne pas être désolé d'exister. malgré toutes les tentatives qu'on a de vouloir nous effacer. Parce que j'ai envie de dire, vous nous avez amenés ici, maintenant il faut assumer.

  • Speaker #0

    Est-ce que je suis juste si je dis que dans l'environnement dans lequel tu évolues, le milieu créatif, artistique, celui de la danse, la danse classique en particulier, tu te vis un petit peu comme... comme une sorte de porte-drapeau pour toi et pour les autres acteurs créatifs de la communauté afro-descendante ?

  • Speaker #1

    Pour moi, c'est très, très important, oui, surtout d'être un homme danseur noir de m'incarnation de peau, de mon teint de peau foncé. C'est très important, pourquoi ? Parce qu'en fait, moi, en étant à l'école de danse, je n'ai pas nécessairement eu de modèle ou de repère. Ou s'il y en avait, c'était un ou deux, mais pas ici en Belgique. Donc oui, pour moi, c'est quand même assez important, oui. Parce que si, maintenant, mettons, un enfant noir va à l'opéra pour la première fois et qu'il me voit sur scène et que ça réveille en lui, que ça soit par rapport à la danse ou par rapport à autre chose, dans la vie où il peut se sentir, ah mais je suis quand même le seul noir dans mon secteur. Mais il n'y a personne d'autre qui va arriver à un tel niveau. Et si en me voyant sur scène, ça peut réveiller en lui une flamme, une étincelle, quelque chose. si lui il y est arrivé mais en fait moi aussi qu'est-ce que ce soit comme discipline que ce soit la danse que ce soit la mode la musique ou que sais-je il

  • Speaker #0

    pourra avoir une manifestation physique de son rêve futur c'est génial en fait t'as conscience et tu prends à bras le corps le rôle de rôle modèle

  • Speaker #1

    Je pense que quand on fait partie d'une minorité, c'est quand même important, surtout une minorité comme une minorité, parce qu'on n'est pas vraiment une minorité, parce que le peuple noir est quand même un grand peuple. Disons les choses telles qu'elles sont, disons les termes, s'il vous plaît. Le peuple noir est un grand peuple, mais c'est qu'on nous a un peu divisé pour mieux régner sur nous. C'est pour ça qu'on se retrouve à être le seul noir de tel département. Donc c'est important, oui, c'est très très important.

  • Speaker #0

    Et quel message tu veux véhiculer quand tu portes un vêtement qui a été fait par un créateur noir ? Qu'est-ce que tu veux raconter ? par rapport à toi en tant que danseur, rôle modèle, dans cette industrie, dans ce secteur, et qu'est-ce que tu veux raconter aussi, si jamais tu veux raconter quelque chose ou dire quelque chose, par rapport aux autres créatifs qui sont là, qui existent, et qu'on ne voit pas forcément. Parce que j'imagine que... les pièces des créateurs que tu portes n'ont pas une audience aussi large que la tienne, puisque tu es danseur. L'Opéra de la Monnaie, c'est comme ça qu'on dit ? En ce moment, oui. Voilà. À l'Opéra de la Monnaie, qui est quand même une institution, c'est quand même quelque chose d'assez prestigieux. C'est quoi le message que tu veux véhiculer ? Et ? Je pense que ça c'est la partie la plus importante de la question. À qui ?

  • Speaker #1

    Alors, à qui ? Déjà, j'ai envie de dire aux jeunes artistes noirs, que ce soit garçons ou filles, crois en toi, crois en tes rêves. Tu es plus que ce que tu ne penses. Tu as tout ce qu'il faut. et tu vas y arriver n'aie pas peur de prendre ta place entoure-toi de personnes qui sont là pour te voir briller parce qu'elles veulent te voir briller pas parce que ça leur apporte quelque chose à sens unique tu as le droit de exister Donc ça c'est déjà une chose. Et aux haters, si je peux dire ça comme ça, aux haters qui ont tenté de me mettre à plat, j'ai juste envie de leur dire... C'était bien essayé. C'était bien essayé, mais... Et merci.

  • Speaker #0

    Ah ouais ? Oui. Tu vas dire merci aux haters ?

  • Speaker #1

    Bah oui, parce que quelque part, leur haine a alimenté mon feu.

  • Speaker #0

    Explique.

  • Speaker #1

    On dit qu'entre l'amour et la haine, il n'y a qu'un pain.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Donc... leur haine envers moi a fait que attiser le feu de l'amour que j'ai pour la vie en fait pour la vie ?

  • Speaker #0

    c'est beau ce que tu viens de dire parce que j'ai vraiment eu des personnes dans cette école d'ailleurs

  • Speaker #1

    qui ont vraiment tenté de me Ouais, m'anéantir.

  • Speaker #0

    Ah ouais, carrément ?

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Une méchance, c'était gratuit. Parce que tu es différent. Parce que tu ne rentres pas justement dans cette case. Ouais, ça a quand même bien joué sur mon mental et au quotidien. Donc c'était pour ça, en fait. T-shirt large, hoodies sur la tête, même en classe, pantalon hyper large pour s'effacer le plus possible. Mais malgré ça, il y a toujours eu une tentative de... de vouloir m'exterminer.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Bon,

  • Speaker #0

    tu es là.

  • Speaker #1

    J'utilise des mots forts, je sais, mais c'est comme ça que je l'ai vécu, c'est comme ça que je l'ai ressenti avec les... Enfin, je n'avais pas rentré dans les détails, mais c'est quand même des choses très fortes et très difficiles. Quand on est un ado qui sent plein de choses changer émotionnellement, physiquement, à l'intérieur de soi, de recevoir ce genre d'attaque-là, c'est très très dur. Donc oui.

  • Speaker #0

    Et aujourd'hui, c'est quoi ton vêtement préféré ?

  • Speaker #1

    Mon vêtement préféré ?

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Vêtements préférés. C'est un vêtement auquel je ne dois pas... pas pensé est-ce que c'est un vêtement qui existe ? c'est un vêtement qui existe et c'est quoi ? c'est quoi ? donc pas seulement d'une manière métaphorique ? non non non ah ok vraiment mon vêtement préféré aujourd'hui ? oh my goodness ben c'est ma couleur de peau noire oh C'est ma couleur de peau noire, c'est mon vêtement préféré. ça fait désabîmer complètement c'est peut-être prétentieux là ce que je suis occupé à dire non c'est très bien tu t'assumes t'as dit non t'excuses pas donc bon on va on va arriver sur la fin et alors on

  • Speaker #0

    va faire un truc un peu sympa que j'aime bien faire tu connais le principe du portrait chinois

  • Speaker #1

    Tu peux me rappeler ?

  • Speaker #0

    Alors, je te dis ici, en l'occurrence, je vais te dire, si tu étais un pull, quel pull tu serais ?

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Donc, si tu étais un pull, au mois de novembre, en Belgique ?

  • Speaker #1

    Oui. Je serais un pull en Cachemire. Un pull en Cachemire. un col roulé de couleur rouge.

  • Speaker #0

    Frileux, mais... I'm here. Ouais. Look at me.

  • Speaker #1

    Un pull en cashmere, col roulé de couleur rouge.

  • Speaker #0

    C'est du temps pantalon.

  • Speaker #1

    Un pantalon noir. en coton, coupe droite. Qui dessine un peu la fesse quand même.

  • Speaker #0

    La fesse qui est trop fesse.

  • Speaker #1

    La fesse qui est trop fesse. Tu vois ? Oui. Tu as compris, non ?

  • Speaker #0

    Très bien.

  • Speaker #1

    Donc, noir, pourquoi ? Parce que noir, c'est une couleur de pouvoir. et qui est très classe, qui est très royale. Et droite, pourquoi ? Parce qu'en fait, c'est une coupe qui tombe sur les formes du corps. Et voilà.

  • Speaker #0

    Si tu étais une paire de chaussures ?

  • Speaker #1

    Une paire de chaussures ? Une paire de chaussures... Une bottine. Parce que nous sommes toujours au mois de novembre, n'est-ce pas ?

  • Speaker #0

    Ou pas ! Si tu as une saison favorite qui correspond à une autre paire de chaussures, tu pourrais être une autre paire de chaussures.

  • Speaker #1

    Non, parce que là, ce que j'ai en tête, c'est... ça se prête plutôt... enfin, quoique, ça pourrait aussi se prêter au printemps. ça pourrait aussi se prêter au printemps donc ça serait une bottine avec une petite talonnette si je peux dire ça comme ça noire la matière la matière En cuir satiné ? Oui. En cuir satiné.

  • Speaker #0

    Tu peux être la chaussure que tu veux.

  • Speaker #1

    En cuir satiné, oui, quelque chose pareil.

  • Speaker #0

    Et donc, si tu étais un vêtement de dessus, donc une veste ou un manteau, est-ce que tu serais plutôt... Un vêtement du mois de novembre ou un vêtement du mois de juin ?

  • Speaker #1

    Quand j'ai la silhouette en tête, c'est plutôt une silhouette du mois de novembre. Le vêtement du dessus que j'aurais, ce serait un trench.

  • Speaker #0

    OK.

  • Speaker #1

    Un trench de couleur. Est-ce que du vert, ça serait trop ? Avec cette silhouette-là, peut-être pas.

  • Speaker #0

    Vert sapin, comme ça ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    C'est pas mal. J'ai un peu la silhouette en tête. Tu la sais pas ? Oui. Il va falloir la dessiner. Il va falloir la... Tu me compliques la tâche. Comment je fais pour illustrer ce podcast ? Moi, maintenant, des poteaux, des illustrations, on fait quoi ? OK. J'ai une dernière question.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Peut-être que cette question va être la question qui va revenir dans tous les épisodes. Quelle est pour toi la définition du vêtement ? Qu'est-ce qu'un vêtement pour toi ?

  • Speaker #1

    Un vêtement pour moi c'est... Alors déjà c'est pas juste un vêtement. C'est pas juste un vêtement. Dans certaines circonstances ça peut juste être un vêtement. Mais quand on met un vêtement c'est... C'est on se montre, c'est on s'affirme, on se présente. On brille, on ose, on prend pas de détours. C'est le soleil.

  • Speaker #0

    Merci Manu. Merci de t'être déshabillé avec moi. De t'être laissé déshabiller par moi.

  • Speaker #1

    Ben écoute, c'était assez bien fait. C'était assez smooth quand même.

  • Speaker #0

    Merci pour ton écoute. J'espère que cet épisode avec Emmanuel t'a plu. Si tu as des questions, des commentaires, des suggestions, des propositions, des interrogations, n'hésite pas à me laisser un commentaire. Et surtout, je t'invite à follower, suivre, t'abonner à DHV sur la plateforme d'écoute de ton choix. Dans le prochain épisode, je reçois un chapelier patoqué. Ok, elle était facile celle-là, mais bon, voilà. Je reçois Elvis Pompilio. Allez, rendez-vous au prochain épisode. Salut ! Déshabillez-vous est un podcast créé, présenté et produit par Samia Boujard, moi, avec une musique originale de Maïeva Fiston alias MPLI, montage, mixage et post-production par Alice Desbelles-Fréquences et Laetitia, podcast manager. THV, déshabillez-vous !

Chapters

  • Introduction

    00:00

  • Présentation

    00:36

  • Description de son look du jour

    02:49

  • Critères pour choisir ses tenues

    04:10

  • Ses débuts dans la danse

    08:43

  • Impact du vêtement dans la construction de son identité de danseur

    09:35

  • Assumer son apparence malgré les comparaisons

    15:10

  • Sa friperie secrète

    18:58

  • Ses critères pour choisir une pièce

    22:18

  • Son designer préféré & tissu africain

    25:58

  • Éducation & réappropriation d’identité

    29:06

  • Le look comme miroir de la personnalité

    35:18

  • Évolution de son style

    38:07

  • Revendiquer sa place & être un exemple

    40:11

  • Le message qu’il veut faire passer

    45:16

  • Son vêtement préféré

    49:50

  • Le portrait chinois d’Emmanuel

    51:00

  • Sa définition du vêtement

    54:52

  • Conclusion

    55:51

Description

Pour ce deuxième épisode, je t’emmène à la rencontre d'Emmanuel Diela Nkita, un danseur classique afro-descendant aux racines congolaises qui a su s'imposer sur la scène artistique et créative afropéenne bruxelloise.


Né à Bruxelles avec un métissage culturel profond, Emmanuel est un danseur complet, maîtrisant aussi bien le classique que le contemporain, le moderne et le néoclassique.


Au cours de notre échange, on explore la relation intime entre les vêtements et l'identité personnelle.

À travers ses choix vestimentaires, il exprime son humeur, ses émotions et son état d'esprit. Les vêtements sont pour lui une seconde peau, un reflet de son intérieur et un moyen de revendiquer sa place dans le monde.


Il raconte comment ses vêtements, choisis avec soin, reflètent son parcours de vie, ses origines africaines et son expérience dans le milieu de la danse classique, souvent dominé par des standards esthétiques éloignés de sa réalité de jeune homme noir.


Sans langue de bois, Emmanuel partage son histoire, le racisme subi en école de danse, l’affirmation de son identité à travers les vêtements qu’il porte et comment il se positionne en tant que modèle pour inspirer les générations afro-descendantes futures à oser.


Belle écoute 🎧

Samia


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Vous pouvez retrouver Emmanuel Diela Nkita sur Instagram


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En attendant de nous retrouver pour un prochain épisode, je t’invite invite à t’abonner au podcast et à laisser 5 étoiles et un mot doux sur ta plateforme d’écoute préférée 💌


Si tu souhaites continuer la discussion et découvrir les coulisses de DHV, retrouve-moi au quotidien sur Instagram à @samiabouhjar


👗 Pour aller plus loin et découvrir mes prestations de Directrice Artistique, Styliste et Costumière pour la Télévision et le monde du Spectacle, rendez-vous sur https://samiabouhjar.com


Des bises,

Samia


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Crédits :

Production & Présentation : Samia Bouhjar.

Montage et mixage : Alice des Belles Fréquences.

Consulting et coordination : Laëtitia, Podcast Manager.

Direction Artistique : Samia Bouhjar, Amélie Breuil et Jennifer Boruchowitch.

Musique originale de Maéva Fiston.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    S'habiller ou ne pas s'habiller, ça dit quelque chose de chaque personne.

  • Speaker #1

    Déshabillez-vous.

  • Speaker #0

    H.V.

  • Speaker #1

    Déshabillez-vous.

  • Speaker #0

    Quand t'es bien habillé, que tu te trouves frais ou fraîche quand tu te regardes, et bien en fait, ça te permet de sécréter des endorphines. Déshabillez-vous. Salut, moi c'est Samia Boujard et tu t'apprêtes à écouter Déshabillez-vous avec Emmanuel Diela Hitta. Salut Manu.

  • Speaker #1

    Salut.

  • Speaker #0

    Ça va ?

  • Speaker #1

    Ça va très bien et toi ? Bien.

  • Speaker #0

    On ne se connaît pas beaucoup. Est-ce que tu veux que je te présente du peu que je sais de toi ou tu te présentes toi-même ?

  • Speaker #1

    Ah bah tu peux, ça m'intéresse. Ok.

  • Speaker #0

    De voir un petit peu. Et tu complèteras ?

  • Speaker #1

    Et je compléterai, oui.

  • Speaker #0

    Ok. Alors, Emmanuel Diela Nkita, danseur classique à l'Opéra de la Monnaie, jeune homme afro-descendant dont les parents sont originaires du Congo. Donc un jeune homme noir, tu es très grand, tu es très beau, tu as fait du mannequinat, tu fréquentes la scène artistique et créative afropéenne bruxelloise. Voilà, c'est tout ce que je sais de toi, de manière plus ou moins sûre. Le reste, je te laisse compléter. Voilà,

  • Speaker #1

    donc oui, effectivement, je suis danseur, donc j'ai une formation classique. Mais je n'avais pas seulement du classique, je fais aussi du contemporain, du moderne, du néoclassique. Je fais aussi du commercial, puis j'enseigne aussi la danse. Et en ce moment, je suis effectivement sur une production à l'Opéra de la Monnaie. Là, c'est une chorégraphie de l'ordre de la danse contemporaine dans une production qui s'appelle Das Rheingold, qui est mise en scène par Romeo Castellucci et chorégraphiée par une chorégraphe contemporaine, Cindy Van Acker. Et pour les détails concernant d'où je viens, en termes... D'origine, oui, je viens du Congo et en détail de la région du Kassai, du Kassai occidental.

  • Speaker #0

    Tu es né là-bas ?

  • Speaker #1

    Je suis né ici à Bruxelles. Donc j'ai ce métissage culturel, mais je suis déjà parti au Congo une fois quand j'avais 6 ans, une fois quand j'avais 12 ans. Donc oui, j'ai ce métissage culturel en moi.

  • Speaker #0

    Ok. On va parler de toi plus en détail et plus profondément au travers de tes habits. C'est mon sujet de prédilection, c'est ce qui me passionne dans la vie, c'est les habits et ce que ça raconte sur les gens. Donc, on va parler de ça ensemble. Ma première question, c'est d'où vient tout ce que tu portes aujourd'hui ? Alors, je vais décrire parce qu'on n'a pas de vidéo. On aura quelques photos qui vont... Illustrer notre rencontre d'aujourd'hui, tu portes un pull en laine côtelée, vert sapin, une ceinture en coton tressé, un pantalon vintage si je ne me trompe pas, en laine, une couleur que je qualifierais de grège, tu portes des chaussures en cuir, c'est des bottines, des bottines en cuir. Elles sont complètement en cuir, même la semelle est cousue, dont j'ignore la marque, mais en tout cas, ça a l'air d'être une très belle façon.

  • Speaker #1

    Haechung.

  • Speaker #0

    Haechung, je ne connais pas du tout. Pourquoi ce look aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Pourquoi ce look aujourd'hui ? Alors déjà, parce qu'il fait froid.

  • Speaker #0

    Ça explique la laine.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, parce qu'il fait froid, parce qu'il pleut. Et aussi pour le côté, déjà de pratique, mais aussi pour le côté confortable. Oui, confort et pratique. Esthétique, oui, d'une certaine manière. Apprêté, désapprêté, si on peut dire ça comme ça.

  • Speaker #0

    J'aime bien cette manière de dire apprêté, désapprêté, parce que je te trouve particulièrement bien mis, bien habillé, parce que les couleurs vont bien ensemble, parce que ça te donne quand même une belle allure. Quand tu choisis tes vêtements, est-ce que tu les choisis ? Tu y réfléchis la veille, par exemple, quand tu sais que tu dois aller quelque part rencontrer quelqu'un ? Ou est-ce que c'est vraiment quelque chose que tu choisis sur le moment même ? Donc le matin, quand tu dois aller quelque part, ou l'après-midi, ou le soir, peu importe le moment ?

  • Speaker #1

    Oui et non. Ça dépend aussi un petit peu de mon humeur. Par exemple, si je dois aller à un événement, que ce soit par rapport au travail, une soirée ou quoi, ça peut m'arriver que j'ai déjà une idée de ce que je vais porter dans la tête la veille. Et puis ensuite, j'ai toujours une pièce en tête, une pièce de base en tête. Et puis après, le reste, ça vient sur le moment même, au feeling. Je mets un petit peu de musique et puis après, je vois un petit peu qu'est-ce que ça me procure comme émotion, comme sensation. Puis... Donc voilà, c'est un petit peu comme ça que je fonctionne. préparé, oui. Donc, il y a une idée de base principale. Et puis après, le reste, c'est au coup de cœur, aux sensations.

  • Speaker #0

    Tu as dit, ça dépend de mes sensations et de mes émotions. Oui. Donc, est-ce qu'on peut dire que... ce que tu portes reflète ton état d'esprit intérieur ? Est-ce que d'abord tu le choisis en fonction de toi ou en fonction de l'extérieur justement, de où tu vas et qui tu vas rencontrer ?

  • Speaker #1

    Alors oui, effectivement, en fonction de là où je vais aller, mais aussi avant tout par rapport à mon propre confort aussi. Parce que j'aime bien me sentir bien dans mes vêtements. je pense que ça serait un petit peu dommage de ne pas se sentir bien dans ses vêtements parce que c'est quand même une seconde peau. Donc, mettre sur soi une peau avec laquelle on ne se sent pas bien, c'est quand même assez triste, c'est quand même assez dommage. Donc, comment dirais-je ? Est-ce que c'est le reflet de mon intérieur ? Oui, quelque part, oui, ça peut être le reflet de mon intérieur, oui.

  • Speaker #0

    Et... quelle importance a pour toi le vêtement ? Est-ce que le vêtement a une importance dans le milieu dans lequel tu évolues ? Par exemple, moi j'adore les vêtements de danse. Oui. Parce qu'une de mes séries préférées quand j'étais jeune, c'était Fame. J'adorais.

  • Speaker #1

    I wanna live forever.

  • Speaker #0

    I wanna live forever. Je rêverais de monter comme ça avec des chevilles sur une voiture, en dansant avec un juste au corps, ce qui est juste impossible. À cause de... Enfin bref. Mais... Est-ce que... C'est quoi la particularité du vêtement de danse ? Qu'est-ce qu'il représente pour toi ? Comment est-ce que toi, tu fais plusieurs questions en une. Oui. Comment tu t'habilles quand tu danses, par exemple ?

  • Speaker #1

    Comment je m'habille quand je danse ? Alors, ça dépend encore une fois de mon humeur. Alors, ça peut aller à... Donc, je vais mettre quelque chose qui est assez proche du corps où je vais pouvoir voir les lignes de mon corps, pouvoir corriger ce qui est à corriger en termes de mouvement. Comme ça peut être quelque chose d'assez ample où j'ai juste envie d'être... dans la chaleur corporelle et pas dans le côté esthétique si ça te fait sens donc ça dépend de comment tu vas danser ça dépend plutôt de comment est-ce que je vais me sentir et aussi ça dépend de avec quel mindset est-ce que je vais approcher le cours en fait aussi avec quel mindset est-ce que je vais approcher la journée de travail de répétition si maintenant le but de Mon entraînement va être basé sur les lignes. Donc, je vais plutôt mettre quelque chose qui va favoriser justement la vision de ces lignes dans le miroir. Si maintenant, c'est un travail qui va être plus porté sur le côté émotionnel. Du coup, je vais un petit peu moins faire attention à la couleur ou quoi. Je vais plutôt mettre quelque chose de très, très, très confortable. Comme ça, je peux vraiment aller chercher à l'intérieur et pas aller... sur quelque chose de visuel, plutôt de l'ordre du ressenti.

  • Speaker #0

    À quel âge tu as commencé la danse ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que j'ai toujours dansé, mais on va dire d'une manière sérieuse, sérieuse, sérieuse. En école de danse, j'ai commencé à l'âge de 16-17 ans.

  • Speaker #0

    C'est tard, non, pour la danse classique ?

  • Speaker #1

    C'est tard, oui.

  • Speaker #0

    Quel âge tu as ?

  • Speaker #1

    Là maintenant j'ai 31 ans, bientôt 32. Donc oui effectivement c'est tard, mais j'avais déjà fait d'autres sports avant, j'avais déjà bougé mon corps en passant par la natation, le judo, j'avais fait aussi un petit peu d'équitation, bon là c'est plutôt le cheval qui fait tout le travail. Mais bon, puis aussi du football.

  • Speaker #0

    Donc bouger ton corps, c'est pas quelque chose d'inconnu. Et alors la danse classique, l'image... classiques qu'on en a, c'est des jeunes femmes blanches en tutu.

  • Speaker #1

    N'est-ce pas ?

  • Speaker #0

    Tu es un grand garçon noir qui ne porte pas de tutu, je pense, quand tu danses.

  • Speaker #1

    Pas quand je danse.

  • Speaker #0

    Peut-être quand tu danses, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Non, non, non, je ne porte pas de tutu.

  • Speaker #0

    Ok, d'accord.

  • Speaker #1

    Je ne porte pas de tutu. C'est très, très mignon sur les autres, mais bon, sur moi, I don't know.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que Parce que les miroirs sont omniprésents quand on danse.

  • Speaker #1

    Tout à fait, oui.

  • Speaker #0

    Comme tu dis, on choisit ses vêtements en fonction de la musique sur laquelle on danse, de la chorégraphie qu'on est en train de travailler. Quelle importance a eu le vêtement dans la manière dont tu as créé, construit, imposé, montré ton identité de jeune homme noir faisant de la danse classique ?

  • Speaker #1

    C'est oser se montrer, déjà. Oui, c'est oser se montrer parce que... Donc c'est... un impact quand même assez fort sur ma manière de bouger. Au début, quand j'ai commencé, je mettais toujours un pantalon noir avec un t-shirt oversize.

  • Speaker #0

    Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Parce que je n'aimais pas forcément mon corps à 100%. Parce que dû aux critiques que j'en ai pris... par rapport à mon physique, qui ne ressemblait pas au physique des autres personnes en classe.

  • Speaker #0

    Tu peux donner plus de détails par rapport aux reproches qui t'ont été faits par rapport à ton physique ?

  • Speaker #1

    En tant que danseur noir, c'était surtout au niveau des pieds. Donc, je mettais des pantalons qui descendaient jusqu'à ses... bas, qui couvrait pratiquement mes pieds, parce qu'en fait, recevoir souvent des remarques, tu as pas un beau pied, rentre tes fesses, tu as les fesses qui ressortent.

  • Speaker #0

    Et ça, c'est de l'ordre de... Tu peux pas gérer, c'est pas quelque chose sur lequel tu peux travailler, la forme de tes pieds.

  • Speaker #1

    On peut le travailler d'une manière musculaire, mais c'est vrai que j'ai une forme de pied de... de base, donc du coup ça ne va pas nécessairement ressembler à un pied caucasien, si il faut dire les choses.

  • Speaker #0

    Mais donc tu veux dire qu'un pied africain n'a pas la même forme qu'un pied caucasien ?

  • Speaker #1

    Disons que le pied noir est un pied un peu plus... En tout cas, pour moi, est un pied un peu plus dur à travailler. Il n'est pas facilement cassable et pliable. OK. Donc...

  • Speaker #0

    Donc tu le couvrais volontairement ? Je le couvrais volontairement,

  • Speaker #1

    parce qu'on disait que ça allait... Enfin, je veux dire qu'ils étaient pas à beau et que du coup,

  • Speaker #0

    il y avait rien à faire. Ok, ok. Et donc comment est-ce que t'as... avancer avec ça. Donc au début tu te couvrais.

  • Speaker #1

    Je me couvrais et puis après à un moment donné j'en ai eu assez. À un moment donné j'en ai eu assez et puis je me suis dit je vais travailler sur ce qu'on dit qui sont mes défauts et en fait je me suis rendu compte que c'était complètement démonstreux. qu'en fait, j'ai de beaux pieds.

  • Speaker #0

    Et de belles fesses.

  • Speaker #1

    Et j'ai de belles fesses aussi. J'ai de beaux pieds, j'ai de belles fesses, j'ai de beaux bras. Et tout ça, tout ça, quoi.

  • Speaker #0

    Et est-ce que quand on danse, aujourd'hui, alors, qu'est-ce que tu dis de toi quand tu t'habilles pour aller danser ? Parce que quand tu danses en studio, quand tu es en entraînement ou en répétition, est-ce que tu dis quelque chose de toi lorsque tu t'habilles ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai le droit d'être là.

  • Speaker #0

    C'est ça que tu dis ? Oui. En portant des choses qui ne couvrent pas tes pieds, qui ne couvrent pas tes fesses.

  • Speaker #1

    Mais en fait, j'ai le droit d'être là, j'ai aussi le droit de travailler, de corriger, peut-être pas corriger, d'améliorer.

  • Speaker #0

    Elle a nuancé quand même.

  • Speaker #1

    J'ai le droit aussi... d'améliorer ce qui est déjà là, même si ça pourrait gêner certaines personnes. Parce que justement... c'est quelque chose qui est arrivé souvent dans mes oreilles, c'est que Oh mon Dieu, j'ai jamais eu un garçon comme toi

  • Speaker #0

    Ça veut dire quoi ?

  • Speaker #1

    Justement, ça veut à la fois tout dire et rien dire à la fois.

  • Speaker #0

    On t'a déjà dit ce que ça voulait dire ? Toi, tu as une idée de ce que ça veut dire ? Un garçon comme toi, c'est quoi ? C'est un garçon noir dans des compagnies, sur des scènes en Belgique ?

  • Speaker #1

    Un garçon noir, un garçon aussi grand ?

  • Speaker #0

    Combien tu mesures ?

  • Speaker #1

    1m85.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est grand.

  • Speaker #1

    Mais après, en tant que réflexion du genre, oui, tu as un corps qui est difficile. difficile peut-être, mais peut-être pas nécessairement pour d'autres. Je ne pense pas avoir un corps difficile, je pense que j'ai un corps très simple, mais je pense que la simplicité, ça devient difficile pour certaines personnes.

  • Speaker #0

    Et donc, aujourd'hui, ce n'est plus un problème pour toi d'être... devant un miroir avec d'autres danseurs, d'autres danseuses et de choisir ce que tu portes. Tu ne te caches plus.

  • Speaker #1

    Dire que c'est plus difficile, ça serait mentir. C'est un travail. C'est un travail, que ce soit avec ou sans danseurs autour de moi, déjà se regarder dans le miroir et... Et apprécier, accepter, aimer ce que l'on voit, c'est un travail difficile, qui peut paraître difficile. Pourquoi ? Parce qu'on ne nous a pas appris à aimer ce que l'on voit de nous. On nous a toujours comparé.

  • Speaker #0

    Qui ça, nous ?

  • Speaker #1

    En tout cas, je vais plutôt parler pour moi. On m'a souvent et toujours comparé aux autres. regarde, c'est bien, regarde comment un tel fait, pourquoi est-ce que tu ne fais pas pareil.

  • Speaker #0

    Dans la danse ?

  • Speaker #1

    Que ce soit dans la danse ou d'une manière générale. Pour moi, ma danse, c'est un petit peu... un reflet de la vie qu'il y a quelque part. Parce que c'est quand même une mini société, si on peut dire ça comme ça. J'avais une prof de danse, elle m'a dit que quand elle était à l'école de danse, elle entendait des remarques. Ah, tu vois cette fille, la hauteur à laquelle elle lève sa jambe ? Ah ben, toi, tu dois lever ta jambe un peu plus haut. Donc du coup, ce que tu fais, c'est que tu... c'est que tu te compares. Donc, on t'amène à te comparer à l'autre et on t'amène à être dans un mindset où ce que tu vois de toi dans le miroir n'est pas assez.

  • Speaker #0

    Donc, ça, c'est à la scène, on va dire. Oui. Et dans ta vie, en dehors de la musique, de la barre, des studios et des miroirs, est-ce que c'est la même chose ? Est-ce qu'il y a aussi cet exercice de comparaison

  • Speaker #1

    Hum. Ça peut arriver.

  • Speaker #0

    Plus souvent, tu es dans quelle démarche, tu vois, par rapport à ton image, par rapport aux autres, par rapport au monde, en fait ?

  • Speaker #1

    Alors moi, mon image à moi, par rapport aux autres, que ce soit par rapport aux vêtements ou que ce soit par rapport à ma manière d'être, en fait, je ne me compare pas nécessairement. Ma première approche ne va pas justement être de me comparer à l'autre, de me dire, oui, je suis. Je suis mieux que toi, je vais t'écraser ou quoi. Non, parce qu'en fait, je me rends compte que dès qu'on commence à rentrer dans cette démarche-là, en tout cas pour moi, il y a quelque chose d'assez sale, d'assez dégueulasse à l'intérieur qui commence à pousser. et qui ne fait pas nécessairement du bien en fait, parce que du coup on sent vraiment qu'il y a une sorte de poison qui se crée à l'intérieur, et donc du coup ça entraîne un comportement avec autrui qui est de l'ordre du... Oui, qui est très néfaste, qui est très sombre, qui est très... Ça me donne presque la chair de poule à force d'y penser. Ça n'a rien de sain, ça n'a rien de joli, ça n'apporte rien de constructif à autrui.

  • Speaker #0

    Ça veut dire que sur les deux tableaux, autant à la scène qu'à la ville, tu t'habilles d'abord pour toi, en fonction de ton humeur, de tes émotions et de tes objectifs. Là, il fait froid, donc tu t'habilles chaudement parce que tu n'aimes pas avoir froid. Quand tu es en studio... tu choisis en fonction de ce que tu vas faire comme travail où est-ce que tu t'habilles ?

  • Speaker #1

    alors donc je m'habille dans la meilleure friperie du monde je veux savoir la garde-robe de mon père mais non il ne va pas m'aimer sinon non en fait je veux dire par là que lorsque je regarde des photos photos de mon père parce qu'en fait, il faut dire quand même que si je dois avoir des idéaux de beauté, ce sont quand même mes parents. Parce que, waouh, ils sont juste magnifiques. Ils sont beaux.

  • Speaker #0

    C'était pas mal non plus, d'entendre.

  • Speaker #1

    Merci, c'était beau. Quand je dis la garde-robe de mon père, c'est parce qu'en fait, quand je regarde des photos des années 70, il avait un look mais absolument, il a toujours un look que...

  • Speaker #0

    Ok, je comprends un peu plus la vibe d'aujourd'hui parce qu'effectivement, il y a un petit... Il y a un petit twist 70's dans les couleurs. Le pantalon, il n'est pas très pas de def aujourd'hui, mais tu l'as.

  • Speaker #1

    Donc, il y a toujours un petit peu ce côté évasé, toujours assez proche du corps. Donc, quelque chose qui épouse le corps sans trop l'épouser non plus, mais avec un côté assez confortable. Donc, quelque chose qui tombe sur le corps et qui prend la forme du corps. qui ne soit pas trop découpé d'une manière où on ne sait pas ce qui va pouvoir rentrer dedans. OK.

  • Speaker #0

    Et donc, tu t'inspires de la garde-robe de ton père ou tu vas vraiment prendre ses pulls ?

  • Speaker #1

    Non, non, non. Je m'inspire de la garde-robe de mon père, oui.

  • Speaker #0

    Et après, tu vas chercher où, alors, les pièces qui restent ?

  • Speaker #1

    Du coup, je vais en friperie. Je vais en friperie ou bien... Parce qu'en fait, j'ai un petit peu du mal à les prendre. En boutique de première main ? Si je vais en boutique de première main, c'est vraiment pour prendre des petits basiques, comme une chemise ou quoi, et encore, en fait. Parce que je trouve que les vêtements de l'époque, je dis de l'époque comme si c'était il y a hyper longtemps, mais c'était il n'y a pas si longtemps que ça, en fait. Je trouve qu'ils avaient une certaine... du caractère en fait, une âme, quelque chose qui vit. Ou bien chez des créateurs.

  • Speaker #0

    Ah ouais ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #0

    Alors, quel est ton top 3 des friperies à Bruxelles ? Ouf. Ou alors ta best friperie à Bruxelles ?

  • Speaker #1

    Oh my god.

  • Speaker #0

    Là où t'as acheté le plus de pièces. Ou celle où tu trouves des dingueries.

  • Speaker #1

    Bah du coup, des dingueries, je dirais pas. Mais là où j'ai acheté le plus de pièces, je dirais plutôt épisodes.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Ouais. Puis là où j'ai trouvé des dingueries. Je n'en ai pas encore trouvé de dinguerie.

  • Speaker #0

    Ok. Écoute, on va faire des petites promenades ensemble.

  • Speaker #1

    Voilà.

  • Speaker #0

    Tu peux trouver des dingueries.

  • Speaker #1

    Super.

  • Speaker #0

    Et comment est-ce que tu choisis ? Un vêtement que tu décides...

  • Speaker #1

    Au coup de cœur.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi qui t'accroche en général ?

  • Speaker #1

    En général, c'est une matière.

  • Speaker #0

    Tu la vois ou tu la touches ? Ou tu la touches d'abord et ensuite tu l'observes ?

  • Speaker #1

    Je la touche. En fait, oui, je vois la couleur et puis ensuite la matière, je la touche. Et puis surtout, déjà, comment est-ce que le tissu tombe ?

  • Speaker #0

    Donc, tu vois la couleur ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    J'essaye de déterminer un peu ton processus de sélection de la pièce vintage. Tu vois une couleur, tu t'approches, tu détermines un petit peu la matière, tu touches la matière, tu sors le vêtement, et puis tu regardes comment il tombe déjà sur le cintre. Et puis de là, tu sais si tu vas l'essayer ou pas. Et donc quand tu passes à l'essayage. qu'est-ce qui doit se passer à l'essayage pour que tu continues l'aventure jusqu'à la caisse ?

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qui va être de l'ordre du ressenti et qui va attention, ça doit procurer ceci. Ah !

  • Speaker #0

    Ah oui ! Oui. Donc un soulagement, une satisfaction. Oui. C'est ce que je comprends dans ton...

  • Speaker #1

    Ah ! Oui, donc c'est vraiment un... Ah oui, ok.

  • Speaker #0

    Une évidence.

  • Speaker #1

    Oui, une évidence. Quelque chose qui est comme un gant, en fait.

  • Speaker #0

    Ok. Tu parlais de seconde peau tout à l'heure.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Oui.

  • Speaker #0

    Donc une seconde peau.

  • Speaker #1

    Quelque chose qui est juste.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Et arriver à trouver quelque chose de juste, c'est pas facile.

  • Speaker #0

    Ouais, donc tu tombes pas régulièrement sur...

  • Speaker #1

    Donc c'est pour ça que je dis que je n'ai pas encore trouvé de dinguerie, tu vois.

  • Speaker #0

    Ouais, ouais. Après, t'es pas venu souvent chez moi. Ah,

  • Speaker #1

    voilà.

  • Speaker #0

    Tu sais que je collectionne des dingueries. Ah,

  • Speaker #1

    ah.

  • Speaker #0

    On va se revoir.

  • Speaker #1

    On va se revoir.

  • Speaker #0

    Alors, ok, donc, sélection en fripes. Donc c'est de là que je vois que t'as des belles qualités sur toi, des belles matières sur toi. Et puis t'as dit que tu t'habilles aussi des designers.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    quel designer, comment tu les choisis, comment tu fais aussi pour te les payer, parce que je pense que beaucoup de gens, dont moi, on aime les designers, connus, inconnus, surtout on a un amour pour les belles pièces, bien coupées, dans de belles matières, mais que tout ça, ça a un certain coût, et que c'est difficile. de se dire qu'on va consacrer plusieurs centaines d'euros dans un vêtement alors qu'on pourrait avoir quelque chose de similaire, dix fois moins cher dans un magasin de distribution. Et puis alors, ça veut dire que si tu payes un vêtement dix fois plus cher, tu vas pouvoir en acheter qu'un peut-être, au lieu de t'en acheter dix différents. Ça, c'est la logique de la fast fashion. Est-ce que tu as déconstruit cette logique de la fast fashion ?

  • Speaker #1

    Alors moi je vais plutôt dans la qualité plutôt que dans la quantité.

  • Speaker #0

    Amen !

  • Speaker #1

    Donc du coup oui, quand je dis designer, après je ne dis pas que j'ai tout un dressing qui est rempli de vêtements de designer, mais je veux dire lorsque je tombe sur une pièce et que la matière elle me plaît, et que sur le moment j'ai l'opportunité de me l'offrir, je le fais.

  • Speaker #0

    Ok, ce n'est pas un frein.

  • Speaker #1

    Donc non, ce n'est pas un frein. Enfin, je veux dire, je ne vis pas au-dessus de mes moyens non plus. Donc que ça, on entend bien.

  • Speaker #0

    Et quels sont tes designers préférés ? ce que tout le monde connaît ? Et peut-être que ton designer ou tes designers préférés ne sont pas connus du grand public ?

  • Speaker #1

    En fait, il y a un designer en particulier avec qui j'ai déjà travaillé, avec qui je travaille encore en ce moment. Il s'appelle Koualé. Il a reçu le prix du fashion design, si je ne dis pas de bêtises, du MAD. Et en fait, il a créé toute une... La collection est en rapport avec un métissage culturel, parce qu'en fait il est roi rwandais et qui a grandi ici en Belgique. Donc toute sa collection se prête sur ce métissage culturel, que ce soit au niveau du drapé, du tissu, au niveau de l'imprimé du tissu, des différentes matières. Il a d'ailleurs créé quelques pièces sur moi.

  • Speaker #0

    Tu es une muse ! Manu est une muse de la mode !

  • Speaker #1

    Donc il a déjà créé quelques pièces sur moi et je dois dire que c'est aussi un honneur et un privilège de pouvoir avoir un vêtement qui a été fait sur mesure par un jeune créateur. C'est un talent !

  • Speaker #0

    Et les pièces que tu as de Koalé, tu les portes pour quelles occasions ?

  • Speaker #1

    Je les porte pour des occasions. Déjà, il faut dire aussi que dans le travail de Koalé, c'est un travail qui met en avant... toute la gloire et la royauté du tissu africain. Parce que c'est quand même un tissu noble, une matière noble qui est portée de façon noble. par des personnes. Les robes, là. Appelons un chat un chat. Donc du coup, je vais vraiment aller honorer ces créations, honorer ces vêtements dans des événements qui s'y prêtent, dans des endroits qui s'y prêtent, que ça soit un mariage ou bien un vernissage, que ça soit à une soirée d'ouverture, à une réception.

  • Speaker #0

    plus pour des événements que pour la vie quotidienne ?

  • Speaker #1

    En tout cas, moi, ce sont vraiment les endroits où je vais les honorer parce qu'aussi, vu la météo que nous avons aussi à Bruxelles, parfois c'est un petit peu compliqué de savoir, ok, telle matière, est-ce que ça serait adéquat pour tel météo ? Donc oui, plutôt pour des... dans des endroits qui se prêtent à leur glorification.

  • Speaker #0

    Et comment tu te sens quand tu portes ces vêtements-là qui visiblement t'apportent de l'empouvoirment ? Je dis en français. En français. Parce que j'aime le français. L'empowerment. Qu'est-ce que tu ressens dans ces étoffes, dans ces pièces dont tu connais le créateur, dont tu connais... l'histoire, le processus créatif, parce que visiblement tu y as contribué, puisque tu as été le modèle, le mannequin sur lequel certaines pièces ont été conçues. Qu'est-ce que toi, ça t'apporte ? Qu'est-ce que toi, ça te raconte ? Et en les portant, qu'est-ce que tu racontes au monde ?

  • Speaker #1

    Déjà, de un, ça sonne juste. Qu'est-ce que ça raconte au monde ? Encore une fois, c'est que j'ai le droit d'être là dans toute ma splendeur.

  • Speaker #0

    Alors moi tu sais je vais mettre les pieds dans le plat dans toute ton africanité dans toute ta noiritude je viens d'inventer un mot tu l'as dit à ma place je l'ai dit à ta place génial au moins je ne t'ai pas je craignais quand même de te croisser parce que c'est important peut-être on fait un petit peu On n'en est qu'au début de ce podcast, donc on ne sait pas encore on, je dis on parce que je parle de moi et tous mes colloques dans ma tête. On ne sait pas encore quel ton vraiment on va donner, on va avoir, mais on voudrait vraiment pouvoir parler sans langue de bois. Et donc, quand je dis que ça te permet de t'exprimer dans toute ta noirétude, c'est parce que tu évolues dans un milieu qui est essentiellement blanc, assez aisé, et que tu fais tâche de temps. N'est-ce pas ? Une jolie tâche, hein ? Une jolie petite tâche. Ce que j'ai compris et ce que je comprends, c'est que c'est un peu une revendication.

  • Speaker #1

    Oui, quand même, parce qu'il ne faut quand même pas oublier le passé colonial que la Belgique a avec le Congo. Parce qu'encore une fois, je suis Congolais, du Kassai occidental, né ici en Belgique, à Bruxelles. donc j'ai dû rentrer dans des cases justement pour ne pas faire trop tâche justement donc bien parler, bien se tenir bien s'habiller c'est pour ça que quelque part mon éducation a aussi une grande influence sur la manière dont je m'habille aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Qui est différente d'il y a quelque temps, ou d'avant ? Tout à l'heure, tu as dit que maintenant, tu as envie de ne plus t'excuser. Oui. Ça veut dire que je suppose qu'avant, tu t'excusais et que tu t'habillais en fonction de comment est-ce que tu pensais qu'on attendait, qu'on souhaitait que tu sois habillé.

  • Speaker #1

    Par exemple, oui.

  • Speaker #0

    Mais qu'aujourd'hui, tu te réappropries ton identité, entre autres, au travers de ce que tu choisis de porter. Et quand tu es... dans un studio de danse, et quand tu vas en représentation dans des événements en tant que danseur, et puis en tant que toi, Emmanuel, citoyen belge, de parents congolais, qui eux sont nés au Congo, toi ici, dans un pays qui a une histoire assez longue, assez lourde, avec le pays d'origine de tes parents. Oui. Est-ce que... tu as déjà pensé que c'est une revendication, que les choix que tu fais de, par exemple, porter exclusivement des vêtements d'un designer aussi afrodescendant qui crée des vêtements que je qualifierais aussi d'afropéens, parce que c'est des vêtements inspirés de techniques, de vêtements traditionnels rwandais, mais ce sont des vêtements occidentaux. Est-ce que c'est une manière de revendiquer que tu es un afrodescendant vivant en Europe, en Occident, mais qui n'oublie pas d'où il vient ? Je vais loin quand même.

  • Speaker #1

    Oui, quand même. Est-ce que je vais trop loin ? Je dirais que les créations de Kuali, ce ne sont pas des techniques rwandaises, c'est plutôt une technique africaine noire dans son ensemble. Ça rassemble plusieurs pays d'Afrique noire. Donc, on va plutôt dire ça comme ça pour avoir ensuite une esthétique qui a un métissage européen et africain. ok et ça ça te définit ça te qualifie mieux est-ce que c'est ben oui quelque part je peux dire ça comme ça parce que j'ai ce métissage en moi de toute manière j'ai ce métissage européen et afrique noire oui oui oui donc oui ça sonne juste pour moi peut-être que je me trompe mais Je n'en ai pas l'impression. Parce que lorsque je porte le vêtement, je me sens bien dedans, je me sens à l'aise, ce sont des couleurs qui mettent en avant ma personnalité. Quand je dis qu'ils mettent en avant ma personnalité, ce sont des couleurs vives, joyeuses, qui ont une histoire, comme tout le monde. Tout le monde a une histoire, mais par rapport, encore une fois... Par rapport à toute ma noiritude. Voilà, c'est...

  • Speaker #0

    On va la garder celle-là. La noiritude.

  • Speaker #1

    Donc oui, c'est plein de vie, c'est chaud, c'est...

  • Speaker #0

    Ça, c'est des adjectifs qui pourraient te qualifier toi en tant que personne ?

  • Speaker #1

    Oui, oui, oui, oui. Sans aucune prétention.

  • Speaker #0

    Tu penses que, de manière générale, on choisit ses vêtements comme on... pourrait définir sa personnalité ?

  • Speaker #1

    Oui. Je me souviens lorsque j'étais à l'école secondaire, il y avait une école en particulier où je ne me sentais pas très bien, voire même pas bien du tout d'ailleurs. Et je me souviens qu'en fait, mon outfit, c'était un long t-shirt oversize, avec un jeans très oversize, avec des baskets, et avec un hoodie sur la tête.

  • Speaker #0

    C'est ce que tu portais ? Oui.

  • Speaker #1

    Donc, ça a été à chaque fois des choses très, très, très, très, très, très amples où je pouvais me cacher, en fait.

  • Speaker #0

    Et pourquoi est-ce que tu voulais te cacher ?

  • Speaker #1

    Parce que, justement, je remarquais que je n'étais pas nécessairement comme les autres enfants de cette école-là, avec une personnalité complètement différente, avec un mindset complètement différent. avec une manière d'être, une manière de me voir complètement différente. J'avais tout le temps mes mains dans les poches, j'avais la tête baissée, je ne parlais pas.

  • Speaker #0

    Mais tu as toujours été aussi grand ? Cette question peut paraître bizarre, mais je veux dire, parfois on a des poussées de...

  • Speaker #1

    J'ai eu une poussée de croissance. J'étais resté petit pendant quand même assez longtemps. Puis ensuite, en un été, j'ai pris 11 centimètres. Oh, waouh ! Oui, en un été.

  • Speaker #0

    Je pense que je n'ai jamais autant grandi.

  • Speaker #1

    du coup voilà donc j'ai pris 11 centimètres en une fois et du coup voilà donc on va dire que oui je donc là tu te sentais pas bien donc tu portais des vêtements dans lesquels tu t'effaçais oui et

  • Speaker #0

    à quel moment est-ce que tu t'es sentie mieux, suffisamment mieux pour ne plus t'effacer mais plutôt t'affirmer est-ce que c'est arrivé ?

  • Speaker #1

    oui c'est arrivé d'une certaine manière quand je suis arrivé à l'école de danse ah oui

  • Speaker #0

    donc malgré le fait que donc c'était t'as fait ça par étapes peut-être je sais pas je viens d'avoir une image comme ça qui m'est venue à la tête qui m'est passée par la tête c'est de toi en train d'éclore comme ça donc ça veut dire que l'éclosion a commencé quand t'as commencé la danse donc à t'habiller un petit peu plus en fonction de comment tu pouvais définir ta personnalité et puis tout à l'heure tu disais que c'est un travail de tous les jours que de pouvoir affirmer qui on est au travers de ces vêtements et pour toi en particulier lorsque tu es en studio parce que tu es un homme noir faisant de la danse classique Première étape de l'éclosion, c'est après l'école secondaire, quand tu commences à faire de la danse classique. Comment ça s'est exprimé ? Comment est-ce que tu es passé du hoodie, t-shirt oversize, jean oversize, main dans les poches, à quoi après ? C'était quoi après ?

  • Speaker #1

    On va dire que c'était des choses un petit peu moins oversize.

  • Speaker #0

    Tu as fait des trucs un peu moins grands. Tu as commencé à porter des vêtements un peu moins larges.

  • Speaker #1

    Un peu moins larges. Juste un t-shirt, on va dire d'une taille régulière qui va juste être à ma taille. Et puis après, un pantalon pas trop ample non plus, mais juste avec une coupe droite où on peut quand même voir les lignes de mon corps.

  • Speaker #0

    Et à quel moment est-ce que tu es passé à ce look-là que tu as aujourd'hui ? ce look un peu d'un spy 70's comme ton papa qui avait la classe et qu'il a encore une classe mais incroyable à quel moment justement t'as fait ce switch alors de passer de vêtements juste à ta taille pas pour te cacher mais juste pour t'habiller à ce look que t'as aujourd'hui qui est quand même un peu marqué tu vois t'as quand même une identité stylistique que teinté d'élégance, à quel moment tu t'es autorisé ça ?

  • Speaker #1

    Est-ce que je vais avoir une réponse correcte par rapport à cette question ? Je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Toutes tes réponses sont des bonnes réponses.

  • Speaker #1

    À quel moment est-ce que c'est arrivé ? C'est arrivé...

  • Speaker #0

    Peut-être que c'est arrivé progressivement.

  • Speaker #1

    C'est arrivé un petit peu comme ça, je pense. Oui, ça a été arrivé assez progressivement. C'est arrivé au moment où où en fait, je pense que ça va être un petit peu redondant ce que je vais dire, mais c'est arrivé à un moment où dans ma tête, c'est moi, c'est comme ça, c'est comme ça que j'aime bien m'habiller, c'est comme ça que je me sens, c'est apprendre ou à laisser, that's it.

  • Speaker #0

    ok et je reviens un petit peu sur ce qu'on disait juste avant quand tu expliquais que tu portais des vêtements de créateur et de ce créateur afrodescendant Koale Akiza Pourquoi est-ce que pour toi c'est important ? Parce que tu as dit que tu portais ces pièces pas dans la vie de tous les jours, mais pour des performances, pour des vernissages, lors d'événements, quand tu vas vraiment un peu te montrer. Est-ce que c'est plus important pour toi de porter ces vêtements à ces moments-là qu'à d'autres ? Et si oui, pourquoi ?

  • Speaker #1

    Pourquoi ? Parce que déjà, dans le milieu, nous ne sommes pas beaucoup.

  • Speaker #0

    Quel milieu ?

  • Speaker #1

    Dans le milieu créatif, dans le milieu artistique.

  • Speaker #0

    Et c'est qui nous ?

  • Speaker #1

    Donc nous, les noirs.

  • Speaker #0

    Ok. Appelons un chat un chat et un noir un noir.

  • Speaker #1

    Appelons un chat un chat et un noir un noir. Bon,

  • Speaker #0

    aujourd'hui, parce qu'en fait, oui, enfin, on ne doit pas forcément... Ce n'est pas ce qui définit une personne, mais dans certaines circonstances, ça fait la différence. Donc ok, c'est pour...

  • Speaker #1

    C'est pour... vas-y pas de l'homme de bois oui mais en fait je cherche vraiment les mots justes pour que ça sorte de la bonne manière et pour que ça soit surtout entendu de la bonne manière c'est pas juste pour montrer que nous sommes là, oui les gens nous voient que nous sommes là mais c'est pour nous montrer nous, pour nous voir nous pas juste une image qu'on veut nous coller pas juste euh le petit noir dans le coin de la salle qui est très reconnaissant parce qu'il a eu une petite place, pas juste le noir dans la salle qui occupait à servir les coupes de champagne, mais qui garde l'uniforme du colonisateur, si je peux dire ça comme ça. Donc c'est encore une fois revendiquer sa place. C'est ne pas être désolé d'exister. malgré toutes les tentatives qu'on a de vouloir nous effacer. Parce que j'ai envie de dire, vous nous avez amenés ici, maintenant il faut assumer.

  • Speaker #0

    Est-ce que je suis juste si je dis que dans l'environnement dans lequel tu évolues, le milieu créatif, artistique, celui de la danse, la danse classique en particulier, tu te vis un petit peu comme... comme une sorte de porte-drapeau pour toi et pour les autres acteurs créatifs de la communauté afro-descendante ?

  • Speaker #1

    Pour moi, c'est très, très important, oui, surtout d'être un homme danseur noir de m'incarnation de peau, de mon teint de peau foncé. C'est très important, pourquoi ? Parce qu'en fait, moi, en étant à l'école de danse, je n'ai pas nécessairement eu de modèle ou de repère. Ou s'il y en avait, c'était un ou deux, mais pas ici en Belgique. Donc oui, pour moi, c'est quand même assez important, oui. Parce que si, maintenant, mettons, un enfant noir va à l'opéra pour la première fois et qu'il me voit sur scène et que ça réveille en lui, que ça soit par rapport à la danse ou par rapport à autre chose, dans la vie où il peut se sentir, ah mais je suis quand même le seul noir dans mon secteur. Mais il n'y a personne d'autre qui va arriver à un tel niveau. Et si en me voyant sur scène, ça peut réveiller en lui une flamme, une étincelle, quelque chose. si lui il y est arrivé mais en fait moi aussi qu'est-ce que ce soit comme discipline que ce soit la danse que ce soit la mode la musique ou que sais-je il

  • Speaker #0

    pourra avoir une manifestation physique de son rêve futur c'est génial en fait t'as conscience et tu prends à bras le corps le rôle de rôle modèle

  • Speaker #1

    Je pense que quand on fait partie d'une minorité, c'est quand même important, surtout une minorité comme une minorité, parce qu'on n'est pas vraiment une minorité, parce que le peuple noir est quand même un grand peuple. Disons les choses telles qu'elles sont, disons les termes, s'il vous plaît. Le peuple noir est un grand peuple, mais c'est qu'on nous a un peu divisé pour mieux régner sur nous. C'est pour ça qu'on se retrouve à être le seul noir de tel département. Donc c'est important, oui, c'est très très important.

  • Speaker #0

    Et quel message tu veux véhiculer quand tu portes un vêtement qui a été fait par un créateur noir ? Qu'est-ce que tu veux raconter ? par rapport à toi en tant que danseur, rôle modèle, dans cette industrie, dans ce secteur, et qu'est-ce que tu veux raconter aussi, si jamais tu veux raconter quelque chose ou dire quelque chose, par rapport aux autres créatifs qui sont là, qui existent, et qu'on ne voit pas forcément. Parce que j'imagine que... les pièces des créateurs que tu portes n'ont pas une audience aussi large que la tienne, puisque tu es danseur. L'Opéra de la Monnaie, c'est comme ça qu'on dit ? En ce moment, oui. Voilà. À l'Opéra de la Monnaie, qui est quand même une institution, c'est quand même quelque chose d'assez prestigieux. C'est quoi le message que tu veux véhiculer ? Et ? Je pense que ça c'est la partie la plus importante de la question. À qui ?

  • Speaker #1

    Alors, à qui ? Déjà, j'ai envie de dire aux jeunes artistes noirs, que ce soit garçons ou filles, crois en toi, crois en tes rêves. Tu es plus que ce que tu ne penses. Tu as tout ce qu'il faut. et tu vas y arriver n'aie pas peur de prendre ta place entoure-toi de personnes qui sont là pour te voir briller parce qu'elles veulent te voir briller pas parce que ça leur apporte quelque chose à sens unique tu as le droit de exister Donc ça c'est déjà une chose. Et aux haters, si je peux dire ça comme ça, aux haters qui ont tenté de me mettre à plat, j'ai juste envie de leur dire... C'était bien essayé. C'était bien essayé, mais... Et merci.

  • Speaker #0

    Ah ouais ? Oui. Tu vas dire merci aux haters ?

  • Speaker #1

    Bah oui, parce que quelque part, leur haine a alimenté mon feu.

  • Speaker #0

    Explique.

  • Speaker #1

    On dit qu'entre l'amour et la haine, il n'y a qu'un pain.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Donc... leur haine envers moi a fait que attiser le feu de l'amour que j'ai pour la vie en fait pour la vie ?

  • Speaker #0

    c'est beau ce que tu viens de dire parce que j'ai vraiment eu des personnes dans cette école d'ailleurs

  • Speaker #1

    qui ont vraiment tenté de me Ouais, m'anéantir.

  • Speaker #0

    Ah ouais, carrément ?

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Une méchance, c'était gratuit. Parce que tu es différent. Parce que tu ne rentres pas justement dans cette case. Ouais, ça a quand même bien joué sur mon mental et au quotidien. Donc c'était pour ça, en fait. T-shirt large, hoodies sur la tête, même en classe, pantalon hyper large pour s'effacer le plus possible. Mais malgré ça, il y a toujours eu une tentative de... de vouloir m'exterminer.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Bon,

  • Speaker #0

    tu es là.

  • Speaker #1

    J'utilise des mots forts, je sais, mais c'est comme ça que je l'ai vécu, c'est comme ça que je l'ai ressenti avec les... Enfin, je n'avais pas rentré dans les détails, mais c'est quand même des choses très fortes et très difficiles. Quand on est un ado qui sent plein de choses changer émotionnellement, physiquement, à l'intérieur de soi, de recevoir ce genre d'attaque-là, c'est très très dur. Donc oui.

  • Speaker #0

    Et aujourd'hui, c'est quoi ton vêtement préféré ?

  • Speaker #1

    Mon vêtement préféré ?

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Vêtements préférés. C'est un vêtement auquel je ne dois pas... pas pensé est-ce que c'est un vêtement qui existe ? c'est un vêtement qui existe et c'est quoi ? c'est quoi ? donc pas seulement d'une manière métaphorique ? non non non ah ok vraiment mon vêtement préféré aujourd'hui ? oh my goodness ben c'est ma couleur de peau noire oh C'est ma couleur de peau noire, c'est mon vêtement préféré. ça fait désabîmer complètement c'est peut-être prétentieux là ce que je suis occupé à dire non c'est très bien tu t'assumes t'as dit non t'excuses pas donc bon on va on va arriver sur la fin et alors on

  • Speaker #0

    va faire un truc un peu sympa que j'aime bien faire tu connais le principe du portrait chinois

  • Speaker #1

    Tu peux me rappeler ?

  • Speaker #0

    Alors, je te dis ici, en l'occurrence, je vais te dire, si tu étais un pull, quel pull tu serais ?

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Donc, si tu étais un pull, au mois de novembre, en Belgique ?

  • Speaker #1

    Oui. Je serais un pull en Cachemire. Un pull en Cachemire. un col roulé de couleur rouge.

  • Speaker #0

    Frileux, mais... I'm here. Ouais. Look at me.

  • Speaker #1

    Un pull en cashmere, col roulé de couleur rouge.

  • Speaker #0

    C'est du temps pantalon.

  • Speaker #1

    Un pantalon noir. en coton, coupe droite. Qui dessine un peu la fesse quand même.

  • Speaker #0

    La fesse qui est trop fesse.

  • Speaker #1

    La fesse qui est trop fesse. Tu vois ? Oui. Tu as compris, non ?

  • Speaker #0

    Très bien.

  • Speaker #1

    Donc, noir, pourquoi ? Parce que noir, c'est une couleur de pouvoir. et qui est très classe, qui est très royale. Et droite, pourquoi ? Parce qu'en fait, c'est une coupe qui tombe sur les formes du corps. Et voilà.

  • Speaker #0

    Si tu étais une paire de chaussures ?

  • Speaker #1

    Une paire de chaussures ? Une paire de chaussures... Une bottine. Parce que nous sommes toujours au mois de novembre, n'est-ce pas ?

  • Speaker #0

    Ou pas ! Si tu as une saison favorite qui correspond à une autre paire de chaussures, tu pourrais être une autre paire de chaussures.

  • Speaker #1

    Non, parce que là, ce que j'ai en tête, c'est... ça se prête plutôt... enfin, quoique, ça pourrait aussi se prêter au printemps. ça pourrait aussi se prêter au printemps donc ça serait une bottine avec une petite talonnette si je peux dire ça comme ça noire la matière la matière En cuir satiné ? Oui. En cuir satiné.

  • Speaker #0

    Tu peux être la chaussure que tu veux.

  • Speaker #1

    En cuir satiné, oui, quelque chose pareil.

  • Speaker #0

    Et donc, si tu étais un vêtement de dessus, donc une veste ou un manteau, est-ce que tu serais plutôt... Un vêtement du mois de novembre ou un vêtement du mois de juin ?

  • Speaker #1

    Quand j'ai la silhouette en tête, c'est plutôt une silhouette du mois de novembre. Le vêtement du dessus que j'aurais, ce serait un trench.

  • Speaker #0

    OK.

  • Speaker #1

    Un trench de couleur. Est-ce que du vert, ça serait trop ? Avec cette silhouette-là, peut-être pas.

  • Speaker #0

    Vert sapin, comme ça ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    C'est pas mal. J'ai un peu la silhouette en tête. Tu la sais pas ? Oui. Il va falloir la dessiner. Il va falloir la... Tu me compliques la tâche. Comment je fais pour illustrer ce podcast ? Moi, maintenant, des poteaux, des illustrations, on fait quoi ? OK. J'ai une dernière question.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Peut-être que cette question va être la question qui va revenir dans tous les épisodes. Quelle est pour toi la définition du vêtement ? Qu'est-ce qu'un vêtement pour toi ?

  • Speaker #1

    Un vêtement pour moi c'est... Alors déjà c'est pas juste un vêtement. C'est pas juste un vêtement. Dans certaines circonstances ça peut juste être un vêtement. Mais quand on met un vêtement c'est... C'est on se montre, c'est on s'affirme, on se présente. On brille, on ose, on prend pas de détours. C'est le soleil.

  • Speaker #0

    Merci Manu. Merci de t'être déshabillé avec moi. De t'être laissé déshabiller par moi.

  • Speaker #1

    Ben écoute, c'était assez bien fait. C'était assez smooth quand même.

  • Speaker #0

    Merci pour ton écoute. J'espère que cet épisode avec Emmanuel t'a plu. Si tu as des questions, des commentaires, des suggestions, des propositions, des interrogations, n'hésite pas à me laisser un commentaire. Et surtout, je t'invite à follower, suivre, t'abonner à DHV sur la plateforme d'écoute de ton choix. Dans le prochain épisode, je reçois un chapelier patoqué. Ok, elle était facile celle-là, mais bon, voilà. Je reçois Elvis Pompilio. Allez, rendez-vous au prochain épisode. Salut ! Déshabillez-vous est un podcast créé, présenté et produit par Samia Boujard, moi, avec une musique originale de Maïeva Fiston alias MPLI, montage, mixage et post-production par Alice Desbelles-Fréquences et Laetitia, podcast manager. THV, déshabillez-vous !

Chapters

  • Introduction

    00:00

  • Présentation

    00:36

  • Description de son look du jour

    02:49

  • Critères pour choisir ses tenues

    04:10

  • Ses débuts dans la danse

    08:43

  • Impact du vêtement dans la construction de son identité de danseur

    09:35

  • Assumer son apparence malgré les comparaisons

    15:10

  • Sa friperie secrète

    18:58

  • Ses critères pour choisir une pièce

    22:18

  • Son designer préféré & tissu africain

    25:58

  • Éducation & réappropriation d’identité

    29:06

  • Le look comme miroir de la personnalité

    35:18

  • Évolution de son style

    38:07

  • Revendiquer sa place & être un exemple

    40:11

  • Le message qu’il veut faire passer

    45:16

  • Son vêtement préféré

    49:50

  • Le portrait chinois d’Emmanuel

    51:00

  • Sa définition du vêtement

    54:52

  • Conclusion

    55:51

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Description

Pour ce deuxième épisode, je t’emmène à la rencontre d'Emmanuel Diela Nkita, un danseur classique afro-descendant aux racines congolaises qui a su s'imposer sur la scène artistique et créative afropéenne bruxelloise.


Né à Bruxelles avec un métissage culturel profond, Emmanuel est un danseur complet, maîtrisant aussi bien le classique que le contemporain, le moderne et le néoclassique.


Au cours de notre échange, on explore la relation intime entre les vêtements et l'identité personnelle.

À travers ses choix vestimentaires, il exprime son humeur, ses émotions et son état d'esprit. Les vêtements sont pour lui une seconde peau, un reflet de son intérieur et un moyen de revendiquer sa place dans le monde.


Il raconte comment ses vêtements, choisis avec soin, reflètent son parcours de vie, ses origines africaines et son expérience dans le milieu de la danse classique, souvent dominé par des standards esthétiques éloignés de sa réalité de jeune homme noir.


Sans langue de bois, Emmanuel partage son histoire, le racisme subi en école de danse, l’affirmation de son identité à travers les vêtements qu’il porte et comment il se positionne en tant que modèle pour inspirer les générations afro-descendantes futures à oser.


Belle écoute 🎧

Samia


-

Vous pouvez retrouver Emmanuel Diela Nkita sur Instagram


-

En attendant de nous retrouver pour un prochain épisode, je t’invite invite à t’abonner au podcast et à laisser 5 étoiles et un mot doux sur ta plateforme d’écoute préférée 💌


Si tu souhaites continuer la discussion et découvrir les coulisses de DHV, retrouve-moi au quotidien sur Instagram à @samiabouhjar


👗 Pour aller plus loin et découvrir mes prestations de Directrice Artistique, Styliste et Costumière pour la Télévision et le monde du Spectacle, rendez-vous sur https://samiabouhjar.com


Des bises,

Samia


-

Crédits :

Production & Présentation : Samia Bouhjar.

Montage et mixage : Alice des Belles Fréquences.

Consulting et coordination : Laëtitia, Podcast Manager.

Direction Artistique : Samia Bouhjar, Amélie Breuil et Jennifer Boruchowitch.

Musique originale de Maéva Fiston.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    S'habiller ou ne pas s'habiller, ça dit quelque chose de chaque personne.

  • Speaker #1

    Déshabillez-vous.

  • Speaker #0

    H.V.

  • Speaker #1

    Déshabillez-vous.

  • Speaker #0

    Quand t'es bien habillé, que tu te trouves frais ou fraîche quand tu te regardes, et bien en fait, ça te permet de sécréter des endorphines. Déshabillez-vous. Salut, moi c'est Samia Boujard et tu t'apprêtes à écouter Déshabillez-vous avec Emmanuel Diela Hitta. Salut Manu.

  • Speaker #1

    Salut.

  • Speaker #0

    Ça va ?

  • Speaker #1

    Ça va très bien et toi ? Bien.

  • Speaker #0

    On ne se connaît pas beaucoup. Est-ce que tu veux que je te présente du peu que je sais de toi ou tu te présentes toi-même ?

  • Speaker #1

    Ah bah tu peux, ça m'intéresse. Ok.

  • Speaker #0

    De voir un petit peu. Et tu complèteras ?

  • Speaker #1

    Et je compléterai, oui.

  • Speaker #0

    Ok. Alors, Emmanuel Diela Nkita, danseur classique à l'Opéra de la Monnaie, jeune homme afro-descendant dont les parents sont originaires du Congo. Donc un jeune homme noir, tu es très grand, tu es très beau, tu as fait du mannequinat, tu fréquentes la scène artistique et créative afropéenne bruxelloise. Voilà, c'est tout ce que je sais de toi, de manière plus ou moins sûre. Le reste, je te laisse compléter. Voilà,

  • Speaker #1

    donc oui, effectivement, je suis danseur, donc j'ai une formation classique. Mais je n'avais pas seulement du classique, je fais aussi du contemporain, du moderne, du néoclassique. Je fais aussi du commercial, puis j'enseigne aussi la danse. Et en ce moment, je suis effectivement sur une production à l'Opéra de la Monnaie. Là, c'est une chorégraphie de l'ordre de la danse contemporaine dans une production qui s'appelle Das Rheingold, qui est mise en scène par Romeo Castellucci et chorégraphiée par une chorégraphe contemporaine, Cindy Van Acker. Et pour les détails concernant d'où je viens, en termes... D'origine, oui, je viens du Congo et en détail de la région du Kassai, du Kassai occidental.

  • Speaker #0

    Tu es né là-bas ?

  • Speaker #1

    Je suis né ici à Bruxelles. Donc j'ai ce métissage culturel, mais je suis déjà parti au Congo une fois quand j'avais 6 ans, une fois quand j'avais 12 ans. Donc oui, j'ai ce métissage culturel en moi.

  • Speaker #0

    Ok. On va parler de toi plus en détail et plus profondément au travers de tes habits. C'est mon sujet de prédilection, c'est ce qui me passionne dans la vie, c'est les habits et ce que ça raconte sur les gens. Donc, on va parler de ça ensemble. Ma première question, c'est d'où vient tout ce que tu portes aujourd'hui ? Alors, je vais décrire parce qu'on n'a pas de vidéo. On aura quelques photos qui vont... Illustrer notre rencontre d'aujourd'hui, tu portes un pull en laine côtelée, vert sapin, une ceinture en coton tressé, un pantalon vintage si je ne me trompe pas, en laine, une couleur que je qualifierais de grège, tu portes des chaussures en cuir, c'est des bottines, des bottines en cuir. Elles sont complètement en cuir, même la semelle est cousue, dont j'ignore la marque, mais en tout cas, ça a l'air d'être une très belle façon.

  • Speaker #1

    Haechung.

  • Speaker #0

    Haechung, je ne connais pas du tout. Pourquoi ce look aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Pourquoi ce look aujourd'hui ? Alors déjà, parce qu'il fait froid.

  • Speaker #0

    Ça explique la laine.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, parce qu'il fait froid, parce qu'il pleut. Et aussi pour le côté, déjà de pratique, mais aussi pour le côté confortable. Oui, confort et pratique. Esthétique, oui, d'une certaine manière. Apprêté, désapprêté, si on peut dire ça comme ça.

  • Speaker #0

    J'aime bien cette manière de dire apprêté, désapprêté, parce que je te trouve particulièrement bien mis, bien habillé, parce que les couleurs vont bien ensemble, parce que ça te donne quand même une belle allure. Quand tu choisis tes vêtements, est-ce que tu les choisis ? Tu y réfléchis la veille, par exemple, quand tu sais que tu dois aller quelque part rencontrer quelqu'un ? Ou est-ce que c'est vraiment quelque chose que tu choisis sur le moment même ? Donc le matin, quand tu dois aller quelque part, ou l'après-midi, ou le soir, peu importe le moment ?

  • Speaker #1

    Oui et non. Ça dépend aussi un petit peu de mon humeur. Par exemple, si je dois aller à un événement, que ce soit par rapport au travail, une soirée ou quoi, ça peut m'arriver que j'ai déjà une idée de ce que je vais porter dans la tête la veille. Et puis ensuite, j'ai toujours une pièce en tête, une pièce de base en tête. Et puis après, le reste, ça vient sur le moment même, au feeling. Je mets un petit peu de musique et puis après, je vois un petit peu qu'est-ce que ça me procure comme émotion, comme sensation. Puis... Donc voilà, c'est un petit peu comme ça que je fonctionne. préparé, oui. Donc, il y a une idée de base principale. Et puis après, le reste, c'est au coup de cœur, aux sensations.

  • Speaker #0

    Tu as dit, ça dépend de mes sensations et de mes émotions. Oui. Donc, est-ce qu'on peut dire que... ce que tu portes reflète ton état d'esprit intérieur ? Est-ce que d'abord tu le choisis en fonction de toi ou en fonction de l'extérieur justement, de où tu vas et qui tu vas rencontrer ?

  • Speaker #1

    Alors oui, effectivement, en fonction de là où je vais aller, mais aussi avant tout par rapport à mon propre confort aussi. Parce que j'aime bien me sentir bien dans mes vêtements. je pense que ça serait un petit peu dommage de ne pas se sentir bien dans ses vêtements parce que c'est quand même une seconde peau. Donc, mettre sur soi une peau avec laquelle on ne se sent pas bien, c'est quand même assez triste, c'est quand même assez dommage. Donc, comment dirais-je ? Est-ce que c'est le reflet de mon intérieur ? Oui, quelque part, oui, ça peut être le reflet de mon intérieur, oui.

  • Speaker #0

    Et... quelle importance a pour toi le vêtement ? Est-ce que le vêtement a une importance dans le milieu dans lequel tu évolues ? Par exemple, moi j'adore les vêtements de danse. Oui. Parce qu'une de mes séries préférées quand j'étais jeune, c'était Fame. J'adorais.

  • Speaker #1

    I wanna live forever.

  • Speaker #0

    I wanna live forever. Je rêverais de monter comme ça avec des chevilles sur une voiture, en dansant avec un juste au corps, ce qui est juste impossible. À cause de... Enfin bref. Mais... Est-ce que... C'est quoi la particularité du vêtement de danse ? Qu'est-ce qu'il représente pour toi ? Comment est-ce que toi, tu fais plusieurs questions en une. Oui. Comment tu t'habilles quand tu danses, par exemple ?

  • Speaker #1

    Comment je m'habille quand je danse ? Alors, ça dépend encore une fois de mon humeur. Alors, ça peut aller à... Donc, je vais mettre quelque chose qui est assez proche du corps où je vais pouvoir voir les lignes de mon corps, pouvoir corriger ce qui est à corriger en termes de mouvement. Comme ça peut être quelque chose d'assez ample où j'ai juste envie d'être... dans la chaleur corporelle et pas dans le côté esthétique si ça te fait sens donc ça dépend de comment tu vas danser ça dépend plutôt de comment est-ce que je vais me sentir et aussi ça dépend de avec quel mindset est-ce que je vais approcher le cours en fait aussi avec quel mindset est-ce que je vais approcher la journée de travail de répétition si maintenant le but de Mon entraînement va être basé sur les lignes. Donc, je vais plutôt mettre quelque chose qui va favoriser justement la vision de ces lignes dans le miroir. Si maintenant, c'est un travail qui va être plus porté sur le côté émotionnel. Du coup, je vais un petit peu moins faire attention à la couleur ou quoi. Je vais plutôt mettre quelque chose de très, très, très confortable. Comme ça, je peux vraiment aller chercher à l'intérieur et pas aller... sur quelque chose de visuel, plutôt de l'ordre du ressenti.

  • Speaker #0

    À quel âge tu as commencé la danse ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que j'ai toujours dansé, mais on va dire d'une manière sérieuse, sérieuse, sérieuse. En école de danse, j'ai commencé à l'âge de 16-17 ans.

  • Speaker #0

    C'est tard, non, pour la danse classique ?

  • Speaker #1

    C'est tard, oui.

  • Speaker #0

    Quel âge tu as ?

  • Speaker #1

    Là maintenant j'ai 31 ans, bientôt 32. Donc oui effectivement c'est tard, mais j'avais déjà fait d'autres sports avant, j'avais déjà bougé mon corps en passant par la natation, le judo, j'avais fait aussi un petit peu d'équitation, bon là c'est plutôt le cheval qui fait tout le travail. Mais bon, puis aussi du football.

  • Speaker #0

    Donc bouger ton corps, c'est pas quelque chose d'inconnu. Et alors la danse classique, l'image... classiques qu'on en a, c'est des jeunes femmes blanches en tutu.

  • Speaker #1

    N'est-ce pas ?

  • Speaker #0

    Tu es un grand garçon noir qui ne porte pas de tutu, je pense, quand tu danses.

  • Speaker #1

    Pas quand je danse.

  • Speaker #0

    Peut-être quand tu danses, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Non, non, non, je ne porte pas de tutu.

  • Speaker #0

    Ok, d'accord.

  • Speaker #1

    Je ne porte pas de tutu. C'est très, très mignon sur les autres, mais bon, sur moi, I don't know.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que Parce que les miroirs sont omniprésents quand on danse.

  • Speaker #1

    Tout à fait, oui.

  • Speaker #0

    Comme tu dis, on choisit ses vêtements en fonction de la musique sur laquelle on danse, de la chorégraphie qu'on est en train de travailler. Quelle importance a eu le vêtement dans la manière dont tu as créé, construit, imposé, montré ton identité de jeune homme noir faisant de la danse classique ?

  • Speaker #1

    C'est oser se montrer, déjà. Oui, c'est oser se montrer parce que... Donc c'est... un impact quand même assez fort sur ma manière de bouger. Au début, quand j'ai commencé, je mettais toujours un pantalon noir avec un t-shirt oversize.

  • Speaker #0

    Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Parce que je n'aimais pas forcément mon corps à 100%. Parce que dû aux critiques que j'en ai pris... par rapport à mon physique, qui ne ressemblait pas au physique des autres personnes en classe.

  • Speaker #0

    Tu peux donner plus de détails par rapport aux reproches qui t'ont été faits par rapport à ton physique ?

  • Speaker #1

    En tant que danseur noir, c'était surtout au niveau des pieds. Donc, je mettais des pantalons qui descendaient jusqu'à ses... bas, qui couvrait pratiquement mes pieds, parce qu'en fait, recevoir souvent des remarques, tu as pas un beau pied, rentre tes fesses, tu as les fesses qui ressortent.

  • Speaker #0

    Et ça, c'est de l'ordre de... Tu peux pas gérer, c'est pas quelque chose sur lequel tu peux travailler, la forme de tes pieds.

  • Speaker #1

    On peut le travailler d'une manière musculaire, mais c'est vrai que j'ai une forme de pied de... de base, donc du coup ça ne va pas nécessairement ressembler à un pied caucasien, si il faut dire les choses.

  • Speaker #0

    Mais donc tu veux dire qu'un pied africain n'a pas la même forme qu'un pied caucasien ?

  • Speaker #1

    Disons que le pied noir est un pied un peu plus... En tout cas, pour moi, est un pied un peu plus dur à travailler. Il n'est pas facilement cassable et pliable. OK. Donc...

  • Speaker #0

    Donc tu le couvrais volontairement ? Je le couvrais volontairement,

  • Speaker #1

    parce qu'on disait que ça allait... Enfin, je veux dire qu'ils étaient pas à beau et que du coup,

  • Speaker #0

    il y avait rien à faire. Ok, ok. Et donc comment est-ce que t'as... avancer avec ça. Donc au début tu te couvrais.

  • Speaker #1

    Je me couvrais et puis après à un moment donné j'en ai eu assez. À un moment donné j'en ai eu assez et puis je me suis dit je vais travailler sur ce qu'on dit qui sont mes défauts et en fait je me suis rendu compte que c'était complètement démonstreux. qu'en fait, j'ai de beaux pieds.

  • Speaker #0

    Et de belles fesses.

  • Speaker #1

    Et j'ai de belles fesses aussi. J'ai de beaux pieds, j'ai de belles fesses, j'ai de beaux bras. Et tout ça, tout ça, quoi.

  • Speaker #0

    Et est-ce que quand on danse, aujourd'hui, alors, qu'est-ce que tu dis de toi quand tu t'habilles pour aller danser ? Parce que quand tu danses en studio, quand tu es en entraînement ou en répétition, est-ce que tu dis quelque chose de toi lorsque tu t'habilles ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai le droit d'être là.

  • Speaker #0

    C'est ça que tu dis ? Oui. En portant des choses qui ne couvrent pas tes pieds, qui ne couvrent pas tes fesses.

  • Speaker #1

    Mais en fait, j'ai le droit d'être là, j'ai aussi le droit de travailler, de corriger, peut-être pas corriger, d'améliorer.

  • Speaker #0

    Elle a nuancé quand même.

  • Speaker #1

    J'ai le droit aussi... d'améliorer ce qui est déjà là, même si ça pourrait gêner certaines personnes. Parce que justement... c'est quelque chose qui est arrivé souvent dans mes oreilles, c'est que Oh mon Dieu, j'ai jamais eu un garçon comme toi

  • Speaker #0

    Ça veut dire quoi ?

  • Speaker #1

    Justement, ça veut à la fois tout dire et rien dire à la fois.

  • Speaker #0

    On t'a déjà dit ce que ça voulait dire ? Toi, tu as une idée de ce que ça veut dire ? Un garçon comme toi, c'est quoi ? C'est un garçon noir dans des compagnies, sur des scènes en Belgique ?

  • Speaker #1

    Un garçon noir, un garçon aussi grand ?

  • Speaker #0

    Combien tu mesures ?

  • Speaker #1

    1m85.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est grand.

  • Speaker #1

    Mais après, en tant que réflexion du genre, oui, tu as un corps qui est difficile. difficile peut-être, mais peut-être pas nécessairement pour d'autres. Je ne pense pas avoir un corps difficile, je pense que j'ai un corps très simple, mais je pense que la simplicité, ça devient difficile pour certaines personnes.

  • Speaker #0

    Et donc, aujourd'hui, ce n'est plus un problème pour toi d'être... devant un miroir avec d'autres danseurs, d'autres danseuses et de choisir ce que tu portes. Tu ne te caches plus.

  • Speaker #1

    Dire que c'est plus difficile, ça serait mentir. C'est un travail. C'est un travail, que ce soit avec ou sans danseurs autour de moi, déjà se regarder dans le miroir et... Et apprécier, accepter, aimer ce que l'on voit, c'est un travail difficile, qui peut paraître difficile. Pourquoi ? Parce qu'on ne nous a pas appris à aimer ce que l'on voit de nous. On nous a toujours comparé.

  • Speaker #0

    Qui ça, nous ?

  • Speaker #1

    En tout cas, je vais plutôt parler pour moi. On m'a souvent et toujours comparé aux autres. regarde, c'est bien, regarde comment un tel fait, pourquoi est-ce que tu ne fais pas pareil.

  • Speaker #0

    Dans la danse ?

  • Speaker #1

    Que ce soit dans la danse ou d'une manière générale. Pour moi, ma danse, c'est un petit peu... un reflet de la vie qu'il y a quelque part. Parce que c'est quand même une mini société, si on peut dire ça comme ça. J'avais une prof de danse, elle m'a dit que quand elle était à l'école de danse, elle entendait des remarques. Ah, tu vois cette fille, la hauteur à laquelle elle lève sa jambe ? Ah ben, toi, tu dois lever ta jambe un peu plus haut. Donc du coup, ce que tu fais, c'est que tu... c'est que tu te compares. Donc, on t'amène à te comparer à l'autre et on t'amène à être dans un mindset où ce que tu vois de toi dans le miroir n'est pas assez.

  • Speaker #0

    Donc, ça, c'est à la scène, on va dire. Oui. Et dans ta vie, en dehors de la musique, de la barre, des studios et des miroirs, est-ce que c'est la même chose ? Est-ce qu'il y a aussi cet exercice de comparaison

  • Speaker #1

    Hum. Ça peut arriver.

  • Speaker #0

    Plus souvent, tu es dans quelle démarche, tu vois, par rapport à ton image, par rapport aux autres, par rapport au monde, en fait ?

  • Speaker #1

    Alors moi, mon image à moi, par rapport aux autres, que ce soit par rapport aux vêtements ou que ce soit par rapport à ma manière d'être, en fait, je ne me compare pas nécessairement. Ma première approche ne va pas justement être de me comparer à l'autre, de me dire, oui, je suis. Je suis mieux que toi, je vais t'écraser ou quoi. Non, parce qu'en fait, je me rends compte que dès qu'on commence à rentrer dans cette démarche-là, en tout cas pour moi, il y a quelque chose d'assez sale, d'assez dégueulasse à l'intérieur qui commence à pousser. et qui ne fait pas nécessairement du bien en fait, parce que du coup on sent vraiment qu'il y a une sorte de poison qui se crée à l'intérieur, et donc du coup ça entraîne un comportement avec autrui qui est de l'ordre du... Oui, qui est très néfaste, qui est très sombre, qui est très... Ça me donne presque la chair de poule à force d'y penser. Ça n'a rien de sain, ça n'a rien de joli, ça n'apporte rien de constructif à autrui.

  • Speaker #0

    Ça veut dire que sur les deux tableaux, autant à la scène qu'à la ville, tu t'habilles d'abord pour toi, en fonction de ton humeur, de tes émotions et de tes objectifs. Là, il fait froid, donc tu t'habilles chaudement parce que tu n'aimes pas avoir froid. Quand tu es en studio... tu choisis en fonction de ce que tu vas faire comme travail où est-ce que tu t'habilles ?

  • Speaker #1

    alors donc je m'habille dans la meilleure friperie du monde je veux savoir la garde-robe de mon père mais non il ne va pas m'aimer sinon non en fait je veux dire par là que lorsque je regarde des photos photos de mon père parce qu'en fait, il faut dire quand même que si je dois avoir des idéaux de beauté, ce sont quand même mes parents. Parce que, waouh, ils sont juste magnifiques. Ils sont beaux.

  • Speaker #0

    C'était pas mal non plus, d'entendre.

  • Speaker #1

    Merci, c'était beau. Quand je dis la garde-robe de mon père, c'est parce qu'en fait, quand je regarde des photos des années 70, il avait un look mais absolument, il a toujours un look que...

  • Speaker #0

    Ok, je comprends un peu plus la vibe d'aujourd'hui parce qu'effectivement, il y a un petit... Il y a un petit twist 70's dans les couleurs. Le pantalon, il n'est pas très pas de def aujourd'hui, mais tu l'as.

  • Speaker #1

    Donc, il y a toujours un petit peu ce côté évasé, toujours assez proche du corps. Donc, quelque chose qui épouse le corps sans trop l'épouser non plus, mais avec un côté assez confortable. Donc, quelque chose qui tombe sur le corps et qui prend la forme du corps. qui ne soit pas trop découpé d'une manière où on ne sait pas ce qui va pouvoir rentrer dedans. OK.

  • Speaker #0

    Et donc, tu t'inspires de la garde-robe de ton père ou tu vas vraiment prendre ses pulls ?

  • Speaker #1

    Non, non, non. Je m'inspire de la garde-robe de mon père, oui.

  • Speaker #0

    Et après, tu vas chercher où, alors, les pièces qui restent ?

  • Speaker #1

    Du coup, je vais en friperie. Je vais en friperie ou bien... Parce qu'en fait, j'ai un petit peu du mal à les prendre. En boutique de première main ? Si je vais en boutique de première main, c'est vraiment pour prendre des petits basiques, comme une chemise ou quoi, et encore, en fait. Parce que je trouve que les vêtements de l'époque, je dis de l'époque comme si c'était il y a hyper longtemps, mais c'était il n'y a pas si longtemps que ça, en fait. Je trouve qu'ils avaient une certaine... du caractère en fait, une âme, quelque chose qui vit. Ou bien chez des créateurs.

  • Speaker #0

    Ah ouais ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #0

    Alors, quel est ton top 3 des friperies à Bruxelles ? Ouf. Ou alors ta best friperie à Bruxelles ?

  • Speaker #1

    Oh my god.

  • Speaker #0

    Là où t'as acheté le plus de pièces. Ou celle où tu trouves des dingueries.

  • Speaker #1

    Bah du coup, des dingueries, je dirais pas. Mais là où j'ai acheté le plus de pièces, je dirais plutôt épisodes.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Ouais. Puis là où j'ai trouvé des dingueries. Je n'en ai pas encore trouvé de dinguerie.

  • Speaker #0

    Ok. Écoute, on va faire des petites promenades ensemble.

  • Speaker #1

    Voilà.

  • Speaker #0

    Tu peux trouver des dingueries.

  • Speaker #1

    Super.

  • Speaker #0

    Et comment est-ce que tu choisis ? Un vêtement que tu décides...

  • Speaker #1

    Au coup de cœur.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi qui t'accroche en général ?

  • Speaker #1

    En général, c'est une matière.

  • Speaker #0

    Tu la vois ou tu la touches ? Ou tu la touches d'abord et ensuite tu l'observes ?

  • Speaker #1

    Je la touche. En fait, oui, je vois la couleur et puis ensuite la matière, je la touche. Et puis surtout, déjà, comment est-ce que le tissu tombe ?

  • Speaker #0

    Donc, tu vois la couleur ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    J'essaye de déterminer un peu ton processus de sélection de la pièce vintage. Tu vois une couleur, tu t'approches, tu détermines un petit peu la matière, tu touches la matière, tu sors le vêtement, et puis tu regardes comment il tombe déjà sur le cintre. Et puis de là, tu sais si tu vas l'essayer ou pas. Et donc quand tu passes à l'essayage. qu'est-ce qui doit se passer à l'essayage pour que tu continues l'aventure jusqu'à la caisse ?

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qui va être de l'ordre du ressenti et qui va attention, ça doit procurer ceci. Ah !

  • Speaker #0

    Ah oui ! Oui. Donc un soulagement, une satisfaction. Oui. C'est ce que je comprends dans ton...

  • Speaker #1

    Ah ! Oui, donc c'est vraiment un... Ah oui, ok.

  • Speaker #0

    Une évidence.

  • Speaker #1

    Oui, une évidence. Quelque chose qui est comme un gant, en fait.

  • Speaker #0

    Ok. Tu parlais de seconde peau tout à l'heure.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Oui.

  • Speaker #0

    Donc une seconde peau.

  • Speaker #1

    Quelque chose qui est juste.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Et arriver à trouver quelque chose de juste, c'est pas facile.

  • Speaker #0

    Ouais, donc tu tombes pas régulièrement sur...

  • Speaker #1

    Donc c'est pour ça que je dis que je n'ai pas encore trouvé de dinguerie, tu vois.

  • Speaker #0

    Ouais, ouais. Après, t'es pas venu souvent chez moi. Ah,

  • Speaker #1

    voilà.

  • Speaker #0

    Tu sais que je collectionne des dingueries. Ah,

  • Speaker #1

    ah.

  • Speaker #0

    On va se revoir.

  • Speaker #1

    On va se revoir.

  • Speaker #0

    Alors, ok, donc, sélection en fripes. Donc c'est de là que je vois que t'as des belles qualités sur toi, des belles matières sur toi. Et puis t'as dit que tu t'habilles aussi des designers.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    quel designer, comment tu les choisis, comment tu fais aussi pour te les payer, parce que je pense que beaucoup de gens, dont moi, on aime les designers, connus, inconnus, surtout on a un amour pour les belles pièces, bien coupées, dans de belles matières, mais que tout ça, ça a un certain coût, et que c'est difficile. de se dire qu'on va consacrer plusieurs centaines d'euros dans un vêtement alors qu'on pourrait avoir quelque chose de similaire, dix fois moins cher dans un magasin de distribution. Et puis alors, ça veut dire que si tu payes un vêtement dix fois plus cher, tu vas pouvoir en acheter qu'un peut-être, au lieu de t'en acheter dix différents. Ça, c'est la logique de la fast fashion. Est-ce que tu as déconstruit cette logique de la fast fashion ?

  • Speaker #1

    Alors moi je vais plutôt dans la qualité plutôt que dans la quantité.

  • Speaker #0

    Amen !

  • Speaker #1

    Donc du coup oui, quand je dis designer, après je ne dis pas que j'ai tout un dressing qui est rempli de vêtements de designer, mais je veux dire lorsque je tombe sur une pièce et que la matière elle me plaît, et que sur le moment j'ai l'opportunité de me l'offrir, je le fais.

  • Speaker #0

    Ok, ce n'est pas un frein.

  • Speaker #1

    Donc non, ce n'est pas un frein. Enfin, je veux dire, je ne vis pas au-dessus de mes moyens non plus. Donc que ça, on entend bien.

  • Speaker #0

    Et quels sont tes designers préférés ? ce que tout le monde connaît ? Et peut-être que ton designer ou tes designers préférés ne sont pas connus du grand public ?

  • Speaker #1

    En fait, il y a un designer en particulier avec qui j'ai déjà travaillé, avec qui je travaille encore en ce moment. Il s'appelle Koualé. Il a reçu le prix du fashion design, si je ne dis pas de bêtises, du MAD. Et en fait, il a créé toute une... La collection est en rapport avec un métissage culturel, parce qu'en fait il est roi rwandais et qui a grandi ici en Belgique. Donc toute sa collection se prête sur ce métissage culturel, que ce soit au niveau du drapé, du tissu, au niveau de l'imprimé du tissu, des différentes matières. Il a d'ailleurs créé quelques pièces sur moi.

  • Speaker #0

    Tu es une muse ! Manu est une muse de la mode !

  • Speaker #1

    Donc il a déjà créé quelques pièces sur moi et je dois dire que c'est aussi un honneur et un privilège de pouvoir avoir un vêtement qui a été fait sur mesure par un jeune créateur. C'est un talent !

  • Speaker #0

    Et les pièces que tu as de Koalé, tu les portes pour quelles occasions ?

  • Speaker #1

    Je les porte pour des occasions. Déjà, il faut dire aussi que dans le travail de Koalé, c'est un travail qui met en avant... toute la gloire et la royauté du tissu africain. Parce que c'est quand même un tissu noble, une matière noble qui est portée de façon noble. par des personnes. Les robes, là. Appelons un chat un chat. Donc du coup, je vais vraiment aller honorer ces créations, honorer ces vêtements dans des événements qui s'y prêtent, dans des endroits qui s'y prêtent, que ça soit un mariage ou bien un vernissage, que ça soit à une soirée d'ouverture, à une réception.

  • Speaker #0

    plus pour des événements que pour la vie quotidienne ?

  • Speaker #1

    En tout cas, moi, ce sont vraiment les endroits où je vais les honorer parce qu'aussi, vu la météo que nous avons aussi à Bruxelles, parfois c'est un petit peu compliqué de savoir, ok, telle matière, est-ce que ça serait adéquat pour tel météo ? Donc oui, plutôt pour des... dans des endroits qui se prêtent à leur glorification.

  • Speaker #0

    Et comment tu te sens quand tu portes ces vêtements-là qui visiblement t'apportent de l'empouvoirment ? Je dis en français. En français. Parce que j'aime le français. L'empowerment. Qu'est-ce que tu ressens dans ces étoffes, dans ces pièces dont tu connais le créateur, dont tu connais... l'histoire, le processus créatif, parce que visiblement tu y as contribué, puisque tu as été le modèle, le mannequin sur lequel certaines pièces ont été conçues. Qu'est-ce que toi, ça t'apporte ? Qu'est-ce que toi, ça te raconte ? Et en les portant, qu'est-ce que tu racontes au monde ?

  • Speaker #1

    Déjà, de un, ça sonne juste. Qu'est-ce que ça raconte au monde ? Encore une fois, c'est que j'ai le droit d'être là dans toute ma splendeur.

  • Speaker #0

    Alors moi tu sais je vais mettre les pieds dans le plat dans toute ton africanité dans toute ta noiritude je viens d'inventer un mot tu l'as dit à ma place je l'ai dit à ta place génial au moins je ne t'ai pas je craignais quand même de te croisser parce que c'est important peut-être on fait un petit peu On n'en est qu'au début de ce podcast, donc on ne sait pas encore on, je dis on parce que je parle de moi et tous mes colloques dans ma tête. On ne sait pas encore quel ton vraiment on va donner, on va avoir, mais on voudrait vraiment pouvoir parler sans langue de bois. Et donc, quand je dis que ça te permet de t'exprimer dans toute ta noirétude, c'est parce que tu évolues dans un milieu qui est essentiellement blanc, assez aisé, et que tu fais tâche de temps. N'est-ce pas ? Une jolie tâche, hein ? Une jolie petite tâche. Ce que j'ai compris et ce que je comprends, c'est que c'est un peu une revendication.

  • Speaker #1

    Oui, quand même, parce qu'il ne faut quand même pas oublier le passé colonial que la Belgique a avec le Congo. Parce qu'encore une fois, je suis Congolais, du Kassai occidental, né ici en Belgique, à Bruxelles. donc j'ai dû rentrer dans des cases justement pour ne pas faire trop tâche justement donc bien parler, bien se tenir bien s'habiller c'est pour ça que quelque part mon éducation a aussi une grande influence sur la manière dont je m'habille aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Qui est différente d'il y a quelque temps, ou d'avant ? Tout à l'heure, tu as dit que maintenant, tu as envie de ne plus t'excuser. Oui. Ça veut dire que je suppose qu'avant, tu t'excusais et que tu t'habillais en fonction de comment est-ce que tu pensais qu'on attendait, qu'on souhaitait que tu sois habillé.

  • Speaker #1

    Par exemple, oui.

  • Speaker #0

    Mais qu'aujourd'hui, tu te réappropries ton identité, entre autres, au travers de ce que tu choisis de porter. Et quand tu es... dans un studio de danse, et quand tu vas en représentation dans des événements en tant que danseur, et puis en tant que toi, Emmanuel, citoyen belge, de parents congolais, qui eux sont nés au Congo, toi ici, dans un pays qui a une histoire assez longue, assez lourde, avec le pays d'origine de tes parents. Oui. Est-ce que... tu as déjà pensé que c'est une revendication, que les choix que tu fais de, par exemple, porter exclusivement des vêtements d'un designer aussi afrodescendant qui crée des vêtements que je qualifierais aussi d'afropéens, parce que c'est des vêtements inspirés de techniques, de vêtements traditionnels rwandais, mais ce sont des vêtements occidentaux. Est-ce que c'est une manière de revendiquer que tu es un afrodescendant vivant en Europe, en Occident, mais qui n'oublie pas d'où il vient ? Je vais loin quand même.

  • Speaker #1

    Oui, quand même. Est-ce que je vais trop loin ? Je dirais que les créations de Kuali, ce ne sont pas des techniques rwandaises, c'est plutôt une technique africaine noire dans son ensemble. Ça rassemble plusieurs pays d'Afrique noire. Donc, on va plutôt dire ça comme ça pour avoir ensuite une esthétique qui a un métissage européen et africain. ok et ça ça te définit ça te qualifie mieux est-ce que c'est ben oui quelque part je peux dire ça comme ça parce que j'ai ce métissage en moi de toute manière j'ai ce métissage européen et afrique noire oui oui oui donc oui ça sonne juste pour moi peut-être que je me trompe mais Je n'en ai pas l'impression. Parce que lorsque je porte le vêtement, je me sens bien dedans, je me sens à l'aise, ce sont des couleurs qui mettent en avant ma personnalité. Quand je dis qu'ils mettent en avant ma personnalité, ce sont des couleurs vives, joyeuses, qui ont une histoire, comme tout le monde. Tout le monde a une histoire, mais par rapport, encore une fois... Par rapport à toute ma noiritude. Voilà, c'est...

  • Speaker #0

    On va la garder celle-là. La noiritude.

  • Speaker #1

    Donc oui, c'est plein de vie, c'est chaud, c'est...

  • Speaker #0

    Ça, c'est des adjectifs qui pourraient te qualifier toi en tant que personne ?

  • Speaker #1

    Oui, oui, oui, oui. Sans aucune prétention.

  • Speaker #0

    Tu penses que, de manière générale, on choisit ses vêtements comme on... pourrait définir sa personnalité ?

  • Speaker #1

    Oui. Je me souviens lorsque j'étais à l'école secondaire, il y avait une école en particulier où je ne me sentais pas très bien, voire même pas bien du tout d'ailleurs. Et je me souviens qu'en fait, mon outfit, c'était un long t-shirt oversize, avec un jeans très oversize, avec des baskets, et avec un hoodie sur la tête.

  • Speaker #0

    C'est ce que tu portais ? Oui.

  • Speaker #1

    Donc, ça a été à chaque fois des choses très, très, très, très, très, très amples où je pouvais me cacher, en fait.

  • Speaker #0

    Et pourquoi est-ce que tu voulais te cacher ?

  • Speaker #1

    Parce que, justement, je remarquais que je n'étais pas nécessairement comme les autres enfants de cette école-là, avec une personnalité complètement différente, avec un mindset complètement différent. avec une manière d'être, une manière de me voir complètement différente. J'avais tout le temps mes mains dans les poches, j'avais la tête baissée, je ne parlais pas.

  • Speaker #0

    Mais tu as toujours été aussi grand ? Cette question peut paraître bizarre, mais je veux dire, parfois on a des poussées de...

  • Speaker #1

    J'ai eu une poussée de croissance. J'étais resté petit pendant quand même assez longtemps. Puis ensuite, en un été, j'ai pris 11 centimètres. Oh, waouh ! Oui, en un été.

  • Speaker #0

    Je pense que je n'ai jamais autant grandi.

  • Speaker #1

    du coup voilà donc j'ai pris 11 centimètres en une fois et du coup voilà donc on va dire que oui je donc là tu te sentais pas bien donc tu portais des vêtements dans lesquels tu t'effaçais oui et

  • Speaker #0

    à quel moment est-ce que tu t'es sentie mieux, suffisamment mieux pour ne plus t'effacer mais plutôt t'affirmer est-ce que c'est arrivé ?

  • Speaker #1

    oui c'est arrivé d'une certaine manière quand je suis arrivé à l'école de danse ah oui

  • Speaker #0

    donc malgré le fait que donc c'était t'as fait ça par étapes peut-être je sais pas je viens d'avoir une image comme ça qui m'est venue à la tête qui m'est passée par la tête c'est de toi en train d'éclore comme ça donc ça veut dire que l'éclosion a commencé quand t'as commencé la danse donc à t'habiller un petit peu plus en fonction de comment tu pouvais définir ta personnalité et puis tout à l'heure tu disais que c'est un travail de tous les jours que de pouvoir affirmer qui on est au travers de ces vêtements et pour toi en particulier lorsque tu es en studio parce que tu es un homme noir faisant de la danse classique Première étape de l'éclosion, c'est après l'école secondaire, quand tu commences à faire de la danse classique. Comment ça s'est exprimé ? Comment est-ce que tu es passé du hoodie, t-shirt oversize, jean oversize, main dans les poches, à quoi après ? C'était quoi après ?

  • Speaker #1

    On va dire que c'était des choses un petit peu moins oversize.

  • Speaker #0

    Tu as fait des trucs un peu moins grands. Tu as commencé à porter des vêtements un peu moins larges.

  • Speaker #1

    Un peu moins larges. Juste un t-shirt, on va dire d'une taille régulière qui va juste être à ma taille. Et puis après, un pantalon pas trop ample non plus, mais juste avec une coupe droite où on peut quand même voir les lignes de mon corps.

  • Speaker #0

    Et à quel moment est-ce que tu es passé à ce look-là que tu as aujourd'hui ? ce look un peu d'un spy 70's comme ton papa qui avait la classe et qu'il a encore une classe mais incroyable à quel moment justement t'as fait ce switch alors de passer de vêtements juste à ta taille pas pour te cacher mais juste pour t'habiller à ce look que t'as aujourd'hui qui est quand même un peu marqué tu vois t'as quand même une identité stylistique que teinté d'élégance, à quel moment tu t'es autorisé ça ?

  • Speaker #1

    Est-ce que je vais avoir une réponse correcte par rapport à cette question ? Je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Toutes tes réponses sont des bonnes réponses.

  • Speaker #1

    À quel moment est-ce que c'est arrivé ? C'est arrivé...

  • Speaker #0

    Peut-être que c'est arrivé progressivement.

  • Speaker #1

    C'est arrivé un petit peu comme ça, je pense. Oui, ça a été arrivé assez progressivement. C'est arrivé au moment où où en fait, je pense que ça va être un petit peu redondant ce que je vais dire, mais c'est arrivé à un moment où dans ma tête, c'est moi, c'est comme ça, c'est comme ça que j'aime bien m'habiller, c'est comme ça que je me sens, c'est apprendre ou à laisser, that's it.

  • Speaker #0

    ok et je reviens un petit peu sur ce qu'on disait juste avant quand tu expliquais que tu portais des vêtements de créateur et de ce créateur afrodescendant Koale Akiza Pourquoi est-ce que pour toi c'est important ? Parce que tu as dit que tu portais ces pièces pas dans la vie de tous les jours, mais pour des performances, pour des vernissages, lors d'événements, quand tu vas vraiment un peu te montrer. Est-ce que c'est plus important pour toi de porter ces vêtements à ces moments-là qu'à d'autres ? Et si oui, pourquoi ?

  • Speaker #1

    Pourquoi ? Parce que déjà, dans le milieu, nous ne sommes pas beaucoup.

  • Speaker #0

    Quel milieu ?

  • Speaker #1

    Dans le milieu créatif, dans le milieu artistique.

  • Speaker #0

    Et c'est qui nous ?

  • Speaker #1

    Donc nous, les noirs.

  • Speaker #0

    Ok. Appelons un chat un chat et un noir un noir.

  • Speaker #1

    Appelons un chat un chat et un noir un noir. Bon,

  • Speaker #0

    aujourd'hui, parce qu'en fait, oui, enfin, on ne doit pas forcément... Ce n'est pas ce qui définit une personne, mais dans certaines circonstances, ça fait la différence. Donc ok, c'est pour...

  • Speaker #1

    C'est pour... vas-y pas de l'homme de bois oui mais en fait je cherche vraiment les mots justes pour que ça sorte de la bonne manière et pour que ça soit surtout entendu de la bonne manière c'est pas juste pour montrer que nous sommes là, oui les gens nous voient que nous sommes là mais c'est pour nous montrer nous, pour nous voir nous pas juste une image qu'on veut nous coller pas juste euh le petit noir dans le coin de la salle qui est très reconnaissant parce qu'il a eu une petite place, pas juste le noir dans la salle qui occupait à servir les coupes de champagne, mais qui garde l'uniforme du colonisateur, si je peux dire ça comme ça. Donc c'est encore une fois revendiquer sa place. C'est ne pas être désolé d'exister. malgré toutes les tentatives qu'on a de vouloir nous effacer. Parce que j'ai envie de dire, vous nous avez amenés ici, maintenant il faut assumer.

  • Speaker #0

    Est-ce que je suis juste si je dis que dans l'environnement dans lequel tu évolues, le milieu créatif, artistique, celui de la danse, la danse classique en particulier, tu te vis un petit peu comme... comme une sorte de porte-drapeau pour toi et pour les autres acteurs créatifs de la communauté afro-descendante ?

  • Speaker #1

    Pour moi, c'est très, très important, oui, surtout d'être un homme danseur noir de m'incarnation de peau, de mon teint de peau foncé. C'est très important, pourquoi ? Parce qu'en fait, moi, en étant à l'école de danse, je n'ai pas nécessairement eu de modèle ou de repère. Ou s'il y en avait, c'était un ou deux, mais pas ici en Belgique. Donc oui, pour moi, c'est quand même assez important, oui. Parce que si, maintenant, mettons, un enfant noir va à l'opéra pour la première fois et qu'il me voit sur scène et que ça réveille en lui, que ça soit par rapport à la danse ou par rapport à autre chose, dans la vie où il peut se sentir, ah mais je suis quand même le seul noir dans mon secteur. Mais il n'y a personne d'autre qui va arriver à un tel niveau. Et si en me voyant sur scène, ça peut réveiller en lui une flamme, une étincelle, quelque chose. si lui il y est arrivé mais en fait moi aussi qu'est-ce que ce soit comme discipline que ce soit la danse que ce soit la mode la musique ou que sais-je il

  • Speaker #0

    pourra avoir une manifestation physique de son rêve futur c'est génial en fait t'as conscience et tu prends à bras le corps le rôle de rôle modèle

  • Speaker #1

    Je pense que quand on fait partie d'une minorité, c'est quand même important, surtout une minorité comme une minorité, parce qu'on n'est pas vraiment une minorité, parce que le peuple noir est quand même un grand peuple. Disons les choses telles qu'elles sont, disons les termes, s'il vous plaît. Le peuple noir est un grand peuple, mais c'est qu'on nous a un peu divisé pour mieux régner sur nous. C'est pour ça qu'on se retrouve à être le seul noir de tel département. Donc c'est important, oui, c'est très très important.

  • Speaker #0

    Et quel message tu veux véhiculer quand tu portes un vêtement qui a été fait par un créateur noir ? Qu'est-ce que tu veux raconter ? par rapport à toi en tant que danseur, rôle modèle, dans cette industrie, dans ce secteur, et qu'est-ce que tu veux raconter aussi, si jamais tu veux raconter quelque chose ou dire quelque chose, par rapport aux autres créatifs qui sont là, qui existent, et qu'on ne voit pas forcément. Parce que j'imagine que... les pièces des créateurs que tu portes n'ont pas une audience aussi large que la tienne, puisque tu es danseur. L'Opéra de la Monnaie, c'est comme ça qu'on dit ? En ce moment, oui. Voilà. À l'Opéra de la Monnaie, qui est quand même une institution, c'est quand même quelque chose d'assez prestigieux. C'est quoi le message que tu veux véhiculer ? Et ? Je pense que ça c'est la partie la plus importante de la question. À qui ?

  • Speaker #1

    Alors, à qui ? Déjà, j'ai envie de dire aux jeunes artistes noirs, que ce soit garçons ou filles, crois en toi, crois en tes rêves. Tu es plus que ce que tu ne penses. Tu as tout ce qu'il faut. et tu vas y arriver n'aie pas peur de prendre ta place entoure-toi de personnes qui sont là pour te voir briller parce qu'elles veulent te voir briller pas parce que ça leur apporte quelque chose à sens unique tu as le droit de exister Donc ça c'est déjà une chose. Et aux haters, si je peux dire ça comme ça, aux haters qui ont tenté de me mettre à plat, j'ai juste envie de leur dire... C'était bien essayé. C'était bien essayé, mais... Et merci.

  • Speaker #0

    Ah ouais ? Oui. Tu vas dire merci aux haters ?

  • Speaker #1

    Bah oui, parce que quelque part, leur haine a alimenté mon feu.

  • Speaker #0

    Explique.

  • Speaker #1

    On dit qu'entre l'amour et la haine, il n'y a qu'un pain.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Donc... leur haine envers moi a fait que attiser le feu de l'amour que j'ai pour la vie en fait pour la vie ?

  • Speaker #0

    c'est beau ce que tu viens de dire parce que j'ai vraiment eu des personnes dans cette école d'ailleurs

  • Speaker #1

    qui ont vraiment tenté de me Ouais, m'anéantir.

  • Speaker #0

    Ah ouais, carrément ?

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Une méchance, c'était gratuit. Parce que tu es différent. Parce que tu ne rentres pas justement dans cette case. Ouais, ça a quand même bien joué sur mon mental et au quotidien. Donc c'était pour ça, en fait. T-shirt large, hoodies sur la tête, même en classe, pantalon hyper large pour s'effacer le plus possible. Mais malgré ça, il y a toujours eu une tentative de... de vouloir m'exterminer.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Bon,

  • Speaker #0

    tu es là.

  • Speaker #1

    J'utilise des mots forts, je sais, mais c'est comme ça que je l'ai vécu, c'est comme ça que je l'ai ressenti avec les... Enfin, je n'avais pas rentré dans les détails, mais c'est quand même des choses très fortes et très difficiles. Quand on est un ado qui sent plein de choses changer émotionnellement, physiquement, à l'intérieur de soi, de recevoir ce genre d'attaque-là, c'est très très dur. Donc oui.

  • Speaker #0

    Et aujourd'hui, c'est quoi ton vêtement préféré ?

  • Speaker #1

    Mon vêtement préféré ?

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Vêtements préférés. C'est un vêtement auquel je ne dois pas... pas pensé est-ce que c'est un vêtement qui existe ? c'est un vêtement qui existe et c'est quoi ? c'est quoi ? donc pas seulement d'une manière métaphorique ? non non non ah ok vraiment mon vêtement préféré aujourd'hui ? oh my goodness ben c'est ma couleur de peau noire oh C'est ma couleur de peau noire, c'est mon vêtement préféré. ça fait désabîmer complètement c'est peut-être prétentieux là ce que je suis occupé à dire non c'est très bien tu t'assumes t'as dit non t'excuses pas donc bon on va on va arriver sur la fin et alors on

  • Speaker #0

    va faire un truc un peu sympa que j'aime bien faire tu connais le principe du portrait chinois

  • Speaker #1

    Tu peux me rappeler ?

  • Speaker #0

    Alors, je te dis ici, en l'occurrence, je vais te dire, si tu étais un pull, quel pull tu serais ?

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Donc, si tu étais un pull, au mois de novembre, en Belgique ?

  • Speaker #1

    Oui. Je serais un pull en Cachemire. Un pull en Cachemire. un col roulé de couleur rouge.

  • Speaker #0

    Frileux, mais... I'm here. Ouais. Look at me.

  • Speaker #1

    Un pull en cashmere, col roulé de couleur rouge.

  • Speaker #0

    C'est du temps pantalon.

  • Speaker #1

    Un pantalon noir. en coton, coupe droite. Qui dessine un peu la fesse quand même.

  • Speaker #0

    La fesse qui est trop fesse.

  • Speaker #1

    La fesse qui est trop fesse. Tu vois ? Oui. Tu as compris, non ?

  • Speaker #0

    Très bien.

  • Speaker #1

    Donc, noir, pourquoi ? Parce que noir, c'est une couleur de pouvoir. et qui est très classe, qui est très royale. Et droite, pourquoi ? Parce qu'en fait, c'est une coupe qui tombe sur les formes du corps. Et voilà.

  • Speaker #0

    Si tu étais une paire de chaussures ?

  • Speaker #1

    Une paire de chaussures ? Une paire de chaussures... Une bottine. Parce que nous sommes toujours au mois de novembre, n'est-ce pas ?

  • Speaker #0

    Ou pas ! Si tu as une saison favorite qui correspond à une autre paire de chaussures, tu pourrais être une autre paire de chaussures.

  • Speaker #1

    Non, parce que là, ce que j'ai en tête, c'est... ça se prête plutôt... enfin, quoique, ça pourrait aussi se prêter au printemps. ça pourrait aussi se prêter au printemps donc ça serait une bottine avec une petite talonnette si je peux dire ça comme ça noire la matière la matière En cuir satiné ? Oui. En cuir satiné.

  • Speaker #0

    Tu peux être la chaussure que tu veux.

  • Speaker #1

    En cuir satiné, oui, quelque chose pareil.

  • Speaker #0

    Et donc, si tu étais un vêtement de dessus, donc une veste ou un manteau, est-ce que tu serais plutôt... Un vêtement du mois de novembre ou un vêtement du mois de juin ?

  • Speaker #1

    Quand j'ai la silhouette en tête, c'est plutôt une silhouette du mois de novembre. Le vêtement du dessus que j'aurais, ce serait un trench.

  • Speaker #0

    OK.

  • Speaker #1

    Un trench de couleur. Est-ce que du vert, ça serait trop ? Avec cette silhouette-là, peut-être pas.

  • Speaker #0

    Vert sapin, comme ça ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    C'est pas mal. J'ai un peu la silhouette en tête. Tu la sais pas ? Oui. Il va falloir la dessiner. Il va falloir la... Tu me compliques la tâche. Comment je fais pour illustrer ce podcast ? Moi, maintenant, des poteaux, des illustrations, on fait quoi ? OK. J'ai une dernière question.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Peut-être que cette question va être la question qui va revenir dans tous les épisodes. Quelle est pour toi la définition du vêtement ? Qu'est-ce qu'un vêtement pour toi ?

  • Speaker #1

    Un vêtement pour moi c'est... Alors déjà c'est pas juste un vêtement. C'est pas juste un vêtement. Dans certaines circonstances ça peut juste être un vêtement. Mais quand on met un vêtement c'est... C'est on se montre, c'est on s'affirme, on se présente. On brille, on ose, on prend pas de détours. C'est le soleil.

  • Speaker #0

    Merci Manu. Merci de t'être déshabillé avec moi. De t'être laissé déshabiller par moi.

  • Speaker #1

    Ben écoute, c'était assez bien fait. C'était assez smooth quand même.

  • Speaker #0

    Merci pour ton écoute. J'espère que cet épisode avec Emmanuel t'a plu. Si tu as des questions, des commentaires, des suggestions, des propositions, des interrogations, n'hésite pas à me laisser un commentaire. Et surtout, je t'invite à follower, suivre, t'abonner à DHV sur la plateforme d'écoute de ton choix. Dans le prochain épisode, je reçois un chapelier patoqué. Ok, elle était facile celle-là, mais bon, voilà. Je reçois Elvis Pompilio. Allez, rendez-vous au prochain épisode. Salut ! Déshabillez-vous est un podcast créé, présenté et produit par Samia Boujard, moi, avec une musique originale de Maïeva Fiston alias MPLI, montage, mixage et post-production par Alice Desbelles-Fréquences et Laetitia, podcast manager. THV, déshabillez-vous !

Chapters

  • Introduction

    00:00

  • Présentation

    00:36

  • Description de son look du jour

    02:49

  • Critères pour choisir ses tenues

    04:10

  • Ses débuts dans la danse

    08:43

  • Impact du vêtement dans la construction de son identité de danseur

    09:35

  • Assumer son apparence malgré les comparaisons

    15:10

  • Sa friperie secrète

    18:58

  • Ses critères pour choisir une pièce

    22:18

  • Son designer préféré & tissu africain

    25:58

  • Éducation & réappropriation d’identité

    29:06

  • Le look comme miroir de la personnalité

    35:18

  • Évolution de son style

    38:07

  • Revendiquer sa place & être un exemple

    40:11

  • Le message qu’il veut faire passer

    45:16

  • Son vêtement préféré

    49:50

  • Le portrait chinois d’Emmanuel

    51:00

  • Sa définition du vêtement

    54:52

  • Conclusion

    55:51

Description

Pour ce deuxième épisode, je t’emmène à la rencontre d'Emmanuel Diela Nkita, un danseur classique afro-descendant aux racines congolaises qui a su s'imposer sur la scène artistique et créative afropéenne bruxelloise.


Né à Bruxelles avec un métissage culturel profond, Emmanuel est un danseur complet, maîtrisant aussi bien le classique que le contemporain, le moderne et le néoclassique.


Au cours de notre échange, on explore la relation intime entre les vêtements et l'identité personnelle.

À travers ses choix vestimentaires, il exprime son humeur, ses émotions et son état d'esprit. Les vêtements sont pour lui une seconde peau, un reflet de son intérieur et un moyen de revendiquer sa place dans le monde.


Il raconte comment ses vêtements, choisis avec soin, reflètent son parcours de vie, ses origines africaines et son expérience dans le milieu de la danse classique, souvent dominé par des standards esthétiques éloignés de sa réalité de jeune homme noir.


Sans langue de bois, Emmanuel partage son histoire, le racisme subi en école de danse, l’affirmation de son identité à travers les vêtements qu’il porte et comment il se positionne en tant que modèle pour inspirer les générations afro-descendantes futures à oser.


Belle écoute 🎧

Samia


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Vous pouvez retrouver Emmanuel Diela Nkita sur Instagram


-

En attendant de nous retrouver pour un prochain épisode, je t’invite invite à t’abonner au podcast et à laisser 5 étoiles et un mot doux sur ta plateforme d’écoute préférée 💌


Si tu souhaites continuer la discussion et découvrir les coulisses de DHV, retrouve-moi au quotidien sur Instagram à @samiabouhjar


👗 Pour aller plus loin et découvrir mes prestations de Directrice Artistique, Styliste et Costumière pour la Télévision et le monde du Spectacle, rendez-vous sur https://samiabouhjar.com


Des bises,

Samia


-

Crédits :

Production & Présentation : Samia Bouhjar.

Montage et mixage : Alice des Belles Fréquences.

Consulting et coordination : Laëtitia, Podcast Manager.

Direction Artistique : Samia Bouhjar, Amélie Breuil et Jennifer Boruchowitch.

Musique originale de Maéva Fiston.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    S'habiller ou ne pas s'habiller, ça dit quelque chose de chaque personne.

  • Speaker #1

    Déshabillez-vous.

  • Speaker #0

    H.V.

  • Speaker #1

    Déshabillez-vous.

  • Speaker #0

    Quand t'es bien habillé, que tu te trouves frais ou fraîche quand tu te regardes, et bien en fait, ça te permet de sécréter des endorphines. Déshabillez-vous. Salut, moi c'est Samia Boujard et tu t'apprêtes à écouter Déshabillez-vous avec Emmanuel Diela Hitta. Salut Manu.

  • Speaker #1

    Salut.

  • Speaker #0

    Ça va ?

  • Speaker #1

    Ça va très bien et toi ? Bien.

  • Speaker #0

    On ne se connaît pas beaucoup. Est-ce que tu veux que je te présente du peu que je sais de toi ou tu te présentes toi-même ?

  • Speaker #1

    Ah bah tu peux, ça m'intéresse. Ok.

  • Speaker #0

    De voir un petit peu. Et tu complèteras ?

  • Speaker #1

    Et je compléterai, oui.

  • Speaker #0

    Ok. Alors, Emmanuel Diela Nkita, danseur classique à l'Opéra de la Monnaie, jeune homme afro-descendant dont les parents sont originaires du Congo. Donc un jeune homme noir, tu es très grand, tu es très beau, tu as fait du mannequinat, tu fréquentes la scène artistique et créative afropéenne bruxelloise. Voilà, c'est tout ce que je sais de toi, de manière plus ou moins sûre. Le reste, je te laisse compléter. Voilà,

  • Speaker #1

    donc oui, effectivement, je suis danseur, donc j'ai une formation classique. Mais je n'avais pas seulement du classique, je fais aussi du contemporain, du moderne, du néoclassique. Je fais aussi du commercial, puis j'enseigne aussi la danse. Et en ce moment, je suis effectivement sur une production à l'Opéra de la Monnaie. Là, c'est une chorégraphie de l'ordre de la danse contemporaine dans une production qui s'appelle Das Rheingold, qui est mise en scène par Romeo Castellucci et chorégraphiée par une chorégraphe contemporaine, Cindy Van Acker. Et pour les détails concernant d'où je viens, en termes... D'origine, oui, je viens du Congo et en détail de la région du Kassai, du Kassai occidental.

  • Speaker #0

    Tu es né là-bas ?

  • Speaker #1

    Je suis né ici à Bruxelles. Donc j'ai ce métissage culturel, mais je suis déjà parti au Congo une fois quand j'avais 6 ans, une fois quand j'avais 12 ans. Donc oui, j'ai ce métissage culturel en moi.

  • Speaker #0

    Ok. On va parler de toi plus en détail et plus profondément au travers de tes habits. C'est mon sujet de prédilection, c'est ce qui me passionne dans la vie, c'est les habits et ce que ça raconte sur les gens. Donc, on va parler de ça ensemble. Ma première question, c'est d'où vient tout ce que tu portes aujourd'hui ? Alors, je vais décrire parce qu'on n'a pas de vidéo. On aura quelques photos qui vont... Illustrer notre rencontre d'aujourd'hui, tu portes un pull en laine côtelée, vert sapin, une ceinture en coton tressé, un pantalon vintage si je ne me trompe pas, en laine, une couleur que je qualifierais de grège, tu portes des chaussures en cuir, c'est des bottines, des bottines en cuir. Elles sont complètement en cuir, même la semelle est cousue, dont j'ignore la marque, mais en tout cas, ça a l'air d'être une très belle façon.

  • Speaker #1

    Haechung.

  • Speaker #0

    Haechung, je ne connais pas du tout. Pourquoi ce look aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Pourquoi ce look aujourd'hui ? Alors déjà, parce qu'il fait froid.

  • Speaker #0

    Ça explique la laine.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, parce qu'il fait froid, parce qu'il pleut. Et aussi pour le côté, déjà de pratique, mais aussi pour le côté confortable. Oui, confort et pratique. Esthétique, oui, d'une certaine manière. Apprêté, désapprêté, si on peut dire ça comme ça.

  • Speaker #0

    J'aime bien cette manière de dire apprêté, désapprêté, parce que je te trouve particulièrement bien mis, bien habillé, parce que les couleurs vont bien ensemble, parce que ça te donne quand même une belle allure. Quand tu choisis tes vêtements, est-ce que tu les choisis ? Tu y réfléchis la veille, par exemple, quand tu sais que tu dois aller quelque part rencontrer quelqu'un ? Ou est-ce que c'est vraiment quelque chose que tu choisis sur le moment même ? Donc le matin, quand tu dois aller quelque part, ou l'après-midi, ou le soir, peu importe le moment ?

  • Speaker #1

    Oui et non. Ça dépend aussi un petit peu de mon humeur. Par exemple, si je dois aller à un événement, que ce soit par rapport au travail, une soirée ou quoi, ça peut m'arriver que j'ai déjà une idée de ce que je vais porter dans la tête la veille. Et puis ensuite, j'ai toujours une pièce en tête, une pièce de base en tête. Et puis après, le reste, ça vient sur le moment même, au feeling. Je mets un petit peu de musique et puis après, je vois un petit peu qu'est-ce que ça me procure comme émotion, comme sensation. Puis... Donc voilà, c'est un petit peu comme ça que je fonctionne. préparé, oui. Donc, il y a une idée de base principale. Et puis après, le reste, c'est au coup de cœur, aux sensations.

  • Speaker #0

    Tu as dit, ça dépend de mes sensations et de mes émotions. Oui. Donc, est-ce qu'on peut dire que... ce que tu portes reflète ton état d'esprit intérieur ? Est-ce que d'abord tu le choisis en fonction de toi ou en fonction de l'extérieur justement, de où tu vas et qui tu vas rencontrer ?

  • Speaker #1

    Alors oui, effectivement, en fonction de là où je vais aller, mais aussi avant tout par rapport à mon propre confort aussi. Parce que j'aime bien me sentir bien dans mes vêtements. je pense que ça serait un petit peu dommage de ne pas se sentir bien dans ses vêtements parce que c'est quand même une seconde peau. Donc, mettre sur soi une peau avec laquelle on ne se sent pas bien, c'est quand même assez triste, c'est quand même assez dommage. Donc, comment dirais-je ? Est-ce que c'est le reflet de mon intérieur ? Oui, quelque part, oui, ça peut être le reflet de mon intérieur, oui.

  • Speaker #0

    Et... quelle importance a pour toi le vêtement ? Est-ce que le vêtement a une importance dans le milieu dans lequel tu évolues ? Par exemple, moi j'adore les vêtements de danse. Oui. Parce qu'une de mes séries préférées quand j'étais jeune, c'était Fame. J'adorais.

  • Speaker #1

    I wanna live forever.

  • Speaker #0

    I wanna live forever. Je rêverais de monter comme ça avec des chevilles sur une voiture, en dansant avec un juste au corps, ce qui est juste impossible. À cause de... Enfin bref. Mais... Est-ce que... C'est quoi la particularité du vêtement de danse ? Qu'est-ce qu'il représente pour toi ? Comment est-ce que toi, tu fais plusieurs questions en une. Oui. Comment tu t'habilles quand tu danses, par exemple ?

  • Speaker #1

    Comment je m'habille quand je danse ? Alors, ça dépend encore une fois de mon humeur. Alors, ça peut aller à... Donc, je vais mettre quelque chose qui est assez proche du corps où je vais pouvoir voir les lignes de mon corps, pouvoir corriger ce qui est à corriger en termes de mouvement. Comme ça peut être quelque chose d'assez ample où j'ai juste envie d'être... dans la chaleur corporelle et pas dans le côté esthétique si ça te fait sens donc ça dépend de comment tu vas danser ça dépend plutôt de comment est-ce que je vais me sentir et aussi ça dépend de avec quel mindset est-ce que je vais approcher le cours en fait aussi avec quel mindset est-ce que je vais approcher la journée de travail de répétition si maintenant le but de Mon entraînement va être basé sur les lignes. Donc, je vais plutôt mettre quelque chose qui va favoriser justement la vision de ces lignes dans le miroir. Si maintenant, c'est un travail qui va être plus porté sur le côté émotionnel. Du coup, je vais un petit peu moins faire attention à la couleur ou quoi. Je vais plutôt mettre quelque chose de très, très, très confortable. Comme ça, je peux vraiment aller chercher à l'intérieur et pas aller... sur quelque chose de visuel, plutôt de l'ordre du ressenti.

  • Speaker #0

    À quel âge tu as commencé la danse ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense que j'ai toujours dansé, mais on va dire d'une manière sérieuse, sérieuse, sérieuse. En école de danse, j'ai commencé à l'âge de 16-17 ans.

  • Speaker #0

    C'est tard, non, pour la danse classique ?

  • Speaker #1

    C'est tard, oui.

  • Speaker #0

    Quel âge tu as ?

  • Speaker #1

    Là maintenant j'ai 31 ans, bientôt 32. Donc oui effectivement c'est tard, mais j'avais déjà fait d'autres sports avant, j'avais déjà bougé mon corps en passant par la natation, le judo, j'avais fait aussi un petit peu d'équitation, bon là c'est plutôt le cheval qui fait tout le travail. Mais bon, puis aussi du football.

  • Speaker #0

    Donc bouger ton corps, c'est pas quelque chose d'inconnu. Et alors la danse classique, l'image... classiques qu'on en a, c'est des jeunes femmes blanches en tutu.

  • Speaker #1

    N'est-ce pas ?

  • Speaker #0

    Tu es un grand garçon noir qui ne porte pas de tutu, je pense, quand tu danses.

  • Speaker #1

    Pas quand je danse.

  • Speaker #0

    Peut-être quand tu danses, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Non, non, non, je ne porte pas de tutu.

  • Speaker #0

    Ok, d'accord.

  • Speaker #1

    Je ne porte pas de tutu. C'est très, très mignon sur les autres, mais bon, sur moi, I don't know.

  • Speaker #0

    Comment est-ce que Parce que les miroirs sont omniprésents quand on danse.

  • Speaker #1

    Tout à fait, oui.

  • Speaker #0

    Comme tu dis, on choisit ses vêtements en fonction de la musique sur laquelle on danse, de la chorégraphie qu'on est en train de travailler. Quelle importance a eu le vêtement dans la manière dont tu as créé, construit, imposé, montré ton identité de jeune homme noir faisant de la danse classique ?

  • Speaker #1

    C'est oser se montrer, déjà. Oui, c'est oser se montrer parce que... Donc c'est... un impact quand même assez fort sur ma manière de bouger. Au début, quand j'ai commencé, je mettais toujours un pantalon noir avec un t-shirt oversize.

  • Speaker #0

    Pourquoi ?

  • Speaker #1

    Parce que je n'aimais pas forcément mon corps à 100%. Parce que dû aux critiques que j'en ai pris... par rapport à mon physique, qui ne ressemblait pas au physique des autres personnes en classe.

  • Speaker #0

    Tu peux donner plus de détails par rapport aux reproches qui t'ont été faits par rapport à ton physique ?

  • Speaker #1

    En tant que danseur noir, c'était surtout au niveau des pieds. Donc, je mettais des pantalons qui descendaient jusqu'à ses... bas, qui couvrait pratiquement mes pieds, parce qu'en fait, recevoir souvent des remarques, tu as pas un beau pied, rentre tes fesses, tu as les fesses qui ressortent.

  • Speaker #0

    Et ça, c'est de l'ordre de... Tu peux pas gérer, c'est pas quelque chose sur lequel tu peux travailler, la forme de tes pieds.

  • Speaker #1

    On peut le travailler d'une manière musculaire, mais c'est vrai que j'ai une forme de pied de... de base, donc du coup ça ne va pas nécessairement ressembler à un pied caucasien, si il faut dire les choses.

  • Speaker #0

    Mais donc tu veux dire qu'un pied africain n'a pas la même forme qu'un pied caucasien ?

  • Speaker #1

    Disons que le pied noir est un pied un peu plus... En tout cas, pour moi, est un pied un peu plus dur à travailler. Il n'est pas facilement cassable et pliable. OK. Donc...

  • Speaker #0

    Donc tu le couvrais volontairement ? Je le couvrais volontairement,

  • Speaker #1

    parce qu'on disait que ça allait... Enfin, je veux dire qu'ils étaient pas à beau et que du coup,

  • Speaker #0

    il y avait rien à faire. Ok, ok. Et donc comment est-ce que t'as... avancer avec ça. Donc au début tu te couvrais.

  • Speaker #1

    Je me couvrais et puis après à un moment donné j'en ai eu assez. À un moment donné j'en ai eu assez et puis je me suis dit je vais travailler sur ce qu'on dit qui sont mes défauts et en fait je me suis rendu compte que c'était complètement démonstreux. qu'en fait, j'ai de beaux pieds.

  • Speaker #0

    Et de belles fesses.

  • Speaker #1

    Et j'ai de belles fesses aussi. J'ai de beaux pieds, j'ai de belles fesses, j'ai de beaux bras. Et tout ça, tout ça, quoi.

  • Speaker #0

    Et est-ce que quand on danse, aujourd'hui, alors, qu'est-ce que tu dis de toi quand tu t'habilles pour aller danser ? Parce que quand tu danses en studio, quand tu es en entraînement ou en répétition, est-ce que tu dis quelque chose de toi lorsque tu t'habilles ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai le droit d'être là.

  • Speaker #0

    C'est ça que tu dis ? Oui. En portant des choses qui ne couvrent pas tes pieds, qui ne couvrent pas tes fesses.

  • Speaker #1

    Mais en fait, j'ai le droit d'être là, j'ai aussi le droit de travailler, de corriger, peut-être pas corriger, d'améliorer.

  • Speaker #0

    Elle a nuancé quand même.

  • Speaker #1

    J'ai le droit aussi... d'améliorer ce qui est déjà là, même si ça pourrait gêner certaines personnes. Parce que justement... c'est quelque chose qui est arrivé souvent dans mes oreilles, c'est que Oh mon Dieu, j'ai jamais eu un garçon comme toi

  • Speaker #0

    Ça veut dire quoi ?

  • Speaker #1

    Justement, ça veut à la fois tout dire et rien dire à la fois.

  • Speaker #0

    On t'a déjà dit ce que ça voulait dire ? Toi, tu as une idée de ce que ça veut dire ? Un garçon comme toi, c'est quoi ? C'est un garçon noir dans des compagnies, sur des scènes en Belgique ?

  • Speaker #1

    Un garçon noir, un garçon aussi grand ?

  • Speaker #0

    Combien tu mesures ?

  • Speaker #1

    1m85.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est grand.

  • Speaker #1

    Mais après, en tant que réflexion du genre, oui, tu as un corps qui est difficile. difficile peut-être, mais peut-être pas nécessairement pour d'autres. Je ne pense pas avoir un corps difficile, je pense que j'ai un corps très simple, mais je pense que la simplicité, ça devient difficile pour certaines personnes.

  • Speaker #0

    Et donc, aujourd'hui, ce n'est plus un problème pour toi d'être... devant un miroir avec d'autres danseurs, d'autres danseuses et de choisir ce que tu portes. Tu ne te caches plus.

  • Speaker #1

    Dire que c'est plus difficile, ça serait mentir. C'est un travail. C'est un travail, que ce soit avec ou sans danseurs autour de moi, déjà se regarder dans le miroir et... Et apprécier, accepter, aimer ce que l'on voit, c'est un travail difficile, qui peut paraître difficile. Pourquoi ? Parce qu'on ne nous a pas appris à aimer ce que l'on voit de nous. On nous a toujours comparé.

  • Speaker #0

    Qui ça, nous ?

  • Speaker #1

    En tout cas, je vais plutôt parler pour moi. On m'a souvent et toujours comparé aux autres. regarde, c'est bien, regarde comment un tel fait, pourquoi est-ce que tu ne fais pas pareil.

  • Speaker #0

    Dans la danse ?

  • Speaker #1

    Que ce soit dans la danse ou d'une manière générale. Pour moi, ma danse, c'est un petit peu... un reflet de la vie qu'il y a quelque part. Parce que c'est quand même une mini société, si on peut dire ça comme ça. J'avais une prof de danse, elle m'a dit que quand elle était à l'école de danse, elle entendait des remarques. Ah, tu vois cette fille, la hauteur à laquelle elle lève sa jambe ? Ah ben, toi, tu dois lever ta jambe un peu plus haut. Donc du coup, ce que tu fais, c'est que tu... c'est que tu te compares. Donc, on t'amène à te comparer à l'autre et on t'amène à être dans un mindset où ce que tu vois de toi dans le miroir n'est pas assez.

  • Speaker #0

    Donc, ça, c'est à la scène, on va dire. Oui. Et dans ta vie, en dehors de la musique, de la barre, des studios et des miroirs, est-ce que c'est la même chose ? Est-ce qu'il y a aussi cet exercice de comparaison

  • Speaker #1

    Hum. Ça peut arriver.

  • Speaker #0

    Plus souvent, tu es dans quelle démarche, tu vois, par rapport à ton image, par rapport aux autres, par rapport au monde, en fait ?

  • Speaker #1

    Alors moi, mon image à moi, par rapport aux autres, que ce soit par rapport aux vêtements ou que ce soit par rapport à ma manière d'être, en fait, je ne me compare pas nécessairement. Ma première approche ne va pas justement être de me comparer à l'autre, de me dire, oui, je suis. Je suis mieux que toi, je vais t'écraser ou quoi. Non, parce qu'en fait, je me rends compte que dès qu'on commence à rentrer dans cette démarche-là, en tout cas pour moi, il y a quelque chose d'assez sale, d'assez dégueulasse à l'intérieur qui commence à pousser. et qui ne fait pas nécessairement du bien en fait, parce que du coup on sent vraiment qu'il y a une sorte de poison qui se crée à l'intérieur, et donc du coup ça entraîne un comportement avec autrui qui est de l'ordre du... Oui, qui est très néfaste, qui est très sombre, qui est très... Ça me donne presque la chair de poule à force d'y penser. Ça n'a rien de sain, ça n'a rien de joli, ça n'apporte rien de constructif à autrui.

  • Speaker #0

    Ça veut dire que sur les deux tableaux, autant à la scène qu'à la ville, tu t'habilles d'abord pour toi, en fonction de ton humeur, de tes émotions et de tes objectifs. Là, il fait froid, donc tu t'habilles chaudement parce que tu n'aimes pas avoir froid. Quand tu es en studio... tu choisis en fonction de ce que tu vas faire comme travail où est-ce que tu t'habilles ?

  • Speaker #1

    alors donc je m'habille dans la meilleure friperie du monde je veux savoir la garde-robe de mon père mais non il ne va pas m'aimer sinon non en fait je veux dire par là que lorsque je regarde des photos photos de mon père parce qu'en fait, il faut dire quand même que si je dois avoir des idéaux de beauté, ce sont quand même mes parents. Parce que, waouh, ils sont juste magnifiques. Ils sont beaux.

  • Speaker #0

    C'était pas mal non plus, d'entendre.

  • Speaker #1

    Merci, c'était beau. Quand je dis la garde-robe de mon père, c'est parce qu'en fait, quand je regarde des photos des années 70, il avait un look mais absolument, il a toujours un look que...

  • Speaker #0

    Ok, je comprends un peu plus la vibe d'aujourd'hui parce qu'effectivement, il y a un petit... Il y a un petit twist 70's dans les couleurs. Le pantalon, il n'est pas très pas de def aujourd'hui, mais tu l'as.

  • Speaker #1

    Donc, il y a toujours un petit peu ce côté évasé, toujours assez proche du corps. Donc, quelque chose qui épouse le corps sans trop l'épouser non plus, mais avec un côté assez confortable. Donc, quelque chose qui tombe sur le corps et qui prend la forme du corps. qui ne soit pas trop découpé d'une manière où on ne sait pas ce qui va pouvoir rentrer dedans. OK.

  • Speaker #0

    Et donc, tu t'inspires de la garde-robe de ton père ou tu vas vraiment prendre ses pulls ?

  • Speaker #1

    Non, non, non. Je m'inspire de la garde-robe de mon père, oui.

  • Speaker #0

    Et après, tu vas chercher où, alors, les pièces qui restent ?

  • Speaker #1

    Du coup, je vais en friperie. Je vais en friperie ou bien... Parce qu'en fait, j'ai un petit peu du mal à les prendre. En boutique de première main ? Si je vais en boutique de première main, c'est vraiment pour prendre des petits basiques, comme une chemise ou quoi, et encore, en fait. Parce que je trouve que les vêtements de l'époque, je dis de l'époque comme si c'était il y a hyper longtemps, mais c'était il n'y a pas si longtemps que ça, en fait. Je trouve qu'ils avaient une certaine... du caractère en fait, une âme, quelque chose qui vit. Ou bien chez des créateurs.

  • Speaker #0

    Ah ouais ?

  • Speaker #1

    Ouais.

  • Speaker #0

    Alors, quel est ton top 3 des friperies à Bruxelles ? Ouf. Ou alors ta best friperie à Bruxelles ?

  • Speaker #1

    Oh my god.

  • Speaker #0

    Là où t'as acheté le plus de pièces. Ou celle où tu trouves des dingueries.

  • Speaker #1

    Bah du coup, des dingueries, je dirais pas. Mais là où j'ai acheté le plus de pièces, je dirais plutôt épisodes.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Ouais. Puis là où j'ai trouvé des dingueries. Je n'en ai pas encore trouvé de dinguerie.

  • Speaker #0

    Ok. Écoute, on va faire des petites promenades ensemble.

  • Speaker #1

    Voilà.

  • Speaker #0

    Tu peux trouver des dingueries.

  • Speaker #1

    Super.

  • Speaker #0

    Et comment est-ce que tu choisis ? Un vêtement que tu décides...

  • Speaker #1

    Au coup de cœur.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi qui t'accroche en général ?

  • Speaker #1

    En général, c'est une matière.

  • Speaker #0

    Tu la vois ou tu la touches ? Ou tu la touches d'abord et ensuite tu l'observes ?

  • Speaker #1

    Je la touche. En fait, oui, je vois la couleur et puis ensuite la matière, je la touche. Et puis surtout, déjà, comment est-ce que le tissu tombe ?

  • Speaker #0

    Donc, tu vois la couleur ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    J'essaye de déterminer un peu ton processus de sélection de la pièce vintage. Tu vois une couleur, tu t'approches, tu détermines un petit peu la matière, tu touches la matière, tu sors le vêtement, et puis tu regardes comment il tombe déjà sur le cintre. Et puis de là, tu sais si tu vas l'essayer ou pas. Et donc quand tu passes à l'essayage. qu'est-ce qui doit se passer à l'essayage pour que tu continues l'aventure jusqu'à la caisse ?

  • Speaker #1

    C'est quelque chose qui va être de l'ordre du ressenti et qui va attention, ça doit procurer ceci. Ah !

  • Speaker #0

    Ah oui ! Oui. Donc un soulagement, une satisfaction. Oui. C'est ce que je comprends dans ton...

  • Speaker #1

    Ah ! Oui, donc c'est vraiment un... Ah oui, ok.

  • Speaker #0

    Une évidence.

  • Speaker #1

    Oui, une évidence. Quelque chose qui est comme un gant, en fait.

  • Speaker #0

    Ok. Tu parlais de seconde peau tout à l'heure.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Oui.

  • Speaker #0

    Donc une seconde peau.

  • Speaker #1

    Quelque chose qui est juste.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Et arriver à trouver quelque chose de juste, c'est pas facile.

  • Speaker #0

    Ouais, donc tu tombes pas régulièrement sur...

  • Speaker #1

    Donc c'est pour ça que je dis que je n'ai pas encore trouvé de dinguerie, tu vois.

  • Speaker #0

    Ouais, ouais. Après, t'es pas venu souvent chez moi. Ah,

  • Speaker #1

    voilà.

  • Speaker #0

    Tu sais que je collectionne des dingueries. Ah,

  • Speaker #1

    ah.

  • Speaker #0

    On va se revoir.

  • Speaker #1

    On va se revoir.

  • Speaker #0

    Alors, ok, donc, sélection en fripes. Donc c'est de là que je vois que t'as des belles qualités sur toi, des belles matières sur toi. Et puis t'as dit que tu t'habilles aussi des designers.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    quel designer, comment tu les choisis, comment tu fais aussi pour te les payer, parce que je pense que beaucoup de gens, dont moi, on aime les designers, connus, inconnus, surtout on a un amour pour les belles pièces, bien coupées, dans de belles matières, mais que tout ça, ça a un certain coût, et que c'est difficile. de se dire qu'on va consacrer plusieurs centaines d'euros dans un vêtement alors qu'on pourrait avoir quelque chose de similaire, dix fois moins cher dans un magasin de distribution. Et puis alors, ça veut dire que si tu payes un vêtement dix fois plus cher, tu vas pouvoir en acheter qu'un peut-être, au lieu de t'en acheter dix différents. Ça, c'est la logique de la fast fashion. Est-ce que tu as déconstruit cette logique de la fast fashion ?

  • Speaker #1

    Alors moi je vais plutôt dans la qualité plutôt que dans la quantité.

  • Speaker #0

    Amen !

  • Speaker #1

    Donc du coup oui, quand je dis designer, après je ne dis pas que j'ai tout un dressing qui est rempli de vêtements de designer, mais je veux dire lorsque je tombe sur une pièce et que la matière elle me plaît, et que sur le moment j'ai l'opportunité de me l'offrir, je le fais.

  • Speaker #0

    Ok, ce n'est pas un frein.

  • Speaker #1

    Donc non, ce n'est pas un frein. Enfin, je veux dire, je ne vis pas au-dessus de mes moyens non plus. Donc que ça, on entend bien.

  • Speaker #0

    Et quels sont tes designers préférés ? ce que tout le monde connaît ? Et peut-être que ton designer ou tes designers préférés ne sont pas connus du grand public ?

  • Speaker #1

    En fait, il y a un designer en particulier avec qui j'ai déjà travaillé, avec qui je travaille encore en ce moment. Il s'appelle Koualé. Il a reçu le prix du fashion design, si je ne dis pas de bêtises, du MAD. Et en fait, il a créé toute une... La collection est en rapport avec un métissage culturel, parce qu'en fait il est roi rwandais et qui a grandi ici en Belgique. Donc toute sa collection se prête sur ce métissage culturel, que ce soit au niveau du drapé, du tissu, au niveau de l'imprimé du tissu, des différentes matières. Il a d'ailleurs créé quelques pièces sur moi.

  • Speaker #0

    Tu es une muse ! Manu est une muse de la mode !

  • Speaker #1

    Donc il a déjà créé quelques pièces sur moi et je dois dire que c'est aussi un honneur et un privilège de pouvoir avoir un vêtement qui a été fait sur mesure par un jeune créateur. C'est un talent !

  • Speaker #0

    Et les pièces que tu as de Koalé, tu les portes pour quelles occasions ?

  • Speaker #1

    Je les porte pour des occasions. Déjà, il faut dire aussi que dans le travail de Koalé, c'est un travail qui met en avant... toute la gloire et la royauté du tissu africain. Parce que c'est quand même un tissu noble, une matière noble qui est portée de façon noble. par des personnes. Les robes, là. Appelons un chat un chat. Donc du coup, je vais vraiment aller honorer ces créations, honorer ces vêtements dans des événements qui s'y prêtent, dans des endroits qui s'y prêtent, que ça soit un mariage ou bien un vernissage, que ça soit à une soirée d'ouverture, à une réception.

  • Speaker #0

    plus pour des événements que pour la vie quotidienne ?

  • Speaker #1

    En tout cas, moi, ce sont vraiment les endroits où je vais les honorer parce qu'aussi, vu la météo que nous avons aussi à Bruxelles, parfois c'est un petit peu compliqué de savoir, ok, telle matière, est-ce que ça serait adéquat pour tel météo ? Donc oui, plutôt pour des... dans des endroits qui se prêtent à leur glorification.

  • Speaker #0

    Et comment tu te sens quand tu portes ces vêtements-là qui visiblement t'apportent de l'empouvoirment ? Je dis en français. En français. Parce que j'aime le français. L'empowerment. Qu'est-ce que tu ressens dans ces étoffes, dans ces pièces dont tu connais le créateur, dont tu connais... l'histoire, le processus créatif, parce que visiblement tu y as contribué, puisque tu as été le modèle, le mannequin sur lequel certaines pièces ont été conçues. Qu'est-ce que toi, ça t'apporte ? Qu'est-ce que toi, ça te raconte ? Et en les portant, qu'est-ce que tu racontes au monde ?

  • Speaker #1

    Déjà, de un, ça sonne juste. Qu'est-ce que ça raconte au monde ? Encore une fois, c'est que j'ai le droit d'être là dans toute ma splendeur.

  • Speaker #0

    Alors moi tu sais je vais mettre les pieds dans le plat dans toute ton africanité dans toute ta noiritude je viens d'inventer un mot tu l'as dit à ma place je l'ai dit à ta place génial au moins je ne t'ai pas je craignais quand même de te croisser parce que c'est important peut-être on fait un petit peu On n'en est qu'au début de ce podcast, donc on ne sait pas encore on, je dis on parce que je parle de moi et tous mes colloques dans ma tête. On ne sait pas encore quel ton vraiment on va donner, on va avoir, mais on voudrait vraiment pouvoir parler sans langue de bois. Et donc, quand je dis que ça te permet de t'exprimer dans toute ta noirétude, c'est parce que tu évolues dans un milieu qui est essentiellement blanc, assez aisé, et que tu fais tâche de temps. N'est-ce pas ? Une jolie tâche, hein ? Une jolie petite tâche. Ce que j'ai compris et ce que je comprends, c'est que c'est un peu une revendication.

  • Speaker #1

    Oui, quand même, parce qu'il ne faut quand même pas oublier le passé colonial que la Belgique a avec le Congo. Parce qu'encore une fois, je suis Congolais, du Kassai occidental, né ici en Belgique, à Bruxelles. donc j'ai dû rentrer dans des cases justement pour ne pas faire trop tâche justement donc bien parler, bien se tenir bien s'habiller c'est pour ça que quelque part mon éducation a aussi une grande influence sur la manière dont je m'habille aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Qui est différente d'il y a quelque temps, ou d'avant ? Tout à l'heure, tu as dit que maintenant, tu as envie de ne plus t'excuser. Oui. Ça veut dire que je suppose qu'avant, tu t'excusais et que tu t'habillais en fonction de comment est-ce que tu pensais qu'on attendait, qu'on souhaitait que tu sois habillé.

  • Speaker #1

    Par exemple, oui.

  • Speaker #0

    Mais qu'aujourd'hui, tu te réappropries ton identité, entre autres, au travers de ce que tu choisis de porter. Et quand tu es... dans un studio de danse, et quand tu vas en représentation dans des événements en tant que danseur, et puis en tant que toi, Emmanuel, citoyen belge, de parents congolais, qui eux sont nés au Congo, toi ici, dans un pays qui a une histoire assez longue, assez lourde, avec le pays d'origine de tes parents. Oui. Est-ce que... tu as déjà pensé que c'est une revendication, que les choix que tu fais de, par exemple, porter exclusivement des vêtements d'un designer aussi afrodescendant qui crée des vêtements que je qualifierais aussi d'afropéens, parce que c'est des vêtements inspirés de techniques, de vêtements traditionnels rwandais, mais ce sont des vêtements occidentaux. Est-ce que c'est une manière de revendiquer que tu es un afrodescendant vivant en Europe, en Occident, mais qui n'oublie pas d'où il vient ? Je vais loin quand même.

  • Speaker #1

    Oui, quand même. Est-ce que je vais trop loin ? Je dirais que les créations de Kuali, ce ne sont pas des techniques rwandaises, c'est plutôt une technique africaine noire dans son ensemble. Ça rassemble plusieurs pays d'Afrique noire. Donc, on va plutôt dire ça comme ça pour avoir ensuite une esthétique qui a un métissage européen et africain. ok et ça ça te définit ça te qualifie mieux est-ce que c'est ben oui quelque part je peux dire ça comme ça parce que j'ai ce métissage en moi de toute manière j'ai ce métissage européen et afrique noire oui oui oui donc oui ça sonne juste pour moi peut-être que je me trompe mais Je n'en ai pas l'impression. Parce que lorsque je porte le vêtement, je me sens bien dedans, je me sens à l'aise, ce sont des couleurs qui mettent en avant ma personnalité. Quand je dis qu'ils mettent en avant ma personnalité, ce sont des couleurs vives, joyeuses, qui ont une histoire, comme tout le monde. Tout le monde a une histoire, mais par rapport, encore une fois... Par rapport à toute ma noiritude. Voilà, c'est...

  • Speaker #0

    On va la garder celle-là. La noiritude.

  • Speaker #1

    Donc oui, c'est plein de vie, c'est chaud, c'est...

  • Speaker #0

    Ça, c'est des adjectifs qui pourraient te qualifier toi en tant que personne ?

  • Speaker #1

    Oui, oui, oui, oui. Sans aucune prétention.

  • Speaker #0

    Tu penses que, de manière générale, on choisit ses vêtements comme on... pourrait définir sa personnalité ?

  • Speaker #1

    Oui. Je me souviens lorsque j'étais à l'école secondaire, il y avait une école en particulier où je ne me sentais pas très bien, voire même pas bien du tout d'ailleurs. Et je me souviens qu'en fait, mon outfit, c'était un long t-shirt oversize, avec un jeans très oversize, avec des baskets, et avec un hoodie sur la tête.

  • Speaker #0

    C'est ce que tu portais ? Oui.

  • Speaker #1

    Donc, ça a été à chaque fois des choses très, très, très, très, très, très amples où je pouvais me cacher, en fait.

  • Speaker #0

    Et pourquoi est-ce que tu voulais te cacher ?

  • Speaker #1

    Parce que, justement, je remarquais que je n'étais pas nécessairement comme les autres enfants de cette école-là, avec une personnalité complètement différente, avec un mindset complètement différent. avec une manière d'être, une manière de me voir complètement différente. J'avais tout le temps mes mains dans les poches, j'avais la tête baissée, je ne parlais pas.

  • Speaker #0

    Mais tu as toujours été aussi grand ? Cette question peut paraître bizarre, mais je veux dire, parfois on a des poussées de...

  • Speaker #1

    J'ai eu une poussée de croissance. J'étais resté petit pendant quand même assez longtemps. Puis ensuite, en un été, j'ai pris 11 centimètres. Oh, waouh ! Oui, en un été.

  • Speaker #0

    Je pense que je n'ai jamais autant grandi.

  • Speaker #1

    du coup voilà donc j'ai pris 11 centimètres en une fois et du coup voilà donc on va dire que oui je donc là tu te sentais pas bien donc tu portais des vêtements dans lesquels tu t'effaçais oui et

  • Speaker #0

    à quel moment est-ce que tu t'es sentie mieux, suffisamment mieux pour ne plus t'effacer mais plutôt t'affirmer est-ce que c'est arrivé ?

  • Speaker #1

    oui c'est arrivé d'une certaine manière quand je suis arrivé à l'école de danse ah oui

  • Speaker #0

    donc malgré le fait que donc c'était t'as fait ça par étapes peut-être je sais pas je viens d'avoir une image comme ça qui m'est venue à la tête qui m'est passée par la tête c'est de toi en train d'éclore comme ça donc ça veut dire que l'éclosion a commencé quand t'as commencé la danse donc à t'habiller un petit peu plus en fonction de comment tu pouvais définir ta personnalité et puis tout à l'heure tu disais que c'est un travail de tous les jours que de pouvoir affirmer qui on est au travers de ces vêtements et pour toi en particulier lorsque tu es en studio parce que tu es un homme noir faisant de la danse classique Première étape de l'éclosion, c'est après l'école secondaire, quand tu commences à faire de la danse classique. Comment ça s'est exprimé ? Comment est-ce que tu es passé du hoodie, t-shirt oversize, jean oversize, main dans les poches, à quoi après ? C'était quoi après ?

  • Speaker #1

    On va dire que c'était des choses un petit peu moins oversize.

  • Speaker #0

    Tu as fait des trucs un peu moins grands. Tu as commencé à porter des vêtements un peu moins larges.

  • Speaker #1

    Un peu moins larges. Juste un t-shirt, on va dire d'une taille régulière qui va juste être à ma taille. Et puis après, un pantalon pas trop ample non plus, mais juste avec une coupe droite où on peut quand même voir les lignes de mon corps.

  • Speaker #0

    Et à quel moment est-ce que tu es passé à ce look-là que tu as aujourd'hui ? ce look un peu d'un spy 70's comme ton papa qui avait la classe et qu'il a encore une classe mais incroyable à quel moment justement t'as fait ce switch alors de passer de vêtements juste à ta taille pas pour te cacher mais juste pour t'habiller à ce look que t'as aujourd'hui qui est quand même un peu marqué tu vois t'as quand même une identité stylistique que teinté d'élégance, à quel moment tu t'es autorisé ça ?

  • Speaker #1

    Est-ce que je vais avoir une réponse correcte par rapport à cette question ? Je ne sais pas.

  • Speaker #0

    Toutes tes réponses sont des bonnes réponses.

  • Speaker #1

    À quel moment est-ce que c'est arrivé ? C'est arrivé...

  • Speaker #0

    Peut-être que c'est arrivé progressivement.

  • Speaker #1

    C'est arrivé un petit peu comme ça, je pense. Oui, ça a été arrivé assez progressivement. C'est arrivé au moment où où en fait, je pense que ça va être un petit peu redondant ce que je vais dire, mais c'est arrivé à un moment où dans ma tête, c'est moi, c'est comme ça, c'est comme ça que j'aime bien m'habiller, c'est comme ça que je me sens, c'est apprendre ou à laisser, that's it.

  • Speaker #0

    ok et je reviens un petit peu sur ce qu'on disait juste avant quand tu expliquais que tu portais des vêtements de créateur et de ce créateur afrodescendant Koale Akiza Pourquoi est-ce que pour toi c'est important ? Parce que tu as dit que tu portais ces pièces pas dans la vie de tous les jours, mais pour des performances, pour des vernissages, lors d'événements, quand tu vas vraiment un peu te montrer. Est-ce que c'est plus important pour toi de porter ces vêtements à ces moments-là qu'à d'autres ? Et si oui, pourquoi ?

  • Speaker #1

    Pourquoi ? Parce que déjà, dans le milieu, nous ne sommes pas beaucoup.

  • Speaker #0

    Quel milieu ?

  • Speaker #1

    Dans le milieu créatif, dans le milieu artistique.

  • Speaker #0

    Et c'est qui nous ?

  • Speaker #1

    Donc nous, les noirs.

  • Speaker #0

    Ok. Appelons un chat un chat et un noir un noir.

  • Speaker #1

    Appelons un chat un chat et un noir un noir. Bon,

  • Speaker #0

    aujourd'hui, parce qu'en fait, oui, enfin, on ne doit pas forcément... Ce n'est pas ce qui définit une personne, mais dans certaines circonstances, ça fait la différence. Donc ok, c'est pour...

  • Speaker #1

    C'est pour... vas-y pas de l'homme de bois oui mais en fait je cherche vraiment les mots justes pour que ça sorte de la bonne manière et pour que ça soit surtout entendu de la bonne manière c'est pas juste pour montrer que nous sommes là, oui les gens nous voient que nous sommes là mais c'est pour nous montrer nous, pour nous voir nous pas juste une image qu'on veut nous coller pas juste euh le petit noir dans le coin de la salle qui est très reconnaissant parce qu'il a eu une petite place, pas juste le noir dans la salle qui occupait à servir les coupes de champagne, mais qui garde l'uniforme du colonisateur, si je peux dire ça comme ça. Donc c'est encore une fois revendiquer sa place. C'est ne pas être désolé d'exister. malgré toutes les tentatives qu'on a de vouloir nous effacer. Parce que j'ai envie de dire, vous nous avez amenés ici, maintenant il faut assumer.

  • Speaker #0

    Est-ce que je suis juste si je dis que dans l'environnement dans lequel tu évolues, le milieu créatif, artistique, celui de la danse, la danse classique en particulier, tu te vis un petit peu comme... comme une sorte de porte-drapeau pour toi et pour les autres acteurs créatifs de la communauté afro-descendante ?

  • Speaker #1

    Pour moi, c'est très, très important, oui, surtout d'être un homme danseur noir de m'incarnation de peau, de mon teint de peau foncé. C'est très important, pourquoi ? Parce qu'en fait, moi, en étant à l'école de danse, je n'ai pas nécessairement eu de modèle ou de repère. Ou s'il y en avait, c'était un ou deux, mais pas ici en Belgique. Donc oui, pour moi, c'est quand même assez important, oui. Parce que si, maintenant, mettons, un enfant noir va à l'opéra pour la première fois et qu'il me voit sur scène et que ça réveille en lui, que ça soit par rapport à la danse ou par rapport à autre chose, dans la vie où il peut se sentir, ah mais je suis quand même le seul noir dans mon secteur. Mais il n'y a personne d'autre qui va arriver à un tel niveau. Et si en me voyant sur scène, ça peut réveiller en lui une flamme, une étincelle, quelque chose. si lui il y est arrivé mais en fait moi aussi qu'est-ce que ce soit comme discipline que ce soit la danse que ce soit la mode la musique ou que sais-je il

  • Speaker #0

    pourra avoir une manifestation physique de son rêve futur c'est génial en fait t'as conscience et tu prends à bras le corps le rôle de rôle modèle

  • Speaker #1

    Je pense que quand on fait partie d'une minorité, c'est quand même important, surtout une minorité comme une minorité, parce qu'on n'est pas vraiment une minorité, parce que le peuple noir est quand même un grand peuple. Disons les choses telles qu'elles sont, disons les termes, s'il vous plaît. Le peuple noir est un grand peuple, mais c'est qu'on nous a un peu divisé pour mieux régner sur nous. C'est pour ça qu'on se retrouve à être le seul noir de tel département. Donc c'est important, oui, c'est très très important.

  • Speaker #0

    Et quel message tu veux véhiculer quand tu portes un vêtement qui a été fait par un créateur noir ? Qu'est-ce que tu veux raconter ? par rapport à toi en tant que danseur, rôle modèle, dans cette industrie, dans ce secteur, et qu'est-ce que tu veux raconter aussi, si jamais tu veux raconter quelque chose ou dire quelque chose, par rapport aux autres créatifs qui sont là, qui existent, et qu'on ne voit pas forcément. Parce que j'imagine que... les pièces des créateurs que tu portes n'ont pas une audience aussi large que la tienne, puisque tu es danseur. L'Opéra de la Monnaie, c'est comme ça qu'on dit ? En ce moment, oui. Voilà. À l'Opéra de la Monnaie, qui est quand même une institution, c'est quand même quelque chose d'assez prestigieux. C'est quoi le message que tu veux véhiculer ? Et ? Je pense que ça c'est la partie la plus importante de la question. À qui ?

  • Speaker #1

    Alors, à qui ? Déjà, j'ai envie de dire aux jeunes artistes noirs, que ce soit garçons ou filles, crois en toi, crois en tes rêves. Tu es plus que ce que tu ne penses. Tu as tout ce qu'il faut. et tu vas y arriver n'aie pas peur de prendre ta place entoure-toi de personnes qui sont là pour te voir briller parce qu'elles veulent te voir briller pas parce que ça leur apporte quelque chose à sens unique tu as le droit de exister Donc ça c'est déjà une chose. Et aux haters, si je peux dire ça comme ça, aux haters qui ont tenté de me mettre à plat, j'ai juste envie de leur dire... C'était bien essayé. C'était bien essayé, mais... Et merci.

  • Speaker #0

    Ah ouais ? Oui. Tu vas dire merci aux haters ?

  • Speaker #1

    Bah oui, parce que quelque part, leur haine a alimenté mon feu.

  • Speaker #0

    Explique.

  • Speaker #1

    On dit qu'entre l'amour et la haine, il n'y a qu'un pain.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Donc... leur haine envers moi a fait que attiser le feu de l'amour que j'ai pour la vie en fait pour la vie ?

  • Speaker #0

    c'est beau ce que tu viens de dire parce que j'ai vraiment eu des personnes dans cette école d'ailleurs

  • Speaker #1

    qui ont vraiment tenté de me Ouais, m'anéantir.

  • Speaker #0

    Ah ouais, carrément ?

  • Speaker #1

    Ouais, ouais, ouais. Une méchance, c'était gratuit. Parce que tu es différent. Parce que tu ne rentres pas justement dans cette case. Ouais, ça a quand même bien joué sur mon mental et au quotidien. Donc c'était pour ça, en fait. T-shirt large, hoodies sur la tête, même en classe, pantalon hyper large pour s'effacer le plus possible. Mais malgré ça, il y a toujours eu une tentative de... de vouloir m'exterminer.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Bon,

  • Speaker #0

    tu es là.

  • Speaker #1

    J'utilise des mots forts, je sais, mais c'est comme ça que je l'ai vécu, c'est comme ça que je l'ai ressenti avec les... Enfin, je n'avais pas rentré dans les détails, mais c'est quand même des choses très fortes et très difficiles. Quand on est un ado qui sent plein de choses changer émotionnellement, physiquement, à l'intérieur de soi, de recevoir ce genre d'attaque-là, c'est très très dur. Donc oui.

  • Speaker #0

    Et aujourd'hui, c'est quoi ton vêtement préféré ?

  • Speaker #1

    Mon vêtement préféré ?

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Vêtements préférés. C'est un vêtement auquel je ne dois pas... pas pensé est-ce que c'est un vêtement qui existe ? c'est un vêtement qui existe et c'est quoi ? c'est quoi ? donc pas seulement d'une manière métaphorique ? non non non ah ok vraiment mon vêtement préféré aujourd'hui ? oh my goodness ben c'est ma couleur de peau noire oh C'est ma couleur de peau noire, c'est mon vêtement préféré. ça fait désabîmer complètement c'est peut-être prétentieux là ce que je suis occupé à dire non c'est très bien tu t'assumes t'as dit non t'excuses pas donc bon on va on va arriver sur la fin et alors on

  • Speaker #0

    va faire un truc un peu sympa que j'aime bien faire tu connais le principe du portrait chinois

  • Speaker #1

    Tu peux me rappeler ?

  • Speaker #0

    Alors, je te dis ici, en l'occurrence, je vais te dire, si tu étais un pull, quel pull tu serais ?

  • Speaker #1

    D'accord.

  • Speaker #0

    Donc, si tu étais un pull, au mois de novembre, en Belgique ?

  • Speaker #1

    Oui. Je serais un pull en Cachemire. Un pull en Cachemire. un col roulé de couleur rouge.

  • Speaker #0

    Frileux, mais... I'm here. Ouais. Look at me.

  • Speaker #1

    Un pull en cashmere, col roulé de couleur rouge.

  • Speaker #0

    C'est du temps pantalon.

  • Speaker #1

    Un pantalon noir. en coton, coupe droite. Qui dessine un peu la fesse quand même.

  • Speaker #0

    La fesse qui est trop fesse.

  • Speaker #1

    La fesse qui est trop fesse. Tu vois ? Oui. Tu as compris, non ?

  • Speaker #0

    Très bien.

  • Speaker #1

    Donc, noir, pourquoi ? Parce que noir, c'est une couleur de pouvoir. et qui est très classe, qui est très royale. Et droite, pourquoi ? Parce qu'en fait, c'est une coupe qui tombe sur les formes du corps. Et voilà.

  • Speaker #0

    Si tu étais une paire de chaussures ?

  • Speaker #1

    Une paire de chaussures ? Une paire de chaussures... Une bottine. Parce que nous sommes toujours au mois de novembre, n'est-ce pas ?

  • Speaker #0

    Ou pas ! Si tu as une saison favorite qui correspond à une autre paire de chaussures, tu pourrais être une autre paire de chaussures.

  • Speaker #1

    Non, parce que là, ce que j'ai en tête, c'est... ça se prête plutôt... enfin, quoique, ça pourrait aussi se prêter au printemps. ça pourrait aussi se prêter au printemps donc ça serait une bottine avec une petite talonnette si je peux dire ça comme ça noire la matière la matière En cuir satiné ? Oui. En cuir satiné.

  • Speaker #0

    Tu peux être la chaussure que tu veux.

  • Speaker #1

    En cuir satiné, oui, quelque chose pareil.

  • Speaker #0

    Et donc, si tu étais un vêtement de dessus, donc une veste ou un manteau, est-ce que tu serais plutôt... Un vêtement du mois de novembre ou un vêtement du mois de juin ?

  • Speaker #1

    Quand j'ai la silhouette en tête, c'est plutôt une silhouette du mois de novembre. Le vêtement du dessus que j'aurais, ce serait un trench.

  • Speaker #0

    OK.

  • Speaker #1

    Un trench de couleur. Est-ce que du vert, ça serait trop ? Avec cette silhouette-là, peut-être pas.

  • Speaker #0

    Vert sapin, comme ça ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    C'est pas mal. J'ai un peu la silhouette en tête. Tu la sais pas ? Oui. Il va falloir la dessiner. Il va falloir la... Tu me compliques la tâche. Comment je fais pour illustrer ce podcast ? Moi, maintenant, des poteaux, des illustrations, on fait quoi ? OK. J'ai une dernière question.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Peut-être que cette question va être la question qui va revenir dans tous les épisodes. Quelle est pour toi la définition du vêtement ? Qu'est-ce qu'un vêtement pour toi ?

  • Speaker #1

    Un vêtement pour moi c'est... Alors déjà c'est pas juste un vêtement. C'est pas juste un vêtement. Dans certaines circonstances ça peut juste être un vêtement. Mais quand on met un vêtement c'est... C'est on se montre, c'est on s'affirme, on se présente. On brille, on ose, on prend pas de détours. C'est le soleil.

  • Speaker #0

    Merci Manu. Merci de t'être déshabillé avec moi. De t'être laissé déshabiller par moi.

  • Speaker #1

    Ben écoute, c'était assez bien fait. C'était assez smooth quand même.

  • Speaker #0

    Merci pour ton écoute. J'espère que cet épisode avec Emmanuel t'a plu. Si tu as des questions, des commentaires, des suggestions, des propositions, des interrogations, n'hésite pas à me laisser un commentaire. Et surtout, je t'invite à follower, suivre, t'abonner à DHV sur la plateforme d'écoute de ton choix. Dans le prochain épisode, je reçois un chapelier patoqué. Ok, elle était facile celle-là, mais bon, voilà. Je reçois Elvis Pompilio. Allez, rendez-vous au prochain épisode. Salut ! Déshabillez-vous est un podcast créé, présenté et produit par Samia Boujard, moi, avec une musique originale de Maïeva Fiston alias MPLI, montage, mixage et post-production par Alice Desbelles-Fréquences et Laetitia, podcast manager. THV, déshabillez-vous !

Chapters

  • Introduction

    00:00

  • Présentation

    00:36

  • Description de son look du jour

    02:49

  • Critères pour choisir ses tenues

    04:10

  • Ses débuts dans la danse

    08:43

  • Impact du vêtement dans la construction de son identité de danseur

    09:35

  • Assumer son apparence malgré les comparaisons

    15:10

  • Sa friperie secrète

    18:58

  • Ses critères pour choisir une pièce

    22:18

  • Son designer préféré & tissu africain

    25:58

  • Éducation & réappropriation d’identité

    29:06

  • Le look comme miroir de la personnalité

    35:18

  • Évolution de son style

    38:07

  • Revendiquer sa place & être un exemple

    40:11

  • Le message qu’il veut faire passer

    45:16

  • Son vêtement préféré

    49:50

  • Le portrait chinois d’Emmanuel

    51:00

  • Sa définition du vêtement

    54:52

  • Conclusion

    55:51

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