- Speaker #0
Bienvenue sur Dino Sapiens, le podcast qui parle de l'humain dans la transformation des organisations. Je suis Bérangère du Cimetière et je vous fais découvrir à chaque épisode les facettes de la transformation des entreprises grâce à des personnalités qui méritent vraiment le détour. Émilie Proyard est de celles qui a toujours mis son cœur sur la table dans ses aventures professionnelles. Récurseur du digital, elle était dans les premières en Europe à façonner l'internet de la pub chez AOL au début des années 2000. Dans un monde d'internet en construction et en public, En pleine effervescence, entre acquisition, revente et restructuration, Émilie Proyard a tissé des liens forts avec les équipes qu'elle dirigeait pour inventer des métiers tout nouveaux et développer le secteur du digital. Ce secteur, on le sait, a connu un développement important ces trois dernières décennies entre innovation technologique et révolution de nos modes de vie. De Paris à Berlin, puis New York, de PurePlayer comme AOL à une plateforme de social listening, du monde de la presse à celui des plateformes d'écoute, Émilie Proyard a contribué à la transformation de... plusieurs secteurs et au succès de ses employeurs pour adopter de nouveaux usages publicitaires. Elle a été l'une des actrices avec ses équipes de la croissance de l'utilisation des technologies qui nous concerne tous aujourd'hui. Et elle a aussi vécu l'envers de la médaille qui pousse certaines organisations à s'éloigner des valeurs humaines fondamentales. Alors un jour, Emilie a décidé de mettre son incroyable énergie et son leadership au service de la planète et de l'humain. Elle s'est formée à la transformation environnementale et sociale. Elle a réfléchi, à partir de son expérience, de son intuition qui ne lui a jamais fait défaut, de sa capacité unique de développer une vision. Elle a réfléchi comment elle pourrait aider et convaincre l'éco-dire, dont elle faisait partie quelques mois plus tôt, à faire changer les choses dans l'entreprise pour le bien de la planète et le bien des personnes. Devenue entrepreneur, Émilie Proyard a choisi de mettre le sens du bien commun au cœur de son activité professionnelle. Et elle nous raconte aujourd'hui comment elle est devenue une membre active d'un écosystème pour une transformation qui touche chacun d'entre nous, celle d'un futur souhaité et soutenable pour l'humanité. Bonjour Émilie et bienvenue sur Dinosapiens. On est au cœur aujourd'hui de ce paradigme. Est-ce qu'on est des dinosaures condamnés à disparaître avec le changement climatique et la sixième extinction de masse ? Ou bien est-ce qu'on est sapiens, c'est-à-dire capables, grâce à nos capacités cognitives, de s'adapter, de se transformer ? Nous n'aurons pas la réponse en 20 minutes, mais grâce à toi, au moins nous aurons quelques éléments. Selon toi, en tant qu'entreprise, quelles questions doit-on se poser pour faire évoluer son business model et s'adapter aux conséquences inévitables dues au changement climatique ?
- Speaker #1
Bonjour Bérangère, alors il y a beaucoup de questions, donc effectivement on ne pourra peut-être pas y répondre en 20 minutes. L'une des premières questions à se poser, c'est en quoi mon modèle est vulnérable ? Parce que vouloir le changer, on pourrait ne pas vouloir le changer. Par contre, il est à peu près sûr que ce modèle-là, il est vulnérable aujourd'hui. Donc, quelle est ma dépense aux ressources naturelles ? Je pense tout simplement à l'énergie. Même si je suis dans une entreprise de service, a priori, je dépends de minima peut-être de l'électricité. Quelle est ma dépense en termes de ressources au niveau de l'eau, au niveau des outils informatiques, etc. ? Et en quoi cette dépendance va finalement impacter mon modèle d'affaires au moyen ou long terme ? Donc finalement... Ce que je peux me demander, c'est en quoi mon modèle est robuste aujourd'hui ? Est-ce que je ne cherche que la performance, la croissance, le modèle ? Tu parlais de paradigme. Quel est le modèle dans lequel je suis ? Est-ce que c'est la croissance capitalistique à tout va ? Et est-ce que ça, c'est un modèle vraiment robuste qui va me permettre de pérenniser mon activité ? Et une autre des questions à se poser, c'est aussi en quoi je suis dépendante des énergies fossiles. Un des gros sujets tarte à la crème au niveau de l'environnement, c'est évidemment notre empreinte carbone individuelle et celle de l'entreprise. Donc à quel point je suis dépendant des énergies fossiles ? Encore une fois, une entreprise de service peut se dire moi je n'ai pas d'usine, donc tout va bien Le trajet des collaborateurs domicile-travail, il y a une dépendance des énergies fossiles. S'ils ont des véhicules thermiques, là encore on est quand même dépendant des énergies fossiles. Donc quelque part, vraiment se poser la question de notre dépendance aux ressources, en quoi effectivement le modèle est robuste. Si c'est une entreprise dans les technologies... les semi-conducteurs, les métaux rares, etc. À quel point c'est lié aux potentielles crises géopolitiques, commerciales, mondiales ? C'est un sujet qui monte énormément. Quel est le prix que je paye aujourd'hui pour ces ressources ? Quel est le prix que je paye pour mes fournisseurs ? Et à quel point ce prix est en train de varier ? À quel point c'est déjà en train d'impacter mon modèle d'affaires ? Il y a des grandes chances que mes enjeux business, mes questions business, soient déjà liées à des sujets liés au changement climatique. Je suis contente. on parle du prix des choses, il y a aussi le prix que je paye pour les ressources humaines, quel est le prix que je paye pour mes collaborateurs et aussi dans ma chaîne de valeur pour toutes les communautés, les fournisseurs qui travaillent pour faire exister ma structure. Et ce prix que je paye, est-ce que c'est le juste prix aujourd'hui ? Ça, c'est les principales questions qu'on peut se poser. Et enfin, je dirais, se poser la question de sa gouvernance et de son modèle actionnarial et... du partage de valeurs. Donc quand on détient une entreprise, on est actionnaire majoritaire, plus facilement le loisir de se dire, tiens, comment je repartage la valeur, comment ça fonctionne. Par contre, quand on est un grand groupe et qu'on dépend d'un conseil d'administration, on n'est pas majoritaire dans l'actionnariat, ça peut être un enjeu et on n'a souvent pas envie de se poser cette question-là. C'est une question qu'il faut se poser, au même titre aussi que l'actionnariat salarié.
- Speaker #0
Comment se fait la prise de conscience dans les organisations que tu accompagnes ?
- Speaker #1
Alors, est-ce qu'il y a une vraie prise de conscience ? Je ne sais pas. Ça dépend des interlocuteurs avec qui je vais pouvoir échanger. Si c'est un responsable RSE, évidemment, il a déjà intériorisé plein de choses. Donc, lui, la prise de conscience, elle est là. Et ce dont il a besoin, c'est de faire bouger son codier. Chaque fois que j'ai des responsables RSE, c'est j'en peux plus, Émilie, s'il te plaît. Fais deux pas en avant, trois pas en arrière. Mon codier, je n'arrive pas à le faire bouger. Donc, eux, la prise de conscience, ils l'ont. Par contre, ils sont bloqués par rapport à la prise de conscience de leur codier. Et un codire, un dirigeant, un CEO, si c'est eux qui viennent à moi directement, c'est plutôt des profils humanistes qui ont une intuition, ils sentent qu'il faut y aller. Et après, j'ai des profils qui sont plutôt gestionnaires et eux, c'est plutôt Hum, il y a la réglementation qui pousse, ça m'embête, ça m'embête, ça m'embête, c'est le caillot dans la chaussure, il faut que je m'en occupe. Et j'ai l'impression que je ne le prends pas vraiment du bon angle. Comment est-ce que je peux faire cette histoire de réglementation ? Comment je peux m'en débarrasser ? En général, j'ai plutôt leur montré qu'il y a une opportunité à saisir une revisite du modèle d'affaires de par cette question de réglementation. Je dirais qu'il n'y a pas vraiment de déclic dans la prise de conscience. C'est plutôt des petites graines qui ont été semées et qui sont à croissance lente ou rapide, mais qui ne peuvent pas, a priori, faire basculer une organisation, un codire ou un dirigeant d'un coup. C'est vraiment quelque chose qui monte, qui monte, qui est progressif. Et on se rend compte que oui, il va falloir apprendre parce que cette prise de conscience monte et que du coup, on va aller vers la transition parce qu'on a conscientisé qu'on a des choses à apprendre et que ça va devenir clé pour la pérennité de l'entreprise.
- Speaker #0
Et alors, quels sont les enjeux à court, moyen et long terme pour les entreprises d'opérer cette transformation, de créer ce projet commun ?
- Speaker #1
Alors à court terme, je dirais que c'est s'aligner en tant que codire. parce qu'un codire, bien souvent, chacun a son périmètre, ses objectifs, et doit faire avancer la structure par rapport à la vision qui a été donnée par le dirigeant, et aussi par rapport à l'aspect gestion. Et bien souvent, ils ne sont pas forcément solidaires. Donc l'un des enjeux à court terme sur lequel je travaille avec eux, c'est ramener de la solidarité au sein du codire, mais ils ne le savent pas forcément en fait. Donc c'est quelque chose un peu en... que je fais en sous-marin. Eux, les enjeux qu'ils voient à court terme, c'est évidemment la réglementation, la CSRD pour les plus grands groupes qui sont assujettis, mais aussi les PME, les ETI qui commencent à y venir. Elle ne va pas disparaître, en fait. Elle donne un cadre qui, en fait, est quelque chose que je vais utiliser pour des plus petites structures parce que tout est dedans.
- Speaker #0
CSRD,
- Speaker #1
tu peux nous rappeler ce que c'est ? Corporate Sustainability Reporting Directive, qui nous vient de... de l'Europe et qui est une directive que doivent appliquer les plus grands groupes à partir de 2025 sur leur reporting extra-financier 2024. Et il y a pas mal d'autres entreprises qui vont commencer à être concernées. sur leur reporting 2025. Donc, une demande est livrée en 2026. Donc, ça veut dire qu'il faut collecter les données dès maintenant. Donc, je suis parfois appelée en mode pompier. Au secours, c'est serdé, on n'avance pas assez vite. Oui, c'est vraiment l'enjeu à court terme de se dire, il faut que je me conforme. Je vois ça comme un caillou dans la chaussure, ça m'embête. Faisons ça vite et bien. Et non, souvent, en fait, il faut remonter avec les dirigeants sur tout ce qui est analyse de double matérialité, donc les impacts. de la population et de l'environnement sur mon activité, et les impacts positifs que moi, en tant qu'entreprise, je pourrais avoir sur les populations et sur l'environnement. Donc voilà, d'un aspect court terme réglementaire, on peut aller chercher des choses assez profondes. Et à court terme aussi, ce qu'ils cherchent à faire, alors là, ça concerne vraiment même aussi les petites structures, c'est l'aspect économique. Dans les appels d'offres, je dois cocher des cases en termes de RSE. Donc il faut que je puisse vraiment initialiser une démarche, pouvoir ensuite cocher des cases et comprendre ce qu'on attend de moi et donc potentiellement gagner des marchés. Donc ça, c'est pour le court terme. À court terme aussi, je dirais qu'il y a comprendre les valeurs de l'entreprise sur lesquelles on va pouvoir s'appuyer pour entrer dans cette démarche RSE avec plus de facilité et d'authenticité. Déjà, est-ce qu'il y a des valeurs à l'entreprise ? Parce qu'avec la perte de sens et d'engagement des collaborateurs, on voit que les sujets autour des ressources humaines et même des relations humaines dans l'entreprise sont... très complexe. Donc, si on n'a pas, en fait, une équipe de collaborateurs qui va venir soutenir la vision du Codire sur le développement RSE, on va les embarquer. Souvent, les collaborateurs vont dire, OK, on est dans une démarche RSE, mais c'est du greenwashing. Donc, à court terme, c'est aussi un vrai enjeu de savoir c'est quoi la culture d'entreprise et sur quoi on va pouvoir s'améliorer. Donc, ça fait déjà beaucoup à court terme. Oui. À moyen terme, c'est anticiper ces impacts négatifs. On parlait de vulnérabilité du modèle tout à l'heure. Anticiper les impacts négatifs de l'environnement. et aussi des aspects sociaux et sociétaux sur mon organisation. Et puis, se mettre dans une posture à long terme, de voir quels sont les impacts positifs que moi, je peux apporter. Et c'est ça qui donne vraiment un élan d'espoir et une envie d'action de la part des dirigeants de ce terme. En fait, OK, je ne suis pas si vilain que ça. Mon organisation, si je me suis posé les bonnes questions, elle peut avoir un impact positif. Et donc là, on va aller chercher en quoi je peux être effectivement une entreprise contributive. On peut s'inspirer de la... de permant-entreprise, ou aller voir du côté des modèles à visée régénérative. Ça peut paraître un peu perché comme ça, donc c'est bon ça qu'on va plutôt regarder ça à long terme pour les novices, mais c'est des choses qui sont, pour le coup, assez passionnantes.
- Speaker #0
Et finalement, ça permet de dédramatiser, de désangoisser les personnes face à peut-être quelque chose qu'ils perçoivent comme une falaise.
- Speaker #1
Oui, oui, effectivement. On a tendance à... Quand on a peur, qu'est-ce qu'on fait ? On fait l'autruche. Oui. On fait l'autruche. Ou même on...
- Speaker #0
On fuit.
- Speaker #1
On fuit. On ignore le risque. Et donc, du coup, tu vois, on est dans un stress cognitif. On a un comportement qui n'est pas adapté à la situation. On bug. Donc, on est tous en bug par rapport à ces sujets, les dirigeants y compris. Et en plus, ils ont une dose de responsabilité énorme par rapport à la gestion de leur entreprise. Donc, ils ne vont surtout pas y aller, en fait. Donc, du coup, voilà, on a le mauvais comportement. Donc, l'idée, c'est d'aller déconstruire, en fait, ces mauvais comportements. pour leur permettre de se reparamétrer et de passer à l'action. Et comme la seule émotion positive qu'on ait, c'est la joie, on a, par rapport à ces sujets relativement anxiogènes, par rapport à la planète, aux enjeux sociaux et à la pérennisation de l'entreprise, soit on a peur, on recule, soit on est triste, on est tétanisé, on ne bouge pas, soit on est en colère, donc on se débat. La CSRD, ça me fait chier, parce que ça, je l'entends souvent. Et donc, on n'a pas les bons comportements. La seule émotion qui nous reste, c'est la joie. Et pour aller vers la joie, on se met... dans l'action. Et ça, ça fait un bien.
- Speaker #0
Et pour aller vers cette joie, progressivement, quelles sont les difficultés que les organisations rencontrent sur un tel parcours de transformation ?
- Speaker #1
Alors, c'est de libérer du temps et des moyens, parce que souvent, on entend que la RSE, ça va me coûter de l'argent pour rien me rapporter. Donc, leur difficulté, c'est de consacrer du temps. Et au sein du Codire, il est essentiel qu'ils puissent consacrer du temps. En général, ce qu'on fait, c'est que je m'invite au Codire, je suis présente au Codire, à tous les Codires, tous les mois. Ils savent qu'ils vont... On va avoir ma pomme qui vient. Mais justement parce qu'on a besoin de faire du temps. Et donc, comme il y a des moments déjà sanctuarisés dans l'agenda, c'est plus simple de dire, tiens, on va prendre dans ce moment du Codi, on va prendre ce temps-là pour parler de la RSE. Donc, l'une des difficultés, c'est ça. C'est de se rendre compte qu'en fait, c'est une transformation humaine avant tout et qu'on n'est pas là finalement pour parler de la planète et du mal ou du bien qu'on veut faire à la planète. avant tout on est là pour parler de justice sociale et comment on va pouvoir se transformer humainement individuellement au sein du Codire et ensuite pouvoir transformer notre pays Et ça, ça peut se faire qu'en lâchant les émotions, en accédant à son cœur. C'est quelque chose qu'on ne se permet pas dans un codire, un dirigeant, parler de ses émotions ou parler même des émotions d'entreprise. Ça ne se fait pas, quoi. Je me rappelle qu'au début de ma carrière, on me disait Ah, t'es émotive. Ah oui, parce que moi, quand je suis joyeuse, ça se voit. Quand je suis triste, ça se voit. Quand je suis en colère, ça se voit. Et du coup, voilà, ça m'est arrivé de pleurer en entreprise sur des choses que je ne comprenais pas, en me disant Non, non, non. cache-toi tout de suite, va dans les toilettes. Et donc, accéder à ces émotions, c'est quelque chose qui peut être une difficulté pour les dirigeants. Donc, ça peut prendre un peu de temps, mais on y arrive. Donc, c'est aussi la bonne nouvelle, c'est que c'est possible.
- Speaker #0
Savoir afficher ses vulnérabilités.
- Speaker #1
Et c'est ça. Tu vois exactement, tu fais bien le lien avec ce qu'on disait au début de quelles sont les vulnérabilités que je suis exposée pour mon entreprise. Et après, en tant qu'humain, c'est quoi mes vulnérabilités ? Et les révéler aux autres, les révéler au sein d'un codire. ou alors avec moi, parce que souvent, mes missions s'accompagnent aussi de coaching ou de sparing partner. C'est se mettre à nu, se mettre en situation de visibilité par rapport à ses vulnérabilités. Et ensuite, fort de ça, passer à l'action.
- Speaker #0
Il y a une forme de conscientisation, finalement, qui permet de passer à l'action.
- Speaker #1
Exactement. Et l'une des difficultés que je vois pour les dirigeants qui ont... Déjà basculé quelque part, où les dirigeants qui sont plus humanistes que gestionnaires dans leur état d'esprit, ils vont être en décalage avec soit le reste du Codire, soit les collaborateurs. Ils le vivent très mal en fait ce décalage. Un responsable RSE aussi, il le vit très mal ce décalage. On parle souvent du burn-out du responsable RSE. Mais pour n'importe quelle personne qui a conscientisé, je pense qu'on peut tous s'identifier à ça. on n'est pas bien parce que les autres n'ont pas compris. Et donc, c'est l'une des difficultés, c'est de se dire que, finalement, dans le parcours de transformation, il y a ma propre transformation à moi, la transformation des gens qui m'entourent dans l'entreprise, mais aussi au niveau personnel. Et c'est ça qui va permettre d'engager la transition, la transformation de l'entreprise. On ne peut pas le faire tout seul.
- Speaker #0
Et comment réussis-tu à aider ces personnes à dépasser les clivages internes ?
- Speaker #1
Alors, très bonne question. En fait, dans mon parcours, je me suis formée en direction du développement durable et je me suis aussi formée au facteur humain. J'ai voulu comprendre pourquoi moi j'ai basculé et pourquoi les autres, je ne me crois pas plus intelligente que les autres. Quel a été le mécanisme à l'oeuvre qui fait que je sois passée à ça ? Et donc je me suis intéressée à l'approche neurocognitive et comportementale. Et donc pour les aider, pour les accompagner, il faut que je puisse apprendre à les connaître déjà. Venir dans un codire, commencer à travailler avec eux et je vais d'abord travailler sur les enjeux business. parce que je suis ancienne dirigeante, donc je vais avoir cette faculté à comprendre ce qui les traverse et ce qui les obsède au quotidien. Parce que quand on est dirigeante, on est obsédé en général par deux choses, la rentabilité et les ressources humaines. Et puis, il y a la transition écologique, environnementale, sociale, mais bon, si c'est quelqu'un d'autre qui pouvait le gérer, ce serait mieux parce que j'ai déjà quand même ces deux sujets assez prégnants et donc je n'ai pas ce temps à dégager. Donc, on va avant tout parler de business. J'ai avant tout apprendre à connaître l'entreprise, son secteur, pour ensuite mieux les accompagner, et donc apprendre à les connaître aussi en tant qu'humains. Et j'ai créé un parcours qui s'appelle Check ton business model qui les attire parce que Ah bah tiens, on va parler business, et on va pas parler de la planète. Et en fait, je vais les aider à conscientiser ces sujets environnementaux et sociaux dans un programme sur mesure. Je vais les sensibiliser, je vais les chercher des sujets qu'ils ne connaissent pas forcément et auxquels ils devraient s'intéresser. Et puis voilà, je vais distiller en fait la connaissance au fur et à mesure. je vais laisser infuser, je vais continuer de leur poser des questions sur leur business je vais les interroger sur ce qu'ils craignent à court, moyen, long terme pour la pérennisation de leur activité et puis je vais leur faire vivre des expériences pas forcément trop perchées non plus ça dépend de quel codirjet des choses accessibles mais qui vont leur permettre d'enclencher en fait cette bascule, même si c'est aussi un mot qui peut faire peur, qui va leur permettre de sortir de leur stress cognitif. Donc ces expériences elles viennent dans le parcours, ça dure à peu près... deux, trois mois selon le temps que le codire permet de dégager. Et puis, je vais les faire jouer autour des sens cognitifs. On va se marrer, en fait, parce que le codire, il a aussi besoin de se marrer, comme tout le monde. Et comme j'ai décidé de faire cette activité dans la joie, comme on disait tout à l'heure, c'est ce que j'ai envie d'amener. Donc, dans les ateliers, en fait, on va jouer avec nos biais cognitifs, avec nos habitudes, nos émotions, nos croyances. Et on va sortir petit à petit de ce bug. Et au final, la dernière partie de Check ton BM, qui ouvre après à une grande transformation, mais c'est de... poser les actions que j'aurais envie de mener, transformer mon modèle. Et on arrive à des choses assez incroyables, parce qu'avec un codire qui s'est aligné et qui est solidaire, en gros, ils arrivent à se rendre compte qu'ils ont les mêmes ambitions en termes de RSE, qu'ils sont au pouvoir de changer les choses, que c'est enthousiasmant, et ils prennent des décisions que moi, j'aurais jamais imaginé possible de bois auparavant. qui vont être de travailler avec des concurrents, donc de faire de la coopétition. Souvent, c'est un gros mot, mais en vrai, ça existe déjà, de collaborer avec ses concurrents et de le faire en vue de faire la transition environnementale du secteur dans lequel ils baignent. Et j'ai vu aussi des sujets autour de refuser certains clients, certaines demandes de clients, ou même d'exclure des clients qui sont dans des industries polluantes ou peu éthiques, et de dire purement et simplement, en fait, non, on va arrêter de bosser avec eux. Après, c'est souvent les entreprises qui ont leur... propres solutions. Et donc, moi, je les aide juste à faire le chemin vers leur décision. C'est qu'au dire qu'ils décident de plus travailler avec un client historique polluant, finalement, ils se rendent compte qu'ils ne vont pas faire ça du jour au lendemain. Ils vont peut-être rentrer dans une démarche ouverte, collaborative, en disant Nous, d'ici 2027, on ne pourra plus bosser avec vous parce que ce n'est pas aligné avec nos valeurs. Racontez-nous, vous, peut-être que vous êtes déjà dans un schéma de transition. Et donc, rentrer dans cette relation, interaction avec ces parties prenantes, ça ouvre un champ des possibles incroyables. Ça ouvre une autre fenêtre sur les individus, les partenaires, les fournisseurs, les clients avec qui on travaille. Ça permet de changer complètement de prisme et de collectivement s'organiser. De se dire, ma structure, j'ai décidé de passer à l'action. En fait, ça ne va pas se faire tout seul. C'est chouette parce que je vais pouvoir m'appuyer sur mes clients, mes fournisseurs, mes collaborateurs, mes parties prenantes, jusqu'au conseil d'administration. Parce que si on revient aux grands groupes qui ne détiennent pas le capital, L'idée, c'est de se dire, tiens, si moi, j'ai basculé en tant que dirigeant, si je veux rentrer en mode entreprise contributive, il faut aussi que j'aille confronter ces administrations. Souvent, ils ont peur d'y aller. Et en fait, ça se passe super bien. Évidemment, ils vont aborder la rentabilité. Évidemment, ils vont être encore dans leur modèle croissanciste, dans leur modèle historique. Et à la fois, ça va leur ouvrir les chakras. Et du coup, on va les amener aussi. On va leur faire faire le parcours chez le business model au conseil d'administration. Du coup, ça va venir soutenir le codire qui, lui, a décidé... d'engager des actions. Ça fait beaucoup. Merci,
- Speaker #0
Amélie, pour toutes ces pistes enrichies de ton expérience et d'exemples bien vivants. Si tu devais donner trois conseils de départ à un dirigeant pour entamer une démarche vertueuse et l'aider à mettre le cap vers d'autres objectifs que la rentabilité seule, quels seraient ces conseils ?
- Speaker #1
Alors, le premier que je donne souvent, c'est quelle est l'utilité sociale de votre entreprise ? Alors, souvent, on se dit, mince, j'en ai pas. En vrai, on en a quand même souvent une. La bonne nouvelle, c'est qu'on en a souvent une. et donc juste s'interroger sur pourquoi l'entreprise elle a été créée en fait quel problème à l'origine elle a été là pour solutionner ce problème est-ce qu'il a une utilité sociale alors il y a des industries pour lesquelles c'est compliqué parce que quand je travaille dans les boissons pétillantes et sucrées une utilité sociale alors là en général on va me répondre ma raison d'être c'est d'apporter des moments de convivialité on regarde pour ceux qui ne boivent pas d'alcool c'est quand même chouette etc ah oui tiens on tient un truc et donc voilà ça permet des conversations qui peuvent nous embarquer sur des chemins assez incroyables et souvent rien que de se poser cette question de l'utilité sociale ça a un vrai intérêt si je suis dans les telcos par exemple aujourd'hui le digital j'ai grandi dans le digital et comme tu le disais tout à l'heure ça fait partie de ma carrière ça fait partie de nos vies on ne va pas couper le digital du jour au lendemain et ça a une utilité sociale de nous relier ensemble etc donc on va aller creuser enfin en tout cas c'est une vraie bonne première question à se poser et je... je pense. Ensuite, aller chercher du côté de la réglementation, déjà pour voir si on y est assujetti ou non, pour voir en quoi mes fournisseurs ou mes clients y sont assujettis et comment, du coup, moi, je vais pouvoir les aider en préparant les questions qu'ils vont me poser. Et puis parce que la réglementation, elle permet de s'interroger sur, avant tout, son modèle d'affaires, sa gouvernance, et d'entraîner ce questionnement avec les parties prenantes qui est vraiment ultra, ultra riche. et où on se rend compte que les parties prenantes, elles sont hyper contentes qu'on leur pose des questions. Elles adorent. Donc vraiment, ne pas craindre cette phase-là. Et puis le dernier conseil que je donnerais, c'est d'abord de poser la vision avant de vouloir rentrer dans des petites mesurettes RSE. En fait, on n'a plus le temps. La RSE, pendant 15 ans, elle a œuvré à faire des choses, finalement, un peu dans l'ombre. Et les responsables RSE n'ont pas été assez mis en avant. On ne font bien souvent pas partie des codires. Et donc, on n'a pas fait de la RSE la stratégie. C'est juste qu'on met la RSE dans la stratégie. Et donc, moi, mon conseil, pour avoir la bonne vision, c'est vraiment de faire de la RSE la stratégie, parce que les enjeux environnementaux, sociaux et sociétaux, c'est eux qui pèsent sur le modèle d'affaires. Pour mes trois conseils, et une fois qu'on a posé ces trois sujets, on est capable... ensuite de mener les actions sur le chemin vers la vision. Et là, ce ne sera pas du greenwashing, parce qu'on aura la vision, parce qu'avec authenticité, on se sera posé les bonnes questions, on sera capable d'y répondre avec transparence et sans langue de bois.
- Speaker #0
Émilie, comme chaque invitée de Dino Sapiens, est-ce que tu pourrais nous partager un mantra ou un livre que tu nous conseilles pour aller dans le sens de notre épisode ?
- Speaker #1
Écoute, avec plaisir, je te conseille, et je conseille à tes auditeurs, de lire... France Go, la nature au travail, collaborer autrement avec le vivant. Hans, c'est le premier représentant de la nature au board, au board notamment de Norcis. Et en fait, il a le droit de vote, le droit de veto sur des décisions stratégiques qui sont prises au board, comme sur la croissance externe, par exemple, ou sur le fait d'intégrer un nouveau client. Il a le droit de dire oui ou non en tant que représentant de la nature. première mondiale et son livre est extrêmement enrichissant pour aller chercher un nouveau prisme et révéler vraiment le potentiel de l'entreprise autour de sa prise en compte du vivant et de sa participation aux écosystèmes. Et quelque part, prendre ce qui représente la nature, quelque part, moi je suis un peu le pendant de, je représente l'humain et en quoi l'humain, dans l'écosystème, doit aussi être préservé. Chaque décision interne, comme la croissance externe par exemple. qui va avoir un fort impact sur les humains aussi.
- Speaker #0
Merci beaucoup, Émilie, pour cet épisode vraiment riche de sens et de conseils pratiques. Je pense qu'il démystifie aussi le sujet de la RSE en entreprise.
- Speaker #1
Merci à toi, Bérangère, pour ton invitation et pour ce beau travail que tu fais avec Dinosapie.
- Speaker #0
Cet épisode un peu plus long que d'habitude vous a emmené, je l'espère, avec la joie qui tient tant à cœur à Émilie, faire un pas de plus vers la nature et l'humain. En tout cas, j'ai compris bien des choses sur la... puissance qui peut émerger d'une organisation lorsque le collectif se met en marche un pied après l'autre. Et ça m'enthousiasme beaucoup, ça me rend optimiste. Vous pouvez suivre cet épisode sur les principales plateformes d'écoute et sur YouTube. N'hésitez pas à vous abonner au podcast, vous pouvez aussi me suivre sur LinkedIn, également activer la cloche pour les annonces des sorties. Je vous souhaite de très belles fêtes de fin d'année, à très bientôt pour un nouvel épisode de Dino Sapiens, et d'ici là, évitons l'extinction !