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Échange Climatique

Le Pacte Vert Européen est-il en danger ? Avec Phuc-Vinh Nguyen

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1h04 |03/06/2024
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Le Pacte Vert Européen est-il en danger ? Avec Phuc-Vinh Nguyen

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Description

C'est au niveau européen que naissent bon nombre des normes qui ont et auront de plus en plus d’impact sur nos vies. La Politique Agricole Commune, les décisions sur les pesticides, le marché de l’énergie, le marché carbone...


L'UE s'est donné des objectifs audacieux avec le Pacte Vert Européen, incluant cette fameuse neutralité carbone d'ici 2050. Mais alors qu'en 2019 il était plutôt populaire, ce pacte est aujourd'hui sous le feu des critiques, à quelques jours des élections européennes qui éliront les députés pour siéger au Parlement.


Alors, quels progrès ont été accomplis d’un point de vue environnemental ces 5 dernières années et est-ce qu’il y a un risque que tout cela soit détricoté en cas de percée de la droite et de l’extrême droite lors de la prochaine mandature ? Voici les questions auxquelles on va essayer de répondre.


Merci à Albane Crespel et à Antoine Trouche pour leur présence.


Infos: https://linktr.ee/echangeclimatique

Contact: echangesclimatiques@gmail.com

Production: https://onetwo-onetwo.com/

Note Construire l’écologie : https://www.construirelecologie.fr/post/publication-de-notre-première-note

Note Institut Delors : https://institutdelors.eu/publications/pacte-vert-europeen-suite-ou-fin/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bien, bonjour à toutes et bonjour à tous, bienvenue dans ce nouvel épisode d'Échange climatique, un épisode consacré aux élections européennes qui auront lieu le 9 juin prochain. Un sujet pas facile à cerner, il faut dire que nous ne sommes pas aidés par les débats entre candidats où les voix s'enchevêtrent ou des termes barbares comme directive ou règlement sont régulièrement prononcés. Dans cet épisode, on va essayer d'y voir plus clair, on commencera par rappeler à quoi sert et comment fonctionne le Parlement européen. Ensuite, nous dresserons. Un bilan environnemental de la mandature qui s'achève. Et enfin, on se demandera s'il y a un risque de recul sur ces questions lors de la prochaine mandature. Pour cela, nous recevrons Fouque, Vinh, Nguyen, chercheurs sur les politiques françaises et européennes de l'énergie au sein de l'Institut Jacques Delors. Pour m'épauler, j'ai la chance d'être accompagné de deux chroniqueurs du collectif Construire l'écologie, Alban et Antoine. Salut à vous deux.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Alban Krespel travaille dans la transformation écologique dans le logement social et Antoine Trouche dans la suréfférence de la pollution de l'air. En deux mots, est-ce que vous pouvez expliquer ce que c'est que construire l'écologie ?

  • Speaker #2

    Oui, alors Construire l'écologie, c'est un collectif de professionnels de tous horizons, donc des chercheurs, des militants, des professionnels de la transition écologique, des personnes syndiquées de tous horizons qui sont impliqués dans la transformation écologique et qui a été lancée début 2024 avec la volonté d'élargir et de donner une voix à cette coalition d'acteurs de la transformation écologique pour créer des liens entre eux et pour porter... dans le débat public, une vision concrète, structurée et globale de la bifurcation écologique et des moyens de la réaliser. Et aussi de répondre aux personnes qui entendent saboter les ambitions écologiques par ce qu'on appelle le green blaming chez Construire l'écologie, mais on en reparlera plus tard. Et donc ça, ça se fait à travers des événements thématiques et des after-works réguliers.

  • Speaker #0

    Merci Alban, donc comme tu l'as dit Antoine nous partagera tout à l'heure une note de votre collectif du coup sur le green blaming, on comprendra plus tard ce que ça veut dire en détail. Mais avant ça moi je vais vous partager les actus des derniers jours qui ont attiré mon attention. Comme vous l'avez remarqué je ne demande pas de dons pour faire visite à cette chaîne et Youtube rapporte très peu d'argent. Si vous voulez tout de même m'aider vous pouvez vous abonner, c'est un gros coup de pouce pour la chaîne. Merci pour ça. Alors pour les actus que je vous ai réservés cette semaine, on va commencer par la France. Le 22 mai dernier, le Premier ministre Gabriel Attal s'est félicité de la baisse des émissions de CO2 du pays de 5,8% en 2023. Notre action paie a-t-il commenté sur X ? Alors est-ce que cette baisse est le fruit d'une action déterminée ou est-ce le résultat d'autres facteurs ? C'est ce que nous allons voir. Mais avant un peu de contexte, on ne parle ici que des émissions territoriales, celles que la France s'est engagée à réduire dans sa stratégie nationale bas carbone. Et c'est dans ce cadre que nous avons presque respecté notre objectif de réduction d'émissions sur la période 2019-2023. Objectif raté de peu, notamment parce que les puits de carbone ont capté moins que prévu. Le CIDPA, l'organisme indépendant chargé d'évaluer le sujet, nous explique que les sols et les forêts captent deux fois moins aujourd'hui que dans les années 2000, en raison de l'effet couplé de sécheresse à répétition, de maladies affectant... Le taux de mortalité des arbres et d'une hausse des récoltes de bois. Détaillons à présent cette baisse. La plus grosse contribution provient du secteur de l'énergie. On a brûlé moins de gaz et de charbon en 2023 par rapport à 2022 parce que l'électricité bas carbone fut plus abondante. D'une part, le nucléaire et l'hydraulique ont été plus disponibles et d'autre part, de nouvelles capacités de solaire et d'éolien ont été installées. C'est en partie la météo plus douce des mois de janvier et février qui a permis de faire baisser les émissions du secteur des bâtiments où la majorité provient. du chauffage au gaz et au fuel. Le CITPA met aussi en avant la sobriété et l'inflation des prix de l'énergie. Qui a fait quoi entre les deux ? Ça reste difficile à évaluer. L'inflation qui serait aussi en cause dans les autres secteurs, comme celui des transports, premier secteur émetteur en France, et de l'industrie. Les augmentations des prix des carburants à la pompe ont réduit les déplacements non contraints, tandis que la hausse des prix de l'énergie a fait baisser la production d'activités très émettrices, comme celle du ciment, de l'acier et de la chimie. Alors est-ce que cette hausse des émissions de la France est seulement un effet collatéral de l'inflation et de la météo ? Le CITPAM est quand même en avant des effets de moyen et long terme, comme le renouvellement du parc automobile par des voitures électriques, le report modal dans les transports, la rénovation thermique des bâtiments. Et précise que 2023 est une situation inédite, car tous les grands secteurs émetteurs ont baissé leurs émissions sans crise économique majeure. La question qui demeure, est-ce que nous arriverons à garder le rythme dans les prochaines années ? Il y a deux problèmes, comme le dit François Gemmette sur France Info. Le premier, c'est que nos puits de carbone sont de moins en moins efficaces, on l'a vu. Et le deuxième, c'est qu'on s'est fixé une trajectoire linéaire avec le même objectif chaque année jusqu'en 2030, sauf que l'on commence forcément par les émissions les plus faciles à réduire. Dans le secteur de l'énergie, par exemple, il reste peu de gaz et de charbon à éliminer. Donc il faudrait en réalité qu'on ait fait des baisses beaucoup plus marquées dès maintenant. Et j'ajouterais même un troisième problème, celui du désintéressement affiché de l'exécutif pour la cause, en témoignent les coupes budgétaires dans le ministère de la Transition. À l'étranger à présent, de vastes régions d'Asie ont connu des vagues de chaleur entre avril et mai, d'Israël, de Palestine, du Liban et de la Syrie à l'ouest, jusqu'à la Birmanie, la Thaïlande, le Vietnam et les Philippines à l'est, en passant par l'Inde et le Pakistan. Une étude du World Weather Attribution, qui évalue le rôle du changement climatique... dans les phénomènes météorologiques, nous apprend que pour chaque cas, ce dernier a rendu ces températures extrêmes plus probables et plus chaudes. L'organisation dresse une liste d'impacts, mort en nombre bien souvent sous-estimée, augmentation du nombre de déplacés et aggravation des conditions de leur vie comme à Gaza, chômage forcé pour les personnes travaillant à l'extérieur ou encore perte de récolte pour les agriculteurs. Autre dommage, la fermeture des écoles. Ainsi, ces 28 millions d'enfants qui n'ont pas pu aller étudier cette semaine rien qu'au Pakistan selon l'ONG Save the Children, mais ces fermetures ont aussi concerné la Thaïlande, le Bangladesh, les Philippines et l'Inde. La journaliste Marina Fabre-Soundron n'a pas hésité à parler de confinement climatique dans un article sur Novetic. Elle conclut son article avec cette phrase Sans réelle adaptation au changement climatique, de plus en plus de pays sont ainsi contraints de se confiner, mettant à mal leur liberté de déplacement ou d'accès à l'éducation, à vie à ceux qui brandissent l'expression écologie punitive à tort et à travers. Et pour terminer, je voudrais vous parler d'un article scientifique sorti récemment et qui ressemble à une bonne nouvelle. Dans les modèles, un facteur crucial est la sensibilité climatique. Elle mesure de combien la Terre se réchauffe pour une quantité de CO2 émise. En gros, c'est la réaction du climat à nos émissions. Pour la calculer, les scientifiques prennent en compte des boucles de rétroaction, l'observation du réchauffement historique depuis le début de l'industrialisation, des modèles statistiques ou encore l'analyse des climats du passé. Jusqu'à présent, cette valeur était très incertaine. Par exemple, selon le dernier rapport du GIEC, les politiques actuelles pourraient entraîner un réchauffement de 2,1 à 3,5 degrés, avec une estimation centrale à 2,7 d'ici la fin du siècle. Deux climatologues, dont un auteur du dernier rapport du GIEC, ont mené des recherches pour élire cette incertitude et viennent de publier le résultat. Ils montrent que la sensibilité du climat a été jusqu'à présent surestimée. En effet, dans les études précédentes sur le dernier maximum grêle... Sur le dernier maximum glaciaire il y a 20 000 ans, les géantes calottes glaciaires de l'émis mer Nord avaient un effet de refroidissement très important car elles produisaient des nuages bas dans les océans qui réfléchissaient à la lumière du soleil. La sensibilité y était donc élevée et a permis de conclure que celle d'aujourd'hui devait l'être aussi. Mais nos deux scientifiques ont découvert que ces boucles de rétroaction nuageuses sont uniques au climat de l'âge glaciaire et ne s'appliquent donc plus. C'est un peu technique, mais ce qu'il faut retenir, c'est que leur conclusion montre que les valeurs élevées de la sensibilité climatique sont moins probables qu'on ne le pensait. Leur estimation centrale reste la même, mais la borne haute est significativement réduite. En d'autres termes, 2,7°C à la fin du siècle est toujours aussi probable, mais le scénario à 3,5°C s'éloigne un peu. C'est une nouvelle plutôt rassurante, mais déjà ce n'est qu'une seule étude et cela ne change rien au fait que le niveau de réchauffement à la fin du siècle dépendra principalement de nos émissions futures. Si nos objectifs ne sont pas respectés, un réchauffement de plus 4 degrés n'est pas à exclure. Voilà pour mes petites actus. Antoine, Alban, est-ce que vous avez des réactions ? Est-ce que quelque chose vous a interloqué ?

  • Speaker #1

    Je veux bien commencer. Moi, par rapport à ta première actu, il y a un peu deux réactions vis-à-vis de cette baisse des émissions territoriales de la France et je les trouve toutes les deux aussi énervantes l'une que l'autre. Il y a une réaction un peu pavlovienne, notamment, malheureusement, dans pas mal d'ONG écolos de partie de gauche, qui consiste à dire, en fait, cette baisse, elle est liée uniquement à une météo un peu favorable, qui nous a fait consommer moins de carburant carboné pour le chauffage, et à... la souveraineté contrainte en fait, la hausse du coût de l'énergie. Moi je pense vraiment qu'il faut casser un peu cet argument-là, parce qu'on dit ça depuis au moins cinq ans, et qu'on regarde un peu sur ces dernières années, on a quand même eu une baisse nette, je ne parle pas vraiment sur la dernière année, mais sur ces dernières années, on a une baisse nette des émissions territoriales de la France, et c'est plutôt logique parce qu'on a des politiques de décarbonation qui ont été mises en place, pas toujours suffisantes, mais qui ont été mises en place. On va rappeler quand même que depuis les années 90, on a baissé de plus de 30% nos émissions territoriales, on a eu un impact conséquent. et on voit que notamment dans le bâtiment et dans l'énergie, on a des politiques structurelles, des sorts, des pompes à chaleur, des sorts des énergies renouvelables qui ont eu un impact conséquent sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre. Ce n'est pas que de la souveraineté civile ou l'impact de la météo. Après, l'autre position qui m'énerve un peu, c'est celle du gouvernement, qui dit que c'est formidable et vous voyez à quel point on est fort. Parce que comme tu l'as bien expliqué, on est sur un moment qui est plutôt un moment de reflux, à un moment où on est en train de couper dans les hausses. deux crédits qui étaient accordés au ministère de la Transition écologique, alors que là, ce qu'on a fait, ce n'est pas du tout exceptionnel. En fait, c'est à peu près ce qu'il faut faire chaque année d'ici 2030, si on veut atteindre nos objectifs climatiques. Et il faut encore accroître l'effort après 2030. Donc, on est à un moment où il faudrait plutôt se dire, c'est une bonne nouvelle. Par contre, ça ne présage pas du tout du fait qu'à l'avenir, on sera capable de rester sur la bonne trajectoire. C'est vraiment tout l'enjeu. Peut-être juste le tout dernier point important pour moi, donc on parle des émissions territoriales. Évidemment, il y a la question de, est-ce que quand on regarde l'empreinte carbone, si les émissions liées à nos imports, les résultats sont aussi bons ? Il faut bien comprendre que calculer les émissions importées, c'est très très complexe, c'est pour ça qu'on ne va pas avoir les résultats tout de suite. Ce qui est sûr, c'est que dans les derniers résultats qui ont été donnés par le ministère de la Transition écologique pour 2022, on avait une empreinte carbone par habitant qui stagnait depuis les années 2019. Donc en fait, on n'avait pas d'effort. qui étaient visibles depuis les années 2019. Donc ça, c'est plutôt inquiétant. C'est des données encore temporaires, parce que les données définitives, elles ne sont connues que dans quelques années. Mais c'est quelque chose qu'il faut surveiller, parce qu'évidemment, si on compense par nos imports les baisses d'émissions locales, on ne sera pas totalement gagnant.

  • Speaker #0

    Oui, je pense que tu as bien résumé les clivages des derniers jours. Abban, est-ce que tu veux rajouter quelque chose ?

  • Speaker #2

    Non, je pense qu'Antoine a dit la majorité de ce qu'on avait à dire là-dessus. Peut-être juste ajouter effectivement qu'il y a une partie de ces baisses qui sont des baisses... conjoncturelle, mais aussi une partie de baisse structurelle. Pour autant, effectivement, comme on l'a souligné dans une de nos dernières tribunes chez Construire l'écologie, ça ne signifie pas qu'il faut se reposer sur ses lauriers et prendre encore du retard sur la programmation pluriannuelle de l'énergie, la stratégie française énergie-climat, le plan d'adaptation nationale au changement climatique. On a des textes qui prennent un peu de retard et il ne faudrait pas que ça vienne... Comment dire ? entraver les efforts qui sont faits en la matière. Donc voilà, c'est le seul point que je voulais ajouter.

  • Speaker #0

    Merci à vous deux. On va passer maintenant à notre sujet du jour, qui est la politique environnementale de l'Union européenne. Quels progrès ont été accomplis d'un point de vue environnemental ces cinq dernières années ? Et est-ce qu'il y a un risque que tout cela soit détricoté en cas de percée de la droite et de l'extrême droite lors de la prochaine mandature ? Voici les questions auxquelles on va essayer de répondre. On va commencer par les sujets énergie et climat avec vous, Fouk, Vin et Nguyen. Bonjour. Bonjour. Je rappelle que vous êtes chercheur sur les politiques françaises et européennes de l'énergie au sein de l'Institut Jacques Delors. On va peut-être commencer par un rappel du fonctionnement du Parlement européen, parce que c'est quelque chose d'assez complexe. Est-ce que vous pouvez nous expliquer un petit peu comment ça marche ?

  • Speaker #3

    Oui, donc du 6 au 9 juin prochain et le 9 juin en France, on va être appelé aux urnes pour élire des eurodéputés, donc des députés européens. qui vont donc siéger à Bruxelles et à Strasbourg afin de discuter des futures ambitions climatiques de l'Union européenne. Le Parlement européen, qu'est-ce que c'est ? C'est donc 720 eurodéputés qui vont être élus afin justement de pouvoir très concrètement réfléchir sur l'ambition climatique de l'Union européenne vis-à-vis des objectifs 2030, 2040, 2050. À l'heure actuelle, ils disposent de ce qu'on appelle un pouvoir de co-décision, c'est-à-dire qu'au côté des États membres, enfin du Conseil, ils vont pouvoir réagir aux propositions qui sont mises sur la table par la Commission européenne. Donc la Commission européenne propose un texte de loi, et puis ce texte de loi ensuite est débattu de manière conjointe au sein du Parlement européen, donc au travers des commissions thématiques dans un premier temps, donc des commissions dédiées par exemple à l'énergie, à l'emploi, au commerce international. Et puis ces députés européens vont donc mettre en place des amendements, des compromis, pour justement en fonction de l'équilibre politique déterminer l'ambition du texte. Et puis ce texte sera à in fine voté au sein de ce qu'on appelle une plénière avec les 720 eurodéputés. Les États membres de leur côté font ce même travail, et puis lorsque les États membres ont déterminé une position de négociation, et que le Parlement a fait pareil, on va se réunir dans ce qu'on appelle des trilogues, qui vont réunir la Commission européenne, le Parlement européen et les États membres, pour tenter d'obtenir des compromis. Une fois qu'on a obtenu ces compromis, le texte de loi sera ensuite validé encore une fois par le Parlement européen, puis par les États membres. Et puis il prendra forme une fois que tout ça aura été validé. Tout ça pour dire que c'est un processus qui est assez chronopage. On reproche souvent à l'Union européenne de mettre beaucoup de normes en place, mais en réalité ces normes, elles mettent du temps. à être mis en place parce qu'il faut obtenir des compromis texte par texte et qu'aucune majorité n'est évidente au sein du Parlement européen. Et c'est ce qui permet de garantir un respect des équilibres politiques de manière générale. Une fois qu'on a dit ça, le Parlement européen a d'autres pouvoirs. Il a également un pouvoir d'adoption du budget annuel de l'Union européenne, ce qui n'est pas rien, et du budget pluriannuel de l'Union européenne. Il a également aussi, et c'est là où ça sera très important, le rôle d'avaliser, de voter pour le ou la future présidente de la Commission européenne. C'est-à-dire qu'en réalité, à partir du moment où le futur président de la Commission européenne devra être avalisée par le Parlement européen, eh bien, elle devra donner des gages vis-à-vis de ce dernier et respecter l'équilibre politique qui va ressortir des élections du 6 et du 9 juin prochain. Dit autrement, à partir du moment où personne n'a la majorité absolue au sein du Parlement européen, vous devez donner des gages aux sociodémocrates, aux partis populaires européens, et on y reviendra dessus par la suite, pour faire en sorte justement d'avoir un équilibre politique qui tienne la route.

  • Speaker #0

    Tu l'as dit, je pense que le maître mot c'est compromis. Antoine, tu avais une question sur le poids du Parlement dans les décisions.

  • Speaker #1

    Oui, exactement. Là, on va donc voter pour le Parlement. Les autres organes de l'Union européenne, en fait, on a directement voté pour eux lors des élections législatives. Moi, la question que je me pose, c'est en fait, à la fin, dans les concertations et dans les équilibres qui sont trouvés entre notamment le Parlement et le Conseil de l'Europe, en fait, qui gagne un peu à la fin ? et comment se fait le rapport de force dans le sens où sur les textes de les pouvoirs, j'ai eu l'impression, mais c'est peut-être une impression erronée, que le Parlement assez systématiquement tendait à essayer de rehausser l'ambition des textes qui étaient proposés initialement, et que le compromis à la fin se rapprochait quand même plus de la proposition initiale du Conseil que de la position sur laquelle le Parlement s'est rencontré. Donc voilà, est-ce que c'est juste et comment se fait ce rapport de force ?

  • Speaker #3

    Exactement. Déjà, une précision qui montre la difficulté de tout ça, c'est que tu as parlé du Conseil de l'Europe, ce n'est pas le Conseil de l'Europe, c'est le Conseil de l'Union Européenne. Le Conseil de l'Europe, c'est autre chose liée à la CEDH notamment, mais l'idée étant vraiment de dire que le Conseil de l'Union Européenne, c'est les représentants de chaque état, chaque ministre qui a le droit au dossier. Dit concrètement, en France par exemple, Roland Lescure, qui est un ministre lié à l'énergie, eh bien… C'est lui qui va siéger avec ses 26 autres homologues pour déterminer la position du Conseil de l'Union européenne sur les questions énergétiques. Une fois qu'on a dit ça, qui est-ce qui va gagner remporter les arbitrages ? Tu l'as très bien expliqué, le Parlement européen sera toujours celui qui va tenter de rehausser l'ambition vis-à-vis de la proposition de la Commission européenne. Prenons un exemple très concret sur la directive énergie renouvelable. C'est le Parlement européen qui a fait en sorte de se positionner sur un objectif de 45%. Les États membres étaient un peu plus frileux, ils baissaient pour cette ambition. Et au final, on a tranché entre les deux, on a fini sur un objectif de 42,5%. Tout ça pour dire que ça, c'était la position entre 2019 et 2024. Ça ne sera pas forcément la position qui va rejaillir des élections européennes, puisqu'on y reviendra. par la suite, on aura vraisemblablement un Parlement européen plus à droite, donc vraisemblablement moins ambitieux sur les questions climatiques. Et puis, il faut aussi rappeler une chose, c'est que le Parlement européen se bat beaucoup pour avoir un droit d'initiative, c'est-à-dire pouvoir mettre à l'agenda un certain nombre de questions. Il ne dispose pas à l'heure actuelle de ce droit d'initiative, et c'est éventuellement une réforme institutionnelle qui pourrait être menée dans les années à venir pour justement permettre d'avoir une forme de démocratie plus directe. Tu l'as très bien dit, on vote directement pour ces eurodéputés. Par contre, on ne vote pas pour les ministres qui composent le Conseil de l'Union européenne. Et donc là-dessus, pour avoir une forme de rééquilibrage et faire en sorte que les citoyens aient droit... sur les dossiers qui vont être discutés au niveau européen, on pourrait tenter de faire en sorte de renforcer le pouvoir du Parlement européen sur les années à venir. C'est toutes les questions qui se posent de manière plus générale, mais ça implique également éventuellement une réforme des traités qui requiert derrière l'unanimité des 27, ce qui est évidemment très compliqué à obtenir au niveau européen.

  • Speaker #0

    Comme on a commencé à évoquer le sujet des partis faux, est-ce que tu peux juste nous poser un peu les bases s'il te plaît ?

  • Speaker #3

    Jusqu'à 2019, C'était une alliance qui était composée de ce qu'on appelle le Parti Populaire Européen, donc la droite européenne, les Républicains en France, avec les sociodémocrates, le Parti Socialiste en France, qui jusqu'à présent détenaient la majorité absolue. qui permettait donc en fait, lorsqu'ils votaient ensemble, de gagner les amendements, de remporter les textes et d'imposer un peu, entre guillemets, leur vision. En 2019, pour la première fois, on a eu une situation toute nouvelle qui a fait que le Parti populaire européen et les sociodémocrates à eux deux n'avaient pas la majorité absolue. Ils ont dû chercher un troisième parti pour pouvoir justement opérer une alliance. C'est donc naturellement qu'ils se sont retournés vers les libéraux. donc en France c'est l'équivalent d'Emmanuel Macron, et au niveau européen il s'appelle Renew, ces libéraux étaient ce qu'on appelle les faiseurs de roi et permettaient d'obtenir une majorité absolue au sein du Parlement européen. Et donc en fonction des textes, ils pouvaient décider d'avoir une ambition, on va dire notamment sur les climatiques, plus ambitieuse, ou alors au contraire tenter de diminuer l'ambition en fonction de leur doctrine. Et puis il y a d'autres groupes, politique au sein du Parlement européen. Il y a donc les Verts européens qui ont connu une percée assez importante en 2019. suite notamment aux mobilisations climat pour faire en sorte justement de pouvoir tenter de peser au sein du Parlement européen. Il y a ce qu'on appelle la GUE, qui est entre guillemets l'extrême gauche qui correspond à la France insoumise au sein du Parlement européen, qui a environ une quarantaine de membres. Et puis de l'autre côté de l'échec qui est politique, il y a ce qu'on appelle les conservateurs européens, ICIER, qui correspond au parti de Giorgia Meloni en Italie. En France, c'est plutôt Éric Zemmour, mais c'est un peu moins représentatif, il faut rester vraiment sur la logique de Thierry Jameloni au niveau européen. Et puis, ce qu'on appelle l'extrême droite, donc identité-démocratie, qui est composée notamment du Rassemblement National en France. Vis-à-vis de ce parti d'extrême droite, il y a ce qu'on appelle un cordon sanitaire. Je pense que c'est important de le rappeler parce qu'à la différence de la France, ce cordon sanitaire fait en sorte qu'on ne croit pas de poste à responsabilité à l'extrême droite au niveau européen. Dit autrement, en France, Sébastien Chénu est vice-président de l'Assemblée nationale. Au niveau européen, il est impossible qu'une personne qui appartienne au groupe d'identité et démocratie obtienne... Un poste de caisseur au niveau du Parlement européen, un poste de vice-président du Parlement européen ou un poste de président d'une commission au niveau du Parlement européen. Ça, c'est très important parce qu'en fait, ça va déterminer également la lecture politique une fois que les élections seront terminées. On sera sur une recherche d'une alliance entre les groupes du Parti populaire européen, des sociodémocrates, des libéraux, éventuellement des conservateurs ou alors des verts. Mais l'extrême droite sera très clairement ostracisée au sein du Parlement européen.

  • Speaker #0

    Juste une dernière question sur le fonctionnement avant de rentrer dans le cœur du sujet. Quelle est la répartition des responsabilités entre États membres et Union européenne en termes d'énergie, du climat, en d'autres termes, qui décide entre la France et l'Union européenne sur sa politique énergétique ?

  • Speaker #3

    Article 194 TFUE du traité de fonctionnement de l'Union européenne, si on revient à la base, qui fait qu'en fait, il y a sur un certain nombre de dossiers... la possibilité pour les États membres de conserver un regard sur, par exemple, leur mix énergétique. Donc là-dessus, l'Union européenne ne va rien nous imposer. Par contre, un certain nombre de décisions qui sont prises au sein de l'Union européenne, par exemple lorsqu'on détermine des objectifs sur les énergies renouvelables, vont avoir une conséquence très directe sur la manière dont on va devoir déployer ça en France. Donc vraiment, on est sur une logique de compétences partagées. avec un impératif qui est quand même nécessaire sur des questions par exemple de fiscalité, les États membres conservent également un droit de regard. Et puis de manière plus générale, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'à partir du moment où, et on l'a vu avec la guerre en Ukraine, on arrive à se mettre d'accord au niveau européen sur des objectifs communs, par exemple sur un objectif de réduction de la consommation de gaz, et bien il y a ensuite une forme de translation au niveau national, c'est-à-dire que le niveau national va appliquer autant que faire se peut. et en fonction de ses propres considérations. C'est-à-dire que si vous êtes un grand consommateur de gaz, vous allez diminuer vos objectifs de manière plus significative que si vous êtes un pays qui, traditionnellement, ne consomme pas de gaz. C'est un peu la répartition, pour être très schématique, entre les compétences européennes et les compétences des États-Unis.

  • Speaker #0

    Ok. Donc, on va se jeter dans le cœur du sujet. On va commencer par le... L'énergie et le climat, je le dis en intro, en 2019 a été signé le pacte vert qui vise à reformer l'ensemble des secteurs de l'économie européenne grâce à plus de 75 textes législatifs. Concernant la réduction des gaz à effet de serre, il y a le paquet Fit for 55. Est-ce que tu peux nous expliquer ce que c'est, s'il te plaît, Fouque ?

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Donc le Fit for 55, qui a justement l'objectif 55, si vous voulez le traduire en français, c'est l'objectif de réduire de 55% nos émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990. Une fois qu'on a dit ça, on a opéré une forme de réforme législative qui va tenter de repenser la manière dont on produit, dont on consomme, dont on se déplace, et qui va toucher au quotidien très concret des Français. C'est par exemple la mesure la plus emblématique, la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, mais vraiment, je voudrais insister sur la logique systémique de cet ensemble-là. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on a... on met fin au véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, on va en même temps mettre en place un règlement pour favoriser l'essor des bornes de recharge tous les 60 km, on va en même temps favoriser avec une directive dédiée la promotion des énergies renouvelables pour favoriser l'électrification, justement parce qu'on va promouvoir le 100% électrique. Et donc là, c'est vraiment une logique d'ensemble qui fait que tout ça a été pensé de manière concrète et conjointe. On ne peut pas donc déterminer et singulariser une seule mesure, on doit vraiment réfléchir ça de manière collective, pour faire en sorte justement qu'à l'horizon 2030, on réduise de 55% nos émissions de gaz à effet de serre. Il y a d'autres mesures qui sont mises en place, on va sûrement y venir dessus par la suite, mais... il faut vraiment insister sur le fait que désormais, on s'est doté d'objectifs très concrets à l'horizon 2030. Donc ça, c'est ce qu'a fait l'Union européenne et c'est ce qu'essaie de faire le mieux, c'est-à-dire réglementer. Et désormais, en fait, on s'ouvre sur une nouvelle face, c'est-à-dire la mise en œuvre au niveau national et puis la détermination des objectifs pour l'horizon 2040. Mais ça, on y reviendra dessus par la suite.

  • Speaker #0

    L'Union européenne, c'est aussi un marché du carbone qu'on nomme aussi ETS1 pour les intimes. Alban, est-ce que tu avais une question sur ce sujet ?

  • Speaker #2

    Oui, effectivement. L'Union européenne s'est dotée d'un premier système d'échange des quotas d'émissions en 2005. Est-ce que ce fameux marché carbone, qui est un pilier important de sa stratégie en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, est-ce que tu pourrais nous dire comment il fonctionne, à quel secteur d'activité il s'applique, et est-ce qu'aujourd'hui on sait s'il a eu un impact sur les émissions de gaz à effet de serre européennes ?

  • Speaker #3

    Oui, concrètement, le marché carbone européen, c'est l'application du principe polyurépaire. C'est-à-dire que pour les industries et pour les producteurs d'électricité, à partir du moment où vous émettez une tonne de CO2, vous allez payer l'équivalent d'un prix carbone. Ce prix carbone est déterminé selon des lois de marché. Et jusqu'en 2018-2019, ce prix carbone était très faible, il était autour de 5 euros la tonne de CO2, ce qui était en fait assez rédhibitoire parce qu'il n'était pas utile pour envoyer un signal prix. On a opéré des réformes et en fait, à partir du moment où le prix carbone a augmenté, a atteint notamment un prix autour des 30 euros la tente de CO2, il a bouleversé ce qu'on appelle l'ordre de mérite au niveau européen, c'est-à-dire qu'il a permis de renchérir la production d'électricité à partir de charbon. pour la rendre non compétitive vis-à-vis de la production d'électricité produite à partir de gaz. Et ça, c'est très significatif d'un point de vue des émissions climatiques. Pourquoi ? Parce que produire de l'électricité à partir du charbon, c'est deux fois plus émetteur que produire de l'électricité à partir du gaz. Donc, à partir du moment où on avait un prix carbone autour des 30 euros la tente de CO2, il était plus rentable économiquement de produire de l'électricité à partir du gaz. Et donc ça, ça a eu un effet très concret sur la réduction des émissions de CO2 au niveau européen. sur les dernières années. Et puis, les industries également étaient soumises à ce prix carbone. Sauf que les industries, elles bénéficiaient, elles bénéficient d'ailleurs toujours de ce qu'on appelle des allocations gratuites, c'est-à-dire des droits à polluer, qui sont octroyés par le système afin de faire en sorte justement d'opérer une transition au sein du secteur industriel et d'éviter que la transition soit trop abrupte et que cela renchérisse les coûts pour l'industrie de manière trop conséquente.

  • Speaker #0

    On a opéré des modélisations et on a opéré également des reporting. On s'est rendu compte que l'industrie comparée au secteur de la production d'électricité avait baissé de manière beaucoup moins drastique ses émissions de gaz à effet de serre justement parce qu'elle avait trop d'allocations gratuites qui faisaient qu'elle avait donc trop de droits à polluer de manière gratuite. On a donc opéré une réforme au sein du fameux Fit for 55 pour faire en sorte que d'ici 2030, d'ici 2035, on diminue très concrètement les allocations gratuites qui étaient données à ces industries pour faire en sorte de les inciter au travers du prix carbone à investir dans la recherche et le développement pour faire en sorte de verdir leur industrie. Et donc là, on est vraiment sur un marché carbone qui va faire en sorte, sur un horizon de temps 2030-2035, d'orienter les comportements des industriels et de renchérir leurs coûts de production et donc de les inciter à opérer une décarbonation au travers soit de l'électrification, soit... le remplacement au travers notamment par exemple de l'hydrogène vert pour faire en sorte justement d'être vertueux d'un point de vue des émissions de gaz à effet de serre. Et puis ce marché carbone, il doit se penser de manière un peu plus systémique, on revient dessus par la suite, avec un mécanisme qui a été mis en place au niveau européen au travers du feed for feed-file, c'est ce qu'on appelle le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, ce que les politiques vont vulgariser en taxes carbone aux frontières, qui font en sorte que... Puisqu'on va renchérir nos coûts de production au niveau européen en mettant un prix carbone, et donc on va faire en sorte que l'acier soit plus cher à partir du moment où il est produit dans des conditions peu vertueuses, on va faire en sorte que lorsque l'acier est importé par exemple de Chine, on renchérisse cette importation avec un prix carbone à partir du moment où il franchit la frontière, pour faire en sorte qu'il y ait ce qu'on appelle... en anglais un level playing field, une forme de compétition équitable entre l'acier qui est produit en Chine à partir du charbon et l'acier qui va être produit en France ou en Europe à partir d'énergies renouvelables, du nucléaire ou du gaz, pour faire en sorte justement que cet acier soit assez compétitif à partir du moment où il est produit dans des conditions assez peu environnementales. en Chine pour faire en sorte justement d'avoir une compétitivité au niveau européen vis-à-vis nos partenaires internationaux.

  • Speaker #1

    Ce mécanisme d'ajustement aux frontières, est-ce qu'il est satisfaisant aujourd'hui ou est-ce qu'il faut le renforcer ?

  • Speaker #0

    Alors, il va être mis en place au niveau européen, donc on est vraiment dans sa toute première itération. Donc il est encore dans ses balbutiements et il va, il faut être très pragmatique, il va y avoir, je pense, des trous dans la raquette, c'est-à-dire qu'on ne pourra pas faire en sorte de pouvoir à l'heure actuelle couvrir l'ensemble des émissions. Il s'applique à un nombre très réduit de secteurs, l'électricité, l'acier, le fer notamment. Donc il faut être très prudent, mais il va monter en puissance d'ici à l'horizon 2035 pour faire en sorte justement de protéger l'industrie européenne. Donc il va falloir travailler main dans la main avec les industriels pour identifier là où il y a encore des manques. Il va également faire en sorte de rendre le mécanisme entre guillemets le plus simpliste possible parce que ça va rajouter des charges pour les industriels, des charges déclaratives. pour toujours monitorer leur production, également faire des reporting auprès de la Commission européenne. Mais très concrètement, c'est un instrument qui a pour objectif de rééquilibrer la balance commerciale et rééquilibrer le rapport de force vis-à-vis des partenaires internationaux. Et puis, il faudra également être très précautionneux, parce que là, la manière dont on présente, c'est vraiment un rapport de force vis-à-vis de la Chine, un rapport de force vis-à-vis d'autres pays comme la Turquie, les États-Unis, mais ça va avoir également des conséquences internationales vis-à-vis d'autres pays. à des pays tiers, comme par exemple des pays africains, qui nous exportent à l'heure actuelle, par exemple, des denrées, l'aluminium, etc., et qui représentent un poids très important dans leur balance commerciale. Donc là-dessus, vu que c'est des pays en développement, on peut s'alarmer du fait que ce mécanisme-là pourrait avoir des conséquences assez délétères, parce que c'est une rentrée d'argent financière très importante pour eux, qui peut ensuite permettre... leur développement et faire en sorte vraiment de calibrer ça en fonction des partenaires internationaux qui sont concernés. Et tout ça doit se faire également dans le respect des règles de l'OMC. Donc une fois que j'ai dit tout ça, tu te rends bien compte que c'est assez compliqué de mettre en place un mécanisme sur le très court terme qui soit très très complet.

  • Speaker #1

    C'est clair, c'est un gros sujet. Antoine, tu avais une question sur une autre norme, sur une autre directive ?

  • Speaker #2

    Oui, parce qu'on parle beaucoup en Europe et à raison de tout ce qui a été fait sur les transports, notamment l'interdiction à la vente des véhicules thermique neufs à partir de 2035. Il y a une autre directive qui, j'ai l'impression, est beaucoup moins bien connue qui est la directive sur l'efficacité énergétique des bâtiments et qui est une directive qui est en fait assez dure parce que dans… vraiment de façon très… En général, c'est une directive qui va avoir un impact très fort sur les moyens de chauffage qu'on va avoir le droit d'utiliser dans les bâtiments en Europe à partir de 2030. et encore plus tôt pour les bâtiments publics à partir de 2021, si je ne me trompe pas. Et c'est une directive encore plus dure sur les efforts qu'il va falloir faire pour réduire la consommation d'énergie des bâtiments, parce que si je ne me trompe pas, ça fait partie des bâtiments, ça fait vraiment partie des secteurs dans lesquels, notamment grâce à la rénovation thermique, on peut le plus économiser de l'énergie, le plus facilement, avec plein de guillemets, parce que ce n'est même pas si simple que ça. Donc est-ce que c'est possible que tu nous en parles un peu plus ? Oui,

  • Speaker #0

    complètement. On a donc un objectif contraignant au niveau de l'Union européenne qui a été adopté, pour réduire vraiment de 11,7% les objectifs d'efficacité énergétique. Je souligne vraiment 11,7% parce que ça te montre le degré de granularité de l'Union européenne. Vraiment, quand on parle de compromis, c'est qu'on va le négocier à la virgule près. C'est-à-dire qu'un certain propose 12,5%, d'autres proposent 12%, et bien on va parfois trancher entre les deux, on va arriver à 11,7%. Et ça en fait, pourquoi est-ce qu'on met en place ce principe d'efficacité énergétique ? C'est qu'on va tenter de donner la priorité à cela parce que... On s'est rendu compte de manière très concrète que les bâtiments qui vont être construits aujourd'hui, ils vont être encore là pour les années, les décennies à venir, d'ici 2100. Donc en fait, le premier objectif, il est de faire en sorte que dès que tu construis un bâtiment, il soit bas carbone, pour faire en sorte justement d'optimiser la consommation d'énergie, dans une logique d'efficacité énergétique. Et puis après, on va mettre en place la rénovation énergétique des bâtiments, pour faire en sorte justement... de minimiser la consommation d'énergie et, quand et, de faire d'une pierre deux coups, si je permets, c'est de sortir les personnes de la situation de précarité énergétique. Au niveau européen, selon les estimations à l'heure actuelle, 34 millions de personnes sont encore en situation de précarité énergétique. Donc à partir de là, l'objectif est de dire qu'on va rénover les bâtiments pour faire en sorte d'éviter de brûler trop de gaz pour se chauffer et en même temps, on va améliorer le quotidien des Européens. C'est ça l'objectif sous-jacent de la directive sur l'efficacité énergétique. Pour ce faire, on s'est doté d'une trajectoire qui est très ambitieuse de réduction d'annuelles d'économies au niveau national, qui vont doubler entre 2028 et 2030, et qui vont imposer aux États-Unis un rythme très fort de rénovation énergétique des bâtiments. Une fois qu'on a dit ça, et tu le rappelais tout à l'heure, ça va rentrer en contradiction directe. Avec l'austérité budgétaire qui pointe son nez au sein des états membres. Pourquoi ? Parce que rénover des bâtiments, c'est extrêmement coûteux. Et donc là-dessus, même avec l'ensemble des aides qui sont mises en place au niveau européen, déjà ça prend du temps, les aides ne sont pas souvent de manière très claire et donc il faut opérer une forme de démarchage, etc. Et puis derrière, il faut engager énormément d'emplois. Et donc la question qui se pose, c'est comment est-ce qu'on va derrière aussi soutenir les ménages pour faire en sorte d'opérer cette rénovation énergétique des bâtiments. Il y a des mécanismes qui ont été mis en place au sein du FITFACTIFAC, notamment ce qu'on appelle un fonds social climat, on reviendra dessus par la suite, d'aider les ménages à faire cela, mais il faut être très concret sur le fait que le retour sur investissement se fera sur le moyen long terme, alors que l'impératif et la contrainte économique, elle pèsera immédiatement sur les ménages. Et donc là, on est vraiment sur... résoudre cette fameuse équation entre fin du mois et fin du monde. Évidemment, les factures énergétiques ont extrêmement augmenté avec les conséquences de l'inflation qui sont nées de la guerre en Ukraine, mais si on ne débloque pas des schémas pour permettre justement d'opérer ces rénovations énergétiques des bâtiments et qu'on n'acte pas le fait qu'on doit apprécier ça sur le moyen long terme, ça c'est le rapport Pisaniféré qui a été mis en France, eh bien, on ne pourra pas opérer cette transformation au niveau national et au niveau européen de manière

  • Speaker #1

    Puisqu'on revient inexorablement sur cette question du financement, est-ce que tu peux nous parler de ce Fonds Social Climat, s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, le Fonds Social Climat, c'est la contrepartie de l'extension du marché carbone européen. Tout à l'heure, avec Alban, on parlait du marché carbone européen, l'ETS, qui portait sur les industries et sur la production d'électricité. Ce marché carbone européen va être étendu en 2027 aux bâtiments et aux transports. des particuliers notamment. C'est-à-dire qu'en fait, ça va très concrètement renchérir d'une certaine manière, il faut être très concret, la structure de tout un chacun pour faire en sorte justement d'orienter les comportements. À partir du moment où on aura des transports routiers, par exemple les voitures individuelles, les bus ou les bâtiments, le chauffage résidentiel et commercial, qui vont être taxés, Il faut mettre en place, de manière parallèle, un fonds pour justement permettre aux personnes de sortir de cette situation. où leurs voitures individuelles, leurs bâtiments sont taxés en rénovant les bâtiments, en passant aux véhicules électriques. C'est tout l'intérêt du Fonds social climat. Le Fonds social climat, ça va être un fonds de 65 milliards d'euros sur la période 2026-2032 au niveau européen, pour faire en sorte justement... d'aider les ménages à sortir du véhicule thermique, à rénover leurs bâtiments. Ce fonds européen va être alimenté directement par les États-Unis et également par les revenus du nouveau marché carbone européen. Il aura pour objectif de financer les rénovations énergétiques des bâtiments, de financer les bandes de recharge, de financer le passage aux véhicules électriques, de financer le leasing social qu'on a mis en place en France qui jusqu'à présent a fait preuve d'une certaine forme d'engouement, ce qui est une bonne chose. pour justement magnifier les politiques publiques qui sont menées au niveau national. Mais ce Fonds social pour le climat, il faut être très clair là-dessus, et on le voit avec l'exemple français, où lorsqu'on doit faire des économies budgétaires, la transition énergétique est celle qui va le plus trinquer, qui est le plus mis à contribution avec le Fonds vert ou encore la prime rénov', le Fonds social climat ne devra pas justement compenser le fait qu'on sera dans une situation de... d'austérité budgétaire au niveau national. C'est-à-dire qu'il faudra augmenter les moyens donnés à la rénovation énergétique et des bâtiments. Le Fonds social pour le climat ne devra pas seulement compenser la baisse qu'on pourrait tenter d'être observée au niveau national. Et donc là-dessus, la question qui se pose, c'est comment est-ce qu'on va permettre également de protéger les plus vulnérables ? Parce que les plus vulnérables seront les plus exposés à ce nouveau marché carbone européen. Marché carbone européen qui, si les prix... de l'énergie venait à être trop élevé ne serait pas lancé en 2028, mais en 2028. Là où le Fonds social climat serait lancé en 2026, c'est-à-dire préalablement, pour tenter justement de permettre d'opérer en amont un changement de comportement et un changement dans le quotidien des Français.

  • Speaker #1

    Pour parachever ce panorama des nouveautés, tu voulais nous parler de la réforme du marché de l'électricité. Alors évidemment sans rentrer dans trop de détails parce qu'il faudrait 4-5 épisodes, mais est-ce que tu peux nous parler des enjeux s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, je voulais parler de cette réforme parce que c'est quelque chose qui est très significatif de ce qu'on a réussi à faire au niveau européen à très très court terme, c'est-à-dire dans l'urgence. et en même temps ce qu'il faudrait faire au niveau européen sur le moyen d'en faire. Dit concrètement, hier en Ukraine, on a eu une explosion des prix de l'électricité pour une raison très simple, c'est qu'au niveau européen, 20% de l'électricité est encore produite à partir de gaz. À partir de ce moment-là, et du fait que l'électricité ne se stocke pas, la manière dont fonctionne le marché européen, c'est de dire que À partir du moment où on a des pics de consommation, lorsque l'on rentre chez soi le soir pour produire de l'électricité, ou le matin lorsqu'on se réveille et qu'on fait marcher la machine à café, on a donc des pics de production d'électricité, et que pour répondre à ces demandes d'électricité, il faut activer des centrales à gaz, sinon on n'a pas assez d'offres pour répondre à la demande, et on est dans une situation de blackout au niveau européen. Donc à partir du moment où les prix du gaz avaient été multipliés par 10, cette translation-là s'opérait sur les prix de l'électricité. On a donc opéré une réforme dans l'urgence, vraiment, pour tenter de décorréler les prix du gaz des prix de l'électricité. On peut discuter... une année de est-ce que ça marchera ou ça marchera pas ? mais on a fait ça dans l'urgence et on a fait ce que l'Union Européenne ne sait pas bien faire en réalité, c'est légiférer dans un temps très court. Parce qu'en fait, on n'a pas le temps d'opérer des études d'impact, on n'a pas le temps également de prendre en compte toutes les considérations sociotechniques et les implications que ça aura sur les citoyens. Donc en fait, on a fait quelque chose, on a opéré, on a fait un pansement, on va dire, pour faire en sorte de réformer ce marché européen de l'électricité. Mais ce marché européen de l'électricité, il va falloir le réformer également de manière plus générale à l'horizon 2024-2029 pour intégrer une chose très concrète, c'est que selon les modélisations de la Commission européenne, à l'horizon 2030, 70% de notre électricité sera produite à partir des énergies renouvelables. Et ça, le marché européen de l'électricité qui est designé à l'heure actuelle, il n'est pas prêt pour ça. Et ça te montre en fait tout l'enjeu de ce qui se passe au niveau européen, c'est qu'on pense le moyen long terme. on ne pense pas forcément le court terme. Par contre, lorsqu'on doit penser le court terme, c'est qu'on est dans une situation de crise. C'est ce qu'on a fait avec les nombreuses déclarations, notamment de nos dirigeants politiques, qui ont utilisé le marché européen de l'électricité comme étant un bouc émissaire pour expliquer une partie de la hausse des factures. Même si, en fait, une fois la réforme est passée, on est resté sur le même mécanisme de formation des prix de l'électricité au niveau européen. Donc, on a beaucoup tapé dessus, mais en réalité, on est resté sur une logique très... européennes sur ces questions-là. Et cette logique européenne, il faudra la pousser plus loin, mais la pousser plus loin lorsqu'on n'aura pas une forme de pression politique là-dessus. Et c'est ça, en fait, le pacte vert européen. C'est qu'on a travaillé pendant cinq ans presque en sous-main. C'est-à-dire qu'on n'entendait pas parler du pacte vert européen. Et de manière très paradoxale, la première fois qu'on a entendu parler du pacte vert européen, c'est quand il y avait la colère des agriculteurs. C'est quand il y avait des agriculteurs dans la rue pour justement dénoncer, d'une certaine manière, le pacte vert européen. qui ont été votés dans ce pacte européen sur le volet agricole ne sont même pas mis en place. Donc c'est une question aussi de récit derrière. C'est vraiment une question de comment est-ce qu'on est capable de déployer un récit vis-à-vis de ce pacte européen qui à l'heure actuelle a été amalgamé par une certaine partie de la classe politique et a même été instrumentalisé en amont des élections européennes.

  • Speaker #1

    Et c'est loin d'être nouveau. On peut dire que globalement, cette mandature a été assez productive d'un point de vue environnemental. Quel bilan tu tirerais ? Peut-être nous parler aussi de ce qui n'a pas marché.

  • Speaker #0

    Sur les questions de l'énergie, sur les questions du transport, on a fait énormément et là on peut considérer que c'est un succès. On a parlé depuis tout à l'heure énergie renouvelable, fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. Il y a tout un tas de mesures qui ont été adoptées au niveau européen et qui sont vraiment dans la lignée de l'atteinte de nos objectifs à l'horizon 2030. Sur la question environnementale, par contre, on a eu des reculs très forts. En tout cas, on a eu des bémols très forts qu'on vient de mentionner. notamment en amont des élections européennes. C'est-à-dire que sur la loi sur la restauration de la nature, qui permet de protéger l'écosystème, si je suis vraiment très simpliste, on a eu une reculade vis-à-vis de la proposition de la Commission européenne. Tout à l'heure, je te parlais du fonctionnement de la Commission européenne. La Commission européenne a mis en place une proposition. Cette proposition a été édulcorée au sein du Parlement européen. ce qui veut dire qu'en fait les groupes de droite du Parlement européen ont diminué l'ambition initiale qui avait été mise sur la table par la Commission européenne et ça c'est assez rare pour être souligné, c'est-à-dire qu'en fait on a diminué l'ambition parce que on avait peur des conséquences électorales que cela pourrait avoir le 9 juin prochain Même sujet avec un règlement sur les pesticides. La Commission européenne propose un règlement sur les pesticides, la droite européenne détricote ce règlement-là. à un point tel que le Parlement européen rejette le règlement et renvoie la balle dans le camp de la Commission européenne. Sur ces questions environnementales, on a eu un vrai recul sur la dernière année, justement parce qu'on s'est rendu compte qu'on était peut-être, avec la colère des agriculteurs, sous le coup d'une trop forte émotion, sous une trop forte récupération politique. Et c'est peut-être le risque des élections européennes. du 9 juin prochain, c'est que d'une certaine manière, on va avoir une forme de projection, si on se projette, selon les dernières projections et sondages, une montée des droits européennes, de la droite conservatrice, de la droite radicale. Et le risque est qu'on amalgame ce rejet des normes environnementales en un rejet plus fort des normes climatiques de manière générale. Et ça, c'est peut-être le plus grand des dangers, parce que ça voudrait dire qu'au niveau national, on serait tenté de diminuer le rythme de mise en œuvre, et qu'au niveau européen, on serait tenté de diminuer l'ambition climatique dès lors qu'on va négocier la future cible à l'horizon 2040.

  • Speaker #1

    Antoine, est-ce que tu as une question sur ce bilan ?

  • Speaker #2

    Oui, pour conclure, tu as très bien fait le bilan. On a plein de points qui sont très discutables. On peut discuter de ce que c'est vraiment via l'extension du marché carbone qu'il faut accélérer la décarbonation du transport, du chauffage. On peut reprendre tout ce qu'on a discuté ici et débattre de ce que c'est la meilleure façon de faire. Mais on peut s'entendre sur le fait que sur le plan de la décarbonation, il y a eu vraiment des politiques structurelles et importantes qui ont été mises en place ces cinq dernières années. Et ça va avoir un impact vraiment très concret sur nos façons de se déplacer, de se choper et de produire de l'énergie en Europe. Donc sur l'agriculture, c'est un peu plus lancé, mais on en parlera. Moi, la grande question, c'est, tu l'as dit au départ, tout ça, ça a été voté largement par une coalition qui a été formée en gros d'équivalents du Parti Socialiste français et par l'équivalent de la droite française. Et la grande question, c'est comment est-ce qu'on a pu avoir à un moment des élus de droite qui ont voté des politiques structurelles et contraignantes au Parlement européen ? Car l'exemple d'interdiction de la vente de véhicules thermiques à partir de 2035, c'est un bon exemple. Ça a été voté par une coalition européenne qui contenait beaucoup d'élus de droite. qui, à l'heure actuelle, sont en train de vitipérer contre cette interdiction, en France, pas qu'en France. Donc voilà, comment est-ce qu'on a pu créer à un moment ce momentum ? On parle beaucoup des marches climat, mais est-ce que c'est des marches climat ou est-ce que c'est d'autres choses ? Et c'est aussi intéressant parce que ça pose la question de comment est-ce que dans les années à venir, on peut se mobiliser au-delà du vote pour recréer ce momentum.

  • Speaker #0

    Exactement. Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'on dit souvent que le pacte vert européen est né des élections européennes de 2019. En réalité, je voudrais nuancer ce propos. Pourquoi ? Parce qu'avant ça, il y avait, de la part des États membres, et notamment de la Commission européenne, une forme de volonté politique d'accélérer sur les questions climatiques. Ça s'est vu lorsque, en mars 2018, les États membres chargent officiellement la Commission européenne de présenter ce qu'on appelle une stratégie de long terme. une stratégie de long terme, donc à l'horizon 2050, pour justement faire en sorte d'atteindre un objectif de neutralité climatique. Donc la Commission européenne présente en novembre 2018 une stratégie de long terme qui évoque pour la première fois le concept de neutralité climatique. Donc en réalité, il y avait un terreau fertile sur lequel les élections européennes ont permis de capitaliser et ont légitimé démocratiquement l'avènement du pacte vert européen, qui en fait est un coup politique très intelligent de la part d'Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, pour permettre justement de... d'entretenir ce momentum qui a été mis en place par les institutions européennes. Maintenant, la question qui se pose, c'est qu'on est beaucoup moins dans cette logique-là, on est dans une logique de frilosité de la part des États membres, on est dans une logique également où, parce qu'il y a des considérations nationales internes au sein des groupes politiques, certains groupes politiques... jouent leur partition pour tenter de gagner les élections au niveau national. C'est-à-dire qu'en fait, si je prends l'exemple très concret de la droite allemande, la droite allemande, pour tenter de gagner les votes de l'industrie, notamment l'industrie automobile, qui a un très fort lobby en Allemagne, va tenter de mettre en avant le fait qu'ils vont vouloir réouvrir le dossier de la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. alors que jusqu'à présent il y a eu des coalitions qui s'étaient formées au sein du Parlement européen parce qu'il y avait ce fameux momentum. Comment est-ce qu'on en est arrivé là ? C'est parce qu'il y a une chose qui a été mise en place dans chacun des dossiers du pacte vert européen, notamment du Fit for Tifa, c'est ce qu'on appelle des clauses de revoyure. Ces clauses de revoyure, c'est un mécanisme juridique, c'est une clause de rendez-vous qui permet justement... d'être activé par la Commission européenne pour réouvrir un dossier et revoir à la hausse ou à la baisse les ambitions qui ont été définies au sein de la mandature qui vient de s'écouler. Pour en prendre un exemple très concret, sur la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2030, en 2026, il y a une clause de revoyure qui prévoit que la Commission européenne va remettre un rapport au Parlement européen et au Conseil pour faire en sorte de juger de l'opportunité de revenir sur la deadline de 2035. Cette clause de revoyure-là, elle menace d'être actionnée par un certain nombre de parlementaires européens, notamment la droite européenne. pour justement revenir sur cet objectif-là. Une fois qu'on a dit ça, pourquoi est-ce que les élections européennes sont dimensionnantes pour l'ambition climatique à l'horizon 2030 ? C'est parce que de l'équilibre qui ressortira des élections européennes de 2024, cela se rejaillira sur les priorités de la Commission européenne. Et donc, Ursula von der Leyen, si elle est réélue, pourrait par exemple subordonner sa réélection à la réouverture. du dossier du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. C'est là où on risque d'avoir une forme de détricotage sur les années à venir. C'est de faire en sorte que l'ensemble de ces clauses de revoyure soient actionnées et ce qu'on appelle un effet boule de neige. Parce qu'à partir du moment où tu reviens sur la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, tu vas être désincitatif sur l'électrification, et donc tu vas avoir des conséquences directes sur la directive énergie renouvelable, tu vas avoir des conséquences directes sur le règlement, sur le déploiement des bornes de recharge tous les 60 km. Et donc c'est là en fait le plus gros risque, c'est qu'on ait une diminution de l'ambition au travers. l'ouverture de ces clauses de revoyure. Et petit instant autopromo, on vient de publier aujourd'hui même, un à l'Institut Jacques Delors, un papier qui analyse en fait comment est-ce qu'on pourrait mettre en œuvre ces clauses de revoyure, quelles sont les conditions... à déployer pour justement tenter de diminuer l'ambition climatique ? Et comment est-ce qu'on pourrait tenter de contrecarrer ça ? On a une proposition qui est la mise en place d'une grande coalition élargie qui verrait le Parti populaire européen, les sociodémocrates, les libéraux et les verts européens opérer un accord de coalition pour justement sauvegarder les objectifs qui ont été décidés jusqu'à présent et qui en échange permettraient justement à la candidate du Parti populaire européen d'être réunie avec une donnée qui convient d'être prise en compte. En 2019, Ursula von der Leyen avait été élue à neuf voix près. Aujourd'hui, sa réélection n'est pas assurée. C'est pour ça que les verts européens qui sont projetés autour des 40 sièges pourraient faire office de socle pour tenter de sécuriser sa réélection.

  • Speaker #1

    Je ferais bien l'intention de mettre le lien de cette note dans la description de l'épisode. Merci beaucoup, Fouk. On va passer au billet de construire l'écologie. C'est à toi Antoine.

  • Speaker #2

    Je voulais vous parler de ce qu'a introduit Alban au début de l'émission, qui est cette histoire de Green Blending, dont la compréhension n'est pas sans intérêt à l'approche des élections européennes. On est vraiment, et c'est ce qu'on a commencé à introduire là, arrivé à un point de bascule. On a d'un côté une prise de conscience de la gravité et du changement climatique et de l'effondrement de la biodiversité qui est de plus en plus large dans la population et qui nous incite à adopter des politiques écologiques de plus en plus ambitieuses. Et en face, on a des groupes d'intérêt qui tentent de rendre ces politiques de transformation écologique responsables de tous les maux pour les discréditer. Avec tout le monde toujours les mêmes arguments, qui sont que ces politiques de transformation écologique seraient systématiquement à l'origine de l'augmentation du coût de la vie, de perte d'emploi et de compétitivité, d'endettement, qui en fait même seraient inefficaces voire contre-productives sur le plan environnemental. Le green blaming, c'est vraiment ça. C'est utiliser des arguments faux, fallacieux ou partiellement faux pour attribuer à une politique écologique des torts qui justifieraient son abandon. Il ne s'agit surtout pas de dire ici qu'il ne serait jamais légitime de remettre en question une politique écologique, puisqu'il y en a certaines qui sont effectivement soit inefficaces, soit socialement injustes, soit les deux. Mais là on parle bien d'autres choses, on parle de critiques qui sont inventées uniquement pour faire échouer des transformations, qui sont d'ailleurs souvent perçues comme trop contraignantes, afin de protéger des intérêts économiques ou de se soustraire à des changements de comportement. Pour rendre ça un peu concret, en fait l'actualité européenne regorge d'exemples de green blaming récents. Sans rentrer dans le détail des controverses autour desquelles chacune de ces opérations de grippes dynamiques se sont organisées, Pour incarner tout ça, par exemple en Allemagne, on a eu une tentative l'année dernière du gouvernement allemand d'interdire l'installation de nouvelles chaudières au gaz pour limiter les émissions de gaz à effet de serre liées au chauffage des bâtiments et aussi pour réduire accessoirement la dépendance du pays au régime autoritaire qui fournit son gaz fossile, celui de Montgard. Ça a provoqué des très vives divisions dans le pays et un recul en bonne et bonne forme qui a été largement alimenté par l'industrie du gaz, par des parties d'extrême droite comme l'AFD et par une coalition de médias conservateurs. Un autre exemple un peu concret, aux Pays-Bas, on a des mesures d'urgence qui ont été prises par le gouvernement pour réduire les pollutions causées par l'excès d'azote lié aux encas azotés dans le secteur agricole. Dans ces mesures, il y avait notamment la réduction de 30% du chèque-tête bovin planifié d'ici 2030, et ça a entraîné des oppositions massives et une montée en puissance du mouvement agriculteur-citoyen, qui est maintenant un parti politique des Pays-Bas, qui est systématiquement opposé aux politiques environnementales. Et en France, plus près de nous, rien qu'en 2023, On a eu un recul du gouvernement sur un projet d'interdiction naissante d'installation de nouvelles chaudières en glace, toujours. On a des zones à faible émission qui visent à réduire la pollution de l'air dans les zones urbaines qui sont très régulièrement des sujets de débat enflammés. Et la simple évocation de la réduction de chez Ptelbovin dans un rapport récent de la Cour des comptes a provoqué un central, là aussi national. Et en parallèle, on a une diabolisation vraiment de... toutes les politiques publiques environnementales contraignantes, qui sont pourtant essentielles pour réussir la transformation écologique. Résultat, on a des droits traditionnels et libérales de la République en marche aux Républicains qui promeuvent de plus en plus une écologie qui serait uniquement incitative, qui n'affecterait pas les intérêts économiques ou le quotidien des Français, et qui réduit forcément la capacité de ces politiques à être vraiment efficaces sur le plan de la décarbonation et de la préservation de la biodiversité. Il faut bien comprendre que ce green blaming, ça marque une grande évolution dans le débat politique autour de la transformation écologique. On n'est plus du tout dans le fait de nier frontalement les crises environnementales, ce qu'on a appelé sur le plan du carbone le climato-négationnisme ou le climato-dénialisme.

  • Speaker #0

    Là, on est vraiment plutôt dans une instrumentalisation des conséquences sociales des politiques de transformation écologique. Donc c'est une stratégie qui est plus subtile, on n'est pas en train de contester la réalité des crises, en fait on ne conteste même pas souvent l'intérêt théorique de la transformation écologique, vous avez des partis de droite ou d'extrême droite qui disent bien sûr, le changement climatique c'est grave, il faut s'en préoccuper mais on attaque les modalités concrètes de la mise en œuvre de cette transformation écologique. Et derrière, comme je le disais dans le cas allemand, mais en fait c'est généralisable à l'ensemble des stratégies de crime blaming, on a une espèce de coalition informelle entre des droites et extrêmes droites européennes, une presse et des médias conservateurs, et puis aussi des regroupements industriels ou corporatistes, alors pas toutes les industries, mais en fait souvent des industries, notamment ceux qui ont raté les créneaux des technologies utiles à la transformation écologique, par exemple des industries automobiles européennes qui ont beaucoup misé sur le véhicule thermique, qui n'ont pas vu venir le besoin. d'électrifier les véhicules, et qui sont maintenant en concurrence avec des acteurs, notamment asiatiques, qui ont fait cette électrification beaucoup plus que eux, qui du coup, constatant que leur production actuelle est incompatible avec les prérequis de la transformation écologique, ils voient une menace pour leur modèle d'affaires. Et ce qui est encore plus triste, c'est qu'il y a d'autres acteurs qui peuvent occasionnellement se joindre à cette coalition, beaucoup plus ponctuellement, on voit même que parfois on a certains partis de gauche ou certains syndicats qui ont une volonté théorique de transformation écologique, mais qui s'opposent à des modalités concrètes de cette transformation. par exemple des parties de gauche qui s'opposent aux véhicules électriques ou à la baisse de la consommation de viande, là encore, suivez mon revient. Pour terminer, comment peuvent se manifester ces opérations de green living ? Il y a un exemple très intéressant qui a eu lieu en France dans... ces derniers mois, il y a eu, comme je le disais, une volonté du gouvernement qui a testé un peu dans le débat public l'idée d'interdire à terme l'installation de nouvelles chaudières au gaz, parce que le gaz fossile émet fortement de gaz à effet de serre dans le secteur du chauffage. Par ailleurs, on sait qu'on ne va pas avoir assez de biogaz pour pouvoir conserver autant de chaudières fossiles que ce qu'on utilise à l'heure actuelle. En face de ça, il y a une technologie qui marche plutôt bien. Il y a d'abord la rénovation thermique de bâtiments, première technologie, puis ensuite, il y a notamment l'usage de pompes à chaleur. qui est un moyen de chauffage basé sur l'électricité, qui est très efficace pour réduire la consommation d'énergie et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Dans tous les scénarios de transition écologique, les pompes à chaleur, d'ici 2050, ça doit représenter entre 30 et 65% des moyens de chauffage utilisés en France. Face à cette idée d'interdiction de nouvelles chaudières au gaz, il y a eu une mobilisation vraiment très forte des industriels de la filière gaz, des politiques de droite, mais aussi malheureusement de certaines ONG écologistes et de syndicats qui s'y sont opposés en critiquant, en remettant en question l'efficacité de ces pompes à chaleur. Alors il y a eu plein d'arguments mobilisés, j'en donne juste deux qui ont été vraiment violemment faux mais pourtant très mobilisés et qui restent encore un peu dans l'esprit de beaucoup. Le premier argument faux, c'est que les pompes à chaleur ne marcheraient pas quand il fait froid. Par exemple quand on a des températures en dessous de zéro. C'est vraiment une idée préconçue qui ne s'appuie sur aucune réalité. Des pompes à chaleur qui fonctionnent en dessous de zéro degré, c'est l'ensemble des pompes à chaleur notamment installées dans les pays du nord de l'Europe. Il faut savoir qu'il y a plusieurs pays du nord de l'Europe dans lesquels la proportion de pompes à chaleur par logement est parmi les plus élevées au monde. Je pense par exemple à la Norvège, plus de la moitié des logements sont chauffés par des pompes à chaleur en Norvège, dans lesquels le climat est beaucoup plus froid que la France. Et vous imaginez bien que les Norvégiens n'utiliseraient pas de pompes à chaleur. si jamais il ne pouvait pas se tromper avec en hiver. Et un autre argument faux, un peu iconique, c'est que les pompes à chaleur ne marcheraient pas dans des maisons mal isolées, et que de façon générale, dans des maisons mal isolées, une pompe à chaleur surdimensionnée, ça entraînerait des surconsommations d'électricité, une fois que la maison devient correctement isolée. Il est derrière, c'est de dire, tant que la maison est bien isolée, il vaut mieux remplacer une chaudière au gaz pour une autre chaudière au gaz que de passer à la pompe à chaleur. Et ça du coup, il y a plusieurs publications récentes qui ont montré que vraiment, on pouvait très bien utiliser une pompe à chaleur et se chauffer correctement, même dans une maison mal isolée, même si ce n'est pas du tout optimal, et que par ailleurs, on est capable de réduire la consommation d'électricité des pompes à chaleur, on est capable de les régler si on fait ces travaux de rénovation énergétique après avoir installé ces pompes à chaleur. et donc c'est vraiment important de se dire que même dans des maisons mal isolées il vaut mieux utiliser une pompe à chaleur, passer à la pompe à chaleur que repartir dans une chaudière au gaz qui va être utilisée pendant 20 ans et émettre des gaz à effet de serre pendant 20 ans donc pour conclure, de façon générale, ces campagnes de green blaming et on va avoir d'autres exemples sans doute avec l'interview suivante dans laquelle on va se localiser plus sur le cas du secteur agricole c'est en train d'entraîner un retour de bâtons écologiques dans toute l'Union Européenne Alors qu'on avait un enjeu écologique qui gagnait en importance dans le débat public et que même la plupart des droites, on en parlait avant, acceptaient la nécessité de la transformation écologique, on a maintenant des politiques concrètes de transformation écologique qui entraînent des oppositions de principe avec deux conséquences réelles, l'échec de projet écologique et la remise en question du principe même de contrainte. collectives nécessaires pour leur mise en œuvre. Et c'est pour ça qu'à construire l'écologie, on a essayé d'identifier cette nouvelle opposition, le green blaming, à travers d'autres exemples concrets que je ne détaille pas ici. La hausse du prix des véhicules qui serait liée à la transformation écologique et à l'électrification des véhicules. Les zones à faible émission qui ne seraient pas des politiques efficaces pour lutter contre la pollution de l'air. La lutte contre les passoires énergétiques qui serait à l'origine de l'explosion du prix des loyers. En fait, tout ça est très largement faux et instrumentalisé. Et ce qu'on a essayé... d'examiner plus en détail dans notre mode. Merci beaucoup Antoine, merci beaucoup Alban de m'avoir épaulé pour cet épisode.

Description

C'est au niveau européen que naissent bon nombre des normes qui ont et auront de plus en plus d’impact sur nos vies. La Politique Agricole Commune, les décisions sur les pesticides, le marché de l’énergie, le marché carbone...


L'UE s'est donné des objectifs audacieux avec le Pacte Vert Européen, incluant cette fameuse neutralité carbone d'ici 2050. Mais alors qu'en 2019 il était plutôt populaire, ce pacte est aujourd'hui sous le feu des critiques, à quelques jours des élections européennes qui éliront les députés pour siéger au Parlement.


Alors, quels progrès ont été accomplis d’un point de vue environnemental ces 5 dernières années et est-ce qu’il y a un risque que tout cela soit détricoté en cas de percée de la droite et de l’extrême droite lors de la prochaine mandature ? Voici les questions auxquelles on va essayer de répondre.


Merci à Albane Crespel et à Antoine Trouche pour leur présence.


Infos: https://linktr.ee/echangeclimatique

Contact: echangesclimatiques@gmail.com

Production: https://onetwo-onetwo.com/

Note Construire l’écologie : https://www.construirelecologie.fr/post/publication-de-notre-première-note

Note Institut Delors : https://institutdelors.eu/publications/pacte-vert-europeen-suite-ou-fin/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bien, bonjour à toutes et bonjour à tous, bienvenue dans ce nouvel épisode d'Échange climatique, un épisode consacré aux élections européennes qui auront lieu le 9 juin prochain. Un sujet pas facile à cerner, il faut dire que nous ne sommes pas aidés par les débats entre candidats où les voix s'enchevêtrent ou des termes barbares comme directive ou règlement sont régulièrement prononcés. Dans cet épisode, on va essayer d'y voir plus clair, on commencera par rappeler à quoi sert et comment fonctionne le Parlement européen. Ensuite, nous dresserons. Un bilan environnemental de la mandature qui s'achève. Et enfin, on se demandera s'il y a un risque de recul sur ces questions lors de la prochaine mandature. Pour cela, nous recevrons Fouque, Vinh, Nguyen, chercheurs sur les politiques françaises et européennes de l'énergie au sein de l'Institut Jacques Delors. Pour m'épauler, j'ai la chance d'être accompagné de deux chroniqueurs du collectif Construire l'écologie, Alban et Antoine. Salut à vous deux.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Alban Krespel travaille dans la transformation écologique dans le logement social et Antoine Trouche dans la suréfférence de la pollution de l'air. En deux mots, est-ce que vous pouvez expliquer ce que c'est que construire l'écologie ?

  • Speaker #2

    Oui, alors Construire l'écologie, c'est un collectif de professionnels de tous horizons, donc des chercheurs, des militants, des professionnels de la transition écologique, des personnes syndiquées de tous horizons qui sont impliqués dans la transformation écologique et qui a été lancée début 2024 avec la volonté d'élargir et de donner une voix à cette coalition d'acteurs de la transformation écologique pour créer des liens entre eux et pour porter... dans le débat public, une vision concrète, structurée et globale de la bifurcation écologique et des moyens de la réaliser. Et aussi de répondre aux personnes qui entendent saboter les ambitions écologiques par ce qu'on appelle le green blaming chez Construire l'écologie, mais on en reparlera plus tard. Et donc ça, ça se fait à travers des événements thématiques et des after-works réguliers.

  • Speaker #0

    Merci Alban, donc comme tu l'as dit Antoine nous partagera tout à l'heure une note de votre collectif du coup sur le green blaming, on comprendra plus tard ce que ça veut dire en détail. Mais avant ça moi je vais vous partager les actus des derniers jours qui ont attiré mon attention. Comme vous l'avez remarqué je ne demande pas de dons pour faire visite à cette chaîne et Youtube rapporte très peu d'argent. Si vous voulez tout de même m'aider vous pouvez vous abonner, c'est un gros coup de pouce pour la chaîne. Merci pour ça. Alors pour les actus que je vous ai réservés cette semaine, on va commencer par la France. Le 22 mai dernier, le Premier ministre Gabriel Attal s'est félicité de la baisse des émissions de CO2 du pays de 5,8% en 2023. Notre action paie a-t-il commenté sur X ? Alors est-ce que cette baisse est le fruit d'une action déterminée ou est-ce le résultat d'autres facteurs ? C'est ce que nous allons voir. Mais avant un peu de contexte, on ne parle ici que des émissions territoriales, celles que la France s'est engagée à réduire dans sa stratégie nationale bas carbone. Et c'est dans ce cadre que nous avons presque respecté notre objectif de réduction d'émissions sur la période 2019-2023. Objectif raté de peu, notamment parce que les puits de carbone ont capté moins que prévu. Le CIDPA, l'organisme indépendant chargé d'évaluer le sujet, nous explique que les sols et les forêts captent deux fois moins aujourd'hui que dans les années 2000, en raison de l'effet couplé de sécheresse à répétition, de maladies affectant... Le taux de mortalité des arbres et d'une hausse des récoltes de bois. Détaillons à présent cette baisse. La plus grosse contribution provient du secteur de l'énergie. On a brûlé moins de gaz et de charbon en 2023 par rapport à 2022 parce que l'électricité bas carbone fut plus abondante. D'une part, le nucléaire et l'hydraulique ont été plus disponibles et d'autre part, de nouvelles capacités de solaire et d'éolien ont été installées. C'est en partie la météo plus douce des mois de janvier et février qui a permis de faire baisser les émissions du secteur des bâtiments où la majorité provient. du chauffage au gaz et au fuel. Le CITPA met aussi en avant la sobriété et l'inflation des prix de l'énergie. Qui a fait quoi entre les deux ? Ça reste difficile à évaluer. L'inflation qui serait aussi en cause dans les autres secteurs, comme celui des transports, premier secteur émetteur en France, et de l'industrie. Les augmentations des prix des carburants à la pompe ont réduit les déplacements non contraints, tandis que la hausse des prix de l'énergie a fait baisser la production d'activités très émettrices, comme celle du ciment, de l'acier et de la chimie. Alors est-ce que cette hausse des émissions de la France est seulement un effet collatéral de l'inflation et de la météo ? Le CITPAM est quand même en avant des effets de moyen et long terme, comme le renouvellement du parc automobile par des voitures électriques, le report modal dans les transports, la rénovation thermique des bâtiments. Et précise que 2023 est une situation inédite, car tous les grands secteurs émetteurs ont baissé leurs émissions sans crise économique majeure. La question qui demeure, est-ce que nous arriverons à garder le rythme dans les prochaines années ? Il y a deux problèmes, comme le dit François Gemmette sur France Info. Le premier, c'est que nos puits de carbone sont de moins en moins efficaces, on l'a vu. Et le deuxième, c'est qu'on s'est fixé une trajectoire linéaire avec le même objectif chaque année jusqu'en 2030, sauf que l'on commence forcément par les émissions les plus faciles à réduire. Dans le secteur de l'énergie, par exemple, il reste peu de gaz et de charbon à éliminer. Donc il faudrait en réalité qu'on ait fait des baisses beaucoup plus marquées dès maintenant. Et j'ajouterais même un troisième problème, celui du désintéressement affiché de l'exécutif pour la cause, en témoignent les coupes budgétaires dans le ministère de la Transition. À l'étranger à présent, de vastes régions d'Asie ont connu des vagues de chaleur entre avril et mai, d'Israël, de Palestine, du Liban et de la Syrie à l'ouest, jusqu'à la Birmanie, la Thaïlande, le Vietnam et les Philippines à l'est, en passant par l'Inde et le Pakistan. Une étude du World Weather Attribution, qui évalue le rôle du changement climatique... dans les phénomènes météorologiques, nous apprend que pour chaque cas, ce dernier a rendu ces températures extrêmes plus probables et plus chaudes. L'organisation dresse une liste d'impacts, mort en nombre bien souvent sous-estimée, augmentation du nombre de déplacés et aggravation des conditions de leur vie comme à Gaza, chômage forcé pour les personnes travaillant à l'extérieur ou encore perte de récolte pour les agriculteurs. Autre dommage, la fermeture des écoles. Ainsi, ces 28 millions d'enfants qui n'ont pas pu aller étudier cette semaine rien qu'au Pakistan selon l'ONG Save the Children, mais ces fermetures ont aussi concerné la Thaïlande, le Bangladesh, les Philippines et l'Inde. La journaliste Marina Fabre-Soundron n'a pas hésité à parler de confinement climatique dans un article sur Novetic. Elle conclut son article avec cette phrase Sans réelle adaptation au changement climatique, de plus en plus de pays sont ainsi contraints de se confiner, mettant à mal leur liberté de déplacement ou d'accès à l'éducation, à vie à ceux qui brandissent l'expression écologie punitive à tort et à travers. Et pour terminer, je voudrais vous parler d'un article scientifique sorti récemment et qui ressemble à une bonne nouvelle. Dans les modèles, un facteur crucial est la sensibilité climatique. Elle mesure de combien la Terre se réchauffe pour une quantité de CO2 émise. En gros, c'est la réaction du climat à nos émissions. Pour la calculer, les scientifiques prennent en compte des boucles de rétroaction, l'observation du réchauffement historique depuis le début de l'industrialisation, des modèles statistiques ou encore l'analyse des climats du passé. Jusqu'à présent, cette valeur était très incertaine. Par exemple, selon le dernier rapport du GIEC, les politiques actuelles pourraient entraîner un réchauffement de 2,1 à 3,5 degrés, avec une estimation centrale à 2,7 d'ici la fin du siècle. Deux climatologues, dont un auteur du dernier rapport du GIEC, ont mené des recherches pour élire cette incertitude et viennent de publier le résultat. Ils montrent que la sensibilité du climat a été jusqu'à présent surestimée. En effet, dans les études précédentes sur le dernier maximum grêle... Sur le dernier maximum glaciaire il y a 20 000 ans, les géantes calottes glaciaires de l'émis mer Nord avaient un effet de refroidissement très important car elles produisaient des nuages bas dans les océans qui réfléchissaient à la lumière du soleil. La sensibilité y était donc élevée et a permis de conclure que celle d'aujourd'hui devait l'être aussi. Mais nos deux scientifiques ont découvert que ces boucles de rétroaction nuageuses sont uniques au climat de l'âge glaciaire et ne s'appliquent donc plus. C'est un peu technique, mais ce qu'il faut retenir, c'est que leur conclusion montre que les valeurs élevées de la sensibilité climatique sont moins probables qu'on ne le pensait. Leur estimation centrale reste la même, mais la borne haute est significativement réduite. En d'autres termes, 2,7°C à la fin du siècle est toujours aussi probable, mais le scénario à 3,5°C s'éloigne un peu. C'est une nouvelle plutôt rassurante, mais déjà ce n'est qu'une seule étude et cela ne change rien au fait que le niveau de réchauffement à la fin du siècle dépendra principalement de nos émissions futures. Si nos objectifs ne sont pas respectés, un réchauffement de plus 4 degrés n'est pas à exclure. Voilà pour mes petites actus. Antoine, Alban, est-ce que vous avez des réactions ? Est-ce que quelque chose vous a interloqué ?

  • Speaker #1

    Je veux bien commencer. Moi, par rapport à ta première actu, il y a un peu deux réactions vis-à-vis de cette baisse des émissions territoriales de la France et je les trouve toutes les deux aussi énervantes l'une que l'autre. Il y a une réaction un peu pavlovienne, notamment, malheureusement, dans pas mal d'ONG écolos de partie de gauche, qui consiste à dire, en fait, cette baisse, elle est liée uniquement à une météo un peu favorable, qui nous a fait consommer moins de carburant carboné pour le chauffage, et à... la souveraineté contrainte en fait, la hausse du coût de l'énergie. Moi je pense vraiment qu'il faut casser un peu cet argument-là, parce qu'on dit ça depuis au moins cinq ans, et qu'on regarde un peu sur ces dernières années, on a quand même eu une baisse nette, je ne parle pas vraiment sur la dernière année, mais sur ces dernières années, on a une baisse nette des émissions territoriales de la France, et c'est plutôt logique parce qu'on a des politiques de décarbonation qui ont été mises en place, pas toujours suffisantes, mais qui ont été mises en place. On va rappeler quand même que depuis les années 90, on a baissé de plus de 30% nos émissions territoriales, on a eu un impact conséquent. et on voit que notamment dans le bâtiment et dans l'énergie, on a des politiques structurelles, des sorts, des pompes à chaleur, des sorts des énergies renouvelables qui ont eu un impact conséquent sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre. Ce n'est pas que de la souveraineté civile ou l'impact de la météo. Après, l'autre position qui m'énerve un peu, c'est celle du gouvernement, qui dit que c'est formidable et vous voyez à quel point on est fort. Parce que comme tu l'as bien expliqué, on est sur un moment qui est plutôt un moment de reflux, à un moment où on est en train de couper dans les hausses. deux crédits qui étaient accordés au ministère de la Transition écologique, alors que là, ce qu'on a fait, ce n'est pas du tout exceptionnel. En fait, c'est à peu près ce qu'il faut faire chaque année d'ici 2030, si on veut atteindre nos objectifs climatiques. Et il faut encore accroître l'effort après 2030. Donc, on est à un moment où il faudrait plutôt se dire, c'est une bonne nouvelle. Par contre, ça ne présage pas du tout du fait qu'à l'avenir, on sera capable de rester sur la bonne trajectoire. C'est vraiment tout l'enjeu. Peut-être juste le tout dernier point important pour moi, donc on parle des émissions territoriales. Évidemment, il y a la question de, est-ce que quand on regarde l'empreinte carbone, si les émissions liées à nos imports, les résultats sont aussi bons ? Il faut bien comprendre que calculer les émissions importées, c'est très très complexe, c'est pour ça qu'on ne va pas avoir les résultats tout de suite. Ce qui est sûr, c'est que dans les derniers résultats qui ont été donnés par le ministère de la Transition écologique pour 2022, on avait une empreinte carbone par habitant qui stagnait depuis les années 2019. Donc en fait, on n'avait pas d'effort. qui étaient visibles depuis les années 2019. Donc ça, c'est plutôt inquiétant. C'est des données encore temporaires, parce que les données définitives, elles ne sont connues que dans quelques années. Mais c'est quelque chose qu'il faut surveiller, parce qu'évidemment, si on compense par nos imports les baisses d'émissions locales, on ne sera pas totalement gagnant.

  • Speaker #0

    Oui, je pense que tu as bien résumé les clivages des derniers jours. Abban, est-ce que tu veux rajouter quelque chose ?

  • Speaker #2

    Non, je pense qu'Antoine a dit la majorité de ce qu'on avait à dire là-dessus. Peut-être juste ajouter effectivement qu'il y a une partie de ces baisses qui sont des baisses... conjoncturelle, mais aussi une partie de baisse structurelle. Pour autant, effectivement, comme on l'a souligné dans une de nos dernières tribunes chez Construire l'écologie, ça ne signifie pas qu'il faut se reposer sur ses lauriers et prendre encore du retard sur la programmation pluriannuelle de l'énergie, la stratégie française énergie-climat, le plan d'adaptation nationale au changement climatique. On a des textes qui prennent un peu de retard et il ne faudrait pas que ça vienne... Comment dire ? entraver les efforts qui sont faits en la matière. Donc voilà, c'est le seul point que je voulais ajouter.

  • Speaker #0

    Merci à vous deux. On va passer maintenant à notre sujet du jour, qui est la politique environnementale de l'Union européenne. Quels progrès ont été accomplis d'un point de vue environnemental ces cinq dernières années ? Et est-ce qu'il y a un risque que tout cela soit détricoté en cas de percée de la droite et de l'extrême droite lors de la prochaine mandature ? Voici les questions auxquelles on va essayer de répondre. On va commencer par les sujets énergie et climat avec vous, Fouk, Vin et Nguyen. Bonjour. Bonjour. Je rappelle que vous êtes chercheur sur les politiques françaises et européennes de l'énergie au sein de l'Institut Jacques Delors. On va peut-être commencer par un rappel du fonctionnement du Parlement européen, parce que c'est quelque chose d'assez complexe. Est-ce que vous pouvez nous expliquer un petit peu comment ça marche ?

  • Speaker #3

    Oui, donc du 6 au 9 juin prochain et le 9 juin en France, on va être appelé aux urnes pour élire des eurodéputés, donc des députés européens. qui vont donc siéger à Bruxelles et à Strasbourg afin de discuter des futures ambitions climatiques de l'Union européenne. Le Parlement européen, qu'est-ce que c'est ? C'est donc 720 eurodéputés qui vont être élus afin justement de pouvoir très concrètement réfléchir sur l'ambition climatique de l'Union européenne vis-à-vis des objectifs 2030, 2040, 2050. À l'heure actuelle, ils disposent de ce qu'on appelle un pouvoir de co-décision, c'est-à-dire qu'au côté des États membres, enfin du Conseil, ils vont pouvoir réagir aux propositions qui sont mises sur la table par la Commission européenne. Donc la Commission européenne propose un texte de loi, et puis ce texte de loi ensuite est débattu de manière conjointe au sein du Parlement européen, donc au travers des commissions thématiques dans un premier temps, donc des commissions dédiées par exemple à l'énergie, à l'emploi, au commerce international. Et puis ces députés européens vont donc mettre en place des amendements, des compromis, pour justement en fonction de l'équilibre politique déterminer l'ambition du texte. Et puis ce texte sera à in fine voté au sein de ce qu'on appelle une plénière avec les 720 eurodéputés. Les États membres de leur côté font ce même travail, et puis lorsque les États membres ont déterminé une position de négociation, et que le Parlement a fait pareil, on va se réunir dans ce qu'on appelle des trilogues, qui vont réunir la Commission européenne, le Parlement européen et les États membres, pour tenter d'obtenir des compromis. Une fois qu'on a obtenu ces compromis, le texte de loi sera ensuite validé encore une fois par le Parlement européen, puis par les États membres. Et puis il prendra forme une fois que tout ça aura été validé. Tout ça pour dire que c'est un processus qui est assez chronopage. On reproche souvent à l'Union européenne de mettre beaucoup de normes en place, mais en réalité ces normes, elles mettent du temps. à être mis en place parce qu'il faut obtenir des compromis texte par texte et qu'aucune majorité n'est évidente au sein du Parlement européen. Et c'est ce qui permet de garantir un respect des équilibres politiques de manière générale. Une fois qu'on a dit ça, le Parlement européen a d'autres pouvoirs. Il a également un pouvoir d'adoption du budget annuel de l'Union européenne, ce qui n'est pas rien, et du budget pluriannuel de l'Union européenne. Il a également aussi, et c'est là où ça sera très important, le rôle d'avaliser, de voter pour le ou la future présidente de la Commission européenne. C'est-à-dire qu'en réalité, à partir du moment où le futur président de la Commission européenne devra être avalisée par le Parlement européen, eh bien, elle devra donner des gages vis-à-vis de ce dernier et respecter l'équilibre politique qui va ressortir des élections du 6 et du 9 juin prochain. Dit autrement, à partir du moment où personne n'a la majorité absolue au sein du Parlement européen, vous devez donner des gages aux sociodémocrates, aux partis populaires européens, et on y reviendra dessus par la suite, pour faire en sorte justement d'avoir un équilibre politique qui tienne la route.

  • Speaker #0

    Tu l'as dit, je pense que le maître mot c'est compromis. Antoine, tu avais une question sur le poids du Parlement dans les décisions.

  • Speaker #1

    Oui, exactement. Là, on va donc voter pour le Parlement. Les autres organes de l'Union européenne, en fait, on a directement voté pour eux lors des élections législatives. Moi, la question que je me pose, c'est en fait, à la fin, dans les concertations et dans les équilibres qui sont trouvés entre notamment le Parlement et le Conseil de l'Europe, en fait, qui gagne un peu à la fin ? et comment se fait le rapport de force dans le sens où sur les textes de les pouvoirs, j'ai eu l'impression, mais c'est peut-être une impression erronée, que le Parlement assez systématiquement tendait à essayer de rehausser l'ambition des textes qui étaient proposés initialement, et que le compromis à la fin se rapprochait quand même plus de la proposition initiale du Conseil que de la position sur laquelle le Parlement s'est rencontré. Donc voilà, est-ce que c'est juste et comment se fait ce rapport de force ?

  • Speaker #3

    Exactement. Déjà, une précision qui montre la difficulté de tout ça, c'est que tu as parlé du Conseil de l'Europe, ce n'est pas le Conseil de l'Europe, c'est le Conseil de l'Union Européenne. Le Conseil de l'Europe, c'est autre chose liée à la CEDH notamment, mais l'idée étant vraiment de dire que le Conseil de l'Union Européenne, c'est les représentants de chaque état, chaque ministre qui a le droit au dossier. Dit concrètement, en France par exemple, Roland Lescure, qui est un ministre lié à l'énergie, eh bien… C'est lui qui va siéger avec ses 26 autres homologues pour déterminer la position du Conseil de l'Union européenne sur les questions énergétiques. Une fois qu'on a dit ça, qui est-ce qui va gagner remporter les arbitrages ? Tu l'as très bien expliqué, le Parlement européen sera toujours celui qui va tenter de rehausser l'ambition vis-à-vis de la proposition de la Commission européenne. Prenons un exemple très concret sur la directive énergie renouvelable. C'est le Parlement européen qui a fait en sorte de se positionner sur un objectif de 45%. Les États membres étaient un peu plus frileux, ils baissaient pour cette ambition. Et au final, on a tranché entre les deux, on a fini sur un objectif de 42,5%. Tout ça pour dire que ça, c'était la position entre 2019 et 2024. Ça ne sera pas forcément la position qui va rejaillir des élections européennes, puisqu'on y reviendra. par la suite, on aura vraisemblablement un Parlement européen plus à droite, donc vraisemblablement moins ambitieux sur les questions climatiques. Et puis, il faut aussi rappeler une chose, c'est que le Parlement européen se bat beaucoup pour avoir un droit d'initiative, c'est-à-dire pouvoir mettre à l'agenda un certain nombre de questions. Il ne dispose pas à l'heure actuelle de ce droit d'initiative, et c'est éventuellement une réforme institutionnelle qui pourrait être menée dans les années à venir pour justement permettre d'avoir une forme de démocratie plus directe. Tu l'as très bien dit, on vote directement pour ces eurodéputés. Par contre, on ne vote pas pour les ministres qui composent le Conseil de l'Union européenne. Et donc là-dessus, pour avoir une forme de rééquilibrage et faire en sorte que les citoyens aient droit... sur les dossiers qui vont être discutés au niveau européen, on pourrait tenter de faire en sorte de renforcer le pouvoir du Parlement européen sur les années à venir. C'est toutes les questions qui se posent de manière plus générale, mais ça implique également éventuellement une réforme des traités qui requiert derrière l'unanimité des 27, ce qui est évidemment très compliqué à obtenir au niveau européen.

  • Speaker #0

    Comme on a commencé à évoquer le sujet des partis faux, est-ce que tu peux juste nous poser un peu les bases s'il te plaît ?

  • Speaker #3

    Jusqu'à 2019, C'était une alliance qui était composée de ce qu'on appelle le Parti Populaire Européen, donc la droite européenne, les Républicains en France, avec les sociodémocrates, le Parti Socialiste en France, qui jusqu'à présent détenaient la majorité absolue. qui permettait donc en fait, lorsqu'ils votaient ensemble, de gagner les amendements, de remporter les textes et d'imposer un peu, entre guillemets, leur vision. En 2019, pour la première fois, on a eu une situation toute nouvelle qui a fait que le Parti populaire européen et les sociodémocrates à eux deux n'avaient pas la majorité absolue. Ils ont dû chercher un troisième parti pour pouvoir justement opérer une alliance. C'est donc naturellement qu'ils se sont retournés vers les libéraux. donc en France c'est l'équivalent d'Emmanuel Macron, et au niveau européen il s'appelle Renew, ces libéraux étaient ce qu'on appelle les faiseurs de roi et permettaient d'obtenir une majorité absolue au sein du Parlement européen. Et donc en fonction des textes, ils pouvaient décider d'avoir une ambition, on va dire notamment sur les climatiques, plus ambitieuse, ou alors au contraire tenter de diminuer l'ambition en fonction de leur doctrine. Et puis il y a d'autres groupes, politique au sein du Parlement européen. Il y a donc les Verts européens qui ont connu une percée assez importante en 2019. suite notamment aux mobilisations climat pour faire en sorte justement de pouvoir tenter de peser au sein du Parlement européen. Il y a ce qu'on appelle la GUE, qui est entre guillemets l'extrême gauche qui correspond à la France insoumise au sein du Parlement européen, qui a environ une quarantaine de membres. Et puis de l'autre côté de l'échec qui est politique, il y a ce qu'on appelle les conservateurs européens, ICIER, qui correspond au parti de Giorgia Meloni en Italie. En France, c'est plutôt Éric Zemmour, mais c'est un peu moins représentatif, il faut rester vraiment sur la logique de Thierry Jameloni au niveau européen. Et puis, ce qu'on appelle l'extrême droite, donc identité-démocratie, qui est composée notamment du Rassemblement National en France. Vis-à-vis de ce parti d'extrême droite, il y a ce qu'on appelle un cordon sanitaire. Je pense que c'est important de le rappeler parce qu'à la différence de la France, ce cordon sanitaire fait en sorte qu'on ne croit pas de poste à responsabilité à l'extrême droite au niveau européen. Dit autrement, en France, Sébastien Chénu est vice-président de l'Assemblée nationale. Au niveau européen, il est impossible qu'une personne qui appartienne au groupe d'identité et démocratie obtienne... Un poste de caisseur au niveau du Parlement européen, un poste de vice-président du Parlement européen ou un poste de président d'une commission au niveau du Parlement européen. Ça, c'est très important parce qu'en fait, ça va déterminer également la lecture politique une fois que les élections seront terminées. On sera sur une recherche d'une alliance entre les groupes du Parti populaire européen, des sociodémocrates, des libéraux, éventuellement des conservateurs ou alors des verts. Mais l'extrême droite sera très clairement ostracisée au sein du Parlement européen.

  • Speaker #0

    Juste une dernière question sur le fonctionnement avant de rentrer dans le cœur du sujet. Quelle est la répartition des responsabilités entre États membres et Union européenne en termes d'énergie, du climat, en d'autres termes, qui décide entre la France et l'Union européenne sur sa politique énergétique ?

  • Speaker #3

    Article 194 TFUE du traité de fonctionnement de l'Union européenne, si on revient à la base, qui fait qu'en fait, il y a sur un certain nombre de dossiers... la possibilité pour les États membres de conserver un regard sur, par exemple, leur mix énergétique. Donc là-dessus, l'Union européenne ne va rien nous imposer. Par contre, un certain nombre de décisions qui sont prises au sein de l'Union européenne, par exemple lorsqu'on détermine des objectifs sur les énergies renouvelables, vont avoir une conséquence très directe sur la manière dont on va devoir déployer ça en France. Donc vraiment, on est sur une logique de compétences partagées. avec un impératif qui est quand même nécessaire sur des questions par exemple de fiscalité, les États membres conservent également un droit de regard. Et puis de manière plus générale, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'à partir du moment où, et on l'a vu avec la guerre en Ukraine, on arrive à se mettre d'accord au niveau européen sur des objectifs communs, par exemple sur un objectif de réduction de la consommation de gaz, et bien il y a ensuite une forme de translation au niveau national, c'est-à-dire que le niveau national va appliquer autant que faire se peut. et en fonction de ses propres considérations. C'est-à-dire que si vous êtes un grand consommateur de gaz, vous allez diminuer vos objectifs de manière plus significative que si vous êtes un pays qui, traditionnellement, ne consomme pas de gaz. C'est un peu la répartition, pour être très schématique, entre les compétences européennes et les compétences des États-Unis.

  • Speaker #0

    Ok. Donc, on va se jeter dans le cœur du sujet. On va commencer par le... L'énergie et le climat, je le dis en intro, en 2019 a été signé le pacte vert qui vise à reformer l'ensemble des secteurs de l'économie européenne grâce à plus de 75 textes législatifs. Concernant la réduction des gaz à effet de serre, il y a le paquet Fit for 55. Est-ce que tu peux nous expliquer ce que c'est, s'il te plaît, Fouque ?

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Donc le Fit for 55, qui a justement l'objectif 55, si vous voulez le traduire en français, c'est l'objectif de réduire de 55% nos émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990. Une fois qu'on a dit ça, on a opéré une forme de réforme législative qui va tenter de repenser la manière dont on produit, dont on consomme, dont on se déplace, et qui va toucher au quotidien très concret des Français. C'est par exemple la mesure la plus emblématique, la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, mais vraiment, je voudrais insister sur la logique systémique de cet ensemble-là. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on a... on met fin au véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, on va en même temps mettre en place un règlement pour favoriser l'essor des bornes de recharge tous les 60 km, on va en même temps favoriser avec une directive dédiée la promotion des énergies renouvelables pour favoriser l'électrification, justement parce qu'on va promouvoir le 100% électrique. Et donc là, c'est vraiment une logique d'ensemble qui fait que tout ça a été pensé de manière concrète et conjointe. On ne peut pas donc déterminer et singulariser une seule mesure, on doit vraiment réfléchir ça de manière collective, pour faire en sorte justement qu'à l'horizon 2030, on réduise de 55% nos émissions de gaz à effet de serre. Il y a d'autres mesures qui sont mises en place, on va sûrement y venir dessus par la suite, mais... il faut vraiment insister sur le fait que désormais, on s'est doté d'objectifs très concrets à l'horizon 2030. Donc ça, c'est ce qu'a fait l'Union européenne et c'est ce qu'essaie de faire le mieux, c'est-à-dire réglementer. Et désormais, en fait, on s'ouvre sur une nouvelle face, c'est-à-dire la mise en œuvre au niveau national et puis la détermination des objectifs pour l'horizon 2040. Mais ça, on y reviendra dessus par la suite.

  • Speaker #0

    L'Union européenne, c'est aussi un marché du carbone qu'on nomme aussi ETS1 pour les intimes. Alban, est-ce que tu avais une question sur ce sujet ?

  • Speaker #2

    Oui, effectivement. L'Union européenne s'est dotée d'un premier système d'échange des quotas d'émissions en 2005. Est-ce que ce fameux marché carbone, qui est un pilier important de sa stratégie en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, est-ce que tu pourrais nous dire comment il fonctionne, à quel secteur d'activité il s'applique, et est-ce qu'aujourd'hui on sait s'il a eu un impact sur les émissions de gaz à effet de serre européennes ?

  • Speaker #3

    Oui, concrètement, le marché carbone européen, c'est l'application du principe polyurépaire. C'est-à-dire que pour les industries et pour les producteurs d'électricité, à partir du moment où vous émettez une tonne de CO2, vous allez payer l'équivalent d'un prix carbone. Ce prix carbone est déterminé selon des lois de marché. Et jusqu'en 2018-2019, ce prix carbone était très faible, il était autour de 5 euros la tonne de CO2, ce qui était en fait assez rédhibitoire parce qu'il n'était pas utile pour envoyer un signal prix. On a opéré des réformes et en fait, à partir du moment où le prix carbone a augmenté, a atteint notamment un prix autour des 30 euros la tente de CO2, il a bouleversé ce qu'on appelle l'ordre de mérite au niveau européen, c'est-à-dire qu'il a permis de renchérir la production d'électricité à partir de charbon. pour la rendre non compétitive vis-à-vis de la production d'électricité produite à partir de gaz. Et ça, c'est très significatif d'un point de vue des émissions climatiques. Pourquoi ? Parce que produire de l'électricité à partir du charbon, c'est deux fois plus émetteur que produire de l'électricité à partir du gaz. Donc, à partir du moment où on avait un prix carbone autour des 30 euros la tente de CO2, il était plus rentable économiquement de produire de l'électricité à partir du gaz. Et donc ça, ça a eu un effet très concret sur la réduction des émissions de CO2 au niveau européen. sur les dernières années. Et puis, les industries également étaient soumises à ce prix carbone. Sauf que les industries, elles bénéficiaient, elles bénéficient d'ailleurs toujours de ce qu'on appelle des allocations gratuites, c'est-à-dire des droits à polluer, qui sont octroyés par le système afin de faire en sorte justement d'opérer une transition au sein du secteur industriel et d'éviter que la transition soit trop abrupte et que cela renchérisse les coûts pour l'industrie de manière trop conséquente.

  • Speaker #0

    On a opéré des modélisations et on a opéré également des reporting. On s'est rendu compte que l'industrie comparée au secteur de la production d'électricité avait baissé de manière beaucoup moins drastique ses émissions de gaz à effet de serre justement parce qu'elle avait trop d'allocations gratuites qui faisaient qu'elle avait donc trop de droits à polluer de manière gratuite. On a donc opéré une réforme au sein du fameux Fit for 55 pour faire en sorte que d'ici 2030, d'ici 2035, on diminue très concrètement les allocations gratuites qui étaient données à ces industries pour faire en sorte de les inciter au travers du prix carbone à investir dans la recherche et le développement pour faire en sorte de verdir leur industrie. Et donc là, on est vraiment sur un marché carbone qui va faire en sorte, sur un horizon de temps 2030-2035, d'orienter les comportements des industriels et de renchérir leurs coûts de production et donc de les inciter à opérer une décarbonation au travers soit de l'électrification, soit... le remplacement au travers notamment par exemple de l'hydrogène vert pour faire en sorte justement d'être vertueux d'un point de vue des émissions de gaz à effet de serre. Et puis ce marché carbone, il doit se penser de manière un peu plus systémique, on revient dessus par la suite, avec un mécanisme qui a été mis en place au niveau européen au travers du feed for feed-file, c'est ce qu'on appelle le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, ce que les politiques vont vulgariser en taxes carbone aux frontières, qui font en sorte que... Puisqu'on va renchérir nos coûts de production au niveau européen en mettant un prix carbone, et donc on va faire en sorte que l'acier soit plus cher à partir du moment où il est produit dans des conditions peu vertueuses, on va faire en sorte que lorsque l'acier est importé par exemple de Chine, on renchérisse cette importation avec un prix carbone à partir du moment où il franchit la frontière, pour faire en sorte qu'il y ait ce qu'on appelle... en anglais un level playing field, une forme de compétition équitable entre l'acier qui est produit en Chine à partir du charbon et l'acier qui va être produit en France ou en Europe à partir d'énergies renouvelables, du nucléaire ou du gaz, pour faire en sorte justement que cet acier soit assez compétitif à partir du moment où il est produit dans des conditions assez peu environnementales. en Chine pour faire en sorte justement d'avoir une compétitivité au niveau européen vis-à-vis nos partenaires internationaux.

  • Speaker #1

    Ce mécanisme d'ajustement aux frontières, est-ce qu'il est satisfaisant aujourd'hui ou est-ce qu'il faut le renforcer ?

  • Speaker #0

    Alors, il va être mis en place au niveau européen, donc on est vraiment dans sa toute première itération. Donc il est encore dans ses balbutiements et il va, il faut être très pragmatique, il va y avoir, je pense, des trous dans la raquette, c'est-à-dire qu'on ne pourra pas faire en sorte de pouvoir à l'heure actuelle couvrir l'ensemble des émissions. Il s'applique à un nombre très réduit de secteurs, l'électricité, l'acier, le fer notamment. Donc il faut être très prudent, mais il va monter en puissance d'ici à l'horizon 2035 pour faire en sorte justement de protéger l'industrie européenne. Donc il va falloir travailler main dans la main avec les industriels pour identifier là où il y a encore des manques. Il va également faire en sorte de rendre le mécanisme entre guillemets le plus simpliste possible parce que ça va rajouter des charges pour les industriels, des charges déclaratives. pour toujours monitorer leur production, également faire des reporting auprès de la Commission européenne. Mais très concrètement, c'est un instrument qui a pour objectif de rééquilibrer la balance commerciale et rééquilibrer le rapport de force vis-à-vis des partenaires internationaux. Et puis, il faudra également être très précautionneux, parce que là, la manière dont on présente, c'est vraiment un rapport de force vis-à-vis de la Chine, un rapport de force vis-à-vis d'autres pays comme la Turquie, les États-Unis, mais ça va avoir également des conséquences internationales vis-à-vis d'autres pays. à des pays tiers, comme par exemple des pays africains, qui nous exportent à l'heure actuelle, par exemple, des denrées, l'aluminium, etc., et qui représentent un poids très important dans leur balance commerciale. Donc là-dessus, vu que c'est des pays en développement, on peut s'alarmer du fait que ce mécanisme-là pourrait avoir des conséquences assez délétères, parce que c'est une rentrée d'argent financière très importante pour eux, qui peut ensuite permettre... leur développement et faire en sorte vraiment de calibrer ça en fonction des partenaires internationaux qui sont concernés. Et tout ça doit se faire également dans le respect des règles de l'OMC. Donc une fois que j'ai dit tout ça, tu te rends bien compte que c'est assez compliqué de mettre en place un mécanisme sur le très court terme qui soit très très complet.

  • Speaker #1

    C'est clair, c'est un gros sujet. Antoine, tu avais une question sur une autre norme, sur une autre directive ?

  • Speaker #2

    Oui, parce qu'on parle beaucoup en Europe et à raison de tout ce qui a été fait sur les transports, notamment l'interdiction à la vente des véhicules thermique neufs à partir de 2035. Il y a une autre directive qui, j'ai l'impression, est beaucoup moins bien connue qui est la directive sur l'efficacité énergétique des bâtiments et qui est une directive qui est en fait assez dure parce que dans… vraiment de façon très… En général, c'est une directive qui va avoir un impact très fort sur les moyens de chauffage qu'on va avoir le droit d'utiliser dans les bâtiments en Europe à partir de 2030. et encore plus tôt pour les bâtiments publics à partir de 2021, si je ne me trompe pas. Et c'est une directive encore plus dure sur les efforts qu'il va falloir faire pour réduire la consommation d'énergie des bâtiments, parce que si je ne me trompe pas, ça fait partie des bâtiments, ça fait vraiment partie des secteurs dans lesquels, notamment grâce à la rénovation thermique, on peut le plus économiser de l'énergie, le plus facilement, avec plein de guillemets, parce que ce n'est même pas si simple que ça. Donc est-ce que c'est possible que tu nous en parles un peu plus ? Oui,

  • Speaker #0

    complètement. On a donc un objectif contraignant au niveau de l'Union européenne qui a été adopté, pour réduire vraiment de 11,7% les objectifs d'efficacité énergétique. Je souligne vraiment 11,7% parce que ça te montre le degré de granularité de l'Union européenne. Vraiment, quand on parle de compromis, c'est qu'on va le négocier à la virgule près. C'est-à-dire qu'un certain propose 12,5%, d'autres proposent 12%, et bien on va parfois trancher entre les deux, on va arriver à 11,7%. Et ça en fait, pourquoi est-ce qu'on met en place ce principe d'efficacité énergétique ? C'est qu'on va tenter de donner la priorité à cela parce que... On s'est rendu compte de manière très concrète que les bâtiments qui vont être construits aujourd'hui, ils vont être encore là pour les années, les décennies à venir, d'ici 2100. Donc en fait, le premier objectif, il est de faire en sorte que dès que tu construis un bâtiment, il soit bas carbone, pour faire en sorte justement d'optimiser la consommation d'énergie, dans une logique d'efficacité énergétique. Et puis après, on va mettre en place la rénovation énergétique des bâtiments, pour faire en sorte justement... de minimiser la consommation d'énergie et, quand et, de faire d'une pierre deux coups, si je permets, c'est de sortir les personnes de la situation de précarité énergétique. Au niveau européen, selon les estimations à l'heure actuelle, 34 millions de personnes sont encore en situation de précarité énergétique. Donc à partir de là, l'objectif est de dire qu'on va rénover les bâtiments pour faire en sorte d'éviter de brûler trop de gaz pour se chauffer et en même temps, on va améliorer le quotidien des Européens. C'est ça l'objectif sous-jacent de la directive sur l'efficacité énergétique. Pour ce faire, on s'est doté d'une trajectoire qui est très ambitieuse de réduction d'annuelles d'économies au niveau national, qui vont doubler entre 2028 et 2030, et qui vont imposer aux États-Unis un rythme très fort de rénovation énergétique des bâtiments. Une fois qu'on a dit ça, et tu le rappelais tout à l'heure, ça va rentrer en contradiction directe. Avec l'austérité budgétaire qui pointe son nez au sein des états membres. Pourquoi ? Parce que rénover des bâtiments, c'est extrêmement coûteux. Et donc là-dessus, même avec l'ensemble des aides qui sont mises en place au niveau européen, déjà ça prend du temps, les aides ne sont pas souvent de manière très claire et donc il faut opérer une forme de démarchage, etc. Et puis derrière, il faut engager énormément d'emplois. Et donc la question qui se pose, c'est comment est-ce qu'on va derrière aussi soutenir les ménages pour faire en sorte d'opérer cette rénovation énergétique des bâtiments. Il y a des mécanismes qui ont été mis en place au sein du FITFACTIFAC, notamment ce qu'on appelle un fonds social climat, on reviendra dessus par la suite, d'aider les ménages à faire cela, mais il faut être très concret sur le fait que le retour sur investissement se fera sur le moyen long terme, alors que l'impératif et la contrainte économique, elle pèsera immédiatement sur les ménages. Et donc là, on est vraiment sur... résoudre cette fameuse équation entre fin du mois et fin du monde. Évidemment, les factures énergétiques ont extrêmement augmenté avec les conséquences de l'inflation qui sont nées de la guerre en Ukraine, mais si on ne débloque pas des schémas pour permettre justement d'opérer ces rénovations énergétiques des bâtiments et qu'on n'acte pas le fait qu'on doit apprécier ça sur le moyen long terme, ça c'est le rapport Pisaniféré qui a été mis en France, eh bien, on ne pourra pas opérer cette transformation au niveau national et au niveau européen de manière

  • Speaker #1

    Puisqu'on revient inexorablement sur cette question du financement, est-ce que tu peux nous parler de ce Fonds Social Climat, s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, le Fonds Social Climat, c'est la contrepartie de l'extension du marché carbone européen. Tout à l'heure, avec Alban, on parlait du marché carbone européen, l'ETS, qui portait sur les industries et sur la production d'électricité. Ce marché carbone européen va être étendu en 2027 aux bâtiments et aux transports. des particuliers notamment. C'est-à-dire qu'en fait, ça va très concrètement renchérir d'une certaine manière, il faut être très concret, la structure de tout un chacun pour faire en sorte justement d'orienter les comportements. À partir du moment où on aura des transports routiers, par exemple les voitures individuelles, les bus ou les bâtiments, le chauffage résidentiel et commercial, qui vont être taxés, Il faut mettre en place, de manière parallèle, un fonds pour justement permettre aux personnes de sortir de cette situation. où leurs voitures individuelles, leurs bâtiments sont taxés en rénovant les bâtiments, en passant aux véhicules électriques. C'est tout l'intérêt du Fonds social climat. Le Fonds social climat, ça va être un fonds de 65 milliards d'euros sur la période 2026-2032 au niveau européen, pour faire en sorte justement... d'aider les ménages à sortir du véhicule thermique, à rénover leurs bâtiments. Ce fonds européen va être alimenté directement par les États-Unis et également par les revenus du nouveau marché carbone européen. Il aura pour objectif de financer les rénovations énergétiques des bâtiments, de financer les bandes de recharge, de financer le passage aux véhicules électriques, de financer le leasing social qu'on a mis en place en France qui jusqu'à présent a fait preuve d'une certaine forme d'engouement, ce qui est une bonne chose. pour justement magnifier les politiques publiques qui sont menées au niveau national. Mais ce Fonds social pour le climat, il faut être très clair là-dessus, et on le voit avec l'exemple français, où lorsqu'on doit faire des économies budgétaires, la transition énergétique est celle qui va le plus trinquer, qui est le plus mis à contribution avec le Fonds vert ou encore la prime rénov', le Fonds social climat ne devra pas justement compenser le fait qu'on sera dans une situation de... d'austérité budgétaire au niveau national. C'est-à-dire qu'il faudra augmenter les moyens donnés à la rénovation énergétique et des bâtiments. Le Fonds social pour le climat ne devra pas seulement compenser la baisse qu'on pourrait tenter d'être observée au niveau national. Et donc là-dessus, la question qui se pose, c'est comment est-ce qu'on va permettre également de protéger les plus vulnérables ? Parce que les plus vulnérables seront les plus exposés à ce nouveau marché carbone européen. Marché carbone européen qui, si les prix... de l'énergie venait à être trop élevé ne serait pas lancé en 2028, mais en 2028. Là où le Fonds social climat serait lancé en 2026, c'est-à-dire préalablement, pour tenter justement de permettre d'opérer en amont un changement de comportement et un changement dans le quotidien des Français.

  • Speaker #1

    Pour parachever ce panorama des nouveautés, tu voulais nous parler de la réforme du marché de l'électricité. Alors évidemment sans rentrer dans trop de détails parce qu'il faudrait 4-5 épisodes, mais est-ce que tu peux nous parler des enjeux s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, je voulais parler de cette réforme parce que c'est quelque chose qui est très significatif de ce qu'on a réussi à faire au niveau européen à très très court terme, c'est-à-dire dans l'urgence. et en même temps ce qu'il faudrait faire au niveau européen sur le moyen d'en faire. Dit concrètement, hier en Ukraine, on a eu une explosion des prix de l'électricité pour une raison très simple, c'est qu'au niveau européen, 20% de l'électricité est encore produite à partir de gaz. À partir de ce moment-là, et du fait que l'électricité ne se stocke pas, la manière dont fonctionne le marché européen, c'est de dire que À partir du moment où on a des pics de consommation, lorsque l'on rentre chez soi le soir pour produire de l'électricité, ou le matin lorsqu'on se réveille et qu'on fait marcher la machine à café, on a donc des pics de production d'électricité, et que pour répondre à ces demandes d'électricité, il faut activer des centrales à gaz, sinon on n'a pas assez d'offres pour répondre à la demande, et on est dans une situation de blackout au niveau européen. Donc à partir du moment où les prix du gaz avaient été multipliés par 10, cette translation-là s'opérait sur les prix de l'électricité. On a donc opéré une réforme dans l'urgence, vraiment, pour tenter de décorréler les prix du gaz des prix de l'électricité. On peut discuter... une année de est-ce que ça marchera ou ça marchera pas ? mais on a fait ça dans l'urgence et on a fait ce que l'Union Européenne ne sait pas bien faire en réalité, c'est légiférer dans un temps très court. Parce qu'en fait, on n'a pas le temps d'opérer des études d'impact, on n'a pas le temps également de prendre en compte toutes les considérations sociotechniques et les implications que ça aura sur les citoyens. Donc en fait, on a fait quelque chose, on a opéré, on a fait un pansement, on va dire, pour faire en sorte de réformer ce marché européen de l'électricité. Mais ce marché européen de l'électricité, il va falloir le réformer également de manière plus générale à l'horizon 2024-2029 pour intégrer une chose très concrète, c'est que selon les modélisations de la Commission européenne, à l'horizon 2030, 70% de notre électricité sera produite à partir des énergies renouvelables. Et ça, le marché européen de l'électricité qui est designé à l'heure actuelle, il n'est pas prêt pour ça. Et ça te montre en fait tout l'enjeu de ce qui se passe au niveau européen, c'est qu'on pense le moyen long terme. on ne pense pas forcément le court terme. Par contre, lorsqu'on doit penser le court terme, c'est qu'on est dans une situation de crise. C'est ce qu'on a fait avec les nombreuses déclarations, notamment de nos dirigeants politiques, qui ont utilisé le marché européen de l'électricité comme étant un bouc émissaire pour expliquer une partie de la hausse des factures. Même si, en fait, une fois la réforme est passée, on est resté sur le même mécanisme de formation des prix de l'électricité au niveau européen. Donc, on a beaucoup tapé dessus, mais en réalité, on est resté sur une logique très... européennes sur ces questions-là. Et cette logique européenne, il faudra la pousser plus loin, mais la pousser plus loin lorsqu'on n'aura pas une forme de pression politique là-dessus. Et c'est ça, en fait, le pacte vert européen. C'est qu'on a travaillé pendant cinq ans presque en sous-main. C'est-à-dire qu'on n'entendait pas parler du pacte vert européen. Et de manière très paradoxale, la première fois qu'on a entendu parler du pacte vert européen, c'est quand il y avait la colère des agriculteurs. C'est quand il y avait des agriculteurs dans la rue pour justement dénoncer, d'une certaine manière, le pacte vert européen. qui ont été votés dans ce pacte européen sur le volet agricole ne sont même pas mis en place. Donc c'est une question aussi de récit derrière. C'est vraiment une question de comment est-ce qu'on est capable de déployer un récit vis-à-vis de ce pacte européen qui à l'heure actuelle a été amalgamé par une certaine partie de la classe politique et a même été instrumentalisé en amont des élections européennes.

  • Speaker #1

    Et c'est loin d'être nouveau. On peut dire que globalement, cette mandature a été assez productive d'un point de vue environnemental. Quel bilan tu tirerais ? Peut-être nous parler aussi de ce qui n'a pas marché.

  • Speaker #0

    Sur les questions de l'énergie, sur les questions du transport, on a fait énormément et là on peut considérer que c'est un succès. On a parlé depuis tout à l'heure énergie renouvelable, fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. Il y a tout un tas de mesures qui ont été adoptées au niveau européen et qui sont vraiment dans la lignée de l'atteinte de nos objectifs à l'horizon 2030. Sur la question environnementale, par contre, on a eu des reculs très forts. En tout cas, on a eu des bémols très forts qu'on vient de mentionner. notamment en amont des élections européennes. C'est-à-dire que sur la loi sur la restauration de la nature, qui permet de protéger l'écosystème, si je suis vraiment très simpliste, on a eu une reculade vis-à-vis de la proposition de la Commission européenne. Tout à l'heure, je te parlais du fonctionnement de la Commission européenne. La Commission européenne a mis en place une proposition. Cette proposition a été édulcorée au sein du Parlement européen. ce qui veut dire qu'en fait les groupes de droite du Parlement européen ont diminué l'ambition initiale qui avait été mise sur la table par la Commission européenne et ça c'est assez rare pour être souligné, c'est-à-dire qu'en fait on a diminué l'ambition parce que on avait peur des conséquences électorales que cela pourrait avoir le 9 juin prochain Même sujet avec un règlement sur les pesticides. La Commission européenne propose un règlement sur les pesticides, la droite européenne détricote ce règlement-là. à un point tel que le Parlement européen rejette le règlement et renvoie la balle dans le camp de la Commission européenne. Sur ces questions environnementales, on a eu un vrai recul sur la dernière année, justement parce qu'on s'est rendu compte qu'on était peut-être, avec la colère des agriculteurs, sous le coup d'une trop forte émotion, sous une trop forte récupération politique. Et c'est peut-être le risque des élections européennes. du 9 juin prochain, c'est que d'une certaine manière, on va avoir une forme de projection, si on se projette, selon les dernières projections et sondages, une montée des droits européennes, de la droite conservatrice, de la droite radicale. Et le risque est qu'on amalgame ce rejet des normes environnementales en un rejet plus fort des normes climatiques de manière générale. Et ça, c'est peut-être le plus grand des dangers, parce que ça voudrait dire qu'au niveau national, on serait tenté de diminuer le rythme de mise en œuvre, et qu'au niveau européen, on serait tenté de diminuer l'ambition climatique dès lors qu'on va négocier la future cible à l'horizon 2040.

  • Speaker #1

    Antoine, est-ce que tu as une question sur ce bilan ?

  • Speaker #2

    Oui, pour conclure, tu as très bien fait le bilan. On a plein de points qui sont très discutables. On peut discuter de ce que c'est vraiment via l'extension du marché carbone qu'il faut accélérer la décarbonation du transport, du chauffage. On peut reprendre tout ce qu'on a discuté ici et débattre de ce que c'est la meilleure façon de faire. Mais on peut s'entendre sur le fait que sur le plan de la décarbonation, il y a eu vraiment des politiques structurelles et importantes qui ont été mises en place ces cinq dernières années. Et ça va avoir un impact vraiment très concret sur nos façons de se déplacer, de se choper et de produire de l'énergie en Europe. Donc sur l'agriculture, c'est un peu plus lancé, mais on en parlera. Moi, la grande question, c'est, tu l'as dit au départ, tout ça, ça a été voté largement par une coalition qui a été formée en gros d'équivalents du Parti Socialiste français et par l'équivalent de la droite française. Et la grande question, c'est comment est-ce qu'on a pu avoir à un moment des élus de droite qui ont voté des politiques structurelles et contraignantes au Parlement européen ? Car l'exemple d'interdiction de la vente de véhicules thermiques à partir de 2035, c'est un bon exemple. Ça a été voté par une coalition européenne qui contenait beaucoup d'élus de droite. qui, à l'heure actuelle, sont en train de vitipérer contre cette interdiction, en France, pas qu'en France. Donc voilà, comment est-ce qu'on a pu créer à un moment ce momentum ? On parle beaucoup des marches climat, mais est-ce que c'est des marches climat ou est-ce que c'est d'autres choses ? Et c'est aussi intéressant parce que ça pose la question de comment est-ce que dans les années à venir, on peut se mobiliser au-delà du vote pour recréer ce momentum.

  • Speaker #0

    Exactement. Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'on dit souvent que le pacte vert européen est né des élections européennes de 2019. En réalité, je voudrais nuancer ce propos. Pourquoi ? Parce qu'avant ça, il y avait, de la part des États membres, et notamment de la Commission européenne, une forme de volonté politique d'accélérer sur les questions climatiques. Ça s'est vu lorsque, en mars 2018, les États membres chargent officiellement la Commission européenne de présenter ce qu'on appelle une stratégie de long terme. une stratégie de long terme, donc à l'horizon 2050, pour justement faire en sorte d'atteindre un objectif de neutralité climatique. Donc la Commission européenne présente en novembre 2018 une stratégie de long terme qui évoque pour la première fois le concept de neutralité climatique. Donc en réalité, il y avait un terreau fertile sur lequel les élections européennes ont permis de capitaliser et ont légitimé démocratiquement l'avènement du pacte vert européen, qui en fait est un coup politique très intelligent de la part d'Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, pour permettre justement de... d'entretenir ce momentum qui a été mis en place par les institutions européennes. Maintenant, la question qui se pose, c'est qu'on est beaucoup moins dans cette logique-là, on est dans une logique de frilosité de la part des États membres, on est dans une logique également où, parce qu'il y a des considérations nationales internes au sein des groupes politiques, certains groupes politiques... jouent leur partition pour tenter de gagner les élections au niveau national. C'est-à-dire qu'en fait, si je prends l'exemple très concret de la droite allemande, la droite allemande, pour tenter de gagner les votes de l'industrie, notamment l'industrie automobile, qui a un très fort lobby en Allemagne, va tenter de mettre en avant le fait qu'ils vont vouloir réouvrir le dossier de la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. alors que jusqu'à présent il y a eu des coalitions qui s'étaient formées au sein du Parlement européen parce qu'il y avait ce fameux momentum. Comment est-ce qu'on en est arrivé là ? C'est parce qu'il y a une chose qui a été mise en place dans chacun des dossiers du pacte vert européen, notamment du Fit for Tifa, c'est ce qu'on appelle des clauses de revoyure. Ces clauses de revoyure, c'est un mécanisme juridique, c'est une clause de rendez-vous qui permet justement... d'être activé par la Commission européenne pour réouvrir un dossier et revoir à la hausse ou à la baisse les ambitions qui ont été définies au sein de la mandature qui vient de s'écouler. Pour en prendre un exemple très concret, sur la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2030, en 2026, il y a une clause de revoyure qui prévoit que la Commission européenne va remettre un rapport au Parlement européen et au Conseil pour faire en sorte de juger de l'opportunité de revenir sur la deadline de 2035. Cette clause de revoyure-là, elle menace d'être actionnée par un certain nombre de parlementaires européens, notamment la droite européenne. pour justement revenir sur cet objectif-là. Une fois qu'on a dit ça, pourquoi est-ce que les élections européennes sont dimensionnantes pour l'ambition climatique à l'horizon 2030 ? C'est parce que de l'équilibre qui ressortira des élections européennes de 2024, cela se rejaillira sur les priorités de la Commission européenne. Et donc, Ursula von der Leyen, si elle est réélue, pourrait par exemple subordonner sa réélection à la réouverture. du dossier du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. C'est là où on risque d'avoir une forme de détricotage sur les années à venir. C'est de faire en sorte que l'ensemble de ces clauses de revoyure soient actionnées et ce qu'on appelle un effet boule de neige. Parce qu'à partir du moment où tu reviens sur la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, tu vas être désincitatif sur l'électrification, et donc tu vas avoir des conséquences directes sur la directive énergie renouvelable, tu vas avoir des conséquences directes sur le règlement, sur le déploiement des bornes de recharge tous les 60 km. Et donc c'est là en fait le plus gros risque, c'est qu'on ait une diminution de l'ambition au travers. l'ouverture de ces clauses de revoyure. Et petit instant autopromo, on vient de publier aujourd'hui même, un à l'Institut Jacques Delors, un papier qui analyse en fait comment est-ce qu'on pourrait mettre en œuvre ces clauses de revoyure, quelles sont les conditions... à déployer pour justement tenter de diminuer l'ambition climatique ? Et comment est-ce qu'on pourrait tenter de contrecarrer ça ? On a une proposition qui est la mise en place d'une grande coalition élargie qui verrait le Parti populaire européen, les sociodémocrates, les libéraux et les verts européens opérer un accord de coalition pour justement sauvegarder les objectifs qui ont été décidés jusqu'à présent et qui en échange permettraient justement à la candidate du Parti populaire européen d'être réunie avec une donnée qui convient d'être prise en compte. En 2019, Ursula von der Leyen avait été élue à neuf voix près. Aujourd'hui, sa réélection n'est pas assurée. C'est pour ça que les verts européens qui sont projetés autour des 40 sièges pourraient faire office de socle pour tenter de sécuriser sa réélection.

  • Speaker #1

    Je ferais bien l'intention de mettre le lien de cette note dans la description de l'épisode. Merci beaucoup, Fouk. On va passer au billet de construire l'écologie. C'est à toi Antoine.

  • Speaker #2

    Je voulais vous parler de ce qu'a introduit Alban au début de l'émission, qui est cette histoire de Green Blending, dont la compréhension n'est pas sans intérêt à l'approche des élections européennes. On est vraiment, et c'est ce qu'on a commencé à introduire là, arrivé à un point de bascule. On a d'un côté une prise de conscience de la gravité et du changement climatique et de l'effondrement de la biodiversité qui est de plus en plus large dans la population et qui nous incite à adopter des politiques écologiques de plus en plus ambitieuses. Et en face, on a des groupes d'intérêt qui tentent de rendre ces politiques de transformation écologique responsables de tous les maux pour les discréditer. Avec tout le monde toujours les mêmes arguments, qui sont que ces politiques de transformation écologique seraient systématiquement à l'origine de l'augmentation du coût de la vie, de perte d'emploi et de compétitivité, d'endettement, qui en fait même seraient inefficaces voire contre-productives sur le plan environnemental. Le green blaming, c'est vraiment ça. C'est utiliser des arguments faux, fallacieux ou partiellement faux pour attribuer à une politique écologique des torts qui justifieraient son abandon. Il ne s'agit surtout pas de dire ici qu'il ne serait jamais légitime de remettre en question une politique écologique, puisqu'il y en a certaines qui sont effectivement soit inefficaces, soit socialement injustes, soit les deux. Mais là on parle bien d'autres choses, on parle de critiques qui sont inventées uniquement pour faire échouer des transformations, qui sont d'ailleurs souvent perçues comme trop contraignantes, afin de protéger des intérêts économiques ou de se soustraire à des changements de comportement. Pour rendre ça un peu concret, en fait l'actualité européenne regorge d'exemples de green blaming récents. Sans rentrer dans le détail des controverses autour desquelles chacune de ces opérations de grippes dynamiques se sont organisées, Pour incarner tout ça, par exemple en Allemagne, on a eu une tentative l'année dernière du gouvernement allemand d'interdire l'installation de nouvelles chaudières au gaz pour limiter les émissions de gaz à effet de serre liées au chauffage des bâtiments et aussi pour réduire accessoirement la dépendance du pays au régime autoritaire qui fournit son gaz fossile, celui de Montgard. Ça a provoqué des très vives divisions dans le pays et un recul en bonne et bonne forme qui a été largement alimenté par l'industrie du gaz, par des parties d'extrême droite comme l'AFD et par une coalition de médias conservateurs. Un autre exemple un peu concret, aux Pays-Bas, on a des mesures d'urgence qui ont été prises par le gouvernement pour réduire les pollutions causées par l'excès d'azote lié aux encas azotés dans le secteur agricole. Dans ces mesures, il y avait notamment la réduction de 30% du chèque-tête bovin planifié d'ici 2030, et ça a entraîné des oppositions massives et une montée en puissance du mouvement agriculteur-citoyen, qui est maintenant un parti politique des Pays-Bas, qui est systématiquement opposé aux politiques environnementales. Et en France, plus près de nous, rien qu'en 2023, On a eu un recul du gouvernement sur un projet d'interdiction naissante d'installation de nouvelles chaudières en glace, toujours. On a des zones à faible émission qui visent à réduire la pollution de l'air dans les zones urbaines qui sont très régulièrement des sujets de débat enflammés. Et la simple évocation de la réduction de chez Ptelbovin dans un rapport récent de la Cour des comptes a provoqué un central, là aussi national. Et en parallèle, on a une diabolisation vraiment de... toutes les politiques publiques environnementales contraignantes, qui sont pourtant essentielles pour réussir la transformation écologique. Résultat, on a des droits traditionnels et libérales de la République en marche aux Républicains qui promeuvent de plus en plus une écologie qui serait uniquement incitative, qui n'affecterait pas les intérêts économiques ou le quotidien des Français, et qui réduit forcément la capacité de ces politiques à être vraiment efficaces sur le plan de la décarbonation et de la préservation de la biodiversité. Il faut bien comprendre que ce green blaming, ça marque une grande évolution dans le débat politique autour de la transformation écologique. On n'est plus du tout dans le fait de nier frontalement les crises environnementales, ce qu'on a appelé sur le plan du carbone le climato-négationnisme ou le climato-dénialisme.

  • Speaker #0

    Là, on est vraiment plutôt dans une instrumentalisation des conséquences sociales des politiques de transformation écologique. Donc c'est une stratégie qui est plus subtile, on n'est pas en train de contester la réalité des crises, en fait on ne conteste même pas souvent l'intérêt théorique de la transformation écologique, vous avez des partis de droite ou d'extrême droite qui disent bien sûr, le changement climatique c'est grave, il faut s'en préoccuper mais on attaque les modalités concrètes de la mise en œuvre de cette transformation écologique. Et derrière, comme je le disais dans le cas allemand, mais en fait c'est généralisable à l'ensemble des stratégies de crime blaming, on a une espèce de coalition informelle entre des droites et extrêmes droites européennes, une presse et des médias conservateurs, et puis aussi des regroupements industriels ou corporatistes, alors pas toutes les industries, mais en fait souvent des industries, notamment ceux qui ont raté les créneaux des technologies utiles à la transformation écologique, par exemple des industries automobiles européennes qui ont beaucoup misé sur le véhicule thermique, qui n'ont pas vu venir le besoin. d'électrifier les véhicules, et qui sont maintenant en concurrence avec des acteurs, notamment asiatiques, qui ont fait cette électrification beaucoup plus que eux, qui du coup, constatant que leur production actuelle est incompatible avec les prérequis de la transformation écologique, ils voient une menace pour leur modèle d'affaires. Et ce qui est encore plus triste, c'est qu'il y a d'autres acteurs qui peuvent occasionnellement se joindre à cette coalition, beaucoup plus ponctuellement, on voit même que parfois on a certains partis de gauche ou certains syndicats qui ont une volonté théorique de transformation écologique, mais qui s'opposent à des modalités concrètes de cette transformation. par exemple des parties de gauche qui s'opposent aux véhicules électriques ou à la baisse de la consommation de viande, là encore, suivez mon revient. Pour terminer, comment peuvent se manifester ces opérations de green living ? Il y a un exemple très intéressant qui a eu lieu en France dans... ces derniers mois, il y a eu, comme je le disais, une volonté du gouvernement qui a testé un peu dans le débat public l'idée d'interdire à terme l'installation de nouvelles chaudières au gaz, parce que le gaz fossile émet fortement de gaz à effet de serre dans le secteur du chauffage. Par ailleurs, on sait qu'on ne va pas avoir assez de biogaz pour pouvoir conserver autant de chaudières fossiles que ce qu'on utilise à l'heure actuelle. En face de ça, il y a une technologie qui marche plutôt bien. Il y a d'abord la rénovation thermique de bâtiments, première technologie, puis ensuite, il y a notamment l'usage de pompes à chaleur. qui est un moyen de chauffage basé sur l'électricité, qui est très efficace pour réduire la consommation d'énergie et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Dans tous les scénarios de transition écologique, les pompes à chaleur, d'ici 2050, ça doit représenter entre 30 et 65% des moyens de chauffage utilisés en France. Face à cette idée d'interdiction de nouvelles chaudières au gaz, il y a eu une mobilisation vraiment très forte des industriels de la filière gaz, des politiques de droite, mais aussi malheureusement de certaines ONG écologistes et de syndicats qui s'y sont opposés en critiquant, en remettant en question l'efficacité de ces pompes à chaleur. Alors il y a eu plein d'arguments mobilisés, j'en donne juste deux qui ont été vraiment violemment faux mais pourtant très mobilisés et qui restent encore un peu dans l'esprit de beaucoup. Le premier argument faux, c'est que les pompes à chaleur ne marcheraient pas quand il fait froid. Par exemple quand on a des températures en dessous de zéro. C'est vraiment une idée préconçue qui ne s'appuie sur aucune réalité. Des pompes à chaleur qui fonctionnent en dessous de zéro degré, c'est l'ensemble des pompes à chaleur notamment installées dans les pays du nord de l'Europe. Il faut savoir qu'il y a plusieurs pays du nord de l'Europe dans lesquels la proportion de pompes à chaleur par logement est parmi les plus élevées au monde. Je pense par exemple à la Norvège, plus de la moitié des logements sont chauffés par des pompes à chaleur en Norvège, dans lesquels le climat est beaucoup plus froid que la France. Et vous imaginez bien que les Norvégiens n'utiliseraient pas de pompes à chaleur. si jamais il ne pouvait pas se tromper avec en hiver. Et un autre argument faux, un peu iconique, c'est que les pompes à chaleur ne marcheraient pas dans des maisons mal isolées, et que de façon générale, dans des maisons mal isolées, une pompe à chaleur surdimensionnée, ça entraînerait des surconsommations d'électricité, une fois que la maison devient correctement isolée. Il est derrière, c'est de dire, tant que la maison est bien isolée, il vaut mieux remplacer une chaudière au gaz pour une autre chaudière au gaz que de passer à la pompe à chaleur. Et ça du coup, il y a plusieurs publications récentes qui ont montré que vraiment, on pouvait très bien utiliser une pompe à chaleur et se chauffer correctement, même dans une maison mal isolée, même si ce n'est pas du tout optimal, et que par ailleurs, on est capable de réduire la consommation d'électricité des pompes à chaleur, on est capable de les régler si on fait ces travaux de rénovation énergétique après avoir installé ces pompes à chaleur. et donc c'est vraiment important de se dire que même dans des maisons mal isolées il vaut mieux utiliser une pompe à chaleur, passer à la pompe à chaleur que repartir dans une chaudière au gaz qui va être utilisée pendant 20 ans et émettre des gaz à effet de serre pendant 20 ans donc pour conclure, de façon générale, ces campagnes de green blaming et on va avoir d'autres exemples sans doute avec l'interview suivante dans laquelle on va se localiser plus sur le cas du secteur agricole c'est en train d'entraîner un retour de bâtons écologiques dans toute l'Union Européenne Alors qu'on avait un enjeu écologique qui gagnait en importance dans le débat public et que même la plupart des droites, on en parlait avant, acceptaient la nécessité de la transformation écologique, on a maintenant des politiques concrètes de transformation écologique qui entraînent des oppositions de principe avec deux conséquences réelles, l'échec de projet écologique et la remise en question du principe même de contrainte. collectives nécessaires pour leur mise en œuvre. Et c'est pour ça qu'à construire l'écologie, on a essayé d'identifier cette nouvelle opposition, le green blaming, à travers d'autres exemples concrets que je ne détaille pas ici. La hausse du prix des véhicules qui serait liée à la transformation écologique et à l'électrification des véhicules. Les zones à faible émission qui ne seraient pas des politiques efficaces pour lutter contre la pollution de l'air. La lutte contre les passoires énergétiques qui serait à l'origine de l'explosion du prix des loyers. En fait, tout ça est très largement faux et instrumentalisé. Et ce qu'on a essayé... d'examiner plus en détail dans notre mode. Merci beaucoup Antoine, merci beaucoup Alban de m'avoir épaulé pour cet épisode.

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Description

C'est au niveau européen que naissent bon nombre des normes qui ont et auront de plus en plus d’impact sur nos vies. La Politique Agricole Commune, les décisions sur les pesticides, le marché de l’énergie, le marché carbone...


L'UE s'est donné des objectifs audacieux avec le Pacte Vert Européen, incluant cette fameuse neutralité carbone d'ici 2050. Mais alors qu'en 2019 il était plutôt populaire, ce pacte est aujourd'hui sous le feu des critiques, à quelques jours des élections européennes qui éliront les députés pour siéger au Parlement.


Alors, quels progrès ont été accomplis d’un point de vue environnemental ces 5 dernières années et est-ce qu’il y a un risque que tout cela soit détricoté en cas de percée de la droite et de l’extrême droite lors de la prochaine mandature ? Voici les questions auxquelles on va essayer de répondre.


Merci à Albane Crespel et à Antoine Trouche pour leur présence.


Infos: https://linktr.ee/echangeclimatique

Contact: echangesclimatiques@gmail.com

Production: https://onetwo-onetwo.com/

Note Construire l’écologie : https://www.construirelecologie.fr/post/publication-de-notre-première-note

Note Institut Delors : https://institutdelors.eu/publications/pacte-vert-europeen-suite-ou-fin/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bien, bonjour à toutes et bonjour à tous, bienvenue dans ce nouvel épisode d'Échange climatique, un épisode consacré aux élections européennes qui auront lieu le 9 juin prochain. Un sujet pas facile à cerner, il faut dire que nous ne sommes pas aidés par les débats entre candidats où les voix s'enchevêtrent ou des termes barbares comme directive ou règlement sont régulièrement prononcés. Dans cet épisode, on va essayer d'y voir plus clair, on commencera par rappeler à quoi sert et comment fonctionne le Parlement européen. Ensuite, nous dresserons. Un bilan environnemental de la mandature qui s'achève. Et enfin, on se demandera s'il y a un risque de recul sur ces questions lors de la prochaine mandature. Pour cela, nous recevrons Fouque, Vinh, Nguyen, chercheurs sur les politiques françaises et européennes de l'énergie au sein de l'Institut Jacques Delors. Pour m'épauler, j'ai la chance d'être accompagné de deux chroniqueurs du collectif Construire l'écologie, Alban et Antoine. Salut à vous deux.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Alban Krespel travaille dans la transformation écologique dans le logement social et Antoine Trouche dans la suréfférence de la pollution de l'air. En deux mots, est-ce que vous pouvez expliquer ce que c'est que construire l'écologie ?

  • Speaker #2

    Oui, alors Construire l'écologie, c'est un collectif de professionnels de tous horizons, donc des chercheurs, des militants, des professionnels de la transition écologique, des personnes syndiquées de tous horizons qui sont impliqués dans la transformation écologique et qui a été lancée début 2024 avec la volonté d'élargir et de donner une voix à cette coalition d'acteurs de la transformation écologique pour créer des liens entre eux et pour porter... dans le débat public, une vision concrète, structurée et globale de la bifurcation écologique et des moyens de la réaliser. Et aussi de répondre aux personnes qui entendent saboter les ambitions écologiques par ce qu'on appelle le green blaming chez Construire l'écologie, mais on en reparlera plus tard. Et donc ça, ça se fait à travers des événements thématiques et des after-works réguliers.

  • Speaker #0

    Merci Alban, donc comme tu l'as dit Antoine nous partagera tout à l'heure une note de votre collectif du coup sur le green blaming, on comprendra plus tard ce que ça veut dire en détail. Mais avant ça moi je vais vous partager les actus des derniers jours qui ont attiré mon attention. Comme vous l'avez remarqué je ne demande pas de dons pour faire visite à cette chaîne et Youtube rapporte très peu d'argent. Si vous voulez tout de même m'aider vous pouvez vous abonner, c'est un gros coup de pouce pour la chaîne. Merci pour ça. Alors pour les actus que je vous ai réservés cette semaine, on va commencer par la France. Le 22 mai dernier, le Premier ministre Gabriel Attal s'est félicité de la baisse des émissions de CO2 du pays de 5,8% en 2023. Notre action paie a-t-il commenté sur X ? Alors est-ce que cette baisse est le fruit d'une action déterminée ou est-ce le résultat d'autres facteurs ? C'est ce que nous allons voir. Mais avant un peu de contexte, on ne parle ici que des émissions territoriales, celles que la France s'est engagée à réduire dans sa stratégie nationale bas carbone. Et c'est dans ce cadre que nous avons presque respecté notre objectif de réduction d'émissions sur la période 2019-2023. Objectif raté de peu, notamment parce que les puits de carbone ont capté moins que prévu. Le CIDPA, l'organisme indépendant chargé d'évaluer le sujet, nous explique que les sols et les forêts captent deux fois moins aujourd'hui que dans les années 2000, en raison de l'effet couplé de sécheresse à répétition, de maladies affectant... Le taux de mortalité des arbres et d'une hausse des récoltes de bois. Détaillons à présent cette baisse. La plus grosse contribution provient du secteur de l'énergie. On a brûlé moins de gaz et de charbon en 2023 par rapport à 2022 parce que l'électricité bas carbone fut plus abondante. D'une part, le nucléaire et l'hydraulique ont été plus disponibles et d'autre part, de nouvelles capacités de solaire et d'éolien ont été installées. C'est en partie la météo plus douce des mois de janvier et février qui a permis de faire baisser les émissions du secteur des bâtiments où la majorité provient. du chauffage au gaz et au fuel. Le CITPA met aussi en avant la sobriété et l'inflation des prix de l'énergie. Qui a fait quoi entre les deux ? Ça reste difficile à évaluer. L'inflation qui serait aussi en cause dans les autres secteurs, comme celui des transports, premier secteur émetteur en France, et de l'industrie. Les augmentations des prix des carburants à la pompe ont réduit les déplacements non contraints, tandis que la hausse des prix de l'énergie a fait baisser la production d'activités très émettrices, comme celle du ciment, de l'acier et de la chimie. Alors est-ce que cette hausse des émissions de la France est seulement un effet collatéral de l'inflation et de la météo ? Le CITPAM est quand même en avant des effets de moyen et long terme, comme le renouvellement du parc automobile par des voitures électriques, le report modal dans les transports, la rénovation thermique des bâtiments. Et précise que 2023 est une situation inédite, car tous les grands secteurs émetteurs ont baissé leurs émissions sans crise économique majeure. La question qui demeure, est-ce que nous arriverons à garder le rythme dans les prochaines années ? Il y a deux problèmes, comme le dit François Gemmette sur France Info. Le premier, c'est que nos puits de carbone sont de moins en moins efficaces, on l'a vu. Et le deuxième, c'est qu'on s'est fixé une trajectoire linéaire avec le même objectif chaque année jusqu'en 2030, sauf que l'on commence forcément par les émissions les plus faciles à réduire. Dans le secteur de l'énergie, par exemple, il reste peu de gaz et de charbon à éliminer. Donc il faudrait en réalité qu'on ait fait des baisses beaucoup plus marquées dès maintenant. Et j'ajouterais même un troisième problème, celui du désintéressement affiché de l'exécutif pour la cause, en témoignent les coupes budgétaires dans le ministère de la Transition. À l'étranger à présent, de vastes régions d'Asie ont connu des vagues de chaleur entre avril et mai, d'Israël, de Palestine, du Liban et de la Syrie à l'ouest, jusqu'à la Birmanie, la Thaïlande, le Vietnam et les Philippines à l'est, en passant par l'Inde et le Pakistan. Une étude du World Weather Attribution, qui évalue le rôle du changement climatique... dans les phénomènes météorologiques, nous apprend que pour chaque cas, ce dernier a rendu ces températures extrêmes plus probables et plus chaudes. L'organisation dresse une liste d'impacts, mort en nombre bien souvent sous-estimée, augmentation du nombre de déplacés et aggravation des conditions de leur vie comme à Gaza, chômage forcé pour les personnes travaillant à l'extérieur ou encore perte de récolte pour les agriculteurs. Autre dommage, la fermeture des écoles. Ainsi, ces 28 millions d'enfants qui n'ont pas pu aller étudier cette semaine rien qu'au Pakistan selon l'ONG Save the Children, mais ces fermetures ont aussi concerné la Thaïlande, le Bangladesh, les Philippines et l'Inde. La journaliste Marina Fabre-Soundron n'a pas hésité à parler de confinement climatique dans un article sur Novetic. Elle conclut son article avec cette phrase Sans réelle adaptation au changement climatique, de plus en plus de pays sont ainsi contraints de se confiner, mettant à mal leur liberté de déplacement ou d'accès à l'éducation, à vie à ceux qui brandissent l'expression écologie punitive à tort et à travers. Et pour terminer, je voudrais vous parler d'un article scientifique sorti récemment et qui ressemble à une bonne nouvelle. Dans les modèles, un facteur crucial est la sensibilité climatique. Elle mesure de combien la Terre se réchauffe pour une quantité de CO2 émise. En gros, c'est la réaction du climat à nos émissions. Pour la calculer, les scientifiques prennent en compte des boucles de rétroaction, l'observation du réchauffement historique depuis le début de l'industrialisation, des modèles statistiques ou encore l'analyse des climats du passé. Jusqu'à présent, cette valeur était très incertaine. Par exemple, selon le dernier rapport du GIEC, les politiques actuelles pourraient entraîner un réchauffement de 2,1 à 3,5 degrés, avec une estimation centrale à 2,7 d'ici la fin du siècle. Deux climatologues, dont un auteur du dernier rapport du GIEC, ont mené des recherches pour élire cette incertitude et viennent de publier le résultat. Ils montrent que la sensibilité du climat a été jusqu'à présent surestimée. En effet, dans les études précédentes sur le dernier maximum grêle... Sur le dernier maximum glaciaire il y a 20 000 ans, les géantes calottes glaciaires de l'émis mer Nord avaient un effet de refroidissement très important car elles produisaient des nuages bas dans les océans qui réfléchissaient à la lumière du soleil. La sensibilité y était donc élevée et a permis de conclure que celle d'aujourd'hui devait l'être aussi. Mais nos deux scientifiques ont découvert que ces boucles de rétroaction nuageuses sont uniques au climat de l'âge glaciaire et ne s'appliquent donc plus. C'est un peu technique, mais ce qu'il faut retenir, c'est que leur conclusion montre que les valeurs élevées de la sensibilité climatique sont moins probables qu'on ne le pensait. Leur estimation centrale reste la même, mais la borne haute est significativement réduite. En d'autres termes, 2,7°C à la fin du siècle est toujours aussi probable, mais le scénario à 3,5°C s'éloigne un peu. C'est une nouvelle plutôt rassurante, mais déjà ce n'est qu'une seule étude et cela ne change rien au fait que le niveau de réchauffement à la fin du siècle dépendra principalement de nos émissions futures. Si nos objectifs ne sont pas respectés, un réchauffement de plus 4 degrés n'est pas à exclure. Voilà pour mes petites actus. Antoine, Alban, est-ce que vous avez des réactions ? Est-ce que quelque chose vous a interloqué ?

  • Speaker #1

    Je veux bien commencer. Moi, par rapport à ta première actu, il y a un peu deux réactions vis-à-vis de cette baisse des émissions territoriales de la France et je les trouve toutes les deux aussi énervantes l'une que l'autre. Il y a une réaction un peu pavlovienne, notamment, malheureusement, dans pas mal d'ONG écolos de partie de gauche, qui consiste à dire, en fait, cette baisse, elle est liée uniquement à une météo un peu favorable, qui nous a fait consommer moins de carburant carboné pour le chauffage, et à... la souveraineté contrainte en fait, la hausse du coût de l'énergie. Moi je pense vraiment qu'il faut casser un peu cet argument-là, parce qu'on dit ça depuis au moins cinq ans, et qu'on regarde un peu sur ces dernières années, on a quand même eu une baisse nette, je ne parle pas vraiment sur la dernière année, mais sur ces dernières années, on a une baisse nette des émissions territoriales de la France, et c'est plutôt logique parce qu'on a des politiques de décarbonation qui ont été mises en place, pas toujours suffisantes, mais qui ont été mises en place. On va rappeler quand même que depuis les années 90, on a baissé de plus de 30% nos émissions territoriales, on a eu un impact conséquent. et on voit que notamment dans le bâtiment et dans l'énergie, on a des politiques structurelles, des sorts, des pompes à chaleur, des sorts des énergies renouvelables qui ont eu un impact conséquent sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre. Ce n'est pas que de la souveraineté civile ou l'impact de la météo. Après, l'autre position qui m'énerve un peu, c'est celle du gouvernement, qui dit que c'est formidable et vous voyez à quel point on est fort. Parce que comme tu l'as bien expliqué, on est sur un moment qui est plutôt un moment de reflux, à un moment où on est en train de couper dans les hausses. deux crédits qui étaient accordés au ministère de la Transition écologique, alors que là, ce qu'on a fait, ce n'est pas du tout exceptionnel. En fait, c'est à peu près ce qu'il faut faire chaque année d'ici 2030, si on veut atteindre nos objectifs climatiques. Et il faut encore accroître l'effort après 2030. Donc, on est à un moment où il faudrait plutôt se dire, c'est une bonne nouvelle. Par contre, ça ne présage pas du tout du fait qu'à l'avenir, on sera capable de rester sur la bonne trajectoire. C'est vraiment tout l'enjeu. Peut-être juste le tout dernier point important pour moi, donc on parle des émissions territoriales. Évidemment, il y a la question de, est-ce que quand on regarde l'empreinte carbone, si les émissions liées à nos imports, les résultats sont aussi bons ? Il faut bien comprendre que calculer les émissions importées, c'est très très complexe, c'est pour ça qu'on ne va pas avoir les résultats tout de suite. Ce qui est sûr, c'est que dans les derniers résultats qui ont été donnés par le ministère de la Transition écologique pour 2022, on avait une empreinte carbone par habitant qui stagnait depuis les années 2019. Donc en fait, on n'avait pas d'effort. qui étaient visibles depuis les années 2019. Donc ça, c'est plutôt inquiétant. C'est des données encore temporaires, parce que les données définitives, elles ne sont connues que dans quelques années. Mais c'est quelque chose qu'il faut surveiller, parce qu'évidemment, si on compense par nos imports les baisses d'émissions locales, on ne sera pas totalement gagnant.

  • Speaker #0

    Oui, je pense que tu as bien résumé les clivages des derniers jours. Abban, est-ce que tu veux rajouter quelque chose ?

  • Speaker #2

    Non, je pense qu'Antoine a dit la majorité de ce qu'on avait à dire là-dessus. Peut-être juste ajouter effectivement qu'il y a une partie de ces baisses qui sont des baisses... conjoncturelle, mais aussi une partie de baisse structurelle. Pour autant, effectivement, comme on l'a souligné dans une de nos dernières tribunes chez Construire l'écologie, ça ne signifie pas qu'il faut se reposer sur ses lauriers et prendre encore du retard sur la programmation pluriannuelle de l'énergie, la stratégie française énergie-climat, le plan d'adaptation nationale au changement climatique. On a des textes qui prennent un peu de retard et il ne faudrait pas que ça vienne... Comment dire ? entraver les efforts qui sont faits en la matière. Donc voilà, c'est le seul point que je voulais ajouter.

  • Speaker #0

    Merci à vous deux. On va passer maintenant à notre sujet du jour, qui est la politique environnementale de l'Union européenne. Quels progrès ont été accomplis d'un point de vue environnemental ces cinq dernières années ? Et est-ce qu'il y a un risque que tout cela soit détricoté en cas de percée de la droite et de l'extrême droite lors de la prochaine mandature ? Voici les questions auxquelles on va essayer de répondre. On va commencer par les sujets énergie et climat avec vous, Fouk, Vin et Nguyen. Bonjour. Bonjour. Je rappelle que vous êtes chercheur sur les politiques françaises et européennes de l'énergie au sein de l'Institut Jacques Delors. On va peut-être commencer par un rappel du fonctionnement du Parlement européen, parce que c'est quelque chose d'assez complexe. Est-ce que vous pouvez nous expliquer un petit peu comment ça marche ?

  • Speaker #3

    Oui, donc du 6 au 9 juin prochain et le 9 juin en France, on va être appelé aux urnes pour élire des eurodéputés, donc des députés européens. qui vont donc siéger à Bruxelles et à Strasbourg afin de discuter des futures ambitions climatiques de l'Union européenne. Le Parlement européen, qu'est-ce que c'est ? C'est donc 720 eurodéputés qui vont être élus afin justement de pouvoir très concrètement réfléchir sur l'ambition climatique de l'Union européenne vis-à-vis des objectifs 2030, 2040, 2050. À l'heure actuelle, ils disposent de ce qu'on appelle un pouvoir de co-décision, c'est-à-dire qu'au côté des États membres, enfin du Conseil, ils vont pouvoir réagir aux propositions qui sont mises sur la table par la Commission européenne. Donc la Commission européenne propose un texte de loi, et puis ce texte de loi ensuite est débattu de manière conjointe au sein du Parlement européen, donc au travers des commissions thématiques dans un premier temps, donc des commissions dédiées par exemple à l'énergie, à l'emploi, au commerce international. Et puis ces députés européens vont donc mettre en place des amendements, des compromis, pour justement en fonction de l'équilibre politique déterminer l'ambition du texte. Et puis ce texte sera à in fine voté au sein de ce qu'on appelle une plénière avec les 720 eurodéputés. Les États membres de leur côté font ce même travail, et puis lorsque les États membres ont déterminé une position de négociation, et que le Parlement a fait pareil, on va se réunir dans ce qu'on appelle des trilogues, qui vont réunir la Commission européenne, le Parlement européen et les États membres, pour tenter d'obtenir des compromis. Une fois qu'on a obtenu ces compromis, le texte de loi sera ensuite validé encore une fois par le Parlement européen, puis par les États membres. Et puis il prendra forme une fois que tout ça aura été validé. Tout ça pour dire que c'est un processus qui est assez chronopage. On reproche souvent à l'Union européenne de mettre beaucoup de normes en place, mais en réalité ces normes, elles mettent du temps. à être mis en place parce qu'il faut obtenir des compromis texte par texte et qu'aucune majorité n'est évidente au sein du Parlement européen. Et c'est ce qui permet de garantir un respect des équilibres politiques de manière générale. Une fois qu'on a dit ça, le Parlement européen a d'autres pouvoirs. Il a également un pouvoir d'adoption du budget annuel de l'Union européenne, ce qui n'est pas rien, et du budget pluriannuel de l'Union européenne. Il a également aussi, et c'est là où ça sera très important, le rôle d'avaliser, de voter pour le ou la future présidente de la Commission européenne. C'est-à-dire qu'en réalité, à partir du moment où le futur président de la Commission européenne devra être avalisée par le Parlement européen, eh bien, elle devra donner des gages vis-à-vis de ce dernier et respecter l'équilibre politique qui va ressortir des élections du 6 et du 9 juin prochain. Dit autrement, à partir du moment où personne n'a la majorité absolue au sein du Parlement européen, vous devez donner des gages aux sociodémocrates, aux partis populaires européens, et on y reviendra dessus par la suite, pour faire en sorte justement d'avoir un équilibre politique qui tienne la route.

  • Speaker #0

    Tu l'as dit, je pense que le maître mot c'est compromis. Antoine, tu avais une question sur le poids du Parlement dans les décisions.

  • Speaker #1

    Oui, exactement. Là, on va donc voter pour le Parlement. Les autres organes de l'Union européenne, en fait, on a directement voté pour eux lors des élections législatives. Moi, la question que je me pose, c'est en fait, à la fin, dans les concertations et dans les équilibres qui sont trouvés entre notamment le Parlement et le Conseil de l'Europe, en fait, qui gagne un peu à la fin ? et comment se fait le rapport de force dans le sens où sur les textes de les pouvoirs, j'ai eu l'impression, mais c'est peut-être une impression erronée, que le Parlement assez systématiquement tendait à essayer de rehausser l'ambition des textes qui étaient proposés initialement, et que le compromis à la fin se rapprochait quand même plus de la proposition initiale du Conseil que de la position sur laquelle le Parlement s'est rencontré. Donc voilà, est-ce que c'est juste et comment se fait ce rapport de force ?

  • Speaker #3

    Exactement. Déjà, une précision qui montre la difficulté de tout ça, c'est que tu as parlé du Conseil de l'Europe, ce n'est pas le Conseil de l'Europe, c'est le Conseil de l'Union Européenne. Le Conseil de l'Europe, c'est autre chose liée à la CEDH notamment, mais l'idée étant vraiment de dire que le Conseil de l'Union Européenne, c'est les représentants de chaque état, chaque ministre qui a le droit au dossier. Dit concrètement, en France par exemple, Roland Lescure, qui est un ministre lié à l'énergie, eh bien… C'est lui qui va siéger avec ses 26 autres homologues pour déterminer la position du Conseil de l'Union européenne sur les questions énergétiques. Une fois qu'on a dit ça, qui est-ce qui va gagner remporter les arbitrages ? Tu l'as très bien expliqué, le Parlement européen sera toujours celui qui va tenter de rehausser l'ambition vis-à-vis de la proposition de la Commission européenne. Prenons un exemple très concret sur la directive énergie renouvelable. C'est le Parlement européen qui a fait en sorte de se positionner sur un objectif de 45%. Les États membres étaient un peu plus frileux, ils baissaient pour cette ambition. Et au final, on a tranché entre les deux, on a fini sur un objectif de 42,5%. Tout ça pour dire que ça, c'était la position entre 2019 et 2024. Ça ne sera pas forcément la position qui va rejaillir des élections européennes, puisqu'on y reviendra. par la suite, on aura vraisemblablement un Parlement européen plus à droite, donc vraisemblablement moins ambitieux sur les questions climatiques. Et puis, il faut aussi rappeler une chose, c'est que le Parlement européen se bat beaucoup pour avoir un droit d'initiative, c'est-à-dire pouvoir mettre à l'agenda un certain nombre de questions. Il ne dispose pas à l'heure actuelle de ce droit d'initiative, et c'est éventuellement une réforme institutionnelle qui pourrait être menée dans les années à venir pour justement permettre d'avoir une forme de démocratie plus directe. Tu l'as très bien dit, on vote directement pour ces eurodéputés. Par contre, on ne vote pas pour les ministres qui composent le Conseil de l'Union européenne. Et donc là-dessus, pour avoir une forme de rééquilibrage et faire en sorte que les citoyens aient droit... sur les dossiers qui vont être discutés au niveau européen, on pourrait tenter de faire en sorte de renforcer le pouvoir du Parlement européen sur les années à venir. C'est toutes les questions qui se posent de manière plus générale, mais ça implique également éventuellement une réforme des traités qui requiert derrière l'unanimité des 27, ce qui est évidemment très compliqué à obtenir au niveau européen.

  • Speaker #0

    Comme on a commencé à évoquer le sujet des partis faux, est-ce que tu peux juste nous poser un peu les bases s'il te plaît ?

  • Speaker #3

    Jusqu'à 2019, C'était une alliance qui était composée de ce qu'on appelle le Parti Populaire Européen, donc la droite européenne, les Républicains en France, avec les sociodémocrates, le Parti Socialiste en France, qui jusqu'à présent détenaient la majorité absolue. qui permettait donc en fait, lorsqu'ils votaient ensemble, de gagner les amendements, de remporter les textes et d'imposer un peu, entre guillemets, leur vision. En 2019, pour la première fois, on a eu une situation toute nouvelle qui a fait que le Parti populaire européen et les sociodémocrates à eux deux n'avaient pas la majorité absolue. Ils ont dû chercher un troisième parti pour pouvoir justement opérer une alliance. C'est donc naturellement qu'ils se sont retournés vers les libéraux. donc en France c'est l'équivalent d'Emmanuel Macron, et au niveau européen il s'appelle Renew, ces libéraux étaient ce qu'on appelle les faiseurs de roi et permettaient d'obtenir une majorité absolue au sein du Parlement européen. Et donc en fonction des textes, ils pouvaient décider d'avoir une ambition, on va dire notamment sur les climatiques, plus ambitieuse, ou alors au contraire tenter de diminuer l'ambition en fonction de leur doctrine. Et puis il y a d'autres groupes, politique au sein du Parlement européen. Il y a donc les Verts européens qui ont connu une percée assez importante en 2019. suite notamment aux mobilisations climat pour faire en sorte justement de pouvoir tenter de peser au sein du Parlement européen. Il y a ce qu'on appelle la GUE, qui est entre guillemets l'extrême gauche qui correspond à la France insoumise au sein du Parlement européen, qui a environ une quarantaine de membres. Et puis de l'autre côté de l'échec qui est politique, il y a ce qu'on appelle les conservateurs européens, ICIER, qui correspond au parti de Giorgia Meloni en Italie. En France, c'est plutôt Éric Zemmour, mais c'est un peu moins représentatif, il faut rester vraiment sur la logique de Thierry Jameloni au niveau européen. Et puis, ce qu'on appelle l'extrême droite, donc identité-démocratie, qui est composée notamment du Rassemblement National en France. Vis-à-vis de ce parti d'extrême droite, il y a ce qu'on appelle un cordon sanitaire. Je pense que c'est important de le rappeler parce qu'à la différence de la France, ce cordon sanitaire fait en sorte qu'on ne croit pas de poste à responsabilité à l'extrême droite au niveau européen. Dit autrement, en France, Sébastien Chénu est vice-président de l'Assemblée nationale. Au niveau européen, il est impossible qu'une personne qui appartienne au groupe d'identité et démocratie obtienne... Un poste de caisseur au niveau du Parlement européen, un poste de vice-président du Parlement européen ou un poste de président d'une commission au niveau du Parlement européen. Ça, c'est très important parce qu'en fait, ça va déterminer également la lecture politique une fois que les élections seront terminées. On sera sur une recherche d'une alliance entre les groupes du Parti populaire européen, des sociodémocrates, des libéraux, éventuellement des conservateurs ou alors des verts. Mais l'extrême droite sera très clairement ostracisée au sein du Parlement européen.

  • Speaker #0

    Juste une dernière question sur le fonctionnement avant de rentrer dans le cœur du sujet. Quelle est la répartition des responsabilités entre États membres et Union européenne en termes d'énergie, du climat, en d'autres termes, qui décide entre la France et l'Union européenne sur sa politique énergétique ?

  • Speaker #3

    Article 194 TFUE du traité de fonctionnement de l'Union européenne, si on revient à la base, qui fait qu'en fait, il y a sur un certain nombre de dossiers... la possibilité pour les États membres de conserver un regard sur, par exemple, leur mix énergétique. Donc là-dessus, l'Union européenne ne va rien nous imposer. Par contre, un certain nombre de décisions qui sont prises au sein de l'Union européenne, par exemple lorsqu'on détermine des objectifs sur les énergies renouvelables, vont avoir une conséquence très directe sur la manière dont on va devoir déployer ça en France. Donc vraiment, on est sur une logique de compétences partagées. avec un impératif qui est quand même nécessaire sur des questions par exemple de fiscalité, les États membres conservent également un droit de regard. Et puis de manière plus générale, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'à partir du moment où, et on l'a vu avec la guerre en Ukraine, on arrive à se mettre d'accord au niveau européen sur des objectifs communs, par exemple sur un objectif de réduction de la consommation de gaz, et bien il y a ensuite une forme de translation au niveau national, c'est-à-dire que le niveau national va appliquer autant que faire se peut. et en fonction de ses propres considérations. C'est-à-dire que si vous êtes un grand consommateur de gaz, vous allez diminuer vos objectifs de manière plus significative que si vous êtes un pays qui, traditionnellement, ne consomme pas de gaz. C'est un peu la répartition, pour être très schématique, entre les compétences européennes et les compétences des États-Unis.

  • Speaker #0

    Ok. Donc, on va se jeter dans le cœur du sujet. On va commencer par le... L'énergie et le climat, je le dis en intro, en 2019 a été signé le pacte vert qui vise à reformer l'ensemble des secteurs de l'économie européenne grâce à plus de 75 textes législatifs. Concernant la réduction des gaz à effet de serre, il y a le paquet Fit for 55. Est-ce que tu peux nous expliquer ce que c'est, s'il te plaît, Fouque ?

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Donc le Fit for 55, qui a justement l'objectif 55, si vous voulez le traduire en français, c'est l'objectif de réduire de 55% nos émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990. Une fois qu'on a dit ça, on a opéré une forme de réforme législative qui va tenter de repenser la manière dont on produit, dont on consomme, dont on se déplace, et qui va toucher au quotidien très concret des Français. C'est par exemple la mesure la plus emblématique, la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, mais vraiment, je voudrais insister sur la logique systémique de cet ensemble-là. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on a... on met fin au véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, on va en même temps mettre en place un règlement pour favoriser l'essor des bornes de recharge tous les 60 km, on va en même temps favoriser avec une directive dédiée la promotion des énergies renouvelables pour favoriser l'électrification, justement parce qu'on va promouvoir le 100% électrique. Et donc là, c'est vraiment une logique d'ensemble qui fait que tout ça a été pensé de manière concrète et conjointe. On ne peut pas donc déterminer et singulariser une seule mesure, on doit vraiment réfléchir ça de manière collective, pour faire en sorte justement qu'à l'horizon 2030, on réduise de 55% nos émissions de gaz à effet de serre. Il y a d'autres mesures qui sont mises en place, on va sûrement y venir dessus par la suite, mais... il faut vraiment insister sur le fait que désormais, on s'est doté d'objectifs très concrets à l'horizon 2030. Donc ça, c'est ce qu'a fait l'Union européenne et c'est ce qu'essaie de faire le mieux, c'est-à-dire réglementer. Et désormais, en fait, on s'ouvre sur une nouvelle face, c'est-à-dire la mise en œuvre au niveau national et puis la détermination des objectifs pour l'horizon 2040. Mais ça, on y reviendra dessus par la suite.

  • Speaker #0

    L'Union européenne, c'est aussi un marché du carbone qu'on nomme aussi ETS1 pour les intimes. Alban, est-ce que tu avais une question sur ce sujet ?

  • Speaker #2

    Oui, effectivement. L'Union européenne s'est dotée d'un premier système d'échange des quotas d'émissions en 2005. Est-ce que ce fameux marché carbone, qui est un pilier important de sa stratégie en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, est-ce que tu pourrais nous dire comment il fonctionne, à quel secteur d'activité il s'applique, et est-ce qu'aujourd'hui on sait s'il a eu un impact sur les émissions de gaz à effet de serre européennes ?

  • Speaker #3

    Oui, concrètement, le marché carbone européen, c'est l'application du principe polyurépaire. C'est-à-dire que pour les industries et pour les producteurs d'électricité, à partir du moment où vous émettez une tonne de CO2, vous allez payer l'équivalent d'un prix carbone. Ce prix carbone est déterminé selon des lois de marché. Et jusqu'en 2018-2019, ce prix carbone était très faible, il était autour de 5 euros la tonne de CO2, ce qui était en fait assez rédhibitoire parce qu'il n'était pas utile pour envoyer un signal prix. On a opéré des réformes et en fait, à partir du moment où le prix carbone a augmenté, a atteint notamment un prix autour des 30 euros la tente de CO2, il a bouleversé ce qu'on appelle l'ordre de mérite au niveau européen, c'est-à-dire qu'il a permis de renchérir la production d'électricité à partir de charbon. pour la rendre non compétitive vis-à-vis de la production d'électricité produite à partir de gaz. Et ça, c'est très significatif d'un point de vue des émissions climatiques. Pourquoi ? Parce que produire de l'électricité à partir du charbon, c'est deux fois plus émetteur que produire de l'électricité à partir du gaz. Donc, à partir du moment où on avait un prix carbone autour des 30 euros la tente de CO2, il était plus rentable économiquement de produire de l'électricité à partir du gaz. Et donc ça, ça a eu un effet très concret sur la réduction des émissions de CO2 au niveau européen. sur les dernières années. Et puis, les industries également étaient soumises à ce prix carbone. Sauf que les industries, elles bénéficiaient, elles bénéficient d'ailleurs toujours de ce qu'on appelle des allocations gratuites, c'est-à-dire des droits à polluer, qui sont octroyés par le système afin de faire en sorte justement d'opérer une transition au sein du secteur industriel et d'éviter que la transition soit trop abrupte et que cela renchérisse les coûts pour l'industrie de manière trop conséquente.

  • Speaker #0

    On a opéré des modélisations et on a opéré également des reporting. On s'est rendu compte que l'industrie comparée au secteur de la production d'électricité avait baissé de manière beaucoup moins drastique ses émissions de gaz à effet de serre justement parce qu'elle avait trop d'allocations gratuites qui faisaient qu'elle avait donc trop de droits à polluer de manière gratuite. On a donc opéré une réforme au sein du fameux Fit for 55 pour faire en sorte que d'ici 2030, d'ici 2035, on diminue très concrètement les allocations gratuites qui étaient données à ces industries pour faire en sorte de les inciter au travers du prix carbone à investir dans la recherche et le développement pour faire en sorte de verdir leur industrie. Et donc là, on est vraiment sur un marché carbone qui va faire en sorte, sur un horizon de temps 2030-2035, d'orienter les comportements des industriels et de renchérir leurs coûts de production et donc de les inciter à opérer une décarbonation au travers soit de l'électrification, soit... le remplacement au travers notamment par exemple de l'hydrogène vert pour faire en sorte justement d'être vertueux d'un point de vue des émissions de gaz à effet de serre. Et puis ce marché carbone, il doit se penser de manière un peu plus systémique, on revient dessus par la suite, avec un mécanisme qui a été mis en place au niveau européen au travers du feed for feed-file, c'est ce qu'on appelle le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, ce que les politiques vont vulgariser en taxes carbone aux frontières, qui font en sorte que... Puisqu'on va renchérir nos coûts de production au niveau européen en mettant un prix carbone, et donc on va faire en sorte que l'acier soit plus cher à partir du moment où il est produit dans des conditions peu vertueuses, on va faire en sorte que lorsque l'acier est importé par exemple de Chine, on renchérisse cette importation avec un prix carbone à partir du moment où il franchit la frontière, pour faire en sorte qu'il y ait ce qu'on appelle... en anglais un level playing field, une forme de compétition équitable entre l'acier qui est produit en Chine à partir du charbon et l'acier qui va être produit en France ou en Europe à partir d'énergies renouvelables, du nucléaire ou du gaz, pour faire en sorte justement que cet acier soit assez compétitif à partir du moment où il est produit dans des conditions assez peu environnementales. en Chine pour faire en sorte justement d'avoir une compétitivité au niveau européen vis-à-vis nos partenaires internationaux.

  • Speaker #1

    Ce mécanisme d'ajustement aux frontières, est-ce qu'il est satisfaisant aujourd'hui ou est-ce qu'il faut le renforcer ?

  • Speaker #0

    Alors, il va être mis en place au niveau européen, donc on est vraiment dans sa toute première itération. Donc il est encore dans ses balbutiements et il va, il faut être très pragmatique, il va y avoir, je pense, des trous dans la raquette, c'est-à-dire qu'on ne pourra pas faire en sorte de pouvoir à l'heure actuelle couvrir l'ensemble des émissions. Il s'applique à un nombre très réduit de secteurs, l'électricité, l'acier, le fer notamment. Donc il faut être très prudent, mais il va monter en puissance d'ici à l'horizon 2035 pour faire en sorte justement de protéger l'industrie européenne. Donc il va falloir travailler main dans la main avec les industriels pour identifier là où il y a encore des manques. Il va également faire en sorte de rendre le mécanisme entre guillemets le plus simpliste possible parce que ça va rajouter des charges pour les industriels, des charges déclaratives. pour toujours monitorer leur production, également faire des reporting auprès de la Commission européenne. Mais très concrètement, c'est un instrument qui a pour objectif de rééquilibrer la balance commerciale et rééquilibrer le rapport de force vis-à-vis des partenaires internationaux. Et puis, il faudra également être très précautionneux, parce que là, la manière dont on présente, c'est vraiment un rapport de force vis-à-vis de la Chine, un rapport de force vis-à-vis d'autres pays comme la Turquie, les États-Unis, mais ça va avoir également des conséquences internationales vis-à-vis d'autres pays. à des pays tiers, comme par exemple des pays africains, qui nous exportent à l'heure actuelle, par exemple, des denrées, l'aluminium, etc., et qui représentent un poids très important dans leur balance commerciale. Donc là-dessus, vu que c'est des pays en développement, on peut s'alarmer du fait que ce mécanisme-là pourrait avoir des conséquences assez délétères, parce que c'est une rentrée d'argent financière très importante pour eux, qui peut ensuite permettre... leur développement et faire en sorte vraiment de calibrer ça en fonction des partenaires internationaux qui sont concernés. Et tout ça doit se faire également dans le respect des règles de l'OMC. Donc une fois que j'ai dit tout ça, tu te rends bien compte que c'est assez compliqué de mettre en place un mécanisme sur le très court terme qui soit très très complet.

  • Speaker #1

    C'est clair, c'est un gros sujet. Antoine, tu avais une question sur une autre norme, sur une autre directive ?

  • Speaker #2

    Oui, parce qu'on parle beaucoup en Europe et à raison de tout ce qui a été fait sur les transports, notamment l'interdiction à la vente des véhicules thermique neufs à partir de 2035. Il y a une autre directive qui, j'ai l'impression, est beaucoup moins bien connue qui est la directive sur l'efficacité énergétique des bâtiments et qui est une directive qui est en fait assez dure parce que dans… vraiment de façon très… En général, c'est une directive qui va avoir un impact très fort sur les moyens de chauffage qu'on va avoir le droit d'utiliser dans les bâtiments en Europe à partir de 2030. et encore plus tôt pour les bâtiments publics à partir de 2021, si je ne me trompe pas. Et c'est une directive encore plus dure sur les efforts qu'il va falloir faire pour réduire la consommation d'énergie des bâtiments, parce que si je ne me trompe pas, ça fait partie des bâtiments, ça fait vraiment partie des secteurs dans lesquels, notamment grâce à la rénovation thermique, on peut le plus économiser de l'énergie, le plus facilement, avec plein de guillemets, parce que ce n'est même pas si simple que ça. Donc est-ce que c'est possible que tu nous en parles un peu plus ? Oui,

  • Speaker #0

    complètement. On a donc un objectif contraignant au niveau de l'Union européenne qui a été adopté, pour réduire vraiment de 11,7% les objectifs d'efficacité énergétique. Je souligne vraiment 11,7% parce que ça te montre le degré de granularité de l'Union européenne. Vraiment, quand on parle de compromis, c'est qu'on va le négocier à la virgule près. C'est-à-dire qu'un certain propose 12,5%, d'autres proposent 12%, et bien on va parfois trancher entre les deux, on va arriver à 11,7%. Et ça en fait, pourquoi est-ce qu'on met en place ce principe d'efficacité énergétique ? C'est qu'on va tenter de donner la priorité à cela parce que... On s'est rendu compte de manière très concrète que les bâtiments qui vont être construits aujourd'hui, ils vont être encore là pour les années, les décennies à venir, d'ici 2100. Donc en fait, le premier objectif, il est de faire en sorte que dès que tu construis un bâtiment, il soit bas carbone, pour faire en sorte justement d'optimiser la consommation d'énergie, dans une logique d'efficacité énergétique. Et puis après, on va mettre en place la rénovation énergétique des bâtiments, pour faire en sorte justement... de minimiser la consommation d'énergie et, quand et, de faire d'une pierre deux coups, si je permets, c'est de sortir les personnes de la situation de précarité énergétique. Au niveau européen, selon les estimations à l'heure actuelle, 34 millions de personnes sont encore en situation de précarité énergétique. Donc à partir de là, l'objectif est de dire qu'on va rénover les bâtiments pour faire en sorte d'éviter de brûler trop de gaz pour se chauffer et en même temps, on va améliorer le quotidien des Européens. C'est ça l'objectif sous-jacent de la directive sur l'efficacité énergétique. Pour ce faire, on s'est doté d'une trajectoire qui est très ambitieuse de réduction d'annuelles d'économies au niveau national, qui vont doubler entre 2028 et 2030, et qui vont imposer aux États-Unis un rythme très fort de rénovation énergétique des bâtiments. Une fois qu'on a dit ça, et tu le rappelais tout à l'heure, ça va rentrer en contradiction directe. Avec l'austérité budgétaire qui pointe son nez au sein des états membres. Pourquoi ? Parce que rénover des bâtiments, c'est extrêmement coûteux. Et donc là-dessus, même avec l'ensemble des aides qui sont mises en place au niveau européen, déjà ça prend du temps, les aides ne sont pas souvent de manière très claire et donc il faut opérer une forme de démarchage, etc. Et puis derrière, il faut engager énormément d'emplois. Et donc la question qui se pose, c'est comment est-ce qu'on va derrière aussi soutenir les ménages pour faire en sorte d'opérer cette rénovation énergétique des bâtiments. Il y a des mécanismes qui ont été mis en place au sein du FITFACTIFAC, notamment ce qu'on appelle un fonds social climat, on reviendra dessus par la suite, d'aider les ménages à faire cela, mais il faut être très concret sur le fait que le retour sur investissement se fera sur le moyen long terme, alors que l'impératif et la contrainte économique, elle pèsera immédiatement sur les ménages. Et donc là, on est vraiment sur... résoudre cette fameuse équation entre fin du mois et fin du monde. Évidemment, les factures énergétiques ont extrêmement augmenté avec les conséquences de l'inflation qui sont nées de la guerre en Ukraine, mais si on ne débloque pas des schémas pour permettre justement d'opérer ces rénovations énergétiques des bâtiments et qu'on n'acte pas le fait qu'on doit apprécier ça sur le moyen long terme, ça c'est le rapport Pisaniféré qui a été mis en France, eh bien, on ne pourra pas opérer cette transformation au niveau national et au niveau européen de manière

  • Speaker #1

    Puisqu'on revient inexorablement sur cette question du financement, est-ce que tu peux nous parler de ce Fonds Social Climat, s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, le Fonds Social Climat, c'est la contrepartie de l'extension du marché carbone européen. Tout à l'heure, avec Alban, on parlait du marché carbone européen, l'ETS, qui portait sur les industries et sur la production d'électricité. Ce marché carbone européen va être étendu en 2027 aux bâtiments et aux transports. des particuliers notamment. C'est-à-dire qu'en fait, ça va très concrètement renchérir d'une certaine manière, il faut être très concret, la structure de tout un chacun pour faire en sorte justement d'orienter les comportements. À partir du moment où on aura des transports routiers, par exemple les voitures individuelles, les bus ou les bâtiments, le chauffage résidentiel et commercial, qui vont être taxés, Il faut mettre en place, de manière parallèle, un fonds pour justement permettre aux personnes de sortir de cette situation. où leurs voitures individuelles, leurs bâtiments sont taxés en rénovant les bâtiments, en passant aux véhicules électriques. C'est tout l'intérêt du Fonds social climat. Le Fonds social climat, ça va être un fonds de 65 milliards d'euros sur la période 2026-2032 au niveau européen, pour faire en sorte justement... d'aider les ménages à sortir du véhicule thermique, à rénover leurs bâtiments. Ce fonds européen va être alimenté directement par les États-Unis et également par les revenus du nouveau marché carbone européen. Il aura pour objectif de financer les rénovations énergétiques des bâtiments, de financer les bandes de recharge, de financer le passage aux véhicules électriques, de financer le leasing social qu'on a mis en place en France qui jusqu'à présent a fait preuve d'une certaine forme d'engouement, ce qui est une bonne chose. pour justement magnifier les politiques publiques qui sont menées au niveau national. Mais ce Fonds social pour le climat, il faut être très clair là-dessus, et on le voit avec l'exemple français, où lorsqu'on doit faire des économies budgétaires, la transition énergétique est celle qui va le plus trinquer, qui est le plus mis à contribution avec le Fonds vert ou encore la prime rénov', le Fonds social climat ne devra pas justement compenser le fait qu'on sera dans une situation de... d'austérité budgétaire au niveau national. C'est-à-dire qu'il faudra augmenter les moyens donnés à la rénovation énergétique et des bâtiments. Le Fonds social pour le climat ne devra pas seulement compenser la baisse qu'on pourrait tenter d'être observée au niveau national. Et donc là-dessus, la question qui se pose, c'est comment est-ce qu'on va permettre également de protéger les plus vulnérables ? Parce que les plus vulnérables seront les plus exposés à ce nouveau marché carbone européen. Marché carbone européen qui, si les prix... de l'énergie venait à être trop élevé ne serait pas lancé en 2028, mais en 2028. Là où le Fonds social climat serait lancé en 2026, c'est-à-dire préalablement, pour tenter justement de permettre d'opérer en amont un changement de comportement et un changement dans le quotidien des Français.

  • Speaker #1

    Pour parachever ce panorama des nouveautés, tu voulais nous parler de la réforme du marché de l'électricité. Alors évidemment sans rentrer dans trop de détails parce qu'il faudrait 4-5 épisodes, mais est-ce que tu peux nous parler des enjeux s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, je voulais parler de cette réforme parce que c'est quelque chose qui est très significatif de ce qu'on a réussi à faire au niveau européen à très très court terme, c'est-à-dire dans l'urgence. et en même temps ce qu'il faudrait faire au niveau européen sur le moyen d'en faire. Dit concrètement, hier en Ukraine, on a eu une explosion des prix de l'électricité pour une raison très simple, c'est qu'au niveau européen, 20% de l'électricité est encore produite à partir de gaz. À partir de ce moment-là, et du fait que l'électricité ne se stocke pas, la manière dont fonctionne le marché européen, c'est de dire que À partir du moment où on a des pics de consommation, lorsque l'on rentre chez soi le soir pour produire de l'électricité, ou le matin lorsqu'on se réveille et qu'on fait marcher la machine à café, on a donc des pics de production d'électricité, et que pour répondre à ces demandes d'électricité, il faut activer des centrales à gaz, sinon on n'a pas assez d'offres pour répondre à la demande, et on est dans une situation de blackout au niveau européen. Donc à partir du moment où les prix du gaz avaient été multipliés par 10, cette translation-là s'opérait sur les prix de l'électricité. On a donc opéré une réforme dans l'urgence, vraiment, pour tenter de décorréler les prix du gaz des prix de l'électricité. On peut discuter... une année de est-ce que ça marchera ou ça marchera pas ? mais on a fait ça dans l'urgence et on a fait ce que l'Union Européenne ne sait pas bien faire en réalité, c'est légiférer dans un temps très court. Parce qu'en fait, on n'a pas le temps d'opérer des études d'impact, on n'a pas le temps également de prendre en compte toutes les considérations sociotechniques et les implications que ça aura sur les citoyens. Donc en fait, on a fait quelque chose, on a opéré, on a fait un pansement, on va dire, pour faire en sorte de réformer ce marché européen de l'électricité. Mais ce marché européen de l'électricité, il va falloir le réformer également de manière plus générale à l'horizon 2024-2029 pour intégrer une chose très concrète, c'est que selon les modélisations de la Commission européenne, à l'horizon 2030, 70% de notre électricité sera produite à partir des énergies renouvelables. Et ça, le marché européen de l'électricité qui est designé à l'heure actuelle, il n'est pas prêt pour ça. Et ça te montre en fait tout l'enjeu de ce qui se passe au niveau européen, c'est qu'on pense le moyen long terme. on ne pense pas forcément le court terme. Par contre, lorsqu'on doit penser le court terme, c'est qu'on est dans une situation de crise. C'est ce qu'on a fait avec les nombreuses déclarations, notamment de nos dirigeants politiques, qui ont utilisé le marché européen de l'électricité comme étant un bouc émissaire pour expliquer une partie de la hausse des factures. Même si, en fait, une fois la réforme est passée, on est resté sur le même mécanisme de formation des prix de l'électricité au niveau européen. Donc, on a beaucoup tapé dessus, mais en réalité, on est resté sur une logique très... européennes sur ces questions-là. Et cette logique européenne, il faudra la pousser plus loin, mais la pousser plus loin lorsqu'on n'aura pas une forme de pression politique là-dessus. Et c'est ça, en fait, le pacte vert européen. C'est qu'on a travaillé pendant cinq ans presque en sous-main. C'est-à-dire qu'on n'entendait pas parler du pacte vert européen. Et de manière très paradoxale, la première fois qu'on a entendu parler du pacte vert européen, c'est quand il y avait la colère des agriculteurs. C'est quand il y avait des agriculteurs dans la rue pour justement dénoncer, d'une certaine manière, le pacte vert européen. qui ont été votés dans ce pacte européen sur le volet agricole ne sont même pas mis en place. Donc c'est une question aussi de récit derrière. C'est vraiment une question de comment est-ce qu'on est capable de déployer un récit vis-à-vis de ce pacte européen qui à l'heure actuelle a été amalgamé par une certaine partie de la classe politique et a même été instrumentalisé en amont des élections européennes.

  • Speaker #1

    Et c'est loin d'être nouveau. On peut dire que globalement, cette mandature a été assez productive d'un point de vue environnemental. Quel bilan tu tirerais ? Peut-être nous parler aussi de ce qui n'a pas marché.

  • Speaker #0

    Sur les questions de l'énergie, sur les questions du transport, on a fait énormément et là on peut considérer que c'est un succès. On a parlé depuis tout à l'heure énergie renouvelable, fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. Il y a tout un tas de mesures qui ont été adoptées au niveau européen et qui sont vraiment dans la lignée de l'atteinte de nos objectifs à l'horizon 2030. Sur la question environnementale, par contre, on a eu des reculs très forts. En tout cas, on a eu des bémols très forts qu'on vient de mentionner. notamment en amont des élections européennes. C'est-à-dire que sur la loi sur la restauration de la nature, qui permet de protéger l'écosystème, si je suis vraiment très simpliste, on a eu une reculade vis-à-vis de la proposition de la Commission européenne. Tout à l'heure, je te parlais du fonctionnement de la Commission européenne. La Commission européenne a mis en place une proposition. Cette proposition a été édulcorée au sein du Parlement européen. ce qui veut dire qu'en fait les groupes de droite du Parlement européen ont diminué l'ambition initiale qui avait été mise sur la table par la Commission européenne et ça c'est assez rare pour être souligné, c'est-à-dire qu'en fait on a diminué l'ambition parce que on avait peur des conséquences électorales que cela pourrait avoir le 9 juin prochain Même sujet avec un règlement sur les pesticides. La Commission européenne propose un règlement sur les pesticides, la droite européenne détricote ce règlement-là. à un point tel que le Parlement européen rejette le règlement et renvoie la balle dans le camp de la Commission européenne. Sur ces questions environnementales, on a eu un vrai recul sur la dernière année, justement parce qu'on s'est rendu compte qu'on était peut-être, avec la colère des agriculteurs, sous le coup d'une trop forte émotion, sous une trop forte récupération politique. Et c'est peut-être le risque des élections européennes. du 9 juin prochain, c'est que d'une certaine manière, on va avoir une forme de projection, si on se projette, selon les dernières projections et sondages, une montée des droits européennes, de la droite conservatrice, de la droite radicale. Et le risque est qu'on amalgame ce rejet des normes environnementales en un rejet plus fort des normes climatiques de manière générale. Et ça, c'est peut-être le plus grand des dangers, parce que ça voudrait dire qu'au niveau national, on serait tenté de diminuer le rythme de mise en œuvre, et qu'au niveau européen, on serait tenté de diminuer l'ambition climatique dès lors qu'on va négocier la future cible à l'horizon 2040.

  • Speaker #1

    Antoine, est-ce que tu as une question sur ce bilan ?

  • Speaker #2

    Oui, pour conclure, tu as très bien fait le bilan. On a plein de points qui sont très discutables. On peut discuter de ce que c'est vraiment via l'extension du marché carbone qu'il faut accélérer la décarbonation du transport, du chauffage. On peut reprendre tout ce qu'on a discuté ici et débattre de ce que c'est la meilleure façon de faire. Mais on peut s'entendre sur le fait que sur le plan de la décarbonation, il y a eu vraiment des politiques structurelles et importantes qui ont été mises en place ces cinq dernières années. Et ça va avoir un impact vraiment très concret sur nos façons de se déplacer, de se choper et de produire de l'énergie en Europe. Donc sur l'agriculture, c'est un peu plus lancé, mais on en parlera. Moi, la grande question, c'est, tu l'as dit au départ, tout ça, ça a été voté largement par une coalition qui a été formée en gros d'équivalents du Parti Socialiste français et par l'équivalent de la droite française. Et la grande question, c'est comment est-ce qu'on a pu avoir à un moment des élus de droite qui ont voté des politiques structurelles et contraignantes au Parlement européen ? Car l'exemple d'interdiction de la vente de véhicules thermiques à partir de 2035, c'est un bon exemple. Ça a été voté par une coalition européenne qui contenait beaucoup d'élus de droite. qui, à l'heure actuelle, sont en train de vitipérer contre cette interdiction, en France, pas qu'en France. Donc voilà, comment est-ce qu'on a pu créer à un moment ce momentum ? On parle beaucoup des marches climat, mais est-ce que c'est des marches climat ou est-ce que c'est d'autres choses ? Et c'est aussi intéressant parce que ça pose la question de comment est-ce que dans les années à venir, on peut se mobiliser au-delà du vote pour recréer ce momentum.

  • Speaker #0

    Exactement. Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'on dit souvent que le pacte vert européen est né des élections européennes de 2019. En réalité, je voudrais nuancer ce propos. Pourquoi ? Parce qu'avant ça, il y avait, de la part des États membres, et notamment de la Commission européenne, une forme de volonté politique d'accélérer sur les questions climatiques. Ça s'est vu lorsque, en mars 2018, les États membres chargent officiellement la Commission européenne de présenter ce qu'on appelle une stratégie de long terme. une stratégie de long terme, donc à l'horizon 2050, pour justement faire en sorte d'atteindre un objectif de neutralité climatique. Donc la Commission européenne présente en novembre 2018 une stratégie de long terme qui évoque pour la première fois le concept de neutralité climatique. Donc en réalité, il y avait un terreau fertile sur lequel les élections européennes ont permis de capitaliser et ont légitimé démocratiquement l'avènement du pacte vert européen, qui en fait est un coup politique très intelligent de la part d'Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, pour permettre justement de... d'entretenir ce momentum qui a été mis en place par les institutions européennes. Maintenant, la question qui se pose, c'est qu'on est beaucoup moins dans cette logique-là, on est dans une logique de frilosité de la part des États membres, on est dans une logique également où, parce qu'il y a des considérations nationales internes au sein des groupes politiques, certains groupes politiques... jouent leur partition pour tenter de gagner les élections au niveau national. C'est-à-dire qu'en fait, si je prends l'exemple très concret de la droite allemande, la droite allemande, pour tenter de gagner les votes de l'industrie, notamment l'industrie automobile, qui a un très fort lobby en Allemagne, va tenter de mettre en avant le fait qu'ils vont vouloir réouvrir le dossier de la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. alors que jusqu'à présent il y a eu des coalitions qui s'étaient formées au sein du Parlement européen parce qu'il y avait ce fameux momentum. Comment est-ce qu'on en est arrivé là ? C'est parce qu'il y a une chose qui a été mise en place dans chacun des dossiers du pacte vert européen, notamment du Fit for Tifa, c'est ce qu'on appelle des clauses de revoyure. Ces clauses de revoyure, c'est un mécanisme juridique, c'est une clause de rendez-vous qui permet justement... d'être activé par la Commission européenne pour réouvrir un dossier et revoir à la hausse ou à la baisse les ambitions qui ont été définies au sein de la mandature qui vient de s'écouler. Pour en prendre un exemple très concret, sur la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2030, en 2026, il y a une clause de revoyure qui prévoit que la Commission européenne va remettre un rapport au Parlement européen et au Conseil pour faire en sorte de juger de l'opportunité de revenir sur la deadline de 2035. Cette clause de revoyure-là, elle menace d'être actionnée par un certain nombre de parlementaires européens, notamment la droite européenne. pour justement revenir sur cet objectif-là. Une fois qu'on a dit ça, pourquoi est-ce que les élections européennes sont dimensionnantes pour l'ambition climatique à l'horizon 2030 ? C'est parce que de l'équilibre qui ressortira des élections européennes de 2024, cela se rejaillira sur les priorités de la Commission européenne. Et donc, Ursula von der Leyen, si elle est réélue, pourrait par exemple subordonner sa réélection à la réouverture. du dossier du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. C'est là où on risque d'avoir une forme de détricotage sur les années à venir. C'est de faire en sorte que l'ensemble de ces clauses de revoyure soient actionnées et ce qu'on appelle un effet boule de neige. Parce qu'à partir du moment où tu reviens sur la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, tu vas être désincitatif sur l'électrification, et donc tu vas avoir des conséquences directes sur la directive énergie renouvelable, tu vas avoir des conséquences directes sur le règlement, sur le déploiement des bornes de recharge tous les 60 km. Et donc c'est là en fait le plus gros risque, c'est qu'on ait une diminution de l'ambition au travers. l'ouverture de ces clauses de revoyure. Et petit instant autopromo, on vient de publier aujourd'hui même, un à l'Institut Jacques Delors, un papier qui analyse en fait comment est-ce qu'on pourrait mettre en œuvre ces clauses de revoyure, quelles sont les conditions... à déployer pour justement tenter de diminuer l'ambition climatique ? Et comment est-ce qu'on pourrait tenter de contrecarrer ça ? On a une proposition qui est la mise en place d'une grande coalition élargie qui verrait le Parti populaire européen, les sociodémocrates, les libéraux et les verts européens opérer un accord de coalition pour justement sauvegarder les objectifs qui ont été décidés jusqu'à présent et qui en échange permettraient justement à la candidate du Parti populaire européen d'être réunie avec une donnée qui convient d'être prise en compte. En 2019, Ursula von der Leyen avait été élue à neuf voix près. Aujourd'hui, sa réélection n'est pas assurée. C'est pour ça que les verts européens qui sont projetés autour des 40 sièges pourraient faire office de socle pour tenter de sécuriser sa réélection.

  • Speaker #1

    Je ferais bien l'intention de mettre le lien de cette note dans la description de l'épisode. Merci beaucoup, Fouk. On va passer au billet de construire l'écologie. C'est à toi Antoine.

  • Speaker #2

    Je voulais vous parler de ce qu'a introduit Alban au début de l'émission, qui est cette histoire de Green Blending, dont la compréhension n'est pas sans intérêt à l'approche des élections européennes. On est vraiment, et c'est ce qu'on a commencé à introduire là, arrivé à un point de bascule. On a d'un côté une prise de conscience de la gravité et du changement climatique et de l'effondrement de la biodiversité qui est de plus en plus large dans la population et qui nous incite à adopter des politiques écologiques de plus en plus ambitieuses. Et en face, on a des groupes d'intérêt qui tentent de rendre ces politiques de transformation écologique responsables de tous les maux pour les discréditer. Avec tout le monde toujours les mêmes arguments, qui sont que ces politiques de transformation écologique seraient systématiquement à l'origine de l'augmentation du coût de la vie, de perte d'emploi et de compétitivité, d'endettement, qui en fait même seraient inefficaces voire contre-productives sur le plan environnemental. Le green blaming, c'est vraiment ça. C'est utiliser des arguments faux, fallacieux ou partiellement faux pour attribuer à une politique écologique des torts qui justifieraient son abandon. Il ne s'agit surtout pas de dire ici qu'il ne serait jamais légitime de remettre en question une politique écologique, puisqu'il y en a certaines qui sont effectivement soit inefficaces, soit socialement injustes, soit les deux. Mais là on parle bien d'autres choses, on parle de critiques qui sont inventées uniquement pour faire échouer des transformations, qui sont d'ailleurs souvent perçues comme trop contraignantes, afin de protéger des intérêts économiques ou de se soustraire à des changements de comportement. Pour rendre ça un peu concret, en fait l'actualité européenne regorge d'exemples de green blaming récents. Sans rentrer dans le détail des controverses autour desquelles chacune de ces opérations de grippes dynamiques se sont organisées, Pour incarner tout ça, par exemple en Allemagne, on a eu une tentative l'année dernière du gouvernement allemand d'interdire l'installation de nouvelles chaudières au gaz pour limiter les émissions de gaz à effet de serre liées au chauffage des bâtiments et aussi pour réduire accessoirement la dépendance du pays au régime autoritaire qui fournit son gaz fossile, celui de Montgard. Ça a provoqué des très vives divisions dans le pays et un recul en bonne et bonne forme qui a été largement alimenté par l'industrie du gaz, par des parties d'extrême droite comme l'AFD et par une coalition de médias conservateurs. Un autre exemple un peu concret, aux Pays-Bas, on a des mesures d'urgence qui ont été prises par le gouvernement pour réduire les pollutions causées par l'excès d'azote lié aux encas azotés dans le secteur agricole. Dans ces mesures, il y avait notamment la réduction de 30% du chèque-tête bovin planifié d'ici 2030, et ça a entraîné des oppositions massives et une montée en puissance du mouvement agriculteur-citoyen, qui est maintenant un parti politique des Pays-Bas, qui est systématiquement opposé aux politiques environnementales. Et en France, plus près de nous, rien qu'en 2023, On a eu un recul du gouvernement sur un projet d'interdiction naissante d'installation de nouvelles chaudières en glace, toujours. On a des zones à faible émission qui visent à réduire la pollution de l'air dans les zones urbaines qui sont très régulièrement des sujets de débat enflammés. Et la simple évocation de la réduction de chez Ptelbovin dans un rapport récent de la Cour des comptes a provoqué un central, là aussi national. Et en parallèle, on a une diabolisation vraiment de... toutes les politiques publiques environnementales contraignantes, qui sont pourtant essentielles pour réussir la transformation écologique. Résultat, on a des droits traditionnels et libérales de la République en marche aux Républicains qui promeuvent de plus en plus une écologie qui serait uniquement incitative, qui n'affecterait pas les intérêts économiques ou le quotidien des Français, et qui réduit forcément la capacité de ces politiques à être vraiment efficaces sur le plan de la décarbonation et de la préservation de la biodiversité. Il faut bien comprendre que ce green blaming, ça marque une grande évolution dans le débat politique autour de la transformation écologique. On n'est plus du tout dans le fait de nier frontalement les crises environnementales, ce qu'on a appelé sur le plan du carbone le climato-négationnisme ou le climato-dénialisme.

  • Speaker #0

    Là, on est vraiment plutôt dans une instrumentalisation des conséquences sociales des politiques de transformation écologique. Donc c'est une stratégie qui est plus subtile, on n'est pas en train de contester la réalité des crises, en fait on ne conteste même pas souvent l'intérêt théorique de la transformation écologique, vous avez des partis de droite ou d'extrême droite qui disent bien sûr, le changement climatique c'est grave, il faut s'en préoccuper mais on attaque les modalités concrètes de la mise en œuvre de cette transformation écologique. Et derrière, comme je le disais dans le cas allemand, mais en fait c'est généralisable à l'ensemble des stratégies de crime blaming, on a une espèce de coalition informelle entre des droites et extrêmes droites européennes, une presse et des médias conservateurs, et puis aussi des regroupements industriels ou corporatistes, alors pas toutes les industries, mais en fait souvent des industries, notamment ceux qui ont raté les créneaux des technologies utiles à la transformation écologique, par exemple des industries automobiles européennes qui ont beaucoup misé sur le véhicule thermique, qui n'ont pas vu venir le besoin. d'électrifier les véhicules, et qui sont maintenant en concurrence avec des acteurs, notamment asiatiques, qui ont fait cette électrification beaucoup plus que eux, qui du coup, constatant que leur production actuelle est incompatible avec les prérequis de la transformation écologique, ils voient une menace pour leur modèle d'affaires. Et ce qui est encore plus triste, c'est qu'il y a d'autres acteurs qui peuvent occasionnellement se joindre à cette coalition, beaucoup plus ponctuellement, on voit même que parfois on a certains partis de gauche ou certains syndicats qui ont une volonté théorique de transformation écologique, mais qui s'opposent à des modalités concrètes de cette transformation. par exemple des parties de gauche qui s'opposent aux véhicules électriques ou à la baisse de la consommation de viande, là encore, suivez mon revient. Pour terminer, comment peuvent se manifester ces opérations de green living ? Il y a un exemple très intéressant qui a eu lieu en France dans... ces derniers mois, il y a eu, comme je le disais, une volonté du gouvernement qui a testé un peu dans le débat public l'idée d'interdire à terme l'installation de nouvelles chaudières au gaz, parce que le gaz fossile émet fortement de gaz à effet de serre dans le secteur du chauffage. Par ailleurs, on sait qu'on ne va pas avoir assez de biogaz pour pouvoir conserver autant de chaudières fossiles que ce qu'on utilise à l'heure actuelle. En face de ça, il y a une technologie qui marche plutôt bien. Il y a d'abord la rénovation thermique de bâtiments, première technologie, puis ensuite, il y a notamment l'usage de pompes à chaleur. qui est un moyen de chauffage basé sur l'électricité, qui est très efficace pour réduire la consommation d'énergie et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Dans tous les scénarios de transition écologique, les pompes à chaleur, d'ici 2050, ça doit représenter entre 30 et 65% des moyens de chauffage utilisés en France. Face à cette idée d'interdiction de nouvelles chaudières au gaz, il y a eu une mobilisation vraiment très forte des industriels de la filière gaz, des politiques de droite, mais aussi malheureusement de certaines ONG écologistes et de syndicats qui s'y sont opposés en critiquant, en remettant en question l'efficacité de ces pompes à chaleur. Alors il y a eu plein d'arguments mobilisés, j'en donne juste deux qui ont été vraiment violemment faux mais pourtant très mobilisés et qui restent encore un peu dans l'esprit de beaucoup. Le premier argument faux, c'est que les pompes à chaleur ne marcheraient pas quand il fait froid. Par exemple quand on a des températures en dessous de zéro. C'est vraiment une idée préconçue qui ne s'appuie sur aucune réalité. Des pompes à chaleur qui fonctionnent en dessous de zéro degré, c'est l'ensemble des pompes à chaleur notamment installées dans les pays du nord de l'Europe. Il faut savoir qu'il y a plusieurs pays du nord de l'Europe dans lesquels la proportion de pompes à chaleur par logement est parmi les plus élevées au monde. Je pense par exemple à la Norvège, plus de la moitié des logements sont chauffés par des pompes à chaleur en Norvège, dans lesquels le climat est beaucoup plus froid que la France. Et vous imaginez bien que les Norvégiens n'utiliseraient pas de pompes à chaleur. si jamais il ne pouvait pas se tromper avec en hiver. Et un autre argument faux, un peu iconique, c'est que les pompes à chaleur ne marcheraient pas dans des maisons mal isolées, et que de façon générale, dans des maisons mal isolées, une pompe à chaleur surdimensionnée, ça entraînerait des surconsommations d'électricité, une fois que la maison devient correctement isolée. Il est derrière, c'est de dire, tant que la maison est bien isolée, il vaut mieux remplacer une chaudière au gaz pour une autre chaudière au gaz que de passer à la pompe à chaleur. Et ça du coup, il y a plusieurs publications récentes qui ont montré que vraiment, on pouvait très bien utiliser une pompe à chaleur et se chauffer correctement, même dans une maison mal isolée, même si ce n'est pas du tout optimal, et que par ailleurs, on est capable de réduire la consommation d'électricité des pompes à chaleur, on est capable de les régler si on fait ces travaux de rénovation énergétique après avoir installé ces pompes à chaleur. et donc c'est vraiment important de se dire que même dans des maisons mal isolées il vaut mieux utiliser une pompe à chaleur, passer à la pompe à chaleur que repartir dans une chaudière au gaz qui va être utilisée pendant 20 ans et émettre des gaz à effet de serre pendant 20 ans donc pour conclure, de façon générale, ces campagnes de green blaming et on va avoir d'autres exemples sans doute avec l'interview suivante dans laquelle on va se localiser plus sur le cas du secteur agricole c'est en train d'entraîner un retour de bâtons écologiques dans toute l'Union Européenne Alors qu'on avait un enjeu écologique qui gagnait en importance dans le débat public et que même la plupart des droites, on en parlait avant, acceptaient la nécessité de la transformation écologique, on a maintenant des politiques concrètes de transformation écologique qui entraînent des oppositions de principe avec deux conséquences réelles, l'échec de projet écologique et la remise en question du principe même de contrainte. collectives nécessaires pour leur mise en œuvre. Et c'est pour ça qu'à construire l'écologie, on a essayé d'identifier cette nouvelle opposition, le green blaming, à travers d'autres exemples concrets que je ne détaille pas ici. La hausse du prix des véhicules qui serait liée à la transformation écologique et à l'électrification des véhicules. Les zones à faible émission qui ne seraient pas des politiques efficaces pour lutter contre la pollution de l'air. La lutte contre les passoires énergétiques qui serait à l'origine de l'explosion du prix des loyers. En fait, tout ça est très largement faux et instrumentalisé. Et ce qu'on a essayé... d'examiner plus en détail dans notre mode. Merci beaucoup Antoine, merci beaucoup Alban de m'avoir épaulé pour cet épisode.

Description

C'est au niveau européen que naissent bon nombre des normes qui ont et auront de plus en plus d’impact sur nos vies. La Politique Agricole Commune, les décisions sur les pesticides, le marché de l’énergie, le marché carbone...


L'UE s'est donné des objectifs audacieux avec le Pacte Vert Européen, incluant cette fameuse neutralité carbone d'ici 2050. Mais alors qu'en 2019 il était plutôt populaire, ce pacte est aujourd'hui sous le feu des critiques, à quelques jours des élections européennes qui éliront les députés pour siéger au Parlement.


Alors, quels progrès ont été accomplis d’un point de vue environnemental ces 5 dernières années et est-ce qu’il y a un risque que tout cela soit détricoté en cas de percée de la droite et de l’extrême droite lors de la prochaine mandature ? Voici les questions auxquelles on va essayer de répondre.


Merci à Albane Crespel et à Antoine Trouche pour leur présence.


Infos: https://linktr.ee/echangeclimatique

Contact: echangesclimatiques@gmail.com

Production: https://onetwo-onetwo.com/

Note Construire l’écologie : https://www.construirelecologie.fr/post/publication-de-notre-première-note

Note Institut Delors : https://institutdelors.eu/publications/pacte-vert-europeen-suite-ou-fin/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bien, bonjour à toutes et bonjour à tous, bienvenue dans ce nouvel épisode d'Échange climatique, un épisode consacré aux élections européennes qui auront lieu le 9 juin prochain. Un sujet pas facile à cerner, il faut dire que nous ne sommes pas aidés par les débats entre candidats où les voix s'enchevêtrent ou des termes barbares comme directive ou règlement sont régulièrement prononcés. Dans cet épisode, on va essayer d'y voir plus clair, on commencera par rappeler à quoi sert et comment fonctionne le Parlement européen. Ensuite, nous dresserons. Un bilan environnemental de la mandature qui s'achève. Et enfin, on se demandera s'il y a un risque de recul sur ces questions lors de la prochaine mandature. Pour cela, nous recevrons Fouque, Vinh, Nguyen, chercheurs sur les politiques françaises et européennes de l'énergie au sein de l'Institut Jacques Delors. Pour m'épauler, j'ai la chance d'être accompagné de deux chroniqueurs du collectif Construire l'écologie, Alban et Antoine. Salut à vous deux.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Alban Krespel travaille dans la transformation écologique dans le logement social et Antoine Trouche dans la suréfférence de la pollution de l'air. En deux mots, est-ce que vous pouvez expliquer ce que c'est que construire l'écologie ?

  • Speaker #2

    Oui, alors Construire l'écologie, c'est un collectif de professionnels de tous horizons, donc des chercheurs, des militants, des professionnels de la transition écologique, des personnes syndiquées de tous horizons qui sont impliqués dans la transformation écologique et qui a été lancée début 2024 avec la volonté d'élargir et de donner une voix à cette coalition d'acteurs de la transformation écologique pour créer des liens entre eux et pour porter... dans le débat public, une vision concrète, structurée et globale de la bifurcation écologique et des moyens de la réaliser. Et aussi de répondre aux personnes qui entendent saboter les ambitions écologiques par ce qu'on appelle le green blaming chez Construire l'écologie, mais on en reparlera plus tard. Et donc ça, ça se fait à travers des événements thématiques et des after-works réguliers.

  • Speaker #0

    Merci Alban, donc comme tu l'as dit Antoine nous partagera tout à l'heure une note de votre collectif du coup sur le green blaming, on comprendra plus tard ce que ça veut dire en détail. Mais avant ça moi je vais vous partager les actus des derniers jours qui ont attiré mon attention. Comme vous l'avez remarqué je ne demande pas de dons pour faire visite à cette chaîne et Youtube rapporte très peu d'argent. Si vous voulez tout de même m'aider vous pouvez vous abonner, c'est un gros coup de pouce pour la chaîne. Merci pour ça. Alors pour les actus que je vous ai réservés cette semaine, on va commencer par la France. Le 22 mai dernier, le Premier ministre Gabriel Attal s'est félicité de la baisse des émissions de CO2 du pays de 5,8% en 2023. Notre action paie a-t-il commenté sur X ? Alors est-ce que cette baisse est le fruit d'une action déterminée ou est-ce le résultat d'autres facteurs ? C'est ce que nous allons voir. Mais avant un peu de contexte, on ne parle ici que des émissions territoriales, celles que la France s'est engagée à réduire dans sa stratégie nationale bas carbone. Et c'est dans ce cadre que nous avons presque respecté notre objectif de réduction d'émissions sur la période 2019-2023. Objectif raté de peu, notamment parce que les puits de carbone ont capté moins que prévu. Le CIDPA, l'organisme indépendant chargé d'évaluer le sujet, nous explique que les sols et les forêts captent deux fois moins aujourd'hui que dans les années 2000, en raison de l'effet couplé de sécheresse à répétition, de maladies affectant... Le taux de mortalité des arbres et d'une hausse des récoltes de bois. Détaillons à présent cette baisse. La plus grosse contribution provient du secteur de l'énergie. On a brûlé moins de gaz et de charbon en 2023 par rapport à 2022 parce que l'électricité bas carbone fut plus abondante. D'une part, le nucléaire et l'hydraulique ont été plus disponibles et d'autre part, de nouvelles capacités de solaire et d'éolien ont été installées. C'est en partie la météo plus douce des mois de janvier et février qui a permis de faire baisser les émissions du secteur des bâtiments où la majorité provient. du chauffage au gaz et au fuel. Le CITPA met aussi en avant la sobriété et l'inflation des prix de l'énergie. Qui a fait quoi entre les deux ? Ça reste difficile à évaluer. L'inflation qui serait aussi en cause dans les autres secteurs, comme celui des transports, premier secteur émetteur en France, et de l'industrie. Les augmentations des prix des carburants à la pompe ont réduit les déplacements non contraints, tandis que la hausse des prix de l'énergie a fait baisser la production d'activités très émettrices, comme celle du ciment, de l'acier et de la chimie. Alors est-ce que cette hausse des émissions de la France est seulement un effet collatéral de l'inflation et de la météo ? Le CITPAM est quand même en avant des effets de moyen et long terme, comme le renouvellement du parc automobile par des voitures électriques, le report modal dans les transports, la rénovation thermique des bâtiments. Et précise que 2023 est une situation inédite, car tous les grands secteurs émetteurs ont baissé leurs émissions sans crise économique majeure. La question qui demeure, est-ce que nous arriverons à garder le rythme dans les prochaines années ? Il y a deux problèmes, comme le dit François Gemmette sur France Info. Le premier, c'est que nos puits de carbone sont de moins en moins efficaces, on l'a vu. Et le deuxième, c'est qu'on s'est fixé une trajectoire linéaire avec le même objectif chaque année jusqu'en 2030, sauf que l'on commence forcément par les émissions les plus faciles à réduire. Dans le secteur de l'énergie, par exemple, il reste peu de gaz et de charbon à éliminer. Donc il faudrait en réalité qu'on ait fait des baisses beaucoup plus marquées dès maintenant. Et j'ajouterais même un troisième problème, celui du désintéressement affiché de l'exécutif pour la cause, en témoignent les coupes budgétaires dans le ministère de la Transition. À l'étranger à présent, de vastes régions d'Asie ont connu des vagues de chaleur entre avril et mai, d'Israël, de Palestine, du Liban et de la Syrie à l'ouest, jusqu'à la Birmanie, la Thaïlande, le Vietnam et les Philippines à l'est, en passant par l'Inde et le Pakistan. Une étude du World Weather Attribution, qui évalue le rôle du changement climatique... dans les phénomènes météorologiques, nous apprend que pour chaque cas, ce dernier a rendu ces températures extrêmes plus probables et plus chaudes. L'organisation dresse une liste d'impacts, mort en nombre bien souvent sous-estimée, augmentation du nombre de déplacés et aggravation des conditions de leur vie comme à Gaza, chômage forcé pour les personnes travaillant à l'extérieur ou encore perte de récolte pour les agriculteurs. Autre dommage, la fermeture des écoles. Ainsi, ces 28 millions d'enfants qui n'ont pas pu aller étudier cette semaine rien qu'au Pakistan selon l'ONG Save the Children, mais ces fermetures ont aussi concerné la Thaïlande, le Bangladesh, les Philippines et l'Inde. La journaliste Marina Fabre-Soundron n'a pas hésité à parler de confinement climatique dans un article sur Novetic. Elle conclut son article avec cette phrase Sans réelle adaptation au changement climatique, de plus en plus de pays sont ainsi contraints de se confiner, mettant à mal leur liberté de déplacement ou d'accès à l'éducation, à vie à ceux qui brandissent l'expression écologie punitive à tort et à travers. Et pour terminer, je voudrais vous parler d'un article scientifique sorti récemment et qui ressemble à une bonne nouvelle. Dans les modèles, un facteur crucial est la sensibilité climatique. Elle mesure de combien la Terre se réchauffe pour une quantité de CO2 émise. En gros, c'est la réaction du climat à nos émissions. Pour la calculer, les scientifiques prennent en compte des boucles de rétroaction, l'observation du réchauffement historique depuis le début de l'industrialisation, des modèles statistiques ou encore l'analyse des climats du passé. Jusqu'à présent, cette valeur était très incertaine. Par exemple, selon le dernier rapport du GIEC, les politiques actuelles pourraient entraîner un réchauffement de 2,1 à 3,5 degrés, avec une estimation centrale à 2,7 d'ici la fin du siècle. Deux climatologues, dont un auteur du dernier rapport du GIEC, ont mené des recherches pour élire cette incertitude et viennent de publier le résultat. Ils montrent que la sensibilité du climat a été jusqu'à présent surestimée. En effet, dans les études précédentes sur le dernier maximum grêle... Sur le dernier maximum glaciaire il y a 20 000 ans, les géantes calottes glaciaires de l'émis mer Nord avaient un effet de refroidissement très important car elles produisaient des nuages bas dans les océans qui réfléchissaient à la lumière du soleil. La sensibilité y était donc élevée et a permis de conclure que celle d'aujourd'hui devait l'être aussi. Mais nos deux scientifiques ont découvert que ces boucles de rétroaction nuageuses sont uniques au climat de l'âge glaciaire et ne s'appliquent donc plus. C'est un peu technique, mais ce qu'il faut retenir, c'est que leur conclusion montre que les valeurs élevées de la sensibilité climatique sont moins probables qu'on ne le pensait. Leur estimation centrale reste la même, mais la borne haute est significativement réduite. En d'autres termes, 2,7°C à la fin du siècle est toujours aussi probable, mais le scénario à 3,5°C s'éloigne un peu. C'est une nouvelle plutôt rassurante, mais déjà ce n'est qu'une seule étude et cela ne change rien au fait que le niveau de réchauffement à la fin du siècle dépendra principalement de nos émissions futures. Si nos objectifs ne sont pas respectés, un réchauffement de plus 4 degrés n'est pas à exclure. Voilà pour mes petites actus. Antoine, Alban, est-ce que vous avez des réactions ? Est-ce que quelque chose vous a interloqué ?

  • Speaker #1

    Je veux bien commencer. Moi, par rapport à ta première actu, il y a un peu deux réactions vis-à-vis de cette baisse des émissions territoriales de la France et je les trouve toutes les deux aussi énervantes l'une que l'autre. Il y a une réaction un peu pavlovienne, notamment, malheureusement, dans pas mal d'ONG écolos de partie de gauche, qui consiste à dire, en fait, cette baisse, elle est liée uniquement à une météo un peu favorable, qui nous a fait consommer moins de carburant carboné pour le chauffage, et à... la souveraineté contrainte en fait, la hausse du coût de l'énergie. Moi je pense vraiment qu'il faut casser un peu cet argument-là, parce qu'on dit ça depuis au moins cinq ans, et qu'on regarde un peu sur ces dernières années, on a quand même eu une baisse nette, je ne parle pas vraiment sur la dernière année, mais sur ces dernières années, on a une baisse nette des émissions territoriales de la France, et c'est plutôt logique parce qu'on a des politiques de décarbonation qui ont été mises en place, pas toujours suffisantes, mais qui ont été mises en place. On va rappeler quand même que depuis les années 90, on a baissé de plus de 30% nos émissions territoriales, on a eu un impact conséquent. et on voit que notamment dans le bâtiment et dans l'énergie, on a des politiques structurelles, des sorts, des pompes à chaleur, des sorts des énergies renouvelables qui ont eu un impact conséquent sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre. Ce n'est pas que de la souveraineté civile ou l'impact de la météo. Après, l'autre position qui m'énerve un peu, c'est celle du gouvernement, qui dit que c'est formidable et vous voyez à quel point on est fort. Parce que comme tu l'as bien expliqué, on est sur un moment qui est plutôt un moment de reflux, à un moment où on est en train de couper dans les hausses. deux crédits qui étaient accordés au ministère de la Transition écologique, alors que là, ce qu'on a fait, ce n'est pas du tout exceptionnel. En fait, c'est à peu près ce qu'il faut faire chaque année d'ici 2030, si on veut atteindre nos objectifs climatiques. Et il faut encore accroître l'effort après 2030. Donc, on est à un moment où il faudrait plutôt se dire, c'est une bonne nouvelle. Par contre, ça ne présage pas du tout du fait qu'à l'avenir, on sera capable de rester sur la bonne trajectoire. C'est vraiment tout l'enjeu. Peut-être juste le tout dernier point important pour moi, donc on parle des émissions territoriales. Évidemment, il y a la question de, est-ce que quand on regarde l'empreinte carbone, si les émissions liées à nos imports, les résultats sont aussi bons ? Il faut bien comprendre que calculer les émissions importées, c'est très très complexe, c'est pour ça qu'on ne va pas avoir les résultats tout de suite. Ce qui est sûr, c'est que dans les derniers résultats qui ont été donnés par le ministère de la Transition écologique pour 2022, on avait une empreinte carbone par habitant qui stagnait depuis les années 2019. Donc en fait, on n'avait pas d'effort. qui étaient visibles depuis les années 2019. Donc ça, c'est plutôt inquiétant. C'est des données encore temporaires, parce que les données définitives, elles ne sont connues que dans quelques années. Mais c'est quelque chose qu'il faut surveiller, parce qu'évidemment, si on compense par nos imports les baisses d'émissions locales, on ne sera pas totalement gagnant.

  • Speaker #0

    Oui, je pense que tu as bien résumé les clivages des derniers jours. Abban, est-ce que tu veux rajouter quelque chose ?

  • Speaker #2

    Non, je pense qu'Antoine a dit la majorité de ce qu'on avait à dire là-dessus. Peut-être juste ajouter effectivement qu'il y a une partie de ces baisses qui sont des baisses... conjoncturelle, mais aussi une partie de baisse structurelle. Pour autant, effectivement, comme on l'a souligné dans une de nos dernières tribunes chez Construire l'écologie, ça ne signifie pas qu'il faut se reposer sur ses lauriers et prendre encore du retard sur la programmation pluriannuelle de l'énergie, la stratégie française énergie-climat, le plan d'adaptation nationale au changement climatique. On a des textes qui prennent un peu de retard et il ne faudrait pas que ça vienne... Comment dire ? entraver les efforts qui sont faits en la matière. Donc voilà, c'est le seul point que je voulais ajouter.

  • Speaker #0

    Merci à vous deux. On va passer maintenant à notre sujet du jour, qui est la politique environnementale de l'Union européenne. Quels progrès ont été accomplis d'un point de vue environnemental ces cinq dernières années ? Et est-ce qu'il y a un risque que tout cela soit détricoté en cas de percée de la droite et de l'extrême droite lors de la prochaine mandature ? Voici les questions auxquelles on va essayer de répondre. On va commencer par les sujets énergie et climat avec vous, Fouk, Vin et Nguyen. Bonjour. Bonjour. Je rappelle que vous êtes chercheur sur les politiques françaises et européennes de l'énergie au sein de l'Institut Jacques Delors. On va peut-être commencer par un rappel du fonctionnement du Parlement européen, parce que c'est quelque chose d'assez complexe. Est-ce que vous pouvez nous expliquer un petit peu comment ça marche ?

  • Speaker #3

    Oui, donc du 6 au 9 juin prochain et le 9 juin en France, on va être appelé aux urnes pour élire des eurodéputés, donc des députés européens. qui vont donc siéger à Bruxelles et à Strasbourg afin de discuter des futures ambitions climatiques de l'Union européenne. Le Parlement européen, qu'est-ce que c'est ? C'est donc 720 eurodéputés qui vont être élus afin justement de pouvoir très concrètement réfléchir sur l'ambition climatique de l'Union européenne vis-à-vis des objectifs 2030, 2040, 2050. À l'heure actuelle, ils disposent de ce qu'on appelle un pouvoir de co-décision, c'est-à-dire qu'au côté des États membres, enfin du Conseil, ils vont pouvoir réagir aux propositions qui sont mises sur la table par la Commission européenne. Donc la Commission européenne propose un texte de loi, et puis ce texte de loi ensuite est débattu de manière conjointe au sein du Parlement européen, donc au travers des commissions thématiques dans un premier temps, donc des commissions dédiées par exemple à l'énergie, à l'emploi, au commerce international. Et puis ces députés européens vont donc mettre en place des amendements, des compromis, pour justement en fonction de l'équilibre politique déterminer l'ambition du texte. Et puis ce texte sera à in fine voté au sein de ce qu'on appelle une plénière avec les 720 eurodéputés. Les États membres de leur côté font ce même travail, et puis lorsque les États membres ont déterminé une position de négociation, et que le Parlement a fait pareil, on va se réunir dans ce qu'on appelle des trilogues, qui vont réunir la Commission européenne, le Parlement européen et les États membres, pour tenter d'obtenir des compromis. Une fois qu'on a obtenu ces compromis, le texte de loi sera ensuite validé encore une fois par le Parlement européen, puis par les États membres. Et puis il prendra forme une fois que tout ça aura été validé. Tout ça pour dire que c'est un processus qui est assez chronopage. On reproche souvent à l'Union européenne de mettre beaucoup de normes en place, mais en réalité ces normes, elles mettent du temps. à être mis en place parce qu'il faut obtenir des compromis texte par texte et qu'aucune majorité n'est évidente au sein du Parlement européen. Et c'est ce qui permet de garantir un respect des équilibres politiques de manière générale. Une fois qu'on a dit ça, le Parlement européen a d'autres pouvoirs. Il a également un pouvoir d'adoption du budget annuel de l'Union européenne, ce qui n'est pas rien, et du budget pluriannuel de l'Union européenne. Il a également aussi, et c'est là où ça sera très important, le rôle d'avaliser, de voter pour le ou la future présidente de la Commission européenne. C'est-à-dire qu'en réalité, à partir du moment où le futur président de la Commission européenne devra être avalisée par le Parlement européen, eh bien, elle devra donner des gages vis-à-vis de ce dernier et respecter l'équilibre politique qui va ressortir des élections du 6 et du 9 juin prochain. Dit autrement, à partir du moment où personne n'a la majorité absolue au sein du Parlement européen, vous devez donner des gages aux sociodémocrates, aux partis populaires européens, et on y reviendra dessus par la suite, pour faire en sorte justement d'avoir un équilibre politique qui tienne la route.

  • Speaker #0

    Tu l'as dit, je pense que le maître mot c'est compromis. Antoine, tu avais une question sur le poids du Parlement dans les décisions.

  • Speaker #1

    Oui, exactement. Là, on va donc voter pour le Parlement. Les autres organes de l'Union européenne, en fait, on a directement voté pour eux lors des élections législatives. Moi, la question que je me pose, c'est en fait, à la fin, dans les concertations et dans les équilibres qui sont trouvés entre notamment le Parlement et le Conseil de l'Europe, en fait, qui gagne un peu à la fin ? et comment se fait le rapport de force dans le sens où sur les textes de les pouvoirs, j'ai eu l'impression, mais c'est peut-être une impression erronée, que le Parlement assez systématiquement tendait à essayer de rehausser l'ambition des textes qui étaient proposés initialement, et que le compromis à la fin se rapprochait quand même plus de la proposition initiale du Conseil que de la position sur laquelle le Parlement s'est rencontré. Donc voilà, est-ce que c'est juste et comment se fait ce rapport de force ?

  • Speaker #3

    Exactement. Déjà, une précision qui montre la difficulté de tout ça, c'est que tu as parlé du Conseil de l'Europe, ce n'est pas le Conseil de l'Europe, c'est le Conseil de l'Union Européenne. Le Conseil de l'Europe, c'est autre chose liée à la CEDH notamment, mais l'idée étant vraiment de dire que le Conseil de l'Union Européenne, c'est les représentants de chaque état, chaque ministre qui a le droit au dossier. Dit concrètement, en France par exemple, Roland Lescure, qui est un ministre lié à l'énergie, eh bien… C'est lui qui va siéger avec ses 26 autres homologues pour déterminer la position du Conseil de l'Union européenne sur les questions énergétiques. Une fois qu'on a dit ça, qui est-ce qui va gagner remporter les arbitrages ? Tu l'as très bien expliqué, le Parlement européen sera toujours celui qui va tenter de rehausser l'ambition vis-à-vis de la proposition de la Commission européenne. Prenons un exemple très concret sur la directive énergie renouvelable. C'est le Parlement européen qui a fait en sorte de se positionner sur un objectif de 45%. Les États membres étaient un peu plus frileux, ils baissaient pour cette ambition. Et au final, on a tranché entre les deux, on a fini sur un objectif de 42,5%. Tout ça pour dire que ça, c'était la position entre 2019 et 2024. Ça ne sera pas forcément la position qui va rejaillir des élections européennes, puisqu'on y reviendra. par la suite, on aura vraisemblablement un Parlement européen plus à droite, donc vraisemblablement moins ambitieux sur les questions climatiques. Et puis, il faut aussi rappeler une chose, c'est que le Parlement européen se bat beaucoup pour avoir un droit d'initiative, c'est-à-dire pouvoir mettre à l'agenda un certain nombre de questions. Il ne dispose pas à l'heure actuelle de ce droit d'initiative, et c'est éventuellement une réforme institutionnelle qui pourrait être menée dans les années à venir pour justement permettre d'avoir une forme de démocratie plus directe. Tu l'as très bien dit, on vote directement pour ces eurodéputés. Par contre, on ne vote pas pour les ministres qui composent le Conseil de l'Union européenne. Et donc là-dessus, pour avoir une forme de rééquilibrage et faire en sorte que les citoyens aient droit... sur les dossiers qui vont être discutés au niveau européen, on pourrait tenter de faire en sorte de renforcer le pouvoir du Parlement européen sur les années à venir. C'est toutes les questions qui se posent de manière plus générale, mais ça implique également éventuellement une réforme des traités qui requiert derrière l'unanimité des 27, ce qui est évidemment très compliqué à obtenir au niveau européen.

  • Speaker #0

    Comme on a commencé à évoquer le sujet des partis faux, est-ce que tu peux juste nous poser un peu les bases s'il te plaît ?

  • Speaker #3

    Jusqu'à 2019, C'était une alliance qui était composée de ce qu'on appelle le Parti Populaire Européen, donc la droite européenne, les Républicains en France, avec les sociodémocrates, le Parti Socialiste en France, qui jusqu'à présent détenaient la majorité absolue. qui permettait donc en fait, lorsqu'ils votaient ensemble, de gagner les amendements, de remporter les textes et d'imposer un peu, entre guillemets, leur vision. En 2019, pour la première fois, on a eu une situation toute nouvelle qui a fait que le Parti populaire européen et les sociodémocrates à eux deux n'avaient pas la majorité absolue. Ils ont dû chercher un troisième parti pour pouvoir justement opérer une alliance. C'est donc naturellement qu'ils se sont retournés vers les libéraux. donc en France c'est l'équivalent d'Emmanuel Macron, et au niveau européen il s'appelle Renew, ces libéraux étaient ce qu'on appelle les faiseurs de roi et permettaient d'obtenir une majorité absolue au sein du Parlement européen. Et donc en fonction des textes, ils pouvaient décider d'avoir une ambition, on va dire notamment sur les climatiques, plus ambitieuse, ou alors au contraire tenter de diminuer l'ambition en fonction de leur doctrine. Et puis il y a d'autres groupes, politique au sein du Parlement européen. Il y a donc les Verts européens qui ont connu une percée assez importante en 2019. suite notamment aux mobilisations climat pour faire en sorte justement de pouvoir tenter de peser au sein du Parlement européen. Il y a ce qu'on appelle la GUE, qui est entre guillemets l'extrême gauche qui correspond à la France insoumise au sein du Parlement européen, qui a environ une quarantaine de membres. Et puis de l'autre côté de l'échec qui est politique, il y a ce qu'on appelle les conservateurs européens, ICIER, qui correspond au parti de Giorgia Meloni en Italie. En France, c'est plutôt Éric Zemmour, mais c'est un peu moins représentatif, il faut rester vraiment sur la logique de Thierry Jameloni au niveau européen. Et puis, ce qu'on appelle l'extrême droite, donc identité-démocratie, qui est composée notamment du Rassemblement National en France. Vis-à-vis de ce parti d'extrême droite, il y a ce qu'on appelle un cordon sanitaire. Je pense que c'est important de le rappeler parce qu'à la différence de la France, ce cordon sanitaire fait en sorte qu'on ne croit pas de poste à responsabilité à l'extrême droite au niveau européen. Dit autrement, en France, Sébastien Chénu est vice-président de l'Assemblée nationale. Au niveau européen, il est impossible qu'une personne qui appartienne au groupe d'identité et démocratie obtienne... Un poste de caisseur au niveau du Parlement européen, un poste de vice-président du Parlement européen ou un poste de président d'une commission au niveau du Parlement européen. Ça, c'est très important parce qu'en fait, ça va déterminer également la lecture politique une fois que les élections seront terminées. On sera sur une recherche d'une alliance entre les groupes du Parti populaire européen, des sociodémocrates, des libéraux, éventuellement des conservateurs ou alors des verts. Mais l'extrême droite sera très clairement ostracisée au sein du Parlement européen.

  • Speaker #0

    Juste une dernière question sur le fonctionnement avant de rentrer dans le cœur du sujet. Quelle est la répartition des responsabilités entre États membres et Union européenne en termes d'énergie, du climat, en d'autres termes, qui décide entre la France et l'Union européenne sur sa politique énergétique ?

  • Speaker #3

    Article 194 TFUE du traité de fonctionnement de l'Union européenne, si on revient à la base, qui fait qu'en fait, il y a sur un certain nombre de dossiers... la possibilité pour les États membres de conserver un regard sur, par exemple, leur mix énergétique. Donc là-dessus, l'Union européenne ne va rien nous imposer. Par contre, un certain nombre de décisions qui sont prises au sein de l'Union européenne, par exemple lorsqu'on détermine des objectifs sur les énergies renouvelables, vont avoir une conséquence très directe sur la manière dont on va devoir déployer ça en France. Donc vraiment, on est sur une logique de compétences partagées. avec un impératif qui est quand même nécessaire sur des questions par exemple de fiscalité, les États membres conservent également un droit de regard. Et puis de manière plus générale, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'à partir du moment où, et on l'a vu avec la guerre en Ukraine, on arrive à se mettre d'accord au niveau européen sur des objectifs communs, par exemple sur un objectif de réduction de la consommation de gaz, et bien il y a ensuite une forme de translation au niveau national, c'est-à-dire que le niveau national va appliquer autant que faire se peut. et en fonction de ses propres considérations. C'est-à-dire que si vous êtes un grand consommateur de gaz, vous allez diminuer vos objectifs de manière plus significative que si vous êtes un pays qui, traditionnellement, ne consomme pas de gaz. C'est un peu la répartition, pour être très schématique, entre les compétences européennes et les compétences des États-Unis.

  • Speaker #0

    Ok. Donc, on va se jeter dans le cœur du sujet. On va commencer par le... L'énergie et le climat, je le dis en intro, en 2019 a été signé le pacte vert qui vise à reformer l'ensemble des secteurs de l'économie européenne grâce à plus de 75 textes législatifs. Concernant la réduction des gaz à effet de serre, il y a le paquet Fit for 55. Est-ce que tu peux nous expliquer ce que c'est, s'il te plaît, Fouque ?

  • Speaker #3

    Oui, tout à fait. Donc le Fit for 55, qui a justement l'objectif 55, si vous voulez le traduire en français, c'est l'objectif de réduire de 55% nos émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990. Une fois qu'on a dit ça, on a opéré une forme de réforme législative qui va tenter de repenser la manière dont on produit, dont on consomme, dont on se déplace, et qui va toucher au quotidien très concret des Français. C'est par exemple la mesure la plus emblématique, la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, mais vraiment, je voudrais insister sur la logique systémique de cet ensemble-là. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on a... on met fin au véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, on va en même temps mettre en place un règlement pour favoriser l'essor des bornes de recharge tous les 60 km, on va en même temps favoriser avec une directive dédiée la promotion des énergies renouvelables pour favoriser l'électrification, justement parce qu'on va promouvoir le 100% électrique. Et donc là, c'est vraiment une logique d'ensemble qui fait que tout ça a été pensé de manière concrète et conjointe. On ne peut pas donc déterminer et singulariser une seule mesure, on doit vraiment réfléchir ça de manière collective, pour faire en sorte justement qu'à l'horizon 2030, on réduise de 55% nos émissions de gaz à effet de serre. Il y a d'autres mesures qui sont mises en place, on va sûrement y venir dessus par la suite, mais... il faut vraiment insister sur le fait que désormais, on s'est doté d'objectifs très concrets à l'horizon 2030. Donc ça, c'est ce qu'a fait l'Union européenne et c'est ce qu'essaie de faire le mieux, c'est-à-dire réglementer. Et désormais, en fait, on s'ouvre sur une nouvelle face, c'est-à-dire la mise en œuvre au niveau national et puis la détermination des objectifs pour l'horizon 2040. Mais ça, on y reviendra dessus par la suite.

  • Speaker #0

    L'Union européenne, c'est aussi un marché du carbone qu'on nomme aussi ETS1 pour les intimes. Alban, est-ce que tu avais une question sur ce sujet ?

  • Speaker #2

    Oui, effectivement. L'Union européenne s'est dotée d'un premier système d'échange des quotas d'émissions en 2005. Est-ce que ce fameux marché carbone, qui est un pilier important de sa stratégie en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, est-ce que tu pourrais nous dire comment il fonctionne, à quel secteur d'activité il s'applique, et est-ce qu'aujourd'hui on sait s'il a eu un impact sur les émissions de gaz à effet de serre européennes ?

  • Speaker #3

    Oui, concrètement, le marché carbone européen, c'est l'application du principe polyurépaire. C'est-à-dire que pour les industries et pour les producteurs d'électricité, à partir du moment où vous émettez une tonne de CO2, vous allez payer l'équivalent d'un prix carbone. Ce prix carbone est déterminé selon des lois de marché. Et jusqu'en 2018-2019, ce prix carbone était très faible, il était autour de 5 euros la tonne de CO2, ce qui était en fait assez rédhibitoire parce qu'il n'était pas utile pour envoyer un signal prix. On a opéré des réformes et en fait, à partir du moment où le prix carbone a augmenté, a atteint notamment un prix autour des 30 euros la tente de CO2, il a bouleversé ce qu'on appelle l'ordre de mérite au niveau européen, c'est-à-dire qu'il a permis de renchérir la production d'électricité à partir de charbon. pour la rendre non compétitive vis-à-vis de la production d'électricité produite à partir de gaz. Et ça, c'est très significatif d'un point de vue des émissions climatiques. Pourquoi ? Parce que produire de l'électricité à partir du charbon, c'est deux fois plus émetteur que produire de l'électricité à partir du gaz. Donc, à partir du moment où on avait un prix carbone autour des 30 euros la tente de CO2, il était plus rentable économiquement de produire de l'électricité à partir du gaz. Et donc ça, ça a eu un effet très concret sur la réduction des émissions de CO2 au niveau européen. sur les dernières années. Et puis, les industries également étaient soumises à ce prix carbone. Sauf que les industries, elles bénéficiaient, elles bénéficient d'ailleurs toujours de ce qu'on appelle des allocations gratuites, c'est-à-dire des droits à polluer, qui sont octroyés par le système afin de faire en sorte justement d'opérer une transition au sein du secteur industriel et d'éviter que la transition soit trop abrupte et que cela renchérisse les coûts pour l'industrie de manière trop conséquente.

  • Speaker #0

    On a opéré des modélisations et on a opéré également des reporting. On s'est rendu compte que l'industrie comparée au secteur de la production d'électricité avait baissé de manière beaucoup moins drastique ses émissions de gaz à effet de serre justement parce qu'elle avait trop d'allocations gratuites qui faisaient qu'elle avait donc trop de droits à polluer de manière gratuite. On a donc opéré une réforme au sein du fameux Fit for 55 pour faire en sorte que d'ici 2030, d'ici 2035, on diminue très concrètement les allocations gratuites qui étaient données à ces industries pour faire en sorte de les inciter au travers du prix carbone à investir dans la recherche et le développement pour faire en sorte de verdir leur industrie. Et donc là, on est vraiment sur un marché carbone qui va faire en sorte, sur un horizon de temps 2030-2035, d'orienter les comportements des industriels et de renchérir leurs coûts de production et donc de les inciter à opérer une décarbonation au travers soit de l'électrification, soit... le remplacement au travers notamment par exemple de l'hydrogène vert pour faire en sorte justement d'être vertueux d'un point de vue des émissions de gaz à effet de serre. Et puis ce marché carbone, il doit se penser de manière un peu plus systémique, on revient dessus par la suite, avec un mécanisme qui a été mis en place au niveau européen au travers du feed for feed-file, c'est ce qu'on appelle le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, ce que les politiques vont vulgariser en taxes carbone aux frontières, qui font en sorte que... Puisqu'on va renchérir nos coûts de production au niveau européen en mettant un prix carbone, et donc on va faire en sorte que l'acier soit plus cher à partir du moment où il est produit dans des conditions peu vertueuses, on va faire en sorte que lorsque l'acier est importé par exemple de Chine, on renchérisse cette importation avec un prix carbone à partir du moment où il franchit la frontière, pour faire en sorte qu'il y ait ce qu'on appelle... en anglais un level playing field, une forme de compétition équitable entre l'acier qui est produit en Chine à partir du charbon et l'acier qui va être produit en France ou en Europe à partir d'énergies renouvelables, du nucléaire ou du gaz, pour faire en sorte justement que cet acier soit assez compétitif à partir du moment où il est produit dans des conditions assez peu environnementales. en Chine pour faire en sorte justement d'avoir une compétitivité au niveau européen vis-à-vis nos partenaires internationaux.

  • Speaker #1

    Ce mécanisme d'ajustement aux frontières, est-ce qu'il est satisfaisant aujourd'hui ou est-ce qu'il faut le renforcer ?

  • Speaker #0

    Alors, il va être mis en place au niveau européen, donc on est vraiment dans sa toute première itération. Donc il est encore dans ses balbutiements et il va, il faut être très pragmatique, il va y avoir, je pense, des trous dans la raquette, c'est-à-dire qu'on ne pourra pas faire en sorte de pouvoir à l'heure actuelle couvrir l'ensemble des émissions. Il s'applique à un nombre très réduit de secteurs, l'électricité, l'acier, le fer notamment. Donc il faut être très prudent, mais il va monter en puissance d'ici à l'horizon 2035 pour faire en sorte justement de protéger l'industrie européenne. Donc il va falloir travailler main dans la main avec les industriels pour identifier là où il y a encore des manques. Il va également faire en sorte de rendre le mécanisme entre guillemets le plus simpliste possible parce que ça va rajouter des charges pour les industriels, des charges déclaratives. pour toujours monitorer leur production, également faire des reporting auprès de la Commission européenne. Mais très concrètement, c'est un instrument qui a pour objectif de rééquilibrer la balance commerciale et rééquilibrer le rapport de force vis-à-vis des partenaires internationaux. Et puis, il faudra également être très précautionneux, parce que là, la manière dont on présente, c'est vraiment un rapport de force vis-à-vis de la Chine, un rapport de force vis-à-vis d'autres pays comme la Turquie, les États-Unis, mais ça va avoir également des conséquences internationales vis-à-vis d'autres pays. à des pays tiers, comme par exemple des pays africains, qui nous exportent à l'heure actuelle, par exemple, des denrées, l'aluminium, etc., et qui représentent un poids très important dans leur balance commerciale. Donc là-dessus, vu que c'est des pays en développement, on peut s'alarmer du fait que ce mécanisme-là pourrait avoir des conséquences assez délétères, parce que c'est une rentrée d'argent financière très importante pour eux, qui peut ensuite permettre... leur développement et faire en sorte vraiment de calibrer ça en fonction des partenaires internationaux qui sont concernés. Et tout ça doit se faire également dans le respect des règles de l'OMC. Donc une fois que j'ai dit tout ça, tu te rends bien compte que c'est assez compliqué de mettre en place un mécanisme sur le très court terme qui soit très très complet.

  • Speaker #1

    C'est clair, c'est un gros sujet. Antoine, tu avais une question sur une autre norme, sur une autre directive ?

  • Speaker #2

    Oui, parce qu'on parle beaucoup en Europe et à raison de tout ce qui a été fait sur les transports, notamment l'interdiction à la vente des véhicules thermique neufs à partir de 2035. Il y a une autre directive qui, j'ai l'impression, est beaucoup moins bien connue qui est la directive sur l'efficacité énergétique des bâtiments et qui est une directive qui est en fait assez dure parce que dans… vraiment de façon très… En général, c'est une directive qui va avoir un impact très fort sur les moyens de chauffage qu'on va avoir le droit d'utiliser dans les bâtiments en Europe à partir de 2030. et encore plus tôt pour les bâtiments publics à partir de 2021, si je ne me trompe pas. Et c'est une directive encore plus dure sur les efforts qu'il va falloir faire pour réduire la consommation d'énergie des bâtiments, parce que si je ne me trompe pas, ça fait partie des bâtiments, ça fait vraiment partie des secteurs dans lesquels, notamment grâce à la rénovation thermique, on peut le plus économiser de l'énergie, le plus facilement, avec plein de guillemets, parce que ce n'est même pas si simple que ça. Donc est-ce que c'est possible que tu nous en parles un peu plus ? Oui,

  • Speaker #0

    complètement. On a donc un objectif contraignant au niveau de l'Union européenne qui a été adopté, pour réduire vraiment de 11,7% les objectifs d'efficacité énergétique. Je souligne vraiment 11,7% parce que ça te montre le degré de granularité de l'Union européenne. Vraiment, quand on parle de compromis, c'est qu'on va le négocier à la virgule près. C'est-à-dire qu'un certain propose 12,5%, d'autres proposent 12%, et bien on va parfois trancher entre les deux, on va arriver à 11,7%. Et ça en fait, pourquoi est-ce qu'on met en place ce principe d'efficacité énergétique ? C'est qu'on va tenter de donner la priorité à cela parce que... On s'est rendu compte de manière très concrète que les bâtiments qui vont être construits aujourd'hui, ils vont être encore là pour les années, les décennies à venir, d'ici 2100. Donc en fait, le premier objectif, il est de faire en sorte que dès que tu construis un bâtiment, il soit bas carbone, pour faire en sorte justement d'optimiser la consommation d'énergie, dans une logique d'efficacité énergétique. Et puis après, on va mettre en place la rénovation énergétique des bâtiments, pour faire en sorte justement... de minimiser la consommation d'énergie et, quand et, de faire d'une pierre deux coups, si je permets, c'est de sortir les personnes de la situation de précarité énergétique. Au niveau européen, selon les estimations à l'heure actuelle, 34 millions de personnes sont encore en situation de précarité énergétique. Donc à partir de là, l'objectif est de dire qu'on va rénover les bâtiments pour faire en sorte d'éviter de brûler trop de gaz pour se chauffer et en même temps, on va améliorer le quotidien des Européens. C'est ça l'objectif sous-jacent de la directive sur l'efficacité énergétique. Pour ce faire, on s'est doté d'une trajectoire qui est très ambitieuse de réduction d'annuelles d'économies au niveau national, qui vont doubler entre 2028 et 2030, et qui vont imposer aux États-Unis un rythme très fort de rénovation énergétique des bâtiments. Une fois qu'on a dit ça, et tu le rappelais tout à l'heure, ça va rentrer en contradiction directe. Avec l'austérité budgétaire qui pointe son nez au sein des états membres. Pourquoi ? Parce que rénover des bâtiments, c'est extrêmement coûteux. Et donc là-dessus, même avec l'ensemble des aides qui sont mises en place au niveau européen, déjà ça prend du temps, les aides ne sont pas souvent de manière très claire et donc il faut opérer une forme de démarchage, etc. Et puis derrière, il faut engager énormément d'emplois. Et donc la question qui se pose, c'est comment est-ce qu'on va derrière aussi soutenir les ménages pour faire en sorte d'opérer cette rénovation énergétique des bâtiments. Il y a des mécanismes qui ont été mis en place au sein du FITFACTIFAC, notamment ce qu'on appelle un fonds social climat, on reviendra dessus par la suite, d'aider les ménages à faire cela, mais il faut être très concret sur le fait que le retour sur investissement se fera sur le moyen long terme, alors que l'impératif et la contrainte économique, elle pèsera immédiatement sur les ménages. Et donc là, on est vraiment sur... résoudre cette fameuse équation entre fin du mois et fin du monde. Évidemment, les factures énergétiques ont extrêmement augmenté avec les conséquences de l'inflation qui sont nées de la guerre en Ukraine, mais si on ne débloque pas des schémas pour permettre justement d'opérer ces rénovations énergétiques des bâtiments et qu'on n'acte pas le fait qu'on doit apprécier ça sur le moyen long terme, ça c'est le rapport Pisaniféré qui a été mis en France, eh bien, on ne pourra pas opérer cette transformation au niveau national et au niveau européen de manière

  • Speaker #1

    Puisqu'on revient inexorablement sur cette question du financement, est-ce que tu peux nous parler de ce Fonds Social Climat, s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, le Fonds Social Climat, c'est la contrepartie de l'extension du marché carbone européen. Tout à l'heure, avec Alban, on parlait du marché carbone européen, l'ETS, qui portait sur les industries et sur la production d'électricité. Ce marché carbone européen va être étendu en 2027 aux bâtiments et aux transports. des particuliers notamment. C'est-à-dire qu'en fait, ça va très concrètement renchérir d'une certaine manière, il faut être très concret, la structure de tout un chacun pour faire en sorte justement d'orienter les comportements. À partir du moment où on aura des transports routiers, par exemple les voitures individuelles, les bus ou les bâtiments, le chauffage résidentiel et commercial, qui vont être taxés, Il faut mettre en place, de manière parallèle, un fonds pour justement permettre aux personnes de sortir de cette situation. où leurs voitures individuelles, leurs bâtiments sont taxés en rénovant les bâtiments, en passant aux véhicules électriques. C'est tout l'intérêt du Fonds social climat. Le Fonds social climat, ça va être un fonds de 65 milliards d'euros sur la période 2026-2032 au niveau européen, pour faire en sorte justement... d'aider les ménages à sortir du véhicule thermique, à rénover leurs bâtiments. Ce fonds européen va être alimenté directement par les États-Unis et également par les revenus du nouveau marché carbone européen. Il aura pour objectif de financer les rénovations énergétiques des bâtiments, de financer les bandes de recharge, de financer le passage aux véhicules électriques, de financer le leasing social qu'on a mis en place en France qui jusqu'à présent a fait preuve d'une certaine forme d'engouement, ce qui est une bonne chose. pour justement magnifier les politiques publiques qui sont menées au niveau national. Mais ce Fonds social pour le climat, il faut être très clair là-dessus, et on le voit avec l'exemple français, où lorsqu'on doit faire des économies budgétaires, la transition énergétique est celle qui va le plus trinquer, qui est le plus mis à contribution avec le Fonds vert ou encore la prime rénov', le Fonds social climat ne devra pas justement compenser le fait qu'on sera dans une situation de... d'austérité budgétaire au niveau national. C'est-à-dire qu'il faudra augmenter les moyens donnés à la rénovation énergétique et des bâtiments. Le Fonds social pour le climat ne devra pas seulement compenser la baisse qu'on pourrait tenter d'être observée au niveau national. Et donc là-dessus, la question qui se pose, c'est comment est-ce qu'on va permettre également de protéger les plus vulnérables ? Parce que les plus vulnérables seront les plus exposés à ce nouveau marché carbone européen. Marché carbone européen qui, si les prix... de l'énergie venait à être trop élevé ne serait pas lancé en 2028, mais en 2028. Là où le Fonds social climat serait lancé en 2026, c'est-à-dire préalablement, pour tenter justement de permettre d'opérer en amont un changement de comportement et un changement dans le quotidien des Français.

  • Speaker #1

    Pour parachever ce panorama des nouveautés, tu voulais nous parler de la réforme du marché de l'électricité. Alors évidemment sans rentrer dans trop de détails parce qu'il faudrait 4-5 épisodes, mais est-ce que tu peux nous parler des enjeux s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, je voulais parler de cette réforme parce que c'est quelque chose qui est très significatif de ce qu'on a réussi à faire au niveau européen à très très court terme, c'est-à-dire dans l'urgence. et en même temps ce qu'il faudrait faire au niveau européen sur le moyen d'en faire. Dit concrètement, hier en Ukraine, on a eu une explosion des prix de l'électricité pour une raison très simple, c'est qu'au niveau européen, 20% de l'électricité est encore produite à partir de gaz. À partir de ce moment-là, et du fait que l'électricité ne se stocke pas, la manière dont fonctionne le marché européen, c'est de dire que À partir du moment où on a des pics de consommation, lorsque l'on rentre chez soi le soir pour produire de l'électricité, ou le matin lorsqu'on se réveille et qu'on fait marcher la machine à café, on a donc des pics de production d'électricité, et que pour répondre à ces demandes d'électricité, il faut activer des centrales à gaz, sinon on n'a pas assez d'offres pour répondre à la demande, et on est dans une situation de blackout au niveau européen. Donc à partir du moment où les prix du gaz avaient été multipliés par 10, cette translation-là s'opérait sur les prix de l'électricité. On a donc opéré une réforme dans l'urgence, vraiment, pour tenter de décorréler les prix du gaz des prix de l'électricité. On peut discuter... une année de est-ce que ça marchera ou ça marchera pas ? mais on a fait ça dans l'urgence et on a fait ce que l'Union Européenne ne sait pas bien faire en réalité, c'est légiférer dans un temps très court. Parce qu'en fait, on n'a pas le temps d'opérer des études d'impact, on n'a pas le temps également de prendre en compte toutes les considérations sociotechniques et les implications que ça aura sur les citoyens. Donc en fait, on a fait quelque chose, on a opéré, on a fait un pansement, on va dire, pour faire en sorte de réformer ce marché européen de l'électricité. Mais ce marché européen de l'électricité, il va falloir le réformer également de manière plus générale à l'horizon 2024-2029 pour intégrer une chose très concrète, c'est que selon les modélisations de la Commission européenne, à l'horizon 2030, 70% de notre électricité sera produite à partir des énergies renouvelables. Et ça, le marché européen de l'électricité qui est designé à l'heure actuelle, il n'est pas prêt pour ça. Et ça te montre en fait tout l'enjeu de ce qui se passe au niveau européen, c'est qu'on pense le moyen long terme. on ne pense pas forcément le court terme. Par contre, lorsqu'on doit penser le court terme, c'est qu'on est dans une situation de crise. C'est ce qu'on a fait avec les nombreuses déclarations, notamment de nos dirigeants politiques, qui ont utilisé le marché européen de l'électricité comme étant un bouc émissaire pour expliquer une partie de la hausse des factures. Même si, en fait, une fois la réforme est passée, on est resté sur le même mécanisme de formation des prix de l'électricité au niveau européen. Donc, on a beaucoup tapé dessus, mais en réalité, on est resté sur une logique très... européennes sur ces questions-là. Et cette logique européenne, il faudra la pousser plus loin, mais la pousser plus loin lorsqu'on n'aura pas une forme de pression politique là-dessus. Et c'est ça, en fait, le pacte vert européen. C'est qu'on a travaillé pendant cinq ans presque en sous-main. C'est-à-dire qu'on n'entendait pas parler du pacte vert européen. Et de manière très paradoxale, la première fois qu'on a entendu parler du pacte vert européen, c'est quand il y avait la colère des agriculteurs. C'est quand il y avait des agriculteurs dans la rue pour justement dénoncer, d'une certaine manière, le pacte vert européen. qui ont été votés dans ce pacte européen sur le volet agricole ne sont même pas mis en place. Donc c'est une question aussi de récit derrière. C'est vraiment une question de comment est-ce qu'on est capable de déployer un récit vis-à-vis de ce pacte européen qui à l'heure actuelle a été amalgamé par une certaine partie de la classe politique et a même été instrumentalisé en amont des élections européennes.

  • Speaker #1

    Et c'est loin d'être nouveau. On peut dire que globalement, cette mandature a été assez productive d'un point de vue environnemental. Quel bilan tu tirerais ? Peut-être nous parler aussi de ce qui n'a pas marché.

  • Speaker #0

    Sur les questions de l'énergie, sur les questions du transport, on a fait énormément et là on peut considérer que c'est un succès. On a parlé depuis tout à l'heure énergie renouvelable, fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. Il y a tout un tas de mesures qui ont été adoptées au niveau européen et qui sont vraiment dans la lignée de l'atteinte de nos objectifs à l'horizon 2030. Sur la question environnementale, par contre, on a eu des reculs très forts. En tout cas, on a eu des bémols très forts qu'on vient de mentionner. notamment en amont des élections européennes. C'est-à-dire que sur la loi sur la restauration de la nature, qui permet de protéger l'écosystème, si je suis vraiment très simpliste, on a eu une reculade vis-à-vis de la proposition de la Commission européenne. Tout à l'heure, je te parlais du fonctionnement de la Commission européenne. La Commission européenne a mis en place une proposition. Cette proposition a été édulcorée au sein du Parlement européen. ce qui veut dire qu'en fait les groupes de droite du Parlement européen ont diminué l'ambition initiale qui avait été mise sur la table par la Commission européenne et ça c'est assez rare pour être souligné, c'est-à-dire qu'en fait on a diminué l'ambition parce que on avait peur des conséquences électorales que cela pourrait avoir le 9 juin prochain Même sujet avec un règlement sur les pesticides. La Commission européenne propose un règlement sur les pesticides, la droite européenne détricote ce règlement-là. à un point tel que le Parlement européen rejette le règlement et renvoie la balle dans le camp de la Commission européenne. Sur ces questions environnementales, on a eu un vrai recul sur la dernière année, justement parce qu'on s'est rendu compte qu'on était peut-être, avec la colère des agriculteurs, sous le coup d'une trop forte émotion, sous une trop forte récupération politique. Et c'est peut-être le risque des élections européennes. du 9 juin prochain, c'est que d'une certaine manière, on va avoir une forme de projection, si on se projette, selon les dernières projections et sondages, une montée des droits européennes, de la droite conservatrice, de la droite radicale. Et le risque est qu'on amalgame ce rejet des normes environnementales en un rejet plus fort des normes climatiques de manière générale. Et ça, c'est peut-être le plus grand des dangers, parce que ça voudrait dire qu'au niveau national, on serait tenté de diminuer le rythme de mise en œuvre, et qu'au niveau européen, on serait tenté de diminuer l'ambition climatique dès lors qu'on va négocier la future cible à l'horizon 2040.

  • Speaker #1

    Antoine, est-ce que tu as une question sur ce bilan ?

  • Speaker #2

    Oui, pour conclure, tu as très bien fait le bilan. On a plein de points qui sont très discutables. On peut discuter de ce que c'est vraiment via l'extension du marché carbone qu'il faut accélérer la décarbonation du transport, du chauffage. On peut reprendre tout ce qu'on a discuté ici et débattre de ce que c'est la meilleure façon de faire. Mais on peut s'entendre sur le fait que sur le plan de la décarbonation, il y a eu vraiment des politiques structurelles et importantes qui ont été mises en place ces cinq dernières années. Et ça va avoir un impact vraiment très concret sur nos façons de se déplacer, de se choper et de produire de l'énergie en Europe. Donc sur l'agriculture, c'est un peu plus lancé, mais on en parlera. Moi, la grande question, c'est, tu l'as dit au départ, tout ça, ça a été voté largement par une coalition qui a été formée en gros d'équivalents du Parti Socialiste français et par l'équivalent de la droite française. Et la grande question, c'est comment est-ce qu'on a pu avoir à un moment des élus de droite qui ont voté des politiques structurelles et contraignantes au Parlement européen ? Car l'exemple d'interdiction de la vente de véhicules thermiques à partir de 2035, c'est un bon exemple. Ça a été voté par une coalition européenne qui contenait beaucoup d'élus de droite. qui, à l'heure actuelle, sont en train de vitipérer contre cette interdiction, en France, pas qu'en France. Donc voilà, comment est-ce qu'on a pu créer à un moment ce momentum ? On parle beaucoup des marches climat, mais est-ce que c'est des marches climat ou est-ce que c'est d'autres choses ? Et c'est aussi intéressant parce que ça pose la question de comment est-ce que dans les années à venir, on peut se mobiliser au-delà du vote pour recréer ce momentum.

  • Speaker #0

    Exactement. Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'on dit souvent que le pacte vert européen est né des élections européennes de 2019. En réalité, je voudrais nuancer ce propos. Pourquoi ? Parce qu'avant ça, il y avait, de la part des États membres, et notamment de la Commission européenne, une forme de volonté politique d'accélérer sur les questions climatiques. Ça s'est vu lorsque, en mars 2018, les États membres chargent officiellement la Commission européenne de présenter ce qu'on appelle une stratégie de long terme. une stratégie de long terme, donc à l'horizon 2050, pour justement faire en sorte d'atteindre un objectif de neutralité climatique. Donc la Commission européenne présente en novembre 2018 une stratégie de long terme qui évoque pour la première fois le concept de neutralité climatique. Donc en réalité, il y avait un terreau fertile sur lequel les élections européennes ont permis de capitaliser et ont légitimé démocratiquement l'avènement du pacte vert européen, qui en fait est un coup politique très intelligent de la part d'Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, pour permettre justement de... d'entretenir ce momentum qui a été mis en place par les institutions européennes. Maintenant, la question qui se pose, c'est qu'on est beaucoup moins dans cette logique-là, on est dans une logique de frilosité de la part des États membres, on est dans une logique également où, parce qu'il y a des considérations nationales internes au sein des groupes politiques, certains groupes politiques... jouent leur partition pour tenter de gagner les élections au niveau national. C'est-à-dire qu'en fait, si je prends l'exemple très concret de la droite allemande, la droite allemande, pour tenter de gagner les votes de l'industrie, notamment l'industrie automobile, qui a un très fort lobby en Allemagne, va tenter de mettre en avant le fait qu'ils vont vouloir réouvrir le dossier de la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. alors que jusqu'à présent il y a eu des coalitions qui s'étaient formées au sein du Parlement européen parce qu'il y avait ce fameux momentum. Comment est-ce qu'on en est arrivé là ? C'est parce qu'il y a une chose qui a été mise en place dans chacun des dossiers du pacte vert européen, notamment du Fit for Tifa, c'est ce qu'on appelle des clauses de revoyure. Ces clauses de revoyure, c'est un mécanisme juridique, c'est une clause de rendez-vous qui permet justement... d'être activé par la Commission européenne pour réouvrir un dossier et revoir à la hausse ou à la baisse les ambitions qui ont été définies au sein de la mandature qui vient de s'écouler. Pour en prendre un exemple très concret, sur la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2030, en 2026, il y a une clause de revoyure qui prévoit que la Commission européenne va remettre un rapport au Parlement européen et au Conseil pour faire en sorte de juger de l'opportunité de revenir sur la deadline de 2035. Cette clause de revoyure-là, elle menace d'être actionnée par un certain nombre de parlementaires européens, notamment la droite européenne. pour justement revenir sur cet objectif-là. Une fois qu'on a dit ça, pourquoi est-ce que les élections européennes sont dimensionnantes pour l'ambition climatique à l'horizon 2030 ? C'est parce que de l'équilibre qui ressortira des élections européennes de 2024, cela se rejaillira sur les priorités de la Commission européenne. Et donc, Ursula von der Leyen, si elle est réélue, pourrait par exemple subordonner sa réélection à la réouverture. du dossier du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035. C'est là où on risque d'avoir une forme de détricotage sur les années à venir. C'est de faire en sorte que l'ensemble de ces clauses de revoyure soient actionnées et ce qu'on appelle un effet boule de neige. Parce qu'à partir du moment où tu reviens sur la fin de vente du véhicule thermique neuf à l'horizon 2035, tu vas être désincitatif sur l'électrification, et donc tu vas avoir des conséquences directes sur la directive énergie renouvelable, tu vas avoir des conséquences directes sur le règlement, sur le déploiement des bornes de recharge tous les 60 km. Et donc c'est là en fait le plus gros risque, c'est qu'on ait une diminution de l'ambition au travers. l'ouverture de ces clauses de revoyure. Et petit instant autopromo, on vient de publier aujourd'hui même, un à l'Institut Jacques Delors, un papier qui analyse en fait comment est-ce qu'on pourrait mettre en œuvre ces clauses de revoyure, quelles sont les conditions... à déployer pour justement tenter de diminuer l'ambition climatique ? Et comment est-ce qu'on pourrait tenter de contrecarrer ça ? On a une proposition qui est la mise en place d'une grande coalition élargie qui verrait le Parti populaire européen, les sociodémocrates, les libéraux et les verts européens opérer un accord de coalition pour justement sauvegarder les objectifs qui ont été décidés jusqu'à présent et qui en échange permettraient justement à la candidate du Parti populaire européen d'être réunie avec une donnée qui convient d'être prise en compte. En 2019, Ursula von der Leyen avait été élue à neuf voix près. Aujourd'hui, sa réélection n'est pas assurée. C'est pour ça que les verts européens qui sont projetés autour des 40 sièges pourraient faire office de socle pour tenter de sécuriser sa réélection.

  • Speaker #1

    Je ferais bien l'intention de mettre le lien de cette note dans la description de l'épisode. Merci beaucoup, Fouk. On va passer au billet de construire l'écologie. C'est à toi Antoine.

  • Speaker #2

    Je voulais vous parler de ce qu'a introduit Alban au début de l'émission, qui est cette histoire de Green Blending, dont la compréhension n'est pas sans intérêt à l'approche des élections européennes. On est vraiment, et c'est ce qu'on a commencé à introduire là, arrivé à un point de bascule. On a d'un côté une prise de conscience de la gravité et du changement climatique et de l'effondrement de la biodiversité qui est de plus en plus large dans la population et qui nous incite à adopter des politiques écologiques de plus en plus ambitieuses. Et en face, on a des groupes d'intérêt qui tentent de rendre ces politiques de transformation écologique responsables de tous les maux pour les discréditer. Avec tout le monde toujours les mêmes arguments, qui sont que ces politiques de transformation écologique seraient systématiquement à l'origine de l'augmentation du coût de la vie, de perte d'emploi et de compétitivité, d'endettement, qui en fait même seraient inefficaces voire contre-productives sur le plan environnemental. Le green blaming, c'est vraiment ça. C'est utiliser des arguments faux, fallacieux ou partiellement faux pour attribuer à une politique écologique des torts qui justifieraient son abandon. Il ne s'agit surtout pas de dire ici qu'il ne serait jamais légitime de remettre en question une politique écologique, puisqu'il y en a certaines qui sont effectivement soit inefficaces, soit socialement injustes, soit les deux. Mais là on parle bien d'autres choses, on parle de critiques qui sont inventées uniquement pour faire échouer des transformations, qui sont d'ailleurs souvent perçues comme trop contraignantes, afin de protéger des intérêts économiques ou de se soustraire à des changements de comportement. Pour rendre ça un peu concret, en fait l'actualité européenne regorge d'exemples de green blaming récents. Sans rentrer dans le détail des controverses autour desquelles chacune de ces opérations de grippes dynamiques se sont organisées, Pour incarner tout ça, par exemple en Allemagne, on a eu une tentative l'année dernière du gouvernement allemand d'interdire l'installation de nouvelles chaudières au gaz pour limiter les émissions de gaz à effet de serre liées au chauffage des bâtiments et aussi pour réduire accessoirement la dépendance du pays au régime autoritaire qui fournit son gaz fossile, celui de Montgard. Ça a provoqué des très vives divisions dans le pays et un recul en bonne et bonne forme qui a été largement alimenté par l'industrie du gaz, par des parties d'extrême droite comme l'AFD et par une coalition de médias conservateurs. Un autre exemple un peu concret, aux Pays-Bas, on a des mesures d'urgence qui ont été prises par le gouvernement pour réduire les pollutions causées par l'excès d'azote lié aux encas azotés dans le secteur agricole. Dans ces mesures, il y avait notamment la réduction de 30% du chèque-tête bovin planifié d'ici 2030, et ça a entraîné des oppositions massives et une montée en puissance du mouvement agriculteur-citoyen, qui est maintenant un parti politique des Pays-Bas, qui est systématiquement opposé aux politiques environnementales. Et en France, plus près de nous, rien qu'en 2023, On a eu un recul du gouvernement sur un projet d'interdiction naissante d'installation de nouvelles chaudières en glace, toujours. On a des zones à faible émission qui visent à réduire la pollution de l'air dans les zones urbaines qui sont très régulièrement des sujets de débat enflammés. Et la simple évocation de la réduction de chez Ptelbovin dans un rapport récent de la Cour des comptes a provoqué un central, là aussi national. Et en parallèle, on a une diabolisation vraiment de... toutes les politiques publiques environnementales contraignantes, qui sont pourtant essentielles pour réussir la transformation écologique. Résultat, on a des droits traditionnels et libérales de la République en marche aux Républicains qui promeuvent de plus en plus une écologie qui serait uniquement incitative, qui n'affecterait pas les intérêts économiques ou le quotidien des Français, et qui réduit forcément la capacité de ces politiques à être vraiment efficaces sur le plan de la décarbonation et de la préservation de la biodiversité. Il faut bien comprendre que ce green blaming, ça marque une grande évolution dans le débat politique autour de la transformation écologique. On n'est plus du tout dans le fait de nier frontalement les crises environnementales, ce qu'on a appelé sur le plan du carbone le climato-négationnisme ou le climato-dénialisme.

  • Speaker #0

    Là, on est vraiment plutôt dans une instrumentalisation des conséquences sociales des politiques de transformation écologique. Donc c'est une stratégie qui est plus subtile, on n'est pas en train de contester la réalité des crises, en fait on ne conteste même pas souvent l'intérêt théorique de la transformation écologique, vous avez des partis de droite ou d'extrême droite qui disent bien sûr, le changement climatique c'est grave, il faut s'en préoccuper mais on attaque les modalités concrètes de la mise en œuvre de cette transformation écologique. Et derrière, comme je le disais dans le cas allemand, mais en fait c'est généralisable à l'ensemble des stratégies de crime blaming, on a une espèce de coalition informelle entre des droites et extrêmes droites européennes, une presse et des médias conservateurs, et puis aussi des regroupements industriels ou corporatistes, alors pas toutes les industries, mais en fait souvent des industries, notamment ceux qui ont raté les créneaux des technologies utiles à la transformation écologique, par exemple des industries automobiles européennes qui ont beaucoup misé sur le véhicule thermique, qui n'ont pas vu venir le besoin. d'électrifier les véhicules, et qui sont maintenant en concurrence avec des acteurs, notamment asiatiques, qui ont fait cette électrification beaucoup plus que eux, qui du coup, constatant que leur production actuelle est incompatible avec les prérequis de la transformation écologique, ils voient une menace pour leur modèle d'affaires. Et ce qui est encore plus triste, c'est qu'il y a d'autres acteurs qui peuvent occasionnellement se joindre à cette coalition, beaucoup plus ponctuellement, on voit même que parfois on a certains partis de gauche ou certains syndicats qui ont une volonté théorique de transformation écologique, mais qui s'opposent à des modalités concrètes de cette transformation. par exemple des parties de gauche qui s'opposent aux véhicules électriques ou à la baisse de la consommation de viande, là encore, suivez mon revient. Pour terminer, comment peuvent se manifester ces opérations de green living ? Il y a un exemple très intéressant qui a eu lieu en France dans... ces derniers mois, il y a eu, comme je le disais, une volonté du gouvernement qui a testé un peu dans le débat public l'idée d'interdire à terme l'installation de nouvelles chaudières au gaz, parce que le gaz fossile émet fortement de gaz à effet de serre dans le secteur du chauffage. Par ailleurs, on sait qu'on ne va pas avoir assez de biogaz pour pouvoir conserver autant de chaudières fossiles que ce qu'on utilise à l'heure actuelle. En face de ça, il y a une technologie qui marche plutôt bien. Il y a d'abord la rénovation thermique de bâtiments, première technologie, puis ensuite, il y a notamment l'usage de pompes à chaleur. qui est un moyen de chauffage basé sur l'électricité, qui est très efficace pour réduire la consommation d'énergie et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Dans tous les scénarios de transition écologique, les pompes à chaleur, d'ici 2050, ça doit représenter entre 30 et 65% des moyens de chauffage utilisés en France. Face à cette idée d'interdiction de nouvelles chaudières au gaz, il y a eu une mobilisation vraiment très forte des industriels de la filière gaz, des politiques de droite, mais aussi malheureusement de certaines ONG écologistes et de syndicats qui s'y sont opposés en critiquant, en remettant en question l'efficacité de ces pompes à chaleur. Alors il y a eu plein d'arguments mobilisés, j'en donne juste deux qui ont été vraiment violemment faux mais pourtant très mobilisés et qui restent encore un peu dans l'esprit de beaucoup. Le premier argument faux, c'est que les pompes à chaleur ne marcheraient pas quand il fait froid. Par exemple quand on a des températures en dessous de zéro. C'est vraiment une idée préconçue qui ne s'appuie sur aucune réalité. Des pompes à chaleur qui fonctionnent en dessous de zéro degré, c'est l'ensemble des pompes à chaleur notamment installées dans les pays du nord de l'Europe. Il faut savoir qu'il y a plusieurs pays du nord de l'Europe dans lesquels la proportion de pompes à chaleur par logement est parmi les plus élevées au monde. Je pense par exemple à la Norvège, plus de la moitié des logements sont chauffés par des pompes à chaleur en Norvège, dans lesquels le climat est beaucoup plus froid que la France. Et vous imaginez bien que les Norvégiens n'utiliseraient pas de pompes à chaleur. si jamais il ne pouvait pas se tromper avec en hiver. Et un autre argument faux, un peu iconique, c'est que les pompes à chaleur ne marcheraient pas dans des maisons mal isolées, et que de façon générale, dans des maisons mal isolées, une pompe à chaleur surdimensionnée, ça entraînerait des surconsommations d'électricité, une fois que la maison devient correctement isolée. Il est derrière, c'est de dire, tant que la maison est bien isolée, il vaut mieux remplacer une chaudière au gaz pour une autre chaudière au gaz que de passer à la pompe à chaleur. Et ça du coup, il y a plusieurs publications récentes qui ont montré que vraiment, on pouvait très bien utiliser une pompe à chaleur et se chauffer correctement, même dans une maison mal isolée, même si ce n'est pas du tout optimal, et que par ailleurs, on est capable de réduire la consommation d'électricité des pompes à chaleur, on est capable de les régler si on fait ces travaux de rénovation énergétique après avoir installé ces pompes à chaleur. et donc c'est vraiment important de se dire que même dans des maisons mal isolées il vaut mieux utiliser une pompe à chaleur, passer à la pompe à chaleur que repartir dans une chaudière au gaz qui va être utilisée pendant 20 ans et émettre des gaz à effet de serre pendant 20 ans donc pour conclure, de façon générale, ces campagnes de green blaming et on va avoir d'autres exemples sans doute avec l'interview suivante dans laquelle on va se localiser plus sur le cas du secteur agricole c'est en train d'entraîner un retour de bâtons écologiques dans toute l'Union Européenne Alors qu'on avait un enjeu écologique qui gagnait en importance dans le débat public et que même la plupart des droites, on en parlait avant, acceptaient la nécessité de la transformation écologique, on a maintenant des politiques concrètes de transformation écologique qui entraînent des oppositions de principe avec deux conséquences réelles, l'échec de projet écologique et la remise en question du principe même de contrainte. collectives nécessaires pour leur mise en œuvre. Et c'est pour ça qu'à construire l'écologie, on a essayé d'identifier cette nouvelle opposition, le green blaming, à travers d'autres exemples concrets que je ne détaille pas ici. La hausse du prix des véhicules qui serait liée à la transformation écologique et à l'électrification des véhicules. Les zones à faible émission qui ne seraient pas des politiques efficaces pour lutter contre la pollution de l'air. La lutte contre les passoires énergétiques qui serait à l'origine de l'explosion du prix des loyers. En fait, tout ça est très largement faux et instrumentalisé. Et ce qu'on a essayé... d'examiner plus en détail dans notre mode. Merci beaucoup Antoine, merci beaucoup Alban de m'avoir épaulé pour cet épisode.

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