- Speaker #0
Bonjour et bienvenue sur cette série de podcasts conçus pour vous aider à communiquer le mieux possible avec votre enfant.
- Speaker #1
Aux jeunes parents, on demande souvent si l'enfant dort bien ou mange bien, plus rarement s'il parle bien. Pourtant, bien parler est tout aussi vital. Je m'appelle Céline De Villers, je suis orthophoniste et fondatrice de loulilou.fr. Je forme depuis des années les professionnels de la petite enfance au développement. et à l'éveil au langage. Au cours de ma carrière, j'ai rencontré de nombreux parents et j'ai remarqué que très peu d'entre eux sont conscients du rôle crucial qu'ils ont à jouer dans le développement du langage de leur enfant. Voilà pourquoi j'ai créé cette série de podcasts. Pour vous parler gazouillis, babillages, en attendant les premiers mots, vous guider pour accompagner les premières phrases, mais aussi vous partager astuces, conseils et anecdotes pour vous éviter certains écueils. Pas de formule magique, mais une formule toute simple. Un beau langage permet de mieux s'épanouir. Écoute-moi bien dans les yeux. Le podcast sur l'évaillot langage chez l'enfant de 0 à 5 ans. Aujourd'hui, nous allons parler de ce stade de langage bien connu pour son explosion du vocabulaire. Bienvenue dans l'épisode 6, la soif d'apprendre, de 2 ans à 2 ans et demi. À cet âge, votre bouchou est très curieux et impatient de découvrir le monde. Il vous demande sans cesse
- Speaker #0
« c'est quoi ça ? c'est quoi ça ? »
- Speaker #1
Mais oui, tiens, qu'est-ce que c'est ? À deux ans, l'enfant s'exprime généralement avec un stock lexical d'environ 100 mots, voire même de 250 mots bien identifiables. Il est capable de nommer et de décrire 3 à 5 objets de son environnement. Il a même des mots doudous, des mots… préféré, qu'il utilise à tout bout de champ. Selon la situation, il emploie des phrases avec des noms, des verbes, des pronoms ou des adverbes. Il continue à adorer les comptines que vous lui chantez. Un, deux, trois, nous irons au bois. Une souris verte qui courait dans l'herbe. Cette comptine date du XVIIIe siècle, mais elle plaît toujours autant. Au niveau moteur, l'enfant adore sauter, grimper, Pouper, dévisser, dessiner ou même peindre. Dans ces jeux, il joue à faire semblant. Avec ses poupées, il joue au docteur, à la dînette, au garage. Il s'intéresse aux premiers puzzles et aux autres jeux d'encastrement. Le petit de deux ans s'exprime généralement par des phrases de deux mots juxtaposés, ou plus, qu'on appelle protolangage, avec une syntaxe souvent inversée.
- Speaker #0
Qu'est-ce que c'est, Doudou ?
- Speaker #1
Petit à petit. l'enfant forme des phrases dont la grammaire ressemble à sa langue maternelle, type sujet-verbe.
- Speaker #0
Par exemple,
- Speaker #1
À cet âge, je vous recommande d'ailleurs les livres de la série La boîte des papas, aux éditions École des loisirs, qui présentent des modèles de phrases simples, très adaptés à cet âge et qui mettent à l'honneur les papas. Vers deux ans et demi, cette juxtaposition de deux mots va évoluer et se transformer en des énoncés de trois mots, en suivant le modèle sujet-verbe-objet.
- Speaker #0
« Il mange une glace. »
- Speaker #1
Les articles sont correctement utilisés au fur et à mesure de la troisième année, tout comme certains pronoms personnels ou adverbes de lieu comme « ici » , « là-bas » . Le genre, masculin-féminin, est encore instable. Voilà pourquoi vous entendrez bien souvent l'enfant dire « Il court la dame ! » Le langage de votre bout de chou est encore très égocentrique, avec beaucoup d'allusions narcissiques. Vers deux ans, pour parler de lui ou d'elle, l'enfant utilisera le pronom « moi » .
- Speaker #0
« Moi veux pas »
- Speaker #1
Ou son prénom.
- Speaker #0
« Chloé pas contente »
- Speaker #1
Aux alentours de 30 mois, le « moi-je » commence à faire son apparition. Bien entendu, je donne des indications d'âge, mais celles-ci sont à prendre avec des nuances, à deux ou trois mois près. Il n'y a pas lieu de s'inquiéter car chaque enfant avance à son propre rythme. Je consacrerai bientôt un épisode aux inquiétudes bien justifiées des parents concernant le langage. Pour revenir au sujet, vers deux ans, le développement de la syntaxe permet au fil des mois une communication enrichie avec l'adulte et des temps de conversation plus allongés. Ce stade de langage se caractérise aussi par le fait que l'enfant aime poser des questions et nommer les choses pour faire des commentaires. Très souvent, votre bambin peut répéter en boucle la même phrase tant que vous ne lui avez pas fait un retour positif. Par exemple, un jour, Thibaut, mon deuxième, regardait par la fenêtre et répétait inlassablement en pointant du doigt Voiture papa noir ! Voiture papa noir ! Voiture papa noir ! Je lui ai répondu avec un oui en reformulant son énoncé. Oui, la voiture de papa est noire. Et il est parti sur autre chose. L'enfant qui a compris que toute chose s'appelle va également poser des questions à son entourage en utilisant les mots interrogatifs. Où ? Quoi ? Qui ? Par exemple,
- Speaker #0
Il est où papa ? Tu t'appelles qui ?
- Speaker #1
Le jeune enfant est curieux et pose beaucoup de questions.
- Speaker #0
C'est quoi ça ? C'est quoi ça ?
- Speaker #1
Il est à présent un vrai interlocuteur dont il faut assouvir la curiosité. Et j'insiste là-dessus, c'est très important de prendre le temps de lui répondre et de se montrer disponible. Pour cela, poser son portable est déjà une première étape indispensable. Savez-vous que l'enfant a la capacité d'apprendre des centaines de mots entre 2 et 3 ans ? Mais encore faut-il qu'il soit exposé à une grande variété de vocabulaire et que son entourage serve d'exemple. Parents, vous avez un vrai rôle éducatif à jouer dans ce domaine. Évitez aussi les tournures grammaticales imparfaites ou le langage familier. Oubliez les « c'est qui qui vient ? » « La copine à Zoé ? » « C'est trop top ! » qui ne mettent pas en valeur la langue française. Et bien évidemment, parler bébé n'est pas la bonne option. C'est à lui de s'inspirer de vous et non le contraire. Voici un exemple très parlant, si je puis dire. Un jour, un papa a dit à son fils de 3 ans « C'est bien, Tintin, il a fait pipi au popo ! » Bon, le positif, c'est que ce papa est très valorisant, c'est bien. Mais le négatif, c'est qu'il se peut que son entourage le trouve un peu gaga. Mais surtout, cela n'aidera pas l'enfant à progresser dans son acquisition langagière. Je conseille de privilégier le modèle syntaxique suivant. « C'est bien, Martin, tu as fait pipi dans ton pot » . Entre 2 et 3 ans, le jeune enfant est capable d'apprendre 4 à 7 nouveaux mots par jour. Il retient aussi bien les mots courants, comme « cochon » , que les mots rares, comme « facochère » . Ainsi, son vocabulaire va s'enrichir tout au long de la troisième année à une vitesse impressionnante. Dans l'épisode 1, intitulé « L'importance de l'éveil au langage » , j'avais abordé le vocabulaire comme facteur d'éveil déterminant pour la future réussite scolaire. Malheureusement, cette acquisition est loin d'être suffisante chez un grand nombre d'enfants. Dès l'entrée en petite section d'école maternelle, des maîtresses constatent que certains enfants manquent cruellement de vocabulaire, ce qui gêne la compréhension des consignes et les apprentissages. La recherche confirme qu'il y a un lien direct entre l'étendue du vocabulaire et la réussite dans les apprentissages. En 2003, l'étude américaine de Hart et Risley, intitulée « La catastrophe précoce » , créait une onde de choc. À trois ans, un enfant de famille aisé aurait entendu 30 millions de mots de plus, par son parent ou référent, qu'un enfant de milieu défavorisé. Si ce chiffre monumental est très discuté, Le fossé en matière de développement précoce du langage selon le milieu social est, lui, étayé scientifiquement. En France, cette étude a inspiré à l'époque des dispositifs et des rapports pour lutter contre les inégalités dans la petite enfance. En 2018, l'étude de Hart et Risley a été contestée car elle ne prenait pas en compte les conversations autour de l'enfant ou de l'enfant avec sa fratrie. Or, ces différentes situations impactent. positivement la richesse du vocabulaire. Finalement, les scientifiques sont globalement d'accord pour dire qu'un enfant doit être exposé à plus ou moins 20 000 mots par jour, pour entendre environ 45 millions de mots afin d'être prêt pour l'entrée en maternelle. On sait qu'un parent qui éveille son enfant au langage utilise environ 2000 mots par heure. Quand d'autres parents qui parlent moins à leur enfant ou bien laissent cette mission aux écrans, sont autour de 600 mots par heure. Alors, où se cachent les dizaines de milliers de mots par jour ? Durant les temps d'interaction privilégiés, avec vous autour d'un livre ou d'un jeu. Dans les compétences sociales, c'est-à-dire dans les discussions avec ses copains de la crèche, du relais petite enfance ou chez la nounou. Durant les temps de routine, par exemple pendant que vous préparez le repas. Durant des temps d'observation de la nature ou des scènes de vie au parc, je vous ai dit qu'un enfant a une capacité lexicale de 4 à 7 nouveaux mots par jour, soit environ 2000 nouveaux mots par an. Il peut donc apprendre des centaines de mots entre 2 et 3 ans. Mais pour cela, il est important qu'il soit exposé à une grande variété de vocabulaire et que l'entourage donne l'exemple. Concrètement, comment faire pour favoriser l'acquisition du vocabulaire ? Tout d'abord, être soi-même exemplaire. Au placard, les mots « truc » , les « tu veux ta teute ? » « Tu veux miam miam ? » « Tu veux aller néné ? » À comprendre comme « aller te promener » . Donne non simplement à l'enfant le mot adéquat, car dès 15 mois, il a compris que chaque chose correspond à un mot et il a un besoin insatiable d'étiqueter les choses du monde. Bien entendu, les mots ne tombent pas tout cuits dans le bec de l'enfant. Pour acquérir du vocabulaire, l'enfant doit avoir entendu le mot, certes, mais surtout en situation des dizaines de fois. Et oui, voilà le secret. Répétez, répétez et encore. Encore répétez les mots. Votre redondance est ultra porteuse. Bon, il ne s'agit pas non plus de radoter automatiquement tel un robot. Car ce qui est fondamental, c'est que l'enfant se sente écouté et encouragé et que l'adulte parle avec l'enfant en mode conversation. Les imagiers peuvent vous aider à développer un vocabulaire plus fin ou plus précis. Aujourd'hui, tous les enfants connaissent le mot arbre, mais ils seront aussi heureux d'apprendre ce qu'est un boulot, un chêne, un être. Le grand imagier Montessori de la nature aux éditions Larousse est une valeur sûre. La lecture quotidienne d'albums et de contes à haute voix est très porteuse pour l'enfant, car elle l'expose naturellement à beaucoup de mots et surtout à des tournures de phrases soutenues, avec une syntaxe élaborée. Côté compréhension, l'enfant de 2 ans répond à minima à des ordres simples. « Tu vas chercher tes chaussures ? » Et il comprend plusieurs centaines de mots. Il fait déjà la différence entre les structures syntaxiques de phrases qui lui sont adressées. En effet, aussi fou que cela puisse être, la recherche montre que les activités neuronales ne sont pas les mêmes si l'enfant entend une phrase correcte syntaxiquement ou une phrase mal tournée. Dans un livre, le jeune enfant va nous montrer aisément 7 à 10 images simples. En fait, la compréhension précède l'expression. L'enfant comprend des mots avant même de pouvoir déjà les prononcer. Le voilà par exemple qui vous montre la banane alors qu'il ne sait pas encore prononcer ce mot. Malgré cette forte évolution syntaxique et lexicale, vers deux ans et demi, la parole reste encore avec un style qu'on appelle télégraphique. du fait de la juxtaposition des mots. Côté articulation, à cet âge, le jargon prédomine souvent en expression. L'enfant est encore parfois difficilement compréhensible par son entourage. Sa parole est encore bien souvent inintelligible. Par exemple,
- Speaker #0
« Tombez-vous du cahier ! »
- Speaker #1
Vous n'avez pas tout compris ? Eh bien, c'est normal ! Inutile de faire répéter votre bambin. La reformulation est votre meilleur allié. Oui, ton doudou est tombé dans l'escalier. Vous lui présentez ainsi le bon modèle pour l'accompagner dans la suite de son développement langagier. Vous avez désormais des pistes pour enrichir le vocabulaire de l'enfant, ce qui l'aidera dans son épanouissement, mais aussi dans sa future réussite scolaire. Alors il ne vous reste plus qu'à instaurer des rituels d'histoire à voix haute, parler avec votre bout de chou et répondre à son incroyable soif d'apprendre. Ainsi se termine l'épisode 6, intitulé « La soif d'apprendre » de deux ans à deux ans et demi. J'espère qu'il vous a plu. Je vous donne rendez-vous avec l'épisode 7 « Du jargon à la parole » trois ans. Vous pourrez trouver davantage de ressources gratuites sur le sujet, vidéos et articles, sur le site loulilou.fr ou la chaîne YouTube.
- Speaker #0
C'était Écoute-moi bien dans les yeux. La série de podcasts sur l'éveil au langage de 0 à 5 ans, imaginée et écrite par Céline De Villers, produite par Logarithme.