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#91  Vanessa Bousardo Vice-bâtonnière de l'Ordre des avocats de Paris. Réparer les injustices silencieuses du métier d’avocate cover
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Elles Agissent

#91 Vanessa Bousardo Vice-bâtonnière de l'Ordre des avocats de Paris. Réparer les injustices silencieuses du métier d’avocate

#91 Vanessa Bousardo Vice-bâtonnière de l'Ordre des avocats de Paris. Réparer les injustices silencieuses du métier d’avocate

45min |24/04/2025
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#91 Vanessa Bousardo Vice-bâtonnière de l'Ordre des avocats de Paris. Réparer les injustices silencieuses du métier d’avocate

#91 Vanessa Bousardo Vice-bâtonnière de l'Ordre des avocats de Paris. Réparer les injustices silencieuses du métier d’avocate

45min |24/04/2025
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Description

C’est dans la Maison des avocats, juste en face du tribunal de Paris, imposant et presque intimidant, que Vanessa Bousardo me reçoit.

Un jour un peu particulier. Pila à l’heure où tombe la condamnation de Marine Le Pen. Le droit et le politique se croisent, s'entremêlent. Dans l'air, quelque chose de suspendu. Beaucoup d'agitation, de bruits, je demande si c'est toujours comme ça ici. Non c'est exceptionnel, comme ma rencontre du jour finalement !

Une atmosphère singulière s’installe dans ces lieux où tout prend une autre densité.


Coupées du tumulte extérieur, Vanessa m’accueille dans son bureau, avec une grande simplicité, avec chaleur. On se pose, on se coupe de l’agitation. L’épisode peut commencer.


Son rêve, petite, c’était d’être avocate. Pourtant, elle commence par tester médecine, presque en sachant que ce n’est pas sa place. Et dès qu’elle arrive en droit, c’est la révélation. Une évidence. Une passion.
Dès la première année, elle se sent pleinement à sa place. Le rêve devient un objectif. Et une fois cette porte du rêve franchie, tout est à construire. Le moteur : le travail. Et cette envie profonde de faire.

Elle nous raconte ensuite ce concours de circonstances qui l’a conduite à devenir vice-bâtonnière. L’envie était là, oui, mais l’opportunité est arrivée plus vite que prévu.


C’était aussi un moment de vie particulier : en plein cœur de sa maternité. Mais elle n’a pas hésité à s’engager, à donner de son temps, de son énergie, à cette profession qu’elle aime profondément.

Une fois élue, c’est tout son temps qui est consacré à cette fonction.


Et elle le dit avec clarté : les femmes avocates n’exercent pas dans les mêmes conditions que les hommes. Ce n’est pas une posture, c’est un constat.


Les maternités, les parcours de soin, les silences autour de la charge mentale… Malgré les avancées, il reste tant à faire.


Vanessa agit. Elle fait bouger les lignes, concrètement. Et c'est l'une des raisons qui m'a poussé à l'interview, son envie d'agir est rayonnante.


Un salon d’allaitement. Des congés pour fausse couche. Un projet de crèche pour les enfants des avocats, Vanessa propose des idées fortes, essentielles.

Evidemment, sinon ça serait trop simple, ces propositions rencontrent encore parfois des résistances.
Mais elle les envisage non comme des freins, mais comme des invitations à réfléchir autrement, à affiner, et surtout à persister !


Elle a cette aura. Cette présence calme, mais ferme. Cette énergie douce mais déterminée. Elle incarne pleinement ce que j’appelle une femme Elles Agissent.


Et puis, il y a cette conviction qu’elle porte : celle que les grandes valeurs du droit ( la justice, l’équité, la dignité ) qui selon elle, devraient faire partie de l’éducation dès le plus jeune âge. Une transmission essentielle. Une "graine du savoir" à planter tôt.


Bonne écoute.


Retrouvez toutes les informations sur www.ellesagissent.com

Retrouvez moi sur www.emilieberthet.fr

Sur mon Instagram Berthet_Emilie


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Musique:  Amour Aveugle / Garçon de Plage


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour Vanessa.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation dans Elsagis, je suis ravie. Vanessa, vous êtes vice-patronnière du Barreau de Paris, vous êtes avocate et vous êtes aussi engagée, je trouve, pour une meilleure prise en compte des réalités féminines dans le domaine du droit. Évidemment, c'est comme ça que je vous ai rencontré d'ailleurs, en étant engagée, en mettant en place des choses. Et donc dans ce podcast, je pense qu'on va évoquer ensemble justement le pouvoir de l'action concrète. à l'intérieur d'un système, peut-être d'un système qui a trop longtemps oublié aussi, la nécessité de faire entre les voix féminines, on en parlera. Et avant ça, comme je l'ai dit, vous êtes vice-patronnière. Est-ce que vous pouvez revenir justement sur les grandes étapes de votre parcours et ce qui vous a mené jusqu'à cette fonction ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr, avec plaisir. D'abord, merci infiniment de me donner la parole aujourd'hui, je suis très touchée. Les grandes étapes de mon parcours... En quelques mots, je suis avocate depuis bientôt 20 ans, puisque j'ai prêté serment en 2006, vous voyez, donc le temps passe. J'ai été 10 ans collaboratrice dans un cabinet et puis j'ai créé mon cabinet en 2016. Et depuis, j'exerce évidemment toujours, parallèlement à mon activité, pardon, à mon mandat de vice-bâtonnière, je suis toujours avocate pénaliste. Voilà, depuis maintenant une vingtaine d'années, ce qui a également... était un moment important dans mon parcours professionnel. C'est mon élection en tant que secrétaire de la conférence en 2010. C'était véritablement pour moi un objectif à atteindre quand j'étais jeune avocate. Mon rêve, c'était d'être secrétaire de la conférence. Donc je n'oublie jamais de le rappeler parce que c'est vrai que j'y tiens beaucoup. Et c'était une année en 2010 très formatrice. Pendant un an, vous savez, lorsque vous êtes secrétaire, De la conférence, vous avez accès aux commissions d'office criminelles, donc vous êtes projeté, lorsque vous êtes pénaliste, c'est forcément un peu un rêve, projeté dans des affaires criminelles, vous êtes commis d'office, ou commis d'office pour des assises, pour des comparutions immédiates également. Donc c'était un moment important dans mon parcours, dans mon parcours professionnel. Et puis ensuite, il y a eu effectivement d'autres étapes qui m'ont mené à ce mandat de vice-bâtonnière, et notamment une première étape en... en étant élue en 2018, fin 2018, membre du Conseil de l'Ordre du barreau de Paris.

  • Speaker #0

    Et justement, est-ce que vous pouvez revenir sur les actions que vous avez mises en place pour arriver à justement atteindre vos objectifs ?

  • Speaker #1

    Les actions ? Alors, ça dépend de ce dont on parle. Le ressort initial reste, de mon point de vue, le travail. C'est aussi beaucoup, beaucoup de travail, ne serait-ce que devenir avocate. Pour moi, c'était un rêve aussi. On est allé directement aux différentes étapes, mais lorsque j'étais étudiante en droit, d'abord à l'université de Nanterre, Paris 10, qui s'appelait comme ça à l'époque, et puis mon troisième cycle à Paris 2, devenir avocate, c'était un rêve. Dans ma famille, il n'y avait pas de juriste, encore moins d'avocat. Déjà, si je parvenais à un jour porter la robe, c'était déjà une grande victoire.

  • Speaker #0

    Ce rêve, du coup, il est...

  • Speaker #1

    Alors, rêve... Il y a eu quand même un petit passage, un petit préalable d'une année un peu, je me suis un peu perdue quand même, une année en médecine. Je pense que c'était, voilà...

  • Speaker #0

    C'est dur aussi de savoir en sortant du bac, etc.

  • Speaker #1

    J'ai une fascination, alors je suis nulle en sciences, je fais un bac S, je sais pas pourquoi, enfin vraiment la volonté de se confronter à ce à quoi on n'est pas fait, peut-être. Mais c'est vrai que j'ai une fascination pour la science, fascination pour la médecine, et j'avais envie d'y aller. Tout en sachant évidemment que ce n'était pas ma place, en réalité. Je crois que je n'y ai jamais vraiment cru. Oui, j'avais besoin d'être peut-être sur les bancs de cette université de médecine. Mais 15 jours, je crois, 15 jours ou trois semaines après avoir commencé ma première année de médecine, j'avais déjà passé un petit examen à Nanterre pour intégrer un BIDOG à l'époque, en droit en fait. Donc, c'est vraiment l'année un peu, l'erreur de parcours qui est plus qu'une erreur, c'est un test. Et en revanche, lorsque j'arrive en droit, c'est une révélation. C'est-à-dire que là, je suis véritablement à ma place. Le droit que je n'avais par définition jamais étudié auparavant me plaît. C'est une passion. C'est-à-dire que vraiment, c'est une révélation. Et à partir de là, de cette première année de droit jusqu'au bout, alors c'est parfois difficile évidemment, mais... Je sais que je n'ai pas lâché. La question ne s'est même pas posée parce que je me sentais très à ma place. J'ai tout de suite adoré vraiment la matière, le raisonnement juridique. Et donc, à ce moment-là, ça devient un rêve. Il faut que j'arrive à devenir avocate. Pour moi, c'était ça l'aboutissement. Ça y est, j'ai franchi cette porte, je suis avocate. Je me rends compte que tout, évidemment, commence, que tout reste à faire et que le travail ne s'arrête évidemment pas là. Et pour répondre à votre question initiale, quels sont les ressorts ? C'est beaucoup de travail et puis d'envie de faire. Vous voyez, quand je vous parlais tout à l'heure de la conférence, pour moi, ce concours d'éloquence, lorsque je voyais les secrétaires en poste, j'en rêvais. Donc c'est y aller, c'est s'entraîner, c'est se dire c'est pas grave. Le travail, évidemment, toujours, nécessairement, mais aussi... L'envie de faire, l'envie de se fixer à soi des objectifs d'une certaine manière. Moi je découvre la conférence, j'y reviens encore, mais lorsque j'étais en stage, lorsque j'étais élève avocate, et tout d'un coup je découvre ce monde, je me dis « Oh, c'est incroyable, c'est extraordinaire, qu'est-ce que j'aimerais en faire partie ? » Donc il y a aussi ce ressort-là, c'est la fascination, et puis ensuite de se donner autant que possible. On ne réussit évidemment pas tout, mais essayez en tout cas. Se donner les moyens et puis après c'est évidemment apprendre son métier, se confronter au réel, aux audiences, à la rudesse aussi des audiences, aux difficultés et puis aussi au succès. Et s'agissant plus de mon envie ensuite d'aller non pas au-delà de ma profession mais à côté de ma profession, agir. notamment pour ce qu'elle représente, c'est-à-dire agir pour les avocats, pour les avocates. Effectivement, ça part presque d'un concours de circonstances. C'est-à-dire que lorsque je me présente au Conseil de l'Ordre en fin 2018, il s'avère que mon ancien patron, avec lequel j'ai travaillé dix ans, qui était ancien bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier Sure, me propose... d'être son binôme au Conseil de l'Ordre, puisque ce sont des élections paritaires, binôme homme-femme. Et il me fait cette proposition-là. Et évidemment, j'en ai bien conscience que c'est une chance. Donc il faut le dire aussi, c'est aussi la capacité de saisir les opportunités et les chances lorsqu'elles se présentent. Et là, il me fait cette proposition, il me donne 15 jours pour réfléchir si je me présente ou pas avec lui. Et évidemment, le soir même, je lui dis... Voilà, un donné, un grand oui, bien sûr, je me présente, évidemment. Alors, ce n'est pas non plus un saut dans le vide. Je savais et j'avais déjà l'envie, en tout cas je réfléchissais, au fait de me présenter peut-être dans quelques années à cette élection pour devenir membre du Conseil de l'Ordre, ça c'est vrai. Mais cette opportunité se présente avant, et à ce moment-là, je me dis, bien sûr, c'est une chance, j'en ai conscience. et je la saisis. Donc c'est la raison pour laquelle je dis que d'une certaine manière, c'est aussi un concours de circonstances qui mène parfois à l'accomplissement de certaines choses.

  • Speaker #0

    Est-ce que lui a su voir que vous étiez prêtes à un moment où vous n'aviez pas encore conscience peut-être aussi ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, peut-être.

  • Speaker #0

    Si vous connaissez ?

  • Speaker #1

    Alors c'est vrai qu'on avait travaillé dix ans ensemble donc on se connaissait très bien et on se connaît toujours. parce qu'aujourd'hui, au-delà de mon ancien patron, c'est devenu un ami. Mais en tout cas, moi, à ce moment-là, je me dis, ça fait partie de ce qui m'intéresse et j'aimerais pouvoir donner de mon temps aussi à ma profession. L'opportunité se présente, je la saisis. Et c'est vrai que ce n'est pas forcément d'ailleurs le meilleur moment dans ma vie. Moi, j'ai à ce moment-là un petit bébé, une petite fille qui a encore à peine un an. Vous voyez, donc... Sur la chronologie, on peut se demander si c'est le bon moment. En fait, tu ne me poses pas la question. En tout cas, pour moi, c'est le moment. Je considère que je serai en mesure de mener de front à la fois ma vie personnelle et ma vie professionnelle.

  • Speaker #0

    Justement, pour bien qu'on comprenne à la fois combien de temps ça vous prend, comment vous pouvez vous organiser, déjà, est-ce que vous pouvez redéfinir vraiment ? quel est votre rôle en tant que vice-bâtonnière, parce que ce n'est pas évident, même pour moi, ni pour tout le monde, je pense, de bien comprendre quel est votre rôle. Et justement, qu'est-ce que ça rajoute dans votre quotidien qui était déjà assez chargé, je pense ?

  • Speaker #1

    Effectivement. En fait, il y a deux choses. Ce dont je vous parlais, c'était, entre guillemets, mon entrée dans les instances de la profession en tant que membre du Conseil de l'ordre. Et puis, effectivement, une fois que je suis au Conseil de l'ordre, là, je mesure et je réalise tout ce que notre institution, tout ce que l'ordre fait pour les avocats, et tout ce qu'il peut faire, peut-être encore mieux, en tout cas plus loin, pour les avocats. Et c'est là que naît, entre guillemets... La seconde idée, de me dire, mais on fait beaucoup de choses en tant que membre du Conseil de l'Ordre, j'aimerais peut-être pousser plus loin mon engagement pour la profession dans le cadre d'un mandat de bâtonnier ou de vice-bâtonnier. Donc vous voyez, c'est ce qui va m'amener à me présenter aux côtés de Pierre Hoffmann, en qualité pour le poste, pour le mandat, pour la mission de vice-bâtonnière. Et aujourd'hui, et pour répondre précisément à votre question, quel temps ça occupe dans mon quotidien ? En fait, ça occupe 100% de mon temps, en réalité. Une fois que vous êtes élu, alors il y a un temps de latence entre votre élection et puis l'entrée en fonction. En ce qui nous concerne, il y a eu six mois, six mois de décalage. Mais une fois que vous êtes en fonction, c'est tout mon temps, tout mon temps. Le matin jusqu'au soir, voire même la nuit. Et vous me direz parallèlement, vous avez une activité ? Oui, mais vous voyez, le challenge, il est aussi là. C'est-à-dire que je travaille avec ma collaboratrice, on a des points réguliers, on est en contact 15, 20, 25 fois par jour, par audio, par texto, par appel. Il n'est pas rare que je lui laisse des projets de plaidoiries tels que je les plaiderais. Donc on est en lien régulier. elle vient à l'ordre et on travaille ensemble. Et puis lorsqu'il y a un rendez-vous client, évidemment, je m'y rends. Mais entre guillemets, vous voyez, mon temps, c'est barreau. Et évidemment, je travaille les dossiers, mais par son intermédiaire et grâce à elle. Donc c'est l'occasion aussi de la remercier infiniment, parce que sans elle, ce serait évidemment particulièrement compliqué.

  • Speaker #0

    Et justement, est-ce que ce n'est pas aussi une des clés ? C'est de savoir s'entourer et parfois déléguer ? Ça a l'air compliqué peut-être ? Ah,

  • Speaker #1

    par la force des choses. Non, mais évidemment. Faire beaucoup de choses en même temps. Parce que c'est vrai que le cabinet, évidemment, je tiens mon cabinet, je tiens plus que tout à mes clients et je suis là pour eux. Et puis mon mandat, évidemment, je le vis d'une certaine manière avec passion aussi. Mais ça implique nécessairement à un moment de... d'avoir peut-être avec soi-même un tout petit peu moins d'exigence. C'est-à-dire que j'ai tendance, en tout cas j'avais tendance, à vouloir... La perfection n'existe pas, mais en tout cas à la chercher, vous voyez, dans les écritures, dans les écrits, dans les courriels, dans les envois de lettres, dans les conclusions. Et aujourd'hui, bon, il y a un moment, si ça correspond à l'idée générale, évidemment si tout ça est bien écrit, mais vous voyez, avoir une exigence un peu moindre et on se rend compte... que dans les faits, on ne perd pas en qualité et en réalité, on gagne d'une certaine manière en efficacité. Donc oui, ça implique nécessairement de déléguer. Et je réalise que je n'ai quand même pas répondu à votre question, parce que je suis un peu bavarde finalement, mais vous me demandiez ce que représente au quotidien le mandat de vice-bâtonnière. Eh bien, c'est la représentation des avocats, en l'occurrence du barreau de Paris. C'est-à-dire que... Nous sommes un binôme, donc vous avez le bâtonnier et moi, vice-bâtonnière, et nous représentons les 34 000 avocats parisiens. Au quotidien, ça signifie quoi ? Ça signifie présider un certain nombre de commissions. Vous avez à la fois des commissions déontologiques, vous avez à la fois l'aspect disciplinaire. Le rôle, c'est vraiment la représentation des avocats, impulser aussi une direction, une politique. pour la profession. Et puis, quand même, être aussi l'épaule des avocats en cas de difficulté. On parle de discipline, on parle de déontologie. Donc, ce sont potentiellement des avis et des sanctions qui peuvent être rendus, qui peuvent être rendus, mais c'est aussi être là. Oui,

  • Speaker #0

    c'est pas que du positif, c'est un ensemble.

  • Speaker #1

    C'est un ensemble, et c'est aussi être à l'écoute et présent pour les avocats en cas de difficulté. Et lorsqu'on est 34 000, évidemment, il ne manque pas d'y en avoir.

  • Speaker #0

    C'est sûr. Vous parliez justement d'impulser des choses. Alors effectivement, vous avez mis en place pas mal de choses, notamment autour des femmes. Avant de revenir justement sur ce que vous avez mis en place, parce que c'est très important. Je voulais savoir, vous, est-ce que vous avez eu, alors en tant que femme avocate, vous parliez aussi entre le rêve et la réalité. Est-ce qu'il y a eu des déconvenues ? Est-ce que ça a été fait ? Plus difficile, est-ce qu'il y a une réalité autour de l'image du métier d'avocat, de la rigueur, l'exigence, qui est encore un peu plus complexe pour les femmes ?

  • Speaker #1

    Je pense globalement que oui, ça reste plus difficile pour les femmes. C'est ce que je pense. Lorsque je dis cela, évidemment, ça ne retire en rien. l'existence de vraies figures modèles au sein du barreau. Vous avez beaucoup de femmes brillantes qui vraiment sont des modèles pour toutes et tous. Mais globalement, ça reste plus difficile. Ça reste plus difficile pour les femmes d'accéder à l'association au sein d'un cabinet. Ça reste plus difficile pour les femmes en termes de rémunération, vous voyez, selon des études relativement récentes. toute une carrière, les femmes gagnent deux fois moins que les hommes. Et c'est pas rien.

  • Speaker #0

    C'est même énorme.

  • Speaker #1

    Oui, c'est énorme. Le gap, il est majeur. Et ça s'explique évidemment par plein de choses. Déjà, des rémunérations qui sont très rapidement différentes entre hommes et femmes. Et puis... Et puis... C'est un peu toujours pareil, c'est-à-dire qu'on pourrait croire que dans la profession juridique, parce que nous autres avocats nous défendons tous les jours les droits des justiciables, d'une certaine manière on serait d'autant plus rigoureux et d'autant plus respectueux de l'égalité. Mais dans les faits, chez nous aussi, comme ailleurs, comme dans la majorité des domaines, les femmes sont bien moins loties. Et il est vrai que la question de la parentalité, de la maternité... est aujourd'hui perçue comme la première cause de discrimination. C'est-à-dire que lorsque une femme... Alors évidemment, là, mon propos est général, et vous avez évidemment de très belles exceptions, et puis beaucoup de cabinets qui se comportent très très bien, bien sûr, mais très souvent, dans ce qui nous remonte, le premier enfant, le deuxième enfant, est un frein à l'évolution de la carrière, est perçu comme tel, et puis pas simplement perçu. Les femmes peuvent perdre leur collaboration ou alors ne pas accéder à l'association qu'elles attendaient, qu'elles espéraient de leur vœu, qu'elles appelaient de leur vœu depuis des années.

  • Speaker #0

    Donc c'est une réalité.

  • Speaker #1

    C'est une réalité qui est, entre guillemets, contre laquelle l'Ordre, dans sa continuité, véritablement se bat depuis des années. Vraiment. On n'a pas attendu que nous soyons en poste pour s'emparer de ce sujet. Ce serait faux de le dire. Ça fait des années que les bâtonniers et vice-bâtonniers en poste œuvrent en la matière parce que c'est une nécessité. Il est inacceptable de laisser la situation en l'état. Et à ce jour, les femmes identifient la maternité comme le principal frein à leur carrière. Vous savez, selon une étude... Il en ressortait que lorsqu'un homme dans un cabinet, donc un collaborateur, a son premier enfant, c'est vu comme quelque chose de valorisant, d'une certaine manière. Il devient chef de famille, il a des responsabilités. Ce n'est plus le jeune homme, c'est le père de famille. Et d'une certaine manière, ça va de pair avec un ancrage au sein des cabinets en termes de rémunération, en termes même d'évolution. Alors que pour les femmes, souvent, pas toujours, mais souvent... C'est une zone de risque. Tout d'un coup, ça devient plus compliqué. Et ça peut être vu comme tel. D'où le frein. Ça veut dire moins de présence. Ça veut dire, en tout cas, potentiellement, c'est comme ça que c'est vu. Donc, il y a une vraie crispation. Il y a une tension au regard de l'équilibre vie personnelle, vie professionnelle. Ça ne vaut pas que chez les avocats, bien sûr, puisqu'on en parle beaucoup. Et d'autant plus ces dernières années. Et c'est heureux. Mais c'est vrai que cette tension, on l'aperçoit d'autant plus. dans la profession d'avocat, qui est une profession libérale. Il n'y a pas la protection du contrat de travail. Oui,

  • Speaker #0

    une maternité va engendrer aussi des conséquences. Vous l'avez aussi abordé lors du colloque en termes de santé, en termes de retour après une naissance, etc. Et c'est des sujets qui, vous, vous tiennent à cœur et où vous avez eu envie de mettre des choses en place.

  • Speaker #1

    Oui, ça me tient à cœur. Non pas que j'ai vécu à titre personnel des difficultés particulières. Moi, lorsque j'ai eu mes... Mes deux enfants, vous voyez, j'étais déjà installée et j'avais créé mon propre cabinet. Mais pour autant, c'est une difficulté qui remonte trop souvent. Vous voyez, pendant la campagne, le nombre d'avocates qui se faisaient l'écho de situations comme celle-ci, de collaborations qu'elles ne retrouvaient pas dans les mêmes conditions à leur retour, de bureaux qui avaient été déménagés en leur absence. C'est violent, tout ça. Voilà, d'une augmentation qui n'est pas... qui n'est pas accordée parce que les objectifs ne sont prétendument pas respectés pendant cette période. Et ce n'est plus acceptable, en fait. Ce n'est pas acceptable. Donc, en 2025, on ne peut pas se satisfaire de chiffres tels que ceux-ci. Et c'est la raison pour laquelle, pour moi, ça fait partie des priorités. Dans un mandat, il y a un certain nombre d'objectifs. C'est un mandat qui est quand même relativement court. Ce n'est que deux ans. Donc en deux ans, il faut aller vite.

  • Speaker #0

    À l'essentiel.

  • Speaker #1

    Et à l'essentiel. Voilà. Et notamment sur ce qui relève d'engagement. Donc c'est la raison pour laquelle ces sujets-là, je m'en suis, enfin ce sujet en particulier, je m'en suis emparée parce que je considère que les femmes, elles attendent trop souvent leur tour. C'est jamais le bon moment, vous voyez, pour les femmes. Première enfant, on se dit, ah bah mince, dans ma collaboration, ça va peut-être pas bien passer. Puis après, c'est à main, si j'ai mon troisième enfant, est-ce que je vais avoir l'association à laquelle je rêve ? Vous voyez, c'est jamais le bon moment. Et je crois qu'il n'y a pas de bon moment. C'est-à-dire que le bon moment, c'est celui que l'on décide pour soi-même, en fait.

  • Speaker #0

    Et c'est aussi engendré par tout ce que vous avez expliqué, le contexte, etc., de se dire si je pars, est-ce que je vais revenir dans les mêmes conditions, etc. Est-ce que vous, vous avez mis en place des choses particulières pour arriver à concilier justement votre vie personnelle et professionnelle ou est-ce que vous vous êtes rendu compte de certaines choses ? Est-ce que là... Avec le recul, vous avez peut-être même un message à faire passer à de futures jeunes mamans avocates. Est-ce que ce n'est pas évident ? On voit le rôle que vous avez, l'engagement, et puis en même temps, vous êtes mère aussi.

  • Speaker #1

    Oui, alors ce n'est pas évident, d'accord ? Et ce n'est évident pour personne. J'ai tendance à dire, il n'y a pas de superwoman, wonderwoman. Moi, je ne suis pas plus forte que les autres. Je donne souvent mon exemple. Non pas parce que ce serait un exemple à suivre, mais pour dire que dans la vie, en fait, il n'y a pas de bon moment. Le bon moment, c'est celui qu'on décide. Vous voyez, je vous le disais tout à l'heure, lorsque je me lance dans la campagne pour être membre du Conseil de l'Andre, à l'époque, j'ai une petite fille qui a à peine un an. Lorsque je me lance dans la campagne pour le vice-batonnat, en fait, je viens d'accoucher, pour tout vous dire. C'est-à-dire que, vous voyez, j'ai le projet batonnat-vice-batonnat en tête et j'ai un projet personnel essentiel, évidemment. d'avoir un second bébé. Il s'avère, et on ne sait jamais quand est-ce que les choses adviennent, on va dire. Finalement, j'ai le bonheur de pouvoir avoir ce second enfant, et je ne le vois en aucune manière comme un frein pour le projet que j'ai parallèlement en tête, vous voyez, de vice-bâtonnard. Et c'est vrai qu'au tout début de la campagne, j'avais donc un nouveau-né. J'ai tendance à dire que mon fils avait quasiment l'âge de la campagne. Ah mais oui, globalement, je me rappelle d'un premier rendez-vous de campagne. Mon fils avait un mois. Alors au début, la campagne, ça monte crescendo. Donc évidemment, heureusement, les premiers mois étaient relativement calmes, si je puis dire. Mais évidemment, on se doute que sur une période... Une campagne longue comme celle que nous avons vécue de 18 mois, j'étais avec mon petit bébé. Et certains s'interrogeaient, ou ont pu me faire savoir, mais on espère quand même que cela me permettrait quand même...

  • Speaker #0

    C'est une réalité aussi d'avoir ce genre de retour.

  • Speaker #1

    Oui, c'est une réalité. Et je ne suis pas sûre qu'elle soit toujours bienveillante. Bravo, mais j'espère quand même que vous serez en mesure de bien vous occuper de vos enfants. C'est rarement bienveillant. Et ce qui m'interpellait, parce que ce qui m'interpellait surtout, c'est que parmi les candidats, parce qu'il y avait beaucoup de candidats, certains avaient de très jeunes enfants. Alors, je parle des candidats hommes, de jeunes enfants de deux ans, des petits. Et cette question-là, étonnamment, ne leur était jamais posée. Vous voyez ça, pour le coup, j'espère quand même que votre campagne ne sera pas une difficulté et que vous pourrez être un bon père parallèlement. Ça, ce n'était pas un sujet. En revanche, pour nous, pour moi en l'occurrence, mais plus largement, c'était quand même des sujets sur lesquels on est souvent un peu presque culpabilisés. Donc, pourquoi je vous donne cet exemple ? C'est pour dire qu'en fait, il n'y a pas de bon moment. On peut se dire, là, c'est quand même compliqué. Et oui, c'est compliqué, mais lorsqu'on a ensuite des enfants, adolescents, c'est aussi compliqué. Vous voyez, en fait, pour les femmes, c'est jamais le bon moment. Donc, en fait, c'est quel est... pour moi, à titre personnel, le moment qui me semble opérant pour m'épanouir. Et moi, à ce moment de ma vie, j'ai toujours fonctionné comme ça, je pense qu'il y a des opportunités dans la vie, il y a des choses qu'il faut saisir ou pas, et lorsque ça se présente, il faut pouvoir les saisir, si on est en mesure évidemment de le faire. Et à ce moment-là... J'avais envie de prolonger mon engagement pour la profession. J'étais très heureuse en tant que membre du Conseil de l'Ordre. J'avais envie d'aller plus loin. Et j'avais aussi envie d'être maman pour la seconde fois. Et les choses se sont faites concomitamment et parallèlement. Non pas de manière simple, ce serait mentir que de dire que c'est simple. C'est quand même une organisation.

  • Speaker #0

    C'est votre choix aussi.

  • Speaker #1

    Mais c'est mon choix.

  • Speaker #0

    Un choix, c'est jamais simple dans la réalisation. En tout cas, c'est ce que vous vouliez à la fois, concilier les deux, pas faire de concession.

  • Speaker #1

    Ben, en tout cas... De toute façon,

  • Speaker #0

    le bébé était là, enfin voilà, je veux dire, et puis l'opportunité était là. C'est vrai que tout est arrivé.

  • Speaker #1

    Bien sûr, bien sûr. Et sans... Lorsque je dis ça, encore une fois, c'est pas un modèle. On pourrait se dire, oh là là, j'ai besoin de temps pour moi, j'ai besoin de faire les choses avec une certaine sérénité. Et ça sera mon moment à moi, personnellement, pour mon épanouissement professionnel, peut-être dans 10 ans, dans 5 ans. Et c'est très bien. Il n'y a pas de modèle. Mais lorsqu'on a, au contraire, une envie, la maternité n'est en aucune manière un obstacle. Pour moi, c'est ce qui est important. Et dans les mesures que j'ai voulu mettre en place dans le cadre de mon mandat, c'est des mesures qui essayent, tant bien que mal, ce n'est pas non plus des baillettes magiques, mais essayent de faciliter un peu, de limiter un peu cette... tension vie personnelle, vie professionnelle que nous autres avocats, on vit quand même particulièrement. C'est-à-dire que c'est une profession qui est quand même difficile, qui est quand même exigeante. Bon, je pense que on peut quand même faire en sorte que les choses le soient un petit peu moins. Et donc, c'est des mesures qui me paraissaient importantes. Je peux vous les... Sans vous faire un catalogue, mais par exemple... Il n'est pas rare de voir des femmes très enceintes aux audiences parce qu'elles viennent, par exemple, solliciter un renvoi et elles sont enceintes de huit mois et plus. Pour moi, c'était important, vraiment, que l'Ordre puisse mettre en place un système qui permette tout simplement de se faire remplacer, c'est-à-dire d'avoir un avocat ou une avocate missionnée par l'Ordre, donc payée par l'Ordre, mais qui va comme ça pouvoir se déplacer pour accomplir des petits actes de procédure. pour pouvoir aller solliciter un renvoi pour une avocate enceinte ou parce qu'elle est en congé maternité. Par exemple, c'est des petites choses mais qui quand même facilitent les choses.

  • Speaker #0

    Oui, elle peut arriver à couper aussi parce que ça a la difficulté dans le métier.

  • Speaker #1

    Certes, vous avez un congé maternité, c'est vrai, mais dans les faits, il est très rare qu'une avocate arrête complètement de travailler. On ne baisse pas les rideaux du jour au lendemain, c'est très très très très rare. Et c'est un problème, en réalité, parce que ce temps, il est nécessaire. Donc, se dire qu'on a la possibilité de se retourner vers notre ordre, qui quand même nous représente, et là pour nous, en disant, voilà, moi dans un mois, pendant mon congé maternité, là j'aurai deux, trois audiences que j'aimerais faire renvoyer, je sais qu'il n'y a pas de problème particulier, en plus, sur ces renvois, que l'ordre se charge d'être présent pour moi, ça me paraissait quelque chose d'important. Donc ça reste encore récent, mais j'espère que les avocates vont s'en emparer parce que ça me paraît utile. Et d'ailleurs, je le précise, ça vaut pour les femmes dans le cadre de leur congé maternité, mais aussi j'englobe les hommes parce qu'il y a aussi les accidents de la vie. Tout d'un coup, il y a la maladie et les audiences elles sont quand même. Donc ça englobe plein de services. qui vient en vos lieux et places lorsqu'il y a vraiment une impossibilité. Donc ça, c'était une chose qui me paraissait importante. De la même manière, on a lancé en septembre dernier le premier salon d'allaitement. Eh oui ! Donc, il n'y en avait pas jusque-là chez les avocats. Et donc, à la Maison des avocats, en face du tribunal judiciaire, vous avez désormais un salon d'allaitement qui permet, comme son nom l'indique, aux femmes avocates qui ont repris leur activité, d'avoir un moment. qu'il aurait, en tout cas un espace qui l'aurait dédié pour tirer son lait. Exactement. Et je tenais beaucoup à cette mesure et je pensais d'ailleurs, je me disais, oh là là, ça va être peut-être accueilli de manière...

  • Speaker #0

    Un peu symbolique, alors qu'en réalité, ce n'est pas ça.

  • Speaker #1

    C'est une vraie réalité.

  • Speaker #0

    C'est une réalité. Depuis, on a beaucoup de satisfaction à entendre les avocats nous dire « c'est super, franchement, ça nous est vraiment utile » . Ça, c'était quelque chose qui me paraissait important à mettre en place.

  • Speaker #1

    Vous avez aussi mis en place un congé, je crois, pour les fausses couches. En cas de fausses couches, une possibilité de prolonger.

  • Speaker #0

    Alors, en réalité, on a renégocié avec notre courtier en assurance, effectivement pour accorder aux avocates qui sont confrontés à une fausse couche ou qui sont engagés dans un parcours PMA de leur donner quelques jours d'indemnité journalière auxquels, jusqu'à présent, elles n'avaient pas droit. Voilà. Donc voilà, l'avocate qui est dans son cabinet. ou l'associer, elle peut disposer de 5 jours d'indemnité journalière si elle est dans un parcours PMA, de 3 jours en cas de fausse couche. Alors ça reste limité, bien sûr, j'en ai conscience, mais c'est un début et c'est aussi de mon point de vue, un marqueur pour dire que c'est pas des sujets anecdotiques.

  • Speaker #1

    C'est pas anodin.

  • Speaker #0

    C'est pas anodin, voilà. Traverser un parcours PMA... C'est difficile, généralement. Une fausse couche, c'est difficile, physiquement et psychologiquement. Se dire qu'on a peut-être, allez, trois jours, ce n'est pas grand-chose, mais quand même trois jours qui vont être pris en charge dans ce cadre, c'est aussi un signal qui est envoyé. prendre soin de soi les avocats ont tendance à laisser un peu ça de côté parce que c'est vrai qu'on parle pour les autres on agit pour les autres, on se bat pour les autres et on laisse un peu de côté sa santé. Voilà.

  • Speaker #1

    Et c'est important de rappeler l'importance de ne pas l'oublier, justement. Par rapport à tout ce que vous avez mis en place, j'imagine peut-être qu'il y a encore des réticences, en tout cas, ou est-ce que vous avez eu des retours ? Mais est-ce que vous avez eu des retours tout court ? Parce que parfois, on met en place des choses et il n'y a pas forcément de retours qui sont même parfois attendus. Et est-ce qu'il existe encore des réticences ?

  • Speaker #0

    Je crois qu'il existe toujours. les réticences.

  • Speaker #1

    Même sur ces sujets-là ?

  • Speaker #0

    Oui. J'en ai été moi-même assez surprise, je dois te dire, parce que parfois, lorsqu'on est convaincu du bien fondé d'une mesure, on ne s'attend peut-être pas forcément aux réticences, voire aux oppositions, alors qu'elles sont en fait naturelles et peut-être normales. Mais je ne sais pas. Ça fait partie de toute action. La question c'est l'engagement, c'est agir. L'action, nécessairement, va donner lieu à une opposition, à des questionnements. Il s'agit de prendre son bâton de pèlerin et de convaincre.

  • Speaker #1

    Ça ne vous arrête pas en tout cas ?

  • Speaker #0

    Non, jamais. Jamais. Mais j'entends. Et puis, vous savez, la contradiction, l'opposition, elle peut, pas toujours, mais elle peut être utile puisqu'elle permet de parfois recentrer un peu ou retravailler les choses pour qu'elles soient le plus adéquates possible avec son idée de départ. Donc, en tout cas, en ce qui me concerne, c'est jamais un frein. Et puis, on continue encore à avancer sur d'autres mesures, notamment... Le conseil de l'ordre du barreau a voté un budget pour une micro crèche du barreau de Paris. Et vous voyez, jusqu'à présent, nous n'avons jamais eu de crèche véritablement du barreau. Alors qu'en tant que profession libérale, c'est très difficile d'avoir une place en crèche. On pourrait se dire, bon, ce n'est pas vraiment le sujet des avocates. Si, en fait, bien sûr que c'est un sujet parce que, comme chacun le sait, il est difficile d'avoir des places en crèche publiques. LMI et Et ce qui relève des crèches inter-entreprise, en réalité, on n'y a pas le droit. En tout cas, c'est un coût très important puisqu'il faut payer, pour être concret, la part famille et la part entreprise qui revient au prix d'une école de commerce pour son nouveau-né. Donc, ça n'a pas grand sens. Et donc, c'est en partant de ce constat que la crèche est apparue comme une nécessité. Donc, évidemment, c'est long et lourd à tout point de vue, administrativement. de créer une crèche, une micro-crèche en l'occurrence. Mais le barreau s'est entouré de personnes qui sont en mesure de rendre cela possible. Le budget a été voté. Le cahier des charges est également circonscrit. C'est bien avancé. Voilà, nous avançons. Alors, nous avançons doucement, mais j'ai très bon espoir pour que, malheureusement, ce sera vraisemblablement après le mandat, puisque... Nous ne pourrons pas ouvrir une crèche au 31 décembre 2025, mais c'est très bien parti. C'est un projet qui me tient de la même manière vraiment à cœur. C'est-à-dire que certes, une micro-crèche, c'est par définition peu de place, mais ce que j'espère, d'une certaine manière, je vois cette micro-crèche comme une première pierre. Une première pierre pour que peut-être, dans dix ans, lorsqu'on se retournera, on pourra se dire bon ben Depuis, le barreau de Paris a ses 4-5 crèches du barreau. Oui, c'est important de la poser cette première. Exactement. Lorsqu'on dit, bah oui, mais bon, c'est pas assez. Il y a des centaines de naissances au barreau par an. C'est anecdotique. J'entends. Et si cela ne tenait qu'à moi, j'adorerais qu'on ouvre tout de suite deux micro-crèches. Mais dans les faits, je pense qu'il faut d'abord démontrer qu'on est en mesure de le faire. Le faire. Et puis ensuite... à charge pour les successeurs, de poursuivre, mais je crois beaucoup à la politique des petits pas et c'est une première pierre.

  • Speaker #1

    Après ce mandat, est-ce qu'il y a d'autres objectifs ? Est-ce que vous avez, vous, personnellement, d'autres objectifs à atteindre ? Est-ce que vous vous projetez déjà ou c'est trop tôt ?

  • Speaker #0

    Je pense que c'est trop tôt, c'est-à-dire que moi je suis encore en plein dedans. Ah oui, à 100% dans le mandat. C'est vrai qu'on est déjà, ça y est, c'est la seconde année, on est en... Ça va vite. Oui, quasiment en avril. Donc ça va vite, mais néanmoins, il reste quand même plusieurs mois. Donc je suis complètement concentrée sur le mandat. Il y a encore beaucoup de choses à faire. Donc non, je suis complètement dédiée à ma mission à ce jour.

  • Speaker #1

    Alors Vanessa, on est dans l'Else Agis. J'ai quelques questions signatures du podcast à vous poser. Pour terminer cet échange, déjà pour vous, Agir, qu'est-ce que ça signifie ?

  • Speaker #0

    Agir, ça revient à ce que je vous expliquais tout à l'heure. C'est-à-dire qu'agir, c'est avancer à son rythme, à soi, selon son propre calendrier, sans chercher à attendre le bon moment. C'est vraiment avancer selon sa propre volonté. Et c'est vrai qu'on est à une époque où on est quand même beaucoup contrainte, beaucoup contrainte dans la vie personnelle et la vie professionnelle, entre en tension d'une certaine manière et le déséquilibre il porte beaucoup sur les femmes parce que la réalité c'est que le poids de la vie personnelle porte davantage sur les femmes que sur les hommes et c'est un frein à l'action et je crois qu'au contraire. Il nous appartient, en fonction évidemment de Ausha personnels, mais d'avancer selon son propre calendrier, sa propre impulsion. Sans écouter, c'est pas le bon moment, pas tout de suite, c'est jamais le bon moment. Donc c'est à soi-même, on doit répondre nous-mêmes à cette question, est-ce que c'est le bon moment ? Est-ce que là, je me sens épanouie pour le faire ou est-ce qu'au contraire, pas du tout ?

  • Speaker #1

    Se forcer aussi parfois à ne pas trop s'écouter cette petite voix qui... Peut-être autour de la confiance en soi, de l'audace ?

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'il y a évidemment des peurs. L'action n'empêche pas la peur, l'action n'empêche pas la crainte de l'échec. Bien sûr, évidemment. Mais peut-être que l'action implique de laisser de côté, en tout cas autant que possible, le risque d'échec. C'est-à-dire qu'évidemment, on peut ne pas y arriver, on peut ne pas convaincre. On peut ne pas être élu, mais on y va. On y va et on porte ses idées. Et puis, elles font leur chemin.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il y a un domaine dans lequel vous aimeriez voir plus d'action ?

  • Speaker #0

    Plusieurs choses. Je trouve que, vous voyez, le droit, on en parlait tout à l'heure. L'éducation au droit et à la justice. Je trouve que c'est quelque chose à côté duquel... Globalement, je parle au niveau de la société, on passe quand même vraiment à côté. C'est-à-dire que vous avez les études de droit, et ceux qui font du droit évidemment entrent dans ce parcours et ont toute l'éducation, la connaissance. Mais je trouve qu'on gagnerait à ce que l'enseignement du droit, de la justice, des grands principes, des grandes valeurs, soit inculqué très tôt, dès l'école. Je trouve que dans les débats actuels... Vous voyez nos fondamentaux ont tendance à s'effriter un peu. Les valeurs, la présomption d'innocence, le contradictoire, le procès équitable. qui nous paraît, à nous juristes, des évidences, on se rend compte que dans les débats, même de société, en réalité, c'est souvent des notions assez abstraites pour les gens. Oui, bon, d'accord, ok, mais alors que...

  • Speaker #1

    Il n'y a pas la valeur associée, ou en tout cas, l'impact, tout ça.

  • Speaker #0

    Alors que pour moi, ça relève vraiment... Il y a un enjeu énorme à l'éducation. L'éducation, vous voyez, mais de la justice, du droit, de ces valeurs, parce qu'en réalité, elles sont le socle. Vous voyez, quand on parle d'état de droit, C'est vrai que parfois c'est un peu évanescent pour un certain nombre de personnes, alors que c'est en fait le socle sur lequel notre démocratie est assise. Et je trouve que c'est un peu un domaine qu'on a tendance à laisser aux avocats. Oui, bon d'accord, les avocats et leurs grands principes, oui, bon d'accord. Vous voyez ? Alors qu'en réalité, on aurait pu... Oui, ça a gagné.

  • Speaker #1

    Parfois obscur, en fait. C'était peu connu et peu généralisé.

  • Speaker #0

    Alors que je crois qu'à l'époque où l'on vit, actuellement, c'est indispensable. Vraiment. De mettre la lumière, le focus sur l'éducation, au droit, à la justice, beaucoup plus tôt.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous avez une figure féminine, alors ça peut être personnelle, professionnelle, voire historique, qui vous inspire particulièrement dans votre manière d'agir ou au quotidien ? Ça serait qui et pourquoi ?

  • Speaker #0

    Alors ce serait une figure féminine personnelle puisque c'est ma mère. Voilà. Tout simplement et sans aucune hésitation possible, c'est ma mère. Vous voyez, je vous disais, il n'y a pas de modèle, on a surtout… comment dire, il n'y a pas de Wonder Woman ou de Superwoman, on fait ce qu'on peut chacune en réalité. Moi quand même, mon modèle, c'est clairement ma mère. Vraiment. Et je considère que tout ce que j'ai accompli à ce jour, et c'est pas du tout une... Enfin, je pense chaque mot, c'est vraiment grâce à elle. Vraiment, vraiment. Par toute petite, déjà, l'importance accordée au travail, à l'exigence du travail. Et surtout, au-delà de ça, parce que c'est un peu banal, les parents généralement poussent à ça, mais vraiment... de ne jamais se mettre de freins ou de limites. Et je réalise maintenant, en étant adulte, très adulte, qu'en réalité, c'est le meilleur conseil ou le meilleur étayage à donner, je crois, aux enfants. C'est pas « tu verras si tu peux » . Non, c'est « vas-y, on y va » . On y va et on verra. Et ça, c'est vraiment ma mère qui me l'a inculqué. Donc, c'est vraiment, c'est ma figure évidente qui m'a porté et qui me porte toujours aujourd'hui.

  • Speaker #1

    Eh bien, on va rester sur ça. Merci beaucoup, Vanessa, pour cet échange.

  • Speaker #0

    Merci infiniment. C'était un plaisir. Merci beaucoup.

Description

C’est dans la Maison des avocats, juste en face du tribunal de Paris, imposant et presque intimidant, que Vanessa Bousardo me reçoit.

Un jour un peu particulier. Pila à l’heure où tombe la condamnation de Marine Le Pen. Le droit et le politique se croisent, s'entremêlent. Dans l'air, quelque chose de suspendu. Beaucoup d'agitation, de bruits, je demande si c'est toujours comme ça ici. Non c'est exceptionnel, comme ma rencontre du jour finalement !

Une atmosphère singulière s’installe dans ces lieux où tout prend une autre densité.


Coupées du tumulte extérieur, Vanessa m’accueille dans son bureau, avec une grande simplicité, avec chaleur. On se pose, on se coupe de l’agitation. L’épisode peut commencer.


Son rêve, petite, c’était d’être avocate. Pourtant, elle commence par tester médecine, presque en sachant que ce n’est pas sa place. Et dès qu’elle arrive en droit, c’est la révélation. Une évidence. Une passion.
Dès la première année, elle se sent pleinement à sa place. Le rêve devient un objectif. Et une fois cette porte du rêve franchie, tout est à construire. Le moteur : le travail. Et cette envie profonde de faire.

Elle nous raconte ensuite ce concours de circonstances qui l’a conduite à devenir vice-bâtonnière. L’envie était là, oui, mais l’opportunité est arrivée plus vite que prévu.


C’était aussi un moment de vie particulier : en plein cœur de sa maternité. Mais elle n’a pas hésité à s’engager, à donner de son temps, de son énergie, à cette profession qu’elle aime profondément.

Une fois élue, c’est tout son temps qui est consacré à cette fonction.


Et elle le dit avec clarté : les femmes avocates n’exercent pas dans les mêmes conditions que les hommes. Ce n’est pas une posture, c’est un constat.


Les maternités, les parcours de soin, les silences autour de la charge mentale… Malgré les avancées, il reste tant à faire.


Vanessa agit. Elle fait bouger les lignes, concrètement. Et c'est l'une des raisons qui m'a poussé à l'interview, son envie d'agir est rayonnante.


Un salon d’allaitement. Des congés pour fausse couche. Un projet de crèche pour les enfants des avocats, Vanessa propose des idées fortes, essentielles.

Evidemment, sinon ça serait trop simple, ces propositions rencontrent encore parfois des résistances.
Mais elle les envisage non comme des freins, mais comme des invitations à réfléchir autrement, à affiner, et surtout à persister !


Elle a cette aura. Cette présence calme, mais ferme. Cette énergie douce mais déterminée. Elle incarne pleinement ce que j’appelle une femme Elles Agissent.


Et puis, il y a cette conviction qu’elle porte : celle que les grandes valeurs du droit ( la justice, l’équité, la dignité ) qui selon elle, devraient faire partie de l’éducation dès le plus jeune âge. Une transmission essentielle. Une "graine du savoir" à planter tôt.


Bonne écoute.


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Musique:  Amour Aveugle / Garçon de Plage


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour Vanessa.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation dans Elsagis, je suis ravie. Vanessa, vous êtes vice-patronnière du Barreau de Paris, vous êtes avocate et vous êtes aussi engagée, je trouve, pour une meilleure prise en compte des réalités féminines dans le domaine du droit. Évidemment, c'est comme ça que je vous ai rencontré d'ailleurs, en étant engagée, en mettant en place des choses. Et donc dans ce podcast, je pense qu'on va évoquer ensemble justement le pouvoir de l'action concrète. à l'intérieur d'un système, peut-être d'un système qui a trop longtemps oublié aussi, la nécessité de faire entre les voix féminines, on en parlera. Et avant ça, comme je l'ai dit, vous êtes vice-patronnière. Est-ce que vous pouvez revenir justement sur les grandes étapes de votre parcours et ce qui vous a mené jusqu'à cette fonction ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr, avec plaisir. D'abord, merci infiniment de me donner la parole aujourd'hui, je suis très touchée. Les grandes étapes de mon parcours... En quelques mots, je suis avocate depuis bientôt 20 ans, puisque j'ai prêté serment en 2006, vous voyez, donc le temps passe. J'ai été 10 ans collaboratrice dans un cabinet et puis j'ai créé mon cabinet en 2016. Et depuis, j'exerce évidemment toujours, parallèlement à mon activité, pardon, à mon mandat de vice-bâtonnière, je suis toujours avocate pénaliste. Voilà, depuis maintenant une vingtaine d'années, ce qui a également... était un moment important dans mon parcours professionnel. C'est mon élection en tant que secrétaire de la conférence en 2010. C'était véritablement pour moi un objectif à atteindre quand j'étais jeune avocate. Mon rêve, c'était d'être secrétaire de la conférence. Donc je n'oublie jamais de le rappeler parce que c'est vrai que j'y tiens beaucoup. Et c'était une année en 2010 très formatrice. Pendant un an, vous savez, lorsque vous êtes secrétaire, De la conférence, vous avez accès aux commissions d'office criminelles, donc vous êtes projeté, lorsque vous êtes pénaliste, c'est forcément un peu un rêve, projeté dans des affaires criminelles, vous êtes commis d'office, ou commis d'office pour des assises, pour des comparutions immédiates également. Donc c'était un moment important dans mon parcours, dans mon parcours professionnel. Et puis ensuite, il y a eu effectivement d'autres étapes qui m'ont mené à ce mandat de vice-bâtonnière, et notamment une première étape en... en étant élue en 2018, fin 2018, membre du Conseil de l'Ordre du barreau de Paris.

  • Speaker #0

    Et justement, est-ce que vous pouvez revenir sur les actions que vous avez mises en place pour arriver à justement atteindre vos objectifs ?

  • Speaker #1

    Les actions ? Alors, ça dépend de ce dont on parle. Le ressort initial reste, de mon point de vue, le travail. C'est aussi beaucoup, beaucoup de travail, ne serait-ce que devenir avocate. Pour moi, c'était un rêve aussi. On est allé directement aux différentes étapes, mais lorsque j'étais étudiante en droit, d'abord à l'université de Nanterre, Paris 10, qui s'appelait comme ça à l'époque, et puis mon troisième cycle à Paris 2, devenir avocate, c'était un rêve. Dans ma famille, il n'y avait pas de juriste, encore moins d'avocat. Déjà, si je parvenais à un jour porter la robe, c'était déjà une grande victoire.

  • Speaker #0

    Ce rêve, du coup, il est...

  • Speaker #1

    Alors, rêve... Il y a eu quand même un petit passage, un petit préalable d'une année un peu, je me suis un peu perdue quand même, une année en médecine. Je pense que c'était, voilà...

  • Speaker #0

    C'est dur aussi de savoir en sortant du bac, etc.

  • Speaker #1

    J'ai une fascination, alors je suis nulle en sciences, je fais un bac S, je sais pas pourquoi, enfin vraiment la volonté de se confronter à ce à quoi on n'est pas fait, peut-être. Mais c'est vrai que j'ai une fascination pour la science, fascination pour la médecine, et j'avais envie d'y aller. Tout en sachant évidemment que ce n'était pas ma place, en réalité. Je crois que je n'y ai jamais vraiment cru. Oui, j'avais besoin d'être peut-être sur les bancs de cette université de médecine. Mais 15 jours, je crois, 15 jours ou trois semaines après avoir commencé ma première année de médecine, j'avais déjà passé un petit examen à Nanterre pour intégrer un BIDOG à l'époque, en droit en fait. Donc, c'est vraiment l'année un peu, l'erreur de parcours qui est plus qu'une erreur, c'est un test. Et en revanche, lorsque j'arrive en droit, c'est une révélation. C'est-à-dire que là, je suis véritablement à ma place. Le droit que je n'avais par définition jamais étudié auparavant me plaît. C'est une passion. C'est-à-dire que vraiment, c'est une révélation. Et à partir de là, de cette première année de droit jusqu'au bout, alors c'est parfois difficile évidemment, mais... Je sais que je n'ai pas lâché. La question ne s'est même pas posée parce que je me sentais très à ma place. J'ai tout de suite adoré vraiment la matière, le raisonnement juridique. Et donc, à ce moment-là, ça devient un rêve. Il faut que j'arrive à devenir avocate. Pour moi, c'était ça l'aboutissement. Ça y est, j'ai franchi cette porte, je suis avocate. Je me rends compte que tout, évidemment, commence, que tout reste à faire et que le travail ne s'arrête évidemment pas là. Et pour répondre à votre question initiale, quels sont les ressorts ? C'est beaucoup de travail et puis d'envie de faire. Vous voyez, quand je vous parlais tout à l'heure de la conférence, pour moi, ce concours d'éloquence, lorsque je voyais les secrétaires en poste, j'en rêvais. Donc c'est y aller, c'est s'entraîner, c'est se dire c'est pas grave. Le travail, évidemment, toujours, nécessairement, mais aussi... L'envie de faire, l'envie de se fixer à soi des objectifs d'une certaine manière. Moi je découvre la conférence, j'y reviens encore, mais lorsque j'étais en stage, lorsque j'étais élève avocate, et tout d'un coup je découvre ce monde, je me dis « Oh, c'est incroyable, c'est extraordinaire, qu'est-ce que j'aimerais en faire partie ? » Donc il y a aussi ce ressort-là, c'est la fascination, et puis ensuite de se donner autant que possible. On ne réussit évidemment pas tout, mais essayez en tout cas. Se donner les moyens et puis après c'est évidemment apprendre son métier, se confronter au réel, aux audiences, à la rudesse aussi des audiences, aux difficultés et puis aussi au succès. Et s'agissant plus de mon envie ensuite d'aller non pas au-delà de ma profession mais à côté de ma profession, agir. notamment pour ce qu'elle représente, c'est-à-dire agir pour les avocats, pour les avocates. Effectivement, ça part presque d'un concours de circonstances. C'est-à-dire que lorsque je me présente au Conseil de l'Ordre en fin 2018, il s'avère que mon ancien patron, avec lequel j'ai travaillé dix ans, qui était ancien bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier Sure, me propose... d'être son binôme au Conseil de l'Ordre, puisque ce sont des élections paritaires, binôme homme-femme. Et il me fait cette proposition-là. Et évidemment, j'en ai bien conscience que c'est une chance. Donc il faut le dire aussi, c'est aussi la capacité de saisir les opportunités et les chances lorsqu'elles se présentent. Et là, il me fait cette proposition, il me donne 15 jours pour réfléchir si je me présente ou pas avec lui. Et évidemment, le soir même, je lui dis... Voilà, un donné, un grand oui, bien sûr, je me présente, évidemment. Alors, ce n'est pas non plus un saut dans le vide. Je savais et j'avais déjà l'envie, en tout cas je réfléchissais, au fait de me présenter peut-être dans quelques années à cette élection pour devenir membre du Conseil de l'Ordre, ça c'est vrai. Mais cette opportunité se présente avant, et à ce moment-là, je me dis, bien sûr, c'est une chance, j'en ai conscience. et je la saisis. Donc c'est la raison pour laquelle je dis que d'une certaine manière, c'est aussi un concours de circonstances qui mène parfois à l'accomplissement de certaines choses.

  • Speaker #0

    Est-ce que lui a su voir que vous étiez prêtes à un moment où vous n'aviez pas encore conscience peut-être aussi ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, peut-être.

  • Speaker #0

    Si vous connaissez ?

  • Speaker #1

    Alors c'est vrai qu'on avait travaillé dix ans ensemble donc on se connaissait très bien et on se connaît toujours. parce qu'aujourd'hui, au-delà de mon ancien patron, c'est devenu un ami. Mais en tout cas, moi, à ce moment-là, je me dis, ça fait partie de ce qui m'intéresse et j'aimerais pouvoir donner de mon temps aussi à ma profession. L'opportunité se présente, je la saisis. Et c'est vrai que ce n'est pas forcément d'ailleurs le meilleur moment dans ma vie. Moi, j'ai à ce moment-là un petit bébé, une petite fille qui a encore à peine un an. Vous voyez, donc... Sur la chronologie, on peut se demander si c'est le bon moment. En fait, tu ne me poses pas la question. En tout cas, pour moi, c'est le moment. Je considère que je serai en mesure de mener de front à la fois ma vie personnelle et ma vie professionnelle.

  • Speaker #0

    Justement, pour bien qu'on comprenne à la fois combien de temps ça vous prend, comment vous pouvez vous organiser, déjà, est-ce que vous pouvez redéfinir vraiment ? quel est votre rôle en tant que vice-bâtonnière, parce que ce n'est pas évident, même pour moi, ni pour tout le monde, je pense, de bien comprendre quel est votre rôle. Et justement, qu'est-ce que ça rajoute dans votre quotidien qui était déjà assez chargé, je pense ?

  • Speaker #1

    Effectivement. En fait, il y a deux choses. Ce dont je vous parlais, c'était, entre guillemets, mon entrée dans les instances de la profession en tant que membre du Conseil de l'ordre. Et puis, effectivement, une fois que je suis au Conseil de l'ordre, là, je mesure et je réalise tout ce que notre institution, tout ce que l'ordre fait pour les avocats, et tout ce qu'il peut faire, peut-être encore mieux, en tout cas plus loin, pour les avocats. Et c'est là que naît, entre guillemets... La seconde idée, de me dire, mais on fait beaucoup de choses en tant que membre du Conseil de l'Ordre, j'aimerais peut-être pousser plus loin mon engagement pour la profession dans le cadre d'un mandat de bâtonnier ou de vice-bâtonnier. Donc vous voyez, c'est ce qui va m'amener à me présenter aux côtés de Pierre Hoffmann, en qualité pour le poste, pour le mandat, pour la mission de vice-bâtonnière. Et aujourd'hui, et pour répondre précisément à votre question, quel temps ça occupe dans mon quotidien ? En fait, ça occupe 100% de mon temps, en réalité. Une fois que vous êtes élu, alors il y a un temps de latence entre votre élection et puis l'entrée en fonction. En ce qui nous concerne, il y a eu six mois, six mois de décalage. Mais une fois que vous êtes en fonction, c'est tout mon temps, tout mon temps. Le matin jusqu'au soir, voire même la nuit. Et vous me direz parallèlement, vous avez une activité ? Oui, mais vous voyez, le challenge, il est aussi là. C'est-à-dire que je travaille avec ma collaboratrice, on a des points réguliers, on est en contact 15, 20, 25 fois par jour, par audio, par texto, par appel. Il n'est pas rare que je lui laisse des projets de plaidoiries tels que je les plaiderais. Donc on est en lien régulier. elle vient à l'ordre et on travaille ensemble. Et puis lorsqu'il y a un rendez-vous client, évidemment, je m'y rends. Mais entre guillemets, vous voyez, mon temps, c'est barreau. Et évidemment, je travaille les dossiers, mais par son intermédiaire et grâce à elle. Donc c'est l'occasion aussi de la remercier infiniment, parce que sans elle, ce serait évidemment particulièrement compliqué.

  • Speaker #0

    Et justement, est-ce que ce n'est pas aussi une des clés ? C'est de savoir s'entourer et parfois déléguer ? Ça a l'air compliqué peut-être ? Ah,

  • Speaker #1

    par la force des choses. Non, mais évidemment. Faire beaucoup de choses en même temps. Parce que c'est vrai que le cabinet, évidemment, je tiens mon cabinet, je tiens plus que tout à mes clients et je suis là pour eux. Et puis mon mandat, évidemment, je le vis d'une certaine manière avec passion aussi. Mais ça implique nécessairement à un moment de... d'avoir peut-être avec soi-même un tout petit peu moins d'exigence. C'est-à-dire que j'ai tendance, en tout cas j'avais tendance, à vouloir... La perfection n'existe pas, mais en tout cas à la chercher, vous voyez, dans les écritures, dans les écrits, dans les courriels, dans les envois de lettres, dans les conclusions. Et aujourd'hui, bon, il y a un moment, si ça correspond à l'idée générale, évidemment si tout ça est bien écrit, mais vous voyez, avoir une exigence un peu moindre et on se rend compte... que dans les faits, on ne perd pas en qualité et en réalité, on gagne d'une certaine manière en efficacité. Donc oui, ça implique nécessairement de déléguer. Et je réalise que je n'ai quand même pas répondu à votre question, parce que je suis un peu bavarde finalement, mais vous me demandiez ce que représente au quotidien le mandat de vice-bâtonnière. Eh bien, c'est la représentation des avocats, en l'occurrence du barreau de Paris. C'est-à-dire que... Nous sommes un binôme, donc vous avez le bâtonnier et moi, vice-bâtonnière, et nous représentons les 34 000 avocats parisiens. Au quotidien, ça signifie quoi ? Ça signifie présider un certain nombre de commissions. Vous avez à la fois des commissions déontologiques, vous avez à la fois l'aspect disciplinaire. Le rôle, c'est vraiment la représentation des avocats, impulser aussi une direction, une politique. pour la profession. Et puis, quand même, être aussi l'épaule des avocats en cas de difficulté. On parle de discipline, on parle de déontologie. Donc, ce sont potentiellement des avis et des sanctions qui peuvent être rendus, qui peuvent être rendus, mais c'est aussi être là. Oui,

  • Speaker #0

    c'est pas que du positif, c'est un ensemble.

  • Speaker #1

    C'est un ensemble, et c'est aussi être à l'écoute et présent pour les avocats en cas de difficulté. Et lorsqu'on est 34 000, évidemment, il ne manque pas d'y en avoir.

  • Speaker #0

    C'est sûr. Vous parliez justement d'impulser des choses. Alors effectivement, vous avez mis en place pas mal de choses, notamment autour des femmes. Avant de revenir justement sur ce que vous avez mis en place, parce que c'est très important. Je voulais savoir, vous, est-ce que vous avez eu, alors en tant que femme avocate, vous parliez aussi entre le rêve et la réalité. Est-ce qu'il y a eu des déconvenues ? Est-ce que ça a été fait ? Plus difficile, est-ce qu'il y a une réalité autour de l'image du métier d'avocat, de la rigueur, l'exigence, qui est encore un peu plus complexe pour les femmes ?

  • Speaker #1

    Je pense globalement que oui, ça reste plus difficile pour les femmes. C'est ce que je pense. Lorsque je dis cela, évidemment, ça ne retire en rien. l'existence de vraies figures modèles au sein du barreau. Vous avez beaucoup de femmes brillantes qui vraiment sont des modèles pour toutes et tous. Mais globalement, ça reste plus difficile. Ça reste plus difficile pour les femmes d'accéder à l'association au sein d'un cabinet. Ça reste plus difficile pour les femmes en termes de rémunération, vous voyez, selon des études relativement récentes. toute une carrière, les femmes gagnent deux fois moins que les hommes. Et c'est pas rien.

  • Speaker #0

    C'est même énorme.

  • Speaker #1

    Oui, c'est énorme. Le gap, il est majeur. Et ça s'explique évidemment par plein de choses. Déjà, des rémunérations qui sont très rapidement différentes entre hommes et femmes. Et puis... Et puis... C'est un peu toujours pareil, c'est-à-dire qu'on pourrait croire que dans la profession juridique, parce que nous autres avocats nous défendons tous les jours les droits des justiciables, d'une certaine manière on serait d'autant plus rigoureux et d'autant plus respectueux de l'égalité. Mais dans les faits, chez nous aussi, comme ailleurs, comme dans la majorité des domaines, les femmes sont bien moins loties. Et il est vrai que la question de la parentalité, de la maternité... est aujourd'hui perçue comme la première cause de discrimination. C'est-à-dire que lorsque une femme... Alors évidemment, là, mon propos est général, et vous avez évidemment de très belles exceptions, et puis beaucoup de cabinets qui se comportent très très bien, bien sûr, mais très souvent, dans ce qui nous remonte, le premier enfant, le deuxième enfant, est un frein à l'évolution de la carrière, est perçu comme tel, et puis pas simplement perçu. Les femmes peuvent perdre leur collaboration ou alors ne pas accéder à l'association qu'elles attendaient, qu'elles espéraient de leur vœu, qu'elles appelaient de leur vœu depuis des années.

  • Speaker #0

    Donc c'est une réalité.

  • Speaker #1

    C'est une réalité qui est, entre guillemets, contre laquelle l'Ordre, dans sa continuité, véritablement se bat depuis des années. Vraiment. On n'a pas attendu que nous soyons en poste pour s'emparer de ce sujet. Ce serait faux de le dire. Ça fait des années que les bâtonniers et vice-bâtonniers en poste œuvrent en la matière parce que c'est une nécessité. Il est inacceptable de laisser la situation en l'état. Et à ce jour, les femmes identifient la maternité comme le principal frein à leur carrière. Vous savez, selon une étude... Il en ressortait que lorsqu'un homme dans un cabinet, donc un collaborateur, a son premier enfant, c'est vu comme quelque chose de valorisant, d'une certaine manière. Il devient chef de famille, il a des responsabilités. Ce n'est plus le jeune homme, c'est le père de famille. Et d'une certaine manière, ça va de pair avec un ancrage au sein des cabinets en termes de rémunération, en termes même d'évolution. Alors que pour les femmes, souvent, pas toujours, mais souvent... C'est une zone de risque. Tout d'un coup, ça devient plus compliqué. Et ça peut être vu comme tel. D'où le frein. Ça veut dire moins de présence. Ça veut dire, en tout cas, potentiellement, c'est comme ça que c'est vu. Donc, il y a une vraie crispation. Il y a une tension au regard de l'équilibre vie personnelle, vie professionnelle. Ça ne vaut pas que chez les avocats, bien sûr, puisqu'on en parle beaucoup. Et d'autant plus ces dernières années. Et c'est heureux. Mais c'est vrai que cette tension, on l'aperçoit d'autant plus. dans la profession d'avocat, qui est une profession libérale. Il n'y a pas la protection du contrat de travail. Oui,

  • Speaker #0

    une maternité va engendrer aussi des conséquences. Vous l'avez aussi abordé lors du colloque en termes de santé, en termes de retour après une naissance, etc. Et c'est des sujets qui, vous, vous tiennent à cœur et où vous avez eu envie de mettre des choses en place.

  • Speaker #1

    Oui, ça me tient à cœur. Non pas que j'ai vécu à titre personnel des difficultés particulières. Moi, lorsque j'ai eu mes... Mes deux enfants, vous voyez, j'étais déjà installée et j'avais créé mon propre cabinet. Mais pour autant, c'est une difficulté qui remonte trop souvent. Vous voyez, pendant la campagne, le nombre d'avocates qui se faisaient l'écho de situations comme celle-ci, de collaborations qu'elles ne retrouvaient pas dans les mêmes conditions à leur retour, de bureaux qui avaient été déménagés en leur absence. C'est violent, tout ça. Voilà, d'une augmentation qui n'est pas... qui n'est pas accordée parce que les objectifs ne sont prétendument pas respectés pendant cette période. Et ce n'est plus acceptable, en fait. Ce n'est pas acceptable. Donc, en 2025, on ne peut pas se satisfaire de chiffres tels que ceux-ci. Et c'est la raison pour laquelle, pour moi, ça fait partie des priorités. Dans un mandat, il y a un certain nombre d'objectifs. C'est un mandat qui est quand même relativement court. Ce n'est que deux ans. Donc en deux ans, il faut aller vite.

  • Speaker #0

    À l'essentiel.

  • Speaker #1

    Et à l'essentiel. Voilà. Et notamment sur ce qui relève d'engagement. Donc c'est la raison pour laquelle ces sujets-là, je m'en suis, enfin ce sujet en particulier, je m'en suis emparée parce que je considère que les femmes, elles attendent trop souvent leur tour. C'est jamais le bon moment, vous voyez, pour les femmes. Première enfant, on se dit, ah bah mince, dans ma collaboration, ça va peut-être pas bien passer. Puis après, c'est à main, si j'ai mon troisième enfant, est-ce que je vais avoir l'association à laquelle je rêve ? Vous voyez, c'est jamais le bon moment. Et je crois qu'il n'y a pas de bon moment. C'est-à-dire que le bon moment, c'est celui que l'on décide pour soi-même, en fait.

  • Speaker #0

    Et c'est aussi engendré par tout ce que vous avez expliqué, le contexte, etc., de se dire si je pars, est-ce que je vais revenir dans les mêmes conditions, etc. Est-ce que vous, vous avez mis en place des choses particulières pour arriver à concilier justement votre vie personnelle et professionnelle ou est-ce que vous vous êtes rendu compte de certaines choses ? Est-ce que là... Avec le recul, vous avez peut-être même un message à faire passer à de futures jeunes mamans avocates. Est-ce que ce n'est pas évident ? On voit le rôle que vous avez, l'engagement, et puis en même temps, vous êtes mère aussi.

  • Speaker #1

    Oui, alors ce n'est pas évident, d'accord ? Et ce n'est évident pour personne. J'ai tendance à dire, il n'y a pas de superwoman, wonderwoman. Moi, je ne suis pas plus forte que les autres. Je donne souvent mon exemple. Non pas parce que ce serait un exemple à suivre, mais pour dire que dans la vie, en fait, il n'y a pas de bon moment. Le bon moment, c'est celui qu'on décide. Vous voyez, je vous le disais tout à l'heure, lorsque je me lance dans la campagne pour être membre du Conseil de l'Andre, à l'époque, j'ai une petite fille qui a à peine un an. Lorsque je me lance dans la campagne pour le vice-batonnat, en fait, je viens d'accoucher, pour tout vous dire. C'est-à-dire que, vous voyez, j'ai le projet batonnat-vice-batonnat en tête et j'ai un projet personnel essentiel, évidemment. d'avoir un second bébé. Il s'avère, et on ne sait jamais quand est-ce que les choses adviennent, on va dire. Finalement, j'ai le bonheur de pouvoir avoir ce second enfant, et je ne le vois en aucune manière comme un frein pour le projet que j'ai parallèlement en tête, vous voyez, de vice-bâtonnard. Et c'est vrai qu'au tout début de la campagne, j'avais donc un nouveau-né. J'ai tendance à dire que mon fils avait quasiment l'âge de la campagne. Ah mais oui, globalement, je me rappelle d'un premier rendez-vous de campagne. Mon fils avait un mois. Alors au début, la campagne, ça monte crescendo. Donc évidemment, heureusement, les premiers mois étaient relativement calmes, si je puis dire. Mais évidemment, on se doute que sur une période... Une campagne longue comme celle que nous avons vécue de 18 mois, j'étais avec mon petit bébé. Et certains s'interrogeaient, ou ont pu me faire savoir, mais on espère quand même que cela me permettrait quand même...

  • Speaker #0

    C'est une réalité aussi d'avoir ce genre de retour.

  • Speaker #1

    Oui, c'est une réalité. Et je ne suis pas sûre qu'elle soit toujours bienveillante. Bravo, mais j'espère quand même que vous serez en mesure de bien vous occuper de vos enfants. C'est rarement bienveillant. Et ce qui m'interpellait, parce que ce qui m'interpellait surtout, c'est que parmi les candidats, parce qu'il y avait beaucoup de candidats, certains avaient de très jeunes enfants. Alors, je parle des candidats hommes, de jeunes enfants de deux ans, des petits. Et cette question-là, étonnamment, ne leur était jamais posée. Vous voyez ça, pour le coup, j'espère quand même que votre campagne ne sera pas une difficulté et que vous pourrez être un bon père parallèlement. Ça, ce n'était pas un sujet. En revanche, pour nous, pour moi en l'occurrence, mais plus largement, c'était quand même des sujets sur lesquels on est souvent un peu presque culpabilisés. Donc, pourquoi je vous donne cet exemple ? C'est pour dire qu'en fait, il n'y a pas de bon moment. On peut se dire, là, c'est quand même compliqué. Et oui, c'est compliqué, mais lorsqu'on a ensuite des enfants, adolescents, c'est aussi compliqué. Vous voyez, en fait, pour les femmes, c'est jamais le bon moment. Donc, en fait, c'est quel est... pour moi, à titre personnel, le moment qui me semble opérant pour m'épanouir. Et moi, à ce moment de ma vie, j'ai toujours fonctionné comme ça, je pense qu'il y a des opportunités dans la vie, il y a des choses qu'il faut saisir ou pas, et lorsque ça se présente, il faut pouvoir les saisir, si on est en mesure évidemment de le faire. Et à ce moment-là... J'avais envie de prolonger mon engagement pour la profession. J'étais très heureuse en tant que membre du Conseil de l'Ordre. J'avais envie d'aller plus loin. Et j'avais aussi envie d'être maman pour la seconde fois. Et les choses se sont faites concomitamment et parallèlement. Non pas de manière simple, ce serait mentir que de dire que c'est simple. C'est quand même une organisation.

  • Speaker #0

    C'est votre choix aussi.

  • Speaker #1

    Mais c'est mon choix.

  • Speaker #0

    Un choix, c'est jamais simple dans la réalisation. En tout cas, c'est ce que vous vouliez à la fois, concilier les deux, pas faire de concession.

  • Speaker #1

    Ben, en tout cas... De toute façon,

  • Speaker #0

    le bébé était là, enfin voilà, je veux dire, et puis l'opportunité était là. C'est vrai que tout est arrivé.

  • Speaker #1

    Bien sûr, bien sûr. Et sans... Lorsque je dis ça, encore une fois, c'est pas un modèle. On pourrait se dire, oh là là, j'ai besoin de temps pour moi, j'ai besoin de faire les choses avec une certaine sérénité. Et ça sera mon moment à moi, personnellement, pour mon épanouissement professionnel, peut-être dans 10 ans, dans 5 ans. Et c'est très bien. Il n'y a pas de modèle. Mais lorsqu'on a, au contraire, une envie, la maternité n'est en aucune manière un obstacle. Pour moi, c'est ce qui est important. Et dans les mesures que j'ai voulu mettre en place dans le cadre de mon mandat, c'est des mesures qui essayent, tant bien que mal, ce n'est pas non plus des baillettes magiques, mais essayent de faciliter un peu, de limiter un peu cette... tension vie personnelle, vie professionnelle que nous autres avocats, on vit quand même particulièrement. C'est-à-dire que c'est une profession qui est quand même difficile, qui est quand même exigeante. Bon, je pense que on peut quand même faire en sorte que les choses le soient un petit peu moins. Et donc, c'est des mesures qui me paraissaient importantes. Je peux vous les... Sans vous faire un catalogue, mais par exemple... Il n'est pas rare de voir des femmes très enceintes aux audiences parce qu'elles viennent, par exemple, solliciter un renvoi et elles sont enceintes de huit mois et plus. Pour moi, c'était important, vraiment, que l'Ordre puisse mettre en place un système qui permette tout simplement de se faire remplacer, c'est-à-dire d'avoir un avocat ou une avocate missionnée par l'Ordre, donc payée par l'Ordre, mais qui va comme ça pouvoir se déplacer pour accomplir des petits actes de procédure. pour pouvoir aller solliciter un renvoi pour une avocate enceinte ou parce qu'elle est en congé maternité. Par exemple, c'est des petites choses mais qui quand même facilitent les choses.

  • Speaker #0

    Oui, elle peut arriver à couper aussi parce que ça a la difficulté dans le métier.

  • Speaker #1

    Certes, vous avez un congé maternité, c'est vrai, mais dans les faits, il est très rare qu'une avocate arrête complètement de travailler. On ne baisse pas les rideaux du jour au lendemain, c'est très très très très rare. Et c'est un problème, en réalité, parce que ce temps, il est nécessaire. Donc, se dire qu'on a la possibilité de se retourner vers notre ordre, qui quand même nous représente, et là pour nous, en disant, voilà, moi dans un mois, pendant mon congé maternité, là j'aurai deux, trois audiences que j'aimerais faire renvoyer, je sais qu'il n'y a pas de problème particulier, en plus, sur ces renvois, que l'ordre se charge d'être présent pour moi, ça me paraissait quelque chose d'important. Donc ça reste encore récent, mais j'espère que les avocates vont s'en emparer parce que ça me paraît utile. Et d'ailleurs, je le précise, ça vaut pour les femmes dans le cadre de leur congé maternité, mais aussi j'englobe les hommes parce qu'il y a aussi les accidents de la vie. Tout d'un coup, il y a la maladie et les audiences elles sont quand même. Donc ça englobe plein de services. qui vient en vos lieux et places lorsqu'il y a vraiment une impossibilité. Donc ça, c'était une chose qui me paraissait importante. De la même manière, on a lancé en septembre dernier le premier salon d'allaitement. Eh oui ! Donc, il n'y en avait pas jusque-là chez les avocats. Et donc, à la Maison des avocats, en face du tribunal judiciaire, vous avez désormais un salon d'allaitement qui permet, comme son nom l'indique, aux femmes avocates qui ont repris leur activité, d'avoir un moment. qu'il aurait, en tout cas un espace qui l'aurait dédié pour tirer son lait. Exactement. Et je tenais beaucoup à cette mesure et je pensais d'ailleurs, je me disais, oh là là, ça va être peut-être accueilli de manière...

  • Speaker #0

    Un peu symbolique, alors qu'en réalité, ce n'est pas ça.

  • Speaker #1

    C'est une vraie réalité.

  • Speaker #0

    C'est une réalité. Depuis, on a beaucoup de satisfaction à entendre les avocats nous dire « c'est super, franchement, ça nous est vraiment utile » . Ça, c'était quelque chose qui me paraissait important à mettre en place.

  • Speaker #1

    Vous avez aussi mis en place un congé, je crois, pour les fausses couches. En cas de fausses couches, une possibilité de prolonger.

  • Speaker #0

    Alors, en réalité, on a renégocié avec notre courtier en assurance, effectivement pour accorder aux avocates qui sont confrontés à une fausse couche ou qui sont engagés dans un parcours PMA de leur donner quelques jours d'indemnité journalière auxquels, jusqu'à présent, elles n'avaient pas droit. Voilà. Donc voilà, l'avocate qui est dans son cabinet. ou l'associer, elle peut disposer de 5 jours d'indemnité journalière si elle est dans un parcours PMA, de 3 jours en cas de fausse couche. Alors ça reste limité, bien sûr, j'en ai conscience, mais c'est un début et c'est aussi de mon point de vue, un marqueur pour dire que c'est pas des sujets anecdotiques.

  • Speaker #1

    C'est pas anodin.

  • Speaker #0

    C'est pas anodin, voilà. Traverser un parcours PMA... C'est difficile, généralement. Une fausse couche, c'est difficile, physiquement et psychologiquement. Se dire qu'on a peut-être, allez, trois jours, ce n'est pas grand-chose, mais quand même trois jours qui vont être pris en charge dans ce cadre, c'est aussi un signal qui est envoyé. prendre soin de soi les avocats ont tendance à laisser un peu ça de côté parce que c'est vrai qu'on parle pour les autres on agit pour les autres, on se bat pour les autres et on laisse un peu de côté sa santé. Voilà.

  • Speaker #1

    Et c'est important de rappeler l'importance de ne pas l'oublier, justement. Par rapport à tout ce que vous avez mis en place, j'imagine peut-être qu'il y a encore des réticences, en tout cas, ou est-ce que vous avez eu des retours ? Mais est-ce que vous avez eu des retours tout court ? Parce que parfois, on met en place des choses et il n'y a pas forcément de retours qui sont même parfois attendus. Et est-ce qu'il existe encore des réticences ?

  • Speaker #0

    Je crois qu'il existe toujours. les réticences.

  • Speaker #1

    Même sur ces sujets-là ?

  • Speaker #0

    Oui. J'en ai été moi-même assez surprise, je dois te dire, parce que parfois, lorsqu'on est convaincu du bien fondé d'une mesure, on ne s'attend peut-être pas forcément aux réticences, voire aux oppositions, alors qu'elles sont en fait naturelles et peut-être normales. Mais je ne sais pas. Ça fait partie de toute action. La question c'est l'engagement, c'est agir. L'action, nécessairement, va donner lieu à une opposition, à des questionnements. Il s'agit de prendre son bâton de pèlerin et de convaincre.

  • Speaker #1

    Ça ne vous arrête pas en tout cas ?

  • Speaker #0

    Non, jamais. Jamais. Mais j'entends. Et puis, vous savez, la contradiction, l'opposition, elle peut, pas toujours, mais elle peut être utile puisqu'elle permet de parfois recentrer un peu ou retravailler les choses pour qu'elles soient le plus adéquates possible avec son idée de départ. Donc, en tout cas, en ce qui me concerne, c'est jamais un frein. Et puis, on continue encore à avancer sur d'autres mesures, notamment... Le conseil de l'ordre du barreau a voté un budget pour une micro crèche du barreau de Paris. Et vous voyez, jusqu'à présent, nous n'avons jamais eu de crèche véritablement du barreau. Alors qu'en tant que profession libérale, c'est très difficile d'avoir une place en crèche. On pourrait se dire, bon, ce n'est pas vraiment le sujet des avocates. Si, en fait, bien sûr que c'est un sujet parce que, comme chacun le sait, il est difficile d'avoir des places en crèche publiques. LMI et Et ce qui relève des crèches inter-entreprise, en réalité, on n'y a pas le droit. En tout cas, c'est un coût très important puisqu'il faut payer, pour être concret, la part famille et la part entreprise qui revient au prix d'une école de commerce pour son nouveau-né. Donc, ça n'a pas grand sens. Et donc, c'est en partant de ce constat que la crèche est apparue comme une nécessité. Donc, évidemment, c'est long et lourd à tout point de vue, administrativement. de créer une crèche, une micro-crèche en l'occurrence. Mais le barreau s'est entouré de personnes qui sont en mesure de rendre cela possible. Le budget a été voté. Le cahier des charges est également circonscrit. C'est bien avancé. Voilà, nous avançons. Alors, nous avançons doucement, mais j'ai très bon espoir pour que, malheureusement, ce sera vraisemblablement après le mandat, puisque... Nous ne pourrons pas ouvrir une crèche au 31 décembre 2025, mais c'est très bien parti. C'est un projet qui me tient de la même manière vraiment à cœur. C'est-à-dire que certes, une micro-crèche, c'est par définition peu de place, mais ce que j'espère, d'une certaine manière, je vois cette micro-crèche comme une première pierre. Une première pierre pour que peut-être, dans dix ans, lorsqu'on se retournera, on pourra se dire bon ben Depuis, le barreau de Paris a ses 4-5 crèches du barreau. Oui, c'est important de la poser cette première. Exactement. Lorsqu'on dit, bah oui, mais bon, c'est pas assez. Il y a des centaines de naissances au barreau par an. C'est anecdotique. J'entends. Et si cela ne tenait qu'à moi, j'adorerais qu'on ouvre tout de suite deux micro-crèches. Mais dans les faits, je pense qu'il faut d'abord démontrer qu'on est en mesure de le faire. Le faire. Et puis ensuite... à charge pour les successeurs, de poursuivre, mais je crois beaucoup à la politique des petits pas et c'est une première pierre.

  • Speaker #1

    Après ce mandat, est-ce qu'il y a d'autres objectifs ? Est-ce que vous avez, vous, personnellement, d'autres objectifs à atteindre ? Est-ce que vous vous projetez déjà ou c'est trop tôt ?

  • Speaker #0

    Je pense que c'est trop tôt, c'est-à-dire que moi je suis encore en plein dedans. Ah oui, à 100% dans le mandat. C'est vrai qu'on est déjà, ça y est, c'est la seconde année, on est en... Ça va vite. Oui, quasiment en avril. Donc ça va vite, mais néanmoins, il reste quand même plusieurs mois. Donc je suis complètement concentrée sur le mandat. Il y a encore beaucoup de choses à faire. Donc non, je suis complètement dédiée à ma mission à ce jour.

  • Speaker #1

    Alors Vanessa, on est dans l'Else Agis. J'ai quelques questions signatures du podcast à vous poser. Pour terminer cet échange, déjà pour vous, Agir, qu'est-ce que ça signifie ?

  • Speaker #0

    Agir, ça revient à ce que je vous expliquais tout à l'heure. C'est-à-dire qu'agir, c'est avancer à son rythme, à soi, selon son propre calendrier, sans chercher à attendre le bon moment. C'est vraiment avancer selon sa propre volonté. Et c'est vrai qu'on est à une époque où on est quand même beaucoup contrainte, beaucoup contrainte dans la vie personnelle et la vie professionnelle, entre en tension d'une certaine manière et le déséquilibre il porte beaucoup sur les femmes parce que la réalité c'est que le poids de la vie personnelle porte davantage sur les femmes que sur les hommes et c'est un frein à l'action et je crois qu'au contraire. Il nous appartient, en fonction évidemment de Ausha personnels, mais d'avancer selon son propre calendrier, sa propre impulsion. Sans écouter, c'est pas le bon moment, pas tout de suite, c'est jamais le bon moment. Donc c'est à soi-même, on doit répondre nous-mêmes à cette question, est-ce que c'est le bon moment ? Est-ce que là, je me sens épanouie pour le faire ou est-ce qu'au contraire, pas du tout ?

  • Speaker #1

    Se forcer aussi parfois à ne pas trop s'écouter cette petite voix qui... Peut-être autour de la confiance en soi, de l'audace ?

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'il y a évidemment des peurs. L'action n'empêche pas la peur, l'action n'empêche pas la crainte de l'échec. Bien sûr, évidemment. Mais peut-être que l'action implique de laisser de côté, en tout cas autant que possible, le risque d'échec. C'est-à-dire qu'évidemment, on peut ne pas y arriver, on peut ne pas convaincre. On peut ne pas être élu, mais on y va. On y va et on porte ses idées. Et puis, elles font leur chemin.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il y a un domaine dans lequel vous aimeriez voir plus d'action ?

  • Speaker #0

    Plusieurs choses. Je trouve que, vous voyez, le droit, on en parlait tout à l'heure. L'éducation au droit et à la justice. Je trouve que c'est quelque chose à côté duquel... Globalement, je parle au niveau de la société, on passe quand même vraiment à côté. C'est-à-dire que vous avez les études de droit, et ceux qui font du droit évidemment entrent dans ce parcours et ont toute l'éducation, la connaissance. Mais je trouve qu'on gagnerait à ce que l'enseignement du droit, de la justice, des grands principes, des grandes valeurs, soit inculqué très tôt, dès l'école. Je trouve que dans les débats actuels... Vous voyez nos fondamentaux ont tendance à s'effriter un peu. Les valeurs, la présomption d'innocence, le contradictoire, le procès équitable. qui nous paraît, à nous juristes, des évidences, on se rend compte que dans les débats, même de société, en réalité, c'est souvent des notions assez abstraites pour les gens. Oui, bon, d'accord, ok, mais alors que...

  • Speaker #1

    Il n'y a pas la valeur associée, ou en tout cas, l'impact, tout ça.

  • Speaker #0

    Alors que pour moi, ça relève vraiment... Il y a un enjeu énorme à l'éducation. L'éducation, vous voyez, mais de la justice, du droit, de ces valeurs, parce qu'en réalité, elles sont le socle. Vous voyez, quand on parle d'état de droit, C'est vrai que parfois c'est un peu évanescent pour un certain nombre de personnes, alors que c'est en fait le socle sur lequel notre démocratie est assise. Et je trouve que c'est un peu un domaine qu'on a tendance à laisser aux avocats. Oui, bon d'accord, les avocats et leurs grands principes, oui, bon d'accord. Vous voyez ? Alors qu'en réalité, on aurait pu... Oui, ça a gagné.

  • Speaker #1

    Parfois obscur, en fait. C'était peu connu et peu généralisé.

  • Speaker #0

    Alors que je crois qu'à l'époque où l'on vit, actuellement, c'est indispensable. Vraiment. De mettre la lumière, le focus sur l'éducation, au droit, à la justice, beaucoup plus tôt.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous avez une figure féminine, alors ça peut être personnelle, professionnelle, voire historique, qui vous inspire particulièrement dans votre manière d'agir ou au quotidien ? Ça serait qui et pourquoi ?

  • Speaker #0

    Alors ce serait une figure féminine personnelle puisque c'est ma mère. Voilà. Tout simplement et sans aucune hésitation possible, c'est ma mère. Vous voyez, je vous disais, il n'y a pas de modèle, on a surtout… comment dire, il n'y a pas de Wonder Woman ou de Superwoman, on fait ce qu'on peut chacune en réalité. Moi quand même, mon modèle, c'est clairement ma mère. Vraiment. Et je considère que tout ce que j'ai accompli à ce jour, et c'est pas du tout une... Enfin, je pense chaque mot, c'est vraiment grâce à elle. Vraiment, vraiment. Par toute petite, déjà, l'importance accordée au travail, à l'exigence du travail. Et surtout, au-delà de ça, parce que c'est un peu banal, les parents généralement poussent à ça, mais vraiment... de ne jamais se mettre de freins ou de limites. Et je réalise maintenant, en étant adulte, très adulte, qu'en réalité, c'est le meilleur conseil ou le meilleur étayage à donner, je crois, aux enfants. C'est pas « tu verras si tu peux » . Non, c'est « vas-y, on y va » . On y va et on verra. Et ça, c'est vraiment ma mère qui me l'a inculqué. Donc, c'est vraiment, c'est ma figure évidente qui m'a porté et qui me porte toujours aujourd'hui.

  • Speaker #1

    Eh bien, on va rester sur ça. Merci beaucoup, Vanessa, pour cet échange.

  • Speaker #0

    Merci infiniment. C'était un plaisir. Merci beaucoup.

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Description

C’est dans la Maison des avocats, juste en face du tribunal de Paris, imposant et presque intimidant, que Vanessa Bousardo me reçoit.

Un jour un peu particulier. Pila à l’heure où tombe la condamnation de Marine Le Pen. Le droit et le politique se croisent, s'entremêlent. Dans l'air, quelque chose de suspendu. Beaucoup d'agitation, de bruits, je demande si c'est toujours comme ça ici. Non c'est exceptionnel, comme ma rencontre du jour finalement !

Une atmosphère singulière s’installe dans ces lieux où tout prend une autre densité.


Coupées du tumulte extérieur, Vanessa m’accueille dans son bureau, avec une grande simplicité, avec chaleur. On se pose, on se coupe de l’agitation. L’épisode peut commencer.


Son rêve, petite, c’était d’être avocate. Pourtant, elle commence par tester médecine, presque en sachant que ce n’est pas sa place. Et dès qu’elle arrive en droit, c’est la révélation. Une évidence. Une passion.
Dès la première année, elle se sent pleinement à sa place. Le rêve devient un objectif. Et une fois cette porte du rêve franchie, tout est à construire. Le moteur : le travail. Et cette envie profonde de faire.

Elle nous raconte ensuite ce concours de circonstances qui l’a conduite à devenir vice-bâtonnière. L’envie était là, oui, mais l’opportunité est arrivée plus vite que prévu.


C’était aussi un moment de vie particulier : en plein cœur de sa maternité. Mais elle n’a pas hésité à s’engager, à donner de son temps, de son énergie, à cette profession qu’elle aime profondément.

Une fois élue, c’est tout son temps qui est consacré à cette fonction.


Et elle le dit avec clarté : les femmes avocates n’exercent pas dans les mêmes conditions que les hommes. Ce n’est pas une posture, c’est un constat.


Les maternités, les parcours de soin, les silences autour de la charge mentale… Malgré les avancées, il reste tant à faire.


Vanessa agit. Elle fait bouger les lignes, concrètement. Et c'est l'une des raisons qui m'a poussé à l'interview, son envie d'agir est rayonnante.


Un salon d’allaitement. Des congés pour fausse couche. Un projet de crèche pour les enfants des avocats, Vanessa propose des idées fortes, essentielles.

Evidemment, sinon ça serait trop simple, ces propositions rencontrent encore parfois des résistances.
Mais elle les envisage non comme des freins, mais comme des invitations à réfléchir autrement, à affiner, et surtout à persister !


Elle a cette aura. Cette présence calme, mais ferme. Cette énergie douce mais déterminée. Elle incarne pleinement ce que j’appelle une femme Elles Agissent.


Et puis, il y a cette conviction qu’elle porte : celle que les grandes valeurs du droit ( la justice, l’équité, la dignité ) qui selon elle, devraient faire partie de l’éducation dès le plus jeune âge. Une transmission essentielle. Une "graine du savoir" à planter tôt.


Bonne écoute.


Retrouvez toutes les informations sur www.ellesagissent.com

Retrouvez moi sur www.emilieberthet.fr

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Musique:  Amour Aveugle / Garçon de Plage


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour Vanessa.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation dans Elsagis, je suis ravie. Vanessa, vous êtes vice-patronnière du Barreau de Paris, vous êtes avocate et vous êtes aussi engagée, je trouve, pour une meilleure prise en compte des réalités féminines dans le domaine du droit. Évidemment, c'est comme ça que je vous ai rencontré d'ailleurs, en étant engagée, en mettant en place des choses. Et donc dans ce podcast, je pense qu'on va évoquer ensemble justement le pouvoir de l'action concrète. à l'intérieur d'un système, peut-être d'un système qui a trop longtemps oublié aussi, la nécessité de faire entre les voix féminines, on en parlera. Et avant ça, comme je l'ai dit, vous êtes vice-patronnière. Est-ce que vous pouvez revenir justement sur les grandes étapes de votre parcours et ce qui vous a mené jusqu'à cette fonction ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr, avec plaisir. D'abord, merci infiniment de me donner la parole aujourd'hui, je suis très touchée. Les grandes étapes de mon parcours... En quelques mots, je suis avocate depuis bientôt 20 ans, puisque j'ai prêté serment en 2006, vous voyez, donc le temps passe. J'ai été 10 ans collaboratrice dans un cabinet et puis j'ai créé mon cabinet en 2016. Et depuis, j'exerce évidemment toujours, parallèlement à mon activité, pardon, à mon mandat de vice-bâtonnière, je suis toujours avocate pénaliste. Voilà, depuis maintenant une vingtaine d'années, ce qui a également... était un moment important dans mon parcours professionnel. C'est mon élection en tant que secrétaire de la conférence en 2010. C'était véritablement pour moi un objectif à atteindre quand j'étais jeune avocate. Mon rêve, c'était d'être secrétaire de la conférence. Donc je n'oublie jamais de le rappeler parce que c'est vrai que j'y tiens beaucoup. Et c'était une année en 2010 très formatrice. Pendant un an, vous savez, lorsque vous êtes secrétaire, De la conférence, vous avez accès aux commissions d'office criminelles, donc vous êtes projeté, lorsque vous êtes pénaliste, c'est forcément un peu un rêve, projeté dans des affaires criminelles, vous êtes commis d'office, ou commis d'office pour des assises, pour des comparutions immédiates également. Donc c'était un moment important dans mon parcours, dans mon parcours professionnel. Et puis ensuite, il y a eu effectivement d'autres étapes qui m'ont mené à ce mandat de vice-bâtonnière, et notamment une première étape en... en étant élue en 2018, fin 2018, membre du Conseil de l'Ordre du barreau de Paris.

  • Speaker #0

    Et justement, est-ce que vous pouvez revenir sur les actions que vous avez mises en place pour arriver à justement atteindre vos objectifs ?

  • Speaker #1

    Les actions ? Alors, ça dépend de ce dont on parle. Le ressort initial reste, de mon point de vue, le travail. C'est aussi beaucoup, beaucoup de travail, ne serait-ce que devenir avocate. Pour moi, c'était un rêve aussi. On est allé directement aux différentes étapes, mais lorsque j'étais étudiante en droit, d'abord à l'université de Nanterre, Paris 10, qui s'appelait comme ça à l'époque, et puis mon troisième cycle à Paris 2, devenir avocate, c'était un rêve. Dans ma famille, il n'y avait pas de juriste, encore moins d'avocat. Déjà, si je parvenais à un jour porter la robe, c'était déjà une grande victoire.

  • Speaker #0

    Ce rêve, du coup, il est...

  • Speaker #1

    Alors, rêve... Il y a eu quand même un petit passage, un petit préalable d'une année un peu, je me suis un peu perdue quand même, une année en médecine. Je pense que c'était, voilà...

  • Speaker #0

    C'est dur aussi de savoir en sortant du bac, etc.

  • Speaker #1

    J'ai une fascination, alors je suis nulle en sciences, je fais un bac S, je sais pas pourquoi, enfin vraiment la volonté de se confronter à ce à quoi on n'est pas fait, peut-être. Mais c'est vrai que j'ai une fascination pour la science, fascination pour la médecine, et j'avais envie d'y aller. Tout en sachant évidemment que ce n'était pas ma place, en réalité. Je crois que je n'y ai jamais vraiment cru. Oui, j'avais besoin d'être peut-être sur les bancs de cette université de médecine. Mais 15 jours, je crois, 15 jours ou trois semaines après avoir commencé ma première année de médecine, j'avais déjà passé un petit examen à Nanterre pour intégrer un BIDOG à l'époque, en droit en fait. Donc, c'est vraiment l'année un peu, l'erreur de parcours qui est plus qu'une erreur, c'est un test. Et en revanche, lorsque j'arrive en droit, c'est une révélation. C'est-à-dire que là, je suis véritablement à ma place. Le droit que je n'avais par définition jamais étudié auparavant me plaît. C'est une passion. C'est-à-dire que vraiment, c'est une révélation. Et à partir de là, de cette première année de droit jusqu'au bout, alors c'est parfois difficile évidemment, mais... Je sais que je n'ai pas lâché. La question ne s'est même pas posée parce que je me sentais très à ma place. J'ai tout de suite adoré vraiment la matière, le raisonnement juridique. Et donc, à ce moment-là, ça devient un rêve. Il faut que j'arrive à devenir avocate. Pour moi, c'était ça l'aboutissement. Ça y est, j'ai franchi cette porte, je suis avocate. Je me rends compte que tout, évidemment, commence, que tout reste à faire et que le travail ne s'arrête évidemment pas là. Et pour répondre à votre question initiale, quels sont les ressorts ? C'est beaucoup de travail et puis d'envie de faire. Vous voyez, quand je vous parlais tout à l'heure de la conférence, pour moi, ce concours d'éloquence, lorsque je voyais les secrétaires en poste, j'en rêvais. Donc c'est y aller, c'est s'entraîner, c'est se dire c'est pas grave. Le travail, évidemment, toujours, nécessairement, mais aussi... L'envie de faire, l'envie de se fixer à soi des objectifs d'une certaine manière. Moi je découvre la conférence, j'y reviens encore, mais lorsque j'étais en stage, lorsque j'étais élève avocate, et tout d'un coup je découvre ce monde, je me dis « Oh, c'est incroyable, c'est extraordinaire, qu'est-ce que j'aimerais en faire partie ? » Donc il y a aussi ce ressort-là, c'est la fascination, et puis ensuite de se donner autant que possible. On ne réussit évidemment pas tout, mais essayez en tout cas. Se donner les moyens et puis après c'est évidemment apprendre son métier, se confronter au réel, aux audiences, à la rudesse aussi des audiences, aux difficultés et puis aussi au succès. Et s'agissant plus de mon envie ensuite d'aller non pas au-delà de ma profession mais à côté de ma profession, agir. notamment pour ce qu'elle représente, c'est-à-dire agir pour les avocats, pour les avocates. Effectivement, ça part presque d'un concours de circonstances. C'est-à-dire que lorsque je me présente au Conseil de l'Ordre en fin 2018, il s'avère que mon ancien patron, avec lequel j'ai travaillé dix ans, qui était ancien bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier Sure, me propose... d'être son binôme au Conseil de l'Ordre, puisque ce sont des élections paritaires, binôme homme-femme. Et il me fait cette proposition-là. Et évidemment, j'en ai bien conscience que c'est une chance. Donc il faut le dire aussi, c'est aussi la capacité de saisir les opportunités et les chances lorsqu'elles se présentent. Et là, il me fait cette proposition, il me donne 15 jours pour réfléchir si je me présente ou pas avec lui. Et évidemment, le soir même, je lui dis... Voilà, un donné, un grand oui, bien sûr, je me présente, évidemment. Alors, ce n'est pas non plus un saut dans le vide. Je savais et j'avais déjà l'envie, en tout cas je réfléchissais, au fait de me présenter peut-être dans quelques années à cette élection pour devenir membre du Conseil de l'Ordre, ça c'est vrai. Mais cette opportunité se présente avant, et à ce moment-là, je me dis, bien sûr, c'est une chance, j'en ai conscience. et je la saisis. Donc c'est la raison pour laquelle je dis que d'une certaine manière, c'est aussi un concours de circonstances qui mène parfois à l'accomplissement de certaines choses.

  • Speaker #0

    Est-ce que lui a su voir que vous étiez prêtes à un moment où vous n'aviez pas encore conscience peut-être aussi ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, peut-être.

  • Speaker #0

    Si vous connaissez ?

  • Speaker #1

    Alors c'est vrai qu'on avait travaillé dix ans ensemble donc on se connaissait très bien et on se connaît toujours. parce qu'aujourd'hui, au-delà de mon ancien patron, c'est devenu un ami. Mais en tout cas, moi, à ce moment-là, je me dis, ça fait partie de ce qui m'intéresse et j'aimerais pouvoir donner de mon temps aussi à ma profession. L'opportunité se présente, je la saisis. Et c'est vrai que ce n'est pas forcément d'ailleurs le meilleur moment dans ma vie. Moi, j'ai à ce moment-là un petit bébé, une petite fille qui a encore à peine un an. Vous voyez, donc... Sur la chronologie, on peut se demander si c'est le bon moment. En fait, tu ne me poses pas la question. En tout cas, pour moi, c'est le moment. Je considère que je serai en mesure de mener de front à la fois ma vie personnelle et ma vie professionnelle.

  • Speaker #0

    Justement, pour bien qu'on comprenne à la fois combien de temps ça vous prend, comment vous pouvez vous organiser, déjà, est-ce que vous pouvez redéfinir vraiment ? quel est votre rôle en tant que vice-bâtonnière, parce que ce n'est pas évident, même pour moi, ni pour tout le monde, je pense, de bien comprendre quel est votre rôle. Et justement, qu'est-ce que ça rajoute dans votre quotidien qui était déjà assez chargé, je pense ?

  • Speaker #1

    Effectivement. En fait, il y a deux choses. Ce dont je vous parlais, c'était, entre guillemets, mon entrée dans les instances de la profession en tant que membre du Conseil de l'ordre. Et puis, effectivement, une fois que je suis au Conseil de l'ordre, là, je mesure et je réalise tout ce que notre institution, tout ce que l'ordre fait pour les avocats, et tout ce qu'il peut faire, peut-être encore mieux, en tout cas plus loin, pour les avocats. Et c'est là que naît, entre guillemets... La seconde idée, de me dire, mais on fait beaucoup de choses en tant que membre du Conseil de l'Ordre, j'aimerais peut-être pousser plus loin mon engagement pour la profession dans le cadre d'un mandat de bâtonnier ou de vice-bâtonnier. Donc vous voyez, c'est ce qui va m'amener à me présenter aux côtés de Pierre Hoffmann, en qualité pour le poste, pour le mandat, pour la mission de vice-bâtonnière. Et aujourd'hui, et pour répondre précisément à votre question, quel temps ça occupe dans mon quotidien ? En fait, ça occupe 100% de mon temps, en réalité. Une fois que vous êtes élu, alors il y a un temps de latence entre votre élection et puis l'entrée en fonction. En ce qui nous concerne, il y a eu six mois, six mois de décalage. Mais une fois que vous êtes en fonction, c'est tout mon temps, tout mon temps. Le matin jusqu'au soir, voire même la nuit. Et vous me direz parallèlement, vous avez une activité ? Oui, mais vous voyez, le challenge, il est aussi là. C'est-à-dire que je travaille avec ma collaboratrice, on a des points réguliers, on est en contact 15, 20, 25 fois par jour, par audio, par texto, par appel. Il n'est pas rare que je lui laisse des projets de plaidoiries tels que je les plaiderais. Donc on est en lien régulier. elle vient à l'ordre et on travaille ensemble. Et puis lorsqu'il y a un rendez-vous client, évidemment, je m'y rends. Mais entre guillemets, vous voyez, mon temps, c'est barreau. Et évidemment, je travaille les dossiers, mais par son intermédiaire et grâce à elle. Donc c'est l'occasion aussi de la remercier infiniment, parce que sans elle, ce serait évidemment particulièrement compliqué.

  • Speaker #0

    Et justement, est-ce que ce n'est pas aussi une des clés ? C'est de savoir s'entourer et parfois déléguer ? Ça a l'air compliqué peut-être ? Ah,

  • Speaker #1

    par la force des choses. Non, mais évidemment. Faire beaucoup de choses en même temps. Parce que c'est vrai que le cabinet, évidemment, je tiens mon cabinet, je tiens plus que tout à mes clients et je suis là pour eux. Et puis mon mandat, évidemment, je le vis d'une certaine manière avec passion aussi. Mais ça implique nécessairement à un moment de... d'avoir peut-être avec soi-même un tout petit peu moins d'exigence. C'est-à-dire que j'ai tendance, en tout cas j'avais tendance, à vouloir... La perfection n'existe pas, mais en tout cas à la chercher, vous voyez, dans les écritures, dans les écrits, dans les courriels, dans les envois de lettres, dans les conclusions. Et aujourd'hui, bon, il y a un moment, si ça correspond à l'idée générale, évidemment si tout ça est bien écrit, mais vous voyez, avoir une exigence un peu moindre et on se rend compte... que dans les faits, on ne perd pas en qualité et en réalité, on gagne d'une certaine manière en efficacité. Donc oui, ça implique nécessairement de déléguer. Et je réalise que je n'ai quand même pas répondu à votre question, parce que je suis un peu bavarde finalement, mais vous me demandiez ce que représente au quotidien le mandat de vice-bâtonnière. Eh bien, c'est la représentation des avocats, en l'occurrence du barreau de Paris. C'est-à-dire que... Nous sommes un binôme, donc vous avez le bâtonnier et moi, vice-bâtonnière, et nous représentons les 34 000 avocats parisiens. Au quotidien, ça signifie quoi ? Ça signifie présider un certain nombre de commissions. Vous avez à la fois des commissions déontologiques, vous avez à la fois l'aspect disciplinaire. Le rôle, c'est vraiment la représentation des avocats, impulser aussi une direction, une politique. pour la profession. Et puis, quand même, être aussi l'épaule des avocats en cas de difficulté. On parle de discipline, on parle de déontologie. Donc, ce sont potentiellement des avis et des sanctions qui peuvent être rendus, qui peuvent être rendus, mais c'est aussi être là. Oui,

  • Speaker #0

    c'est pas que du positif, c'est un ensemble.

  • Speaker #1

    C'est un ensemble, et c'est aussi être à l'écoute et présent pour les avocats en cas de difficulté. Et lorsqu'on est 34 000, évidemment, il ne manque pas d'y en avoir.

  • Speaker #0

    C'est sûr. Vous parliez justement d'impulser des choses. Alors effectivement, vous avez mis en place pas mal de choses, notamment autour des femmes. Avant de revenir justement sur ce que vous avez mis en place, parce que c'est très important. Je voulais savoir, vous, est-ce que vous avez eu, alors en tant que femme avocate, vous parliez aussi entre le rêve et la réalité. Est-ce qu'il y a eu des déconvenues ? Est-ce que ça a été fait ? Plus difficile, est-ce qu'il y a une réalité autour de l'image du métier d'avocat, de la rigueur, l'exigence, qui est encore un peu plus complexe pour les femmes ?

  • Speaker #1

    Je pense globalement que oui, ça reste plus difficile pour les femmes. C'est ce que je pense. Lorsque je dis cela, évidemment, ça ne retire en rien. l'existence de vraies figures modèles au sein du barreau. Vous avez beaucoup de femmes brillantes qui vraiment sont des modèles pour toutes et tous. Mais globalement, ça reste plus difficile. Ça reste plus difficile pour les femmes d'accéder à l'association au sein d'un cabinet. Ça reste plus difficile pour les femmes en termes de rémunération, vous voyez, selon des études relativement récentes. toute une carrière, les femmes gagnent deux fois moins que les hommes. Et c'est pas rien.

  • Speaker #0

    C'est même énorme.

  • Speaker #1

    Oui, c'est énorme. Le gap, il est majeur. Et ça s'explique évidemment par plein de choses. Déjà, des rémunérations qui sont très rapidement différentes entre hommes et femmes. Et puis... Et puis... C'est un peu toujours pareil, c'est-à-dire qu'on pourrait croire que dans la profession juridique, parce que nous autres avocats nous défendons tous les jours les droits des justiciables, d'une certaine manière on serait d'autant plus rigoureux et d'autant plus respectueux de l'égalité. Mais dans les faits, chez nous aussi, comme ailleurs, comme dans la majorité des domaines, les femmes sont bien moins loties. Et il est vrai que la question de la parentalité, de la maternité... est aujourd'hui perçue comme la première cause de discrimination. C'est-à-dire que lorsque une femme... Alors évidemment, là, mon propos est général, et vous avez évidemment de très belles exceptions, et puis beaucoup de cabinets qui se comportent très très bien, bien sûr, mais très souvent, dans ce qui nous remonte, le premier enfant, le deuxième enfant, est un frein à l'évolution de la carrière, est perçu comme tel, et puis pas simplement perçu. Les femmes peuvent perdre leur collaboration ou alors ne pas accéder à l'association qu'elles attendaient, qu'elles espéraient de leur vœu, qu'elles appelaient de leur vœu depuis des années.

  • Speaker #0

    Donc c'est une réalité.

  • Speaker #1

    C'est une réalité qui est, entre guillemets, contre laquelle l'Ordre, dans sa continuité, véritablement se bat depuis des années. Vraiment. On n'a pas attendu que nous soyons en poste pour s'emparer de ce sujet. Ce serait faux de le dire. Ça fait des années que les bâtonniers et vice-bâtonniers en poste œuvrent en la matière parce que c'est une nécessité. Il est inacceptable de laisser la situation en l'état. Et à ce jour, les femmes identifient la maternité comme le principal frein à leur carrière. Vous savez, selon une étude... Il en ressortait que lorsqu'un homme dans un cabinet, donc un collaborateur, a son premier enfant, c'est vu comme quelque chose de valorisant, d'une certaine manière. Il devient chef de famille, il a des responsabilités. Ce n'est plus le jeune homme, c'est le père de famille. Et d'une certaine manière, ça va de pair avec un ancrage au sein des cabinets en termes de rémunération, en termes même d'évolution. Alors que pour les femmes, souvent, pas toujours, mais souvent... C'est une zone de risque. Tout d'un coup, ça devient plus compliqué. Et ça peut être vu comme tel. D'où le frein. Ça veut dire moins de présence. Ça veut dire, en tout cas, potentiellement, c'est comme ça que c'est vu. Donc, il y a une vraie crispation. Il y a une tension au regard de l'équilibre vie personnelle, vie professionnelle. Ça ne vaut pas que chez les avocats, bien sûr, puisqu'on en parle beaucoup. Et d'autant plus ces dernières années. Et c'est heureux. Mais c'est vrai que cette tension, on l'aperçoit d'autant plus. dans la profession d'avocat, qui est une profession libérale. Il n'y a pas la protection du contrat de travail. Oui,

  • Speaker #0

    une maternité va engendrer aussi des conséquences. Vous l'avez aussi abordé lors du colloque en termes de santé, en termes de retour après une naissance, etc. Et c'est des sujets qui, vous, vous tiennent à cœur et où vous avez eu envie de mettre des choses en place.

  • Speaker #1

    Oui, ça me tient à cœur. Non pas que j'ai vécu à titre personnel des difficultés particulières. Moi, lorsque j'ai eu mes... Mes deux enfants, vous voyez, j'étais déjà installée et j'avais créé mon propre cabinet. Mais pour autant, c'est une difficulté qui remonte trop souvent. Vous voyez, pendant la campagne, le nombre d'avocates qui se faisaient l'écho de situations comme celle-ci, de collaborations qu'elles ne retrouvaient pas dans les mêmes conditions à leur retour, de bureaux qui avaient été déménagés en leur absence. C'est violent, tout ça. Voilà, d'une augmentation qui n'est pas... qui n'est pas accordée parce que les objectifs ne sont prétendument pas respectés pendant cette période. Et ce n'est plus acceptable, en fait. Ce n'est pas acceptable. Donc, en 2025, on ne peut pas se satisfaire de chiffres tels que ceux-ci. Et c'est la raison pour laquelle, pour moi, ça fait partie des priorités. Dans un mandat, il y a un certain nombre d'objectifs. C'est un mandat qui est quand même relativement court. Ce n'est que deux ans. Donc en deux ans, il faut aller vite.

  • Speaker #0

    À l'essentiel.

  • Speaker #1

    Et à l'essentiel. Voilà. Et notamment sur ce qui relève d'engagement. Donc c'est la raison pour laquelle ces sujets-là, je m'en suis, enfin ce sujet en particulier, je m'en suis emparée parce que je considère que les femmes, elles attendent trop souvent leur tour. C'est jamais le bon moment, vous voyez, pour les femmes. Première enfant, on se dit, ah bah mince, dans ma collaboration, ça va peut-être pas bien passer. Puis après, c'est à main, si j'ai mon troisième enfant, est-ce que je vais avoir l'association à laquelle je rêve ? Vous voyez, c'est jamais le bon moment. Et je crois qu'il n'y a pas de bon moment. C'est-à-dire que le bon moment, c'est celui que l'on décide pour soi-même, en fait.

  • Speaker #0

    Et c'est aussi engendré par tout ce que vous avez expliqué, le contexte, etc., de se dire si je pars, est-ce que je vais revenir dans les mêmes conditions, etc. Est-ce que vous, vous avez mis en place des choses particulières pour arriver à concilier justement votre vie personnelle et professionnelle ou est-ce que vous vous êtes rendu compte de certaines choses ? Est-ce que là... Avec le recul, vous avez peut-être même un message à faire passer à de futures jeunes mamans avocates. Est-ce que ce n'est pas évident ? On voit le rôle que vous avez, l'engagement, et puis en même temps, vous êtes mère aussi.

  • Speaker #1

    Oui, alors ce n'est pas évident, d'accord ? Et ce n'est évident pour personne. J'ai tendance à dire, il n'y a pas de superwoman, wonderwoman. Moi, je ne suis pas plus forte que les autres. Je donne souvent mon exemple. Non pas parce que ce serait un exemple à suivre, mais pour dire que dans la vie, en fait, il n'y a pas de bon moment. Le bon moment, c'est celui qu'on décide. Vous voyez, je vous le disais tout à l'heure, lorsque je me lance dans la campagne pour être membre du Conseil de l'Andre, à l'époque, j'ai une petite fille qui a à peine un an. Lorsque je me lance dans la campagne pour le vice-batonnat, en fait, je viens d'accoucher, pour tout vous dire. C'est-à-dire que, vous voyez, j'ai le projet batonnat-vice-batonnat en tête et j'ai un projet personnel essentiel, évidemment. d'avoir un second bébé. Il s'avère, et on ne sait jamais quand est-ce que les choses adviennent, on va dire. Finalement, j'ai le bonheur de pouvoir avoir ce second enfant, et je ne le vois en aucune manière comme un frein pour le projet que j'ai parallèlement en tête, vous voyez, de vice-bâtonnard. Et c'est vrai qu'au tout début de la campagne, j'avais donc un nouveau-né. J'ai tendance à dire que mon fils avait quasiment l'âge de la campagne. Ah mais oui, globalement, je me rappelle d'un premier rendez-vous de campagne. Mon fils avait un mois. Alors au début, la campagne, ça monte crescendo. Donc évidemment, heureusement, les premiers mois étaient relativement calmes, si je puis dire. Mais évidemment, on se doute que sur une période... Une campagne longue comme celle que nous avons vécue de 18 mois, j'étais avec mon petit bébé. Et certains s'interrogeaient, ou ont pu me faire savoir, mais on espère quand même que cela me permettrait quand même...

  • Speaker #0

    C'est une réalité aussi d'avoir ce genre de retour.

  • Speaker #1

    Oui, c'est une réalité. Et je ne suis pas sûre qu'elle soit toujours bienveillante. Bravo, mais j'espère quand même que vous serez en mesure de bien vous occuper de vos enfants. C'est rarement bienveillant. Et ce qui m'interpellait, parce que ce qui m'interpellait surtout, c'est que parmi les candidats, parce qu'il y avait beaucoup de candidats, certains avaient de très jeunes enfants. Alors, je parle des candidats hommes, de jeunes enfants de deux ans, des petits. Et cette question-là, étonnamment, ne leur était jamais posée. Vous voyez ça, pour le coup, j'espère quand même que votre campagne ne sera pas une difficulté et que vous pourrez être un bon père parallèlement. Ça, ce n'était pas un sujet. En revanche, pour nous, pour moi en l'occurrence, mais plus largement, c'était quand même des sujets sur lesquels on est souvent un peu presque culpabilisés. Donc, pourquoi je vous donne cet exemple ? C'est pour dire qu'en fait, il n'y a pas de bon moment. On peut se dire, là, c'est quand même compliqué. Et oui, c'est compliqué, mais lorsqu'on a ensuite des enfants, adolescents, c'est aussi compliqué. Vous voyez, en fait, pour les femmes, c'est jamais le bon moment. Donc, en fait, c'est quel est... pour moi, à titre personnel, le moment qui me semble opérant pour m'épanouir. Et moi, à ce moment de ma vie, j'ai toujours fonctionné comme ça, je pense qu'il y a des opportunités dans la vie, il y a des choses qu'il faut saisir ou pas, et lorsque ça se présente, il faut pouvoir les saisir, si on est en mesure évidemment de le faire. Et à ce moment-là... J'avais envie de prolonger mon engagement pour la profession. J'étais très heureuse en tant que membre du Conseil de l'Ordre. J'avais envie d'aller plus loin. Et j'avais aussi envie d'être maman pour la seconde fois. Et les choses se sont faites concomitamment et parallèlement. Non pas de manière simple, ce serait mentir que de dire que c'est simple. C'est quand même une organisation.

  • Speaker #0

    C'est votre choix aussi.

  • Speaker #1

    Mais c'est mon choix.

  • Speaker #0

    Un choix, c'est jamais simple dans la réalisation. En tout cas, c'est ce que vous vouliez à la fois, concilier les deux, pas faire de concession.

  • Speaker #1

    Ben, en tout cas... De toute façon,

  • Speaker #0

    le bébé était là, enfin voilà, je veux dire, et puis l'opportunité était là. C'est vrai que tout est arrivé.

  • Speaker #1

    Bien sûr, bien sûr. Et sans... Lorsque je dis ça, encore une fois, c'est pas un modèle. On pourrait se dire, oh là là, j'ai besoin de temps pour moi, j'ai besoin de faire les choses avec une certaine sérénité. Et ça sera mon moment à moi, personnellement, pour mon épanouissement professionnel, peut-être dans 10 ans, dans 5 ans. Et c'est très bien. Il n'y a pas de modèle. Mais lorsqu'on a, au contraire, une envie, la maternité n'est en aucune manière un obstacle. Pour moi, c'est ce qui est important. Et dans les mesures que j'ai voulu mettre en place dans le cadre de mon mandat, c'est des mesures qui essayent, tant bien que mal, ce n'est pas non plus des baillettes magiques, mais essayent de faciliter un peu, de limiter un peu cette... tension vie personnelle, vie professionnelle que nous autres avocats, on vit quand même particulièrement. C'est-à-dire que c'est une profession qui est quand même difficile, qui est quand même exigeante. Bon, je pense que on peut quand même faire en sorte que les choses le soient un petit peu moins. Et donc, c'est des mesures qui me paraissaient importantes. Je peux vous les... Sans vous faire un catalogue, mais par exemple... Il n'est pas rare de voir des femmes très enceintes aux audiences parce qu'elles viennent, par exemple, solliciter un renvoi et elles sont enceintes de huit mois et plus. Pour moi, c'était important, vraiment, que l'Ordre puisse mettre en place un système qui permette tout simplement de se faire remplacer, c'est-à-dire d'avoir un avocat ou une avocate missionnée par l'Ordre, donc payée par l'Ordre, mais qui va comme ça pouvoir se déplacer pour accomplir des petits actes de procédure. pour pouvoir aller solliciter un renvoi pour une avocate enceinte ou parce qu'elle est en congé maternité. Par exemple, c'est des petites choses mais qui quand même facilitent les choses.

  • Speaker #0

    Oui, elle peut arriver à couper aussi parce que ça a la difficulté dans le métier.

  • Speaker #1

    Certes, vous avez un congé maternité, c'est vrai, mais dans les faits, il est très rare qu'une avocate arrête complètement de travailler. On ne baisse pas les rideaux du jour au lendemain, c'est très très très très rare. Et c'est un problème, en réalité, parce que ce temps, il est nécessaire. Donc, se dire qu'on a la possibilité de se retourner vers notre ordre, qui quand même nous représente, et là pour nous, en disant, voilà, moi dans un mois, pendant mon congé maternité, là j'aurai deux, trois audiences que j'aimerais faire renvoyer, je sais qu'il n'y a pas de problème particulier, en plus, sur ces renvois, que l'ordre se charge d'être présent pour moi, ça me paraissait quelque chose d'important. Donc ça reste encore récent, mais j'espère que les avocates vont s'en emparer parce que ça me paraît utile. Et d'ailleurs, je le précise, ça vaut pour les femmes dans le cadre de leur congé maternité, mais aussi j'englobe les hommes parce qu'il y a aussi les accidents de la vie. Tout d'un coup, il y a la maladie et les audiences elles sont quand même. Donc ça englobe plein de services. qui vient en vos lieux et places lorsqu'il y a vraiment une impossibilité. Donc ça, c'était une chose qui me paraissait importante. De la même manière, on a lancé en septembre dernier le premier salon d'allaitement. Eh oui ! Donc, il n'y en avait pas jusque-là chez les avocats. Et donc, à la Maison des avocats, en face du tribunal judiciaire, vous avez désormais un salon d'allaitement qui permet, comme son nom l'indique, aux femmes avocates qui ont repris leur activité, d'avoir un moment. qu'il aurait, en tout cas un espace qui l'aurait dédié pour tirer son lait. Exactement. Et je tenais beaucoup à cette mesure et je pensais d'ailleurs, je me disais, oh là là, ça va être peut-être accueilli de manière...

  • Speaker #0

    Un peu symbolique, alors qu'en réalité, ce n'est pas ça.

  • Speaker #1

    C'est une vraie réalité.

  • Speaker #0

    C'est une réalité. Depuis, on a beaucoup de satisfaction à entendre les avocats nous dire « c'est super, franchement, ça nous est vraiment utile » . Ça, c'était quelque chose qui me paraissait important à mettre en place.

  • Speaker #1

    Vous avez aussi mis en place un congé, je crois, pour les fausses couches. En cas de fausses couches, une possibilité de prolonger.

  • Speaker #0

    Alors, en réalité, on a renégocié avec notre courtier en assurance, effectivement pour accorder aux avocates qui sont confrontés à une fausse couche ou qui sont engagés dans un parcours PMA de leur donner quelques jours d'indemnité journalière auxquels, jusqu'à présent, elles n'avaient pas droit. Voilà. Donc voilà, l'avocate qui est dans son cabinet. ou l'associer, elle peut disposer de 5 jours d'indemnité journalière si elle est dans un parcours PMA, de 3 jours en cas de fausse couche. Alors ça reste limité, bien sûr, j'en ai conscience, mais c'est un début et c'est aussi de mon point de vue, un marqueur pour dire que c'est pas des sujets anecdotiques.

  • Speaker #1

    C'est pas anodin.

  • Speaker #0

    C'est pas anodin, voilà. Traverser un parcours PMA... C'est difficile, généralement. Une fausse couche, c'est difficile, physiquement et psychologiquement. Se dire qu'on a peut-être, allez, trois jours, ce n'est pas grand-chose, mais quand même trois jours qui vont être pris en charge dans ce cadre, c'est aussi un signal qui est envoyé. prendre soin de soi les avocats ont tendance à laisser un peu ça de côté parce que c'est vrai qu'on parle pour les autres on agit pour les autres, on se bat pour les autres et on laisse un peu de côté sa santé. Voilà.

  • Speaker #1

    Et c'est important de rappeler l'importance de ne pas l'oublier, justement. Par rapport à tout ce que vous avez mis en place, j'imagine peut-être qu'il y a encore des réticences, en tout cas, ou est-ce que vous avez eu des retours ? Mais est-ce que vous avez eu des retours tout court ? Parce que parfois, on met en place des choses et il n'y a pas forcément de retours qui sont même parfois attendus. Et est-ce qu'il existe encore des réticences ?

  • Speaker #0

    Je crois qu'il existe toujours. les réticences.

  • Speaker #1

    Même sur ces sujets-là ?

  • Speaker #0

    Oui. J'en ai été moi-même assez surprise, je dois te dire, parce que parfois, lorsqu'on est convaincu du bien fondé d'une mesure, on ne s'attend peut-être pas forcément aux réticences, voire aux oppositions, alors qu'elles sont en fait naturelles et peut-être normales. Mais je ne sais pas. Ça fait partie de toute action. La question c'est l'engagement, c'est agir. L'action, nécessairement, va donner lieu à une opposition, à des questionnements. Il s'agit de prendre son bâton de pèlerin et de convaincre.

  • Speaker #1

    Ça ne vous arrête pas en tout cas ?

  • Speaker #0

    Non, jamais. Jamais. Mais j'entends. Et puis, vous savez, la contradiction, l'opposition, elle peut, pas toujours, mais elle peut être utile puisqu'elle permet de parfois recentrer un peu ou retravailler les choses pour qu'elles soient le plus adéquates possible avec son idée de départ. Donc, en tout cas, en ce qui me concerne, c'est jamais un frein. Et puis, on continue encore à avancer sur d'autres mesures, notamment... Le conseil de l'ordre du barreau a voté un budget pour une micro crèche du barreau de Paris. Et vous voyez, jusqu'à présent, nous n'avons jamais eu de crèche véritablement du barreau. Alors qu'en tant que profession libérale, c'est très difficile d'avoir une place en crèche. On pourrait se dire, bon, ce n'est pas vraiment le sujet des avocates. Si, en fait, bien sûr que c'est un sujet parce que, comme chacun le sait, il est difficile d'avoir des places en crèche publiques. LMI et Et ce qui relève des crèches inter-entreprise, en réalité, on n'y a pas le droit. En tout cas, c'est un coût très important puisqu'il faut payer, pour être concret, la part famille et la part entreprise qui revient au prix d'une école de commerce pour son nouveau-né. Donc, ça n'a pas grand sens. Et donc, c'est en partant de ce constat que la crèche est apparue comme une nécessité. Donc, évidemment, c'est long et lourd à tout point de vue, administrativement. de créer une crèche, une micro-crèche en l'occurrence. Mais le barreau s'est entouré de personnes qui sont en mesure de rendre cela possible. Le budget a été voté. Le cahier des charges est également circonscrit. C'est bien avancé. Voilà, nous avançons. Alors, nous avançons doucement, mais j'ai très bon espoir pour que, malheureusement, ce sera vraisemblablement après le mandat, puisque... Nous ne pourrons pas ouvrir une crèche au 31 décembre 2025, mais c'est très bien parti. C'est un projet qui me tient de la même manière vraiment à cœur. C'est-à-dire que certes, une micro-crèche, c'est par définition peu de place, mais ce que j'espère, d'une certaine manière, je vois cette micro-crèche comme une première pierre. Une première pierre pour que peut-être, dans dix ans, lorsqu'on se retournera, on pourra se dire bon ben Depuis, le barreau de Paris a ses 4-5 crèches du barreau. Oui, c'est important de la poser cette première. Exactement. Lorsqu'on dit, bah oui, mais bon, c'est pas assez. Il y a des centaines de naissances au barreau par an. C'est anecdotique. J'entends. Et si cela ne tenait qu'à moi, j'adorerais qu'on ouvre tout de suite deux micro-crèches. Mais dans les faits, je pense qu'il faut d'abord démontrer qu'on est en mesure de le faire. Le faire. Et puis ensuite... à charge pour les successeurs, de poursuivre, mais je crois beaucoup à la politique des petits pas et c'est une première pierre.

  • Speaker #1

    Après ce mandat, est-ce qu'il y a d'autres objectifs ? Est-ce que vous avez, vous, personnellement, d'autres objectifs à atteindre ? Est-ce que vous vous projetez déjà ou c'est trop tôt ?

  • Speaker #0

    Je pense que c'est trop tôt, c'est-à-dire que moi je suis encore en plein dedans. Ah oui, à 100% dans le mandat. C'est vrai qu'on est déjà, ça y est, c'est la seconde année, on est en... Ça va vite. Oui, quasiment en avril. Donc ça va vite, mais néanmoins, il reste quand même plusieurs mois. Donc je suis complètement concentrée sur le mandat. Il y a encore beaucoup de choses à faire. Donc non, je suis complètement dédiée à ma mission à ce jour.

  • Speaker #1

    Alors Vanessa, on est dans l'Else Agis. J'ai quelques questions signatures du podcast à vous poser. Pour terminer cet échange, déjà pour vous, Agir, qu'est-ce que ça signifie ?

  • Speaker #0

    Agir, ça revient à ce que je vous expliquais tout à l'heure. C'est-à-dire qu'agir, c'est avancer à son rythme, à soi, selon son propre calendrier, sans chercher à attendre le bon moment. C'est vraiment avancer selon sa propre volonté. Et c'est vrai qu'on est à une époque où on est quand même beaucoup contrainte, beaucoup contrainte dans la vie personnelle et la vie professionnelle, entre en tension d'une certaine manière et le déséquilibre il porte beaucoup sur les femmes parce que la réalité c'est que le poids de la vie personnelle porte davantage sur les femmes que sur les hommes et c'est un frein à l'action et je crois qu'au contraire. Il nous appartient, en fonction évidemment de Ausha personnels, mais d'avancer selon son propre calendrier, sa propre impulsion. Sans écouter, c'est pas le bon moment, pas tout de suite, c'est jamais le bon moment. Donc c'est à soi-même, on doit répondre nous-mêmes à cette question, est-ce que c'est le bon moment ? Est-ce que là, je me sens épanouie pour le faire ou est-ce qu'au contraire, pas du tout ?

  • Speaker #1

    Se forcer aussi parfois à ne pas trop s'écouter cette petite voix qui... Peut-être autour de la confiance en soi, de l'audace ?

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'il y a évidemment des peurs. L'action n'empêche pas la peur, l'action n'empêche pas la crainte de l'échec. Bien sûr, évidemment. Mais peut-être que l'action implique de laisser de côté, en tout cas autant que possible, le risque d'échec. C'est-à-dire qu'évidemment, on peut ne pas y arriver, on peut ne pas convaincre. On peut ne pas être élu, mais on y va. On y va et on porte ses idées. Et puis, elles font leur chemin.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il y a un domaine dans lequel vous aimeriez voir plus d'action ?

  • Speaker #0

    Plusieurs choses. Je trouve que, vous voyez, le droit, on en parlait tout à l'heure. L'éducation au droit et à la justice. Je trouve que c'est quelque chose à côté duquel... Globalement, je parle au niveau de la société, on passe quand même vraiment à côté. C'est-à-dire que vous avez les études de droit, et ceux qui font du droit évidemment entrent dans ce parcours et ont toute l'éducation, la connaissance. Mais je trouve qu'on gagnerait à ce que l'enseignement du droit, de la justice, des grands principes, des grandes valeurs, soit inculqué très tôt, dès l'école. Je trouve que dans les débats actuels... Vous voyez nos fondamentaux ont tendance à s'effriter un peu. Les valeurs, la présomption d'innocence, le contradictoire, le procès équitable. qui nous paraît, à nous juristes, des évidences, on se rend compte que dans les débats, même de société, en réalité, c'est souvent des notions assez abstraites pour les gens. Oui, bon, d'accord, ok, mais alors que...

  • Speaker #1

    Il n'y a pas la valeur associée, ou en tout cas, l'impact, tout ça.

  • Speaker #0

    Alors que pour moi, ça relève vraiment... Il y a un enjeu énorme à l'éducation. L'éducation, vous voyez, mais de la justice, du droit, de ces valeurs, parce qu'en réalité, elles sont le socle. Vous voyez, quand on parle d'état de droit, C'est vrai que parfois c'est un peu évanescent pour un certain nombre de personnes, alors que c'est en fait le socle sur lequel notre démocratie est assise. Et je trouve que c'est un peu un domaine qu'on a tendance à laisser aux avocats. Oui, bon d'accord, les avocats et leurs grands principes, oui, bon d'accord. Vous voyez ? Alors qu'en réalité, on aurait pu... Oui, ça a gagné.

  • Speaker #1

    Parfois obscur, en fait. C'était peu connu et peu généralisé.

  • Speaker #0

    Alors que je crois qu'à l'époque où l'on vit, actuellement, c'est indispensable. Vraiment. De mettre la lumière, le focus sur l'éducation, au droit, à la justice, beaucoup plus tôt.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous avez une figure féminine, alors ça peut être personnelle, professionnelle, voire historique, qui vous inspire particulièrement dans votre manière d'agir ou au quotidien ? Ça serait qui et pourquoi ?

  • Speaker #0

    Alors ce serait une figure féminine personnelle puisque c'est ma mère. Voilà. Tout simplement et sans aucune hésitation possible, c'est ma mère. Vous voyez, je vous disais, il n'y a pas de modèle, on a surtout… comment dire, il n'y a pas de Wonder Woman ou de Superwoman, on fait ce qu'on peut chacune en réalité. Moi quand même, mon modèle, c'est clairement ma mère. Vraiment. Et je considère que tout ce que j'ai accompli à ce jour, et c'est pas du tout une... Enfin, je pense chaque mot, c'est vraiment grâce à elle. Vraiment, vraiment. Par toute petite, déjà, l'importance accordée au travail, à l'exigence du travail. Et surtout, au-delà de ça, parce que c'est un peu banal, les parents généralement poussent à ça, mais vraiment... de ne jamais se mettre de freins ou de limites. Et je réalise maintenant, en étant adulte, très adulte, qu'en réalité, c'est le meilleur conseil ou le meilleur étayage à donner, je crois, aux enfants. C'est pas « tu verras si tu peux » . Non, c'est « vas-y, on y va » . On y va et on verra. Et ça, c'est vraiment ma mère qui me l'a inculqué. Donc, c'est vraiment, c'est ma figure évidente qui m'a porté et qui me porte toujours aujourd'hui.

  • Speaker #1

    Eh bien, on va rester sur ça. Merci beaucoup, Vanessa, pour cet échange.

  • Speaker #0

    Merci infiniment. C'était un plaisir. Merci beaucoup.

Description

C’est dans la Maison des avocats, juste en face du tribunal de Paris, imposant et presque intimidant, que Vanessa Bousardo me reçoit.

Un jour un peu particulier. Pila à l’heure où tombe la condamnation de Marine Le Pen. Le droit et le politique se croisent, s'entremêlent. Dans l'air, quelque chose de suspendu. Beaucoup d'agitation, de bruits, je demande si c'est toujours comme ça ici. Non c'est exceptionnel, comme ma rencontre du jour finalement !

Une atmosphère singulière s’installe dans ces lieux où tout prend une autre densité.


Coupées du tumulte extérieur, Vanessa m’accueille dans son bureau, avec une grande simplicité, avec chaleur. On se pose, on se coupe de l’agitation. L’épisode peut commencer.


Son rêve, petite, c’était d’être avocate. Pourtant, elle commence par tester médecine, presque en sachant que ce n’est pas sa place. Et dès qu’elle arrive en droit, c’est la révélation. Une évidence. Une passion.
Dès la première année, elle se sent pleinement à sa place. Le rêve devient un objectif. Et une fois cette porte du rêve franchie, tout est à construire. Le moteur : le travail. Et cette envie profonde de faire.

Elle nous raconte ensuite ce concours de circonstances qui l’a conduite à devenir vice-bâtonnière. L’envie était là, oui, mais l’opportunité est arrivée plus vite que prévu.


C’était aussi un moment de vie particulier : en plein cœur de sa maternité. Mais elle n’a pas hésité à s’engager, à donner de son temps, de son énergie, à cette profession qu’elle aime profondément.

Une fois élue, c’est tout son temps qui est consacré à cette fonction.


Et elle le dit avec clarté : les femmes avocates n’exercent pas dans les mêmes conditions que les hommes. Ce n’est pas une posture, c’est un constat.


Les maternités, les parcours de soin, les silences autour de la charge mentale… Malgré les avancées, il reste tant à faire.


Vanessa agit. Elle fait bouger les lignes, concrètement. Et c'est l'une des raisons qui m'a poussé à l'interview, son envie d'agir est rayonnante.


Un salon d’allaitement. Des congés pour fausse couche. Un projet de crèche pour les enfants des avocats, Vanessa propose des idées fortes, essentielles.

Evidemment, sinon ça serait trop simple, ces propositions rencontrent encore parfois des résistances.
Mais elle les envisage non comme des freins, mais comme des invitations à réfléchir autrement, à affiner, et surtout à persister !


Elle a cette aura. Cette présence calme, mais ferme. Cette énergie douce mais déterminée. Elle incarne pleinement ce que j’appelle une femme Elles Agissent.


Et puis, il y a cette conviction qu’elle porte : celle que les grandes valeurs du droit ( la justice, l’équité, la dignité ) qui selon elle, devraient faire partie de l’éducation dès le plus jeune âge. Une transmission essentielle. Une "graine du savoir" à planter tôt.


Bonne écoute.


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Musique:  Amour Aveugle / Garçon de Plage


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour Vanessa.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup d'avoir accepté mon invitation dans Elsagis, je suis ravie. Vanessa, vous êtes vice-patronnière du Barreau de Paris, vous êtes avocate et vous êtes aussi engagée, je trouve, pour une meilleure prise en compte des réalités féminines dans le domaine du droit. Évidemment, c'est comme ça que je vous ai rencontré d'ailleurs, en étant engagée, en mettant en place des choses. Et donc dans ce podcast, je pense qu'on va évoquer ensemble justement le pouvoir de l'action concrète. à l'intérieur d'un système, peut-être d'un système qui a trop longtemps oublié aussi, la nécessité de faire entre les voix féminines, on en parlera. Et avant ça, comme je l'ai dit, vous êtes vice-patronnière. Est-ce que vous pouvez revenir justement sur les grandes étapes de votre parcours et ce qui vous a mené jusqu'à cette fonction ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr, avec plaisir. D'abord, merci infiniment de me donner la parole aujourd'hui, je suis très touchée. Les grandes étapes de mon parcours... En quelques mots, je suis avocate depuis bientôt 20 ans, puisque j'ai prêté serment en 2006, vous voyez, donc le temps passe. J'ai été 10 ans collaboratrice dans un cabinet et puis j'ai créé mon cabinet en 2016. Et depuis, j'exerce évidemment toujours, parallèlement à mon activité, pardon, à mon mandat de vice-bâtonnière, je suis toujours avocate pénaliste. Voilà, depuis maintenant une vingtaine d'années, ce qui a également... était un moment important dans mon parcours professionnel. C'est mon élection en tant que secrétaire de la conférence en 2010. C'était véritablement pour moi un objectif à atteindre quand j'étais jeune avocate. Mon rêve, c'était d'être secrétaire de la conférence. Donc je n'oublie jamais de le rappeler parce que c'est vrai que j'y tiens beaucoup. Et c'était une année en 2010 très formatrice. Pendant un an, vous savez, lorsque vous êtes secrétaire, De la conférence, vous avez accès aux commissions d'office criminelles, donc vous êtes projeté, lorsque vous êtes pénaliste, c'est forcément un peu un rêve, projeté dans des affaires criminelles, vous êtes commis d'office, ou commis d'office pour des assises, pour des comparutions immédiates également. Donc c'était un moment important dans mon parcours, dans mon parcours professionnel. Et puis ensuite, il y a eu effectivement d'autres étapes qui m'ont mené à ce mandat de vice-bâtonnière, et notamment une première étape en... en étant élue en 2018, fin 2018, membre du Conseil de l'Ordre du barreau de Paris.

  • Speaker #0

    Et justement, est-ce que vous pouvez revenir sur les actions que vous avez mises en place pour arriver à justement atteindre vos objectifs ?

  • Speaker #1

    Les actions ? Alors, ça dépend de ce dont on parle. Le ressort initial reste, de mon point de vue, le travail. C'est aussi beaucoup, beaucoup de travail, ne serait-ce que devenir avocate. Pour moi, c'était un rêve aussi. On est allé directement aux différentes étapes, mais lorsque j'étais étudiante en droit, d'abord à l'université de Nanterre, Paris 10, qui s'appelait comme ça à l'époque, et puis mon troisième cycle à Paris 2, devenir avocate, c'était un rêve. Dans ma famille, il n'y avait pas de juriste, encore moins d'avocat. Déjà, si je parvenais à un jour porter la robe, c'était déjà une grande victoire.

  • Speaker #0

    Ce rêve, du coup, il est...

  • Speaker #1

    Alors, rêve... Il y a eu quand même un petit passage, un petit préalable d'une année un peu, je me suis un peu perdue quand même, une année en médecine. Je pense que c'était, voilà...

  • Speaker #0

    C'est dur aussi de savoir en sortant du bac, etc.

  • Speaker #1

    J'ai une fascination, alors je suis nulle en sciences, je fais un bac S, je sais pas pourquoi, enfin vraiment la volonté de se confronter à ce à quoi on n'est pas fait, peut-être. Mais c'est vrai que j'ai une fascination pour la science, fascination pour la médecine, et j'avais envie d'y aller. Tout en sachant évidemment que ce n'était pas ma place, en réalité. Je crois que je n'y ai jamais vraiment cru. Oui, j'avais besoin d'être peut-être sur les bancs de cette université de médecine. Mais 15 jours, je crois, 15 jours ou trois semaines après avoir commencé ma première année de médecine, j'avais déjà passé un petit examen à Nanterre pour intégrer un BIDOG à l'époque, en droit en fait. Donc, c'est vraiment l'année un peu, l'erreur de parcours qui est plus qu'une erreur, c'est un test. Et en revanche, lorsque j'arrive en droit, c'est une révélation. C'est-à-dire que là, je suis véritablement à ma place. Le droit que je n'avais par définition jamais étudié auparavant me plaît. C'est une passion. C'est-à-dire que vraiment, c'est une révélation. Et à partir de là, de cette première année de droit jusqu'au bout, alors c'est parfois difficile évidemment, mais... Je sais que je n'ai pas lâché. La question ne s'est même pas posée parce que je me sentais très à ma place. J'ai tout de suite adoré vraiment la matière, le raisonnement juridique. Et donc, à ce moment-là, ça devient un rêve. Il faut que j'arrive à devenir avocate. Pour moi, c'était ça l'aboutissement. Ça y est, j'ai franchi cette porte, je suis avocate. Je me rends compte que tout, évidemment, commence, que tout reste à faire et que le travail ne s'arrête évidemment pas là. Et pour répondre à votre question initiale, quels sont les ressorts ? C'est beaucoup de travail et puis d'envie de faire. Vous voyez, quand je vous parlais tout à l'heure de la conférence, pour moi, ce concours d'éloquence, lorsque je voyais les secrétaires en poste, j'en rêvais. Donc c'est y aller, c'est s'entraîner, c'est se dire c'est pas grave. Le travail, évidemment, toujours, nécessairement, mais aussi... L'envie de faire, l'envie de se fixer à soi des objectifs d'une certaine manière. Moi je découvre la conférence, j'y reviens encore, mais lorsque j'étais en stage, lorsque j'étais élève avocate, et tout d'un coup je découvre ce monde, je me dis « Oh, c'est incroyable, c'est extraordinaire, qu'est-ce que j'aimerais en faire partie ? » Donc il y a aussi ce ressort-là, c'est la fascination, et puis ensuite de se donner autant que possible. On ne réussit évidemment pas tout, mais essayez en tout cas. Se donner les moyens et puis après c'est évidemment apprendre son métier, se confronter au réel, aux audiences, à la rudesse aussi des audiences, aux difficultés et puis aussi au succès. Et s'agissant plus de mon envie ensuite d'aller non pas au-delà de ma profession mais à côté de ma profession, agir. notamment pour ce qu'elle représente, c'est-à-dire agir pour les avocats, pour les avocates. Effectivement, ça part presque d'un concours de circonstances. C'est-à-dire que lorsque je me présente au Conseil de l'Ordre en fin 2018, il s'avère que mon ancien patron, avec lequel j'ai travaillé dix ans, qui était ancien bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier Sure, me propose... d'être son binôme au Conseil de l'Ordre, puisque ce sont des élections paritaires, binôme homme-femme. Et il me fait cette proposition-là. Et évidemment, j'en ai bien conscience que c'est une chance. Donc il faut le dire aussi, c'est aussi la capacité de saisir les opportunités et les chances lorsqu'elles se présentent. Et là, il me fait cette proposition, il me donne 15 jours pour réfléchir si je me présente ou pas avec lui. Et évidemment, le soir même, je lui dis... Voilà, un donné, un grand oui, bien sûr, je me présente, évidemment. Alors, ce n'est pas non plus un saut dans le vide. Je savais et j'avais déjà l'envie, en tout cas je réfléchissais, au fait de me présenter peut-être dans quelques années à cette élection pour devenir membre du Conseil de l'Ordre, ça c'est vrai. Mais cette opportunité se présente avant, et à ce moment-là, je me dis, bien sûr, c'est une chance, j'en ai conscience. et je la saisis. Donc c'est la raison pour laquelle je dis que d'une certaine manière, c'est aussi un concours de circonstances qui mène parfois à l'accomplissement de certaines choses.

  • Speaker #0

    Est-ce que lui a su voir que vous étiez prêtes à un moment où vous n'aviez pas encore conscience peut-être aussi ?

  • Speaker #1

    Je ne sais pas, peut-être.

  • Speaker #0

    Si vous connaissez ?

  • Speaker #1

    Alors c'est vrai qu'on avait travaillé dix ans ensemble donc on se connaissait très bien et on se connaît toujours. parce qu'aujourd'hui, au-delà de mon ancien patron, c'est devenu un ami. Mais en tout cas, moi, à ce moment-là, je me dis, ça fait partie de ce qui m'intéresse et j'aimerais pouvoir donner de mon temps aussi à ma profession. L'opportunité se présente, je la saisis. Et c'est vrai que ce n'est pas forcément d'ailleurs le meilleur moment dans ma vie. Moi, j'ai à ce moment-là un petit bébé, une petite fille qui a encore à peine un an. Vous voyez, donc... Sur la chronologie, on peut se demander si c'est le bon moment. En fait, tu ne me poses pas la question. En tout cas, pour moi, c'est le moment. Je considère que je serai en mesure de mener de front à la fois ma vie personnelle et ma vie professionnelle.

  • Speaker #0

    Justement, pour bien qu'on comprenne à la fois combien de temps ça vous prend, comment vous pouvez vous organiser, déjà, est-ce que vous pouvez redéfinir vraiment ? quel est votre rôle en tant que vice-bâtonnière, parce que ce n'est pas évident, même pour moi, ni pour tout le monde, je pense, de bien comprendre quel est votre rôle. Et justement, qu'est-ce que ça rajoute dans votre quotidien qui était déjà assez chargé, je pense ?

  • Speaker #1

    Effectivement. En fait, il y a deux choses. Ce dont je vous parlais, c'était, entre guillemets, mon entrée dans les instances de la profession en tant que membre du Conseil de l'ordre. Et puis, effectivement, une fois que je suis au Conseil de l'ordre, là, je mesure et je réalise tout ce que notre institution, tout ce que l'ordre fait pour les avocats, et tout ce qu'il peut faire, peut-être encore mieux, en tout cas plus loin, pour les avocats. Et c'est là que naît, entre guillemets... La seconde idée, de me dire, mais on fait beaucoup de choses en tant que membre du Conseil de l'Ordre, j'aimerais peut-être pousser plus loin mon engagement pour la profession dans le cadre d'un mandat de bâtonnier ou de vice-bâtonnier. Donc vous voyez, c'est ce qui va m'amener à me présenter aux côtés de Pierre Hoffmann, en qualité pour le poste, pour le mandat, pour la mission de vice-bâtonnière. Et aujourd'hui, et pour répondre précisément à votre question, quel temps ça occupe dans mon quotidien ? En fait, ça occupe 100% de mon temps, en réalité. Une fois que vous êtes élu, alors il y a un temps de latence entre votre élection et puis l'entrée en fonction. En ce qui nous concerne, il y a eu six mois, six mois de décalage. Mais une fois que vous êtes en fonction, c'est tout mon temps, tout mon temps. Le matin jusqu'au soir, voire même la nuit. Et vous me direz parallèlement, vous avez une activité ? Oui, mais vous voyez, le challenge, il est aussi là. C'est-à-dire que je travaille avec ma collaboratrice, on a des points réguliers, on est en contact 15, 20, 25 fois par jour, par audio, par texto, par appel. Il n'est pas rare que je lui laisse des projets de plaidoiries tels que je les plaiderais. Donc on est en lien régulier. elle vient à l'ordre et on travaille ensemble. Et puis lorsqu'il y a un rendez-vous client, évidemment, je m'y rends. Mais entre guillemets, vous voyez, mon temps, c'est barreau. Et évidemment, je travaille les dossiers, mais par son intermédiaire et grâce à elle. Donc c'est l'occasion aussi de la remercier infiniment, parce que sans elle, ce serait évidemment particulièrement compliqué.

  • Speaker #0

    Et justement, est-ce que ce n'est pas aussi une des clés ? C'est de savoir s'entourer et parfois déléguer ? Ça a l'air compliqué peut-être ? Ah,

  • Speaker #1

    par la force des choses. Non, mais évidemment. Faire beaucoup de choses en même temps. Parce que c'est vrai que le cabinet, évidemment, je tiens mon cabinet, je tiens plus que tout à mes clients et je suis là pour eux. Et puis mon mandat, évidemment, je le vis d'une certaine manière avec passion aussi. Mais ça implique nécessairement à un moment de... d'avoir peut-être avec soi-même un tout petit peu moins d'exigence. C'est-à-dire que j'ai tendance, en tout cas j'avais tendance, à vouloir... La perfection n'existe pas, mais en tout cas à la chercher, vous voyez, dans les écritures, dans les écrits, dans les courriels, dans les envois de lettres, dans les conclusions. Et aujourd'hui, bon, il y a un moment, si ça correspond à l'idée générale, évidemment si tout ça est bien écrit, mais vous voyez, avoir une exigence un peu moindre et on se rend compte... que dans les faits, on ne perd pas en qualité et en réalité, on gagne d'une certaine manière en efficacité. Donc oui, ça implique nécessairement de déléguer. Et je réalise que je n'ai quand même pas répondu à votre question, parce que je suis un peu bavarde finalement, mais vous me demandiez ce que représente au quotidien le mandat de vice-bâtonnière. Eh bien, c'est la représentation des avocats, en l'occurrence du barreau de Paris. C'est-à-dire que... Nous sommes un binôme, donc vous avez le bâtonnier et moi, vice-bâtonnière, et nous représentons les 34 000 avocats parisiens. Au quotidien, ça signifie quoi ? Ça signifie présider un certain nombre de commissions. Vous avez à la fois des commissions déontologiques, vous avez à la fois l'aspect disciplinaire. Le rôle, c'est vraiment la représentation des avocats, impulser aussi une direction, une politique. pour la profession. Et puis, quand même, être aussi l'épaule des avocats en cas de difficulté. On parle de discipline, on parle de déontologie. Donc, ce sont potentiellement des avis et des sanctions qui peuvent être rendus, qui peuvent être rendus, mais c'est aussi être là. Oui,

  • Speaker #0

    c'est pas que du positif, c'est un ensemble.

  • Speaker #1

    C'est un ensemble, et c'est aussi être à l'écoute et présent pour les avocats en cas de difficulté. Et lorsqu'on est 34 000, évidemment, il ne manque pas d'y en avoir.

  • Speaker #0

    C'est sûr. Vous parliez justement d'impulser des choses. Alors effectivement, vous avez mis en place pas mal de choses, notamment autour des femmes. Avant de revenir justement sur ce que vous avez mis en place, parce que c'est très important. Je voulais savoir, vous, est-ce que vous avez eu, alors en tant que femme avocate, vous parliez aussi entre le rêve et la réalité. Est-ce qu'il y a eu des déconvenues ? Est-ce que ça a été fait ? Plus difficile, est-ce qu'il y a une réalité autour de l'image du métier d'avocat, de la rigueur, l'exigence, qui est encore un peu plus complexe pour les femmes ?

  • Speaker #1

    Je pense globalement que oui, ça reste plus difficile pour les femmes. C'est ce que je pense. Lorsque je dis cela, évidemment, ça ne retire en rien. l'existence de vraies figures modèles au sein du barreau. Vous avez beaucoup de femmes brillantes qui vraiment sont des modèles pour toutes et tous. Mais globalement, ça reste plus difficile. Ça reste plus difficile pour les femmes d'accéder à l'association au sein d'un cabinet. Ça reste plus difficile pour les femmes en termes de rémunération, vous voyez, selon des études relativement récentes. toute une carrière, les femmes gagnent deux fois moins que les hommes. Et c'est pas rien.

  • Speaker #0

    C'est même énorme.

  • Speaker #1

    Oui, c'est énorme. Le gap, il est majeur. Et ça s'explique évidemment par plein de choses. Déjà, des rémunérations qui sont très rapidement différentes entre hommes et femmes. Et puis... Et puis... C'est un peu toujours pareil, c'est-à-dire qu'on pourrait croire que dans la profession juridique, parce que nous autres avocats nous défendons tous les jours les droits des justiciables, d'une certaine manière on serait d'autant plus rigoureux et d'autant plus respectueux de l'égalité. Mais dans les faits, chez nous aussi, comme ailleurs, comme dans la majorité des domaines, les femmes sont bien moins loties. Et il est vrai que la question de la parentalité, de la maternité... est aujourd'hui perçue comme la première cause de discrimination. C'est-à-dire que lorsque une femme... Alors évidemment, là, mon propos est général, et vous avez évidemment de très belles exceptions, et puis beaucoup de cabinets qui se comportent très très bien, bien sûr, mais très souvent, dans ce qui nous remonte, le premier enfant, le deuxième enfant, est un frein à l'évolution de la carrière, est perçu comme tel, et puis pas simplement perçu. Les femmes peuvent perdre leur collaboration ou alors ne pas accéder à l'association qu'elles attendaient, qu'elles espéraient de leur vœu, qu'elles appelaient de leur vœu depuis des années.

  • Speaker #0

    Donc c'est une réalité.

  • Speaker #1

    C'est une réalité qui est, entre guillemets, contre laquelle l'Ordre, dans sa continuité, véritablement se bat depuis des années. Vraiment. On n'a pas attendu que nous soyons en poste pour s'emparer de ce sujet. Ce serait faux de le dire. Ça fait des années que les bâtonniers et vice-bâtonniers en poste œuvrent en la matière parce que c'est une nécessité. Il est inacceptable de laisser la situation en l'état. Et à ce jour, les femmes identifient la maternité comme le principal frein à leur carrière. Vous savez, selon une étude... Il en ressortait que lorsqu'un homme dans un cabinet, donc un collaborateur, a son premier enfant, c'est vu comme quelque chose de valorisant, d'une certaine manière. Il devient chef de famille, il a des responsabilités. Ce n'est plus le jeune homme, c'est le père de famille. Et d'une certaine manière, ça va de pair avec un ancrage au sein des cabinets en termes de rémunération, en termes même d'évolution. Alors que pour les femmes, souvent, pas toujours, mais souvent... C'est une zone de risque. Tout d'un coup, ça devient plus compliqué. Et ça peut être vu comme tel. D'où le frein. Ça veut dire moins de présence. Ça veut dire, en tout cas, potentiellement, c'est comme ça que c'est vu. Donc, il y a une vraie crispation. Il y a une tension au regard de l'équilibre vie personnelle, vie professionnelle. Ça ne vaut pas que chez les avocats, bien sûr, puisqu'on en parle beaucoup. Et d'autant plus ces dernières années. Et c'est heureux. Mais c'est vrai que cette tension, on l'aperçoit d'autant plus. dans la profession d'avocat, qui est une profession libérale. Il n'y a pas la protection du contrat de travail. Oui,

  • Speaker #0

    une maternité va engendrer aussi des conséquences. Vous l'avez aussi abordé lors du colloque en termes de santé, en termes de retour après une naissance, etc. Et c'est des sujets qui, vous, vous tiennent à cœur et où vous avez eu envie de mettre des choses en place.

  • Speaker #1

    Oui, ça me tient à cœur. Non pas que j'ai vécu à titre personnel des difficultés particulières. Moi, lorsque j'ai eu mes... Mes deux enfants, vous voyez, j'étais déjà installée et j'avais créé mon propre cabinet. Mais pour autant, c'est une difficulté qui remonte trop souvent. Vous voyez, pendant la campagne, le nombre d'avocates qui se faisaient l'écho de situations comme celle-ci, de collaborations qu'elles ne retrouvaient pas dans les mêmes conditions à leur retour, de bureaux qui avaient été déménagés en leur absence. C'est violent, tout ça. Voilà, d'une augmentation qui n'est pas... qui n'est pas accordée parce que les objectifs ne sont prétendument pas respectés pendant cette période. Et ce n'est plus acceptable, en fait. Ce n'est pas acceptable. Donc, en 2025, on ne peut pas se satisfaire de chiffres tels que ceux-ci. Et c'est la raison pour laquelle, pour moi, ça fait partie des priorités. Dans un mandat, il y a un certain nombre d'objectifs. C'est un mandat qui est quand même relativement court. Ce n'est que deux ans. Donc en deux ans, il faut aller vite.

  • Speaker #0

    À l'essentiel.

  • Speaker #1

    Et à l'essentiel. Voilà. Et notamment sur ce qui relève d'engagement. Donc c'est la raison pour laquelle ces sujets-là, je m'en suis, enfin ce sujet en particulier, je m'en suis emparée parce que je considère que les femmes, elles attendent trop souvent leur tour. C'est jamais le bon moment, vous voyez, pour les femmes. Première enfant, on se dit, ah bah mince, dans ma collaboration, ça va peut-être pas bien passer. Puis après, c'est à main, si j'ai mon troisième enfant, est-ce que je vais avoir l'association à laquelle je rêve ? Vous voyez, c'est jamais le bon moment. Et je crois qu'il n'y a pas de bon moment. C'est-à-dire que le bon moment, c'est celui que l'on décide pour soi-même, en fait.

  • Speaker #0

    Et c'est aussi engendré par tout ce que vous avez expliqué, le contexte, etc., de se dire si je pars, est-ce que je vais revenir dans les mêmes conditions, etc. Est-ce que vous, vous avez mis en place des choses particulières pour arriver à concilier justement votre vie personnelle et professionnelle ou est-ce que vous vous êtes rendu compte de certaines choses ? Est-ce que là... Avec le recul, vous avez peut-être même un message à faire passer à de futures jeunes mamans avocates. Est-ce que ce n'est pas évident ? On voit le rôle que vous avez, l'engagement, et puis en même temps, vous êtes mère aussi.

  • Speaker #1

    Oui, alors ce n'est pas évident, d'accord ? Et ce n'est évident pour personne. J'ai tendance à dire, il n'y a pas de superwoman, wonderwoman. Moi, je ne suis pas plus forte que les autres. Je donne souvent mon exemple. Non pas parce que ce serait un exemple à suivre, mais pour dire que dans la vie, en fait, il n'y a pas de bon moment. Le bon moment, c'est celui qu'on décide. Vous voyez, je vous le disais tout à l'heure, lorsque je me lance dans la campagne pour être membre du Conseil de l'Andre, à l'époque, j'ai une petite fille qui a à peine un an. Lorsque je me lance dans la campagne pour le vice-batonnat, en fait, je viens d'accoucher, pour tout vous dire. C'est-à-dire que, vous voyez, j'ai le projet batonnat-vice-batonnat en tête et j'ai un projet personnel essentiel, évidemment. d'avoir un second bébé. Il s'avère, et on ne sait jamais quand est-ce que les choses adviennent, on va dire. Finalement, j'ai le bonheur de pouvoir avoir ce second enfant, et je ne le vois en aucune manière comme un frein pour le projet que j'ai parallèlement en tête, vous voyez, de vice-bâtonnard. Et c'est vrai qu'au tout début de la campagne, j'avais donc un nouveau-né. J'ai tendance à dire que mon fils avait quasiment l'âge de la campagne. Ah mais oui, globalement, je me rappelle d'un premier rendez-vous de campagne. Mon fils avait un mois. Alors au début, la campagne, ça monte crescendo. Donc évidemment, heureusement, les premiers mois étaient relativement calmes, si je puis dire. Mais évidemment, on se doute que sur une période... Une campagne longue comme celle que nous avons vécue de 18 mois, j'étais avec mon petit bébé. Et certains s'interrogeaient, ou ont pu me faire savoir, mais on espère quand même que cela me permettrait quand même...

  • Speaker #0

    C'est une réalité aussi d'avoir ce genre de retour.

  • Speaker #1

    Oui, c'est une réalité. Et je ne suis pas sûre qu'elle soit toujours bienveillante. Bravo, mais j'espère quand même que vous serez en mesure de bien vous occuper de vos enfants. C'est rarement bienveillant. Et ce qui m'interpellait, parce que ce qui m'interpellait surtout, c'est que parmi les candidats, parce qu'il y avait beaucoup de candidats, certains avaient de très jeunes enfants. Alors, je parle des candidats hommes, de jeunes enfants de deux ans, des petits. Et cette question-là, étonnamment, ne leur était jamais posée. Vous voyez ça, pour le coup, j'espère quand même que votre campagne ne sera pas une difficulté et que vous pourrez être un bon père parallèlement. Ça, ce n'était pas un sujet. En revanche, pour nous, pour moi en l'occurrence, mais plus largement, c'était quand même des sujets sur lesquels on est souvent un peu presque culpabilisés. Donc, pourquoi je vous donne cet exemple ? C'est pour dire qu'en fait, il n'y a pas de bon moment. On peut se dire, là, c'est quand même compliqué. Et oui, c'est compliqué, mais lorsqu'on a ensuite des enfants, adolescents, c'est aussi compliqué. Vous voyez, en fait, pour les femmes, c'est jamais le bon moment. Donc, en fait, c'est quel est... pour moi, à titre personnel, le moment qui me semble opérant pour m'épanouir. Et moi, à ce moment de ma vie, j'ai toujours fonctionné comme ça, je pense qu'il y a des opportunités dans la vie, il y a des choses qu'il faut saisir ou pas, et lorsque ça se présente, il faut pouvoir les saisir, si on est en mesure évidemment de le faire. Et à ce moment-là... J'avais envie de prolonger mon engagement pour la profession. J'étais très heureuse en tant que membre du Conseil de l'Ordre. J'avais envie d'aller plus loin. Et j'avais aussi envie d'être maman pour la seconde fois. Et les choses se sont faites concomitamment et parallèlement. Non pas de manière simple, ce serait mentir que de dire que c'est simple. C'est quand même une organisation.

  • Speaker #0

    C'est votre choix aussi.

  • Speaker #1

    Mais c'est mon choix.

  • Speaker #0

    Un choix, c'est jamais simple dans la réalisation. En tout cas, c'est ce que vous vouliez à la fois, concilier les deux, pas faire de concession.

  • Speaker #1

    Ben, en tout cas... De toute façon,

  • Speaker #0

    le bébé était là, enfin voilà, je veux dire, et puis l'opportunité était là. C'est vrai que tout est arrivé.

  • Speaker #1

    Bien sûr, bien sûr. Et sans... Lorsque je dis ça, encore une fois, c'est pas un modèle. On pourrait se dire, oh là là, j'ai besoin de temps pour moi, j'ai besoin de faire les choses avec une certaine sérénité. Et ça sera mon moment à moi, personnellement, pour mon épanouissement professionnel, peut-être dans 10 ans, dans 5 ans. Et c'est très bien. Il n'y a pas de modèle. Mais lorsqu'on a, au contraire, une envie, la maternité n'est en aucune manière un obstacle. Pour moi, c'est ce qui est important. Et dans les mesures que j'ai voulu mettre en place dans le cadre de mon mandat, c'est des mesures qui essayent, tant bien que mal, ce n'est pas non plus des baillettes magiques, mais essayent de faciliter un peu, de limiter un peu cette... tension vie personnelle, vie professionnelle que nous autres avocats, on vit quand même particulièrement. C'est-à-dire que c'est une profession qui est quand même difficile, qui est quand même exigeante. Bon, je pense que on peut quand même faire en sorte que les choses le soient un petit peu moins. Et donc, c'est des mesures qui me paraissaient importantes. Je peux vous les... Sans vous faire un catalogue, mais par exemple... Il n'est pas rare de voir des femmes très enceintes aux audiences parce qu'elles viennent, par exemple, solliciter un renvoi et elles sont enceintes de huit mois et plus. Pour moi, c'était important, vraiment, que l'Ordre puisse mettre en place un système qui permette tout simplement de se faire remplacer, c'est-à-dire d'avoir un avocat ou une avocate missionnée par l'Ordre, donc payée par l'Ordre, mais qui va comme ça pouvoir se déplacer pour accomplir des petits actes de procédure. pour pouvoir aller solliciter un renvoi pour une avocate enceinte ou parce qu'elle est en congé maternité. Par exemple, c'est des petites choses mais qui quand même facilitent les choses.

  • Speaker #0

    Oui, elle peut arriver à couper aussi parce que ça a la difficulté dans le métier.

  • Speaker #1

    Certes, vous avez un congé maternité, c'est vrai, mais dans les faits, il est très rare qu'une avocate arrête complètement de travailler. On ne baisse pas les rideaux du jour au lendemain, c'est très très très très rare. Et c'est un problème, en réalité, parce que ce temps, il est nécessaire. Donc, se dire qu'on a la possibilité de se retourner vers notre ordre, qui quand même nous représente, et là pour nous, en disant, voilà, moi dans un mois, pendant mon congé maternité, là j'aurai deux, trois audiences que j'aimerais faire renvoyer, je sais qu'il n'y a pas de problème particulier, en plus, sur ces renvois, que l'ordre se charge d'être présent pour moi, ça me paraissait quelque chose d'important. Donc ça reste encore récent, mais j'espère que les avocates vont s'en emparer parce que ça me paraît utile. Et d'ailleurs, je le précise, ça vaut pour les femmes dans le cadre de leur congé maternité, mais aussi j'englobe les hommes parce qu'il y a aussi les accidents de la vie. Tout d'un coup, il y a la maladie et les audiences elles sont quand même. Donc ça englobe plein de services. qui vient en vos lieux et places lorsqu'il y a vraiment une impossibilité. Donc ça, c'était une chose qui me paraissait importante. De la même manière, on a lancé en septembre dernier le premier salon d'allaitement. Eh oui ! Donc, il n'y en avait pas jusque-là chez les avocats. Et donc, à la Maison des avocats, en face du tribunal judiciaire, vous avez désormais un salon d'allaitement qui permet, comme son nom l'indique, aux femmes avocates qui ont repris leur activité, d'avoir un moment. qu'il aurait, en tout cas un espace qui l'aurait dédié pour tirer son lait. Exactement. Et je tenais beaucoup à cette mesure et je pensais d'ailleurs, je me disais, oh là là, ça va être peut-être accueilli de manière...

  • Speaker #0

    Un peu symbolique, alors qu'en réalité, ce n'est pas ça.

  • Speaker #1

    C'est une vraie réalité.

  • Speaker #0

    C'est une réalité. Depuis, on a beaucoup de satisfaction à entendre les avocats nous dire « c'est super, franchement, ça nous est vraiment utile » . Ça, c'était quelque chose qui me paraissait important à mettre en place.

  • Speaker #1

    Vous avez aussi mis en place un congé, je crois, pour les fausses couches. En cas de fausses couches, une possibilité de prolonger.

  • Speaker #0

    Alors, en réalité, on a renégocié avec notre courtier en assurance, effectivement pour accorder aux avocates qui sont confrontés à une fausse couche ou qui sont engagés dans un parcours PMA de leur donner quelques jours d'indemnité journalière auxquels, jusqu'à présent, elles n'avaient pas droit. Voilà. Donc voilà, l'avocate qui est dans son cabinet. ou l'associer, elle peut disposer de 5 jours d'indemnité journalière si elle est dans un parcours PMA, de 3 jours en cas de fausse couche. Alors ça reste limité, bien sûr, j'en ai conscience, mais c'est un début et c'est aussi de mon point de vue, un marqueur pour dire que c'est pas des sujets anecdotiques.

  • Speaker #1

    C'est pas anodin.

  • Speaker #0

    C'est pas anodin, voilà. Traverser un parcours PMA... C'est difficile, généralement. Une fausse couche, c'est difficile, physiquement et psychologiquement. Se dire qu'on a peut-être, allez, trois jours, ce n'est pas grand-chose, mais quand même trois jours qui vont être pris en charge dans ce cadre, c'est aussi un signal qui est envoyé. prendre soin de soi les avocats ont tendance à laisser un peu ça de côté parce que c'est vrai qu'on parle pour les autres on agit pour les autres, on se bat pour les autres et on laisse un peu de côté sa santé. Voilà.

  • Speaker #1

    Et c'est important de rappeler l'importance de ne pas l'oublier, justement. Par rapport à tout ce que vous avez mis en place, j'imagine peut-être qu'il y a encore des réticences, en tout cas, ou est-ce que vous avez eu des retours ? Mais est-ce que vous avez eu des retours tout court ? Parce que parfois, on met en place des choses et il n'y a pas forcément de retours qui sont même parfois attendus. Et est-ce qu'il existe encore des réticences ?

  • Speaker #0

    Je crois qu'il existe toujours. les réticences.

  • Speaker #1

    Même sur ces sujets-là ?

  • Speaker #0

    Oui. J'en ai été moi-même assez surprise, je dois te dire, parce que parfois, lorsqu'on est convaincu du bien fondé d'une mesure, on ne s'attend peut-être pas forcément aux réticences, voire aux oppositions, alors qu'elles sont en fait naturelles et peut-être normales. Mais je ne sais pas. Ça fait partie de toute action. La question c'est l'engagement, c'est agir. L'action, nécessairement, va donner lieu à une opposition, à des questionnements. Il s'agit de prendre son bâton de pèlerin et de convaincre.

  • Speaker #1

    Ça ne vous arrête pas en tout cas ?

  • Speaker #0

    Non, jamais. Jamais. Mais j'entends. Et puis, vous savez, la contradiction, l'opposition, elle peut, pas toujours, mais elle peut être utile puisqu'elle permet de parfois recentrer un peu ou retravailler les choses pour qu'elles soient le plus adéquates possible avec son idée de départ. Donc, en tout cas, en ce qui me concerne, c'est jamais un frein. Et puis, on continue encore à avancer sur d'autres mesures, notamment... Le conseil de l'ordre du barreau a voté un budget pour une micro crèche du barreau de Paris. Et vous voyez, jusqu'à présent, nous n'avons jamais eu de crèche véritablement du barreau. Alors qu'en tant que profession libérale, c'est très difficile d'avoir une place en crèche. On pourrait se dire, bon, ce n'est pas vraiment le sujet des avocates. Si, en fait, bien sûr que c'est un sujet parce que, comme chacun le sait, il est difficile d'avoir des places en crèche publiques. LMI et Et ce qui relève des crèches inter-entreprise, en réalité, on n'y a pas le droit. En tout cas, c'est un coût très important puisqu'il faut payer, pour être concret, la part famille et la part entreprise qui revient au prix d'une école de commerce pour son nouveau-né. Donc, ça n'a pas grand sens. Et donc, c'est en partant de ce constat que la crèche est apparue comme une nécessité. Donc, évidemment, c'est long et lourd à tout point de vue, administrativement. de créer une crèche, une micro-crèche en l'occurrence. Mais le barreau s'est entouré de personnes qui sont en mesure de rendre cela possible. Le budget a été voté. Le cahier des charges est également circonscrit. C'est bien avancé. Voilà, nous avançons. Alors, nous avançons doucement, mais j'ai très bon espoir pour que, malheureusement, ce sera vraisemblablement après le mandat, puisque... Nous ne pourrons pas ouvrir une crèche au 31 décembre 2025, mais c'est très bien parti. C'est un projet qui me tient de la même manière vraiment à cœur. C'est-à-dire que certes, une micro-crèche, c'est par définition peu de place, mais ce que j'espère, d'une certaine manière, je vois cette micro-crèche comme une première pierre. Une première pierre pour que peut-être, dans dix ans, lorsqu'on se retournera, on pourra se dire bon ben Depuis, le barreau de Paris a ses 4-5 crèches du barreau. Oui, c'est important de la poser cette première. Exactement. Lorsqu'on dit, bah oui, mais bon, c'est pas assez. Il y a des centaines de naissances au barreau par an. C'est anecdotique. J'entends. Et si cela ne tenait qu'à moi, j'adorerais qu'on ouvre tout de suite deux micro-crèches. Mais dans les faits, je pense qu'il faut d'abord démontrer qu'on est en mesure de le faire. Le faire. Et puis ensuite... à charge pour les successeurs, de poursuivre, mais je crois beaucoup à la politique des petits pas et c'est une première pierre.

  • Speaker #1

    Après ce mandat, est-ce qu'il y a d'autres objectifs ? Est-ce que vous avez, vous, personnellement, d'autres objectifs à atteindre ? Est-ce que vous vous projetez déjà ou c'est trop tôt ?

  • Speaker #0

    Je pense que c'est trop tôt, c'est-à-dire que moi je suis encore en plein dedans. Ah oui, à 100% dans le mandat. C'est vrai qu'on est déjà, ça y est, c'est la seconde année, on est en... Ça va vite. Oui, quasiment en avril. Donc ça va vite, mais néanmoins, il reste quand même plusieurs mois. Donc je suis complètement concentrée sur le mandat. Il y a encore beaucoup de choses à faire. Donc non, je suis complètement dédiée à ma mission à ce jour.

  • Speaker #1

    Alors Vanessa, on est dans l'Else Agis. J'ai quelques questions signatures du podcast à vous poser. Pour terminer cet échange, déjà pour vous, Agir, qu'est-ce que ça signifie ?

  • Speaker #0

    Agir, ça revient à ce que je vous expliquais tout à l'heure. C'est-à-dire qu'agir, c'est avancer à son rythme, à soi, selon son propre calendrier, sans chercher à attendre le bon moment. C'est vraiment avancer selon sa propre volonté. Et c'est vrai qu'on est à une époque où on est quand même beaucoup contrainte, beaucoup contrainte dans la vie personnelle et la vie professionnelle, entre en tension d'une certaine manière et le déséquilibre il porte beaucoup sur les femmes parce que la réalité c'est que le poids de la vie personnelle porte davantage sur les femmes que sur les hommes et c'est un frein à l'action et je crois qu'au contraire. Il nous appartient, en fonction évidemment de Ausha personnels, mais d'avancer selon son propre calendrier, sa propre impulsion. Sans écouter, c'est pas le bon moment, pas tout de suite, c'est jamais le bon moment. Donc c'est à soi-même, on doit répondre nous-mêmes à cette question, est-ce que c'est le bon moment ? Est-ce que là, je me sens épanouie pour le faire ou est-ce qu'au contraire, pas du tout ?

  • Speaker #1

    Se forcer aussi parfois à ne pas trop s'écouter cette petite voix qui... Peut-être autour de la confiance en soi, de l'audace ?

  • Speaker #0

    Oui, parce qu'il y a évidemment des peurs. L'action n'empêche pas la peur, l'action n'empêche pas la crainte de l'échec. Bien sûr, évidemment. Mais peut-être que l'action implique de laisser de côté, en tout cas autant que possible, le risque d'échec. C'est-à-dire qu'évidemment, on peut ne pas y arriver, on peut ne pas convaincre. On peut ne pas être élu, mais on y va. On y va et on porte ses idées. Et puis, elles font leur chemin.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'il y a un domaine dans lequel vous aimeriez voir plus d'action ?

  • Speaker #0

    Plusieurs choses. Je trouve que, vous voyez, le droit, on en parlait tout à l'heure. L'éducation au droit et à la justice. Je trouve que c'est quelque chose à côté duquel... Globalement, je parle au niveau de la société, on passe quand même vraiment à côté. C'est-à-dire que vous avez les études de droit, et ceux qui font du droit évidemment entrent dans ce parcours et ont toute l'éducation, la connaissance. Mais je trouve qu'on gagnerait à ce que l'enseignement du droit, de la justice, des grands principes, des grandes valeurs, soit inculqué très tôt, dès l'école. Je trouve que dans les débats actuels... Vous voyez nos fondamentaux ont tendance à s'effriter un peu. Les valeurs, la présomption d'innocence, le contradictoire, le procès équitable. qui nous paraît, à nous juristes, des évidences, on se rend compte que dans les débats, même de société, en réalité, c'est souvent des notions assez abstraites pour les gens. Oui, bon, d'accord, ok, mais alors que...

  • Speaker #1

    Il n'y a pas la valeur associée, ou en tout cas, l'impact, tout ça.

  • Speaker #0

    Alors que pour moi, ça relève vraiment... Il y a un enjeu énorme à l'éducation. L'éducation, vous voyez, mais de la justice, du droit, de ces valeurs, parce qu'en réalité, elles sont le socle. Vous voyez, quand on parle d'état de droit, C'est vrai que parfois c'est un peu évanescent pour un certain nombre de personnes, alors que c'est en fait le socle sur lequel notre démocratie est assise. Et je trouve que c'est un peu un domaine qu'on a tendance à laisser aux avocats. Oui, bon d'accord, les avocats et leurs grands principes, oui, bon d'accord. Vous voyez ? Alors qu'en réalité, on aurait pu... Oui, ça a gagné.

  • Speaker #1

    Parfois obscur, en fait. C'était peu connu et peu généralisé.

  • Speaker #0

    Alors que je crois qu'à l'époque où l'on vit, actuellement, c'est indispensable. Vraiment. De mettre la lumière, le focus sur l'éducation, au droit, à la justice, beaucoup plus tôt.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous avez une figure féminine, alors ça peut être personnelle, professionnelle, voire historique, qui vous inspire particulièrement dans votre manière d'agir ou au quotidien ? Ça serait qui et pourquoi ?

  • Speaker #0

    Alors ce serait une figure féminine personnelle puisque c'est ma mère. Voilà. Tout simplement et sans aucune hésitation possible, c'est ma mère. Vous voyez, je vous disais, il n'y a pas de modèle, on a surtout… comment dire, il n'y a pas de Wonder Woman ou de Superwoman, on fait ce qu'on peut chacune en réalité. Moi quand même, mon modèle, c'est clairement ma mère. Vraiment. Et je considère que tout ce que j'ai accompli à ce jour, et c'est pas du tout une... Enfin, je pense chaque mot, c'est vraiment grâce à elle. Vraiment, vraiment. Par toute petite, déjà, l'importance accordée au travail, à l'exigence du travail. Et surtout, au-delà de ça, parce que c'est un peu banal, les parents généralement poussent à ça, mais vraiment... de ne jamais se mettre de freins ou de limites. Et je réalise maintenant, en étant adulte, très adulte, qu'en réalité, c'est le meilleur conseil ou le meilleur étayage à donner, je crois, aux enfants. C'est pas « tu verras si tu peux » . Non, c'est « vas-y, on y va » . On y va et on verra. Et ça, c'est vraiment ma mère qui me l'a inculqué. Donc, c'est vraiment, c'est ma figure évidente qui m'a porté et qui me porte toujours aujourd'hui.

  • Speaker #1

    Eh bien, on va rester sur ça. Merci beaucoup, Vanessa, pour cet échange.

  • Speaker #0

    Merci infiniment. C'était un plaisir. Merci beaucoup.

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