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#23: Edouard, la liberté de s’accomplir, corps et âme

#23: Edouard, la liberté de s’accomplir, corps et âme

45min |22/04/2025
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#23: Edouard, la liberté de s’accomplir, corps et âme

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45min |22/04/2025
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Description

Si vous cherchez à suspendre le temps, à le regarder autrement, laissez tomber l’urgence, enfilez vos écouteurs, et plongez dans la voix profonde et vivifiante d’un homme qui traverse la vie avec curiosité, intensité et humilité : Édouard.

À 80 ans, il n’a rien perdu de sa flamme – ni de sa capacité à nous faire réfléchir, sentir, respirer autrement.

Dans cet épisode, nous parlerons :

  • De la vieillesse comme art de vivre, ou plutôt, comme art de bien vieillir. Une discipline quotidienne, ancrée dans le corps, le souffle, le vivant.

  • De la respiration consciente, du Tai Chi, de l’éveil par le silence… et de ce que la Chine, le Japon ou l’Inde ont à nous apprendre pour habiter pleinement nos vies.

  • De sagesse, de Montaigne à Mircea Eliade, en passant par Jeanne Fonda et Pamela Anderson – oui, vraiment.

  • De ce que veut dire habiter le monde avec les autres, en respectant la lenteur, la différence, les âges, les arbres, etc

Et puis nous parlerons aussi de ce mot, “Encore”, qu’il réinvente en deux : En-corps. Parce qu’Édouard ne parle jamais seulement avec des idées, mais toujours avec son être tout entier.


Pour en savoir plus sur Édouard Stacke :
• Des métiers multiples: kiné, ostéopathe, thérapeute, coach de dirigeants et dirigeant d'une école de formation à la respiration

• Pionnier dans le coaching
• Formateur, voyageur, chercheur en humanité
• Auteur de La liberté de s’accomplir
• Et amoureux invétéré… des arbres, des jardins zen, des chants à pleine voix et des projets jusqu’à 100 ans


Un épisode lumineux, exigeant, sensible — à écouter sans hâte, avec tout votre cœur et vos deux oreilles.

Bonne écoute ✨


Et partagez ce moment précieux avec celles et ceux que vous aimez.

Pour suivre le podcast, c’est par ici, sur Instagram


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et tous, bienvenue dans ce nouvel épisode et avant de rencontrer Edouard, je vous donne quelques mots sur Vivagen, un événement dédié à l'intergénérationnel qui aura lieu très bientôt. Bonne écoute ! Et si la diversité des âges devenait votre plus grand atout, que vous soyez DRH, manager, responsable RSE, Vivagen est fait pour vous. On vous donne rendez-vous le 29 avril 2025 pour une journée unique où nous ferons de la collaboration intergénérationnelle un véritable levier de performance. Bonjour Edouard.

  • Speaker #1

    Bonjour Claire.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté mon invitation pour venir au micro d'Encore.

  • Speaker #1

    Bienvenue, j'en suis ravi.

  • Speaker #0

    On va passer un moment ensemble, et je vais être tout à fait franche avec les auditeurs qui écouteront cet épisode. On a passé un moment avec Edouard avant l'enregistrement, et c'est un moment qui m'a bouleversée. Donc si vous entendez un peu d'émotion dans ma voix, c'est normal, puisqu'on vient de brancher les micros après ce moment de partage intense. Et je profite de remercier à nouveau Edouard. Introduction faite, je vais vous demander, comme à chaque invité, de vous présenter de la manière dont vous souhaitez. Voilà, qui est Edouard en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Alors, en quelques mots, c'est toujours difficile puisque j'ai une longue vie professionnelle, mais j'ai été un soignant pendant 20 ans, 10 ans comme kiné, ostéopathe, acupuncteur, sophrologue, prof de tai chi, puis 10 ans comme psychothérapeute et formateur de psychothérapeute, j'ai monté un institut en France. et à Montréal pour former des psychothérapeutes. Et j'en ai formé 3000 avec un collectif de psychiatres. Et les 30 années suivantes, j'ai été consultant en management dans les entreprises françaises et internationales. Et j'ai développé le facteur humain et entre autres, la manière de travailler en équipe performante. Et comme je suis assez sportif, j'ai utilisé la pédagogie par l'action. pour impliquer les gens dans leur comportement et pas simplement dans leur discours. Il y a un proverbe corse que j'adore qui dit « Entre le dire et le faire, il y a la mer » . Il y a longtemps que je ne crois plus ce que les gens me disent, je regarde qui ils sont et ce qu'ils font. Et s'ils sont cohérents, ils font ce qu'ils disent et disent ce qu'ils font. Voilà, donc j'ai développé la culture d'entreprise sur le facteur humain.

  • Speaker #0

    Et le faire, l'action. Est-ce que vous êtes un homme d'action ? Plus qu'un homme de raison.

  • Speaker #1

    Alors, je vais vous le dire avec une pirouette. Quand j'étais jeune, je me disais, entre nomade et sédentaire, je préfère être sémade parce qu'en aucun cas je ne pourrais être notaire. Voilà, donc je suis un aventurier du facteur humain, tourné vers l'action et l'expérimentation, la découverte, le voyage. la rencontre avec les cultures, mais aussi un homme de réflexion. Je combine la réflexion profonde sur l'être humain, sur les cultures, et je fais ce va-et-vient permanent.

  • Speaker #0

    On va aborder tous ces thèmes. Je pense qu'on n'aura pas le temps de rentrer dans ni toute votre vie, ni surtout, parce que vous connaissez l'angle du podcast, c'est évoquer la vieillesse avec un angle du présent et du futur. Donc on va parler aussi de vos projets actuels et ceux à venir. Forcément ça va être teinté de votre expérience. Est-ce que vous êtes ok de nous partager votre âge ?

  • Speaker #1

    J'ai 80 ans depuis le mois de septembre 2024. D'accord.

  • Speaker #0

    Est-ce que l'âge, ce chiffre, c'est important pour vous ?

  • Speaker #1

    Alors, la Chine traditionnelle est une gérontocratie. Et quand les gens vieillissent, on considère qu'ils sont plus sages que les gens plus jeunes parce qu'ils ont un cumul d'expérience. C'est le cas en Afrique. On respecte les personnes âgées. Ma mère a rendu visite à ma jeune sœur qui a vécu à Dakar et elle était surprise de la bienveillance de tous les voisins qui étaient adorables avec elle parce que c'était une vieille dame, simplement parce qu'elle bénéficiait du respect qu'on voue aux personnes âgées. Nous, on s'est dégradés. Il y a eu ce respect des personnes âgées, de leur expérience, mais au niveau de l'entreprise... On a poussé les gens vers la sortie à partir de 55 ans en considérant qu'ils étaient obsolètes, ce qui est complètement stupide. Quand on voit Henri Salvador ou Charles Azdawour qui à 92 ans sont en concert avec 3000, 5000 spectateurs, on voit bien qu'il y a de la ressource. Et puis il y a les auteurs, il y a les comédiens. Je me suis occupé de Madeleine Rollo de Jean-Hubert Barrault, elle a joué jusqu'à 88 ans en scène. C'est nombreux les artistes qui restent actifs à un âge avancé. Il est temps de rappeler que les personnes âgées ont une richesse à apporter dans le dialogue intergénération, avec le recul, la compréhension du temps long, la vision plus large, pour peu qu'ils ne soient pas radotés sur la nostalgie de leur jeunesse.

  • Speaker #0

    Comment vous abordez justement le fait de vieillir ? C'est une question centrale dans votre vie. Est-ce que ça a été une question centrale de vous dire comment je vais faire en sorte de bien vieillir ou d'être l'homme à 80 ou 90 ans que je désire être ?

  • Speaker #1

    Alors, être ce que je désire être, c'est depuis mon enfance que je m'y emploie. On commence à vieillir à la naissance. Et donc, le vieillissement est un processus naturel. Mais par exemple, pendant mes études... J'ai appris que les neurones, on les a au départ, mais après ils se détruisent, mais ils ne se renouvellent pas. Or, depuis quelques années, on sait qu'on peut stimuler le renouvellement des neurones et qu'on continue à fabriquer, même jusqu'à 50 ans, des neurones, à condition d'avoir l'esprit actif. Et donc, le potentiel de récupération, c'est comme avec l'épigénétique, on sait que le mode de vie peut changer même la trame génétique. et qu'on peut améliorer son capital santé, comme on le fait avec la médecine chinoise, la médecine indienne, ayurvédique, en ayant une manière de vivre en équilibre. Et en Chine, on appelle ça Yangsheng, l'art de vieillir en bonne santé. Mon premier voyage en Chine en 1981, je vois des hommes de 80 ans, à l'âge que j'ai maintenant, avec le pied sur un arbre, en train de faire le grand écart. Et moi, je m'occupais de danseuse professionnelle, classique, moderne. Donc pour une danseuse, c'est normal de faire le grand écart. Il y a 80 ans, normalement, il est perclu de rhumatisme, il ne peut pas faire ça. Et souvent, ils ont commencé à travailler à 50 ans pour travailler en souplesse, pour entretenir la flexibilité. Et donc, ça m'a donné confiance et toute ma vie, j'ai pris soin de mon corps pour vivre de manière équilibrée. J'ai beaucoup picolé quand j'étais jeune, entre 15 et 25, pour faire la fête. Et puis entre 25 et 45, j'ai bu un verre de vin par semaine. Je ne fumais pas, pas de café, mais je faisais du sport plusieurs heures par semaine. J'ai couru mon dernier marathon, j'avais 64 ans. Et donc, le vieillissement, il est normal. Je commence à avoir la vue qui baisse, j'ai été opéré de la cataracte, j'ai des aides auditives. Il y a les signes de vieillissement qui m'affectent. Mais j'ai une énergie qui reste assez importante et une agilité physique et mentale parce que j'ai entretenu mon corps très régulièrement. Et la clé, pour les gens qui veulent bien vieillir, en bonne santé, c'est de prendre soin d'eux. Très souvent, tous les jours, très régulièrement.

  • Speaker #0

    On est notre meilleur capital, vieillesse.

  • Speaker #1

    Voilà.

  • Speaker #0

    Vous l'avez étudiée, cette vieillesse, ou c'est finalement quelque chose qui est à côté ? Parce que là, vous en parlez comme vous avez observé dans d'autres pays, vous avez également touché à beaucoup de médecines alternatives différentes de ce qu'on peut entendre aujourd'hui en France. Vous en avez fait certaines fois votre métier. Oui. Donc vous avez creusé bien plus que Berni, mais vous avez creusé ces sujets pour en devenir expert. Justement, est-ce que la vieillesse est quelque chose ? Parce qu'on dit souvent que la prévention, notamment en France, est le parent pauvre de la santé. Comment on explique qu'aujourd'hui, on a gagné en longévité, mais pas forcément les dernières années en très bonne santé finalement ?

  • Speaker #1

    Les laboratoires pharmaceutiques exercent une pression importante sur la formation des médecins. Et les médecins sont formés d'une manière... technicienne, et ça va s'aggraver encore avec l'intelligence artificielle, à distribuer des médicaments, mais pas apprendre aux gens à bien se porter. Sur l'ensemble des généralistes, il y en a un sur deux qui se porte mal parce qu'il n'a pas appris à prendre soin de lui-même. Si vous regardez les chiffres de l'association des internes, un interne sur deux se porte très mal. Il est surexploité par les administrations des hôpitaux et travaille souvent 70-80 heures par semaine. Alors que la limite légale, c'est 55, donc il y a un non-respect de la loi par les administrations des hôpitaux. Et les études de médecine sont extrêmement intenses, les contenus sont très copieux. Mais j'ai une thèse de médecine de l'Université de Strasbourg de 2017 qui montre qu'en 8 ans, 9 ans d'études pour devenir un médecin généraliste, il n'y a que 150 heures de psychologie. Les infirmiers et les infirmières ont 4 ans, 5 ans d'études, ont 1500 heures de psychologie. Comment c'est acceptable ? que les médecins n'aient pas de formation psychologique pour pouvoir dialoguer avec leurs interlocuteurs. On ne soigne pas une maladie, on soigne une personne atteinte d'une maladie ou d'un handicap. Donc cette formation à la relation thérapeutique, elle est indispensable et elle est insuffisante dans la formation de la plupart des soignants.

  • Speaker #0

    Et ça, c'est valable pour tous les corps de métier, tous les corps de la médecine aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Par contre,

  • Speaker #1

    il y a une réaction ces dernières années, ces dix dernières années. Il y a un film fait par Catherine Bellum sur les tentatives de développer la santé intégrative, que ce soit à l'hôpital, dans des cliniques ou dans des centres de santé pluridisciplinaires. Il y a un vrai mouvement qui est en train de se produire depuis quelques années. Je serai vendredi, samedi, avec Isabelle Célestin, à un congrès de santé intégrative.

  • Speaker #0

    C'est quoi justement ce terme-là, santé intégrative ?

  • Speaker #1

    C'est avoir une approche pour rendre les personnes acteurs de leur santé et se servir aussi des médecines complémentaires. Le docteur Alain Toledano à l'Institut Raphaël a développé 40 médecines complémentaires de la sophrologie à leur thérapie pour aider le traitement des cancers avec l'approche classique du traitement des cancers, mais mobiliser toutes les ressources des patients pour aller plus loin. Il y aura Catherine Cornibert, la présidente de l'association Soins pour soignants, qui viendra parler de ce qu'elle fait. On a 200 000 soignants qui ont démissionné de leur job, tellement avec la fatigue du Covid et de l'afflux de malades qui ont débordé les hôpitaux. Les budgets n'ont pas suivi et on a fermé des lits d'hôpitaux parce qu'on n'a plus d'infirmières pour s'occuper des malades. Donc notre système de santé, il est défaillant. Et on ne forme pas assez bien les soignants et on n'investit pas assez les fonds nécessaires. On ne valide pas assez la bonne gestion des établissements pour avoir les moyens de soigner les gens gravement malades. Et ça passe par l'éducation à la santé pour que les gens soient beaucoup moins malades. En 60 ans d'activité, je me suis arrêté à peu près un jour tous les deux ans parce que j'avais une angine, parce que j'avais un labago, etc. Mais je ne me plains pas. 30 jours d'inactivité sur 60 ans, c'est pas mal.

  • Speaker #0

    Ça va, c'est pas la sécu qui va venir vous chercher. Voilà.

  • Speaker #1

    Mais beaucoup plus de gens pourraient se porter mieux en ayant cette hygiène de vie. Et par exemple, tout le monde sait à peu près ce qu'il faut manger pour bien se porter. La diététique s'est beaucoup développée, même dans les écoles, on fait attention. Mais la respiration consciente, par exemple, qui est gratuite, on n'apprend pas aux gens à respirer. J'ai rencontré les gens de la Fondation du Souffle, les responsables de la prévention. Ils s'occupent des pathologies à nouveau, pas de l'éducation à la santé. J'ai soigné les enfants gravement asthmatiques pour les débarrasser de leur asthme, qui sont devenus des beaux jeunes hommes en pleine forme, qui ont changé leur rapport au corps, à leur respiration, à la gestion de leurs affects, etc. Il n'y a pas que les allergies qui vont entraîner les maladies respiratoires. Il y a aussi la vie intérieure et les difficultés psychologiques. qui vont impacter la manière dont le corps s'épanouit ou pas.

  • Speaker #0

    Vous êtes un amoureux du vivant ?

  • Speaker #1

    On peut dire ça, profondément. Du vivant, parce que quand je voyage, il y a deux choses que je vais visiter. Les lieux en général de prière, les lieux où les gens se retrouvent pour pratiquer leur foi. J'aime bien voir comment ça se passe, l'atmosphère de ces lieux. Mais je visite les jardins. Je visite les plus beaux jardins. Il y a par exemple un jardin zen tout près de chez moi, le jardin albercal où j'étais hier après-midi. Mais il y a un jardin japonais tout près du musée de la Légion d'honneur à San Francisco. Il y a une ville comme Kyoto où il y a 2000 jardins auprès des 2000 temples bouddhistes. Il y a Suzhou en Chine où il y a 140 jardins de mandarins qui sont absolument splendides. J'adore les forêts, j'adore les forêts, les vieux arbres.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que ça nous apprend d'observer davantage le vivant ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est une immersion dans la complexité du vivant. Quand j'étais adolescent, j'avais un petit bateau, j'allais à la pêche pendant l'été. Et donc, j'observais la rivière, j'observais les poissons, j'observais le courant. Je savais qu'il y avait l'invisible dans la nature et je cherchais à le capter, mais ce n'était pas évident. Par contre, l'immersion dans le silence, l'immersion dans le cycle des saisons, ça me touche énormément. Sur mon bateau, j'ai le parc de Saint-Cloud en face de chez moi, je ne m'ennuie jamais de voir les variations de la lumière du matin au soir, les variations du ciel, les variations de la végétation sur les arbres, au printemps la couleur des arbres et puis l'automne. Pour moi, c'est un spectacle infini et magnifique. Et ça me permet de me détacher de mon activisme passionné pour être là et jouir de l'instant présent.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous raconter un petit peu votre quotidien à l'aune de vos 80 ans ? Comment vous... C'est quoi votre moteur ? Parce que vous êtes amoureux du vivant, vous vous exercez encore, vous avez mille métiers dans votre vie, vous avez voyagé partout dans le monde, vous avez écrit des livres, on va aborder notamment un livre, La liberté de s'accomplir, tout à l'heure, qui va être peut-être aussi un de nos guides pour l'entretien. Mais c'est quoi votre moteur au quotidien ?

  • Speaker #1

    J'aime les gens. Et j'aime vivre intensément, même dans des registres très sobres. Hier, j'ai rencontré un jeune musicien que j'écoutais chanter et jouer de la guitare. Il avait une voix très mélodieuse, une belle composition. Il y a des moments privilégiés où il y a quelque chose d'intense et de beau qui est à observer. Quelquefois, c'est lors d'un voyage où je vais découvrir des nouvelles choses, mais je prends le temps de la réflexion. C'est-à-dire que j'ai dû me méfier de mon activisme passionné. Je prends des temps pour méditer, pour m'étirer, pour lire, pour réfléchir. Je prends le temps de rencontrer beaucoup de gens. J'ai beaucoup de jeunes professionnels qui viennent me voir pour bénéficier de mon regard sur leur propre projet. Je fais partie de nombreuses associations. Je vais partager avec des collègues, des experts sur des thématiques. J'ai monté avec des amis une soirée sur les spiritualités, les valeurs qu'elles font circuler entre les générations, aussi sur la place de la diversité, de l'inclusion. La société française devient très exclusive et très sauvage. Quand je vois les enfants qui vont poignarder un autre qu'on disciple à l'école, quand je vois cette sauvagerie dans la société, même chez les plus jeunes, je trouve ça extrêmement inquiétant. Et il y a des réflexes de peur. et d'hostilité où on trouve beaucoup de boucs émissaires. On ne sait plus vivre ensemble en paix. On a besoin de retrouver la connexion avec le vivre ensemble et la tolérance et la solidarité largement.

  • Speaker #0

    Est-ce que justement la crainte que partagent beaucoup de gens par rapport au fait de vieillir, parce qu'on se prend aussi beaucoup de dictates sur comment vieillir, il y a des personnes qui ont peur de la vieillesse, il y a des personnes qui prennent des crèmes anti-rides, anti-âge. Est-ce que ça ne favorise pas justement, d'un certain point, cette exclusion et ce mauvais traitement aussi qu'on peut avoir sur les personnes âgées ou les personnes qui vieillissent autour de nous ?

  • Speaker #1

    Alors la peur de la mort, souvent, elle va amener les gens à se ratatiner et à être de plus en plus anxieux. Sauver les apparences, et en particulier pour les femmes, j'ai une amie psychologue et psychosociologue qui s'appelle Danielle Rapoport, qui a écrit un joli petit livre qui s'appelle « L'aventure au coin de la ride » .

  • Speaker #0

    J'aime beaucoup le terme.

  • Speaker #1

    Voilà, elle écrit très bien et elle parle entre autres de la peur des femmes de vieillir et de changer d'apparence, etc. Moins de mes modèles féminins, c'est Jeanne Fonda, qui était une poupée Barbie splendide à 20 ans, 30 ans, quand elle jouait Barbarella, qui était la femme de Vadim, entre autres, mais qui, avec le yoga et le sport, à 85 ans passés, elle a développé une énergie de sagesse, d'ouverture sur le monde et d'humanité extraordinaire. Elle aime le genre humain et elle se bat pour la liberté des femmes et pour accepter la vie qui passe malgré le vieillissement. Accepter de changer d'image, Pamela Anderson qui choisit de ne plus se maquiller, c'est une manière de dire j'accepte de vieillir. C'est vrai pour l'actrice italienne dont le nom va me revenir. Et donc accepter le vieillissement, c'est de la sagesse. Ça ne veut pas dire le subir. C'est-à-dire que si je m'entretiens en ayant un équilibre de vie, en restant actif, en faisant marcher mes neurones, je recommande souvent aux gens qui prennent de l'âge de rester curieux et de, par exemple, de continuer à voyager ou d'être dans la vie associative pour aller participer à des activités artistiques, culturelles, etc. Moi, je me suis mis aux Russes à 60 ans pour entretenir ma mémoire qui commençait à fléchir comme tout le monde. Je n'ai pas retenu beaucoup, mais mes 80 heures de Russes m'ont fait travailler mes neurones. Il y a 65 ans, j'ai pris 60 heures de cours de chinois. Je n'ai pas retenu beaucoup, mais ma mémoire marche beaucoup mieux.

  • Speaker #0

    C'est des langues faciles quand même en plus.

  • Speaker #1

    Et aujourd'hui, j'ai une mémoire qui reste en bon état parce que je l'entretiens. J'organise des lectures à voix haute de poésie, par exemple, où je fais chanter les gens pour qu'ils mémorisent justement les paroles en s'amusant. C'est un jeu d'entretenir ses capacités. Et si on y prend plaisir... Ce n'est pas une contrainte, ce n'est pas fascinant. C'est cette peur de changer d'image qui est le problème, ce n'est pas le vieillissement en lui-même.

  • Speaker #0

    J'aimerais bien qu'on revienne sur certains concepts que vous avez beaucoup développés dans le livre La liberté de s'accomplir. Vous y parlez beaucoup de transmission dans son arbre généalogique, par exemple, mais également de transmission du passé, un peu plus archaïque, de choses qui nous seraient transmises dans notre ADN. C'est intéressant d'avoir ce point justement sur notre regard et comment on évolue dans ce monde et comment on est au monde, chacun, chacun et chacune. Est-ce que vous pouvez nous parler un petit peu de ce point-là ?

  • Speaker #1

    Alors, je vais prendre un premier exemple qui est celui des compagnons du Tour de France. Mais ils n'apprennent pas simplement un merveilleux métier, que ce soit la fironnerie, la menuiserie, la sculpture ou autre chose. Ils apprennent une attitude éthique, une attitude morale, pour être fiers de ce qu'ils font, de leur pouvoir faire, mais humbles dans le fait de contribuer à faire des choses belles. Et donc transmettre des valeurs, c'est essentiel. Et c'est ce qui se passait entre les générations, entre fois. Et les jeunes sont coupés de la relation avec leurs grands-parents. On vit par tranches d'âge. Et moi, j'ai dansé avec les grands-mères dans mon village. Aujourd'hui, on va en boîte de nuit et on va dans une boîte avec des gens de sa génération. Mais il n'y a plus de partage intergénérationnel à part les mariages, les enterrements.

  • Speaker #0

    Qui sont des réunions.

  • Speaker #1

    Les baptêmes.

  • Speaker #0

    Comment on peut retrouver aujourd'hui ? Parce qu'on l'a perdu en chemin pour plein de raisons et on n'aurait pas assez le temps d'un épisode pour expliquer pourquoi on a perdu ça. Comment on peut le retrouver ? Parce que finalement, faisons un peu de prospective. Qu'est-ce qu'on peut faire aujourd'hui pour retrouver ce qui est d'ailleurs possible ? Je vais vous donner un exemple de compagnonnage. Aujourd'hui, il y a des choses qui existent et qui sont là sous nos yeux. Qu'est-ce qu'on peut faire pour que la société, justement, on fasse un peu péter ces silos où on a mis les gens dedans ?

  • Speaker #1

    Alors, je vais vous donner deux, trois pistes, dont le vivre ensemble dans les entreprises. Dans l'entreprise, ça s'appelle l'empowerment. Quand on s'intéresse à la capacité d'évoluer de chaque personne, c'est ce que chaque salarié a comme motivation première. Est-ce que je peux évoluer dans mon travail au fil de mon temps de participation à une entreprise ? Est-ce que je peux continuer à apprendre, prendre des responsabilités ? L'argent, c'est que la troisième source de motivation. La deuxième, c'est le vivre ensemble. Si je m'entends bien avec mes collègues, je suis content d'aller bosser le matin. Parce que je suis avec des gens que j'apprécie, avec qui on s'entend bien. Et donc quand on développe une dynamique de transformation d'un collectif, et qu'on donne à chacun sa chance, la censure sociale peut continuer à fonctionner, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Vous n'avez que 20% des enfants d'ouvriers qui terminent leurs études secondaires. Et donc, à l'époque où c'était Mitterrand, il y avait pratiquement 200 ou 300 députés à l'Assemblée qui étaient des enseignants. Quand c'est la droite qui est au pouvoir, c'est deux ou trois cents médecins, avocats, professions libérales. Mais ce n'est pas donner sa chance à tout le monde. Le slogan « liberté, égalité, fraternité » , il est loin d'être mis en pratique dans la réalité. Donc donner sa chance à tout le monde, retrouver une manière de partager, valoriser les contributions de chacun, c'est un état d'esprit qu'on retrouve dans beaucoup de boîtes familiales comme Michelin, le groupe Bouygues, le groupe Bongrain. Il y a un certain nombre de boîtes où on n'est pas dans l'urgence de faire du fric tous les trois mois, mais on donne leur chance pour que les gens évoluent. Pérennise. C'est en développant le capital humain que l'entreprise crée de la richesse.

  • Speaker #0

    Et quand on sort de l'entreprise et qu'on va vers la société, cette notion aussi de... Parce qu'au micro, j'ai beaucoup de personnes aussi de plus de 70 et 80 qui me disent au moment de la retraite, j'ai perdu mon sentiment d'utilité, je me suis sentie écartée de la société.

  • Speaker #1

    Alors, j'ai mis du temps ça. Alors, c'est une forme de mort sociale. Si en plus, je m'y suis pris un peu tard et j'achète une maison dans la Creuse où je ne connais personne, je vais m'isoler doublement. À l'inverse, il y a beaucoup de gens qui, quand ils prennent leur retraite, s'investissent dans la vie associative. Que ça soit une association culturelle, sportive, peu importe, mais créez du lien et trouvez les choses qui vous plaisent. J'ai chanté deux ans dans une chorale de gospel avec ma femme et ma fille à Bouloï. il y avait 40... 50 personnes. Les plus anciens étaient très accueillants pour les nouveaux et c'était extrêmement solidaire mais très joyeux. Chanter ensemble, c'est magnifique. On se réjouit, on se ressource, on charge les batteries et c'est un bonheur. Donc, participer à des échanges, provoquer des échanges, rencontrer du monde, ne rester pas seul.

  • Speaker #0

    Ça c'est important. Et être curieux. Ne pas être seul, être curieux. Mais ça c'est valable pour tous les âges.

  • Speaker #1

    Oui, mais la grande richesse du vieillissement et de la retraite, c'est qu'on a du temps. Souvent, quand on est actif et qu'on a une famille à élever ou un boulot assuré, on a quelques petits moments, mais on a beaucoup moins de temps. Les grandes vacances, c'est quand même chouette pour faire des choses qui nous plaisent et qui nous font du bien.

  • Speaker #0

    Oui, c'est sûr. Quel est votre regard, vous, que vous portez sur votre propre vieillesse ? Est-ce que déjà, vous êtes l'homme à 80 ans ? que vous avez toujours projeté être.

  • Speaker #1

    Alors, je ne savais pas que j'allais aller si loin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    À 20 ans, j'avais un rêve, je voulais devenir un soignant. À 16 ans, je rêvais de devenir psychanalyste, puis à 40 ans, j'étais psychanalyste reichien. Et donc, j'ai atteint mes objectifs de 20 ans dès la quarantaine. J'ai dû trouver des nouveaux objectifs. Mais étant un fils d'immigré, je n'aurais jamais imaginé qu'à 40 ans, j'allais coacher les PLG du CAC 40. C'est ma manière d'approfondir le facteur humain qui fait qu'on m'a sollicité pour accompagner et faire progresser des gens avec beaucoup de pouvoir. J'ai appris à le faire, je sais le faire, je le fais plutôt bien et ça m'a amené dans des chemins complètement nouveaux. Je n'aurais jamais imaginé aller bosser dans 30 pays pour amener cette dynamique d'équipe performante dans des grands groupes. Donc c'était assez amusant. Mon père est mort à 70 ans, il a travaillé depuis l'âge de 7 ans. Et il a travaillé très dur, donc 15 ans comme envoyé agricole, mais il a travaillé toute sa vie, il n'a jamais pris de vacances. Et comme il fumait, comme il buvait, il jouait aux cartes, son corps a été usé. Et ma mère est décédée à 80 ans. Alors que moi je me disais, je devrais pouvoir aller jusqu'à 90, j'ai une vie plus équilibrée, moins dure. Puis un jour j'étais en République tchèque. car le vivarique est une station thermale avec des clients tchèques. Je leur fais faire une petite expérience dans la forêt, de connexion avec les arbres, etc. Et puis ils étaient en train de méditer, chacun avec leur arbre, et moi avec le mien, avec un beau chêne de 2-3 siècles. Et puis je m'interroge sur ma durée de vie. Ce qui m'importe, c'est de vieillir en bonne santé. Le jour où je ne serai plus tout à fait en bonne santé, je suis prêt à partir, même à interrompre mon parcours. Mais ce jour-là... Avec ce beau chêne, je me suis dit, je m'étais donné une limite de 90, mais au fond, si je suis en bon état, je peux aller jusqu'à 100. Quand je vois Edgar Morin, à 103, 104 ans, qui fait encore des émissions de télévision, il n'y a pas de problème, ça me plairait bien. Il y a un numéro spécial du Point sur les centenaires, et les gens de 100, 102 ans qui sont en bonne santé, c'est parce qu'ils restent tactiques. Soit professionnellement, il y a d'anciens avocats, des écrivains, etc. Soit parce qu'ils bougent physiquement ou bien les deux. Donc, c'est moins l'âge que le fait de vivre le plus longtemps possible en bon état et en prenant plaisir. Il y a un écologiste professionnel qui avait fait une étude sur l'espérance de vie des salariés de la SNCF. Les cheminots qui, depuis l'âge de 16 ans, posent les traverses sur les voies. et travaillent par tous les temps, ils prenaient leur retraite à 55 ans, la plupart mourraient dans les 6 mois qui suivent leur départ en retraite. Ils ont tellement travaillé dur pendant 40 ans qu'ils se sont usés. A l'inverse, les professions libérales qui disposent du choix de leur mode de vie, comme les avocats, les médecins, ont une espérance de vie 5 ans supérieure aux salariés. Les gens qui ont des hobbies, parce qu'ils ont la liberté de choix. Donc ça pèse beaucoup sur la qualité de vie. Les gens qui ont des hobbies, qui pratiquent des activités physiques et qui n'ont pas d'addiction, qui boivent très peu, qui ne fument pas et qui font un peu d'activités physiques, ils ont cinq ans d'espérance de vie supplémentaire. Donc ce sont vraiment des chiffres importants pour les gens qui veulent vieillir en bon état. Prenez soin de vous et ne vous isolez pas, ne vous repliez pas sur vous-même.

  • Speaker #0

    Et j'ai envie de rajouter aussi, apprenez à bien respirer.

  • Speaker #1

    Ça, c'est ce que l'Asie m'a appris.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on peut en parler un peu, parce que je trouve ça passionnant.

  • Speaker #1

    Avec grand plaisir. Mon intérêt pour la respiration vient de mon adolescence, où j'ai appris à nager tardivement. Mais dès l'âge de 16 ans, je me suis amusé à nager sous l'eau. Et donc j'ai découvert qu'en ravalant ma salive, je pouvais nager quelques mètres de plus. Et donc j'ai appris à nager en apnée et j'arrivais à faire 50 mètres sous l'eau. Quand je suis allé au Japon, j'ai fait pas mal d'apnée en Polynésie aussi, avec les plus pêcheurs. Mais quand je suis allé au Japon méditer avec les moines, j'ai découvert que...

  • Speaker #0

    La spiritualité bouddhiste, c'est de prendre conscience de son corps, prendre conscience de sa respiration et de laisser passer les pensées dans la tête pour ne pas s'y attacher. Donc ce n'est pas réfléchir, c'est être attentif à ce qui est là. Et quand j'ai commencé à aller en Chine ou à apprendre le Tai Chi Chuan, je me suis rendu compte que mettre l'esprit au repos et se détendre complètement, c'était une culture qui se transmettait depuis des siècles. Et moi qui étais un jeune paysan, altérophile, costaud, robuste, rentré dans la délicatesse du relâchement, du mouvement fin, etc. Ça m'a vraiment passionné. J'ai pu entraîner les danseurs professionnels à ce mouvement du Tai Chi Chuan, par exemple. J'ai trouvé ça transformateur de l'état intérieur. Et donc, toute ma vie, j'ai commencé à faire attention à ma respiration, que ce soit avec le pranayama du yoga, avec la méditation ou avec... Le sport, j'ai couru à pied pendant 25 ans, en observant chaque respiration pendant tout un marathon ou pendant chacun de mes entraînements, et la conscience de chaque geste pour être dans la décontraction. En Asie, pour le résumer, on dit que la sagesse c'est d'avoir l'esprit aiguisé, le corps détendu. Et j'invite nos auditeurs à observer leur temps. tonus musculaire pour se relâcher le plus souvent possible, le plus largement possible. C'est comme les lampes à basse consommation. Elles sont obligatoires maintenant, elles consomment moins. Et si vous respirez lentement et profondément, vous décontractez musculairement, vous gardez l'énergie pour agir quand vous en avez besoin. Et vous allez éviter la fatigue. J'ai publié un article sur fatigue et ressourcement dans une revue de coaching en mars. 2023, numéro 18 de la revue Le Coaching Pro. Et si on sait récupérer, prendre du répit, on ne va pas s'épuiser. Moi j'ai travaillé énormément, j'ai travaillé 12 heures par jour pour soigner les gens. Mais si je me relaxe, si je me détends, si je récupère, si je fais la sieste, je vais laisser mon organisme récupérer. Au Japon... on prend des bains à 38-40 degrés le soir pour se décontracter. On se lave avant de rentrer au fur et à mesure du bain japonais. Et on va rester 20-30 minutes à se détendre dans l'eau chaude pour se relâcher, exactement comme les musulmans avant la mosquée le vendredi matin vont aller au hammam. Apprendre à se détendre, les Scandinaves le font avec le sauna. C'est un état d'esprit culturel. On ne s'accorde plus le temps du répit. Avec les réseaux sociaux, les écrans, les gens ont la tête toujours absorbée, et du coup, créent une charge mentale. Alors que s'ils donnent le temps de ne rien faire très régulièrement, leur organisme récupère. Une capacité d'auto-réparation du capital santé. C'est ça. Et de l'alternance. Accepter l'alternance. Il y a le jour, il y a la nuit. Il y a l'hiver, il y a l'été. Il y a un temps pour agir et un temps pour ne rien faire.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'avec votre regard sur le monde, tout ce qui fait que vous êtes Édouard à 80 ans aujourd'hui, tout ce qui vous a façonné, tout ce qui vous façonnera demain, qu'est-ce qu'on peut dire, et j'en fais partie, aux gens qui, en 2025, sont un peu inquiets, anxieux, de ce qui nous entoure ? Alors on n'a pas la main dessus. Vous nous avez donné beaucoup de pistes aujourd'hui sur comment reprendre soi-même aussi et cultiver cette joie intérieure. se reconnecter à soi. Qu'est-ce qu'on peut concrètement faire à tous les âges, aujourd'hui, pour relever peut-être les défis qui nous entourent ?

  • Speaker #0

    Alors, Alain Juppé parlait de sobriété heureuse, et au fond, il reprenait les termes de Pierre Rabhi. Et vivre simplement, c'est une façon de se rendre la vie plus agréable. Si je ne me crois pas obligé d'accumuler, mais que je profite de ce que j'ai. Napoléon disait « Être heureux, c'est dépenser 70% de ce qu'on gagne » . Et donc si, comme beaucoup d'Américains, j'ai 4-5 quarts de crédit et je prends des emprunts à tirer l'arigot, et du coup, quand il y a une crise financière, je suis obligé de vendre ma maison parce que je ne peux plus payer les frais, je suis vraiment embêté. Si je profite de la simplicité, J'aime beaucoup la nature et j'ai marché dans la forêt, j'ai marché dans la montagne. Manger un sandwich au bord du torrent avec un bout de fromage, un bout de pain, une tranche de saucisson, ça ne coûte pas grand-chose. Je n'ai pas besoin d'aller au Club Med dans un 5 étoiles sous les cocotiers pour être heureux. Si je suis dans la nature et que j'en profite... C'est tout à fait à ma portée. Respirer, c'est gratuit. Je peux créer un état de grâce en sachant respirer amplement et profondément, en chantant à tue-tête, en me réjouissant avec d'autres. Ça ne coûte rien. Et donc, profiter de la vie, ce n'est pas accumuler. On a une logique de propriétaire. Marshall McLuhan, qui a écrit « Pieds nus sur la terre sacrée » , raconte l'histoire d'un dialogue entre un chef indien au XVIIIe siècle et un officier français. Et le chef indien lui dit, on n'a pas construit de temple, on n'a pas de ruines à faire visiter. Et chez les Amérindiens, il y a un respect de la nature extrêmement important, mais comme beaucoup de peuples premiers. Et donc, aller vers la simplicité, vivre simplement, se nourrir simplement avec des choses de qualité, avec des circuits courts. Il y a même des gens qui construisent maintenant des quartiers avec des maisons écologiques. avec des jardins partagés, avec des installations collectives.

  • Speaker #1

    Des habitats intergénérationnels.

  • Speaker #0

    Absolument. Il y a des communes qui rachètent des immeubles pour faire des habitats intergénérationnels ou des maisons partagées comme les Baba Yaga. C'est formidable. Ça remet de la vie dans les villages, ça crée des relations nouvelles ou même des expériences chouettes entre les crèches, les jardins d'enfants et les EHPAD où les enfants se re... d'interagir avec des gens disponibles et les personnes âgées sont heureuses de voir des bambins autour d'eux avec cette joie qui manifeste chez les petits.

  • Speaker #1

    Je pense que c'est un beau message à transmettre et à cultiver et à propager. Ce mouvement citoyen qui doit se remettre en marche et en local, parce que j'ai le sentiment aussi qu'on attend beaucoup de choses parfois, des politiques ou d'institutions ou d'entreprises et finalement... ensemble, chacun déjà, si on prend le temps nécessaire pour se reconnecter à soi, au vivant.

  • Speaker #0

    Alors, ce qui est vraiment important, je pense, c'est des projets collectifs, de façon à faire des expériences qui soient un peu plus vastes. Il y a beaucoup de paysans qui ont créé des boutiques où ils vont vendre leurs propres produits en circuit court. C'est le cas en Normandie, mais Intermarché a plus de 20% des produits qui viennent du circuit court. Donc, c'est vraiment... Retrouver la solidarité, la proximité. Et tout seul, ce n'est pas facile de faire quelque chose de cohérent. Alors qu'en collectif, on peut vraiment améliorer les choses. Je serai avec Sylvie à cette rencontre du vieillissement, la gaguette, le 24. C'est une démarche associative communautaire qui permet beaucoup de choses.

  • Speaker #1

    Le pouvoir... Je me suis donné un mot en 2025. Unis. C'est mon mot de l'année.

  • Speaker #0

    Alors, au plan du développement personnel, moi j'invite les gens, et j'ai écrit un chapitre dans La liberté de s'accomplir, sur la liberté d'être unique. Chacun est complètement particulier dans son histoire, dans sa façon d'être, etc. Mais on peut être unique d'un côté et uni de l'autre. Avec un projet commun, des valeurs communes et le vivre ensemble, c'est essentiel. Complètement. Et donc, le dialogue avec les gens différents, c'est justement s'enrichir, comme Montaigne qui disait « Limer sa cervelle contre celle d'autrui » . On s'enrichit de nos différences.

  • Speaker #1

    Tellement important, cette richesse. Vous avez parlé de projets à l'instant. Dans le podcast, moi, j'aime bien aussi que les invités parlent de leurs projets, de leurs rêves et de leurs désirs. Vous, Edouard, ce serait quoi vos rêves et vos désirs ?

  • Speaker #0

    Alors, au travers des podcasts, je me suis demandé pourquoi j'avais accepté autant d'interviews ces deux dernières années. J'ai le sentiment qu'il faut que je synthétise encore plus toute ma richesse d'expérience pour la transmettre. Et je voudrais toucher en l'espace de deux, trois ans autant de gens que j'en ai touché pendant toute ma vie. Et le podcast, c'est une bonne manière. Il y a un garçon qui m'a interviewé, qui est venu de Marseille et qui l'a mis sur les réseaux sociaux. Il a eu 200 000 vues sur Instagram avec l'interview qu'on a pu faire ensemble. Donc c'est une façon de répandre des messages sans me soucier simplement de faire des conférences ou d'écrire des livres. Donc c'est vraiment un de mes buts. Et puis, dans les filières professionnelles, j'espère que je vais pouvoir inspirer les jeunes professionnels pour donner du sens à leur exercice et avoir une approche plus systémique, plus humaine, plus... plus riche, plus porteuse d'épanouissement pour leurs interlocuteurs.

  • Speaker #1

    Et pour vous ? Vous avez des choses pour vous ? Vous avez appris deux langues à 60 et 70. Est-ce qu'il y a d'autres projets ?

  • Speaker #0

    Je vais me mettre à l'espagnol cette année. Mon copain avec qui je vais partir en balade est parfaitement bilingue espagnol, donc je compte sur lui pour me faire progresser. Je veux recommencer à voyager tant que je suis encore en bon état physique, continuer à me cultiver et rencontrer du monde. Ça suffit à mon bonheur.

  • Speaker #1

    Vous avez les yeux qui pétillent, on en parlait tout à l'heure, vous l'avez là. Je ne sais pas quel voyage vous avez en tête, mais j'ai vu des choses passer dans votre regard. C'est bientôt le mot de la fin. Il y a un mot qui est important, c'est le nom du podcast, ça s'appelle Encore. Qu'est-ce que vous mettez derrière ce mot ?

  • Speaker #0

    Alors, j'y mettrais un trait d'union. Au lieu d'écrire en un seul mot, j'écrirais en deux mots.

  • Speaker #1

    Comme Cédric Lapiche.

  • Speaker #0

    En, trait d'union, encore, C-O-R-P-S. Et je vous inviterai à habiter vos corps dans leur richesse complexe. Il y a une alchimie du corps, l'alchimie chinoise, une alchimie corporelle qui vient de la tradition sibérienne. Et donc on va du corps grossier au corps subtil, et on va du corps physique au corps énergétique, puis au corps spirituel. Et il y a une merveilleuse professeure de chinois qui a publié un certain nombre d'ouvrages, Catherine Despeux. Et je vous recommande son livre sur les pratiques des femmes taoïstes, qui explique très bien et très simplement les modes de méditation pour transformer cette conscience fine du corps. Et donc, aller vers la lumière, Mircea Eliade, l'anthropologue, a écrit Mephistopheles et l'Androgyne sur les expériences lumineuses qu'on peut faire, quelle que soit la spiritualité qui soit la nôtre. Cette ouverture du cœur, cette ouverture de la conscience qui va faire que... On se rapproche de la dimension angélique qu'on trouve merveilleusement dans le chant, par exemple. Il y a l'écran de l'incantatrice dont la voix est sublime. Elle nous emmène dans cette direction angélique. Ça permet de partir joyeux à la fin d'une longue vie.

  • Speaker #1

    Merci. Merci, Edouard, pour ce moment de connivence, de joie. vraiment du bien d'entendre des messages d'espoir et d'avoir le témoignage d'un homme à 80 ans. Je redis l'âge parce que ça fait partie aussi du jeu du podcast, justement, de donner envie aux gens de se dire « Ah ouais, quand même, j'aimerais bien parler comme Edouard à 80 ans, j'aimerais bien raconter ce que j'ai fait, j'aimerais bien raconter mes projets. » Et ce que vous venez de nous transmettre au micro, c'est ça. C'est donner de l'espoir. donner envie aux gens aussi de se connecter aux autres, les uns aux autres, d'avoir cette curiosité de l'autre, donner envie aussi de se reconnecter à soi pour cultiver sa joie intérieure, on en a besoin en ce moment. Donc c'est des beaux cadeaux que vous nous avez fait.

  • Speaker #0

    Je recommande vraiment aux personnes âgées de prendre le temps de raconter leur histoire, à leur famille, à leurs proches, parce qu'ils ont un partage de leur regard sur le monde qui est très précieux. Et j'ai une amie qui est prof de cinéma, qui a formé plein de... technicien au Mali, entre autres pour les télévisions du Mali, qui fait beaucoup de films documentaires, et qui aujourd'hui fait des vidéos biographiques. Il y a des gens qui vont se faire aider par quelqu'un qui va aider à écrire leur histoire, que ce soit par écrit, en audio, en visio. C'est très important de la raconter, parce que j'ai quatre petites filles, elles sont très heureuses d'apprendre des choses sur ma compréhension de l'histoire familiale. Donc c'est un beau cadeau à faire à sa famille, à ses proches, voire à ses amis, de prendre le temps de...

  • Speaker #1

    Mais c'est réciproque. J'invite aussi à tous les auditeurs, auditrices, peu importe leur âge, à poser des questions parce que parfois on n'ose pas. Et la naissance de Encore, je l'avais raconté dans un épisode, c'est quelques temps avant que ma dernière grand-mère encore en vie décède, je suis allée l'interviewer. Et j'ai eu un moment... que j'avais... Je ne l'ai dit à personne. Je n'ai ni dit à mes cousins, cousines, ni dit à mon père qui venait de perdre sa mère. Je lui ai dit après, je lui ai offert ce cadeau, dire si un jour tu veux entendre à nouveau le rire de ta mère, je l'ai. Et ce moment-là avec elle, il est gravé à vie parce que j'ai osé. Je savais aussi qu'elle allait mourir. Et j'ai osé lui dire, mamie, il faut absolument qu'on se pose et que tu me racontes des choses que je ne sais pas de toi. Et je suis tellement heureuse de l'avoir fait parce que c'est jamais trop toi. Trop tard. On ne peut pas avoir des regrets et l'audio a une puissance d'échange au-delà de la vidéo, qui est un super média. Mais la puissance de l'audio, de réécouter la voix de quelqu'un une fois qu'il est parti, cette personne, ou juste se poser et creuser des choses, c'est des cadeaux merveilleux à se faire. Donc on invite tout le monde à se poser des questions, à creuser et à partager, parce que c'est ça finalement la vie et être humain, c'est ça. Ça vous va comme conclusion, pas Edouard ?

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #1

    Merci encore d'être venu.

  • Speaker #0

    Merci de votre accueil.

  • Speaker #1

    D'avoir renommé le podcast encore en deux mots. On ne me l'avait pas encore donné celle-là, je l'attendais. Et je vous dis à très bientôt. Merci Edouard. Merci d'avoir écouté cet épisode. J'espère qu'il vous a plu. Si c'est le cas, gratifiez-le d'un maximum d'étoiles sur votre plateforme d'écoute préférée. Et surtout, parlez-en autour de vous. Et pour suivre les coulisses, retrouvez Encore sur Instagram. À bientôt !

Description

Si vous cherchez à suspendre le temps, à le regarder autrement, laissez tomber l’urgence, enfilez vos écouteurs, et plongez dans la voix profonde et vivifiante d’un homme qui traverse la vie avec curiosité, intensité et humilité : Édouard.

À 80 ans, il n’a rien perdu de sa flamme – ni de sa capacité à nous faire réfléchir, sentir, respirer autrement.

Dans cet épisode, nous parlerons :

  • De la vieillesse comme art de vivre, ou plutôt, comme art de bien vieillir. Une discipline quotidienne, ancrée dans le corps, le souffle, le vivant.

  • De la respiration consciente, du Tai Chi, de l’éveil par le silence… et de ce que la Chine, le Japon ou l’Inde ont à nous apprendre pour habiter pleinement nos vies.

  • De sagesse, de Montaigne à Mircea Eliade, en passant par Jeanne Fonda et Pamela Anderson – oui, vraiment.

  • De ce que veut dire habiter le monde avec les autres, en respectant la lenteur, la différence, les âges, les arbres, etc

Et puis nous parlerons aussi de ce mot, “Encore”, qu’il réinvente en deux : En-corps. Parce qu’Édouard ne parle jamais seulement avec des idées, mais toujours avec son être tout entier.


Pour en savoir plus sur Édouard Stacke :
• Des métiers multiples: kiné, ostéopathe, thérapeute, coach de dirigeants et dirigeant d'une école de formation à la respiration

• Pionnier dans le coaching
• Formateur, voyageur, chercheur en humanité
• Auteur de La liberté de s’accomplir
• Et amoureux invétéré… des arbres, des jardins zen, des chants à pleine voix et des projets jusqu’à 100 ans


Un épisode lumineux, exigeant, sensible — à écouter sans hâte, avec tout votre cœur et vos deux oreilles.

Bonne écoute ✨


Et partagez ce moment précieux avec celles et ceux que vous aimez.

Pour suivre le podcast, c’est par ici, sur Instagram


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et tous, bienvenue dans ce nouvel épisode et avant de rencontrer Edouard, je vous donne quelques mots sur Vivagen, un événement dédié à l'intergénérationnel qui aura lieu très bientôt. Bonne écoute ! Et si la diversité des âges devenait votre plus grand atout, que vous soyez DRH, manager, responsable RSE, Vivagen est fait pour vous. On vous donne rendez-vous le 29 avril 2025 pour une journée unique où nous ferons de la collaboration intergénérationnelle un véritable levier de performance. Bonjour Edouard.

  • Speaker #1

    Bonjour Claire.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté mon invitation pour venir au micro d'Encore.

  • Speaker #1

    Bienvenue, j'en suis ravi.

  • Speaker #0

    On va passer un moment ensemble, et je vais être tout à fait franche avec les auditeurs qui écouteront cet épisode. On a passé un moment avec Edouard avant l'enregistrement, et c'est un moment qui m'a bouleversée. Donc si vous entendez un peu d'émotion dans ma voix, c'est normal, puisqu'on vient de brancher les micros après ce moment de partage intense. Et je profite de remercier à nouveau Edouard. Introduction faite, je vais vous demander, comme à chaque invité, de vous présenter de la manière dont vous souhaitez. Voilà, qui est Edouard en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Alors, en quelques mots, c'est toujours difficile puisque j'ai une longue vie professionnelle, mais j'ai été un soignant pendant 20 ans, 10 ans comme kiné, ostéopathe, acupuncteur, sophrologue, prof de tai chi, puis 10 ans comme psychothérapeute et formateur de psychothérapeute, j'ai monté un institut en France. et à Montréal pour former des psychothérapeutes. Et j'en ai formé 3000 avec un collectif de psychiatres. Et les 30 années suivantes, j'ai été consultant en management dans les entreprises françaises et internationales. Et j'ai développé le facteur humain et entre autres, la manière de travailler en équipe performante. Et comme je suis assez sportif, j'ai utilisé la pédagogie par l'action. pour impliquer les gens dans leur comportement et pas simplement dans leur discours. Il y a un proverbe corse que j'adore qui dit « Entre le dire et le faire, il y a la mer » . Il y a longtemps que je ne crois plus ce que les gens me disent, je regarde qui ils sont et ce qu'ils font. Et s'ils sont cohérents, ils font ce qu'ils disent et disent ce qu'ils font. Voilà, donc j'ai développé la culture d'entreprise sur le facteur humain.

  • Speaker #0

    Et le faire, l'action. Est-ce que vous êtes un homme d'action ? Plus qu'un homme de raison.

  • Speaker #1

    Alors, je vais vous le dire avec une pirouette. Quand j'étais jeune, je me disais, entre nomade et sédentaire, je préfère être sémade parce qu'en aucun cas je ne pourrais être notaire. Voilà, donc je suis un aventurier du facteur humain, tourné vers l'action et l'expérimentation, la découverte, le voyage. la rencontre avec les cultures, mais aussi un homme de réflexion. Je combine la réflexion profonde sur l'être humain, sur les cultures, et je fais ce va-et-vient permanent.

  • Speaker #0

    On va aborder tous ces thèmes. Je pense qu'on n'aura pas le temps de rentrer dans ni toute votre vie, ni surtout, parce que vous connaissez l'angle du podcast, c'est évoquer la vieillesse avec un angle du présent et du futur. Donc on va parler aussi de vos projets actuels et ceux à venir. Forcément ça va être teinté de votre expérience. Est-ce que vous êtes ok de nous partager votre âge ?

  • Speaker #1

    J'ai 80 ans depuis le mois de septembre 2024. D'accord.

  • Speaker #0

    Est-ce que l'âge, ce chiffre, c'est important pour vous ?

  • Speaker #1

    Alors, la Chine traditionnelle est une gérontocratie. Et quand les gens vieillissent, on considère qu'ils sont plus sages que les gens plus jeunes parce qu'ils ont un cumul d'expérience. C'est le cas en Afrique. On respecte les personnes âgées. Ma mère a rendu visite à ma jeune sœur qui a vécu à Dakar et elle était surprise de la bienveillance de tous les voisins qui étaient adorables avec elle parce que c'était une vieille dame, simplement parce qu'elle bénéficiait du respect qu'on voue aux personnes âgées. Nous, on s'est dégradés. Il y a eu ce respect des personnes âgées, de leur expérience, mais au niveau de l'entreprise... On a poussé les gens vers la sortie à partir de 55 ans en considérant qu'ils étaient obsolètes, ce qui est complètement stupide. Quand on voit Henri Salvador ou Charles Azdawour qui à 92 ans sont en concert avec 3000, 5000 spectateurs, on voit bien qu'il y a de la ressource. Et puis il y a les auteurs, il y a les comédiens. Je me suis occupé de Madeleine Rollo de Jean-Hubert Barrault, elle a joué jusqu'à 88 ans en scène. C'est nombreux les artistes qui restent actifs à un âge avancé. Il est temps de rappeler que les personnes âgées ont une richesse à apporter dans le dialogue intergénération, avec le recul, la compréhension du temps long, la vision plus large, pour peu qu'ils ne soient pas radotés sur la nostalgie de leur jeunesse.

  • Speaker #0

    Comment vous abordez justement le fait de vieillir ? C'est une question centrale dans votre vie. Est-ce que ça a été une question centrale de vous dire comment je vais faire en sorte de bien vieillir ou d'être l'homme à 80 ou 90 ans que je désire être ?

  • Speaker #1

    Alors, être ce que je désire être, c'est depuis mon enfance que je m'y emploie. On commence à vieillir à la naissance. Et donc, le vieillissement est un processus naturel. Mais par exemple, pendant mes études... J'ai appris que les neurones, on les a au départ, mais après ils se détruisent, mais ils ne se renouvellent pas. Or, depuis quelques années, on sait qu'on peut stimuler le renouvellement des neurones et qu'on continue à fabriquer, même jusqu'à 50 ans, des neurones, à condition d'avoir l'esprit actif. Et donc, le potentiel de récupération, c'est comme avec l'épigénétique, on sait que le mode de vie peut changer même la trame génétique. et qu'on peut améliorer son capital santé, comme on le fait avec la médecine chinoise, la médecine indienne, ayurvédique, en ayant une manière de vivre en équilibre. Et en Chine, on appelle ça Yangsheng, l'art de vieillir en bonne santé. Mon premier voyage en Chine en 1981, je vois des hommes de 80 ans, à l'âge que j'ai maintenant, avec le pied sur un arbre, en train de faire le grand écart. Et moi, je m'occupais de danseuse professionnelle, classique, moderne. Donc pour une danseuse, c'est normal de faire le grand écart. Il y a 80 ans, normalement, il est perclu de rhumatisme, il ne peut pas faire ça. Et souvent, ils ont commencé à travailler à 50 ans pour travailler en souplesse, pour entretenir la flexibilité. Et donc, ça m'a donné confiance et toute ma vie, j'ai pris soin de mon corps pour vivre de manière équilibrée. J'ai beaucoup picolé quand j'étais jeune, entre 15 et 25, pour faire la fête. Et puis entre 25 et 45, j'ai bu un verre de vin par semaine. Je ne fumais pas, pas de café, mais je faisais du sport plusieurs heures par semaine. J'ai couru mon dernier marathon, j'avais 64 ans. Et donc, le vieillissement, il est normal. Je commence à avoir la vue qui baisse, j'ai été opéré de la cataracte, j'ai des aides auditives. Il y a les signes de vieillissement qui m'affectent. Mais j'ai une énergie qui reste assez importante et une agilité physique et mentale parce que j'ai entretenu mon corps très régulièrement. Et la clé, pour les gens qui veulent bien vieillir, en bonne santé, c'est de prendre soin d'eux. Très souvent, tous les jours, très régulièrement.

  • Speaker #0

    On est notre meilleur capital, vieillesse.

  • Speaker #1

    Voilà.

  • Speaker #0

    Vous l'avez étudiée, cette vieillesse, ou c'est finalement quelque chose qui est à côté ? Parce que là, vous en parlez comme vous avez observé dans d'autres pays, vous avez également touché à beaucoup de médecines alternatives différentes de ce qu'on peut entendre aujourd'hui en France. Vous en avez fait certaines fois votre métier. Oui. Donc vous avez creusé bien plus que Berni, mais vous avez creusé ces sujets pour en devenir expert. Justement, est-ce que la vieillesse est quelque chose ? Parce qu'on dit souvent que la prévention, notamment en France, est le parent pauvre de la santé. Comment on explique qu'aujourd'hui, on a gagné en longévité, mais pas forcément les dernières années en très bonne santé finalement ?

  • Speaker #1

    Les laboratoires pharmaceutiques exercent une pression importante sur la formation des médecins. Et les médecins sont formés d'une manière... technicienne, et ça va s'aggraver encore avec l'intelligence artificielle, à distribuer des médicaments, mais pas apprendre aux gens à bien se porter. Sur l'ensemble des généralistes, il y en a un sur deux qui se porte mal parce qu'il n'a pas appris à prendre soin de lui-même. Si vous regardez les chiffres de l'association des internes, un interne sur deux se porte très mal. Il est surexploité par les administrations des hôpitaux et travaille souvent 70-80 heures par semaine. Alors que la limite légale, c'est 55, donc il y a un non-respect de la loi par les administrations des hôpitaux. Et les études de médecine sont extrêmement intenses, les contenus sont très copieux. Mais j'ai une thèse de médecine de l'Université de Strasbourg de 2017 qui montre qu'en 8 ans, 9 ans d'études pour devenir un médecin généraliste, il n'y a que 150 heures de psychologie. Les infirmiers et les infirmières ont 4 ans, 5 ans d'études, ont 1500 heures de psychologie. Comment c'est acceptable ? que les médecins n'aient pas de formation psychologique pour pouvoir dialoguer avec leurs interlocuteurs. On ne soigne pas une maladie, on soigne une personne atteinte d'une maladie ou d'un handicap. Donc cette formation à la relation thérapeutique, elle est indispensable et elle est insuffisante dans la formation de la plupart des soignants.

  • Speaker #0

    Et ça, c'est valable pour tous les corps de métier, tous les corps de la médecine aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Par contre,

  • Speaker #1

    il y a une réaction ces dernières années, ces dix dernières années. Il y a un film fait par Catherine Bellum sur les tentatives de développer la santé intégrative, que ce soit à l'hôpital, dans des cliniques ou dans des centres de santé pluridisciplinaires. Il y a un vrai mouvement qui est en train de se produire depuis quelques années. Je serai vendredi, samedi, avec Isabelle Célestin, à un congrès de santé intégrative.

  • Speaker #0

    C'est quoi justement ce terme-là, santé intégrative ?

  • Speaker #1

    C'est avoir une approche pour rendre les personnes acteurs de leur santé et se servir aussi des médecines complémentaires. Le docteur Alain Toledano à l'Institut Raphaël a développé 40 médecines complémentaires de la sophrologie à leur thérapie pour aider le traitement des cancers avec l'approche classique du traitement des cancers, mais mobiliser toutes les ressources des patients pour aller plus loin. Il y aura Catherine Cornibert, la présidente de l'association Soins pour soignants, qui viendra parler de ce qu'elle fait. On a 200 000 soignants qui ont démissionné de leur job, tellement avec la fatigue du Covid et de l'afflux de malades qui ont débordé les hôpitaux. Les budgets n'ont pas suivi et on a fermé des lits d'hôpitaux parce qu'on n'a plus d'infirmières pour s'occuper des malades. Donc notre système de santé, il est défaillant. Et on ne forme pas assez bien les soignants et on n'investit pas assez les fonds nécessaires. On ne valide pas assez la bonne gestion des établissements pour avoir les moyens de soigner les gens gravement malades. Et ça passe par l'éducation à la santé pour que les gens soient beaucoup moins malades. En 60 ans d'activité, je me suis arrêté à peu près un jour tous les deux ans parce que j'avais une angine, parce que j'avais un labago, etc. Mais je ne me plains pas. 30 jours d'inactivité sur 60 ans, c'est pas mal.

  • Speaker #0

    Ça va, c'est pas la sécu qui va venir vous chercher. Voilà.

  • Speaker #1

    Mais beaucoup plus de gens pourraient se porter mieux en ayant cette hygiène de vie. Et par exemple, tout le monde sait à peu près ce qu'il faut manger pour bien se porter. La diététique s'est beaucoup développée, même dans les écoles, on fait attention. Mais la respiration consciente, par exemple, qui est gratuite, on n'apprend pas aux gens à respirer. J'ai rencontré les gens de la Fondation du Souffle, les responsables de la prévention. Ils s'occupent des pathologies à nouveau, pas de l'éducation à la santé. J'ai soigné les enfants gravement asthmatiques pour les débarrasser de leur asthme, qui sont devenus des beaux jeunes hommes en pleine forme, qui ont changé leur rapport au corps, à leur respiration, à la gestion de leurs affects, etc. Il n'y a pas que les allergies qui vont entraîner les maladies respiratoires. Il y a aussi la vie intérieure et les difficultés psychologiques. qui vont impacter la manière dont le corps s'épanouit ou pas.

  • Speaker #0

    Vous êtes un amoureux du vivant ?

  • Speaker #1

    On peut dire ça, profondément. Du vivant, parce que quand je voyage, il y a deux choses que je vais visiter. Les lieux en général de prière, les lieux où les gens se retrouvent pour pratiquer leur foi. J'aime bien voir comment ça se passe, l'atmosphère de ces lieux. Mais je visite les jardins. Je visite les plus beaux jardins. Il y a par exemple un jardin zen tout près de chez moi, le jardin albercal où j'étais hier après-midi. Mais il y a un jardin japonais tout près du musée de la Légion d'honneur à San Francisco. Il y a une ville comme Kyoto où il y a 2000 jardins auprès des 2000 temples bouddhistes. Il y a Suzhou en Chine où il y a 140 jardins de mandarins qui sont absolument splendides. J'adore les forêts, j'adore les forêts, les vieux arbres.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que ça nous apprend d'observer davantage le vivant ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est une immersion dans la complexité du vivant. Quand j'étais adolescent, j'avais un petit bateau, j'allais à la pêche pendant l'été. Et donc, j'observais la rivière, j'observais les poissons, j'observais le courant. Je savais qu'il y avait l'invisible dans la nature et je cherchais à le capter, mais ce n'était pas évident. Par contre, l'immersion dans le silence, l'immersion dans le cycle des saisons, ça me touche énormément. Sur mon bateau, j'ai le parc de Saint-Cloud en face de chez moi, je ne m'ennuie jamais de voir les variations de la lumière du matin au soir, les variations du ciel, les variations de la végétation sur les arbres, au printemps la couleur des arbres et puis l'automne. Pour moi, c'est un spectacle infini et magnifique. Et ça me permet de me détacher de mon activisme passionné pour être là et jouir de l'instant présent.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous raconter un petit peu votre quotidien à l'aune de vos 80 ans ? Comment vous... C'est quoi votre moteur ? Parce que vous êtes amoureux du vivant, vous vous exercez encore, vous avez mille métiers dans votre vie, vous avez voyagé partout dans le monde, vous avez écrit des livres, on va aborder notamment un livre, La liberté de s'accomplir, tout à l'heure, qui va être peut-être aussi un de nos guides pour l'entretien. Mais c'est quoi votre moteur au quotidien ?

  • Speaker #1

    J'aime les gens. Et j'aime vivre intensément, même dans des registres très sobres. Hier, j'ai rencontré un jeune musicien que j'écoutais chanter et jouer de la guitare. Il avait une voix très mélodieuse, une belle composition. Il y a des moments privilégiés où il y a quelque chose d'intense et de beau qui est à observer. Quelquefois, c'est lors d'un voyage où je vais découvrir des nouvelles choses, mais je prends le temps de la réflexion. C'est-à-dire que j'ai dû me méfier de mon activisme passionné. Je prends des temps pour méditer, pour m'étirer, pour lire, pour réfléchir. Je prends le temps de rencontrer beaucoup de gens. J'ai beaucoup de jeunes professionnels qui viennent me voir pour bénéficier de mon regard sur leur propre projet. Je fais partie de nombreuses associations. Je vais partager avec des collègues, des experts sur des thématiques. J'ai monté avec des amis une soirée sur les spiritualités, les valeurs qu'elles font circuler entre les générations, aussi sur la place de la diversité, de l'inclusion. La société française devient très exclusive et très sauvage. Quand je vois les enfants qui vont poignarder un autre qu'on disciple à l'école, quand je vois cette sauvagerie dans la société, même chez les plus jeunes, je trouve ça extrêmement inquiétant. Et il y a des réflexes de peur. et d'hostilité où on trouve beaucoup de boucs émissaires. On ne sait plus vivre ensemble en paix. On a besoin de retrouver la connexion avec le vivre ensemble et la tolérance et la solidarité largement.

  • Speaker #0

    Est-ce que justement la crainte que partagent beaucoup de gens par rapport au fait de vieillir, parce qu'on se prend aussi beaucoup de dictates sur comment vieillir, il y a des personnes qui ont peur de la vieillesse, il y a des personnes qui prennent des crèmes anti-rides, anti-âge. Est-ce que ça ne favorise pas justement, d'un certain point, cette exclusion et ce mauvais traitement aussi qu'on peut avoir sur les personnes âgées ou les personnes qui vieillissent autour de nous ?

  • Speaker #1

    Alors la peur de la mort, souvent, elle va amener les gens à se ratatiner et à être de plus en plus anxieux. Sauver les apparences, et en particulier pour les femmes, j'ai une amie psychologue et psychosociologue qui s'appelle Danielle Rapoport, qui a écrit un joli petit livre qui s'appelle « L'aventure au coin de la ride » .

  • Speaker #0

    J'aime beaucoup le terme.

  • Speaker #1

    Voilà, elle écrit très bien et elle parle entre autres de la peur des femmes de vieillir et de changer d'apparence, etc. Moins de mes modèles féminins, c'est Jeanne Fonda, qui était une poupée Barbie splendide à 20 ans, 30 ans, quand elle jouait Barbarella, qui était la femme de Vadim, entre autres, mais qui, avec le yoga et le sport, à 85 ans passés, elle a développé une énergie de sagesse, d'ouverture sur le monde et d'humanité extraordinaire. Elle aime le genre humain et elle se bat pour la liberté des femmes et pour accepter la vie qui passe malgré le vieillissement. Accepter de changer d'image, Pamela Anderson qui choisit de ne plus se maquiller, c'est une manière de dire j'accepte de vieillir. C'est vrai pour l'actrice italienne dont le nom va me revenir. Et donc accepter le vieillissement, c'est de la sagesse. Ça ne veut pas dire le subir. C'est-à-dire que si je m'entretiens en ayant un équilibre de vie, en restant actif, en faisant marcher mes neurones, je recommande souvent aux gens qui prennent de l'âge de rester curieux et de, par exemple, de continuer à voyager ou d'être dans la vie associative pour aller participer à des activités artistiques, culturelles, etc. Moi, je me suis mis aux Russes à 60 ans pour entretenir ma mémoire qui commençait à fléchir comme tout le monde. Je n'ai pas retenu beaucoup, mais mes 80 heures de Russes m'ont fait travailler mes neurones. Il y a 65 ans, j'ai pris 60 heures de cours de chinois. Je n'ai pas retenu beaucoup, mais ma mémoire marche beaucoup mieux.

  • Speaker #0

    C'est des langues faciles quand même en plus.

  • Speaker #1

    Et aujourd'hui, j'ai une mémoire qui reste en bon état parce que je l'entretiens. J'organise des lectures à voix haute de poésie, par exemple, où je fais chanter les gens pour qu'ils mémorisent justement les paroles en s'amusant. C'est un jeu d'entretenir ses capacités. Et si on y prend plaisir... Ce n'est pas une contrainte, ce n'est pas fascinant. C'est cette peur de changer d'image qui est le problème, ce n'est pas le vieillissement en lui-même.

  • Speaker #0

    J'aimerais bien qu'on revienne sur certains concepts que vous avez beaucoup développés dans le livre La liberté de s'accomplir. Vous y parlez beaucoup de transmission dans son arbre généalogique, par exemple, mais également de transmission du passé, un peu plus archaïque, de choses qui nous seraient transmises dans notre ADN. C'est intéressant d'avoir ce point justement sur notre regard et comment on évolue dans ce monde et comment on est au monde, chacun, chacun et chacune. Est-ce que vous pouvez nous parler un petit peu de ce point-là ?

  • Speaker #1

    Alors, je vais prendre un premier exemple qui est celui des compagnons du Tour de France. Mais ils n'apprennent pas simplement un merveilleux métier, que ce soit la fironnerie, la menuiserie, la sculpture ou autre chose. Ils apprennent une attitude éthique, une attitude morale, pour être fiers de ce qu'ils font, de leur pouvoir faire, mais humbles dans le fait de contribuer à faire des choses belles. Et donc transmettre des valeurs, c'est essentiel. Et c'est ce qui se passait entre les générations, entre fois. Et les jeunes sont coupés de la relation avec leurs grands-parents. On vit par tranches d'âge. Et moi, j'ai dansé avec les grands-mères dans mon village. Aujourd'hui, on va en boîte de nuit et on va dans une boîte avec des gens de sa génération. Mais il n'y a plus de partage intergénérationnel à part les mariages, les enterrements.

  • Speaker #0

    Qui sont des réunions.

  • Speaker #1

    Les baptêmes.

  • Speaker #0

    Comment on peut retrouver aujourd'hui ? Parce qu'on l'a perdu en chemin pour plein de raisons et on n'aurait pas assez le temps d'un épisode pour expliquer pourquoi on a perdu ça. Comment on peut le retrouver ? Parce que finalement, faisons un peu de prospective. Qu'est-ce qu'on peut faire aujourd'hui pour retrouver ce qui est d'ailleurs possible ? Je vais vous donner un exemple de compagnonnage. Aujourd'hui, il y a des choses qui existent et qui sont là sous nos yeux. Qu'est-ce qu'on peut faire pour que la société, justement, on fasse un peu péter ces silos où on a mis les gens dedans ?

  • Speaker #1

    Alors, je vais vous donner deux, trois pistes, dont le vivre ensemble dans les entreprises. Dans l'entreprise, ça s'appelle l'empowerment. Quand on s'intéresse à la capacité d'évoluer de chaque personne, c'est ce que chaque salarié a comme motivation première. Est-ce que je peux évoluer dans mon travail au fil de mon temps de participation à une entreprise ? Est-ce que je peux continuer à apprendre, prendre des responsabilités ? L'argent, c'est que la troisième source de motivation. La deuxième, c'est le vivre ensemble. Si je m'entends bien avec mes collègues, je suis content d'aller bosser le matin. Parce que je suis avec des gens que j'apprécie, avec qui on s'entend bien. Et donc quand on développe une dynamique de transformation d'un collectif, et qu'on donne à chacun sa chance, la censure sociale peut continuer à fonctionner, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Vous n'avez que 20% des enfants d'ouvriers qui terminent leurs études secondaires. Et donc, à l'époque où c'était Mitterrand, il y avait pratiquement 200 ou 300 députés à l'Assemblée qui étaient des enseignants. Quand c'est la droite qui est au pouvoir, c'est deux ou trois cents médecins, avocats, professions libérales. Mais ce n'est pas donner sa chance à tout le monde. Le slogan « liberté, égalité, fraternité » , il est loin d'être mis en pratique dans la réalité. Donc donner sa chance à tout le monde, retrouver une manière de partager, valoriser les contributions de chacun, c'est un état d'esprit qu'on retrouve dans beaucoup de boîtes familiales comme Michelin, le groupe Bouygues, le groupe Bongrain. Il y a un certain nombre de boîtes où on n'est pas dans l'urgence de faire du fric tous les trois mois, mais on donne leur chance pour que les gens évoluent. Pérennise. C'est en développant le capital humain que l'entreprise crée de la richesse.

  • Speaker #0

    Et quand on sort de l'entreprise et qu'on va vers la société, cette notion aussi de... Parce qu'au micro, j'ai beaucoup de personnes aussi de plus de 70 et 80 qui me disent au moment de la retraite, j'ai perdu mon sentiment d'utilité, je me suis sentie écartée de la société.

  • Speaker #1

    Alors, j'ai mis du temps ça. Alors, c'est une forme de mort sociale. Si en plus, je m'y suis pris un peu tard et j'achète une maison dans la Creuse où je ne connais personne, je vais m'isoler doublement. À l'inverse, il y a beaucoup de gens qui, quand ils prennent leur retraite, s'investissent dans la vie associative. Que ça soit une association culturelle, sportive, peu importe, mais créez du lien et trouvez les choses qui vous plaisent. J'ai chanté deux ans dans une chorale de gospel avec ma femme et ma fille à Bouloï. il y avait 40... 50 personnes. Les plus anciens étaient très accueillants pour les nouveaux et c'était extrêmement solidaire mais très joyeux. Chanter ensemble, c'est magnifique. On se réjouit, on se ressource, on charge les batteries et c'est un bonheur. Donc, participer à des échanges, provoquer des échanges, rencontrer du monde, ne rester pas seul.

  • Speaker #0

    Ça c'est important. Et être curieux. Ne pas être seul, être curieux. Mais ça c'est valable pour tous les âges.

  • Speaker #1

    Oui, mais la grande richesse du vieillissement et de la retraite, c'est qu'on a du temps. Souvent, quand on est actif et qu'on a une famille à élever ou un boulot assuré, on a quelques petits moments, mais on a beaucoup moins de temps. Les grandes vacances, c'est quand même chouette pour faire des choses qui nous plaisent et qui nous font du bien.

  • Speaker #0

    Oui, c'est sûr. Quel est votre regard, vous, que vous portez sur votre propre vieillesse ? Est-ce que déjà, vous êtes l'homme à 80 ans ? que vous avez toujours projeté être.

  • Speaker #1

    Alors, je ne savais pas que j'allais aller si loin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    À 20 ans, j'avais un rêve, je voulais devenir un soignant. À 16 ans, je rêvais de devenir psychanalyste, puis à 40 ans, j'étais psychanalyste reichien. Et donc, j'ai atteint mes objectifs de 20 ans dès la quarantaine. J'ai dû trouver des nouveaux objectifs. Mais étant un fils d'immigré, je n'aurais jamais imaginé qu'à 40 ans, j'allais coacher les PLG du CAC 40. C'est ma manière d'approfondir le facteur humain qui fait qu'on m'a sollicité pour accompagner et faire progresser des gens avec beaucoup de pouvoir. J'ai appris à le faire, je sais le faire, je le fais plutôt bien et ça m'a amené dans des chemins complètement nouveaux. Je n'aurais jamais imaginé aller bosser dans 30 pays pour amener cette dynamique d'équipe performante dans des grands groupes. Donc c'était assez amusant. Mon père est mort à 70 ans, il a travaillé depuis l'âge de 7 ans. Et il a travaillé très dur, donc 15 ans comme envoyé agricole, mais il a travaillé toute sa vie, il n'a jamais pris de vacances. Et comme il fumait, comme il buvait, il jouait aux cartes, son corps a été usé. Et ma mère est décédée à 80 ans. Alors que moi je me disais, je devrais pouvoir aller jusqu'à 90, j'ai une vie plus équilibrée, moins dure. Puis un jour j'étais en République tchèque. car le vivarique est une station thermale avec des clients tchèques. Je leur fais faire une petite expérience dans la forêt, de connexion avec les arbres, etc. Et puis ils étaient en train de méditer, chacun avec leur arbre, et moi avec le mien, avec un beau chêne de 2-3 siècles. Et puis je m'interroge sur ma durée de vie. Ce qui m'importe, c'est de vieillir en bonne santé. Le jour où je ne serai plus tout à fait en bonne santé, je suis prêt à partir, même à interrompre mon parcours. Mais ce jour-là... Avec ce beau chêne, je me suis dit, je m'étais donné une limite de 90, mais au fond, si je suis en bon état, je peux aller jusqu'à 100. Quand je vois Edgar Morin, à 103, 104 ans, qui fait encore des émissions de télévision, il n'y a pas de problème, ça me plairait bien. Il y a un numéro spécial du Point sur les centenaires, et les gens de 100, 102 ans qui sont en bonne santé, c'est parce qu'ils restent tactiques. Soit professionnellement, il y a d'anciens avocats, des écrivains, etc. Soit parce qu'ils bougent physiquement ou bien les deux. Donc, c'est moins l'âge que le fait de vivre le plus longtemps possible en bon état et en prenant plaisir. Il y a un écologiste professionnel qui avait fait une étude sur l'espérance de vie des salariés de la SNCF. Les cheminots qui, depuis l'âge de 16 ans, posent les traverses sur les voies. et travaillent par tous les temps, ils prenaient leur retraite à 55 ans, la plupart mourraient dans les 6 mois qui suivent leur départ en retraite. Ils ont tellement travaillé dur pendant 40 ans qu'ils se sont usés. A l'inverse, les professions libérales qui disposent du choix de leur mode de vie, comme les avocats, les médecins, ont une espérance de vie 5 ans supérieure aux salariés. Les gens qui ont des hobbies, parce qu'ils ont la liberté de choix. Donc ça pèse beaucoup sur la qualité de vie. Les gens qui ont des hobbies, qui pratiquent des activités physiques et qui n'ont pas d'addiction, qui boivent très peu, qui ne fument pas et qui font un peu d'activités physiques, ils ont cinq ans d'espérance de vie supplémentaire. Donc ce sont vraiment des chiffres importants pour les gens qui veulent vieillir en bon état. Prenez soin de vous et ne vous isolez pas, ne vous repliez pas sur vous-même.

  • Speaker #0

    Et j'ai envie de rajouter aussi, apprenez à bien respirer.

  • Speaker #1

    Ça, c'est ce que l'Asie m'a appris.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on peut en parler un peu, parce que je trouve ça passionnant.

  • Speaker #1

    Avec grand plaisir. Mon intérêt pour la respiration vient de mon adolescence, où j'ai appris à nager tardivement. Mais dès l'âge de 16 ans, je me suis amusé à nager sous l'eau. Et donc j'ai découvert qu'en ravalant ma salive, je pouvais nager quelques mètres de plus. Et donc j'ai appris à nager en apnée et j'arrivais à faire 50 mètres sous l'eau. Quand je suis allé au Japon, j'ai fait pas mal d'apnée en Polynésie aussi, avec les plus pêcheurs. Mais quand je suis allé au Japon méditer avec les moines, j'ai découvert que...

  • Speaker #0

    La spiritualité bouddhiste, c'est de prendre conscience de son corps, prendre conscience de sa respiration et de laisser passer les pensées dans la tête pour ne pas s'y attacher. Donc ce n'est pas réfléchir, c'est être attentif à ce qui est là. Et quand j'ai commencé à aller en Chine ou à apprendre le Tai Chi Chuan, je me suis rendu compte que mettre l'esprit au repos et se détendre complètement, c'était une culture qui se transmettait depuis des siècles. Et moi qui étais un jeune paysan, altérophile, costaud, robuste, rentré dans la délicatesse du relâchement, du mouvement fin, etc. Ça m'a vraiment passionné. J'ai pu entraîner les danseurs professionnels à ce mouvement du Tai Chi Chuan, par exemple. J'ai trouvé ça transformateur de l'état intérieur. Et donc, toute ma vie, j'ai commencé à faire attention à ma respiration, que ce soit avec le pranayama du yoga, avec la méditation ou avec... Le sport, j'ai couru à pied pendant 25 ans, en observant chaque respiration pendant tout un marathon ou pendant chacun de mes entraînements, et la conscience de chaque geste pour être dans la décontraction. En Asie, pour le résumer, on dit que la sagesse c'est d'avoir l'esprit aiguisé, le corps détendu. Et j'invite nos auditeurs à observer leur temps. tonus musculaire pour se relâcher le plus souvent possible, le plus largement possible. C'est comme les lampes à basse consommation. Elles sont obligatoires maintenant, elles consomment moins. Et si vous respirez lentement et profondément, vous décontractez musculairement, vous gardez l'énergie pour agir quand vous en avez besoin. Et vous allez éviter la fatigue. J'ai publié un article sur fatigue et ressourcement dans une revue de coaching en mars. 2023, numéro 18 de la revue Le Coaching Pro. Et si on sait récupérer, prendre du répit, on ne va pas s'épuiser. Moi j'ai travaillé énormément, j'ai travaillé 12 heures par jour pour soigner les gens. Mais si je me relaxe, si je me détends, si je récupère, si je fais la sieste, je vais laisser mon organisme récupérer. Au Japon... on prend des bains à 38-40 degrés le soir pour se décontracter. On se lave avant de rentrer au fur et à mesure du bain japonais. Et on va rester 20-30 minutes à se détendre dans l'eau chaude pour se relâcher, exactement comme les musulmans avant la mosquée le vendredi matin vont aller au hammam. Apprendre à se détendre, les Scandinaves le font avec le sauna. C'est un état d'esprit culturel. On ne s'accorde plus le temps du répit. Avec les réseaux sociaux, les écrans, les gens ont la tête toujours absorbée, et du coup, créent une charge mentale. Alors que s'ils donnent le temps de ne rien faire très régulièrement, leur organisme récupère. Une capacité d'auto-réparation du capital santé. C'est ça. Et de l'alternance. Accepter l'alternance. Il y a le jour, il y a la nuit. Il y a l'hiver, il y a l'été. Il y a un temps pour agir et un temps pour ne rien faire.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'avec votre regard sur le monde, tout ce qui fait que vous êtes Édouard à 80 ans aujourd'hui, tout ce qui vous a façonné, tout ce qui vous façonnera demain, qu'est-ce qu'on peut dire, et j'en fais partie, aux gens qui, en 2025, sont un peu inquiets, anxieux, de ce qui nous entoure ? Alors on n'a pas la main dessus. Vous nous avez donné beaucoup de pistes aujourd'hui sur comment reprendre soi-même aussi et cultiver cette joie intérieure. se reconnecter à soi. Qu'est-ce qu'on peut concrètement faire à tous les âges, aujourd'hui, pour relever peut-être les défis qui nous entourent ?

  • Speaker #0

    Alors, Alain Juppé parlait de sobriété heureuse, et au fond, il reprenait les termes de Pierre Rabhi. Et vivre simplement, c'est une façon de se rendre la vie plus agréable. Si je ne me crois pas obligé d'accumuler, mais que je profite de ce que j'ai. Napoléon disait « Être heureux, c'est dépenser 70% de ce qu'on gagne » . Et donc si, comme beaucoup d'Américains, j'ai 4-5 quarts de crédit et je prends des emprunts à tirer l'arigot, et du coup, quand il y a une crise financière, je suis obligé de vendre ma maison parce que je ne peux plus payer les frais, je suis vraiment embêté. Si je profite de la simplicité, J'aime beaucoup la nature et j'ai marché dans la forêt, j'ai marché dans la montagne. Manger un sandwich au bord du torrent avec un bout de fromage, un bout de pain, une tranche de saucisson, ça ne coûte pas grand-chose. Je n'ai pas besoin d'aller au Club Med dans un 5 étoiles sous les cocotiers pour être heureux. Si je suis dans la nature et que j'en profite... C'est tout à fait à ma portée. Respirer, c'est gratuit. Je peux créer un état de grâce en sachant respirer amplement et profondément, en chantant à tue-tête, en me réjouissant avec d'autres. Ça ne coûte rien. Et donc, profiter de la vie, ce n'est pas accumuler. On a une logique de propriétaire. Marshall McLuhan, qui a écrit « Pieds nus sur la terre sacrée » , raconte l'histoire d'un dialogue entre un chef indien au XVIIIe siècle et un officier français. Et le chef indien lui dit, on n'a pas construit de temple, on n'a pas de ruines à faire visiter. Et chez les Amérindiens, il y a un respect de la nature extrêmement important, mais comme beaucoup de peuples premiers. Et donc, aller vers la simplicité, vivre simplement, se nourrir simplement avec des choses de qualité, avec des circuits courts. Il y a même des gens qui construisent maintenant des quartiers avec des maisons écologiques. avec des jardins partagés, avec des installations collectives.

  • Speaker #1

    Des habitats intergénérationnels.

  • Speaker #0

    Absolument. Il y a des communes qui rachètent des immeubles pour faire des habitats intergénérationnels ou des maisons partagées comme les Baba Yaga. C'est formidable. Ça remet de la vie dans les villages, ça crée des relations nouvelles ou même des expériences chouettes entre les crèches, les jardins d'enfants et les EHPAD où les enfants se re... d'interagir avec des gens disponibles et les personnes âgées sont heureuses de voir des bambins autour d'eux avec cette joie qui manifeste chez les petits.

  • Speaker #1

    Je pense que c'est un beau message à transmettre et à cultiver et à propager. Ce mouvement citoyen qui doit se remettre en marche et en local, parce que j'ai le sentiment aussi qu'on attend beaucoup de choses parfois, des politiques ou d'institutions ou d'entreprises et finalement... ensemble, chacun déjà, si on prend le temps nécessaire pour se reconnecter à soi, au vivant.

  • Speaker #0

    Alors, ce qui est vraiment important, je pense, c'est des projets collectifs, de façon à faire des expériences qui soient un peu plus vastes. Il y a beaucoup de paysans qui ont créé des boutiques où ils vont vendre leurs propres produits en circuit court. C'est le cas en Normandie, mais Intermarché a plus de 20% des produits qui viennent du circuit court. Donc, c'est vraiment... Retrouver la solidarité, la proximité. Et tout seul, ce n'est pas facile de faire quelque chose de cohérent. Alors qu'en collectif, on peut vraiment améliorer les choses. Je serai avec Sylvie à cette rencontre du vieillissement, la gaguette, le 24. C'est une démarche associative communautaire qui permet beaucoup de choses.

  • Speaker #1

    Le pouvoir... Je me suis donné un mot en 2025. Unis. C'est mon mot de l'année.

  • Speaker #0

    Alors, au plan du développement personnel, moi j'invite les gens, et j'ai écrit un chapitre dans La liberté de s'accomplir, sur la liberté d'être unique. Chacun est complètement particulier dans son histoire, dans sa façon d'être, etc. Mais on peut être unique d'un côté et uni de l'autre. Avec un projet commun, des valeurs communes et le vivre ensemble, c'est essentiel. Complètement. Et donc, le dialogue avec les gens différents, c'est justement s'enrichir, comme Montaigne qui disait « Limer sa cervelle contre celle d'autrui » . On s'enrichit de nos différences.

  • Speaker #1

    Tellement important, cette richesse. Vous avez parlé de projets à l'instant. Dans le podcast, moi, j'aime bien aussi que les invités parlent de leurs projets, de leurs rêves et de leurs désirs. Vous, Edouard, ce serait quoi vos rêves et vos désirs ?

  • Speaker #0

    Alors, au travers des podcasts, je me suis demandé pourquoi j'avais accepté autant d'interviews ces deux dernières années. J'ai le sentiment qu'il faut que je synthétise encore plus toute ma richesse d'expérience pour la transmettre. Et je voudrais toucher en l'espace de deux, trois ans autant de gens que j'en ai touché pendant toute ma vie. Et le podcast, c'est une bonne manière. Il y a un garçon qui m'a interviewé, qui est venu de Marseille et qui l'a mis sur les réseaux sociaux. Il a eu 200 000 vues sur Instagram avec l'interview qu'on a pu faire ensemble. Donc c'est une façon de répandre des messages sans me soucier simplement de faire des conférences ou d'écrire des livres. Donc c'est vraiment un de mes buts. Et puis, dans les filières professionnelles, j'espère que je vais pouvoir inspirer les jeunes professionnels pour donner du sens à leur exercice et avoir une approche plus systémique, plus humaine, plus... plus riche, plus porteuse d'épanouissement pour leurs interlocuteurs.

  • Speaker #1

    Et pour vous ? Vous avez des choses pour vous ? Vous avez appris deux langues à 60 et 70. Est-ce qu'il y a d'autres projets ?

  • Speaker #0

    Je vais me mettre à l'espagnol cette année. Mon copain avec qui je vais partir en balade est parfaitement bilingue espagnol, donc je compte sur lui pour me faire progresser. Je veux recommencer à voyager tant que je suis encore en bon état physique, continuer à me cultiver et rencontrer du monde. Ça suffit à mon bonheur.

  • Speaker #1

    Vous avez les yeux qui pétillent, on en parlait tout à l'heure, vous l'avez là. Je ne sais pas quel voyage vous avez en tête, mais j'ai vu des choses passer dans votre regard. C'est bientôt le mot de la fin. Il y a un mot qui est important, c'est le nom du podcast, ça s'appelle Encore. Qu'est-ce que vous mettez derrière ce mot ?

  • Speaker #0

    Alors, j'y mettrais un trait d'union. Au lieu d'écrire en un seul mot, j'écrirais en deux mots.

  • Speaker #1

    Comme Cédric Lapiche.

  • Speaker #0

    En, trait d'union, encore, C-O-R-P-S. Et je vous inviterai à habiter vos corps dans leur richesse complexe. Il y a une alchimie du corps, l'alchimie chinoise, une alchimie corporelle qui vient de la tradition sibérienne. Et donc on va du corps grossier au corps subtil, et on va du corps physique au corps énergétique, puis au corps spirituel. Et il y a une merveilleuse professeure de chinois qui a publié un certain nombre d'ouvrages, Catherine Despeux. Et je vous recommande son livre sur les pratiques des femmes taoïstes, qui explique très bien et très simplement les modes de méditation pour transformer cette conscience fine du corps. Et donc, aller vers la lumière, Mircea Eliade, l'anthropologue, a écrit Mephistopheles et l'Androgyne sur les expériences lumineuses qu'on peut faire, quelle que soit la spiritualité qui soit la nôtre. Cette ouverture du cœur, cette ouverture de la conscience qui va faire que... On se rapproche de la dimension angélique qu'on trouve merveilleusement dans le chant, par exemple. Il y a l'écran de l'incantatrice dont la voix est sublime. Elle nous emmène dans cette direction angélique. Ça permet de partir joyeux à la fin d'une longue vie.

  • Speaker #1

    Merci. Merci, Edouard, pour ce moment de connivence, de joie. vraiment du bien d'entendre des messages d'espoir et d'avoir le témoignage d'un homme à 80 ans. Je redis l'âge parce que ça fait partie aussi du jeu du podcast, justement, de donner envie aux gens de se dire « Ah ouais, quand même, j'aimerais bien parler comme Edouard à 80 ans, j'aimerais bien raconter ce que j'ai fait, j'aimerais bien raconter mes projets. » Et ce que vous venez de nous transmettre au micro, c'est ça. C'est donner de l'espoir. donner envie aux gens aussi de se connecter aux autres, les uns aux autres, d'avoir cette curiosité de l'autre, donner envie aussi de se reconnecter à soi pour cultiver sa joie intérieure, on en a besoin en ce moment. Donc c'est des beaux cadeaux que vous nous avez fait.

  • Speaker #0

    Je recommande vraiment aux personnes âgées de prendre le temps de raconter leur histoire, à leur famille, à leurs proches, parce qu'ils ont un partage de leur regard sur le monde qui est très précieux. Et j'ai une amie qui est prof de cinéma, qui a formé plein de... technicien au Mali, entre autres pour les télévisions du Mali, qui fait beaucoup de films documentaires, et qui aujourd'hui fait des vidéos biographiques. Il y a des gens qui vont se faire aider par quelqu'un qui va aider à écrire leur histoire, que ce soit par écrit, en audio, en visio. C'est très important de la raconter, parce que j'ai quatre petites filles, elles sont très heureuses d'apprendre des choses sur ma compréhension de l'histoire familiale. Donc c'est un beau cadeau à faire à sa famille, à ses proches, voire à ses amis, de prendre le temps de...

  • Speaker #1

    Mais c'est réciproque. J'invite aussi à tous les auditeurs, auditrices, peu importe leur âge, à poser des questions parce que parfois on n'ose pas. Et la naissance de Encore, je l'avais raconté dans un épisode, c'est quelques temps avant que ma dernière grand-mère encore en vie décède, je suis allée l'interviewer. Et j'ai eu un moment... que j'avais... Je ne l'ai dit à personne. Je n'ai ni dit à mes cousins, cousines, ni dit à mon père qui venait de perdre sa mère. Je lui ai dit après, je lui ai offert ce cadeau, dire si un jour tu veux entendre à nouveau le rire de ta mère, je l'ai. Et ce moment-là avec elle, il est gravé à vie parce que j'ai osé. Je savais aussi qu'elle allait mourir. Et j'ai osé lui dire, mamie, il faut absolument qu'on se pose et que tu me racontes des choses que je ne sais pas de toi. Et je suis tellement heureuse de l'avoir fait parce que c'est jamais trop toi. Trop tard. On ne peut pas avoir des regrets et l'audio a une puissance d'échange au-delà de la vidéo, qui est un super média. Mais la puissance de l'audio, de réécouter la voix de quelqu'un une fois qu'il est parti, cette personne, ou juste se poser et creuser des choses, c'est des cadeaux merveilleux à se faire. Donc on invite tout le monde à se poser des questions, à creuser et à partager, parce que c'est ça finalement la vie et être humain, c'est ça. Ça vous va comme conclusion, pas Edouard ?

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #1

    Merci encore d'être venu.

  • Speaker #0

    Merci de votre accueil.

  • Speaker #1

    D'avoir renommé le podcast encore en deux mots. On ne me l'avait pas encore donné celle-là, je l'attendais. Et je vous dis à très bientôt. Merci Edouard. Merci d'avoir écouté cet épisode. J'espère qu'il vous a plu. Si c'est le cas, gratifiez-le d'un maximum d'étoiles sur votre plateforme d'écoute préférée. Et surtout, parlez-en autour de vous. Et pour suivre les coulisses, retrouvez Encore sur Instagram. À bientôt !

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Description

Si vous cherchez à suspendre le temps, à le regarder autrement, laissez tomber l’urgence, enfilez vos écouteurs, et plongez dans la voix profonde et vivifiante d’un homme qui traverse la vie avec curiosité, intensité et humilité : Édouard.

À 80 ans, il n’a rien perdu de sa flamme – ni de sa capacité à nous faire réfléchir, sentir, respirer autrement.

Dans cet épisode, nous parlerons :

  • De la vieillesse comme art de vivre, ou plutôt, comme art de bien vieillir. Une discipline quotidienne, ancrée dans le corps, le souffle, le vivant.

  • De la respiration consciente, du Tai Chi, de l’éveil par le silence… et de ce que la Chine, le Japon ou l’Inde ont à nous apprendre pour habiter pleinement nos vies.

  • De sagesse, de Montaigne à Mircea Eliade, en passant par Jeanne Fonda et Pamela Anderson – oui, vraiment.

  • De ce que veut dire habiter le monde avec les autres, en respectant la lenteur, la différence, les âges, les arbres, etc

Et puis nous parlerons aussi de ce mot, “Encore”, qu’il réinvente en deux : En-corps. Parce qu’Édouard ne parle jamais seulement avec des idées, mais toujours avec son être tout entier.


Pour en savoir plus sur Édouard Stacke :
• Des métiers multiples: kiné, ostéopathe, thérapeute, coach de dirigeants et dirigeant d'une école de formation à la respiration

• Pionnier dans le coaching
• Formateur, voyageur, chercheur en humanité
• Auteur de La liberté de s’accomplir
• Et amoureux invétéré… des arbres, des jardins zen, des chants à pleine voix et des projets jusqu’à 100 ans


Un épisode lumineux, exigeant, sensible — à écouter sans hâte, avec tout votre cœur et vos deux oreilles.

Bonne écoute ✨


Et partagez ce moment précieux avec celles et ceux que vous aimez.

Pour suivre le podcast, c’est par ici, sur Instagram


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et tous, bienvenue dans ce nouvel épisode et avant de rencontrer Edouard, je vous donne quelques mots sur Vivagen, un événement dédié à l'intergénérationnel qui aura lieu très bientôt. Bonne écoute ! Et si la diversité des âges devenait votre plus grand atout, que vous soyez DRH, manager, responsable RSE, Vivagen est fait pour vous. On vous donne rendez-vous le 29 avril 2025 pour une journée unique où nous ferons de la collaboration intergénérationnelle un véritable levier de performance. Bonjour Edouard.

  • Speaker #1

    Bonjour Claire.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté mon invitation pour venir au micro d'Encore.

  • Speaker #1

    Bienvenue, j'en suis ravi.

  • Speaker #0

    On va passer un moment ensemble, et je vais être tout à fait franche avec les auditeurs qui écouteront cet épisode. On a passé un moment avec Edouard avant l'enregistrement, et c'est un moment qui m'a bouleversée. Donc si vous entendez un peu d'émotion dans ma voix, c'est normal, puisqu'on vient de brancher les micros après ce moment de partage intense. Et je profite de remercier à nouveau Edouard. Introduction faite, je vais vous demander, comme à chaque invité, de vous présenter de la manière dont vous souhaitez. Voilà, qui est Edouard en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Alors, en quelques mots, c'est toujours difficile puisque j'ai une longue vie professionnelle, mais j'ai été un soignant pendant 20 ans, 10 ans comme kiné, ostéopathe, acupuncteur, sophrologue, prof de tai chi, puis 10 ans comme psychothérapeute et formateur de psychothérapeute, j'ai monté un institut en France. et à Montréal pour former des psychothérapeutes. Et j'en ai formé 3000 avec un collectif de psychiatres. Et les 30 années suivantes, j'ai été consultant en management dans les entreprises françaises et internationales. Et j'ai développé le facteur humain et entre autres, la manière de travailler en équipe performante. Et comme je suis assez sportif, j'ai utilisé la pédagogie par l'action. pour impliquer les gens dans leur comportement et pas simplement dans leur discours. Il y a un proverbe corse que j'adore qui dit « Entre le dire et le faire, il y a la mer » . Il y a longtemps que je ne crois plus ce que les gens me disent, je regarde qui ils sont et ce qu'ils font. Et s'ils sont cohérents, ils font ce qu'ils disent et disent ce qu'ils font. Voilà, donc j'ai développé la culture d'entreprise sur le facteur humain.

  • Speaker #0

    Et le faire, l'action. Est-ce que vous êtes un homme d'action ? Plus qu'un homme de raison.

  • Speaker #1

    Alors, je vais vous le dire avec une pirouette. Quand j'étais jeune, je me disais, entre nomade et sédentaire, je préfère être sémade parce qu'en aucun cas je ne pourrais être notaire. Voilà, donc je suis un aventurier du facteur humain, tourné vers l'action et l'expérimentation, la découverte, le voyage. la rencontre avec les cultures, mais aussi un homme de réflexion. Je combine la réflexion profonde sur l'être humain, sur les cultures, et je fais ce va-et-vient permanent.

  • Speaker #0

    On va aborder tous ces thèmes. Je pense qu'on n'aura pas le temps de rentrer dans ni toute votre vie, ni surtout, parce que vous connaissez l'angle du podcast, c'est évoquer la vieillesse avec un angle du présent et du futur. Donc on va parler aussi de vos projets actuels et ceux à venir. Forcément ça va être teinté de votre expérience. Est-ce que vous êtes ok de nous partager votre âge ?

  • Speaker #1

    J'ai 80 ans depuis le mois de septembre 2024. D'accord.

  • Speaker #0

    Est-ce que l'âge, ce chiffre, c'est important pour vous ?

  • Speaker #1

    Alors, la Chine traditionnelle est une gérontocratie. Et quand les gens vieillissent, on considère qu'ils sont plus sages que les gens plus jeunes parce qu'ils ont un cumul d'expérience. C'est le cas en Afrique. On respecte les personnes âgées. Ma mère a rendu visite à ma jeune sœur qui a vécu à Dakar et elle était surprise de la bienveillance de tous les voisins qui étaient adorables avec elle parce que c'était une vieille dame, simplement parce qu'elle bénéficiait du respect qu'on voue aux personnes âgées. Nous, on s'est dégradés. Il y a eu ce respect des personnes âgées, de leur expérience, mais au niveau de l'entreprise... On a poussé les gens vers la sortie à partir de 55 ans en considérant qu'ils étaient obsolètes, ce qui est complètement stupide. Quand on voit Henri Salvador ou Charles Azdawour qui à 92 ans sont en concert avec 3000, 5000 spectateurs, on voit bien qu'il y a de la ressource. Et puis il y a les auteurs, il y a les comédiens. Je me suis occupé de Madeleine Rollo de Jean-Hubert Barrault, elle a joué jusqu'à 88 ans en scène. C'est nombreux les artistes qui restent actifs à un âge avancé. Il est temps de rappeler que les personnes âgées ont une richesse à apporter dans le dialogue intergénération, avec le recul, la compréhension du temps long, la vision plus large, pour peu qu'ils ne soient pas radotés sur la nostalgie de leur jeunesse.

  • Speaker #0

    Comment vous abordez justement le fait de vieillir ? C'est une question centrale dans votre vie. Est-ce que ça a été une question centrale de vous dire comment je vais faire en sorte de bien vieillir ou d'être l'homme à 80 ou 90 ans que je désire être ?

  • Speaker #1

    Alors, être ce que je désire être, c'est depuis mon enfance que je m'y emploie. On commence à vieillir à la naissance. Et donc, le vieillissement est un processus naturel. Mais par exemple, pendant mes études... J'ai appris que les neurones, on les a au départ, mais après ils se détruisent, mais ils ne se renouvellent pas. Or, depuis quelques années, on sait qu'on peut stimuler le renouvellement des neurones et qu'on continue à fabriquer, même jusqu'à 50 ans, des neurones, à condition d'avoir l'esprit actif. Et donc, le potentiel de récupération, c'est comme avec l'épigénétique, on sait que le mode de vie peut changer même la trame génétique. et qu'on peut améliorer son capital santé, comme on le fait avec la médecine chinoise, la médecine indienne, ayurvédique, en ayant une manière de vivre en équilibre. Et en Chine, on appelle ça Yangsheng, l'art de vieillir en bonne santé. Mon premier voyage en Chine en 1981, je vois des hommes de 80 ans, à l'âge que j'ai maintenant, avec le pied sur un arbre, en train de faire le grand écart. Et moi, je m'occupais de danseuse professionnelle, classique, moderne. Donc pour une danseuse, c'est normal de faire le grand écart. Il y a 80 ans, normalement, il est perclu de rhumatisme, il ne peut pas faire ça. Et souvent, ils ont commencé à travailler à 50 ans pour travailler en souplesse, pour entretenir la flexibilité. Et donc, ça m'a donné confiance et toute ma vie, j'ai pris soin de mon corps pour vivre de manière équilibrée. J'ai beaucoup picolé quand j'étais jeune, entre 15 et 25, pour faire la fête. Et puis entre 25 et 45, j'ai bu un verre de vin par semaine. Je ne fumais pas, pas de café, mais je faisais du sport plusieurs heures par semaine. J'ai couru mon dernier marathon, j'avais 64 ans. Et donc, le vieillissement, il est normal. Je commence à avoir la vue qui baisse, j'ai été opéré de la cataracte, j'ai des aides auditives. Il y a les signes de vieillissement qui m'affectent. Mais j'ai une énergie qui reste assez importante et une agilité physique et mentale parce que j'ai entretenu mon corps très régulièrement. Et la clé, pour les gens qui veulent bien vieillir, en bonne santé, c'est de prendre soin d'eux. Très souvent, tous les jours, très régulièrement.

  • Speaker #0

    On est notre meilleur capital, vieillesse.

  • Speaker #1

    Voilà.

  • Speaker #0

    Vous l'avez étudiée, cette vieillesse, ou c'est finalement quelque chose qui est à côté ? Parce que là, vous en parlez comme vous avez observé dans d'autres pays, vous avez également touché à beaucoup de médecines alternatives différentes de ce qu'on peut entendre aujourd'hui en France. Vous en avez fait certaines fois votre métier. Oui. Donc vous avez creusé bien plus que Berni, mais vous avez creusé ces sujets pour en devenir expert. Justement, est-ce que la vieillesse est quelque chose ? Parce qu'on dit souvent que la prévention, notamment en France, est le parent pauvre de la santé. Comment on explique qu'aujourd'hui, on a gagné en longévité, mais pas forcément les dernières années en très bonne santé finalement ?

  • Speaker #1

    Les laboratoires pharmaceutiques exercent une pression importante sur la formation des médecins. Et les médecins sont formés d'une manière... technicienne, et ça va s'aggraver encore avec l'intelligence artificielle, à distribuer des médicaments, mais pas apprendre aux gens à bien se porter. Sur l'ensemble des généralistes, il y en a un sur deux qui se porte mal parce qu'il n'a pas appris à prendre soin de lui-même. Si vous regardez les chiffres de l'association des internes, un interne sur deux se porte très mal. Il est surexploité par les administrations des hôpitaux et travaille souvent 70-80 heures par semaine. Alors que la limite légale, c'est 55, donc il y a un non-respect de la loi par les administrations des hôpitaux. Et les études de médecine sont extrêmement intenses, les contenus sont très copieux. Mais j'ai une thèse de médecine de l'Université de Strasbourg de 2017 qui montre qu'en 8 ans, 9 ans d'études pour devenir un médecin généraliste, il n'y a que 150 heures de psychologie. Les infirmiers et les infirmières ont 4 ans, 5 ans d'études, ont 1500 heures de psychologie. Comment c'est acceptable ? que les médecins n'aient pas de formation psychologique pour pouvoir dialoguer avec leurs interlocuteurs. On ne soigne pas une maladie, on soigne une personne atteinte d'une maladie ou d'un handicap. Donc cette formation à la relation thérapeutique, elle est indispensable et elle est insuffisante dans la formation de la plupart des soignants.

  • Speaker #0

    Et ça, c'est valable pour tous les corps de métier, tous les corps de la médecine aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Par contre,

  • Speaker #1

    il y a une réaction ces dernières années, ces dix dernières années. Il y a un film fait par Catherine Bellum sur les tentatives de développer la santé intégrative, que ce soit à l'hôpital, dans des cliniques ou dans des centres de santé pluridisciplinaires. Il y a un vrai mouvement qui est en train de se produire depuis quelques années. Je serai vendredi, samedi, avec Isabelle Célestin, à un congrès de santé intégrative.

  • Speaker #0

    C'est quoi justement ce terme-là, santé intégrative ?

  • Speaker #1

    C'est avoir une approche pour rendre les personnes acteurs de leur santé et se servir aussi des médecines complémentaires. Le docteur Alain Toledano à l'Institut Raphaël a développé 40 médecines complémentaires de la sophrologie à leur thérapie pour aider le traitement des cancers avec l'approche classique du traitement des cancers, mais mobiliser toutes les ressources des patients pour aller plus loin. Il y aura Catherine Cornibert, la présidente de l'association Soins pour soignants, qui viendra parler de ce qu'elle fait. On a 200 000 soignants qui ont démissionné de leur job, tellement avec la fatigue du Covid et de l'afflux de malades qui ont débordé les hôpitaux. Les budgets n'ont pas suivi et on a fermé des lits d'hôpitaux parce qu'on n'a plus d'infirmières pour s'occuper des malades. Donc notre système de santé, il est défaillant. Et on ne forme pas assez bien les soignants et on n'investit pas assez les fonds nécessaires. On ne valide pas assez la bonne gestion des établissements pour avoir les moyens de soigner les gens gravement malades. Et ça passe par l'éducation à la santé pour que les gens soient beaucoup moins malades. En 60 ans d'activité, je me suis arrêté à peu près un jour tous les deux ans parce que j'avais une angine, parce que j'avais un labago, etc. Mais je ne me plains pas. 30 jours d'inactivité sur 60 ans, c'est pas mal.

  • Speaker #0

    Ça va, c'est pas la sécu qui va venir vous chercher. Voilà.

  • Speaker #1

    Mais beaucoup plus de gens pourraient se porter mieux en ayant cette hygiène de vie. Et par exemple, tout le monde sait à peu près ce qu'il faut manger pour bien se porter. La diététique s'est beaucoup développée, même dans les écoles, on fait attention. Mais la respiration consciente, par exemple, qui est gratuite, on n'apprend pas aux gens à respirer. J'ai rencontré les gens de la Fondation du Souffle, les responsables de la prévention. Ils s'occupent des pathologies à nouveau, pas de l'éducation à la santé. J'ai soigné les enfants gravement asthmatiques pour les débarrasser de leur asthme, qui sont devenus des beaux jeunes hommes en pleine forme, qui ont changé leur rapport au corps, à leur respiration, à la gestion de leurs affects, etc. Il n'y a pas que les allergies qui vont entraîner les maladies respiratoires. Il y a aussi la vie intérieure et les difficultés psychologiques. qui vont impacter la manière dont le corps s'épanouit ou pas.

  • Speaker #0

    Vous êtes un amoureux du vivant ?

  • Speaker #1

    On peut dire ça, profondément. Du vivant, parce que quand je voyage, il y a deux choses que je vais visiter. Les lieux en général de prière, les lieux où les gens se retrouvent pour pratiquer leur foi. J'aime bien voir comment ça se passe, l'atmosphère de ces lieux. Mais je visite les jardins. Je visite les plus beaux jardins. Il y a par exemple un jardin zen tout près de chez moi, le jardin albercal où j'étais hier après-midi. Mais il y a un jardin japonais tout près du musée de la Légion d'honneur à San Francisco. Il y a une ville comme Kyoto où il y a 2000 jardins auprès des 2000 temples bouddhistes. Il y a Suzhou en Chine où il y a 140 jardins de mandarins qui sont absolument splendides. J'adore les forêts, j'adore les forêts, les vieux arbres.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que ça nous apprend d'observer davantage le vivant ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est une immersion dans la complexité du vivant. Quand j'étais adolescent, j'avais un petit bateau, j'allais à la pêche pendant l'été. Et donc, j'observais la rivière, j'observais les poissons, j'observais le courant. Je savais qu'il y avait l'invisible dans la nature et je cherchais à le capter, mais ce n'était pas évident. Par contre, l'immersion dans le silence, l'immersion dans le cycle des saisons, ça me touche énormément. Sur mon bateau, j'ai le parc de Saint-Cloud en face de chez moi, je ne m'ennuie jamais de voir les variations de la lumière du matin au soir, les variations du ciel, les variations de la végétation sur les arbres, au printemps la couleur des arbres et puis l'automne. Pour moi, c'est un spectacle infini et magnifique. Et ça me permet de me détacher de mon activisme passionné pour être là et jouir de l'instant présent.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous raconter un petit peu votre quotidien à l'aune de vos 80 ans ? Comment vous... C'est quoi votre moteur ? Parce que vous êtes amoureux du vivant, vous vous exercez encore, vous avez mille métiers dans votre vie, vous avez voyagé partout dans le monde, vous avez écrit des livres, on va aborder notamment un livre, La liberté de s'accomplir, tout à l'heure, qui va être peut-être aussi un de nos guides pour l'entretien. Mais c'est quoi votre moteur au quotidien ?

  • Speaker #1

    J'aime les gens. Et j'aime vivre intensément, même dans des registres très sobres. Hier, j'ai rencontré un jeune musicien que j'écoutais chanter et jouer de la guitare. Il avait une voix très mélodieuse, une belle composition. Il y a des moments privilégiés où il y a quelque chose d'intense et de beau qui est à observer. Quelquefois, c'est lors d'un voyage où je vais découvrir des nouvelles choses, mais je prends le temps de la réflexion. C'est-à-dire que j'ai dû me méfier de mon activisme passionné. Je prends des temps pour méditer, pour m'étirer, pour lire, pour réfléchir. Je prends le temps de rencontrer beaucoup de gens. J'ai beaucoup de jeunes professionnels qui viennent me voir pour bénéficier de mon regard sur leur propre projet. Je fais partie de nombreuses associations. Je vais partager avec des collègues, des experts sur des thématiques. J'ai monté avec des amis une soirée sur les spiritualités, les valeurs qu'elles font circuler entre les générations, aussi sur la place de la diversité, de l'inclusion. La société française devient très exclusive et très sauvage. Quand je vois les enfants qui vont poignarder un autre qu'on disciple à l'école, quand je vois cette sauvagerie dans la société, même chez les plus jeunes, je trouve ça extrêmement inquiétant. Et il y a des réflexes de peur. et d'hostilité où on trouve beaucoup de boucs émissaires. On ne sait plus vivre ensemble en paix. On a besoin de retrouver la connexion avec le vivre ensemble et la tolérance et la solidarité largement.

  • Speaker #0

    Est-ce que justement la crainte que partagent beaucoup de gens par rapport au fait de vieillir, parce qu'on se prend aussi beaucoup de dictates sur comment vieillir, il y a des personnes qui ont peur de la vieillesse, il y a des personnes qui prennent des crèmes anti-rides, anti-âge. Est-ce que ça ne favorise pas justement, d'un certain point, cette exclusion et ce mauvais traitement aussi qu'on peut avoir sur les personnes âgées ou les personnes qui vieillissent autour de nous ?

  • Speaker #1

    Alors la peur de la mort, souvent, elle va amener les gens à se ratatiner et à être de plus en plus anxieux. Sauver les apparences, et en particulier pour les femmes, j'ai une amie psychologue et psychosociologue qui s'appelle Danielle Rapoport, qui a écrit un joli petit livre qui s'appelle « L'aventure au coin de la ride » .

  • Speaker #0

    J'aime beaucoup le terme.

  • Speaker #1

    Voilà, elle écrit très bien et elle parle entre autres de la peur des femmes de vieillir et de changer d'apparence, etc. Moins de mes modèles féminins, c'est Jeanne Fonda, qui était une poupée Barbie splendide à 20 ans, 30 ans, quand elle jouait Barbarella, qui était la femme de Vadim, entre autres, mais qui, avec le yoga et le sport, à 85 ans passés, elle a développé une énergie de sagesse, d'ouverture sur le monde et d'humanité extraordinaire. Elle aime le genre humain et elle se bat pour la liberté des femmes et pour accepter la vie qui passe malgré le vieillissement. Accepter de changer d'image, Pamela Anderson qui choisit de ne plus se maquiller, c'est une manière de dire j'accepte de vieillir. C'est vrai pour l'actrice italienne dont le nom va me revenir. Et donc accepter le vieillissement, c'est de la sagesse. Ça ne veut pas dire le subir. C'est-à-dire que si je m'entretiens en ayant un équilibre de vie, en restant actif, en faisant marcher mes neurones, je recommande souvent aux gens qui prennent de l'âge de rester curieux et de, par exemple, de continuer à voyager ou d'être dans la vie associative pour aller participer à des activités artistiques, culturelles, etc. Moi, je me suis mis aux Russes à 60 ans pour entretenir ma mémoire qui commençait à fléchir comme tout le monde. Je n'ai pas retenu beaucoup, mais mes 80 heures de Russes m'ont fait travailler mes neurones. Il y a 65 ans, j'ai pris 60 heures de cours de chinois. Je n'ai pas retenu beaucoup, mais ma mémoire marche beaucoup mieux.

  • Speaker #0

    C'est des langues faciles quand même en plus.

  • Speaker #1

    Et aujourd'hui, j'ai une mémoire qui reste en bon état parce que je l'entretiens. J'organise des lectures à voix haute de poésie, par exemple, où je fais chanter les gens pour qu'ils mémorisent justement les paroles en s'amusant. C'est un jeu d'entretenir ses capacités. Et si on y prend plaisir... Ce n'est pas une contrainte, ce n'est pas fascinant. C'est cette peur de changer d'image qui est le problème, ce n'est pas le vieillissement en lui-même.

  • Speaker #0

    J'aimerais bien qu'on revienne sur certains concepts que vous avez beaucoup développés dans le livre La liberté de s'accomplir. Vous y parlez beaucoup de transmission dans son arbre généalogique, par exemple, mais également de transmission du passé, un peu plus archaïque, de choses qui nous seraient transmises dans notre ADN. C'est intéressant d'avoir ce point justement sur notre regard et comment on évolue dans ce monde et comment on est au monde, chacun, chacun et chacune. Est-ce que vous pouvez nous parler un petit peu de ce point-là ?

  • Speaker #1

    Alors, je vais prendre un premier exemple qui est celui des compagnons du Tour de France. Mais ils n'apprennent pas simplement un merveilleux métier, que ce soit la fironnerie, la menuiserie, la sculpture ou autre chose. Ils apprennent une attitude éthique, une attitude morale, pour être fiers de ce qu'ils font, de leur pouvoir faire, mais humbles dans le fait de contribuer à faire des choses belles. Et donc transmettre des valeurs, c'est essentiel. Et c'est ce qui se passait entre les générations, entre fois. Et les jeunes sont coupés de la relation avec leurs grands-parents. On vit par tranches d'âge. Et moi, j'ai dansé avec les grands-mères dans mon village. Aujourd'hui, on va en boîte de nuit et on va dans une boîte avec des gens de sa génération. Mais il n'y a plus de partage intergénérationnel à part les mariages, les enterrements.

  • Speaker #0

    Qui sont des réunions.

  • Speaker #1

    Les baptêmes.

  • Speaker #0

    Comment on peut retrouver aujourd'hui ? Parce qu'on l'a perdu en chemin pour plein de raisons et on n'aurait pas assez le temps d'un épisode pour expliquer pourquoi on a perdu ça. Comment on peut le retrouver ? Parce que finalement, faisons un peu de prospective. Qu'est-ce qu'on peut faire aujourd'hui pour retrouver ce qui est d'ailleurs possible ? Je vais vous donner un exemple de compagnonnage. Aujourd'hui, il y a des choses qui existent et qui sont là sous nos yeux. Qu'est-ce qu'on peut faire pour que la société, justement, on fasse un peu péter ces silos où on a mis les gens dedans ?

  • Speaker #1

    Alors, je vais vous donner deux, trois pistes, dont le vivre ensemble dans les entreprises. Dans l'entreprise, ça s'appelle l'empowerment. Quand on s'intéresse à la capacité d'évoluer de chaque personne, c'est ce que chaque salarié a comme motivation première. Est-ce que je peux évoluer dans mon travail au fil de mon temps de participation à une entreprise ? Est-ce que je peux continuer à apprendre, prendre des responsabilités ? L'argent, c'est que la troisième source de motivation. La deuxième, c'est le vivre ensemble. Si je m'entends bien avec mes collègues, je suis content d'aller bosser le matin. Parce que je suis avec des gens que j'apprécie, avec qui on s'entend bien. Et donc quand on développe une dynamique de transformation d'un collectif, et qu'on donne à chacun sa chance, la censure sociale peut continuer à fonctionner, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Vous n'avez que 20% des enfants d'ouvriers qui terminent leurs études secondaires. Et donc, à l'époque où c'était Mitterrand, il y avait pratiquement 200 ou 300 députés à l'Assemblée qui étaient des enseignants. Quand c'est la droite qui est au pouvoir, c'est deux ou trois cents médecins, avocats, professions libérales. Mais ce n'est pas donner sa chance à tout le monde. Le slogan « liberté, égalité, fraternité » , il est loin d'être mis en pratique dans la réalité. Donc donner sa chance à tout le monde, retrouver une manière de partager, valoriser les contributions de chacun, c'est un état d'esprit qu'on retrouve dans beaucoup de boîtes familiales comme Michelin, le groupe Bouygues, le groupe Bongrain. Il y a un certain nombre de boîtes où on n'est pas dans l'urgence de faire du fric tous les trois mois, mais on donne leur chance pour que les gens évoluent. Pérennise. C'est en développant le capital humain que l'entreprise crée de la richesse.

  • Speaker #0

    Et quand on sort de l'entreprise et qu'on va vers la société, cette notion aussi de... Parce qu'au micro, j'ai beaucoup de personnes aussi de plus de 70 et 80 qui me disent au moment de la retraite, j'ai perdu mon sentiment d'utilité, je me suis sentie écartée de la société.

  • Speaker #1

    Alors, j'ai mis du temps ça. Alors, c'est une forme de mort sociale. Si en plus, je m'y suis pris un peu tard et j'achète une maison dans la Creuse où je ne connais personne, je vais m'isoler doublement. À l'inverse, il y a beaucoup de gens qui, quand ils prennent leur retraite, s'investissent dans la vie associative. Que ça soit une association culturelle, sportive, peu importe, mais créez du lien et trouvez les choses qui vous plaisent. J'ai chanté deux ans dans une chorale de gospel avec ma femme et ma fille à Bouloï. il y avait 40... 50 personnes. Les plus anciens étaient très accueillants pour les nouveaux et c'était extrêmement solidaire mais très joyeux. Chanter ensemble, c'est magnifique. On se réjouit, on se ressource, on charge les batteries et c'est un bonheur. Donc, participer à des échanges, provoquer des échanges, rencontrer du monde, ne rester pas seul.

  • Speaker #0

    Ça c'est important. Et être curieux. Ne pas être seul, être curieux. Mais ça c'est valable pour tous les âges.

  • Speaker #1

    Oui, mais la grande richesse du vieillissement et de la retraite, c'est qu'on a du temps. Souvent, quand on est actif et qu'on a une famille à élever ou un boulot assuré, on a quelques petits moments, mais on a beaucoup moins de temps. Les grandes vacances, c'est quand même chouette pour faire des choses qui nous plaisent et qui nous font du bien.

  • Speaker #0

    Oui, c'est sûr. Quel est votre regard, vous, que vous portez sur votre propre vieillesse ? Est-ce que déjà, vous êtes l'homme à 80 ans ? que vous avez toujours projeté être.

  • Speaker #1

    Alors, je ne savais pas que j'allais aller si loin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    À 20 ans, j'avais un rêve, je voulais devenir un soignant. À 16 ans, je rêvais de devenir psychanalyste, puis à 40 ans, j'étais psychanalyste reichien. Et donc, j'ai atteint mes objectifs de 20 ans dès la quarantaine. J'ai dû trouver des nouveaux objectifs. Mais étant un fils d'immigré, je n'aurais jamais imaginé qu'à 40 ans, j'allais coacher les PLG du CAC 40. C'est ma manière d'approfondir le facteur humain qui fait qu'on m'a sollicité pour accompagner et faire progresser des gens avec beaucoup de pouvoir. J'ai appris à le faire, je sais le faire, je le fais plutôt bien et ça m'a amené dans des chemins complètement nouveaux. Je n'aurais jamais imaginé aller bosser dans 30 pays pour amener cette dynamique d'équipe performante dans des grands groupes. Donc c'était assez amusant. Mon père est mort à 70 ans, il a travaillé depuis l'âge de 7 ans. Et il a travaillé très dur, donc 15 ans comme envoyé agricole, mais il a travaillé toute sa vie, il n'a jamais pris de vacances. Et comme il fumait, comme il buvait, il jouait aux cartes, son corps a été usé. Et ma mère est décédée à 80 ans. Alors que moi je me disais, je devrais pouvoir aller jusqu'à 90, j'ai une vie plus équilibrée, moins dure. Puis un jour j'étais en République tchèque. car le vivarique est une station thermale avec des clients tchèques. Je leur fais faire une petite expérience dans la forêt, de connexion avec les arbres, etc. Et puis ils étaient en train de méditer, chacun avec leur arbre, et moi avec le mien, avec un beau chêne de 2-3 siècles. Et puis je m'interroge sur ma durée de vie. Ce qui m'importe, c'est de vieillir en bonne santé. Le jour où je ne serai plus tout à fait en bonne santé, je suis prêt à partir, même à interrompre mon parcours. Mais ce jour-là... Avec ce beau chêne, je me suis dit, je m'étais donné une limite de 90, mais au fond, si je suis en bon état, je peux aller jusqu'à 100. Quand je vois Edgar Morin, à 103, 104 ans, qui fait encore des émissions de télévision, il n'y a pas de problème, ça me plairait bien. Il y a un numéro spécial du Point sur les centenaires, et les gens de 100, 102 ans qui sont en bonne santé, c'est parce qu'ils restent tactiques. Soit professionnellement, il y a d'anciens avocats, des écrivains, etc. Soit parce qu'ils bougent physiquement ou bien les deux. Donc, c'est moins l'âge que le fait de vivre le plus longtemps possible en bon état et en prenant plaisir. Il y a un écologiste professionnel qui avait fait une étude sur l'espérance de vie des salariés de la SNCF. Les cheminots qui, depuis l'âge de 16 ans, posent les traverses sur les voies. et travaillent par tous les temps, ils prenaient leur retraite à 55 ans, la plupart mourraient dans les 6 mois qui suivent leur départ en retraite. Ils ont tellement travaillé dur pendant 40 ans qu'ils se sont usés. A l'inverse, les professions libérales qui disposent du choix de leur mode de vie, comme les avocats, les médecins, ont une espérance de vie 5 ans supérieure aux salariés. Les gens qui ont des hobbies, parce qu'ils ont la liberté de choix. Donc ça pèse beaucoup sur la qualité de vie. Les gens qui ont des hobbies, qui pratiquent des activités physiques et qui n'ont pas d'addiction, qui boivent très peu, qui ne fument pas et qui font un peu d'activités physiques, ils ont cinq ans d'espérance de vie supplémentaire. Donc ce sont vraiment des chiffres importants pour les gens qui veulent vieillir en bon état. Prenez soin de vous et ne vous isolez pas, ne vous repliez pas sur vous-même.

  • Speaker #0

    Et j'ai envie de rajouter aussi, apprenez à bien respirer.

  • Speaker #1

    Ça, c'est ce que l'Asie m'a appris.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on peut en parler un peu, parce que je trouve ça passionnant.

  • Speaker #1

    Avec grand plaisir. Mon intérêt pour la respiration vient de mon adolescence, où j'ai appris à nager tardivement. Mais dès l'âge de 16 ans, je me suis amusé à nager sous l'eau. Et donc j'ai découvert qu'en ravalant ma salive, je pouvais nager quelques mètres de plus. Et donc j'ai appris à nager en apnée et j'arrivais à faire 50 mètres sous l'eau. Quand je suis allé au Japon, j'ai fait pas mal d'apnée en Polynésie aussi, avec les plus pêcheurs. Mais quand je suis allé au Japon méditer avec les moines, j'ai découvert que...

  • Speaker #0

    La spiritualité bouddhiste, c'est de prendre conscience de son corps, prendre conscience de sa respiration et de laisser passer les pensées dans la tête pour ne pas s'y attacher. Donc ce n'est pas réfléchir, c'est être attentif à ce qui est là. Et quand j'ai commencé à aller en Chine ou à apprendre le Tai Chi Chuan, je me suis rendu compte que mettre l'esprit au repos et se détendre complètement, c'était une culture qui se transmettait depuis des siècles. Et moi qui étais un jeune paysan, altérophile, costaud, robuste, rentré dans la délicatesse du relâchement, du mouvement fin, etc. Ça m'a vraiment passionné. J'ai pu entraîner les danseurs professionnels à ce mouvement du Tai Chi Chuan, par exemple. J'ai trouvé ça transformateur de l'état intérieur. Et donc, toute ma vie, j'ai commencé à faire attention à ma respiration, que ce soit avec le pranayama du yoga, avec la méditation ou avec... Le sport, j'ai couru à pied pendant 25 ans, en observant chaque respiration pendant tout un marathon ou pendant chacun de mes entraînements, et la conscience de chaque geste pour être dans la décontraction. En Asie, pour le résumer, on dit que la sagesse c'est d'avoir l'esprit aiguisé, le corps détendu. Et j'invite nos auditeurs à observer leur temps. tonus musculaire pour se relâcher le plus souvent possible, le plus largement possible. C'est comme les lampes à basse consommation. Elles sont obligatoires maintenant, elles consomment moins. Et si vous respirez lentement et profondément, vous décontractez musculairement, vous gardez l'énergie pour agir quand vous en avez besoin. Et vous allez éviter la fatigue. J'ai publié un article sur fatigue et ressourcement dans une revue de coaching en mars. 2023, numéro 18 de la revue Le Coaching Pro. Et si on sait récupérer, prendre du répit, on ne va pas s'épuiser. Moi j'ai travaillé énormément, j'ai travaillé 12 heures par jour pour soigner les gens. Mais si je me relaxe, si je me détends, si je récupère, si je fais la sieste, je vais laisser mon organisme récupérer. Au Japon... on prend des bains à 38-40 degrés le soir pour se décontracter. On se lave avant de rentrer au fur et à mesure du bain japonais. Et on va rester 20-30 minutes à se détendre dans l'eau chaude pour se relâcher, exactement comme les musulmans avant la mosquée le vendredi matin vont aller au hammam. Apprendre à se détendre, les Scandinaves le font avec le sauna. C'est un état d'esprit culturel. On ne s'accorde plus le temps du répit. Avec les réseaux sociaux, les écrans, les gens ont la tête toujours absorbée, et du coup, créent une charge mentale. Alors que s'ils donnent le temps de ne rien faire très régulièrement, leur organisme récupère. Une capacité d'auto-réparation du capital santé. C'est ça. Et de l'alternance. Accepter l'alternance. Il y a le jour, il y a la nuit. Il y a l'hiver, il y a l'été. Il y a un temps pour agir et un temps pour ne rien faire.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'avec votre regard sur le monde, tout ce qui fait que vous êtes Édouard à 80 ans aujourd'hui, tout ce qui vous a façonné, tout ce qui vous façonnera demain, qu'est-ce qu'on peut dire, et j'en fais partie, aux gens qui, en 2025, sont un peu inquiets, anxieux, de ce qui nous entoure ? Alors on n'a pas la main dessus. Vous nous avez donné beaucoup de pistes aujourd'hui sur comment reprendre soi-même aussi et cultiver cette joie intérieure. se reconnecter à soi. Qu'est-ce qu'on peut concrètement faire à tous les âges, aujourd'hui, pour relever peut-être les défis qui nous entourent ?

  • Speaker #0

    Alors, Alain Juppé parlait de sobriété heureuse, et au fond, il reprenait les termes de Pierre Rabhi. Et vivre simplement, c'est une façon de se rendre la vie plus agréable. Si je ne me crois pas obligé d'accumuler, mais que je profite de ce que j'ai. Napoléon disait « Être heureux, c'est dépenser 70% de ce qu'on gagne » . Et donc si, comme beaucoup d'Américains, j'ai 4-5 quarts de crédit et je prends des emprunts à tirer l'arigot, et du coup, quand il y a une crise financière, je suis obligé de vendre ma maison parce que je ne peux plus payer les frais, je suis vraiment embêté. Si je profite de la simplicité, J'aime beaucoup la nature et j'ai marché dans la forêt, j'ai marché dans la montagne. Manger un sandwich au bord du torrent avec un bout de fromage, un bout de pain, une tranche de saucisson, ça ne coûte pas grand-chose. Je n'ai pas besoin d'aller au Club Med dans un 5 étoiles sous les cocotiers pour être heureux. Si je suis dans la nature et que j'en profite... C'est tout à fait à ma portée. Respirer, c'est gratuit. Je peux créer un état de grâce en sachant respirer amplement et profondément, en chantant à tue-tête, en me réjouissant avec d'autres. Ça ne coûte rien. Et donc, profiter de la vie, ce n'est pas accumuler. On a une logique de propriétaire. Marshall McLuhan, qui a écrit « Pieds nus sur la terre sacrée » , raconte l'histoire d'un dialogue entre un chef indien au XVIIIe siècle et un officier français. Et le chef indien lui dit, on n'a pas construit de temple, on n'a pas de ruines à faire visiter. Et chez les Amérindiens, il y a un respect de la nature extrêmement important, mais comme beaucoup de peuples premiers. Et donc, aller vers la simplicité, vivre simplement, se nourrir simplement avec des choses de qualité, avec des circuits courts. Il y a même des gens qui construisent maintenant des quartiers avec des maisons écologiques. avec des jardins partagés, avec des installations collectives.

  • Speaker #1

    Des habitats intergénérationnels.

  • Speaker #0

    Absolument. Il y a des communes qui rachètent des immeubles pour faire des habitats intergénérationnels ou des maisons partagées comme les Baba Yaga. C'est formidable. Ça remet de la vie dans les villages, ça crée des relations nouvelles ou même des expériences chouettes entre les crèches, les jardins d'enfants et les EHPAD où les enfants se re... d'interagir avec des gens disponibles et les personnes âgées sont heureuses de voir des bambins autour d'eux avec cette joie qui manifeste chez les petits.

  • Speaker #1

    Je pense que c'est un beau message à transmettre et à cultiver et à propager. Ce mouvement citoyen qui doit se remettre en marche et en local, parce que j'ai le sentiment aussi qu'on attend beaucoup de choses parfois, des politiques ou d'institutions ou d'entreprises et finalement... ensemble, chacun déjà, si on prend le temps nécessaire pour se reconnecter à soi, au vivant.

  • Speaker #0

    Alors, ce qui est vraiment important, je pense, c'est des projets collectifs, de façon à faire des expériences qui soient un peu plus vastes. Il y a beaucoup de paysans qui ont créé des boutiques où ils vont vendre leurs propres produits en circuit court. C'est le cas en Normandie, mais Intermarché a plus de 20% des produits qui viennent du circuit court. Donc, c'est vraiment... Retrouver la solidarité, la proximité. Et tout seul, ce n'est pas facile de faire quelque chose de cohérent. Alors qu'en collectif, on peut vraiment améliorer les choses. Je serai avec Sylvie à cette rencontre du vieillissement, la gaguette, le 24. C'est une démarche associative communautaire qui permet beaucoup de choses.

  • Speaker #1

    Le pouvoir... Je me suis donné un mot en 2025. Unis. C'est mon mot de l'année.

  • Speaker #0

    Alors, au plan du développement personnel, moi j'invite les gens, et j'ai écrit un chapitre dans La liberté de s'accomplir, sur la liberté d'être unique. Chacun est complètement particulier dans son histoire, dans sa façon d'être, etc. Mais on peut être unique d'un côté et uni de l'autre. Avec un projet commun, des valeurs communes et le vivre ensemble, c'est essentiel. Complètement. Et donc, le dialogue avec les gens différents, c'est justement s'enrichir, comme Montaigne qui disait « Limer sa cervelle contre celle d'autrui » . On s'enrichit de nos différences.

  • Speaker #1

    Tellement important, cette richesse. Vous avez parlé de projets à l'instant. Dans le podcast, moi, j'aime bien aussi que les invités parlent de leurs projets, de leurs rêves et de leurs désirs. Vous, Edouard, ce serait quoi vos rêves et vos désirs ?

  • Speaker #0

    Alors, au travers des podcasts, je me suis demandé pourquoi j'avais accepté autant d'interviews ces deux dernières années. J'ai le sentiment qu'il faut que je synthétise encore plus toute ma richesse d'expérience pour la transmettre. Et je voudrais toucher en l'espace de deux, trois ans autant de gens que j'en ai touché pendant toute ma vie. Et le podcast, c'est une bonne manière. Il y a un garçon qui m'a interviewé, qui est venu de Marseille et qui l'a mis sur les réseaux sociaux. Il a eu 200 000 vues sur Instagram avec l'interview qu'on a pu faire ensemble. Donc c'est une façon de répandre des messages sans me soucier simplement de faire des conférences ou d'écrire des livres. Donc c'est vraiment un de mes buts. Et puis, dans les filières professionnelles, j'espère que je vais pouvoir inspirer les jeunes professionnels pour donner du sens à leur exercice et avoir une approche plus systémique, plus humaine, plus... plus riche, plus porteuse d'épanouissement pour leurs interlocuteurs.

  • Speaker #1

    Et pour vous ? Vous avez des choses pour vous ? Vous avez appris deux langues à 60 et 70. Est-ce qu'il y a d'autres projets ?

  • Speaker #0

    Je vais me mettre à l'espagnol cette année. Mon copain avec qui je vais partir en balade est parfaitement bilingue espagnol, donc je compte sur lui pour me faire progresser. Je veux recommencer à voyager tant que je suis encore en bon état physique, continuer à me cultiver et rencontrer du monde. Ça suffit à mon bonheur.

  • Speaker #1

    Vous avez les yeux qui pétillent, on en parlait tout à l'heure, vous l'avez là. Je ne sais pas quel voyage vous avez en tête, mais j'ai vu des choses passer dans votre regard. C'est bientôt le mot de la fin. Il y a un mot qui est important, c'est le nom du podcast, ça s'appelle Encore. Qu'est-ce que vous mettez derrière ce mot ?

  • Speaker #0

    Alors, j'y mettrais un trait d'union. Au lieu d'écrire en un seul mot, j'écrirais en deux mots.

  • Speaker #1

    Comme Cédric Lapiche.

  • Speaker #0

    En, trait d'union, encore, C-O-R-P-S. Et je vous inviterai à habiter vos corps dans leur richesse complexe. Il y a une alchimie du corps, l'alchimie chinoise, une alchimie corporelle qui vient de la tradition sibérienne. Et donc on va du corps grossier au corps subtil, et on va du corps physique au corps énergétique, puis au corps spirituel. Et il y a une merveilleuse professeure de chinois qui a publié un certain nombre d'ouvrages, Catherine Despeux. Et je vous recommande son livre sur les pratiques des femmes taoïstes, qui explique très bien et très simplement les modes de méditation pour transformer cette conscience fine du corps. Et donc, aller vers la lumière, Mircea Eliade, l'anthropologue, a écrit Mephistopheles et l'Androgyne sur les expériences lumineuses qu'on peut faire, quelle que soit la spiritualité qui soit la nôtre. Cette ouverture du cœur, cette ouverture de la conscience qui va faire que... On se rapproche de la dimension angélique qu'on trouve merveilleusement dans le chant, par exemple. Il y a l'écran de l'incantatrice dont la voix est sublime. Elle nous emmène dans cette direction angélique. Ça permet de partir joyeux à la fin d'une longue vie.

  • Speaker #1

    Merci. Merci, Edouard, pour ce moment de connivence, de joie. vraiment du bien d'entendre des messages d'espoir et d'avoir le témoignage d'un homme à 80 ans. Je redis l'âge parce que ça fait partie aussi du jeu du podcast, justement, de donner envie aux gens de se dire « Ah ouais, quand même, j'aimerais bien parler comme Edouard à 80 ans, j'aimerais bien raconter ce que j'ai fait, j'aimerais bien raconter mes projets. » Et ce que vous venez de nous transmettre au micro, c'est ça. C'est donner de l'espoir. donner envie aux gens aussi de se connecter aux autres, les uns aux autres, d'avoir cette curiosité de l'autre, donner envie aussi de se reconnecter à soi pour cultiver sa joie intérieure, on en a besoin en ce moment. Donc c'est des beaux cadeaux que vous nous avez fait.

  • Speaker #0

    Je recommande vraiment aux personnes âgées de prendre le temps de raconter leur histoire, à leur famille, à leurs proches, parce qu'ils ont un partage de leur regard sur le monde qui est très précieux. Et j'ai une amie qui est prof de cinéma, qui a formé plein de... technicien au Mali, entre autres pour les télévisions du Mali, qui fait beaucoup de films documentaires, et qui aujourd'hui fait des vidéos biographiques. Il y a des gens qui vont se faire aider par quelqu'un qui va aider à écrire leur histoire, que ce soit par écrit, en audio, en visio. C'est très important de la raconter, parce que j'ai quatre petites filles, elles sont très heureuses d'apprendre des choses sur ma compréhension de l'histoire familiale. Donc c'est un beau cadeau à faire à sa famille, à ses proches, voire à ses amis, de prendre le temps de...

  • Speaker #1

    Mais c'est réciproque. J'invite aussi à tous les auditeurs, auditrices, peu importe leur âge, à poser des questions parce que parfois on n'ose pas. Et la naissance de Encore, je l'avais raconté dans un épisode, c'est quelques temps avant que ma dernière grand-mère encore en vie décède, je suis allée l'interviewer. Et j'ai eu un moment... que j'avais... Je ne l'ai dit à personne. Je n'ai ni dit à mes cousins, cousines, ni dit à mon père qui venait de perdre sa mère. Je lui ai dit après, je lui ai offert ce cadeau, dire si un jour tu veux entendre à nouveau le rire de ta mère, je l'ai. Et ce moment-là avec elle, il est gravé à vie parce que j'ai osé. Je savais aussi qu'elle allait mourir. Et j'ai osé lui dire, mamie, il faut absolument qu'on se pose et que tu me racontes des choses que je ne sais pas de toi. Et je suis tellement heureuse de l'avoir fait parce que c'est jamais trop toi. Trop tard. On ne peut pas avoir des regrets et l'audio a une puissance d'échange au-delà de la vidéo, qui est un super média. Mais la puissance de l'audio, de réécouter la voix de quelqu'un une fois qu'il est parti, cette personne, ou juste se poser et creuser des choses, c'est des cadeaux merveilleux à se faire. Donc on invite tout le monde à se poser des questions, à creuser et à partager, parce que c'est ça finalement la vie et être humain, c'est ça. Ça vous va comme conclusion, pas Edouard ?

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #1

    Merci encore d'être venu.

  • Speaker #0

    Merci de votre accueil.

  • Speaker #1

    D'avoir renommé le podcast encore en deux mots. On ne me l'avait pas encore donné celle-là, je l'attendais. Et je vous dis à très bientôt. Merci Edouard. Merci d'avoir écouté cet épisode. J'espère qu'il vous a plu. Si c'est le cas, gratifiez-le d'un maximum d'étoiles sur votre plateforme d'écoute préférée. Et surtout, parlez-en autour de vous. Et pour suivre les coulisses, retrouvez Encore sur Instagram. À bientôt !

Description

Si vous cherchez à suspendre le temps, à le regarder autrement, laissez tomber l’urgence, enfilez vos écouteurs, et plongez dans la voix profonde et vivifiante d’un homme qui traverse la vie avec curiosité, intensité et humilité : Édouard.

À 80 ans, il n’a rien perdu de sa flamme – ni de sa capacité à nous faire réfléchir, sentir, respirer autrement.

Dans cet épisode, nous parlerons :

  • De la vieillesse comme art de vivre, ou plutôt, comme art de bien vieillir. Une discipline quotidienne, ancrée dans le corps, le souffle, le vivant.

  • De la respiration consciente, du Tai Chi, de l’éveil par le silence… et de ce que la Chine, le Japon ou l’Inde ont à nous apprendre pour habiter pleinement nos vies.

  • De sagesse, de Montaigne à Mircea Eliade, en passant par Jeanne Fonda et Pamela Anderson – oui, vraiment.

  • De ce que veut dire habiter le monde avec les autres, en respectant la lenteur, la différence, les âges, les arbres, etc

Et puis nous parlerons aussi de ce mot, “Encore”, qu’il réinvente en deux : En-corps. Parce qu’Édouard ne parle jamais seulement avec des idées, mais toujours avec son être tout entier.


Pour en savoir plus sur Édouard Stacke :
• Des métiers multiples: kiné, ostéopathe, thérapeute, coach de dirigeants et dirigeant d'une école de formation à la respiration

• Pionnier dans le coaching
• Formateur, voyageur, chercheur en humanité
• Auteur de La liberté de s’accomplir
• Et amoureux invétéré… des arbres, des jardins zen, des chants à pleine voix et des projets jusqu’à 100 ans


Un épisode lumineux, exigeant, sensible — à écouter sans hâte, avec tout votre cœur et vos deux oreilles.

Bonne écoute ✨


Et partagez ce moment précieux avec celles et ceux que vous aimez.

Pour suivre le podcast, c’est par ici, sur Instagram


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et tous, bienvenue dans ce nouvel épisode et avant de rencontrer Edouard, je vous donne quelques mots sur Vivagen, un événement dédié à l'intergénérationnel qui aura lieu très bientôt. Bonne écoute ! Et si la diversité des âges devenait votre plus grand atout, que vous soyez DRH, manager, responsable RSE, Vivagen est fait pour vous. On vous donne rendez-vous le 29 avril 2025 pour une journée unique où nous ferons de la collaboration intergénérationnelle un véritable levier de performance. Bonjour Edouard.

  • Speaker #1

    Bonjour Claire.

  • Speaker #0

    Merci d'avoir accepté mon invitation pour venir au micro d'Encore.

  • Speaker #1

    Bienvenue, j'en suis ravi.

  • Speaker #0

    On va passer un moment ensemble, et je vais être tout à fait franche avec les auditeurs qui écouteront cet épisode. On a passé un moment avec Edouard avant l'enregistrement, et c'est un moment qui m'a bouleversée. Donc si vous entendez un peu d'émotion dans ma voix, c'est normal, puisqu'on vient de brancher les micros après ce moment de partage intense. Et je profite de remercier à nouveau Edouard. Introduction faite, je vais vous demander, comme à chaque invité, de vous présenter de la manière dont vous souhaitez. Voilà, qui est Edouard en quelques mots ?

  • Speaker #1

    Alors, en quelques mots, c'est toujours difficile puisque j'ai une longue vie professionnelle, mais j'ai été un soignant pendant 20 ans, 10 ans comme kiné, ostéopathe, acupuncteur, sophrologue, prof de tai chi, puis 10 ans comme psychothérapeute et formateur de psychothérapeute, j'ai monté un institut en France. et à Montréal pour former des psychothérapeutes. Et j'en ai formé 3000 avec un collectif de psychiatres. Et les 30 années suivantes, j'ai été consultant en management dans les entreprises françaises et internationales. Et j'ai développé le facteur humain et entre autres, la manière de travailler en équipe performante. Et comme je suis assez sportif, j'ai utilisé la pédagogie par l'action. pour impliquer les gens dans leur comportement et pas simplement dans leur discours. Il y a un proverbe corse que j'adore qui dit « Entre le dire et le faire, il y a la mer » . Il y a longtemps que je ne crois plus ce que les gens me disent, je regarde qui ils sont et ce qu'ils font. Et s'ils sont cohérents, ils font ce qu'ils disent et disent ce qu'ils font. Voilà, donc j'ai développé la culture d'entreprise sur le facteur humain.

  • Speaker #0

    Et le faire, l'action. Est-ce que vous êtes un homme d'action ? Plus qu'un homme de raison.

  • Speaker #1

    Alors, je vais vous le dire avec une pirouette. Quand j'étais jeune, je me disais, entre nomade et sédentaire, je préfère être sémade parce qu'en aucun cas je ne pourrais être notaire. Voilà, donc je suis un aventurier du facteur humain, tourné vers l'action et l'expérimentation, la découverte, le voyage. la rencontre avec les cultures, mais aussi un homme de réflexion. Je combine la réflexion profonde sur l'être humain, sur les cultures, et je fais ce va-et-vient permanent.

  • Speaker #0

    On va aborder tous ces thèmes. Je pense qu'on n'aura pas le temps de rentrer dans ni toute votre vie, ni surtout, parce que vous connaissez l'angle du podcast, c'est évoquer la vieillesse avec un angle du présent et du futur. Donc on va parler aussi de vos projets actuels et ceux à venir. Forcément ça va être teinté de votre expérience. Est-ce que vous êtes ok de nous partager votre âge ?

  • Speaker #1

    J'ai 80 ans depuis le mois de septembre 2024. D'accord.

  • Speaker #0

    Est-ce que l'âge, ce chiffre, c'est important pour vous ?

  • Speaker #1

    Alors, la Chine traditionnelle est une gérontocratie. Et quand les gens vieillissent, on considère qu'ils sont plus sages que les gens plus jeunes parce qu'ils ont un cumul d'expérience. C'est le cas en Afrique. On respecte les personnes âgées. Ma mère a rendu visite à ma jeune sœur qui a vécu à Dakar et elle était surprise de la bienveillance de tous les voisins qui étaient adorables avec elle parce que c'était une vieille dame, simplement parce qu'elle bénéficiait du respect qu'on voue aux personnes âgées. Nous, on s'est dégradés. Il y a eu ce respect des personnes âgées, de leur expérience, mais au niveau de l'entreprise... On a poussé les gens vers la sortie à partir de 55 ans en considérant qu'ils étaient obsolètes, ce qui est complètement stupide. Quand on voit Henri Salvador ou Charles Azdawour qui à 92 ans sont en concert avec 3000, 5000 spectateurs, on voit bien qu'il y a de la ressource. Et puis il y a les auteurs, il y a les comédiens. Je me suis occupé de Madeleine Rollo de Jean-Hubert Barrault, elle a joué jusqu'à 88 ans en scène. C'est nombreux les artistes qui restent actifs à un âge avancé. Il est temps de rappeler que les personnes âgées ont une richesse à apporter dans le dialogue intergénération, avec le recul, la compréhension du temps long, la vision plus large, pour peu qu'ils ne soient pas radotés sur la nostalgie de leur jeunesse.

  • Speaker #0

    Comment vous abordez justement le fait de vieillir ? C'est une question centrale dans votre vie. Est-ce que ça a été une question centrale de vous dire comment je vais faire en sorte de bien vieillir ou d'être l'homme à 80 ou 90 ans que je désire être ?

  • Speaker #1

    Alors, être ce que je désire être, c'est depuis mon enfance que je m'y emploie. On commence à vieillir à la naissance. Et donc, le vieillissement est un processus naturel. Mais par exemple, pendant mes études... J'ai appris que les neurones, on les a au départ, mais après ils se détruisent, mais ils ne se renouvellent pas. Or, depuis quelques années, on sait qu'on peut stimuler le renouvellement des neurones et qu'on continue à fabriquer, même jusqu'à 50 ans, des neurones, à condition d'avoir l'esprit actif. Et donc, le potentiel de récupération, c'est comme avec l'épigénétique, on sait que le mode de vie peut changer même la trame génétique. et qu'on peut améliorer son capital santé, comme on le fait avec la médecine chinoise, la médecine indienne, ayurvédique, en ayant une manière de vivre en équilibre. Et en Chine, on appelle ça Yangsheng, l'art de vieillir en bonne santé. Mon premier voyage en Chine en 1981, je vois des hommes de 80 ans, à l'âge que j'ai maintenant, avec le pied sur un arbre, en train de faire le grand écart. Et moi, je m'occupais de danseuse professionnelle, classique, moderne. Donc pour une danseuse, c'est normal de faire le grand écart. Il y a 80 ans, normalement, il est perclu de rhumatisme, il ne peut pas faire ça. Et souvent, ils ont commencé à travailler à 50 ans pour travailler en souplesse, pour entretenir la flexibilité. Et donc, ça m'a donné confiance et toute ma vie, j'ai pris soin de mon corps pour vivre de manière équilibrée. J'ai beaucoup picolé quand j'étais jeune, entre 15 et 25, pour faire la fête. Et puis entre 25 et 45, j'ai bu un verre de vin par semaine. Je ne fumais pas, pas de café, mais je faisais du sport plusieurs heures par semaine. J'ai couru mon dernier marathon, j'avais 64 ans. Et donc, le vieillissement, il est normal. Je commence à avoir la vue qui baisse, j'ai été opéré de la cataracte, j'ai des aides auditives. Il y a les signes de vieillissement qui m'affectent. Mais j'ai une énergie qui reste assez importante et une agilité physique et mentale parce que j'ai entretenu mon corps très régulièrement. Et la clé, pour les gens qui veulent bien vieillir, en bonne santé, c'est de prendre soin d'eux. Très souvent, tous les jours, très régulièrement.

  • Speaker #0

    On est notre meilleur capital, vieillesse.

  • Speaker #1

    Voilà.

  • Speaker #0

    Vous l'avez étudiée, cette vieillesse, ou c'est finalement quelque chose qui est à côté ? Parce que là, vous en parlez comme vous avez observé dans d'autres pays, vous avez également touché à beaucoup de médecines alternatives différentes de ce qu'on peut entendre aujourd'hui en France. Vous en avez fait certaines fois votre métier. Oui. Donc vous avez creusé bien plus que Berni, mais vous avez creusé ces sujets pour en devenir expert. Justement, est-ce que la vieillesse est quelque chose ? Parce qu'on dit souvent que la prévention, notamment en France, est le parent pauvre de la santé. Comment on explique qu'aujourd'hui, on a gagné en longévité, mais pas forcément les dernières années en très bonne santé finalement ?

  • Speaker #1

    Les laboratoires pharmaceutiques exercent une pression importante sur la formation des médecins. Et les médecins sont formés d'une manière... technicienne, et ça va s'aggraver encore avec l'intelligence artificielle, à distribuer des médicaments, mais pas apprendre aux gens à bien se porter. Sur l'ensemble des généralistes, il y en a un sur deux qui se porte mal parce qu'il n'a pas appris à prendre soin de lui-même. Si vous regardez les chiffres de l'association des internes, un interne sur deux se porte très mal. Il est surexploité par les administrations des hôpitaux et travaille souvent 70-80 heures par semaine. Alors que la limite légale, c'est 55, donc il y a un non-respect de la loi par les administrations des hôpitaux. Et les études de médecine sont extrêmement intenses, les contenus sont très copieux. Mais j'ai une thèse de médecine de l'Université de Strasbourg de 2017 qui montre qu'en 8 ans, 9 ans d'études pour devenir un médecin généraliste, il n'y a que 150 heures de psychologie. Les infirmiers et les infirmières ont 4 ans, 5 ans d'études, ont 1500 heures de psychologie. Comment c'est acceptable ? que les médecins n'aient pas de formation psychologique pour pouvoir dialoguer avec leurs interlocuteurs. On ne soigne pas une maladie, on soigne une personne atteinte d'une maladie ou d'un handicap. Donc cette formation à la relation thérapeutique, elle est indispensable et elle est insuffisante dans la formation de la plupart des soignants.

  • Speaker #0

    Et ça, c'est valable pour tous les corps de métier, tous les corps de la médecine aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Absolument.

  • Speaker #0

    Par contre,

  • Speaker #1

    il y a une réaction ces dernières années, ces dix dernières années. Il y a un film fait par Catherine Bellum sur les tentatives de développer la santé intégrative, que ce soit à l'hôpital, dans des cliniques ou dans des centres de santé pluridisciplinaires. Il y a un vrai mouvement qui est en train de se produire depuis quelques années. Je serai vendredi, samedi, avec Isabelle Célestin, à un congrès de santé intégrative.

  • Speaker #0

    C'est quoi justement ce terme-là, santé intégrative ?

  • Speaker #1

    C'est avoir une approche pour rendre les personnes acteurs de leur santé et se servir aussi des médecines complémentaires. Le docteur Alain Toledano à l'Institut Raphaël a développé 40 médecines complémentaires de la sophrologie à leur thérapie pour aider le traitement des cancers avec l'approche classique du traitement des cancers, mais mobiliser toutes les ressources des patients pour aller plus loin. Il y aura Catherine Cornibert, la présidente de l'association Soins pour soignants, qui viendra parler de ce qu'elle fait. On a 200 000 soignants qui ont démissionné de leur job, tellement avec la fatigue du Covid et de l'afflux de malades qui ont débordé les hôpitaux. Les budgets n'ont pas suivi et on a fermé des lits d'hôpitaux parce qu'on n'a plus d'infirmières pour s'occuper des malades. Donc notre système de santé, il est défaillant. Et on ne forme pas assez bien les soignants et on n'investit pas assez les fonds nécessaires. On ne valide pas assez la bonne gestion des établissements pour avoir les moyens de soigner les gens gravement malades. Et ça passe par l'éducation à la santé pour que les gens soient beaucoup moins malades. En 60 ans d'activité, je me suis arrêté à peu près un jour tous les deux ans parce que j'avais une angine, parce que j'avais un labago, etc. Mais je ne me plains pas. 30 jours d'inactivité sur 60 ans, c'est pas mal.

  • Speaker #0

    Ça va, c'est pas la sécu qui va venir vous chercher. Voilà.

  • Speaker #1

    Mais beaucoup plus de gens pourraient se porter mieux en ayant cette hygiène de vie. Et par exemple, tout le monde sait à peu près ce qu'il faut manger pour bien se porter. La diététique s'est beaucoup développée, même dans les écoles, on fait attention. Mais la respiration consciente, par exemple, qui est gratuite, on n'apprend pas aux gens à respirer. J'ai rencontré les gens de la Fondation du Souffle, les responsables de la prévention. Ils s'occupent des pathologies à nouveau, pas de l'éducation à la santé. J'ai soigné les enfants gravement asthmatiques pour les débarrasser de leur asthme, qui sont devenus des beaux jeunes hommes en pleine forme, qui ont changé leur rapport au corps, à leur respiration, à la gestion de leurs affects, etc. Il n'y a pas que les allergies qui vont entraîner les maladies respiratoires. Il y a aussi la vie intérieure et les difficultés psychologiques. qui vont impacter la manière dont le corps s'épanouit ou pas.

  • Speaker #0

    Vous êtes un amoureux du vivant ?

  • Speaker #1

    On peut dire ça, profondément. Du vivant, parce que quand je voyage, il y a deux choses que je vais visiter. Les lieux en général de prière, les lieux où les gens se retrouvent pour pratiquer leur foi. J'aime bien voir comment ça se passe, l'atmosphère de ces lieux. Mais je visite les jardins. Je visite les plus beaux jardins. Il y a par exemple un jardin zen tout près de chez moi, le jardin albercal où j'étais hier après-midi. Mais il y a un jardin japonais tout près du musée de la Légion d'honneur à San Francisco. Il y a une ville comme Kyoto où il y a 2000 jardins auprès des 2000 temples bouddhistes. Il y a Suzhou en Chine où il y a 140 jardins de mandarins qui sont absolument splendides. J'adore les forêts, j'adore les forêts, les vieux arbres.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que ça nous apprend d'observer davantage le vivant ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est une immersion dans la complexité du vivant. Quand j'étais adolescent, j'avais un petit bateau, j'allais à la pêche pendant l'été. Et donc, j'observais la rivière, j'observais les poissons, j'observais le courant. Je savais qu'il y avait l'invisible dans la nature et je cherchais à le capter, mais ce n'était pas évident. Par contre, l'immersion dans le silence, l'immersion dans le cycle des saisons, ça me touche énormément. Sur mon bateau, j'ai le parc de Saint-Cloud en face de chez moi, je ne m'ennuie jamais de voir les variations de la lumière du matin au soir, les variations du ciel, les variations de la végétation sur les arbres, au printemps la couleur des arbres et puis l'automne. Pour moi, c'est un spectacle infini et magnifique. Et ça me permet de me détacher de mon activisme passionné pour être là et jouir de l'instant présent.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pouvez nous raconter un petit peu votre quotidien à l'aune de vos 80 ans ? Comment vous... C'est quoi votre moteur ? Parce que vous êtes amoureux du vivant, vous vous exercez encore, vous avez mille métiers dans votre vie, vous avez voyagé partout dans le monde, vous avez écrit des livres, on va aborder notamment un livre, La liberté de s'accomplir, tout à l'heure, qui va être peut-être aussi un de nos guides pour l'entretien. Mais c'est quoi votre moteur au quotidien ?

  • Speaker #1

    J'aime les gens. Et j'aime vivre intensément, même dans des registres très sobres. Hier, j'ai rencontré un jeune musicien que j'écoutais chanter et jouer de la guitare. Il avait une voix très mélodieuse, une belle composition. Il y a des moments privilégiés où il y a quelque chose d'intense et de beau qui est à observer. Quelquefois, c'est lors d'un voyage où je vais découvrir des nouvelles choses, mais je prends le temps de la réflexion. C'est-à-dire que j'ai dû me méfier de mon activisme passionné. Je prends des temps pour méditer, pour m'étirer, pour lire, pour réfléchir. Je prends le temps de rencontrer beaucoup de gens. J'ai beaucoup de jeunes professionnels qui viennent me voir pour bénéficier de mon regard sur leur propre projet. Je fais partie de nombreuses associations. Je vais partager avec des collègues, des experts sur des thématiques. J'ai monté avec des amis une soirée sur les spiritualités, les valeurs qu'elles font circuler entre les générations, aussi sur la place de la diversité, de l'inclusion. La société française devient très exclusive et très sauvage. Quand je vois les enfants qui vont poignarder un autre qu'on disciple à l'école, quand je vois cette sauvagerie dans la société, même chez les plus jeunes, je trouve ça extrêmement inquiétant. Et il y a des réflexes de peur. et d'hostilité où on trouve beaucoup de boucs émissaires. On ne sait plus vivre ensemble en paix. On a besoin de retrouver la connexion avec le vivre ensemble et la tolérance et la solidarité largement.

  • Speaker #0

    Est-ce que justement la crainte que partagent beaucoup de gens par rapport au fait de vieillir, parce qu'on se prend aussi beaucoup de dictates sur comment vieillir, il y a des personnes qui ont peur de la vieillesse, il y a des personnes qui prennent des crèmes anti-rides, anti-âge. Est-ce que ça ne favorise pas justement, d'un certain point, cette exclusion et ce mauvais traitement aussi qu'on peut avoir sur les personnes âgées ou les personnes qui vieillissent autour de nous ?

  • Speaker #1

    Alors la peur de la mort, souvent, elle va amener les gens à se ratatiner et à être de plus en plus anxieux. Sauver les apparences, et en particulier pour les femmes, j'ai une amie psychologue et psychosociologue qui s'appelle Danielle Rapoport, qui a écrit un joli petit livre qui s'appelle « L'aventure au coin de la ride » .

  • Speaker #0

    J'aime beaucoup le terme.

  • Speaker #1

    Voilà, elle écrit très bien et elle parle entre autres de la peur des femmes de vieillir et de changer d'apparence, etc. Moins de mes modèles féminins, c'est Jeanne Fonda, qui était une poupée Barbie splendide à 20 ans, 30 ans, quand elle jouait Barbarella, qui était la femme de Vadim, entre autres, mais qui, avec le yoga et le sport, à 85 ans passés, elle a développé une énergie de sagesse, d'ouverture sur le monde et d'humanité extraordinaire. Elle aime le genre humain et elle se bat pour la liberté des femmes et pour accepter la vie qui passe malgré le vieillissement. Accepter de changer d'image, Pamela Anderson qui choisit de ne plus se maquiller, c'est une manière de dire j'accepte de vieillir. C'est vrai pour l'actrice italienne dont le nom va me revenir. Et donc accepter le vieillissement, c'est de la sagesse. Ça ne veut pas dire le subir. C'est-à-dire que si je m'entretiens en ayant un équilibre de vie, en restant actif, en faisant marcher mes neurones, je recommande souvent aux gens qui prennent de l'âge de rester curieux et de, par exemple, de continuer à voyager ou d'être dans la vie associative pour aller participer à des activités artistiques, culturelles, etc. Moi, je me suis mis aux Russes à 60 ans pour entretenir ma mémoire qui commençait à fléchir comme tout le monde. Je n'ai pas retenu beaucoup, mais mes 80 heures de Russes m'ont fait travailler mes neurones. Il y a 65 ans, j'ai pris 60 heures de cours de chinois. Je n'ai pas retenu beaucoup, mais ma mémoire marche beaucoup mieux.

  • Speaker #0

    C'est des langues faciles quand même en plus.

  • Speaker #1

    Et aujourd'hui, j'ai une mémoire qui reste en bon état parce que je l'entretiens. J'organise des lectures à voix haute de poésie, par exemple, où je fais chanter les gens pour qu'ils mémorisent justement les paroles en s'amusant. C'est un jeu d'entretenir ses capacités. Et si on y prend plaisir... Ce n'est pas une contrainte, ce n'est pas fascinant. C'est cette peur de changer d'image qui est le problème, ce n'est pas le vieillissement en lui-même.

  • Speaker #0

    J'aimerais bien qu'on revienne sur certains concepts que vous avez beaucoup développés dans le livre La liberté de s'accomplir. Vous y parlez beaucoup de transmission dans son arbre généalogique, par exemple, mais également de transmission du passé, un peu plus archaïque, de choses qui nous seraient transmises dans notre ADN. C'est intéressant d'avoir ce point justement sur notre regard et comment on évolue dans ce monde et comment on est au monde, chacun, chacun et chacune. Est-ce que vous pouvez nous parler un petit peu de ce point-là ?

  • Speaker #1

    Alors, je vais prendre un premier exemple qui est celui des compagnons du Tour de France. Mais ils n'apprennent pas simplement un merveilleux métier, que ce soit la fironnerie, la menuiserie, la sculpture ou autre chose. Ils apprennent une attitude éthique, une attitude morale, pour être fiers de ce qu'ils font, de leur pouvoir faire, mais humbles dans le fait de contribuer à faire des choses belles. Et donc transmettre des valeurs, c'est essentiel. Et c'est ce qui se passait entre les générations, entre fois. Et les jeunes sont coupés de la relation avec leurs grands-parents. On vit par tranches d'âge. Et moi, j'ai dansé avec les grands-mères dans mon village. Aujourd'hui, on va en boîte de nuit et on va dans une boîte avec des gens de sa génération. Mais il n'y a plus de partage intergénérationnel à part les mariages, les enterrements.

  • Speaker #0

    Qui sont des réunions.

  • Speaker #1

    Les baptêmes.

  • Speaker #0

    Comment on peut retrouver aujourd'hui ? Parce qu'on l'a perdu en chemin pour plein de raisons et on n'aurait pas assez le temps d'un épisode pour expliquer pourquoi on a perdu ça. Comment on peut le retrouver ? Parce que finalement, faisons un peu de prospective. Qu'est-ce qu'on peut faire aujourd'hui pour retrouver ce qui est d'ailleurs possible ? Je vais vous donner un exemple de compagnonnage. Aujourd'hui, il y a des choses qui existent et qui sont là sous nos yeux. Qu'est-ce qu'on peut faire pour que la société, justement, on fasse un peu péter ces silos où on a mis les gens dedans ?

  • Speaker #1

    Alors, je vais vous donner deux, trois pistes, dont le vivre ensemble dans les entreprises. Dans l'entreprise, ça s'appelle l'empowerment. Quand on s'intéresse à la capacité d'évoluer de chaque personne, c'est ce que chaque salarié a comme motivation première. Est-ce que je peux évoluer dans mon travail au fil de mon temps de participation à une entreprise ? Est-ce que je peux continuer à apprendre, prendre des responsabilités ? L'argent, c'est que la troisième source de motivation. La deuxième, c'est le vivre ensemble. Si je m'entends bien avec mes collègues, je suis content d'aller bosser le matin. Parce que je suis avec des gens que j'apprécie, avec qui on s'entend bien. Et donc quand on développe une dynamique de transformation d'un collectif, et qu'on donne à chacun sa chance, la censure sociale peut continuer à fonctionner, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Vous n'avez que 20% des enfants d'ouvriers qui terminent leurs études secondaires. Et donc, à l'époque où c'était Mitterrand, il y avait pratiquement 200 ou 300 députés à l'Assemblée qui étaient des enseignants. Quand c'est la droite qui est au pouvoir, c'est deux ou trois cents médecins, avocats, professions libérales. Mais ce n'est pas donner sa chance à tout le monde. Le slogan « liberté, égalité, fraternité » , il est loin d'être mis en pratique dans la réalité. Donc donner sa chance à tout le monde, retrouver une manière de partager, valoriser les contributions de chacun, c'est un état d'esprit qu'on retrouve dans beaucoup de boîtes familiales comme Michelin, le groupe Bouygues, le groupe Bongrain. Il y a un certain nombre de boîtes où on n'est pas dans l'urgence de faire du fric tous les trois mois, mais on donne leur chance pour que les gens évoluent. Pérennise. C'est en développant le capital humain que l'entreprise crée de la richesse.

  • Speaker #0

    Et quand on sort de l'entreprise et qu'on va vers la société, cette notion aussi de... Parce qu'au micro, j'ai beaucoup de personnes aussi de plus de 70 et 80 qui me disent au moment de la retraite, j'ai perdu mon sentiment d'utilité, je me suis sentie écartée de la société.

  • Speaker #1

    Alors, j'ai mis du temps ça. Alors, c'est une forme de mort sociale. Si en plus, je m'y suis pris un peu tard et j'achète une maison dans la Creuse où je ne connais personne, je vais m'isoler doublement. À l'inverse, il y a beaucoup de gens qui, quand ils prennent leur retraite, s'investissent dans la vie associative. Que ça soit une association culturelle, sportive, peu importe, mais créez du lien et trouvez les choses qui vous plaisent. J'ai chanté deux ans dans une chorale de gospel avec ma femme et ma fille à Bouloï. il y avait 40... 50 personnes. Les plus anciens étaient très accueillants pour les nouveaux et c'était extrêmement solidaire mais très joyeux. Chanter ensemble, c'est magnifique. On se réjouit, on se ressource, on charge les batteries et c'est un bonheur. Donc, participer à des échanges, provoquer des échanges, rencontrer du monde, ne rester pas seul.

  • Speaker #0

    Ça c'est important. Et être curieux. Ne pas être seul, être curieux. Mais ça c'est valable pour tous les âges.

  • Speaker #1

    Oui, mais la grande richesse du vieillissement et de la retraite, c'est qu'on a du temps. Souvent, quand on est actif et qu'on a une famille à élever ou un boulot assuré, on a quelques petits moments, mais on a beaucoup moins de temps. Les grandes vacances, c'est quand même chouette pour faire des choses qui nous plaisent et qui nous font du bien.

  • Speaker #0

    Oui, c'est sûr. Quel est votre regard, vous, que vous portez sur votre propre vieillesse ? Est-ce que déjà, vous êtes l'homme à 80 ans ? que vous avez toujours projeté être.

  • Speaker #1

    Alors, je ne savais pas que j'allais aller si loin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    À 20 ans, j'avais un rêve, je voulais devenir un soignant. À 16 ans, je rêvais de devenir psychanalyste, puis à 40 ans, j'étais psychanalyste reichien. Et donc, j'ai atteint mes objectifs de 20 ans dès la quarantaine. J'ai dû trouver des nouveaux objectifs. Mais étant un fils d'immigré, je n'aurais jamais imaginé qu'à 40 ans, j'allais coacher les PLG du CAC 40. C'est ma manière d'approfondir le facteur humain qui fait qu'on m'a sollicité pour accompagner et faire progresser des gens avec beaucoup de pouvoir. J'ai appris à le faire, je sais le faire, je le fais plutôt bien et ça m'a amené dans des chemins complètement nouveaux. Je n'aurais jamais imaginé aller bosser dans 30 pays pour amener cette dynamique d'équipe performante dans des grands groupes. Donc c'était assez amusant. Mon père est mort à 70 ans, il a travaillé depuis l'âge de 7 ans. Et il a travaillé très dur, donc 15 ans comme envoyé agricole, mais il a travaillé toute sa vie, il n'a jamais pris de vacances. Et comme il fumait, comme il buvait, il jouait aux cartes, son corps a été usé. Et ma mère est décédée à 80 ans. Alors que moi je me disais, je devrais pouvoir aller jusqu'à 90, j'ai une vie plus équilibrée, moins dure. Puis un jour j'étais en République tchèque. car le vivarique est une station thermale avec des clients tchèques. Je leur fais faire une petite expérience dans la forêt, de connexion avec les arbres, etc. Et puis ils étaient en train de méditer, chacun avec leur arbre, et moi avec le mien, avec un beau chêne de 2-3 siècles. Et puis je m'interroge sur ma durée de vie. Ce qui m'importe, c'est de vieillir en bonne santé. Le jour où je ne serai plus tout à fait en bonne santé, je suis prêt à partir, même à interrompre mon parcours. Mais ce jour-là... Avec ce beau chêne, je me suis dit, je m'étais donné une limite de 90, mais au fond, si je suis en bon état, je peux aller jusqu'à 100. Quand je vois Edgar Morin, à 103, 104 ans, qui fait encore des émissions de télévision, il n'y a pas de problème, ça me plairait bien. Il y a un numéro spécial du Point sur les centenaires, et les gens de 100, 102 ans qui sont en bonne santé, c'est parce qu'ils restent tactiques. Soit professionnellement, il y a d'anciens avocats, des écrivains, etc. Soit parce qu'ils bougent physiquement ou bien les deux. Donc, c'est moins l'âge que le fait de vivre le plus longtemps possible en bon état et en prenant plaisir. Il y a un écologiste professionnel qui avait fait une étude sur l'espérance de vie des salariés de la SNCF. Les cheminots qui, depuis l'âge de 16 ans, posent les traverses sur les voies. et travaillent par tous les temps, ils prenaient leur retraite à 55 ans, la plupart mourraient dans les 6 mois qui suivent leur départ en retraite. Ils ont tellement travaillé dur pendant 40 ans qu'ils se sont usés. A l'inverse, les professions libérales qui disposent du choix de leur mode de vie, comme les avocats, les médecins, ont une espérance de vie 5 ans supérieure aux salariés. Les gens qui ont des hobbies, parce qu'ils ont la liberté de choix. Donc ça pèse beaucoup sur la qualité de vie. Les gens qui ont des hobbies, qui pratiquent des activités physiques et qui n'ont pas d'addiction, qui boivent très peu, qui ne fument pas et qui font un peu d'activités physiques, ils ont cinq ans d'espérance de vie supplémentaire. Donc ce sont vraiment des chiffres importants pour les gens qui veulent vieillir en bon état. Prenez soin de vous et ne vous isolez pas, ne vous repliez pas sur vous-même.

  • Speaker #0

    Et j'ai envie de rajouter aussi, apprenez à bien respirer.

  • Speaker #1

    Ça, c'est ce que l'Asie m'a appris.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'on peut en parler un peu, parce que je trouve ça passionnant.

  • Speaker #1

    Avec grand plaisir. Mon intérêt pour la respiration vient de mon adolescence, où j'ai appris à nager tardivement. Mais dès l'âge de 16 ans, je me suis amusé à nager sous l'eau. Et donc j'ai découvert qu'en ravalant ma salive, je pouvais nager quelques mètres de plus. Et donc j'ai appris à nager en apnée et j'arrivais à faire 50 mètres sous l'eau. Quand je suis allé au Japon, j'ai fait pas mal d'apnée en Polynésie aussi, avec les plus pêcheurs. Mais quand je suis allé au Japon méditer avec les moines, j'ai découvert que...

  • Speaker #0

    La spiritualité bouddhiste, c'est de prendre conscience de son corps, prendre conscience de sa respiration et de laisser passer les pensées dans la tête pour ne pas s'y attacher. Donc ce n'est pas réfléchir, c'est être attentif à ce qui est là. Et quand j'ai commencé à aller en Chine ou à apprendre le Tai Chi Chuan, je me suis rendu compte que mettre l'esprit au repos et se détendre complètement, c'était une culture qui se transmettait depuis des siècles. Et moi qui étais un jeune paysan, altérophile, costaud, robuste, rentré dans la délicatesse du relâchement, du mouvement fin, etc. Ça m'a vraiment passionné. J'ai pu entraîner les danseurs professionnels à ce mouvement du Tai Chi Chuan, par exemple. J'ai trouvé ça transformateur de l'état intérieur. Et donc, toute ma vie, j'ai commencé à faire attention à ma respiration, que ce soit avec le pranayama du yoga, avec la méditation ou avec... Le sport, j'ai couru à pied pendant 25 ans, en observant chaque respiration pendant tout un marathon ou pendant chacun de mes entraînements, et la conscience de chaque geste pour être dans la décontraction. En Asie, pour le résumer, on dit que la sagesse c'est d'avoir l'esprit aiguisé, le corps détendu. Et j'invite nos auditeurs à observer leur temps. tonus musculaire pour se relâcher le plus souvent possible, le plus largement possible. C'est comme les lampes à basse consommation. Elles sont obligatoires maintenant, elles consomment moins. Et si vous respirez lentement et profondément, vous décontractez musculairement, vous gardez l'énergie pour agir quand vous en avez besoin. Et vous allez éviter la fatigue. J'ai publié un article sur fatigue et ressourcement dans une revue de coaching en mars. 2023, numéro 18 de la revue Le Coaching Pro. Et si on sait récupérer, prendre du répit, on ne va pas s'épuiser. Moi j'ai travaillé énormément, j'ai travaillé 12 heures par jour pour soigner les gens. Mais si je me relaxe, si je me détends, si je récupère, si je fais la sieste, je vais laisser mon organisme récupérer. Au Japon... on prend des bains à 38-40 degrés le soir pour se décontracter. On se lave avant de rentrer au fur et à mesure du bain japonais. Et on va rester 20-30 minutes à se détendre dans l'eau chaude pour se relâcher, exactement comme les musulmans avant la mosquée le vendredi matin vont aller au hammam. Apprendre à se détendre, les Scandinaves le font avec le sauna. C'est un état d'esprit culturel. On ne s'accorde plus le temps du répit. Avec les réseaux sociaux, les écrans, les gens ont la tête toujours absorbée, et du coup, créent une charge mentale. Alors que s'ils donnent le temps de ne rien faire très régulièrement, leur organisme récupère. Une capacité d'auto-réparation du capital santé. C'est ça. Et de l'alternance. Accepter l'alternance. Il y a le jour, il y a la nuit. Il y a l'hiver, il y a l'été. Il y a un temps pour agir et un temps pour ne rien faire.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'avec votre regard sur le monde, tout ce qui fait que vous êtes Édouard à 80 ans aujourd'hui, tout ce qui vous a façonné, tout ce qui vous façonnera demain, qu'est-ce qu'on peut dire, et j'en fais partie, aux gens qui, en 2025, sont un peu inquiets, anxieux, de ce qui nous entoure ? Alors on n'a pas la main dessus. Vous nous avez donné beaucoup de pistes aujourd'hui sur comment reprendre soi-même aussi et cultiver cette joie intérieure. se reconnecter à soi. Qu'est-ce qu'on peut concrètement faire à tous les âges, aujourd'hui, pour relever peut-être les défis qui nous entourent ?

  • Speaker #0

    Alors, Alain Juppé parlait de sobriété heureuse, et au fond, il reprenait les termes de Pierre Rabhi. Et vivre simplement, c'est une façon de se rendre la vie plus agréable. Si je ne me crois pas obligé d'accumuler, mais que je profite de ce que j'ai. Napoléon disait « Être heureux, c'est dépenser 70% de ce qu'on gagne » . Et donc si, comme beaucoup d'Américains, j'ai 4-5 quarts de crédit et je prends des emprunts à tirer l'arigot, et du coup, quand il y a une crise financière, je suis obligé de vendre ma maison parce que je ne peux plus payer les frais, je suis vraiment embêté. Si je profite de la simplicité, J'aime beaucoup la nature et j'ai marché dans la forêt, j'ai marché dans la montagne. Manger un sandwich au bord du torrent avec un bout de fromage, un bout de pain, une tranche de saucisson, ça ne coûte pas grand-chose. Je n'ai pas besoin d'aller au Club Med dans un 5 étoiles sous les cocotiers pour être heureux. Si je suis dans la nature et que j'en profite... C'est tout à fait à ma portée. Respirer, c'est gratuit. Je peux créer un état de grâce en sachant respirer amplement et profondément, en chantant à tue-tête, en me réjouissant avec d'autres. Ça ne coûte rien. Et donc, profiter de la vie, ce n'est pas accumuler. On a une logique de propriétaire. Marshall McLuhan, qui a écrit « Pieds nus sur la terre sacrée » , raconte l'histoire d'un dialogue entre un chef indien au XVIIIe siècle et un officier français. Et le chef indien lui dit, on n'a pas construit de temple, on n'a pas de ruines à faire visiter. Et chez les Amérindiens, il y a un respect de la nature extrêmement important, mais comme beaucoup de peuples premiers. Et donc, aller vers la simplicité, vivre simplement, se nourrir simplement avec des choses de qualité, avec des circuits courts. Il y a même des gens qui construisent maintenant des quartiers avec des maisons écologiques. avec des jardins partagés, avec des installations collectives.

  • Speaker #1

    Des habitats intergénérationnels.

  • Speaker #0

    Absolument. Il y a des communes qui rachètent des immeubles pour faire des habitats intergénérationnels ou des maisons partagées comme les Baba Yaga. C'est formidable. Ça remet de la vie dans les villages, ça crée des relations nouvelles ou même des expériences chouettes entre les crèches, les jardins d'enfants et les EHPAD où les enfants se re... d'interagir avec des gens disponibles et les personnes âgées sont heureuses de voir des bambins autour d'eux avec cette joie qui manifeste chez les petits.

  • Speaker #1

    Je pense que c'est un beau message à transmettre et à cultiver et à propager. Ce mouvement citoyen qui doit se remettre en marche et en local, parce que j'ai le sentiment aussi qu'on attend beaucoup de choses parfois, des politiques ou d'institutions ou d'entreprises et finalement... ensemble, chacun déjà, si on prend le temps nécessaire pour se reconnecter à soi, au vivant.

  • Speaker #0

    Alors, ce qui est vraiment important, je pense, c'est des projets collectifs, de façon à faire des expériences qui soient un peu plus vastes. Il y a beaucoup de paysans qui ont créé des boutiques où ils vont vendre leurs propres produits en circuit court. C'est le cas en Normandie, mais Intermarché a plus de 20% des produits qui viennent du circuit court. Donc, c'est vraiment... Retrouver la solidarité, la proximité. Et tout seul, ce n'est pas facile de faire quelque chose de cohérent. Alors qu'en collectif, on peut vraiment améliorer les choses. Je serai avec Sylvie à cette rencontre du vieillissement, la gaguette, le 24. C'est une démarche associative communautaire qui permet beaucoup de choses.

  • Speaker #1

    Le pouvoir... Je me suis donné un mot en 2025. Unis. C'est mon mot de l'année.

  • Speaker #0

    Alors, au plan du développement personnel, moi j'invite les gens, et j'ai écrit un chapitre dans La liberté de s'accomplir, sur la liberté d'être unique. Chacun est complètement particulier dans son histoire, dans sa façon d'être, etc. Mais on peut être unique d'un côté et uni de l'autre. Avec un projet commun, des valeurs communes et le vivre ensemble, c'est essentiel. Complètement. Et donc, le dialogue avec les gens différents, c'est justement s'enrichir, comme Montaigne qui disait « Limer sa cervelle contre celle d'autrui » . On s'enrichit de nos différences.

  • Speaker #1

    Tellement important, cette richesse. Vous avez parlé de projets à l'instant. Dans le podcast, moi, j'aime bien aussi que les invités parlent de leurs projets, de leurs rêves et de leurs désirs. Vous, Edouard, ce serait quoi vos rêves et vos désirs ?

  • Speaker #0

    Alors, au travers des podcasts, je me suis demandé pourquoi j'avais accepté autant d'interviews ces deux dernières années. J'ai le sentiment qu'il faut que je synthétise encore plus toute ma richesse d'expérience pour la transmettre. Et je voudrais toucher en l'espace de deux, trois ans autant de gens que j'en ai touché pendant toute ma vie. Et le podcast, c'est une bonne manière. Il y a un garçon qui m'a interviewé, qui est venu de Marseille et qui l'a mis sur les réseaux sociaux. Il a eu 200 000 vues sur Instagram avec l'interview qu'on a pu faire ensemble. Donc c'est une façon de répandre des messages sans me soucier simplement de faire des conférences ou d'écrire des livres. Donc c'est vraiment un de mes buts. Et puis, dans les filières professionnelles, j'espère que je vais pouvoir inspirer les jeunes professionnels pour donner du sens à leur exercice et avoir une approche plus systémique, plus humaine, plus... plus riche, plus porteuse d'épanouissement pour leurs interlocuteurs.

  • Speaker #1

    Et pour vous ? Vous avez des choses pour vous ? Vous avez appris deux langues à 60 et 70. Est-ce qu'il y a d'autres projets ?

  • Speaker #0

    Je vais me mettre à l'espagnol cette année. Mon copain avec qui je vais partir en balade est parfaitement bilingue espagnol, donc je compte sur lui pour me faire progresser. Je veux recommencer à voyager tant que je suis encore en bon état physique, continuer à me cultiver et rencontrer du monde. Ça suffit à mon bonheur.

  • Speaker #1

    Vous avez les yeux qui pétillent, on en parlait tout à l'heure, vous l'avez là. Je ne sais pas quel voyage vous avez en tête, mais j'ai vu des choses passer dans votre regard. C'est bientôt le mot de la fin. Il y a un mot qui est important, c'est le nom du podcast, ça s'appelle Encore. Qu'est-ce que vous mettez derrière ce mot ?

  • Speaker #0

    Alors, j'y mettrais un trait d'union. Au lieu d'écrire en un seul mot, j'écrirais en deux mots.

  • Speaker #1

    Comme Cédric Lapiche.

  • Speaker #0

    En, trait d'union, encore, C-O-R-P-S. Et je vous inviterai à habiter vos corps dans leur richesse complexe. Il y a une alchimie du corps, l'alchimie chinoise, une alchimie corporelle qui vient de la tradition sibérienne. Et donc on va du corps grossier au corps subtil, et on va du corps physique au corps énergétique, puis au corps spirituel. Et il y a une merveilleuse professeure de chinois qui a publié un certain nombre d'ouvrages, Catherine Despeux. Et je vous recommande son livre sur les pratiques des femmes taoïstes, qui explique très bien et très simplement les modes de méditation pour transformer cette conscience fine du corps. Et donc, aller vers la lumière, Mircea Eliade, l'anthropologue, a écrit Mephistopheles et l'Androgyne sur les expériences lumineuses qu'on peut faire, quelle que soit la spiritualité qui soit la nôtre. Cette ouverture du cœur, cette ouverture de la conscience qui va faire que... On se rapproche de la dimension angélique qu'on trouve merveilleusement dans le chant, par exemple. Il y a l'écran de l'incantatrice dont la voix est sublime. Elle nous emmène dans cette direction angélique. Ça permet de partir joyeux à la fin d'une longue vie.

  • Speaker #1

    Merci. Merci, Edouard, pour ce moment de connivence, de joie. vraiment du bien d'entendre des messages d'espoir et d'avoir le témoignage d'un homme à 80 ans. Je redis l'âge parce que ça fait partie aussi du jeu du podcast, justement, de donner envie aux gens de se dire « Ah ouais, quand même, j'aimerais bien parler comme Edouard à 80 ans, j'aimerais bien raconter ce que j'ai fait, j'aimerais bien raconter mes projets. » Et ce que vous venez de nous transmettre au micro, c'est ça. C'est donner de l'espoir. donner envie aux gens aussi de se connecter aux autres, les uns aux autres, d'avoir cette curiosité de l'autre, donner envie aussi de se reconnecter à soi pour cultiver sa joie intérieure, on en a besoin en ce moment. Donc c'est des beaux cadeaux que vous nous avez fait.

  • Speaker #0

    Je recommande vraiment aux personnes âgées de prendre le temps de raconter leur histoire, à leur famille, à leurs proches, parce qu'ils ont un partage de leur regard sur le monde qui est très précieux. Et j'ai une amie qui est prof de cinéma, qui a formé plein de... technicien au Mali, entre autres pour les télévisions du Mali, qui fait beaucoup de films documentaires, et qui aujourd'hui fait des vidéos biographiques. Il y a des gens qui vont se faire aider par quelqu'un qui va aider à écrire leur histoire, que ce soit par écrit, en audio, en visio. C'est très important de la raconter, parce que j'ai quatre petites filles, elles sont très heureuses d'apprendre des choses sur ma compréhension de l'histoire familiale. Donc c'est un beau cadeau à faire à sa famille, à ses proches, voire à ses amis, de prendre le temps de...

  • Speaker #1

    Mais c'est réciproque. J'invite aussi à tous les auditeurs, auditrices, peu importe leur âge, à poser des questions parce que parfois on n'ose pas. Et la naissance de Encore, je l'avais raconté dans un épisode, c'est quelques temps avant que ma dernière grand-mère encore en vie décède, je suis allée l'interviewer. Et j'ai eu un moment... que j'avais... Je ne l'ai dit à personne. Je n'ai ni dit à mes cousins, cousines, ni dit à mon père qui venait de perdre sa mère. Je lui ai dit après, je lui ai offert ce cadeau, dire si un jour tu veux entendre à nouveau le rire de ta mère, je l'ai. Et ce moment-là avec elle, il est gravé à vie parce que j'ai osé. Je savais aussi qu'elle allait mourir. Et j'ai osé lui dire, mamie, il faut absolument qu'on se pose et que tu me racontes des choses que je ne sais pas de toi. Et je suis tellement heureuse de l'avoir fait parce que c'est jamais trop toi. Trop tard. On ne peut pas avoir des regrets et l'audio a une puissance d'échange au-delà de la vidéo, qui est un super média. Mais la puissance de l'audio, de réécouter la voix de quelqu'un une fois qu'il est parti, cette personne, ou juste se poser et creuser des choses, c'est des cadeaux merveilleux à se faire. Donc on invite tout le monde à se poser des questions, à creuser et à partager, parce que c'est ça finalement la vie et être humain, c'est ça. Ça vous va comme conclusion, pas Edouard ?

  • Speaker #0

    Tout à fait.

  • Speaker #1

    Merci encore d'être venu.

  • Speaker #0

    Merci de votre accueil.

  • Speaker #1

    D'avoir renommé le podcast encore en deux mots. On ne me l'avait pas encore donné celle-là, je l'attendais. Et je vous dis à très bientôt. Merci Edouard. Merci d'avoir écouté cet épisode. J'espère qu'il vous a plu. Si c'est le cas, gratifiez-le d'un maximum d'étoiles sur votre plateforme d'écoute préférée. Et surtout, parlez-en autour de vous. Et pour suivre les coulisses, retrouvez Encore sur Instagram. À bientôt !

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