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Epicea - témoignages inspirants de personnes engagées

Taxer les riches? parlons justice fiscale

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51min |17/11/2025
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Description

Taxer les riches? Parlons justice fiscale!

J'ai la chance de recevoir 2 pointures du sujet:

  • Julien Desiderio - expert en fiscalité chez Oxfam

  • Bruno Fierens - premier membre belge de 'millionaires for humanity'

50min pour comprendre pourquoi rétablir la balance fiscale est nécessaire et comment on doit avoir cette conversation.
Bonne écoute!



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, ici Laurie, et vous écoutez Epicea,

  • Speaker #1

    un podcast dédié aux témoignages inspirants de personnes engagées.

  • Speaker #0

    Je me fais un café et je vous explique. Il y a un sujet dont j'aimerais vous parler depuis un moment, mais c'est pas si facile de le prendre par le bon bout pour qu'il fasse sens pour vous et surtout que j'arrive à bien raconter l'histoire. C'est la justice fiscale. Taxer les riches. Pourquoi ? Comment ? Comment ça se fait que la justice fiscale, elle est pas là pour le moment, que c'est pas équilibré ? Et du coup, aujourd'hui, là, va arriver dans quelques minutes chez moi Julien Desiderieux de chez Oxfam, expert en justice fiscale, expert en fiscalité. Et du coup, il va nous raconter plein de trucs. Je vous laisse avec lui.

  • Speaker #1

    Moi c'est Julien Desiderio, je suis chargé de plaidoyer pour l'ONG Oxfam sur les questions de fiscalité et d'inégalité. Oxfam c'est une ONG internationale dont l'objectif c'est de changer les systèmes pour combattre les inégalités. En fait on reconnaît que les inégalités elles sont au cœur des systèmes, elles sont structurelles et que donc c'est par... la politique et par des mesures, notamment en matière de justice fiscale, qu'on va réduire les inégalités dans le monde. Et donc pour l'instant, on a une campagne qui s'appelle Make Rich Polluters Pay, donc faire payer les riches pollueurs, qui est en fait une campagne qui a démarré comme une campagne Tax the Rich. Pourquoi Tax the Rich ? Parce qu'aujourd'hui, on a de plus en plus de preuves, d'évidence, de recherches universitaires qui montrent que les... plus riches, les milliardaires dans le monde ne payent pas leur juste part d'impôt. Donc l'impôt, nous on dit tout souvent que c'est le prix à payer pour une société civilisée, donc ça veut dire une société où on a des services publics, une société où on a des soins de santé qui sont accessibles, où on a une justice qui est efficace, et donc tout le monde doit contribuer d'une manière ou d'une autre au financement de ses biens collectifs, mais ça doit se faire de manière proportionnelle, et donc tout le monde ne doit pas participaient de la même manière. C'est cette fameuse idée des épaules les plus larges qui doivent contribuer une plus large proportion. Aujourd'hui, on voit que ce n'est pas le cas. Par exemple, en Belgique, les 1% les plus riches payent deux fois moins d'impôts sur leurs revenus que la classe moyenne. C'est injuste, ce n'est pas normal. Ça crée des problèmes en matière d'assentiment à l'impôt. Mais ça crée aussi des problèmes en intérieur d'accumulation du patrimoine entre les mains des plus riches. Et l'accumulation du patrimoine entre les mains des plus riches, ça fait aussi une accumulation de pouvoir. Et après, on arrive à des situations extrêmes, comme on le voit aux Etats-Unis, où pendant tout un temps, on a eu un président milliardaire avec son bras droit qui était l'homme le plus riche du monde et qui décidait de couper dans tous les budgets de la coopération et de développement à travers le monde. Et donc qui s'attaquait aux personnes les plus précarisées de la planète. Et donc ça, c'est un système extrême contre lequel on se bat aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Comment ça se fait que les riches, les milliardaires et j'imagine aussi certains millionnaires ne payent pas d'impôts ? Comment ça se fait ? Parce que nous, on est taxé sur le revenu. On ne le voit même pas quand on est salarié. Je sais, c'est une question un peu naïve, mais comment ça se fait du coup ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas une question naïve parce que c'est quelque chose qui revient souvent. Les gens ont du mal. à comprendre ces mécanismes-là. Pourquoi ? Parce que les gens, à la fin du mois, ils reçoivent leur paye, ils reçoivent leur chèque, et bien souvent, c'est le seul revenu qu'ils ont. Parce que la plupart des gens ne saisissent pas, et c'est tout à fait normal parce que c'est pas accessible à tout le monde, c'est que pour la catégorie des millionnaires et des milliardaires, il y a d'autres formes de revenus qui entrent en compte, qui sont moins... liquide, ça veut dire qu'on peut moins... Ça veut dire que, simplement, on ne va pas aller acheter son pain avec, mais par exemple, si je prends un cas extrême, c'est souvent très facile de prendre un extrême pour présenter cette problématique. Si tu prends Elon Musk, Elon Musk, il a des entreprises, Tesla... X, etc. La fortune d'Elon Musk, elle ne réside pas sur son compte en banque, elle réside dans les actions au sein des entreprises qu'il possède. Et même s'il ne peut pas acheter du pain, de l'eau, du lait avec ses actions Tesla, il peut quand même acheter Twitter, parce que c'est grâce à ses actions Tesla qu'il a mis en collatéral pour faire des prêts auprès des banques et ne pas payer d'impôts, parce qu'on ne paye pas d'impôts sur des prêts. qu'on fait auprès d'une banque, qu'il a pu racheter Twitter. Il y a aussi un autre système qui est un peu plus généralisé, qui est celui des holdings. Et donc une holding, c'est quoi ? Une holding, c'est une entreprise qui va faire écran à l'impôt que devraient payer normalement les milliardaires. Et donc par exemple, ils ont des actions dans des sociétés. Ces sociétés génèrent une activité, vont générer un bénéfice et puis vont verser des dividendes. Si ces dividendes sont versés dans la holding du millionnaire ou du milliardaire, elles seront en principe exemptées d'impôts. Mais ça ne veut pas dire qu'après, une fois que cet argent est dans la holding, les milliardaires ne peuvent pas s'en servir. Ils peuvent s'en servir pour racheter d'autres entreprises, ils peuvent s'en servir pour racheter des médias, pour racheter de l'influence, etc. Ou même pour acheter un yacht aux îles Caïmans ou aux Bahamas. Ce qui est important de comprendre, c'est que l'argent qui est arrivé dans cet holding n'a pas été taxé. Et qu'au final, la personne qui va être la bénéficiaire effective du yacht, du jet, etc., ce n'est pas l'entreprise, c'est la personne qui possède cette entreprise.

  • Speaker #0

    Complètement, c'est la famille qui détient l'holding, qui va pouvoir jouir de l'argent de l'holding, mais sans être taxé dessus. Très peu, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, c'est un peu le principe. Je caricature, le système est très complexe, mais en gros, ça, c'est le principe.

  • Speaker #0

    Ok, très bien. Et donc, du coup, par rapport à moi qui suis dans la classe moyenne, qui paye, je dirais, un gros 40% d'impôts, un millionnaire, un milliardaire en Belgique, il paye combien de pourcents d'impôts ? Enfin, d'impôts, oui, il contribue à hauteur de combien de pourcents ?

  • Speaker #1

    En fait, on a estimé... Il y a une étude en Belgique qui est tout à fait récente et super révolutionnaire, je trouve, parce qu'on manquait vraiment de ces infos-là en Belgique, que les 1% les plus riches payent 23% de leurs revenus en impôts, alors que la classe moyenne, la moyenne des Belges, pas la classe moyenne, mais la moyenne des Belges, paie 43% de leurs revenus en impôts. Mais là, c'est tout impôt confondu. Donc c'est l'impôt sur le revenu, c'est l'impôt des sociétés, c'est... La TVA, c'est important parce que souvent on pense que les gens qui sont les plus précaires, les plus pauvres, les gens qui ont peu de revenus ne payent pas d'impôts, mais en fait tout le monde paye des impôts, même des SDF payent des impôts parce que dès que tu achètes un bien dans un supermarché, tu payes de la TVA là-dessus. et donc ça c'est allez tu vas payer 6% ou 21% de TVA sur certains produits les gens payent de l'impôt là-dessus et ça pèse beaucoup plus dans le portefeuille des personnes qui ont moins de revenus que dans le portefeuille des millionnaires et des milliardaires. Et donc aujourd'hui, la classe des 1% les plus riches en Belgique, c'est celle qui, par rapport à toutes les autres classes de revenus, paye le moins d'impôts.

  • Speaker #0

    Et quand on vient avec ce discours de justice fiscale près des décideurs, qu'est-ce qui se passe en fait ? Parce que ça fait sens ce que tu me racontes là, c'est des chiffres, c'est des études. Comment ça se fait qu'on n'a pas de mécanisme mis en place pour rééquilibrer la contribution de chacun ?

  • Speaker #1

    Il y a des décideurs qui sont favorables à changer le système. Aujourd'hui, ils ne sont pas forcément tous au gouvernement. En tout cas, s'il y en a qui sont au gouvernement, ils sont extrêmement minoritaires. Après, il y a toujours cette histoire de la théorie du ruissellement qui est encore très vivace. Donc la théorie du ruissellement, c'est quoi ? C'est une théorie qui nous vient des années 80, des Ronald Reagan et des Thatcher. Et d'ailleurs, Bardo Hever aime bien. Citer Margaret Thatcher et Georges Louis Boucher aussi. Cette théorie, elle dit qu'en fait, baisser les impôts sur les plus riches, ça va rejaillir en croissance et en emploi sur le reste de la population. Mais c'est ce que Macron a fait pendant des années en France. Et en fait, tout ce qu'il a réussi à faire, c'est creuser le déficit et les inégalités du pays. Et donc ça ne marche pas. Donc même le FMI a dit, même des études ont été menées par l'université d'Oxford. et évaluer sur le long terme ces politiques de ruissellement dans les pays de l'OCDE. Et les conclusions, c'est que ça a augmenté les inégalités et ça n'a pas créé la croissance et les emplois qui étaient souhaités.

  • Speaker #0

    Ok, donc c'est vraiment un leurre, c'est un mythe en fait. C'est un mythe, oui. Ça a déjà fonctionné ? C'est pour ça qu'on pense ça ?

  • Speaker #1

    Non, ça n'a jamais fonctionné. Donc c'est ça en fait, on a le recul aujourd'hui pour montrer que ça ne fonctionne pas, qu'aujourd'hui on est dans un moment où, coupé dans les services sociaux, Ça va ralentir l'économie. En plus, on a un gouvernement qui décide, surtout en Wallonie, une des premières mesures, c'est d'octroyer des avantages fiscaux sur les successions ou sur les droits d'enregistrement, mais des avantages fiscaux qui, on le voit, bénéficient majoritairement aux classes les plus privilégiées de la population. Et donc ça, c'est des mesures qui creusent le déficit. Et après, on vient nous dire que voilà le déficit des rails, qu'il faut couper dans la santé, couper dans les services sociaux, augmenter le minerval des universités. Mais en fait, tout ça, c'est des choix politiques. Et souvent, on dit, bah oui, il y a une rage taxatoire en Belgique. Les gens payent beaucoup trop d'impôts. Mais en fait, oui, c'est vrai, quelque part, quand on est dans la classe moyenne en Belgique, on paie vite beaucoup d'impôts. Mais c'est pas le cas de tout le monde. et en fait ce dont on a besoin aujourd'hui C'est un rééquilibrage de l'impôt, surtout entre le travail et le capital. Les gens qui bossent payent aujourd'hui beaucoup plus d'impôts que des gens qui tirent des revenus uniquement de leur capital. Un exemple très simple, on avait calculé chez Oxfam quelqu'un qui gagne 40 000 euros brut par an uniquement de par son travail. paye en moyenne 30% d'impôts sur ce revenu. Donc des 40 000 euros, on va retirer 30% pour financer les services publics, les services à la collectivité, etc. Jusqu'à ce jour, jusqu'à aujourd'hui, quelqu'un qui fait 40 000 euros de revenus en achetant et en revendant des actions, en faisant une plus-value sur ses actions, va payer 0 euros d'impôts. Donc pour le même type de revenus, dépendant d'où ça vient, il y en a un qui paye 30% d'impôts, et l'autre qui paie 0% d'impôts. Mais celui qui paie beaucoup d'impôts, c'est celui qui bosse, c'est celui qui se lève tous les matins. Alors que pour faire des plus-values, il faut juste avoir un capital. On peut avoir un capital de départ, on peut hériter d'un capital. On ne doit pas forcément avoir travaillé pour après investir en bourse et générer des plus-values. Chaque année, on publie un rapport mondial sur les inégalités dans le monde, en janvier. Et on collabore notamment avec les millionnaires for humanity et les patriotiques millionnaires. qui sont en fait un groupement de millionnaires et de multimillionnaires qui demandent à payer plus d'impôts. C'est des gens qui disent, ben voilà, moi je vis très bien avec ce que j'ai, je pense qu'aujourd'hui on a un besoin d'investissement public, on a besoin de rééquilibrer le système fiscaux, on a besoin de plus de solidarité pour financer nos sociétés et les collectivités.

  • Speaker #0

    Et la décarbonation, notamment.

  • Speaker #1

    Et la décarbonation, oui. C'est aussi pour ça que notre campagne s'appelle Make Rich, Pollute Your Spee, parce qu'on demande de taxer les plus riches de façon équitable pour financer notamment l'investissement public dans la transition climatique.

  • Speaker #0

    Oui, et comme tu dis, c'est de façon équitable. Il n'est pas question, encore une fois, de...

  • Speaker #1

    De spoliation, pas du tout. Oui,

  • Speaker #0

    c'est ça.

  • Speaker #1

    Par exemple, il y a la fameuse taxe Zucman. Donc ça, c'est super populaire pour l'instant. vraiment mis la lumière sur la question de justice fiscale. Et ce que Zucman propose, c'est un taux minimum de 2% sur la fortune des milliardaires. C'est-à-dire qu'on taxerait les milliardaires à 2% minimum sur leur fortune. Donc minimum, ça veut dire déduire... des impôts qu'il paye déjà. Donc s'il paye déjà 2%, il ne paierait pas un impôt supplémentaire.

  • Speaker #0

    C'est s'assurer qu'il paye déjà 2%.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, un minimum de 2%. Mais ce que Zucman montre, c'est que même en payant ces 2%, la fortune des milliardaires continuerait à augmenter. Donc voilà, nous chez Oxfam, ce qu'on voudrait, c'est un peu amorcer une déconcentration de ces fortunes-là, des super grandes fortunes qui aujourd'hui... ont un pouvoir sur nos démocraties qui est complètement démesuré, qui est en dehors de tout cadre démocratique. Donc on ne vote pas pour des milliardaires mais ils ont parfois plus d'influence sur nos vies que les choix politiques qu'on fait dans les urnes. Mais donc voilà, aujourd'hui on est dans ce débat de dire mais en fait même 2% d'impôt sur la fortune des milliardaires, chez certaines personnes c'est vu comme de la spoliation, mais nous sur nos revenus on paie jusqu'à 30-40% d'impôt. Enfin voilà, il y a cet équilibre. Et alors je voudrais surtout pas tomber dans l'idée de dire « Ah oui, mais alors baissons les impôts absolument sur nous, sur la classe moyenne, sur les gens qui sont plus précaires, etc. » Ok pour ça, mais si on baisse les impôts sans compenser, alors on va perdre... On fait des économies dans quoi ? On fait des économies dans la santé ? On fait des économies... Dans la justice, on fait des économies, dans la sécurité, dans le climat, enfin voilà.

  • Speaker #0

    Non bien sûr, il faut des rentrées, l'État a besoin de rentrées pour faire fonctionner les services publics, pour payer les retraites, on oublie toujours, mais il y a une grosse partie de l'impôt qui part dans les retraites. L'idée en fait c'est de rééquilibrer qui contribue, mais cette enveloppe elle doit rester là, même elle doit croître par rapport à tous les sujets auxquels on doit faire face, comme notamment... Le changement climatique, les inégalités croissantes, cette enveloppe doit rester là et croître pour faire face à tout ça. Mais oui, on doit rééquilibrer de qui contribue à cette enveloppe finalement.

  • Speaker #1

    Et ça, c'est ce que demandent les millionnaires avec lesquels on travaille. Même des gens comme Warren Buffett, qui est un des hommes les plus riches du monde et qui n'est pas du tout membre de ce groupe de millionnaires, il a eu cette phrase qui, je trouve, est vraiment révélatrice. Il y a une guerre des classes aujourd'hui. La lutte des classes, c'est les millionnaires contre le reste du monde. Et c'est ma classe, celle des milliardaires, qui est en train de la gagner. Et donc, même quelqu'un comme Bill Gates va dire « Mais oui, ça ne me dérangerait pas de payer plus d'impôts » . Quelqu'un comme Marlène Engelhorn, qui est l'héritière du groupe chimique BASF. Elle, elle a dit, elle est membre de ce groupement de millionnaires et elle dit mais en fait, voilà, moi, je veux redistribuer ma fortune parce que je l'ai héritée, je vis très bien, je peux en redistribuer une partie pour la collectivité et financer des projets sur lesquels les gens vont s'accorder, vont débattre et vont décider ce qu'ils veulent financer, ce qui est bénéfique pour la société.

  • Speaker #0

    et du coup il y a un truc dont j'ai envie de parler c'est que Donc ces personnes fortunées, elles sont au courant qu'elles payent très peu d'impôts, en tout cas pour la plupart. Il y en a qui sont d'accord de redistribuer, il y en a probablement moins. Une majorité probablement n'est pas d'accord de redistribuer. Mais du coup, elles mettent un mécanisme quand même en place qui est la philanthropie. Et du coup, elles se défendent avec ça. Ça devient un argument de je ne paye pas, je ne paye peu d'impôts. Oui, mais j'investis dans tel et tel projet et j'ai dépensé des millions dans ça et des millions dans ça. Comment, chez Oxfam, et comment toi, vous gérez cet argument-là de la philanthropie ?

  • Speaker #1

    En fait, la question de la philanthropie, on ne va jamais critiquer quelqu'un parce qu'il donne de l'argent à une cause qu'il estime bonne. Mais souvent, les causes que les philanthropes estiment bonnes ne sont pas nécessairement celles qui vont bénéficier à l'ensemble de la société. Donc en fait, ce que nous on dit, c'est qu'aujourd'hui, on ne peut pas compter... On ne peut pas compter sur les milliardaires ou les millionnaires pour financer par la philanthropie notre système de soins de santé. On ne peut pas compter sur la philanthropie pour financer notre système de justice. On ne peut pas compter sur la philanthropie pour financer notre système éducatif. Donc aujourd'hui, ok, c'est très bien, faites de la philanthropie, c'est super, mais d'abord aussi payez vos impôts de manière juste. Il faut savoir que la philanthropie, ça vient des Etats-Unis. Ça vient d'une époque où il y avait une extrême concentration des richesses dans le pays, je crois qu'on appelait ça le Gilded Age à l'époque, avec des types comme J.P. Morgan, tous ces super... les Rockefellers, etc. Et qu'en fait, à l'époque, ces gens payaient presque pas d'impôts. Et qu'un des moyens pour continuer à ne pas payer d'impôts face au mécontentement populaire qui montait dans la population aux Etats-Unis parce qu'il y avait des inégalités croissantes, ça a été de dire, ben ok, voilà ce qu'on va faire, c'est qu'on va créer des oeuvres philanthropiques, mais elles seront exemptes d'imposition, mais en échange, on rend cet argent vers la société. Mais le problème de la philanthropie, qui est très bien encore une fois, c'est très bien de faire de la philanthropie, je ne vais pas critiquer ça, mais c'est qu'en fait, on va financer des choses qui ne sont pas nécessairement bonnes pour l'ensemble de la société, et en fait, on est vraiment dépendant du bon vouloir des milliardaires qui décident, « Oui, ça, ça mérite d'être financé, ça, ça ne mérite pas d'être financé, ça, ça mérite d'être financé. » Une fois, j'étais en débat avec une avocate fiscaliste, et on parlait justement de la taxation des plus riches. Et elle nous a dit, oui mais en fait, le problème, c'est que l'argent il est mal dépensé, tu peux le penser, mais après il y a un processus qui s'appelle le vote, on élit des parlementaires, qui après vont former un gouvernement, et après voilà, le gouvernement, ça s'appelle la démocratie représentative, donc voilà, c'est mal géré, tu peux l'estimer, mais...

  • Speaker #0

    Alors vote pour les gens qui gèrent le moins mal selon toi.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, exactement. Et donc ce qu'elle nous disait c'était, je suis sûr que si vous demandez aux millionnaires qu'est-ce qu'il faut faire avec leur argent et que vous le faites ensuite, ils vont accepter de payer plus d'impôts. Mais ça on a déjà essayé, c'était au début du 19e siècle, du 20e siècle, ça s'appelait le suffrage censitaire. Et donc en fait ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'on doit donner... plus de poids aux millionnaires, aux gens qui ont un gros patrimoine. Les gens qui ont un gros patrimoine devraient avoir plus de voix, plus de poids sur la société dans les décisions qu'un gouvernement doit prendre par rapport aux commandes immortelles. C'est un peu l'idée qui revient souvent de dire, mais en fait, si vous leur demandez, ils accepteront de payer plus d'impôts. Et souvent, c'est des gestionnaires de fortune qui nous disent ça.

  • Speaker #0

    Il y a un dernier point que je voudrais aborder avant qu'on clôture cette partie. C'est cette fausse croyance que si les gens sont millionnaires ou milliardaires, donc si les gens sont fortunés, c'est qu'ils ont travaillé dur. Alors qu'on sait actuellement qu'il y a une part significative des personnes fortunées qui sont simplement des héritiers. Donc ils sont nés riches quoi.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est ça. Donc je crois qu'aujourd'hui, la première cause d'enrichissement des milliardaires à travers le monde, c'est l'héritage. 69% de la fortune des milliardaires à travers le monde ne provient pas du mérite. Ça ne veut pas dire que les 30% qui restent, ça provient du mérite. Mais en tout cas, sur trois critères qu'on avait évalués, qui étaient la détention d'entreprises qui sont des monopoles, donc qui vont contre la concurrence, qui sont mauvaises pour le marché et pour les consommateurs. Ça, c'est un élément. Ensuite, un deuxième élément, c'est l'héritage. C'est le premier facteur dans ce qu'on avait évalué par rapport à la richesse qui n'est pas méritée entre les mains des milliardaires. Et un troisième élément sur lequel parfois on oublie, mais il y a les questions de corruption, les questions de clientélisme, le fait qu'il y a beaucoup de milliardaires qui ont fait fortune aussi parce qu'ils ont reçu des contrats de la part des États dans lesquels ils sont. Par exemple Tesla, c'est une des entreprises les plus subsidiées aux États-Unis. C'est incroyable. Déjà c'est super violent de dire que c'est en bossant qu'on devient milliardaire. Parce que ça veut dire que tous les gens qui se lèvent tous les matins, qui ont des travaux qui sont pénibles, qui franchement se cassent le dos au boulot, on pense aux infirmières, aux gens qui ramassent les déchets dans les rues, vraiment des métiers pénibles, aux cheminots, etc. Ça veut dire que ces gens, parce qu'ils ne sont pas milliardaires, ils ne sont pas méritants, qu'ils ne bossent pas assez, c'est un peu l'idée. et ensuite il y a un truc qui est hyper violent aussi c'est de dire que les milliardaires sont Riches parce qu'ils ont juste bossé, mais la richesse des milliardaires est toujours collective. Parce que leurs entreprises ne reposent pas uniquement sur eux, il y a plein de collaborateurs qui sont derrière. Il y a aussi l'État qui est présent, et c'est important de le rappeler. Par exemple, si je pense à Marc Cook, qui est un de nos milliardaires belges, Merci. Marc-Court a fait fortune en Belgique, mais c'est aussi parce qu'en Belgique, il avait la possibilité de lancer son business, parce qu'il y avait une sécurité sociale, parce que ses employés pouvaient revenir rapidement au boulot après être tombés malades. parce qu'il y avait un système d'éducation et des universités qui permettaient aussi d'embaucher des profils qui correspondaient. Et donc tout ça, c'est financé par la collectivité. Et donc la richesse des milliardaires, elle n'est jamais individuelle. On a souvent tendance à dire, ah mais regardez, il est super riche, alors il est super intelligent, il est super travailleur, ah c'est un génie. Certainement que certains de ces milliardaires, ils ont une part de... Peut-être qu'ils sont certainement visionnaires sous certains aspects, mais réduire leur réussite, à juste du génie et quelque chose d'individuel et quelque chose qui est relatif juste au mérite c'est complètement louper tous les processus collectifs sur lesquels la société se repose pour se construire et c'est complètement ignorer les milliers de collaborateurs et les milliers de gens qui en fait créent la plus-value aujourd'hui dans les entreprises

  • Speaker #0

    Ok, donc grâce à Julien, maintenant, on comprend mieux les rouages du système fiscal, de comment on en est arrivé là et de comment on pourrait aussi rétablir une forme de justice fiscale. Maintenant, je vous propose d'en discuter avec une personne directement concernée, une personne fortunée qui va aussi nous parler de justice fiscale. Et dans quelques minutes, arrive chez moi Bruno Firenze. Je vous laisse avec lui.

  • Speaker #2

    Alors bonjour, je m'appelle Bruno Firenze. Si je suis ici, c'est parce que je suis le premier membre belge de Millionaires for Humanity. Et je suis plein d'autres choses, mais là, c'est ce qui est pertinent aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Tout à fait. Est-ce que tu peux du coup nous partager ton parcours ? Comment en fait tu en es venu à devenir membre de Millionaires for Humanity ?

  • Speaker #2

    Donc moi, je fais partie d'une famille belge qui est fortunée. Je fais partie d'une cinquième génération, donc on va dire du capital de ce que j'appelle générationnel. Et qu'est-ce qui m'a mené à devenir l'année passée membre de Millions for Humanity ? Ça a été un parcours assez long, si je retourne en arrière, qui a commencé par une conscience environnementale qui s'est accrue. Et puis il y a eu une période... plus philanthropique où j'ai fait un peu, j'étais actif avec une organisation très chouette, Douche Flux, et là c'est plus de la lutte contre la pauvreté. À côté de ça, il y a toujours eu pas mal de réflexions sur ma position privilégiée, on va dire, et une situation locale et globale d'inégalité qui se détériore, qui se dégrade. Et puis je crois que j'ai eu un moment où je me suis dit, Bon bah écoute-ci. Si. Si je suis vraiment sérieux à propos d'essayer de changer toutes ces choses pour le mieux, alors en fait, la taxation équitable, c'est le sujet sur lequel il faut se concentrer. Après, ça, c'est la longue route. J'ai eu des moments plus concrets aussi. Je lisais pas mal de choses ou j'écoute beaucoup de podcasts par rapport à ce sujet. Je me souviens que je lisais une interview. d'un journaliste flamand qui avait écrit un gros livre, La machine à inégalité. Et je me suis dit, mais lui, il faut absolument que je le rencontre. Et j'ai réussi à le rencontrer, on a parlé pendant une heure. Et dans son livre, il avait écrit, par exemple, une chouette phrase qui disait « L'inégalité est un système, un ensemble de lois et d'accords plus qu'un vice. » Et je trouvais ça assez intéressant. J'ai lu tout son livre. Et en fait, je me disais, mais c'est de nouveau un livre... ou une analyse, comme j'en ai déjà lu beaucoup, c'est une sorte d'analyse macroéconomique qui dit la situation va de mal en pire, il faut absolument y faire quelque chose et il y a une petite catégorie de gens qui en profitent un maximum. Je me suis dit oui, mais ça c'est l'analyse macro, moi ce qui m'adressait c'était les dynamiques au niveau micro qui font qu'on a l'impression que c'est inarrêtable. et puis il y a eu un moment Vraiment très concret, dont je parle en fait, que j'utilise souvent comme exemple, mais c'est un bon exemple, donc je vais le réutiliser. Ici, à Bruxelles, incertainement, on avait décidé de ne plus avoir de voiture. Et quand on décide de laisser tomber sa voiture, on peut rendre sa plaque d'immatriculation et on a droit à une prime environnementale, une prime de mobilité. Et il y a une prime minimum et une prime maximum. Et en tant que membre des 1% en Belgique, j'ai eu droit à la prime maximum. Et là, je me suis dit, mais c'est quoi cette histoire ? Donc en fait, il y a toute une partie de ma réalité financière qui n'est simplement pas prise en compte. C'est comme si elle n'existait pas. Et à ce moment-là, je me suis dit, bon, écoute, maintenant, tu arrêtes de te poser toutes ces questions, tu t'assieds, tu te confrontes à cette histoire, t'essayes de répondre à toutes ces questions aussi. Et j'ai commencé une sorte de gros mélange d'analyse personnelle et sociétale, où je me suis utilisé moi-même comme symptôme de société. Et où...

  • Speaker #0

    Oui, pour essayer de répondre aux questions. Quelles sont les micro-dynamiques qui soutiennent cette inégalité croissante ? Et quel est mon rôle dans toute cette histoire, que je le veuille ou non, qu'il me plaise ou non ? Et ça, in fine, ça a mené à devenir membre de Millionaires for Humanity et à plaider pour une taxation plus équitable. Donc ça veut dire un meilleur équilibre, en fait. Plus taxer le capital et moins taxer le travail. Je dis quand même les deux toujours ensemble.

  • Speaker #1

    Et qu'est-ce que ça veut dire en fait être membre de Millionaires for Humanity ? Tu t'inscris sur internet et puis qu'est-ce qui se passe en fait ? Tu rencontres une communauté, on te donne des talking points, on te dit de rencontrer les ONG locales. Qu'est-ce qui se passe en fait ? D'un point de vue concret, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Il se passe très peu. Millionaires for Humanity, ça a été créé par Jafar Chalchi au Danemark, qui lui a fait fortune lui-même. Son histoire est géniale d'ailleurs. Il est arrivé au Danemark en tant que réfugié iranien à 7 ans. Il a passé un an dans un orphelinat. Le temps que ses parents trouvent une solution, sa mère a été travailler dans un hôtel pour changer des lits. Lui, il est rentré dans le système scolaire et puis l'université danoise et il a fait fortune dans l'immobilier. Et lui, il se dit, il voit très concrètement comment est-ce possible que moi, en fait, in fine, je paye maintenant moins d'impôts que ma mère qui changeait des lits dans un hôtel. C'est complètement dingue. Et donc il a créé cette communauté, mais c'est vraiment une plateforme de communication. Donc dans un monde idéal, il y a quelques membres de Millenials for Humanity dans chaque pays qui vont faire passer le même message partout. Il faut absolument qu'on travaille à une taxation plus équitable. Et en pratique, il y a depuis peu un coup de fil bimensuel avec les membres qui veulent. pour un peu parler et comparer. Mais c'est vraiment... Moi, j'avais besoin d'une plateforme utilisable. Et il y en a plusieurs. Il y a Millionaires for Humanity, il y a Patriotic Millionaires aux Etats-Unis et en Angleterre. Et puis, il y a dans le monde germanophone, Tax Me Now, lié à Marlene Engelhorn.

  • Speaker #1

    Et du coup, tu rejoins ce collectif, cette plateforme, mais tu es le seul Belge. Donc, c'est quoi ton plan d'attaque ? Tu te dis, en Belgique, je suis quand même un peu seul. Comment je vais faire rayonner mon histoire et le fait que je défende une justice fiscale et donc une taxation plus équitable ? C'est quoi ton process ensuite ?

  • Speaker #0

    Moi, je sors un peu du monde de la com, ce qui m'a bien aidé. Mon constat surtout, c'était que je trouve qu'il y a une voix dans ce débat qui manque. J'entendais personne de mon angle très particulier dire ce que je raconte. Et donc je me suis dit, je trouve que c'est un gros manque. Et donc j'ai simplement fait une sorte de petite campagne com. Et je me suis mis, ok, je prépare mes messages et je vais parler d'abord à toutes les médias écrites. Et puis à tous ceux qui veulent l'entendre pour essayer de dire, ben voilà, il y a une autre voie. dans le débat actuel.

  • Speaker #1

    Parce que du coup, tu dis, ta voix, elle n'existait pas, en tout cas avant que tu prennes position et que tu communiques à ce sujet. Parce qu'en fait, quand on entend les Belges fortunés dans les médias, ce n'est absolument pas pour raconter la même chose que toi.

  • Speaker #0

    Oui, les Belges fortunés qu'on entend dans les médias à propos de ça, c'est un peu toujours le même profil. C'est les capitaines d'industrie qui viennent très fort du monde. de l'entrepreneuriat, qui est, attention, hyper important, mais ils vont voir le monde d'une façon assez particulière, ils vont voir le monde en fonction de retours sur investissement. Quand on investit dans quelque chose, ce n'est pas anormal, on pense en termes de retours sur investissement. Mais pas tout fonctionne comme ça. Donc ça veut dire qu'en tant que capitaine d'industrie... Il ne va pas investir dans l'école, la justice, la police, les bibliothèques, parce que ce n'est pas dans cette logique-là. Et si un jour c'est le cas, c'est une très mauvaise nouvelle, parce que dans les pays où le privé commence à investir là-dedans, l'inégalité augmente encore plus. Donc c'est un angle d'approche qui est très spécifique. Et moi, je trouvais qu'il y avait un angle d'approche qui voit les choses un peu plus large. qui était nécessaire aussi.

  • Speaker #1

    Et tu parles justement d'une prise de conscience écologique, de base en tout cas, et puis qui a rayonné, qui a grandi, et surtout du fait qu'on vit dans un monde aux ressources finies. Et tu me parlais juste... avant qu'on branche les micros, du fait que tu réalisais parfois qu'on ne savait pas objectiver. C'est quoi beaucoup d'argent ? Par contre, on arrive très bien à objectiver. C'est quoi peu d'argent ?

  • Speaker #0

    En fait, ça, c'est vraiment la fin de la longue analyse. Ma longue analyse a été une sorte de grosse question-réponse avec moi-même, en me disant, voilà, on me dit souvent des choses pareilles. Est-ce que c'est vrai ? Est-ce que ce n'est pas vrai ? « Et qu'est-ce que j'en fais ? Et pourquoi est-ce qu'on me dit ça ? » Taxer la fortune, ce serait malhonnête, parce que le résultat d'une fortune, c'est le résultat d'un travail, et donc on ne va pas taxer quelqu'un une seconde fois. C'était par exemple ma première question, et là je me suis dit, en 2022, il y avait 483 milliards d'euros qui étaient gérés par des banques privées en Belgique. La première question que je me suis posée, c'est combien de ces 483 milliards ? correspondent avec l'histoire que je viens de raconter. À partir de certains montants, à partir de... Surtout quand c'est de génération en génération, cette histoire n'a plus vraiment la route. On sort de cette logique. Et alors on me demande, oui, mais à partir de quels montants ? Je ne sais pas à partir de quels montants. Ce qu'on constate par contre, c'est qu'on arrive très bien à objectiver des salaires minimums, des montants minimums. Mais alors commencer à réfléchir à... Des barèmes progressifs par rapport à la fortune, apparemment...

  • Speaker #1

    On n'y arrive pas.

  • Speaker #0

    C'est pas possible. En tout cas, à partir d'un certain niveau, ou à partir d'une certaine fortune, que ce soit 10 millions, 100 millions, hop, hop, hop, voilà, tout ça c'est la même chose. Ce que je trouve assez particulier. Qu'est-ce qu'on me dit aussi à ce moment-là, c'est « Ah oui, mais attention, parce qu'on n'est jamais sûr. Demain tout... » Demain, tout peut être parti. Non, pas demain, pas tout peut être parti. À partir d'un certain... De nouveau, et je dis beaucoup ça, à partir de certains montants, à partir de... On commence à savoir diversifier un maximum, donc on ne met pas tous ses oeufs dans le même panier et on sait commencer à miser sur tous les chevaux en même temps. Donc, en fait, on devient le casino. On ne sait plus perdre. Qu'est-ce qu'on me dit alors très souvent à ce moment-là ? C'est « Oui, mais en Belgique, ça va » . Oui, non. Et ça, il y a un très bon rapport qui est sorti l'année passée d'André Decoastre, le paradoxe des inégalités en Belgique. En Belgique, ça va si on ne tient que compte du salaire. Si on tient compte des inégalités du capital, ça va beaucoup, beaucoup moins. Et en plus, on a un système, et ça, ce n'est pas juste en Belgique, on a un système où à partir de vraiment des 1%, la taxation devient régressive, en fait. parce qu'il y a beaucoup plus de rentrées qui viennent du capital ou du patrimoine immobilier, par exemple. Du coup, ça veut dire que, et ça c'était mon premier constat, je disais mais en fait on a un système de taxation qui alimente les inégalités. C'est complètement dingue. Après ça c'est un constat qui n'est pas très compliqué. Je ne suis pas le seul à faire ça. Il y a beaucoup...

  • Speaker #1

    Oui, et tous les académiques, les fiscalistes,

  • Speaker #0

    les économistes. Donc la question que moi je me suis posée, c'est comment ça se fait que ça ne change pas ? Pourquoi est-ce que ce n'est pas plus vraiment un sujet majeur pour plein de partis politiques ? Et là, je suis vite venu sur un concept de déni, en fait. Comme mon exemple de matriculation, on nie une certaine réalité, et à plusieurs niveaux. Alors d'abord, pour moi, il y a un déni pour la très grande majorité des gens. En fait, ils ne savent pas s'imaginer ce que c'est une très très grande fortune. Non, moi, je ne sais pas, par exemple. Et donc, un ami m'a une fois dit, et je trouve ça pas mal, il disait, oui, mais je suis d'accord avec toi et tout, mais ils ne peuvent pas toucher à la taxation sur l'héritage. Je me dis « Ah, c'est moi-même, pourquoi tu dis ça ? » Parce que moi, j'ai travaillé dur pour m'acheter une maison et je veux savoir la donner à mes enfants sans que ce soit taxé encore une fois. Et là, je me dis « Mais oui, je vois très bien la logique. Mais si quelqu'un a 27 maisons, il faut peut-être oser commencer à réfléchir différemment par rapport à ça. Mais déjà, il faut accepter que ça existe. » Et puis, il y a les 1%, les gens comme moi, qui sont censés savoir voir ce que je vois, mais il faut vouloir le voir aussi. Et souvent, on est dans un déni pour de très bonnes raisons. On veut correctement éduquer ses enfants, avec les bonnes valeurs. Socialement, on n'aime pas sortir du lot. On apprend certaines choses assez tard, parce qu'on est éduqué d'une certaine bonne façon. des choses en fait des décisions qui Au niveau personnel et social ? ont tout à fait raison d'être, mais qui ont à un certain moment un impact sociétal, parce qu'on reste aussi dans ce déni. Oui, mais ce n'est pas très important, ce n'est pas de l'argent mérité, ce n'est pas de l'argent gagné, donc on met de côté et on fait un peu comme si ça n'existait pas. Et puis il y a le troisième niveau, il y a le niveau politique, où, et ça c'est plutôt une bonne chose, la plupart des politiques ne sortent pas du monde des très fortunés, donc ont du mal à s'imaginer mais par contre ils ont plus accès à ce genre d'informations. Et là aussi, ça n'arrange personne dans le narratif. Toutes les politiques de n'importe quel bord accentuent la valeur du travail et la valeur du mérite. Mais quand on est un démonteur pareil, on sort de cette logique. Et donc, c'est beaucoup plus pratique par rapport au narratif de l'ignorer. Donc, déni sur déni sur déni, ça fait, moi, je... Je trouve une certaine malhonnêteté intellectuelle, en fait. Je dis souvent qu'en tant que très fortuné, on tient très fort compte de mes intérêts, mais très fort peu compte de ma fortune.

  • Speaker #1

    Oui, mais c'est hyper intéressant. Je pense que c'est la première fois que j'entends un discours pareil d'une personne fortunée. On entend, comme tu dis, toute la théorie, tous les fiscalistes, les économistes qui parlent de ce genre de sujet. On entend Oxfam, on va peut-être en parler un peu. Tu as fait une conférence avec Oxfam récemment au Parlement européen pour parler notamment du rapport d'Oxfam sur les inégalités. On l'entend du monde associatif, du monde académique, un petit peu du monde politique, mais très peu, comme tu le dis, et pas suffisamment, parce qu'il y a ce malaise, il y a ce déni. Mais je trouve ça hyper rafraîchissant et hyper utile d'avoir des gens comme toi qui prennent la parole sur ce genre de sujet. Et de dire exactement la phrase que tu viens de dire, c'est « on prend en compte mes intérêts, mais pas ma fortune » . Et je trouve que cette phrase résume parfaitement la situation. C'est un peu lunaire. Mais du coup, pour revenir sur la collaboration avec les académiques et notamment Oxfam. Donc récemment, tu as été au Parlement européen avec un expert de chez Oxfam pour discuter de ces sujets. Et est-ce que tu peux un peu nous en parler ?

  • Speaker #0

    Alors Oxfam m'avait invité à parler dans un panel au Parlement européen pour parler de ça. Eux, ils ont sorti un rapport pour expliquer que la situation s'aggrave et qu'est-ce qu'on pourrait peut-être y faire. Là, j'ai constaté aussi, après notre débat, il y avait un débat entre les politiques. En fait, tout le monde raconte un peu sa position sans vraiment en parler. Qu'est-ce que j'ai sorti de cette expérience au Parlement européen ? mais... il y a quand même un gros manque de vrai débat. Donc je pense, d'abord, ça, ça revient un peu... En fait, je vais un peu répondre à la question, qu'est-ce que je pense qui doit se passer pour qu'on essaye de trouver des solutions ? Ça recoupe un peu sur ce que je disais de Denis. Je pense que cette énorme inégalité et le fait qu'il y ait une telle masse financière qui va que vers tellement peu de personnes... peace On parle beaucoup de proportion aussi, c'est complètement disproportionné. Que ce soit au niveau sociétal ou que ce soit au niveau personnel, une masse financière parée, en fait, c'est un dilemme moral. On se dit mais ce n'est pas possible. Et qu'est-ce qu'on fait en général avec les dilemmes moraux ? On essaie de les éviter le plus possible. Ou en tout cas, on essaie aussi de changer de sujet. Donc qu'est-ce qu'on va énormément dire ? on va venir... Quand je parle de ça, oui, mais l'État gaspille notre argent et est un très mauvais gestionnaire. Ok, l'État... J'ai un mine Bruxelles, donc je vois très bien de quoi on parle. Mais même si on vivait dans un État qui travaillerait à la perfection et où tout fonctionne parfaitement, on va devoir encore toujours s'atteler à cette question. Qu'est-ce qu'une taxation éguitable ? Qu'est-ce qu'on me dit aussi ? Mais il faut plus encourager l'entrepreneuriat. D'accord.

  • Speaker #1

    Comme si c'était opposé en fait.

  • Speaker #0

    Comme si c'était opposé. Moi je vois pas très bien en quoi la situation actuelle encourage l'entrepreneuriat. On est loin du compte en fait. Mais de nouveau, c'est un débat différent. Oui mais si on taxe plus les riches alors il va y avoir moins de philanthropie. C'est la philanthropie. va toujours être nécessaire, mais c'est de nouveau un débat différent. Donc on utilise tous ces sujets qui ont tout à fait lieu d'être et dont il faut parler, mais en fait comme excuse pour ne surtout pas commencer à parler de ce problème d'inégalité croissante et de taxation foireuse, on va dire. Donc il faut avoir, en fait il faut oser cette confrontation. On doit oser se confronter par rapport à cette situation. On doit oser regarder la situation et se dire mais... Ok, ça en fait c'est pas possible. Il y a quelque chose de complètement... Et oser regarder les chiffres. Et à côté de ça, on doit avoir, moi je pense aussi, le courage de la discussion, et c'est là que je recoupe un peu avec Oxfam. Tu vois, au début je parlais du livre, que j'étais en train de lire un livre, que j'ai rencontré un journaliste, et lui, ce qui était intéressant, donc on a parlé pendant une heure, et j'ai réalisé, je ne lui ai jamais posé la question, je devrais, Moi, je pense que c'est la première fois qu'il parlait à 1%. Moi aussi. Oui, oui. Non, mais c'est la première fois qu'il parlait. Mais lui, il a écrit un livre de 600 pages.

  • Speaker #1

    Sur ces gens-là, c'est vrai.

  • Speaker #0

    Avec des gens quand même qui ont... Et je me disais, mais c'est assez bizarre. Et puis, je lis son livre. Et il y a des magnifiques phrases. Et j'en ai noté deux. Ce genre de personnes qui ne peuvent se passer de vanité et de paillettes avec Louis XIV et Marie-Antoinette à Versailles, ce n'était pas différent. Ok, et mon préféré, c'est Nanty capable de se gâcher le sommeil en cherchant les moyens de se faire encore plus d'argent avec leur argent. Quand je lis ça, d'abord je ne me reconnais pas spécialement, je me dis ok, c'est spécial, mais surtout, ça rend les choses très faciles pour moi de me dire, moi je n'ai rien à voir avec ça. Et donc, l'argent, la fortune, à n'importe quel niveau, c'est quelque chose de très émotionnel. Et donc quand il y a, l'autre fois c'était dans une manif en France, quelqu'un qui avait un grand panneau avec « Il faut reprendre l'argent que les riches nous ont volé » . Alors même si je vois très bien d'où vient cette phrase, si on me traite de voleur, je vais par définition réagir de façon assez défensive. Oui,

  • Speaker #1

    même si tu comprends le fond.

  • Speaker #0

    Je comprends très bien le fond. Et c'est entre autres pour ça qu'il n'y a pas de dialogue. On doit réussir. avoir une discussion qui va au-delà des clichés. La fois passée, j'ai réagi par rapport à une proposition politique. Taxer les riches, c'est taxer la richesse. Taxer la richesse excessive. Et je sais bien que...

  • Speaker #1

    C'est ça qu'on veut dire par taxer les riches. Oui,

  • Speaker #0

    je sais bien que c'est ça qu'on veut dire. Et je sais bien que rétablir l'équilibre en taxant plus la richesse excessive, ça marche moins bien en termes de com. C'est moins vendeur. Mais c'est vers là qu'on doit aller pour avoir une discussion correcte. C'est... Je parlais à Oxfam par rapport à ça, et ça c'était très chouette comme discussion, parce qu'il disait, c'est très fort dans le narratif, donc pour moi c'est les deux choses qui doivent se passer, on doit accepter de plus parler, mais on doit réussir à parler différemment. Mais Oxfam, dans un de leurs rapports aussi, ça c'est pas le rapport Oxfam, dans plein de rapports, la plus grosse partie des fortunes maintenant, c'est de la fortune héritée. Donc les très grosses fortunes maintenant, en majorité, c'est des fortunes héritées. Si c'est hérité, ben voilà, il n'y a pas de mérite, mais ce n'est pas ma faute non plus. Oui, t'es né là-dedans quoi. Oui, t'es né là-dedans. Donc on peut m'accuser de ne pas prendre mes ressources habitées, on peut m'accuser de...

  • Speaker #1

    De malhonnêteté intellectuelle, comme tu disais.

  • Speaker #0

    De malhonnêteté intellectuelle, mais c'est encore différent de dire c'est ta faute. Votre faute. Je dois me confronter à ça comme tout le monde. Et voilà, s'il y a ce discours-là, ça ne me la rend pas plus facile pour sortir du bois, on va dire. J'avais trouvé une analogie qui était pas mal, je pensais, enfin je pense. On est un des dix seuls pays au monde à avoir réussi à avoir une conversation sur l'euthanasie. C'est pénible, hein. C'est parler de la mort. Tout le monde doit passer certaines lignes et... Il y a beaucoup d'analogie. C'est une discussion qui ne termine jamais. On doit reparler de ça à tous les instants pour de nouveau trouver un juste équilibre. Il y a dix pays qui ont réussi à avoir le courage d'avoir cette discussion. Ce n'est pas beaucoup. Et la Belgique en fait partie. C'est exactement la même chose. On doit réussir à trouver une façon de, et je ne sais pas comment encore, mais on doit trouver une façon d'avoir une discussion correcte et adulte.

  • Speaker #1

    Et à un niveau aussi, tu le portais au Parlement européen. Et c'est une conversation qui doit avoir lieu de manière internationale aussi, ça doit dépasser les frontières et le porter je pense au niveau européen est déjà un premier pas et je pense que c'est le but aussi de Millionaires for Humanity d'avoir cette conversation à l'international et de pouvoir justement s'allier dans ce message là, mais en effet c'est quelque chose qui vit très peu de manière générale en Belgique et partout ailleurs.

  • Speaker #0

    qui vit très peu, ce que je trouve assez étonnant parce que c'est quand même la source de beaucoup de... de problèmes, ou la source de beaucoup de choses, et donc la solution aussi de beaucoup de choses, donc je trouve ça très étonnant, et ça c'est une des choses qui m'a étonné depuis que j'ai commencé à faire ça jusqu'à quel point les gens vont pour ne surtout pas en parler moi je pensais qu'en fait que ça allait être, ah tiens une nouvelle voix, on va quand même écouter ah non, il faut pousser, pousser, pousser avant de savoir aller donner ce nouvel angle parce qu'on essaye vraiment d'éviter ça Euh... Un maximum. Mais je reviens sur ce que tu disais tout à l'heure sur les ressources infinies et le beaucoup d'argent. Je disais au tout début, je ne sais pas si ça a commencé comme ça, mais je sais qu'au début, il y a une sorte de conscience environnementale. Et il n'y a pas longtemps, j'ai vraiment eu un moment où je me suis dit, ah, mais voilà, la boucle est bouclée quelque part. Très souvent, on me dit, oui, mais c'est quoi beaucoup d'argent finalement ? Tu vois, pour toi, c'est autant, pour quelqu'un d'autre, c'est autant. autant pour Elon Musk, ce sera autant. Et certainement, j'ai un peu fait le lien entre tous les gens qui me disaient ça et je me disais, Si on voit le monde comme un monde aux ressources infinies, comme beaucoup de gens font encore, 1 million, 3 milliards ou 300 trilliards, ça ne change rien. De toute façon, il n'y a pas de limite. Le moment où on change cette façon de penser là, où on se dit parce que tout cet argent est lié à quelque chose, est lié à une machine qui doit tourner, est lié à plein de choses, au moment où on se dit, ah mais non, on n'est pas. dans un monde aux ressources infinies. Mais là, tout change. Et là, tout change par rapport à ce sujet-ci aussi.

  • Speaker #1

    Mais je pense que c'est parfait pour clôturer cet épisode. Merci beaucoup Bruno d'être venu parler de tout ça à mon micro. Et à bientôt !

  • Speaker #0

    Merci beaucoup, à bientôt !

  • Speaker #1

    J'espère que cet épisode vous a plu. Si c'est le cas, n'oubliez pas de vous abonner au podcast. Si vous voulez réagir à nos propos, la section commentaires est faite pour cela. Ou alors, vous pouvez me retrouver sur Instagram sous le pseudo at goodmorninglo. On se retrouve dans deux semaines pour un prochain épisode d'Epicéa. Et d'ici là, prenez soin de vous.

Description

Taxer les riches? Parlons justice fiscale!

J'ai la chance de recevoir 2 pointures du sujet:

  • Julien Desiderio - expert en fiscalité chez Oxfam

  • Bruno Fierens - premier membre belge de 'millionaires for humanity'

50min pour comprendre pourquoi rétablir la balance fiscale est nécessaire et comment on doit avoir cette conversation.
Bonne écoute!



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, ici Laurie, et vous écoutez Epicea,

  • Speaker #1

    un podcast dédié aux témoignages inspirants de personnes engagées.

  • Speaker #0

    Je me fais un café et je vous explique. Il y a un sujet dont j'aimerais vous parler depuis un moment, mais c'est pas si facile de le prendre par le bon bout pour qu'il fasse sens pour vous et surtout que j'arrive à bien raconter l'histoire. C'est la justice fiscale. Taxer les riches. Pourquoi ? Comment ? Comment ça se fait que la justice fiscale, elle est pas là pour le moment, que c'est pas équilibré ? Et du coup, aujourd'hui, là, va arriver dans quelques minutes chez moi Julien Desiderieux de chez Oxfam, expert en justice fiscale, expert en fiscalité. Et du coup, il va nous raconter plein de trucs. Je vous laisse avec lui.

  • Speaker #1

    Moi c'est Julien Desiderio, je suis chargé de plaidoyer pour l'ONG Oxfam sur les questions de fiscalité et d'inégalité. Oxfam c'est une ONG internationale dont l'objectif c'est de changer les systèmes pour combattre les inégalités. En fait on reconnaît que les inégalités elles sont au cœur des systèmes, elles sont structurelles et que donc c'est par... la politique et par des mesures, notamment en matière de justice fiscale, qu'on va réduire les inégalités dans le monde. Et donc pour l'instant, on a une campagne qui s'appelle Make Rich Polluters Pay, donc faire payer les riches pollueurs, qui est en fait une campagne qui a démarré comme une campagne Tax the Rich. Pourquoi Tax the Rich ? Parce qu'aujourd'hui, on a de plus en plus de preuves, d'évidence, de recherches universitaires qui montrent que les... plus riches, les milliardaires dans le monde ne payent pas leur juste part d'impôt. Donc l'impôt, nous on dit tout souvent que c'est le prix à payer pour une société civilisée, donc ça veut dire une société où on a des services publics, une société où on a des soins de santé qui sont accessibles, où on a une justice qui est efficace, et donc tout le monde doit contribuer d'une manière ou d'une autre au financement de ses biens collectifs, mais ça doit se faire de manière proportionnelle, et donc tout le monde ne doit pas participaient de la même manière. C'est cette fameuse idée des épaules les plus larges qui doivent contribuer une plus large proportion. Aujourd'hui, on voit que ce n'est pas le cas. Par exemple, en Belgique, les 1% les plus riches payent deux fois moins d'impôts sur leurs revenus que la classe moyenne. C'est injuste, ce n'est pas normal. Ça crée des problèmes en matière d'assentiment à l'impôt. Mais ça crée aussi des problèmes en intérieur d'accumulation du patrimoine entre les mains des plus riches. Et l'accumulation du patrimoine entre les mains des plus riches, ça fait aussi une accumulation de pouvoir. Et après, on arrive à des situations extrêmes, comme on le voit aux Etats-Unis, où pendant tout un temps, on a eu un président milliardaire avec son bras droit qui était l'homme le plus riche du monde et qui décidait de couper dans tous les budgets de la coopération et de développement à travers le monde. Et donc qui s'attaquait aux personnes les plus précarisées de la planète. Et donc ça, c'est un système extrême contre lequel on se bat aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Comment ça se fait que les riches, les milliardaires et j'imagine aussi certains millionnaires ne payent pas d'impôts ? Comment ça se fait ? Parce que nous, on est taxé sur le revenu. On ne le voit même pas quand on est salarié. Je sais, c'est une question un peu naïve, mais comment ça se fait du coup ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas une question naïve parce que c'est quelque chose qui revient souvent. Les gens ont du mal. à comprendre ces mécanismes-là. Pourquoi ? Parce que les gens, à la fin du mois, ils reçoivent leur paye, ils reçoivent leur chèque, et bien souvent, c'est le seul revenu qu'ils ont. Parce que la plupart des gens ne saisissent pas, et c'est tout à fait normal parce que c'est pas accessible à tout le monde, c'est que pour la catégorie des millionnaires et des milliardaires, il y a d'autres formes de revenus qui entrent en compte, qui sont moins... liquide, ça veut dire qu'on peut moins... Ça veut dire que, simplement, on ne va pas aller acheter son pain avec, mais par exemple, si je prends un cas extrême, c'est souvent très facile de prendre un extrême pour présenter cette problématique. Si tu prends Elon Musk, Elon Musk, il a des entreprises, Tesla... X, etc. La fortune d'Elon Musk, elle ne réside pas sur son compte en banque, elle réside dans les actions au sein des entreprises qu'il possède. Et même s'il ne peut pas acheter du pain, de l'eau, du lait avec ses actions Tesla, il peut quand même acheter Twitter, parce que c'est grâce à ses actions Tesla qu'il a mis en collatéral pour faire des prêts auprès des banques et ne pas payer d'impôts, parce qu'on ne paye pas d'impôts sur des prêts. qu'on fait auprès d'une banque, qu'il a pu racheter Twitter. Il y a aussi un autre système qui est un peu plus généralisé, qui est celui des holdings. Et donc une holding, c'est quoi ? Une holding, c'est une entreprise qui va faire écran à l'impôt que devraient payer normalement les milliardaires. Et donc par exemple, ils ont des actions dans des sociétés. Ces sociétés génèrent une activité, vont générer un bénéfice et puis vont verser des dividendes. Si ces dividendes sont versés dans la holding du millionnaire ou du milliardaire, elles seront en principe exemptées d'impôts. Mais ça ne veut pas dire qu'après, une fois que cet argent est dans la holding, les milliardaires ne peuvent pas s'en servir. Ils peuvent s'en servir pour racheter d'autres entreprises, ils peuvent s'en servir pour racheter des médias, pour racheter de l'influence, etc. Ou même pour acheter un yacht aux îles Caïmans ou aux Bahamas. Ce qui est important de comprendre, c'est que l'argent qui est arrivé dans cet holding n'a pas été taxé. Et qu'au final, la personne qui va être la bénéficiaire effective du yacht, du jet, etc., ce n'est pas l'entreprise, c'est la personne qui possède cette entreprise.

  • Speaker #0

    Complètement, c'est la famille qui détient l'holding, qui va pouvoir jouir de l'argent de l'holding, mais sans être taxé dessus. Très peu, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, c'est un peu le principe. Je caricature, le système est très complexe, mais en gros, ça, c'est le principe.

  • Speaker #0

    Ok, très bien. Et donc, du coup, par rapport à moi qui suis dans la classe moyenne, qui paye, je dirais, un gros 40% d'impôts, un millionnaire, un milliardaire en Belgique, il paye combien de pourcents d'impôts ? Enfin, d'impôts, oui, il contribue à hauteur de combien de pourcents ?

  • Speaker #1

    En fait, on a estimé... Il y a une étude en Belgique qui est tout à fait récente et super révolutionnaire, je trouve, parce qu'on manquait vraiment de ces infos-là en Belgique, que les 1% les plus riches payent 23% de leurs revenus en impôts, alors que la classe moyenne, la moyenne des Belges, pas la classe moyenne, mais la moyenne des Belges, paie 43% de leurs revenus en impôts. Mais là, c'est tout impôt confondu. Donc c'est l'impôt sur le revenu, c'est l'impôt des sociétés, c'est... La TVA, c'est important parce que souvent on pense que les gens qui sont les plus précaires, les plus pauvres, les gens qui ont peu de revenus ne payent pas d'impôts, mais en fait tout le monde paye des impôts, même des SDF payent des impôts parce que dès que tu achètes un bien dans un supermarché, tu payes de la TVA là-dessus. et donc ça c'est allez tu vas payer 6% ou 21% de TVA sur certains produits les gens payent de l'impôt là-dessus et ça pèse beaucoup plus dans le portefeuille des personnes qui ont moins de revenus que dans le portefeuille des millionnaires et des milliardaires. Et donc aujourd'hui, la classe des 1% les plus riches en Belgique, c'est celle qui, par rapport à toutes les autres classes de revenus, paye le moins d'impôts.

  • Speaker #0

    Et quand on vient avec ce discours de justice fiscale près des décideurs, qu'est-ce qui se passe en fait ? Parce que ça fait sens ce que tu me racontes là, c'est des chiffres, c'est des études. Comment ça se fait qu'on n'a pas de mécanisme mis en place pour rééquilibrer la contribution de chacun ?

  • Speaker #1

    Il y a des décideurs qui sont favorables à changer le système. Aujourd'hui, ils ne sont pas forcément tous au gouvernement. En tout cas, s'il y en a qui sont au gouvernement, ils sont extrêmement minoritaires. Après, il y a toujours cette histoire de la théorie du ruissellement qui est encore très vivace. Donc la théorie du ruissellement, c'est quoi ? C'est une théorie qui nous vient des années 80, des Ronald Reagan et des Thatcher. Et d'ailleurs, Bardo Hever aime bien. Citer Margaret Thatcher et Georges Louis Boucher aussi. Cette théorie, elle dit qu'en fait, baisser les impôts sur les plus riches, ça va rejaillir en croissance et en emploi sur le reste de la population. Mais c'est ce que Macron a fait pendant des années en France. Et en fait, tout ce qu'il a réussi à faire, c'est creuser le déficit et les inégalités du pays. Et donc ça ne marche pas. Donc même le FMI a dit, même des études ont été menées par l'université d'Oxford. et évaluer sur le long terme ces politiques de ruissellement dans les pays de l'OCDE. Et les conclusions, c'est que ça a augmenté les inégalités et ça n'a pas créé la croissance et les emplois qui étaient souhaités.

  • Speaker #0

    Ok, donc c'est vraiment un leurre, c'est un mythe en fait. C'est un mythe, oui. Ça a déjà fonctionné ? C'est pour ça qu'on pense ça ?

  • Speaker #1

    Non, ça n'a jamais fonctionné. Donc c'est ça en fait, on a le recul aujourd'hui pour montrer que ça ne fonctionne pas, qu'aujourd'hui on est dans un moment où, coupé dans les services sociaux, Ça va ralentir l'économie. En plus, on a un gouvernement qui décide, surtout en Wallonie, une des premières mesures, c'est d'octroyer des avantages fiscaux sur les successions ou sur les droits d'enregistrement, mais des avantages fiscaux qui, on le voit, bénéficient majoritairement aux classes les plus privilégiées de la population. Et donc ça, c'est des mesures qui creusent le déficit. Et après, on vient nous dire que voilà le déficit des rails, qu'il faut couper dans la santé, couper dans les services sociaux, augmenter le minerval des universités. Mais en fait, tout ça, c'est des choix politiques. Et souvent, on dit, bah oui, il y a une rage taxatoire en Belgique. Les gens payent beaucoup trop d'impôts. Mais en fait, oui, c'est vrai, quelque part, quand on est dans la classe moyenne en Belgique, on paie vite beaucoup d'impôts. Mais c'est pas le cas de tout le monde. et en fait ce dont on a besoin aujourd'hui C'est un rééquilibrage de l'impôt, surtout entre le travail et le capital. Les gens qui bossent payent aujourd'hui beaucoup plus d'impôts que des gens qui tirent des revenus uniquement de leur capital. Un exemple très simple, on avait calculé chez Oxfam quelqu'un qui gagne 40 000 euros brut par an uniquement de par son travail. paye en moyenne 30% d'impôts sur ce revenu. Donc des 40 000 euros, on va retirer 30% pour financer les services publics, les services à la collectivité, etc. Jusqu'à ce jour, jusqu'à aujourd'hui, quelqu'un qui fait 40 000 euros de revenus en achetant et en revendant des actions, en faisant une plus-value sur ses actions, va payer 0 euros d'impôts. Donc pour le même type de revenus, dépendant d'où ça vient, il y en a un qui paye 30% d'impôts, et l'autre qui paie 0% d'impôts. Mais celui qui paie beaucoup d'impôts, c'est celui qui bosse, c'est celui qui se lève tous les matins. Alors que pour faire des plus-values, il faut juste avoir un capital. On peut avoir un capital de départ, on peut hériter d'un capital. On ne doit pas forcément avoir travaillé pour après investir en bourse et générer des plus-values. Chaque année, on publie un rapport mondial sur les inégalités dans le monde, en janvier. Et on collabore notamment avec les millionnaires for humanity et les patriotiques millionnaires. qui sont en fait un groupement de millionnaires et de multimillionnaires qui demandent à payer plus d'impôts. C'est des gens qui disent, ben voilà, moi je vis très bien avec ce que j'ai, je pense qu'aujourd'hui on a un besoin d'investissement public, on a besoin de rééquilibrer le système fiscaux, on a besoin de plus de solidarité pour financer nos sociétés et les collectivités.

  • Speaker #0

    Et la décarbonation, notamment.

  • Speaker #1

    Et la décarbonation, oui. C'est aussi pour ça que notre campagne s'appelle Make Rich, Pollute Your Spee, parce qu'on demande de taxer les plus riches de façon équitable pour financer notamment l'investissement public dans la transition climatique.

  • Speaker #0

    Oui, et comme tu dis, c'est de façon équitable. Il n'est pas question, encore une fois, de...

  • Speaker #1

    De spoliation, pas du tout. Oui,

  • Speaker #0

    c'est ça.

  • Speaker #1

    Par exemple, il y a la fameuse taxe Zucman. Donc ça, c'est super populaire pour l'instant. vraiment mis la lumière sur la question de justice fiscale. Et ce que Zucman propose, c'est un taux minimum de 2% sur la fortune des milliardaires. C'est-à-dire qu'on taxerait les milliardaires à 2% minimum sur leur fortune. Donc minimum, ça veut dire déduire... des impôts qu'il paye déjà. Donc s'il paye déjà 2%, il ne paierait pas un impôt supplémentaire.

  • Speaker #0

    C'est s'assurer qu'il paye déjà 2%.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, un minimum de 2%. Mais ce que Zucman montre, c'est que même en payant ces 2%, la fortune des milliardaires continuerait à augmenter. Donc voilà, nous chez Oxfam, ce qu'on voudrait, c'est un peu amorcer une déconcentration de ces fortunes-là, des super grandes fortunes qui aujourd'hui... ont un pouvoir sur nos démocraties qui est complètement démesuré, qui est en dehors de tout cadre démocratique. Donc on ne vote pas pour des milliardaires mais ils ont parfois plus d'influence sur nos vies que les choix politiques qu'on fait dans les urnes. Mais donc voilà, aujourd'hui on est dans ce débat de dire mais en fait même 2% d'impôt sur la fortune des milliardaires, chez certaines personnes c'est vu comme de la spoliation, mais nous sur nos revenus on paie jusqu'à 30-40% d'impôt. Enfin voilà, il y a cet équilibre. Et alors je voudrais surtout pas tomber dans l'idée de dire « Ah oui, mais alors baissons les impôts absolument sur nous, sur la classe moyenne, sur les gens qui sont plus précaires, etc. » Ok pour ça, mais si on baisse les impôts sans compenser, alors on va perdre... On fait des économies dans quoi ? On fait des économies dans la santé ? On fait des économies... Dans la justice, on fait des économies, dans la sécurité, dans le climat, enfin voilà.

  • Speaker #0

    Non bien sûr, il faut des rentrées, l'État a besoin de rentrées pour faire fonctionner les services publics, pour payer les retraites, on oublie toujours, mais il y a une grosse partie de l'impôt qui part dans les retraites. L'idée en fait c'est de rééquilibrer qui contribue, mais cette enveloppe elle doit rester là, même elle doit croître par rapport à tous les sujets auxquels on doit faire face, comme notamment... Le changement climatique, les inégalités croissantes, cette enveloppe doit rester là et croître pour faire face à tout ça. Mais oui, on doit rééquilibrer de qui contribue à cette enveloppe finalement.

  • Speaker #1

    Et ça, c'est ce que demandent les millionnaires avec lesquels on travaille. Même des gens comme Warren Buffett, qui est un des hommes les plus riches du monde et qui n'est pas du tout membre de ce groupe de millionnaires, il a eu cette phrase qui, je trouve, est vraiment révélatrice. Il y a une guerre des classes aujourd'hui. La lutte des classes, c'est les millionnaires contre le reste du monde. Et c'est ma classe, celle des milliardaires, qui est en train de la gagner. Et donc, même quelqu'un comme Bill Gates va dire « Mais oui, ça ne me dérangerait pas de payer plus d'impôts » . Quelqu'un comme Marlène Engelhorn, qui est l'héritière du groupe chimique BASF. Elle, elle a dit, elle est membre de ce groupement de millionnaires et elle dit mais en fait, voilà, moi, je veux redistribuer ma fortune parce que je l'ai héritée, je vis très bien, je peux en redistribuer une partie pour la collectivité et financer des projets sur lesquels les gens vont s'accorder, vont débattre et vont décider ce qu'ils veulent financer, ce qui est bénéfique pour la société.

  • Speaker #0

    et du coup il y a un truc dont j'ai envie de parler c'est que Donc ces personnes fortunées, elles sont au courant qu'elles payent très peu d'impôts, en tout cas pour la plupart. Il y en a qui sont d'accord de redistribuer, il y en a probablement moins. Une majorité probablement n'est pas d'accord de redistribuer. Mais du coup, elles mettent un mécanisme quand même en place qui est la philanthropie. Et du coup, elles se défendent avec ça. Ça devient un argument de je ne paye pas, je ne paye peu d'impôts. Oui, mais j'investis dans tel et tel projet et j'ai dépensé des millions dans ça et des millions dans ça. Comment, chez Oxfam, et comment toi, vous gérez cet argument-là de la philanthropie ?

  • Speaker #1

    En fait, la question de la philanthropie, on ne va jamais critiquer quelqu'un parce qu'il donne de l'argent à une cause qu'il estime bonne. Mais souvent, les causes que les philanthropes estiment bonnes ne sont pas nécessairement celles qui vont bénéficier à l'ensemble de la société. Donc en fait, ce que nous on dit, c'est qu'aujourd'hui, on ne peut pas compter... On ne peut pas compter sur les milliardaires ou les millionnaires pour financer par la philanthropie notre système de soins de santé. On ne peut pas compter sur la philanthropie pour financer notre système de justice. On ne peut pas compter sur la philanthropie pour financer notre système éducatif. Donc aujourd'hui, ok, c'est très bien, faites de la philanthropie, c'est super, mais d'abord aussi payez vos impôts de manière juste. Il faut savoir que la philanthropie, ça vient des Etats-Unis. Ça vient d'une époque où il y avait une extrême concentration des richesses dans le pays, je crois qu'on appelait ça le Gilded Age à l'époque, avec des types comme J.P. Morgan, tous ces super... les Rockefellers, etc. Et qu'en fait, à l'époque, ces gens payaient presque pas d'impôts. Et qu'un des moyens pour continuer à ne pas payer d'impôts face au mécontentement populaire qui montait dans la population aux Etats-Unis parce qu'il y avait des inégalités croissantes, ça a été de dire, ben ok, voilà ce qu'on va faire, c'est qu'on va créer des oeuvres philanthropiques, mais elles seront exemptes d'imposition, mais en échange, on rend cet argent vers la société. Mais le problème de la philanthropie, qui est très bien encore une fois, c'est très bien de faire de la philanthropie, je ne vais pas critiquer ça, mais c'est qu'en fait, on va financer des choses qui ne sont pas nécessairement bonnes pour l'ensemble de la société, et en fait, on est vraiment dépendant du bon vouloir des milliardaires qui décident, « Oui, ça, ça mérite d'être financé, ça, ça ne mérite pas d'être financé, ça, ça mérite d'être financé. » Une fois, j'étais en débat avec une avocate fiscaliste, et on parlait justement de la taxation des plus riches. Et elle nous a dit, oui mais en fait, le problème, c'est que l'argent il est mal dépensé, tu peux le penser, mais après il y a un processus qui s'appelle le vote, on élit des parlementaires, qui après vont former un gouvernement, et après voilà, le gouvernement, ça s'appelle la démocratie représentative, donc voilà, c'est mal géré, tu peux l'estimer, mais...

  • Speaker #0

    Alors vote pour les gens qui gèrent le moins mal selon toi.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, exactement. Et donc ce qu'elle nous disait c'était, je suis sûr que si vous demandez aux millionnaires qu'est-ce qu'il faut faire avec leur argent et que vous le faites ensuite, ils vont accepter de payer plus d'impôts. Mais ça on a déjà essayé, c'était au début du 19e siècle, du 20e siècle, ça s'appelait le suffrage censitaire. Et donc en fait ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'on doit donner... plus de poids aux millionnaires, aux gens qui ont un gros patrimoine. Les gens qui ont un gros patrimoine devraient avoir plus de voix, plus de poids sur la société dans les décisions qu'un gouvernement doit prendre par rapport aux commandes immortelles. C'est un peu l'idée qui revient souvent de dire, mais en fait, si vous leur demandez, ils accepteront de payer plus d'impôts. Et souvent, c'est des gestionnaires de fortune qui nous disent ça.

  • Speaker #0

    Il y a un dernier point que je voudrais aborder avant qu'on clôture cette partie. C'est cette fausse croyance que si les gens sont millionnaires ou milliardaires, donc si les gens sont fortunés, c'est qu'ils ont travaillé dur. Alors qu'on sait actuellement qu'il y a une part significative des personnes fortunées qui sont simplement des héritiers. Donc ils sont nés riches quoi.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est ça. Donc je crois qu'aujourd'hui, la première cause d'enrichissement des milliardaires à travers le monde, c'est l'héritage. 69% de la fortune des milliardaires à travers le monde ne provient pas du mérite. Ça ne veut pas dire que les 30% qui restent, ça provient du mérite. Mais en tout cas, sur trois critères qu'on avait évalués, qui étaient la détention d'entreprises qui sont des monopoles, donc qui vont contre la concurrence, qui sont mauvaises pour le marché et pour les consommateurs. Ça, c'est un élément. Ensuite, un deuxième élément, c'est l'héritage. C'est le premier facteur dans ce qu'on avait évalué par rapport à la richesse qui n'est pas méritée entre les mains des milliardaires. Et un troisième élément sur lequel parfois on oublie, mais il y a les questions de corruption, les questions de clientélisme, le fait qu'il y a beaucoup de milliardaires qui ont fait fortune aussi parce qu'ils ont reçu des contrats de la part des États dans lesquels ils sont. Par exemple Tesla, c'est une des entreprises les plus subsidiées aux États-Unis. C'est incroyable. Déjà c'est super violent de dire que c'est en bossant qu'on devient milliardaire. Parce que ça veut dire que tous les gens qui se lèvent tous les matins, qui ont des travaux qui sont pénibles, qui franchement se cassent le dos au boulot, on pense aux infirmières, aux gens qui ramassent les déchets dans les rues, vraiment des métiers pénibles, aux cheminots, etc. Ça veut dire que ces gens, parce qu'ils ne sont pas milliardaires, ils ne sont pas méritants, qu'ils ne bossent pas assez, c'est un peu l'idée. et ensuite il y a un truc qui est hyper violent aussi c'est de dire que les milliardaires sont Riches parce qu'ils ont juste bossé, mais la richesse des milliardaires est toujours collective. Parce que leurs entreprises ne reposent pas uniquement sur eux, il y a plein de collaborateurs qui sont derrière. Il y a aussi l'État qui est présent, et c'est important de le rappeler. Par exemple, si je pense à Marc Cook, qui est un de nos milliardaires belges, Merci. Marc-Court a fait fortune en Belgique, mais c'est aussi parce qu'en Belgique, il avait la possibilité de lancer son business, parce qu'il y avait une sécurité sociale, parce que ses employés pouvaient revenir rapidement au boulot après être tombés malades. parce qu'il y avait un système d'éducation et des universités qui permettaient aussi d'embaucher des profils qui correspondaient. Et donc tout ça, c'est financé par la collectivité. Et donc la richesse des milliardaires, elle n'est jamais individuelle. On a souvent tendance à dire, ah mais regardez, il est super riche, alors il est super intelligent, il est super travailleur, ah c'est un génie. Certainement que certains de ces milliardaires, ils ont une part de... Peut-être qu'ils sont certainement visionnaires sous certains aspects, mais réduire leur réussite, à juste du génie et quelque chose d'individuel et quelque chose qui est relatif juste au mérite c'est complètement louper tous les processus collectifs sur lesquels la société se repose pour se construire et c'est complètement ignorer les milliers de collaborateurs et les milliers de gens qui en fait créent la plus-value aujourd'hui dans les entreprises

  • Speaker #0

    Ok, donc grâce à Julien, maintenant, on comprend mieux les rouages du système fiscal, de comment on en est arrivé là et de comment on pourrait aussi rétablir une forme de justice fiscale. Maintenant, je vous propose d'en discuter avec une personne directement concernée, une personne fortunée qui va aussi nous parler de justice fiscale. Et dans quelques minutes, arrive chez moi Bruno Firenze. Je vous laisse avec lui.

  • Speaker #2

    Alors bonjour, je m'appelle Bruno Firenze. Si je suis ici, c'est parce que je suis le premier membre belge de Millionaires for Humanity. Et je suis plein d'autres choses, mais là, c'est ce qui est pertinent aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Tout à fait. Est-ce que tu peux du coup nous partager ton parcours ? Comment en fait tu en es venu à devenir membre de Millionaires for Humanity ?

  • Speaker #2

    Donc moi, je fais partie d'une famille belge qui est fortunée. Je fais partie d'une cinquième génération, donc on va dire du capital de ce que j'appelle générationnel. Et qu'est-ce qui m'a mené à devenir l'année passée membre de Millions for Humanity ? Ça a été un parcours assez long, si je retourne en arrière, qui a commencé par une conscience environnementale qui s'est accrue. Et puis il y a eu une période... plus philanthropique où j'ai fait un peu, j'étais actif avec une organisation très chouette, Douche Flux, et là c'est plus de la lutte contre la pauvreté. À côté de ça, il y a toujours eu pas mal de réflexions sur ma position privilégiée, on va dire, et une situation locale et globale d'inégalité qui se détériore, qui se dégrade. Et puis je crois que j'ai eu un moment où je me suis dit, Bon bah écoute-ci. Si. Si je suis vraiment sérieux à propos d'essayer de changer toutes ces choses pour le mieux, alors en fait, la taxation équitable, c'est le sujet sur lequel il faut se concentrer. Après, ça, c'est la longue route. J'ai eu des moments plus concrets aussi. Je lisais pas mal de choses ou j'écoute beaucoup de podcasts par rapport à ce sujet. Je me souviens que je lisais une interview. d'un journaliste flamand qui avait écrit un gros livre, La machine à inégalité. Et je me suis dit, mais lui, il faut absolument que je le rencontre. Et j'ai réussi à le rencontrer, on a parlé pendant une heure. Et dans son livre, il avait écrit, par exemple, une chouette phrase qui disait « L'inégalité est un système, un ensemble de lois et d'accords plus qu'un vice. » Et je trouvais ça assez intéressant. J'ai lu tout son livre. Et en fait, je me disais, mais c'est de nouveau un livre... ou une analyse, comme j'en ai déjà lu beaucoup, c'est une sorte d'analyse macroéconomique qui dit la situation va de mal en pire, il faut absolument y faire quelque chose et il y a une petite catégorie de gens qui en profitent un maximum. Je me suis dit oui, mais ça c'est l'analyse macro, moi ce qui m'adressait c'était les dynamiques au niveau micro qui font qu'on a l'impression que c'est inarrêtable. et puis il y a eu un moment Vraiment très concret, dont je parle en fait, que j'utilise souvent comme exemple, mais c'est un bon exemple, donc je vais le réutiliser. Ici, à Bruxelles, incertainement, on avait décidé de ne plus avoir de voiture. Et quand on décide de laisser tomber sa voiture, on peut rendre sa plaque d'immatriculation et on a droit à une prime environnementale, une prime de mobilité. Et il y a une prime minimum et une prime maximum. Et en tant que membre des 1% en Belgique, j'ai eu droit à la prime maximum. Et là, je me suis dit, mais c'est quoi cette histoire ? Donc en fait, il y a toute une partie de ma réalité financière qui n'est simplement pas prise en compte. C'est comme si elle n'existait pas. Et à ce moment-là, je me suis dit, bon, écoute, maintenant, tu arrêtes de te poser toutes ces questions, tu t'assieds, tu te confrontes à cette histoire, t'essayes de répondre à toutes ces questions aussi. Et j'ai commencé une sorte de gros mélange d'analyse personnelle et sociétale, où je me suis utilisé moi-même comme symptôme de société. Et où...

  • Speaker #0

    Oui, pour essayer de répondre aux questions. Quelles sont les micro-dynamiques qui soutiennent cette inégalité croissante ? Et quel est mon rôle dans toute cette histoire, que je le veuille ou non, qu'il me plaise ou non ? Et ça, in fine, ça a mené à devenir membre de Millionaires for Humanity et à plaider pour une taxation plus équitable. Donc ça veut dire un meilleur équilibre, en fait. Plus taxer le capital et moins taxer le travail. Je dis quand même les deux toujours ensemble.

  • Speaker #1

    Et qu'est-ce que ça veut dire en fait être membre de Millionaires for Humanity ? Tu t'inscris sur internet et puis qu'est-ce qui se passe en fait ? Tu rencontres une communauté, on te donne des talking points, on te dit de rencontrer les ONG locales. Qu'est-ce qui se passe en fait ? D'un point de vue concret, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Il se passe très peu. Millionaires for Humanity, ça a été créé par Jafar Chalchi au Danemark, qui lui a fait fortune lui-même. Son histoire est géniale d'ailleurs. Il est arrivé au Danemark en tant que réfugié iranien à 7 ans. Il a passé un an dans un orphelinat. Le temps que ses parents trouvent une solution, sa mère a été travailler dans un hôtel pour changer des lits. Lui, il est rentré dans le système scolaire et puis l'université danoise et il a fait fortune dans l'immobilier. Et lui, il se dit, il voit très concrètement comment est-ce possible que moi, en fait, in fine, je paye maintenant moins d'impôts que ma mère qui changeait des lits dans un hôtel. C'est complètement dingue. Et donc il a créé cette communauté, mais c'est vraiment une plateforme de communication. Donc dans un monde idéal, il y a quelques membres de Millenials for Humanity dans chaque pays qui vont faire passer le même message partout. Il faut absolument qu'on travaille à une taxation plus équitable. Et en pratique, il y a depuis peu un coup de fil bimensuel avec les membres qui veulent. pour un peu parler et comparer. Mais c'est vraiment... Moi, j'avais besoin d'une plateforme utilisable. Et il y en a plusieurs. Il y a Millionaires for Humanity, il y a Patriotic Millionaires aux Etats-Unis et en Angleterre. Et puis, il y a dans le monde germanophone, Tax Me Now, lié à Marlene Engelhorn.

  • Speaker #1

    Et du coup, tu rejoins ce collectif, cette plateforme, mais tu es le seul Belge. Donc, c'est quoi ton plan d'attaque ? Tu te dis, en Belgique, je suis quand même un peu seul. Comment je vais faire rayonner mon histoire et le fait que je défende une justice fiscale et donc une taxation plus équitable ? C'est quoi ton process ensuite ?

  • Speaker #0

    Moi, je sors un peu du monde de la com, ce qui m'a bien aidé. Mon constat surtout, c'était que je trouve qu'il y a une voix dans ce débat qui manque. J'entendais personne de mon angle très particulier dire ce que je raconte. Et donc je me suis dit, je trouve que c'est un gros manque. Et donc j'ai simplement fait une sorte de petite campagne com. Et je me suis mis, ok, je prépare mes messages et je vais parler d'abord à toutes les médias écrites. Et puis à tous ceux qui veulent l'entendre pour essayer de dire, ben voilà, il y a une autre voie. dans le débat actuel.

  • Speaker #1

    Parce que du coup, tu dis, ta voix, elle n'existait pas, en tout cas avant que tu prennes position et que tu communiques à ce sujet. Parce qu'en fait, quand on entend les Belges fortunés dans les médias, ce n'est absolument pas pour raconter la même chose que toi.

  • Speaker #0

    Oui, les Belges fortunés qu'on entend dans les médias à propos de ça, c'est un peu toujours le même profil. C'est les capitaines d'industrie qui viennent très fort du monde. de l'entrepreneuriat, qui est, attention, hyper important, mais ils vont voir le monde d'une façon assez particulière, ils vont voir le monde en fonction de retours sur investissement. Quand on investit dans quelque chose, ce n'est pas anormal, on pense en termes de retours sur investissement. Mais pas tout fonctionne comme ça. Donc ça veut dire qu'en tant que capitaine d'industrie... Il ne va pas investir dans l'école, la justice, la police, les bibliothèques, parce que ce n'est pas dans cette logique-là. Et si un jour c'est le cas, c'est une très mauvaise nouvelle, parce que dans les pays où le privé commence à investir là-dedans, l'inégalité augmente encore plus. Donc c'est un angle d'approche qui est très spécifique. Et moi, je trouvais qu'il y avait un angle d'approche qui voit les choses un peu plus large. qui était nécessaire aussi.

  • Speaker #1

    Et tu parles justement d'une prise de conscience écologique, de base en tout cas, et puis qui a rayonné, qui a grandi, et surtout du fait qu'on vit dans un monde aux ressources finies. Et tu me parlais juste... avant qu'on branche les micros, du fait que tu réalisais parfois qu'on ne savait pas objectiver. C'est quoi beaucoup d'argent ? Par contre, on arrive très bien à objectiver. C'est quoi peu d'argent ?

  • Speaker #0

    En fait, ça, c'est vraiment la fin de la longue analyse. Ma longue analyse a été une sorte de grosse question-réponse avec moi-même, en me disant, voilà, on me dit souvent des choses pareilles. Est-ce que c'est vrai ? Est-ce que ce n'est pas vrai ? « Et qu'est-ce que j'en fais ? Et pourquoi est-ce qu'on me dit ça ? » Taxer la fortune, ce serait malhonnête, parce que le résultat d'une fortune, c'est le résultat d'un travail, et donc on ne va pas taxer quelqu'un une seconde fois. C'était par exemple ma première question, et là je me suis dit, en 2022, il y avait 483 milliards d'euros qui étaient gérés par des banques privées en Belgique. La première question que je me suis posée, c'est combien de ces 483 milliards ? correspondent avec l'histoire que je viens de raconter. À partir de certains montants, à partir de... Surtout quand c'est de génération en génération, cette histoire n'a plus vraiment la route. On sort de cette logique. Et alors on me demande, oui, mais à partir de quels montants ? Je ne sais pas à partir de quels montants. Ce qu'on constate par contre, c'est qu'on arrive très bien à objectiver des salaires minimums, des montants minimums. Mais alors commencer à réfléchir à... Des barèmes progressifs par rapport à la fortune, apparemment...

  • Speaker #1

    On n'y arrive pas.

  • Speaker #0

    C'est pas possible. En tout cas, à partir d'un certain niveau, ou à partir d'une certaine fortune, que ce soit 10 millions, 100 millions, hop, hop, hop, voilà, tout ça c'est la même chose. Ce que je trouve assez particulier. Qu'est-ce qu'on me dit aussi à ce moment-là, c'est « Ah oui, mais attention, parce qu'on n'est jamais sûr. Demain tout... » Demain, tout peut être parti. Non, pas demain, pas tout peut être parti. À partir d'un certain... De nouveau, et je dis beaucoup ça, à partir de certains montants, à partir de... On commence à savoir diversifier un maximum, donc on ne met pas tous ses oeufs dans le même panier et on sait commencer à miser sur tous les chevaux en même temps. Donc, en fait, on devient le casino. On ne sait plus perdre. Qu'est-ce qu'on me dit alors très souvent à ce moment-là ? C'est « Oui, mais en Belgique, ça va » . Oui, non. Et ça, il y a un très bon rapport qui est sorti l'année passée d'André Decoastre, le paradoxe des inégalités en Belgique. En Belgique, ça va si on ne tient que compte du salaire. Si on tient compte des inégalités du capital, ça va beaucoup, beaucoup moins. Et en plus, on a un système, et ça, ce n'est pas juste en Belgique, on a un système où à partir de vraiment des 1%, la taxation devient régressive, en fait. parce qu'il y a beaucoup plus de rentrées qui viennent du capital ou du patrimoine immobilier, par exemple. Du coup, ça veut dire que, et ça c'était mon premier constat, je disais mais en fait on a un système de taxation qui alimente les inégalités. C'est complètement dingue. Après ça c'est un constat qui n'est pas très compliqué. Je ne suis pas le seul à faire ça. Il y a beaucoup...

  • Speaker #1

    Oui, et tous les académiques, les fiscalistes,

  • Speaker #0

    les économistes. Donc la question que moi je me suis posée, c'est comment ça se fait que ça ne change pas ? Pourquoi est-ce que ce n'est pas plus vraiment un sujet majeur pour plein de partis politiques ? Et là, je suis vite venu sur un concept de déni, en fait. Comme mon exemple de matriculation, on nie une certaine réalité, et à plusieurs niveaux. Alors d'abord, pour moi, il y a un déni pour la très grande majorité des gens. En fait, ils ne savent pas s'imaginer ce que c'est une très très grande fortune. Non, moi, je ne sais pas, par exemple. Et donc, un ami m'a une fois dit, et je trouve ça pas mal, il disait, oui, mais je suis d'accord avec toi et tout, mais ils ne peuvent pas toucher à la taxation sur l'héritage. Je me dis « Ah, c'est moi-même, pourquoi tu dis ça ? » Parce que moi, j'ai travaillé dur pour m'acheter une maison et je veux savoir la donner à mes enfants sans que ce soit taxé encore une fois. Et là, je me dis « Mais oui, je vois très bien la logique. Mais si quelqu'un a 27 maisons, il faut peut-être oser commencer à réfléchir différemment par rapport à ça. Mais déjà, il faut accepter que ça existe. » Et puis, il y a les 1%, les gens comme moi, qui sont censés savoir voir ce que je vois, mais il faut vouloir le voir aussi. Et souvent, on est dans un déni pour de très bonnes raisons. On veut correctement éduquer ses enfants, avec les bonnes valeurs. Socialement, on n'aime pas sortir du lot. On apprend certaines choses assez tard, parce qu'on est éduqué d'une certaine bonne façon. des choses en fait des décisions qui Au niveau personnel et social ? ont tout à fait raison d'être, mais qui ont à un certain moment un impact sociétal, parce qu'on reste aussi dans ce déni. Oui, mais ce n'est pas très important, ce n'est pas de l'argent mérité, ce n'est pas de l'argent gagné, donc on met de côté et on fait un peu comme si ça n'existait pas. Et puis il y a le troisième niveau, il y a le niveau politique, où, et ça c'est plutôt une bonne chose, la plupart des politiques ne sortent pas du monde des très fortunés, donc ont du mal à s'imaginer mais par contre ils ont plus accès à ce genre d'informations. Et là aussi, ça n'arrange personne dans le narratif. Toutes les politiques de n'importe quel bord accentuent la valeur du travail et la valeur du mérite. Mais quand on est un démonteur pareil, on sort de cette logique. Et donc, c'est beaucoup plus pratique par rapport au narratif de l'ignorer. Donc, déni sur déni sur déni, ça fait, moi, je... Je trouve une certaine malhonnêteté intellectuelle, en fait. Je dis souvent qu'en tant que très fortuné, on tient très fort compte de mes intérêts, mais très fort peu compte de ma fortune.

  • Speaker #1

    Oui, mais c'est hyper intéressant. Je pense que c'est la première fois que j'entends un discours pareil d'une personne fortunée. On entend, comme tu dis, toute la théorie, tous les fiscalistes, les économistes qui parlent de ce genre de sujet. On entend Oxfam, on va peut-être en parler un peu. Tu as fait une conférence avec Oxfam récemment au Parlement européen pour parler notamment du rapport d'Oxfam sur les inégalités. On l'entend du monde associatif, du monde académique, un petit peu du monde politique, mais très peu, comme tu le dis, et pas suffisamment, parce qu'il y a ce malaise, il y a ce déni. Mais je trouve ça hyper rafraîchissant et hyper utile d'avoir des gens comme toi qui prennent la parole sur ce genre de sujet. Et de dire exactement la phrase que tu viens de dire, c'est « on prend en compte mes intérêts, mais pas ma fortune » . Et je trouve que cette phrase résume parfaitement la situation. C'est un peu lunaire. Mais du coup, pour revenir sur la collaboration avec les académiques et notamment Oxfam. Donc récemment, tu as été au Parlement européen avec un expert de chez Oxfam pour discuter de ces sujets. Et est-ce que tu peux un peu nous en parler ?

  • Speaker #0

    Alors Oxfam m'avait invité à parler dans un panel au Parlement européen pour parler de ça. Eux, ils ont sorti un rapport pour expliquer que la situation s'aggrave et qu'est-ce qu'on pourrait peut-être y faire. Là, j'ai constaté aussi, après notre débat, il y avait un débat entre les politiques. En fait, tout le monde raconte un peu sa position sans vraiment en parler. Qu'est-ce que j'ai sorti de cette expérience au Parlement européen ? mais... il y a quand même un gros manque de vrai débat. Donc je pense, d'abord, ça, ça revient un peu... En fait, je vais un peu répondre à la question, qu'est-ce que je pense qui doit se passer pour qu'on essaye de trouver des solutions ? Ça recoupe un peu sur ce que je disais de Denis. Je pense que cette énorme inégalité et le fait qu'il y ait une telle masse financière qui va que vers tellement peu de personnes... peace On parle beaucoup de proportion aussi, c'est complètement disproportionné. Que ce soit au niveau sociétal ou que ce soit au niveau personnel, une masse financière parée, en fait, c'est un dilemme moral. On se dit mais ce n'est pas possible. Et qu'est-ce qu'on fait en général avec les dilemmes moraux ? On essaie de les éviter le plus possible. Ou en tout cas, on essaie aussi de changer de sujet. Donc qu'est-ce qu'on va énormément dire ? on va venir... Quand je parle de ça, oui, mais l'État gaspille notre argent et est un très mauvais gestionnaire. Ok, l'État... J'ai un mine Bruxelles, donc je vois très bien de quoi on parle. Mais même si on vivait dans un État qui travaillerait à la perfection et où tout fonctionne parfaitement, on va devoir encore toujours s'atteler à cette question. Qu'est-ce qu'une taxation éguitable ? Qu'est-ce qu'on me dit aussi ? Mais il faut plus encourager l'entrepreneuriat. D'accord.

  • Speaker #1

    Comme si c'était opposé en fait.

  • Speaker #0

    Comme si c'était opposé. Moi je vois pas très bien en quoi la situation actuelle encourage l'entrepreneuriat. On est loin du compte en fait. Mais de nouveau, c'est un débat différent. Oui mais si on taxe plus les riches alors il va y avoir moins de philanthropie. C'est la philanthropie. va toujours être nécessaire, mais c'est de nouveau un débat différent. Donc on utilise tous ces sujets qui ont tout à fait lieu d'être et dont il faut parler, mais en fait comme excuse pour ne surtout pas commencer à parler de ce problème d'inégalité croissante et de taxation foireuse, on va dire. Donc il faut avoir, en fait il faut oser cette confrontation. On doit oser se confronter par rapport à cette situation. On doit oser regarder la situation et se dire mais... Ok, ça en fait c'est pas possible. Il y a quelque chose de complètement... Et oser regarder les chiffres. Et à côté de ça, on doit avoir, moi je pense aussi, le courage de la discussion, et c'est là que je recoupe un peu avec Oxfam. Tu vois, au début je parlais du livre, que j'étais en train de lire un livre, que j'ai rencontré un journaliste, et lui, ce qui était intéressant, donc on a parlé pendant une heure, et j'ai réalisé, je ne lui ai jamais posé la question, je devrais, Moi, je pense que c'est la première fois qu'il parlait à 1%. Moi aussi. Oui, oui. Non, mais c'est la première fois qu'il parlait. Mais lui, il a écrit un livre de 600 pages.

  • Speaker #1

    Sur ces gens-là, c'est vrai.

  • Speaker #0

    Avec des gens quand même qui ont... Et je me disais, mais c'est assez bizarre. Et puis, je lis son livre. Et il y a des magnifiques phrases. Et j'en ai noté deux. Ce genre de personnes qui ne peuvent se passer de vanité et de paillettes avec Louis XIV et Marie-Antoinette à Versailles, ce n'était pas différent. Ok, et mon préféré, c'est Nanty capable de se gâcher le sommeil en cherchant les moyens de se faire encore plus d'argent avec leur argent. Quand je lis ça, d'abord je ne me reconnais pas spécialement, je me dis ok, c'est spécial, mais surtout, ça rend les choses très faciles pour moi de me dire, moi je n'ai rien à voir avec ça. Et donc, l'argent, la fortune, à n'importe quel niveau, c'est quelque chose de très émotionnel. Et donc quand il y a, l'autre fois c'était dans une manif en France, quelqu'un qui avait un grand panneau avec « Il faut reprendre l'argent que les riches nous ont volé » . Alors même si je vois très bien d'où vient cette phrase, si on me traite de voleur, je vais par définition réagir de façon assez défensive. Oui,

  • Speaker #1

    même si tu comprends le fond.

  • Speaker #0

    Je comprends très bien le fond. Et c'est entre autres pour ça qu'il n'y a pas de dialogue. On doit réussir. avoir une discussion qui va au-delà des clichés. La fois passée, j'ai réagi par rapport à une proposition politique. Taxer les riches, c'est taxer la richesse. Taxer la richesse excessive. Et je sais bien que...

  • Speaker #1

    C'est ça qu'on veut dire par taxer les riches. Oui,

  • Speaker #0

    je sais bien que c'est ça qu'on veut dire. Et je sais bien que rétablir l'équilibre en taxant plus la richesse excessive, ça marche moins bien en termes de com. C'est moins vendeur. Mais c'est vers là qu'on doit aller pour avoir une discussion correcte. C'est... Je parlais à Oxfam par rapport à ça, et ça c'était très chouette comme discussion, parce qu'il disait, c'est très fort dans le narratif, donc pour moi c'est les deux choses qui doivent se passer, on doit accepter de plus parler, mais on doit réussir à parler différemment. Mais Oxfam, dans un de leurs rapports aussi, ça c'est pas le rapport Oxfam, dans plein de rapports, la plus grosse partie des fortunes maintenant, c'est de la fortune héritée. Donc les très grosses fortunes maintenant, en majorité, c'est des fortunes héritées. Si c'est hérité, ben voilà, il n'y a pas de mérite, mais ce n'est pas ma faute non plus. Oui, t'es né là-dedans quoi. Oui, t'es né là-dedans. Donc on peut m'accuser de ne pas prendre mes ressources habitées, on peut m'accuser de...

  • Speaker #1

    De malhonnêteté intellectuelle, comme tu disais.

  • Speaker #0

    De malhonnêteté intellectuelle, mais c'est encore différent de dire c'est ta faute. Votre faute. Je dois me confronter à ça comme tout le monde. Et voilà, s'il y a ce discours-là, ça ne me la rend pas plus facile pour sortir du bois, on va dire. J'avais trouvé une analogie qui était pas mal, je pensais, enfin je pense. On est un des dix seuls pays au monde à avoir réussi à avoir une conversation sur l'euthanasie. C'est pénible, hein. C'est parler de la mort. Tout le monde doit passer certaines lignes et... Il y a beaucoup d'analogie. C'est une discussion qui ne termine jamais. On doit reparler de ça à tous les instants pour de nouveau trouver un juste équilibre. Il y a dix pays qui ont réussi à avoir le courage d'avoir cette discussion. Ce n'est pas beaucoup. Et la Belgique en fait partie. C'est exactement la même chose. On doit réussir à trouver une façon de, et je ne sais pas comment encore, mais on doit trouver une façon d'avoir une discussion correcte et adulte.

  • Speaker #1

    Et à un niveau aussi, tu le portais au Parlement européen. Et c'est une conversation qui doit avoir lieu de manière internationale aussi, ça doit dépasser les frontières et le porter je pense au niveau européen est déjà un premier pas et je pense que c'est le but aussi de Millionaires for Humanity d'avoir cette conversation à l'international et de pouvoir justement s'allier dans ce message là, mais en effet c'est quelque chose qui vit très peu de manière générale en Belgique et partout ailleurs.

  • Speaker #0

    qui vit très peu, ce que je trouve assez étonnant parce que c'est quand même la source de beaucoup de... de problèmes, ou la source de beaucoup de choses, et donc la solution aussi de beaucoup de choses, donc je trouve ça très étonnant, et ça c'est une des choses qui m'a étonné depuis que j'ai commencé à faire ça jusqu'à quel point les gens vont pour ne surtout pas en parler moi je pensais qu'en fait que ça allait être, ah tiens une nouvelle voix, on va quand même écouter ah non, il faut pousser, pousser, pousser avant de savoir aller donner ce nouvel angle parce qu'on essaye vraiment d'éviter ça Euh... Un maximum. Mais je reviens sur ce que tu disais tout à l'heure sur les ressources infinies et le beaucoup d'argent. Je disais au tout début, je ne sais pas si ça a commencé comme ça, mais je sais qu'au début, il y a une sorte de conscience environnementale. Et il n'y a pas longtemps, j'ai vraiment eu un moment où je me suis dit, ah, mais voilà, la boucle est bouclée quelque part. Très souvent, on me dit, oui, mais c'est quoi beaucoup d'argent finalement ? Tu vois, pour toi, c'est autant, pour quelqu'un d'autre, c'est autant. autant pour Elon Musk, ce sera autant. Et certainement, j'ai un peu fait le lien entre tous les gens qui me disaient ça et je me disais, Si on voit le monde comme un monde aux ressources infinies, comme beaucoup de gens font encore, 1 million, 3 milliards ou 300 trilliards, ça ne change rien. De toute façon, il n'y a pas de limite. Le moment où on change cette façon de penser là, où on se dit parce que tout cet argent est lié à quelque chose, est lié à une machine qui doit tourner, est lié à plein de choses, au moment où on se dit, ah mais non, on n'est pas. dans un monde aux ressources infinies. Mais là, tout change. Et là, tout change par rapport à ce sujet-ci aussi.

  • Speaker #1

    Mais je pense que c'est parfait pour clôturer cet épisode. Merci beaucoup Bruno d'être venu parler de tout ça à mon micro. Et à bientôt !

  • Speaker #0

    Merci beaucoup, à bientôt !

  • Speaker #1

    J'espère que cet épisode vous a plu. Si c'est le cas, n'oubliez pas de vous abonner au podcast. Si vous voulez réagir à nos propos, la section commentaires est faite pour cela. Ou alors, vous pouvez me retrouver sur Instagram sous le pseudo at goodmorninglo. On se retrouve dans deux semaines pour un prochain épisode d'Epicéa. Et d'ici là, prenez soin de vous.

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Description

Taxer les riches? Parlons justice fiscale!

J'ai la chance de recevoir 2 pointures du sujet:

  • Julien Desiderio - expert en fiscalité chez Oxfam

  • Bruno Fierens - premier membre belge de 'millionaires for humanity'

50min pour comprendre pourquoi rétablir la balance fiscale est nécessaire et comment on doit avoir cette conversation.
Bonne écoute!



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, ici Laurie, et vous écoutez Epicea,

  • Speaker #1

    un podcast dédié aux témoignages inspirants de personnes engagées.

  • Speaker #0

    Je me fais un café et je vous explique. Il y a un sujet dont j'aimerais vous parler depuis un moment, mais c'est pas si facile de le prendre par le bon bout pour qu'il fasse sens pour vous et surtout que j'arrive à bien raconter l'histoire. C'est la justice fiscale. Taxer les riches. Pourquoi ? Comment ? Comment ça se fait que la justice fiscale, elle est pas là pour le moment, que c'est pas équilibré ? Et du coup, aujourd'hui, là, va arriver dans quelques minutes chez moi Julien Desiderieux de chez Oxfam, expert en justice fiscale, expert en fiscalité. Et du coup, il va nous raconter plein de trucs. Je vous laisse avec lui.

  • Speaker #1

    Moi c'est Julien Desiderio, je suis chargé de plaidoyer pour l'ONG Oxfam sur les questions de fiscalité et d'inégalité. Oxfam c'est une ONG internationale dont l'objectif c'est de changer les systèmes pour combattre les inégalités. En fait on reconnaît que les inégalités elles sont au cœur des systèmes, elles sont structurelles et que donc c'est par... la politique et par des mesures, notamment en matière de justice fiscale, qu'on va réduire les inégalités dans le monde. Et donc pour l'instant, on a une campagne qui s'appelle Make Rich Polluters Pay, donc faire payer les riches pollueurs, qui est en fait une campagne qui a démarré comme une campagne Tax the Rich. Pourquoi Tax the Rich ? Parce qu'aujourd'hui, on a de plus en plus de preuves, d'évidence, de recherches universitaires qui montrent que les... plus riches, les milliardaires dans le monde ne payent pas leur juste part d'impôt. Donc l'impôt, nous on dit tout souvent que c'est le prix à payer pour une société civilisée, donc ça veut dire une société où on a des services publics, une société où on a des soins de santé qui sont accessibles, où on a une justice qui est efficace, et donc tout le monde doit contribuer d'une manière ou d'une autre au financement de ses biens collectifs, mais ça doit se faire de manière proportionnelle, et donc tout le monde ne doit pas participaient de la même manière. C'est cette fameuse idée des épaules les plus larges qui doivent contribuer une plus large proportion. Aujourd'hui, on voit que ce n'est pas le cas. Par exemple, en Belgique, les 1% les plus riches payent deux fois moins d'impôts sur leurs revenus que la classe moyenne. C'est injuste, ce n'est pas normal. Ça crée des problèmes en matière d'assentiment à l'impôt. Mais ça crée aussi des problèmes en intérieur d'accumulation du patrimoine entre les mains des plus riches. Et l'accumulation du patrimoine entre les mains des plus riches, ça fait aussi une accumulation de pouvoir. Et après, on arrive à des situations extrêmes, comme on le voit aux Etats-Unis, où pendant tout un temps, on a eu un président milliardaire avec son bras droit qui était l'homme le plus riche du monde et qui décidait de couper dans tous les budgets de la coopération et de développement à travers le monde. Et donc qui s'attaquait aux personnes les plus précarisées de la planète. Et donc ça, c'est un système extrême contre lequel on se bat aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Comment ça se fait que les riches, les milliardaires et j'imagine aussi certains millionnaires ne payent pas d'impôts ? Comment ça se fait ? Parce que nous, on est taxé sur le revenu. On ne le voit même pas quand on est salarié. Je sais, c'est une question un peu naïve, mais comment ça se fait du coup ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas une question naïve parce que c'est quelque chose qui revient souvent. Les gens ont du mal. à comprendre ces mécanismes-là. Pourquoi ? Parce que les gens, à la fin du mois, ils reçoivent leur paye, ils reçoivent leur chèque, et bien souvent, c'est le seul revenu qu'ils ont. Parce que la plupart des gens ne saisissent pas, et c'est tout à fait normal parce que c'est pas accessible à tout le monde, c'est que pour la catégorie des millionnaires et des milliardaires, il y a d'autres formes de revenus qui entrent en compte, qui sont moins... liquide, ça veut dire qu'on peut moins... Ça veut dire que, simplement, on ne va pas aller acheter son pain avec, mais par exemple, si je prends un cas extrême, c'est souvent très facile de prendre un extrême pour présenter cette problématique. Si tu prends Elon Musk, Elon Musk, il a des entreprises, Tesla... X, etc. La fortune d'Elon Musk, elle ne réside pas sur son compte en banque, elle réside dans les actions au sein des entreprises qu'il possède. Et même s'il ne peut pas acheter du pain, de l'eau, du lait avec ses actions Tesla, il peut quand même acheter Twitter, parce que c'est grâce à ses actions Tesla qu'il a mis en collatéral pour faire des prêts auprès des banques et ne pas payer d'impôts, parce qu'on ne paye pas d'impôts sur des prêts. qu'on fait auprès d'une banque, qu'il a pu racheter Twitter. Il y a aussi un autre système qui est un peu plus généralisé, qui est celui des holdings. Et donc une holding, c'est quoi ? Une holding, c'est une entreprise qui va faire écran à l'impôt que devraient payer normalement les milliardaires. Et donc par exemple, ils ont des actions dans des sociétés. Ces sociétés génèrent une activité, vont générer un bénéfice et puis vont verser des dividendes. Si ces dividendes sont versés dans la holding du millionnaire ou du milliardaire, elles seront en principe exemptées d'impôts. Mais ça ne veut pas dire qu'après, une fois que cet argent est dans la holding, les milliardaires ne peuvent pas s'en servir. Ils peuvent s'en servir pour racheter d'autres entreprises, ils peuvent s'en servir pour racheter des médias, pour racheter de l'influence, etc. Ou même pour acheter un yacht aux îles Caïmans ou aux Bahamas. Ce qui est important de comprendre, c'est que l'argent qui est arrivé dans cet holding n'a pas été taxé. Et qu'au final, la personne qui va être la bénéficiaire effective du yacht, du jet, etc., ce n'est pas l'entreprise, c'est la personne qui possède cette entreprise.

  • Speaker #0

    Complètement, c'est la famille qui détient l'holding, qui va pouvoir jouir de l'argent de l'holding, mais sans être taxé dessus. Très peu, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, c'est un peu le principe. Je caricature, le système est très complexe, mais en gros, ça, c'est le principe.

  • Speaker #0

    Ok, très bien. Et donc, du coup, par rapport à moi qui suis dans la classe moyenne, qui paye, je dirais, un gros 40% d'impôts, un millionnaire, un milliardaire en Belgique, il paye combien de pourcents d'impôts ? Enfin, d'impôts, oui, il contribue à hauteur de combien de pourcents ?

  • Speaker #1

    En fait, on a estimé... Il y a une étude en Belgique qui est tout à fait récente et super révolutionnaire, je trouve, parce qu'on manquait vraiment de ces infos-là en Belgique, que les 1% les plus riches payent 23% de leurs revenus en impôts, alors que la classe moyenne, la moyenne des Belges, pas la classe moyenne, mais la moyenne des Belges, paie 43% de leurs revenus en impôts. Mais là, c'est tout impôt confondu. Donc c'est l'impôt sur le revenu, c'est l'impôt des sociétés, c'est... La TVA, c'est important parce que souvent on pense que les gens qui sont les plus précaires, les plus pauvres, les gens qui ont peu de revenus ne payent pas d'impôts, mais en fait tout le monde paye des impôts, même des SDF payent des impôts parce que dès que tu achètes un bien dans un supermarché, tu payes de la TVA là-dessus. et donc ça c'est allez tu vas payer 6% ou 21% de TVA sur certains produits les gens payent de l'impôt là-dessus et ça pèse beaucoup plus dans le portefeuille des personnes qui ont moins de revenus que dans le portefeuille des millionnaires et des milliardaires. Et donc aujourd'hui, la classe des 1% les plus riches en Belgique, c'est celle qui, par rapport à toutes les autres classes de revenus, paye le moins d'impôts.

  • Speaker #0

    Et quand on vient avec ce discours de justice fiscale près des décideurs, qu'est-ce qui se passe en fait ? Parce que ça fait sens ce que tu me racontes là, c'est des chiffres, c'est des études. Comment ça se fait qu'on n'a pas de mécanisme mis en place pour rééquilibrer la contribution de chacun ?

  • Speaker #1

    Il y a des décideurs qui sont favorables à changer le système. Aujourd'hui, ils ne sont pas forcément tous au gouvernement. En tout cas, s'il y en a qui sont au gouvernement, ils sont extrêmement minoritaires. Après, il y a toujours cette histoire de la théorie du ruissellement qui est encore très vivace. Donc la théorie du ruissellement, c'est quoi ? C'est une théorie qui nous vient des années 80, des Ronald Reagan et des Thatcher. Et d'ailleurs, Bardo Hever aime bien. Citer Margaret Thatcher et Georges Louis Boucher aussi. Cette théorie, elle dit qu'en fait, baisser les impôts sur les plus riches, ça va rejaillir en croissance et en emploi sur le reste de la population. Mais c'est ce que Macron a fait pendant des années en France. Et en fait, tout ce qu'il a réussi à faire, c'est creuser le déficit et les inégalités du pays. Et donc ça ne marche pas. Donc même le FMI a dit, même des études ont été menées par l'université d'Oxford. et évaluer sur le long terme ces politiques de ruissellement dans les pays de l'OCDE. Et les conclusions, c'est que ça a augmenté les inégalités et ça n'a pas créé la croissance et les emplois qui étaient souhaités.

  • Speaker #0

    Ok, donc c'est vraiment un leurre, c'est un mythe en fait. C'est un mythe, oui. Ça a déjà fonctionné ? C'est pour ça qu'on pense ça ?

  • Speaker #1

    Non, ça n'a jamais fonctionné. Donc c'est ça en fait, on a le recul aujourd'hui pour montrer que ça ne fonctionne pas, qu'aujourd'hui on est dans un moment où, coupé dans les services sociaux, Ça va ralentir l'économie. En plus, on a un gouvernement qui décide, surtout en Wallonie, une des premières mesures, c'est d'octroyer des avantages fiscaux sur les successions ou sur les droits d'enregistrement, mais des avantages fiscaux qui, on le voit, bénéficient majoritairement aux classes les plus privilégiées de la population. Et donc ça, c'est des mesures qui creusent le déficit. Et après, on vient nous dire que voilà le déficit des rails, qu'il faut couper dans la santé, couper dans les services sociaux, augmenter le minerval des universités. Mais en fait, tout ça, c'est des choix politiques. Et souvent, on dit, bah oui, il y a une rage taxatoire en Belgique. Les gens payent beaucoup trop d'impôts. Mais en fait, oui, c'est vrai, quelque part, quand on est dans la classe moyenne en Belgique, on paie vite beaucoup d'impôts. Mais c'est pas le cas de tout le monde. et en fait ce dont on a besoin aujourd'hui C'est un rééquilibrage de l'impôt, surtout entre le travail et le capital. Les gens qui bossent payent aujourd'hui beaucoup plus d'impôts que des gens qui tirent des revenus uniquement de leur capital. Un exemple très simple, on avait calculé chez Oxfam quelqu'un qui gagne 40 000 euros brut par an uniquement de par son travail. paye en moyenne 30% d'impôts sur ce revenu. Donc des 40 000 euros, on va retirer 30% pour financer les services publics, les services à la collectivité, etc. Jusqu'à ce jour, jusqu'à aujourd'hui, quelqu'un qui fait 40 000 euros de revenus en achetant et en revendant des actions, en faisant une plus-value sur ses actions, va payer 0 euros d'impôts. Donc pour le même type de revenus, dépendant d'où ça vient, il y en a un qui paye 30% d'impôts, et l'autre qui paie 0% d'impôts. Mais celui qui paie beaucoup d'impôts, c'est celui qui bosse, c'est celui qui se lève tous les matins. Alors que pour faire des plus-values, il faut juste avoir un capital. On peut avoir un capital de départ, on peut hériter d'un capital. On ne doit pas forcément avoir travaillé pour après investir en bourse et générer des plus-values. Chaque année, on publie un rapport mondial sur les inégalités dans le monde, en janvier. Et on collabore notamment avec les millionnaires for humanity et les patriotiques millionnaires. qui sont en fait un groupement de millionnaires et de multimillionnaires qui demandent à payer plus d'impôts. C'est des gens qui disent, ben voilà, moi je vis très bien avec ce que j'ai, je pense qu'aujourd'hui on a un besoin d'investissement public, on a besoin de rééquilibrer le système fiscaux, on a besoin de plus de solidarité pour financer nos sociétés et les collectivités.

  • Speaker #0

    Et la décarbonation, notamment.

  • Speaker #1

    Et la décarbonation, oui. C'est aussi pour ça que notre campagne s'appelle Make Rich, Pollute Your Spee, parce qu'on demande de taxer les plus riches de façon équitable pour financer notamment l'investissement public dans la transition climatique.

  • Speaker #0

    Oui, et comme tu dis, c'est de façon équitable. Il n'est pas question, encore une fois, de...

  • Speaker #1

    De spoliation, pas du tout. Oui,

  • Speaker #0

    c'est ça.

  • Speaker #1

    Par exemple, il y a la fameuse taxe Zucman. Donc ça, c'est super populaire pour l'instant. vraiment mis la lumière sur la question de justice fiscale. Et ce que Zucman propose, c'est un taux minimum de 2% sur la fortune des milliardaires. C'est-à-dire qu'on taxerait les milliardaires à 2% minimum sur leur fortune. Donc minimum, ça veut dire déduire... des impôts qu'il paye déjà. Donc s'il paye déjà 2%, il ne paierait pas un impôt supplémentaire.

  • Speaker #0

    C'est s'assurer qu'il paye déjà 2%.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, un minimum de 2%. Mais ce que Zucman montre, c'est que même en payant ces 2%, la fortune des milliardaires continuerait à augmenter. Donc voilà, nous chez Oxfam, ce qu'on voudrait, c'est un peu amorcer une déconcentration de ces fortunes-là, des super grandes fortunes qui aujourd'hui... ont un pouvoir sur nos démocraties qui est complètement démesuré, qui est en dehors de tout cadre démocratique. Donc on ne vote pas pour des milliardaires mais ils ont parfois plus d'influence sur nos vies que les choix politiques qu'on fait dans les urnes. Mais donc voilà, aujourd'hui on est dans ce débat de dire mais en fait même 2% d'impôt sur la fortune des milliardaires, chez certaines personnes c'est vu comme de la spoliation, mais nous sur nos revenus on paie jusqu'à 30-40% d'impôt. Enfin voilà, il y a cet équilibre. Et alors je voudrais surtout pas tomber dans l'idée de dire « Ah oui, mais alors baissons les impôts absolument sur nous, sur la classe moyenne, sur les gens qui sont plus précaires, etc. » Ok pour ça, mais si on baisse les impôts sans compenser, alors on va perdre... On fait des économies dans quoi ? On fait des économies dans la santé ? On fait des économies... Dans la justice, on fait des économies, dans la sécurité, dans le climat, enfin voilà.

  • Speaker #0

    Non bien sûr, il faut des rentrées, l'État a besoin de rentrées pour faire fonctionner les services publics, pour payer les retraites, on oublie toujours, mais il y a une grosse partie de l'impôt qui part dans les retraites. L'idée en fait c'est de rééquilibrer qui contribue, mais cette enveloppe elle doit rester là, même elle doit croître par rapport à tous les sujets auxquels on doit faire face, comme notamment... Le changement climatique, les inégalités croissantes, cette enveloppe doit rester là et croître pour faire face à tout ça. Mais oui, on doit rééquilibrer de qui contribue à cette enveloppe finalement.

  • Speaker #1

    Et ça, c'est ce que demandent les millionnaires avec lesquels on travaille. Même des gens comme Warren Buffett, qui est un des hommes les plus riches du monde et qui n'est pas du tout membre de ce groupe de millionnaires, il a eu cette phrase qui, je trouve, est vraiment révélatrice. Il y a une guerre des classes aujourd'hui. La lutte des classes, c'est les millionnaires contre le reste du monde. Et c'est ma classe, celle des milliardaires, qui est en train de la gagner. Et donc, même quelqu'un comme Bill Gates va dire « Mais oui, ça ne me dérangerait pas de payer plus d'impôts » . Quelqu'un comme Marlène Engelhorn, qui est l'héritière du groupe chimique BASF. Elle, elle a dit, elle est membre de ce groupement de millionnaires et elle dit mais en fait, voilà, moi, je veux redistribuer ma fortune parce que je l'ai héritée, je vis très bien, je peux en redistribuer une partie pour la collectivité et financer des projets sur lesquels les gens vont s'accorder, vont débattre et vont décider ce qu'ils veulent financer, ce qui est bénéfique pour la société.

  • Speaker #0

    et du coup il y a un truc dont j'ai envie de parler c'est que Donc ces personnes fortunées, elles sont au courant qu'elles payent très peu d'impôts, en tout cas pour la plupart. Il y en a qui sont d'accord de redistribuer, il y en a probablement moins. Une majorité probablement n'est pas d'accord de redistribuer. Mais du coup, elles mettent un mécanisme quand même en place qui est la philanthropie. Et du coup, elles se défendent avec ça. Ça devient un argument de je ne paye pas, je ne paye peu d'impôts. Oui, mais j'investis dans tel et tel projet et j'ai dépensé des millions dans ça et des millions dans ça. Comment, chez Oxfam, et comment toi, vous gérez cet argument-là de la philanthropie ?

  • Speaker #1

    En fait, la question de la philanthropie, on ne va jamais critiquer quelqu'un parce qu'il donne de l'argent à une cause qu'il estime bonne. Mais souvent, les causes que les philanthropes estiment bonnes ne sont pas nécessairement celles qui vont bénéficier à l'ensemble de la société. Donc en fait, ce que nous on dit, c'est qu'aujourd'hui, on ne peut pas compter... On ne peut pas compter sur les milliardaires ou les millionnaires pour financer par la philanthropie notre système de soins de santé. On ne peut pas compter sur la philanthropie pour financer notre système de justice. On ne peut pas compter sur la philanthropie pour financer notre système éducatif. Donc aujourd'hui, ok, c'est très bien, faites de la philanthropie, c'est super, mais d'abord aussi payez vos impôts de manière juste. Il faut savoir que la philanthropie, ça vient des Etats-Unis. Ça vient d'une époque où il y avait une extrême concentration des richesses dans le pays, je crois qu'on appelait ça le Gilded Age à l'époque, avec des types comme J.P. Morgan, tous ces super... les Rockefellers, etc. Et qu'en fait, à l'époque, ces gens payaient presque pas d'impôts. Et qu'un des moyens pour continuer à ne pas payer d'impôts face au mécontentement populaire qui montait dans la population aux Etats-Unis parce qu'il y avait des inégalités croissantes, ça a été de dire, ben ok, voilà ce qu'on va faire, c'est qu'on va créer des oeuvres philanthropiques, mais elles seront exemptes d'imposition, mais en échange, on rend cet argent vers la société. Mais le problème de la philanthropie, qui est très bien encore une fois, c'est très bien de faire de la philanthropie, je ne vais pas critiquer ça, mais c'est qu'en fait, on va financer des choses qui ne sont pas nécessairement bonnes pour l'ensemble de la société, et en fait, on est vraiment dépendant du bon vouloir des milliardaires qui décident, « Oui, ça, ça mérite d'être financé, ça, ça ne mérite pas d'être financé, ça, ça mérite d'être financé. » Une fois, j'étais en débat avec une avocate fiscaliste, et on parlait justement de la taxation des plus riches. Et elle nous a dit, oui mais en fait, le problème, c'est que l'argent il est mal dépensé, tu peux le penser, mais après il y a un processus qui s'appelle le vote, on élit des parlementaires, qui après vont former un gouvernement, et après voilà, le gouvernement, ça s'appelle la démocratie représentative, donc voilà, c'est mal géré, tu peux l'estimer, mais...

  • Speaker #0

    Alors vote pour les gens qui gèrent le moins mal selon toi.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, exactement. Et donc ce qu'elle nous disait c'était, je suis sûr que si vous demandez aux millionnaires qu'est-ce qu'il faut faire avec leur argent et que vous le faites ensuite, ils vont accepter de payer plus d'impôts. Mais ça on a déjà essayé, c'était au début du 19e siècle, du 20e siècle, ça s'appelait le suffrage censitaire. Et donc en fait ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'on doit donner... plus de poids aux millionnaires, aux gens qui ont un gros patrimoine. Les gens qui ont un gros patrimoine devraient avoir plus de voix, plus de poids sur la société dans les décisions qu'un gouvernement doit prendre par rapport aux commandes immortelles. C'est un peu l'idée qui revient souvent de dire, mais en fait, si vous leur demandez, ils accepteront de payer plus d'impôts. Et souvent, c'est des gestionnaires de fortune qui nous disent ça.

  • Speaker #0

    Il y a un dernier point que je voudrais aborder avant qu'on clôture cette partie. C'est cette fausse croyance que si les gens sont millionnaires ou milliardaires, donc si les gens sont fortunés, c'est qu'ils ont travaillé dur. Alors qu'on sait actuellement qu'il y a une part significative des personnes fortunées qui sont simplement des héritiers. Donc ils sont nés riches quoi.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est ça. Donc je crois qu'aujourd'hui, la première cause d'enrichissement des milliardaires à travers le monde, c'est l'héritage. 69% de la fortune des milliardaires à travers le monde ne provient pas du mérite. Ça ne veut pas dire que les 30% qui restent, ça provient du mérite. Mais en tout cas, sur trois critères qu'on avait évalués, qui étaient la détention d'entreprises qui sont des monopoles, donc qui vont contre la concurrence, qui sont mauvaises pour le marché et pour les consommateurs. Ça, c'est un élément. Ensuite, un deuxième élément, c'est l'héritage. C'est le premier facteur dans ce qu'on avait évalué par rapport à la richesse qui n'est pas méritée entre les mains des milliardaires. Et un troisième élément sur lequel parfois on oublie, mais il y a les questions de corruption, les questions de clientélisme, le fait qu'il y a beaucoup de milliardaires qui ont fait fortune aussi parce qu'ils ont reçu des contrats de la part des États dans lesquels ils sont. Par exemple Tesla, c'est une des entreprises les plus subsidiées aux États-Unis. C'est incroyable. Déjà c'est super violent de dire que c'est en bossant qu'on devient milliardaire. Parce que ça veut dire que tous les gens qui se lèvent tous les matins, qui ont des travaux qui sont pénibles, qui franchement se cassent le dos au boulot, on pense aux infirmières, aux gens qui ramassent les déchets dans les rues, vraiment des métiers pénibles, aux cheminots, etc. Ça veut dire que ces gens, parce qu'ils ne sont pas milliardaires, ils ne sont pas méritants, qu'ils ne bossent pas assez, c'est un peu l'idée. et ensuite il y a un truc qui est hyper violent aussi c'est de dire que les milliardaires sont Riches parce qu'ils ont juste bossé, mais la richesse des milliardaires est toujours collective. Parce que leurs entreprises ne reposent pas uniquement sur eux, il y a plein de collaborateurs qui sont derrière. Il y a aussi l'État qui est présent, et c'est important de le rappeler. Par exemple, si je pense à Marc Cook, qui est un de nos milliardaires belges, Merci. Marc-Court a fait fortune en Belgique, mais c'est aussi parce qu'en Belgique, il avait la possibilité de lancer son business, parce qu'il y avait une sécurité sociale, parce que ses employés pouvaient revenir rapidement au boulot après être tombés malades. parce qu'il y avait un système d'éducation et des universités qui permettaient aussi d'embaucher des profils qui correspondaient. Et donc tout ça, c'est financé par la collectivité. Et donc la richesse des milliardaires, elle n'est jamais individuelle. On a souvent tendance à dire, ah mais regardez, il est super riche, alors il est super intelligent, il est super travailleur, ah c'est un génie. Certainement que certains de ces milliardaires, ils ont une part de... Peut-être qu'ils sont certainement visionnaires sous certains aspects, mais réduire leur réussite, à juste du génie et quelque chose d'individuel et quelque chose qui est relatif juste au mérite c'est complètement louper tous les processus collectifs sur lesquels la société se repose pour se construire et c'est complètement ignorer les milliers de collaborateurs et les milliers de gens qui en fait créent la plus-value aujourd'hui dans les entreprises

  • Speaker #0

    Ok, donc grâce à Julien, maintenant, on comprend mieux les rouages du système fiscal, de comment on en est arrivé là et de comment on pourrait aussi rétablir une forme de justice fiscale. Maintenant, je vous propose d'en discuter avec une personne directement concernée, une personne fortunée qui va aussi nous parler de justice fiscale. Et dans quelques minutes, arrive chez moi Bruno Firenze. Je vous laisse avec lui.

  • Speaker #2

    Alors bonjour, je m'appelle Bruno Firenze. Si je suis ici, c'est parce que je suis le premier membre belge de Millionaires for Humanity. Et je suis plein d'autres choses, mais là, c'est ce qui est pertinent aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Tout à fait. Est-ce que tu peux du coup nous partager ton parcours ? Comment en fait tu en es venu à devenir membre de Millionaires for Humanity ?

  • Speaker #2

    Donc moi, je fais partie d'une famille belge qui est fortunée. Je fais partie d'une cinquième génération, donc on va dire du capital de ce que j'appelle générationnel. Et qu'est-ce qui m'a mené à devenir l'année passée membre de Millions for Humanity ? Ça a été un parcours assez long, si je retourne en arrière, qui a commencé par une conscience environnementale qui s'est accrue. Et puis il y a eu une période... plus philanthropique où j'ai fait un peu, j'étais actif avec une organisation très chouette, Douche Flux, et là c'est plus de la lutte contre la pauvreté. À côté de ça, il y a toujours eu pas mal de réflexions sur ma position privilégiée, on va dire, et une situation locale et globale d'inégalité qui se détériore, qui se dégrade. Et puis je crois que j'ai eu un moment où je me suis dit, Bon bah écoute-ci. Si. Si je suis vraiment sérieux à propos d'essayer de changer toutes ces choses pour le mieux, alors en fait, la taxation équitable, c'est le sujet sur lequel il faut se concentrer. Après, ça, c'est la longue route. J'ai eu des moments plus concrets aussi. Je lisais pas mal de choses ou j'écoute beaucoup de podcasts par rapport à ce sujet. Je me souviens que je lisais une interview. d'un journaliste flamand qui avait écrit un gros livre, La machine à inégalité. Et je me suis dit, mais lui, il faut absolument que je le rencontre. Et j'ai réussi à le rencontrer, on a parlé pendant une heure. Et dans son livre, il avait écrit, par exemple, une chouette phrase qui disait « L'inégalité est un système, un ensemble de lois et d'accords plus qu'un vice. » Et je trouvais ça assez intéressant. J'ai lu tout son livre. Et en fait, je me disais, mais c'est de nouveau un livre... ou une analyse, comme j'en ai déjà lu beaucoup, c'est une sorte d'analyse macroéconomique qui dit la situation va de mal en pire, il faut absolument y faire quelque chose et il y a une petite catégorie de gens qui en profitent un maximum. Je me suis dit oui, mais ça c'est l'analyse macro, moi ce qui m'adressait c'était les dynamiques au niveau micro qui font qu'on a l'impression que c'est inarrêtable. et puis il y a eu un moment Vraiment très concret, dont je parle en fait, que j'utilise souvent comme exemple, mais c'est un bon exemple, donc je vais le réutiliser. Ici, à Bruxelles, incertainement, on avait décidé de ne plus avoir de voiture. Et quand on décide de laisser tomber sa voiture, on peut rendre sa plaque d'immatriculation et on a droit à une prime environnementale, une prime de mobilité. Et il y a une prime minimum et une prime maximum. Et en tant que membre des 1% en Belgique, j'ai eu droit à la prime maximum. Et là, je me suis dit, mais c'est quoi cette histoire ? Donc en fait, il y a toute une partie de ma réalité financière qui n'est simplement pas prise en compte. C'est comme si elle n'existait pas. Et à ce moment-là, je me suis dit, bon, écoute, maintenant, tu arrêtes de te poser toutes ces questions, tu t'assieds, tu te confrontes à cette histoire, t'essayes de répondre à toutes ces questions aussi. Et j'ai commencé une sorte de gros mélange d'analyse personnelle et sociétale, où je me suis utilisé moi-même comme symptôme de société. Et où...

  • Speaker #0

    Oui, pour essayer de répondre aux questions. Quelles sont les micro-dynamiques qui soutiennent cette inégalité croissante ? Et quel est mon rôle dans toute cette histoire, que je le veuille ou non, qu'il me plaise ou non ? Et ça, in fine, ça a mené à devenir membre de Millionaires for Humanity et à plaider pour une taxation plus équitable. Donc ça veut dire un meilleur équilibre, en fait. Plus taxer le capital et moins taxer le travail. Je dis quand même les deux toujours ensemble.

  • Speaker #1

    Et qu'est-ce que ça veut dire en fait être membre de Millionaires for Humanity ? Tu t'inscris sur internet et puis qu'est-ce qui se passe en fait ? Tu rencontres une communauté, on te donne des talking points, on te dit de rencontrer les ONG locales. Qu'est-ce qui se passe en fait ? D'un point de vue concret, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Il se passe très peu. Millionaires for Humanity, ça a été créé par Jafar Chalchi au Danemark, qui lui a fait fortune lui-même. Son histoire est géniale d'ailleurs. Il est arrivé au Danemark en tant que réfugié iranien à 7 ans. Il a passé un an dans un orphelinat. Le temps que ses parents trouvent une solution, sa mère a été travailler dans un hôtel pour changer des lits. Lui, il est rentré dans le système scolaire et puis l'université danoise et il a fait fortune dans l'immobilier. Et lui, il se dit, il voit très concrètement comment est-ce possible que moi, en fait, in fine, je paye maintenant moins d'impôts que ma mère qui changeait des lits dans un hôtel. C'est complètement dingue. Et donc il a créé cette communauté, mais c'est vraiment une plateforme de communication. Donc dans un monde idéal, il y a quelques membres de Millenials for Humanity dans chaque pays qui vont faire passer le même message partout. Il faut absolument qu'on travaille à une taxation plus équitable. Et en pratique, il y a depuis peu un coup de fil bimensuel avec les membres qui veulent. pour un peu parler et comparer. Mais c'est vraiment... Moi, j'avais besoin d'une plateforme utilisable. Et il y en a plusieurs. Il y a Millionaires for Humanity, il y a Patriotic Millionaires aux Etats-Unis et en Angleterre. Et puis, il y a dans le monde germanophone, Tax Me Now, lié à Marlene Engelhorn.

  • Speaker #1

    Et du coup, tu rejoins ce collectif, cette plateforme, mais tu es le seul Belge. Donc, c'est quoi ton plan d'attaque ? Tu te dis, en Belgique, je suis quand même un peu seul. Comment je vais faire rayonner mon histoire et le fait que je défende une justice fiscale et donc une taxation plus équitable ? C'est quoi ton process ensuite ?

  • Speaker #0

    Moi, je sors un peu du monde de la com, ce qui m'a bien aidé. Mon constat surtout, c'était que je trouve qu'il y a une voix dans ce débat qui manque. J'entendais personne de mon angle très particulier dire ce que je raconte. Et donc je me suis dit, je trouve que c'est un gros manque. Et donc j'ai simplement fait une sorte de petite campagne com. Et je me suis mis, ok, je prépare mes messages et je vais parler d'abord à toutes les médias écrites. Et puis à tous ceux qui veulent l'entendre pour essayer de dire, ben voilà, il y a une autre voie. dans le débat actuel.

  • Speaker #1

    Parce que du coup, tu dis, ta voix, elle n'existait pas, en tout cas avant que tu prennes position et que tu communiques à ce sujet. Parce qu'en fait, quand on entend les Belges fortunés dans les médias, ce n'est absolument pas pour raconter la même chose que toi.

  • Speaker #0

    Oui, les Belges fortunés qu'on entend dans les médias à propos de ça, c'est un peu toujours le même profil. C'est les capitaines d'industrie qui viennent très fort du monde. de l'entrepreneuriat, qui est, attention, hyper important, mais ils vont voir le monde d'une façon assez particulière, ils vont voir le monde en fonction de retours sur investissement. Quand on investit dans quelque chose, ce n'est pas anormal, on pense en termes de retours sur investissement. Mais pas tout fonctionne comme ça. Donc ça veut dire qu'en tant que capitaine d'industrie... Il ne va pas investir dans l'école, la justice, la police, les bibliothèques, parce que ce n'est pas dans cette logique-là. Et si un jour c'est le cas, c'est une très mauvaise nouvelle, parce que dans les pays où le privé commence à investir là-dedans, l'inégalité augmente encore plus. Donc c'est un angle d'approche qui est très spécifique. Et moi, je trouvais qu'il y avait un angle d'approche qui voit les choses un peu plus large. qui était nécessaire aussi.

  • Speaker #1

    Et tu parles justement d'une prise de conscience écologique, de base en tout cas, et puis qui a rayonné, qui a grandi, et surtout du fait qu'on vit dans un monde aux ressources finies. Et tu me parlais juste... avant qu'on branche les micros, du fait que tu réalisais parfois qu'on ne savait pas objectiver. C'est quoi beaucoup d'argent ? Par contre, on arrive très bien à objectiver. C'est quoi peu d'argent ?

  • Speaker #0

    En fait, ça, c'est vraiment la fin de la longue analyse. Ma longue analyse a été une sorte de grosse question-réponse avec moi-même, en me disant, voilà, on me dit souvent des choses pareilles. Est-ce que c'est vrai ? Est-ce que ce n'est pas vrai ? « Et qu'est-ce que j'en fais ? Et pourquoi est-ce qu'on me dit ça ? » Taxer la fortune, ce serait malhonnête, parce que le résultat d'une fortune, c'est le résultat d'un travail, et donc on ne va pas taxer quelqu'un une seconde fois. C'était par exemple ma première question, et là je me suis dit, en 2022, il y avait 483 milliards d'euros qui étaient gérés par des banques privées en Belgique. La première question que je me suis posée, c'est combien de ces 483 milliards ? correspondent avec l'histoire que je viens de raconter. À partir de certains montants, à partir de... Surtout quand c'est de génération en génération, cette histoire n'a plus vraiment la route. On sort de cette logique. Et alors on me demande, oui, mais à partir de quels montants ? Je ne sais pas à partir de quels montants. Ce qu'on constate par contre, c'est qu'on arrive très bien à objectiver des salaires minimums, des montants minimums. Mais alors commencer à réfléchir à... Des barèmes progressifs par rapport à la fortune, apparemment...

  • Speaker #1

    On n'y arrive pas.

  • Speaker #0

    C'est pas possible. En tout cas, à partir d'un certain niveau, ou à partir d'une certaine fortune, que ce soit 10 millions, 100 millions, hop, hop, hop, voilà, tout ça c'est la même chose. Ce que je trouve assez particulier. Qu'est-ce qu'on me dit aussi à ce moment-là, c'est « Ah oui, mais attention, parce qu'on n'est jamais sûr. Demain tout... » Demain, tout peut être parti. Non, pas demain, pas tout peut être parti. À partir d'un certain... De nouveau, et je dis beaucoup ça, à partir de certains montants, à partir de... On commence à savoir diversifier un maximum, donc on ne met pas tous ses oeufs dans le même panier et on sait commencer à miser sur tous les chevaux en même temps. Donc, en fait, on devient le casino. On ne sait plus perdre. Qu'est-ce qu'on me dit alors très souvent à ce moment-là ? C'est « Oui, mais en Belgique, ça va » . Oui, non. Et ça, il y a un très bon rapport qui est sorti l'année passée d'André Decoastre, le paradoxe des inégalités en Belgique. En Belgique, ça va si on ne tient que compte du salaire. Si on tient compte des inégalités du capital, ça va beaucoup, beaucoup moins. Et en plus, on a un système, et ça, ce n'est pas juste en Belgique, on a un système où à partir de vraiment des 1%, la taxation devient régressive, en fait. parce qu'il y a beaucoup plus de rentrées qui viennent du capital ou du patrimoine immobilier, par exemple. Du coup, ça veut dire que, et ça c'était mon premier constat, je disais mais en fait on a un système de taxation qui alimente les inégalités. C'est complètement dingue. Après ça c'est un constat qui n'est pas très compliqué. Je ne suis pas le seul à faire ça. Il y a beaucoup...

  • Speaker #1

    Oui, et tous les académiques, les fiscalistes,

  • Speaker #0

    les économistes. Donc la question que moi je me suis posée, c'est comment ça se fait que ça ne change pas ? Pourquoi est-ce que ce n'est pas plus vraiment un sujet majeur pour plein de partis politiques ? Et là, je suis vite venu sur un concept de déni, en fait. Comme mon exemple de matriculation, on nie une certaine réalité, et à plusieurs niveaux. Alors d'abord, pour moi, il y a un déni pour la très grande majorité des gens. En fait, ils ne savent pas s'imaginer ce que c'est une très très grande fortune. Non, moi, je ne sais pas, par exemple. Et donc, un ami m'a une fois dit, et je trouve ça pas mal, il disait, oui, mais je suis d'accord avec toi et tout, mais ils ne peuvent pas toucher à la taxation sur l'héritage. Je me dis « Ah, c'est moi-même, pourquoi tu dis ça ? » Parce que moi, j'ai travaillé dur pour m'acheter une maison et je veux savoir la donner à mes enfants sans que ce soit taxé encore une fois. Et là, je me dis « Mais oui, je vois très bien la logique. Mais si quelqu'un a 27 maisons, il faut peut-être oser commencer à réfléchir différemment par rapport à ça. Mais déjà, il faut accepter que ça existe. » Et puis, il y a les 1%, les gens comme moi, qui sont censés savoir voir ce que je vois, mais il faut vouloir le voir aussi. Et souvent, on est dans un déni pour de très bonnes raisons. On veut correctement éduquer ses enfants, avec les bonnes valeurs. Socialement, on n'aime pas sortir du lot. On apprend certaines choses assez tard, parce qu'on est éduqué d'une certaine bonne façon. des choses en fait des décisions qui Au niveau personnel et social ? ont tout à fait raison d'être, mais qui ont à un certain moment un impact sociétal, parce qu'on reste aussi dans ce déni. Oui, mais ce n'est pas très important, ce n'est pas de l'argent mérité, ce n'est pas de l'argent gagné, donc on met de côté et on fait un peu comme si ça n'existait pas. Et puis il y a le troisième niveau, il y a le niveau politique, où, et ça c'est plutôt une bonne chose, la plupart des politiques ne sortent pas du monde des très fortunés, donc ont du mal à s'imaginer mais par contre ils ont plus accès à ce genre d'informations. Et là aussi, ça n'arrange personne dans le narratif. Toutes les politiques de n'importe quel bord accentuent la valeur du travail et la valeur du mérite. Mais quand on est un démonteur pareil, on sort de cette logique. Et donc, c'est beaucoup plus pratique par rapport au narratif de l'ignorer. Donc, déni sur déni sur déni, ça fait, moi, je... Je trouve une certaine malhonnêteté intellectuelle, en fait. Je dis souvent qu'en tant que très fortuné, on tient très fort compte de mes intérêts, mais très fort peu compte de ma fortune.

  • Speaker #1

    Oui, mais c'est hyper intéressant. Je pense que c'est la première fois que j'entends un discours pareil d'une personne fortunée. On entend, comme tu dis, toute la théorie, tous les fiscalistes, les économistes qui parlent de ce genre de sujet. On entend Oxfam, on va peut-être en parler un peu. Tu as fait une conférence avec Oxfam récemment au Parlement européen pour parler notamment du rapport d'Oxfam sur les inégalités. On l'entend du monde associatif, du monde académique, un petit peu du monde politique, mais très peu, comme tu le dis, et pas suffisamment, parce qu'il y a ce malaise, il y a ce déni. Mais je trouve ça hyper rafraîchissant et hyper utile d'avoir des gens comme toi qui prennent la parole sur ce genre de sujet. Et de dire exactement la phrase que tu viens de dire, c'est « on prend en compte mes intérêts, mais pas ma fortune » . Et je trouve que cette phrase résume parfaitement la situation. C'est un peu lunaire. Mais du coup, pour revenir sur la collaboration avec les académiques et notamment Oxfam. Donc récemment, tu as été au Parlement européen avec un expert de chez Oxfam pour discuter de ces sujets. Et est-ce que tu peux un peu nous en parler ?

  • Speaker #0

    Alors Oxfam m'avait invité à parler dans un panel au Parlement européen pour parler de ça. Eux, ils ont sorti un rapport pour expliquer que la situation s'aggrave et qu'est-ce qu'on pourrait peut-être y faire. Là, j'ai constaté aussi, après notre débat, il y avait un débat entre les politiques. En fait, tout le monde raconte un peu sa position sans vraiment en parler. Qu'est-ce que j'ai sorti de cette expérience au Parlement européen ? mais... il y a quand même un gros manque de vrai débat. Donc je pense, d'abord, ça, ça revient un peu... En fait, je vais un peu répondre à la question, qu'est-ce que je pense qui doit se passer pour qu'on essaye de trouver des solutions ? Ça recoupe un peu sur ce que je disais de Denis. Je pense que cette énorme inégalité et le fait qu'il y ait une telle masse financière qui va que vers tellement peu de personnes... peace On parle beaucoup de proportion aussi, c'est complètement disproportionné. Que ce soit au niveau sociétal ou que ce soit au niveau personnel, une masse financière parée, en fait, c'est un dilemme moral. On se dit mais ce n'est pas possible. Et qu'est-ce qu'on fait en général avec les dilemmes moraux ? On essaie de les éviter le plus possible. Ou en tout cas, on essaie aussi de changer de sujet. Donc qu'est-ce qu'on va énormément dire ? on va venir... Quand je parle de ça, oui, mais l'État gaspille notre argent et est un très mauvais gestionnaire. Ok, l'État... J'ai un mine Bruxelles, donc je vois très bien de quoi on parle. Mais même si on vivait dans un État qui travaillerait à la perfection et où tout fonctionne parfaitement, on va devoir encore toujours s'atteler à cette question. Qu'est-ce qu'une taxation éguitable ? Qu'est-ce qu'on me dit aussi ? Mais il faut plus encourager l'entrepreneuriat. D'accord.

  • Speaker #1

    Comme si c'était opposé en fait.

  • Speaker #0

    Comme si c'était opposé. Moi je vois pas très bien en quoi la situation actuelle encourage l'entrepreneuriat. On est loin du compte en fait. Mais de nouveau, c'est un débat différent. Oui mais si on taxe plus les riches alors il va y avoir moins de philanthropie. C'est la philanthropie. va toujours être nécessaire, mais c'est de nouveau un débat différent. Donc on utilise tous ces sujets qui ont tout à fait lieu d'être et dont il faut parler, mais en fait comme excuse pour ne surtout pas commencer à parler de ce problème d'inégalité croissante et de taxation foireuse, on va dire. Donc il faut avoir, en fait il faut oser cette confrontation. On doit oser se confronter par rapport à cette situation. On doit oser regarder la situation et se dire mais... Ok, ça en fait c'est pas possible. Il y a quelque chose de complètement... Et oser regarder les chiffres. Et à côté de ça, on doit avoir, moi je pense aussi, le courage de la discussion, et c'est là que je recoupe un peu avec Oxfam. Tu vois, au début je parlais du livre, que j'étais en train de lire un livre, que j'ai rencontré un journaliste, et lui, ce qui était intéressant, donc on a parlé pendant une heure, et j'ai réalisé, je ne lui ai jamais posé la question, je devrais, Moi, je pense que c'est la première fois qu'il parlait à 1%. Moi aussi. Oui, oui. Non, mais c'est la première fois qu'il parlait. Mais lui, il a écrit un livre de 600 pages.

  • Speaker #1

    Sur ces gens-là, c'est vrai.

  • Speaker #0

    Avec des gens quand même qui ont... Et je me disais, mais c'est assez bizarre. Et puis, je lis son livre. Et il y a des magnifiques phrases. Et j'en ai noté deux. Ce genre de personnes qui ne peuvent se passer de vanité et de paillettes avec Louis XIV et Marie-Antoinette à Versailles, ce n'était pas différent. Ok, et mon préféré, c'est Nanty capable de se gâcher le sommeil en cherchant les moyens de se faire encore plus d'argent avec leur argent. Quand je lis ça, d'abord je ne me reconnais pas spécialement, je me dis ok, c'est spécial, mais surtout, ça rend les choses très faciles pour moi de me dire, moi je n'ai rien à voir avec ça. Et donc, l'argent, la fortune, à n'importe quel niveau, c'est quelque chose de très émotionnel. Et donc quand il y a, l'autre fois c'était dans une manif en France, quelqu'un qui avait un grand panneau avec « Il faut reprendre l'argent que les riches nous ont volé » . Alors même si je vois très bien d'où vient cette phrase, si on me traite de voleur, je vais par définition réagir de façon assez défensive. Oui,

  • Speaker #1

    même si tu comprends le fond.

  • Speaker #0

    Je comprends très bien le fond. Et c'est entre autres pour ça qu'il n'y a pas de dialogue. On doit réussir. avoir une discussion qui va au-delà des clichés. La fois passée, j'ai réagi par rapport à une proposition politique. Taxer les riches, c'est taxer la richesse. Taxer la richesse excessive. Et je sais bien que...

  • Speaker #1

    C'est ça qu'on veut dire par taxer les riches. Oui,

  • Speaker #0

    je sais bien que c'est ça qu'on veut dire. Et je sais bien que rétablir l'équilibre en taxant plus la richesse excessive, ça marche moins bien en termes de com. C'est moins vendeur. Mais c'est vers là qu'on doit aller pour avoir une discussion correcte. C'est... Je parlais à Oxfam par rapport à ça, et ça c'était très chouette comme discussion, parce qu'il disait, c'est très fort dans le narratif, donc pour moi c'est les deux choses qui doivent se passer, on doit accepter de plus parler, mais on doit réussir à parler différemment. Mais Oxfam, dans un de leurs rapports aussi, ça c'est pas le rapport Oxfam, dans plein de rapports, la plus grosse partie des fortunes maintenant, c'est de la fortune héritée. Donc les très grosses fortunes maintenant, en majorité, c'est des fortunes héritées. Si c'est hérité, ben voilà, il n'y a pas de mérite, mais ce n'est pas ma faute non plus. Oui, t'es né là-dedans quoi. Oui, t'es né là-dedans. Donc on peut m'accuser de ne pas prendre mes ressources habitées, on peut m'accuser de...

  • Speaker #1

    De malhonnêteté intellectuelle, comme tu disais.

  • Speaker #0

    De malhonnêteté intellectuelle, mais c'est encore différent de dire c'est ta faute. Votre faute. Je dois me confronter à ça comme tout le monde. Et voilà, s'il y a ce discours-là, ça ne me la rend pas plus facile pour sortir du bois, on va dire. J'avais trouvé une analogie qui était pas mal, je pensais, enfin je pense. On est un des dix seuls pays au monde à avoir réussi à avoir une conversation sur l'euthanasie. C'est pénible, hein. C'est parler de la mort. Tout le monde doit passer certaines lignes et... Il y a beaucoup d'analogie. C'est une discussion qui ne termine jamais. On doit reparler de ça à tous les instants pour de nouveau trouver un juste équilibre. Il y a dix pays qui ont réussi à avoir le courage d'avoir cette discussion. Ce n'est pas beaucoup. Et la Belgique en fait partie. C'est exactement la même chose. On doit réussir à trouver une façon de, et je ne sais pas comment encore, mais on doit trouver une façon d'avoir une discussion correcte et adulte.

  • Speaker #1

    Et à un niveau aussi, tu le portais au Parlement européen. Et c'est une conversation qui doit avoir lieu de manière internationale aussi, ça doit dépasser les frontières et le porter je pense au niveau européen est déjà un premier pas et je pense que c'est le but aussi de Millionaires for Humanity d'avoir cette conversation à l'international et de pouvoir justement s'allier dans ce message là, mais en effet c'est quelque chose qui vit très peu de manière générale en Belgique et partout ailleurs.

  • Speaker #0

    qui vit très peu, ce que je trouve assez étonnant parce que c'est quand même la source de beaucoup de... de problèmes, ou la source de beaucoup de choses, et donc la solution aussi de beaucoup de choses, donc je trouve ça très étonnant, et ça c'est une des choses qui m'a étonné depuis que j'ai commencé à faire ça jusqu'à quel point les gens vont pour ne surtout pas en parler moi je pensais qu'en fait que ça allait être, ah tiens une nouvelle voix, on va quand même écouter ah non, il faut pousser, pousser, pousser avant de savoir aller donner ce nouvel angle parce qu'on essaye vraiment d'éviter ça Euh... Un maximum. Mais je reviens sur ce que tu disais tout à l'heure sur les ressources infinies et le beaucoup d'argent. Je disais au tout début, je ne sais pas si ça a commencé comme ça, mais je sais qu'au début, il y a une sorte de conscience environnementale. Et il n'y a pas longtemps, j'ai vraiment eu un moment où je me suis dit, ah, mais voilà, la boucle est bouclée quelque part. Très souvent, on me dit, oui, mais c'est quoi beaucoup d'argent finalement ? Tu vois, pour toi, c'est autant, pour quelqu'un d'autre, c'est autant. autant pour Elon Musk, ce sera autant. Et certainement, j'ai un peu fait le lien entre tous les gens qui me disaient ça et je me disais, Si on voit le monde comme un monde aux ressources infinies, comme beaucoup de gens font encore, 1 million, 3 milliards ou 300 trilliards, ça ne change rien. De toute façon, il n'y a pas de limite. Le moment où on change cette façon de penser là, où on se dit parce que tout cet argent est lié à quelque chose, est lié à une machine qui doit tourner, est lié à plein de choses, au moment où on se dit, ah mais non, on n'est pas. dans un monde aux ressources infinies. Mais là, tout change. Et là, tout change par rapport à ce sujet-ci aussi.

  • Speaker #1

    Mais je pense que c'est parfait pour clôturer cet épisode. Merci beaucoup Bruno d'être venu parler de tout ça à mon micro. Et à bientôt !

  • Speaker #0

    Merci beaucoup, à bientôt !

  • Speaker #1

    J'espère que cet épisode vous a plu. Si c'est le cas, n'oubliez pas de vous abonner au podcast. Si vous voulez réagir à nos propos, la section commentaires est faite pour cela. Ou alors, vous pouvez me retrouver sur Instagram sous le pseudo at goodmorninglo. On se retrouve dans deux semaines pour un prochain épisode d'Epicéa. Et d'ici là, prenez soin de vous.

Description

Taxer les riches? Parlons justice fiscale!

J'ai la chance de recevoir 2 pointures du sujet:

  • Julien Desiderio - expert en fiscalité chez Oxfam

  • Bruno Fierens - premier membre belge de 'millionaires for humanity'

50min pour comprendre pourquoi rétablir la balance fiscale est nécessaire et comment on doit avoir cette conversation.
Bonne écoute!



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, ici Laurie, et vous écoutez Epicea,

  • Speaker #1

    un podcast dédié aux témoignages inspirants de personnes engagées.

  • Speaker #0

    Je me fais un café et je vous explique. Il y a un sujet dont j'aimerais vous parler depuis un moment, mais c'est pas si facile de le prendre par le bon bout pour qu'il fasse sens pour vous et surtout que j'arrive à bien raconter l'histoire. C'est la justice fiscale. Taxer les riches. Pourquoi ? Comment ? Comment ça se fait que la justice fiscale, elle est pas là pour le moment, que c'est pas équilibré ? Et du coup, aujourd'hui, là, va arriver dans quelques minutes chez moi Julien Desiderieux de chez Oxfam, expert en justice fiscale, expert en fiscalité. Et du coup, il va nous raconter plein de trucs. Je vous laisse avec lui.

  • Speaker #1

    Moi c'est Julien Desiderio, je suis chargé de plaidoyer pour l'ONG Oxfam sur les questions de fiscalité et d'inégalité. Oxfam c'est une ONG internationale dont l'objectif c'est de changer les systèmes pour combattre les inégalités. En fait on reconnaît que les inégalités elles sont au cœur des systèmes, elles sont structurelles et que donc c'est par... la politique et par des mesures, notamment en matière de justice fiscale, qu'on va réduire les inégalités dans le monde. Et donc pour l'instant, on a une campagne qui s'appelle Make Rich Polluters Pay, donc faire payer les riches pollueurs, qui est en fait une campagne qui a démarré comme une campagne Tax the Rich. Pourquoi Tax the Rich ? Parce qu'aujourd'hui, on a de plus en plus de preuves, d'évidence, de recherches universitaires qui montrent que les... plus riches, les milliardaires dans le monde ne payent pas leur juste part d'impôt. Donc l'impôt, nous on dit tout souvent que c'est le prix à payer pour une société civilisée, donc ça veut dire une société où on a des services publics, une société où on a des soins de santé qui sont accessibles, où on a une justice qui est efficace, et donc tout le monde doit contribuer d'une manière ou d'une autre au financement de ses biens collectifs, mais ça doit se faire de manière proportionnelle, et donc tout le monde ne doit pas participaient de la même manière. C'est cette fameuse idée des épaules les plus larges qui doivent contribuer une plus large proportion. Aujourd'hui, on voit que ce n'est pas le cas. Par exemple, en Belgique, les 1% les plus riches payent deux fois moins d'impôts sur leurs revenus que la classe moyenne. C'est injuste, ce n'est pas normal. Ça crée des problèmes en matière d'assentiment à l'impôt. Mais ça crée aussi des problèmes en intérieur d'accumulation du patrimoine entre les mains des plus riches. Et l'accumulation du patrimoine entre les mains des plus riches, ça fait aussi une accumulation de pouvoir. Et après, on arrive à des situations extrêmes, comme on le voit aux Etats-Unis, où pendant tout un temps, on a eu un président milliardaire avec son bras droit qui était l'homme le plus riche du monde et qui décidait de couper dans tous les budgets de la coopération et de développement à travers le monde. Et donc qui s'attaquait aux personnes les plus précarisées de la planète. Et donc ça, c'est un système extrême contre lequel on se bat aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Comment ça se fait que les riches, les milliardaires et j'imagine aussi certains millionnaires ne payent pas d'impôts ? Comment ça se fait ? Parce que nous, on est taxé sur le revenu. On ne le voit même pas quand on est salarié. Je sais, c'est une question un peu naïve, mais comment ça se fait du coup ?

  • Speaker #1

    Ce n'est pas une question naïve parce que c'est quelque chose qui revient souvent. Les gens ont du mal. à comprendre ces mécanismes-là. Pourquoi ? Parce que les gens, à la fin du mois, ils reçoivent leur paye, ils reçoivent leur chèque, et bien souvent, c'est le seul revenu qu'ils ont. Parce que la plupart des gens ne saisissent pas, et c'est tout à fait normal parce que c'est pas accessible à tout le monde, c'est que pour la catégorie des millionnaires et des milliardaires, il y a d'autres formes de revenus qui entrent en compte, qui sont moins... liquide, ça veut dire qu'on peut moins... Ça veut dire que, simplement, on ne va pas aller acheter son pain avec, mais par exemple, si je prends un cas extrême, c'est souvent très facile de prendre un extrême pour présenter cette problématique. Si tu prends Elon Musk, Elon Musk, il a des entreprises, Tesla... X, etc. La fortune d'Elon Musk, elle ne réside pas sur son compte en banque, elle réside dans les actions au sein des entreprises qu'il possède. Et même s'il ne peut pas acheter du pain, de l'eau, du lait avec ses actions Tesla, il peut quand même acheter Twitter, parce que c'est grâce à ses actions Tesla qu'il a mis en collatéral pour faire des prêts auprès des banques et ne pas payer d'impôts, parce qu'on ne paye pas d'impôts sur des prêts. qu'on fait auprès d'une banque, qu'il a pu racheter Twitter. Il y a aussi un autre système qui est un peu plus généralisé, qui est celui des holdings. Et donc une holding, c'est quoi ? Une holding, c'est une entreprise qui va faire écran à l'impôt que devraient payer normalement les milliardaires. Et donc par exemple, ils ont des actions dans des sociétés. Ces sociétés génèrent une activité, vont générer un bénéfice et puis vont verser des dividendes. Si ces dividendes sont versés dans la holding du millionnaire ou du milliardaire, elles seront en principe exemptées d'impôts. Mais ça ne veut pas dire qu'après, une fois que cet argent est dans la holding, les milliardaires ne peuvent pas s'en servir. Ils peuvent s'en servir pour racheter d'autres entreprises, ils peuvent s'en servir pour racheter des médias, pour racheter de l'influence, etc. Ou même pour acheter un yacht aux îles Caïmans ou aux Bahamas. Ce qui est important de comprendre, c'est que l'argent qui est arrivé dans cet holding n'a pas été taxé. Et qu'au final, la personne qui va être la bénéficiaire effective du yacht, du jet, etc., ce n'est pas l'entreprise, c'est la personne qui possède cette entreprise.

  • Speaker #0

    Complètement, c'est la famille qui détient l'holding, qui va pouvoir jouir de l'argent de l'holding, mais sans être taxé dessus. Très peu, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, c'est un peu le principe. Je caricature, le système est très complexe, mais en gros, ça, c'est le principe.

  • Speaker #0

    Ok, très bien. Et donc, du coup, par rapport à moi qui suis dans la classe moyenne, qui paye, je dirais, un gros 40% d'impôts, un millionnaire, un milliardaire en Belgique, il paye combien de pourcents d'impôts ? Enfin, d'impôts, oui, il contribue à hauteur de combien de pourcents ?

  • Speaker #1

    En fait, on a estimé... Il y a une étude en Belgique qui est tout à fait récente et super révolutionnaire, je trouve, parce qu'on manquait vraiment de ces infos-là en Belgique, que les 1% les plus riches payent 23% de leurs revenus en impôts, alors que la classe moyenne, la moyenne des Belges, pas la classe moyenne, mais la moyenne des Belges, paie 43% de leurs revenus en impôts. Mais là, c'est tout impôt confondu. Donc c'est l'impôt sur le revenu, c'est l'impôt des sociétés, c'est... La TVA, c'est important parce que souvent on pense que les gens qui sont les plus précaires, les plus pauvres, les gens qui ont peu de revenus ne payent pas d'impôts, mais en fait tout le monde paye des impôts, même des SDF payent des impôts parce que dès que tu achètes un bien dans un supermarché, tu payes de la TVA là-dessus. et donc ça c'est allez tu vas payer 6% ou 21% de TVA sur certains produits les gens payent de l'impôt là-dessus et ça pèse beaucoup plus dans le portefeuille des personnes qui ont moins de revenus que dans le portefeuille des millionnaires et des milliardaires. Et donc aujourd'hui, la classe des 1% les plus riches en Belgique, c'est celle qui, par rapport à toutes les autres classes de revenus, paye le moins d'impôts.

  • Speaker #0

    Et quand on vient avec ce discours de justice fiscale près des décideurs, qu'est-ce qui se passe en fait ? Parce que ça fait sens ce que tu me racontes là, c'est des chiffres, c'est des études. Comment ça se fait qu'on n'a pas de mécanisme mis en place pour rééquilibrer la contribution de chacun ?

  • Speaker #1

    Il y a des décideurs qui sont favorables à changer le système. Aujourd'hui, ils ne sont pas forcément tous au gouvernement. En tout cas, s'il y en a qui sont au gouvernement, ils sont extrêmement minoritaires. Après, il y a toujours cette histoire de la théorie du ruissellement qui est encore très vivace. Donc la théorie du ruissellement, c'est quoi ? C'est une théorie qui nous vient des années 80, des Ronald Reagan et des Thatcher. Et d'ailleurs, Bardo Hever aime bien. Citer Margaret Thatcher et Georges Louis Boucher aussi. Cette théorie, elle dit qu'en fait, baisser les impôts sur les plus riches, ça va rejaillir en croissance et en emploi sur le reste de la population. Mais c'est ce que Macron a fait pendant des années en France. Et en fait, tout ce qu'il a réussi à faire, c'est creuser le déficit et les inégalités du pays. Et donc ça ne marche pas. Donc même le FMI a dit, même des études ont été menées par l'université d'Oxford. et évaluer sur le long terme ces politiques de ruissellement dans les pays de l'OCDE. Et les conclusions, c'est que ça a augmenté les inégalités et ça n'a pas créé la croissance et les emplois qui étaient souhaités.

  • Speaker #0

    Ok, donc c'est vraiment un leurre, c'est un mythe en fait. C'est un mythe, oui. Ça a déjà fonctionné ? C'est pour ça qu'on pense ça ?

  • Speaker #1

    Non, ça n'a jamais fonctionné. Donc c'est ça en fait, on a le recul aujourd'hui pour montrer que ça ne fonctionne pas, qu'aujourd'hui on est dans un moment où, coupé dans les services sociaux, Ça va ralentir l'économie. En plus, on a un gouvernement qui décide, surtout en Wallonie, une des premières mesures, c'est d'octroyer des avantages fiscaux sur les successions ou sur les droits d'enregistrement, mais des avantages fiscaux qui, on le voit, bénéficient majoritairement aux classes les plus privilégiées de la population. Et donc ça, c'est des mesures qui creusent le déficit. Et après, on vient nous dire que voilà le déficit des rails, qu'il faut couper dans la santé, couper dans les services sociaux, augmenter le minerval des universités. Mais en fait, tout ça, c'est des choix politiques. Et souvent, on dit, bah oui, il y a une rage taxatoire en Belgique. Les gens payent beaucoup trop d'impôts. Mais en fait, oui, c'est vrai, quelque part, quand on est dans la classe moyenne en Belgique, on paie vite beaucoup d'impôts. Mais c'est pas le cas de tout le monde. et en fait ce dont on a besoin aujourd'hui C'est un rééquilibrage de l'impôt, surtout entre le travail et le capital. Les gens qui bossent payent aujourd'hui beaucoup plus d'impôts que des gens qui tirent des revenus uniquement de leur capital. Un exemple très simple, on avait calculé chez Oxfam quelqu'un qui gagne 40 000 euros brut par an uniquement de par son travail. paye en moyenne 30% d'impôts sur ce revenu. Donc des 40 000 euros, on va retirer 30% pour financer les services publics, les services à la collectivité, etc. Jusqu'à ce jour, jusqu'à aujourd'hui, quelqu'un qui fait 40 000 euros de revenus en achetant et en revendant des actions, en faisant une plus-value sur ses actions, va payer 0 euros d'impôts. Donc pour le même type de revenus, dépendant d'où ça vient, il y en a un qui paye 30% d'impôts, et l'autre qui paie 0% d'impôts. Mais celui qui paie beaucoup d'impôts, c'est celui qui bosse, c'est celui qui se lève tous les matins. Alors que pour faire des plus-values, il faut juste avoir un capital. On peut avoir un capital de départ, on peut hériter d'un capital. On ne doit pas forcément avoir travaillé pour après investir en bourse et générer des plus-values. Chaque année, on publie un rapport mondial sur les inégalités dans le monde, en janvier. Et on collabore notamment avec les millionnaires for humanity et les patriotiques millionnaires. qui sont en fait un groupement de millionnaires et de multimillionnaires qui demandent à payer plus d'impôts. C'est des gens qui disent, ben voilà, moi je vis très bien avec ce que j'ai, je pense qu'aujourd'hui on a un besoin d'investissement public, on a besoin de rééquilibrer le système fiscaux, on a besoin de plus de solidarité pour financer nos sociétés et les collectivités.

  • Speaker #0

    Et la décarbonation, notamment.

  • Speaker #1

    Et la décarbonation, oui. C'est aussi pour ça que notre campagne s'appelle Make Rich, Pollute Your Spee, parce qu'on demande de taxer les plus riches de façon équitable pour financer notamment l'investissement public dans la transition climatique.

  • Speaker #0

    Oui, et comme tu dis, c'est de façon équitable. Il n'est pas question, encore une fois, de...

  • Speaker #1

    De spoliation, pas du tout. Oui,

  • Speaker #0

    c'est ça.

  • Speaker #1

    Par exemple, il y a la fameuse taxe Zucman. Donc ça, c'est super populaire pour l'instant. vraiment mis la lumière sur la question de justice fiscale. Et ce que Zucman propose, c'est un taux minimum de 2% sur la fortune des milliardaires. C'est-à-dire qu'on taxerait les milliardaires à 2% minimum sur leur fortune. Donc minimum, ça veut dire déduire... des impôts qu'il paye déjà. Donc s'il paye déjà 2%, il ne paierait pas un impôt supplémentaire.

  • Speaker #0

    C'est s'assurer qu'il paye déjà 2%.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, un minimum de 2%. Mais ce que Zucman montre, c'est que même en payant ces 2%, la fortune des milliardaires continuerait à augmenter. Donc voilà, nous chez Oxfam, ce qu'on voudrait, c'est un peu amorcer une déconcentration de ces fortunes-là, des super grandes fortunes qui aujourd'hui... ont un pouvoir sur nos démocraties qui est complètement démesuré, qui est en dehors de tout cadre démocratique. Donc on ne vote pas pour des milliardaires mais ils ont parfois plus d'influence sur nos vies que les choix politiques qu'on fait dans les urnes. Mais donc voilà, aujourd'hui on est dans ce débat de dire mais en fait même 2% d'impôt sur la fortune des milliardaires, chez certaines personnes c'est vu comme de la spoliation, mais nous sur nos revenus on paie jusqu'à 30-40% d'impôt. Enfin voilà, il y a cet équilibre. Et alors je voudrais surtout pas tomber dans l'idée de dire « Ah oui, mais alors baissons les impôts absolument sur nous, sur la classe moyenne, sur les gens qui sont plus précaires, etc. » Ok pour ça, mais si on baisse les impôts sans compenser, alors on va perdre... On fait des économies dans quoi ? On fait des économies dans la santé ? On fait des économies... Dans la justice, on fait des économies, dans la sécurité, dans le climat, enfin voilà.

  • Speaker #0

    Non bien sûr, il faut des rentrées, l'État a besoin de rentrées pour faire fonctionner les services publics, pour payer les retraites, on oublie toujours, mais il y a une grosse partie de l'impôt qui part dans les retraites. L'idée en fait c'est de rééquilibrer qui contribue, mais cette enveloppe elle doit rester là, même elle doit croître par rapport à tous les sujets auxquels on doit faire face, comme notamment... Le changement climatique, les inégalités croissantes, cette enveloppe doit rester là et croître pour faire face à tout ça. Mais oui, on doit rééquilibrer de qui contribue à cette enveloppe finalement.

  • Speaker #1

    Et ça, c'est ce que demandent les millionnaires avec lesquels on travaille. Même des gens comme Warren Buffett, qui est un des hommes les plus riches du monde et qui n'est pas du tout membre de ce groupe de millionnaires, il a eu cette phrase qui, je trouve, est vraiment révélatrice. Il y a une guerre des classes aujourd'hui. La lutte des classes, c'est les millionnaires contre le reste du monde. Et c'est ma classe, celle des milliardaires, qui est en train de la gagner. Et donc, même quelqu'un comme Bill Gates va dire « Mais oui, ça ne me dérangerait pas de payer plus d'impôts » . Quelqu'un comme Marlène Engelhorn, qui est l'héritière du groupe chimique BASF. Elle, elle a dit, elle est membre de ce groupement de millionnaires et elle dit mais en fait, voilà, moi, je veux redistribuer ma fortune parce que je l'ai héritée, je vis très bien, je peux en redistribuer une partie pour la collectivité et financer des projets sur lesquels les gens vont s'accorder, vont débattre et vont décider ce qu'ils veulent financer, ce qui est bénéfique pour la société.

  • Speaker #0

    et du coup il y a un truc dont j'ai envie de parler c'est que Donc ces personnes fortunées, elles sont au courant qu'elles payent très peu d'impôts, en tout cas pour la plupart. Il y en a qui sont d'accord de redistribuer, il y en a probablement moins. Une majorité probablement n'est pas d'accord de redistribuer. Mais du coup, elles mettent un mécanisme quand même en place qui est la philanthropie. Et du coup, elles se défendent avec ça. Ça devient un argument de je ne paye pas, je ne paye peu d'impôts. Oui, mais j'investis dans tel et tel projet et j'ai dépensé des millions dans ça et des millions dans ça. Comment, chez Oxfam, et comment toi, vous gérez cet argument-là de la philanthropie ?

  • Speaker #1

    En fait, la question de la philanthropie, on ne va jamais critiquer quelqu'un parce qu'il donne de l'argent à une cause qu'il estime bonne. Mais souvent, les causes que les philanthropes estiment bonnes ne sont pas nécessairement celles qui vont bénéficier à l'ensemble de la société. Donc en fait, ce que nous on dit, c'est qu'aujourd'hui, on ne peut pas compter... On ne peut pas compter sur les milliardaires ou les millionnaires pour financer par la philanthropie notre système de soins de santé. On ne peut pas compter sur la philanthropie pour financer notre système de justice. On ne peut pas compter sur la philanthropie pour financer notre système éducatif. Donc aujourd'hui, ok, c'est très bien, faites de la philanthropie, c'est super, mais d'abord aussi payez vos impôts de manière juste. Il faut savoir que la philanthropie, ça vient des Etats-Unis. Ça vient d'une époque où il y avait une extrême concentration des richesses dans le pays, je crois qu'on appelait ça le Gilded Age à l'époque, avec des types comme J.P. Morgan, tous ces super... les Rockefellers, etc. Et qu'en fait, à l'époque, ces gens payaient presque pas d'impôts. Et qu'un des moyens pour continuer à ne pas payer d'impôts face au mécontentement populaire qui montait dans la population aux Etats-Unis parce qu'il y avait des inégalités croissantes, ça a été de dire, ben ok, voilà ce qu'on va faire, c'est qu'on va créer des oeuvres philanthropiques, mais elles seront exemptes d'imposition, mais en échange, on rend cet argent vers la société. Mais le problème de la philanthropie, qui est très bien encore une fois, c'est très bien de faire de la philanthropie, je ne vais pas critiquer ça, mais c'est qu'en fait, on va financer des choses qui ne sont pas nécessairement bonnes pour l'ensemble de la société, et en fait, on est vraiment dépendant du bon vouloir des milliardaires qui décident, « Oui, ça, ça mérite d'être financé, ça, ça ne mérite pas d'être financé, ça, ça mérite d'être financé. » Une fois, j'étais en débat avec une avocate fiscaliste, et on parlait justement de la taxation des plus riches. Et elle nous a dit, oui mais en fait, le problème, c'est que l'argent il est mal dépensé, tu peux le penser, mais après il y a un processus qui s'appelle le vote, on élit des parlementaires, qui après vont former un gouvernement, et après voilà, le gouvernement, ça s'appelle la démocratie représentative, donc voilà, c'est mal géré, tu peux l'estimer, mais...

  • Speaker #0

    Alors vote pour les gens qui gèrent le moins mal selon toi.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça, exactement. Et donc ce qu'elle nous disait c'était, je suis sûr que si vous demandez aux millionnaires qu'est-ce qu'il faut faire avec leur argent et que vous le faites ensuite, ils vont accepter de payer plus d'impôts. Mais ça on a déjà essayé, c'était au début du 19e siècle, du 20e siècle, ça s'appelait le suffrage censitaire. Et donc en fait ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'on doit donner... plus de poids aux millionnaires, aux gens qui ont un gros patrimoine. Les gens qui ont un gros patrimoine devraient avoir plus de voix, plus de poids sur la société dans les décisions qu'un gouvernement doit prendre par rapport aux commandes immortelles. C'est un peu l'idée qui revient souvent de dire, mais en fait, si vous leur demandez, ils accepteront de payer plus d'impôts. Et souvent, c'est des gestionnaires de fortune qui nous disent ça.

  • Speaker #0

    Il y a un dernier point que je voudrais aborder avant qu'on clôture cette partie. C'est cette fausse croyance que si les gens sont millionnaires ou milliardaires, donc si les gens sont fortunés, c'est qu'ils ont travaillé dur. Alors qu'on sait actuellement qu'il y a une part significative des personnes fortunées qui sont simplement des héritiers. Donc ils sont nés riches quoi.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est ça. Donc je crois qu'aujourd'hui, la première cause d'enrichissement des milliardaires à travers le monde, c'est l'héritage. 69% de la fortune des milliardaires à travers le monde ne provient pas du mérite. Ça ne veut pas dire que les 30% qui restent, ça provient du mérite. Mais en tout cas, sur trois critères qu'on avait évalués, qui étaient la détention d'entreprises qui sont des monopoles, donc qui vont contre la concurrence, qui sont mauvaises pour le marché et pour les consommateurs. Ça, c'est un élément. Ensuite, un deuxième élément, c'est l'héritage. C'est le premier facteur dans ce qu'on avait évalué par rapport à la richesse qui n'est pas méritée entre les mains des milliardaires. Et un troisième élément sur lequel parfois on oublie, mais il y a les questions de corruption, les questions de clientélisme, le fait qu'il y a beaucoup de milliardaires qui ont fait fortune aussi parce qu'ils ont reçu des contrats de la part des États dans lesquels ils sont. Par exemple Tesla, c'est une des entreprises les plus subsidiées aux États-Unis. C'est incroyable. Déjà c'est super violent de dire que c'est en bossant qu'on devient milliardaire. Parce que ça veut dire que tous les gens qui se lèvent tous les matins, qui ont des travaux qui sont pénibles, qui franchement se cassent le dos au boulot, on pense aux infirmières, aux gens qui ramassent les déchets dans les rues, vraiment des métiers pénibles, aux cheminots, etc. Ça veut dire que ces gens, parce qu'ils ne sont pas milliardaires, ils ne sont pas méritants, qu'ils ne bossent pas assez, c'est un peu l'idée. et ensuite il y a un truc qui est hyper violent aussi c'est de dire que les milliardaires sont Riches parce qu'ils ont juste bossé, mais la richesse des milliardaires est toujours collective. Parce que leurs entreprises ne reposent pas uniquement sur eux, il y a plein de collaborateurs qui sont derrière. Il y a aussi l'État qui est présent, et c'est important de le rappeler. Par exemple, si je pense à Marc Cook, qui est un de nos milliardaires belges, Merci. Marc-Court a fait fortune en Belgique, mais c'est aussi parce qu'en Belgique, il avait la possibilité de lancer son business, parce qu'il y avait une sécurité sociale, parce que ses employés pouvaient revenir rapidement au boulot après être tombés malades. parce qu'il y avait un système d'éducation et des universités qui permettaient aussi d'embaucher des profils qui correspondaient. Et donc tout ça, c'est financé par la collectivité. Et donc la richesse des milliardaires, elle n'est jamais individuelle. On a souvent tendance à dire, ah mais regardez, il est super riche, alors il est super intelligent, il est super travailleur, ah c'est un génie. Certainement que certains de ces milliardaires, ils ont une part de... Peut-être qu'ils sont certainement visionnaires sous certains aspects, mais réduire leur réussite, à juste du génie et quelque chose d'individuel et quelque chose qui est relatif juste au mérite c'est complètement louper tous les processus collectifs sur lesquels la société se repose pour se construire et c'est complètement ignorer les milliers de collaborateurs et les milliers de gens qui en fait créent la plus-value aujourd'hui dans les entreprises

  • Speaker #0

    Ok, donc grâce à Julien, maintenant, on comprend mieux les rouages du système fiscal, de comment on en est arrivé là et de comment on pourrait aussi rétablir une forme de justice fiscale. Maintenant, je vous propose d'en discuter avec une personne directement concernée, une personne fortunée qui va aussi nous parler de justice fiscale. Et dans quelques minutes, arrive chez moi Bruno Firenze. Je vous laisse avec lui.

  • Speaker #2

    Alors bonjour, je m'appelle Bruno Firenze. Si je suis ici, c'est parce que je suis le premier membre belge de Millionaires for Humanity. Et je suis plein d'autres choses, mais là, c'est ce qui est pertinent aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Tout à fait. Est-ce que tu peux du coup nous partager ton parcours ? Comment en fait tu en es venu à devenir membre de Millionaires for Humanity ?

  • Speaker #2

    Donc moi, je fais partie d'une famille belge qui est fortunée. Je fais partie d'une cinquième génération, donc on va dire du capital de ce que j'appelle générationnel. Et qu'est-ce qui m'a mené à devenir l'année passée membre de Millions for Humanity ? Ça a été un parcours assez long, si je retourne en arrière, qui a commencé par une conscience environnementale qui s'est accrue. Et puis il y a eu une période... plus philanthropique où j'ai fait un peu, j'étais actif avec une organisation très chouette, Douche Flux, et là c'est plus de la lutte contre la pauvreté. À côté de ça, il y a toujours eu pas mal de réflexions sur ma position privilégiée, on va dire, et une situation locale et globale d'inégalité qui se détériore, qui se dégrade. Et puis je crois que j'ai eu un moment où je me suis dit, Bon bah écoute-ci. Si. Si je suis vraiment sérieux à propos d'essayer de changer toutes ces choses pour le mieux, alors en fait, la taxation équitable, c'est le sujet sur lequel il faut se concentrer. Après, ça, c'est la longue route. J'ai eu des moments plus concrets aussi. Je lisais pas mal de choses ou j'écoute beaucoup de podcasts par rapport à ce sujet. Je me souviens que je lisais une interview. d'un journaliste flamand qui avait écrit un gros livre, La machine à inégalité. Et je me suis dit, mais lui, il faut absolument que je le rencontre. Et j'ai réussi à le rencontrer, on a parlé pendant une heure. Et dans son livre, il avait écrit, par exemple, une chouette phrase qui disait « L'inégalité est un système, un ensemble de lois et d'accords plus qu'un vice. » Et je trouvais ça assez intéressant. J'ai lu tout son livre. Et en fait, je me disais, mais c'est de nouveau un livre... ou une analyse, comme j'en ai déjà lu beaucoup, c'est une sorte d'analyse macroéconomique qui dit la situation va de mal en pire, il faut absolument y faire quelque chose et il y a une petite catégorie de gens qui en profitent un maximum. Je me suis dit oui, mais ça c'est l'analyse macro, moi ce qui m'adressait c'était les dynamiques au niveau micro qui font qu'on a l'impression que c'est inarrêtable. et puis il y a eu un moment Vraiment très concret, dont je parle en fait, que j'utilise souvent comme exemple, mais c'est un bon exemple, donc je vais le réutiliser. Ici, à Bruxelles, incertainement, on avait décidé de ne plus avoir de voiture. Et quand on décide de laisser tomber sa voiture, on peut rendre sa plaque d'immatriculation et on a droit à une prime environnementale, une prime de mobilité. Et il y a une prime minimum et une prime maximum. Et en tant que membre des 1% en Belgique, j'ai eu droit à la prime maximum. Et là, je me suis dit, mais c'est quoi cette histoire ? Donc en fait, il y a toute une partie de ma réalité financière qui n'est simplement pas prise en compte. C'est comme si elle n'existait pas. Et à ce moment-là, je me suis dit, bon, écoute, maintenant, tu arrêtes de te poser toutes ces questions, tu t'assieds, tu te confrontes à cette histoire, t'essayes de répondre à toutes ces questions aussi. Et j'ai commencé une sorte de gros mélange d'analyse personnelle et sociétale, où je me suis utilisé moi-même comme symptôme de société. Et où...

  • Speaker #0

    Oui, pour essayer de répondre aux questions. Quelles sont les micro-dynamiques qui soutiennent cette inégalité croissante ? Et quel est mon rôle dans toute cette histoire, que je le veuille ou non, qu'il me plaise ou non ? Et ça, in fine, ça a mené à devenir membre de Millionaires for Humanity et à plaider pour une taxation plus équitable. Donc ça veut dire un meilleur équilibre, en fait. Plus taxer le capital et moins taxer le travail. Je dis quand même les deux toujours ensemble.

  • Speaker #1

    Et qu'est-ce que ça veut dire en fait être membre de Millionaires for Humanity ? Tu t'inscris sur internet et puis qu'est-ce qui se passe en fait ? Tu rencontres une communauté, on te donne des talking points, on te dit de rencontrer les ONG locales. Qu'est-ce qui se passe en fait ? D'un point de vue concret, c'est quoi ?

  • Speaker #0

    Il se passe très peu. Millionaires for Humanity, ça a été créé par Jafar Chalchi au Danemark, qui lui a fait fortune lui-même. Son histoire est géniale d'ailleurs. Il est arrivé au Danemark en tant que réfugié iranien à 7 ans. Il a passé un an dans un orphelinat. Le temps que ses parents trouvent une solution, sa mère a été travailler dans un hôtel pour changer des lits. Lui, il est rentré dans le système scolaire et puis l'université danoise et il a fait fortune dans l'immobilier. Et lui, il se dit, il voit très concrètement comment est-ce possible que moi, en fait, in fine, je paye maintenant moins d'impôts que ma mère qui changeait des lits dans un hôtel. C'est complètement dingue. Et donc il a créé cette communauté, mais c'est vraiment une plateforme de communication. Donc dans un monde idéal, il y a quelques membres de Millenials for Humanity dans chaque pays qui vont faire passer le même message partout. Il faut absolument qu'on travaille à une taxation plus équitable. Et en pratique, il y a depuis peu un coup de fil bimensuel avec les membres qui veulent. pour un peu parler et comparer. Mais c'est vraiment... Moi, j'avais besoin d'une plateforme utilisable. Et il y en a plusieurs. Il y a Millionaires for Humanity, il y a Patriotic Millionaires aux Etats-Unis et en Angleterre. Et puis, il y a dans le monde germanophone, Tax Me Now, lié à Marlene Engelhorn.

  • Speaker #1

    Et du coup, tu rejoins ce collectif, cette plateforme, mais tu es le seul Belge. Donc, c'est quoi ton plan d'attaque ? Tu te dis, en Belgique, je suis quand même un peu seul. Comment je vais faire rayonner mon histoire et le fait que je défende une justice fiscale et donc une taxation plus équitable ? C'est quoi ton process ensuite ?

  • Speaker #0

    Moi, je sors un peu du monde de la com, ce qui m'a bien aidé. Mon constat surtout, c'était que je trouve qu'il y a une voix dans ce débat qui manque. J'entendais personne de mon angle très particulier dire ce que je raconte. Et donc je me suis dit, je trouve que c'est un gros manque. Et donc j'ai simplement fait une sorte de petite campagne com. Et je me suis mis, ok, je prépare mes messages et je vais parler d'abord à toutes les médias écrites. Et puis à tous ceux qui veulent l'entendre pour essayer de dire, ben voilà, il y a une autre voie. dans le débat actuel.

  • Speaker #1

    Parce que du coup, tu dis, ta voix, elle n'existait pas, en tout cas avant que tu prennes position et que tu communiques à ce sujet. Parce qu'en fait, quand on entend les Belges fortunés dans les médias, ce n'est absolument pas pour raconter la même chose que toi.

  • Speaker #0

    Oui, les Belges fortunés qu'on entend dans les médias à propos de ça, c'est un peu toujours le même profil. C'est les capitaines d'industrie qui viennent très fort du monde. de l'entrepreneuriat, qui est, attention, hyper important, mais ils vont voir le monde d'une façon assez particulière, ils vont voir le monde en fonction de retours sur investissement. Quand on investit dans quelque chose, ce n'est pas anormal, on pense en termes de retours sur investissement. Mais pas tout fonctionne comme ça. Donc ça veut dire qu'en tant que capitaine d'industrie... Il ne va pas investir dans l'école, la justice, la police, les bibliothèques, parce que ce n'est pas dans cette logique-là. Et si un jour c'est le cas, c'est une très mauvaise nouvelle, parce que dans les pays où le privé commence à investir là-dedans, l'inégalité augmente encore plus. Donc c'est un angle d'approche qui est très spécifique. Et moi, je trouvais qu'il y avait un angle d'approche qui voit les choses un peu plus large. qui était nécessaire aussi.

  • Speaker #1

    Et tu parles justement d'une prise de conscience écologique, de base en tout cas, et puis qui a rayonné, qui a grandi, et surtout du fait qu'on vit dans un monde aux ressources finies. Et tu me parlais juste... avant qu'on branche les micros, du fait que tu réalisais parfois qu'on ne savait pas objectiver. C'est quoi beaucoup d'argent ? Par contre, on arrive très bien à objectiver. C'est quoi peu d'argent ?

  • Speaker #0

    En fait, ça, c'est vraiment la fin de la longue analyse. Ma longue analyse a été une sorte de grosse question-réponse avec moi-même, en me disant, voilà, on me dit souvent des choses pareilles. Est-ce que c'est vrai ? Est-ce que ce n'est pas vrai ? « Et qu'est-ce que j'en fais ? Et pourquoi est-ce qu'on me dit ça ? » Taxer la fortune, ce serait malhonnête, parce que le résultat d'une fortune, c'est le résultat d'un travail, et donc on ne va pas taxer quelqu'un une seconde fois. C'était par exemple ma première question, et là je me suis dit, en 2022, il y avait 483 milliards d'euros qui étaient gérés par des banques privées en Belgique. La première question que je me suis posée, c'est combien de ces 483 milliards ? correspondent avec l'histoire que je viens de raconter. À partir de certains montants, à partir de... Surtout quand c'est de génération en génération, cette histoire n'a plus vraiment la route. On sort de cette logique. Et alors on me demande, oui, mais à partir de quels montants ? Je ne sais pas à partir de quels montants. Ce qu'on constate par contre, c'est qu'on arrive très bien à objectiver des salaires minimums, des montants minimums. Mais alors commencer à réfléchir à... Des barèmes progressifs par rapport à la fortune, apparemment...

  • Speaker #1

    On n'y arrive pas.

  • Speaker #0

    C'est pas possible. En tout cas, à partir d'un certain niveau, ou à partir d'une certaine fortune, que ce soit 10 millions, 100 millions, hop, hop, hop, voilà, tout ça c'est la même chose. Ce que je trouve assez particulier. Qu'est-ce qu'on me dit aussi à ce moment-là, c'est « Ah oui, mais attention, parce qu'on n'est jamais sûr. Demain tout... » Demain, tout peut être parti. Non, pas demain, pas tout peut être parti. À partir d'un certain... De nouveau, et je dis beaucoup ça, à partir de certains montants, à partir de... On commence à savoir diversifier un maximum, donc on ne met pas tous ses oeufs dans le même panier et on sait commencer à miser sur tous les chevaux en même temps. Donc, en fait, on devient le casino. On ne sait plus perdre. Qu'est-ce qu'on me dit alors très souvent à ce moment-là ? C'est « Oui, mais en Belgique, ça va » . Oui, non. Et ça, il y a un très bon rapport qui est sorti l'année passée d'André Decoastre, le paradoxe des inégalités en Belgique. En Belgique, ça va si on ne tient que compte du salaire. Si on tient compte des inégalités du capital, ça va beaucoup, beaucoup moins. Et en plus, on a un système, et ça, ce n'est pas juste en Belgique, on a un système où à partir de vraiment des 1%, la taxation devient régressive, en fait. parce qu'il y a beaucoup plus de rentrées qui viennent du capital ou du patrimoine immobilier, par exemple. Du coup, ça veut dire que, et ça c'était mon premier constat, je disais mais en fait on a un système de taxation qui alimente les inégalités. C'est complètement dingue. Après ça c'est un constat qui n'est pas très compliqué. Je ne suis pas le seul à faire ça. Il y a beaucoup...

  • Speaker #1

    Oui, et tous les académiques, les fiscalistes,

  • Speaker #0

    les économistes. Donc la question que moi je me suis posée, c'est comment ça se fait que ça ne change pas ? Pourquoi est-ce que ce n'est pas plus vraiment un sujet majeur pour plein de partis politiques ? Et là, je suis vite venu sur un concept de déni, en fait. Comme mon exemple de matriculation, on nie une certaine réalité, et à plusieurs niveaux. Alors d'abord, pour moi, il y a un déni pour la très grande majorité des gens. En fait, ils ne savent pas s'imaginer ce que c'est une très très grande fortune. Non, moi, je ne sais pas, par exemple. Et donc, un ami m'a une fois dit, et je trouve ça pas mal, il disait, oui, mais je suis d'accord avec toi et tout, mais ils ne peuvent pas toucher à la taxation sur l'héritage. Je me dis « Ah, c'est moi-même, pourquoi tu dis ça ? » Parce que moi, j'ai travaillé dur pour m'acheter une maison et je veux savoir la donner à mes enfants sans que ce soit taxé encore une fois. Et là, je me dis « Mais oui, je vois très bien la logique. Mais si quelqu'un a 27 maisons, il faut peut-être oser commencer à réfléchir différemment par rapport à ça. Mais déjà, il faut accepter que ça existe. » Et puis, il y a les 1%, les gens comme moi, qui sont censés savoir voir ce que je vois, mais il faut vouloir le voir aussi. Et souvent, on est dans un déni pour de très bonnes raisons. On veut correctement éduquer ses enfants, avec les bonnes valeurs. Socialement, on n'aime pas sortir du lot. On apprend certaines choses assez tard, parce qu'on est éduqué d'une certaine bonne façon. des choses en fait des décisions qui Au niveau personnel et social ? ont tout à fait raison d'être, mais qui ont à un certain moment un impact sociétal, parce qu'on reste aussi dans ce déni. Oui, mais ce n'est pas très important, ce n'est pas de l'argent mérité, ce n'est pas de l'argent gagné, donc on met de côté et on fait un peu comme si ça n'existait pas. Et puis il y a le troisième niveau, il y a le niveau politique, où, et ça c'est plutôt une bonne chose, la plupart des politiques ne sortent pas du monde des très fortunés, donc ont du mal à s'imaginer mais par contre ils ont plus accès à ce genre d'informations. Et là aussi, ça n'arrange personne dans le narratif. Toutes les politiques de n'importe quel bord accentuent la valeur du travail et la valeur du mérite. Mais quand on est un démonteur pareil, on sort de cette logique. Et donc, c'est beaucoup plus pratique par rapport au narratif de l'ignorer. Donc, déni sur déni sur déni, ça fait, moi, je... Je trouve une certaine malhonnêteté intellectuelle, en fait. Je dis souvent qu'en tant que très fortuné, on tient très fort compte de mes intérêts, mais très fort peu compte de ma fortune.

  • Speaker #1

    Oui, mais c'est hyper intéressant. Je pense que c'est la première fois que j'entends un discours pareil d'une personne fortunée. On entend, comme tu dis, toute la théorie, tous les fiscalistes, les économistes qui parlent de ce genre de sujet. On entend Oxfam, on va peut-être en parler un peu. Tu as fait une conférence avec Oxfam récemment au Parlement européen pour parler notamment du rapport d'Oxfam sur les inégalités. On l'entend du monde associatif, du monde académique, un petit peu du monde politique, mais très peu, comme tu le dis, et pas suffisamment, parce qu'il y a ce malaise, il y a ce déni. Mais je trouve ça hyper rafraîchissant et hyper utile d'avoir des gens comme toi qui prennent la parole sur ce genre de sujet. Et de dire exactement la phrase que tu viens de dire, c'est « on prend en compte mes intérêts, mais pas ma fortune » . Et je trouve que cette phrase résume parfaitement la situation. C'est un peu lunaire. Mais du coup, pour revenir sur la collaboration avec les académiques et notamment Oxfam. Donc récemment, tu as été au Parlement européen avec un expert de chez Oxfam pour discuter de ces sujets. Et est-ce que tu peux un peu nous en parler ?

  • Speaker #0

    Alors Oxfam m'avait invité à parler dans un panel au Parlement européen pour parler de ça. Eux, ils ont sorti un rapport pour expliquer que la situation s'aggrave et qu'est-ce qu'on pourrait peut-être y faire. Là, j'ai constaté aussi, après notre débat, il y avait un débat entre les politiques. En fait, tout le monde raconte un peu sa position sans vraiment en parler. Qu'est-ce que j'ai sorti de cette expérience au Parlement européen ? mais... il y a quand même un gros manque de vrai débat. Donc je pense, d'abord, ça, ça revient un peu... En fait, je vais un peu répondre à la question, qu'est-ce que je pense qui doit se passer pour qu'on essaye de trouver des solutions ? Ça recoupe un peu sur ce que je disais de Denis. Je pense que cette énorme inégalité et le fait qu'il y ait une telle masse financière qui va que vers tellement peu de personnes... peace On parle beaucoup de proportion aussi, c'est complètement disproportionné. Que ce soit au niveau sociétal ou que ce soit au niveau personnel, une masse financière parée, en fait, c'est un dilemme moral. On se dit mais ce n'est pas possible. Et qu'est-ce qu'on fait en général avec les dilemmes moraux ? On essaie de les éviter le plus possible. Ou en tout cas, on essaie aussi de changer de sujet. Donc qu'est-ce qu'on va énormément dire ? on va venir... Quand je parle de ça, oui, mais l'État gaspille notre argent et est un très mauvais gestionnaire. Ok, l'État... J'ai un mine Bruxelles, donc je vois très bien de quoi on parle. Mais même si on vivait dans un État qui travaillerait à la perfection et où tout fonctionne parfaitement, on va devoir encore toujours s'atteler à cette question. Qu'est-ce qu'une taxation éguitable ? Qu'est-ce qu'on me dit aussi ? Mais il faut plus encourager l'entrepreneuriat. D'accord.

  • Speaker #1

    Comme si c'était opposé en fait.

  • Speaker #0

    Comme si c'était opposé. Moi je vois pas très bien en quoi la situation actuelle encourage l'entrepreneuriat. On est loin du compte en fait. Mais de nouveau, c'est un débat différent. Oui mais si on taxe plus les riches alors il va y avoir moins de philanthropie. C'est la philanthropie. va toujours être nécessaire, mais c'est de nouveau un débat différent. Donc on utilise tous ces sujets qui ont tout à fait lieu d'être et dont il faut parler, mais en fait comme excuse pour ne surtout pas commencer à parler de ce problème d'inégalité croissante et de taxation foireuse, on va dire. Donc il faut avoir, en fait il faut oser cette confrontation. On doit oser se confronter par rapport à cette situation. On doit oser regarder la situation et se dire mais... Ok, ça en fait c'est pas possible. Il y a quelque chose de complètement... Et oser regarder les chiffres. Et à côté de ça, on doit avoir, moi je pense aussi, le courage de la discussion, et c'est là que je recoupe un peu avec Oxfam. Tu vois, au début je parlais du livre, que j'étais en train de lire un livre, que j'ai rencontré un journaliste, et lui, ce qui était intéressant, donc on a parlé pendant une heure, et j'ai réalisé, je ne lui ai jamais posé la question, je devrais, Moi, je pense que c'est la première fois qu'il parlait à 1%. Moi aussi. Oui, oui. Non, mais c'est la première fois qu'il parlait. Mais lui, il a écrit un livre de 600 pages.

  • Speaker #1

    Sur ces gens-là, c'est vrai.

  • Speaker #0

    Avec des gens quand même qui ont... Et je me disais, mais c'est assez bizarre. Et puis, je lis son livre. Et il y a des magnifiques phrases. Et j'en ai noté deux. Ce genre de personnes qui ne peuvent se passer de vanité et de paillettes avec Louis XIV et Marie-Antoinette à Versailles, ce n'était pas différent. Ok, et mon préféré, c'est Nanty capable de se gâcher le sommeil en cherchant les moyens de se faire encore plus d'argent avec leur argent. Quand je lis ça, d'abord je ne me reconnais pas spécialement, je me dis ok, c'est spécial, mais surtout, ça rend les choses très faciles pour moi de me dire, moi je n'ai rien à voir avec ça. Et donc, l'argent, la fortune, à n'importe quel niveau, c'est quelque chose de très émotionnel. Et donc quand il y a, l'autre fois c'était dans une manif en France, quelqu'un qui avait un grand panneau avec « Il faut reprendre l'argent que les riches nous ont volé » . Alors même si je vois très bien d'où vient cette phrase, si on me traite de voleur, je vais par définition réagir de façon assez défensive. Oui,

  • Speaker #1

    même si tu comprends le fond.

  • Speaker #0

    Je comprends très bien le fond. Et c'est entre autres pour ça qu'il n'y a pas de dialogue. On doit réussir. avoir une discussion qui va au-delà des clichés. La fois passée, j'ai réagi par rapport à une proposition politique. Taxer les riches, c'est taxer la richesse. Taxer la richesse excessive. Et je sais bien que...

  • Speaker #1

    C'est ça qu'on veut dire par taxer les riches. Oui,

  • Speaker #0

    je sais bien que c'est ça qu'on veut dire. Et je sais bien que rétablir l'équilibre en taxant plus la richesse excessive, ça marche moins bien en termes de com. C'est moins vendeur. Mais c'est vers là qu'on doit aller pour avoir une discussion correcte. C'est... Je parlais à Oxfam par rapport à ça, et ça c'était très chouette comme discussion, parce qu'il disait, c'est très fort dans le narratif, donc pour moi c'est les deux choses qui doivent se passer, on doit accepter de plus parler, mais on doit réussir à parler différemment. Mais Oxfam, dans un de leurs rapports aussi, ça c'est pas le rapport Oxfam, dans plein de rapports, la plus grosse partie des fortunes maintenant, c'est de la fortune héritée. Donc les très grosses fortunes maintenant, en majorité, c'est des fortunes héritées. Si c'est hérité, ben voilà, il n'y a pas de mérite, mais ce n'est pas ma faute non plus. Oui, t'es né là-dedans quoi. Oui, t'es né là-dedans. Donc on peut m'accuser de ne pas prendre mes ressources habitées, on peut m'accuser de...

  • Speaker #1

    De malhonnêteté intellectuelle, comme tu disais.

  • Speaker #0

    De malhonnêteté intellectuelle, mais c'est encore différent de dire c'est ta faute. Votre faute. Je dois me confronter à ça comme tout le monde. Et voilà, s'il y a ce discours-là, ça ne me la rend pas plus facile pour sortir du bois, on va dire. J'avais trouvé une analogie qui était pas mal, je pensais, enfin je pense. On est un des dix seuls pays au monde à avoir réussi à avoir une conversation sur l'euthanasie. C'est pénible, hein. C'est parler de la mort. Tout le monde doit passer certaines lignes et... Il y a beaucoup d'analogie. C'est une discussion qui ne termine jamais. On doit reparler de ça à tous les instants pour de nouveau trouver un juste équilibre. Il y a dix pays qui ont réussi à avoir le courage d'avoir cette discussion. Ce n'est pas beaucoup. Et la Belgique en fait partie. C'est exactement la même chose. On doit réussir à trouver une façon de, et je ne sais pas comment encore, mais on doit trouver une façon d'avoir une discussion correcte et adulte.

  • Speaker #1

    Et à un niveau aussi, tu le portais au Parlement européen. Et c'est une conversation qui doit avoir lieu de manière internationale aussi, ça doit dépasser les frontières et le porter je pense au niveau européen est déjà un premier pas et je pense que c'est le but aussi de Millionaires for Humanity d'avoir cette conversation à l'international et de pouvoir justement s'allier dans ce message là, mais en effet c'est quelque chose qui vit très peu de manière générale en Belgique et partout ailleurs.

  • Speaker #0

    qui vit très peu, ce que je trouve assez étonnant parce que c'est quand même la source de beaucoup de... de problèmes, ou la source de beaucoup de choses, et donc la solution aussi de beaucoup de choses, donc je trouve ça très étonnant, et ça c'est une des choses qui m'a étonné depuis que j'ai commencé à faire ça jusqu'à quel point les gens vont pour ne surtout pas en parler moi je pensais qu'en fait que ça allait être, ah tiens une nouvelle voix, on va quand même écouter ah non, il faut pousser, pousser, pousser avant de savoir aller donner ce nouvel angle parce qu'on essaye vraiment d'éviter ça Euh... Un maximum. Mais je reviens sur ce que tu disais tout à l'heure sur les ressources infinies et le beaucoup d'argent. Je disais au tout début, je ne sais pas si ça a commencé comme ça, mais je sais qu'au début, il y a une sorte de conscience environnementale. Et il n'y a pas longtemps, j'ai vraiment eu un moment où je me suis dit, ah, mais voilà, la boucle est bouclée quelque part. Très souvent, on me dit, oui, mais c'est quoi beaucoup d'argent finalement ? Tu vois, pour toi, c'est autant, pour quelqu'un d'autre, c'est autant. autant pour Elon Musk, ce sera autant. Et certainement, j'ai un peu fait le lien entre tous les gens qui me disaient ça et je me disais, Si on voit le monde comme un monde aux ressources infinies, comme beaucoup de gens font encore, 1 million, 3 milliards ou 300 trilliards, ça ne change rien. De toute façon, il n'y a pas de limite. Le moment où on change cette façon de penser là, où on se dit parce que tout cet argent est lié à quelque chose, est lié à une machine qui doit tourner, est lié à plein de choses, au moment où on se dit, ah mais non, on n'est pas. dans un monde aux ressources infinies. Mais là, tout change. Et là, tout change par rapport à ce sujet-ci aussi.

  • Speaker #1

    Mais je pense que c'est parfait pour clôturer cet épisode. Merci beaucoup Bruno d'être venu parler de tout ça à mon micro. Et à bientôt !

  • Speaker #0

    Merci beaucoup, à bientôt !

  • Speaker #1

    J'espère que cet épisode vous a plu. Si c'est le cas, n'oubliez pas de vous abonner au podcast. Si vous voulez réagir à nos propos, la section commentaires est faite pour cela. Ou alors, vous pouvez me retrouver sur Instagram sous le pseudo at goodmorninglo. On se retrouve dans deux semaines pour un prochain épisode d'Epicéa. Et d'ici là, prenez soin de vous.

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