- Speaker #0
Bon, c'est n'importe quoi. On s'en fout. C'est pour ça que c'est cool le cinéma. Ça sert à rien, ok ?
- Speaker #1
C'est le scénario qui détanche tout.
- Speaker #0
Pas tout, mais enfin beaucoup de choses. Oui, parce que je trouve que c'est la chose sur laquelle on doit être le plus exigeant. C'est une histoire.
- Speaker #1
Bonjour et bienvenue dans Phase B, le podcast qui nous plonge tous les mois dans les coulisses du cinéma. Écrire des histoires, inventer des personnages, réinventer des mondes et des époques, c'est le travail passionnant de Ali Charef qui est scénariste. Bonjour Ali.
- Speaker #0
Bonjour Benjamin.
- Speaker #1
Comment ça va ?
- Speaker #0
Ça va et toi ?
- Speaker #1
Ouais ça va, on se remet doucement de la victoire du PSG. Ouais c'est ça, une grosse fête. Parce que là, pour le contexte, on enregistre quelques jours après, Paris a tremblé.
- Speaker #0
Ouais exactement, et on est encore plus excité de faire la vraie fête, on l'espère, on croise les doigts pour la finale. Ouais. On est prêt à... entre potes, en famille, etc. C'est cool.
- Speaker #1
En tout cas, aujourd'hui, on est là pour parler de cinéma et de ton métier de scénariste. On va parler de séries que tu écris et de courts-métrages que tu réalises, de la banlieue, de ton arrivée chez Itinéraire Productions, en passant par la FEMIS et bien sûr, donc, ton métier. Et pour commencer, j'ai lu que, dans ta biographie, que t'es tout petit, tu savais déjà ce que tu voulais faire et j'aime bien la formule raconter des histoires. Pour parler un peu du métier de scénariste, je trouve que c'est cool, c'est comme ça que tu le vois ton métier ?
- Speaker #0
Ouais grave bien sûr, c'est vrai que dès le départ en fait, quand j'étais petit, il faut savoir que je viens d'une famille très scientifique. Mes parents sont aussi en chercheur. les maths, la SED, la physique chimique, etc. Mais moi, j'ai toujours été attiré par l'existence, de manière générale, ou même juste ce qui se racontait dans la famille, comme... les gens de même d'histoire a vécu de la guerre d'algérie de la colonisation et c'est une migration j'ai toujours été un passionné des histoires et vraiment le moment où c'est né précisément c'était quand j'ai le chemin oncle ouais frère me montrer toujours des films c'était vraiment un gros fan de blockbuster américain et il m'avait montré quand j'étais 4 50 speed armand de hockey c'est une ouverture où tu sais peter doit aller en et la pizza sauf qu'il est en retard et donc du coup il se change dans une ruée ni leur sort c'est speed armand et c'est vraiment mon plus vieux souvenir de cinéma c'est cette scène là qui m'a vraiment choqué.
- Speaker #1
Ouais.
- Speaker #0
C'est fantastique de voir quelqu'un qui se change en super héros, qui tisse sa toile entre les gratte-ciel. Je me suis dit c'est incroyable. Et donc après, il y a eu une obsession de ce personnage là, de Spider-Man, qui m'a jamais quitté. Et donc, mon père m'a offert le coffret de CD dont le making-of.
- Speaker #1
Et t'as saigné le making-of ou pas ?
- Speaker #0
C'est ça, et c'était une vraie passion. C'est-à-dire que c'est là où j'ai vu qu'il y avait un métier derrière. J'ai vu que... on pouvait fabriquer vraiment ces histoires-là et en faire une vocation. Parce que tu sais, quand on est petit, si tu veux faire quoi, je vais faire comme papa, je vais faire comme maman, voilà, je vois qu'il y a ça, et je me dis, ben en fait, c'est ça que je vais faire plus tard. Et mes parents... ça les faisait marrer c'était en mode écoute vas-y très naturellement je commençais à écrire des histoires dans ma chambre, des bandes dessinées précisément et c'est comme ça que la passion est née ça m'a jamais quitté au fil des années au début c'était des BD après c'était des sortes de débuts de romans après c'était des petits courts métrages et ainsi de suite jusqu'à jusqu'à
- Speaker #1
aujourd'hui où t'écris des séries mais on va en parler c'est vrai que quand on regarde ton ... Ton parcours scolaire, surtout après le bac, tu t'es détaché, comme tu dis, de ta famille qui est très scientifique. C'est ça. Parce que tu as fait beaucoup de réorientation.
- Speaker #0
Oui, exactement.
- Speaker #1
Tu as fait une première année de droit, une première année d'histoire, où tu ne t'es pas forcément plu à la fac.
- Speaker #0
Alors, en gros, moi, il faut savoir que dès le collège... Même en 6e, 5e, je disais à mes profs, quand on parlait, il y avait des petits moments de cours d'orientation, je disais c'est le cinéma. Je les disais, c'était le cinéma, etc. Sauf que, en vrai, les enseignants, ils ne connaissent pas trop ce milieu-là, donc ils ne savent pas te conseiller. mais il se posait toujours la question de qu'est-ce que tu vas faire concrètement quand tu vas sortir, parce que le cinéma, ce n'est pas vraiment un métier, etc. Donc moi, je me disais que ce serait soit du droit, soit de l'histoire.
- Speaker #1
Ok.
- Speaker #0
Et finalement, j'ai fait le film. les deux. Parce que quand je suis arrivé en terminale, j'entendais déjà parler de la FEMIS et je le visais en fait, je visais la FEMIS dès cette époque-là. Mais je savais qu'il fallait Bac plus 2 et que j'avais beaucoup de lacunes en art de manière générale, en culture générale de l'art. et même du cinéma. Et je m'étais dit qu'il me fallait encore un peu de temps avant de sauter le pas, et tant mieux parce qu'il faut un bac plus 2. Donc qu'est-ce que je vais faire en attendant mon bac plus 2 ? Je vais peut-être faire du droit, parce que moi j'ai fait ES, et je trouvais que ça allait... Voilà, il y avait une sorte de logique. Donc j'arrive en premier semestre de droit, et en vrai, je m'en sors bien. Genre ça m'intéresse et tout, l'histoire, parce qu'on fait beaucoup d'histoires, et moi je suis un passionné d'histoire en premier semestre de droit. Et le problème, c'est que je me sens un peu déphasé dans le sens où Très vite on se fait des premiers amis, une première bande et chacun se dit tu veux faire quoi ? Moi je veux faire avocat, moi je veux faire procureur, je veux faire juge, toi Ali tu veux faire quoi ? Moi je veux faire scénariste-réalisateur. Et il y a un petit moment, ils se demandent « what the f***, qu'est-ce que tu fais là ? » . Et en parallèle, je commence à écrire vraiment des vrais premiers scénarios de longs-métrages.
- Speaker #1
Ouais, un peu plus sérieusement que les bandes dessinées d'enfants. Ouais,
- Speaker #0
vachement plus sérieusement parce que c'est là où il y a une sorte d'univers qui s'est formé. C'est-à-dire qu'avant, quand j'étais petit... J'imitais les films que je voyais au cinéma. C'est-à-dire que j'étais un gros passionné de stop-motion. Je faisais dans ma chambre, je prenais mes figurines, une photo, deux photos, trois photos, je faisais bouger le bras de la figurine, et ça faisait une sorte d'animation. Je faisais des films comme ça, et généralement c'était Avengers, Spider-Man. Plan par plan, je refaisais les films que je voyais et qui me faisaient kiffer. Et donc c'était un univers qui était très loin de moi, c'est-à-dire que quand j'écrivais des choses, c'était un truc de super-héros, de fantastique, toujours un adolescent qui a un super-pouvoir, et c'est quelqu'un qui s'appelle genre Mike, qui habite aux Etats-Unis, dans le New Jersey, et tout.
- Speaker #1
Ce qui t'a fait kiffer quand t'étais petit, quoi.
- Speaker #0
Ça, mais en fait, au final, qui est loin de moi, de ce que je suis, de ma culture, même de la France, tout court, c'est pas la France, quoi. Et donc arrivé à ce moment-là, en terminale, et en début d'année de fac... Je me suis dit, je veux raconter ce que je suis et moi c'est vrai que depuis petit, en fait moi je suis binational, c'est-à-dire que j'ai la nationalité française et la nationalité algérienne. Et depuis que je suis enfant, on va tous les étés en Algérie. On fait les 1 mois, quand j'étais petit même plus et tout. Et donc j'ai toute la famille de mon père qui est là-bas. Et donc c'est un pays, vraiment je suis très attaché. Et je me suis toujours senti au milieu en fait entre la France et l'Algérie. Et c'est quelque chose qui se ressent dans la vie de tous les jours. Et là, je m'étais dit que j'avais envie de le mettre en fiction. C'était au cours d'un été, en fait c'est l'été entre le bac et la rentrée à la fac, que j'avais pensé à un premier long métrage qui s'appelle L'étranger. Il raconte en fait l'histoire d'un enfant qui fuit la guerre civile algérienne dans les années 90 parce que son père en fait est un grand chanteur de rail assassiné par les islamistes. Il part en France avec sa mère et il revient en fait 20 ans plus tard et il se comprend un peu au fantôme de la société. Là, il y a eu un vrai saut de maturité même dans le récit. Un vrai contexte historique, etc.
- Speaker #1
Et comment on fait pour... Parce que le scénario, on ne le voit pas. Quand on regarde un film, on ne voit pas comment le scénario est écrit. Et l'écriture d'un scénario, ce n'est pas du tout la même écriture. Une écriture littéraire, quand on lit un roman, etc. Comment tu fais ? Tu t'es entraîné ? Tu as essayé de fouiller des scénarios quelque part ? Oui, imiter.
- Speaker #0
Dans un premier temps, c'était ça. C'est vraiment, je suis parti dans les... Il y a des sortes de sites qui offrent des scripts gratuitement, etc. Et c'est là où j'ai vraiment recopié. Après, c'est vrai que pour un début, un scénario de long métrage, généralement, on n'écrit pas les 190 pages. Mais ce qui fait qu'il y a finalement des résumés détaillés. Et ça ressemble beaucoup à un résumé de roman. Il y a quelque chose vraiment où, au final, c'est beaucoup plus littéraire que... À l'arrivée où il y a le script, et là c'est vraiment très visuel, c'est vraiment un document technique de tournage. Donc là-dessus je m'en suis sorti, je m'en suis bien sorti. Et ce qui m'a permis d'arriver à ce premier scénario de long métrage, c'est que pendant les années lycées, j'ai lu les livres un peu les classiques de la dramaturgie. Que ce soit l'anatomie d'un scénario de John Truby, ou Story de Robert McKee. Ça je les ai lus quand j'étais en première terminale et donc ça m'a énormément aidé. Et en parallèle au lycée, je commençais enfin à quitter la stop motion, c'est-à-dire mes figurines, pour filmer mes potes. Et là faire des vrais courts-métrages en prise de vue réelle, on va dire quasiment. Et donc après, en droit, je continue à écrire l'étranger avec cet objectif de faire un résumé de 6 pages avec une note d'intention. Et à cette époque-là, c'était un peu l'ouverture de la plateforme Paper to Film, qui en gros, on envoie un scénario, il y a un comité qui le lit, et ils mettent en lien avec des producteurs. Moi, c'était mon objectif, je me suis dit, je regarde en plus, il y a des gens qui ont fait des études de cinéma, je me suis dit, ils doivent savoir c'est quoi un mauvais scénario, quoi, un bon scénario quoi. Et donc, à un moment donné, j'ai dit à mes parents qu'en droit, en vrai, ça me va plus. Je sèche de ouf, j'en ai plus rien à faire parce que moi, c'est le cinéma. Et dans mon temps libre, je vais au cinéma et je suis en mode, en vrai, je veux faire partie de ce monde-là. Et je me suis dit... J'ai même pas envie d'attendre la Fémis en fait, j'ai envie d'y aller là, j'ai envie... Et limite moi, je m'en souviens qu'à ce moment-là, mon rêve c'était juste de pas faire la fac, de pas faire les cours, et juste expérimenter, faire des courts-métrages avec ma caméra. Mes parents ils m'ont dit, c'est mort. Ils m'ont dit, t'arrêtes le droit parce que tu veux plus, c'est très bien, mais du coup tu vas aller en histoire, t'aimes l'histoire. Je me suis dit, bon vas-y c'est pas grave. Et peut-être qu'ils se sont dit, en histoire, peut-être qu'il va kiffer l'histoire, il va vouloir y rester. Mais on parlait aussi d'aller faire des licences d'anglais, parce que j'aime bien l'anglais aussi. Et moi, j'étais en mode, oui, oui, oui, mais c'est mort. Je vais finir par dire non à tout au final. Donc, c'est pour ça qu'en janvier, en fait, c'est même pas une année. OK. C'est en fait en janvier. Oui, c'est ça. J'ai fait qu'un semestre de droit. Je suis allé en histoire. Moi, je suis vraiment un passionné d'histoire. J'aurais pu faire prof d'histoire dans un autre monde. Mais... Mais le cinéma, c'est trop. C'est vraiment mon truc. Je m'en souviens, j'ai fait un cours d'amphi. Juste un cours d'amphi. Et après, pareil, je rebelote. Je pense qu'au cinéma. Et j'envoie l'étranger à Paper to Film, qu'il accepte. Ah ouais, en fait...
- Speaker #1
Il y a un espoir, là.
- Speaker #0
Parce que ouais, autour de moi, les gens qui avaient lu, ils avaient vraiment kiffé. Mais moi, je me suis dit c'est les proches. C'est les proches. et là c'est accepté Je me dis « Waouh ! » Je sors juste de la terminale et tout. Et en même temps, je passe. Je fais vite fait le tour des écoles privées. Parce que je suis en mode… En fait, je ne peux pas attendre la fin de l'année. Je veux là tout de suite mettre la main dessus. Et donc, je me dirige vers Trois-Iesses.
- Speaker #1
Ok, ouais.
- Speaker #0
Et là, je vais avec mes parents à Trois-Iesses, à ce moment-là. Et donc, il y a eu une longue négociation avec mes parents. Parce que, il faut savoir qu'il n'y a pas de règles pour aller dans le cinéma. c'est énormément de stratégie et c'est énormément aussi, c'est énormément, je dirais pas de chance, mais ça dépend aussi beaucoup d'où on vient et d'où viennent nos parents et où en sont nos parents. Moi, j'avais de la chance, mes parents étant enseignants, etc., d'arriver à une situation où ils peuvent se permettre, en fait, d'accepter de faire un prêt. Parce que les écoles de cinéma, c'est un gros coup. Même si j'ai dû le négocier aussi. Et en me disant, les écoles privées, je vais avoir de la culture générale, je vais pratiquer, je vais faire Merci. des stages surtout si je suis obligé d'y aller là. Et donc au final, ils ont fini par accepter en mode, bon, tu sais quoi, vas-y, de toute façon, depuis que je suis petit, je leur casse la tête avec ça. Donc j'ai passé le concours de 3IS et j'ai été accepté.
- Speaker #1
Ouais. 3IS, juste pour expliquer à ceux qui connaissent pas, c'est l'Institut International de l'Image et du Son. Et donc tu es là, tu es là-bas de 2019 à 2022 et tu sors major de promo. Donc ça change de la fac où tu sais chez... J'ai vu ça que t'étais sorti majeur de pro Du coup je me suis dit Le progrès est fou Parce qu'il s'est réorienté deux fois en droit en histoire Et là ça prouve que c'est vraiment Ce qui te plaisait,
- Speaker #0
ce qui te passe bonnet Tu te sentais bien quoi Exactement et en vrai le cinéma ça a toujours été ça Dans le sens où à l'école Au lycée, au collège Plus au lycée qu'au collège J'étais Bon, enfin dans le sens où moi je tapais... Au collège c'était plus dur, mais au lycée et fin collège début lycée, lycée je tapais genre dans les
- Speaker #1
12-13. Ouais t'avais trouvé l'Astra pour pas faire grand chose mais...
- Speaker #0
De choisir les matières, genre je t'abonne ça, vas-y... Tant que je suis dans les 12, 12 et pas en dessous, ça va. Mais du coup il y avait toujours plus chaud... plus en difficulté. Moi mon rêve ça a toujours été d'être parmi les plus chauds. J'ai envie que les enseignants me voient comme quelqu'un qui mène un peu la classe. J'avais vraiment ce complexe là et moi c'est vrai que le... cinéma comme je le faisais à la fois au début en cachette et ensuite quand je l'ai montré aux gens de ma ville de mon lycée et tout personne en fait n'avait partie n'avait tenté de faire du cinéma forcément je les impressionnait tous et donc ce truc où tu arrives aussi avec une confiance là tu te crées une confiance que tu n'as pas ailleurs ouais et donc quand j'arrive à 3i s je suis en mode purée là je vais être dans mon élément de ouf vraiment dans mon truc et donc je rentre à 3i s et ça a été vraiment trois années super dans le sens où s'il ya plein de choses à retirer mais où j'ai pu en fait découvrir l'histoire du cinéma et en fait pallier à un manque de culture.
- Speaker #1
Ce n'était pas juste aller au cinéma tout seul, c'est là il y avait des vrais experts entre guillemets.
- Speaker #0
Pas dans le sens où voilà on parle de genre, en mouvement artistique, on se cultive énormément. Il y avait des cours d'histoire de l'art, des cours de dramaturgie, de mythologie, d'art visuel vraiment, de comment tu cadres un plan et tout. Et forcément, c'était un cursus général, donc il y avait plein de choses qui me faisaient chier. Et donc ça, c'était cool, parce que ça me permettait de savoir vraiment ce que j'aime ou non. Et donc toute la technique, l'image, à part le montage, parce que j'en faisais dans ma chambre, ça, ça me plaisait. Je continuais à avoir vraiment un kiff du scénario.
- Speaker #1
Et puis tu as appris plein de choses, du coup, niveau technique, etc. C'est trop cool. Et en 2023-2024, pour finir un peu sur ton cursus d'études, Donc tu fais un cursus écriture et création de séries à la FEMIS. Je me suis noté, est-ce que quelqu'un t'avait parlé de la FEMIS, comment t'es arrivé là-bas ? Mais en fait c'est toi-même, du coup tu m'as dit que c'était ton ambition depuis longtemps.
- Speaker #0
Exactement, mais pas cette formation précisément. En fait c'est à la fin de 3IS où je me spécialise en scénario pur, parce que je sais qu'en sortant de 3IS je ne vais pas être un réalisateur à temps plein. Je sais que je ne vais pas travailler en tant que réalisateur et gagner ma vie. Donc ma stratégie, c'est pour ça que j'insiste toujours, c'est toujours une question de stratégie. Ma stratégie, ça a été de me dire, il faut que j'aille dans une filière qui va me donner un emploi où je vais être proche du scénario. Et donc je m'étais dit, c'est chargé de développement. Donc chargé de développement, c'est accueillir les projets, faire des fiches de lecture, faire des retours sur les scénarios. Je me suis dit, pour un amoureux du scénario, un pur scénariste,
- Speaker #1
Tu fais toute la journée, tu lis...
- Speaker #0
Exactement. Donc, en troisième année, je vais en scénario, en écriture, et je donne tout pour avoir un stage en développement. Et donc, c'est chez Itinéraire Production que j'atterris, où je passe les entretiens, justement, des fiches de lecture. Donc, je rencontre vraiment une équipe formidable. Pierre Loger et Anthony Lancret, donc les fondateurs, les producteurs, les associés. Lola Manaï et Juliette Lassalle qui sont directrices littéraires et productrices artistiques. Je rentre dans cette équipe, passionné par ce qu'ils font, parce qu'il y a à la fois HPI et Ousekin.
- Speaker #1
Ouais.
- Speaker #0
Et moi j'en souviens, j'avais vu Ousekin, j'avais adoré. Et ils sortaient de la saison 2 de HPI qui confirmait le carton de cet univers. Et donc à l'entretien, je leur dis moi j'aimerais bien faire la FEMIS. C'est-à-dire que là je savais que 3DS ça ne me suffisait pas. Je leur dis voilà, là c'est mon stage de fin d'études. Après j'aimerais faire la FEMIS ou le CEEA. le conservatoire européen...
- Speaker #1
Je l'ai pas...
- Speaker #0
Personne ne l'a pas, tout le monde dit c'est E.E.A. Donc bref. Et c'est là, à l'entretien, où on parle plutôt de la formation écriture et création de séries. Qui te fait rentrer vraiment dans l'industrie. Vraiment, et même si tu veux faire du cinéma après et tout. Et donc c'est comme ça que je suis allé vers cette formation. Entre les deux, entre 3DS et La Fémis, il y a eu cette année chez Itinéraire Productions, qui a en vrai tout changé.
- Speaker #1
Et du coup, c'est plus une boîte de prod qui fait pas mal de séries ?
- Speaker #0
Exactement.
- Speaker #1
Qui fait que ça ou ils font aussi d'autres choses ?
- Speaker #0
Alors là, je sais qu'ils passent aussi au long métrage de cinéma. Ok. Mais à la base, c'est les séries. C'est une boîte de prod affiliée à UGC, séries. Et donc avec une conviction moi qui me parlait beaucoup, c'était à la fois d'avoir du blockbuster, de divertissement intelligent, hyper ambitieux, qu'on peut voir en famille comme HPI, et d'avoir vraiment de porter des vraies visions d'auteurs, des vrais regards hyper intéressants, importants.
- Speaker #1
Ouais des projets de genre un peu.
- Speaker #0
C'est ça exactement. Et d'avoir... En fait d'avoir à la fois du drame social comme Oussekine, de la série d'auteurs, et de l'autre côté du blockbuster comme là aussi ils ont fait avec Flashback, et moi ça me parlait parce que c'était aussi moi mes envies, même en tant que scénariste, de pouvoir alterner entre ces deux formes de récits, d'objets quoi.
- Speaker #1
Et bah du coup ouais t'as travaillé en tant que chargé de développement sur ces séries qui sont diffusées sur TF1. Et du coup, à quel point et à quelle étape est-ce que tu interviens dans l'écriture de ces séries en tant que chargé de développement ?
- Speaker #0
Alors ça, c'est vraiment passionnant. Il y a à la fois, ça peut intervenir à plein d'endroits différents, dans le sens où je reçois tous les projets que n'importe quel scénariste envoie, je lis, là j'ai un coup de cœur, j'en parle avec les directrices itéraires, elles en ont aussi, on défend ça au prod. Et là ça part en développement, on rencontre les scénaristes, etc. Et moi pour l'instant je suis toujours là. Donc là c'est vraiment, je peux arriver au début, soit comme quand je suis arrivé c'est qu'il y a des séries qui ne sont pas encore conventionnées avec des diffuseurs, donc il n'y a pas pour l'instant de plateforme ou de chaîne, ou soit il y avait d'autres séries quand je suis arrivé, c'était clairement le cas. Et donc j'interviens à chaque nouvelle étape du scénario.
- Speaker #1
Ok, ouais.
- Speaker #0
que ce soit la première étape qui est la Bible, la Bible donc voilà là où il y a vraiment c'est un peu le mode d'emploi de la chaîne, avec les personnages etc. Les arches, donc le déroulé de la saison, qu'est ce qui se passe concrètement, les épisodes dialogués, les séquencier et c'est sous forme vraiment, les scénaristes envoient un doc, on met ça sur un google doc, chacun fait des commentaires en marge, ensuite on rencontre Donc on fait un rendez-vous avec les scénaristes et là on leur fait les retours. Donc il y a tout aussi une méthodologie de retour, de commencer par le positif, ensuite le négatif, etc. Et c'est ce qui m'a permis de rencontrer des scénaristes de ouf qui font la série et moi aussi de découvrir l'industrie, comment elle fonctionne. C'est-à-dire, qu'est-ce que les plateformes cherchent, qu'est-ce que les chaînes cherchent concrètement pour pouvoir leur proposer des choses qui leur conviennent. Et donc à ce stade-là, je faisais ça. Je pouvais aussi me permettre, par moments, de créer une sorte de direction artistique pour les bibles. Donc aller chercher des visuels, se dire voilà, c'est quoi un peu l'univers visuel de notre série, en allant chercher des références, rencontrer des jeunes scénaristes pour savoir un peu quels sont leurs univers. Essentiellement, des scénaristes, c'est ça que j'ai remarqué, et c'est ce qui a un peu guidé la suite, essentiellement des scénaristes qui sont du CEA ou de la FEMIS. Et je voyais, tu vois, genre j'étais en... J'étais au taf avec eux, je vois, je fais « Ah ouais, lui, il a fait quoi ? » « Ah oui, c'est un scénariste qui sort du CEA. » « Ah oui, c'est un scénariste qui sort de la FEMIS série. » « Ok, d'accord. » Je vois, en fait, c'est soit l'un, soit l'autre. Donc, c'est pour ça qu'après, j'ai décidé de passer les deux concours.
- Speaker #1
Ok, ouais, d'accord.
- Speaker #0
J'ai eu les deux et après, j'ai choisi la FEMIS. J'ai décidé de partir à la FEMIS. Et c'est à ce moment-là aussi où il y a eu la vraie passion pour les séries, en fait. Ça s'est vraiment confirmé à ce moment-là. C'est de se dire, en fait... Il y a le cinéma et il y a l'industrie de la série et les deux secteurs offrent des choses qui peuvent être différentes. Donc c'est un espace de plus pour créer, un espace de plus pour raconter d'autres formes d'histoire. Je me suis dit que c'était assez kiffant.
- Speaker #1
Mais toi, en tant que chargé de développement, est-ce que c'est compliqué d'être objectif ? Parce que forcément, il y a quelque chose qui touche quand tu choisis un projet. Et est-ce que des fois, la boîte de prod ou la chaîne de télé te demande des... critères qu'il faut que ça rentre dans la série, certains critères, et tu es d'accord avec, pas d'accord ?
- Speaker #0
Alors en gros, là où il peut y avoir ce genre de situation, c'est plus on va... dans la série, dans l'industrie de la série, on va te demander d'être assez pragmatique, dans le sens où il y a des tendances, c'est un marché qui a des tendances. Par exemple, moi, je suis arrivé à un moment, donc en 2022, 2023, où la science-fiction, c'était terminé. Vraiment, la science-fiction, ils avaient essayé, les spectateurs n'étaient pas au rendez-vous, l'historique aussi. Et donc là, parfois, tu te retrouves avec des scénaristes qui t'envoient un projet qui a l'air vraiment super. Tu te dis, moi, je le regarderai. Par contre, je sais que personne ne va nous l'acheter. enfin il y a ce truc un peu de c'est vraiment tous les gens nous disent que no way, tous les diffuseurs là c'est vraiment pas ce qu'ils recherchent donc forcément il y a moins un côté, alors après bien sûr tu peux quand même y croire et tu te dis bah écoute, on va rencontrer les scénaristes, on va leur proposer peut-être une nouvelle direction sur leur projet comment peut-être réinventer la SF comment trouver un pas de côté, ils aiment beaucoup ce terme-là, quand on trouve un pas de côté. Mais du coup, c'est des risques. Et c'est peut-être aussi une perte de temps. Il y avait ce côté-là où des fois, tu te dis, ah, en vrai, c'est bien, mais tu ne peux le vendre à personne. Et donc, c'est surtout dans ce cas de figure qu'il peut y avoir ce genre de réflexion. Sinon, Sinon c'est énormément de retours de diffuseurs avec lesquels tu n'es pas d'accord mais tu dois délivrer la série, il faut que tu avances et donc parfois tu essayes de te battre sur certains éléments et finalement tu peux pas gagner ou faut faire des compromis, que ce soit même plus tard au niveau du casting etc.
- Speaker #1
Et souvent les gens qui arrivent avec des séries c'est plutôt des scénaristes, des réalisateurs, des potes de prod ?
- Speaker #0
La majeure partie du temps, c'est des scénaristes. C'est vraiment des scénaristes. C'est-à-dire que comparé au cinéma et aux courts-métrages, l'industrie de la série, c'est vraiment l'endroit de jeu du scénariste. Vraiment, le scénario, c'est le cœur de tout. On ne va pas forcément chercher l'univers de quelqu'un, un regard comme dans le cinéma. On va vraiment chercher des techniciens. des vrais dramaturges. Généralement, c'est des scénaristes qui arrivent ou soit c'est des scénaristes qui sont accompagnés d'un réal. Ou soit des réals qui sont accompagnés de scénaristes. La figure du scénariste.
- Speaker #1
Ils travaillent ensemble.
- Speaker #0
Ils ne sont pas dissociés.
- Speaker #1
Est-ce que ça arrive souvent que les scénaristes écrivent précisément pour un réalisateur ou pour un acteur ? Ils disent, moi j'arrive avec ce projet, mais je veux que ce soit un tel ou un tel qui joue dedans.
- Speaker #0
Bien sûr, en fait, surtout, c'est un avantage dans le sens où c'est une industrie, c'est un marché. Donc, c'est des gens qui doutent, qui ne savent pas ce qu'ils font. En fait, il n'y a pas de règles sur ce qui fonctionne et sur ce qui rapporte. Par contre, il y a quelque chose qui rassure, c'est les grands noms. Quand tu es scénariste et tu arrives avec un acteur un peu connu, un réal, qui a fait des choses, qui a prouvé des choses. Là, tu sais que ton dossier, il a plus de poids. Parce qu'on se dit, ok, en fait, c'est un peu ce genre de calcul. Ok, donc lui, le réal, il a fait ce long métrage-là qui a pas mal marché. Ah, l'acteur, ouais, l'acteur, il peut ramener tel genre de public.
- Speaker #1
C'est ça. C'est ce qui se passe un peu pour les séries sur TF1, parce que les séries sur TF1, elles ramènent des stars et c'est ce qui fait l'audience. Donc, il y a un côté aussi économique. est-ce que c'est... C'est quelque chose que tu dois réfléchir aussi, et c'est pas forcément le plus kiffant, je pense, dans ton boulot.
- Speaker #0
En vrai, c'est tout un enjeu en soi, et qui est pris très au sérieux. C'est de se dire... Il faut que cette série, il y ait le plus de monde qui le voit. Et ce qui était intéressant quand j'étais chez Itinerar Productions, c'est d'apprendre toute la stratégie derrière le casting, de se dire, voilà quoi, les spectateurs, ils sont tous très différents et pour un même projet, ils ne viennent pas pour les mêmes raisons. Il y en a qui viennent pour le genre, il y en a qui viennent pour tel acteur, tel acteur secondaire, par exemple. Je ne sais pas, il y en a qui vont venir dans un même produit, il y en a qui vont venir pour Cadmerade, d'autres qui vont venir pour François Civil. et donc c'est de se dire comment chaque personnage comment le casting, on va le penser en se disant, cet acteur là il peut nous ramener tel public genre les plus de 60 ans, nostalgique de je ne sais quoi ça c'est vraiment l'acteur qui ramène les jeunes ça c'est vraiment de se dire c'est une vraie stratégie qui est prise au sérieux et je trouvais hyper intéressant de penser le casting comme ça aussi il faut le voir dans la globalité justement
- Speaker #1
Et justement, il y a ce côté un peu... où on cherche à ramener le plus de public possible avec des acteurs pour plaire au grand public. Mais il y a aussi des enjeux de genre et une réflexion un peu plus artistique et d'écriture. C'est un peu ce qui se passe dans Flashback parce que quand on le regarde, il y a à la fois ce côté grand public avec Michael Youn, mais il y a aussi quelque chose derrière avec un peu plus de réflexion, par exemple les combats identitaires. qui sont apparues parce qu'en fait pour expliquer pour ceux qui n'ont pas vu la série c'est une policière qui vit dans notre époque et elle retourne dans les années 90, 94 exactement c'est pas 94 exactement et en fait c'est marrant parce que très subtilement mais on montre par exemple l'apparition de la conscience écologique du féminisme etc Les combats identitaires, est-ce que c'est vraiment quelque chose qui est intéressant aussi à écrire et à voir dans les séries, au-delà aussi de juste analyser un casting et voir combien ça va rapporter ?
- Speaker #0
C'est ça exactement. Mais c'est là où moi j'avais adoré Flashback et pour l'anecdote... Quand je passais les entretiens, je devais faire des fiches d'écriture sur la Bible de Flashback. Je me souviens, j'avais lu, j'avais vraiment aimé. Parce que je trouvais ça intéressant, c'est-à-dire qu'en France, savoir que dans la série, le genre qui prédomine à l'échelle nationale, c'est le polar. Les Français sont fans de polar. Et on le voit aujourd'hui, c'est le jeudi soir, c'est le soir du polar.
- Speaker #1
Le suspense.
- Speaker #0
France 2, c'est ça, c'est vraiment... Et chaque épisode dans un polar, chaque meurtre... révèlent en soi une thématique sociale. Et c'est ça qui est hyper intéressant. HPI aussi le font, mais là où Flashback, c'est hyper... frais, c'est que... on arrive à un moment où on se demande comment réinventer le polar. C'est-à-dire que là, on a eu vraiment une sorte de... de rise du polar, avec HPI en tête, etc. C'est quoi le polar d'après ? Et je trouvais ça hyper intéressant de se dire que Flashback arrive à tousser le truc avec de la science-fiction. en se disant, il va y avoir du voyage dans le temps, mais ce n'est pas gratuit, parce que c'est au service d'un propos de se dire, on va confronter deux époques, donc deux regards, donc deux manières de penser les choses. Et c'est là où la thématique sociale, qui est toujours au cœur des épisodes de Polar, la prend en densité, et c'est toujours intéressant de faire le point sur la société française, de se dire, on est très nostalgique des années 90. Comme on est très nostalgique... Dans la vie de tous les jours, la nostalgie a tendance à effacer les mauvais moments. Et donc là dans Flashback, ce que je trouve intéressant, c'est que la nostalgie efface complètement la face cachée de son père. Qui est vraiment un gros sexiste, raciste, homophobe et tout. Et donc je trouvais que là, il y avait une vraie thématique au cœur de cette série et qui se déployait partout chez les personnages, dans le concept, dans la structure. Et c'est ce qui fait, je trouve, que ça a aussi trouvé son public. C'est que c'est très universel, en même temps ça mélange des genres, donc c'est rafraîchissant et c'est fun, tout en étant profond comme tu dis. Donc c'était le pari gagnant depuis le départ.
- Speaker #1
Ouais, non mais c'est vrai que c'est universel parce que moi je l'ai vu, j'ai 19 ans, mais je suis sûr qu'il y a des gens beaucoup plus âgés ou des plus jeunes à qui ça peut parler. Forcément ça ne sera pas les mêmes choses, ils ne vont pas être touchés par les mêmes choses. C'est une série qui peut toucher le plus de public possible. C'est ça qui est trop cool et c'est ce que tu recherches un peu.
- Speaker #0
On peut le regarder en famille quoi. Et moi, quand j'étais chez It's La Production, donc ça, c'est une série qui a été portée aussi par Lola Manay, qui est productrice artistique de cette série. C'est elle qui m'a fait écouter. Et donc ensemble, en fait, j'ai pu à chaque version du pilote des épisodes faire des retours. Et ensuite, comment ça marche, c'est que tu as ce qu'on appelle les directeurs de collection, ou les directrices de collection. C'est un peu comme on dirait, mais de manière assez bâtarde, que c'est des showrunners. Parce qu'en fait, en soi, les showrunners, c'est encore un autre truc. Donc, il ou elle gère, vraiment coordonne l'écriture de la série, en écrivant généralement soit le pilote, soit les deux premiers épisodes. Et ensuite, il ramène... des scénaristes dans une room et donc dans le polar c'est que le recrutement se fait comment, par exemple sur 8 épisodes t'as les directeurs et directrices de collection qui écrivent les deux premiers, ensuite t'as des scénaristes qui viennent pitcher des enquêtes ils viennent pitcher des enquêtes voilà donc moi je viens, je pitch une enquête sur l'arène du boys band, comme il y a dans la saison 1 de Flashback, donc les directeurs et les directrices de collection qui sont généralement créateurs de la série, ils les pitchent il faut une phase de recrutement et ensuite on choisit on choisit les pitchs on choisit les pitchs et ensuite il y a ces jeunes scénaristes ou même pas jeunes du tout qui rejoignent l'écriture de la série et c'est comme ça qu'ensuite ça devient collégial c'est
- Speaker #1
ça parce que pour expliquer un petit peu que dans chaque épisode il y a une enquête c'est pas une série il y a une histoire tout du long mais il y a une enquête par épisode le format bouclé c'est ce qu'on appelle le format bouclé ...
- Speaker #0
comparé aux feuilles tonant.
- Speaker #1
Ouais, ok. Et pour parler un peu plus du métier de scénariste de manière globale, je me posais une question. Est-ce que ça... Parce que là, tout le travail que tu nous expliques depuis toute heure, ça se passe dans un bureau. Ouais. Mais est-ce que ça arrive que le scénariste soit présent sur un plateau de tournage ?
- Speaker #0
Oui, ça arrive énormément, ouais. Moi, c'est vrai qu'en tant que chargé de développement, étant dans la boîte de prod, etc., j'ai pu aller, par exemple, sur le tournage de... HPI, etc. Mais c'est vrai que très souvent, il y a des scénaristes créateurs de la série, les directeurs de collection notamment, qui sont présents sur le plateau. Pas tout le temps, mais en fait, si le désir, ils peuvent être très bien accueillis, dans le sens où il y a des fois même du travail à faire sur le tournage. Des scènes à réécrire, on voit que ça ne marche pas, notamment sur les quotidiennes, comme « Plus belle la vie » , « Demain nous appartient » et « Ici tout commence » . Il y a vraiment des scénaristes plateaux, vraiment un rôle, une fonction.
- Speaker #1
Mais du coup ça doit être trop cool de pouvoir voir ces idées que tu as écrites, et de les voir là dans la caméra, sur un plateau, que tout le monde s'affaire autour d'un truc, une idée que tu as eue à un moment.
- Speaker #0
Ouais c'était complètement dingue, moi c'est vrai que j'ai pu... À travers aussi Mercato, qui était sorti. Moi, quand je suis arrivé, c'était le début du casting, de l'écriture. Et j'ai vraiment vu la série se créer. C'est-à-dire qu'elle a été créée très, très vite. Et donc, j'ai vu vraiment tout prendre forme. C'est-à-dire que je lisais les scénarios. Il y avait certaines arènes, certains personnages. Et les voir prendre vie, c'était vraiment quelque chose. C'était vraiment passionnant. Et c'est là où... où Hitler Productions a énormément de chance, c'est qu'ils créent énormément, ils arrivent vraiment à créer, et il y a beaucoup justement de boîtes de prod, même de scénaristes qui peuvent s'enterrer dans des développements très longs, et c'est des fois très dur de fabriquer, alors eux ils sont vraiment dans la fabrication, et c'est magnifique.
- Speaker #1
On connaît un petit peu la durée de construction d'un long métrage, il y a des exceptions, mais de l'écriture, le tournage, on sait combien de semaines ça dure, le montage etc une série c'est Beaucoup plus lent ?
- Speaker #0
On dit généralement qu'une série, il faut compter trois ans, si tout se passe bien. Vraiment, trois ans si tout se passe bien, dans le sens où, on va dire, tu comptes une sorte de première année, où juste entre prod et scénariste, vous développez l'idée, la bible et tout. Ensuite, si tout le monde est content, à la fin de cette année, on va dire, ou de ces six mois, il y a un diffuseur qui est prêt à développer la série. avec vous, genre en Netflix ou en TF1. Ensuite, il y a un an d'écriture des épisodes, d'écriture des arches, de casting, etc. On compte ensuite un an de tournage et de post-prod. C'est trois ans. Et là, c'est vraiment trois ans qui se passent très très bien et ça avance plutôt pas mal. Ouais,
- Speaker #1
c'est qu'il n'y a pas d'accrocs, etc. Et une série, ça s'écrit épisode par épisode ou alors est-ce que c'est une histoire tout du long et... tu découpes un peu au milieu pour faire des épisodes.
- Speaker #0
En gros, au départ, t'écris le pilote et les arches. C'est-à-dire que tu montres très bien comment ça commence et ensuite, sous forme de dialoguer et tout, comme un script prêt à être tourné. Et ensuite, t'as un document, un gros document, généralement, qui est pas évident, où là, tu résumes l'épisode 1 et la suite. épisode 2, épisode 3, épisode 4, épisode 5, épisode 6, où en résumé, tu racontes ce qui se passe dans chaque épisode. Et ça, c'est les arches. Et donc généralement, une fois que ton pilote et les arches sont validés par la chaîne, la plateforme, là tu pars et donc avec tes équipes de scénaristes, tu écris précisément les dialogués de chaque épisode, puisque ce qui s'y joue de toute façon a été validé dans les arches. Et avant ça, il y avait la Bible, où la Bible c'est plus... On présente comment ça commence, où vont aller grosso modo les personnages. Mais le cœur de ce que sera la série, c'est énormément le pilote et les arches.
- Speaker #1
Donc tout ça c'était le métier de scénariste, mais tu as aussi un peu une double casquette, parce que tu as réalisé des courts-métrages, et on va parler de La Bête de la Tour, qui est un court-métrage que tu as réalisé, que tu as fait entre potes,
- Speaker #0
c'est ça ? Exactement, c'est-à-dire que moi je viens de Fresnes, et je trouve que c'est vraiment un vivier de talent. Vraiment, je suis dans un lycée où il y en a qui sont sortis directrices de casting, designers dans la mode, rappeurs, acteurs, influenceurs. C'est vraiment, il y avait un vivier incroyable. Et moi, j'ai un peu ma bande de potes depuis le collège, depuis le lycée, que j'ai vraiment entraînés dans le cinéma. C'est-à-dire qu'au début, j'étais un peu genre le galérien qui se lançait là-dedans. Eux, ils étaient genre dans leurs études et tout. Et petit à petit, dès qu'il y en avait un qui se posait la question de ce qu'il ferait, est-ce qu'il ne changerait pas de vie et tout, j'étais en mode, viens fuir du cinéma. Et c'était le cas de mon ami Lionel Etundi, que vous pouvez retrouver dans la série Le Beau Geste, qui est là actuellement à la FEMIS en première année image, qui m'a rejoint dans l'aventure. Ensuite, il y avait mon pote Sofiane Métir, qui lui est dans l'acting, Matteo Donini dans l'acting aussi, et mon pote Brian Deleuze, qui lui est plus du côté marketing. de travailler l'image, du groupe. Et très vite, c'était pendant le Covid, on s'était dit, en vrai, pourquoi on ne ferait pas une sorte de collectif qui s'appellerait Le Topique ? Et comme ça, on peut s'entraider, construire des projets, etc. avec toujours une volonté de tout faire ensemble et de pouvoir grimper l'échelle et arriver dans le monde du cinéma tous ensemble, de la même manière qu'un collectif comme Courtrage Mais. Et donc la bête de la tour, c'était un court métrage que j'avais pensé depuis un bon moment. J'avais cette idée là, notamment dans Le beau geste, on voit cette tour. Où j'imaginais au dernier étage une sorte de loup-garou, de monstre, de bête. J'avais cette image très visuelle de jeune qui monte en haut de la tour et qui trouve un monstre, qui trouve une bête et précisément un loup-garou. Mais je n'avais pas le fond, en fait. Je n'avais pas le fond encore de ce que ça pouvait raconter, etc. Et quand j'ai passé le CEA, je me souviens que là, j'ai pensé ce court-métrage-là. En disant que là, je vais raconter une histoire. C'est ça. Et donc, c'était un plus long court-métrage que la bête de la tour d'aujourd'hui. Ça racontait l'histoire d'Alia, une fille qui a 12 ans. à l'époque, et qui est à la recherche de son grand frère, Younes, qui a disparu. Et à l'époque, dans cette version de la vie scénario, alors que tout le monde dans le quartier lui dit que son frère est parti faire le djihad, elle est persuadée que non, c'est la bête qui habite au dernier étage de la tour qui l'a dévorée. Ensuite, elle va se rendre compte, dans forme de conte un peu fantastique, que cette bête-là, c'est ce qui est devenu son frère. Donc c'était parler un peu de la monstruosité de l'humain. comment l'humain peut devenir monstre et d'où vient ce monstre là les monstres de nos sociétés d'où viennent-ils pourquoi les qualifie-t-on de monstres est-ce qu'ils sont nés monstres ou c'est des gens qui sont devenus monstres c'est toutes ces questions là en fait philosophiques où je me suis dit et donc après j'ai rencontré Jean-Félix d'Alberto et Jonas Benayem qui sont deux producteurs de chez Salles Communes une boîte de production Et eux étaient juste avant chez Charade, qui est la boîte de distrib. Et avec à la base, comme itinéraire, une envie de se spécialiser en série, mais un besoin qui les a rattrapés de faire du cinéma, de faire des films.
- Speaker #1
Avec un peu plus de réflexion.
- Speaker #0
C'est ça, et donc ils étaient chauds de me produire, de m'accompagner dans ce parcours-là de réalisation vers le cinéma. Et c'est comme ça qu'on s'est rejoints sur la bête de la tour. Avec à la fois mes amis qui étaient dans l'équipe. Et à la fois Jean-Félix De Alberto qui m'a produit ce court métrage avec là, vu les 2 minutes 20, une sorte de recalibrage thématique. Dans le sens où là, il n'y avait plus la question du djihad, mais c'est l'histoire d'une fille qui essaie de convaincre à tout le monde que son frère n'est pas le monstre qu'il voit, mais personne ne veut l'écouter. Et ça finit par couper vraiment la relation qu'elle a avec son frère. Et donc là, c'est plus quelque chose de... d'aujourd'hui on va dire dans le sens où quelque chose de la diabolisation du maghrébin, de l'homme maghrébin est vu comme un monstre ou raconté comme tel et je me suis dit ça serait intéressant de revenir en fait à la belle et la bête c'est à dire de ne pas suivre les apparences, ce truc là, les clichés, les stéréotypes et tout c'est mal vraiment ce truc je suis allé vraiment dans le basique du conte, la base, la base des bases et je me suis dit en parlant d'aujourd'hui faire ce court métrage là Et ça a été une expérience super dans le sens où je suis revenu à ce que j'aimais quand j'étais petit. C'est-à-dire que pour parler de mon univers, personnellement, j'ai grandi avec le cinéma américain, vraiment, mais de blockbusters, de divertissements. Donc, c'était... Voilà, quand j'étais petit, je regardais énormément James Cameron, les films de James Cameron, genre Titanic, Terminator, Spielberg. Vraiment, ces films de divertissements, de blockbusters comme Marvel, Sam Raimi et tout. donc j'ai toujours cette envie là. Et en même temps, j'ai grandi dans la culture hip hop. J'écoutais du rap, je dansais, etc. C'était vraiment quelque chose qui était présent dans ma famille de par mon grand frère, mes oncles. Et donc le hip hop, de par son univers, m'a ramené vers les films sur la condition des afro-américains. Et notamment un film qui m'a bouleversé, c'est-à-dire que moi en primaire, j'étais en mode je vais faire du cinéma pour faire Fast & Furious. pour faire des films sur les aliens, vraiment ce truc-là. Ouais, ouais. Et après, j'en suis rentré, j'avais vu Boys in the Woods.
- Speaker #1
Ok, ouais.
- Speaker #0
Et de John Sigleton qui raconte le parcours de trois afro-américains dans le ghetto de South Central à Los Angeles. Et ça m'a vraiment, mais ça m'a mis une gifle. J'étais en sixième, je m'en souviens, j'avais la gorge nouée et tout. Je me suis dit, waouh, c'est ça le cinéma, quoi. Et vraiment, c'était une expérience que j'oublierai jamais. Et encore aujourd'hui, quand je regarde ce film, il n'y a pas une fois, je ne suis pas ému. Il n'y a pas une fois, ça me laisse estomaqué, sans voix, etc. Et je me suis dit, tiens, j'aimerais bien faire ça. En fait, l'émotion que j'ai reçue là, j'ai envie de la transmettre. Et en même temps, ça me parlait par plein d'aspects. Parce que chez moi, on parlait énormément politique. Et c'est vrai que l'histoire de ma famille traverse plein de choses. Il y a à la fois ma famille en Algérie. et aussi mes grands-parents qui ont fait la guerre. Mes grands-parents étaient vraiment dans la lutte contre les militaires français en Algérie pendant la guerre d'Algérie. Et en même temps, j'ai la famille du côté de ma mère qui sont arrivés du Maroc au début des années 70, donc dans les premiers logements qui ensuite sont devenus des cités, etc. Et ma mère a traversé en fait toute l'évolution de la banlieue parisienne. Donc j'ai tout ça en moi. Et comme on parlait énormément politique à la maison, vraiment, très vite, j'ai été connecté par tout ce qui était raconté dans les films américains de Spike Lee aussi. Après, j'ai vu « Do the right thing » . Malcom X. J'ai vraiment eu une inspiration très américaine, à la fois dans le blockbuster que dans le film d'auteur. En me disant, moi, plus tard, j'ai envie de mélanger les deux. J'ai envie de faire des films importants, coup de poing, etc. Mais dans leur forme, embrasser vraiment la notion de spectacle. Et donc, de choisir des genres codifiés. Comme là, c'était l'horreur. Je me suis dit, vas-y, je vais aller à fond là-dedans.
- Speaker #1
C'est ce qu'on ressent.
- Speaker #0
Et que les deux se superposent. C'est pour ça que même l'étranger... a pris une forme, qui est devenu le chanteur de rails, a pris une forme fantastique.
- Speaker #1
Ouais, mais du coup, pour revenir sur la bête de la tour, moi, déjà, je suis content que tu me l'aies expliqué, parce que je n'avais pas du tout vu cette notion un peu philosophique sur le monstre. Et c'est un film qui a été fait pour le Nikon Festival. C'est ça. C'est qui qui a eu l'idée de l'envoyer là-bas ?
- Speaker #0
Alors, en gros, moi, quand je suis sorti de... De la FEMIS, il faut savoir que ça faisait trois ans que je n'avais rien réalisé. Dans le sens où j'avais fait un an de FEMIS, d'écriture de séries, purement scénario, un an chez Itinerre Productions, donc dans le développement, et un an à 3IS, ma dernière année, en formation scénario. Donc je n'avais pas réalisé depuis trois ans. Je me suis dit, je veux un retour. Parce que là, ok, je mets un pied dans la série, mais je ne veux pas perdre un pied dans le cinéma. J'ai vraiment envie de réaliser. Et je me suis dit, j'ai envie de commencer déjà sur un 2 minutes 20. Voilà où j'étais en mode de base, c'est très drôle, mais de base je m'étais dit, un 2 minutes 20, un truc simple, pas de galère, un truc où je peux vraiment m'entraîner et tout. Je terminais avec un film, il y a un monstre, des mecs du GIGN, des habitants en masse. Vraiment, je ne me suis pas facilité la tâche, mais c'est incroyable. Et le film,
- Speaker #1
il a été tourné en combien de temps, comment, où ?
- Speaker #0
Il a été tourné en une journée.
- Speaker #1
Ok. Ouais,
- Speaker #0
ouais, ouais.
- Speaker #1
En une journée ou en une nuit ?
- Speaker #0
En une journée. Ok. Une journée. C'est-à-dire que ce qu'on a fait, c'est que toutes les scènes à l'intérieur ont été tournées la journée et les scènes d'extérieur ont été tournées en fin de journée. Ok. Mais ça a été des mois de préparation. On a tourné début janvier. On avait commencé à préparer le film au mois d'octobre avec Jean-Félix. Et c'était vraiment incroyable de se dire que d'un coup, tu as l'idée d'un film et tu as plein de gens qui arrivent et qui travaillent et qui ramènent en fait leur... leurs univers pour que ça finisse par être complémentaire avec le tien. C'était vraiment super. Il y avait des fois où on faisait des réunions très tard le soir et j'étais en train de les regarder, ils étaient en train de se casser la tête. Parce qu'un jour, j'ai décidé qu'il allait y avoir une fille qui rencontre un monstre en haut d'une tour HLM. J'étais en mode mais why ? Mais en même temps, c'est très beau et c'est incroyable. Et tu te retrouves vraiment à être juste... Comme au centre de loisirs, genre juste un groupe d'enfants qui s'amuse à faire une tour de Kapla. Enfin, c'était un peu ça. Et donc tout ça jusqu'en janvier, début janvier, où là on tourne le film en une journée. J'étais mort à la fin. Avec une super équipe. Une super équipe qui a rendu le truc vraiment faisable, agréable. J'étais vraiment très content de cette expérience qui m'a encore plus confirmé que je voulais continuer sur cette voie-là.
- Speaker #1
Et donc La Bête de la Tour, c'est un film que vous avez tourné... dans la banlieue ?
- Speaker #0
Alors, de base, on voulait le tourner à Frennes, chez moi. Mais on a eu des petits soucis, etc. Et comme on voulait tourner en une journée, il ne nous fallait pas plusieurs décors. Donc on a fini par le tourner à Montreuil, dans une tour, en fait, qui était une ancienne tour où il y avait des bureaux, mais qui est complètement... c'est à Croix de Ausha qui est complètement abandonné mais qui a été reprise par des différents groupes artistiques. Donc voilà on a vraiment une grande tour où il y a plein d'étages vides et donc on s'est dit bah on va totalement le faire là et donc ça nous a donné la place. aussi pour la déco de s'amuser. On a pu ramener plein de trucs, foutre vraiment la pagaille pour vraiment faire croire qu'il y a un monstre qui est passé. Donc on avait ça en haut et en bas de la tour, c'est là qu'on a tourné les scènes de l'extérieur. Et pour le plan, le premier plan du film, on est parti juste à côté. Là, c'est une vraie tour d'habitation pour prendre le plan d'extérieur.
- Speaker #1
Le plan,
- Speaker #0
le premier plan.
- Speaker #1
Et c'est quoi la place de la banlieue dans ton coeur ? Merci.
- Speaker #0
et dans ton cinéma bah moi c'est vrai que je suis un vrai amoureux Plus précisément de l'Île-de-France. Vraiment, je me sens bien en Île-de-France. Et comme je te disais, ma famille, aussi de par ma mère, etc., leur parcours, ils racontent cette histoire. Le fait qu'ils soient arrivés dans les années 70. Et c'est vrai que moi, c'est là où j'ai grandi, mais dans toute sa diversité. C'est-à-dire des pavillons, aux cités. Tout ce paysage-là de la banlieue, de toutes ces villes, qui sont un peu des petits villages, comme on dit, il y a vraiment cet esprit-là. Moi, c'est vrai que c'est là où j'ai grandi, donc c'est forcément très vite, c'est devenu mon décor de cinéma, en fait. C'est devenu mon décor de cinéma, et j'aime beaucoup les récits qui y existent. Et je trouve qu'il y a un vrai territoire de fiction à réinventer, et c'est ce que moi, j'essaye de faire en ramenant... Il y a tout un truc du cinéma de banlieue, comme on dit, qui est passé par plusieurs phases. Moi, je dis toujours qu'au début, il y avait juste un manque de représentation dans la banlieue, etc. Des différentes histoires et tout, il y avait un vrai manque de représentation. Ensuite, il y a eu un moment donné où pas mal de personnes issues de la diversité ont pu un peu gravir les échelons, pouvoir réaliser des films. Donc là, il y avait un véritable besoin d'être réaliste. d'être proche de la réalité.
- Speaker #1
Pour montrer un petit peu ce qui se passe.
- Speaker #0
C'est ça, parce qu'il n'y avait rien, en fait. Tellement rien n'existait ou existait très mal, là, il fallait aller au cœur de l'authenticité, vraiment d'être hyper réaliste. Et aujourd'hui, j'ai l'impression qu'il y a une sorte de nouvelle génération qui, maintenant, se repose sur ça et tente des nouveaux mélanges. On a des films comme Vermin, par exemple, et c'est hyper encourageant. Ou même des films comme Gagarine, qui frôlent un peu avec la SF d'une manière très onirique. Mais on sent qu'il y a quelque chose... une place pour que ce territoire là soit réinventé et moi c'est vrai que c'est quelque chose qui m'intéresse vachement les heures de way en fait j'ai une attache énormément et je trouve que la banlieue d'une certaine manière surtout l'île de france heureux représente très bien l'entre-deux dans lequel je suis.
- Speaker #1
C'est ce qu'on voit dans la séquence de Beaugest, qui est l'émission cinéma le dimanche sur France 2, dans laquelle, avec vos amis, l'équipe de France 2 est venue directement là où vous vous inspirez. Et on voit vraiment que c'est quelque chose qui vous inspire, qui vous touche, c'est l'origine de pas mal d'idées, j'ai l'impression.
- Speaker #0
C'est ça, exactement, parce qu'il y a ce truc vraiment déjà de de l'île de France et de la banlieue comme sorte d'endroit où convergent mille et une histoires, même à la fois issues du continent africain, c'est à dire que c'est à travers les différentes familles immigrées etc. C'est à dire que on a plein de familles mais vecteurs d'histoires incroyables et en même temps il y a ce côté comme je dis très différent en vérité de Paris intra-muros c'est à dire qu'il y a quelque chose où tout le monde se connaît, tout le monde se connaît, il y a une vraie... où et du coup un truc de fidélité à la ville parce que vraiment oui c'est ça où tu vas à la salle de sport tu croises tout ce que tu avais quitté au lycée tu parles dans la rue tu parles tout le monde alors il y en a qui ont fui ça il y en a qui ont clairement moi au contraire j'adore moi je suis très attaché à ces endroits de mes souvenirs d'adolescence etc et où vraiment des histoires des mythes limite même de légendes ont marqué les murs de certaines villes et Et je trouve que c'est un... Parce que comme c'est des endroits, on va dire, la banlieue de manière générale, au cœur de plein de crispations, en même temps plein de... En fait, de ces problèmes-là naissent énormément de poésie et de beauté et de vie. En tant que scénariste, c'est un vrai plaisir de fiction.
- Speaker #1
Oui, parce que quand tu le montres de la bonne manière, c'est un peu l'histoire de Baudelaire, c'est rendre le lait beau, quoi.
- Speaker #0
Ce que j'allais dire, c'est que pour moi, il faut pas la représenter sans ses défauts et la représenter sans ses qualités. C'est à dire qu'il faut pas faire un portrait noir, il faut pas faire un portrait édulcoré. Et moi je suis vraiment dans cette démarche là, notamment avec la série que je développe, que j'ai développée à la FEMIS et qui est en développement chez Itinér Productions, qui s'appelle « Ça vient d'où ? » , qui parle en fait des rixes entre bandes rivales entre jeunes en banlieue parisienne Parce que c'est un phénomène qui a un peu rythmé mes années lycée et qui a traversé plusieurs générations en Ile-de-France, soit celle de mes oncles, celle de mon grand frère, la mienne, celle de mon petit frère. Et c'est vrai qu'au niveau des médias, ça a explosé ces dernières années, c'est-à-dire que maintenant ça devient un vrai sujet, parce que c'est filmé comparé à avant et on se pose beaucoup de questions. beaucoup de questions aujourd'hui, encore aujourd'hui, de la violence juvénile. Moi, celle que je connais, c'est celle-là. C'est celle d'Éric, c'est des règlements de comptes, de tu viens pas du même quartier, tu viens pas de la même ville, et tout. J'en ai été témoin, et à un moment donné, j'avais besoin de me l'expliquer. et je savais tout de suite qu'il y avait un vrai territoire de fiction. Parce que j'ai vu qu'il y avait beaucoup d'inspiration de mythes. Il y avait quelque chose de très mythique. C'est-à-dire que se reproduisait dans les rixes ce que tu peux lire dans La Guerre de Troie. Ces questions d'honneur, de vouloir être quelqu'un, de laisser son empreinte. C'est vrai que La Guerre des Trois, ça reste deux mecs qui s'embrouillent pour une meuf à la base et qui décident de convoquer tout le monde pour se battre pour ça, etc. et il y avait... en même temps des vrais codes de films de guerre, c'est-à-dire qu'il y a une vraie stratégie de quai tapant, de meneur, de stratégie, etc. Et en même temps, il y avait de la tragédie, parce que généralement, ça se finit assez mal. Et donc, moi, je me suis dit, il y a un vrai espace de fiction, à la fois pour parler de quelque chose d'aujourd'hui, et d'espérer utiliser la série pour pouvoir apporter des réponses qu'on n'a pas dans le réel. c'est que principalement sur les plateaux télé, c'était énormément de questions, très peu de réponses. Et donc, j'ai fait une vraie recherche documentaire avec des sociologues, des profs, des enseignants, etc., avec une série qui part des ados pour aller jusqu'aux adultes et de raconter vraiment à l'échelle de deux villes et demie comment les RICS viennent, comment les RICS, en fait, incarnent une violence, à la fois la violence d'un système et à la fois une... violence juvénile qui sert en fait à pallier à une mort sociale, une peur d'invisibilité et donc je trouvais ça hyper intéressant et donc là c'était vraiment ce que je disais c'est que ne pas représenter la banlieue que par ses défauts et que par une sorte de réalité édulcorée, c'était là de se dire ok il y a une violence mais si je veux représenter cette violence j'ai envie de l'expliquer Et donc... aller vraiment au cœur du sujet. Et se dire... Donc se dire avec des sociologues, pourquoi cette violence existe principalement qu'à l'époque du lycée, dans l'adolescence, pourquoi qu'en banlieue, comment ça se fait que le système, comme un vrai enquêteur en fait, comment le système scolaire, ses défaillances, est lié au RICS, que ça se passe essentiellement même parfois dans l'enceinte du lycée. Il y avait plein de choses à tirer sur en fait les RICS vont raconter quelque chose de nos en France. Et donc je trouvais que c'était là où t'évites une sorte d'écueil, de piège. Et donc comme je disais au début, avec une volonté là cette fois-ci de faire référence à tous les films de bandes américains, d'aller du côté de West Side Story, de la tragédie de Romeo et Juliette, même un peu des inspirations Bonnie & Clyde parce qu'au cœur de tout ça il y a une sorte d'histoire d'amour impossible, tragique et avec vraiment un côté pop stylisé, pas naturaliste, pas quasi documentaire, loin de là. C'est vraiment quelque chose que tu peux trouver du côté de Euphoria. Vraiment de se dire je vais vous parler vraiment, c'est une sorte de épopée contemporaine, c'est vraiment ça. C'est l'Iliade, mais aujourd'hui, en 2025, avec des adolescents.
- Speaker #1
Et du coup, cette série-là, elle est en écriture, en production ?
- Speaker #0
Elle est en développement, donc en écriture. Toujours en écriture, toujours. On est vraiment au début. Il n'y a pas encore de date de prévu. Là, vraiment, on est vraiment au tout début. C'est très embryonnaire. J'ai développé ça à la FEMIS et là on entre vraiment dans le cœur de la collaboration avec les producteurs pour en parler à un diffuseur par la suite etc.
- Speaker #1
Donc c'est tes projets sur lesquels tu taffes en ce moment du coup ?
- Speaker #0
C'est ça exactement.
- Speaker #1
Ça fait plus d'une heure qu'on part, est-ce qu'on peut te suivre quelque part pour suivre ton travail ?
- Speaker #0
Instagram, c'est là que je donne les updates et tout ça. Donc c'est Ali-ChRF.
- Speaker #1
et ben voilà On va suivre Ali Charef. Et puis, merci aux auditeurs d'avoir écouté cet épisode. Merci, Ali, d'avoir été mon deuxième invité avec grand plaisir pour Phase B. Merci beaucoup d'avoir écouté cet épisode de Phase B que vous pouvez retrouver sur toutes les plateformes de podcast et sur YouTube en version vidéo. Et on se dit au mois prochain avec un nouveau numéro de Phase B. À bientôt.