- Speaker #0
Flamme des années 80. Le podcast qui allume la femme. Bonjour, on a la chance de recevoir aujourd'hui Vincent Robert qui va nous parler de son métier et surtout aussi d'adoption.
- Speaker #1
Bonsoir.
- Speaker #0
On est le soir la journée, on peut foutre et continuer.
- Speaker #1
Bonjour, bonsoir.
- Speaker #0
C'est très ouvert.
- Speaker #1
C'est ça.
- Speaker #0
Est-ce que tu veux te présenter Vincent ?
- Speaker #1
Oui bien sûr, je m'appelle Vincent Robert, je suis scénariste, réalisateur. Et surtout, papa d'un petit grand garçon, maintenant de 16 ans.
- Speaker #0
Oui, il a grandi. Et donc, du coup, tu as adopté cet enfant ?
- Speaker #1
Oui, avec mon mari Marc, on a adopté. En fait, on a été un des tout premiers couples homos en France à pouvoir adopter un pupille de l'État français, après la loi Taubira. Donc, en fait, on a reçu un moment magique, un coup de fil en 19... En 19... Marc a exagéré. En 2017, quand même. En 2017, on a reçu un coup de fil comme quoi les services du Pas-de-Calais avaient éventuellement un petit garçon à nous présenter. On ne savait rien sur le coup de fil en fait. On savait juste qu'il avait à peine 8 ans et on n'avait même pas son prénom. Mais voilà, ça a été le début de cette formidable aventure de notre paternité à Marc et à moi.
- Speaker #0
Oui, franchement, c'est une... parce que moi je la connais parce qu'en fait on ne se connaît pas. En fait, du coup, on ne se connaît pas personnellement. Ce n'est pas moi qui ai eu l'idée de l'inviter parce que je trouvais son histoire incroyable. Parce qu'il y a un livre.
- Speaker #1
Oui, c'est ça, en fait. Mais en fait, le livre, il est parti de... Nous, on s'est mariés en 2013. La loi, elle date d'avril 2013, promulguée en mai, je crois. Et nous, on s'est mariés en septembre. On s'est mariés pour pouvoir déposer un projet d'adoption. Et le soir de notre mariage, j'ai commencé à tenir un journal. Et j'ai mis tous les jours, je mettais la tente un petit peu comme à Louis XVI, sans me faire guillotiner, mais aujourd'hui rien, demain rien, parce qu'en fait l'attente est toujours très longue. Alors pour tout le process agrément en soi ça dure une année à peu près, donc ça on est occupé parce qu'il y a plein de choses à faire, il y a des démarches à faire, il y a des rendez-vous avec des assistantes sociales, avec des références sociaux, en fait voilà, ils viennent à la maison, on va chez eux, on passe devant une psy, enfin voilà.
- Speaker #0
Donc ça, ça dure à peu près une année ?
- Speaker #1
Ça dure une année pour obtenir l'agrément.
- Speaker #0
Est-ce qu'il y a des limites d'âge, par exemple, pour avoir un agrément ?
- Speaker #1
Officiellement, je crois qu'il ne faudrait pas avoir plus de 50 ans, mais je ne sais rien. Je crois que la loi ne l'impose pas, mais bon, il y a peut-être... En fait, c'est pour ça, et c'est intéressant que tu évoques cette histoire d'âge, parce que moi, au départ, je m'étais projeté dans une paternité avec un bébé. Et donc j'ai eu un... que Marc, non, pas spécialement, parce que Marc, il est un tout. un tout petit peu plus âgé que moi, 4 ans, rien, mais lui, il s'était vraiment projeté avec un projet pour une adoption tardive, c'est-à-dire qu'un enfant qui avait entre 3 et 8 ans, et moi, j'étais avec le bébé, donc il a fallu que je fasse ce qu'on appelle le deuil de l'enfant porté, mais qui est aussi à faire, parce que tout à l'heure, j'espère qu'on parlera et que je pourrai vraiment parler de l'adoption tardive, parce que le deuil de l'enfant porté peut aussi être fait chez un couple hétéro. et donc moi il a fallu que je fasse ce deuil là et puis une fois que le deuil a été fait l'idée c'était d'accueillir un enfant donc tout ça c'est quand même un processus qui prend un an et puis une fois qu'on a notre agrément c'est super, en plus on était dans les tout premiers donc c'était et puis voilà ça n'a pas été si vidant que ça parce que la psy qui était en charge d'étudier notre dossier ne croyait pas à l'adoption parentale donc au lieu d'avoir l'adoption parentale
- Speaker #0
de l'adoption parentale d'homosexuels.
- Speaker #1
Homoparentale. Elle ne croyait pas à l'adoption homoparentale. Elle nous l'a dit clairement. Et normalement, un couple hétéro fait deux heures de psy. Mais on a eu 24 heures. 24 heures ? 24 heures. En plusieurs fois, j'imagine. En plusieurs fois, mais c'était tous les deux jours et c'était 3-4 heures tous les deux jours. Elle a fait vraiment un training, comme vous avez dit. On n'a pas lâché. Elle nous a... poser des questions absolument odieuses, infâmes, à vomir. Mais on a tenu, on a vraiment tenu, on a gardé notre sang-froid. Et à la fin d'ailleurs, elle nous l'a dit, elle nous a dit « Non mais je crois que vous êtes bien plus près que n'importe quel couple, vu que je vous ai testé dans tous les sens. »
- Speaker #0
J'allais le dire, si tous les gens qui voudraient faire un enfant passaient 24 heures chez un thérapeute, ce serait quand même intéressant. Le monde irait peut-être mieux.
- Speaker #1
Ceci étant... Moi, ce n'était pas le fait qu'on passe 24 heures comme ça. Je pense que c'est important, quand on donne un incrément à des parents, de s'assurer qu'ils vont pouvoir résister à cette aventure qui va arriver. Pour ces enfants, c'est une deuxième chance s'il n'y en aura pas trois. Et je pense qu'on ne peut pas se permettre de se tromper. Donc, moi, on était plutôt conscients de ça. Non, je te dis, ça a été ces attaques perfides. Une attaque que je n'ai pas vu ni moi par exemple, vous préférez un petit garçon ou une petite fille, sincèrement on lui répond, peu importe, il n'y a pas de... Ah bon un petit garçon, vous n'avez pas peur qu'on vous accuse d'être touchant, qu'on va lui faire prendre le bain ? Donc d'un seul coup il y avait ce mélange entre... Et ça c'est à vomir, c'est-à-dire que quand tu dis ça, tu as envie de retourner le bureau, tu as envie de la claquer, tu as envie de faire tout ça, tu ne fais rien, tu ne bouges pas, tu restes zen, tu réponds, tu expliques la différence entre pédophile et homosexuel, et calmement... Bref, tout ça pour dire que ça prend un an. Et donc pendant ces premières années, de 2013 à 2014, le temps ne l'a pas vu passer, puisqu'on était dans ces démarches-là. Sauf qu'une fois qu'on a l'agrément, c'est super, et passé l'instant où on est content de l'avoir, là c'est l'attente. On attend un coup de fil. Il n'y a plus rien à faire, il n'y a plus de démarche à faire, il faut attendre. Et ça c'est terrible. Ça c'est terrible parce qu'on est partis dans une dynamique pendant une année.
- Speaker #0
Pour avoir quelque chose ?
- Speaker #1
Pour avoir cet agrément. Et puis, du coup, on a beaucoup réfléchi. Le projet s'est parfaitement affiné. On sait précisément ce qu'on veut et on sait surtout qu'on le veut. Et là, il faut attendre.
- Speaker #0
Et là, vous étiez sûr d'attendre un enfant entre 3 et 8 ans ?
- Speaker #1
Oui. En fait, on nous demande précisément ce qu'ils appellent « quel est votre projet ? » . Et nous, notre projet, maintenant, on était calés, j'étais calé, on était calé avec Marc. Mais tout ça, c'était très bien. Il fallait faire cette démarche-là et ces discussions tous les deux. Et donc, on avait fait... On avait un agrément, ce qu'ils appellent pour une fratrie de cœur ou de sang, d'enfants de 3 à 8 ans. Donc, on pouvait avoir en fait un enfant ou deux enfants, frères ou sœurs ou copains de foyer. Mais voilà, le projet...
- Speaker #0
C'est un projet qui ne peut s'ouvrir pas forcément à un seul enfant, ça aurait pu être deux.
- Speaker #1
Oui, ça aurait pu. Alors, en théorie, l'agrément était comme ça.
- Speaker #0
Et l'agrément, ça a une durée de vie ? Oui.
- Speaker #1
Alors, c'est une durée de vie, c'est pour 4 ans, 5 ans, mais on doit le renouveler si on n'a pas de coup de fil. D'accord, il faut le renouveler régulièrement.
- Speaker #0
Vous avez attendu combien de temps ?
- Speaker #1
Alors, nous, on a eu de la chance, en fait. On a eu notre agrément en 2014, et le coup de fil est arrivé 3 ans après. Eh bien,
- Speaker #0
ça, c'est long, quand même, 3 ans.
- Speaker #1
Non, mais c'est rien. Il y en a 4 ans de 10 ans, 8 ans, 9 ans, 10 ans. C'est vrai ? Oui, oui. Donc, 3 ans, c'est rien maintenant. Et je te dis comme ça que c'est rien. Attendre trois ans, c'est terriblement long.
- Speaker #0
En plus, le coup de fil, je ne sais pas si je peux spoiler un peu l'histoire du livre, mais le coup de fil n'est pas juste « ça y est, on a un enfant, c'est plus compliqué que ça » .
- Speaker #1
Ça a été beaucoup plus compliqué que ça. En fait, le coup de fil, on peut être un petit garçon de 7 ans et demi, 8 ans à vous présenter. Par contre, est-ce que vous acceptez que ça se passe dans le cadre du parrainage ? Non. Je dois vraiment t'avouer que c'est moi qui reçois le coup de fil. Je suis complètement...
- Speaker #0
Hyper content déjà que le téléphone sonne.
- Speaker #1
Je suis au 15e, je suis où tu veux, je suis dans les nuages. Et je dis oui au parrainage sans absolument savoir ce que c'est que le parrainage.
- Speaker #0
Qu'est-ce que c'est que ce parrainage ?
- Speaker #1
Et alors on le découvre une semaine après quand on est convoqué. Donc si tu nous dis OK, mais il va falloir passer entre guillemets un grand oral, c'est-à-dire avec toute l'équipe sociale. qui s'occupait de notre enfant, qui n'était pas encore le nôtre. Et parce qu'en fait, il devait s'assurer que nos profils correspondaient aux profils de l'enfant. Et donc, tant qu'on n'avait pas passé ce grand oral, on n'avait aucune indication sur l'enfant. Pas son prénom, on n'avait rien. Parce que si ça ne correspondait pas, ça s'arrêtait là. Donc, une semaine après, on est donc invoqué pour ce grand oral à Arras. Et là, en fait, on nous pose des questions, nos profils correspondent, mais là, la citante sociale et sa référente nous expliquent qu'ils pensent que le petit garçon qu'ils envisagent de nous présenter, qui a un syndrome abandonnique de la mère puissant, sera incapable de recréer un lien familial, qu'il est donc psychologiquement pas adoptable. Donc on t'annonce tout ça, c'est-à-dire que tu ne comprends pas bien, parce que tu as un agrément pour pouvoir faire une adoption. On m'appelle et surtout pourquoi on me donne cet espoir, pourquoi on commence à me parler de l'enfant alors qu'on me dit qu'il veut... Et on lui dit, c'est pour ça qu'on vous a proposé le parrainage. Et là, je dis, oui, alors d'ailleurs, à ce sujet-là, c'est quoi le parrainage ? Alors, le parrainage, c'est un parrainage, c'est-à-dire qu'en fait, de temps en temps, des week-ends de temps en temps, vous allez recevoir l'enfant chez vous. Et comme ça, de temps en temps, ça va pouvoir l'apaiser d'aller... En fait, en clair, il aura des tontons à 500 kilomètres de là. Puis de temps en temps, il ira passer un week-end chez vous.
- Speaker #0
Est-ce que tu penses que c'est parce que c'est un couple homosexuel qu'ils vous ont proposé le parrainage ?
- Speaker #1
Franchement, je ne pense pas. D'ailleurs, ça ne nous a jamais fleuré l'esprit sur le coup. Parce que dans l'équipe, il y avait... Je crois que je peux dire son nom parce que pour nous, c'est un ange. C'était M. Lieber. D'ailleurs, Lieber, c'est l'anagramme de liberté. Je trouve ça absolument fou. Et en fait, on a tout de suite compris qu'il y avait une vraie bienveillance. Non, c'était vraiment cette psy qui était intimement convaincue. Pascal, parce que c'était le prénom de l'enfant, de notre enfant, n'était pas psychologiquement adoptable. Donc ça, ça a été une énorme douche froide. Et du coup, on nous a dit, et c'est là où ça devient encore plus cruel, c'est que si on accepte de recevoir Pascal dans ce cadre du parrainage, on abandonne notre agrément. C'est-à-dire que, où on rentre en relation de parrainage avec Pascal ? Avec le risque. puisqu'Ellen était intimement convaincue que la greffe ne prendrait jamais, et donc qu'il ne pourrait jamais y avoir de lien entre nous, de lien familial, et donc d'être des tontons et des parrains à l'autre bout de la France, où on prenait ce risque-là, et du coup on laissait tomber notre agrément, parce qu'il était hors de question qu'on reçoive en adoption un autre enfant, puisqu'on était déjà parrain, ou alors on refusait l'opportunité qui nous était donnée.
- Speaker #0
Et là, vous auriez dû continuer à attendre ?
- Speaker #1
On aurait dû continuer à attendre. Et sincèrement, en 2017, il y avait quand même encore un vrai plafond de verre. Et puis nous, on avait un petit peu plus de 40 ans et on s'est dit, c'est là maintenant que j'aime. Et puis, moi, je suis un petit peu plus mystique que Marc. On a deux caractères bien différents. Marc est très pragmatique. Et en fait, cet enfant, quand ils nous ont dit, voilà, il s'appelle Pascal. En fait, je l'ai vu. Mais comme je t'expliquais tout à l'heure, j'avais commencé un journal le jour de notre mariage. Et le soir de notre mariage, quand j'ai commencé la première page du journal, je parlais à cet enfant qui nous attendait. Et c'était lui, en fait. Je savais que c'était lui.
- Speaker #0
Ça me met les frissons.
- Speaker #1
Et donc, quand on rentre, parce qu'elle me dit... Marc, pardon. Alors, ça y est. Depuis huit ans, je confonds le prénom, maintenant, entre mon fils et mon mari. Quand on rentre, Marc me dit, c'est une arnaque leur truc de parrainage, parce qu'on s'est battu pour avoir l'agrément, on s'est battu pour avoir le droit déjà d'adopter, on se bat pour l'agrément, on a un agrément, et là on nous dit des parrains, ça va pas. Et je lui dis, on va arrêter d'être pragmatique, on va arrêter d'être carré, on va arrêter d'être posé, en fait on va se faire confiance et on va faire confiance à la vie. Donc on va y aller. Donc, il m'a répondu, on n'est plus pragmatique, mais mystique, c'est ça. Je lui ai dit, voilà, bon, écoute, je te suis. En fait, on dit souvent que dans une adoption, dans un couple, les deux, bien sûr, veulent un enfant, mais il y a toujours un meneur et un suiveur. C'est-à-dire qu'il y a toujours le rêveur, celui qui croit, et puis l'autre qui suit, il y croit, mais il est plutôt dans la, mon Dieu, si ça n'arrive pas. Et c'était ça chez nous. C'est-à-dire que moi, j'étais bien en tête. J'y croyais, voilà, là, je lui dis, on y croit, je l'ai vu, je sais que c'est lui, voilà.
- Speaker #0
C'est aussi le pouvoir de l'intention et de vraiment le voir tellement que ça va comme s'il était déjà là.
- Speaker #1
Et puis derrière, il y avait Marc qui n'arrêtait pas. On en parle beaucoup maintenant, qui disait, mais si ça ne marche pas, je le ramasse à la petite cuillère. C'est-à-dire que comment je vais l'aider à surmonter ça ? Donc bref, on est parti dans cette aventure. Et puis là, c'est tout un livre. Et puis maintenant, une adaptation pour un téléfilm parce que... Ça a été un vrai combat contre cette psychologue qui considérait que Pascal ne pouvait pas être adoptable. Et donc du coup, il a fallu lui démontrer que ce n'était pas le cas. Parce que ce qui s'est passé, c'est que... Alors déjà, à cet entretien, à ce grand oral, on nous donne juste son prénom. Et on n'a pas de photo. Parce qu'on nous dit maintenant, comme il a 7 ans et demi, 8 ans, et que c'est dans le cadre d'une adoption tardive, il a son mot à dire. Ce qui est tout à fait normal.
- Speaker #0
Ça, c'est intéressant de pouvoir avoir son mot à dire. Je trouve ça bien.
- Speaker #1
Ah oui, par contre, c'est fondamental. Sauf que c'est aussi son mot à dire, c'est ce que tu veux, éventuellement, aller dans une famille avec deux hommes. Ce qui n'était pas du tout évident. Donc là, on nous dit, vous allez faire un album photo. Vous allez vous présenter. Et on va avoir un entretien avec l'enfant. On va lui passer l'album. C'est lui qui dira s'il veut vous rencontrer ou pas. Pour un week-end d'abord. Dans un lieu neutre, dans un gîte, pas loin du foyer où il est, où il réside, où il habite. Et puis on verra ce que ça donne. Alors on fait l'album, on se prend en photo, on repose les sens, les chiens, la maison. Et puis comme on m'a dit... Vous avez tout donné dans l'album. J'ai tout donné, on a tout donné. On a écrit avec les feutres à paillettes, on a mis des trucs, j'ai mis des gommettes en volume. Je me suis dit, je ne peux pas parler, donc il faut que cet album parle pour lui.
- Speaker #0
Bien sûr.
- Speaker #1
Et puis on a attendu, donc on savait que c'était un fameux mercredi, où il l'emmenait à McDo pour lui parler du projet. Et donc à partir de 14h, on a attendu le coup de fil. Et puis 14h, rien, 15h, rien, 16h, rien, 17h, rien. Donc là, on se dit, bon, ok, c'est foutu. En fait, il ne veut pas deux hommes. Ce n'est pas la famille qu'il avait projetée. Et puis, en fait, à 18h, on a juste un mail. Parce que M. Lieber, qui se chargeait d'un enfant, a eu une urgence sociale avec un autre enfant. Donc, il n'a pas pu nous appeler. Et il nous a juste envoyé un mail d'où il était, avec juste une pièce jointe. Il n'y avait rien. Et donc, on reçoit un mail. On se dit, mais c'est quoi ? C'est vide. Et une pièce jointe, et on clique sur la pièce jointe, et là, sur l'écran de l'ordinateur, la photo de Pascal apparaît, comme par miracle. Et on l'a trouvé tellement beau, et c'était magique. Donc on a dit, donc il a dit oui, il avait dit oui, effectivement. Et puis, on a été pour ce premier week-end dans ce gîte, au bord de la mer, au bord de la mer. Et puis, 30 secondes après qu'on soit rencontrés tous les trois, C'était fait.
- Speaker #0
Oui,
- Speaker #1
vous avez raison. C'était fait. Mais d'ailleurs, il est mignon aujourd'hui, parce qu'il nous dit, je vous ai aimé tout de suite. Et donc, nous, pour nous, voilà, c'était notre enfant. Enfin, je veux dire, c'était immédiat. Puis quand il a fallu le ramener au foyer le dimanche soir, parce qu'on n'était que dans le statut du parrainage, on a commencé à dire, mais il s'est passé quelque chose. Enfin, je veux dire, il y a vraiment un truc. Et là, la psy nous a dit, en fait, vous êtes tellement en mal d'enfant que vous avez se projeté sur lui, vous ne serez n'importe quel autre, c'était pareil. Et ça, c'était cruel parce que ce n'était pas parce que c'était n'importe quel gamin, c'était parce que c'était lui, vraiment. Et là, elle a dit, oh là là, ça va beaucoup trop vite, donc vous n'allez pas le revoir avant deux mois. Et c'était impossible. Donc on l'a laissé au foyer, il a hurlé, ne me laissez pas là. ne m'aurait abandonné pas. C'était absolument cruel.
- Speaker #0
On ne va pas raconter tout le livre. Non, tu as raison. Surtout qu'il regarde aussi. Moi qui connais l'histoire, je suis quand même absorbée. On vous le conseille. D'ailleurs, on n'a pas donné le titre.
- Speaker #1
C'est Lilo de Pan, récit d'une adoption non parentale. Tu as raison, mais moi je peux en parler de mon histoire.
- Speaker #0
Moi je peux l'écouter pendant des heures, mais ce n'est pas du tout que j'ai envie de le couper, mais c'est que j'ai envie que les gens le lisent. C'est tellement beau de l'entendre dire. Et en même temps, ton écriture est tellement riche que quand on lit, moi, j'ai déjà eu toutes les images, j'ai déjà tout vu. Et vraiment, je trouve que ça va vraiment droit au cœur, en fait. Et souvent, les gens pensent qu'ils savent mieux parce qu'ils vont penser avec leur tête. Mais en fait, comme tu le dis très justement, c'est beau de dire, tu l'as ressenti, c'était lui, tu le sais depuis le début, tu sais que ça va arriver.
- Speaker #1
Il n'y avait rien de... Dans cette histoire et dans cette aventure, il n'y a rien eu de rationnel. Mais c'est normal, l'amour n'est pas rationnel. Et puis un enfant... L'amour filial n'est pas rationnel, un enfant n'est pas rationnel. Donc il n'y avait rien de rationnel.
- Speaker #0
Parce que quand on voit, on a fait beaucoup d'émissions aussi sur la maternité que je vous invite à aller regarder, enfin écouter plutôt. Mais c'est vrai que les bons gynécologues vont dire même de faire un enfant, c'est la seule chose qu'on ne peut pas l'expliquer. Pourquoi est-ce que des parents ne peuvent pas en faire ? pourquoi est-ce que finalement tu vas tomber enceinte alors que ce n'est pas du tout prévu, à un âge qui n'est pas prévu, dans des circonstances qui ne le sont pas, ou essayer tout le temps et ne jamais y arriver. Essayer dix ans avec son mari et puis finalement le quitter et puis réussir avec le premier qui passe. Il y a une histoire. Et c'est la seule chose qu'on ne peut pas contrôler en fait.
- Speaker #1
C'est ça. Et c'est exactement ça. Et nous, notre aventure de parentalité, c'est exactement ça. Et puis après, et tu as raison, dévoiler l'histoire en elle-même, ça m'intéresse de parler de l'adoption tardive.
- Speaker #0
Oui, parce que dans notre imaginaire, j'ai fait une émission, on a fait une autre émission sur l'adoption, mais elle a adopté au Chili. Donc, on n'a pas fait d'émission vraiment sur une adoption en France aujourd'hui. Et c'est vrai que dans l'inconscient collectif, on se dit mais il y a plein d'enfants qui sont malheureux. Pourquoi est-ce qu'on ne peut pas les adopter ? C'est très long, c'est compliqué et tardif bébé.
- Speaker #1
En fait, parce qu'il y a un premier blocage et ce n'est pas du tout un... Ce n'est pas du tout une critique ou un reproche que je fais, mais le premier blocage pour l'adoption tardive, ça va être ce que je t'expliquais tout à l'heure, l'impossibilité pour le couple de faire le deuil de l'enfant porté. Le deuil de l'enfant porté, c'est-à-dire le bébé... Changer les couches... Ce n'est pas facile à faire, donc il y en a qui n'y arrivent pas. Donc ces couples-là attendent un bébé. Et heureusement, beaucoup moins d'accouchements sous X. Il y a beaucoup moins de bébés abandonnés à la naissance. Dieu merci, il y en a encore, mais beaucoup moins. Donc, ces parents qui attendent un bébé, en France, c'est très long, voire quasiment impossible, parce qu'il y a beaucoup plus de parents qui souhaiteraient adopter que d'enfants adoptables. Donc c'est pour ça que ces couples vont se tourner vers l'étranger, souvent. Sauf qu'en plus, l'étranger, les règles changent, les règles avec les pays changent. Du coup, c'est pour ça que ça devient un vrai parcours de combattant et qu'on a en tête, dans l'inconscient collectif, je ne sais pas quoi, on sait que le parcours de l'adoption est un parcours, on n'est pas sûr d'aller au bout, et partout le parcours du combattant. Maintenant, si on arrive à regarder un peu les choses différemment, c'est-à-dire... à réussir, et je le dis encore, c'est vraiment pas facile à faire, j'en suis la preuve, c'est pas facile à faire, mais quand on arrive à dépasser et à faire ce deuil d'un enfant porté, il y a un ciel qui s'ouvre, c'est-à-dire parce que des enfants adoptables, pupilles en France, entre 3 et 8 ans, déjà on a multiplié les possibilités.
- Speaker #0
J'ai une question qui me brûle depuis le début, mais du coup, je te coupe un petit peu. Ils font quoi les enfants qui ont été adoptés ? On ne peut plus adopter après 8 ans ? Enfin, s'ils ont 9 ans,
- Speaker #1
10 ans ? Non, on peut adopter un enfant jusqu'à 16 ans, 17 ans, sauf qu'après, plus personne n'en veut.
- Speaker #0
C'est horrible, ça ne m'arrête plus.
- Speaker #1
Bien sûr que c'est horrible.
- Speaker #0
Non, mais vraiment,
- Speaker #1
je suis... Mais moi, c'est exactement la même chose. Et c'est pour ça que je me suis permis d'insister sur l'adoption tardive, parce que c'est absolument terrible. C'est-à-dire que ces enfants, et que passer 8 ans... Mais en fait, les parents, et c'est là où j'arrive au deuxième blocage, c'est-à-dire il y a eu ce blocage de l'enfant porté, du deuil de l'enfant porté, et le deuxième blocage va être de se dire, oh là là, mais un enfant qui va arriver à la maison 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10 ou 11 ans, va arriver avec tellement de valises, va arriver avec tellement de traumas, que ça va être absolument l'enfer. Et là, je peux maintenant, puisque j'ai 8 ans d'expérience, et de recul, je peux vraiment et c'est pour ça que je voudrais vraiment venir témoigner là-dessus. On commet une erreur en pensant ça. Pourquoi ? Quand on adopte un bébé, le bébé ne parle pas, ne formule pas et au moment de l'adolescence, le bébé peut venir reprocher aux parents, parce qu'il sera au courant bien sûr qu'il a été adopté, vous m'avez pris où ? Vous m'avez retiré d'où ? En fait, vous m'avez volé où et à qui ? Et ça, ça peut être très compliqué au moment de l'adolescence. Et c'est pour ça, pas dans tous les cas, je ne généralise pas, mais quand il y a des problèmes au niveau de l'adolescence avec des enfants, parce que nous, on a eu des couples hétéros qu'on connaît qui ont adopté des bébés, et à l'adolescence, ça a été vraiment très tendu. Eh bien, en fait, quand on adopte un enfant qui est entre 3 et 8 ans, et même plus, au moment de l'adolescence, il sait. D'où il vient ? Nous, Pascal ne nous a jamais dit vous m'avez retiré d'où ? Vous m'avez empêché de vivre quoi ? Vous m'avez volé à qui ? Il savait, lui, qu'il était en foyer depuis l'âge de 11 mois et qu'à 7 ans et demi, quand on l'a récupéré, qu'il pleurait tous les matins parce qu'il réclamait une famille, il savait d'où il venait. Bien sûr que quand il arrive, c'est tendu, parce qu'il arrive avec ses valises, chargées.
- Speaker #0
Oui, ça, on ne va pas dire le contraire.
- Speaker #1
On va dire le contraire, sauf qu'on a un énorme avantage, il parle. Il a la parole. Nous, on a fait trois ans de thérapie, tous les trois. Une thérapie familiale, tous les trois, toutes les semaines. Il y a été une heure toutes les semaines. Et on a vidé, on a aidé un petit peu à vider ses valises, à le réparer, à le soigner. On a fait tout ça entre 8 ans et 12 ans. Je crois qu'il n'y va plus depuis un an et demi, mais on a fait ce travail-là. Donc, à partir du moment où l'enfant a la parole, qu'il sait d'où il vient, en fait, l'adolescence, après, ça se passe très bien.
- Speaker #0
C'est ce qu'il y a en plein dans l'adolescence.
- Speaker #1
Il a 16 ans. Et franchement, ce n'est pas tout à fait fini, mais ça se passe bien. Donc, ces craintes qu'on a de se dire, mais en fait, l'enfant va arriver avec tellement... de trauma et tellement de valise que ça va être l'enfer, c'est pas vrai. C'est-à-dire que oui, les premiers mois, l'enfant va tester. Il va tester le lien. C'est-à-dire qu'il va tester le lien affectif, surtout quand il a un syndrome abandonnique puissant, comme notre petit Pichoune. Il va venir tester, c'est-à-dire, bon, ok, vous voulez m'aimer, vous voulez être mes parents, mais quoi, vous allez vous barrer, vous allez me réabandonner, ou combien de mois. Donc, ça, si je fais ça, vous m'aimez toujours ? Oui. Ok, alors je vais faire plus fort. Et si je fais ça, vous m'aimez toujours ? Ah oui, vous êtes coriace. Et si je fais ça, vous m'aimez vraiment ? C'est désespérant, vous m'aimez. En fait, c'est ça le processus.
- Speaker #0
Après, c'est ce que des enfants peuvent faire sans avoir été adoptés.
- Speaker #1
C'est ce que je voulais dire. Non, mais tu es entièrement raison. Et du coup, moi j'ai une sœur qui est mariée avec un mec, un couple hétéro. Des enfants, l'adolescence, elle n'a pas plus de problèmes que moi. Ni plus ni moins. Donc voilà, c'est pour ça que je tiens vraiment à donner, à faire passer ce message de l'adoption tardive. Il faut faire le deuil à l'enfant porté, on ne va pas revenir tout ça là-dessus, mais les parents adoptants ou futurs adoptants qui se lanceraient dans une adoption tardive multiplient énormément leur chance d'être parents. Et c'est une chance, c'est tellement beau d'être parent. Donc vraiment, bébé,
- Speaker #0
Oui, parce qu'on est parents pour toute une vie, on n'est pas juste parents pour... On est parents jusqu'à...
- Speaker #1
Maintenant, moi, il y a juste un petit... Il a 16 ans, là, aujourd'hui. Les 8 ans, je ne les ai pas vus passer. Et je dis souvent, on m'a enlevé 8 ans. C'est-à-dire qu'en fait, ouais, mais c'est moi. Et du coup, c'est avec moi-même et ça se soigne, tout va bien.
- Speaker #0
Il a caressé à la maison jusqu'à 28 ans. Ouais,
- Speaker #1
alors, de toute façon, on fait tout pour soigner un Tanguy, d'ailleurs. Il est absolument bien. Moi, je pense qu'il va vouloir partir un jour. Bien sûr, il fera ce qu'il veut. Mais oui, il te manque 8 ans. C'est-à-dire que ça va vite. D'un seul coup, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16. Tu dis, ah non. C'est ça. Il va manquer ce temps où j'aurais aimé avoir tout ce temps-là avec lui. Avant. Mais vraiment, j'incite vraiment les couples hétéros, les couples homos, qui veulent adopter... Tu as... vraiment prendre le temps de réfléchir à cette adoption tardive. Il y a énormément, énormément d'enfants, pupilles de l'État, qui sont dans des foyers. En France, ça regorge les foyers. On est même obligé de faire appel à des associations qui créent des maisons tellement il n'y a plus de place dans certains départements. Il y a tellement d'enfants, tellement d'enfants qui demandent à être aimés que ça vaut le coup d'y réfléchir. Après... Si ce n'est pas son projet de vie, ce n'est pas son projet de vie. Je ne suis pas en train de moraliser les choses. Je dis juste de prendre le temps. Nous, ça ne nous a sauvé qu'une assistante sociale. Nous pointe cette possibilité-là. On y a réfléchi. Et heureusement qu'on l'a fait. Donc, vraiment, l'adoption tardive, que les gens réfléchissent bien à ça. Et ça ne va être que du bonheur. Ça ne va être que du bonheur.
- Speaker #0
Oui, parce que souvent, quand on fait un enfant, on imagine que ça va être que du bonheur, mais il n'y a pas forcément... Même quand on a un enfant, naturellement, ce n'est pas tout le temps rose.
- Speaker #1
Non seulement ce n'est pas tout le temps rose, et puis tu sais, souvent, parce que quand on va dans les assos, c'est qu'on témoigne de ce qu'on a vécu et de ce qu'on a traversé, et du bonheur qu'on vit. C'est surtout ça, le bonheur qu'on vit. Souvent, on a la réflexion de, oui, mais quand il arrive à 7 ou 8 ans... on ne va pas pouvoir le façonner à notre manière. Alors là, je dis, attendez, vous pensez sincèrement que vos parents vous ont rêvé comme vous êtes ? Je ne crois pas. En tout cas, mes parents m'adorent. Mon père est parti, mais ils m'adorent. Mais je ne suis pas sûr du tout qu'ils aient projeté en moi ce que je suis devenu.
- Speaker #0
Moi, je ne suis pas sûre qu'ils aient réussi à me façonner beaucoup.
- Speaker #1
Voilà. Donc, je pense que ce n'est pas... Et en fait, on en revient à quoi ? À ce sujet qui est le lien du sang.
- Speaker #0
Et le lien du cœur. Et le lien du sang, c'est formidable, c'est génial, mais le lien du cœur, c'est tout aussi puissant. C'est vraiment tout aussi puissant.
- Speaker #1
Moi, j'ai même envie de dire, c'est mon progrès, moi aussi, le lien d'âme, c'est des liens d'âme qui font en sorte que, des fois, on a des très bons amis qui sont comme des sœurs et qui ne sont pas forcément de la famille. Et ça peut être exactement la même chose. Le nombre de parents qui ne parlent plus à leurs enfants, mais pas forcément dans l'enfance. Mais après, il y a des liens qui se défendent aussi, qui font en sorte que...
- Speaker #0
Je souris quand tu dis les liens d'âme parce que je me souviens que quand... Je ne vais pas spoiler le bouquin ou le film, mais quand il a fallu justifier que cette rencontre avait eu lieu dans ce premier week-end. Tu justifies comment ? Tu ne peux pas justifier. Et donc, j'ai justifié en disant que nos âmes se sont rencontrées. Nos trois âmes se sont rencontrées. Nos trois âmes s'attendaient et se sont rencontrées. Inutile de dire que cet argument n'est absolument pas passé.
- Speaker #1
Moi, j'aurais trop aimé le recevoir.
- Speaker #0
En tout cas, c'était le mien parce que je n'avais que ça. Parce que c'était ce qui s'était passé. Quand je te dis qu'au bout de 15 secondes, tu sais que c'est lui, et que lui ne te parle pas d'âme, et il te dit « je vous ai aimé tout de suite » , c'est ça, nos âmes. Et on dit avec Marc, on disait tout le temps, c'est un mini-nous. Et même encore aujourd'hui... parce que nos mères ont accueilli Pascal, voilà, t'es ravie d'être grand-mère. Il y a eu ça aussi, il y a eu un contexte...
- Speaker #1
C'est hyper intéressant, justement, dans l'histoire.
- Speaker #0
Il y a un contexte familial qui a fait que ça a vraiment été particulièrement facile.
- Speaker #1
Mais moi, ce que j'aime dans l'histoire, si on se polie l'histoire encore une fois, c'est qu'on voit aussi ce rapport, justement, de vos deux mères respectives, et je trouve que c'est vachement intéressant, avec le lien du sang, et avec... On entrevoit aussi... Comment est-ce que vous avez été élevés ? Les rapports de chacun. Et ça, je trouve que c'est génial d'avoir mis aussi des mères dans l'histoire. Parce que du coup, on se rend compte en fait que tout n'est pas parfait, qu'on cherche une perfection dans l'adoption qui ne peut pas exister. Et que ça va relever des choses qui, dans la vraie vie, enfin dans la vraie vie, ce n'est pas une fausse vie que vous avez vécue, mais dans la vie quand on fait un enfant naturellement, il y a énormément aussi de... Nous, on a fait beaucoup d'émissions sur tout ce qui est transgénérationnel, de tout ce qu'on... de tout ce qu'on porte. Dès qu'on arrive sur Terre, de toute façon, on n'arrive pas sans valise.
- Speaker #0
Mais tu as entièrement raison. Alors, dans l'adaptation du film, j'ai un petit peu concentré tout ça, puisqu'il fallait raconter tout en une heure et demie. Mais oui, on a eu cette chance, en fait, d'être accompagnés. Et pourquoi... Pourquoi ? Alors nous déjà, parce qu'on a perdu nos papas, Marc et moi, et effectivement il y a deux grands-mères, et donc c'est nos deux mères. Mais ce n'était pas anodin tout ça, parce que Pascal avait vraiment un syndrome abandonnique de sa mère puissante. Et en fait ce qui s'est passé, et ce n'est pas dans le film, mais c'est dans le livre, je vais raconter juste ça, parce qu'il y a un soir, ça faisait quelques mois qu'on avait gagné ce combat. et qui pouvaient résider à la maison. Et donc on avait enclenché enfin le processus d'adoption, parce qu'il est d'abord placé en vue d'adoption. Ensuite, il faut passer devant un juge. Le juge va poser la question à l'enfant. Alors, les services sociaux ont fait leur travail, ont donné leur accord, mais ils posent la question à l'enfant. Donc voilà, il faut passer devant ce juge de façon solennelle, etc. Donc avant d'avoir cette délibération du juge qui scelle l'adoption, parce que c'est judiciaire, on voit un soir, en deuxième partie de soirée sur France 2, un débat sur l'adoption tardive. On se met dans la télé avec Marc. Non, Pascal dormait. Non, il avait 8 ans. Non, il est couché. On se met dans la télé. Et puis, présentation des invités sur le plateau d'économie d'émission. Et on reconnaît le tuteur de Pascal. On dit, oh tiens, c'est incroyable. Et donc là, il commence à l'interviewer. Et il est venu parler de l'adoption au mot parental. Tardif. Côté OK. Et on comprend, sans donner le prénom, qu'il parle de notre histoire.
- Speaker #1
C'est fou.
- Speaker #0
On n'est pas au courant. Et surtout, ce qu'on apprend, et c'est ça qui est dingue, ce qu'on apprend comme ça, devant la télévision, qu'on a fait partie d'une expérience. Très bonne expérience, sympa. En fait, le chef des services d'adoption avait été faire un stage au Québec et était revenu avec une idée révolutionnaire de là-bas. Ils avaient considéré là-bas qu'un enfant qui avait un syndrome abandonnique puissant, de la mère ou du père d'ailleurs, mais par exemple l'espèce c'était de la mère, un syndrome abandonnique puissant de la mère, n'arriverait pas à se reconstruire dans un schéma familial classique, puisque la femme du couple représenterait cette mère, et donc du coup viendrait en concurrence directe. Le syndrome abandonnique c'est la mère amour-haine, et donc la place est prise. Et donc, ils étaient revenus en disant que les enfants qui avaient un syndrome abandonnique puissant de la mère trouveraient un équilibre entre deux couples d'hommes et des enfants qui avaient un syndrome abandonnique puissant du père trouveraient un équilibre chez un couple de femmes. Et donc, nous, on apprend ça à la télévision. C'est-à-dire qu'on apprend en fait que...
- Speaker #1
T'entends mon truc ?
- Speaker #0
On apprend comme ça qu'en fait, c'est comme ça qu'ils ont réussi en fait à imposer... cette adoption monoparentale, c'est une des toutes premières adoptions monoparentales et qu'ils l'ont adoptée par ce principe. Huit ans après, ça marche.
- Speaker #1
C'est génial.
- Speaker #0
Parce qu'en fait, Pascal ne parle pas souvent de sa mère. Par moments, c'est comme des petits éclairs qui arrivent comme ça. Mais on comprend qu'elle est encore là. Qu'elle est encore là parce qu'il y a eu 24 médiations mises en place. quand ils l'ont retiré pour maltraitance. Il y a eu 24 médiations. 24 fois. Parce qu'elle a fait un petit dessin, un petit cadeau pour sa maman. 24 fois, elle n'est pas venue.
- Speaker #1
Ça me donne envie de pleurer. Mais vraiment. Donc,
- Speaker #0
le syndrome abandonné, tu comprends, c'est-à-dire la place de la maman. Mais ce qui a été formidable, c'est qu'il avait deux grands-mères. Il avait des tantes. Il n'a pas d'oncles. Enfin, des tantes. Je n'ai pas de frères. J'ai une sœur. Pascal. Marc n'a pas de frère, il a des sœurs, et on a nos mères. C'est-à-dire qu'en fait, il a parfaitement l'image féminine, il a des femmes autour de lui, on n'est pas sur une île d'hommes. Par contre, la mère, elle est là. Elle a sa place, même si c'est de la haine. Elle est là. Et c'est ça que j'ai voulu retranscrire dans le film. J'ai vraiment voulu... J'espère avoir réussi. C'est vraiment ça. C'est-à-dire, finalement... Parce que ce qu'on entendait souvent, c'est la manif pour tous. Un enfant, c'est un papa et une maman. Ce n'est pas toujours comme ça que ça fonctionne. Pas toujours comme ça que ça fonctionne.
- Speaker #1
Et puis même dans des familles, il y a des pères qui sont absents, il y a des mères qui sont absentes, même si les gens sont ensemble, la présence, ce n'est pas actuelle forcément.
- Speaker #0
Exactement. Donc nous, on a fait aussi partie de sans le savoir. Et heureusement, parce que je crois que si on l'avait su, ça nous aurait complètement stressé. Mais on l'a appris comme ça, et c'est ça qui est formidable.
- Speaker #1
Et ce qui est formidable, c'est qu'en plus, le film que tu as écrit, ce sera un éternitaire aussi, donc du coup pour la même chaîne.
- Speaker #0
Exactement. Mais c'est pour ça, la vie est toujours très bien faite. La vie se boucle. Et puis peut-être qu'il y aura un débat derrière sur l'adoption tardive, et ce serait formidable.
- Speaker #1
Ça serait formidable. Et du coup, c'est comme ça qu'on s'est rencontrés, parce que moi, quand je fais du casting, c'est moi qui vais m'occuper de trouver cette grosse responsabilité.
- Speaker #0
De trouver l'enfant.
- Speaker #1
De trouver l'enfant. Oui, dans ma vie multiple, je filme aussi. Et voilà, c'est en lisant vraiment le scénario que j'ai demandé au producteur, à Yvan, est-ce que je peux contacter Vincent pour faire une émission avec lui ? Et on ne se connaissait pas. Non. Je suis hyper heureuse que tu aies accepté, parce que ça me touchait énormément de parler de ce sujet. Et c'est la première fois qu'on se rencontre, et c'est vrai que cette petite dame que tu nous montres comme ça dans le livre, c'est assez incroyable.
- Speaker #0
Pourquoi j'ai accepté ? Déjà parce que tu me l'as demandé très gentiment, mais aussi parce que c'est toujours important pour moi de venir parler de l'adoption tardive. Il y a tellement, tellement d'enfants qui demandent, qui attendent une famille, qui demandent à être accueillis dans un foyer, en France, pas à l'autre bout du monde, en France, que je pense que c'est un petit peu ce que je peux rendre à l'univers. C'est-à-dire de cette chance qui nous a été donnée, c'est d'essayer de... d'ouvrir les chakras ou d'ouvrir les possibilités à tous ces parents qui ont envie d'adopter. Quand on a été récupérer les affaires de Pascal au foyer pour venir l'installer à la maison, il avait un très bon copain au foyer. Et quand on a sorti les affaires du foyer pour le mettre dans le coffre, il s'appelait Nathan. Nathan est venu me voir et il me dit « il paraît que vous avez deux chambres » . Et je lui dis, ben oui, parce qu'il dit, vous savez, ils m'ont oublié moi aussi. Je ne peux pas venir avec vous. Je suis resté mortifié sur ce trottoir. J'avais envie que de lui dire une chose. Monte dans la bagnole, va chercher des affaires. Et puis si vous êtes 5, 6 encore, montez dans la bagnole, on va prendre un minibus. En fait, tu vois, je veux dire, j'ai même rappelé M. Lébert en disant mais est-ce qu'on peut faire quelque chose ? Puisqu'on a un agrément pour une fratrie de cœur ou de sang, c'est une fratrie de cœur. Est-ce qu'on ne peut pas accueillir Nathan ? Il a été raisonnable et il m'a dit faites en sorte que ça se passe bien avec Pascal. Voilà. Vous ne réalisez pas. ce qui devrait se passer. Il avait entièrement raison. Mais j'ai toujours en tête ce petit Nathan qui est resté.
- Speaker #1
Et vous n'avez jamais eu le moyen de le...
- Speaker #0
Il y est toujours. Il est à l'âge de Pascal, il est toujours en foyer.
- Speaker #1
Et vous ne pouvez pas le contacter ?
- Speaker #0
C'est compliqué parce que Pascal aussi, il a eu envie de tourner la page. Ce qui est anormal, il a envie de se construire autrement. Mais c'est surtout que ce qui est terrible, c'est qu'à partir du moment où ils ont 18 ans, l'État... n'a plus à s'occuper d'eux. Ils sont mis dehors. Les projets de vie de ces enfants, c'est l'appréhension de leur journée des 18 ans. Toi, moi, on n'attendait qu'une chose, c'était d'avoir 18 ans.
- Speaker #1
Moi, je vais pleurer.
- Speaker #0
On n'attendait qu'une chose, c'est d'avoir 18 ans. Eux, c'est un cauchemar. 18 ans, ils sont dehors.
- Speaker #1
C'est un deuxième abandon, puisque je pense que 8 ans, c'est un âge très... Je pense qu'ils doivent le savoir qu'après 8 ans, c'est plus compliqué, parce que les agréments sont de 3 à 8.
- Speaker #0
Est-ce que tu as vu le film Ma vie de Courgette ?
- Speaker #1
Non Bon,
- Speaker #0
alors tu iras le regarder ce qui est absolument formidable et à un moment donné il y a une réplique dans Ma vie de Courgette qui est très très juste Courgette va se faire adopter il a peut-être 5-6 ans dans le film, je ne sais plus trop bien le film d'animation et il y a un plus grand et donc Courgette lui dit, en clair, il lui dit je ne vais pas y aller parce que du coup je t'abandonne toi ici, et le plus grand lui dit mais... si tu vas y aller, parce que tu ne te rends pas compte, ce message que tu vas véhiculer de pouvoir adopter un enfant grand. Tu ne te rends pas compte de ce que ça va faire. Cette réplique dans ma vie de courgette est absolument, pour moi, terrible, parce que, je te dis, ça me renvoie à ce petit Nathan, mais surtout parce que, voilà, on parlait d'âme tout à l'heure. C'est ça qui se joue, c'est ça qui se joue dans ces foyers. Donc voilà, que les gens qui ont envie d'adopter... qui ont besoin d'adopter, qui ont besoin d'être parents, qui prennent au moins le temps de réfléchir à cette possibilité de l'adoption tardive. Vraiment. Au-delà du fait qu'ils vont énormément agrandir leur chance.
- Speaker #1
Bien sûr. Et moi j'ai une question.
- Speaker #0
Il faut tellement faire du bien.
- Speaker #1
Parce qu'on a quand même pas mal d'auditrices qui nous écoutent. Et il y a beaucoup de femmes aussi d'une quarantaine d'années qui sont célibataires et qui n'ont pas forcément pensé encore à l'adoption. Est-ce que tu penses que c'est... Je ne sais pas si tu pourrais me répondre, mais... Parce que là, c'est un couple d'homosexuels, mais il y a quand même le couple. Il y a le magnifique film Pupille sur l'adoption, où elle adopte justement un enfant qui est...
- Speaker #0
Mère célibataire ou père célibataire, d'ailleurs. Je crois que c'est assez ouvert. La loi l'autorise. Après, je n'ai pas les chiffres, sincèrement. Je ne sais pas le pourcentage, je ne sais pas les chiffres. Mais en tout cas, réfléchir à l'adoption.
- Speaker #1
Ça peut ouvrir des portes aussi. Oui,
- Speaker #0
vraiment.
- Speaker #1
Sortir un peu des schémas qu'on s'est imaginés.
- Speaker #0
Oui, complètement. Et faire ce fameux deuil de l'enfant porté. Pensez-y.
- Speaker #1
C'était génial, on arrive à la fin. Est-ce que tu veux rajouter un petit mot de la fin ? Ou tu viens de le dire ?
- Speaker #0
Non, parce que j'ai fait mon plaidoyer sur l'adoption tardive.
- Speaker #1
En tout cas, moi j'ai extrêmement hâte de travailler sur le film. Et puis on remettra un petit mot quand le film sortira. Ah super ! Et puis vous... Je vous invite surtout à lire ce livre, L'île aux deux pans, récit d'une adoption homoparentale. C'est aux éditions...
- Speaker #0
Le Lise-Bleuf.
- Speaker #1
Le Lise-Bleuf. Il est super beau, le livre. Eh bien, c'était une émotion très... Une émotion, ouais. C'était une émission très émotionnelle. Et en tout cas, je te remercie beaucoup...
- Speaker #0
Merci, moi qui te remercie.
- Speaker #1
...de partager ta jolie histoire avec nous. Et moi, je vous dis à la semaine prochaine. Flamme des années 80. Le podcast qui allume la femme.