- Speaker #0
Flamme des années 80.
 - Speaker #1
Le podcast qui allume la femme.
 - Speaker #0
Bonjour ! Alors aujourd'hui c'est une émission un peu spéciale. Donc j'ai invité Anne Fleur que vous connaissez du conte Soleil de Quartz qui présente la météo des flammes toutes les semaines. Et là, comme on est aux alentours du 1er novembre, on s'est dit qu'on avait envie de faire une émission toutes les deux sur la mort. parce que ça fait aussi partie de la vie et je trouve qu'on en parle peu. Donc bonjour Anne-Fleur, merci de partir dans notre aventure commune sur ce sujet très intéressant.
 - Speaker #1
Et bonjour Sarah, bonjour tout le monde. Oui, c'est un vrai challenge. Un vrai challenge et puis c'est né d'une histoire commune aussi. On a vécu un peu des choses similaires en peu de temps et on a eu envie de témoigner, je crois.
 - Speaker #0
Oui, parce qu'Anne-Fleur a perdu son papa il y a plus longtemps que moi et moi j'ai perdu mon papa il y a quelques mois. même pas un mois et demi, le 15 septembre. Et du coup, Anne-Fleur m'a beaucoup accompagnée dans ce passage. On a vécu des moments assez forts. Et heureusement qu'elle a été là, parce qu'il y a des choses que je ne savais pas et qui m'ont été très précieuses dans ce passage, justement. Et donc, comme avec Anne-Fleur, nous sommes des personnes très généreuses, nous avons envie de partager.
 - Speaker #1
Exactement.
 - Speaker #0
On a eu envie, en tout cas, on a eu envie... c'est... On ne savait pas qui c'est qui a eu l'idée, mais ensemble, on s'est dit, il faut vraiment en parler.
 - Speaker #1
Et on n'a même pas de structure en plus. On y va au feeling.
 - Speaker #0
Comme avec Anne-Fleur, on est très créative. Juste après cette émission, on fait un petit spoil, on a mis un petit montage qu'on a mis juste avant, donc on vous met maintenant. On a décidé, Anne-Fleur, qu'est-ce qu'on a décidé ? Raconte notre petite folie.
 - Speaker #1
On avait déjà l'envie de créer un programme et en discutant de ça, On a décidé d'ouvrir un questionnaire pour récolter un maximum de témoignages, si des personnes veulent bien témoigner de ce qu'ils ont vécu, du moment où peut-être du diagnostic jusqu'au moment de passage de la personne qu'elles ont accompagnée, qu'ils ou elles ont accompagnée. Donc on a décidé de mettre dans le lien du podcast l'accès à ce questionnaire. On ne sait pas encore exactement la forme. L'accès au questionnaire pour récolter un maximum d'histoires, de témoignages, je ne sais pas si c'était un autre mot.
 - Speaker #0
Oui, de partage en fait. Et c'est surtout, comme tu fais les poubelles à crottes et les poubelles à vœux, c'est dans l'idée de vous faire du bien aussi. Et souvent, c'est important d'avoir une oreille parce qu'on ne peut pas forcément avoir des oreilles partout bienveillantes pour écrire des choses ou pour déposer ce que vous avez envie de déposer. Après, évidemment, on ne va pas l'utiliser. Ça restera très personnel. Vous vous inquiétez.
 - Speaker #1
C'est anonyme.
 - Speaker #0
Anonyme, non, puisque vous mettrez votre nom quand même pour nous l'envoyer. Ou alors, si vous voulez créer une boîte mail spéciale. Mais en tout cas, nous, on ne va pas l'utiliser pour rien. C'est juste pour vous, vous faire du bien. Et puis, pour qu'on ait une notion aussi de ce que vous avez recherché, des manques que vous avez pu avoir à ces moments-là. Et pour au mieux créer notre programme qu'on va mettre tranquillement. qu'on est en gestation. Donc si ça vous intéresse, n'hésitez pas à remplir ce petit questionnaire où on vous met le lien. Et puis voilà, merci beaucoup.
 - Speaker #1
Oui, merci à vous.
 - Speaker #0
Oui, parce que je pense qu'on avait vraiment besoin de partager ça. Et donc du coup, moi je vais commencer par une question pour toi, Anne-Fleur, par rapport à ce que tu as vécu. Et qu'est-ce que tu aurais aimé savoir sur ce passage de la mort ? Qu'est-ce que tu aurais aimé savoir avant que tu le vives comme tu l'as vécu il n'y a pas si longtemps, il y a quelques mois ?
 - Speaker #1
Ça, c'est une bonne question. Mon papa est décédé en avril. Qu'est-ce que j'aurais aimé savoir ? Peut-être que les dernières 24-48 heures sont quand même assez difficiles. Hyper intenses émotionnellement, bien sûr. Alors nous, c'était un contexte particulier parce que mon papa avait un glioblastome. Donc c'est un cancer du cerveau dont le pronostic vital est engagé dès le diagnostic. En fait, il savait qu'il allait mourir, mais il ne savait pas quand. Et donc on a vécu avec une épée de Damoclès, un peu au-dessus de la tête pendant... le temps qu'il lui restait à vivre. Il s'est trouvé qu'il lui restait 4 mois. Donc il y avait peut-être ça aussi, le côté, en fait, il faut kiffer, vraiment kiffer, tous les jours, à partir de ce moment-là. Mais il y a quand même une mention spéciale pour les 24... Je ne sais pas toi, Sarah, comment tu l'as vécu, mais tu vois, ces dernières heures, les 24-48 heures avant le décès, elles sont dures, je trouve.
 - Speaker #0
Moi, je trouve qu'elles sont primordiales, mais surtout, je fais juste une petite parenthèse pour les auditeurs et auditrices qui nous écoutent. Nous, on a eu la chance, si on peut dire ça, une chance. En tout cas, moi, je le prends comme une chance. D'être dans des fins de maladie, même si toi, la maladie était rapide, tu étais quand même au courant. Moi, je vais mettre beaucoup de pincettes par rapport à des accidents qui sont très soudains par rapport à la mort. Et à ce moment-là, tu ne peux pas être préparé parce qu'on t'appelle, c'est terminé. Et pour moi, je trouve ça vraiment dramatique. Mais quand on est dans des processus de longue maladie ou alors, comme ton papa, des maladies dégénératives du cerveau ou alors un Alzheimer, des choses qui prennent du temps, entre guillemets. À la fois, moi, j'ai eu la chance de faire un deuil blanc pendant toutes ces années-là. Toi, c'était quand même plus rapide. Donc, l'émission, elle va vraiment être centrée là-dessus, sur les accompagnements de fin de vie quand on sait. Après, quand on ne sait pas, c'est toujours bien d'écouter l'émission parce qu'il y a peut-être des tips ou des choses à avoir. Mais nous, on se concentre vraiment là-dessus parce que c'est là où nous, on peut, entre guillemets, faire quelque chose, donner des conseils ou des choses que nous, on a vécues qui pourraient faciliter ce passage.
 - Speaker #1
Oui, on peut témoigner de ce qu'on a vécu, pas de ce qu'on a jamais vécu, en l'occurrence. Mais c'est vrai que... Les morts traumatiques, mais les morts soudaines, c'est difficile de les accompagner puisqu'on ne les prévoit pas. Nous, on le savait, ça nous pendait au nez, comme on dit, on le savait. Et le truc, en plus, c'est que quelques mois avant, j'avais vécu, j'avais pressenti des décès. Ce que je ne fais pas du tout dans mon activité, je ne fais aucun accompagnement des fins, message de défunt, etc. Ce n'est pas quelque chose qui m'attire à la base. Mais en l'été 2024, sans trop savoir comment ni pourquoi, j'ai senti le décès de quelqu'un de la famille. Et je ne comprenais pas pourquoi j'avais vécu ça. Après, j'ai eu, dans mes accompagnements en magnétisme, en chimiothérapie, enfin j'accompagnais en radiothérapie, tu sais, pour couper le feu, j'ai la maman aussi d'une amie. qui a été malade et en fin de vie, je l'ai accompagnée pareil sur ces deux derniers jours. Elle, mon amie et sa maman. Mais je ne savais pas pourquoi ça se réveillait à ce moment-là. Donc, tout est juste. Et puis, en novembre 2024, la mère de mon amie est décédée début novembre. Je me souviens en plus parce que c'était 1er novembre. Tu vois, c'était il y a un an. 1er novembre, je montais à Paris avec mon père pour me déménager. Il venait avec moi m'aider à déménager. Mais dans le même temps, cette amie perdait sa maman. que j'avais accompagné en chimio. Et en fait, ça a pris du sens après. J'ai accompagné mon propre père parce qu'il a fait de la radio et de la chimio, etc. Lui, il avait l'instinct de survie de fou. Il voulait vivre aussi longtemps que possible. Donc aujourd'hui, effectivement, on témoigne de ce qu'on a vécu, de ce qu'on connaît. Toi, l'accompagnement qui a été beaucoup plus long que moi, parce que moi, ça a été finalement condensé sur quatre mois.
 - Speaker #0
Moi, c'était cinq bonnes années.
 - Speaker #1
Ouais. C'était cinq bonnes années et puis en fait, la fin, elle arrive vite. En fait, tu vois,
 - Speaker #0
c'est ça qui est paradoxal. C'est que même si on accompagne pendant longtemps, des mois ou alors des années, quand c'est fini, on n'est jamais forcément prêt à ce que ce soit fini. Il faut aussi se préparer à ce que les gens peuvent nous dire. C'est un soulagement. Moi, j'avais peur de ça parce que quand j'imaginais que mon père allait partir, j'avais peur qu'on me dise des choses comme ça qui allaient me mettre en colère parce que je n'avais jamais envie qu'il disparaisse. Mais c'est vrai que quand, en fait, moi, je l'ai vraiment ressenti, mais à l'intérieur de mon corps, comme un soulagement, mais mutuel, apaisé de toutes parts, j'étais plus à même, parce que j'étais au bon endroit, d'entendre tout ce que les gens pouvaient me dire. Ça ne me mettait pas du tout en colère, parce que j'étais au bon endroit. Je pense que de réussir à s'apaiser, et donc on va parler surtout de ces 24-48 dernières heures, ce que tu voulais faire à la base, et je trouve qu'elles sont primordiales grâce à toi, parce que Anne-Fleur accompagne maintenant, justement, si vous êtes dans... dans ces moments-là. Et je trouve que c'est hyper important d'avoir une personne extérieure qui peut accompagner à la fois énergétiquement et à la fois psychologiquement pour ces moments qui ne sont pas faciles parce que c'est les derniers moments de vie. Donc dans les 24 à 48 heures, après, on pense qu'on peut encore communiquer, mais c'est différent. Là, on a vraiment encore le corps qui est là et avec qui on peut vraiment toucher, dire tout. Du coup, est-ce que tu veux expliquer les étapes de ce que tu m'as transmis à ce moment-là et comment est-ce que tu m'as accompagnée et comment tu pourrais accompagner les gens qui vivent des moments hyper difficiles ?
 - Speaker #1
En réalité, c'est plutôt toi. Je ne sais pas si tu es OK, mais de reparler du contexte. On venait juste d'enregistrer le podcast pour la météo, je ne sais plus laquelle. Et en fait, c'est à la sortie où toi, tu as un message assez soudain disant qu'il faut que tu descendes. Et le lendemain, on était toutes les deux dans le train. Moi, je remontais à Paris, toi, tu descendais. Et en fait, en discutant avec toi, tu m'as raconté la situation, l'état de la situation, l'état de ton papa, etc. Et l'état de la situation. Et à ce moment-là, c'est ce que je t'ai dit. J'étais dans le train, donc physiquement, j'étais avec mon fils. On était en plus en train de bosser, je ne sais plus ce que c'était comme leçon, bref. Mais mentalement, je n'étais pas dans le train. Je t'écoutais, je te lisais. Mais je me voyais aussi, je visualisais la chambre où était ton papa, assise à côté de lui, parce qu'en plus, il était seul, je crois, à ce moment-là. Je l'ai senti très angoissé. Donc, j'ai eu vraiment à cœur, tu vois, j'ai eu... C'est très bizarre de parler de ça parce que ce n'est pas du tout quelque chose que j'ai l'habitude de faire. En plus, je ne fais pas ce genre de... Tu vois, je ne visualise pas souvent. C'était la première fois que je vivais cette expérience où je me suis assise à côté de ton père. Donc, mentalement, j'avais les images dans la tête. Je m'asseyais à côté de ton père. Je lui parlais en lui tenant la main et je t'ai même dit, il a la peau très douce. Je crois que je t'ai dit quelque chose comme ça. Il a la peau très douce et je sentais. Et dès lors que j'ai posé ma main sur la sienne, il était plus calme. Parce que toi, tu n'arrivais que dans l'après-midi, tu avais un autre âge à faire. Tu n'arrivais que dans l'après-midi. Et on a échangé comme ça. Tu m'as donné le prénom de ta maman, de ta sœur. J'ai pu du coup lui parler. Et donc là, je me suis sentie... enfin tu vois j'étais avec lui en train de l'accompagner j'étais à deux endroits en même temps en réalité et puis Et d'ailleurs, j'ai foncièrement passé le week-end à plusieurs endroits. Parce que je remontais à Paris, mais j'étais avec toi là-bas. J'étais avec ton père dans sa chambre. Enfin, j'arrivais à sentir en tout cas. Donc, c'était assez particulier à ce moment-là. J'ai été d'ailleurs très contente de le faire, mais en même temps, hyper surprise de ce qui se passait parce que tu me racontais la situation. Et on ne savait pas, toi et moi, à ce moment-là, qu'il restait peu de temps.
 - Speaker #0
Oui, on se doutait que c'était vers la fin, mais c'est ça qui est intéressant, c'est surtout, n'hésitez pas à demander à un moment donné, avec justement Anne-Fleur qui est assez… parce que ça rassure vachement, à la fois moi ça me rassurait, et puis je sentais que mon père ça l'apaisait, et je pense que c'est des moments où c'est des moments de passage où on voit vraiment le corps qui va disparaître, c'est des choses où on n'est pas prêt, c'est complètement irréel, je ne sais pas comment tu as vécu toi quand ton père est décédé, mais ce fait de, en fait, tu as une personne et puis qu'elle soit malade ou pas, puis après elle n'existe plus et puis tu ne la verras plus jamais, et ça on en parle très peu je trouve dans la vie. Non,
 - Speaker #1
on n'en parle pas. Je vais revenir parce qu'il y a beaucoup de choses que tu as dit dans un message. Mais tu vois, parce que le samedi, on ne le savait pas. Je me souviens d'avoir dit ça passe ou ça casse. C'était vraiment la phrase que je... Je ne t'ai pas dit le samedi, c'est fini. C'est le dimanche que je te l'ai dit. Mais le samedi, moi, j'avais cette information de ça passe ou ça casse. Et c'est ce que je t'ai toujours dit. Je transmets les messages que j'ai. je ne prédis pas la date de la mort parce que ce n'est pas un truc que j'ai envie de faire mais j'ai cette capacité à sentir quand c'est les derniers instants Et le dimanche, quand tu m'as envoyé cet enregistrement, je t'ai dit, c'est pour moi, et en plus je l'avais senti. Le dimanche, quand j'ai essayé de me connecter à ton... parce que je l'ai accompagné à différents moments, je me souviens le samedi soir avant de me coucher vers minuit, pareil, j'ai essayé d'apaiser ces angoisses à distance. Le dimanche, tu m'as envoyé ce message où j'ai entendu sa respiration. Ça, c'est un truc qui me marquera toujours, ça me met encore les poils, parce que j'ai entendu mon père, parce qu'il y a dix ans, j'ai accompagné mon beau-père. Cette respiration. tu sais juste avant je ne sais pas si on peut dire les termes mais juste avant que la personne décède elle est hyper particulière je la reconnaîtrais parmi mille autres et quand tu me l'as envoyé j'ai eu les poils tu vois et je te l'ai dit et je me souviens que tu m'as répondu ouais l'infirmière nous a dit que c'était normal à cause de sa de son infection mais moi je savais je te l'ai dit il est à moitié déjà parti je le sentais je le savais et donc du coup je t'ai laissé l'espace de vivre ce que tu avais à vivre.
 - Speaker #0
Ça, c'est vachement intéressant pour les gens, justement, de cette respiration. De toute façon, les gens qui nous écoutent et qui ont déjà entendu celle-là, ça ne peut pas être à nous. Donc, cette respiration-là, je ne sais pas comment on pourrait la définir, mais c'est vraiment une respiration extrêmement forte qui est proche d'un ronflement. Parce que moi, on me disait, maintenant, il ronfle, mais moi, je voyais bien qu'il ne ronflait pas. Et en fait, à la fois, le corps est bien fait. Encore une fois, dans tous les moments, vous avez la chance, parce que moi, je trouve que ça a une chance de pouvoir accompagner, justement les gens qui s'en vont. C'est un moment où, à ce moment-là, il faut quand même pouvoir dire tous les conseils que tu m'as donnés, dire tout ce que tu veux dire. C'est le samedi soir,
 - Speaker #1
on a échangé, j'ai pris le temps de t'appeler. En fait, toi, tu as surtout pris le temps de discuter avec moi au téléphone, parce que tu étais hyper sollicitée. Et je t'ai dit, Sarah, c'est le moment. C'est le moment que vous lui disiez ce que vous avez à lui dire. C'est le moment que... Enfin, voilà, je ne sais plus exactement les mots que j'ai employés, mais je t'ai dit, Sarah, il faut lui parler. Dis-lui tout ce que tu as à lui dire. pour préparer parce que vraiment, j'avais la sensation que ça passait ou que ça cassait. J'étais... C'est difficile d'être certaine. Mais c'est le dimanche. Quand tu es arrivé à l'hôpital et que tu m'as dit « il est très angoissé » , je t'ai dit « envoie-moi un enregistrement de la respiration » . Je la reconnaîtrai parmi des milliards d'autres respirations. Et je savais que c'était à ce moment-là que c'était la fin. Tu étais sur la dernière ligne droite. Et à la fois, tu étais prête à l'entendre et à la fois, tu n'étais pas prête à l'entendre. Il y avait cette dualité, parce que tu me l'as toujours dit « dis-moi les choses » . C'est pour ça qu'accompagner, oui, sur les 24-40, mais il faut quand même être conscient qu'il faut être prêt à entendre que c'est la fin parce que toi tu le savais et pour autant il y a eu ce truc de je le sais sans le savoir et moi quand j'ai accompagné mon père et qu'on était à la fin, alors ça a été particulier parce que j'ai dû un peu me battre pour que mon père soit apaisé, il y a aussi ça les personnes qui partent elles sont souvent très angoissées et elles ont besoin d'être apaisées avec des médicaments, et il a fallu que je me batte pour qu'il en ait parce qu'il en avait pas et mon père en plus ce qui est vraiment particulier c'est que tout s'est fait très vite il marchait il était debout parce qu'on meurt en bonne santé du glioblastome il faut le savoir donc corporellement tout va très bien c'est le cerveau qui dysfonctionne et mon père on l'avait mis au lit le dimanche à 17h parce qu'il avait passé 24 enfin un week-end difficile assis au bord de son lit à divaguer et donc on l'a allongé à 4 à 17h le dimanche soir et ça a été je ne savais pas mais c'était la dernière fois que je l'allongeais Et le lundi matin, on a eu l'appel.
 - Speaker #0
Et ça, c'est vrai que c'est quand même la chance qu'on peut avoir dans ces moments-là. Moi, de mon témoignage, c'est d'avoir eu de la chance qu'on nous appelle. Parce qu'en fait, dans ces moments-là, il ne faut pas avoir forcément peur d'aller jusqu'au bout de l'accompagnement. C'est-à-dire que moi, quand on nous appelait, c'était 23h. on est parti, on est retourné à la clinique alors qu'on y avait passé tout le dimanche et on l'a veillé de 23h30 à 6h du matin Il y a plein de moments où on nous a dit, alors on a eu encore une fois énormément de chance, parce que les médicaments, les docteurs sont extrêmement bien formés aussi pour l'accompagnement, pour apaiser les souffrances. Et voilà, nous on ne voulait pas d'acharnement thérapeutique parce qu'on n'a pas été malade depuis longtemps. Et du coup, c'est vrai que ce moment-là, où déjà on formule qu'on ne veut pas, justement qu'on a envie que ça s'arrête, mais c'est aussi quelque chose qui peut être aussi très beau et très apaisé dans ces fins de vie-là, d'avoir justement... Le courage et en même temps, je trouve que c'est encore plus dur d'imaginer comment il est parti parce qu'on reste avec des zones d'ombre qu'on n'aura jamais. Et là, la chance que moi j'ai, c'est de pouvoir être allée jusqu'au bout. Après, c'est un peu long, mais en même temps, on a eu le chance de tout dire, de partager des moments, de rire. On a eu des fourris. On a été vraiment en famille et avec beaucoup d'amour jusqu'au bout. Et moi, je sais que dans mon deuil aujourd'hui, même si je suis profondément triste, ça m'aide énormément. et je pense que j'avais vraiment envie de faire cette émission parce qu'avec ma mère et ma soeur, à un moment donné, ça faisait déjà 4 ou 5 heures. qu'on le veillait, toujours avec cette respiration qui n'est pas très agréable. Et je leur ai dit, mais quand il va mourir, il va se passer quoi ? Je leur ai demandé, en fait, elles n'avaient jamais vu personne mourir non plus, même ma mère qui est quand même plus âgée. Et du coup, ma mère m'a dit, je ne sais pas, la tête va tomber. On imaginait peut-être qu'il allait y avoir des secousses, qu'il allait se passer un truc improbable. En fait, spoiler, il ne se passe rien. C'est juste que c'est très doux. Et que du coup, ça peut être très doux, surtout quand on a la chance. Ça aussi, c'est des idées reçues que moi j'avais. C'est vachement bien de mourir chez soi et tout. Je pense que quand on est malade, mourir à l'hôpital avec des médecins qui apaisent les souffrances et dont le corps ne souffre pas, je trouve que c'est vachement agréable. Ce qui est important, c'est de mourir aussi avec beaucoup d'amour et accompagné. Si vous avez la chance de pouvoir le faire, encore une fois. Et du coup, parce que ça n'arrive pas toujours et que nous, on a eu de la chance dans tout ce qui s'est passé. et c'est vrai que quand on a le choix je trouve que c'est vachement vachement jolie et que la mort, pour moi, ça a été un moment incroyable qu'on a tous partagé. Alors moi, je suis plus spirituelle que certains membres de ma famille, mais on a tous eu la même sensation de délivrance et d'apaisement. Parce qu'on avait à la fois, nous, on était apaisés et lui, on sentait qu'il était apaisé et c'était un super joli moment. Alors, je n'aurais jamais imaginé parler de la mort comme ça avant que mon père meure, d'ailleurs, parce que ça ne m'était jamais arrivé. Et du coup, c'est aussi pour ça que j'avais envie de faire cette émission. Pour plein de moments où des fois les gens sortent avant qu'ils s'en aillent parce qu'ils pensent que ça va être trop dur. Et alors qu'en fait, au final, ça peut être beau. Et ça peut être, je pense que c'est important maintenant de le faire rentrer aussi dans les mœurs parce que tout le monde va mourir. On va devoir se confronter à la mort encore plein de fois dans notre vie si on vit le plus longtemps possible. Et je trouve que c'est important d'en parler en fait. Parce que c'est vrai que moi, si j'avais eu, après chaque mort est différente comme chaque naissance. Mais moi, j'ai vraiment pris ça aussi comme un accouchement. J'imaginais mon père accoucher de sa mort en fait pendant ces heures-là. Et bizarrement, je me faisais plein de choses dans ma tête. Je me disais, là, c'est fou. Et pour moi, je le sens encore. Il est encore vraiment là. Et j'ai ces croyances-là qui m'aident peut-être. Ça dépend des croyances de chacun. mais donc voilà, moi, à la différence de toi, Anne-Claire, j'ai eu la chance. pouvoir aller au bout. Et je trouve que, je ne sais pas de ton expérience, mais c'est vrai que le coup de téléphone et la chose, elle est glaçante, en fait. Et il y a un moment où peut-être il y a des zones d'ombre dans lesquelles tu n'étais pas là, où je ne sais pas ce que tu penses de ce moment-là, en fait, qui est assez particulier.
 - Speaker #1
Quand la personne décède, quand elle a respiré, du coup, nous, nous, on n'imaginait pas, ça s'est fait comme ça. Ma mère voulait rester avec lui, donc c'est ma mère qui restait avec lui. Après, il y a juste une petite aparté que je vais apporter. C'est que ça arrive aussi que les personnes qui meurent s'arrêtent de respirer quand il n'y a plus personne. Et c'est ce qui s'est passé pour mon père. Ma mère a veillé sur lui toute la nuit. Et à 7h30, elle lui a dit écoute, je vais faire pipi. Pour tout te dire, tu vois. Et elle lui a dit, je te mets... Il avait une musique que je ne peux plus écouter aujourd'hui. Elle lui dit, je te mets ta musique préférée. Elle a mis la musique, elle est partie faire pipi. Elle est revenue, il avait arrêté de respirer. Donc il y a des gens qui partent en présence de leur famille et d'autres qui partent en plus en intimité. On nous avait prévenu de ça avant. Nous, on a eu les soins palliatifs qui nous ont accompagnés. On a été pris en charge à domicile. Pareil pour l'histoire, mon père voulait mourir à domicile au départ. Lui, il préférait mourir à domicile parce qu'il avait envie. Mais en fait, en discutant entre nous dans la famille et un peu avec les soins palliatifs, Je me souviens, je crois que c'est ma sœur qui nous a fait la réflexion. Mourir à domicile, tu ne retournes plus dans la pièce avant des mois et des mois après. Si mon père mourait dans sa chambre, ma mère n'aurait jamais pu dormir à cet endroit-là après. Et du coup, il a réajusté sa vision des choses et on a décidé de mourir à l'hôpital. Mais ça, c'est pareil. Il faut être au courant que mourir à l'hôpital, ça ne veut pas dire être les six derniers mois à l'hôpital. Ça veut dire que tu... et chez toi en hospitalisation à domicile, ou alors tu as une place en EHPAD, comme nous on a fait à la fin, l'hôpital nous a demandé de récupérer mon père, parce que pour lui, il lui restait encore 2-3 mois à vivre, et il l'aurait récupéré 24-48 heures avant le décès, c'est-à-dire au moment de cette fameuse respiration. Et quand on a compris que l'hôpital récupère les personnes à ce moment-là, on s'est dit, mais c'est horrible de faire ça pour la personne. qui est en train de mourir, elle a mal partout, enfin mon père avait mal partout, elle est dans le coma, elle respire mal, et on les transporte pour les emmener mourir à l'hôpital. Mais c'est horrible de faire ça. Et donc on a pris la décision, étant donné qu'il avait une maladie dégénérative du cerveau, il déambulait, il se cassait la figure, etc. On a cherché un EHPAD, et comme la vie est bien faite, on a été guidés, on lui a trouvé une place dans un EHPAD extraordinaire avec des gens hyper bienveillants, qui s'en sont occupés d'une manière incroyable pendant une semaine. Ils ont tout mis en place. Ils ne savaient pas combien de temps mon père resterait, mais ils ont tout mis en place et on pouvait venir quand on voulait, jour et nuit. Et mon père pouvait déambuler comme il voulait. Il n'était pas contraint à rester au lit, ce qui fait qu'il y avait moins de chutes. Et je me souviens aussi, il y a une aide-soignante qui m'a dit, quand il est décédé, on a trouvé que c'était beaucoup, parce que c'est vrai qu'on a toujours été une famille très soudée. Donc, il y avait tout le temps du monde auprès de mon père. Et pour eux, c'était beaucoup trop. parce qu'ils n'ont pas l'habitude de voir autant de personnes de la famille venir. Et à la fin, elle nous a dit, mais en fait, on a compris après. C'est parce que vous ne saviez pas combien de temps il restait et qu'il était difficile à gérer parce qu'il perdait, cognitivement, il était atteint. Et puis, comme on lui a dit, nous, ça s'est fait en quatre mois. Il a fallu qu'on accuse le coup, qu'on accepte le diagnostic et qu'on accepte qu'il parte. Et comme tu le dis, en fait, tu ne le sers plus jamais. Après, dans tes bras, le corps physique disparaît. Je me souviens, moi, je m'étais dit, il est parti en voyage. Au début, c'était moins compliqué pour moi de me dire qu'il partait en voyage, parce que mon père a toujours voyagé beaucoup. Bon, là, après, il y a un moment donné où la réalité te rattrape un peu en disant, en fait, il est parti un petit peu plus longtemps qu'en voyage. Voilà.
 - Speaker #0
Oui, puis c'est joli. Puis de toute façon, on se raconte tous des choses dans le deuil. Il y a plusieurs étapes du deuil. Et je pense qu'il y a un deuil déjà, quand il y a plusieurs deuils, il y a un deuil d'accident, il y a les deuils des... Moi, je sais qu'avec ma maman, on a beaucoup pensé à un moment donné, quand on l'accompagnait, en se disant, mon Dieu, imagine que ce soit un enfant. Alors là, du coup, tout de suite, la capacité de l'être humain est de toujours voir le pire. Et au final, on se contente de ce qu'on a et on se dit, c'est vachement bien, on a de la chance. Parce qu'on imagine toujours le pire que des gens auraient pu vivre. Et je pense qu'à chaque fois que les gens imaginent le pire, ils imaginent encore pire. Donc, il y a une échelle comme ça de dureté où l'humain, avec son instinct de survie, va toujours dire qu'en fait, il n'est pas si mal et on s'adapte beaucoup. Même cette respiration, c'est vachement adapté. Alors qu'au début, en rentrant, j'étais incapable de rentrer dans la pièce. Et puis au final, j'ai passé six heures dans cette pièce. Et puis on s'adapte en fait. Et on fait avec ce qu'on a et on transforme. Et voilà, moi j'aime bien l'alchimie de tout ça pour le transformer en quelque chose de positif. En ce passage où, en fait, on est toujours très surpris de la mort ou ça nous dévaste, mais en fait, on est nés sur Terre pour rester et pour partir à un moment donné. Et dans notre culture occidentale, ça n'existe pas, en fait. On n'en parle pas. Cette émission, je ne sais pas s'il y a encore des gens qui nous écoutent après 20 minutes, parce que peut-être que tout le monde est parti, parce que c'est trop dur et qu'on ne veut pas le voir et on se met des œillères. Mais c'est pas grave, on aura fait notre émission pour nous. mais ce que je veux dire c'est que c'est et qu'au contraire de pouvoir l'affronter et l'accepter. Toi, tu as accepté en 4 mois, ce qui est quand même fou. Moi, j'ai mis du temps, j'ai eu 5 ans pour accepter la maladie, accepter que mon père, à la fin, il ne savait pas trop qui j'étais, mais il savait toujours qui j'étais quand même. Il y avait toujours ce lien qui existait. Ça, c'est aussi tout ce qui est maladie dégénérative et d'Alzheimer. On dirait, mon Dieu, il ne te reconnaît plus, mais c'est dramatique. Et en fait, moi, je ne le voyais pas comme ça, parce que moi, le lien avec mon père, il était toujours là. Mais pas forcément...
 - Speaker #1
Parce que tu as su y mettre de la légèreté. Après, pour tout le monde, on n'a pas tous les mêmes capacités d'adaptation et on ne développe pas tous les mêmes stratégies. On a mis beaucoup d'humour dans le cancer de mon père parce que ça l'exaspérait quand il était encore conscient qu'il faisait des bourdes. On avait surnommé son cancer Roger. Je lui avais donné le nom de Roger. Après, c'est pareil, il avait un déambulateur qu'on appelait Marcel. Les cannes, c'était Cunégonde. Et on dédramatisait comme ça. parce qu'on y a mis, toi et moi, on a cette capacité à s'adapter de la même façon qu'on voulait aller jusqu'au bout de l'accompagnement. Et c'est hyper important. Et je suis sortie de cette expérience en me disant mais on ne s'est pas préparé les gens à ça en France. Parce que même mes parents, c'était compliqué. Au début, ça a été compliqué de parler des vrais sujets. Nous, on n'a eu que quatre mois finalement pour le préparer. Et un jour, je me souviens avoir dit à mon père attends, tu prépares un mariage pendant deux ans. Tu prépares ta retraite pendant deux ans. Mais ton départ de cette vie-ci, tu ne le prépares jamais. C'est tabou, on ne peut pas en parler, on ne peut rien faire. Je lui ai dit, je comprends bien que ce soit difficile. Et si tu me dis, je ne veux pas. Mais en réalité, il faut le préparer pour toi, pour nous, pour tout le monde. Ça se prépare aussi un passage comme ça. C'est un moment de passage. Et là, mon père m'a dit, c'est vrai, tu as raison. En fait, il faut que je le vois comme ça. Je vais me faire coacher pour passer. Et donc, du coup, là, on a pu dénouer des langues. Mais ce n'est pas facile. c'est hyper tabou hein En tout cas en France, je ne sais pas ailleurs dans le monde, mais en France c'est hyper tabou, même le milieu médical n'en parle pas. Tu vois, personne ne m'a dit, dans les 24-48 dernières heures, ton père va respirer avec un truc qui va être hyper oppressant, va falloir être solide pour rentrer dans cette chambre et l'accompagner. Parce qu'en réalité, c'est un peu, je ne sais pas si c'est notre rôle, je ne sais pas comment toi tu l'as vécu, mais je me disais, il faut que je sois à côté de lui. Donc apprends à gérer cette respiration hyper oppressante.
 - Speaker #0
Je pense que moi, c'est-à-dire que comme ma mère ne voulait pas partir et qu'elle a une force incroyable et qu'elle voulait vraiment l'accompagner et que moi, je ne me sentais pas du tout de laisser ma mère, il y a eu un espèce de truc qui s'est fait d'adaptation et d'ensemble, en fait, de bloc. Et c'est vrai que le fait de, moi, je dis, on a regardé la mort pendant six heures dans les yeux et c'est vrai. Et en fait, ça, moi, c'est un cadeau que mon père m'a fait en partant parce qu'avec la force maintenant que ça m'a donné et surtout ce... cette zone d'ombre que j'ai éclairée avec de la lumière et de l'amour, maintenant je me sens beaucoup plus capable. Alors je ne dis pas, si demain il ne se passe rien, d'ailleurs même pas le formuler, parce que je pense que j'aurais du mal à me relever d'autres choses, comme on a dit, mais là, dans tout ce qui était créé en restant que sur mon père, toute cette bulle des 5 ans et même ces 5 ans de maladie, je les remercie, parce que s'il était parti en 4 mois comme toi, vu que ce n'est pas mon histoire, je me dis, waouh, ça a l'air assez difficile, alors que nous, on a eu le temps. temps, tout a été très doux. Alors qu'en fait, quand on raconte notre histoire à des gens ou quand ils ont vu notre accompagnement, ils trouvent ça hyper violent, hyper difficile. Mais je pense que, comme tu le disais, on n'a pas tous les mêmes capacités, mais je pense que, je ne suis pas complètement d'accord, je pense qu'on les a et qu'il faut justement aller les travailler, les traverser et qu'on est tous capables de le faire. C'est comme je lisais un livre hier de Fabrice Midel sur le roseau et le... Il y avait une métaphore entre le roseau et le chêne. Et en fait, des fois, on pense qu'on est solide et puis des fois, on pense qu'on ne sera pas capable. Et quand on vit des choses qui sont dramatiques ou qui sont vraiment extrêmement difficiles, on arrive à s'adapter. Et en fait, on ne rompt pas. Et au contraire, et à la fin, on devient encore plus fort de cette expérience. Et je trouve que c'est très riche, en fait, d'aller au bout de ça. En tout cas, pour le coup, c'est un cadeau. Alors, j'aurais préféré qu'ils ne soient jamais malades et qu'ils soient encore là en pleine forme et qu'ils soient un peu relous. Ça m'aurait fait plus plaisir. En général, accepter ce qui se passe et accepter des diagnostics qui ne sont vraiment pas faciles. Après, encore une fois, mon père, il avait 72 ans. C'est une belle vie quand même, c'est pas un accident, c'est pas un ado, c'est pas un enfant, c'est pas un jeune père de famille qui décède. Il y a plein de choses comme ça aussi à mettre en perspective. C'est encore plus dans la normalité des choses. Pour les gens où c'est pas la normalité des choses, j'ai pas trop de conseils à leur donner, à part que peut-être que... Je sais pas en fait. Quand c'est brutal, quand les personnes sont jeunes, mon ex-beau-père est décédé, il avait 56 ans et il est décédé en 9 mois d'un cancer aussi. À croire que je suis douée, parce que je l'ai aussi accompagné, il m'avait demandé si je pouvais être sa personne de confiance là-dedans, donc je l'ai aussi accompagné. Et j'avais d'ailleurs dit à mon ex-mari en septembre, le mois de septembre qui a précédé son décès, il va mourir le jour de mon anniversaire, je te le donne dans le mail. Il est décédé le jour de mon anniversaire. quand c'est des morts précoces, comme ça, jeunes, quand c'est des morts précoces suite à une maladie, il faut kiffer. Même mon père, qui avait 72 ans aussi quand il est décédé, je lui avais dit, une fois qu'il s'est terminé son opération, on va se faire un kiff par jour. Tous les jours, je répondais à ses moindres demandes, quand il en avait, bien sûr. Et même les gens qui meurent précocement, parce que le glioblastome atteint des personnes assez jeunes, finalement, des hommes assez jeunes. Et donc, il faut kiffer sa vie, en fait. Et la mort, on ne peut pas savoir quand est-ce qu'elle arrive. Donc, il faut vraiment vivre comme si... Pas comme si c'était notre dernier jour, mais presque, tu vois. Ne pas avoir de regrets et faire des choses. Et je reviens sur ce que tu as dit, on a tous cette capacité en nous, mais on n'est pas tous prêts au même moment, tu vois. Comme tu l'as dit, il faut travailler à l'intérieur de nous et s'adapter et avoir envie de s'adapter aussi. Parce qu'il y en a qui font un vrai blocage sur ces sujets-là.
 - Speaker #1
Oui, après, je pense que c'est... Mais en tout cas, ce n'est pas irréel. Ce n'est pas irréalisable. Et du coup, j'ai envie de te poser une question. Qu'est-ce que, de cette expérience-là, qu'est-ce que tu as envie d'en faire ? Qu'est-ce que tu en as tiré ? Et comment est-ce que tu peux le transformer, toi, dans ta vie aujourd'hui, de Anne-Fleur qui est médium, à ton coach ? Ou est-ce que tu as d'autres idées ?
 - Speaker #0
Ce que j'en tire, c'est un peu ce que je viens de dire là. Vivre chaque jour, kiffer sa vie, ne pas avoir de regrets. Et ce que j'ai envie, j'aimerais bien, j'imagine que je n'ai pas vécu ça par hasard et que toi non plus. On ne s'est pas retrouvés au même moment dans ce chemin-là pour ne rien faire derrière. J'aimerais être la personne qui accompagne les 24... Enfin, tu vois, de... Je ne sais pas si ça t'a aidé, toi, que je te dise que c'est le moment. Il faut que tu lui dises tout ce que tu as à lui dire.
 - Speaker #1
Oui, ça m'a vachement aidée parce que du coup, ça m'a permis d'avoir une conversation de l'extérieur. Parce que quand on le vit, cette dualité, comme tu l'as très bien expliqué, à la fois, il y avait une part de moi qui le savait, mais depuis même le début où il a été malade quelques jours avant. Parce que moi aussi, je ressens beaucoup les choses. mais la part de moi qui n'avais pas du tout envie de penser que c'était réel. Et donc, peut-être qu'elle aurait pris le dessus et qu'après, je n'aurais pas dit les choses. Mais c'est vrai que du coup, comme tu m'as dit ça, j'ai pu avoir une conversation avec toute ma famille et leur dire. Et puis surtout, je pense que ça, c'est un truc que tu m'avais dit et qui est assez important. C'est qu'à des moments donnés, les gens aussi, qui ont un caractère très fort et étaient très famille, et leur dire qu'on est d'accord aussi qu'ils s'en aillent, que ce n'est pas un abandon, qu'en fait, on est OK avec lui, qu'on va l'accompagner et que... Et qu'on est d'accord, en fait, et qu'on est dans l'amour et qu'on se retrouvera plus tard ou qu'on est toujours là. Et ça, c'est vraiment une super belle preuve d'amour. Ça m'émerge. Parce que c'est hyper dur à dire, en fait, à dire à quelqu'un que, vas-y, tu peux partir, ne t'inquiète pas. On va réussir à rebondir, à vivre, à continuer à avoir le sourire, à continuer à vivre parce qu'il y a une part qui est là. Et c'est intéressant, je rebondis là-dessus, c'est que moi, depuis le deuil, depuis qu'il est décédé, je vois le deuil. Maintenant, j'ai l'impression d'avoir un espèce de trou béant qui n'est pas à l'intérieur de moi. Donc ça, je suis déjà contente, puisque j'ai quand même pris un peu de recul. Il est à côté. Et en fait, si on rentre dedans, c'est abyssal. C'est-à-dire qu'il n'y a pas de fin. C'est-à-dire que c'est un trou tellement profond qu'on peut vraiment s'y noyer. Et que du coup, moi, je suis à côté. Et puis, il y a des moments, en fait, ça ne prévient pas du tout. Il y a des moments complètement anodins où, du coup, on va tomber dans ce trou. Et alors qu'en fait, voilà. Et maintenant, comment ? Pour moi, j'ai une première partie de vie avant mon papa. Et là, je commence une deuxième partie de vie. J'ai vraiment cette sensation d'avoir un avant et un après le décès. Et comment est-ce que je vis maintenant quotidiennement ? Alors, ça ne fait pas longtemps. Ça fait un mois, deux mois, enfin même pas. Donc, comment est-ce que je vis avec ça ? On va voir quotidiennement, mais je pense que de le symboliser et d'en avoir conscience quand ça monte, c'est vachement important pour moi de visualiser et de dire qu'en fait, voilà, c'est toujours là, ça fera toujours partie, mais que moi, je suis quand même une personne à part entière et que j'arrive à le mettre à côté. Voilà. Je ne sais pas si tu le vois comme ça, toi, ou...
 - Speaker #0
Je suis tombée dedans, dans ce trou abyssal, pour la simple et bonne raison que j'ai gérée. J'ai été dans le fer pendant tout l'accompagnement de la maladie. Je me suis mise de côté, j'ai arrêté mon activité, puisque je venais d'arriver chez mes parents. J'ai essayé d'épauler ma mère. Ma mère, elle s'est retrouvée, son monde a changé. Ça faisait 50 ans qu'elle vivait avec mon père. Elle vivait un truc, pour elle, c'était complètement lunaire, irréel. Et quand mon père est décédé, je suis passée de mes journées, je courais partout et on était sur le qui-vive à plus rien. Donc, j'y suis tombée dans le trou abyssal. J'ai essayé de me raccrocher en me plongeant dans le travail, mais ça m'a rattrapée. Et du coup, quand tu en parlais, je me disais mais c'est ça que j'ai envie de faire. J'ai envie de pouvoir accompagner les personnes un petit peu avant la fin, juste avant la fin, pour leur dire comment ça va se passer. Mais surtout être là pour les aider à atterrir plus en douceur derrière. Je ne dis pas d'être une accompagnatrice du deuil, tu vois, c'est pas forcément ça, parce qu'il y a plein de gens qui le font et qui le font très bien. Mais en fait, c'est d'aider à ce passage, parce qu'on passe vraiment d'un truc à un autre, d'un état à un autre. Et en réalité, je crois qu'il n'y a personne qui dit, ça y est, c'est la fin, c'est le moment de lui parler. Alors, ce n'est pas facile, je ne sais pas si je serais capable de le faire pour tout le monde, mais peut-être que ce que j'aimerais en tirer, c'est de pouvoir aider les personnes. que ce soit la personne qui est en train de partir ou sa famille, à mieux vivre le passage, tu vois ?
 - Speaker #1
Oui, et puis surtout d'avoir des réponses. Après, c'est des croyances, tout est croyance, mais d'avoir des réponses de... En fait, même si tu ne me l'avais pas dit, et c'était génial que tu me le confiernes, mais moi, je savais que mon père, il est parti apaisé. Je le savais, en fait. Je le ressentais. Mais surtout d'avoir quelqu'un en plus qui te dit, bah oui, il est parti apaisé, ça peut paraître ridicule pour certaines personnes.
 - Speaker #0
Ah ouais, pour moi, dans le corps, c'était le jour et la nuit, tu vois. Mais en plus, parce que je suis restée connectée à ton père un peu après, j'ai eu d'autres mots qui me venaient derrière. Tu vois, j'avais des phrases, etc. Même si ce n'est pas mon cœur de métier. Mais j'ai été connectée pendant ces journées de passage.
 - Speaker #1
Et ça, je trouve que c'est hyper précieux. Et ça fait du bien parce qu'on n'a pas la sensation de l'abandonner complètement parce qu'on a quand même ce lien qui existe et qui fait en sorte que ça crée le lien pour eux-mêmes par rapport à la suite. Alors après, moi, j'ai plein de gens qui me disent, par rapport à ce scope, ça fait que deux mois, donc qui me disent « Ah, mais de toute façon, t'inquiète pas, tu vas t'effondrer, tu vas tomber. » Et en même temps, j'ai envie de dire « Bah, peut-être, mais dans tous les cas, il y a quand même toute cette préparation qui est là et qui est aussi ces cinq ans de deuil blanc dont on parle très peu, en fait. Le deuil blanc, on n'en parle pas. Enfin, qu'est-ce que c'est un deuil blanc ? » Moi, je n'ai pas volé le fait aujourd'hui d'être plus ou moins encore pas dans ce trou parce que ça fait cinq ans que j'y suis, dans le trou. Donc là, j'ai décidé d'en sortir. Donc, c'est... En fait, c'est que du cas par cas. Là, je partage mon cas à moi. Ça, je ne veux pas qu'il y ait... Enfin, voilà, ça, c'est mon histoire. J'espère qu'il y a des gens qui pourront se reconnaître. Et moi, j'aimerais bien aussi, on en a parlé avec Anne-Fleur, en tant que coach et avec Anne-Fleur. On m'a peut-être ouvert à quelque chose. On n'est pas encore sûr de la forme que ça prendra, ou individuellement ou collectivement. mais voilà c'est des choses en tout cas qui nous tenaient vraiment à coeur de partager parce que en tout cas moi d'avoir Anne-Pleur à mes côtés ça a été extrêmement bénéfique et je pense pas que j'aurais vécu ce passage sans elle de la même manière donc j'en profite pour te remercier encore infiniment avec mon plaisir et voilà c'est des choses qui sont hyper importantes parce que comme quand on fait un burn-out on a besoin d'être accompagnée comme quand on se marie des fois on a besoin d'une wedding planner quand quelqu'un meurt qu'on aime plus que tout on a quand même besoin à côté d'avoir quelqu'un
 - Speaker #0
Ça sera la petite touche drôle du truc. Avec mes frères et sœurs, quand on organisait l'enterrement de mon père, on s'est dit, on parle d'une baby shower. Eh bien, nous, on va parler d'une dark shower. Et du coup, à l'enterrement de mon père, on a fait des trucs, des activités style un peu inspirées des baby showers parce qu'on avait besoin de rendre ça plus léger et non pas à pleurer toute la journée, etc. On fait des préparations au mariage, des préparations à l'accouchement, des préparations dans toutes les étapes de la vie. Et peut-être qu'aujourd'hui, il serait temps qu'on se mette à accompagner aussi ce moment de passage hyper important, pour que chacun puisse filer à l'anglaise, comme disait mon père, mais de manière plus posée et plus sereine.
 - Speaker #1
Oui, plus apaisée. Et puis tous ces rituels qui sont mis en place, comme un enterrement ou une crémation ou quelque chose, c'est des choses qui sont hyper importantes, en fait, qui font en sorte que moi, je sais que j'ai... Ma sœur, on a fait des beaux discours, mais pour moi, c'était vachement important de le faire revivre à ce moment-là. Mais ça, c'était mon truc à moi. Ça peut être des rituels qui ne sont pas forcément des discours, mais c'est hyper important. Il y a des rituels, je pense que dans toutes les coutumes du monde, il y en a. Et je pense que ce n'est pas pour rien, parce que ça accompagne vraiment aussi ce passage pour les gens qui restent. Comme toi, tu as fait ta dark shower. Je ne t'ai pas au courant, mais ça devait être hyper rigolo. Mais ça peut être...
 - Speaker #0
Ça a ramené beaucoup de légèreté, quoi. On a dû choquer des gens, parce que c'est un peu bizarre quand tu n'as pas l'habitude. Mais mon père, c'était quelqu'un de joyeux, qui aimait beaucoup recevoir, qui aimait pas faire la fête. Mais tu vois, elle était très famille, très conviviale. Il aurait adoré savoir qu'à son enterrement, on a organisé. Mais c'était déjà symbolique. On leur avait fait... Il y avait un truc où... Tu connais l'arbre à vœux ?
 - Speaker #1
Oui, oui.
 - Speaker #0
Chez mes parents, on venait juste d'installer une espèce de fil. en faire pour délimiter quelque chose, on a fait accrocher des petits tissus d'arbres de vœux, en fait, et chacun a posé une intention à ce moment-là, et tous les invités ont joué le jeu. Donc c'était plutôt drôle. On avait imprimé des photos de mon père, chacun est reparti avec la photo qu'il avait envie de prendre. C'était pas grand-chose, mais au moins, à l'image de mon père.
 - Speaker #1
Ah, c'est marrant, on se l'est pas dit, mais nous aussi, on a fait imprimer des petites cartes pour que les gens repartent avec la photo. Et ça, je trouve ça sympa, puis... Oui, voilà. Nous, on a fait un truc qui était assez joli. Petit tips pour les gens. Je trouve que les couronnes mortuaires, surtout dans une crémation, c'est compliqué parce qu'après, tout le monde dépense déjà beaucoup d'argent. Ce n'est pas très écolo. Et puis, tu te retrouves avec plein de couronnes mortuaires qu'après, tu ne vas pas les récupérer chez toi pendant dix jours. En général, c'est des associations. C'est intéressant pour des EHPAD qui se partent avec les fleurs pour faire des choses. Donc, c'est joli. Mais nous, on a demandé à chaque personne de venir avec une fleur de son choix. Et je ne pensais pas, mais les gens se sont vraiment cassés la tête pour choisir la fleur qui correspondait. Et on s'est dit peut-être que les gens ne vont pas oser aller la mettre sur le cercueil. Et en fait, tout le monde allait porter sa fleur. Et mon père, il est parti avec un cercueil rempli de fleurs que chacun avait mis. Il y a des gens qui avaient fait des trucs un peu particuliers, qui avaient dessiné des choses. Il y en a qui sont avec une pierre qu'ils aimaient bien. Enfin, on laissait aussi ce temps-là à chaque personne d'être dans sa créativité. Et de pouvoir l'accompagner à sa manière. Et c'était aussi un rituel, en fait, de pouvoir mettre quelque chose. En tout cas, n'hésitez pas à être créatif pendant ces moments-là. Parce que je pense que ça fait du bien aussi à tous les gens qui nous accompagnent. Et à tous les gens et aux gens qui perdent. Tout le monde perd quelqu'un le jour d'un enterrement. Mais quand on perd un parent, un enfant, ou quand on perd quelqu'un qui est un ami éloigné, on a toujours une peine. Mais ce n'est pas forcément la même peine et ce ne sont pas les mêmes choses qu'on perd. Donc, ça fait du bien à tout le monde, en fait. En tout cas, ça fait une belle communion.
 - Speaker #0
Nous, on avait... Les gens nous demandaient, pareil, on ne voulait pas trop de fleurs de partout. Et donc, on avait demandé aux gens d'acheter un... Enfin, de se regrouper pour acheter des arbres. Mon père aurait voulu. Et donc, on a eu plein d'arbres à planter dans la maison de ma mère, là. Donc, un olivier, machin. Et comme ça, ça a évité le trou plein de fleurs, quoi.
 - Speaker #1
Voilà, je crois qu'on a donné les tips de enterrement.
 - Speaker #0
Exactement.
 - Speaker #1
Est-ce que tu veux conclure en disant quelque chose que tu as envie de partager pour finir cette émission ? J'allais dire sur l'amour, mais sur la mort et l'amour en fait, parce que je pense que c'est beaucoup d'amour dans notre émission qu'on a essayé de partager.
 - Speaker #0
Il y avait beaucoup d'amour et d'émotion. Je crois que la seule phrase qui me vient, c'est n'ayez pas peur de la mort.
 - Speaker #1
Oui, c'est vrai. Mais moi, vraiment, ça résonne énormément parce que... Oui, et puis ça vous donnera encore plus envie de vivre en fait, et encore plus envie de... En fait, c'est... Pour moi, il y a l'amour et la peur. Et en fait, la peur et la mort sont très liées. Et quand on arrive à le transcender ça et qu'on va jusqu'au bout de quelque chose, on le transforme vraiment en amour. Et en fait, tout peut être amour. Même la mort peut être amour et ça peut porter aussi la vie encore plus loin. Voilà. Merci Anne-Fleur. J'espère qu'il y a encore des gens qui nous ont écouté jusqu'au bout, je ne suis pas sûre.
 - Speaker #0
On verra.
 - Speaker #1
En tout cas, on vous tiendra au courant si on crée quelque chose par rapport à ça. On ne sait pas encore. On va y réfléchir. Et merci beaucoup Anne-Fleur. Et on se retrouve quand même. Enfin, on s'est retrouvés déjà dimanche pour la météo. Parce qu'on ne lâche pas la météo des flammes. C'est quelque chose d'un peu plus ludique quand même que l'émission sur la mort.
 - Speaker #0
Et on se retrouve ce soir pour la météo de la semaine du 3 au je ne sais plus combien de mois.
 - Speaker #1
Oui, elle est déjà sortie d'ailleurs. En même temps. J'ai tout sorti en même temps. Flamme des années 80,
 - Speaker #0
le podcast qui allume la femme.