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Grand témoin

Nathalie Levy : "On a mis en place une ronde des aidantes avec ma mère et ma tante"

Nathalie Levy : "On a mis en place une ronde des aidantes avec ma mère et ma tante"

04min |02/06/2025|

7

Play
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Description

La journaliste Nathalie Lévy, présentatrice d'En Aparté sur Canal +, ex-présentatrice sur BFMTV, est l'autrice de "Courage au coeur et sac au dos" (éditions du Rocher). Elle propose un témoignage à la première personne émouvant sur ses années en tant qu'aidante familiale. Avec les femmes de sa famille, elle s'est occupée de sa grand-mère Rosine à tour de rôle en mettant en place un véritable planning pour l'entourer de tout leur amour. Elle raconte les difficultés de l'aidance, la culpabilité de laisser l'aidé, et les obstacles au fait d'être aidant et de travailler.


Retrouvez le Grand dossier sur "Être aidant et travailler"

Leur rôle est crucial dans la société mais ils sont peu identifiés et donc, peu soutenus. Aider un proche vulnérable impacte le quotidien et, souvent, la carrière. Comment le monde du travail doit-il évoluer pour que chacun y trouve sa place ?


Ce podcast est lié aux Grands dossiers de la Caisse des Dépôts. A lire d'urgence !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Je m'appelle Nathalie Lévy, je suis journaliste. J'ai une grand-mère dont j'ai été très très proche dès ma plus tendre enfance, Rosine, qui fatalement, en prenant de l'âge, a commencé à avoir des soucis de santé, une incapacité à se déplacer, à être autonome, consécutivement à une chute au début du confinement. Elle a été hospitalisée, on a souhaité de manière catégorique et unanime la réintégrer dans son domicile. Et à partir de là, s'est mise en place une ronde de femmes, de trois femmes, ma mère, ma tante et moi-même, pour lui permettre d'avoir un quotidien à peu près acceptable, dans ses odeurs, dans ses meubles, dans ses tableaux, etc. Voilà, moi j'étais beaucoup là le matin avant d'aller travailler, ma maman venait plutôt à l'enfin d'après-midi, ma tante à la mi-journée. Il y avait comme ça cette organisation précaire, mais qui nous a permis de tenir quand même, qui lui a permis d'avoir... Les mains, le regard, les voix de ses proches, de ceux avec lesquels elle était depuis toujours. Et je pense que c'est fondamental, être aidant, c'était déjà une découverte, une surprise. Je ne me positionnais pas du tout comme telle, je n'en avais pas du tout conscience. Je crois même que je n'avais jamais trop compris ce que c'était. Moi, j'étais la petite fille de ma mamie et donc il était normal et naturel et organique que je m'occupe d'elle comme elle s'était occupée de moi petite. Donc, certains gestes, comme lui laver les cheveux, lui laver le dos, c'était une évidence. Lui apporter des packs d'eau, de lait, etc. Pareil, ça allait de soi. Après, il y a des gestes et il y a des soins. Donc, ça se transforme. Mais ça ne transforme pas notre relation. J'ai eu la chance d'accompagner quelqu'un que j'aimais foncièrement. Donc, sans doute que ça change aussi la donne et que ce ne serait pas mesuré de la même manière quand on est dans une obligation avec quelqu'un qui est peut-être plus difficile à gérer. Mais... L'amour nous a guidés en fait. Moi c'est une année où je change de média, d'employeur, et où je décide de dire la réalité de mon existence et de mon quotidien. Je ne me vivais pas comme aidante à ce moment-là, même si j'étais dans une compagnie vraiment, pour certains, qui pourrait être excessive puisque je la voyais quotidiennement à Ami. J'ai passé plus de temps chez elle le matin qu'à faire des rendez-vous pour le boulot ou des choses comme ça. J'avais un nouvel employeur dont je sentais qu'il pouvait y avoir une forme d'empathie, de compréhension. C'est une femme. avec laquelle je m'entendais très bien. Et donc, je me suis livrée. Je me suis livrée sur ma réalité, sur le fait que j'avais besoin de cette disponibilité pour être avec ma grand-mère au quotidien. Et donc, j'arriverais plus tard. Ça ne m'empêcherait pas d'être pleinement engagée, disponible, etc. Mais j'avais besoin d'être délocalisée. Et on m'a entendue. On m'a dit oui, mais bien sûr, on m'a plutôt encouragée. Et dans les faits, les choses se sont passées tout à fait autrement puisque c'est ce qu'on m'a reproché finalement au moment d'être conduite. Oui, c'est stigmatisant d'être aidant en entreprise. On est montré du doigt, on peut être vite isolé. Il n'y a pas de bienveillance en fait. Moi, je croyais qu'il y avait cette empathie, mais elle n'existe pas. Donc, c'est pour ça qu'il faut en parler. Moi, j'estime que ça m'a apporté beaucoup. D'abord, la résilience, bien sûr, mais aussi la résistance au stress, les capacités organisationnelles, parce qu'on est là plus efficace dans le temps imparti au boulot. Comme on sait qu'on devient multitâche, voilà, on apprend cette souplesse. Je pense que ça développe aussi des qualités émotionnelles. Une autre forme d'écoute, un autre regard sur les autres, sur les confrères, les consœurs, sur leurs difficultés. Je suis très contente d'avoir réussi à assumer ça en dépit des conséquences. Je pense que dans l'entreprise, les aidants sont un atout et pas un poids. C'est lourd d'être aidant, c'est lourd de savoir que le passage obligé quotidien, ce n'est pas uniquement son job ou aller chercher ses enfants, c'est aussi le domicile de l'aider. Moi, j'ai vu ma maman vraiment avoir des mots qu'on a pu... Oui, assimilée très vite à une forme de burn-out, alors léger heureusement, mais surtout des problèmes d'oreille, de vertige. C'est son corps qui a dit stop en fait. Elle avait des problèmes de dos et une fatigue nerveuse extrême. Moi-même, pareil, tendinite. Voilà, ça n'a pas loupé. À un moment, on pète les plombs, on a juste besoin d'air, de souffler. Et on rentre chez soi, on emporte ça avec soi et donc on va reporter sur son enfant une forme d'agacement, une impatience très forte. Parce que quand on est aidant, c'est très compliqué de laisser l'aider, de laisser le patient, de laisser le malade, de laisser le grand-parent ou le parent dans les mains d'un étranger qui ne va pas le connaître, qui va débarquer là pour deux jours. Donc le répit, oui, il est absolument nécessaire, il est indispensable et il est viscéral. Néanmoins, dans la pratique, c'est beaucoup plus compliqué. Être aidant, ça va nous arriver à tous fatalement à un moment ou à un autre. Ça frappe à notre porte, quelle que soit l'existence, et on n'est jamais préparé à ça. Si on peut trouver le soutien dans son environnement direct, c'est une chance inouïe. Si ce n'est pas le cas, c'est quelque chose d'effectivement très lourd, physiquement, moralement. Mais je pense que personne ne sort perdant de cette situation.

Description

La journaliste Nathalie Lévy, présentatrice d'En Aparté sur Canal +, ex-présentatrice sur BFMTV, est l'autrice de "Courage au coeur et sac au dos" (éditions du Rocher). Elle propose un témoignage à la première personne émouvant sur ses années en tant qu'aidante familiale. Avec les femmes de sa famille, elle s'est occupée de sa grand-mère Rosine à tour de rôle en mettant en place un véritable planning pour l'entourer de tout leur amour. Elle raconte les difficultés de l'aidance, la culpabilité de laisser l'aidé, et les obstacles au fait d'être aidant et de travailler.


Retrouvez le Grand dossier sur "Être aidant et travailler"

Leur rôle est crucial dans la société mais ils sont peu identifiés et donc, peu soutenus. Aider un proche vulnérable impacte le quotidien et, souvent, la carrière. Comment le monde du travail doit-il évoluer pour que chacun y trouve sa place ?


Ce podcast est lié aux Grands dossiers de la Caisse des Dépôts. A lire d'urgence !


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Transcription

  • Speaker #0

    Je m'appelle Nathalie Lévy, je suis journaliste. J'ai une grand-mère dont j'ai été très très proche dès ma plus tendre enfance, Rosine, qui fatalement, en prenant de l'âge, a commencé à avoir des soucis de santé, une incapacité à se déplacer, à être autonome, consécutivement à une chute au début du confinement. Elle a été hospitalisée, on a souhaité de manière catégorique et unanime la réintégrer dans son domicile. Et à partir de là, s'est mise en place une ronde de femmes, de trois femmes, ma mère, ma tante et moi-même, pour lui permettre d'avoir un quotidien à peu près acceptable, dans ses odeurs, dans ses meubles, dans ses tableaux, etc. Voilà, moi j'étais beaucoup là le matin avant d'aller travailler, ma maman venait plutôt à l'enfin d'après-midi, ma tante à la mi-journée. Il y avait comme ça cette organisation précaire, mais qui nous a permis de tenir quand même, qui lui a permis d'avoir... Les mains, le regard, les voix de ses proches, de ceux avec lesquels elle était depuis toujours. Et je pense que c'est fondamental, être aidant, c'était déjà une découverte, une surprise. Je ne me positionnais pas du tout comme telle, je n'en avais pas du tout conscience. Je crois même que je n'avais jamais trop compris ce que c'était. Moi, j'étais la petite fille de ma mamie et donc il était normal et naturel et organique que je m'occupe d'elle comme elle s'était occupée de moi petite. Donc, certains gestes, comme lui laver les cheveux, lui laver le dos, c'était une évidence. Lui apporter des packs d'eau, de lait, etc. Pareil, ça allait de soi. Après, il y a des gestes et il y a des soins. Donc, ça se transforme. Mais ça ne transforme pas notre relation. J'ai eu la chance d'accompagner quelqu'un que j'aimais foncièrement. Donc, sans doute que ça change aussi la donne et que ce ne serait pas mesuré de la même manière quand on est dans une obligation avec quelqu'un qui est peut-être plus difficile à gérer. Mais... L'amour nous a guidés en fait. Moi c'est une année où je change de média, d'employeur, et où je décide de dire la réalité de mon existence et de mon quotidien. Je ne me vivais pas comme aidante à ce moment-là, même si j'étais dans une compagnie vraiment, pour certains, qui pourrait être excessive puisque je la voyais quotidiennement à Ami. J'ai passé plus de temps chez elle le matin qu'à faire des rendez-vous pour le boulot ou des choses comme ça. J'avais un nouvel employeur dont je sentais qu'il pouvait y avoir une forme d'empathie, de compréhension. C'est une femme. avec laquelle je m'entendais très bien. Et donc, je me suis livrée. Je me suis livrée sur ma réalité, sur le fait que j'avais besoin de cette disponibilité pour être avec ma grand-mère au quotidien. Et donc, j'arriverais plus tard. Ça ne m'empêcherait pas d'être pleinement engagée, disponible, etc. Mais j'avais besoin d'être délocalisée. Et on m'a entendue. On m'a dit oui, mais bien sûr, on m'a plutôt encouragée. Et dans les faits, les choses se sont passées tout à fait autrement puisque c'est ce qu'on m'a reproché finalement au moment d'être conduite. Oui, c'est stigmatisant d'être aidant en entreprise. On est montré du doigt, on peut être vite isolé. Il n'y a pas de bienveillance en fait. Moi, je croyais qu'il y avait cette empathie, mais elle n'existe pas. Donc, c'est pour ça qu'il faut en parler. Moi, j'estime que ça m'a apporté beaucoup. D'abord, la résilience, bien sûr, mais aussi la résistance au stress, les capacités organisationnelles, parce qu'on est là plus efficace dans le temps imparti au boulot. Comme on sait qu'on devient multitâche, voilà, on apprend cette souplesse. Je pense que ça développe aussi des qualités émotionnelles. Une autre forme d'écoute, un autre regard sur les autres, sur les confrères, les consœurs, sur leurs difficultés. Je suis très contente d'avoir réussi à assumer ça en dépit des conséquences. Je pense que dans l'entreprise, les aidants sont un atout et pas un poids. C'est lourd d'être aidant, c'est lourd de savoir que le passage obligé quotidien, ce n'est pas uniquement son job ou aller chercher ses enfants, c'est aussi le domicile de l'aider. Moi, j'ai vu ma maman vraiment avoir des mots qu'on a pu... Oui, assimilée très vite à une forme de burn-out, alors léger heureusement, mais surtout des problèmes d'oreille, de vertige. C'est son corps qui a dit stop en fait. Elle avait des problèmes de dos et une fatigue nerveuse extrême. Moi-même, pareil, tendinite. Voilà, ça n'a pas loupé. À un moment, on pète les plombs, on a juste besoin d'air, de souffler. Et on rentre chez soi, on emporte ça avec soi et donc on va reporter sur son enfant une forme d'agacement, une impatience très forte. Parce que quand on est aidant, c'est très compliqué de laisser l'aider, de laisser le patient, de laisser le malade, de laisser le grand-parent ou le parent dans les mains d'un étranger qui ne va pas le connaître, qui va débarquer là pour deux jours. Donc le répit, oui, il est absolument nécessaire, il est indispensable et il est viscéral. Néanmoins, dans la pratique, c'est beaucoup plus compliqué. Être aidant, ça va nous arriver à tous fatalement à un moment ou à un autre. Ça frappe à notre porte, quelle que soit l'existence, et on n'est jamais préparé à ça. Si on peut trouver le soutien dans son environnement direct, c'est une chance inouïe. Si ce n'est pas le cas, c'est quelque chose d'effectivement très lourd, physiquement, moralement. Mais je pense que personne ne sort perdant de cette situation.

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La journaliste Nathalie Lévy, présentatrice d'En Aparté sur Canal +, ex-présentatrice sur BFMTV, est l'autrice de "Courage au coeur et sac au dos" (éditions du Rocher). Elle propose un témoignage à la première personne émouvant sur ses années en tant qu'aidante familiale. Avec les femmes de sa famille, elle s'est occupée de sa grand-mère Rosine à tour de rôle en mettant en place un véritable planning pour l'entourer de tout leur amour. Elle raconte les difficultés de l'aidance, la culpabilité de laisser l'aidé, et les obstacles au fait d'être aidant et de travailler.


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Leur rôle est crucial dans la société mais ils sont peu identifiés et donc, peu soutenus. Aider un proche vulnérable impacte le quotidien et, souvent, la carrière. Comment le monde du travail doit-il évoluer pour que chacun y trouve sa place ?


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    Je m'appelle Nathalie Lévy, je suis journaliste. J'ai une grand-mère dont j'ai été très très proche dès ma plus tendre enfance, Rosine, qui fatalement, en prenant de l'âge, a commencé à avoir des soucis de santé, une incapacité à se déplacer, à être autonome, consécutivement à une chute au début du confinement. Elle a été hospitalisée, on a souhaité de manière catégorique et unanime la réintégrer dans son domicile. Et à partir de là, s'est mise en place une ronde de femmes, de trois femmes, ma mère, ma tante et moi-même, pour lui permettre d'avoir un quotidien à peu près acceptable, dans ses odeurs, dans ses meubles, dans ses tableaux, etc. Voilà, moi j'étais beaucoup là le matin avant d'aller travailler, ma maman venait plutôt à l'enfin d'après-midi, ma tante à la mi-journée. Il y avait comme ça cette organisation précaire, mais qui nous a permis de tenir quand même, qui lui a permis d'avoir... Les mains, le regard, les voix de ses proches, de ceux avec lesquels elle était depuis toujours. Et je pense que c'est fondamental, être aidant, c'était déjà une découverte, une surprise. Je ne me positionnais pas du tout comme telle, je n'en avais pas du tout conscience. Je crois même que je n'avais jamais trop compris ce que c'était. Moi, j'étais la petite fille de ma mamie et donc il était normal et naturel et organique que je m'occupe d'elle comme elle s'était occupée de moi petite. Donc, certains gestes, comme lui laver les cheveux, lui laver le dos, c'était une évidence. Lui apporter des packs d'eau, de lait, etc. Pareil, ça allait de soi. Après, il y a des gestes et il y a des soins. Donc, ça se transforme. Mais ça ne transforme pas notre relation. J'ai eu la chance d'accompagner quelqu'un que j'aimais foncièrement. Donc, sans doute que ça change aussi la donne et que ce ne serait pas mesuré de la même manière quand on est dans une obligation avec quelqu'un qui est peut-être plus difficile à gérer. Mais... L'amour nous a guidés en fait. Moi c'est une année où je change de média, d'employeur, et où je décide de dire la réalité de mon existence et de mon quotidien. Je ne me vivais pas comme aidante à ce moment-là, même si j'étais dans une compagnie vraiment, pour certains, qui pourrait être excessive puisque je la voyais quotidiennement à Ami. J'ai passé plus de temps chez elle le matin qu'à faire des rendez-vous pour le boulot ou des choses comme ça. J'avais un nouvel employeur dont je sentais qu'il pouvait y avoir une forme d'empathie, de compréhension. C'est une femme. avec laquelle je m'entendais très bien. Et donc, je me suis livrée. Je me suis livrée sur ma réalité, sur le fait que j'avais besoin de cette disponibilité pour être avec ma grand-mère au quotidien. Et donc, j'arriverais plus tard. Ça ne m'empêcherait pas d'être pleinement engagée, disponible, etc. Mais j'avais besoin d'être délocalisée. Et on m'a entendue. On m'a dit oui, mais bien sûr, on m'a plutôt encouragée. Et dans les faits, les choses se sont passées tout à fait autrement puisque c'est ce qu'on m'a reproché finalement au moment d'être conduite. Oui, c'est stigmatisant d'être aidant en entreprise. On est montré du doigt, on peut être vite isolé. Il n'y a pas de bienveillance en fait. Moi, je croyais qu'il y avait cette empathie, mais elle n'existe pas. Donc, c'est pour ça qu'il faut en parler. Moi, j'estime que ça m'a apporté beaucoup. D'abord, la résilience, bien sûr, mais aussi la résistance au stress, les capacités organisationnelles, parce qu'on est là plus efficace dans le temps imparti au boulot. Comme on sait qu'on devient multitâche, voilà, on apprend cette souplesse. Je pense que ça développe aussi des qualités émotionnelles. Une autre forme d'écoute, un autre regard sur les autres, sur les confrères, les consœurs, sur leurs difficultés. Je suis très contente d'avoir réussi à assumer ça en dépit des conséquences. Je pense que dans l'entreprise, les aidants sont un atout et pas un poids. C'est lourd d'être aidant, c'est lourd de savoir que le passage obligé quotidien, ce n'est pas uniquement son job ou aller chercher ses enfants, c'est aussi le domicile de l'aider. Moi, j'ai vu ma maman vraiment avoir des mots qu'on a pu... Oui, assimilée très vite à une forme de burn-out, alors léger heureusement, mais surtout des problèmes d'oreille, de vertige. C'est son corps qui a dit stop en fait. Elle avait des problèmes de dos et une fatigue nerveuse extrême. Moi-même, pareil, tendinite. Voilà, ça n'a pas loupé. À un moment, on pète les plombs, on a juste besoin d'air, de souffler. Et on rentre chez soi, on emporte ça avec soi et donc on va reporter sur son enfant une forme d'agacement, une impatience très forte. Parce que quand on est aidant, c'est très compliqué de laisser l'aider, de laisser le patient, de laisser le malade, de laisser le grand-parent ou le parent dans les mains d'un étranger qui ne va pas le connaître, qui va débarquer là pour deux jours. Donc le répit, oui, il est absolument nécessaire, il est indispensable et il est viscéral. Néanmoins, dans la pratique, c'est beaucoup plus compliqué. Être aidant, ça va nous arriver à tous fatalement à un moment ou à un autre. Ça frappe à notre porte, quelle que soit l'existence, et on n'est jamais préparé à ça. Si on peut trouver le soutien dans son environnement direct, c'est une chance inouïe. Si ce n'est pas le cas, c'est quelque chose d'effectivement très lourd, physiquement, moralement. Mais je pense que personne ne sort perdant de cette situation.

Description

La journaliste Nathalie Lévy, présentatrice d'En Aparté sur Canal +, ex-présentatrice sur BFMTV, est l'autrice de "Courage au coeur et sac au dos" (éditions du Rocher). Elle propose un témoignage à la première personne émouvant sur ses années en tant qu'aidante familiale. Avec les femmes de sa famille, elle s'est occupée de sa grand-mère Rosine à tour de rôle en mettant en place un véritable planning pour l'entourer de tout leur amour. Elle raconte les difficultés de l'aidance, la culpabilité de laisser l'aidé, et les obstacles au fait d'être aidant et de travailler.


Retrouvez le Grand dossier sur "Être aidant et travailler"

Leur rôle est crucial dans la société mais ils sont peu identifiés et donc, peu soutenus. Aider un proche vulnérable impacte le quotidien et, souvent, la carrière. Comment le monde du travail doit-il évoluer pour que chacun y trouve sa place ?


Ce podcast est lié aux Grands dossiers de la Caisse des Dépôts. A lire d'urgence !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Je m'appelle Nathalie Lévy, je suis journaliste. J'ai une grand-mère dont j'ai été très très proche dès ma plus tendre enfance, Rosine, qui fatalement, en prenant de l'âge, a commencé à avoir des soucis de santé, une incapacité à se déplacer, à être autonome, consécutivement à une chute au début du confinement. Elle a été hospitalisée, on a souhaité de manière catégorique et unanime la réintégrer dans son domicile. Et à partir de là, s'est mise en place une ronde de femmes, de trois femmes, ma mère, ma tante et moi-même, pour lui permettre d'avoir un quotidien à peu près acceptable, dans ses odeurs, dans ses meubles, dans ses tableaux, etc. Voilà, moi j'étais beaucoup là le matin avant d'aller travailler, ma maman venait plutôt à l'enfin d'après-midi, ma tante à la mi-journée. Il y avait comme ça cette organisation précaire, mais qui nous a permis de tenir quand même, qui lui a permis d'avoir... Les mains, le regard, les voix de ses proches, de ceux avec lesquels elle était depuis toujours. Et je pense que c'est fondamental, être aidant, c'était déjà une découverte, une surprise. Je ne me positionnais pas du tout comme telle, je n'en avais pas du tout conscience. Je crois même que je n'avais jamais trop compris ce que c'était. Moi, j'étais la petite fille de ma mamie et donc il était normal et naturel et organique que je m'occupe d'elle comme elle s'était occupée de moi petite. Donc, certains gestes, comme lui laver les cheveux, lui laver le dos, c'était une évidence. Lui apporter des packs d'eau, de lait, etc. Pareil, ça allait de soi. Après, il y a des gestes et il y a des soins. Donc, ça se transforme. Mais ça ne transforme pas notre relation. J'ai eu la chance d'accompagner quelqu'un que j'aimais foncièrement. Donc, sans doute que ça change aussi la donne et que ce ne serait pas mesuré de la même manière quand on est dans une obligation avec quelqu'un qui est peut-être plus difficile à gérer. Mais... L'amour nous a guidés en fait. Moi c'est une année où je change de média, d'employeur, et où je décide de dire la réalité de mon existence et de mon quotidien. Je ne me vivais pas comme aidante à ce moment-là, même si j'étais dans une compagnie vraiment, pour certains, qui pourrait être excessive puisque je la voyais quotidiennement à Ami. J'ai passé plus de temps chez elle le matin qu'à faire des rendez-vous pour le boulot ou des choses comme ça. J'avais un nouvel employeur dont je sentais qu'il pouvait y avoir une forme d'empathie, de compréhension. C'est une femme. avec laquelle je m'entendais très bien. Et donc, je me suis livrée. Je me suis livrée sur ma réalité, sur le fait que j'avais besoin de cette disponibilité pour être avec ma grand-mère au quotidien. Et donc, j'arriverais plus tard. Ça ne m'empêcherait pas d'être pleinement engagée, disponible, etc. Mais j'avais besoin d'être délocalisée. Et on m'a entendue. On m'a dit oui, mais bien sûr, on m'a plutôt encouragée. Et dans les faits, les choses se sont passées tout à fait autrement puisque c'est ce qu'on m'a reproché finalement au moment d'être conduite. Oui, c'est stigmatisant d'être aidant en entreprise. On est montré du doigt, on peut être vite isolé. Il n'y a pas de bienveillance en fait. Moi, je croyais qu'il y avait cette empathie, mais elle n'existe pas. Donc, c'est pour ça qu'il faut en parler. Moi, j'estime que ça m'a apporté beaucoup. D'abord, la résilience, bien sûr, mais aussi la résistance au stress, les capacités organisationnelles, parce qu'on est là plus efficace dans le temps imparti au boulot. Comme on sait qu'on devient multitâche, voilà, on apprend cette souplesse. Je pense que ça développe aussi des qualités émotionnelles. Une autre forme d'écoute, un autre regard sur les autres, sur les confrères, les consœurs, sur leurs difficultés. Je suis très contente d'avoir réussi à assumer ça en dépit des conséquences. Je pense que dans l'entreprise, les aidants sont un atout et pas un poids. C'est lourd d'être aidant, c'est lourd de savoir que le passage obligé quotidien, ce n'est pas uniquement son job ou aller chercher ses enfants, c'est aussi le domicile de l'aider. Moi, j'ai vu ma maman vraiment avoir des mots qu'on a pu... Oui, assimilée très vite à une forme de burn-out, alors léger heureusement, mais surtout des problèmes d'oreille, de vertige. C'est son corps qui a dit stop en fait. Elle avait des problèmes de dos et une fatigue nerveuse extrême. Moi-même, pareil, tendinite. Voilà, ça n'a pas loupé. À un moment, on pète les plombs, on a juste besoin d'air, de souffler. Et on rentre chez soi, on emporte ça avec soi et donc on va reporter sur son enfant une forme d'agacement, une impatience très forte. Parce que quand on est aidant, c'est très compliqué de laisser l'aider, de laisser le patient, de laisser le malade, de laisser le grand-parent ou le parent dans les mains d'un étranger qui ne va pas le connaître, qui va débarquer là pour deux jours. Donc le répit, oui, il est absolument nécessaire, il est indispensable et il est viscéral. Néanmoins, dans la pratique, c'est beaucoup plus compliqué. Être aidant, ça va nous arriver à tous fatalement à un moment ou à un autre. Ça frappe à notre porte, quelle que soit l'existence, et on n'est jamais préparé à ça. Si on peut trouver le soutien dans son environnement direct, c'est une chance inouïe. Si ce n'est pas le cas, c'est quelque chose d'effectivement très lourd, physiquement, moralement. Mais je pense que personne ne sort perdant de cette situation.

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