Le sport de haut-niveau est-il bon pour la santé ? - Avec Denis Morcel, Kinésithérapeute de l'Équipe de France de Football cover
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Hors-Champ

Le sport de haut-niveau est-il bon pour la santé ? - Avec Denis Morcel, Kinésithérapeute de l'Équipe de France de Football

Le sport de haut-niveau est-il bon pour la santé ? - Avec Denis Morcel, Kinésithérapeute de l'Équipe de France de Football

29min |17/04/2024
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Description

Denis Morcel, kinésithérapeute de l’Équipe de France de Football, nous plonge dans une réflexion profonde sur la dualité entre performance sportive et santé. Alors que les calendriers sportifs deviennent de plus en plus exigeants, une question fondamentale se pose : le sport est-il réellement bon pour la santé? Dans cet épisode inaugural, nous explorons les défis auxquels les sportifs de haut niveau sont confrontés, et la manière dont ils jonglent entre l'exigence de la performance et le souci de préserver leur bien-être physique et mental.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Denis Morcel

    Bonjour Océane, je m'appelle Denis Morcel, je suis masseur kinesthérapeute depuis très longtemps. On peut considérer que, comme l'a noté l'équipe après l'Euro, le très expérimenté Denis Morcel me référent surtout à mon âge. Donc j'exerce depuis... 1981, avec un exercice libéral, j'exerce en cabinet, qui est spécialisé dans le traitement des TMS, des troubles musculosquelétiques, c'est-à-dire qu'on ne fait que de la rheumatologie et que de la traumatologie. J'ai travaillé 20 ans au stade Malherbe de Caen, c'est mon club de cœur évidemment, étant cané. Je suis passé après, quand j'ai arrêté le stade Malherbe, je suis passé avec l'équipe nationale du Sénégal. J'ai fait deux années et demie, après je suis passé avec l'équipe nationale du Maroc, après j'ai été faire un petit tour au Japon, et depuis, comme tu l'as dit Océane, depuis le septembre 2014, j'ai fait partie, j'ai l'honneur et le privilège de faire partie du stade médical de l'équipe de France de football.

  • Océane Marsault

    Comment vous êtes arrivé jusqu'à travailler avec l'équipe de France ?

  • Denis Morcel

    C'est une histoire de contact, d'échange, de rencontre, c'est une histoire aussi de confiance. L'intégration au sein du stade de l'équipe de France se fait via... en ce qui concerne chaque catégorie professionnelle via le responsable de cette catégorie-là, en l'occurrence le Dr Le Gall, qui est le médecin de l'équipe de France depuis 2012. C'est lui qui apporte le nom et les candidats par rapport à leur expérience et capacité professionnelle. Et derrière, il y a l'humain, l'humain qui est essentiel dans le fonctionnement d'un groupe, dans le fonctionnement d'un staff. Et là, c'est le grand patron qui décide ou pas.

  • Océane Marsault

    Vous nous parliez du coup des sélections étrangères dans lesquelles vous avez eu l'opportunité de pratiquer. Est-ce que vous avez appris des nouvelles techniques, des choses différentes pour vous permettre d'arriver jusqu'en équipe de France ?

  • Denis Morcel

    Alors, j'ai énormément de défauts, mais j'ai une qualité que je revendique, qui est l'humilité. Malgré mon âge avancé, j'apprends tous les jours. Donc, on est, inévitablement, quand on croise des gens, quand on croise des expertises, on apprend tous les jours. Et évidemment, que tout ce que j'ai pu accumuler comme rencontres, comme échanges, je me souviens au Japon, j'avais un collègue qui utilisait des bandes de... des petites bandes de tape qui collaient à une vitesse vertigineuse, qui faisaient des tresses, on avait l'impression qu'ils tricotaient avec des bandes de tape. Donc ça, j'ai appris de là, j'ai appris de partout, et ça nous arrive régulièrement d'avoir des stagiaires au cabinet, et je suis tout à fait capable de recevoir un conseil et un avis du stagiaire, une chose que je ne connais pas, et de toute façon, jusqu'à sa mort, on apprend toujours. et on doit toujours avoir cette vigilance à être réceptif. Après, depuis que je suis dans le staff de l'équipe de France, je côtoie des gens d'exception, quelle que soit la partie, que ce soit la sécurité, l'analyse vidéo, mes collègues, le médecin, tout ça, j'ai plaisir à côtoyer des gens qui ont vraiment une expertise dans leur domaine qui est fabuleuse.

  • Océane Marsault

    On entend souvent que le sport est bon pour la santé, mais qu'en est-il pour le sport de haut niveau ? Comment vous, en tant que professionnel médical, vous arrivez à gérer cette dualité entre la performance qui pousse les corps à l'extrême et le fait qu'il faut préserver la santé de vos athlètes ?

  • Denis Morcel

    Sur ta question, je vais faire deux petites apartés. Je vais parler du sport en général. Le sport est bon pour la santé, évidemment, puisque quand on ne bouge plus... à l'image de nos anciens, tout le temps que nos anciens vont chercher leur journaux, vont faire leur course à pied, tout va bien. Quand ils passent du canapé au lit, ça va beaucoup moins bien, et quand ils restent au lit, c'est la fin. Donc là, sur cet aspect-là, on est dans une année olympique, et on a un petit peu le sentiment, en termes de communication, que tous les Français sont champions olympiques. Donc sur la partie... pas haute compétition, mais sur la partie générale du sport, la communication, je trouve que la communication est très mal faite, on ne parle que de sport entreprise, sport santé, sport ceci, sport cela, le cabinet, et tous les cabinets qui reçoivent des sportifs sont pleins de sportifs, donc si c'était aussi bon que ça, ça saurait, et en communiquant de cette façon-là, on supprime tous les gens qui n'ont jamais fait de sport. On aurait parlé d'activité physique, déjà tu n'élimines pas les gens qui n'ont jamais fait de sport, quand tu parles de sport. santé, le mec va te dire bah oui mais non, moi j'ai jamais fait de sport, c'est pas pour moi après t'élimines les chauves ceux qui sont surpoids, tout ça donc ça c'est pour la première partie après on est dans une société où on est un peu dans l'ultra performance c'est à dire que maintenant aujourd'hui plus personne ne fait un marathon sans que la terre entière soit au courant c'est bien de faire un marathon mais quand tu fais un marathon tu fais pour toi, tu fais pas pour que la terre entière soit au courant via les réseaux via la communication après concernant le sport de haut niveau j'ai 40 ans de recul par rapport au sport de haut niveau, et je sais que mes footballeurs de l'époque du stade Malheur-de-Camp, avec lesquels je bossais il y a 40 ans, sont en... très mauvais état physique par rapport à ce que seront mes footballeurs actuels, parce qu'on a cette notion de prévention, on a cette notion, les joueurs maintenant savent que s'ils ne font pas telle chose un jour ou l'autre, ils auront des retombées. Les joueurs maintenant, je me souviens à l'époque, à Malherbe, les gars arrivaient un quart d'heure avant l'entraînement et puis ils repartaient en courant parce qu'ils avaient toujours des trucs à faire. Après, ils étaient semi-professionnels, mais n'empêche Aujourd'hui, les joueurs descendent 45 minutes, 60 minutes avant la séance, avec des routines, avec des échauffements, avec évidemment le passage dans les mains du clinique s'il y a besoin, avec, en fonction d'une pathologie relativement proche, une lésion aux ischios, avec des routines d'échauffement, de travail excentrique, de travail avec des élastiques, pour être prêt pour s'entraîner. dans la même idée, après la séance, on va s'étirer, on va se faire masser. on va se faire mobiliser, on a les bains froids que tout le monde connaît maintenant, et ça peut durer une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure, une heure et demie après l'entraînement. Et tout ça fait partie de la prévention, c'est ce qui fait qu'au lieu de se retrouver 20 ans après leur fin de carrière avec une prothèse de joue ou une prothèse de hanche, parce que c'est ça la réalité du sport de haut niveau, à partir du moment où tu pousses la machine pendant des années, si tu n'as pas cette notion de prévention, inévitablement 5, 10, 15, 20 ans plus tard tu vas payer. avec en plus l'arrêt du haut niveau bien souvent ça s'accompagne d'une prise de poids et donc sur les articulations qui ont été malmenées pendant des années,

  • Océane Marsault

    c'est délétère ça rejoint du coup pas mal ce que je voulais qu'on aborde en seconde partie est-ce que vous trouvez Denis qu'il y a un changement peut-être générationnel au niveau des sportifs est-ce qu'ils priorisent leur santé à court terme pour la performance immédiate ? et leur carrière de sportif de haut niveau, mais ils réfléchissent aussi à leur santé à long terme, avec le fait que de plus en plus de sportifs retraités ont des carrières professionnelles dans d'autres domaines que le sport de haut niveau, et du coup il faut qu'ils puissent continuer à être actifs, à marcher, à se déplacer, à avoir une vie haute que le sport de haut niveau.

  • Denis Morcel

    Je rejoins parfaitement sur ce sujet, c'est-à-dire qu'ils ont cette sensibilité-là, alors ils l'ont, d'autant plus qu'ils auront une pathologie. Forcément. Je ne sais pas, tu en prends un qui s'est fait opérer d'un menisque, il se focus un peu sur son genou, il va faire toujours très bien attention de préserver ses mobilités, de conserver sa force musculaire, pour que son genou ne soit pas mis en danger par un déficit de mobilité ou par un déficit de force. Effectivement, ils sont très sensibilisés par rapport à ça. D'aucuns, après leur carrière professionnelle, sont capables d'avoir un certain niveau dans d'autres activités sportives, comme le golf, par exemple. Effectivement, si tu es boiteux comme on dit chez nous, forcément, le parcours n'est pas aussi agréable que si tout allait bien. Mais oui, oui, et puis on a... le staff médical, le staff technique, tous les gens qui sont proches des joueurs, les sensibilisent là-dessus pour ceux qui ne le sont pas. Et on insiste là-dessus que, de toute façon, c'est gagnant-gagnant. C'est-à-dire que si on a une vigilance au moment où on est en pleine activité, ce ne sera que du bonus par la suite.

  • Océane Marsault

    C'est assez contradictoire avec la réalité des calendriers sportifs actuels, où il y a de plus en plus de championnats et de plus en plus de matchs. On a par exemple une étude qui est sortie en 2023 qui montre que les joueurs de foot internationaux jouent en moyenne un match tous les cinq jours, ce qui est hyper important. Il y a l'entraîneur de Liverpool qui a pris la parole en 2020 et plusieurs fois depuis en allant jusqu'à dire vous tuez mes joueurs Comment est-ce que c'est possible qu'on réfléchisse de plus en plus à la santé du joueur et en parallèle les entités créent de plus en plus de championnats ?

  • Denis Morcel

    C'est le grand paradoxe. C'est-à-dire que d'un côté, tu as la vigilance qu'on doit avoir pour la santé de nos joueurs. Effectivement, comme tu le dis, en moyenne, c'est un match tous les cinq jours. Et puis d'un autre côté, tu as l'air de la guerre qui est l'argent. à chaque fois qu'il y a un match qui est télévisé, ça rapporte de l'argent, à chaque fois qu'il y a un match qui se joue, le stade est plein, et ainsi de suite. Et donc on est capable de faire des choses qui sont complètement ubuesques. Je peux te donner l'exemple de l'Euro 2016, où on a été, je crois, 7 jours entre deux matchs, entre peut-être le huitième et le quart de finale. et à côté de ça, on a joué notre demi-finale à Marseille le jeudi et on joue la finale le dimanche. On sait qu'un joueur a besoin de 4 jours complets pour récupérer complètement. Ça ne sert à rien. S'il en a 5, c'est bien. S'il en a 6, c'est bien. Mais en dessous de 4 jours, il n'a pas récupéré. Même s'il tue le masque, même s'il fait des bains froids, même si on utilise toutes les techniques de récupération possibles, il faut 4 jours. Nous, on a joué le jeudi. Donc, ça fait vendredi, samedi, dimanche, 3 jours. On a joué notre finale de l'Euro. à trois jours de la demi-finale. Les Portugais avaient joué le mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, quatre jours. Bis repetita a doa. Les Argentins ont joué le mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, quatre jours. Nous, on a joué le jeudi. Et donc, Alors, l'explication est simple. Ça rapporte beaucoup plus d'argent de faire une demi-finale, de retransmettre et de vendre des droits à une demi-finale le mercredi et d'en vendre d'autres le jeudi. Tu mets un match à 18h, tu mets un match à 20h le même jour, ça rapporte moins. Le nerf de la guerre, c'est l'argent. Et on est capable, effectivement, de l'aiser. Parce que là, clairement, physiologiquement, encore une fois, quand tu joues le jeudi, et que la finale est le dimanche, tu es lésé par rapport à ton adversaire qui joue le mercredi et dans la finale dimanche. En 2018, nous avions joué la demi-finale le mardi, les Croates avaient joué leur demi-finale le mercredi, mais mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, 4 jours. Donc ils avaient récupéré. Il y avait une vraie égalité physique sur la récupération. Mais le nerf de la guerre, c'est l'argent. Et c'est l'argent qui décide. C'est l'argent qui décide. Alors après, il y aura certainement des limites. Il y a eu un tollé quand il a été proposé de faire une Coupe du Monde tous les deux ans. Après, c'est infernal. On voit bien aussi la mise en place d'un super championnat. Là, ça n'a pas passé parce qu'il y a des nations de football, comme les Anglais notamment, et puis eux, ils ne lâcheront pas, je pense, et puis j'espère, où ils ont un championnat qui est le leur. Si tu fais un super championnat avec trois ou même... 4-5 équipes anglaises qui vont jouer contre les 4-5 équipes meilleures allemandes, les 4-5 meilleures équipes espagnoles, italiennes et françaises, tu perds l'identité, tu perds ton identité. Et les Anglais sont trop attachés, ils ont une culture footballistique trop importante pour que ça se produise. J'espère que ça ne se produira jamais. Peut-être que je me trompe, parce qu'évidemment, quand on va amener des millions, des millions, des millions, mais les Anglais n'ont pas besoin de ça. Ça fonctionne tellement bien leur championnat que... Ils n'ont pas besoin de ça. Mais effectivement, il y a une vraie problématique. Il y a une vraie problématique.

  • Océane Marsault

    C'est super intéressant parce qu'en tant que spectateur, on n'a pas du tout les tenants et les aboutissants qui influent sur ce type de décision. Et on ne se rend pas forcément compte de la contradiction qu'il y a entre ce qui est préconisé par le staff en termes de récupération du sportif et juste les besoins financiers du sport de haut niveau.

  • Denis Morcel

    c'est aussi un petit peu enfin c'est une forme d'incompatibilité mais aussi t'as une forme d'obligation c'est à dire ce qui va permettre de faire des stades magnifiques ce qui va permettre à des équipes de recruter tel ou tel joueur de prendre très l'entraîneur et tout il faut de l'argent donc c'est un peu le serpent qui se met en la queue mais il y a des limites je pense à ne pas dépasser il y a des limites à ne pas dépasser ça c'est sûr

  • Océane Marsault

    Quand vous parlez des joueurs qui ont besoin de 4 jours pour récupérer pleinement, comment vous gérez le fait que le joueur est avec vous pour la sélection de l'équipe de France, mais après il va retourner dans son club, donc ce n'est pas forcément le même staff. Est-ce qu'il y a un relationnel qui s'installe avec les staffs des clubs des joueurs ? Est-ce que vous les connaissez ? Est-ce que vous parlez des pathologies ?

  • Denis Morcel

    Alors c'est systématique, le relais c'est le patron du médical, c'est le doc, donc le doc, les médecins des différents clubs, lundi prochain il y a des joueurs qui vont arriver peut-être avec une petite séquelle d'entorse et tout, tout ça c'est la première réunion, la deuxième réunion qu'on fait, la première réunion c'est la réunion du staff, en fait il faut savoir que le staff se réunit le dimanche soir à Clairefontaine, que les joueurs arrivent le lundi midi, que le lundi matin à 10h on a une réunion staff avec l'organisation de la semaine. Le coach dit ceci, cela, les gars, prise de poids, le podologue, tel jour, éventuellement pour les obligations qu'ont les joueurs par rapport au... par rapport aux sponsors, tel entraînement, tel jour ouvert au public, tel autre ouvert aux sponsors, donc à tous les gens qui tournent autour du sponsoring. Et nous, derrière, une fois cette réunion faite, on passe au check. On a la liste des 23 joueurs et voilà, c'est parti. Donc on sait exactement ce qu'ils ont parce que le doc a un retour systématique. On a des échanges aussi privilégiés un peu avec les kinés. off de certains joueurs. Certains joueurs ont décliné en off, avec lesquels on s'entend parfaitement et avec lesquels on échange. Et puis après, dès que les joueurs arrivent, ils sont checkés, évidemment, ils sont checkés.

  • Océane Marsault

    On sait que de plus en plus, la population est sédentaire. Il y a aussi tout ce qui est arrivé des nouvelles technologies avec le téléphone. Par exemple, moi, j'ai les petits doigts tordus à force d'être sur mon téléphone toute la journée. Je ne sais pas du tout si c'est vous quelque chose que vous ressentez dans votre pratique et dans votre manipulation des corps au quotidien, ou est-ce que c'est complètement anecdotique parce que du coup, comme on est quand même dans le sport de haut niveau et que les athlètes sont quand même sensibilisés à la préservation de leur corps, ce n'est pas des choses et des changements culturels qui ont impacté les physiques ?

  • Denis Morcel

    Alors oui, oui bien sûr, c'est-à-dire que je vais sortir du foot et puis je vais passer au rugby. Je me souviens qu'il y a 40 ans, les premières lignes, ils étaient en surpoids, ils n'avançaient pas, ils ne couraient pas. Aujourd'hui, une première ligne est capable de piquer un sprint au rugby, d'éliminer un joueur en faisant une feinte et tout ça. Et on le voit puisque les premières et deuxièmes lignes arrivent à marquer des essais sur des courses. Alors effectivement, il y a 40 ans, le sportif de haut niveau... Il était beaucoup moins encadré que maintenant, il avait beaucoup moins d'informations sur la nutrition, sur la récupération. On n'avait pas tous les outils qu'on a aujourd'hui, maintenant, mais ça reste quand même, ce sont des gens qui sont jeunes. qui ont des nécessités d'hygiène de vie, en termes de sommeil, en termes d'alimentation, en termes de récupération, et on bataille parfois, comme tu le disais, avec le téléphone, avec les jeux, on le voit avec les enfants, et comme ce ne sont pas des enfants de joueurs, mais ils sont jeunes, donc ils peuvent très bien être un soir à 4 sur... sur leur console à faire Mario 4, des choses comme ça. Le prépa physique, le doc, on les sensibilise là-dessus, sur la récupération qui est essentielle. La première récupération, ça reste le sommeil. Si tu t'endors tous les soirs à 3h du matin et que tu te lèves à 11h, forcément la récupération n'est pas la même. Les anciens disaient que les heures avant minuit comptaient double pour le sommeil, mais avant qu'un joueur s'endorme, ce n'est pas le cas de tous, mais il faut qu'on ait cette vigilance-là. On est beaucoup plus pointu maintenant, mais on avait aussi cette sensibilité-là il y a 40 ans, beaucoup moins développée en termes de nourriture. Je me souviens parfaitement d'un joueur de camp. L'entraînement est à 9h30, il se réveille, il se réveille, il est à 9h05, c'est pas possible ça, c'est pas possible, il faut anticiper, il faut que la machine se mette en route, il y a un dérouillage à faire, général, articulaire, musculaire, tendineux, mais oui, c'est un combat, c'est un combat, c'est un combat, un combat sans heure, mais on a toujours cette vigilance-là, tout le temps, tout le temps, tout le temps.

  • Océane Marsault

    Oui, si je comprends bien, en fait, vous, c'est une sensibilité que vous avez depuis un moment, mais elle arrive au fur et à mesure dans le sport de haut niveau et elle s'ancre de plus en plus dans la tête des sportifs. Est-ce que vous trouvez qu'on peut un peu faire un parallèle avec le monde du travail où on le remarque de plus en plus ? Ok, les nouvelles générations sont ambitieuses, mais elles font aussi extrêmement attention à avoir du temps en plus de la vie professionnelle, à faire attention à leur bien-être mental, à leur bien-être physique. Est-ce que vous, c'est quelque chose que vous retrouvez dans le sport de haut niveau, qui est retranscrit avec les nouvelles générations de sportifs ?

  • Denis Morcel

    Oui, oui, oui, bien sûr. Tant au niveau physique qu'au niveau psychologique. Après, dans cette profession-là, enfin pas notamment, parce que c'est vrai pour les clubs, il y a des contraintes qui sont liées au fonctionnement du club ou de la fédération. Il y a des sponsors, il va falloir faire la pub pour un sponsor majeur qui est sur le t-shirt d'entraînement. Ça, c'est des contraintes que les joueurs aiment moyen, mais ça fait partie du deal aussi. quand un nouveau maillot va sortir, pour promouvoir le nouveau maillot, il va bien falloir prendre les joueurs en photo. On ne va pas prendre le kin en photo, parce que sinon, on va vendre zéro maillot. Donc là, oui, il y a des contraintes. Après, je pense que l'état d'esprit n'est pas du tout le même, parce que ce sont des compétiteurs et que dans la notion de compétition, il faut savoir aller au-delà de ses limites. Il faut savoir pousser la machine. Aujourd'hui... Alors je vais me faire des amis, mais j'ai bien peur qu'au travail, on ait du mal à pousser la machine. Moi, j'ai vécu toute ma vie professionnelle. Je te dirais presque que j'ai jamais travaillé. J'ai fait mon hobby, quoi. Moi, j'adore masser, j'adore soigner les gens. Chaque cas qui se présente à toi, c'est un nouveau défi, quoi. Et puis, les gens, ils sont dans la misère. Donc, tu essaies de faire en sorte qu'ils souffrent moins, qu'ils aillent mieux, qu'ils puissent reprendre leur activité sportive. Et le sportif, donc, on a des protocoles qui sont bien établis. Mais si on peut gratter 3-4 jours, c'est... sur 3-4 jours, ça fait que le match d'après va pouvoir le jouer ou pas. Et si tu gagnes 3-4 jours, ça va mettre l'intégrité physique du joueur en danger. Mais si on peut gratter et qu'on sait que le joueur ne risque rien, oui, ça c'est un challenge. Et c'est aussi ça dans l'exercice libéral, c'est aussi ça quand on intervient dans les entreprises sur le thème de la prévention. Après, je vais... Enfin, c'est pas une confidence que je vais te faire, mais à chaque fois que je vais dans une entreprise maintenant, tu te rends compte qu'il y a une vraie problématique de recrutement humain, que c'est très, très compliqué, et que dans les entreprises pour lesquelles j'interviens, j'interviens, pardon, dans la prévention des TMS... l'employeur peut mettre ça en avant. Il peut dire, nous, on a un kiné qui vient, qui va vous apprendre à gérer votre dos, à gérer tout ça. Il va vous apprendre les échauffements avant la prise de travail. Il va vous apprendre les étirements, comme on fait pour le sport de haut niveau. Et tu t'en es à argumenter pour recruter sur des critères comme ceux-là. Sur des critères comme ceux-là.

  • Océane Marsault

    Oui, qui n'y avait pas du tout leur place il y a 50 ans. Ah non,

  • Denis Morcel

    complètement, non, non, non, non, avant, t'avais jamais ça.

  • Océane Marsault

    T'en avais jamais entendu parler.

  • Denis Morcel

    Non, non, et puis, il y a eu cette époque-là où le salarié, enfin le salarié, le travailleur était de la marchandise, c'est-à-dire qu'il y allait, il se cassait le dos, c'est pas grave, vas-y, on en prenait un autre, et puis un autre prenait la place, et puis... Aujourd'hui, les entreprises sont pénalisées financièrement quand il y a des maladies professionnelles, quand il y a des excès de travail. Donc elles commencent à... Mais c'est compliqué à mettre en place, tout ça. C'est compliqué. La solution, elle est très simple. Si on veut faire de la prévention, on s'adresse aux gamins. On va dans les CFA du bâtiment, on va dans les lycées agricoles, on va dans les... Comment dirais-je ? Dans n'importe quelle entreprise. on n'est pas fait pour passer sa vie devant un écran, on n'est pas fait pour passer sa vie à masser, on n'est pas fait pour passer sa vie à soulever des sacs à huîtres, donc après il faut s'adapter, et s'adapter ça veut dire savoir comment se gérer, pour mieux récupérer, pour ne pas se mettre en lésion sur le travail, mais comme le sportif, et comme le sportif de niveau, on fait de la prévention, je vais te dire que c'est la même chose c'est à dire que notamment sur la gestion de la colonne vertébrale on a tous la même colonne vertébrale on a une colonne vertébrale à trois courbures donc ce qui marche avec le niveau marche avec l'entreprise, avec le salarié c'est exactement pareil mais on est dans la prévention et on est de plus en plus sensibles là-dessus et c'est pour ça aussi que nos footballeurs de haut niveau vieillissent mieux qu'il y a 40 ans

  • Océane Marsault

    Tout s'explique en fait.

  • Denis Morcel

    Oui, c'est logique. À partir du moment où tu prends soin de toi, à partir du moment où tu prends le temps, après une séance d'entraînement, de t'étirer, tu sais que tu as eu il y a trois semaines ou il y a un mois et demi une lésion sur ton ischio, tu sais qu'il faut bien garder cette élasticité, cette mobilité-là. Tu sais qu'à chaque fois que tu vas te faire masser, ça t'aide, ça t'allège la charge de travail sur ta cuisse. Et voilà, le soudeur qui passe toute sa journée à souder avec son arc, s'il n'a pas cette sensibilité-là de s'étirer un petit peu les avant-bras, s'étirer un peu les coudes, il va repartir le lendemain avec la charge de travail de la journée de la veille, ainsi de suite. C'est comme ça que s'installent les pathologies.

  • Océane Marsault

    Vous en parliez un peu au début, mais vous aimez continuer à apprendre en permanence durant toute votre carrière. Est-ce qu'il y a des avancées technologiques qui ont changé complètement votre pratique ? Je ne sais pas, les bains froids, les arrivées des ondes de choc, etc. Est-ce qu'en l'intégrant, ça a remplacé certains gestes que vous faisiez manuellement avant ?

  • Denis Morcel

    Alors, rien ne remplace la main. La main est intelligente, les ondes de choc ne le sont pas. Les ondes de choc deviennent intelligentes quand la main qu'il utilise est intelligente. Il y a une machine qui est fabuleuse qui s'appelle le LPG, c'est une machine française qui au départ c'était le palpé au relais aspiré, maintenant ils ont optimisé l'appareil, en fait c'est de la ventouse high-tech, pour simplifier. Mais si tu n'as pas la main pour l'utiliser, ça ne va pas être performant. Et les ventouses c'est pareil, on peut penser que les ventouses de massage sont des ventouses en silicone. qui sont comme ça, que tu peux utiliser sur certaines pathologies, il ne faut pas bourriner, il faut avoir une main intelligente. Moi, je revendique que le premier outil pour un thérapeute, c'est la main, et qu'après, effectivement, tu as les ondes de choc, c'est-à-dire que même, les ondes de choc, ce n'est pas fin, c'est un marteau-piqueur, donc même au travers de cet appareil-là, quand tu as une main, tu vas être capable de sentir la zone de tension, tu vas être capable de sentir la zone de fibros, tu vas être capable de sentir ces choses-là, Après, en termes de technologie, il y a eu des choses qui ont explosé. Je pense notamment à l'isocynétique. Ce sont des machines qui sont capables de mesurer la vitesse, la résistance d'un mouvement, l'amplitude. Et on sait que dans toutes les pathologies musculo-tendineuses, c'est indispensable de passer les sportifs et pourquoi pas les non-sportifs au besoin. Par contre, là, on est dans le high-tech. C'est une chose que je maîtrise. Très peu, je m'y intéresse, j'ai deux collègues en équipe de France qui sont experts là-dedans, et donc c'est leur partie, c'est pas la mienne. Et en ville, c'est pareil, si j'ai besoin d'un test ISO, ou si j'ai besoin de passer la main dans ma rééducation pour une lésion musculaire, ou une gammatoplastie, peu importe, j'ai mes contacts sur place, où j'envoie à des gens qui ont l'expertise que je n'ai pas. Les bains froids, oui, oui, les bains froids, oui, c'est... Mais les bains froids, ça commence aussi par... C'est une question aussi d'un peu d'éducation. C'est-à-dire qu'on sait qu'à froid, le muscle grossièrement a un état gélatineux et qu'à chaud, il a un état liquide. Donc tu te lèves le matin, ton muscle est à froid, donc il est gélatineux. Donc on sait que le matin, il vaut mieux prendre une douche chaude. qui va faire monter un peu la température et qui va liquidifier un peu ton muscle. Par contre, le soir, les gens disent je vais prendre un bon bain chaud avant d'aller me coucher Erreur, boulette. Le soir, tu prends ta douche chaude, je veux bien, et puis après, du nombril jusqu'aux orteils, il faut faire du froid. Le froid est en vase au constructeur. Le lendemain, tu te lèveras, tu auras les jambes beaucoup plus légères que si... que si t'as fait un bain chaud et ça c'est une les gens pensent que le bain chaud la douche chaude du soir c'est vraiment non c'est pas ça,

  • Océane Marsault

    c'est le froid qui fait récupérer et bah j'hésiterais pas à essayer ça la prochaine fois lors d'une sortie de course à pied vraiment t'aimes pas le froid,

  • Denis Morcel

    tu commences par t'émoller puis après tu montes petit à petit c'est très récupérateur et tu le sens en plus après quand tu vas te coucher c'est vraiment la sensation sur le on est 3-4 à courir dans le staff en équipe de France, deux collègues, le responsable des flux vidéo, et puis un des responsables de presse, et quand on ne filme pas trop tard le soir à Clairefontaine, pas trop tard ça veut dire... pas après 23h parce qu'au-delà après je ne le fais pas, mais ça m'arrive de faire un bain froid. Et le lendemain matin tu te lèves avec cette sensation très agréable au niveau des jambes, comme des petites bulles de chaleur qui se posent dans les jambes, c'est un vrai confort, c'est un vrai bonheur.

  • Océane Marsault

    En tout cas, super conseil pour tous les sportifs qui nous écoutent, n'hésitez pas à tester les bains froids ou les douches froides après l'effort, vous serez en meilleure forme le lendemain matin et vous récupérez beaucoup plus vite. On arrive déjà malheureusement à la fin de notre entretien. En tout cas, on a appris plein de choses. C'était un plaisir de vous avoir. Pour finir sur une note positive, est-ce que vous pouvez nous raconter l'événement ou l'émotion qui vous a le plus marqué pendant votre carrière sportive ?

  • Denis Morcel

    Il y en a plein. Il y a eu des émotions positives, des émotions négatives. Le positif, forcément, c'est quand on gagne. C'est quand on gagne. J'ai un souvenir vraiment très... très ancré de la demi-finale contre l'Allemagne à l'Euro 2016, où on avait fait un match de folie. Après, il y a des matchs où c'est plus la dramaturgie que le match en lui-même. Je me souviens, par exemple, le premier match contre... En 2022, à Doha, premier match contre l'Australie. Tu sais qu'il y a une maldiction sur le champion du monde. Les trois ou quatre dernières éditions de champion du monde n'ont pas passé les poules. Tu démarres contre l'Australie. Sur une action, tu perds Lucas Hernandez et tu prends un but. Et tu te dis, on va plonger. On va y avoir de l'austine. On va se faire lourder. Heureusement, non. On a bien vu qu'on avait la supériorité sur les Australiens et qu'on a pu revenir. J'ai évidemment la Coupe du Monde en 2018. Et dans ce... dans cet élan de la Coupe du Monde 2018 chaque match à coup près c'est-à-dire huitième, quart, demi ça a été émotionnellement fabuleux

  • Océane Marsault

    En tout cas merci beaucoup Denis d'avoir été notre premier invité, c'était un plaisir de commencer cette belle aventure avec vous Merci Océane Pour toutes les personnes qui nous écoutent, on se retrouve dès maintenant sur tous nos réseaux sociaux ou alors dès le mois prochain pour un nouvel épisode d'Organ qui sera disponible sur toutes les plateformes d'écoute

  • Denis Morcel

    Merci.

Description

Denis Morcel, kinésithérapeute de l’Équipe de France de Football, nous plonge dans une réflexion profonde sur la dualité entre performance sportive et santé. Alors que les calendriers sportifs deviennent de plus en plus exigeants, une question fondamentale se pose : le sport est-il réellement bon pour la santé? Dans cet épisode inaugural, nous explorons les défis auxquels les sportifs de haut niveau sont confrontés, et la manière dont ils jonglent entre l'exigence de la performance et le souci de préserver leur bien-être physique et mental.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Denis Morcel

    Bonjour Océane, je m'appelle Denis Morcel, je suis masseur kinesthérapeute depuis très longtemps. On peut considérer que, comme l'a noté l'équipe après l'Euro, le très expérimenté Denis Morcel me référent surtout à mon âge. Donc j'exerce depuis... 1981, avec un exercice libéral, j'exerce en cabinet, qui est spécialisé dans le traitement des TMS, des troubles musculosquelétiques, c'est-à-dire qu'on ne fait que de la rheumatologie et que de la traumatologie. J'ai travaillé 20 ans au stade Malherbe de Caen, c'est mon club de cœur évidemment, étant cané. Je suis passé après, quand j'ai arrêté le stade Malherbe, je suis passé avec l'équipe nationale du Sénégal. J'ai fait deux années et demie, après je suis passé avec l'équipe nationale du Maroc, après j'ai été faire un petit tour au Japon, et depuis, comme tu l'as dit Océane, depuis le septembre 2014, j'ai fait partie, j'ai l'honneur et le privilège de faire partie du stade médical de l'équipe de France de football.

  • Océane Marsault

    Comment vous êtes arrivé jusqu'à travailler avec l'équipe de France ?

  • Denis Morcel

    C'est une histoire de contact, d'échange, de rencontre, c'est une histoire aussi de confiance. L'intégration au sein du stade de l'équipe de France se fait via... en ce qui concerne chaque catégorie professionnelle via le responsable de cette catégorie-là, en l'occurrence le Dr Le Gall, qui est le médecin de l'équipe de France depuis 2012. C'est lui qui apporte le nom et les candidats par rapport à leur expérience et capacité professionnelle. Et derrière, il y a l'humain, l'humain qui est essentiel dans le fonctionnement d'un groupe, dans le fonctionnement d'un staff. Et là, c'est le grand patron qui décide ou pas.

  • Océane Marsault

    Vous nous parliez du coup des sélections étrangères dans lesquelles vous avez eu l'opportunité de pratiquer. Est-ce que vous avez appris des nouvelles techniques, des choses différentes pour vous permettre d'arriver jusqu'en équipe de France ?

  • Denis Morcel

    Alors, j'ai énormément de défauts, mais j'ai une qualité que je revendique, qui est l'humilité. Malgré mon âge avancé, j'apprends tous les jours. Donc, on est, inévitablement, quand on croise des gens, quand on croise des expertises, on apprend tous les jours. Et évidemment, que tout ce que j'ai pu accumuler comme rencontres, comme échanges, je me souviens au Japon, j'avais un collègue qui utilisait des bandes de... des petites bandes de tape qui collaient à une vitesse vertigineuse, qui faisaient des tresses, on avait l'impression qu'ils tricotaient avec des bandes de tape. Donc ça, j'ai appris de là, j'ai appris de partout, et ça nous arrive régulièrement d'avoir des stagiaires au cabinet, et je suis tout à fait capable de recevoir un conseil et un avis du stagiaire, une chose que je ne connais pas, et de toute façon, jusqu'à sa mort, on apprend toujours. et on doit toujours avoir cette vigilance à être réceptif. Après, depuis que je suis dans le staff de l'équipe de France, je côtoie des gens d'exception, quelle que soit la partie, que ce soit la sécurité, l'analyse vidéo, mes collègues, le médecin, tout ça, j'ai plaisir à côtoyer des gens qui ont vraiment une expertise dans leur domaine qui est fabuleuse.

  • Océane Marsault

    On entend souvent que le sport est bon pour la santé, mais qu'en est-il pour le sport de haut niveau ? Comment vous, en tant que professionnel médical, vous arrivez à gérer cette dualité entre la performance qui pousse les corps à l'extrême et le fait qu'il faut préserver la santé de vos athlètes ?

  • Denis Morcel

    Sur ta question, je vais faire deux petites apartés. Je vais parler du sport en général. Le sport est bon pour la santé, évidemment, puisque quand on ne bouge plus... à l'image de nos anciens, tout le temps que nos anciens vont chercher leur journaux, vont faire leur course à pied, tout va bien. Quand ils passent du canapé au lit, ça va beaucoup moins bien, et quand ils restent au lit, c'est la fin. Donc là, sur cet aspect-là, on est dans une année olympique, et on a un petit peu le sentiment, en termes de communication, que tous les Français sont champions olympiques. Donc sur la partie... pas haute compétition, mais sur la partie générale du sport, la communication, je trouve que la communication est très mal faite, on ne parle que de sport entreprise, sport santé, sport ceci, sport cela, le cabinet, et tous les cabinets qui reçoivent des sportifs sont pleins de sportifs, donc si c'était aussi bon que ça, ça saurait, et en communiquant de cette façon-là, on supprime tous les gens qui n'ont jamais fait de sport. On aurait parlé d'activité physique, déjà tu n'élimines pas les gens qui n'ont jamais fait de sport, quand tu parles de sport. santé, le mec va te dire bah oui mais non, moi j'ai jamais fait de sport, c'est pas pour moi après t'élimines les chauves ceux qui sont surpoids, tout ça donc ça c'est pour la première partie après on est dans une société où on est un peu dans l'ultra performance c'est à dire que maintenant aujourd'hui plus personne ne fait un marathon sans que la terre entière soit au courant c'est bien de faire un marathon mais quand tu fais un marathon tu fais pour toi, tu fais pas pour que la terre entière soit au courant via les réseaux via la communication après concernant le sport de haut niveau j'ai 40 ans de recul par rapport au sport de haut niveau, et je sais que mes footballeurs de l'époque du stade Malheur-de-Camp, avec lesquels je bossais il y a 40 ans, sont en... très mauvais état physique par rapport à ce que seront mes footballeurs actuels, parce qu'on a cette notion de prévention, on a cette notion, les joueurs maintenant savent que s'ils ne font pas telle chose un jour ou l'autre, ils auront des retombées. Les joueurs maintenant, je me souviens à l'époque, à Malherbe, les gars arrivaient un quart d'heure avant l'entraînement et puis ils repartaient en courant parce qu'ils avaient toujours des trucs à faire. Après, ils étaient semi-professionnels, mais n'empêche Aujourd'hui, les joueurs descendent 45 minutes, 60 minutes avant la séance, avec des routines, avec des échauffements, avec évidemment le passage dans les mains du clinique s'il y a besoin, avec, en fonction d'une pathologie relativement proche, une lésion aux ischios, avec des routines d'échauffement, de travail excentrique, de travail avec des élastiques, pour être prêt pour s'entraîner. dans la même idée, après la séance, on va s'étirer, on va se faire masser. on va se faire mobiliser, on a les bains froids que tout le monde connaît maintenant, et ça peut durer une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure, une heure et demie après l'entraînement. Et tout ça fait partie de la prévention, c'est ce qui fait qu'au lieu de se retrouver 20 ans après leur fin de carrière avec une prothèse de joue ou une prothèse de hanche, parce que c'est ça la réalité du sport de haut niveau, à partir du moment où tu pousses la machine pendant des années, si tu n'as pas cette notion de prévention, inévitablement 5, 10, 15, 20 ans plus tard tu vas payer. avec en plus l'arrêt du haut niveau bien souvent ça s'accompagne d'une prise de poids et donc sur les articulations qui ont été malmenées pendant des années,

  • Océane Marsault

    c'est délétère ça rejoint du coup pas mal ce que je voulais qu'on aborde en seconde partie est-ce que vous trouvez Denis qu'il y a un changement peut-être générationnel au niveau des sportifs est-ce qu'ils priorisent leur santé à court terme pour la performance immédiate ? et leur carrière de sportif de haut niveau, mais ils réfléchissent aussi à leur santé à long terme, avec le fait que de plus en plus de sportifs retraités ont des carrières professionnelles dans d'autres domaines que le sport de haut niveau, et du coup il faut qu'ils puissent continuer à être actifs, à marcher, à se déplacer, à avoir une vie haute que le sport de haut niveau.

  • Denis Morcel

    Je rejoins parfaitement sur ce sujet, c'est-à-dire qu'ils ont cette sensibilité-là, alors ils l'ont, d'autant plus qu'ils auront une pathologie. Forcément. Je ne sais pas, tu en prends un qui s'est fait opérer d'un menisque, il se focus un peu sur son genou, il va faire toujours très bien attention de préserver ses mobilités, de conserver sa force musculaire, pour que son genou ne soit pas mis en danger par un déficit de mobilité ou par un déficit de force. Effectivement, ils sont très sensibilisés par rapport à ça. D'aucuns, après leur carrière professionnelle, sont capables d'avoir un certain niveau dans d'autres activités sportives, comme le golf, par exemple. Effectivement, si tu es boiteux comme on dit chez nous, forcément, le parcours n'est pas aussi agréable que si tout allait bien. Mais oui, oui, et puis on a... le staff médical, le staff technique, tous les gens qui sont proches des joueurs, les sensibilisent là-dessus pour ceux qui ne le sont pas. Et on insiste là-dessus que, de toute façon, c'est gagnant-gagnant. C'est-à-dire que si on a une vigilance au moment où on est en pleine activité, ce ne sera que du bonus par la suite.

  • Océane Marsault

    C'est assez contradictoire avec la réalité des calendriers sportifs actuels, où il y a de plus en plus de championnats et de plus en plus de matchs. On a par exemple une étude qui est sortie en 2023 qui montre que les joueurs de foot internationaux jouent en moyenne un match tous les cinq jours, ce qui est hyper important. Il y a l'entraîneur de Liverpool qui a pris la parole en 2020 et plusieurs fois depuis en allant jusqu'à dire vous tuez mes joueurs Comment est-ce que c'est possible qu'on réfléchisse de plus en plus à la santé du joueur et en parallèle les entités créent de plus en plus de championnats ?

  • Denis Morcel

    C'est le grand paradoxe. C'est-à-dire que d'un côté, tu as la vigilance qu'on doit avoir pour la santé de nos joueurs. Effectivement, comme tu le dis, en moyenne, c'est un match tous les cinq jours. Et puis d'un autre côté, tu as l'air de la guerre qui est l'argent. à chaque fois qu'il y a un match qui est télévisé, ça rapporte de l'argent, à chaque fois qu'il y a un match qui se joue, le stade est plein, et ainsi de suite. Et donc on est capable de faire des choses qui sont complètement ubuesques. Je peux te donner l'exemple de l'Euro 2016, où on a été, je crois, 7 jours entre deux matchs, entre peut-être le huitième et le quart de finale. et à côté de ça, on a joué notre demi-finale à Marseille le jeudi et on joue la finale le dimanche. On sait qu'un joueur a besoin de 4 jours complets pour récupérer complètement. Ça ne sert à rien. S'il en a 5, c'est bien. S'il en a 6, c'est bien. Mais en dessous de 4 jours, il n'a pas récupéré. Même s'il tue le masque, même s'il fait des bains froids, même si on utilise toutes les techniques de récupération possibles, il faut 4 jours. Nous, on a joué le jeudi. Donc, ça fait vendredi, samedi, dimanche, 3 jours. On a joué notre finale de l'Euro. à trois jours de la demi-finale. Les Portugais avaient joué le mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, quatre jours. Bis repetita a doa. Les Argentins ont joué le mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, quatre jours. Nous, on a joué le jeudi. Et donc, Alors, l'explication est simple. Ça rapporte beaucoup plus d'argent de faire une demi-finale, de retransmettre et de vendre des droits à une demi-finale le mercredi et d'en vendre d'autres le jeudi. Tu mets un match à 18h, tu mets un match à 20h le même jour, ça rapporte moins. Le nerf de la guerre, c'est l'argent. Et on est capable, effectivement, de l'aiser. Parce que là, clairement, physiologiquement, encore une fois, quand tu joues le jeudi, et que la finale est le dimanche, tu es lésé par rapport à ton adversaire qui joue le mercredi et dans la finale dimanche. En 2018, nous avions joué la demi-finale le mardi, les Croates avaient joué leur demi-finale le mercredi, mais mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, 4 jours. Donc ils avaient récupéré. Il y avait une vraie égalité physique sur la récupération. Mais le nerf de la guerre, c'est l'argent. Et c'est l'argent qui décide. C'est l'argent qui décide. Alors après, il y aura certainement des limites. Il y a eu un tollé quand il a été proposé de faire une Coupe du Monde tous les deux ans. Après, c'est infernal. On voit bien aussi la mise en place d'un super championnat. Là, ça n'a pas passé parce qu'il y a des nations de football, comme les Anglais notamment, et puis eux, ils ne lâcheront pas, je pense, et puis j'espère, où ils ont un championnat qui est le leur. Si tu fais un super championnat avec trois ou même... 4-5 équipes anglaises qui vont jouer contre les 4-5 équipes meilleures allemandes, les 4-5 meilleures équipes espagnoles, italiennes et françaises, tu perds l'identité, tu perds ton identité. Et les Anglais sont trop attachés, ils ont une culture footballistique trop importante pour que ça se produise. J'espère que ça ne se produira jamais. Peut-être que je me trompe, parce qu'évidemment, quand on va amener des millions, des millions, des millions, mais les Anglais n'ont pas besoin de ça. Ça fonctionne tellement bien leur championnat que... Ils n'ont pas besoin de ça. Mais effectivement, il y a une vraie problématique. Il y a une vraie problématique.

  • Océane Marsault

    C'est super intéressant parce qu'en tant que spectateur, on n'a pas du tout les tenants et les aboutissants qui influent sur ce type de décision. Et on ne se rend pas forcément compte de la contradiction qu'il y a entre ce qui est préconisé par le staff en termes de récupération du sportif et juste les besoins financiers du sport de haut niveau.

  • Denis Morcel

    c'est aussi un petit peu enfin c'est une forme d'incompatibilité mais aussi t'as une forme d'obligation c'est à dire ce qui va permettre de faire des stades magnifiques ce qui va permettre à des équipes de recruter tel ou tel joueur de prendre très l'entraîneur et tout il faut de l'argent donc c'est un peu le serpent qui se met en la queue mais il y a des limites je pense à ne pas dépasser il y a des limites à ne pas dépasser ça c'est sûr

  • Océane Marsault

    Quand vous parlez des joueurs qui ont besoin de 4 jours pour récupérer pleinement, comment vous gérez le fait que le joueur est avec vous pour la sélection de l'équipe de France, mais après il va retourner dans son club, donc ce n'est pas forcément le même staff. Est-ce qu'il y a un relationnel qui s'installe avec les staffs des clubs des joueurs ? Est-ce que vous les connaissez ? Est-ce que vous parlez des pathologies ?

  • Denis Morcel

    Alors c'est systématique, le relais c'est le patron du médical, c'est le doc, donc le doc, les médecins des différents clubs, lundi prochain il y a des joueurs qui vont arriver peut-être avec une petite séquelle d'entorse et tout, tout ça c'est la première réunion, la deuxième réunion qu'on fait, la première réunion c'est la réunion du staff, en fait il faut savoir que le staff se réunit le dimanche soir à Clairefontaine, que les joueurs arrivent le lundi midi, que le lundi matin à 10h on a une réunion staff avec l'organisation de la semaine. Le coach dit ceci, cela, les gars, prise de poids, le podologue, tel jour, éventuellement pour les obligations qu'ont les joueurs par rapport au... par rapport aux sponsors, tel entraînement, tel jour ouvert au public, tel autre ouvert aux sponsors, donc à tous les gens qui tournent autour du sponsoring. Et nous, derrière, une fois cette réunion faite, on passe au check. On a la liste des 23 joueurs et voilà, c'est parti. Donc on sait exactement ce qu'ils ont parce que le doc a un retour systématique. On a des échanges aussi privilégiés un peu avec les kinés. off de certains joueurs. Certains joueurs ont décliné en off, avec lesquels on s'entend parfaitement et avec lesquels on échange. Et puis après, dès que les joueurs arrivent, ils sont checkés, évidemment, ils sont checkés.

  • Océane Marsault

    On sait que de plus en plus, la population est sédentaire. Il y a aussi tout ce qui est arrivé des nouvelles technologies avec le téléphone. Par exemple, moi, j'ai les petits doigts tordus à force d'être sur mon téléphone toute la journée. Je ne sais pas du tout si c'est vous quelque chose que vous ressentez dans votre pratique et dans votre manipulation des corps au quotidien, ou est-ce que c'est complètement anecdotique parce que du coup, comme on est quand même dans le sport de haut niveau et que les athlètes sont quand même sensibilisés à la préservation de leur corps, ce n'est pas des choses et des changements culturels qui ont impacté les physiques ?

  • Denis Morcel

    Alors oui, oui bien sûr, c'est-à-dire que je vais sortir du foot et puis je vais passer au rugby. Je me souviens qu'il y a 40 ans, les premières lignes, ils étaient en surpoids, ils n'avançaient pas, ils ne couraient pas. Aujourd'hui, une première ligne est capable de piquer un sprint au rugby, d'éliminer un joueur en faisant une feinte et tout ça. Et on le voit puisque les premières et deuxièmes lignes arrivent à marquer des essais sur des courses. Alors effectivement, il y a 40 ans, le sportif de haut niveau... Il était beaucoup moins encadré que maintenant, il avait beaucoup moins d'informations sur la nutrition, sur la récupération. On n'avait pas tous les outils qu'on a aujourd'hui, maintenant, mais ça reste quand même, ce sont des gens qui sont jeunes. qui ont des nécessités d'hygiène de vie, en termes de sommeil, en termes d'alimentation, en termes de récupération, et on bataille parfois, comme tu le disais, avec le téléphone, avec les jeux, on le voit avec les enfants, et comme ce ne sont pas des enfants de joueurs, mais ils sont jeunes, donc ils peuvent très bien être un soir à 4 sur... sur leur console à faire Mario 4, des choses comme ça. Le prépa physique, le doc, on les sensibilise là-dessus, sur la récupération qui est essentielle. La première récupération, ça reste le sommeil. Si tu t'endors tous les soirs à 3h du matin et que tu te lèves à 11h, forcément la récupération n'est pas la même. Les anciens disaient que les heures avant minuit comptaient double pour le sommeil, mais avant qu'un joueur s'endorme, ce n'est pas le cas de tous, mais il faut qu'on ait cette vigilance-là. On est beaucoup plus pointu maintenant, mais on avait aussi cette sensibilité-là il y a 40 ans, beaucoup moins développée en termes de nourriture. Je me souviens parfaitement d'un joueur de camp. L'entraînement est à 9h30, il se réveille, il se réveille, il est à 9h05, c'est pas possible ça, c'est pas possible, il faut anticiper, il faut que la machine se mette en route, il y a un dérouillage à faire, général, articulaire, musculaire, tendineux, mais oui, c'est un combat, c'est un combat, c'est un combat, un combat sans heure, mais on a toujours cette vigilance-là, tout le temps, tout le temps, tout le temps.

  • Océane Marsault

    Oui, si je comprends bien, en fait, vous, c'est une sensibilité que vous avez depuis un moment, mais elle arrive au fur et à mesure dans le sport de haut niveau et elle s'ancre de plus en plus dans la tête des sportifs. Est-ce que vous trouvez qu'on peut un peu faire un parallèle avec le monde du travail où on le remarque de plus en plus ? Ok, les nouvelles générations sont ambitieuses, mais elles font aussi extrêmement attention à avoir du temps en plus de la vie professionnelle, à faire attention à leur bien-être mental, à leur bien-être physique. Est-ce que vous, c'est quelque chose que vous retrouvez dans le sport de haut niveau, qui est retranscrit avec les nouvelles générations de sportifs ?

  • Denis Morcel

    Oui, oui, oui, bien sûr. Tant au niveau physique qu'au niveau psychologique. Après, dans cette profession-là, enfin pas notamment, parce que c'est vrai pour les clubs, il y a des contraintes qui sont liées au fonctionnement du club ou de la fédération. Il y a des sponsors, il va falloir faire la pub pour un sponsor majeur qui est sur le t-shirt d'entraînement. Ça, c'est des contraintes que les joueurs aiment moyen, mais ça fait partie du deal aussi. quand un nouveau maillot va sortir, pour promouvoir le nouveau maillot, il va bien falloir prendre les joueurs en photo. On ne va pas prendre le kin en photo, parce que sinon, on va vendre zéro maillot. Donc là, oui, il y a des contraintes. Après, je pense que l'état d'esprit n'est pas du tout le même, parce que ce sont des compétiteurs et que dans la notion de compétition, il faut savoir aller au-delà de ses limites. Il faut savoir pousser la machine. Aujourd'hui... Alors je vais me faire des amis, mais j'ai bien peur qu'au travail, on ait du mal à pousser la machine. Moi, j'ai vécu toute ma vie professionnelle. Je te dirais presque que j'ai jamais travaillé. J'ai fait mon hobby, quoi. Moi, j'adore masser, j'adore soigner les gens. Chaque cas qui se présente à toi, c'est un nouveau défi, quoi. Et puis, les gens, ils sont dans la misère. Donc, tu essaies de faire en sorte qu'ils souffrent moins, qu'ils aillent mieux, qu'ils puissent reprendre leur activité sportive. Et le sportif, donc, on a des protocoles qui sont bien établis. Mais si on peut gratter 3-4 jours, c'est... sur 3-4 jours, ça fait que le match d'après va pouvoir le jouer ou pas. Et si tu gagnes 3-4 jours, ça va mettre l'intégrité physique du joueur en danger. Mais si on peut gratter et qu'on sait que le joueur ne risque rien, oui, ça c'est un challenge. Et c'est aussi ça dans l'exercice libéral, c'est aussi ça quand on intervient dans les entreprises sur le thème de la prévention. Après, je vais... Enfin, c'est pas une confidence que je vais te faire, mais à chaque fois que je vais dans une entreprise maintenant, tu te rends compte qu'il y a une vraie problématique de recrutement humain, que c'est très, très compliqué, et que dans les entreprises pour lesquelles j'interviens, j'interviens, pardon, dans la prévention des TMS... l'employeur peut mettre ça en avant. Il peut dire, nous, on a un kiné qui vient, qui va vous apprendre à gérer votre dos, à gérer tout ça. Il va vous apprendre les échauffements avant la prise de travail. Il va vous apprendre les étirements, comme on fait pour le sport de haut niveau. Et tu t'en es à argumenter pour recruter sur des critères comme ceux-là. Sur des critères comme ceux-là.

  • Océane Marsault

    Oui, qui n'y avait pas du tout leur place il y a 50 ans. Ah non,

  • Denis Morcel

    complètement, non, non, non, non, avant, t'avais jamais ça.

  • Océane Marsault

    T'en avais jamais entendu parler.

  • Denis Morcel

    Non, non, et puis, il y a eu cette époque-là où le salarié, enfin le salarié, le travailleur était de la marchandise, c'est-à-dire qu'il y allait, il se cassait le dos, c'est pas grave, vas-y, on en prenait un autre, et puis un autre prenait la place, et puis... Aujourd'hui, les entreprises sont pénalisées financièrement quand il y a des maladies professionnelles, quand il y a des excès de travail. Donc elles commencent à... Mais c'est compliqué à mettre en place, tout ça. C'est compliqué. La solution, elle est très simple. Si on veut faire de la prévention, on s'adresse aux gamins. On va dans les CFA du bâtiment, on va dans les lycées agricoles, on va dans les... Comment dirais-je ? Dans n'importe quelle entreprise. on n'est pas fait pour passer sa vie devant un écran, on n'est pas fait pour passer sa vie à masser, on n'est pas fait pour passer sa vie à soulever des sacs à huîtres, donc après il faut s'adapter, et s'adapter ça veut dire savoir comment se gérer, pour mieux récupérer, pour ne pas se mettre en lésion sur le travail, mais comme le sportif, et comme le sportif de niveau, on fait de la prévention, je vais te dire que c'est la même chose c'est à dire que notamment sur la gestion de la colonne vertébrale on a tous la même colonne vertébrale on a une colonne vertébrale à trois courbures donc ce qui marche avec le niveau marche avec l'entreprise, avec le salarié c'est exactement pareil mais on est dans la prévention et on est de plus en plus sensibles là-dessus et c'est pour ça aussi que nos footballeurs de haut niveau vieillissent mieux qu'il y a 40 ans

  • Océane Marsault

    Tout s'explique en fait.

  • Denis Morcel

    Oui, c'est logique. À partir du moment où tu prends soin de toi, à partir du moment où tu prends le temps, après une séance d'entraînement, de t'étirer, tu sais que tu as eu il y a trois semaines ou il y a un mois et demi une lésion sur ton ischio, tu sais qu'il faut bien garder cette élasticité, cette mobilité-là. Tu sais qu'à chaque fois que tu vas te faire masser, ça t'aide, ça t'allège la charge de travail sur ta cuisse. Et voilà, le soudeur qui passe toute sa journée à souder avec son arc, s'il n'a pas cette sensibilité-là de s'étirer un petit peu les avant-bras, s'étirer un peu les coudes, il va repartir le lendemain avec la charge de travail de la journée de la veille, ainsi de suite. C'est comme ça que s'installent les pathologies.

  • Océane Marsault

    Vous en parliez un peu au début, mais vous aimez continuer à apprendre en permanence durant toute votre carrière. Est-ce qu'il y a des avancées technologiques qui ont changé complètement votre pratique ? Je ne sais pas, les bains froids, les arrivées des ondes de choc, etc. Est-ce qu'en l'intégrant, ça a remplacé certains gestes que vous faisiez manuellement avant ?

  • Denis Morcel

    Alors, rien ne remplace la main. La main est intelligente, les ondes de choc ne le sont pas. Les ondes de choc deviennent intelligentes quand la main qu'il utilise est intelligente. Il y a une machine qui est fabuleuse qui s'appelle le LPG, c'est une machine française qui au départ c'était le palpé au relais aspiré, maintenant ils ont optimisé l'appareil, en fait c'est de la ventouse high-tech, pour simplifier. Mais si tu n'as pas la main pour l'utiliser, ça ne va pas être performant. Et les ventouses c'est pareil, on peut penser que les ventouses de massage sont des ventouses en silicone. qui sont comme ça, que tu peux utiliser sur certaines pathologies, il ne faut pas bourriner, il faut avoir une main intelligente. Moi, je revendique que le premier outil pour un thérapeute, c'est la main, et qu'après, effectivement, tu as les ondes de choc, c'est-à-dire que même, les ondes de choc, ce n'est pas fin, c'est un marteau-piqueur, donc même au travers de cet appareil-là, quand tu as une main, tu vas être capable de sentir la zone de tension, tu vas être capable de sentir la zone de fibros, tu vas être capable de sentir ces choses-là, Après, en termes de technologie, il y a eu des choses qui ont explosé. Je pense notamment à l'isocynétique. Ce sont des machines qui sont capables de mesurer la vitesse, la résistance d'un mouvement, l'amplitude. Et on sait que dans toutes les pathologies musculo-tendineuses, c'est indispensable de passer les sportifs et pourquoi pas les non-sportifs au besoin. Par contre, là, on est dans le high-tech. C'est une chose que je maîtrise. Très peu, je m'y intéresse, j'ai deux collègues en équipe de France qui sont experts là-dedans, et donc c'est leur partie, c'est pas la mienne. Et en ville, c'est pareil, si j'ai besoin d'un test ISO, ou si j'ai besoin de passer la main dans ma rééducation pour une lésion musculaire, ou une gammatoplastie, peu importe, j'ai mes contacts sur place, où j'envoie à des gens qui ont l'expertise que je n'ai pas. Les bains froids, oui, oui, les bains froids, oui, c'est... Mais les bains froids, ça commence aussi par... C'est une question aussi d'un peu d'éducation. C'est-à-dire qu'on sait qu'à froid, le muscle grossièrement a un état gélatineux et qu'à chaud, il a un état liquide. Donc tu te lèves le matin, ton muscle est à froid, donc il est gélatineux. Donc on sait que le matin, il vaut mieux prendre une douche chaude. qui va faire monter un peu la température et qui va liquidifier un peu ton muscle. Par contre, le soir, les gens disent je vais prendre un bon bain chaud avant d'aller me coucher Erreur, boulette. Le soir, tu prends ta douche chaude, je veux bien, et puis après, du nombril jusqu'aux orteils, il faut faire du froid. Le froid est en vase au constructeur. Le lendemain, tu te lèveras, tu auras les jambes beaucoup plus légères que si... que si t'as fait un bain chaud et ça c'est une les gens pensent que le bain chaud la douche chaude du soir c'est vraiment non c'est pas ça,

  • Océane Marsault

    c'est le froid qui fait récupérer et bah j'hésiterais pas à essayer ça la prochaine fois lors d'une sortie de course à pied vraiment t'aimes pas le froid,

  • Denis Morcel

    tu commences par t'émoller puis après tu montes petit à petit c'est très récupérateur et tu le sens en plus après quand tu vas te coucher c'est vraiment la sensation sur le on est 3-4 à courir dans le staff en équipe de France, deux collègues, le responsable des flux vidéo, et puis un des responsables de presse, et quand on ne filme pas trop tard le soir à Clairefontaine, pas trop tard ça veut dire... pas après 23h parce qu'au-delà après je ne le fais pas, mais ça m'arrive de faire un bain froid. Et le lendemain matin tu te lèves avec cette sensation très agréable au niveau des jambes, comme des petites bulles de chaleur qui se posent dans les jambes, c'est un vrai confort, c'est un vrai bonheur.

  • Océane Marsault

    En tout cas, super conseil pour tous les sportifs qui nous écoutent, n'hésitez pas à tester les bains froids ou les douches froides après l'effort, vous serez en meilleure forme le lendemain matin et vous récupérez beaucoup plus vite. On arrive déjà malheureusement à la fin de notre entretien. En tout cas, on a appris plein de choses. C'était un plaisir de vous avoir. Pour finir sur une note positive, est-ce que vous pouvez nous raconter l'événement ou l'émotion qui vous a le plus marqué pendant votre carrière sportive ?

  • Denis Morcel

    Il y en a plein. Il y a eu des émotions positives, des émotions négatives. Le positif, forcément, c'est quand on gagne. C'est quand on gagne. J'ai un souvenir vraiment très... très ancré de la demi-finale contre l'Allemagne à l'Euro 2016, où on avait fait un match de folie. Après, il y a des matchs où c'est plus la dramaturgie que le match en lui-même. Je me souviens, par exemple, le premier match contre... En 2022, à Doha, premier match contre l'Australie. Tu sais qu'il y a une maldiction sur le champion du monde. Les trois ou quatre dernières éditions de champion du monde n'ont pas passé les poules. Tu démarres contre l'Australie. Sur une action, tu perds Lucas Hernandez et tu prends un but. Et tu te dis, on va plonger. On va y avoir de l'austine. On va se faire lourder. Heureusement, non. On a bien vu qu'on avait la supériorité sur les Australiens et qu'on a pu revenir. J'ai évidemment la Coupe du Monde en 2018. Et dans ce... dans cet élan de la Coupe du Monde 2018 chaque match à coup près c'est-à-dire huitième, quart, demi ça a été émotionnellement fabuleux

  • Océane Marsault

    En tout cas merci beaucoup Denis d'avoir été notre premier invité, c'était un plaisir de commencer cette belle aventure avec vous Merci Océane Pour toutes les personnes qui nous écoutent, on se retrouve dès maintenant sur tous nos réseaux sociaux ou alors dès le mois prochain pour un nouvel épisode d'Organ qui sera disponible sur toutes les plateformes d'écoute

  • Denis Morcel

    Merci.

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Description

Denis Morcel, kinésithérapeute de l’Équipe de France de Football, nous plonge dans une réflexion profonde sur la dualité entre performance sportive et santé. Alors que les calendriers sportifs deviennent de plus en plus exigeants, une question fondamentale se pose : le sport est-il réellement bon pour la santé? Dans cet épisode inaugural, nous explorons les défis auxquels les sportifs de haut niveau sont confrontés, et la manière dont ils jonglent entre l'exigence de la performance et le souci de préserver leur bien-être physique et mental.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Denis Morcel

    Bonjour Océane, je m'appelle Denis Morcel, je suis masseur kinesthérapeute depuis très longtemps. On peut considérer que, comme l'a noté l'équipe après l'Euro, le très expérimenté Denis Morcel me référent surtout à mon âge. Donc j'exerce depuis... 1981, avec un exercice libéral, j'exerce en cabinet, qui est spécialisé dans le traitement des TMS, des troubles musculosquelétiques, c'est-à-dire qu'on ne fait que de la rheumatologie et que de la traumatologie. J'ai travaillé 20 ans au stade Malherbe de Caen, c'est mon club de cœur évidemment, étant cané. Je suis passé après, quand j'ai arrêté le stade Malherbe, je suis passé avec l'équipe nationale du Sénégal. J'ai fait deux années et demie, après je suis passé avec l'équipe nationale du Maroc, après j'ai été faire un petit tour au Japon, et depuis, comme tu l'as dit Océane, depuis le septembre 2014, j'ai fait partie, j'ai l'honneur et le privilège de faire partie du stade médical de l'équipe de France de football.

  • Océane Marsault

    Comment vous êtes arrivé jusqu'à travailler avec l'équipe de France ?

  • Denis Morcel

    C'est une histoire de contact, d'échange, de rencontre, c'est une histoire aussi de confiance. L'intégration au sein du stade de l'équipe de France se fait via... en ce qui concerne chaque catégorie professionnelle via le responsable de cette catégorie-là, en l'occurrence le Dr Le Gall, qui est le médecin de l'équipe de France depuis 2012. C'est lui qui apporte le nom et les candidats par rapport à leur expérience et capacité professionnelle. Et derrière, il y a l'humain, l'humain qui est essentiel dans le fonctionnement d'un groupe, dans le fonctionnement d'un staff. Et là, c'est le grand patron qui décide ou pas.

  • Océane Marsault

    Vous nous parliez du coup des sélections étrangères dans lesquelles vous avez eu l'opportunité de pratiquer. Est-ce que vous avez appris des nouvelles techniques, des choses différentes pour vous permettre d'arriver jusqu'en équipe de France ?

  • Denis Morcel

    Alors, j'ai énormément de défauts, mais j'ai une qualité que je revendique, qui est l'humilité. Malgré mon âge avancé, j'apprends tous les jours. Donc, on est, inévitablement, quand on croise des gens, quand on croise des expertises, on apprend tous les jours. Et évidemment, que tout ce que j'ai pu accumuler comme rencontres, comme échanges, je me souviens au Japon, j'avais un collègue qui utilisait des bandes de... des petites bandes de tape qui collaient à une vitesse vertigineuse, qui faisaient des tresses, on avait l'impression qu'ils tricotaient avec des bandes de tape. Donc ça, j'ai appris de là, j'ai appris de partout, et ça nous arrive régulièrement d'avoir des stagiaires au cabinet, et je suis tout à fait capable de recevoir un conseil et un avis du stagiaire, une chose que je ne connais pas, et de toute façon, jusqu'à sa mort, on apprend toujours. et on doit toujours avoir cette vigilance à être réceptif. Après, depuis que je suis dans le staff de l'équipe de France, je côtoie des gens d'exception, quelle que soit la partie, que ce soit la sécurité, l'analyse vidéo, mes collègues, le médecin, tout ça, j'ai plaisir à côtoyer des gens qui ont vraiment une expertise dans leur domaine qui est fabuleuse.

  • Océane Marsault

    On entend souvent que le sport est bon pour la santé, mais qu'en est-il pour le sport de haut niveau ? Comment vous, en tant que professionnel médical, vous arrivez à gérer cette dualité entre la performance qui pousse les corps à l'extrême et le fait qu'il faut préserver la santé de vos athlètes ?

  • Denis Morcel

    Sur ta question, je vais faire deux petites apartés. Je vais parler du sport en général. Le sport est bon pour la santé, évidemment, puisque quand on ne bouge plus... à l'image de nos anciens, tout le temps que nos anciens vont chercher leur journaux, vont faire leur course à pied, tout va bien. Quand ils passent du canapé au lit, ça va beaucoup moins bien, et quand ils restent au lit, c'est la fin. Donc là, sur cet aspect-là, on est dans une année olympique, et on a un petit peu le sentiment, en termes de communication, que tous les Français sont champions olympiques. Donc sur la partie... pas haute compétition, mais sur la partie générale du sport, la communication, je trouve que la communication est très mal faite, on ne parle que de sport entreprise, sport santé, sport ceci, sport cela, le cabinet, et tous les cabinets qui reçoivent des sportifs sont pleins de sportifs, donc si c'était aussi bon que ça, ça saurait, et en communiquant de cette façon-là, on supprime tous les gens qui n'ont jamais fait de sport. On aurait parlé d'activité physique, déjà tu n'élimines pas les gens qui n'ont jamais fait de sport, quand tu parles de sport. santé, le mec va te dire bah oui mais non, moi j'ai jamais fait de sport, c'est pas pour moi après t'élimines les chauves ceux qui sont surpoids, tout ça donc ça c'est pour la première partie après on est dans une société où on est un peu dans l'ultra performance c'est à dire que maintenant aujourd'hui plus personne ne fait un marathon sans que la terre entière soit au courant c'est bien de faire un marathon mais quand tu fais un marathon tu fais pour toi, tu fais pas pour que la terre entière soit au courant via les réseaux via la communication après concernant le sport de haut niveau j'ai 40 ans de recul par rapport au sport de haut niveau, et je sais que mes footballeurs de l'époque du stade Malheur-de-Camp, avec lesquels je bossais il y a 40 ans, sont en... très mauvais état physique par rapport à ce que seront mes footballeurs actuels, parce qu'on a cette notion de prévention, on a cette notion, les joueurs maintenant savent que s'ils ne font pas telle chose un jour ou l'autre, ils auront des retombées. Les joueurs maintenant, je me souviens à l'époque, à Malherbe, les gars arrivaient un quart d'heure avant l'entraînement et puis ils repartaient en courant parce qu'ils avaient toujours des trucs à faire. Après, ils étaient semi-professionnels, mais n'empêche Aujourd'hui, les joueurs descendent 45 minutes, 60 minutes avant la séance, avec des routines, avec des échauffements, avec évidemment le passage dans les mains du clinique s'il y a besoin, avec, en fonction d'une pathologie relativement proche, une lésion aux ischios, avec des routines d'échauffement, de travail excentrique, de travail avec des élastiques, pour être prêt pour s'entraîner. dans la même idée, après la séance, on va s'étirer, on va se faire masser. on va se faire mobiliser, on a les bains froids que tout le monde connaît maintenant, et ça peut durer une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure, une heure et demie après l'entraînement. Et tout ça fait partie de la prévention, c'est ce qui fait qu'au lieu de se retrouver 20 ans après leur fin de carrière avec une prothèse de joue ou une prothèse de hanche, parce que c'est ça la réalité du sport de haut niveau, à partir du moment où tu pousses la machine pendant des années, si tu n'as pas cette notion de prévention, inévitablement 5, 10, 15, 20 ans plus tard tu vas payer. avec en plus l'arrêt du haut niveau bien souvent ça s'accompagne d'une prise de poids et donc sur les articulations qui ont été malmenées pendant des années,

  • Océane Marsault

    c'est délétère ça rejoint du coup pas mal ce que je voulais qu'on aborde en seconde partie est-ce que vous trouvez Denis qu'il y a un changement peut-être générationnel au niveau des sportifs est-ce qu'ils priorisent leur santé à court terme pour la performance immédiate ? et leur carrière de sportif de haut niveau, mais ils réfléchissent aussi à leur santé à long terme, avec le fait que de plus en plus de sportifs retraités ont des carrières professionnelles dans d'autres domaines que le sport de haut niveau, et du coup il faut qu'ils puissent continuer à être actifs, à marcher, à se déplacer, à avoir une vie haute que le sport de haut niveau.

  • Denis Morcel

    Je rejoins parfaitement sur ce sujet, c'est-à-dire qu'ils ont cette sensibilité-là, alors ils l'ont, d'autant plus qu'ils auront une pathologie. Forcément. Je ne sais pas, tu en prends un qui s'est fait opérer d'un menisque, il se focus un peu sur son genou, il va faire toujours très bien attention de préserver ses mobilités, de conserver sa force musculaire, pour que son genou ne soit pas mis en danger par un déficit de mobilité ou par un déficit de force. Effectivement, ils sont très sensibilisés par rapport à ça. D'aucuns, après leur carrière professionnelle, sont capables d'avoir un certain niveau dans d'autres activités sportives, comme le golf, par exemple. Effectivement, si tu es boiteux comme on dit chez nous, forcément, le parcours n'est pas aussi agréable que si tout allait bien. Mais oui, oui, et puis on a... le staff médical, le staff technique, tous les gens qui sont proches des joueurs, les sensibilisent là-dessus pour ceux qui ne le sont pas. Et on insiste là-dessus que, de toute façon, c'est gagnant-gagnant. C'est-à-dire que si on a une vigilance au moment où on est en pleine activité, ce ne sera que du bonus par la suite.

  • Océane Marsault

    C'est assez contradictoire avec la réalité des calendriers sportifs actuels, où il y a de plus en plus de championnats et de plus en plus de matchs. On a par exemple une étude qui est sortie en 2023 qui montre que les joueurs de foot internationaux jouent en moyenne un match tous les cinq jours, ce qui est hyper important. Il y a l'entraîneur de Liverpool qui a pris la parole en 2020 et plusieurs fois depuis en allant jusqu'à dire vous tuez mes joueurs Comment est-ce que c'est possible qu'on réfléchisse de plus en plus à la santé du joueur et en parallèle les entités créent de plus en plus de championnats ?

  • Denis Morcel

    C'est le grand paradoxe. C'est-à-dire que d'un côté, tu as la vigilance qu'on doit avoir pour la santé de nos joueurs. Effectivement, comme tu le dis, en moyenne, c'est un match tous les cinq jours. Et puis d'un autre côté, tu as l'air de la guerre qui est l'argent. à chaque fois qu'il y a un match qui est télévisé, ça rapporte de l'argent, à chaque fois qu'il y a un match qui se joue, le stade est plein, et ainsi de suite. Et donc on est capable de faire des choses qui sont complètement ubuesques. Je peux te donner l'exemple de l'Euro 2016, où on a été, je crois, 7 jours entre deux matchs, entre peut-être le huitième et le quart de finale. et à côté de ça, on a joué notre demi-finale à Marseille le jeudi et on joue la finale le dimanche. On sait qu'un joueur a besoin de 4 jours complets pour récupérer complètement. Ça ne sert à rien. S'il en a 5, c'est bien. S'il en a 6, c'est bien. Mais en dessous de 4 jours, il n'a pas récupéré. Même s'il tue le masque, même s'il fait des bains froids, même si on utilise toutes les techniques de récupération possibles, il faut 4 jours. Nous, on a joué le jeudi. Donc, ça fait vendredi, samedi, dimanche, 3 jours. On a joué notre finale de l'Euro. à trois jours de la demi-finale. Les Portugais avaient joué le mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, quatre jours. Bis repetita a doa. Les Argentins ont joué le mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, quatre jours. Nous, on a joué le jeudi. Et donc, Alors, l'explication est simple. Ça rapporte beaucoup plus d'argent de faire une demi-finale, de retransmettre et de vendre des droits à une demi-finale le mercredi et d'en vendre d'autres le jeudi. Tu mets un match à 18h, tu mets un match à 20h le même jour, ça rapporte moins. Le nerf de la guerre, c'est l'argent. Et on est capable, effectivement, de l'aiser. Parce que là, clairement, physiologiquement, encore une fois, quand tu joues le jeudi, et que la finale est le dimanche, tu es lésé par rapport à ton adversaire qui joue le mercredi et dans la finale dimanche. En 2018, nous avions joué la demi-finale le mardi, les Croates avaient joué leur demi-finale le mercredi, mais mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, 4 jours. Donc ils avaient récupéré. Il y avait une vraie égalité physique sur la récupération. Mais le nerf de la guerre, c'est l'argent. Et c'est l'argent qui décide. C'est l'argent qui décide. Alors après, il y aura certainement des limites. Il y a eu un tollé quand il a été proposé de faire une Coupe du Monde tous les deux ans. Après, c'est infernal. On voit bien aussi la mise en place d'un super championnat. Là, ça n'a pas passé parce qu'il y a des nations de football, comme les Anglais notamment, et puis eux, ils ne lâcheront pas, je pense, et puis j'espère, où ils ont un championnat qui est le leur. Si tu fais un super championnat avec trois ou même... 4-5 équipes anglaises qui vont jouer contre les 4-5 équipes meilleures allemandes, les 4-5 meilleures équipes espagnoles, italiennes et françaises, tu perds l'identité, tu perds ton identité. Et les Anglais sont trop attachés, ils ont une culture footballistique trop importante pour que ça se produise. J'espère que ça ne se produira jamais. Peut-être que je me trompe, parce qu'évidemment, quand on va amener des millions, des millions, des millions, mais les Anglais n'ont pas besoin de ça. Ça fonctionne tellement bien leur championnat que... Ils n'ont pas besoin de ça. Mais effectivement, il y a une vraie problématique. Il y a une vraie problématique.

  • Océane Marsault

    C'est super intéressant parce qu'en tant que spectateur, on n'a pas du tout les tenants et les aboutissants qui influent sur ce type de décision. Et on ne se rend pas forcément compte de la contradiction qu'il y a entre ce qui est préconisé par le staff en termes de récupération du sportif et juste les besoins financiers du sport de haut niveau.

  • Denis Morcel

    c'est aussi un petit peu enfin c'est une forme d'incompatibilité mais aussi t'as une forme d'obligation c'est à dire ce qui va permettre de faire des stades magnifiques ce qui va permettre à des équipes de recruter tel ou tel joueur de prendre très l'entraîneur et tout il faut de l'argent donc c'est un peu le serpent qui se met en la queue mais il y a des limites je pense à ne pas dépasser il y a des limites à ne pas dépasser ça c'est sûr

  • Océane Marsault

    Quand vous parlez des joueurs qui ont besoin de 4 jours pour récupérer pleinement, comment vous gérez le fait que le joueur est avec vous pour la sélection de l'équipe de France, mais après il va retourner dans son club, donc ce n'est pas forcément le même staff. Est-ce qu'il y a un relationnel qui s'installe avec les staffs des clubs des joueurs ? Est-ce que vous les connaissez ? Est-ce que vous parlez des pathologies ?

  • Denis Morcel

    Alors c'est systématique, le relais c'est le patron du médical, c'est le doc, donc le doc, les médecins des différents clubs, lundi prochain il y a des joueurs qui vont arriver peut-être avec une petite séquelle d'entorse et tout, tout ça c'est la première réunion, la deuxième réunion qu'on fait, la première réunion c'est la réunion du staff, en fait il faut savoir que le staff se réunit le dimanche soir à Clairefontaine, que les joueurs arrivent le lundi midi, que le lundi matin à 10h on a une réunion staff avec l'organisation de la semaine. Le coach dit ceci, cela, les gars, prise de poids, le podologue, tel jour, éventuellement pour les obligations qu'ont les joueurs par rapport au... par rapport aux sponsors, tel entraînement, tel jour ouvert au public, tel autre ouvert aux sponsors, donc à tous les gens qui tournent autour du sponsoring. Et nous, derrière, une fois cette réunion faite, on passe au check. On a la liste des 23 joueurs et voilà, c'est parti. Donc on sait exactement ce qu'ils ont parce que le doc a un retour systématique. On a des échanges aussi privilégiés un peu avec les kinés. off de certains joueurs. Certains joueurs ont décliné en off, avec lesquels on s'entend parfaitement et avec lesquels on échange. Et puis après, dès que les joueurs arrivent, ils sont checkés, évidemment, ils sont checkés.

  • Océane Marsault

    On sait que de plus en plus, la population est sédentaire. Il y a aussi tout ce qui est arrivé des nouvelles technologies avec le téléphone. Par exemple, moi, j'ai les petits doigts tordus à force d'être sur mon téléphone toute la journée. Je ne sais pas du tout si c'est vous quelque chose que vous ressentez dans votre pratique et dans votre manipulation des corps au quotidien, ou est-ce que c'est complètement anecdotique parce que du coup, comme on est quand même dans le sport de haut niveau et que les athlètes sont quand même sensibilisés à la préservation de leur corps, ce n'est pas des choses et des changements culturels qui ont impacté les physiques ?

  • Denis Morcel

    Alors oui, oui bien sûr, c'est-à-dire que je vais sortir du foot et puis je vais passer au rugby. Je me souviens qu'il y a 40 ans, les premières lignes, ils étaient en surpoids, ils n'avançaient pas, ils ne couraient pas. Aujourd'hui, une première ligne est capable de piquer un sprint au rugby, d'éliminer un joueur en faisant une feinte et tout ça. Et on le voit puisque les premières et deuxièmes lignes arrivent à marquer des essais sur des courses. Alors effectivement, il y a 40 ans, le sportif de haut niveau... Il était beaucoup moins encadré que maintenant, il avait beaucoup moins d'informations sur la nutrition, sur la récupération. On n'avait pas tous les outils qu'on a aujourd'hui, maintenant, mais ça reste quand même, ce sont des gens qui sont jeunes. qui ont des nécessités d'hygiène de vie, en termes de sommeil, en termes d'alimentation, en termes de récupération, et on bataille parfois, comme tu le disais, avec le téléphone, avec les jeux, on le voit avec les enfants, et comme ce ne sont pas des enfants de joueurs, mais ils sont jeunes, donc ils peuvent très bien être un soir à 4 sur... sur leur console à faire Mario 4, des choses comme ça. Le prépa physique, le doc, on les sensibilise là-dessus, sur la récupération qui est essentielle. La première récupération, ça reste le sommeil. Si tu t'endors tous les soirs à 3h du matin et que tu te lèves à 11h, forcément la récupération n'est pas la même. Les anciens disaient que les heures avant minuit comptaient double pour le sommeil, mais avant qu'un joueur s'endorme, ce n'est pas le cas de tous, mais il faut qu'on ait cette vigilance-là. On est beaucoup plus pointu maintenant, mais on avait aussi cette sensibilité-là il y a 40 ans, beaucoup moins développée en termes de nourriture. Je me souviens parfaitement d'un joueur de camp. L'entraînement est à 9h30, il se réveille, il se réveille, il est à 9h05, c'est pas possible ça, c'est pas possible, il faut anticiper, il faut que la machine se mette en route, il y a un dérouillage à faire, général, articulaire, musculaire, tendineux, mais oui, c'est un combat, c'est un combat, c'est un combat, un combat sans heure, mais on a toujours cette vigilance-là, tout le temps, tout le temps, tout le temps.

  • Océane Marsault

    Oui, si je comprends bien, en fait, vous, c'est une sensibilité que vous avez depuis un moment, mais elle arrive au fur et à mesure dans le sport de haut niveau et elle s'ancre de plus en plus dans la tête des sportifs. Est-ce que vous trouvez qu'on peut un peu faire un parallèle avec le monde du travail où on le remarque de plus en plus ? Ok, les nouvelles générations sont ambitieuses, mais elles font aussi extrêmement attention à avoir du temps en plus de la vie professionnelle, à faire attention à leur bien-être mental, à leur bien-être physique. Est-ce que vous, c'est quelque chose que vous retrouvez dans le sport de haut niveau, qui est retranscrit avec les nouvelles générations de sportifs ?

  • Denis Morcel

    Oui, oui, oui, bien sûr. Tant au niveau physique qu'au niveau psychologique. Après, dans cette profession-là, enfin pas notamment, parce que c'est vrai pour les clubs, il y a des contraintes qui sont liées au fonctionnement du club ou de la fédération. Il y a des sponsors, il va falloir faire la pub pour un sponsor majeur qui est sur le t-shirt d'entraînement. Ça, c'est des contraintes que les joueurs aiment moyen, mais ça fait partie du deal aussi. quand un nouveau maillot va sortir, pour promouvoir le nouveau maillot, il va bien falloir prendre les joueurs en photo. On ne va pas prendre le kin en photo, parce que sinon, on va vendre zéro maillot. Donc là, oui, il y a des contraintes. Après, je pense que l'état d'esprit n'est pas du tout le même, parce que ce sont des compétiteurs et que dans la notion de compétition, il faut savoir aller au-delà de ses limites. Il faut savoir pousser la machine. Aujourd'hui... Alors je vais me faire des amis, mais j'ai bien peur qu'au travail, on ait du mal à pousser la machine. Moi, j'ai vécu toute ma vie professionnelle. Je te dirais presque que j'ai jamais travaillé. J'ai fait mon hobby, quoi. Moi, j'adore masser, j'adore soigner les gens. Chaque cas qui se présente à toi, c'est un nouveau défi, quoi. Et puis, les gens, ils sont dans la misère. Donc, tu essaies de faire en sorte qu'ils souffrent moins, qu'ils aillent mieux, qu'ils puissent reprendre leur activité sportive. Et le sportif, donc, on a des protocoles qui sont bien établis. Mais si on peut gratter 3-4 jours, c'est... sur 3-4 jours, ça fait que le match d'après va pouvoir le jouer ou pas. Et si tu gagnes 3-4 jours, ça va mettre l'intégrité physique du joueur en danger. Mais si on peut gratter et qu'on sait que le joueur ne risque rien, oui, ça c'est un challenge. Et c'est aussi ça dans l'exercice libéral, c'est aussi ça quand on intervient dans les entreprises sur le thème de la prévention. Après, je vais... Enfin, c'est pas une confidence que je vais te faire, mais à chaque fois que je vais dans une entreprise maintenant, tu te rends compte qu'il y a une vraie problématique de recrutement humain, que c'est très, très compliqué, et que dans les entreprises pour lesquelles j'interviens, j'interviens, pardon, dans la prévention des TMS... l'employeur peut mettre ça en avant. Il peut dire, nous, on a un kiné qui vient, qui va vous apprendre à gérer votre dos, à gérer tout ça. Il va vous apprendre les échauffements avant la prise de travail. Il va vous apprendre les étirements, comme on fait pour le sport de haut niveau. Et tu t'en es à argumenter pour recruter sur des critères comme ceux-là. Sur des critères comme ceux-là.

  • Océane Marsault

    Oui, qui n'y avait pas du tout leur place il y a 50 ans. Ah non,

  • Denis Morcel

    complètement, non, non, non, non, avant, t'avais jamais ça.

  • Océane Marsault

    T'en avais jamais entendu parler.

  • Denis Morcel

    Non, non, et puis, il y a eu cette époque-là où le salarié, enfin le salarié, le travailleur était de la marchandise, c'est-à-dire qu'il y allait, il se cassait le dos, c'est pas grave, vas-y, on en prenait un autre, et puis un autre prenait la place, et puis... Aujourd'hui, les entreprises sont pénalisées financièrement quand il y a des maladies professionnelles, quand il y a des excès de travail. Donc elles commencent à... Mais c'est compliqué à mettre en place, tout ça. C'est compliqué. La solution, elle est très simple. Si on veut faire de la prévention, on s'adresse aux gamins. On va dans les CFA du bâtiment, on va dans les lycées agricoles, on va dans les... Comment dirais-je ? Dans n'importe quelle entreprise. on n'est pas fait pour passer sa vie devant un écran, on n'est pas fait pour passer sa vie à masser, on n'est pas fait pour passer sa vie à soulever des sacs à huîtres, donc après il faut s'adapter, et s'adapter ça veut dire savoir comment se gérer, pour mieux récupérer, pour ne pas se mettre en lésion sur le travail, mais comme le sportif, et comme le sportif de niveau, on fait de la prévention, je vais te dire que c'est la même chose c'est à dire que notamment sur la gestion de la colonne vertébrale on a tous la même colonne vertébrale on a une colonne vertébrale à trois courbures donc ce qui marche avec le niveau marche avec l'entreprise, avec le salarié c'est exactement pareil mais on est dans la prévention et on est de plus en plus sensibles là-dessus et c'est pour ça aussi que nos footballeurs de haut niveau vieillissent mieux qu'il y a 40 ans

  • Océane Marsault

    Tout s'explique en fait.

  • Denis Morcel

    Oui, c'est logique. À partir du moment où tu prends soin de toi, à partir du moment où tu prends le temps, après une séance d'entraînement, de t'étirer, tu sais que tu as eu il y a trois semaines ou il y a un mois et demi une lésion sur ton ischio, tu sais qu'il faut bien garder cette élasticité, cette mobilité-là. Tu sais qu'à chaque fois que tu vas te faire masser, ça t'aide, ça t'allège la charge de travail sur ta cuisse. Et voilà, le soudeur qui passe toute sa journée à souder avec son arc, s'il n'a pas cette sensibilité-là de s'étirer un petit peu les avant-bras, s'étirer un peu les coudes, il va repartir le lendemain avec la charge de travail de la journée de la veille, ainsi de suite. C'est comme ça que s'installent les pathologies.

  • Océane Marsault

    Vous en parliez un peu au début, mais vous aimez continuer à apprendre en permanence durant toute votre carrière. Est-ce qu'il y a des avancées technologiques qui ont changé complètement votre pratique ? Je ne sais pas, les bains froids, les arrivées des ondes de choc, etc. Est-ce qu'en l'intégrant, ça a remplacé certains gestes que vous faisiez manuellement avant ?

  • Denis Morcel

    Alors, rien ne remplace la main. La main est intelligente, les ondes de choc ne le sont pas. Les ondes de choc deviennent intelligentes quand la main qu'il utilise est intelligente. Il y a une machine qui est fabuleuse qui s'appelle le LPG, c'est une machine française qui au départ c'était le palpé au relais aspiré, maintenant ils ont optimisé l'appareil, en fait c'est de la ventouse high-tech, pour simplifier. Mais si tu n'as pas la main pour l'utiliser, ça ne va pas être performant. Et les ventouses c'est pareil, on peut penser que les ventouses de massage sont des ventouses en silicone. qui sont comme ça, que tu peux utiliser sur certaines pathologies, il ne faut pas bourriner, il faut avoir une main intelligente. Moi, je revendique que le premier outil pour un thérapeute, c'est la main, et qu'après, effectivement, tu as les ondes de choc, c'est-à-dire que même, les ondes de choc, ce n'est pas fin, c'est un marteau-piqueur, donc même au travers de cet appareil-là, quand tu as une main, tu vas être capable de sentir la zone de tension, tu vas être capable de sentir la zone de fibros, tu vas être capable de sentir ces choses-là, Après, en termes de technologie, il y a eu des choses qui ont explosé. Je pense notamment à l'isocynétique. Ce sont des machines qui sont capables de mesurer la vitesse, la résistance d'un mouvement, l'amplitude. Et on sait que dans toutes les pathologies musculo-tendineuses, c'est indispensable de passer les sportifs et pourquoi pas les non-sportifs au besoin. Par contre, là, on est dans le high-tech. C'est une chose que je maîtrise. Très peu, je m'y intéresse, j'ai deux collègues en équipe de France qui sont experts là-dedans, et donc c'est leur partie, c'est pas la mienne. Et en ville, c'est pareil, si j'ai besoin d'un test ISO, ou si j'ai besoin de passer la main dans ma rééducation pour une lésion musculaire, ou une gammatoplastie, peu importe, j'ai mes contacts sur place, où j'envoie à des gens qui ont l'expertise que je n'ai pas. Les bains froids, oui, oui, les bains froids, oui, c'est... Mais les bains froids, ça commence aussi par... C'est une question aussi d'un peu d'éducation. C'est-à-dire qu'on sait qu'à froid, le muscle grossièrement a un état gélatineux et qu'à chaud, il a un état liquide. Donc tu te lèves le matin, ton muscle est à froid, donc il est gélatineux. Donc on sait que le matin, il vaut mieux prendre une douche chaude. qui va faire monter un peu la température et qui va liquidifier un peu ton muscle. Par contre, le soir, les gens disent je vais prendre un bon bain chaud avant d'aller me coucher Erreur, boulette. Le soir, tu prends ta douche chaude, je veux bien, et puis après, du nombril jusqu'aux orteils, il faut faire du froid. Le froid est en vase au constructeur. Le lendemain, tu te lèveras, tu auras les jambes beaucoup plus légères que si... que si t'as fait un bain chaud et ça c'est une les gens pensent que le bain chaud la douche chaude du soir c'est vraiment non c'est pas ça,

  • Océane Marsault

    c'est le froid qui fait récupérer et bah j'hésiterais pas à essayer ça la prochaine fois lors d'une sortie de course à pied vraiment t'aimes pas le froid,

  • Denis Morcel

    tu commences par t'émoller puis après tu montes petit à petit c'est très récupérateur et tu le sens en plus après quand tu vas te coucher c'est vraiment la sensation sur le on est 3-4 à courir dans le staff en équipe de France, deux collègues, le responsable des flux vidéo, et puis un des responsables de presse, et quand on ne filme pas trop tard le soir à Clairefontaine, pas trop tard ça veut dire... pas après 23h parce qu'au-delà après je ne le fais pas, mais ça m'arrive de faire un bain froid. Et le lendemain matin tu te lèves avec cette sensation très agréable au niveau des jambes, comme des petites bulles de chaleur qui se posent dans les jambes, c'est un vrai confort, c'est un vrai bonheur.

  • Océane Marsault

    En tout cas, super conseil pour tous les sportifs qui nous écoutent, n'hésitez pas à tester les bains froids ou les douches froides après l'effort, vous serez en meilleure forme le lendemain matin et vous récupérez beaucoup plus vite. On arrive déjà malheureusement à la fin de notre entretien. En tout cas, on a appris plein de choses. C'était un plaisir de vous avoir. Pour finir sur une note positive, est-ce que vous pouvez nous raconter l'événement ou l'émotion qui vous a le plus marqué pendant votre carrière sportive ?

  • Denis Morcel

    Il y en a plein. Il y a eu des émotions positives, des émotions négatives. Le positif, forcément, c'est quand on gagne. C'est quand on gagne. J'ai un souvenir vraiment très... très ancré de la demi-finale contre l'Allemagne à l'Euro 2016, où on avait fait un match de folie. Après, il y a des matchs où c'est plus la dramaturgie que le match en lui-même. Je me souviens, par exemple, le premier match contre... En 2022, à Doha, premier match contre l'Australie. Tu sais qu'il y a une maldiction sur le champion du monde. Les trois ou quatre dernières éditions de champion du monde n'ont pas passé les poules. Tu démarres contre l'Australie. Sur une action, tu perds Lucas Hernandez et tu prends un but. Et tu te dis, on va plonger. On va y avoir de l'austine. On va se faire lourder. Heureusement, non. On a bien vu qu'on avait la supériorité sur les Australiens et qu'on a pu revenir. J'ai évidemment la Coupe du Monde en 2018. Et dans ce... dans cet élan de la Coupe du Monde 2018 chaque match à coup près c'est-à-dire huitième, quart, demi ça a été émotionnellement fabuleux

  • Océane Marsault

    En tout cas merci beaucoup Denis d'avoir été notre premier invité, c'était un plaisir de commencer cette belle aventure avec vous Merci Océane Pour toutes les personnes qui nous écoutent, on se retrouve dès maintenant sur tous nos réseaux sociaux ou alors dès le mois prochain pour un nouvel épisode d'Organ qui sera disponible sur toutes les plateformes d'écoute

  • Denis Morcel

    Merci.

Description

Denis Morcel, kinésithérapeute de l’Équipe de France de Football, nous plonge dans une réflexion profonde sur la dualité entre performance sportive et santé. Alors que les calendriers sportifs deviennent de plus en plus exigeants, une question fondamentale se pose : le sport est-il réellement bon pour la santé? Dans cet épisode inaugural, nous explorons les défis auxquels les sportifs de haut niveau sont confrontés, et la manière dont ils jonglent entre l'exigence de la performance et le souci de préserver leur bien-être physique et mental.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Denis Morcel

    Bonjour Océane, je m'appelle Denis Morcel, je suis masseur kinesthérapeute depuis très longtemps. On peut considérer que, comme l'a noté l'équipe après l'Euro, le très expérimenté Denis Morcel me référent surtout à mon âge. Donc j'exerce depuis... 1981, avec un exercice libéral, j'exerce en cabinet, qui est spécialisé dans le traitement des TMS, des troubles musculosquelétiques, c'est-à-dire qu'on ne fait que de la rheumatologie et que de la traumatologie. J'ai travaillé 20 ans au stade Malherbe de Caen, c'est mon club de cœur évidemment, étant cané. Je suis passé après, quand j'ai arrêté le stade Malherbe, je suis passé avec l'équipe nationale du Sénégal. J'ai fait deux années et demie, après je suis passé avec l'équipe nationale du Maroc, après j'ai été faire un petit tour au Japon, et depuis, comme tu l'as dit Océane, depuis le septembre 2014, j'ai fait partie, j'ai l'honneur et le privilège de faire partie du stade médical de l'équipe de France de football.

  • Océane Marsault

    Comment vous êtes arrivé jusqu'à travailler avec l'équipe de France ?

  • Denis Morcel

    C'est une histoire de contact, d'échange, de rencontre, c'est une histoire aussi de confiance. L'intégration au sein du stade de l'équipe de France se fait via... en ce qui concerne chaque catégorie professionnelle via le responsable de cette catégorie-là, en l'occurrence le Dr Le Gall, qui est le médecin de l'équipe de France depuis 2012. C'est lui qui apporte le nom et les candidats par rapport à leur expérience et capacité professionnelle. Et derrière, il y a l'humain, l'humain qui est essentiel dans le fonctionnement d'un groupe, dans le fonctionnement d'un staff. Et là, c'est le grand patron qui décide ou pas.

  • Océane Marsault

    Vous nous parliez du coup des sélections étrangères dans lesquelles vous avez eu l'opportunité de pratiquer. Est-ce que vous avez appris des nouvelles techniques, des choses différentes pour vous permettre d'arriver jusqu'en équipe de France ?

  • Denis Morcel

    Alors, j'ai énormément de défauts, mais j'ai une qualité que je revendique, qui est l'humilité. Malgré mon âge avancé, j'apprends tous les jours. Donc, on est, inévitablement, quand on croise des gens, quand on croise des expertises, on apprend tous les jours. Et évidemment, que tout ce que j'ai pu accumuler comme rencontres, comme échanges, je me souviens au Japon, j'avais un collègue qui utilisait des bandes de... des petites bandes de tape qui collaient à une vitesse vertigineuse, qui faisaient des tresses, on avait l'impression qu'ils tricotaient avec des bandes de tape. Donc ça, j'ai appris de là, j'ai appris de partout, et ça nous arrive régulièrement d'avoir des stagiaires au cabinet, et je suis tout à fait capable de recevoir un conseil et un avis du stagiaire, une chose que je ne connais pas, et de toute façon, jusqu'à sa mort, on apprend toujours. et on doit toujours avoir cette vigilance à être réceptif. Après, depuis que je suis dans le staff de l'équipe de France, je côtoie des gens d'exception, quelle que soit la partie, que ce soit la sécurité, l'analyse vidéo, mes collègues, le médecin, tout ça, j'ai plaisir à côtoyer des gens qui ont vraiment une expertise dans leur domaine qui est fabuleuse.

  • Océane Marsault

    On entend souvent que le sport est bon pour la santé, mais qu'en est-il pour le sport de haut niveau ? Comment vous, en tant que professionnel médical, vous arrivez à gérer cette dualité entre la performance qui pousse les corps à l'extrême et le fait qu'il faut préserver la santé de vos athlètes ?

  • Denis Morcel

    Sur ta question, je vais faire deux petites apartés. Je vais parler du sport en général. Le sport est bon pour la santé, évidemment, puisque quand on ne bouge plus... à l'image de nos anciens, tout le temps que nos anciens vont chercher leur journaux, vont faire leur course à pied, tout va bien. Quand ils passent du canapé au lit, ça va beaucoup moins bien, et quand ils restent au lit, c'est la fin. Donc là, sur cet aspect-là, on est dans une année olympique, et on a un petit peu le sentiment, en termes de communication, que tous les Français sont champions olympiques. Donc sur la partie... pas haute compétition, mais sur la partie générale du sport, la communication, je trouve que la communication est très mal faite, on ne parle que de sport entreprise, sport santé, sport ceci, sport cela, le cabinet, et tous les cabinets qui reçoivent des sportifs sont pleins de sportifs, donc si c'était aussi bon que ça, ça saurait, et en communiquant de cette façon-là, on supprime tous les gens qui n'ont jamais fait de sport. On aurait parlé d'activité physique, déjà tu n'élimines pas les gens qui n'ont jamais fait de sport, quand tu parles de sport. santé, le mec va te dire bah oui mais non, moi j'ai jamais fait de sport, c'est pas pour moi après t'élimines les chauves ceux qui sont surpoids, tout ça donc ça c'est pour la première partie après on est dans une société où on est un peu dans l'ultra performance c'est à dire que maintenant aujourd'hui plus personne ne fait un marathon sans que la terre entière soit au courant c'est bien de faire un marathon mais quand tu fais un marathon tu fais pour toi, tu fais pas pour que la terre entière soit au courant via les réseaux via la communication après concernant le sport de haut niveau j'ai 40 ans de recul par rapport au sport de haut niveau, et je sais que mes footballeurs de l'époque du stade Malheur-de-Camp, avec lesquels je bossais il y a 40 ans, sont en... très mauvais état physique par rapport à ce que seront mes footballeurs actuels, parce qu'on a cette notion de prévention, on a cette notion, les joueurs maintenant savent que s'ils ne font pas telle chose un jour ou l'autre, ils auront des retombées. Les joueurs maintenant, je me souviens à l'époque, à Malherbe, les gars arrivaient un quart d'heure avant l'entraînement et puis ils repartaient en courant parce qu'ils avaient toujours des trucs à faire. Après, ils étaient semi-professionnels, mais n'empêche Aujourd'hui, les joueurs descendent 45 minutes, 60 minutes avant la séance, avec des routines, avec des échauffements, avec évidemment le passage dans les mains du clinique s'il y a besoin, avec, en fonction d'une pathologie relativement proche, une lésion aux ischios, avec des routines d'échauffement, de travail excentrique, de travail avec des élastiques, pour être prêt pour s'entraîner. dans la même idée, après la séance, on va s'étirer, on va se faire masser. on va se faire mobiliser, on a les bains froids que tout le monde connaît maintenant, et ça peut durer une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure, une heure et demie après l'entraînement. Et tout ça fait partie de la prévention, c'est ce qui fait qu'au lieu de se retrouver 20 ans après leur fin de carrière avec une prothèse de joue ou une prothèse de hanche, parce que c'est ça la réalité du sport de haut niveau, à partir du moment où tu pousses la machine pendant des années, si tu n'as pas cette notion de prévention, inévitablement 5, 10, 15, 20 ans plus tard tu vas payer. avec en plus l'arrêt du haut niveau bien souvent ça s'accompagne d'une prise de poids et donc sur les articulations qui ont été malmenées pendant des années,

  • Océane Marsault

    c'est délétère ça rejoint du coup pas mal ce que je voulais qu'on aborde en seconde partie est-ce que vous trouvez Denis qu'il y a un changement peut-être générationnel au niveau des sportifs est-ce qu'ils priorisent leur santé à court terme pour la performance immédiate ? et leur carrière de sportif de haut niveau, mais ils réfléchissent aussi à leur santé à long terme, avec le fait que de plus en plus de sportifs retraités ont des carrières professionnelles dans d'autres domaines que le sport de haut niveau, et du coup il faut qu'ils puissent continuer à être actifs, à marcher, à se déplacer, à avoir une vie haute que le sport de haut niveau.

  • Denis Morcel

    Je rejoins parfaitement sur ce sujet, c'est-à-dire qu'ils ont cette sensibilité-là, alors ils l'ont, d'autant plus qu'ils auront une pathologie. Forcément. Je ne sais pas, tu en prends un qui s'est fait opérer d'un menisque, il se focus un peu sur son genou, il va faire toujours très bien attention de préserver ses mobilités, de conserver sa force musculaire, pour que son genou ne soit pas mis en danger par un déficit de mobilité ou par un déficit de force. Effectivement, ils sont très sensibilisés par rapport à ça. D'aucuns, après leur carrière professionnelle, sont capables d'avoir un certain niveau dans d'autres activités sportives, comme le golf, par exemple. Effectivement, si tu es boiteux comme on dit chez nous, forcément, le parcours n'est pas aussi agréable que si tout allait bien. Mais oui, oui, et puis on a... le staff médical, le staff technique, tous les gens qui sont proches des joueurs, les sensibilisent là-dessus pour ceux qui ne le sont pas. Et on insiste là-dessus que, de toute façon, c'est gagnant-gagnant. C'est-à-dire que si on a une vigilance au moment où on est en pleine activité, ce ne sera que du bonus par la suite.

  • Océane Marsault

    C'est assez contradictoire avec la réalité des calendriers sportifs actuels, où il y a de plus en plus de championnats et de plus en plus de matchs. On a par exemple une étude qui est sortie en 2023 qui montre que les joueurs de foot internationaux jouent en moyenne un match tous les cinq jours, ce qui est hyper important. Il y a l'entraîneur de Liverpool qui a pris la parole en 2020 et plusieurs fois depuis en allant jusqu'à dire vous tuez mes joueurs Comment est-ce que c'est possible qu'on réfléchisse de plus en plus à la santé du joueur et en parallèle les entités créent de plus en plus de championnats ?

  • Denis Morcel

    C'est le grand paradoxe. C'est-à-dire que d'un côté, tu as la vigilance qu'on doit avoir pour la santé de nos joueurs. Effectivement, comme tu le dis, en moyenne, c'est un match tous les cinq jours. Et puis d'un autre côté, tu as l'air de la guerre qui est l'argent. à chaque fois qu'il y a un match qui est télévisé, ça rapporte de l'argent, à chaque fois qu'il y a un match qui se joue, le stade est plein, et ainsi de suite. Et donc on est capable de faire des choses qui sont complètement ubuesques. Je peux te donner l'exemple de l'Euro 2016, où on a été, je crois, 7 jours entre deux matchs, entre peut-être le huitième et le quart de finale. et à côté de ça, on a joué notre demi-finale à Marseille le jeudi et on joue la finale le dimanche. On sait qu'un joueur a besoin de 4 jours complets pour récupérer complètement. Ça ne sert à rien. S'il en a 5, c'est bien. S'il en a 6, c'est bien. Mais en dessous de 4 jours, il n'a pas récupéré. Même s'il tue le masque, même s'il fait des bains froids, même si on utilise toutes les techniques de récupération possibles, il faut 4 jours. Nous, on a joué le jeudi. Donc, ça fait vendredi, samedi, dimanche, 3 jours. On a joué notre finale de l'Euro. à trois jours de la demi-finale. Les Portugais avaient joué le mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, quatre jours. Bis repetita a doa. Les Argentins ont joué le mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, quatre jours. Nous, on a joué le jeudi. Et donc, Alors, l'explication est simple. Ça rapporte beaucoup plus d'argent de faire une demi-finale, de retransmettre et de vendre des droits à une demi-finale le mercredi et d'en vendre d'autres le jeudi. Tu mets un match à 18h, tu mets un match à 20h le même jour, ça rapporte moins. Le nerf de la guerre, c'est l'argent. Et on est capable, effectivement, de l'aiser. Parce que là, clairement, physiologiquement, encore une fois, quand tu joues le jeudi, et que la finale est le dimanche, tu es lésé par rapport à ton adversaire qui joue le mercredi et dans la finale dimanche. En 2018, nous avions joué la demi-finale le mardi, les Croates avaient joué leur demi-finale le mercredi, mais mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche, 4 jours. Donc ils avaient récupéré. Il y avait une vraie égalité physique sur la récupération. Mais le nerf de la guerre, c'est l'argent. Et c'est l'argent qui décide. C'est l'argent qui décide. Alors après, il y aura certainement des limites. Il y a eu un tollé quand il a été proposé de faire une Coupe du Monde tous les deux ans. Après, c'est infernal. On voit bien aussi la mise en place d'un super championnat. Là, ça n'a pas passé parce qu'il y a des nations de football, comme les Anglais notamment, et puis eux, ils ne lâcheront pas, je pense, et puis j'espère, où ils ont un championnat qui est le leur. Si tu fais un super championnat avec trois ou même... 4-5 équipes anglaises qui vont jouer contre les 4-5 équipes meilleures allemandes, les 4-5 meilleures équipes espagnoles, italiennes et françaises, tu perds l'identité, tu perds ton identité. Et les Anglais sont trop attachés, ils ont une culture footballistique trop importante pour que ça se produise. J'espère que ça ne se produira jamais. Peut-être que je me trompe, parce qu'évidemment, quand on va amener des millions, des millions, des millions, mais les Anglais n'ont pas besoin de ça. Ça fonctionne tellement bien leur championnat que... Ils n'ont pas besoin de ça. Mais effectivement, il y a une vraie problématique. Il y a une vraie problématique.

  • Océane Marsault

    C'est super intéressant parce qu'en tant que spectateur, on n'a pas du tout les tenants et les aboutissants qui influent sur ce type de décision. Et on ne se rend pas forcément compte de la contradiction qu'il y a entre ce qui est préconisé par le staff en termes de récupération du sportif et juste les besoins financiers du sport de haut niveau.

  • Denis Morcel

    c'est aussi un petit peu enfin c'est une forme d'incompatibilité mais aussi t'as une forme d'obligation c'est à dire ce qui va permettre de faire des stades magnifiques ce qui va permettre à des équipes de recruter tel ou tel joueur de prendre très l'entraîneur et tout il faut de l'argent donc c'est un peu le serpent qui se met en la queue mais il y a des limites je pense à ne pas dépasser il y a des limites à ne pas dépasser ça c'est sûr

  • Océane Marsault

    Quand vous parlez des joueurs qui ont besoin de 4 jours pour récupérer pleinement, comment vous gérez le fait que le joueur est avec vous pour la sélection de l'équipe de France, mais après il va retourner dans son club, donc ce n'est pas forcément le même staff. Est-ce qu'il y a un relationnel qui s'installe avec les staffs des clubs des joueurs ? Est-ce que vous les connaissez ? Est-ce que vous parlez des pathologies ?

  • Denis Morcel

    Alors c'est systématique, le relais c'est le patron du médical, c'est le doc, donc le doc, les médecins des différents clubs, lundi prochain il y a des joueurs qui vont arriver peut-être avec une petite séquelle d'entorse et tout, tout ça c'est la première réunion, la deuxième réunion qu'on fait, la première réunion c'est la réunion du staff, en fait il faut savoir que le staff se réunit le dimanche soir à Clairefontaine, que les joueurs arrivent le lundi midi, que le lundi matin à 10h on a une réunion staff avec l'organisation de la semaine. Le coach dit ceci, cela, les gars, prise de poids, le podologue, tel jour, éventuellement pour les obligations qu'ont les joueurs par rapport au... par rapport aux sponsors, tel entraînement, tel jour ouvert au public, tel autre ouvert aux sponsors, donc à tous les gens qui tournent autour du sponsoring. Et nous, derrière, une fois cette réunion faite, on passe au check. On a la liste des 23 joueurs et voilà, c'est parti. Donc on sait exactement ce qu'ils ont parce que le doc a un retour systématique. On a des échanges aussi privilégiés un peu avec les kinés. off de certains joueurs. Certains joueurs ont décliné en off, avec lesquels on s'entend parfaitement et avec lesquels on échange. Et puis après, dès que les joueurs arrivent, ils sont checkés, évidemment, ils sont checkés.

  • Océane Marsault

    On sait que de plus en plus, la population est sédentaire. Il y a aussi tout ce qui est arrivé des nouvelles technologies avec le téléphone. Par exemple, moi, j'ai les petits doigts tordus à force d'être sur mon téléphone toute la journée. Je ne sais pas du tout si c'est vous quelque chose que vous ressentez dans votre pratique et dans votre manipulation des corps au quotidien, ou est-ce que c'est complètement anecdotique parce que du coup, comme on est quand même dans le sport de haut niveau et que les athlètes sont quand même sensibilisés à la préservation de leur corps, ce n'est pas des choses et des changements culturels qui ont impacté les physiques ?

  • Denis Morcel

    Alors oui, oui bien sûr, c'est-à-dire que je vais sortir du foot et puis je vais passer au rugby. Je me souviens qu'il y a 40 ans, les premières lignes, ils étaient en surpoids, ils n'avançaient pas, ils ne couraient pas. Aujourd'hui, une première ligne est capable de piquer un sprint au rugby, d'éliminer un joueur en faisant une feinte et tout ça. Et on le voit puisque les premières et deuxièmes lignes arrivent à marquer des essais sur des courses. Alors effectivement, il y a 40 ans, le sportif de haut niveau... Il était beaucoup moins encadré que maintenant, il avait beaucoup moins d'informations sur la nutrition, sur la récupération. On n'avait pas tous les outils qu'on a aujourd'hui, maintenant, mais ça reste quand même, ce sont des gens qui sont jeunes. qui ont des nécessités d'hygiène de vie, en termes de sommeil, en termes d'alimentation, en termes de récupération, et on bataille parfois, comme tu le disais, avec le téléphone, avec les jeux, on le voit avec les enfants, et comme ce ne sont pas des enfants de joueurs, mais ils sont jeunes, donc ils peuvent très bien être un soir à 4 sur... sur leur console à faire Mario 4, des choses comme ça. Le prépa physique, le doc, on les sensibilise là-dessus, sur la récupération qui est essentielle. La première récupération, ça reste le sommeil. Si tu t'endors tous les soirs à 3h du matin et que tu te lèves à 11h, forcément la récupération n'est pas la même. Les anciens disaient que les heures avant minuit comptaient double pour le sommeil, mais avant qu'un joueur s'endorme, ce n'est pas le cas de tous, mais il faut qu'on ait cette vigilance-là. On est beaucoup plus pointu maintenant, mais on avait aussi cette sensibilité-là il y a 40 ans, beaucoup moins développée en termes de nourriture. Je me souviens parfaitement d'un joueur de camp. L'entraînement est à 9h30, il se réveille, il se réveille, il est à 9h05, c'est pas possible ça, c'est pas possible, il faut anticiper, il faut que la machine se mette en route, il y a un dérouillage à faire, général, articulaire, musculaire, tendineux, mais oui, c'est un combat, c'est un combat, c'est un combat, un combat sans heure, mais on a toujours cette vigilance-là, tout le temps, tout le temps, tout le temps.

  • Océane Marsault

    Oui, si je comprends bien, en fait, vous, c'est une sensibilité que vous avez depuis un moment, mais elle arrive au fur et à mesure dans le sport de haut niveau et elle s'ancre de plus en plus dans la tête des sportifs. Est-ce que vous trouvez qu'on peut un peu faire un parallèle avec le monde du travail où on le remarque de plus en plus ? Ok, les nouvelles générations sont ambitieuses, mais elles font aussi extrêmement attention à avoir du temps en plus de la vie professionnelle, à faire attention à leur bien-être mental, à leur bien-être physique. Est-ce que vous, c'est quelque chose que vous retrouvez dans le sport de haut niveau, qui est retranscrit avec les nouvelles générations de sportifs ?

  • Denis Morcel

    Oui, oui, oui, bien sûr. Tant au niveau physique qu'au niveau psychologique. Après, dans cette profession-là, enfin pas notamment, parce que c'est vrai pour les clubs, il y a des contraintes qui sont liées au fonctionnement du club ou de la fédération. Il y a des sponsors, il va falloir faire la pub pour un sponsor majeur qui est sur le t-shirt d'entraînement. Ça, c'est des contraintes que les joueurs aiment moyen, mais ça fait partie du deal aussi. quand un nouveau maillot va sortir, pour promouvoir le nouveau maillot, il va bien falloir prendre les joueurs en photo. On ne va pas prendre le kin en photo, parce que sinon, on va vendre zéro maillot. Donc là, oui, il y a des contraintes. Après, je pense que l'état d'esprit n'est pas du tout le même, parce que ce sont des compétiteurs et que dans la notion de compétition, il faut savoir aller au-delà de ses limites. Il faut savoir pousser la machine. Aujourd'hui... Alors je vais me faire des amis, mais j'ai bien peur qu'au travail, on ait du mal à pousser la machine. Moi, j'ai vécu toute ma vie professionnelle. Je te dirais presque que j'ai jamais travaillé. J'ai fait mon hobby, quoi. Moi, j'adore masser, j'adore soigner les gens. Chaque cas qui se présente à toi, c'est un nouveau défi, quoi. Et puis, les gens, ils sont dans la misère. Donc, tu essaies de faire en sorte qu'ils souffrent moins, qu'ils aillent mieux, qu'ils puissent reprendre leur activité sportive. Et le sportif, donc, on a des protocoles qui sont bien établis. Mais si on peut gratter 3-4 jours, c'est... sur 3-4 jours, ça fait que le match d'après va pouvoir le jouer ou pas. Et si tu gagnes 3-4 jours, ça va mettre l'intégrité physique du joueur en danger. Mais si on peut gratter et qu'on sait que le joueur ne risque rien, oui, ça c'est un challenge. Et c'est aussi ça dans l'exercice libéral, c'est aussi ça quand on intervient dans les entreprises sur le thème de la prévention. Après, je vais... Enfin, c'est pas une confidence que je vais te faire, mais à chaque fois que je vais dans une entreprise maintenant, tu te rends compte qu'il y a une vraie problématique de recrutement humain, que c'est très, très compliqué, et que dans les entreprises pour lesquelles j'interviens, j'interviens, pardon, dans la prévention des TMS... l'employeur peut mettre ça en avant. Il peut dire, nous, on a un kiné qui vient, qui va vous apprendre à gérer votre dos, à gérer tout ça. Il va vous apprendre les échauffements avant la prise de travail. Il va vous apprendre les étirements, comme on fait pour le sport de haut niveau. Et tu t'en es à argumenter pour recruter sur des critères comme ceux-là. Sur des critères comme ceux-là.

  • Océane Marsault

    Oui, qui n'y avait pas du tout leur place il y a 50 ans. Ah non,

  • Denis Morcel

    complètement, non, non, non, non, avant, t'avais jamais ça.

  • Océane Marsault

    T'en avais jamais entendu parler.

  • Denis Morcel

    Non, non, et puis, il y a eu cette époque-là où le salarié, enfin le salarié, le travailleur était de la marchandise, c'est-à-dire qu'il y allait, il se cassait le dos, c'est pas grave, vas-y, on en prenait un autre, et puis un autre prenait la place, et puis... Aujourd'hui, les entreprises sont pénalisées financièrement quand il y a des maladies professionnelles, quand il y a des excès de travail. Donc elles commencent à... Mais c'est compliqué à mettre en place, tout ça. C'est compliqué. La solution, elle est très simple. Si on veut faire de la prévention, on s'adresse aux gamins. On va dans les CFA du bâtiment, on va dans les lycées agricoles, on va dans les... Comment dirais-je ? Dans n'importe quelle entreprise. on n'est pas fait pour passer sa vie devant un écran, on n'est pas fait pour passer sa vie à masser, on n'est pas fait pour passer sa vie à soulever des sacs à huîtres, donc après il faut s'adapter, et s'adapter ça veut dire savoir comment se gérer, pour mieux récupérer, pour ne pas se mettre en lésion sur le travail, mais comme le sportif, et comme le sportif de niveau, on fait de la prévention, je vais te dire que c'est la même chose c'est à dire que notamment sur la gestion de la colonne vertébrale on a tous la même colonne vertébrale on a une colonne vertébrale à trois courbures donc ce qui marche avec le niveau marche avec l'entreprise, avec le salarié c'est exactement pareil mais on est dans la prévention et on est de plus en plus sensibles là-dessus et c'est pour ça aussi que nos footballeurs de haut niveau vieillissent mieux qu'il y a 40 ans

  • Océane Marsault

    Tout s'explique en fait.

  • Denis Morcel

    Oui, c'est logique. À partir du moment où tu prends soin de toi, à partir du moment où tu prends le temps, après une séance d'entraînement, de t'étirer, tu sais que tu as eu il y a trois semaines ou il y a un mois et demi une lésion sur ton ischio, tu sais qu'il faut bien garder cette élasticité, cette mobilité-là. Tu sais qu'à chaque fois que tu vas te faire masser, ça t'aide, ça t'allège la charge de travail sur ta cuisse. Et voilà, le soudeur qui passe toute sa journée à souder avec son arc, s'il n'a pas cette sensibilité-là de s'étirer un petit peu les avant-bras, s'étirer un peu les coudes, il va repartir le lendemain avec la charge de travail de la journée de la veille, ainsi de suite. C'est comme ça que s'installent les pathologies.

  • Océane Marsault

    Vous en parliez un peu au début, mais vous aimez continuer à apprendre en permanence durant toute votre carrière. Est-ce qu'il y a des avancées technologiques qui ont changé complètement votre pratique ? Je ne sais pas, les bains froids, les arrivées des ondes de choc, etc. Est-ce qu'en l'intégrant, ça a remplacé certains gestes que vous faisiez manuellement avant ?

  • Denis Morcel

    Alors, rien ne remplace la main. La main est intelligente, les ondes de choc ne le sont pas. Les ondes de choc deviennent intelligentes quand la main qu'il utilise est intelligente. Il y a une machine qui est fabuleuse qui s'appelle le LPG, c'est une machine française qui au départ c'était le palpé au relais aspiré, maintenant ils ont optimisé l'appareil, en fait c'est de la ventouse high-tech, pour simplifier. Mais si tu n'as pas la main pour l'utiliser, ça ne va pas être performant. Et les ventouses c'est pareil, on peut penser que les ventouses de massage sont des ventouses en silicone. qui sont comme ça, que tu peux utiliser sur certaines pathologies, il ne faut pas bourriner, il faut avoir une main intelligente. Moi, je revendique que le premier outil pour un thérapeute, c'est la main, et qu'après, effectivement, tu as les ondes de choc, c'est-à-dire que même, les ondes de choc, ce n'est pas fin, c'est un marteau-piqueur, donc même au travers de cet appareil-là, quand tu as une main, tu vas être capable de sentir la zone de tension, tu vas être capable de sentir la zone de fibros, tu vas être capable de sentir ces choses-là, Après, en termes de technologie, il y a eu des choses qui ont explosé. Je pense notamment à l'isocynétique. Ce sont des machines qui sont capables de mesurer la vitesse, la résistance d'un mouvement, l'amplitude. Et on sait que dans toutes les pathologies musculo-tendineuses, c'est indispensable de passer les sportifs et pourquoi pas les non-sportifs au besoin. Par contre, là, on est dans le high-tech. C'est une chose que je maîtrise. Très peu, je m'y intéresse, j'ai deux collègues en équipe de France qui sont experts là-dedans, et donc c'est leur partie, c'est pas la mienne. Et en ville, c'est pareil, si j'ai besoin d'un test ISO, ou si j'ai besoin de passer la main dans ma rééducation pour une lésion musculaire, ou une gammatoplastie, peu importe, j'ai mes contacts sur place, où j'envoie à des gens qui ont l'expertise que je n'ai pas. Les bains froids, oui, oui, les bains froids, oui, c'est... Mais les bains froids, ça commence aussi par... C'est une question aussi d'un peu d'éducation. C'est-à-dire qu'on sait qu'à froid, le muscle grossièrement a un état gélatineux et qu'à chaud, il a un état liquide. Donc tu te lèves le matin, ton muscle est à froid, donc il est gélatineux. Donc on sait que le matin, il vaut mieux prendre une douche chaude. qui va faire monter un peu la température et qui va liquidifier un peu ton muscle. Par contre, le soir, les gens disent je vais prendre un bon bain chaud avant d'aller me coucher Erreur, boulette. Le soir, tu prends ta douche chaude, je veux bien, et puis après, du nombril jusqu'aux orteils, il faut faire du froid. Le froid est en vase au constructeur. Le lendemain, tu te lèveras, tu auras les jambes beaucoup plus légères que si... que si t'as fait un bain chaud et ça c'est une les gens pensent que le bain chaud la douche chaude du soir c'est vraiment non c'est pas ça,

  • Océane Marsault

    c'est le froid qui fait récupérer et bah j'hésiterais pas à essayer ça la prochaine fois lors d'une sortie de course à pied vraiment t'aimes pas le froid,

  • Denis Morcel

    tu commences par t'émoller puis après tu montes petit à petit c'est très récupérateur et tu le sens en plus après quand tu vas te coucher c'est vraiment la sensation sur le on est 3-4 à courir dans le staff en équipe de France, deux collègues, le responsable des flux vidéo, et puis un des responsables de presse, et quand on ne filme pas trop tard le soir à Clairefontaine, pas trop tard ça veut dire... pas après 23h parce qu'au-delà après je ne le fais pas, mais ça m'arrive de faire un bain froid. Et le lendemain matin tu te lèves avec cette sensation très agréable au niveau des jambes, comme des petites bulles de chaleur qui se posent dans les jambes, c'est un vrai confort, c'est un vrai bonheur.

  • Océane Marsault

    En tout cas, super conseil pour tous les sportifs qui nous écoutent, n'hésitez pas à tester les bains froids ou les douches froides après l'effort, vous serez en meilleure forme le lendemain matin et vous récupérez beaucoup plus vite. On arrive déjà malheureusement à la fin de notre entretien. En tout cas, on a appris plein de choses. C'était un plaisir de vous avoir. Pour finir sur une note positive, est-ce que vous pouvez nous raconter l'événement ou l'émotion qui vous a le plus marqué pendant votre carrière sportive ?

  • Denis Morcel

    Il y en a plein. Il y a eu des émotions positives, des émotions négatives. Le positif, forcément, c'est quand on gagne. C'est quand on gagne. J'ai un souvenir vraiment très... très ancré de la demi-finale contre l'Allemagne à l'Euro 2016, où on avait fait un match de folie. Après, il y a des matchs où c'est plus la dramaturgie que le match en lui-même. Je me souviens, par exemple, le premier match contre... En 2022, à Doha, premier match contre l'Australie. Tu sais qu'il y a une maldiction sur le champion du monde. Les trois ou quatre dernières éditions de champion du monde n'ont pas passé les poules. Tu démarres contre l'Australie. Sur une action, tu perds Lucas Hernandez et tu prends un but. Et tu te dis, on va plonger. On va y avoir de l'austine. On va se faire lourder. Heureusement, non. On a bien vu qu'on avait la supériorité sur les Australiens et qu'on a pu revenir. J'ai évidemment la Coupe du Monde en 2018. Et dans ce... dans cet élan de la Coupe du Monde 2018 chaque match à coup près c'est-à-dire huitième, quart, demi ça a été émotionnellement fabuleux

  • Océane Marsault

    En tout cas merci beaucoup Denis d'avoir été notre premier invité, c'était un plaisir de commencer cette belle aventure avec vous Merci Océane Pour toutes les personnes qui nous écoutent, on se retrouve dès maintenant sur tous nos réseaux sociaux ou alors dès le mois prochain pour un nouvel épisode d'Organ qui sera disponible sur toutes les plateformes d'écoute

  • Denis Morcel

    Merci.

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