L'appel de l'aube cover
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INTERSTICES

L'appel de l'aube

L'appel de l'aube

16min |11/06/2024
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INTERSTICES

L'appel de l'aube

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Description

Pourquoi maintenant, t’inquiètes-tu de tout si partiellement ?  

J’ai ouvert un œil. Le jour se lève tout juste. Il doit être à peine six heures. 

L’air est si doux. C’est le début de l’été. La forêt est une symphonie. Me rendormir serait tout indiqué, mais je sens qu’une grande vitalité, une énergie fringante et décidée me voudrait déjà dehors. 

Le jardin donne sur un très beau sentier s’ouvrant sous les arbres. Je ne proteste pas bien longtemps, avec de faibles arguments. C’est comme un ordre nouveau venant de ma profondeur, indiscutable. Allons-y. 

Je gagne l’extérieur en ronchonnant un peu contre moi-même. Tout de même, ce n’est pas très malin, à pareille heure. 

La température est extra. Tout est calme, paisible, doux et majestueux. La lumière de l’aurore a la magie de réveiller doucement les couleurs, et de pastelliser toute la puissance éclatante et flamboyante de l’été, comme pour mieux l’annoncer. 

Je n’ai que des espadrilles, mais je n’irai pas loin dans le sous-bois. Juste une petite promenade pour marcher en silence dans la forêt, goûter la nature resplendissante. 

L’orée de la forêt. Le sentier en faux plat est ample, sablonneux, entortillé de racines. J’ai l’impression que mes sens sont d’une réceptivité fantastique, tout est amplifié comme jamais. 

Une pensée du fond de moi, que j’entends comme une voix. « Tu as tout le temps, apprécie ! » Mes semelles sont assez fines pour me donner à palper la souplesse du sable et à deviner les nervures en travers du chemin. Je suis parti sur un rythme très lent. Dessous, la terre est assez dure et pas très loin. J’en perçois la nuance sans laquelle ce serait moins facile. Une petite couche de douceur sur une terre solide et soutenante, sécurisante, c’est idéal. Je me sens porté. Une odeur d’humus, mêlée du végétal des fougères et de quelques feuillus, vient sobrement tempérer la sève dominante des pins. Mon visage est caressé par une petite brise si douce, agréable, faisant bruisser les feuilles. Surtout, ce sont les chants des oiseaux. Ils sont chez eux. La vie bat son plein. Ils se répondent, partageant
la charge d’orner le beau silence de l’aube, tout en le consacrant dans ce petit bout de forêt pyrénéenne. Je suis touché par la nature accessible, offrant sa beauté et une telle paix, si simples. 

La paix, j’en ai tellement besoin. Le choc est passé, mais pas la douleur, ni le ressentiment, encore moins mon inquiétude.
Quelle sera ma vie à présent ? Et puis ces charges et tout ce travail… 

« Chhhhhh ! Ici, la forêt. À présent, l’aube ». 

Ok, ok. Les pas, le souffle, le cœur, la mélodie, tant de battements s’accordent sur le rythme lent. Je m’enfonce dans la grande allée de la cathédrale aux colonnes massives, tortueuses et écorcées, avec sa voute chlorophylle, bariolée de verdure, aux chœurs de mille anges à plumes. 

« Tu es bien, là ! ». Tu parles ! Marche silencieuse. Inspir. Expir. Ressenti dans les pieds, les jambes, les bras, jusqu’au bout des doigts, tout le bassin, le dos, et la poitrine, le visage aussi et la bouche. Verticalité. Extension. Relâchement.
Qualité de présence. Force de Vie, Silence de Paix. Énergie du Vivant. Amour. 

Je progresse une quarantaine de minutes sur le sentier, habité de cette sage autorité, aimante et exigeante, qui parle du fond de ma poitrine, et veille à faire taire ma tête. 

Une petite clairière. Plusieurs belles souches.
Je m’assieds sur celle qui m’attendait, je ne sais combien de temps. Le vide. Les oiseaux. Un clocher au loin. Les arbres serrés les uns contre les autres. Leurs branches se mêlent et forment une tapisserie murale à maille si fine que je n’arrive plus à les différencier. Cela devient un tout, une unité. La qualité du vide établi en moi est exceptionnelle. 

Moment de plénitude jamais vécu comme tel. 

(...)

---

Texte déposé ©Renaud Soubise 

Musique : ©Dvorjak : Symphonie n°9 « Du Nouveau Monde » (Orchestre philharmonique de Radio France)

Description

Pourquoi maintenant, t’inquiètes-tu de tout si partiellement ?  

J’ai ouvert un œil. Le jour se lève tout juste. Il doit être à peine six heures. 

L’air est si doux. C’est le début de l’été. La forêt est une symphonie. Me rendormir serait tout indiqué, mais je sens qu’une grande vitalité, une énergie fringante et décidée me voudrait déjà dehors. 

Le jardin donne sur un très beau sentier s’ouvrant sous les arbres. Je ne proteste pas bien longtemps, avec de faibles arguments. C’est comme un ordre nouveau venant de ma profondeur, indiscutable. Allons-y. 

Je gagne l’extérieur en ronchonnant un peu contre moi-même. Tout de même, ce n’est pas très malin, à pareille heure. 

La température est extra. Tout est calme, paisible, doux et majestueux. La lumière de l’aurore a la magie de réveiller doucement les couleurs, et de pastelliser toute la puissance éclatante et flamboyante de l’été, comme pour mieux l’annoncer. 

Je n’ai que des espadrilles, mais je n’irai pas loin dans le sous-bois. Juste une petite promenade pour marcher en silence dans la forêt, goûter la nature resplendissante. 

L’orée de la forêt. Le sentier en faux plat est ample, sablonneux, entortillé de racines. J’ai l’impression que mes sens sont d’une réceptivité fantastique, tout est amplifié comme jamais. 

Une pensée du fond de moi, que j’entends comme une voix. « Tu as tout le temps, apprécie ! » Mes semelles sont assez fines pour me donner à palper la souplesse du sable et à deviner les nervures en travers du chemin. Je suis parti sur un rythme très lent. Dessous, la terre est assez dure et pas très loin. J’en perçois la nuance sans laquelle ce serait moins facile. Une petite couche de douceur sur une terre solide et soutenante, sécurisante, c’est idéal. Je me sens porté. Une odeur d’humus, mêlée du végétal des fougères et de quelques feuillus, vient sobrement tempérer la sève dominante des pins. Mon visage est caressé par une petite brise si douce, agréable, faisant bruisser les feuilles. Surtout, ce sont les chants des oiseaux. Ils sont chez eux. La vie bat son plein. Ils se répondent, partageant
la charge d’orner le beau silence de l’aube, tout en le consacrant dans ce petit bout de forêt pyrénéenne. Je suis touché par la nature accessible, offrant sa beauté et une telle paix, si simples. 

La paix, j’en ai tellement besoin. Le choc est passé, mais pas la douleur, ni le ressentiment, encore moins mon inquiétude.
Quelle sera ma vie à présent ? Et puis ces charges et tout ce travail… 

« Chhhhhh ! Ici, la forêt. À présent, l’aube ». 

Ok, ok. Les pas, le souffle, le cœur, la mélodie, tant de battements s’accordent sur le rythme lent. Je m’enfonce dans la grande allée de la cathédrale aux colonnes massives, tortueuses et écorcées, avec sa voute chlorophylle, bariolée de verdure, aux chœurs de mille anges à plumes. 

« Tu es bien, là ! ». Tu parles ! Marche silencieuse. Inspir. Expir. Ressenti dans les pieds, les jambes, les bras, jusqu’au bout des doigts, tout le bassin, le dos, et la poitrine, le visage aussi et la bouche. Verticalité. Extension. Relâchement.
Qualité de présence. Force de Vie, Silence de Paix. Énergie du Vivant. Amour. 

Je progresse une quarantaine de minutes sur le sentier, habité de cette sage autorité, aimante et exigeante, qui parle du fond de ma poitrine, et veille à faire taire ma tête. 

Une petite clairière. Plusieurs belles souches.
Je m’assieds sur celle qui m’attendait, je ne sais combien de temps. Le vide. Les oiseaux. Un clocher au loin. Les arbres serrés les uns contre les autres. Leurs branches se mêlent et forment une tapisserie murale à maille si fine que je n’arrive plus à les différencier. Cela devient un tout, une unité. La qualité du vide établi en moi est exceptionnelle. 

Moment de plénitude jamais vécu comme tel. 

(...)

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Texte déposé ©Renaud Soubise 

Musique : ©Dvorjak : Symphonie n°9 « Du Nouveau Monde » (Orchestre philharmonique de Radio France)

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Pourquoi maintenant, t’inquiètes-tu de tout si partiellement ?  

J’ai ouvert un œil. Le jour se lève tout juste. Il doit être à peine six heures. 

L’air est si doux. C’est le début de l’été. La forêt est une symphonie. Me rendormir serait tout indiqué, mais je sens qu’une grande vitalité, une énergie fringante et décidée me voudrait déjà dehors. 

Le jardin donne sur un très beau sentier s’ouvrant sous les arbres. Je ne proteste pas bien longtemps, avec de faibles arguments. C’est comme un ordre nouveau venant de ma profondeur, indiscutable. Allons-y. 

Je gagne l’extérieur en ronchonnant un peu contre moi-même. Tout de même, ce n’est pas très malin, à pareille heure. 

La température est extra. Tout est calme, paisible, doux et majestueux. La lumière de l’aurore a la magie de réveiller doucement les couleurs, et de pastelliser toute la puissance éclatante et flamboyante de l’été, comme pour mieux l’annoncer. 

Je n’ai que des espadrilles, mais je n’irai pas loin dans le sous-bois. Juste une petite promenade pour marcher en silence dans la forêt, goûter la nature resplendissante. 

L’orée de la forêt. Le sentier en faux plat est ample, sablonneux, entortillé de racines. J’ai l’impression que mes sens sont d’une réceptivité fantastique, tout est amplifié comme jamais. 

Une pensée du fond de moi, que j’entends comme une voix. « Tu as tout le temps, apprécie ! » Mes semelles sont assez fines pour me donner à palper la souplesse du sable et à deviner les nervures en travers du chemin. Je suis parti sur un rythme très lent. Dessous, la terre est assez dure et pas très loin. J’en perçois la nuance sans laquelle ce serait moins facile. Une petite couche de douceur sur une terre solide et soutenante, sécurisante, c’est idéal. Je me sens porté. Une odeur d’humus, mêlée du végétal des fougères et de quelques feuillus, vient sobrement tempérer la sève dominante des pins. Mon visage est caressé par une petite brise si douce, agréable, faisant bruisser les feuilles. Surtout, ce sont les chants des oiseaux. Ils sont chez eux. La vie bat son plein. Ils se répondent, partageant
la charge d’orner le beau silence de l’aube, tout en le consacrant dans ce petit bout de forêt pyrénéenne. Je suis touché par la nature accessible, offrant sa beauté et une telle paix, si simples. 

La paix, j’en ai tellement besoin. Le choc est passé, mais pas la douleur, ni le ressentiment, encore moins mon inquiétude.
Quelle sera ma vie à présent ? Et puis ces charges et tout ce travail… 

« Chhhhhh ! Ici, la forêt. À présent, l’aube ». 

Ok, ok. Les pas, le souffle, le cœur, la mélodie, tant de battements s’accordent sur le rythme lent. Je m’enfonce dans la grande allée de la cathédrale aux colonnes massives, tortueuses et écorcées, avec sa voute chlorophylle, bariolée de verdure, aux chœurs de mille anges à plumes. 

« Tu es bien, là ! ». Tu parles ! Marche silencieuse. Inspir. Expir. Ressenti dans les pieds, les jambes, les bras, jusqu’au bout des doigts, tout le bassin, le dos, et la poitrine, le visage aussi et la bouche. Verticalité. Extension. Relâchement.
Qualité de présence. Force de Vie, Silence de Paix. Énergie du Vivant. Amour. 

Je progresse une quarantaine de minutes sur le sentier, habité de cette sage autorité, aimante et exigeante, qui parle du fond de ma poitrine, et veille à faire taire ma tête. 

Une petite clairière. Plusieurs belles souches.
Je m’assieds sur celle qui m’attendait, je ne sais combien de temps. Le vide. Les oiseaux. Un clocher au loin. Les arbres serrés les uns contre les autres. Leurs branches se mêlent et forment une tapisserie murale à maille si fine que je n’arrive plus à les différencier. Cela devient un tout, une unité. La qualité du vide établi en moi est exceptionnelle. 

Moment de plénitude jamais vécu comme tel. 

(...)

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Texte déposé ©Renaud Soubise 

Musique : ©Dvorjak : Symphonie n°9 « Du Nouveau Monde » (Orchestre philharmonique de Radio France)

Description

Pourquoi maintenant, t’inquiètes-tu de tout si partiellement ?  

J’ai ouvert un œil. Le jour se lève tout juste. Il doit être à peine six heures. 

L’air est si doux. C’est le début de l’été. La forêt est une symphonie. Me rendormir serait tout indiqué, mais je sens qu’une grande vitalité, une énergie fringante et décidée me voudrait déjà dehors. 

Le jardin donne sur un très beau sentier s’ouvrant sous les arbres. Je ne proteste pas bien longtemps, avec de faibles arguments. C’est comme un ordre nouveau venant de ma profondeur, indiscutable. Allons-y. 

Je gagne l’extérieur en ronchonnant un peu contre moi-même. Tout de même, ce n’est pas très malin, à pareille heure. 

La température est extra. Tout est calme, paisible, doux et majestueux. La lumière de l’aurore a la magie de réveiller doucement les couleurs, et de pastelliser toute la puissance éclatante et flamboyante de l’été, comme pour mieux l’annoncer. 

Je n’ai que des espadrilles, mais je n’irai pas loin dans le sous-bois. Juste une petite promenade pour marcher en silence dans la forêt, goûter la nature resplendissante. 

L’orée de la forêt. Le sentier en faux plat est ample, sablonneux, entortillé de racines. J’ai l’impression que mes sens sont d’une réceptivité fantastique, tout est amplifié comme jamais. 

Une pensée du fond de moi, que j’entends comme une voix. « Tu as tout le temps, apprécie ! » Mes semelles sont assez fines pour me donner à palper la souplesse du sable et à deviner les nervures en travers du chemin. Je suis parti sur un rythme très lent. Dessous, la terre est assez dure et pas très loin. J’en perçois la nuance sans laquelle ce serait moins facile. Une petite couche de douceur sur une terre solide et soutenante, sécurisante, c’est idéal. Je me sens porté. Une odeur d’humus, mêlée du végétal des fougères et de quelques feuillus, vient sobrement tempérer la sève dominante des pins. Mon visage est caressé par une petite brise si douce, agréable, faisant bruisser les feuilles. Surtout, ce sont les chants des oiseaux. Ils sont chez eux. La vie bat son plein. Ils se répondent, partageant
la charge d’orner le beau silence de l’aube, tout en le consacrant dans ce petit bout de forêt pyrénéenne. Je suis touché par la nature accessible, offrant sa beauté et une telle paix, si simples. 

La paix, j’en ai tellement besoin. Le choc est passé, mais pas la douleur, ni le ressentiment, encore moins mon inquiétude.
Quelle sera ma vie à présent ? Et puis ces charges et tout ce travail… 

« Chhhhhh ! Ici, la forêt. À présent, l’aube ». 

Ok, ok. Les pas, le souffle, le cœur, la mélodie, tant de battements s’accordent sur le rythme lent. Je m’enfonce dans la grande allée de la cathédrale aux colonnes massives, tortueuses et écorcées, avec sa voute chlorophylle, bariolée de verdure, aux chœurs de mille anges à plumes. 

« Tu es bien, là ! ». Tu parles ! Marche silencieuse. Inspir. Expir. Ressenti dans les pieds, les jambes, les bras, jusqu’au bout des doigts, tout le bassin, le dos, et la poitrine, le visage aussi et la bouche. Verticalité. Extension. Relâchement.
Qualité de présence. Force de Vie, Silence de Paix. Énergie du Vivant. Amour. 

Je progresse une quarantaine de minutes sur le sentier, habité de cette sage autorité, aimante et exigeante, qui parle du fond de ma poitrine, et veille à faire taire ma tête. 

Une petite clairière. Plusieurs belles souches.
Je m’assieds sur celle qui m’attendait, je ne sais combien de temps. Le vide. Les oiseaux. Un clocher au loin. Les arbres serrés les uns contre les autres. Leurs branches se mêlent et forment une tapisserie murale à maille si fine que je n’arrive plus à les différencier. Cela devient un tout, une unité. La qualité du vide établi en moi est exceptionnelle. 

Moment de plénitude jamais vécu comme tel. 

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Texte déposé ©Renaud Soubise 

Musique : ©Dvorjak : Symphonie n°9 « Du Nouveau Monde » (Orchestre philharmonique de Radio France)

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