- Speaker #0
C'est bien lui ! Allez, un maximum d'applaudissements pour Emmanuel Petit encore une fois. Et on peut juste, parce qu'il y a certaines... Est-ce qu'il y a quelqu'un, vraiment, on va être honnête, qui ne sait pas qui est Emmanuel Petit ? Emmanuel Lecoën, suivant ! Tout le monde est au courant. Tu peux juste appuyer une dernière fois. ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ...
- Speaker #1
On peut envoyer la rame. Emmanuel Petit qui était parti de...
- Speaker #0
Le Paul Marès, magnifique ! Question suivante, la première question, il y a plein de... Encore ? Vous voyez qu'on ne maîtrise pas les choses, c'est difficile, vous comprenez pourquoi ? Je suis à mon compte, j'aime bien faire les... On va commencer ? Déjà, merci d'être venu, merci vraiment. Je vois l'effet que tu fais. Il n'y a pas besoin d'en parler, c'est comme ça. Est-ce que tu peux nous parler, pour commencer ? Et puis après, l'idée c'est que je te pose quelques questions. Tu l'échanges aussi avec le public. Juste avant, ton train c'est 1547, c'est ça ? C'est ça. Super. Tu as des affaires à prendre ?
- Speaker #2
Non, j'ai tout dans mon sac.
- Speaker #0
1542, on est bon alors ? On est bon. Si tu fais le même sprint que la dernière action, on est bon. La bière, elle est en face. C'est bon, on est bien cool. Est-ce que tu veux nous parler du monde des sportifs de haut niveau ?
- Speaker #2
Tout d'abord, déjà, je vous remercie pour votre accueil extrêmement chaleureux. Je suis toujours extrêmement surpris de voir l'impact de ce qu'on en a fait avec les copains en 98, d'ailleurs. Petite anecdote, on se voit tous la semaine prochaine à Marrakech pendant une semaine. On fêtera l'anniversaire de Zizou et de Patrick Vira. On est unis à vie à travers ce que l'on a fait. Ça dépasse largement le cadre du sport. Même s'il y a eu des petites frictions entre garçons dans l'association, aujourd'hui j'ai l'impression qu'on a tous compris que ce que nous avons fait était bien au-delà de... de notre propre personne et qu'en étant lié à vie, il fallait absolument mettre de côté certaines rancœurs et amertumes. Donc on s'est promis chaque année de se voir avec les proches, tous ensemble, pour solidifier toujours ce qui existe entre nous. Voilà, tout simplement. Donc le sport de haut niveau, qu'est-ce que je peux vous raconter que vous ne savez pas dans la mesure où, pour moi, je trouve que le sport de haut niveau a énormément changé à l'image du monde ? Dans sa communication, dans son approche, dans son entraînement, dans toutes sortes de techniques que vous pouvez mettre à disposition des joueurs. Aujourd'hui, chaque joueur qui joue au niveau international, qui joue dans un grand club, c'est une multinationale. Vous avez autour d'eux à peu près 10-15 personnes qui gèrent leurs intérêts, que ce soit financiers, images, réseaux sociaux, tout ce que vous voulez. On me posait la question tout à l'heure, je pense que c'est la grosse différence aujourd'hui entre... Le joueur de foot que l'on était nous à notre époque et aujourd'hui, c'est-à-dire que nous on n'avait pas toute cette armada autour de nous. Je ne dis pas que ce n'est pas bien, je dis qu'on a toujours une proximité avec les gens que les joueurs d'aujourd'hui ont de moins en moins. Et je trouve que si on perd ce fil-là, moi je pense que déjà que le football prend un chemin qui ne me plaît pas beaucoup. Mais si en plus on coupe le supporter de base avec... Avec les joueurs de foot, je trouve que ça n'a plus aucun sens finalement. C'est comme pendant la pandémie, de faire des matchs dans des stades vides, tu peux comprendre qu'économiquement, c'était vital pour les clubs et les championnats de continuer, mais jouer sans supporter, pour moi, ça n'a aucun sens. Donc le sport de haut niveau aujourd'hui, moi je suis entrepreneur, quand j'étais joueur, j'étais entrepreneur également, et je l'ai suis encore plus aujourd'hui. Je suis un touche-à-tout, je suis un bolimique de travail, ça ne se voit pas avec ma dégaine. Mais j'adore travailler, j'adore créer des projets, j'adore créer des structures, j'adore gérer des équipes. Alors vous allez certainement me poser la question, pourquoi tu ne deviens pas entraîneur ? Tout simplement parce que la vie est plus importante que le football et que je ne mettrai jamais la vie, ma vie, dans la balance face au football qui est une de mes passions, j'en ai d'autres. Pour moi la vie est beaucoup plus importante que le football et je veux avoir cette liberté de pouvoir profiter des miens en permanence. Aujourd'hui, le sport de haut niveau, quand j'essaie de créer une entreprise, j'essaie toujours de créer un pont entre mon expérience de sportif de haut niveau et essayer justement de retrouver ce qui fait la force d'un collectif, mais sans brimer justement l'initiative et la créativité d'un individu au sein d'un collectif. Cette balance, cet équilibre est toujours très difficile à trouver. C'est pour ça que j'en parlais encore tout à l'heure avec des gens. Moi, je prône depuis très très longtemps le salarié actionnaire, parce qu'on est dans une approche complètement différente et je veux qu'il soit responsabilisé et que tous les jours lorsqu'il vient au travail, qu'il y ait une remise en question permanente, qu'il se sente intégré dans le projet. Donc dans le sport d'I.O., évidemment, vous avez le team building, vous avez l'esprit d'entreprise, comment faire justement pour gérer les objectifs dans l'année. Mais s'il y a une chose que moi je trouve très révélatrice dans mon ancien parcours, C'est le sportif de haut niveau, par définition, et je suis complètement d'accord avec la personne qui est passée avant. C'est en prenant des coups qu'on arrive à avancer. C'est dans les grandes défaites qu'on voit la richesse d'un collectif. Parce que dès que tu fais des grandes victoires, tout le monde est toujours là, tout le monde est souriant, tout le monde se fait des tables dans le dos, c'est parfait. Mais on voit vraiment la richesse d'un collectif lorsqu'il traverse une tempête. On voit comment les gens réagissent, comment ils se servent de l'unité. S'il n'y a pas des personnes qui préfèrent jouer une carte personnelle plutôt collective. Donc là où moi je trouve qu'il y a une énorme différence à ce niveau-là, c'est le sportif de haut niveau par définition, on lui propose à chaque fois un challenge et dans l'instant T, il doit donner une réponse. Vous avez une minute pour prendre une décision, une minute pour apporter une réponse et sur le terrain, Tout à l'heure, quelqu'un me parlait, il disait, mais généralement, un entraîneur vous dit, voilà, ça, ça, ça, il va falloir qu'on le respecte pour analyser les jeux de l'adversaire, leur qualité intrinsèque, leur qualité individuelle ou collective. Mais moi, c'est ça, c'est ce qui m'intéresse par-dessus tout, c'est cette possibilité, justement, qu'on donne aux gens dans un collectif de pouvoir amener une réponse face à une problématique et dans l'instant T. Et ça, c'est ce que j'adore dans le sport de haut niveau, que ce soit un tennisman, n'importe quoi. Il est dans la difficulté, il n'est pas bien, il est cuit mentalement, il est au fond du trou, il est obligé de remonter 1-7-0. Comment il fait ? Qu'est-ce qu'il apporte comme solution ? J'essaye de le transposer dans l'entreprise, c'est un peu plus compliqué. Parce que nous, dans le foot, dans le sport de haut niveau, on est au cœur du jeu. Donc on peut avoir un impact tout de suite sur ce qui va se passer après. Et dans l'entreprise, c'est très difficile à voir ces choses-là, c'est sur la durée et autres. Donc, toutes les facettes qu'il peut avoir un entraîneur. Aujourd'hui, les entraîneurs les plus cotés sont qui ? C'est les Guardiola, c'est les Klopp, les Ancelotti. Ils ont tous un point commun, c'est que... C'est justement là où beaucoup d'entraîneurs aujourd'hui ont un peu perdu le fil. C'est que le foot reste un sport collectif, même s'il est de plus en plus individualisé. Et c'est ça que je regrette également. Mais les entraîneurs qui ont gardé... Ce principe qui est fondamental arrive toujours à gagner des titres. De toute manière, regardez tous les vainqueurs de Champions League des dernières années, ce ne sont que des équipes qui ont joué en équipe. Ils ont une grosse ossature, une unité collective. Après, il y a des unités qui arrivent à faire la différence, mais la base, l'ancrage, justement le socle, c'est ça, c'est d'avoir un collectif performant qui puisse donner la possibilité à n'importe quel individu de pouvoir s'épanouir et pouvoir notamment entrevoir. de franchir des étapes et pourquoi pas de s'émanciper, et pourquoi pas, dans les mois, les années à venir, d'avoir sa propre affaire. C'est ce que je dis à chaque fois à mes salariés, je dis, moi, ton objectif, il faut que demain, tu sois indépendant, que tu aies ta propre affaire. C'est ça l'objectif pour moi qui est très important. Donc toutes les corrélations que tu peux amener dans le monde du sport, il y a un plafond de verre à un moment donné. On arrive vraiment à la limite et on ne peut pas aller au-delà. J'ai rarement rencontré justement une unité dans le monde de l'entreprise que je pouvais avoir dans le monde du sport. Parce qu'on est tous unis comme les doigts d'une main et qu'on est tous tributaires du rendement de chacun.
- Speaker #0
D'accord. Donc le collectif, tu le vois aujourd'hui plus fort dans le monde du sport que dans le monde de l'entreprise pour la réussite ?
- Speaker #2
C'est ce que je pense aussi parce que nous on a une chance qui est incroyable quand on est sportif de haut niveau, c'est qu'on a un rendu tous les jours. On a un rendu par la presse. les supporters, tes actionnaires, ton propriétaire, ton entraîneur, son staff, tous les jours, on a un rendu. Tous les jours, on a un rendu. Et moi qui travaille depuis longtemps dans mon entreprise, il y a des meetings chaque week-end, chaque semaine, pour faire justement le bilan de la semaine passée, les objectifs dans la semaine à venir. Il n'y a pas de soucis, ce qu'on peut refaire, machin. Mais ça s'arrête à une certaine logique. Et moi, quand j'étais sportif de niveau, ça me manque dans la vie de tous les jours. J'ai besoin tous les jours d'avoir un curseur. J'ai besoin tous les jours... Des objectifs, j'ai besoin qu'on me dise ça hier c'était pas bien, il faut le faire différemment. Mais j'ai besoin d'avoir cette concertation et quand j'étais joueur j'adorais ça. J'étais très demandeur, même quand les entraîneurs ne me parlaient pas, j'allais les voir dans leur bureau, je toquais, je veux savoir ce que vous pensez de moi, qu'est-ce qu'il faut que j'améliore, dans quel domaine il faut que j'insiste. J'ai besoin d'avoir cet échange-là pour pouvoir progresser individuellement dans un monde collectif. Pour moi, c'est indispensable.
- Speaker #0
Tu regardais aussi la presse ?
- Speaker #2
Oui, mais pas beaucoup. C'est surtout les entraîneurs qui s'en servaient, notamment pendant la Coupe du Monde 98, où Aimé Jacquet avait été pris à partie par certains médias. Et nous, on était labellisés des losers avant même de commencer la Coupe du Monde, dans notre propre pays. Et ça, il y a des entraîneurs. Arsène Wenger le faisait aussi à Monaco. Des coupeurs de presse. T'as même pas besoin d'un speech, ils te disent simplement regardez ce qu'ils pensent de vous. Et c'est ça la chance que quand t'es sportif, c'est que t'as le pouvoir de changer les choses tous les 3 jours. Tous les 3 matchs, tous les 3 jours t'as un match, t'as le pouvoir, un jour t'es un zéro, 3 jours après tu peux être un héros. C'est ce que j'adorais moi dans le milieu parce que t'as ton destin en permanence.
- Speaker #0
Ok, on peut continuer après je t'en raconte ça, on va... Bon, on en a parlé un petit peu, les parallèles, les sports au niveau du monde de l'entreprise. Tu vois, on peut parler même... Ah super, merci beaucoup. C'est la bonne que tu as récupérée ? Merci. Je dirais les parallèles plutôt dans la performance.
- Speaker #2
La performance, oui. Les objectifs, c'est extrêmement aléatoire parce qu'il y a une forte concurrence dans le monde de l'entreprise comme dans le monde du sport. Il y a beaucoup de paramètres justement qui sont tellement... C'est sur une limite à chaque fois. Qu'est-ce qui fait qu'on est vainqueur ou on est loser ? Des fois, il y a aussi le facteur chance. Mais moi, je reste persuadé qu'on n'est pas vainqueur par hasard. Qu'il y a des choses à chaque fois qu'il faut respecter. Mais après, il y a aussi un facteur risque qui vient, comme la chance, comme aussi l'esprit d'entreprise individuelle. Rappelez-vous de la fameuse phrase des Méjacques pendant la Coupe du Monde avec Robert Pires. Muscle ton jeu, le dépassement de soi, c'est très important. Et à un moment donné, regardez ce qu'a fait Lyon-Thuram contre la Croatie. À la mi-temps, quand il rentre, il a ce sentiment de culpabilité d'avoir couvert le but de Schucker. Il était rentré en deuxième mi-temps avec cette volonté justement de renverser la table. Il avait un tel sentiment de culpabilité qu'il s'est dit, moi je ne peux pas finir le match comme ça. Donc ce n'est quand même pas par hasard, derrière il marque les deux seuls buts qu'il a marqués en équipe de France. Dans ce match-là, dans un match tellement important. Donc c'est encore une fois, moi... À un moment donné, il faut attendre d'un individu, dans un collectif, une idée, une action, une responsabilité, mais avec toujours à l'esprit de ne jamais remettre en question l'unité collective. Ça n'empêche pas que les gens peuvent s'émanciper dans un collectif. Et pour moi, ça c'est extrêmement important et c'est ce qui a été symbolique dans pas mal de matchs, notamment pendant la Coupe du Monde 98.
- Speaker #0
D'accord. Tu parlais de Lien de Chirac, mais justement, il vous a dit quelque chose dans les vestiaires à la mi-temps ? Ou il a gardé le truc pour lui ?
- Speaker #2
Non, on avait pour habitude, nous, de jamais parler à la mi-temps. Tu pouvais entendre une mouche voler à chaque fois. Les seuls qui pouvaient parler, c'était le coach Aimé avec son staff. Il y a un seul match où Aimé a eu peur, c'était à la mi-temps contre le Brésil. Il avait eu peur déjà en demi-finale contre la Croatie, parce qu'on ne respectait pas nos fondamentaux de jeu. On était trop étirés, on ne savait pas si on avait un bloc bas ou un bloc haut, on ne savait pas s'il fallait faire le pressing haut ou s'il fallait les attendre plus bas. C'était d'excellents techniciens, les croates à cette époque-là, ils le sont toujours. D'ailleurs, on l'a vu récemment. Et donc, il nous a passé un savon. Aimé n'a pas pour habitude de passer des savons, mais quand il le fait, c'est pour de bonnes raisons, donc il a flippé. Et il avait raison, parce qu'il disait, je ne vous reconnais pas, Je ne sais pas comment vous voulez jouer. Et on est en train de donner le bâton pour se rabattre et on va rentrer à la maison ce soir. Vous allez regarder la finale à la maison. Il faut absolument que vous vous réveillez et que vous jouiez pour ce jeu. Il faut toujours prendre conscience de la concurrence, mais ne pas la regarder avec une loupe. Il faut la regarder telle qu'ils sont et surtout... Tout à l'heure, il vous a donné des outils et qui sont très bien. Moi, je vous en donnais ce que je fais quand j'étais joueur. Et c'est marrant parce que ces dernières semaines, deux, trois dernières semaines, Du journaux spécialisé sportif, il y avait des sportifs de grand renom, différentes disciplines, qui parlaient exactement de ce que moi je m'impose tous les jours. Et quand je dis je m'impose, ce n'est pas quelque chose de négatif. Quand j'étais joueur, je faisais beaucoup de visualisation, de méditation, et de respiration, de travail respiratoire. Déjà à l'époque, j'essayais de me mettre un petit peu à l'écart, parce qu'on me regardait avec des yeux d'une curiosité, on me disait « mais pourquoi tu fais ça ? »
- Speaker #0
C'était déjà pour moi une préparation mentale.
- Speaker #2
J'ai réussi à l'avoir. Après avoir traversé des tragédies, je n'arrivais pas à trouver des réponses dans mon milieu, je n'arrivais pas à trouver des réponses auprès de mes proches. Il fallait que ce soit un parcours initiatique, il fallait que j'aille à la recherche de moi-même. Donc je me suis mis à fond dans la lécure depuis très longtemps, toutes sortes de lécures, sociologie, histoire, n'importe quoi, économie, tout. Et je suis tombé sur un livre un jour qui m'a changé complètement, qui s'appelle « La trilogie des Andes » de James Redfield, qui a été un carton planétaire incroyable. Et je l'ai lu cinq fois pour le comprendre. À un moment donné, je me suis demandé si j'étais véritablement un joueur de foot, parce que je ne comprenais pas ce que je disais en fait. Et donc j'ai relu, j'ai relu, et en fait on m'a donné des outils dans ce livre que je me suis approprié, maintenant je le fais tous les jours. Tous les matins, je me réveille. Je prends 10-15 minutes, je fais de la méditation, je fais de la respiration. Le soir, avant de me coucher, je fais la même chose dans mon lit, toujours au calme, relâché. Toujours essayer de faire cette autocritique dans la journée de ce qui a été bien, ce qui n'a pas été bien, les objectifs ont-ils été remplis. Toujours dans la méditation, la visulation. La visulation, c'est quoi ? Comment je faisais la visulation quand j'étais joueur ? Quand je savais que j'allais préparer un match important, souvent le cas quand tu joues avec les grands clubs, à chaque fois, je me projetais dans le match. dans ma zone respective et en face de moi je ne mettais pas des visages alors que je savais que je les rencontrais dans mes zones mais je mettais des personnes sans visage et moi en fait j'accentuais ma visualisation sur quelle réponse j'apporte à les qualités justement de l'adversaire qui se trouvera dans ma zone, quelle réponse je peux amener justement pour le mettre en difficulté dans l'instant T. La prise de décision elle est 30 secondes, tu la rates c'est fini, t'es dans le décor. Et ça, ça m'aide beaucoup, même dans ma vie de tous les jours. Je ne dis pas que c'est quelque chose qui a fait de moi un autre homme, mais ça m'a beaucoup aidé, surtout que moi, j'ai une deuxième personnalité dans la tête. Donc, il faut absolument que j'arrive à la maîtriser, à la contrôler, parce que si elle ne prend trop le pas sur moi, c'est un peu comme Hulk. Je deviens une personne que je n'ai pas envie d'être. Ça m'a énormément aidé, justement, pour me canaliser et canaliser mon énergie et surtout à être décisif dans les moments opportuns.
- Speaker #0
Et en fait, là, t'es à côté de moi, tu dégages une sérénité, une zénitude, c'est incroyable. C'est ce qu'on dit, c'est incroyable. Je ressens un vieux sage, en fait. Réellement, c'est dingue.
- Speaker #2
Je ne sais pas si c'est par toutes les émotions que j'ai vécues avec mes collègues, mais je pense aussi que quand j'étais jeune, j'ai traversé des trajectiques incroyables et je me demande comment j'ai fait pour faire ce que j'ai fait après, en fait. Moi j'ai perdu mon frère sur un terrain de foot, j'ai failli perdre mon père sur un terrain de foot, j'ai perdu mon meilleur ami qui s'est pendu. J'ai été dans les maisons de redressement quand j'étais jeune à l'époque, je pense que pour certains ça doit leur parler. Parce que moi je me battais tous les jours en fait, et j'étais devenu un délinquant, je raquettais les gens. Non mais c'est vrai, ça allait loin. Mes parents étaient désespérés et à un moment donné ils m'ont pris autour d'une table et ils m'ont dit Manu, qu'est-ce que tu fais ? qu'est-ce qu'on va faire de toi ? Et j'ai dit à mon père, j'ai dit, papa, il y a une chance, c'est que j'adore le foot, j'adore le sport, et j'avais le choix entre être nageur, parce que j'excellais dans la natation, et j'ai choisi le football, parce que j'adore le football également, et ça m'a sauvé en fait.
- Speaker #0
Vers quel âge, c'était à peu près ?
- Speaker #2
J'avais 11-12 ans.
- Speaker #0
Et tu savais que t'allais trop ?
- Speaker #1
Non.
- Speaker #2
Mais j'ai tout fait. En plus, j'ai traversé la France entière. Donc, j'avais des propositions de pas mal de clubs professionnels. J'ai choisi d'aller à la destination la plus loin et la plus compliquée pour moi, qui était l'A.S. Monaco, qui n'avait pas besoin de former des joueurs à l'époque. Avec l'exonération fiscale, ils pouvaient s'acheter des étrangers. Mais moi, j'ai choisi la destination parce que c'était un challenge pour moi. J'avais été dans un sport études dans la région de Normandie une année auparavant. Ça s'est très mal terminé parce qu'à l'époque, il y avait encore le bizutage. Et quand les aînés ont fait le visitage avec moi, j'en ai envoyé deux à l'infirmerie. Donc je suis resté un mois et demi, je suis parti, je suis rentré chez moi, et là je pensais vraiment que c'était terminé pour moi le football. Et comme je m'accrochais, parce que tout à l'heure on parlait du mental, mais moi j'ai un mental, je suis un guerrier. Moi je ne fais qu'avancer en fait. Je prends des coups, je suis par terre, je me relève, je m'avance. Tu mets un flingue devant moi, ça m'est arrivé deux fois, j'avance vers le mec et je mets le flingue sur la tempe, j'avance vers lui. On peut considérer que c'est un peu de la folie, mais moi je pense plus que c'est du caractère, du tempérament, de la personnalité. Et ça me sert aujourd'hui, je suis beaucoup moins fou qu'avant, je te rassure. Je suis beaucoup plus apaisé. Depuis que je suis papa, ça fait maintenant, j'ai trois filles, elle est née à 20 ans, 15 ans et 13 ans. Puis les expériences de la vie aussi ont fait que je ne suis pas la même personne, donc je n'ai pas la même approche du monde dans lequel je vis. Et fort heureusement, le football m'a amené justement cette sérénité, parce que je suis toujours très surpris de voir comment les gens... J'ai l'impression d'avoir des enfants en fait, en face de moi. Quand je vois comme ils viennent me voir, comment leurs yeux pétillent et tout, et je leur dis mais la prescription c'est comme les impôts, c'était il y a 24 ans. Il faut tourner la page. En plus, il y a une nouvelle génération qui est championne du monde. « Ouais, mais c'était pas pareil, c'était pas la même chose. » « C'est pas pareil,
- Speaker #0
c'est sûr. » Ils me disent tout ça. Donc, va-t-on mieux pour nous ? En fait, la conscience... Je leur en ai parlé hier, mais vraiment, sans abuser, je leur ai dit que vous faites partie vraiment du patrimoine français.
- Speaker #2
Ça, on en a conscience, parce que quand on va à l'étranger, je le vois tous les jours, moi. Et ça, franchement, c'est ma plus grande fierté. et je pense qu'avec mes collègues parce qu'on en parle souvent On est toujours estomaqué de voir les réactions des gens, mais surtout à l'étranger. Parce que les Français, ils réagissent de façon patriotique, c'est le cœur qui parle. Mais les étrangers, pourquoi ils ont les yeux pétis quand ils nous voient ? Parce qu'en fait, l'image que l'on a dégagée, ça leur a plu. Cette image de Black Blamber unis tous ensemble sous les couleurs françaises, parce que c'est ça la France. Moi, dans le sport, je ne connais que ça. Donc tous les débats politiques que je vois à la télé, sincèrement, je n'ai pas l'impression qu'on parle de mon pays, en fait. Et les étrangers, quand ils nous voient, à chaque fois, la première chose qu'ils me disent, que ce soit en Asie, quand je vais en Afrique, partout, partout, on nous reconnaît tout le temps. Les gens, ils nous voient en disant, l'image que vous avez dégagée est extraordinaire, elle dépasse le cadre du sport et c'est ça notre plus grande victoire. C'est ce que je dis aux garçons à chaque fois. Je dis, vous vous rendez compte qu'on a déplacé 3 millions de personnes sur les Champs-Élysées, que depuis la guerre mondiale, on n'a jamais eu ça, comme si c'était une libération de la France. Tout ça pour du football.
- Speaker #0
De la même manière, quasiment que les personnes. savent exactement où ils étaient comme la mort de Diana ou les Warchief Center c'est incroyable peut-être même plus c'est un truc de fou tout le monde sait où il était le 12G98 exactement tout le monde je vais vous faire un avis à l'issue de la finale on rentre à Clairefontaine pour
- Speaker #2
faire la fête évidemment et ça dure dans la nuit il y avait les proches il y avait des magiciens enfin bref il y avait une en été il y avait une zénitude Je le souhaite à n'importe qui. J'en ai des frissons quand je vous en parle parce que ça me manque terriblement. Cette unité me manque terriblement. C'est pour ça que chaque fois que je vois des images comme ça, je les regarde très peu parce que je ne veux pas les banaliser. Quand je les vois, j'ai les larmes qui me montrent rapidement parce que... Elle me monte encore là.
- Speaker #0
Chaque année, c'est moi qui vais me pleurer. L'un dernier Philippe Crozant, c'est toi. C'est une émotion...
- Speaker #2
Oui, c'est intense. C'est une émotion parce que cette unité, putain, c'est incroyable. Cette solidarité, on est tous ensemble, il y en a un qui tombe, on le rend... Enfin, on est des frères de cordée en fait. C'est comme si on franchissait le Himalaya et qu'on est tous dépendants de l'autre. Et j'ai du mal à retrouver dans la vie de tous les jours. C'est pour ça que des fois la vie me paraît fade. Et je suis nostalgique de ça. Je ne suis pas nostalgique d'avoir gagné la Coupe du Monde. Je suis très fier de l'avoir fait avec mes collègues. Je suis notre sadique de comment on a fait pour la gagner. Quels ont été les ingrédients qu'on a mis sur la table, tous ensemble ? Est-ce qu'à un moment donné, les objectifs personnels n'ont pas été prédominants par rapport aux objectifs collectifs ? On avait une telle unité, on était tellement tous, mais quand on met les cinq doigts de la main, c'était impressionnant. Et ça, ça me manque terriblement. C'est pour ça que quand je vois les images, je vois tous mes potes, et je vois comment on était, comment on est toujours aujourd'hui. C'est incroyable, je paierais pour revivre ce genre d'émotion.
- Speaker #0
C'est grâce à l'unité que vous l'avez gagné, c'est vraiment ça ?
- Speaker #2
Je pense qu'on est arrivé au bon moment, tous ensemble, on était en pleine maturité tous, et on avait tous une folle envie de décrire l'histoire. C'est un côté égocentrique qui prédomine, mais quant à l'opportunité dans une vie, on a... Quelques opportunités dans une vie qui peuvent changer radicalement le cours de ta propre vie. Il faut tout faire justement pour saisir ces opportunités parce qu'elles sont très rares et elles sont incroyables. Et moi, cette possibilité de jouer une Coupe du Monde dans mon pays, avec mes potes, mais si je pouvais payer pour vivre ça, je le referais, je te jure.
- Speaker #0
C'est incroyable. De toute ma carrière de football,
- Speaker #2
j'ai vécu de fortes émotions partout où je suis allé. Bien ou moins bien, mais l'équipe de France restera à jamais gravée dans mon cœur. J'ai adoré certains clubs, je ne suis pas fait beaucoup de clubs, mais j'ai adoré les rencontres de certaines personnes, aussi les succès sportifs. Mais moi, ce qui m'importe le plus, c'est l'impact qu'on peut avoir au niveau des gens. Parce qu'on n'est pas des docteurs, on n'est pas des scientifiques, on n'est pas des politiciens, on ne change pas la vie des gens, on amène un peu de réconfort. Quand je vois l'importance que prend le football aujourd'hui dans la société, ça me fait flipper. Et j'en parlais tout à l'heure justement sur... J'ai été choqué moi de voir Kylian Mbappé faire... Le journal de 20h pour annoncer sa prolongation au Paris Saint-Germain, je me suis dit putain on n'a rien d'autre à parler au journal de 20h. En plus le président Macron intervient en période électorale pour parler de Kylian Mbappé, je me suis dit mais il n'y a pas d'autre chose plus importante que ça au journal de 20h ? Journal national ? Oui ça me fait flipper. Donc c'est pour ça que j'essaye de prendre le recul sur beaucoup de choses. Je l'étais quand j'étais joueur, souvent c'était mal perçu par le grand public parce que j'étais souvent brocardé dans la presse comme étant un écorchevif et un rebelle.
- Speaker #0
Je trouve que je ne suis pas, je suis sensible, oui, très, mais je ne suis pas un rebelle.
- Speaker #2
Et pour moi, c'est la chose la plus importante. On est un petit peu des gladiateurs à l'époque romaine. Le peuple, les gens, ils veulent rêver, ils veulent avoir des émotions. Et moi, c'est ce que j'ai à chaque fois. Un de mes films préférés, c'est Gladiateur. Et il y a une phrase justement du maître des esclaves envers Maximus et qui lui dit, si tu veux gagner ta liberté, gagne le cœur du public. C'est ce que je dis à tous les joueurs qui veulent commencer une carrière. Arrête de penser à l'argent, à la notoriété. Tu veux tout ça, gagne le cœur du public et t'auras tout ce que tu veux.
- Speaker #0
Je regarde l'heure, ce que je pourrais rester jusqu'à après-demain à discuter avec toi. Je vais poser une question, si vous voulez juste aussi, on a encore du temps, ne vous inquiétez pas. Pour commencer, à préparer un micro pour que vous profitiez aussi, parce que c'est un moment où on profite tous et toutes ensemble.
- Speaker #2
Comment aller chercher encore plus haut ?
- Speaker #0
France 98, t'as gagné.
- Speaker #2
On l'a fait en 2000.
- Speaker #0
Je sais. Et justement, comment tu repars ? Ah oui,
- Speaker #1
le micro,
- Speaker #0
ça peut être utile.
- Speaker #2
En 98, on a été touchés par les critiques qui sont abattues sur nous avant, mais on a été surtout touchés par les critiques qui sont abattues après. On finit Meilleur Attaque, Meilleur Buteur. Certes, on n'a pas eu le jeu brésilien, mais on n'a pas été pourris non plus. Et quand je vois les critiques qui sont abattues sur nous, des gens qui voulaient réécrire l'histoire... C'est toujours l'éternel débat entre les pragmatiques et les romantiques. L'histoire ne retient que les pragmatiques. Romantisme et du beau jeu, mais évidemment, tu poses la question n'importe quel jour, n'importe quel entraîneur, est-ce que tu as envie de gagner ? Oui. Est-ce que tu as envie de gagner ? De quelle manière ? Bien sûr. Quelles sont les équipes aujourd'hui qui gagnent avec la manière ? Il y en a très peu. Regardez, à Madrid, ils sont champions d'Europe, ce n'est pas la meilleure équipe sur les quatre tours. mais ils ont gagné parce que c'est celle qui a démontré peut-être des facultés un peu plus importantes dans des moments cruciaux Voilà. Et comment on fait pour aller plus loin ? Je pense que l'ego joue beaucoup. Cette volonté à chaque fois de repousser ses propres limites. Parce que le plus dur, ce n'est pas d'aller en haut. Le plus dur, c'est de rester en haut. Donc on a été tellement touchés par les critiques qui sont abattues sur nous après 1998. Et en plus, il y avait l'excuse, vous voyez, ça a joué à domicile, ça a été arrangé avec la FIFA et compagnie. Donc on avait à cœur, nous, deux ans après, en sachant qu'un championnat d'Europe est plus relevé d'un point de vue sportif qu'une Coupe du Monde. Donc on avait un cœur, on se savait très attendus, mais c'était un pacte entre nous. Les gars, on s'est dit, il faut absolument qu'on gagne ce championnat d'Europe pour fermer les bouches de tout le monde.
- Speaker #0
C'est l'orgueil qui a donné le mot de la vie. Oui, l'orgueil,
- Speaker #2
mais ça fait aussi de la motivation. La fierté, l'orgueil, ça te permet de te dépasser, d'accepter des choses des fois dans la difficulté, dans l'adversité. Et ça, comme je disais tout à l'heure,
- Speaker #0
l'X-Factor, l'extra-motivation.
- Speaker #2
Les entraîneurs qui prennent les revues de presse, mais nous, on n'est pas stupides, on savait ce qui se disait. Donc on avait à cœur justement, mais on savait que la tâche serait beaucoup plus ardue parce que sportivement, le niveau est quand même plus relevé. Et on l'a fait. Et on l'a fait. Et il n'y avait que trois équipes au monde qui l'avaient fait depuis que le foot est foot. Et ça a été une immense fierté. Du championnat d'Europe, évidemment, on est en fin de cycle. Ce qui s'est passé en Corée en 2002, c'était écrit d'avance. On ne peut pas non plus être au firmament tout le temps. On a régné sur le football pendant cinq ans, on battait tout le monde. Toutes les équipes qui jouent contre nous, on les battait pendant cinq ans. Après, il y a une équipe qui nous a surclassés, qui était l'Espagne, avec la très belle équipe d'Espagne, les Avines, Estas et compagnie. Eux ont gagné deux fois le championnat d'Europe et la Coupe du Monde. Donc, ils ont mis le curseur encore plus haut. Mais quand on connaît la difficulté à gagner un match, ne serait-ce qu'un match, je ne parle même pas d'une compétition dans le foot, alors gagner des compétitions comme ça sur X années, ça te montre la qualité intrinsèque des joueurs individuellement, mais surtout collectivement, cette volonté à chaque fois de repousser ses propres limites, de ne pas se satisfaire de ce que tu as déjà acquis.
- Speaker #0
Et ça, c'est la délimitation même du sport de haut niveau. Tu prends un coup, tu es à terre, tu te relèves, tu repousses tes limites. Tu reprends un coup, tu es à terre, tu te relèves, tu repousses tes limites. C'est ça. Celui qui s'arrête et qui se contemple dans un miroir, il est mort. Il y a une chose qui gère le monde, c'est la faim. Si tu n'as plus faim, tu as été rassasié, tu n'as plus d'objectif, tu réduis la voilure et au final, tu redeviens dans la normalité. Moi, j'ai beaucoup, beaucoup de respect pour énormément de sportifs ou des gens dans la société civile. Si on parle que du sport et du football, je ne fais pas de comparaison entre Messi et Cristiano Ronaldo, mais Cristiano Ronaldo, la façon comme il a géré sa carrière depuis sa putain d'enfance, parce que je connais sa vie depuis Madère, difficultés avec sa famille, il avait l'accent, enfin bref, je connais tout. Et je me dis franchement, chapeau, chapeau, la longévité elle est juste incroyable, mais le curseur tu l'as mis tellement haut, puis à chaque fois tu ne satisfaisais pas, tu l'as mis encore plus haut. Plus haut et plus haut, tu te dis mais jusqu'où il va aller le garçon ? Et je pense que Messi et Granaldo se sont nourris l'un de l'autre mutuellement, dans la diversité, dans cette dualité. Un peu l'image de ce qu'on est en train de voir à l'heure actuelle entre Kylian Mbappé et Herdé Lalang, est-ce qu'ils vont nous donner le même duo justement qui a régné sur le monde du foot pendant 15 ans, à repousser ses propres limites ? Quand on entend Kylian Mbappé à chaque fois dire « moi je veux, je suis très ambitieux » , C'est mal perçu en France parce qu'on considère que c'est de l'arrogance. Quand tu vas à l'étranger, notamment les pays anglo-saxons, ils ne te disent pas que c'est de l'arrogance. Ils te disent au contraire que c'est de l'ambition. Elle peut être démesurée, elle peut être mal perçue, mais pour moi c'est nécessaire si tu veux justement être performant. Et ça ce sont des choses qu'il faut s'imposer à soi-même tous les jours si tu veux être performant. Vous travaillez tous dans le monde de l'immobilier, certains sont patrons, d'autres sont salariés. vous n'avez peut-être pas la même approche tous les jours quand vous allez au travail Mais s'il y a une chose qui est certaine, c'est qu'il n'y a rien de plus chiant que perdre son temps et surtout de faire illusion. Donc il faut être honnête avec soi-même. Il faut savoir justement, parce que moi aussi j'ai vécu des tragédies. J'étais en dépression et tout et je suis revenu.
- Speaker #1
Alors on ne m'a pas aidé, je ne suis pas allé voir un médecin,
- Speaker #0
j'ai lu des livres, je suis allé dans le spiritualisme, dans le bouddhisme, dans beaucoup de choses. Ça m'a énormément aidé pour me construire parce que maintenant je sais qui je suis. Réellement, je n'ai pas attendu d'être champion du monde, je savais déjà qui j'étais avant la Coupe du Monde.
- Speaker #2
D'accord. On va... Je ne sais pas où est le micro. Je me dis un coup de bras de Manuel Petit, ça fait mal. Si tu m'en mets un qui est en retard, tu m'en queuterez. Richard.
- Speaker #3
Bonjour, bonjour Monsieur Petit. Tout d'abord, merci d'être là. C'est une grande fierté pour moi de pouvoir m'adresser à vous. Je me souviens très très bien de l'année 98. Je pense qu'ici tout le monde s'en souvient. Et encore un grand merci pour tout ce que vous avez fait à l'époque.
- Speaker #0
Mais j'ai fait ce que je devais faire, tout simplement. Oui,
- Speaker #3
vous l'avez bien fait.
- Speaker #0
Non, mais ça reste que du foot. Je veux que vous compreniez que ça prend trop d'importance, le football. Enfin, moi, ça me fait flipper. Je ne sais pas pour vous, mais je ne sais pas comment je serais si j'étais joueur aujourd'hui, en fait.
- Speaker #3
D'accord. En tout cas, je vous sens très humble et c'est quelque chose de...
- Speaker #0
Je peux être très con des fois.
- Speaker #3
J'en doute pas.
- Speaker #0
Ça se fait déstabiliser là, c'est garanti ça.
- Speaker #3
Comment s'est passé l'arrêt de votre carrière ?
- Speaker #0
J'ai anticipé moi. Quand j'ai commencé ma carrière pro, je suis arrivé très vite en équipe de France, puisque Platini était mon entraîneur. J'avais même pas 18 ans. Donc j'ai été une météorite en fait. Et moi, je suis arrivé dans le milieu, j'étais entouré de bonhommes, j'étais entouré de vrais bonhommes. J'avais autour de moi des Patrick Baptiston, des Jean-Luc Ettori, des Manu Amoros, Glenn O'Doll, des bonhommes. Et j'étais le seul jeune joueur de l'effectif. Aujourd'hui, c'est l'inverse. Pour trouver un vieux dans un effectif, avec leur trading, dès que tu arrives à 30 ans, c'est à la casse. Ce n'est plus une valeur marchande. Donc j'ai eu la chance d'être chaperonné par des gens qui avaient de l'éthique, qui avaient des valeurs et qui étaient des êtres humains avant des sportifs. Et ça, ça m'a beaucoup aidé. Donc comment je fais ? C'était quoi la question ?
- Speaker #3
Comment je fais pour être après votre carrière ?
- Speaker #0
J'ai anticipé quand j'étais joueur. J'étais un touche-à-tout. Je vais te faire une anecdote. Ça fait longtemps que je suis chef d'entreprise en pas mal d'activités. Et quand j'allais à Barcelone, moi j'avais pour habitude, c'est marrant parce qu'il est avec moi, il me suit, ça commence avec mon agenda. Moi je suis encore à l'ancienne où j'écris tout sur un papier. Et tous les jours... Je me fais ma méditation et tous les jours, je me fais mes objectifs. Tous les jours. Tous les jours de la semaine, je te fais voir mon calepin, tu vas voir tous les jours de la semaine ce que je dois faire, comment je dois le faire. Je me prépare mentalement, je me visualise, je me projette. Donc j'anticipe, je suis en permanence dans l'anticipation. J'anticipais quand j'étais joueur, quand j'ai commencé ma carrière, je me posais déjà la question, qu'est-ce que je vais faire à la fin de ma carrière ? Parce qu'une carrière, ça peut s'arrêter comme ça du jour au lendemain. Donc tout de suite, il faut que tu aies une réponse, il faut que tu t'adaptes à la situation. Et j'arrivais tous les jours dans mes clubs respectifs,
- Speaker #1
et là où c'était mal perçu, c'était à Barcelone.
- Speaker #0
J'arrivais avec mon calepin le matin, je passais mes petits coups de téléphone avant l'entraînement, j'arrivais bien à l'avance, et les gars arrivaient à chaque fois, et puis au bout d'un moment, ils sont venus me voir en me disant « mais qu'est-ce que tu fais tous les matins avec ton calepin ? » C'est ma vie. C'est ma vie de tous les jours. Parce que moi, je ne suis pas qu'un simple joueur de foot. deux activités également. Je suis obligé de m'en occuper. J'ai des responsabilités aussi en dehors. Je suis obligé, ça me parle, de me structurer. Si tu veux évoluer, si tu veux bien évoluer, je pense qu'il faut déjà être structuré. C'était mal perçu. Mais j'ai toujours été australisé quand j'étais joueur de foot. On m'a toujours dit, toi t'es bizarre, t'es à part, t'es pas comme nous. Encore aujourd'hui, on me le dit. Je ne sais pas ce que ça veut dire. Mais bon, je le prends comme un compliment maintenant, vu qu'il y a une majorité de gens qui me ressemblent de plus en plus aujourd'hui. Donc l'anticipation pour moi est très importante. De jamais croire que tout est acquis. Quand j'ai arrêté ma carrière, c'était une petite mort. J'entends des joueurs, même moi je l'ai mal vécu parce que j'ai arrêté ma carrière, on m'a sectionné la jambe à deux endroits, je ne pouvais plus être sportif. J'ai fait pendant trois mois des entraînements à Arsenal, Arsene Wenger le camp d'entraînement. Alors, je finissais mon contrat avec Chelsea. Et il m'a dit, si tu arrives à un niveau convenable, moi je te signe. Et il m'a vu m'entraîner tous les jours. Il a vu les souffrances que j'en dirais. Il m'a dit, t'es un guerrier, t'es surhumain ce que tu fais. Je lui ai dit, mais coach, je ne suis pas un surhomme. Moi, mon mental, ça y est, il ne peut plus là. Je suis au bout là. Je suis au bout de ce que je peux faire. Je ne peux pas aller plus loin que ça. La douleur est trop importante. et je suis en permanence en train de la gérer avec mon mental et j'en oublie le ballon quand il arrive. Donc j'ai dû arrêter ma carrière, mais comme j'avais déjà anticipé la fin de ma carrière, une petite mort, la chance que l'on a quand on est sportif de niveau, quand t'as fait une bonne carrière, c'est que tu peux avoir la chance d'avoir une deuxième vie derrière. Et moi, comme je suis un beau limite de travail, j'ai été dans toute l'industrie du sport. L'équipementier, j'ai créé des structures commerciales avec Sport 2000, j'ai géré des grandes structures commerciales sur la Côte d'Azur. Je me suis mis dans le numérique. On a créé le premier réseau social justement dans... Dans le sport, qui s'appelait Netco Sport, et on a vendu la boîte à Euromédia, j'ai été dans les droits télévisuels, avec une boîte qui s'appelle Kentaro, qui a explosé le jour où la FIFA a débarqué au congrès annuel de la FIFA en 2015, où ils ont arrêté les hauts dignitaires à cause de la corruption qu'il y avait au sein de la FIFA. D'ailleurs, on est en plein dedans aujourd'hui pour d'autres histoires avec Platoche et Blatter. Et j'étais donc numérique, équipementier, droits télévisuels, je suis dans les médias. Je suis aussi dans le monde de la médecine, en parallèle, parce que j'ai investi aussi dans certaines structures. Je fais ce que je maîtrise le mieux. Et je fais beaucoup d'immobilier aussi. Moi, je suis un normand. Les normands, généralement, ils ont des oursins dans les poches. Et donc, j'ai toujours eu une politique de cigale où j'investissais en permanence. D'ailleurs, ça m'a bien servi, puisqu'après trois divorces, je suis toujours sur mes deux jambes. Ce que je veux appeler là, c'est que j'adore l'immobilier, j'adore les transformations, les innovations. Je connais parfaitement le monde de l'immobilier, je connais tous les principes qui régissent le monde de l'immobilier. Je sais très bien faire un achat immobilier pour qu'il soit rentable. C'est un peu le monopoli dans pas mal de domaines, que ce soit en France, dans les spécificités, ou à l'étranger, ils sont différents dans les lois, dans l'urbanisme, dans pas mal de choses. Mais à l'image de ce que je dis aux joueurs aujourd'hui, quand tu signes un contrat, il faut que tu saches ce que tu as signé.
- Speaker #2
Si t'arrives pas à comprendre ce que tu lis,
- Speaker #0
fais-toi réexpliquer à nouveau 5 fois, 6 fois, 7 fois, 10 fois jusqu'à ce que tu comprennes. Quand j'étais joueur de foot, 18 ans de professionnalisme, j'ai eu 1 an à un agent entre la France et l'Angleterre parce que je connaissais pas les spécificités fiscales, le code du travail en Angleterre, ce contrat à la semaine. J'avais besoin des gens avec des compétences. Mais à partir du moment où tu peux gérer les choses toi-même, pourquoi tu vas payer quelqu'un pour faire ton travail ?
- Speaker #2
17 ans sans agent du coup alors ?
- Speaker #0
Je discutais avec M. Compara, qui était le président de l'Est Monaco. Je discutais de mes contrats L'Oréal, Pepsi, tout ça, avec les gens concernés. Je n'avais pas besoin de quelqu'un pour me représenter. Pourquoi tu ferais ça si tu peux le faire toi-même ?
- Speaker #2
Si tu maîtrises, il n'y a pas d'inverse.
- Speaker #0
Les joueurs passent leur temps à m'appeler pour avoir des conseils. En plus, j'ai créé une structure il y a dix mois d'accompagnement de joueurs. Je suis à la rencontre de beaucoup de présidents de Ligue 1 ces derniers temps,
- Speaker #2
et aussi à l'étranger,
- Speaker #0
pour présenter ma structure. 360 degrés au niveau des joueurs, pas simplement tout ce qui est transfert, mais accompagnement dans pas mal de choses, tout ce qui est communication, images, sponsoring, n'importe quoi. Et même après carrière, on propose des formations professionnelles aussi à l'issue des carrières. Parce que c'est le problème aussi des joueurs de foot. Une fois qu'ils sont plus joueurs de foot, tu fais quoi ? Et pour ceux qui ont la chance d'avoir fait une belle carrière financière, mais c'est la minorité, la grande majorité n'ont pas cette chance-là. Donc il faut se réinventer, il faut se relancer des objectifs. Et ça, il ne faut pas attendre que tu sois à la fin de ta carrière pour le faire. Il faut anticiper tout ça.
- Speaker #2
D'accord. On a les diplômes, par exemple.
- Speaker #0
J'ai repassé les diplômes, je suis allé à l'école. J'ai un master en droit à l'économie. Et pourtant, je ne fais pas la gueule, non pas. Il dormait, il fait chaud non ?
- Speaker #2
Ah je cherchais le micro, je dis tiens... Ouais donc t'as vraiment, t'as touche à tout mais... Oui moi je suis à moi. Plus multidisciplinaire, plus multidisciplinaire.
- Speaker #0
Mes proches à chaque fois ils me disent mais... Pourquoi tu veux pas être entraîneur ? Parce que tu prends rarement de vacances. Ça n'a rien à voir je dis. Être entraîneur ça veut dire que 24h sur 24, 12 mois dans l'année, tu vis pour ton club. Ta famille, tu la mets de côté. Moi j'ai adoré ma vie, je suis parti à la jeunesse de chez moi. J'ai vécu une carrière incroyable. mais je sais tous les sacrifices que ça impose pour être au niveau en permanence, tu sacrifies ta famille en permanence. Toute ta famille vit pour toi, en fait. Parce que tu ne peux pas faire autrement. Donc ça aussi, c'est très compliqué à gérer. Le nombre de joueurs qui ont des problèmes dans leur famille avant d'arriver sur le terrain parce que la femme a le sentiment d'être la cinquième roue du carrosse, des fois. À juste titre, tout est privilégié pour... que le joueur soit performant même quand il n'est pas sur le terrain. Et ça, je sais que j'ai sacrifié beaucoup de gens autour de moi à un moment donné. Et ça, je ne veux plus.
- Speaker #1
Bonjour, Julien, Groupe C2I. Je suis là, tout en haut.
- Speaker #0
Ah oui, pardon.
- Speaker #1
Merci d'être là déjà. J'avais une question, je voulais rebondir un petit peu sur une de tes réponses que tu as apportées en disant... mais c'est que du foot. Je pense qu'en 98, en fait, c'était pas que du foot. Parce qu'il y a eu un nombre, il y a eu énormément de personnes qui se sont intéressées, en fait, à votre histoire. Moi, je pense à ma mère, qui était anti-foot. Elle a regardé le match, elle a ressenti des émotions. Et j'aimerais essayer de comprendre c'était quoi l'ingrédient. Il y a eu d'autres Coupes du Monde de gagnés où il n'y a pas eu cette émotion-là. Qu'est-ce qu'il y a pu avoir en 98 pour que ce soit pas que du foot ?
- Speaker #0
Je pense que la force de cette équipe, c'est qu'il y a beaucoup de garçons intelligents dans cette équipe. Des garçons qui ont su et qui savent prendre le recul par rapport à l'importance que l'on donne au football et au statut du joueur professionnel, qui est pour moi démesuré. Mais je pense qu'il y en a beaucoup qui sont d'accord avec moi au sein de France 98. Non seulement le fait de jouer en France, c'était pour nous. Tu sais, quand tu joues pour ton équipe nationale, tu n'es pas un joueur, tu n'es pas un sportif, tu es un ambassadeur de ton pays. Et pour nous, on avait ça en tête en permanence, c'est qu'on voulait marquer l'histoire de notre pays, mais rentrer dans l'histoire vraiment de notre pays, en dehors de l'histoire sportive.
- Speaker #3
Et c'est ce qui a fait notre force en fait,
- Speaker #0
c'est qu'on a toujours eu conscience de l'impact que peut avoir l'équipe nationale auprès des Français. Moi je suis comme n'importe quel Français, quand je vois des compétitions internationales, des Jeux Olympiques, tout ça, je suis patriote, je ne suis pas nationaliste, je suis patriote. Et je suis à fond derrière les Français, je suis même très chauvin. Et j'éprouve de la fierté quand un Français gagne, une Française gagne, une compétition, quoi que ce soit, même quand n'importe quel Français excelle dans n'importe quelle activité à l'étranger, on ressent une certaine fierté. Donc nous, on avait conscience qu'on n'était pas que des joueurs de football quand on représentait l'équipe de France, qu'on était bien en-delà de ça. Quand vous êtes invité chez Nelson Mandela après la Coulion 90, c'est que vous n'êtes plus des joueurs de football. Vous avez atteint une dimension sociale, voire presque politique. Donc quelque part, on ne s'appartient plus. On appartient aux Français, on appartient à son pays. Et nous, on l'a toujours en conscience. Et je pense que c'est ce qui a fait notre force et ce qui nous a permis justement de garder cette unité.
- Speaker #1
Merci.
- Speaker #2
En attendant que le micro soit redonné, le mot que tu as dit, c'est l'émotion. C'est ça qui a tout changé.
- Speaker #0
C'est notre responsabilité. C'est l'image d'un acteur, d'un sportif. Si tu n'apportes pas de l'émotion aux gens, moi je suis fatigué de voir des sportifs qui arrivent en faisant la gueule sur le terrain. Ils sont là sous le stress, j'en ai marre de voir des entraîneurs. Tu as l'impression que c'est un concours de celui qui va se couper les veines. Moi, j'ai le sourire comme ça quand je vois Klopp faire une conférence de presse à Liverpool. Le mec discute, il rigole, il a le sourire ultrabite. Alors peut-être qu'il s'est forcé, c'est à l'américaine. Mais c'est comme ça. Je dis ça, ce n'est pas une pénitence d'être joueur de foot, merde. Je veux dire, quand je vois le commun des mortels, comment ils galèrent, je dis putain les gars, oh,
- Speaker #2
tu pourrais être joueur de foot actuellement ?
- Speaker #0
Oui, je pense que je pourrais, mais je pense que je serais encore plus à l'écart. Et je pense que j'aurais du mal à contrôler mon agressivité des fois. Quand je vois tellement de choses aujourd'hui, je me dis mais putain, ça mérite des tartes des fois. Et moi, à mon époque, ça se gérait comme ça dans un vestiaire. Il n'y a pas besoin d'aller dans la presse. Le nombre de mecs que j'ai vus est allé.
- Speaker #2
Ça cadrait ?
- Speaker #0
Mais oui, mais c'était normal. Les entraîneurs étaient contents parce qu'on s'autogérait. Après, si tu débordes et machin, tout ça, évidemment, l'entraîneur intervient, le club intervient, t'as une sanction. Mais le nombre de mecs que j'ai vu se prendre des droites, qui tombaient devant moi comme ça.
- Speaker #2
Ça restait dans le vestiaire.
- Speaker #0
Puis deux heures après ou le lendemain, le mec arrive, il te regarde, tu sers la main, elle est enterrée, il est ok, elle est enterrée.
- Speaker #2
Mais ça reste entre vous, toujours. Mais oui,
- Speaker #0
mais c'est comme ça que ça doit fonctionner.
- Speaker #2
Et là, le problème, tu vois, c'est qu'aujourd'hui, en fait...
- Speaker #0
Ils ne se mettent même pas de tarte aujourd'hui.
- Speaker #2
Donc il y a de la fumée, mais il n'y a rien.
- Speaker #0
Notre génération, ça envoyait du lourd. Ah putain, ça rigolait pas. Des fois, les entraîneurs se mettaient de côté et regardaient. Mais t'as même pas idée comment ça se passait. Et c'était très bien comme ça. C'est par message sur les réseaux sociaux. Je vais te prendre un exemple. C'est facile de parler comme ça avec le recul, mais tout le monde se rappelle ce qui se passait à Nice. En 2010, si t'avais mis ne serait-ce que 2-3 mecs de 98 dans ces deux... Y'en avait, hein. Y'en avait. Si t'avais mis 3-4 joueurs de 98 dans ce bus, je pense qu'il y aurait eu Basson dans le bus.
- Speaker #2
Ouais, ils auraient eu un gros recadrage, ça aurait été réglé.
- Speaker #0
T'as envie de leur dire, les gars ? Oh, les gars, oh ! La terre de... Vous êtes 80% de Blacks en équipe de France. Donc Nelson Mandela a fait du sud, ça vous parle, non ? Et vous êtes en train de faire une grève dans un bus, sur les terres de Nesson Mandela ? Tout ça parce que vous n'êtes pas d'accord avec votre sélectionneur ? Mais vous êtes les ambassadeurs de notre pays les gars, qu'est-ce que vous faites ? Personne, il n'y a personne, vos proches, personne ne vous appelle en disant les gars qu'est-ce que vous faites ? Réagissez quoi ! Et pourtant il y a des mecs intelligents dans cette équipe. je me suis dit mais qu'est-ce qu'ils font c'est un suicide collectif, c'est ce qu'ils parlaient tout à l'heure un suicide collectif je peux t'assurer que nous ça serait jamais passé comme ça
- Speaker #2
Donc c'est vraiment la mentalité des joueurs ?
- Speaker #0
Moi je pense qu'ils ont été dans un contexte et personne n'a eu justement le recul nécessaire ou alors le pouvoir nécessaire pour dire aux autres « les gars, il faut arrêter les conneries, regardez l'image qu'on renvoie, c'est une honte » . Les millionnaires qui font une grève sur les thèmes de Nelson Mandela, en sachant la difficulté sociale et économique de la majorité des gens sur cette planète. Je ne dis pas qu'on est responsable du malheur des gens, mais à un moment donné, il faut aussi prendre conscience de la position dans laquelle on est. On est scruté en permanence, donc pour répondre à la question, je ne sais pas quel joueur de foot je serai aujourd'hui.
- Speaker #2
D'accord.
- Speaker #0
Déjà, je n'utiliserai pas les réseaux sociaux parce que je n'en ai pas. Si j'ai quelque chose à dire, je viens de te voir.
- Speaker #2
Mickaël, on est là pour ça. Elle commence à m'impressionner.
- Speaker #0
C'est vrai.
- Speaker #2
J'ai envie de faire pipi dans 20 minutes. Il y a écart, je te dis à même temps. 12-13 minutes bien, le selfie, et après c'est bon, une bouteille d'eau si tu veux quelque chose. Non, non, on a encore 12 minutes.
- Speaker #4
Du coup, Pauline de Total Sport Media. J'étais panée à l'époque. Et aujourd'hui j'ai une question, c'est pour tous les jeunes qui ont des rêves et qui osent pas se lancer aujourd'hui, quelle serait ta réponse ? Qu'est-ce que tu leur conseillerais de faire ?
- Speaker #0
Qu'il n'y a que des limites, que celles qu'on s'impose. C'est la seule. J'en ai une deuxième. C'est vrai, vous allez voir un nombre incalculable de personnes autour de vous qui vont vous dire il faudrait que tu fasses comme ça, il faudrait que tu fasses comme ci. Il faut les écouter, les conseils sont toujours pour apprendre. Mais après, c'est votre libre arbitre. Et moi, j'ai une personnalité tellement forte que j'ai pris comme une éponge tous les conseils qu'on m'a donnés. Mais au final, c'est moi qui prends les décisions. Et à chaque fois qu'on me disait, il ne faut pas aller là-bas, il ne faut pas que tu fasses ci. Moi, j'avais l'intime conviction, j'avais raison. Et je voulais, même si j'avais dix personnes devant moi qui me disaient le contraire, vous allez voir, je vais vous montrer que vous avez tort. Et à force de persévérance, d'abnégation, de temps en temps, tu arrives à tes objectifs. C'est comme ça que tu te construis. Ça, c'est la première chose que je conseillerais. La deuxième, si tu veux devenir joueur de foot, la question initiale, c'est pourquoi tu rentres dans le football ? Si c'est pour l'argent, c'est pour les mauvaises raisons. Si c'est pour la passion, c'est pour les bonnes raisons. Et moi, je leur dis toujours, si vous avez la passion du football, il faut l'entretenir tous les jours. C'est le gasoil que vous mettez dans vos réservoirs. Si demain, il y a une pénurie de gasoil, ta passion, après, tu es moins performant parce que la diététique, tu l'approches. pas de la même manière. Le sommeil, c'est pareil. L'hydratation, c'est pareil. Les soins, c'est pareil. Tu fais tout moins bien. C'est ce qu'on a fait en 2002. Champion du monde, champion d'Europe. On se l'a un peu raconté. On ne va pas vous mentir. Et on l'a payé cher. Le sport de haut niveau ne supporte pas la médiocrité, l'approche médiocre. Elle vous sanctionne en permanence. C'est comme la vie. Il faut toujours tout donner pour ne pas avoir aucun regret. C'est ce que je dis aux jeunes à chaque fois. La passion, tu l'entretiens Et surtout, n'aie aucun regret. Tu as le droit d'échouer, tu as le droit de recommencer. Mais surtout, moi les gens qui s'apitoient sur leur sort en permanence, les victimes, j'en cause tous les jours dans la rue. Anani, anana, aninanana. Non, je peux pas à ça. Si tu veux, tu te plaindres, tu vas dans ta salle de bain, tu prends ta douche, tu te plaindres tout seul. Mais arrête de faire chier le monde entier avec tes problèmes, d'accord ? Parce que tout le monde a des problèmes. Maintenant, la différence entre un loser et un gagnant, c'est celui qui tord le cou à ses problèmes, qui dit « moi j'avance, même si je prends des coups, j'avance » . Et je suis complètement d'accord avec le garçon qui était là tout à l'heure. Parce que c'est ce qu'on a vécu quand on est joueur de haut niveau. Putain, mais imagine, tu rates un match, tes gamins sont à l'école, ils sont défoncés, ils rentrent, ils pleurent à la maison, tu fais quoi ? Tu ne sors plus parce que tu as pris une taule 5-0, à peine tu sors, tu vas au supermarché tu te fais insulter par les gens tu fais quoi ? Tu restes chez toi, terré ? Et tu subis en permanence la méchanceté ou la jalousie des autres ? Non, prends ton destin en main. Fais-leur voir que tu es inattaquable. Fais-leur voir que tu as du tempérament, que tu es un guerrier, que tu es un compétiteur, que tu n'acceptes pas ça. Si j'étais entraîneur, c'est comme ça que je parlerais à mes joueurs. Tu as la chance de pouvoir écrire ta propre histoire. On te donne un stylo. Ne demande pas à quelqu'un d'autre d'écrire ton livre, ton histoire à ta place. Fais-le.
- Speaker #2
Dernière petite question, c'est moi ou c'est...
- Speaker #0
Pour moi c'est la vie, c'est les principes de vie. Et je ne suis pas un surhomme, des matins je me réveille, je ne suis pas bien, des fois je me plains aussi, mais je m'arrête rapidement, parce que j'ai la chance d'être entouré de gens qui me disent à chaque fois, « Dimanou arrête, tu nous énerves » , donc ils me remettent tout de suite dans le droit chemin, et ils ont raison.
- Speaker #2
Mais pour moi c'est, faites ce que vous voulez dans votre vie.
- Speaker #0
Moi,
- Speaker #2
c'est comme ça que je gère la mienne. Parmi tes conversions, tu as l'activité média, comme tu le disais. Oui. Tu vis l'intensité comme quand tu étais joueur ? Non. Par moment ? Jamais ?
- Speaker #0
Non. Rien ne remplace le terrain. Et ça aussi, si tu es entraîneur, tu vis des émotions, mais différentes. Quand tu es acteur, ce n'est pas pareil. C'est jouissif. Quand tu es acteur, c'est... Moi, encore une fois, je reviens à l'époque des Romains. Mais c'est ça, quoi. Mais... Vous imaginez l'émotion que vous avez quand vous préparez un match, vous savez qu'il y a 3 millions de personnes qui vous regardent, qu'il y a 80 000 personnes et que tu joues l'honneur de ta famille dans les tribunes. La pression que tu as, il y en a beaucoup qui s'écroulent. J'ai vu des joueurs incroyables se liquéfier avant un match. Liquéfiés, littéralement. Physiquement, ils se sont transformés. Les pieds qui tremblent comme ça.
- Speaker #2
Dans le vestiaire,
- Speaker #0
c'est ce qu'il disait tout à l'heure. Encore une fois, t'es très très bien le garçon qui était avant. Non mais sérieux. Parce qu'il a dit des choses vraiment intéressantes, je me suis reconnu dans ma carrière dans ce qu'il disait. Et des joueurs incroyables qui se liquifient. Des joueurs qui à l'entraînement te font la misère, arrive le match avec la pression et c'est leur frère sur le terrain. Comment, qu'est-ce qui fait qu'un individu supporte plus la pression qu'un autre ? Il y a les expériences de vie, mais je pense aussi qu'il y a quelque chose dans l'ADN qui peut être... On a tous quelque chose d'incroyable en soi. La majorité des gens ne le savent pas. Je vous donne un exemple. Demain, vous voyez votre enfant se faire écraser par une voiture. Votre instinct, tout de suite, va essayer de repousser la voiture. Vous avez des histoires qui, dans ce sens-là, sur Internet, où un père qui a sauvé une bagnole alors qu'elle faisait une tonne et demie, parce qu'il arrive un moment, on ne sait pas pourquoi, il se déclenche quelque chose, mais pour ça, il faut mettre les ingrédients sur la table. Des fois, la vie ne vous donne pas le temps nécessaire pour répondre. Vous êtes pris tout de suite sur l'instant T et c'est votre instinct qui répond tout de suite. Mais on a tous une force incroyable individuellement. Il faut juste savoir qui on est, comment. C'est pour ça que moi, je passe toute ma vie à savoir qui je suis. Et j'apprends tous les jours. Des fois, je surprends moi-même, mais parce que j'ai besoin de ça pour savoir exactement où je peux aller, ce que je peux faire en permanence, comment je peux faire pour reposer mes limites. Et ça, sincèrement, croyez-moi sur parole, j'ai vu des gens normaux faire des choses extraordinaires. Moi, je suis quelqu'un de normal, j'ai fait des choses extraordinaires. Mais je n'imagine pas, je ne pense pas que j'ai des qualités hors normes. J'ai jusqu'à un moment donné, quand t'es au pied du mur, quand t'es face à l'événement, ton instinct prend le dessus. Et tout ce qui a fait que tu t'es construit en tant que personne, à travers tes émotions, tes expériences, moi je mets toujours en tant que force, je ne prépare jamais quelque chose. Il en parlait encore, c'est marrant, on aurait pu faire le truc ensemble. Jamais je vois les côtés négatifs, je vois toujours tout ce qui est positif. Ça, ça ne sert à rien de se rabaisser. Ça, je laisse la concurrence et mes ennemis s'en charger. Moi, je ne vois toujours que le positif pour essayer justement de faire en sorte qu'il y ait une dimension vraiment plus grande que l'événement lui-même.
- Speaker #3
Ça, je m'en sers tous les jours. Ce n'est pas facile, mais je m'en sers tous les jours.
- Speaker #2
Vous pouvez applaudir. C'était un super témoignage.