- Romain LE GAL
Bienvenue sur Lait'Change, le podcast qui donne la parole aux actrices et aux acteurs de la filière laitière et fromagère. Je suis Romain E GAL et j'ai le plaisir de vous retrouver pour le second épisode de cette série spéciale consacrée au Roquefort AOP. Et oui, cette année, ce fromage fête ses 100 ans. Si vous avez loupé le premier, il n'est pas encore trop tard. Il pourra tout à fait s'écouter après cet épisode. Nous étions partis à la rencontre d'un producteur de lait de brebis qui nous a partagé sa passion et son quotidien. Aujourd'hui, je vous propose dans ce nouvel échange qui parle d'un fromage à la saveur intense, d'évoquer sa riche histoire marquée par des défis, sa tradition, mais également de sa fabrication et de son affinage. Le Roquefort, fromage de légende, qui incarne un savoir-faire artisanal qui a su résister à l'épreuve du temps. Je continue donc mon périple dans l'Aveyron, où ce matin je suis allé dans les magnifiques caves naturelles de Roquefort-sur-Souson. Je me trouve actuellement chez Vernier Frères, où sont fabriqués les fromages à quelques lits. kilomètres de là. Merci à Jean-François Ricard de m'accueillir. Bonjour Jean-François.
- Jean-François RICARD
Bonjour Romain.
- Romain LE GAL
Qu'en vas-tu aujourd'hui ?
- Jean-François RICARD
Ça va très bien, je te vois, donc tout va bien.
- Romain LE GAL
Oh bon, magnifique. Jean-François, peux-tu te présenter en quelques mots ?
- Jean-François RICARD
Moi c'est Jean-François Ricard, j'ai 52 ans, je suis tombé dans la marmite de l'aide-brebis quand j'étais tout petit, parce que c'est mes parents, mes grands-parents, mes arrière-grands-parents et mes arrière-grands-parents qui m'ont fait naître au cœur du Roquefort.
- Romain LE GAL
Donc la famille Ricard a toujours, presque toujours été là ?
- Jean-François RICARD
La famille Ricard a été là depuis deux générations, mais je t'expliquerai pourquoi après.
- Romain LE GAL
D'accord. Et du coup, aujourd'hui, la société Vernière, frère, c'est quoi ?
- Jean-François RICARD
C'est une société qui collecte du lait de brebis, qui transforme ce lait de brebis en fromage, et notamment en Roquefort AOP.
- Romain LE GAL
Et si tu peux nous donner quelques chiffres à propos de Vernière ?
- Jean-François RICARD
On a beaucoup le culte du secret dans notre petite PME familiale. Je vois que ça te fait sourire. On collecte le lait de 52 producteurs de lait qui sont autour de notre fromagerie de Villefranche de Pana, que tu as pu voir. Et on transforme 70% de ce lait en Roquefort aujourd'hui. Nous avons une cinquantaine de salariés qui travaillent de façon saisonnière pendant la production du lait de brebis qui court du mois de novembre jusqu'au mois de juin. Donc la fromagerie a une vingtaine de salariés et la partie affinage et la partie conditionnement, c'est une trentaine de salariés sur la commune de Roquefort.
- Romain LE GAL
Aujourd'hui, on va parler principalement du Roquefort AOP, même si on peut évoquer les autres fromages que Vernière fait, notamment des pâtes pressées.
- Jean-François RICARD
Exactement.
- Romain LE GAL
Est-ce que tu peux nous conter la petite histoire, enfin même la longue histoire de ce fromage de Roquefort ?
- Jean-François RICARD
Alors l'histoire de Roquefort, elle démarre il y a très très très longtemps. Elle démarre tout simplement par un éboulis de la montagne du Koumbalou, c'est la montagne qui surplombe le village. Cette montagne s'est affaissée, elle a créé des cavités, et ces cavités aujourd'hui nourrissent nos caves en termes d'air naturel. Et c'est dans ces caves où tout le secret du Roquefort se passe en grande partie. Alors il y a une légende sur le Roquefort qui dit qu'à l'origine c'est un berger. qui avait un fromage qu'il a laissé dans une cavité proche du village de Roquefort. Je dis qu'il l'a laissé parce qu'il a regardé une bergère qui se promenait.
- Romain LE GAL
Une jolie bergère.
- Jean-François RICARD
Une jolie bergère, j'imagine, parce qu'il a plus couru après la bergère qu'après le fromage. Il a oublié le fromage. Son expérience avec la bergère a dû bien se passer. Et quand il est revenu quelques temps après, il s'est aperçu que le fromage avait évolué. et il y avait du... ce qu'on appelle aujourd'hui du penicillium, le fromage a bruit, tout simplement. Il l'a goûté, il l'a trouvé excellent, et c'est parti comme ça.
- Romain LE GAL
Et après, si on parle d'autre chose que de la légende, l'histoire du Roquefort...
- Jean-François RICARD
L'histoire, elle est millénaire, parce que dès Charlemagne, il y a des écrits qui évoquent qu'il y avait un fromage bleuté qui était fabriqué dans notre région, qui s'appelle l'Occitanie aujourd'hui, mais à l'époque, on appelait ça le Ruerg.
- Romain LE GAL
Donc, les origines de Charlemagne, ... Et ensuite, du coup, le Roquefort a traversé les âges et on s'est structuré.
- Jean-François RICARD
Ça s'est plutôt bien passé parce que le fromage, aujourd'hui, il est connu mondialement et il a progressé de l'époque de Charlemagne jusqu'à aujourd'hui, petit à petit, pour devenir ce qu'il est aujourd'hui, un produit incontournable de la gastronomie française, mais de la gastronomie mondiale. Mais là, je suis peut-être un peu chauvin.
- Romain LE GAL
Et du coup, ce fromage n'a pas toujours... dans la région étaient collés de brebis. Non.
- Jean-François RICARD
Il était historiquement au lait de brebis, mais à un moment donné, il y a eu une pénurie du lait de brebis. Donc, il est possible et même certain qu'il y ait eu du lait de mélange avec du lait de vache de façon à fabriquer du roquefort. Par contre, à partir du début du XXe siècle, les roquefortais ont choisi de fabriquer du roquefort exclusivement avec du lait de brebis. Et ils ont déposé à ce titre la première appellation d'origine fromagère. mondiale, en définissant un cahier de charge relativement strict, qui était l'exclusivité du lait de brebis sur une zone bien déterminée, on en parlera peut-être plus tard. Et ensuite, la deuxième spécificité, c'est que l'affinage devait avoir lieu dans des caves.
- Romain LE GAL
Dans des caves, dans les éblouis du mont du Combalou.
- Jean-François RICARD
Exactement.
- Romain LE GAL
Et ils ont également créé une marque collective d'éleveurs.
- Jean-François RICARD
Exactement, qui s'appelle la brebis rouge.
- Romain LE GAL
Et qu'est-ce qu'elle a mené cette marque collective d'élevage ?
- Jean-François RICARD
Ça a été la reconnaissance, comme quoi il y avait une appellation d'origine. A l'époque, on ne parlait pas encore d'appellation d'origine contrôlée et encore moins protégée. Mais la marque de la brebis rouge a été instituée par les fabricants et les producteurs lors de la constitution de l'organisme interprofessionnel, cinq ans après l'appellation d'origine.
- Romain LE GAL
Donc là, on était... Alors du coup, l'appellation d'origine était en 1925. Exactement. Donc le label Brebis Rouge, lui, est sur 1930.
- Jean-François RICARD
Exactement. Ce qui est important de savoir, c'est que l'appellation d'origine Roquefort a été instituée par une loi signée par Gaston Domergue, ce qui permettait, lors de nos ventes de fromage, de stipuler cette loi et de dire au monde entier... Comme quoi, notre fromage était légitime et unique.
- Romain LE GAL
Et du coup, à cette époque-là, en 1925, Jean-François, il y avait combien de laiteries ?
- Jean-François RICARD
Je ne sais pas combien il y avait de laiteries, mais il y avait entre 20 et 25 fabricants de Roquefort qui collectaient le lait de fermes. Parce qu'il faut savoir qu'à l'époque, le fromage n'était pas fait dans des laiteries comme aujourd'hui. Il était fait dans des fermes. Et toutes les deux ou trois fermes, il y avait un site de fabrication, c'est-à-dire qu'il y avait trois fermiers qui se regroupaient de façon... à amener le lait chez l'un d'eux et c'est ce fermier-là qui fabriquait le Roquefort. Et le Roquefort était amené directement dans nos caves de façon à être salé dans les caves, piqué, affiné, et puis après tel qu'on le connaît aujourd'hui.
- Romain LE GAL
Et les laiteries, elles ont toujours été dans la zone d'appellation ?
- Jean-François RICARD
Les laiteries étaient nécessairement dans la zone d'appellation, mais la zone d'appellation des laiteries et de la collecte de lait était beaucoup plus vaste qu'aujourd'hui. Aujourd'hui, la collecte de lait est uniquement sur six départements français, alors qu'au moment de la création de l'appellation en 1925, c'était tout le sud de la France, y compris la Corse, qui était concernée par cette appellation.
- Romain LE GAL
Donc en fait, on ramassait des fromages en Corse, qu'on emmenait dans les caves. Et ça, ça a évolué quand ? Ça s'est arrêté quand ? Comment ça s'est passé ?
- Jean-François RICARD
Alors petit à petit, il y a eu une production. local de lait de Brebis qui s'est développé. Donc, les anciens, ils ont réduit la zone de collecte de lait, de façon à ce qu'aujourd'hui, elle ne soit plus, comme je le disais tout à l'heure, sur six départements. En même temps qu'ils ont réduit la zone de collecte de lait, bien sûr que les laiteries, elles se sont adaptées. Elles ont été concentrées à partir autour des années 60, pour te donner une idée. Chez Vernière, il y avait 120 producteurs, il y avait 80 laiteries. Au début des années 80, on a concentré ces laiteries en trois laiteries ou fromageries. Et aujourd'hui, chez nous, on n'en a plus qu'une. Et l'ensemble des sept fabricants de Roquefort se sont organisés de la même façon.
- Romain LE GAL
Et du coup, cette zone d'appellation aujourd'hui, tu disais, est sur six départements. Donc, c'est tout l'Aveyron ?
- Jean-François RICARD
C'est 80% du département de l'Aveyron. Ce n'est pas la totalité. Le nord Aveyron n'est pas concerné. C'est la Lauserre. la paix. Pointe-du-Gare, Leraux, une partie du Tarn et quelques communes de l'Aude.
- Romain LE GAL
Et c'est toute la Lausanne ? Non, c'est aussi une partie de la Lausanne ? Non,
- Jean-François RICARD
c'est une partie, c'est les deux tiers de la Lausanne.
- Romain LE GAL
Ok. Si on vient maintenant à parler de la fabrication du Roquefort, est-ce que tu peux nous expliquer les grandes étapes de fabrication du Roquefort ? Donc on a dit que le Roquefort ne se fabriquait pas toute l'année puisqu'on n'a pas le droit de désaisonner les brebis ?
- Jean-François RICARD
Je ne sais pas si on n'a pas le droit de désaisonner les brebis mais on a fait le choix de respecter pour la fabrication du Roquefort, le cycle naturel de la brebis. Donc le lait, une fois qu'il est collecté chez le producteur tous les jours, c'est du lait qui vient de deux traites par jour. Il ne peut pas être en monopraîte aujourd'hui pour la fabrication du Roquefort. Donc ce lait, on le collecte tous les jours parce que j'ai 48 heures pour l'emprésurer à partir de la dernière traite du producteur.
- Romain LE GAL
Donc le lait est emprésuré à l'état entier et cru ?
- Jean-François RICARD
Et cru, exactement. Ça c'est l'une des spécificités du Roquefort, mais qui était déjà dans le cahier des charges de 1925.
- Romain LE GAL
Et ensuite, une fois que ce lait est emprésuré,
- Jean-François RICARD
On y met un petit peu de pénicillium roqueforti, parce qu'on en a besoin pour que ce soit la spécificité de Roquefort.
- Romain LE GAL
Donc on met dans le lait du pénicillium roqueforti ? Oui,
- Jean-François RICARD
de la présure.
- Romain LE GAL
De la présure pour qu'on présure ?
- Jean-François RICARD
Le lait est brassé, il est découpé ensuite, une fois qu'il est caillé, en petits cubes. Ces cubes ensuite sont mis dans un moule à fromage. Ce moule à fromage est égoutté. L'égouttage du Roquefort, il doit être... non pressé, c'est l'une des spécificités aussi de l'appellation d'aujourd'hui. Et ensuite, après l'égouttage du Roquefort qui dure entre deux jours et deux jours et demi, le fromage est démoulé, il est salé. Et l'une des dernières étapes chez Vernière, c'est qu'il est piqué à la fromagerie avant de faire son voyage ou son trajet vers les caves de Roquefort, où il va rester le temps nécessaire, au moins 14 jours,
- Romain LE GAL
dans la fleurine.
- Jean-François RICARD
par la cave qui est nourrie d'air naturel frais de la fleurine. Une fleurine, c'est une cavité qui est à l'intérieur de la montagne du Combalou. Et en fait, les anciens, ils ont creusé des tunnels entre les caves et ces fleurines pour que l'air puisse circuler naturellement.
- Romain LE GAL
Et donc là, c'est minimum 14 jours en cave,
- Jean-François RICARD
mais l'affinage du roquefort dure minimum 3 mois. Il y a une partie de l'affinage qui ne se fait pas en cave, dans des salles à température dirigée.
- Romain LE GAL
Dans des caves de maturation ?
- Jean-François RICARD
Exactement.
- Romain LE GAL
Et donc c'est minimum trois mois ?
- Jean-François RICARD
Tout à fait. L'appellation d'origine Roquefort. Je ne peux mettre le logo de l'appellation d'origine protégée Roquefort qu'au bout de trois mois.
- Romain LE GAL
Donc l'appellation et également le logo de la brebis rouge. Et si on revient un petit peu en arrière, là on a parlé de l'affinage, on a parlé de la production, mais Vernière est une très vieille maison. C'est quoi l'histoire de Vernière dans cette appellation ?
- Jean-François RICARD
Alors l'histoire de Vernière dans cette appellation, j'en connais quelques bouts, parce que vous allez comprendre pourquoi. La famille Vernière était déjà présente dans le village de Roquefort dès le XIVe siècle. Et on le sait à travers des écrits ou des actes de baptême, parce qu'à l'époque c'était souvent... paroisses et que se tenaient les registres. Pour être plus concret, la famille Vernière, telle que je la connais aujourd'hui, a créé l'entreprise Vernière en 1890. Donc c'est mon arrière-arrière-grand-père qui est parti de la société des caves, qui a épousé la crémière du village, tout simplement. Cette crémière, elle avait surtout une épicerie. Et sous cette épicerie, il y avait une cave. Donc il s'était dit, l'épicière du village, elle arrivera toujours à me nourrir. Et puis comme elle a une cave dessous, je vais essayer de fabriquer du fromage et de l'affiner. Et c'est comme ça que démarre l'histoire de la famille Vernier.
- Romain LE GAL
Donc là, on est dans lesquelles années ?
- Jean-François RICARD
On est en 1890.
- Romain LE GAL
D'accord. Et du coup, toi, tu t'appelles Jean-François Ricard et la société s'appelle Vernier Frères. Pourquoi ?
- Jean-François RICARD
mon arrière-grand-père. Cette génération-là, il était avec son frère, d'où la marque Vernier Frères. Et ces deux garçons-là, ils ont eu quatre filles, dont ma grand-mère, qui s'appelait Claude Vernier et qui a épousé un certain monsieur, Roger Ricard. Et c'est pour ça que je m'appelle Jean-François Ricard.
- Romain LE GAL
Pour revenir sur un élément essentiel du Roquefort, on n'en a pas à reparler tout à l'heure, on peut parler un petit peu du pénicillium Roqueforti. C'est quoi le pénicillium Roqueforti ?
- Jean-François RICARD
Le pénicillium rocoforti, tout simplement, c'est un champignon. Initialement, il était cultivé sur du pain qui était entreposé dans nos caves et on venait recueillir ce pain de façon à en faire ensuite une poudre sèche pour en faire du pénicillium. Chez Vernière, bien sûr, on a fait ça pendant de longues années. Et une fois qu'on a déterminé que la souche nous convenait, et surtout depuis une trentaine d'années, cette culture du pénicillium rocoforti estampillée Vernière, et fait un laboratoire pour avoir une homogénéité de ce pénicillium.
- Romain LE GAL
Et chez Vernière, vous avez des caves. Ces caves, elles ont toujours appartenu à ta famille ?
- Jean-François RICARD
Alors bien sûr, en 1896, quand Paulin Bernier épouse la fameuse épicière, il avait une toute petite cave, puis petit à petit, il s'est développé. Il a acheté une cave qui était en haut du village de Roquefort. Et la cave actuelle que j'exploite est propriété de notre famille depuis les années 1910, je ne veux pas dire de bêtises. On est dans la même cave depuis plus de 110 ans.
- Romain LE GAL
Alors pour ceux qui nous écoutent, il y en aura peut-être qui auront vu les images qu'on mettra sur nos réseaux de cette cave. Est-ce que tu pourrais la décrire, cette cave, un petit peu, quand on arrive à Roquefort ? Parce que c'est une cave qui est sur plusieurs niveaux.
- Jean-François RICARD
Exactement, c'est une cave qui est sur quatre niveaux. C'est une cave qui est difficilement accessible aujourd'hui parce qu'il y a un tout petit chemin pour y accéder. Aujourd'hui, on accède aux caves avec des camions frigorifiques. Il y a une rue de 400 mètres de long à pouvoir assumer par un transporteur en marche arrière, ce qui n'est pas évident.
- Romain LE GAL
Et donc, ces caves sont sur quatre niveaux ?
- Jean-François RICARD
Exactement. Elles sont sous la maison familiale, historique de la famille. Et tous les étages sont alimentés par un tunnel qui va à une florine unique qui est 80 mètres plus loin.
- Romain LE GAL
Donc il y a 80 mètres pour aller chercher finalement ce flux d'air. Tout à fait. Pour l'avoir pris ce matin, ça fait comme un petit tunnel où on est à maximum 1m70, 1m75.
- Jean-François RICARD
La spécificité de la famille, c'est qu'on n'est pas très grand. Donc je pense que mon arrière-grand-père, quand il a découvert cette faille d'air, il l'a agrandi à sa taille.
- Romain LE GAL
Donc ça a été creusé par ta famille ?
- Jean-François RICARD
Ça a été creusé. Il y avait un courant d'air. Il y avait une faille qui a été agrandie par la famille de façon à pouvoir une alimentation correcte sur l'ensemble des étages.
- Romain LE GAL
Ce qui est assez intéressant, c'est qu'on prend cette faille au niveau moins 3 pour aller chercher, mais en revenant, il y a un embranchement. On peut aller... Au moins 4,
- Jean-François RICARD
exactement.
- Romain LE GAL
Donc, c'était vraiment pour répartir cette terre dans ces cas.
- Jean-François RICARD
De façon uniforme. Alors, pourquoi au moins 4, on pouvait aller directement au moins 3 ? Parce qu'initialement, ils exploitaient que c'est des étages-là. Et puis, en fonction de l'évolution de l'entreprise, on a eu besoin d'amener de l'air à d'autres étages. Et je ne sais pas si tu as pu voir, c'est que ce tunnel a des trappes qui permettent d'accéder aux étages supérieurs.
- Romain LE GAL
Alors ça, je n'y ai pas prêté attention. Il faudra y retourner.
- Jean-François RICARD
Il faudra y retourner, avec plaisir.
- Romain LE GAL
Et donc, pour reparler, dans ce village aujourd'hui, où la spécificité du Roquefort, tous les Roqueforts passent minimum 14 jours dans ces caves. Aujourd'hui, si on parle de la filière, il y a combien de producteurs, combien d'affineurs de Roquefort ?
- Jean-François RICARD
Aujourd'hui, nous sommes 7 fabricants.
- Romain LE GAL
D'accord. Tu peux nous les citer ?
- Jean-François RICARD
Je vais commencer par le plus petit, le vieux berger. Je vais continuer par le... par ordre de taille. Ensuite, vous avez les établissements Carles, ensuite Roquefort-Vernières, Gabriel-Coulet. Et ensuite, nous avons trois groupes importants fromagers à Roquefort, qui sont le groupe Sodial, le groupe Saventia et le groupe Lactalis.
- Romain LE GAL
Et ça, là, on a parlé des producteurs, des affineurs, mais il y a combien de producteurs de lait ?
- Jean-François RICARD
Aujourd'hui, il y a 1200 producteurs qui correspondent au cahier des charges de l'appellation Roquefort.
- Romain LE GAL
Et ces producteurs, c'est assez stable en nombre de producteurs ? Il y a des jeunes qui s'installent, il y a des reprises ? Comment elle vit cette filière ?
- Jean-François RICARD
Alors, elle est plutôt en difficulté aujourd'hui, parce qu'effectivement, il y a des jeunes qui s'installent, mais il y a plus d'exploitations qui ferment plutôt que de jeunes qui s'installent. Mais on a un plan confédéral, parce qu'en fait, il y a un organisme interprofessionnel qui s'appelle la Confédération Générale de Roquefort. qui est là pour accompagner les reprises des exploitations qui s'arrêtent et pour installer des nouveaux producteurs de façon à essayer d'inverser la tendance.
- Romain LE GAL
Et pour toi, c'est quoi les enjeux de la filière Roquefort demain ?
- Jean-François RICARD
Les enjeux de la filière Roquefort, c'est d'arriver à pérenniser les producteurs de lait de façon à ce que la ressource lait reste locale, de façon à garder nos spécificités de fromage.
- Romain LE GAL
Et chez Vernière, vous mettez des choses en place spécifiques ? par rapport à ça pour les accompagner ?
- Jean-François RICARD
On accompagne les jeunes qui s'installent en les aidant ou financièrement ou en termes de volume de lait à produire.
- Romain LE GAL
D'accord. Et sinon, de manière plus générale ? Comment, toi, tu vois le Roquefort demain, le Roquefort au lait cru ? Comment tu vois cette grande bataille qu'on parle souvent ?
- Jean-François RICARD
Donc, moi, je pense que le Roquefort doit rester au lait cru. Mais par contre, il faut qu'on arrive, et ça, c'est un des grands challenges de notre métier, à s'adapter des modalités de consommation des consommateurs d'aujourd'hui, si je peux m'exprimer comme ça. c'est-à-dire que le Rockford... est souvent perçu comme un fromage dégusté en fin de repas, un fromage de plateau, sauf qu'aujourd'hui, le consommateur, c'est très très rare quand il fait entrée, plat, fromage et dessert. Et donc il faut qu'on arrive à désacraliser ce moment de consommation pour en créer d'autres, que ce soit à l'apéritif, en ingrédients culinaires, à travers des salades, des recettes ou d'autres bonnes idées. Il faut que le challenge de la survie du Roquefort demain, c'est d'arriver à créer d'autres instants de consommation.
- Romain LE GAL
Et comment toi tu as vu évoluer de manière organoleptique le Roquefort depuis que tu étais enfant ? Parce que ton mange, tu es tombé dedans. J'ai quelque chose qui me vient en tête quand je parle avec les anciens, c'est qu'il est beaucoup moins salé aujourd'hui qu'il l'était hier.
- Jean-François RICARD
Tu as entièrement raison sur le côté sel, parce que c'est vrai qu'on maîtrise de mieux en mieux notre technologie et on sait qu'on est attendu par le consommateur pour avoir un produit un peu moins salé. la paix. La pâte du roquefort a légèrement évolué. Avant, on avait un roquefort qui était plutôt veiné. Aujourd'hui, on a plutôt des cavités. D'une façon générale, que ce soit chez Vernier ou chez les autres fabricants de roquefort, on a un produit qui est de plus en plus homogène.
- Romain LE GAL
Aujourd'hui, dans l'avenir du roquefort, comment on peut faire pour continuer d'avoir du roquefort au lait cru ?
- Jean-François RICARD
Pour continuer d'avoir du roquefort au lait cru, il faut qu'on ait assez de lait de façon à pouvoir faire un tri de ce lait. Parce que, comme tu l'as dit, il est cru et donc de temps en temps, il a des qualités et des fois, il a des non-qualités. Donc, il est important pour nous d'avoir suffisamment de lait pour que le lait cru destiné au Roquefort soit de la meilleure qualité possible. Il se trouve que chez Vernière, on fabrique bien sûr du Roquefort au lait cru et que le lait qui n'est pas transformé en Roquefort, on le transforme dans un autre fromage qui est une pâte pressée au lait thermisé. à la marque Le Cossonard que certains reconnaîtront.
- Romain LE GAL
Donc aujourd'hui, à la marque Le Cossonard, vous produisez plusieurs types de pâtes pressées ?
- Jean-François RICARD
On a plusieurs types de pâtes pressées, on a surtout différents formats de pâtes pressées et on a des recettes qui tournent tout autour de la même recette, mais avec des typicités de pâtes et de goût.
- Romain LE GAL
Pour terminer, Jean-François, j'aurais une dernière question.
- Jean-François RICARD
Attention !
- Romain LE GAL
Attention ! Quelle est ta pizza préférée ?
- Jean-François RICARD
Ma pizza préférée, et il n'y en a qu'une, c'est la pizza au Roquefort. Je ne comprends pas que les Italiens n'aient pas pensé à créer cette pizza de façon naturelle.
- Romain LE GAL
Merci beaucoup Jean-François de nous avoir accueillis.
- Jean-François RICARD
C'était un grand plaisir.
- Romain LE GAL
Merci beaucoup à vous de nous avoir écoutés jusqu'au bout. N'hésitez pas à nous laisser des commentaires et à nous partager auprès de vos réseaux. Nous vous retrouvons bientôt pour un nouvel épisode de l'Échange.