- Romain Le Gal
Bonjour à toi et bienvenue sur Lait'Change, le podcast qui donne la parole aux actrices et aux acteurs de la filière laitière et fromagère. Je suis Romain Le Gal, meilleur ouvrier de France Fromager, et avec France Frais, nous sommes très heureux de te retrouver pour cette nouvelle saison. Et oui, cela fait déjà un an que nous parcourons nos terroirs pour t'emmener à la rencontre des femmes et des hommes qui font notre belle filière. Pour cette nouvelle saison, on t'a préparé plein de belles rencontres avec encore plus d'immersion. Pour la démarrer, cet été, je suis parti dans les Pyrénées et particulièrement dans le Béarn. J'avais été invité par la présidente de l'association Avenir Fermier en Aspe, Marion Ossiniri, afin de présider un beau concours de fromage fermier dans la vallée d'Aspe. Vous vous en doutez, je n'ai pas pu manquer l'occasion de faire une montée en estive pour aller à la rencontre de Marion. Lors de cet épisode, nous avons parlé de son exploitation, de fromage évidemment. Et oui, comment on fait là-haut, en estive, de manière traditionnelle, du fromage, mais également de la vie en montagne et de sa vision de l'avenir. Je te souhaite une très bonne écoute. Bonjour Marion !
- Marion Ossiniri
Salut Romain !
- Romain Le Gal
Comment ça va ce matin ?
- Marion Ossiniri
Bien, pas mal !
- Romain Le Gal
Donc là, on est où Marion ? La route a été longue, j'ai pris un chemin qui était chaotique. On se retrouve sur l'Estive d'où ?
- Marion Ossiniri
L'Estive de Couecq, on est en Vallée d'Aspe. La Vallée d'Aspe, tu connais ?
- Romain Le Gal
Un petit peu.
- Marion Ossiniri
Ouais, de long. C'est assez réputé quand même maintenant. Un petit peu. Petite vallée en Béarn, dans les Pyrénées-Atlantiques. Au coin ouest, sud-ouest dans les Pyrénées.
- Romain Le Gal
Est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?
- Marion Ossiniri
Marion Ossiniri, je suis mariée à Emmanuel, Manu, on dit. On a trois enfants grands maintenant, 21, 19 et 22 même presque, 22, 19 et 17 et demi. Donc des enfants qui ont grandi en montagne aussi toute la partie de l'été. Et donc on a des brebis, des basco-béarnaises, des brebis laitières. On en a... Enfin, alors voilà. Il y a toujours les suivants la police et suivant les manifestants. Voilà, et donc on sait les chiffres réels à la tonte, le jour de tonte, parce qu'il faut payer à la brebis tendue. Donc voilà, là je découvre des fois qu'on en a plus que ce qui est prévu avant. Donc normalement à peu près 500 avec le renouvellement. On en garde à peu près 80, 90 pour le renouvellement chaque année des brebis. Et ensuite on a des vaches laitières aussi. On en a à peu près une trentaine, 12 à traire. Et avec le renouvellement, ça fait une trentaine.
- Romain Le Gal
voilà Ok. Et comment tu décrirais ta région en quelques mots ?
- Marion Ossiniri
La plus belle région du monde, ça c'est sûr.
- Romain Le Gal
Ils sont un peu chauvins, je m'en suis rendu compte hier déjà.
- Marion Ossiniri
Non mais quand on part ailleurs, qu'on va faire des marchés des fois ailleurs et qu'on revient, on trouve que c'est toujours très très beau. On aime beaucoup, c'est très vert. C'est vrai qu'on a le climat océanique qui fait que c'est très vert. Là on est sur la partie haute, donc évidemment c'est... C'est montagneux, c'est assez peintu, assez escarpé, caillouteux en haut et en bas c'est vert, des beaux pâturages. C'est très vivant, on est sur des montagnes qui sont vivantes avec pas mal de bergers dans toutes les montagnes, des bons troupeaux. Et donc c'est assez vivant avec normalement des rapaces dans le ciel. Alors j'espère t'en montrer quand même aujourd'hui.
- Romain Le Gal
Est-ce que vous avez déjà eu des soucis avec d'autres animaux sur vos estives ?
- Marion Ossiniri
Alors nous sur nos estives, les autres animaux, on a bon les sangliers là, comme tu vois, qui ont un peu beaucoup à labourer, c'est de plus en plus, on est en zone parc national donc ils sont pas chassables, et donc là ils ont bien labouré cette année, donc c'est sûr que derrière il y a moins d'herbes, donc ça c'est un souci récurrent et puis grandissant, vraiment. Il y a eu des vagues par rapport aux vautours. Ça s'est un peu calmé, mais on est toujours un peu en stress par rapport aux vautours. Normalement, le vautour est un charognard, mais comme ils étaient en surpopulation, ils ont eu...
- Romain Le Gal
Ils étaient un peu en surnombre...
- Marion Ossiniri
Oui, c'est ça. Et donc, normalement, quand c'est comme ça, ça régule la population. Quand ils n'ont pas l'alimentation en face de la population. En fait, eux, ils ont adapté leur régime alimentaire. C'est-à-dire qu'au lieu d'avoir que des charognards et que la population baisse de vautours, ils se sont mis à chasser. Mais vraiment, on a vu des choses assez impressionnantes. Vraiment, des vautours les uns derrière les autres qui frôlaient les brebis pour essayer de les faire tomber. Et vraiment très proches. On les voit et on entend, j'espère, parler un peu quand même des attaques sur des vaches qui sont en train de vêler. Et donc, ils attaquent les veaux, ils attaquent le placenta de la mère.
- Romain Le Gal
Donc, pas mal de problèmes avec les vautours. Les loups ?
- Marion Ossiniri
Les loups, alors ici, on a encore épargné. On n'est pas loin, une vallée plus loin, il y a eu pas mal d'attaques. Ils sont en train de tester des méthodes de'effarouchement, entre guillemets, des méthodes avec des phéromones. Ça, c'est quelque chose qui nous stresse.
- Romain Le Gal
Et toi, du coup, tu ne faisais pas de fromage ? Comment tu t'es formée ?
- Marion Ossiniri
Moi, je ne faisais pas du tout de fromage. Je dois t'avouer même que pendant très longtemps, j'ai détesté le fromage. D'accord. Jusqu'à mes 22-23 ans, plutôt. Et quand j'étais étudiante, j'avais une copine bretonne qui est Bérangère. Qu'elle nous écoute.
- Romain Le Gal
Bonjour Bérangère, si tu nous écoutes.
- Marion Ossiniri
Grâce à Bérangère que j'ai...
- Romain Le Gal
Tu pourras lui envoyer le podcast.
- Marion Ossiniri
Grâce à Bérangère que j'ai appris à aimer le fromage. Et je trouve que c'est une chance de ne pas avoir aimé le fromage. Parce que mes parents aimaient le fromage, mais pas forcément étaient des amateurs. Et ils achetaient du fromage un peu facile, je dirais. Et donc, j'avais cette copine de là, Bérangère, qui en était étudiante. On avait quatre sous en poche, comme les étudiants. Et on était à Strasbourg à l'époque. Et elle, une fois par mois, elle avait économisé. Elle partait chez le crémier-fromager. Un petit plateau de fromage. Et pour son plaisir, c'était vraiment son plaisir.
- Romain Le Gal
Et c'était là où tu as commencé à apprécier.
- Marion Ossiniri
Je me suis dit, mais je dois louper quelque chose. Pour qu'on fasse une démarche comme ça, c'est que je dois louper un truc. Et donc, je me dis, il faut que j'apprenne. Il faut que je me force. Donc, petit à petit, j'ai commencé par des fromages doux. Et maintenant, je suis fan de fromages bleus. Et plus les fromages ont du goût, qui sente fort...
- Romain Le Gal
La typicité.
- Marion Ossiniri
Je suis fan. Donc, c'est une chance parce que quelque part, j'ai appris mon palais. C'est de l'acquis, quoi. C'est vraiment... C'est vraiment quelque chose, c'est une éducation.
- Romain Le Gal
Et t'es formée à faire du fromage, à fabriquer du fromage.
- Marion Ossiniri
Faire du fromage, alors Manu m'a appris déjà les gestes, ça c'est sûr. Quand on est arrivé en estive, il y avait des vieux bergers aussi, donc je regardais beaucoup ce qu'ils faisaient. Comparer, voir souvent les jours, essayer de comprendre de manière empirique. Exactement. Et puis après, j'ai fait des petites... journée de formation avec des techniciens fromagers locaux ou d'autres, des techniciens fromagers d'Aurillac ou de Poligny ou d'ailleurs qui venaient pour la journée sur des thèmes particuliers
- Romain Le Gal
Bon bah super, on va aller en fromagerie maintenant ? Oui,
- Marion Ossiniri
c'est ça bien, faire du fromage
- Romain Le Gal
Après cet accueil, il est maintenant temps de suivre Marion en fromagerie. La traite, elle, avait commencé très tôt ce matin. Imaginez un peu plus de 400 brebis traitent à la main. Et oui, c'est ça la vie en estive. 400 brebis à passer à la caisse à traire. Il faut environ 2h30 à 3h à 2 trayeurs pour arriver à passer toutes les brebis. Moi j'ai eu quelques péripéties. Mais bon, j'ai eu la chance, je suis tout juste arrivé avant d'aller en fromagerie. Il était environ 10h. Là on arrive en fromagerie Marion, tu peux nous expliquer un petit peu comment ça se déroule ?
- Marion Ossiniri
Seconde partie de la matinée, donc après la traite, on a mis le lait de la traite d'hier soir, déjà ce matin avant la traite du matin, on a mis le lait dans le chaudron, on est parti traire.
- Romain Le Gal
Chaudon en cuivre ?
- Marion Ossiniri
En cuivre, oui, c'est un 250 litre là, tout en cuivre. On aime beaucoup travailler au cuivre, on a mis du temps à s'y mettre, parce que c'est une demande de l'entretien. Mais en fait, c'est super agréable à travailler dedans, dans le chaudron. Ça diffuse une chaleur douce et donc c'est un plaisir. Ça chauffe en douceur, on va dire, le lait. Et puis après, derrière, le caillé. Donc c'est très, très agréable.
- Romain Le Gal
Donc première étape, tu prends la traite du matin et tu mélanges avec la traite du soir.
- Marion Ossiniri
Voilà, exactement. D'abord, on fait chauffer un peu le lait.
- Romain Le Gal
Vous faites un peu réchauffer le lait.
- Marion Ossiniri
On fait monter, comme ça, il n'y a pas de choc de température entre le froid et le chaud. On rajoute le lait chaud de la traite du matin. Après, on a monté à 33 degrés le lait et on a mis des ferments lactiques. Ici, on utilise beaucoup les MA400, des mésophiles, surtout avec un tout petit peu de thermophiles.
- Romain Le Gal
Des mésophiles qui travaillent plus à froid, du coup, pour ceux qui écoutent.
- Marion Ossiniri
On est plutôt à 25 degrés.
- Romain Le Gal
Par contre,thermophiles, thermos, aiment la chaleur.
- Marion Ossiniri
Qui est plutôt autour des 35. Ensuite, quand on est arrivé à 33 degrés, on a mis la présure.
- Romain Le Gal
Temps de coagulation, combien de temps pour le passage de l'état liquide à l'état solide ?
- Marion Ossiniri
Le temps de coagulation, on essaie d'être entre 12 et 15 minutes. Et après, le temps de prise, on appelle ça le temps de prise. Et après, le temps de caillage complet, on est autour des 40 minutes. On cherche à faire 40 minutes. Bon, j'ai un peu dépassé là aujourd'hui.
- Romain Le Gal
Donc après, tout le travail en cuve va se faire de manière manuelle ?
- Marion Ossiniri
Oui. On va trancher le cahier. Et on grimpe. pas trop fin, pas trop gros entre deux. Et ensuite, on va brasser jusqu'à... Là, on va faire en ce moment un 39 degrés.
- Romain Le Gal
Et donc, tu brasses, tu brasses.
- Marion Ossiniri
Oui.
- Romain Le Gal
Et tu vas brasser avec un outil particulier ?
- Marion Ossiniri
Oui, on a un brasseur en inox. Avant, c'était utilisé, c'est la même chose, c'est le même style, on va dire, ça avait des branches un peu circulaires et c'était fait en buis. C'est plus trop toléré, le bois. Ça s'est perdu, c'est fait un inox maintenant.
- Romain Le Gal
Geste traditionnel ensuite, qui est particulier sur vos fromages, vous allez laisser retomber le cahier dans le fond de la cuve. Oui. Tu peux nous expliquer avec tes mots comment ça se passe ?
- Marion Ossiniri
En fait, quand on est arrivé à 39 degrés, on brasse encore un petit moins, le temps que le chaudron, qui n'est plus la chauffe dessous. Donc suivant comment on veut plus ou moins sec, on peut chauffer un peu, pardon, brasser un peu plus longtemps. Donc voilà et après on laisse poser. Et donc évidemment tous les grains de caillé vont se mettre par gravité au fond du chaudron et le petit lait au dessus. Voilà et après donc on va ramasser. On va faire ce qu'on appelle un pain en fait, une boule qui est plutôt comme les pains de campagne qu'on va dire. Et donc, on va utiliser le chaudron, on va s'appuyer contre le chaudron pour presser cette boule. Et se faire petit à petit, que ça soit tout amalgamé, une masse de caillé.
- Romain Le Gal
Ensuite,
- Marion Ossiniri
découpage ? Oui, parce que là, par exemple, aujourd'hui, on avait six fromages de brebis. Donc, on a coupé pour que ça rentre dans le moule. Et on a pressé, on presse ensuite à la main, chaque fromage est pressé à la main. Et on pique vraiment, ça c'est vraiment les gestes à l'ancienne.
- Romain Le Gal
À l'ancienne ?
- Marion Ossiniri
On pique avec des piques en inox.
- Romain Le Gal
Avec ces petites aiguilles. Ce petit lait évacué, ensuite vous toilez le fromage ?
- Marion Ossiniri
Oui, une fois qu'on a pressé des deux côtés, piqué des deux côtés, on le met dans le petit lait, on met notre moule. Et on met une toile en coton dessus qu'on a trempée dans le petit lait. Comme ça, elle est chaude aussi. Et on la met dans le moule et on met le fromage ensuite dessus. Dans le moule, la toile.
- Romain Le Gal
Dernière étape qu'on voit ce matin, c'est finalement le pressage. Donc là, une fois que tous tes fromages ont été mis en moule, vous mettez une casquette et puis un chapeau pour venir aider à presser. Et puis un poids, ça pèse combien ?
- Marion Ossiniri
Ils sont autour de 5 kg à peu près. D'accord.
- Romain Le Gal
Et ça va rester ici combien de temps ?
- Marion Ossiniri
Là, ça va rester l'après-midi, ici au chaud, pour que maintenant que les bactéries lactiques travaillent, et acidifie les fromages. Et là, surtout dans une heure à peu près, on va les tourner, et on va mettre les marques aussi. On va les mettre, on va les tourner, mettre les marques au fond. Donc on met la marque d'Estive, la petite montagne avec l'Edelweiss dedans. Et après la marque de Brebis, notre marque maison de Brebis. Et on va remettre le chapeau et le poids par-dessus jusqu'à ce soir.
- Romain Le Gal
Du coup, tout le matériel qui est là, là on est en estive, on est à 1600 et quelques mètres d'altitude. La ferme en bas, elle est à 400 mètres. Vous redescendez tout le matériel ?
- Marion Ossiniri
Oui, à la fin de la saison, tout le matériel redescend. Parce qu'on s'en sert en bas après pour la prochaine saison.
- Romain Le Gal
Pour la prochaine saison. Bon, super. On va continuer la visite ?
- Marion Ossiniri
Oui, avec plaisir.
- Romain Le Gal
La notion du temps en estive est un peu différente, on est un peu déconnecté du rythme de la société. Et après ce passage en fromagerie, la pause repas dans la cabane, on est parti avec Marion pour suivre notre échange dans l'estive, au pied des brebis. Là, on a marché un petit peu, on est parti de la cabane et puis on se retrouve face aux montagnes. On a les brebis là, tu peux nous en parler un petit peu de cet endroit ? Donc là, on est en estive.
- Marion Ossiniri
On est sur l'estive, on a deux parcours en fait sur l'estive. On a un parcours pour les brebis qui sont pour les brebis de renouvellement, les nôtres et puis celles qu'on garde pour l'été. Donc c'est surtout des agnelles, des jeunes de l'année ou l'année précédente. Et après, des brebis qui sont taries. Donc elles, elles ont un parcours qui commence dans le bois. Elles ont le temps. Elles peuvent dormir un peu, faire la sieste. Et elles font là maintenant, elles pacagent tranquillement. Et puis, un petit, elles vont pacager à la fraîche et revenir pour 21h, 28h30, tranquillement vers la cabane.
- Romain Le Gal
Donc là, on est avec le troupeau de renouvellement. et puis on voit derrière nous... Les laitières qui, elles, vont redescendre tout à l'heure pour la traite, mais elles, elles ont permis son d'un peu plus tard.
- Marion Ossiniri
Voilà. Rémi, mon fils, il est au-dessus, il avait les laitières. Comme ça, l'objectif, c'est qu'elles ne se mélangent pas avec les voisins, d'autre côté de la crête, et aussi pour un peu les guider, les amener gentiment à redescendre à l'heure quand même.
- Romain Le Gal
Alors ces brebis, est-ce que tu peux nous dire un peu qui elles sont ?
- Marion Ossiniri
Basco-béarnaises, c'est des brebis qui ont des cornes. Même les femelles ont des cornes. Elles ont une laine, en fait c'est des brebis qui ne sont pas croisées avec des mérinos. Donc elles ont une laine assez rêche. Il y a eu des fois des filières qui ont été montées pour faire de l'isolation de maison ou autre, ou des matelas. Mais c'est très pratique parce que nous on ne les tond pas. En Pays Basque, ils les tondent avant de monter en estive. Et nous on ne les tond pas parce que justement on est en haute montagne et donc il peut y avoir des aléas de température. Donc ça les isole aussi bien de la chaleur, quand il fait vraiment des grosses chaleurs, que du froid, si des fois il y a des baisses de température, pour la nuit aussi.
- Romain Le Gal
Si on reprend un peu le schéma de l'année, là on est en estive, on est au milieu de l'été. Quand est-ce que vous montez ici ? Comment ça se passe ?
- Marion Ossiniri
Ici, c'est la seconde montagne où on vient. On monte à peu près le premier samedi de juillet. On transhume d'une montagne à l'autre par la montagne. Et le matériel descend par la route et remonte par la piste de l'autre côté.
- Romain Le Gal
C'est plus une... piste qu'une route, surtout sur la fin.
- Marion Ossiniri
D'abord, il faut se sentir de la première estive.
- Romain Le Gal
C'est praticable.
- Marion Ossiniri
La première estive, c'est une route goudronnée. On redescend par la route nationale, et on remonte par la piste un peu caillouteuse.
- Romain Le Gal
Et vous restez là combien de temps ? Tout l'été ? Et vous redescendez quand dans la vallée ?
- Marion Ossiniri
On reste là tout l'été jusqu'à fin septembre. Après, on va redescendre sur la estive de printemps automne, l'estive intermédiaire. On va redescendre trois semaines un mois, tous les mois d'octobre. On redescend à peu près à Toussaint. Et là, après, on redescend aussi à pied au village à Accous.
- Romain Le Gal
Bon, là, j'ai Tom qui nous a rejoint. Il est proche de mon micro. Tom, c'est qui ?
- Marion Ossiniri
Tom, c'est mon chien.
- Romain Le Gal
C'est quoi les ordres principaux qu'on donne à un chien de troupeau ?
- Marion Ossiniri
C'est en général assez simple. C'est passe par en haut, passe en haut, passe en bas. Pousse, voilà. Donc,
- Romain Le Gal
on les ramène, on les éloigne, on les fait avancer.
- Marion Ossiniri
On parle aux chiens, mais on parle aussi aux brebis, c'est-à-dire on leur dit "saï, saï, saï, saï", pour appeler les brebis. Et le chien, il comprend en fait, par rapport à nous, où nous sommes placés, il sait qu'il doit aller derrière pour aller les pousser, les amener vers nous.
- Romain Le Gal
Tu m'avouais juste avant, quand on montait, que le chien est une bonne aide et quand il n'y a pas le chien, les brebis savent qu'elles ont un peu plus le temps. Toi, tu ressens plus des installations, du renouveau dans les producteurs ces dernières années ? des jeunes ? Tu trouves que la région est attractive pour les jeunes qui veulent s'installer ?
- Marion Ossiniri
Oui, là on a fait un article justement par rapport à la fête du fromage on a mis en valeur en fait sur le village d'Accous qui est un petit village à côté là je crois que c'est en tout il y a 15 fermes actuellement en activité et sur ces 15 sur l'ensemble du village et il y a eu 11 installations en 2-3 ans.
- Romain Le Gal
Et toi, tes enfants, tu penses que, là, tu disais depuis petit, ils sont en estive. Là, aujourd'hui, il y a deux de tes fils qui sont avec vous cet été. Est-ce que tu penses qu'il y en aura un des deux ou les deux qui aimeraient continuer dans cette voie-là, reprendre ?
- Marion Ossiniri
Oui, les deux. Notre fille, même avant, je pense qu'elle aurait aimé aussi, mais elle est partie sur une autre voie, en fin de compte, et ailleurs, dans le Cantal. Mais nos deux gars, ils sont très attachés à la Val d'Aspe, ça c'est sûr. Ils aiment beaucoup le métier aussi. Ils vont reprendre, mais à leur façon, je pense. C'est très bien.
- Romain Le Gal
Bon, super. On va aller voir les fromages au saloir maintenant ?
- Marion Ossiniri
Oui, avec plaisir.
- Romain Le Gal
A tout de suite. La journée continue. Et après ce moment d'échange au milieu de brebis avec Marion, il faut retourner voir les fromages, les démouler. et les emmener au saloir. C'est d'ailleurs là que Marion nous emmène On se retrouve où là Marion ?
- Marion Ossiniri
On est dans la cave d'affinage, c'est ce qu'on appelle nous le saloir.
- Romain Le Gal
Donc les fromages qu'on a vus ce matin vont être démoulés ?
- Marion Ossiniri
Oui, on va les amener ce soir déjà au saloir. D'accord. Et toute la nuit ils vont rester dans le moule et demain matin on va les démouler. D'accord. Là tu vois il y a ceux d'hier qui ont été démoulés ce matin. Et ici tous les jours, pendant 4 jours, on sale les fromages. Donc, toujours sur l'arrondi, on va dire, on les roule dans le sel et après, on met sur la face qui va être dessus.
- Romain Le Gal
Et ici, ce saloir, du coup, la température, l'hygrométrie, vous arrivez à être à peu près stable ? Non,
- Marion Ossiniri
c'est un peu compliqué. Ça peut être un saloir qui est enterré, quand même en partie, avec de l'eau.
- Romain Le Gal
Je ne sais pas si tu vois le petit ruisseau qui traverse le sol, qui apporte l'humidité.
- Marion Ossiniri
On rentre ici dans le saloir que le matin, un peu à la fraîche, et le soir, une fois que le soleil est passé aussi. Et après, on essaie de garder toute la journée bien fermée.
- Romain Le Gal
Garder, la fraîcheur, l'humidité à l'intérieur.
- Marion Ossiniri
Mais malgré ça, évidemment, comme on n'a pas d'électricité, en tout cas, pas de la puissance, même si on nous met l'électricité là, on n'aura pas la puissance pour mettre un groupe froid. Donc, c'est un saloir qui monte un peu en température. moins que d'autres, mais ça monte un peu en température quand même.
- Romain Le Gal
Et après, vos fromages, vous les descendez tous les combien de temps ?
- Marion Ossiniri
Donc là, on va essayer de tenir... Normalement, on tient trois semaines de fabrication au départ, trois semaines à un mois. Et après, toutes les semaines, on en descend une charge, on dit. Voilà, 60 fromages à peu près à chaque fois qu'on descend dans la vallée.
- Romain Le Gal
Et ils vont se retrouver dans votre cave d'affinage à la ferme en bas.
- Marion Ossiniri
Exactement, oui. Et là, il y a quelqu'un qui les suit après.
- Romain Le Gal
Super. Merci beaucoup Marion pour ton accueil sur la ferme. Avant de terminer, j'ai une question rituelle de ce podcast, Lait'Change. Pourquoi tu dis "aïe" ? Tu ne sais pas ce qui va se passer. Ne t'inquiète pas, ce n'est pas très compliqué. C'est quoi ta pizza préférée ?
- Marion Ossiniri
Ma pizza préférée ?
- Romain Le Gal
Oui.
- Marion Ossiniri
La landaise.
- Romain Le Gal
La landaise, qu'est-ce que c'est que ça ?
- Marion Ossiniri
Il fallait dire la quatre fromage ?
- Romain Le Gal
Non, pas nécessairement. Et c'est quoi la landaise ?
- Marion Ossiniri
La landaise, c'est une pizza avec des petits gésiers de canard, du magret de canard fumé, des fois il peut y avoir des poivrons et du jambon de Bayonne sur une base de tomate.
- Romain Le Gal
Merci beaucoup Marion.
- Marion Ossiniri
Avec plaisir.
- Romain Le Gal
A bientôt, salut. Dans cet épisode, on a pu échanger sur la vie en estive. Les conditions sont rudes là-haut. Mais ils ont ça dans le sang. Cela est beau à voir. Marion avait à cœur de nous montrer, nous expliquer comment elle perpétue les gestes traditionnels pour produire de beaux fromages, des fromages authentiques. La vie en montagne, elle, évolue avec de nombreux défis. Les prédateurs, comme les vautours, le changement climatique. Il est agréable de voir des personnes comme Marion voulant partager, transmettre, pour être mieux compris. C'est ça que le monde agricole a besoin. Et qu'est-ce qu'il est bon d'entendre que des jeunes s'installent. On te remercie d'avoir écouté cet épisode jusqu'au bout. On espère qu'il t'a plu. N'hésite pas à le commenter, à le partager, à nous mettre 5 étoiles sur les plateformes. Et on te dit à très bientôt pour un nouvel épisode de Lait'Change.