- Speaker #0
Bonjour et bienvenue sur Le Lien, parlons de la santé mentale de nos ados, un podcast co-réalisé par PSSM France et Parentalité Adolescence. Vous êtes proche d'un adolescent et vous vous posez des questions sur sa santé mentale, ses émotions, son comportement, son mal-être ou tout simplement sur la manière de mieux l'accompagner ? Ce podcast est fait pour vous. Au fil de 12 épisodes courts, Olivier Canseil, spécialiste de la santé mentale des adolescents et des jeunes adultes, et membre du conseil scientifique et pédagogique de PSSM France, répondra aux questions que se posent les adultes autour de la santé mentale des adolescents. Aujourd'hui, on retrouve Olivier Canseil pour parler de l'addiction chez les adolescents et comprendre ses mécanismes ainsi que les signes qu'ils doivent alerter. Bonjour Olivier !
- Speaker #1
Bonjour Sarah !
- Speaker #0
Alors, première question, qu'entend-on pas ? addiction et comment se développe-t-elle chez un jeune ?
- Speaker #1
L'addiction, c'est une maladie. C'est une maladie chronique, multifactorielle qui se caractérise par une perte de contrôle face à une substance, une substance toxique ou finalement un comportement. Parce que ça peut être aussi bien une addiction à l'alcool, au tabac qu'aux jeux vidéo, aux réseaux sociaux, des choses comme ça. Et malgré la conscience que le sujet a, des conséquences que cela a sur sa santé, sa vie sociale et relationnelle ou scolaire. Donc, en fait, il y a plein de facteurs qui s'en mêlent et qui contribuent à l'installation d'une addiction. Il y a d'abord des facteurs neurobiologiques. On sait qu'il y a le cerveau adolescent et encore en développement. Et donc, il y a aussi des zones qui s'enchantent plus lentement, qui sont en chantier. Dans les zones de décision, de contrôle des impulsions. c'est pour ça qu'ils sont... particulièrement impulsifs avant que le contrôle s'installe plus en prenant de l'âge. Et en fait, il y a un système de récompense qui est très actif. Donc, les satisfactions immédiates, ils sont sensibles au plaisir immédiat. Après, il y a des facteurs psychologiques, bien évidemment, parce que le recharge d'identité, le besoin d'autonomie, la gestion des émotions qui est difficile, la fragilité de l'estime de soi, la dépression, des troubles du comportement. enfin bon et puis Aussi, les modèles qu'ils peuvent avoir autour de, parmi leurs pairs, interviennent. Ça, c'est les facteurs sociaux et environnementaux, la pression sociale, la banalisation de certaines consommations, l'accès facilité aussi aux écrans, aux substances, et puis le contexte familial. Parce que s'il y a déjà des comportements addictifs dans la famille, des conflits, tout ça, ça peut favoriser. et il est évident par exemple que Donc avoir des modèles familiaux, ça n'aide pas. Mais ce n'est pas la même chose pour des adultes qui fumaient de l'herbe autour d'un feu de camp dans les années 70 et se péter le casque avec les substances qu'on utilise maintenant et qui sont hyper chargées en substances actives. Ça n'a strictement rien à voir et ça, il faut que les parents puissent le savoir aussi. Donc ça s'installe en fait parce qu'il y a l'expérience, il y a la découverte du plaisir, une consommation occasionnelle et puis on a envie de répéter ce plaisir-là. Et donc le cerveau s'habitue, les circuits de récompense se mettent en place, il y a une tolérance et donc au bout d'un moment, il y a l'addiction en elle-même, c'est-à-dire qu'il y a la perte de contrôle. C'est-à-dire que finalement, ça prend toute la place et ça devient l'objet principal de recherche et d'activité de la journée. quoi.
- Speaker #0
Ok. Donc du coup, c'était une réponse qui pouvait être un peu stressante pour les parents. Donc, ce qui m'amène à ma deuxième question, quels sont les signes que les parents peuvent remarquer ?
- Speaker #1
Alors, il n'y a pas vraiment de signes spécifiques. C'est plutôt une accumulation d'indices et leur intensité qui doit l'erter. Alors, au niveau du comportement, il y a évidemment des changements d'humeur, une instabilité de l'humeur, une irritabilité, une agressivité ou une apathie. Il y a un isolement social avec un changement ou un changement dans les relations. un évitement de la famille, et voilà, les activités habituelles, les amis habituels ont moins d'intérêt, ou ils en changent. Et puis bien sûr, des comportements de dissimulation, voire de mensonges, sur les sorties, les fréquentations, des objets trouvés un peu bizarres, substances ou accessoires. Et puis, bon, perturbation des rythmes de vie, tout particulièrement un sommeil irrégulier, une fatigue chronique, des repas sautés, ils n'arrivent plus à sortir du lit. C'est beaucoup les addictions aux écrans, s'ils passent toute leur nuit sur les écrans. Et puis la motivation qui est affectée, avec un désengagement scolaire, avec une baisse des résultats, un absentéisme en classe, des dissimulations, des mensonges, souvent. Et puis, bien sûr, après, les aspects matériels, des demandes d'argent, des disparitions d'argent. Là, ça commence à être plus compliqué, des objets de valeur qui commencent à disparaître à la maison. pour pouvoir monnayer ou acheter des substances. Là, c'est là que ça devient plus compliqué.
- Speaker #0
Ce qui est compliqué, c'est que je trouve, par rapport au début de votre réponse sur les signes, ça ressemble beaucoup... Un adolescent classique.
- Speaker #1
En fait,
- Speaker #0
ça se confond aussi avec les signes de l'adolescence.
- Speaker #1
Mais complètement, et c'est toute la difficulté de cet âge. Et toute la difficulté d'être parent d'un adolescent, je dirais. Alors évidemment, en plus dans le monde actuel, avec les réseaux sociaux et tout ce qui se passe à l'insu des parents, il y a tout un monde caché des adolescents, encore plus qu'il ne fut avant les réseaux sociaux. Mais il y a aussi une nécessaire tolérance des familles qui peut devenir dangereuse si c'est de la commodation, c'est-à-dire si on s'accommode à des comportements qui vont bien au-delà d'une adolescence ordinaire et qu'on oublie de se poser la question de temps en temps, est-ce bien naturel que j'aille jusque-là dans ma tolérance ? Donc, c'est parce que c'est là qu'on... On rate le coche entre un comportement acceptable socialement d'une adolescence du XXIe siècle et la pathologie.
- Speaker #0
D'accord. Puis comme vous l'avez dit au début, c'est une accumulation de signes, c'est un peu un jeu de pistes finalement. Donc il ne faut pas s'arrêter au premier indice. Il faut essayer d'en accumuler quelques-uns pour voir justement peut-être si oui ou non c'est trop.
- Speaker #1
Alors, je dirais, ce n'est pas non plus une enquête. de policière, mais en fait l'incitation c'est être à observer. Donc l'incitation c'est être attentif. Et en étant attentif, on a déjà fait une bonne partie du chemin. Ça veut dire qu'au-delà de se soucier ou de s'inquiéter, c'est être attentif. C'est ce qui nous demande nos adolescents, c'est-à-dire qu'on soit attentif. Donc être attentif, ça amène éventuellement à, comme on l'avait déjà vu... à ouvrir le dialogue, à s'autoriser à poser des questions et donc finalement à s'intéresser à eux ou à leur témoigner qu'on s'intéresse à eux parce qu'ils en ont besoin qu'on le leur témoigne.
- Speaker #0
Très bien, merci beaucoup. Alors on arrive à la question d'un parent. Donc on a laissé un répondeur ouvert avant d'enregistrer ces capsules pour récolter des questions de parents ou de proches.
- Speaker #2
Oui, bonjour, je vous laisse un message. Je suis éducateur socio-culturel pour une MJC et on a une situation un petit peu compliquée qui concerne un de nos jeunes. C'est un jeune qui a une quinzaine d'années et au départ, je vous avoue que c'était surtout une odeur de cannabis qui revenait très régulièrement. On s'en est rendu compte avec les collègues, on en a parlé entre nous, puis avec le jeune. mais depuis quelques mois on sent que ça s'empire, il est très souvent ailleurs, il décroche facilement, il a des moments d'absence, parfois même en pleine activité et ça commence vraiment à nous inquiéter et ça inquiète tout le monde. On a essayé d'en discuter avec lui mais on voit bien qu'on n'a pas les bons outils, qu'on n'a pas forcément les bons mots, on sait pas exactement comment aborder cette question avec lui. Alors voilà, je voulais vous soumettre cette question pour éventuellement avoir des conseils, une réponse à apporter parce qu'on aimerait bien faire mais on se sent assez impuissant face à cette situation et voilà, pour lui et peut-être pour d'autres à l'avenir. Merci beaucoup pour votre écoute.
- Speaker #1
Question qu'on... parce que la situation décrite est quand même bien avancée. Je pense que là aussi, c'est vraiment le dialogue qui permettrait quelque chose, pour sortir aussi de l'impuissance, parce qu'assister impuissant au naufrage d'un proche, c'est extrêmement compliqué. Par contre, avoir des outils pour ouvrir un dialogue, avoir une écoute réflexive, sans jugement, et accompagner et réfléchir avec la personne non-proposée, pas avec des préconisations ou dans une position de parent, d'éducateur, mais plutôt d'essayer de comprendre quels sont les avantages qu'il trouve à sa consommation, les bénéfices qu'il trouve à sa consommation pour progressivement lui faire prendre conscience aussi des limitations et de la restriction de liberté qu'une addiction finit toujours par être pour la personne. C'est vraiment un dialogue socratique qui est important. En tout cas, ça permet... De sortir d'un sentiment d'impuissance, il n'y a pas quelque chose à faire, il y a d'abord quelque chose à comprendre et dans la réinstauration d'un dialogue, il y a la possibilité après de conduire et d'amener la personne vers les soins. Et je dirais que c'est sur cet aspect-là aussi que les premiers secours en santé mentale sont construits, sur cette capacité à entrer en communication et dans une écoute sans jugement. pour pouvoir justement amener quelqu'un qui est dans une situation de crise, l'accompagner vers une décision de consulter.
- Speaker #0
Oui, parce qu'en plus, dans la formation de secours et santé mentale, non seulement on voit la partie justement de la cause et de la description et de mieux comprendre en tout cas ce trouble, mais ensuite il y a la méthode aérée qui nous permet justement de pouvoir passer à l'action. Et surtout, ce qui est intéressant, c'est qu'il y a énormément de ressources. en fonction des thématiques qui sont abordées. Et donc, de pouvoir se dire que, bon, ok, on a peut-être mieux compris la situation, mais on sait qu'on n'est pas tout seul aussi. Et c'est ça, je trouve, qui est aussi intéressant dans cette formation. Ça permet vraiment d'avoir énormément de ressources et de prendre conscience aussi de tous les acteurs qui existent sur les thématiques pour pouvoir nous accompagner en cas de besoin.
- Speaker #1
Oui, c'est surtout ce deuxième volet-là. Plus que de savoir, c'est pas savoir qui est important, c'est avoir les éléments de compréhension, certes, me. apprendre à communiquer, c'est-à-dire pouvoir se sentir compétent face à la situation et savoir quels sont les relais vers lesquels orienter. C'est vraiment dans ces deux domaines-là que c'est vraiment un apport essentiel.
- Speaker #0
Alors, dernière petite question, avez-vous des ressources à nous partager sur ce sujet ?
- Speaker #1
Il y a la Fédération Addiction, qui est une des sociétés savantes, qui apporte pas mal d'informations. Toujours le Psycom et les ressources du Psycom, qui sont les mieux faites. Et puis surtout, on peut, à partir du Psycom, vraiment pouvoir naviguer sur des blogs, des sites toujours de confiance, dont la validité scientifique a toujours été évaluée. C'est ma référence, le psych-homme.
- Speaker #0
Très bien. Merci beaucoup, Olivier. Merci d'avoir écouté cet épisode. En complément des ressources partagées par Olivier Canseil, nous vous invitons à consulter les carnets du secouriste en santé mentale disponibles sur le site PSSM France. Vous pouvez également vous former au secourisme en santé mentale et plus particulièrement le module PSSM Jeune.