Speaker #0Bienvenue dans Le pervers narcissique par Pascal Coudert. Je suis psychologue clinicien et psychanalyste avec 35 ans d'expérience. Depuis 2005, j'accompagne les victimes de manipulations, d'emprises et de relations toxiques. J'ai consacré 15 années à créer une œuvre unique. 8 livres totalisant 2000 pages et 50 heures d'audio pour vous aider à comprendre, vous protéger et vous reconstruire. L'intégralité de cette collection est disponible sur pervers-narcissique.com. Ensemble, comprenons et agissons. Les fausses promesses d'avenir du pervers narcissique. Bientôt, dans quelques mois, quand la situation sera plus stable, on le fera l'année prochaine. Le pervers narcissique excelle dans l'art de dessiner des horizons qui ne se matérialiseront jamais. Ses promesses d'avenir, mariage, enfants, projet professionnel commun, déménagement, ne sont pas des intentions sincères contrariées par les aléas de la vie. Ce sont des instruments, des appâts, des outils de maintien dans l'attente. La personne ciblée investit son temps, son énergie, ses espoirs dans un futur qui n'existe que dans les mots du manipulateur. Elle suspend sa propre vie, ajourne ses décisions, patiente. Et pendant ce temps, le pervers narcissique consolide son emprise. Cette manipulation du temps est l'une des plus pernicieuses. Elle ne laisse aucune trace visible, pas de marque, pas de preuve tangible. Juste un sentiment diffus, au fil des mois, des années parfois, que quelque chose ne vient jamais. que l'avenir promis recule à mesure qu'on s'en approche. Analyser cette stratégie, c'est comprendre comment le manipulateur transforme l'espoir en chaîne invisible. La mécanique des fausses promesses, le projet comme appât initial. Dans la phase de séduction, le pervers narcissique se montre prodigue en projet d'avenir. Mariage évoqué dès les premiers mois. Enfant, dont on choisit déjà les prénoms, maison. qu'on visitera bientôt. Voyage de rêve qu'on organisera ensemble. Cette surenchère des possibles n'est pas un élan amoureux spontané. C'est une stratégie d'accroche. Le manipulateur sait que rien n'attache davantage qu'un avenir partagé, qu'un horizon commun vers lequel on marche ensemble. Ses promesses créent une configuration relationnelle particulière. La personne ciblée se projette. Elle construit mentalement le futur décrit. Elle investit émotionnellement dans ce qui n'existe pas encore, mais qui, d'après les mots du manipulateur, existera certainement. Cet investissement émotionnel dans le futur fictif devient un piège. Plus on y croit, plus on y consacre de temps et d'énergie, plus il devient difficile d'abandonner. Le coût d'abandon augmente avec chaque mois d'attente. La suspension du temps. Ce qui distingue... La fausse promesse de l'intention sincère, c'est le report systématique. Bientôt ne devient jamais maintenant. Les échéances glissent, dans six mois devient dans un an. Puis, quand j'aurai réglé ce problème, puis ce n'est pas le bon moment. Le pervers narcissique maîtrise l'art du délai élastique. Il maintient la promesse dans un futur perpétuellement repoussé. Jamais tout à fait abandonné, jamais vraiment concrétisé. Cette suspension du temps a des effets concrets sur la vie de la personne ciblée. Elle reporte ses propres décisions. J'attendrai qu'on se marie avant de changer de travail. Je patienterai encore avant de m'installer définitivement quelque part. Je ne prends pas de décision importante tant qu'on n'a pas clarifié notre situation. Sa vie se met en pause. Elle s'installe dans une attente qui devient un état permanent. Le futur promis fonctionne comme un horizon. Il recule à mesure qu'on avance vers lui. L'espoir instrumentalisé. L'espoir est la chaîne invisible par excellence. Tant qu'il subsiste une possibilité, même infime, que le projet se réalise, la personne ciblée reste, elle patiente. Elle justifie les reports par des circonstances extérieures. Il a des raisons valables. Ce n'est pas le bon moment pour lui non plus. Ça viendra. Le manipulateur n'a même pas besoin de réitérer constamment la promesse. Il suffit qu'il l'évoque de temps en temps, qu'il la ravive juste au moment où la personne commence à douter. Ce mécanisme s'appuie sur un phénomène bien documenté, l'escalade d'engagement. Plus on a investi de temps, d'énergie, d'espoir dans un projet, plus il est difficile d'y renoncer. Abandonner après deux ans d'attente signifierait admettre que ces deux années ont été perdues. Il est psychologiquement plus confortable de continuer à attendre, de penser que ça finira par arriver. Le pervers narcissique Merci. exploite ce biais cognitif. Il sait que chaque mois supplémentaire d'attente renforce la probabilité que la personne reste encore un peu. Les terrains d'application dans le couple. Les fausses promesses d'avenir trouvent leur terrain d'élection dans la relation de couple. Le mariage promis qui ne se concrétise jamais est un cas classique année après année. La personne attend. Le manipulateur invoque les finances, le stress professionnel, les tensions familiales, la nécessité de régler d'abord certaines choses, mais rien ne se règle jamais suffisamment pour que le mariage devienne réalité. L'engagement reste dans les mots, jamais dans les actes. L'enfant fonctionne de la même manière. On aura des enfants, mais pas maintenant. Quand je serai plus stable professionnellement ? Quand on aura acheté une maison ? Les conditions évoluent, les échéances reculent. La personne ciblée, souvent une femme dont l'horloge biologique suit son cours, voit les années passer. Elle patiente, elle attend le bon moment que le manipulateur définit unilatéralement et qui ne vient jamais. Quand elle finit par exprimer son urgence, il la culpabilise. « Tu me mets la pression, tu ne penses qu'à toi. Ce n'est jamais le bon moment pour toi. » Le déménagement, les vacances, les projets de vie commune suivent le même schéma. On parlera de vivre ensemble bientôt. On visitera des appartements dans quelques mois. On partira en voyage l'année prochaine. Ces promesses maintiennent l'illusion d'un futur commun sans jamais engager réellement le manipulateur. Il reste libre de partir à tout moment, puisqu'aucun engagement concret n'a été pris. Seule la personne ciblée est liée. par ses espoirs, par son investissement émotionnel dans un avenir qui n'existe que dans sa tête, au travail. En contexte professionnel, la fausse promesse prend souvent la forme de la promotion repoussée. Le pervers narcissique en position hiérarchique promet à son subordonné une évolution de carrière, une augmentation, une responsabilité accrue. Si tu continues comme ça, tu seras promu. Ton travail est remarquable. Je vais en parler à la direction. Dans six mois, on revoit ta situation. Six mois passent. Rien ne change. Le manipulateur invoque le contexte économique, les décisions de la hiérarchie, la nécessité de prouver encore un peu, le subordonné redouble d'efforts, surinvestit, espère. Cette stratégie permet au manipulateur de maximiser l'investissement de sa victime sans contrepartie réelle. La promesse fonctionne comme une carotte perpétuellement suspendue devant l'âne. Elle maintient la motivation, l'engagement, le dévouement. La personne ciblée travaille davantage, accepte des tâches supplémentaires, renonce à d'autres opportunités professionnelles, en pensant que ça va finir par payer. Pendant ce temps, le manipulateur bénéficie d'un collaborateur surengagé qu'il n'a même pas besoin de récompenser réellement. Dans la famille. Au sein de la configuration familiale, les fausses promesses prennent des formes spécifiques. Le parent pervers narcissique peut instrumentaliser l'héritage « si tu t'occupes bien de moi, tout ira à toi. Continue comme ça et tu seras récompensé. » L'enfant adulte se dévoue, sacrifie du temps, de l'énergie, parfois sa propre vie familiale, dans l'espoir d'une reconnaissance qui ne viendra jamais. ou qui sera finalement attribuée à un autre membre de la fratrie. La réconciliation promise fonctionne selon le même mécanisme. Après une période de conflit, le manipulateur laisse entendre qu'il est prêt à tourner la page, à repartir sur de nouvelles bases. Il évoque des changements, une thérapie qu'il envisage, une prise de conscience. La personne ciblée patiente. Elle accepte un contact minimal, elle fait des concessions. Elle espère que cette fois le lien va s'apaiser, mais rien ne change structurellement. Les mêmes schémas se répètent. La promesse de réconciliation était un leurre pour ramener la personne dans l'orbite du manipulateur. Les grandes catégories de promesses. On peut distinguer trois types principaux de fausses promesses. Les promesses matérielles concernent l'argent, les biens, les situations concrètes, « je vais te rembourser » , « on achètera cette maison » , « je t'aiderai financièrement » . Ces promesses créent une dépendance matérielle, ou maintiennent la personne dans l'espoir d'une amélioration de situation qui ne vient jamais. Les promesses relationnelles portent sur l'engagement, le changement personnel, l'évolution du lien. Je vais changer. Je ferai une thérapie. On se mariera. Je divorcerai. Ces promesses maintiennent l'illusion que la relation toxique peut s'améliorer, que le manipulateur peut s'améliorer. peut évoluer. Elles empêchent la personne de partir, en lui faisant miroiter un avenir où tout sera différent. Les promesses de réparation interviennent après les crises, les violences psychiques, les ruptures de confiance. Ça n'arrivera plus jamais. Je vais me rattraper. Tu verras, ça va changer. Ces promesses permettent au manipulateur de maintenir le lien après avoir franchi une ligne rouge. La personne ciblée accepte de donner une dernière chance, puis une autre, puis encore une autre. Le cycle se répète indéfiniment. Les effets sur la personne ciblée. Temps suspendu, vie en attente. Les fausses promesses d'avenir ont pour effet premier de geler la vie de la personne ciblée. Elle reporte ses décisions importantes. Elle ne change pas de ville parce qu'on va peut-être déménager ensemble bientôt. Elle ne s'engage pas dans un nouveau projet professionnel parce qu'on aura peut-être un enfant l'année prochaine. Elle ne reconstruit pas sa vie sentimentale après une séparation parce qu'il a dit qu'il reviendrait. Son présent se vide au profit d'un futur qui n'arrivera jamais. Ce gel temporel peut durer des années. La personne s'installe dans une posture d'attente qui devient un mode de fonctionnement. Elle ne vit plus pleinement l'instant présent. Elle économise son énergie, ses ressources émotionnelles, ses investissements relationnels pour ce moment futur, où le projet promis se réalisera enfin. Mais ce moment ne vient pas. Et pendant ce temps, sa vie passe. Les opportunités qu'elle n'a pas saisies ne reviendront pas. Le temps perdu ne se récupère pas. Désorientation temporelle. À force d'attendre, la personne ciblée perd ses repères dans le temps. Elle ne sait plus depuis combien de temps exactement elle patiente. Les mois se confondent. Il m'a dit qu'on se marierait. C'était il y a combien de temps déjà ? Deux ans ? Trois ans ? Cette confusion n'est pas accidentelle. Elle résulte du flou entretenu par le manipulateur. Les échéances qu'il fixe sont toujours vagues. Bientôt, quand ce sera le bon moment, dans pas longtemps. Ce vocabulaire élastique empêche toute prise sur le réel. La personne ciblée finit par douter de sa propre perception. Est-elle trop impatiente ? Trop exigeante ? Après tout, il a dit qu'il le ferait. Il faut lui laisser le temps. Mais combien de temps est raisonnable ? À quel moment l'attente devient-elle déraisonnable ? Elle ne sait plus. Elle oscille entre la patience et le sentiment diffus d'être dupée, sans jamais pouvoir trancher définitivement. Cette incertitude permanente est épuisante. L'usure de l'espoir. L'espoir, lorsqu'il est constamment déçu puis ranimé, devient un instrument de torture psychique. La personne ciblée traverse des cycles. D'abord l'espoir. Cette fois, ça va vraiment se faire. Puis la déception quand l'échéance passe, sans que rien ne se concrétise. Puis la résignation. Je ne peux plus y croire. Mais le manipulateur ravive alors la promesse, avec juste assez de crédibilité, pour relancer le cycle. « Je sais que j'ai tardé, mais maintenant c'est différent. Je suis vraiment prêt. » Cette alternance espoir-désespoir-espoir épuise les ressources psychiques. Chaque déception entame un peu plus la confiance en soi, en l'autre, en la possibilité d'un avenir stable, mais chaque nouvelle promesse réactive suffisamment d'espoir, Pour que la personne reste, elle se sent coupable de douter. Peut-être que je ne lui laisse pas assez de chance. Peut-être que je devrais être plus patiente. Cette culpabilité empêche la lucidité. Elle transforme l'attente en vertu, alors qu'elle est une prison. Le doute installé. Le doute finit par s'installer comme une tonalité de fond. Peut-être que cette fois sera la bonne. Peut-être qu'il est sincère maintenant. Peut-être que j'ai mal compris ses intentions. Ce doute permanent empêche toute décision ferme. La personne ciblée... ne peut ni vraiment croire, ni vraiment partir. Elle reste dans un entre-deux paralysant. Elle rationalise les reports. Il a vraiment beaucoup de stress en ce moment. Ce n'est effectivement pas le bon moment avec tout ce qui se passe. Elle devient l'avocate de celui qui la manipule, justifiant à sa place les promesses non tenues. Cette auto-persuasion protège contre une vérité difficile à admettre, que les promesses Merci. n'ont jamais été sincères, que l'avenir décrit n'était qu'un leurre, que le temps investi a été perdu. Accepter cette réalité impliquerait de faire le deuil de tout ce qu'on a espéré, de reconnaître qu'on a été dupé, de renoncer à un futur dans lequel on s'était déjà projeté. C'est psychologiquement coûteux. Il est plus confortable de continuer à douter, à espérer, à attendre encore un peu. Distinguer retard légitime et promesses fictives Critères de distinction Ce n'est pas tout retard qui est manipulation. Il existe des retards légitimes, des projets sincères, qui se concrétisent plus lentement que prévu. Comment distinguer ? Un premier critère, le retard légitime s'accompagne d'explications concrètes, vérifiables, cohérentes. On reporte le mariage de six mois parce que ma mère vient d'avoir un accident et je dois m'en occuper. L'explication fait sens. Elle est temporaire. Elle est liée à un événement extérieur identifiable. Le retard légitime génère aussi de la frustration chez celui qui promet. Il est le premier déçu de devoir reporter. Il exprime son regret, sa contrariété face à l'obstacle. Le manipulateur, lui, ne montre aucune gêne. Il reporte avec désinvolture, sans véritable empathie pour la déception qu'il cause. Il ne propose pas non plus de solution alternative, de compensation, de plan B. Il se contente de repousser l'échéance, sans rien offrir en échange. Récurrence et schéma. La récurrence est un indice fiable. Si la même promesse est formulée, puis repoussée, puis reformulé à l'identique, puis à nouveau repoussé, on est en présence d'une fausse promesse, on se mariera l'année prochaine. Un an passe, on se mariera l'année prochaine. Encore un an, bientôt, vraiment. Les excuses changent, mais la structure reste identique. Aucune progression réelle vers l'objectif, aucune action concrète entreprise. Un projet sincère, même s'il prend du temps, montre des signes de progression. On visite des appartements, même si on n'achète pas tout de suite. On discute concrètement du mariage, on contacte une mairie, on en parle à nos familles. Il y a des gestes, des actes, des preuves tangibles que le projet est réel. La promesse fictive, elle, reste dans les mots. Elle ne se traduit jamais en action vérifiable. Le manipulateur parle d'avenir, mais ne fait rien. qui engage concrètement cet avenir. Le test de cohérence. Un test simple, observer si les actes suivent les paroles. Si quelqu'un promet un engagement, mais refuse systématiquement les gestes qui matérialisent cet engagement, on est face à une fausse promesse. Il dit vouloir construire avec vous, mais refuse de vous présenter à sa famille. Il évoque le mariage, mais ne veut pas en discuter sérieusement. Il parle d'un enfant, mais fait tout pour éviter le sujet quand vous essayez de planifier concrètement. Cette incohérence entre discours et comportement est caractéristique. Le pervers narcissique maîtrise l'art de promettre sans jamais s'engager réellement. Il sait quels mots employer pour maintenir l'espoir. « Je t'aime » , « On fera notre vie ensemble » , « Tu es la personne qu'il me faut » . Mais il évite soigneusement tout ce qui est en train de se passer. tout ce qui pourrait le lier concrètement. Les mots ne coûtent rien. Les actes, eux, l'engageraient. Il ne franchit jamais cette ligne. Sortir de l'attente, repères opératoires. Reprendre le contrôle de son temps. Sortir de l'emprise des fausses promesses commence par une décision simple mais difficile. Reprendre le contrôle de son propre temps. Cela signifie cesser de suspendre sa vie en fonction de promesses qui ne se concrétisent pas. Si vous attendez depuis deux ans qu'il divorce, qu'il déménage, qu'il s'engage, et que rien n'a bougé, votre vie ne doit pas rester en suspens. Vous reprenez vos projets personnels. Vous prenez les décisions que vous avez reportées. Vous cessez d'attendre l'autorisation ou la concrétisation de ces promesses pour vivre. Ce n'est pas de l'égoïsme, c'est de la survie psychique. Une vie entière ne peut pas être mise en pause pour un futur qui ne viendra peut-être jamais. Reprendre ses projets, ne signifie pas nécessairement rompre immédiatement, mais cela signifie ne plus conditionner sa propre existence aux promesses de l'autre. C'est se reconstruire un présent autonome, indépendant des horizons fictifs qu'il dessine. Poser des limites temporelles claires. Une stratégie concrète consiste à fixer ses propres échéances. Si dans six mois, rien n'a bougé sur ce projet, je prendrai ma décision. Cette échéance, vous ne la partagez pas nécessairement avec le manipulateur, il pourrait la retourner contre vous, vous accusez de mettre la pression, mais vous vous la fixez intérieurement. Vous reprenez le contrôle du calendrier, vous sortez de l'attente indéfinie pour entrer dans une temporalité maîtrisée. Au terme de cette échéance, si rien n'a changé, vous agissez, vous prenez votre décision. Quittez, renoncez au projet commun. Reprendre votre autonomie, sans culpabilité. Vous avez donné du temps, de la patience, de la confiance. Si rien ne s'est concrétisé, ce n'est pas votre responsabilité. C'est le choix du manipulateur. Poser une limite temporelle, c'est récupérer sa capacité de décision. C'est refuser de rester indéfiniment dans la main de l'autre. Se détacher du futur fictif. Le plus difficile peut-être est de faire le deuil de l'avenir qu'on s'était imaginé. Accepter que certains projets ne se réaliseront jamais, que le mariage promis ne viendra pas, que l'enfant ne naîtra pas dans ce contexte, que la vie rêvée ensemble restera un rêve. Ce deuil est douloureux. Il implique de renoncer non seulement à un projet, mais aussi au temps qu'on y a investi, à l'espoir qu'on a nourri, à l'illusion d'un futur qui semblait si réel dans les mots du manipulateur. Mais ce deuil est aussi libérateur. Il permet de réinvestir dans le présent réel plutôt que dans un futur fictif. Il ouvre la possibilité de construire autre chose, ailleurs, avec d'autres personnes ou en solitaire, mais sur des bases solides. Un avenir qui ne dépend pas de promesses vides. Un présent qu'on habite pleinement plutôt qu'un futur qu'on attend indéfiniment. La vie se passe maintenant. Pas dans un « bientôt » qui ne vient jamais. Reconnaissance du schéma. Sortir de l'attente nécessite aussi de reconnaître le schéma pour ce qu'il est. Une stratégie de manipulation, pas un concours de circonstances malheureuses. Observer la répétition. Documenter, si nécessaire, les promesses et leur non-réalisation. Relire d'anciens messages où ils promettaient la même chose il y a un an, deux ans. Cette objectivation aide à sortir de l'auto-persuasion. On ne peut plus se dire « peut-être que cette fois c'est différent » . Quand on voit noir sur blanc que c'est exactement la même promesse pour la troisième année consécutive. Cette lucidité est inconfortable. Elle force à admettre qu'on a été manipulé, qu'on a cru à quelque chose qui n'était pas réel. Mais elle est nécessaire pour sortir du piège, tant qu'on croit encore que « peut-être il est sincère » , on reste. La reconnaissance du schéma permet de passer de « il a des difficultés à concrétiser » à « il n'a jamais eu l'intention de concrétiser » . Ce changement de perspective est le premier pas vers la sortie. En résumé, les fausses promesses d'avenir constituent un outil d'emprise particulièrement sophistiqué. Elles ne nécessitent aucune violence apparente. Pas de cris, pas de menaces, pas de gestes agressifs, juste des mots. Des projets évoqués, des horizons dessinés, et pourtant, elles enchaînent aussi efficacement que n'importe quelle autre technique de manipulation. Elle transforme le temps lui-même en instrument de contrôle. La personne ciblée ne vit plus dans le présent. Elle habite un futur fictif, un avenir promis qui recule perpétuellement. Pendant ce temps, sa vie réelle, celle qui se déroule maintenant, dans l'instant, se vide. Les décisions sont reportées, les projets personnels suspendus, les opportunités manquées. Tout cela au nom d'un « bientôt » . qui ne devient jamais maintenant. Sortir de cette configuration implique de reprendre le contrôle de son propre temps, de cesser de suspendre sa vie en fonction de promesses qui ne se concrétisent pas, de faire le deuil, aussi douloureux soit-il, de l'avenir imaginé, et de réinvestir dans le présent réel, le seul temps sur lequel on a véritablement prise. Car la vie ne se passe pas dans un futur promis. Elle se passe maintenant, et chaque jour passé à attendre un demain qui ne viendra jamais est un jour qu'on ne récupérera pas.