Speaker #0Psst, c'est l'été du fil d'actu. Chaussez vos tongs et prenez du popcorn. Tout l'été, je vous propose des épisodes consacrés à des grands événements qui ont marqué la pop culture de ces 30 dernières années. A déguster en 5 minutes avec une bonne glace à la fraise. Bon été ! Vous connaissez le jeu vidéo Les Sims ? Ce jeu vidéo où vous devez faire jouer des personnages, les faire manger, boire, dormir, se laver, mais aussi acquérir des compétences, trouver un travail, sociabiliser, et pourquoi pas se marier, faire des enfants et même mourir. Est-ce que vous saviez que quand vous jouez aux Sims, vous rejouez l'un des plus grands débats qui a agité la théologie chrétienne au fil des siècles ? Parce que le paradoxe du jeu Les Sims, c'est que c'est vous qui contrôlez vos personnages, il n'y a donc pas vraiment de libre arbitre, de liberté. les personnages ne peuvent pas décider et choisir ce qu'ils veulent faire, mais quand même, ils ne vous obéissent pas toujours. Et parfois, alors que vous lui avez ordonné d'aller faire la vaisselle ou d'aller lire un livre, il va s'arrêter et faire autre chose. Donc il y a quand même un petit peu libre arbitre dans les Sims. Parfois c'est très énervant et toujours un peu surprenant. Et en fait, vous pouvez même déterminer le niveau de libre arbitre dans la partie que vous allez jouer. Ça c'est une grande question qui a agité la théologie. Est-ce que nous sommes libres ou est-ce que Dieu détermine toutes nos actions ? Et alors la deuxième question sous-jacente, qui a trait directement à cette question du libre-arbitre, c'est pourquoi y a-t-il du mal dans le monde ? Ben oui, quand on croit en Dieu, c'est un paradoxe. Si vous croyez en un Dieu qui est bon et tout-puissant, il aurait dû créer un monde qui soit absolument bon. Donc, nous ne devrions pas souffrir. Un des grands débats de la théologie chrétienne, c'est de comprendre pourquoi Dieu a fait un monde où nous souffrons. Pourquoi la souffrance ? Cette question, en philosophie et en théologie, ça s'appelle la théodicée, ce qui veut dire justice de Dieu. Et c'est une question très importante, c'est une question que je pense tout le monde s'est posée s'il s'est à un moment questionné sur sa croyance en Dieu. Comment croire en Dieu quand les enfants souffrent, par exemple, ou quand des enfants meurent ? Saint Augustin, au IVe siècle après Jésus-Christ, propose de réfléchir sur cette question. Sa réponse, elle va lier l'existence du mal et le libre-arbitre. L'hypothèse de départ, c'est que Dieu est infiniment bon et il a créé le monde. Mais il a donné le libre arbitre aux hommes, pour que les hommes justement ne soient pas des Playmobil ou des Sims, comme vous voulez, et que les hommes puissent expérimenter leur propre choix. Or, que fait l'homme une fois qu'il a la liberté ? Il commet le péché originel, au moment où il mange le fruit défendu, le fruit de la connaissance, dans le jardin d'Éden, et par là, il entache l'humanité d'un péché originel. La liberté de l'homme, elle est donc marquée... du sceau du péché. Et c'est ça qui va créer le mal dans le monde. Voilà comment saint Augustin réconcilie la bonté divine et la liberté de l'homme. Nous ne sommes pas déterminés et c'est justement l'existence du mal qui le prouve. Pourquoi c'est important cette idée de péché originel ? Ça dit que puisque nous sommes tous entachés de ce péché, de cette marque finalement du mal, de la faute première, nous ne pourrons jamais totalement nous racheter. Ça veut dire que si vous vous comportez parfaitement bien durant toute votre vie, vous ne pouvez pas pour autant... exiger le salut divin. Le salut divin, ce n'est pas une méritocratie. Alors comment espérer être sauvé ? Saint Augustin nous répond par la grâce de Dieu. Donc tout ce que vous pouvez faire, c'est bien vous comporter, prier, agir en conformité avec les enseignements divins et espérer la grâce divine. Alors revenons à nos sims. Nos sims, ils sont totalement entre cette question du déterminisme et du libre arbitre. Car malgré tout, nous sommes un petit peu déterminés par un certain nombre de lois de la nature, et puis, je reviens à mes marottes sociologiques, par un certain nombre de conditions d'existence. Mais vous avez tout de même votre libre-arbitre. Et pourtant, quoi que vous fassiez dans le monde, vous ne serez pas toujours récompensés pour vos actions. Et c'est ce qu'on voit dans les Sims. Parfois, vous lui demandez de faire la cuisine, il va quand même mettre le feu à la cuisinière. Alors, c'est quoi la grâce divine dans les Sims ? Eh ben, si vous avez déjà joué... vous savez qu'il existe des codes, des codes secrets, qui vous permettent d'avoir de l'argent illimité par exemple, et donc d'avoir une vie absolument confortable. Vous pouvez aussi les faire progresser dans leur carrière ou dans leur relation sociale. Et ça, en langage Sims, ça correspond au salut. Mais il y a une hypothèse dont on n'a pas parlé là-dedans. Une hypothèse qui a d'ailleurs pas mal agité la théologie. On est parti du postulat que Dieu était bon. Et si Dieu était méchant ? Alors je prétends pas avoir la réponse. Mais tout ce que je sais, c'est que quand on a déjà joué aux Sims, on a déjà été un dieu méchant. Et je sais que vous tous, vous toutes qui avez déjà joué, vous avez déjà tué vos Sims pour avoir un cimetière dans le jardin. Moi aussi, j'ai créé des piscines, mis les Sims dedans, et j'ai enlevé l'échelle pour pas qu'ils puissent remonter, et pour avoir des fantômes Sims dans ma maison. Mais là encore, reste à savoir si c'est moi qui suis un dieu méchant ou si c'est tout simplement que je suis un humain entaché par le péché originel et que de par mon libre arbitre, je ne peux m'empêcher de faire le mal. En tout cas, la prochaine fois que vous jouerez aux Sims, regardez un de vos petits Sims, dites-vous que c'est peut-être le Sims Saint-Augustin qui est en train de se demander pourquoi le mal s'abat sur sa vie, alors qu'après tout, il n'a rien demandé. Bon jeu ! Allez, je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour un nouvel épisode de Pop Culture. Et en attendant, abonnez-vous au compte Instagram du Fil d'Actu, arrobase lefildactu.podcast, pour des informations exclusives. Et ce ne serait pas l'heure de se reprendre une glace, là ?