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# 135 - Manon CERDAN : Changer notre regard sur la vieillesse grâce au cinéma cover
# 135 - Manon CERDAN : Changer notre regard sur la vieillesse grâce au cinéma cover
Le Podcast Des Établissements Médico-sociaux

# 135 - Manon CERDAN : Changer notre regard sur la vieillesse grâce au cinéma

# 135 - Manon CERDAN : Changer notre regard sur la vieillesse grâce au cinéma

43min |05/01/2025|

207

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# 135 - Manon CERDAN : Changer notre regard sur la vieillesse grâce au cinéma

# 135 - Manon CERDAN : Changer notre regard sur la vieillesse grâce au cinéma

43min |05/01/2025|

207

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Description


Dans cet épisode, je retrouve Manon Cerdan, ancienne directrice d’EHPAD et aujourd’hui chercheuse, pour parler de sa thèse et de la série Septième Ciel. Cette comédie, qui raconte avec humour et émotion la vie en EHPAD, sert à ouvrir des discussions importantes avec des aides-soignants en formation.


Manon utilise la série pour travailler les représentations de la vieillesse auprès d'étudiants en école d'aides-soignants.


👉 Au programme :

  • La fiction qui fait réfléchir : comment une série peut changer notre regard sur la vieillesse et les métiers du soin.

  • Les réactions des soignants : ce qu’ils retiennent des personnages de la série et ce que ça leur apprend sur leur métier.

  • Les grands sujets discutés : la liberté des résidents, leur intimité, et même la sexualité des personnes âgées, un sujet encore tabou mais essentiel.

  • Le rôle de la direction en EHPAD : attentes, critiques et incompréhensions autour de la figure du directeur, souvent caricaturée dans la fiction.

  • Les dynamiques de groupe en formation : entre échanges constructifs et déconstruction des préjugés grâce au prisme de la série.

  • Un aperçu de la saison 2 : cette fois, on explore les défis et les belles idées autour de l’habitat partagé pour les personnes âgées.


✨ Un épisode qui montre comment une série peut aider à mieux comprendre et améliorer la vie en établissement. Bonne écoute !


🎧 Disponible sur toutes les plateformes. Abonnez-vous, partagez et laissez une note pour soutenir le podcast ! 🙌


Vous pouvez contacter Manon du Linkedin et regarder la série (avec abonnement)


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et bienvenue sur le podcast des établissements médico-sociaux. Je m'appelle Arnaud Chevalier et après avoir été directeur d'EHPAD pendant 8 ans, j'aide les établissements de santé à adopter les meilleures innovations pour simplifier et améliorer leur quotidien. J'écris ce podcast pour partager les belles expériences portées par des gens passionnés. Avant de commencer, si vous appréciez ce podcast, vous pouvez vous abonner pour ne rater aucun épisode. Et encore mieux, mettre une note 5 étoiles sur Apple Podcasts et le partager à vos collègues. Sur ce, bon épisode. Bonjour à tous, aujourd'hui je discute avec Manon Cerdan. On a déjà fait un épisode en janvier 2023, donc on arrive à la suite, quasiment deux ans plus tard, même deux ans plus tard le temps de le diffuser. On avait parlé de la série 7e ciel, sur laquelle tu avais plus que collaboré, tu avais beaucoup participé, et notamment pour faire en sorte que ce soit une série qui représente la manière de la... possible le fonctionnement et le quotidien d'un établissement. Moi, franchement, c'est une série que j'ai vraiment adorée, que j'ai dévorée, mais en voyant des trucs, tout ça, j'ai beaucoup risqué, beaucoup aussi des démotions sur des trucs, sur plein de sujets, je me suis vu. Donc, c'est vraiment une série qu'il faut recommander à tous les gens qui sont placés de près ou de loin dans un établissement. Et depuis la sortie de cette série, toi tu t'es engagé sur un travail de recherche dans le cadre d'une thèse pour aller rencontrer les aides-soignantes, mais tu vas nous l'expliquer beaucoup mieux. Et l'idée c'est qu'est-ce qu'on fait d'une série qui montre la vie d'un établissement, qu'est-ce que ça peut apporter en gros pour les établissements et surtout pour les écrans. On va aborder ce sujet-là, tu vas pouvoir nous expliquer tout ça.

  • Speaker #1

    pour changer le monde, même si c'était plutôt plus complexe. Les images étaient capables d'auditer le regard. Donc ça, j'ai rejoint. Puis assez rapidement, dans mes 20 ans, j'avais 25 ans, j'ai décidé de creuser un peu cette envie que j'avais de travailler dans la vie de l'ES, parce que j'avais une grande question existentielle, qui est comment on fait pour rester libre jusqu'à la fin de sa vie. Et donc là, je suis passée par l'EHPAD, la direction d'EHPAD notamment. Une expérience qui a été fondatrice mais traumatisante pour moi. Ensuite, j'ai trouvé mon salut dans l'accueil familial pour les personnes âgées où je m'occupais des sujets de formation. Et puis il est arrivé ce moment où j'ai décidé de mettre en musique ces deux sujets d'intérêt dans ma vie, qui sont le cinéma et la vieillesse, en montant un projet de recherche en sciences de l'information et de la communication. Donc ça prend la forme d'une thèse aujourd'hui. Je suis financée pour cela par l'université Paris Panthéon-Assas. Je travaille sur la représentation de la vieillesse dans la fiction, et spécifiquement sur la série Septième Ciel, avec des aides-soignantes en début de formation.

  • Speaker #0

    Ok, alors, il y a plein de trucs sur lesquels je pourrais revenir. On l'a déjà abordé un petit peu la dernière fois, mais c'est vrai que toi, tu as eu un parcours aussi. de directrice, juste à un moment, comment ça vient, comment ça t'est venu ? Pourquoi ? Parce que si tu es dans le cinéma, comment tu te dis je vais aller bosser dans un Ehpad ?

  • Speaker #1

    En fait, ce qu'il y a, c'est que les deux étaient là dès le début. Ce qu'il y a, c'est que quand j'avais 20 ans, que j'étais à ce moment-là en école de commerce, j'avais quand même envie de me faire rêver et que la vieillesse allait tout de suite dans la vieillesse. J'avoue que ça me faisait probablement un peu peur. que le cinéma, voilà, j'avais envie de tenter ma chance et d'y aller. Et donc, j'avais ces deux-là au début. J'ai commencé par le cinéma. Assez vite, je me suis rendue compte que je préférais être une spectatrice plutôt que d'être dans les coulisses. Ça m'intéressait moins intellectuellement. Et donc, c'est pour ça que je suis allée vers la vieillesse, qui avait sa même place dans ma vie et dans mes intérêts. Et j'étais un peu plus mature. Et donc voilà, assez naturellement, quand j'ai quitté le cinéma, je me suis dit, bon, j'ai vu ce que j'avais à voir dans le cinéma, il est temps de passer à autre chose. Et finalement, la vieillesse, intellectuellement, professionnellement, existentiellement, ça m'apporte beaucoup plus.

  • Speaker #0

    C'est vrai que le cinéma se fait de prime abord beaucoup plus rêvé. Tu te dis que ça a l'air beaucoup plus fun, beaucoup plus cool. Et en pensant à ça, je me dis en même temps, même si ce n'est pas toujours simple, c'est tellement aussi vivant l'EHPAD et tout ce qui peut s'y passer de cocasse, d'incongru, d'assez hallucinant parfois, où du coup on se dit, est-ce que ce n'est pas même encore plus dynamique ? Il y a encore peut-être plus de surprises, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Oui, le réel, en général, c'est toujours plus surprenant que la fiction, de toute façon. Mais c'est surtout qu'en termes de profondeur, je trouvais que dans le secteur du vieillissement, à la fois parce que les sujets sont tellement plus profonds, c'est une expérience de la vie qui est une expérience extrême de la vie, la grande vieillesse. que je n'arrivais pas à trouver dans le cinéma. Et je pense que moi, je suis en plein dans mes questionnements existentiels et j'avais besoin de profondeur. Et ça, c'était surtout travailler auprès de la vieillesse, travailler auprès des personnes âgées, ou en tout cas y réfléchir, qui, moi, me nourrissaient immensément.

  • Speaker #0

    Je comprends. Tu voulais changer le monde. On avait eu forcément cette question-là. Est-ce que tu penses que le cinéma peut changer le monde ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne sais pas s'il peut changer le monde, mais là, tu vois, ce matin, j'étais en train de lire un ouvrage de Sabine Ausha de Mercé, qui est une sociologue et qui a beaucoup travaillé sur la fiction. Et elle, elle parle de comment, grâce à la fiction, la fiction a cet effet de transformation de la société, parce qu'elle permet de penser les problèmes qui sont en germe. d'y mettre de l'émotion, de les mettre en récit, et de toutes ces petites choses qu'on ressent dans la société, mais qui peut-être nous accablent, ou qu'on n'arrive pas à approcher, ou qui sont trop complexes, trop compliquées. La fiction et les scénaristes arrivent à le mettre en récit, et que ça, ça a une fonction d'anticipation et de projection, qui permet... parce que les citoyens arrivent à s'en emparer, arrivent à comprendre des problèmes complexes, à modifier la société et ses normes.

  • Speaker #0

    Je suis persuadé, ne serait-ce que par rapport à un changement culturel, tu vas voir quelque chose, se découvrir l'émotion, le fait de rêver aussi un petit peu, d'ouvrir, de voir autre chose, d'ouvrir un possible. Moi, je pense qu'il y a carrément un sujet, et puis c'était l'objet vraiment la dernière fois, mais on va passer à notre... nouvel objet, mais de se dire que le problème de l'EHPAD, c'est qu'il est complètement méconnu, voire inconnu. On ne sait pas ce que c'est. Du coup, on fantasme un petit peu sur des trucs qui n'ont pas forcément à voir et qu'à partir du moment où on rend les choses concrètes, ça peut déjà aussi changer beaucoup de choses. Tu vois, je pense à un truc qui a un petit peu de lien, mais C'est par rapport au YouTuber, par rapport à Innoxtag, à son documentaire, quand il monte, quand il escalade l'Everest. En gros, sur le coup, tu te dis qu'est-ce que c'est encore cette connerie ? Et en fait, tu te rends compte que derrière, c'est ultra profond et tout ça. Et sur un autre podcast, je l'ai entendu dire qu'il reçoit des messages de parents qui disent mes enfants, ils sont… coller toute la journée sur les jeux vidéo. Et puis là, en fait, ils disent quand est-ce qu'on va faire une rando, on voudrait faire ça. Et tu vois, moi, en fait, c'est pareil. En fait, j'ai mon fils qui a 9 ans qui me dit quand est-ce qu'on va faire le GR20 parce qu'il l'a vu dans l'épisode. Et finalement, ça fait changer un petit peu de perspective. Et je pense qu'on manque cruellement de reportages, de documentaires, de séries, de films, de tout ce qu'on veut, même peut-être de dessins animés. qui permettent de changer un petit peu notre vision de la vieillesse et du grand âge. Donc voilà, moi ça c'est mon point de vue.

  • Speaker #1

    Je suis d'accord avec toi et je le partage, et je le partage d'autant plus que même si j'en suis au traitement de mes données, comme on dit dans la recherche, donc j'en suis pas encore aux conclusions, je pense que la fiction est septième ciel auprès des aides-soignantes que j'ai rencontrées et à qui j'ai montré la série en entier. a vraiment fait évoluer leur regard. Et ça, je pense que ce sera la grande démonstration, en tout cas de ma thèse, c'est de montrer que non seulement ça fait évoluer le regard, mais de montrer comment ça le fait évoluer.

  • Speaker #0

    Du coup, est-ce que tu peux rentrer dans le détail ? En gros, comment tu vois les choses ? Qu'est-ce que tu as pu déjà mettre en place ? Quel retour ? Et puis, c'est quoi le principe de ta thèse ? En fait,

  • Speaker #1

    le principe de ma thèse, et comme ça, ça va permettre de faire le lien avec l'épisode qu'on avait fait il y a deux ans, c'est que je travaille à la fois sur la construction des représentations. Et donc, ça, c'était mon rôle de... conseillère grand âge au moment de l'écriture de la série. Et donc, comment on construisait les représentations avec les scénaristes ? Donc, Alice Vial, Clément Sazincourt et Clément Marchand. Et donc, quand tu fais des sciences de l'information et de la communication et quand tu étudies des contenus médiatiques, tu peux t'intéresser soit à la production, donc le scénario, ce que j'ai fait là, par exemple. tu peux t'intéresser au contenu, c'est-à-dire la série en elle-même, étudier un peu ex nihilo, comment tu étudies les représentations qu'il y a dans la série, sans savoir ce qui s'est passé ni à l'écriture ni à la réception. Et la troisième étape, c'est d'étudier la réception, c'est-à-dire comment un contenu est reçu par un public. Et donc moi, j'ai choisi de travailler sur deux pans, à la fois la production, c'est ce que je disais, pour travailler sur la construction des représentations à l'écriture. et comment ça se construit, et à la réception avec des aides-soignantes en début de formation. Et alors pourquoi j'ai choisi d'aller voir des aides-soignantes ? C'est que quand même, dans la série Septième Ciel, les scénaristes avaient choisi de mettre en valeur deux personnages d'aides-soignantes. Elsa, qui est une stagiaire, la petite vingtaine. Un peu perdu, qui est là par hasard, qui veut valider son stage, mais concrètement qui se comporte de façon étonnante, je dirais. Moi, c'est quelque chose qui m'avait gêné à l'écriture, mais c'est plutôt...

  • Speaker #0

    Alors, parce que du coup, moi, je la trouve génialissime. Et en fait, sans spoiler, mais un tout petit peu quand même, mais au tout début, on la voit, son réflexe en arrivant, c'est une personne âgée, endormie, qui bave un petit peu, mais voilà, pas trop, normal. Direct, c'est selfie et TikTok. Et moi, franchement, ça ne m'a pas choqué du tout. Je me suis dit, mais c'est normal. C'est le truc qu'on ne voit pas, mais c'est obligé que c'est comme ça dans la vraie vie.

  • Speaker #1

    Sûrement, moi, je trouvais qu'à l'écriture, c'était très exagéré, mais c'est le propre de la comédie. Et effectivement, quand j'ai rencontré les aides-soignantes en début de formation, et pour la plupart... Franchement, 90% ont travaillé en structure ou à domicile en tant qu'ASH ou faisant fonction. Toutes, elles disent, mais c'est la réalité. Nous, des jeunes, on en voit tout le temps des comme ça. Et en vrai, c'est là aussi où c'est un vrai bonheur d'avoir été là au moment de l'écriture, parce que ça me permet aussi, moi, de voir là où je me trompais et là où les auteurs ont décidé de suivre leur voix. Ils ont vraiment, pour eux, c'était hyper important que ce personnage soit aussi dans cette exagération très poussée de cette façon-là. Parce que c'est exactement ça qui fait réagir les aides-soignantes à la réception. Que contrairement à l'autre personnage, Karima, qui est une aide-soignante, vraiment c'est l'aide-soignante parfaite, dévouée, professionnelle, expérimentée, très juste, très calme. Le personnage de Karima fait beaucoup moins réagir. Donc finalement, en termes de recherche, elle a beaucoup moins d'intérêt que Elsa, la stagiaire qui fait tout n'importe comment. Parce que du coup, les aides-soignantes... qui sont en début de formation, encore une fois, en disant tout ce que le personnage d'Elsa fait mal, elles disent tout ce qu'il faut faire bien. Et donc là, on voit ce qui est important pour elles et qu'est-ce que ça veut dire être une bonne aide-soignante.

  • Speaker #0

    Oui, c'est clair. Non, mais oui, c'est logique. Et du coup, je comprends parce que je me dis, moi, j'ai envie de dire, oui, mais les nouveaux, c'est bien, ils vont arriver sur le circuit, donc c'est nickel qu'ils aient ce recul, en fait. peut-être un tout petit peu plus de maturité, mais je me dis, il y a quand même tous ceux qui sont en poste et pour lesquels c'est jamais négatif et mauvais de prendre un peu de recul. Mais c'est vrai que là, c'est un personnage qui correspond parfaitement. Oui,

  • Speaker #1

    ça correspond. Après, moi, c'est vrai que dans les aides-soignantes que je rencontre, alors oui, pourquoi j'ai choisi de faire ma recherche aussi en institut de formation aide-soignante, IFAS, en tout début de formation ? La première raison, c'est parce que moi, je voulais les rencontrer au moment où la norme professionnelle n'est pas trop marquée. Je ne voulais pas avoir que des postures ou des bonnes pratiques ou des choses qu'on dit parce que c'est comme ça qu'on l'a appris et qu'il faut faire. Je voulais encore qu'il y ait cette espèce de naïveté, tous ces idéaux qu'on peut avoir quand on se lance dans ce métier-là. Je voulais les toucher un peu du doigt. Ce qui est en partie une erreur de ma part, en tout cas un préjugé, parce que la plupart des aides-soignantes en début de formation que j'ai rencontrées, Donc c'est ce que je te disais, A, S, H, faisant fonction, il y en a qui ont trois mois d'expérience, il y en a d'autres qui ont 30 ans d'expérience. Donc j'avais quand même une pluralité d'expérience où clairement, non, elles n'étaient pas vierges de tout. Et le filtre de la norme professionnelle était quand même passé un peu dessus. Mais il y a quand même des idéaux qui restent. Et c'était assez beau d'aller toucher du doigt ses idéaux, mais aussi de déconstruire les postures. C'est-à-dire que moi, je les rencontre en tout début de formation, et le premier jour, après qu'on ait vu trois épisodes de la série, et assez classiquement, les premières remarques, ce ne sont que des critiques sur ce qui n'est pas réaliste dans la série, sur ce qui n'est pas bien. Il y en a plein qui disent Non, mais c'est n'importe quoi, ça ne se passe pas du tout comme ça dans la vraie vie Et c'est normal, en fait. quand tu es professionnel et que tu regardes une série qui parle de toi de ton métier encore plus quand tu es en début de formation où tu dois montrer que tu sais ou que tu es en train d'apprendre ou que tu es en train de devenir professionnel la chose la plus facile à faire c'est la critique et en fait je savais que la première séance on allait en passer par là qu'il fallait que ce soit déposé quelque part qu'on montre qu'on sait, qu'on est professionnel etc et que c'est qu'après qu'une fois que tout ça a été déposé toutes ces espèces de lieux communs, de choses qu'on a entendues, qu'il faut qu'on répète pour montrer qu'on sait, je savais que ça allait être le premier jour et qu'ensuite on allait rentrer vraiment dans l'attachement au personnage et dans les dilemmes qu'on allait pouvoir discuter.

  • Speaker #0

    Et c'est vrai que alors forcément il faut on raconte une histoire et puis il faut pour permettre de réagir il faut grossir un peu le trait, il y a sept ans. un passage où on se dit quand même où on pourrait on prend un peu cher le directeur il prend cher et du coup on pourrait se dire mince tu vas le prendre un peu pour soi et se dire bon en fait oui ok c'est de la connerie on adhère pas il y a ce côté là c'est sûr où il faut aller au delà de la remise en question et pas le prendre trop personnellement donc j'imagine c'est vrai que des gens aussi qui travaillent là depuis longtemps... ça peut faire une remise en question peut-être un petit peu trop violente. Du coup, on va se dire que c'est plus facile de mettre sous le tapis.

  • Speaker #1

    C'est intéressant ce que tu dis sur le directeur d'EHPAD. Forcément, quand tu regardes la série, tu vois ce comportement du directeur d'EHPAD. C'est la remarque que tu m'avais faite dans la fiction. Le directeur d'EHPAD, c'est toujours un peu le méchant. C'est un méchant avec des aspérités quand même. Ce n'est pas un vrai méchant parce qu'aucun personnage n'est vraiment méchant.

  • Speaker #0

    Moi, je dirais qu'en fait, il est nul.

  • Speaker #1

    Mais le fait qu'il soit nul, par exemple, à la réception avec les aides-soignantes, moi, ce que je trouve qui ressort beaucoup, c'est les attentes envers la direction. Par exemple, tu vois, elles disent qu'elles ne pourraient pas travailler à la fin de l'expérience. Est-ce que vous pourriez travailler dans cet EHPAD ? Et il y en a plein qui disent non, alors que quand même, c'est un EHPAD où les gens sont... relativement valides, on peut le dire.

  • Speaker #0

    Elle a plein de trucs sympas, il y a plein d'activités, un beau cadre de vie.

  • Speaker #1

    En revanche, elles disent non, je ne pourrai pas y travailler parce qu'il y a un problème de direction.

  • Speaker #0

    Ok. Et le problème, elle l'identifie sur quoi ?

  • Speaker #1

    Peut-être que la direction, comme tu le dis, elle est nulle, elle ne prend pas ses responsabilités, elle ne fait pas le job et elle cadre...

  • Speaker #0

    Ouais, c'est ça. En fait, il décide pas. À chaque fois, il est un peu en panique, un peu paumé. Et il décide pas, quoi.

  • Speaker #1

    Alors, après, moi, je fais... Donc, il y a effectivement ça qui pose un problème. L'autre problème qui apparaît pour elle... Encore une fois, moi, je fais du qualitatif. Le but, c'est pas de monter en généralité, mais plutôt de faire l'état de tous les discours qu'il peut y avoir sur un même sujet. C'est ça qui est passionnant, parce qu'elles sont pas d'accord, globalement. C'est autour de la direction d'EHPAD, par exemple. C'est qu'il y a quand même très ancré ce truc de ils sont là pour faire de l'argent. La seule chose qui compte pour eux, c'est de respecter les budgets. Et que nous, peu importe. Donc, il y a vraiment ce truc de lutte un peu hiérarchique qui ressort aussi. À la fois, on attend beaucoup de cadres de leur part, et c'est ça qui rassure. Mais en même temps, on met en doute leurs intentions.

  • Speaker #0

    Ok. Et comment tu gères ça ? Parce que, du coup, est-ce que tu le prends un peu comme un sujet de la sensibilisation et des représentations, ou pas ? Et comment tu peux gérer ça ?

  • Speaker #1

    C'est-à-dire, à quel niveau, comment je peux gérer ça ?

  • Speaker #0

    Dans le groupe, en fait, parce que tu vois, si tu amènes le sujet plutôt sous forme d'une posture professionnelle, de situation un peu bien traitante et tout ça, et qu'en fait, ce qui ressort, c'est l'encadrement, ça déconne, la direction, ça déconne. Est-ce que tu en parles ? Est-ce que tu recentres ? Comment tu gères ça par rapport à la dynamique de groupe ?

  • Speaker #1

    Alors ça, ça a été un vrai enjeu parce que je pense que comme je suis une ancienne directrice de maison de retraite, malheureusement, tout ce que j'entendais sur les directeurs et directrices d'EHPAD qui n'en font pas assez et qui pensent qu'à l'argent, je me suis dit Ouh, on part de loin Mais après, c'est ça aussi, c'est là où j'évolue et là où le rôle de la recherche est en tout cas pour moi plus… Je ne sais pas si c'est plus confortable, mais en tout cas, j'ai accepté ce rôle du chercheur ou de la chercheuse au moment où on fait de l'enquête. C'est une posture, à la fois je suis engagée parce que je participe et que je rigole et que je relance et que je recadre, mais je recadre d'une certaine façon, mais en même temps, je ne donne pas mon avis et je ne fais pas de la formation. Donc, quand la tension montait sur certains sujets ou que j'entends des choses qui me déplaisent, les choses qui me déplaisent, je les mets de côté parce qu'en fait, chacun a le droit d'avoir son avis. Et en plus de ça, moi, j'envisage ça plutôt comme de la discussion éthique et que je pense que j'ai été bercée par ça depuis trois ans quand même à l'Espace Éthique Île-de-France et ensuite au Centre d'éthique clinique de Cochin. Et quand les échanges montaient un peu trop, je disais non, mais le but, ce n'est pas d'atteindre le consensus. En fait, vous avez le droit de ne pas être d'accord. Et en plus de ça, vous travaillez sur des sujets où de toute façon, il n'y a pas d'avis tranché. Donc c'est normal que vous ne soyez pas d'accord et que chacun ait son avis. Et donc là, en général, ça faisait redescendre tout le monde, parce que le but, ce n'était pas de convaincre l'autre ou d'atteindre un consensus, c'était que chacun puisse s'exprimer. Et ça a été hyper bien vécu, dans le sens où j'ai été surprise, parce que là, j'ai relu tous les questionnaires anonymes que j'ai fait remplir à la fin. Je ne sais pas trop si je vais les exploiter parce que l'écrit, on récupère beaucoup moins de choses et ça a moins d'intérêt. Mais en revanche, je leur demande comment avez-vous vécu ces trois jours, parce qu'à chaque fois, je restais trois jours. Et ce qui ressort beaucoup, c'est le plaisir de cette conversation. Et ce qui ressort aussi, c'est que cette conversation, elle n'était pas dans le débat ou dans l'opposition, mais elles disent... On a aimé discuter, de voir que chacun avait un point de vue différent, de comparer nos points de vue. Et ce n'était pas du tout vécu comme une tension ou un problème, mais plutôt comme quelque chose d'hyper positif qui ressortait de l'expérience. Pour moi, c'était une discussion éthique, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, oui. Et puis en plus, tu es dans une logique d'observation et pas de formation où tu dois amener un peu plus... Un point B, mais je comprends bien. Après, c'est là où on voit, à travers la formation, qu'en fait, le besoin... Alors, je n'ai pas le recul pour dire si c'est le besoin aujourd'hui ou si ça a toujours été, mais il y a ce besoin énorme de vider son sac, en fait. Et là, tu as un motif parfait, parce qu'en plus, c'est moins... Tu vois, on ne parle pas de soi. On parle de ce qu'on voit à la télé, donc on peut y aller un peu plus. Mais en même temps, ça permet aussi de partager avec des gens qui... qui ne savent pas forcément s'ils sont en tout début de formation, mais avec toi et avec des gens qui l'ont vécu. Donc, c'est beaucoup plus fort.

  • Speaker #1

    Et moi, du coup, j'avais quand même deux limites. À la fois, moi, je n'étais pas là pour faire de la formation. Et donc, il ne faut pas que ça rentre en porte à faux avec les formateurs qui sont là, eux, à l'année et c'est eux qui vont former. Donc, il ne fallait pas non plus que j'amène des informations qui allaient contredire ce qu'ils allaient dire après. Donc moi, c'est pour ça aussi que je suis restée très en retrait par rapport à ça. Et puis, je crois que c'est comme tu dis, il faut qu'il y ait des espaces où les gens puissent s'exprimer sans qu'on les reprenne ou qu'on les reforme. Et il y avait une régulation par le groupe, vu que les plus expérimentés, en général, n'étaient pas forcément d'accord et qu'il faut faire confiance au groupe. Mais quand même, à la fin, on fait une conclusion. C'est là où je diffuse le dernier épisode et où on se quitte. Donc, on sent qu'il y a toujours aussi une difficulté à se quitter. C'est assez touchant. Mais je leur dis quand même, parce qu'il y a deux choses qui sont en question et qui reviennent régulièrement. C'est la liberté d'aller et venir et le droit à l'intimité. Et qu'à la fin, quand même, je me permets, je le fais devant tout le monde. Et je leur dis, bon, vous avez tous des avis différents, et puis vous allez travailler avec vos formateurs et formatrices, et vous verrez bien ce qu'il en est. Mais en revanche, il y a deux points que vous soulevez, sur la liberté d'aller et venir, sur le fait que les résidents aillent sur la plage comme ça, qu'il faudrait peut-être les fouiller à l'entrée, qu'il faut toujours dire où on va. Et il y a un autre sujet sur le droit à l'intimité, sur le fait que... Il faut le dire aux enfants, si les personnes ont des troubles cognitifs, bref, toutes ces tensions-là. Et je leur dis, en fait, ça, c'est quand même des droits fondamentaux. Et à partir du moment où vous venez les mettre en question, où vous venez les réduire, il y a un vrai sujet. Le droit à l'intimité, c'est un droit fondamental, c'est la base. Donc, en fait, automatiquement, non, il ne faut pas prévenir les enfants, c'est plutôt le contraire. C'est se poser la question, à la limite, de si on le dit ou pas, c'est une question qui est légitime, mais ce n'est pas automatique de le dire aux enfants parce que les résidents ont des troubles cognitifs. Et donc j'essaye un peu de les faire aller comme ça sur les libertés qu'on supprime assez rapidement pour leur dire, en fait non, la liberté, vous n'avez pas le choix, elle est là, vous avez le droit de la discuter, mais en fait, n'oubliez pas qu'elle est là à la base.

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr. Et c'est là où on est dans l'éthique, la réflexion. Et c'est un support qui permet de bien imager. Et ça, c'est cool. Au niveau des rencontres, du coup, tu disais que c'était trois jours d'échange. Donc, pour passer les... C'est quoi ? C'est neuf ou dix épisodes ? Il y a à peu près dix heures.

  • Speaker #1

    Dix épisodes, mais c'est dix épisodes de 26 minutes. Donc, ça fait trois heures et demie de projection.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est vrai.

  • Speaker #1

    Ouais, ça va assez vite et ça c'est très précieux. Je ne me rendais pas encore compte quand on s'est rencontré la dernière fois de la pépite que j'avais entre les mains avec la série Septième Ciel. A la fois parce que c'est de la comédie et pour aborder ces sujets-là, mine de rien comme tu disais, en fait si j'avais proposé un drame, je pense que ça aurait été autrement plus dur. Tandis que là, la comédie permet de rentrer dans les sujets assez facilement et avec une certaine distance. tout en s'attachant au fur et à mesure, ce qui permet aussi de faire de l'éthique parce qu'on est engagé avec les personnages et on est attaché à eux. Et les épisodes sont très rythmés. Et donc, moi, j'en montrais à peu près trois par jour parce que je me suis rendu compte, j'avais fait un terrain exploratoire, qu'au-delà de trois, je perdais tout le monde. Enfin, plus d'une heure de projection, c'est hyper difficile. Surtout dans des conditions qui sont très... qui sont très artificielles, en fait. Les séries, tu les regardes chez toi, tranquille, ou alors en couple. Il y a plein de pratiques différentes des séries, mais tu ne regardes pas des séries dans une classe de 30 personnes, avec tes formateurs à côté, et tu n'en discutes pas après, dans la vraie vie. Donc, il y avait ce truc-là de regarder la série tous ensemble, dans une salle de cours, qui était quand même une expérience un peu particulière.

  • Speaker #0

    Oui, je me doute. Tu faisais les épisodes... consécutifs ou tu débriefes chaque épisode et où est-ce que tu les découpes même ?

  • Speaker #1

    Alors, je faisais trois par trois. Moi, c'est la solution que j'ai trouvée. Et après, du coup, les questions qui suivaient... Et après, je voyais en petits groupes, en focus groupes, où on discutait des épisodes qu'on avait vus tous ensemble le matin. Et surtout, j'ai gardé le dernier épisode pour la conclusion. Je voulais pas qu'on en parle, parce que je me suis rendue compte quand j'avais fait mon terrain exploratoire, où j'avais montré les 4 derniers épisodes à la suite, déjà que c'était trop long, 4 épisodes, mais qu'en plus de ça, il y a quand même... comment dire... La logique des séries fonctionne à plein, c'est-à-dire que quand on s'est attaché au personnage, et ben en fait on est triste de l'équité, et que ça coupe les jambes. Si je montrais le dernier épisode, en fait, les gens allaient plus parler. Parce qu'ils sont tristes d'avoir quitté les personnages, parce qu'on ne peut plus imaginer ce qui va leur arriver ensuite.

  • Speaker #0

    Et que quand même, tout le focus group, s'il fonctionne, c'est parce qu'on imagine la suite et qu'on fait des hypothèses sur la suite. Et donc, c'est pour ça que le dernier épisode, finalement, j'ai décidé de le garder pour la conclusion. Et c'est le dernier moment où on se voit et tout le monde attend avec impatience le dernier épisode. Et après, on se dit au revoir et chacun retourne à sa vie. C'est une façon de fermer l'expérience.

  • Speaker #1

    Ouais, pendant trois jours. Tu as vu combien de groupes ?

  • Speaker #0

    J'ai vu 14 groupes.

  • Speaker #1

    C'est vrai, quand même.

  • Speaker #0

    80 personnes interrogées.

  • Speaker #1

    OK, 14 groupes. Et du coup, ça rentrait dans un programme IFAS. C'est ça. OK. Au final, qu'est-ce que tu retiens de ces groupes ? Qu'est-ce que les étudiants t'ont retenu ? Est-ce que tu as eu des retours après ? En gros, qu'est-ce que tu as vu ? Qu'est-ce que ça a pu changer ?

  • Speaker #0

    Il y a quelque chose qui change et que j'avais sous-estimé. C'est effectivement le sujet de la sexualité des personnes âgées. C'est vraiment un espèce de point nodal pour faire évoluer la représentation qu'on a des personnes âgées. Je suis arrivée... Pour moi, tout le monde, c'était mon préjugé en tout cas, je savais que c'était un sujet tabou la sexualité des personnes âgées en établissement, mais pour autant, tout le monde savait que ça existait. Et donc là, je me suis retrouvée avec des discours qui étaient très différents les uns des autres, avec certaines personnes qui ne savaient pas que ça existait, avec d'autres personnes qui pensaient que c'était interdit si les gens n'étaient pas mariés. avec d'autres personnes au contraire qui étaient individuellement hyper enthousiastes à l'idée que ça existe et qu'il fallait vachement protéger ça. Et donc je me suis retrouvée avec une pluralité de discours véritablement autour de ce sujet-là, la sexualité c'est vraiment le sujet important de la série. Mais ce que je trouve assez passionnant, c'est que la sexualité des personnes âgées semble être un peu un impensé. C'est comme si ça n'existait pas véritablement. Et que là, à la découverte de la série, on se rend compte que ça existe. Et donc, c'est déjà un apprentissage en soi. Encore une fois, pas de généralité, pas tout le monde. Il y en a qui savent que ça existe. Mais que le fait que les personnes âgées aient une sexualité, Les fait passer d'objets de soins, où vraiment on dit qu'on veut travailler avec la personne âgée, il y a tout ce discours sur vraiment ce sont des patients, ce sont des objets de soins, il faut en prendre soin. Là, comme ils ont une sexualité et qu'ils tombent amoureux, le regard change complètement sur les personnes âgées, et d'objets de soins, ils deviennent de véritables sujets en fait. Et on ne les considère pas du tout de la même façon. Et donc, quelque part, c'est à travers cette impensée de la sexualité des personnes âgées qu'il y a une forme d'apprentissage. Et auparavant, dans la recherche en général, sur les séries qui nous permettent d'apprendre des choses, typiquement, c'était Dominique Pasquet qui a fait un travail sur Hélène et les garçons qui était très regardé par les petites filles pré-adolescentes. pour une éducation sentimentale, pour apprendre comment on allait faire son premier baiser, comment on abordait quelqu'un pour lui dire qu'on l'aimait, pour déclarer son amour, etc. Mais tout ça, ce ne sont pas des choses impensées, puisqu'on sait qu'elles existent, et on va voir une série pour apprendre. Tandis que là, on part d'une série où quelque part, on ne sait pas que ça existe, et on découvre avec la série que ça existe. Et donc, le mode d'apprentissage se fait à partir de quelque chose qu'on ne pensait pas véritablement exister. Alors après, tu vois ce que je veux dire ? Après, la richesse, et moi, c'est ça que j'ai adoré, c'est que certes, je ne fais pas de la formation, mais en revanche, j'en ai eu fait. Donc, j'ai déjà été formatrice, que j'ai fait de l'éthique. Et que, parce que aussi, je retiens tous les prénoms et que je pense que j'ai à cœur que ce soit un climat de confiance et que les gens puissent s'exprimer, qu'ils puissent aussi dire des âneries. puissent les dire librement sans avoir un jugement sur eux. Tout le monde se sentait libre de s'exprimer et notamment les plus anciennes et les plus expérimentées qui venaient en fait partager leurs pratiques, leurs anecdotes. Et dans les plus jeunes, il y en a certaines qui venaient partager des anecdotes autour du sujet de la sexualité. mais dont on sentait que c'était un peu réactivé et remis en question au moment où elle venait le proposer dans le focus group. Que par exemple, il y en a une qui racontait qu'elle était dans un établissement, et donc là tu vas voir que c'est un truc assez classique, que peut-être que tu auras déjà rencontré, mais le cas classique c'est que tu as deux personnes âgées qui ont des troubles cognitifs, qui commencent à se rapprocher, mais comme ça peut... peut être dangereux, qu'il y a un risque, on décide, par exemple, de les séparer des tâches, misant sur le fait qu'ils ne se souviendront pas exactement où l'un et l'autre sont. Et donc, on les sépare des tâches. Dans la vraie vie, parfois, ils se retrouvent. En tout cas, moi, ça m'est arrivé, j'étais extrêmement surprise. J'ai appris quelque chose à ce moment-là. Mais donc, là, par exemple, cette jeune aide-soyante en début de formation, Reraconter cette anecdote à un moment opportun pour venir le remettre en question, pour se dire, mais en fait, pourquoi on les a séparés à ce moment-là ? Qu'est-ce qui faisait de mal ? Et donc, venir re-questionner toute la question du risque. C'est comme si le risque, parce qu'il y avait un risque supposé, on réfléchissait même plus au droit.

  • Speaker #1

    Là, tu es clairement dans la question éthique, en fait. Donc, c'est... C'est 100% éthique. Mais ce qui est super intéressant, je trouve, c'est que cet angle bien-traitance, qui veut tout et rien dire, mais qui veut surtout tout dire, l'aborder avec un sujet aussi précis, ça permet de rendre les choses aussi concrètes. Et je trouve ça super intéressant. En fait, l'idée, c'est d'avoir un moyen différent d'entrer dans le sujet et puis d'amener les équipes, les professionnels, d'amener les gens, en fait, à... à regarder les choses juste un petit peu différemment, à faire ce petit pas de côté et ça c'est super.

  • Speaker #0

    Oui, et l'avantage avec une série, c'est qu'à la fois t'es attaché au personnage, c'est comme si c'était des vrais gens, mais tu sais que c'est pas des vrais gens, et en même temps t'es à distance parce que tu sais que c'est de la fiction. Donc, tandis que dans la vraie vie, il y a... c'est plus incarné, t'es toujours plus investi parce que c'est un résident que tu connais, parce que tu connais sa famille, parce que tu sens les choses de cette façon-là. Là, quand même, elles sont beaucoup moins engagées, c'est pas des vrais gens. Mais pour autant, elles sont quand même attachées, ce qui fait qu'elles s'engagent dans la discussion politique.

  • Speaker #1

    Même que ce soit avec des collègues, c'est dur, quoi. Surtout si c'est un sujet qui nous concerne, par rapport à un résident, une situation où... Il faut faire un choix, il faut décider. Et là, c'est difficile. Donc, ça permet de prendre un recul plus facile et d'amener aussi sur d'autres sujets.

  • Speaker #0

    Pas de décision à prendre à la fin dans le cas de la recherche. Donc, je pense qu'il y a moins d'enjeux.

  • Speaker #1

    OK. La prochaine étape ou les prochaines étapes, qu'est-ce que... Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que tu vois ? Est-ce qu'il y aura d'autres recherches ? Déjà, est-ce que tu peux nous dire des choses par rapport à la saison 2 ? S'il y a une saison 2, mais je crois que tu m'en avais parlé, donc...

  • Speaker #0

    Oui, il y a une saison 2, elle vient de sortir, puisqu'à chaque fois qu'on se voit, Arnaud, il y a une saison qui sort. Super. Et donc la saison 2 est sortie, on est au cœur de l'actualité. Elle est sortie sur Ciné+, OCS, donc pour les gens qui ont le canal plus...

  • Speaker #1

    C'est déjà OCS, ouais.

  • Speaker #0

    Et donc là, l'histoire est complètement... Les deux saisons peuvent se voir séparément, mais il y a quand même une évolution des personnages qu'on retrouve. Mais donc là, ils sont partis de l'EHPAD. Entre-temps, Jacques est mort. Et donc Rose va devoir se reconstruire. Se reconstruire et en plus de ça, faire vivre une histoire qu'elle avait à la fois du grand. C'était de construire un habitat partagé, autogéré. Une autre difficulté. Et donc là, ça va être une autre histoire autour du personnage de Rose. Ça va encore plus loin en termes de sexualité. Et moi, ce qui me fascine dans leur écriture, et parce que c'est des scénaristes hyper talentueux, c'est à quel point ils vont loin dans les possibles de l'amour. en travaillant à partir de personnages âgés ? Et comment l'âge devient aussi la condition d'une plus grande liberté ? Je ne sais pas si c'est réaliste, je ne sais pas si ce sera comme ça, comme moi-même je serai vieille. Mais en tout cas, je trouve ça bien qu'il y ait aussi ce genre de perspective pour l'avenir.

  • Speaker #1

    C'est clair que c'est plus joyeux que tout ce qu'on peut entendre tout le temps. Et c'est... Alors, j'imagine qu'il y a toujours cette pointe d'humour, mais c'est vrai qu'il y a aussi une... Oui, c'est une question de vie et de liberté, et c'est super sympa. Et c'est intéressant, moi, du coup, il faut que je m'y mette. Parce que ça m'intéresse aussi de voir comment on aborde l'habitat partagé.

  • Speaker #0

    Ça a été une grande question, et là, pour le coup, j'ai été là avec eux dès le début. Donc quand ils ont commencé à écrire parce qu'ils avaient envie d'écrire sur la coloc de personnes âgées, etc. On a vu les différents modèles qui existaient dans l'habitat partagé. Est-ce que c'est autogéré ou est-ce que c'est géré par un tiers ? Est-ce que c'est privé commercial ou est-ce qu'on est plutôt sur de l'associatif ? Et de voir aussi les problèmes qu'il y avait dans l'habitat partagé. Le vivre ensemble. quand quelqu'un décède, comment il est remplacé, comment on recrute les nouvelles personnes, est-ce qu'on fait du recrutement, comment on gère les conflits ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, il y a tout un fantasme aussi avec l'habitat partagé, de se dire que ça pourrait être la réponse qu'on a complètement oubliée, de se dire que c'est simple, on ferme les Ehpad et on fait des colloques et tout va bien. Ça pourrait dans certains cas, mais à mon avis pas tous. un peu le début, donc c'est intéressant aussi de voir comment c'est abordé, et puis juste d'en parler, parce qu'il y a certainement plein de belles choses à prendre, mais il faut en parler, il faut tester des trucs, et puis voilà.

  • Speaker #0

    La fiction l'a testé.

  • Speaker #1

    Et du coup, avec la fiction, on va pouvoir réfléchir un peu. Nickel. Qu'est-ce qu'on peut dire aux personnes qui sont intéressées ? Alors, la thèse, c'est pas pour tout de suite, la série. Par contre, c'est pour tout de suite. OCS, tu l'as dit. Comment on peut conclure ?

  • Speaker #0

    Canal+, je précise. Pour les gens qui ont Canal+, ils peuvent le trouver dans leur abonnement.

  • Speaker #1

    Ok, cool. Pour toi, c'est quoi la prochaine étape ?

  • Speaker #0

    Moi, la prochaine étape, c'est une étape d'écriture. Parce qu'écrire, c'est penser. Et que là, j'ai été pendant des mois avec les voix des aides-soignantes en début de formation, avec leur rire, leur discussion, etc. Que j'en ai tiré des pages et des pages de conversation. Mais que maintenant, il faut que tout ça ait du sens et de voir exactement où ça résonne. Donc on va rentrer dans le temps de l'analyse et de l'écriture. Et pour une soutenance qui est prévue en juin 2026. Bon,

  • Speaker #1

    un an et demi, le temps de faire un troisième épisode, peut-être autour d'une saison 3 où tu pourras nous raconter à ce sujet. Merci Manon, et puis à bientôt.

  • Speaker #0

    Merci Arnaud.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté l'épisode jusqu'au bout, j'espère que le sujet vous a plu et qu'il vous inspire. Pour m'aider à faire connaître le podcast, abonnez-vous sur votre plateforme d'écoute préférée. ou notez-le et partagez-le sur vos réseaux sociaux. N'hésitez pas à me contacter sur LinkedIn pour ma proposition de sujet. Bonne journée et à bientôt sur le podcast des établissements de médicaux sociaux.

Description


Dans cet épisode, je retrouve Manon Cerdan, ancienne directrice d’EHPAD et aujourd’hui chercheuse, pour parler de sa thèse et de la série Septième Ciel. Cette comédie, qui raconte avec humour et émotion la vie en EHPAD, sert à ouvrir des discussions importantes avec des aides-soignants en formation.


Manon utilise la série pour travailler les représentations de la vieillesse auprès d'étudiants en école d'aides-soignants.


👉 Au programme :

  • La fiction qui fait réfléchir : comment une série peut changer notre regard sur la vieillesse et les métiers du soin.

  • Les réactions des soignants : ce qu’ils retiennent des personnages de la série et ce que ça leur apprend sur leur métier.

  • Les grands sujets discutés : la liberté des résidents, leur intimité, et même la sexualité des personnes âgées, un sujet encore tabou mais essentiel.

  • Le rôle de la direction en EHPAD : attentes, critiques et incompréhensions autour de la figure du directeur, souvent caricaturée dans la fiction.

  • Les dynamiques de groupe en formation : entre échanges constructifs et déconstruction des préjugés grâce au prisme de la série.

  • Un aperçu de la saison 2 : cette fois, on explore les défis et les belles idées autour de l’habitat partagé pour les personnes âgées.


✨ Un épisode qui montre comment une série peut aider à mieux comprendre et améliorer la vie en établissement. Bonne écoute !


🎧 Disponible sur toutes les plateformes. Abonnez-vous, partagez et laissez une note pour soutenir le podcast ! 🙌


Vous pouvez contacter Manon du Linkedin et regarder la série (avec abonnement)


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et bienvenue sur le podcast des établissements médico-sociaux. Je m'appelle Arnaud Chevalier et après avoir été directeur d'EHPAD pendant 8 ans, j'aide les établissements de santé à adopter les meilleures innovations pour simplifier et améliorer leur quotidien. J'écris ce podcast pour partager les belles expériences portées par des gens passionnés. Avant de commencer, si vous appréciez ce podcast, vous pouvez vous abonner pour ne rater aucun épisode. Et encore mieux, mettre une note 5 étoiles sur Apple Podcasts et le partager à vos collègues. Sur ce, bon épisode. Bonjour à tous, aujourd'hui je discute avec Manon Cerdan. On a déjà fait un épisode en janvier 2023, donc on arrive à la suite, quasiment deux ans plus tard, même deux ans plus tard le temps de le diffuser. On avait parlé de la série 7e ciel, sur laquelle tu avais plus que collaboré, tu avais beaucoup participé, et notamment pour faire en sorte que ce soit une série qui représente la manière de la... possible le fonctionnement et le quotidien d'un établissement. Moi, franchement, c'est une série que j'ai vraiment adorée, que j'ai dévorée, mais en voyant des trucs, tout ça, j'ai beaucoup risqué, beaucoup aussi des démotions sur des trucs, sur plein de sujets, je me suis vu. Donc, c'est vraiment une série qu'il faut recommander à tous les gens qui sont placés de près ou de loin dans un établissement. Et depuis la sortie de cette série, toi tu t'es engagé sur un travail de recherche dans le cadre d'une thèse pour aller rencontrer les aides-soignantes, mais tu vas nous l'expliquer beaucoup mieux. Et l'idée c'est qu'est-ce qu'on fait d'une série qui montre la vie d'un établissement, qu'est-ce que ça peut apporter en gros pour les établissements et surtout pour les écrans. On va aborder ce sujet-là, tu vas pouvoir nous expliquer tout ça.

  • Speaker #1

    pour changer le monde, même si c'était plutôt plus complexe. Les images étaient capables d'auditer le regard. Donc ça, j'ai rejoint. Puis assez rapidement, dans mes 20 ans, j'avais 25 ans, j'ai décidé de creuser un peu cette envie que j'avais de travailler dans la vie de l'ES, parce que j'avais une grande question existentielle, qui est comment on fait pour rester libre jusqu'à la fin de sa vie. Et donc là, je suis passée par l'EHPAD, la direction d'EHPAD notamment. Une expérience qui a été fondatrice mais traumatisante pour moi. Ensuite, j'ai trouvé mon salut dans l'accueil familial pour les personnes âgées où je m'occupais des sujets de formation. Et puis il est arrivé ce moment où j'ai décidé de mettre en musique ces deux sujets d'intérêt dans ma vie, qui sont le cinéma et la vieillesse, en montant un projet de recherche en sciences de l'information et de la communication. Donc ça prend la forme d'une thèse aujourd'hui. Je suis financée pour cela par l'université Paris Panthéon-Assas. Je travaille sur la représentation de la vieillesse dans la fiction, et spécifiquement sur la série Septième Ciel, avec des aides-soignantes en début de formation.

  • Speaker #0

    Ok, alors, il y a plein de trucs sur lesquels je pourrais revenir. On l'a déjà abordé un petit peu la dernière fois, mais c'est vrai que toi, tu as eu un parcours aussi. de directrice, juste à un moment, comment ça vient, comment ça t'est venu ? Pourquoi ? Parce que si tu es dans le cinéma, comment tu te dis je vais aller bosser dans un Ehpad ?

  • Speaker #1

    En fait, ce qu'il y a, c'est que les deux étaient là dès le début. Ce qu'il y a, c'est que quand j'avais 20 ans, que j'étais à ce moment-là en école de commerce, j'avais quand même envie de me faire rêver et que la vieillesse allait tout de suite dans la vieillesse. J'avoue que ça me faisait probablement un peu peur. que le cinéma, voilà, j'avais envie de tenter ma chance et d'y aller. Et donc, j'avais ces deux-là au début. J'ai commencé par le cinéma. Assez vite, je me suis rendue compte que je préférais être une spectatrice plutôt que d'être dans les coulisses. Ça m'intéressait moins intellectuellement. Et donc, c'est pour ça que je suis allée vers la vieillesse, qui avait sa même place dans ma vie et dans mes intérêts. Et j'étais un peu plus mature. Et donc voilà, assez naturellement, quand j'ai quitté le cinéma, je me suis dit, bon, j'ai vu ce que j'avais à voir dans le cinéma, il est temps de passer à autre chose. Et finalement, la vieillesse, intellectuellement, professionnellement, existentiellement, ça m'apporte beaucoup plus.

  • Speaker #0

    C'est vrai que le cinéma se fait de prime abord beaucoup plus rêvé. Tu te dis que ça a l'air beaucoup plus fun, beaucoup plus cool. Et en pensant à ça, je me dis en même temps, même si ce n'est pas toujours simple, c'est tellement aussi vivant l'EHPAD et tout ce qui peut s'y passer de cocasse, d'incongru, d'assez hallucinant parfois, où du coup on se dit, est-ce que ce n'est pas même encore plus dynamique ? Il y a encore peut-être plus de surprises, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Oui, le réel, en général, c'est toujours plus surprenant que la fiction, de toute façon. Mais c'est surtout qu'en termes de profondeur, je trouvais que dans le secteur du vieillissement, à la fois parce que les sujets sont tellement plus profonds, c'est une expérience de la vie qui est une expérience extrême de la vie, la grande vieillesse. que je n'arrivais pas à trouver dans le cinéma. Et je pense que moi, je suis en plein dans mes questionnements existentiels et j'avais besoin de profondeur. Et ça, c'était surtout travailler auprès de la vieillesse, travailler auprès des personnes âgées, ou en tout cas y réfléchir, qui, moi, me nourrissaient immensément.

  • Speaker #0

    Je comprends. Tu voulais changer le monde. On avait eu forcément cette question-là. Est-ce que tu penses que le cinéma peut changer le monde ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne sais pas s'il peut changer le monde, mais là, tu vois, ce matin, j'étais en train de lire un ouvrage de Sabine Ausha de Mercé, qui est une sociologue et qui a beaucoup travaillé sur la fiction. Et elle, elle parle de comment, grâce à la fiction, la fiction a cet effet de transformation de la société, parce qu'elle permet de penser les problèmes qui sont en germe. d'y mettre de l'émotion, de les mettre en récit, et de toutes ces petites choses qu'on ressent dans la société, mais qui peut-être nous accablent, ou qu'on n'arrive pas à approcher, ou qui sont trop complexes, trop compliquées. La fiction et les scénaristes arrivent à le mettre en récit, et que ça, ça a une fonction d'anticipation et de projection, qui permet... parce que les citoyens arrivent à s'en emparer, arrivent à comprendre des problèmes complexes, à modifier la société et ses normes.

  • Speaker #0

    Je suis persuadé, ne serait-ce que par rapport à un changement culturel, tu vas voir quelque chose, se découvrir l'émotion, le fait de rêver aussi un petit peu, d'ouvrir, de voir autre chose, d'ouvrir un possible. Moi, je pense qu'il y a carrément un sujet, et puis c'était l'objet vraiment la dernière fois, mais on va passer à notre... nouvel objet, mais de se dire que le problème de l'EHPAD, c'est qu'il est complètement méconnu, voire inconnu. On ne sait pas ce que c'est. Du coup, on fantasme un petit peu sur des trucs qui n'ont pas forcément à voir et qu'à partir du moment où on rend les choses concrètes, ça peut déjà aussi changer beaucoup de choses. Tu vois, je pense à un truc qui a un petit peu de lien, mais C'est par rapport au YouTuber, par rapport à Innoxtag, à son documentaire, quand il monte, quand il escalade l'Everest. En gros, sur le coup, tu te dis qu'est-ce que c'est encore cette connerie ? Et en fait, tu te rends compte que derrière, c'est ultra profond et tout ça. Et sur un autre podcast, je l'ai entendu dire qu'il reçoit des messages de parents qui disent mes enfants, ils sont… coller toute la journée sur les jeux vidéo. Et puis là, en fait, ils disent quand est-ce qu'on va faire une rando, on voudrait faire ça. Et tu vois, moi, en fait, c'est pareil. En fait, j'ai mon fils qui a 9 ans qui me dit quand est-ce qu'on va faire le GR20 parce qu'il l'a vu dans l'épisode. Et finalement, ça fait changer un petit peu de perspective. Et je pense qu'on manque cruellement de reportages, de documentaires, de séries, de films, de tout ce qu'on veut, même peut-être de dessins animés. qui permettent de changer un petit peu notre vision de la vieillesse et du grand âge. Donc voilà, moi ça c'est mon point de vue.

  • Speaker #1

    Je suis d'accord avec toi et je le partage, et je le partage d'autant plus que même si j'en suis au traitement de mes données, comme on dit dans la recherche, donc j'en suis pas encore aux conclusions, je pense que la fiction est septième ciel auprès des aides-soignantes que j'ai rencontrées et à qui j'ai montré la série en entier. a vraiment fait évoluer leur regard. Et ça, je pense que ce sera la grande démonstration, en tout cas de ma thèse, c'est de montrer que non seulement ça fait évoluer le regard, mais de montrer comment ça le fait évoluer.

  • Speaker #0

    Du coup, est-ce que tu peux rentrer dans le détail ? En gros, comment tu vois les choses ? Qu'est-ce que tu as pu déjà mettre en place ? Quel retour ? Et puis, c'est quoi le principe de ta thèse ? En fait,

  • Speaker #1

    le principe de ma thèse, et comme ça, ça va permettre de faire le lien avec l'épisode qu'on avait fait il y a deux ans, c'est que je travaille à la fois sur la construction des représentations. Et donc, ça, c'était mon rôle de... conseillère grand âge au moment de l'écriture de la série. Et donc, comment on construisait les représentations avec les scénaristes ? Donc, Alice Vial, Clément Sazincourt et Clément Marchand. Et donc, quand tu fais des sciences de l'information et de la communication et quand tu étudies des contenus médiatiques, tu peux t'intéresser soit à la production, donc le scénario, ce que j'ai fait là, par exemple. tu peux t'intéresser au contenu, c'est-à-dire la série en elle-même, étudier un peu ex nihilo, comment tu étudies les représentations qu'il y a dans la série, sans savoir ce qui s'est passé ni à l'écriture ni à la réception. Et la troisième étape, c'est d'étudier la réception, c'est-à-dire comment un contenu est reçu par un public. Et donc moi, j'ai choisi de travailler sur deux pans, à la fois la production, c'est ce que je disais, pour travailler sur la construction des représentations à l'écriture. et comment ça se construit, et à la réception avec des aides-soignantes en début de formation. Et alors pourquoi j'ai choisi d'aller voir des aides-soignantes ? C'est que quand même, dans la série Septième Ciel, les scénaristes avaient choisi de mettre en valeur deux personnages d'aides-soignantes. Elsa, qui est une stagiaire, la petite vingtaine. Un peu perdu, qui est là par hasard, qui veut valider son stage, mais concrètement qui se comporte de façon étonnante, je dirais. Moi, c'est quelque chose qui m'avait gêné à l'écriture, mais c'est plutôt...

  • Speaker #0

    Alors, parce que du coup, moi, je la trouve génialissime. Et en fait, sans spoiler, mais un tout petit peu quand même, mais au tout début, on la voit, son réflexe en arrivant, c'est une personne âgée, endormie, qui bave un petit peu, mais voilà, pas trop, normal. Direct, c'est selfie et TikTok. Et moi, franchement, ça ne m'a pas choqué du tout. Je me suis dit, mais c'est normal. C'est le truc qu'on ne voit pas, mais c'est obligé que c'est comme ça dans la vraie vie.

  • Speaker #1

    Sûrement, moi, je trouvais qu'à l'écriture, c'était très exagéré, mais c'est le propre de la comédie. Et effectivement, quand j'ai rencontré les aides-soignantes en début de formation, et pour la plupart... Franchement, 90% ont travaillé en structure ou à domicile en tant qu'ASH ou faisant fonction. Toutes, elles disent, mais c'est la réalité. Nous, des jeunes, on en voit tout le temps des comme ça. Et en vrai, c'est là aussi où c'est un vrai bonheur d'avoir été là au moment de l'écriture, parce que ça me permet aussi, moi, de voir là où je me trompais et là où les auteurs ont décidé de suivre leur voix. Ils ont vraiment, pour eux, c'était hyper important que ce personnage soit aussi dans cette exagération très poussée de cette façon-là. Parce que c'est exactement ça qui fait réagir les aides-soignantes à la réception. Que contrairement à l'autre personnage, Karima, qui est une aide-soignante, vraiment c'est l'aide-soignante parfaite, dévouée, professionnelle, expérimentée, très juste, très calme. Le personnage de Karima fait beaucoup moins réagir. Donc finalement, en termes de recherche, elle a beaucoup moins d'intérêt que Elsa, la stagiaire qui fait tout n'importe comment. Parce que du coup, les aides-soignantes... qui sont en début de formation, encore une fois, en disant tout ce que le personnage d'Elsa fait mal, elles disent tout ce qu'il faut faire bien. Et donc là, on voit ce qui est important pour elles et qu'est-ce que ça veut dire être une bonne aide-soignante.

  • Speaker #0

    Oui, c'est clair. Non, mais oui, c'est logique. Et du coup, je comprends parce que je me dis, moi, j'ai envie de dire, oui, mais les nouveaux, c'est bien, ils vont arriver sur le circuit, donc c'est nickel qu'ils aient ce recul, en fait. peut-être un tout petit peu plus de maturité, mais je me dis, il y a quand même tous ceux qui sont en poste et pour lesquels c'est jamais négatif et mauvais de prendre un peu de recul. Mais c'est vrai que là, c'est un personnage qui correspond parfaitement. Oui,

  • Speaker #1

    ça correspond. Après, moi, c'est vrai que dans les aides-soignantes que je rencontre, alors oui, pourquoi j'ai choisi de faire ma recherche aussi en institut de formation aide-soignante, IFAS, en tout début de formation ? La première raison, c'est parce que moi, je voulais les rencontrer au moment où la norme professionnelle n'est pas trop marquée. Je ne voulais pas avoir que des postures ou des bonnes pratiques ou des choses qu'on dit parce que c'est comme ça qu'on l'a appris et qu'il faut faire. Je voulais encore qu'il y ait cette espèce de naïveté, tous ces idéaux qu'on peut avoir quand on se lance dans ce métier-là. Je voulais les toucher un peu du doigt. Ce qui est en partie une erreur de ma part, en tout cas un préjugé, parce que la plupart des aides-soignantes en début de formation que j'ai rencontrées, Donc c'est ce que je te disais, A, S, H, faisant fonction, il y en a qui ont trois mois d'expérience, il y en a d'autres qui ont 30 ans d'expérience. Donc j'avais quand même une pluralité d'expérience où clairement, non, elles n'étaient pas vierges de tout. Et le filtre de la norme professionnelle était quand même passé un peu dessus. Mais il y a quand même des idéaux qui restent. Et c'était assez beau d'aller toucher du doigt ses idéaux, mais aussi de déconstruire les postures. C'est-à-dire que moi, je les rencontre en tout début de formation, et le premier jour, après qu'on ait vu trois épisodes de la série, et assez classiquement, les premières remarques, ce ne sont que des critiques sur ce qui n'est pas réaliste dans la série, sur ce qui n'est pas bien. Il y en a plein qui disent Non, mais c'est n'importe quoi, ça ne se passe pas du tout comme ça dans la vraie vie Et c'est normal, en fait. quand tu es professionnel et que tu regardes une série qui parle de toi de ton métier encore plus quand tu es en début de formation où tu dois montrer que tu sais ou que tu es en train d'apprendre ou que tu es en train de devenir professionnel la chose la plus facile à faire c'est la critique et en fait je savais que la première séance on allait en passer par là qu'il fallait que ce soit déposé quelque part qu'on montre qu'on sait, qu'on est professionnel etc et que c'est qu'après qu'une fois que tout ça a été déposé toutes ces espèces de lieux communs, de choses qu'on a entendues, qu'il faut qu'on répète pour montrer qu'on sait, je savais que ça allait être le premier jour et qu'ensuite on allait rentrer vraiment dans l'attachement au personnage et dans les dilemmes qu'on allait pouvoir discuter.

  • Speaker #0

    Et c'est vrai que alors forcément il faut on raconte une histoire et puis il faut pour permettre de réagir il faut grossir un peu le trait, il y a sept ans. un passage où on se dit quand même où on pourrait on prend un peu cher le directeur il prend cher et du coup on pourrait se dire mince tu vas le prendre un peu pour soi et se dire bon en fait oui ok c'est de la connerie on adhère pas il y a ce côté là c'est sûr où il faut aller au delà de la remise en question et pas le prendre trop personnellement donc j'imagine c'est vrai que des gens aussi qui travaillent là depuis longtemps... ça peut faire une remise en question peut-être un petit peu trop violente. Du coup, on va se dire que c'est plus facile de mettre sous le tapis.

  • Speaker #1

    C'est intéressant ce que tu dis sur le directeur d'EHPAD. Forcément, quand tu regardes la série, tu vois ce comportement du directeur d'EHPAD. C'est la remarque que tu m'avais faite dans la fiction. Le directeur d'EHPAD, c'est toujours un peu le méchant. C'est un méchant avec des aspérités quand même. Ce n'est pas un vrai méchant parce qu'aucun personnage n'est vraiment méchant.

  • Speaker #0

    Moi, je dirais qu'en fait, il est nul.

  • Speaker #1

    Mais le fait qu'il soit nul, par exemple, à la réception avec les aides-soignantes, moi, ce que je trouve qui ressort beaucoup, c'est les attentes envers la direction. Par exemple, tu vois, elles disent qu'elles ne pourraient pas travailler à la fin de l'expérience. Est-ce que vous pourriez travailler dans cet EHPAD ? Et il y en a plein qui disent non, alors que quand même, c'est un EHPAD où les gens sont... relativement valides, on peut le dire.

  • Speaker #0

    Elle a plein de trucs sympas, il y a plein d'activités, un beau cadre de vie.

  • Speaker #1

    En revanche, elles disent non, je ne pourrai pas y travailler parce qu'il y a un problème de direction.

  • Speaker #0

    Ok. Et le problème, elle l'identifie sur quoi ?

  • Speaker #1

    Peut-être que la direction, comme tu le dis, elle est nulle, elle ne prend pas ses responsabilités, elle ne fait pas le job et elle cadre...

  • Speaker #0

    Ouais, c'est ça. En fait, il décide pas. À chaque fois, il est un peu en panique, un peu paumé. Et il décide pas, quoi.

  • Speaker #1

    Alors, après, moi, je fais... Donc, il y a effectivement ça qui pose un problème. L'autre problème qui apparaît pour elle... Encore une fois, moi, je fais du qualitatif. Le but, c'est pas de monter en généralité, mais plutôt de faire l'état de tous les discours qu'il peut y avoir sur un même sujet. C'est ça qui est passionnant, parce qu'elles sont pas d'accord, globalement. C'est autour de la direction d'EHPAD, par exemple. C'est qu'il y a quand même très ancré ce truc de ils sont là pour faire de l'argent. La seule chose qui compte pour eux, c'est de respecter les budgets. Et que nous, peu importe. Donc, il y a vraiment ce truc de lutte un peu hiérarchique qui ressort aussi. À la fois, on attend beaucoup de cadres de leur part, et c'est ça qui rassure. Mais en même temps, on met en doute leurs intentions.

  • Speaker #0

    Ok. Et comment tu gères ça ? Parce que, du coup, est-ce que tu le prends un peu comme un sujet de la sensibilisation et des représentations, ou pas ? Et comment tu peux gérer ça ?

  • Speaker #1

    C'est-à-dire, à quel niveau, comment je peux gérer ça ?

  • Speaker #0

    Dans le groupe, en fait, parce que tu vois, si tu amènes le sujet plutôt sous forme d'une posture professionnelle, de situation un peu bien traitante et tout ça, et qu'en fait, ce qui ressort, c'est l'encadrement, ça déconne, la direction, ça déconne. Est-ce que tu en parles ? Est-ce que tu recentres ? Comment tu gères ça par rapport à la dynamique de groupe ?

  • Speaker #1

    Alors ça, ça a été un vrai enjeu parce que je pense que comme je suis une ancienne directrice de maison de retraite, malheureusement, tout ce que j'entendais sur les directeurs et directrices d'EHPAD qui n'en font pas assez et qui pensent qu'à l'argent, je me suis dit Ouh, on part de loin Mais après, c'est ça aussi, c'est là où j'évolue et là où le rôle de la recherche est en tout cas pour moi plus… Je ne sais pas si c'est plus confortable, mais en tout cas, j'ai accepté ce rôle du chercheur ou de la chercheuse au moment où on fait de l'enquête. C'est une posture, à la fois je suis engagée parce que je participe et que je rigole et que je relance et que je recadre, mais je recadre d'une certaine façon, mais en même temps, je ne donne pas mon avis et je ne fais pas de la formation. Donc, quand la tension montait sur certains sujets ou que j'entends des choses qui me déplaisent, les choses qui me déplaisent, je les mets de côté parce qu'en fait, chacun a le droit d'avoir son avis. Et en plus de ça, moi, j'envisage ça plutôt comme de la discussion éthique et que je pense que j'ai été bercée par ça depuis trois ans quand même à l'Espace Éthique Île-de-France et ensuite au Centre d'éthique clinique de Cochin. Et quand les échanges montaient un peu trop, je disais non, mais le but, ce n'est pas d'atteindre le consensus. En fait, vous avez le droit de ne pas être d'accord. Et en plus de ça, vous travaillez sur des sujets où de toute façon, il n'y a pas d'avis tranché. Donc c'est normal que vous ne soyez pas d'accord et que chacun ait son avis. Et donc là, en général, ça faisait redescendre tout le monde, parce que le but, ce n'était pas de convaincre l'autre ou d'atteindre un consensus, c'était que chacun puisse s'exprimer. Et ça a été hyper bien vécu, dans le sens où j'ai été surprise, parce que là, j'ai relu tous les questionnaires anonymes que j'ai fait remplir à la fin. Je ne sais pas trop si je vais les exploiter parce que l'écrit, on récupère beaucoup moins de choses et ça a moins d'intérêt. Mais en revanche, je leur demande comment avez-vous vécu ces trois jours, parce qu'à chaque fois, je restais trois jours. Et ce qui ressort beaucoup, c'est le plaisir de cette conversation. Et ce qui ressort aussi, c'est que cette conversation, elle n'était pas dans le débat ou dans l'opposition, mais elles disent... On a aimé discuter, de voir que chacun avait un point de vue différent, de comparer nos points de vue. Et ce n'était pas du tout vécu comme une tension ou un problème, mais plutôt comme quelque chose d'hyper positif qui ressortait de l'expérience. Pour moi, c'était une discussion éthique, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, oui. Et puis en plus, tu es dans une logique d'observation et pas de formation où tu dois amener un peu plus... Un point B, mais je comprends bien. Après, c'est là où on voit, à travers la formation, qu'en fait, le besoin... Alors, je n'ai pas le recul pour dire si c'est le besoin aujourd'hui ou si ça a toujours été, mais il y a ce besoin énorme de vider son sac, en fait. Et là, tu as un motif parfait, parce qu'en plus, c'est moins... Tu vois, on ne parle pas de soi. On parle de ce qu'on voit à la télé, donc on peut y aller un peu plus. Mais en même temps, ça permet aussi de partager avec des gens qui... qui ne savent pas forcément s'ils sont en tout début de formation, mais avec toi et avec des gens qui l'ont vécu. Donc, c'est beaucoup plus fort.

  • Speaker #1

    Et moi, du coup, j'avais quand même deux limites. À la fois, moi, je n'étais pas là pour faire de la formation. Et donc, il ne faut pas que ça rentre en porte à faux avec les formateurs qui sont là, eux, à l'année et c'est eux qui vont former. Donc, il ne fallait pas non plus que j'amène des informations qui allaient contredire ce qu'ils allaient dire après. Donc moi, c'est pour ça aussi que je suis restée très en retrait par rapport à ça. Et puis, je crois que c'est comme tu dis, il faut qu'il y ait des espaces où les gens puissent s'exprimer sans qu'on les reprenne ou qu'on les reforme. Et il y avait une régulation par le groupe, vu que les plus expérimentés, en général, n'étaient pas forcément d'accord et qu'il faut faire confiance au groupe. Mais quand même, à la fin, on fait une conclusion. C'est là où je diffuse le dernier épisode et où on se quitte. Donc, on sent qu'il y a toujours aussi une difficulté à se quitter. C'est assez touchant. Mais je leur dis quand même, parce qu'il y a deux choses qui sont en question et qui reviennent régulièrement. C'est la liberté d'aller et venir et le droit à l'intimité. Et qu'à la fin, quand même, je me permets, je le fais devant tout le monde. Et je leur dis, bon, vous avez tous des avis différents, et puis vous allez travailler avec vos formateurs et formatrices, et vous verrez bien ce qu'il en est. Mais en revanche, il y a deux points que vous soulevez, sur la liberté d'aller et venir, sur le fait que les résidents aillent sur la plage comme ça, qu'il faudrait peut-être les fouiller à l'entrée, qu'il faut toujours dire où on va. Et il y a un autre sujet sur le droit à l'intimité, sur le fait que... Il faut le dire aux enfants, si les personnes ont des troubles cognitifs, bref, toutes ces tensions-là. Et je leur dis, en fait, ça, c'est quand même des droits fondamentaux. Et à partir du moment où vous venez les mettre en question, où vous venez les réduire, il y a un vrai sujet. Le droit à l'intimité, c'est un droit fondamental, c'est la base. Donc, en fait, automatiquement, non, il ne faut pas prévenir les enfants, c'est plutôt le contraire. C'est se poser la question, à la limite, de si on le dit ou pas, c'est une question qui est légitime, mais ce n'est pas automatique de le dire aux enfants parce que les résidents ont des troubles cognitifs. Et donc j'essaye un peu de les faire aller comme ça sur les libertés qu'on supprime assez rapidement pour leur dire, en fait non, la liberté, vous n'avez pas le choix, elle est là, vous avez le droit de la discuter, mais en fait, n'oubliez pas qu'elle est là à la base.

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr. Et c'est là où on est dans l'éthique, la réflexion. Et c'est un support qui permet de bien imager. Et ça, c'est cool. Au niveau des rencontres, du coup, tu disais que c'était trois jours d'échange. Donc, pour passer les... C'est quoi ? C'est neuf ou dix épisodes ? Il y a à peu près dix heures.

  • Speaker #1

    Dix épisodes, mais c'est dix épisodes de 26 minutes. Donc, ça fait trois heures et demie de projection.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est vrai.

  • Speaker #1

    Ouais, ça va assez vite et ça c'est très précieux. Je ne me rendais pas encore compte quand on s'est rencontré la dernière fois de la pépite que j'avais entre les mains avec la série Septième Ciel. A la fois parce que c'est de la comédie et pour aborder ces sujets-là, mine de rien comme tu disais, en fait si j'avais proposé un drame, je pense que ça aurait été autrement plus dur. Tandis que là, la comédie permet de rentrer dans les sujets assez facilement et avec une certaine distance. tout en s'attachant au fur et à mesure, ce qui permet aussi de faire de l'éthique parce qu'on est engagé avec les personnages et on est attaché à eux. Et les épisodes sont très rythmés. Et donc, moi, j'en montrais à peu près trois par jour parce que je me suis rendu compte, j'avais fait un terrain exploratoire, qu'au-delà de trois, je perdais tout le monde. Enfin, plus d'une heure de projection, c'est hyper difficile. Surtout dans des conditions qui sont très... qui sont très artificielles, en fait. Les séries, tu les regardes chez toi, tranquille, ou alors en couple. Il y a plein de pratiques différentes des séries, mais tu ne regardes pas des séries dans une classe de 30 personnes, avec tes formateurs à côté, et tu n'en discutes pas après, dans la vraie vie. Donc, il y avait ce truc-là de regarder la série tous ensemble, dans une salle de cours, qui était quand même une expérience un peu particulière.

  • Speaker #0

    Oui, je me doute. Tu faisais les épisodes... consécutifs ou tu débriefes chaque épisode et où est-ce que tu les découpes même ?

  • Speaker #1

    Alors, je faisais trois par trois. Moi, c'est la solution que j'ai trouvée. Et après, du coup, les questions qui suivaient... Et après, je voyais en petits groupes, en focus groupes, où on discutait des épisodes qu'on avait vus tous ensemble le matin. Et surtout, j'ai gardé le dernier épisode pour la conclusion. Je voulais pas qu'on en parle, parce que je me suis rendue compte quand j'avais fait mon terrain exploratoire, où j'avais montré les 4 derniers épisodes à la suite, déjà que c'était trop long, 4 épisodes, mais qu'en plus de ça, il y a quand même... comment dire... La logique des séries fonctionne à plein, c'est-à-dire que quand on s'est attaché au personnage, et ben en fait on est triste de l'équité, et que ça coupe les jambes. Si je montrais le dernier épisode, en fait, les gens allaient plus parler. Parce qu'ils sont tristes d'avoir quitté les personnages, parce qu'on ne peut plus imaginer ce qui va leur arriver ensuite.

  • Speaker #0

    Et que quand même, tout le focus group, s'il fonctionne, c'est parce qu'on imagine la suite et qu'on fait des hypothèses sur la suite. Et donc, c'est pour ça que le dernier épisode, finalement, j'ai décidé de le garder pour la conclusion. Et c'est le dernier moment où on se voit et tout le monde attend avec impatience le dernier épisode. Et après, on se dit au revoir et chacun retourne à sa vie. C'est une façon de fermer l'expérience.

  • Speaker #1

    Ouais, pendant trois jours. Tu as vu combien de groupes ?

  • Speaker #0

    J'ai vu 14 groupes.

  • Speaker #1

    C'est vrai, quand même.

  • Speaker #0

    80 personnes interrogées.

  • Speaker #1

    OK, 14 groupes. Et du coup, ça rentrait dans un programme IFAS. C'est ça. OK. Au final, qu'est-ce que tu retiens de ces groupes ? Qu'est-ce que les étudiants t'ont retenu ? Est-ce que tu as eu des retours après ? En gros, qu'est-ce que tu as vu ? Qu'est-ce que ça a pu changer ?

  • Speaker #0

    Il y a quelque chose qui change et que j'avais sous-estimé. C'est effectivement le sujet de la sexualité des personnes âgées. C'est vraiment un espèce de point nodal pour faire évoluer la représentation qu'on a des personnes âgées. Je suis arrivée... Pour moi, tout le monde, c'était mon préjugé en tout cas, je savais que c'était un sujet tabou la sexualité des personnes âgées en établissement, mais pour autant, tout le monde savait que ça existait. Et donc là, je me suis retrouvée avec des discours qui étaient très différents les uns des autres, avec certaines personnes qui ne savaient pas que ça existait, avec d'autres personnes qui pensaient que c'était interdit si les gens n'étaient pas mariés. avec d'autres personnes au contraire qui étaient individuellement hyper enthousiastes à l'idée que ça existe et qu'il fallait vachement protéger ça. Et donc je me suis retrouvée avec une pluralité de discours véritablement autour de ce sujet-là, la sexualité c'est vraiment le sujet important de la série. Mais ce que je trouve assez passionnant, c'est que la sexualité des personnes âgées semble être un peu un impensé. C'est comme si ça n'existait pas véritablement. Et que là, à la découverte de la série, on se rend compte que ça existe. Et donc, c'est déjà un apprentissage en soi. Encore une fois, pas de généralité, pas tout le monde. Il y en a qui savent que ça existe. Mais que le fait que les personnes âgées aient une sexualité, Les fait passer d'objets de soins, où vraiment on dit qu'on veut travailler avec la personne âgée, il y a tout ce discours sur vraiment ce sont des patients, ce sont des objets de soins, il faut en prendre soin. Là, comme ils ont une sexualité et qu'ils tombent amoureux, le regard change complètement sur les personnes âgées, et d'objets de soins, ils deviennent de véritables sujets en fait. Et on ne les considère pas du tout de la même façon. Et donc, quelque part, c'est à travers cette impensée de la sexualité des personnes âgées qu'il y a une forme d'apprentissage. Et auparavant, dans la recherche en général, sur les séries qui nous permettent d'apprendre des choses, typiquement, c'était Dominique Pasquet qui a fait un travail sur Hélène et les garçons qui était très regardé par les petites filles pré-adolescentes. pour une éducation sentimentale, pour apprendre comment on allait faire son premier baiser, comment on abordait quelqu'un pour lui dire qu'on l'aimait, pour déclarer son amour, etc. Mais tout ça, ce ne sont pas des choses impensées, puisqu'on sait qu'elles existent, et on va voir une série pour apprendre. Tandis que là, on part d'une série où quelque part, on ne sait pas que ça existe, et on découvre avec la série que ça existe. Et donc, le mode d'apprentissage se fait à partir de quelque chose qu'on ne pensait pas véritablement exister. Alors après, tu vois ce que je veux dire ? Après, la richesse, et moi, c'est ça que j'ai adoré, c'est que certes, je ne fais pas de la formation, mais en revanche, j'en ai eu fait. Donc, j'ai déjà été formatrice, que j'ai fait de l'éthique. Et que, parce que aussi, je retiens tous les prénoms et que je pense que j'ai à cœur que ce soit un climat de confiance et que les gens puissent s'exprimer, qu'ils puissent aussi dire des âneries. puissent les dire librement sans avoir un jugement sur eux. Tout le monde se sentait libre de s'exprimer et notamment les plus anciennes et les plus expérimentées qui venaient en fait partager leurs pratiques, leurs anecdotes. Et dans les plus jeunes, il y en a certaines qui venaient partager des anecdotes autour du sujet de la sexualité. mais dont on sentait que c'était un peu réactivé et remis en question au moment où elle venait le proposer dans le focus group. Que par exemple, il y en a une qui racontait qu'elle était dans un établissement, et donc là tu vas voir que c'est un truc assez classique, que peut-être que tu auras déjà rencontré, mais le cas classique c'est que tu as deux personnes âgées qui ont des troubles cognitifs, qui commencent à se rapprocher, mais comme ça peut... peut être dangereux, qu'il y a un risque, on décide, par exemple, de les séparer des tâches, misant sur le fait qu'ils ne se souviendront pas exactement où l'un et l'autre sont. Et donc, on les sépare des tâches. Dans la vraie vie, parfois, ils se retrouvent. En tout cas, moi, ça m'est arrivé, j'étais extrêmement surprise. J'ai appris quelque chose à ce moment-là. Mais donc, là, par exemple, cette jeune aide-soyante en début de formation, Reraconter cette anecdote à un moment opportun pour venir le remettre en question, pour se dire, mais en fait, pourquoi on les a séparés à ce moment-là ? Qu'est-ce qui faisait de mal ? Et donc, venir re-questionner toute la question du risque. C'est comme si le risque, parce qu'il y avait un risque supposé, on réfléchissait même plus au droit.

  • Speaker #1

    Là, tu es clairement dans la question éthique, en fait. Donc, c'est... C'est 100% éthique. Mais ce qui est super intéressant, je trouve, c'est que cet angle bien-traitance, qui veut tout et rien dire, mais qui veut surtout tout dire, l'aborder avec un sujet aussi précis, ça permet de rendre les choses aussi concrètes. Et je trouve ça super intéressant. En fait, l'idée, c'est d'avoir un moyen différent d'entrer dans le sujet et puis d'amener les équipes, les professionnels, d'amener les gens, en fait, à... à regarder les choses juste un petit peu différemment, à faire ce petit pas de côté et ça c'est super.

  • Speaker #0

    Oui, et l'avantage avec une série, c'est qu'à la fois t'es attaché au personnage, c'est comme si c'était des vrais gens, mais tu sais que c'est pas des vrais gens, et en même temps t'es à distance parce que tu sais que c'est de la fiction. Donc, tandis que dans la vraie vie, il y a... c'est plus incarné, t'es toujours plus investi parce que c'est un résident que tu connais, parce que tu connais sa famille, parce que tu sens les choses de cette façon-là. Là, quand même, elles sont beaucoup moins engagées, c'est pas des vrais gens. Mais pour autant, elles sont quand même attachées, ce qui fait qu'elles s'engagent dans la discussion politique.

  • Speaker #1

    Même que ce soit avec des collègues, c'est dur, quoi. Surtout si c'est un sujet qui nous concerne, par rapport à un résident, une situation où... Il faut faire un choix, il faut décider. Et là, c'est difficile. Donc, ça permet de prendre un recul plus facile et d'amener aussi sur d'autres sujets.

  • Speaker #0

    Pas de décision à prendre à la fin dans le cas de la recherche. Donc, je pense qu'il y a moins d'enjeux.

  • Speaker #1

    OK. La prochaine étape ou les prochaines étapes, qu'est-ce que... Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que tu vois ? Est-ce qu'il y aura d'autres recherches ? Déjà, est-ce que tu peux nous dire des choses par rapport à la saison 2 ? S'il y a une saison 2, mais je crois que tu m'en avais parlé, donc...

  • Speaker #0

    Oui, il y a une saison 2, elle vient de sortir, puisqu'à chaque fois qu'on se voit, Arnaud, il y a une saison qui sort. Super. Et donc la saison 2 est sortie, on est au cœur de l'actualité. Elle est sortie sur Ciné+, OCS, donc pour les gens qui ont le canal plus...

  • Speaker #1

    C'est déjà OCS, ouais.

  • Speaker #0

    Et donc là, l'histoire est complètement... Les deux saisons peuvent se voir séparément, mais il y a quand même une évolution des personnages qu'on retrouve. Mais donc là, ils sont partis de l'EHPAD. Entre-temps, Jacques est mort. Et donc Rose va devoir se reconstruire. Se reconstruire et en plus de ça, faire vivre une histoire qu'elle avait à la fois du grand. C'était de construire un habitat partagé, autogéré. Une autre difficulté. Et donc là, ça va être une autre histoire autour du personnage de Rose. Ça va encore plus loin en termes de sexualité. Et moi, ce qui me fascine dans leur écriture, et parce que c'est des scénaristes hyper talentueux, c'est à quel point ils vont loin dans les possibles de l'amour. en travaillant à partir de personnages âgés ? Et comment l'âge devient aussi la condition d'une plus grande liberté ? Je ne sais pas si c'est réaliste, je ne sais pas si ce sera comme ça, comme moi-même je serai vieille. Mais en tout cas, je trouve ça bien qu'il y ait aussi ce genre de perspective pour l'avenir.

  • Speaker #1

    C'est clair que c'est plus joyeux que tout ce qu'on peut entendre tout le temps. Et c'est... Alors, j'imagine qu'il y a toujours cette pointe d'humour, mais c'est vrai qu'il y a aussi une... Oui, c'est une question de vie et de liberté, et c'est super sympa. Et c'est intéressant, moi, du coup, il faut que je m'y mette. Parce que ça m'intéresse aussi de voir comment on aborde l'habitat partagé.

  • Speaker #0

    Ça a été une grande question, et là, pour le coup, j'ai été là avec eux dès le début. Donc quand ils ont commencé à écrire parce qu'ils avaient envie d'écrire sur la coloc de personnes âgées, etc. On a vu les différents modèles qui existaient dans l'habitat partagé. Est-ce que c'est autogéré ou est-ce que c'est géré par un tiers ? Est-ce que c'est privé commercial ou est-ce qu'on est plutôt sur de l'associatif ? Et de voir aussi les problèmes qu'il y avait dans l'habitat partagé. Le vivre ensemble. quand quelqu'un décède, comment il est remplacé, comment on recrute les nouvelles personnes, est-ce qu'on fait du recrutement, comment on gère les conflits ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, il y a tout un fantasme aussi avec l'habitat partagé, de se dire que ça pourrait être la réponse qu'on a complètement oubliée, de se dire que c'est simple, on ferme les Ehpad et on fait des colloques et tout va bien. Ça pourrait dans certains cas, mais à mon avis pas tous. un peu le début, donc c'est intéressant aussi de voir comment c'est abordé, et puis juste d'en parler, parce qu'il y a certainement plein de belles choses à prendre, mais il faut en parler, il faut tester des trucs, et puis voilà.

  • Speaker #0

    La fiction l'a testé.

  • Speaker #1

    Et du coup, avec la fiction, on va pouvoir réfléchir un peu. Nickel. Qu'est-ce qu'on peut dire aux personnes qui sont intéressées ? Alors, la thèse, c'est pas pour tout de suite, la série. Par contre, c'est pour tout de suite. OCS, tu l'as dit. Comment on peut conclure ?

  • Speaker #0

    Canal+, je précise. Pour les gens qui ont Canal+, ils peuvent le trouver dans leur abonnement.

  • Speaker #1

    Ok, cool. Pour toi, c'est quoi la prochaine étape ?

  • Speaker #0

    Moi, la prochaine étape, c'est une étape d'écriture. Parce qu'écrire, c'est penser. Et que là, j'ai été pendant des mois avec les voix des aides-soignantes en début de formation, avec leur rire, leur discussion, etc. Que j'en ai tiré des pages et des pages de conversation. Mais que maintenant, il faut que tout ça ait du sens et de voir exactement où ça résonne. Donc on va rentrer dans le temps de l'analyse et de l'écriture. Et pour une soutenance qui est prévue en juin 2026. Bon,

  • Speaker #1

    un an et demi, le temps de faire un troisième épisode, peut-être autour d'une saison 3 où tu pourras nous raconter à ce sujet. Merci Manon, et puis à bientôt.

  • Speaker #0

    Merci Arnaud.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté l'épisode jusqu'au bout, j'espère que le sujet vous a plu et qu'il vous inspire. Pour m'aider à faire connaître le podcast, abonnez-vous sur votre plateforme d'écoute préférée. ou notez-le et partagez-le sur vos réseaux sociaux. N'hésitez pas à me contacter sur LinkedIn pour ma proposition de sujet. Bonne journée et à bientôt sur le podcast des établissements de médicaux sociaux.

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Description


Dans cet épisode, je retrouve Manon Cerdan, ancienne directrice d’EHPAD et aujourd’hui chercheuse, pour parler de sa thèse et de la série Septième Ciel. Cette comédie, qui raconte avec humour et émotion la vie en EHPAD, sert à ouvrir des discussions importantes avec des aides-soignants en formation.


Manon utilise la série pour travailler les représentations de la vieillesse auprès d'étudiants en école d'aides-soignants.


👉 Au programme :

  • La fiction qui fait réfléchir : comment une série peut changer notre regard sur la vieillesse et les métiers du soin.

  • Les réactions des soignants : ce qu’ils retiennent des personnages de la série et ce que ça leur apprend sur leur métier.

  • Les grands sujets discutés : la liberté des résidents, leur intimité, et même la sexualité des personnes âgées, un sujet encore tabou mais essentiel.

  • Le rôle de la direction en EHPAD : attentes, critiques et incompréhensions autour de la figure du directeur, souvent caricaturée dans la fiction.

  • Les dynamiques de groupe en formation : entre échanges constructifs et déconstruction des préjugés grâce au prisme de la série.

  • Un aperçu de la saison 2 : cette fois, on explore les défis et les belles idées autour de l’habitat partagé pour les personnes âgées.


✨ Un épisode qui montre comment une série peut aider à mieux comprendre et améliorer la vie en établissement. Bonne écoute !


🎧 Disponible sur toutes les plateformes. Abonnez-vous, partagez et laissez une note pour soutenir le podcast ! 🙌


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Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et bienvenue sur le podcast des établissements médico-sociaux. Je m'appelle Arnaud Chevalier et après avoir été directeur d'EHPAD pendant 8 ans, j'aide les établissements de santé à adopter les meilleures innovations pour simplifier et améliorer leur quotidien. J'écris ce podcast pour partager les belles expériences portées par des gens passionnés. Avant de commencer, si vous appréciez ce podcast, vous pouvez vous abonner pour ne rater aucun épisode. Et encore mieux, mettre une note 5 étoiles sur Apple Podcasts et le partager à vos collègues. Sur ce, bon épisode. Bonjour à tous, aujourd'hui je discute avec Manon Cerdan. On a déjà fait un épisode en janvier 2023, donc on arrive à la suite, quasiment deux ans plus tard, même deux ans plus tard le temps de le diffuser. On avait parlé de la série 7e ciel, sur laquelle tu avais plus que collaboré, tu avais beaucoup participé, et notamment pour faire en sorte que ce soit une série qui représente la manière de la... possible le fonctionnement et le quotidien d'un établissement. Moi, franchement, c'est une série que j'ai vraiment adorée, que j'ai dévorée, mais en voyant des trucs, tout ça, j'ai beaucoup risqué, beaucoup aussi des démotions sur des trucs, sur plein de sujets, je me suis vu. Donc, c'est vraiment une série qu'il faut recommander à tous les gens qui sont placés de près ou de loin dans un établissement. Et depuis la sortie de cette série, toi tu t'es engagé sur un travail de recherche dans le cadre d'une thèse pour aller rencontrer les aides-soignantes, mais tu vas nous l'expliquer beaucoup mieux. Et l'idée c'est qu'est-ce qu'on fait d'une série qui montre la vie d'un établissement, qu'est-ce que ça peut apporter en gros pour les établissements et surtout pour les écrans. On va aborder ce sujet-là, tu vas pouvoir nous expliquer tout ça.

  • Speaker #1

    pour changer le monde, même si c'était plutôt plus complexe. Les images étaient capables d'auditer le regard. Donc ça, j'ai rejoint. Puis assez rapidement, dans mes 20 ans, j'avais 25 ans, j'ai décidé de creuser un peu cette envie que j'avais de travailler dans la vie de l'ES, parce que j'avais une grande question existentielle, qui est comment on fait pour rester libre jusqu'à la fin de sa vie. Et donc là, je suis passée par l'EHPAD, la direction d'EHPAD notamment. Une expérience qui a été fondatrice mais traumatisante pour moi. Ensuite, j'ai trouvé mon salut dans l'accueil familial pour les personnes âgées où je m'occupais des sujets de formation. Et puis il est arrivé ce moment où j'ai décidé de mettre en musique ces deux sujets d'intérêt dans ma vie, qui sont le cinéma et la vieillesse, en montant un projet de recherche en sciences de l'information et de la communication. Donc ça prend la forme d'une thèse aujourd'hui. Je suis financée pour cela par l'université Paris Panthéon-Assas. Je travaille sur la représentation de la vieillesse dans la fiction, et spécifiquement sur la série Septième Ciel, avec des aides-soignantes en début de formation.

  • Speaker #0

    Ok, alors, il y a plein de trucs sur lesquels je pourrais revenir. On l'a déjà abordé un petit peu la dernière fois, mais c'est vrai que toi, tu as eu un parcours aussi. de directrice, juste à un moment, comment ça vient, comment ça t'est venu ? Pourquoi ? Parce que si tu es dans le cinéma, comment tu te dis je vais aller bosser dans un Ehpad ?

  • Speaker #1

    En fait, ce qu'il y a, c'est que les deux étaient là dès le début. Ce qu'il y a, c'est que quand j'avais 20 ans, que j'étais à ce moment-là en école de commerce, j'avais quand même envie de me faire rêver et que la vieillesse allait tout de suite dans la vieillesse. J'avoue que ça me faisait probablement un peu peur. que le cinéma, voilà, j'avais envie de tenter ma chance et d'y aller. Et donc, j'avais ces deux-là au début. J'ai commencé par le cinéma. Assez vite, je me suis rendue compte que je préférais être une spectatrice plutôt que d'être dans les coulisses. Ça m'intéressait moins intellectuellement. Et donc, c'est pour ça que je suis allée vers la vieillesse, qui avait sa même place dans ma vie et dans mes intérêts. Et j'étais un peu plus mature. Et donc voilà, assez naturellement, quand j'ai quitté le cinéma, je me suis dit, bon, j'ai vu ce que j'avais à voir dans le cinéma, il est temps de passer à autre chose. Et finalement, la vieillesse, intellectuellement, professionnellement, existentiellement, ça m'apporte beaucoup plus.

  • Speaker #0

    C'est vrai que le cinéma se fait de prime abord beaucoup plus rêvé. Tu te dis que ça a l'air beaucoup plus fun, beaucoup plus cool. Et en pensant à ça, je me dis en même temps, même si ce n'est pas toujours simple, c'est tellement aussi vivant l'EHPAD et tout ce qui peut s'y passer de cocasse, d'incongru, d'assez hallucinant parfois, où du coup on se dit, est-ce que ce n'est pas même encore plus dynamique ? Il y a encore peut-être plus de surprises, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Oui, le réel, en général, c'est toujours plus surprenant que la fiction, de toute façon. Mais c'est surtout qu'en termes de profondeur, je trouvais que dans le secteur du vieillissement, à la fois parce que les sujets sont tellement plus profonds, c'est une expérience de la vie qui est une expérience extrême de la vie, la grande vieillesse. que je n'arrivais pas à trouver dans le cinéma. Et je pense que moi, je suis en plein dans mes questionnements existentiels et j'avais besoin de profondeur. Et ça, c'était surtout travailler auprès de la vieillesse, travailler auprès des personnes âgées, ou en tout cas y réfléchir, qui, moi, me nourrissaient immensément.

  • Speaker #0

    Je comprends. Tu voulais changer le monde. On avait eu forcément cette question-là. Est-ce que tu penses que le cinéma peut changer le monde ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne sais pas s'il peut changer le monde, mais là, tu vois, ce matin, j'étais en train de lire un ouvrage de Sabine Ausha de Mercé, qui est une sociologue et qui a beaucoup travaillé sur la fiction. Et elle, elle parle de comment, grâce à la fiction, la fiction a cet effet de transformation de la société, parce qu'elle permet de penser les problèmes qui sont en germe. d'y mettre de l'émotion, de les mettre en récit, et de toutes ces petites choses qu'on ressent dans la société, mais qui peut-être nous accablent, ou qu'on n'arrive pas à approcher, ou qui sont trop complexes, trop compliquées. La fiction et les scénaristes arrivent à le mettre en récit, et que ça, ça a une fonction d'anticipation et de projection, qui permet... parce que les citoyens arrivent à s'en emparer, arrivent à comprendre des problèmes complexes, à modifier la société et ses normes.

  • Speaker #0

    Je suis persuadé, ne serait-ce que par rapport à un changement culturel, tu vas voir quelque chose, se découvrir l'émotion, le fait de rêver aussi un petit peu, d'ouvrir, de voir autre chose, d'ouvrir un possible. Moi, je pense qu'il y a carrément un sujet, et puis c'était l'objet vraiment la dernière fois, mais on va passer à notre... nouvel objet, mais de se dire que le problème de l'EHPAD, c'est qu'il est complètement méconnu, voire inconnu. On ne sait pas ce que c'est. Du coup, on fantasme un petit peu sur des trucs qui n'ont pas forcément à voir et qu'à partir du moment où on rend les choses concrètes, ça peut déjà aussi changer beaucoup de choses. Tu vois, je pense à un truc qui a un petit peu de lien, mais C'est par rapport au YouTuber, par rapport à Innoxtag, à son documentaire, quand il monte, quand il escalade l'Everest. En gros, sur le coup, tu te dis qu'est-ce que c'est encore cette connerie ? Et en fait, tu te rends compte que derrière, c'est ultra profond et tout ça. Et sur un autre podcast, je l'ai entendu dire qu'il reçoit des messages de parents qui disent mes enfants, ils sont… coller toute la journée sur les jeux vidéo. Et puis là, en fait, ils disent quand est-ce qu'on va faire une rando, on voudrait faire ça. Et tu vois, moi, en fait, c'est pareil. En fait, j'ai mon fils qui a 9 ans qui me dit quand est-ce qu'on va faire le GR20 parce qu'il l'a vu dans l'épisode. Et finalement, ça fait changer un petit peu de perspective. Et je pense qu'on manque cruellement de reportages, de documentaires, de séries, de films, de tout ce qu'on veut, même peut-être de dessins animés. qui permettent de changer un petit peu notre vision de la vieillesse et du grand âge. Donc voilà, moi ça c'est mon point de vue.

  • Speaker #1

    Je suis d'accord avec toi et je le partage, et je le partage d'autant plus que même si j'en suis au traitement de mes données, comme on dit dans la recherche, donc j'en suis pas encore aux conclusions, je pense que la fiction est septième ciel auprès des aides-soignantes que j'ai rencontrées et à qui j'ai montré la série en entier. a vraiment fait évoluer leur regard. Et ça, je pense que ce sera la grande démonstration, en tout cas de ma thèse, c'est de montrer que non seulement ça fait évoluer le regard, mais de montrer comment ça le fait évoluer.

  • Speaker #0

    Du coup, est-ce que tu peux rentrer dans le détail ? En gros, comment tu vois les choses ? Qu'est-ce que tu as pu déjà mettre en place ? Quel retour ? Et puis, c'est quoi le principe de ta thèse ? En fait,

  • Speaker #1

    le principe de ma thèse, et comme ça, ça va permettre de faire le lien avec l'épisode qu'on avait fait il y a deux ans, c'est que je travaille à la fois sur la construction des représentations. Et donc, ça, c'était mon rôle de... conseillère grand âge au moment de l'écriture de la série. Et donc, comment on construisait les représentations avec les scénaristes ? Donc, Alice Vial, Clément Sazincourt et Clément Marchand. Et donc, quand tu fais des sciences de l'information et de la communication et quand tu étudies des contenus médiatiques, tu peux t'intéresser soit à la production, donc le scénario, ce que j'ai fait là, par exemple. tu peux t'intéresser au contenu, c'est-à-dire la série en elle-même, étudier un peu ex nihilo, comment tu étudies les représentations qu'il y a dans la série, sans savoir ce qui s'est passé ni à l'écriture ni à la réception. Et la troisième étape, c'est d'étudier la réception, c'est-à-dire comment un contenu est reçu par un public. Et donc moi, j'ai choisi de travailler sur deux pans, à la fois la production, c'est ce que je disais, pour travailler sur la construction des représentations à l'écriture. et comment ça se construit, et à la réception avec des aides-soignantes en début de formation. Et alors pourquoi j'ai choisi d'aller voir des aides-soignantes ? C'est que quand même, dans la série Septième Ciel, les scénaristes avaient choisi de mettre en valeur deux personnages d'aides-soignantes. Elsa, qui est une stagiaire, la petite vingtaine. Un peu perdu, qui est là par hasard, qui veut valider son stage, mais concrètement qui se comporte de façon étonnante, je dirais. Moi, c'est quelque chose qui m'avait gêné à l'écriture, mais c'est plutôt...

  • Speaker #0

    Alors, parce que du coup, moi, je la trouve génialissime. Et en fait, sans spoiler, mais un tout petit peu quand même, mais au tout début, on la voit, son réflexe en arrivant, c'est une personne âgée, endormie, qui bave un petit peu, mais voilà, pas trop, normal. Direct, c'est selfie et TikTok. Et moi, franchement, ça ne m'a pas choqué du tout. Je me suis dit, mais c'est normal. C'est le truc qu'on ne voit pas, mais c'est obligé que c'est comme ça dans la vraie vie.

  • Speaker #1

    Sûrement, moi, je trouvais qu'à l'écriture, c'était très exagéré, mais c'est le propre de la comédie. Et effectivement, quand j'ai rencontré les aides-soignantes en début de formation, et pour la plupart... Franchement, 90% ont travaillé en structure ou à domicile en tant qu'ASH ou faisant fonction. Toutes, elles disent, mais c'est la réalité. Nous, des jeunes, on en voit tout le temps des comme ça. Et en vrai, c'est là aussi où c'est un vrai bonheur d'avoir été là au moment de l'écriture, parce que ça me permet aussi, moi, de voir là où je me trompais et là où les auteurs ont décidé de suivre leur voix. Ils ont vraiment, pour eux, c'était hyper important que ce personnage soit aussi dans cette exagération très poussée de cette façon-là. Parce que c'est exactement ça qui fait réagir les aides-soignantes à la réception. Que contrairement à l'autre personnage, Karima, qui est une aide-soignante, vraiment c'est l'aide-soignante parfaite, dévouée, professionnelle, expérimentée, très juste, très calme. Le personnage de Karima fait beaucoup moins réagir. Donc finalement, en termes de recherche, elle a beaucoup moins d'intérêt que Elsa, la stagiaire qui fait tout n'importe comment. Parce que du coup, les aides-soignantes... qui sont en début de formation, encore une fois, en disant tout ce que le personnage d'Elsa fait mal, elles disent tout ce qu'il faut faire bien. Et donc là, on voit ce qui est important pour elles et qu'est-ce que ça veut dire être une bonne aide-soignante.

  • Speaker #0

    Oui, c'est clair. Non, mais oui, c'est logique. Et du coup, je comprends parce que je me dis, moi, j'ai envie de dire, oui, mais les nouveaux, c'est bien, ils vont arriver sur le circuit, donc c'est nickel qu'ils aient ce recul, en fait. peut-être un tout petit peu plus de maturité, mais je me dis, il y a quand même tous ceux qui sont en poste et pour lesquels c'est jamais négatif et mauvais de prendre un peu de recul. Mais c'est vrai que là, c'est un personnage qui correspond parfaitement. Oui,

  • Speaker #1

    ça correspond. Après, moi, c'est vrai que dans les aides-soignantes que je rencontre, alors oui, pourquoi j'ai choisi de faire ma recherche aussi en institut de formation aide-soignante, IFAS, en tout début de formation ? La première raison, c'est parce que moi, je voulais les rencontrer au moment où la norme professionnelle n'est pas trop marquée. Je ne voulais pas avoir que des postures ou des bonnes pratiques ou des choses qu'on dit parce que c'est comme ça qu'on l'a appris et qu'il faut faire. Je voulais encore qu'il y ait cette espèce de naïveté, tous ces idéaux qu'on peut avoir quand on se lance dans ce métier-là. Je voulais les toucher un peu du doigt. Ce qui est en partie une erreur de ma part, en tout cas un préjugé, parce que la plupart des aides-soignantes en début de formation que j'ai rencontrées, Donc c'est ce que je te disais, A, S, H, faisant fonction, il y en a qui ont trois mois d'expérience, il y en a d'autres qui ont 30 ans d'expérience. Donc j'avais quand même une pluralité d'expérience où clairement, non, elles n'étaient pas vierges de tout. Et le filtre de la norme professionnelle était quand même passé un peu dessus. Mais il y a quand même des idéaux qui restent. Et c'était assez beau d'aller toucher du doigt ses idéaux, mais aussi de déconstruire les postures. C'est-à-dire que moi, je les rencontre en tout début de formation, et le premier jour, après qu'on ait vu trois épisodes de la série, et assez classiquement, les premières remarques, ce ne sont que des critiques sur ce qui n'est pas réaliste dans la série, sur ce qui n'est pas bien. Il y en a plein qui disent Non, mais c'est n'importe quoi, ça ne se passe pas du tout comme ça dans la vraie vie Et c'est normal, en fait. quand tu es professionnel et que tu regardes une série qui parle de toi de ton métier encore plus quand tu es en début de formation où tu dois montrer que tu sais ou que tu es en train d'apprendre ou que tu es en train de devenir professionnel la chose la plus facile à faire c'est la critique et en fait je savais que la première séance on allait en passer par là qu'il fallait que ce soit déposé quelque part qu'on montre qu'on sait, qu'on est professionnel etc et que c'est qu'après qu'une fois que tout ça a été déposé toutes ces espèces de lieux communs, de choses qu'on a entendues, qu'il faut qu'on répète pour montrer qu'on sait, je savais que ça allait être le premier jour et qu'ensuite on allait rentrer vraiment dans l'attachement au personnage et dans les dilemmes qu'on allait pouvoir discuter.

  • Speaker #0

    Et c'est vrai que alors forcément il faut on raconte une histoire et puis il faut pour permettre de réagir il faut grossir un peu le trait, il y a sept ans. un passage où on se dit quand même où on pourrait on prend un peu cher le directeur il prend cher et du coup on pourrait se dire mince tu vas le prendre un peu pour soi et se dire bon en fait oui ok c'est de la connerie on adhère pas il y a ce côté là c'est sûr où il faut aller au delà de la remise en question et pas le prendre trop personnellement donc j'imagine c'est vrai que des gens aussi qui travaillent là depuis longtemps... ça peut faire une remise en question peut-être un petit peu trop violente. Du coup, on va se dire que c'est plus facile de mettre sous le tapis.

  • Speaker #1

    C'est intéressant ce que tu dis sur le directeur d'EHPAD. Forcément, quand tu regardes la série, tu vois ce comportement du directeur d'EHPAD. C'est la remarque que tu m'avais faite dans la fiction. Le directeur d'EHPAD, c'est toujours un peu le méchant. C'est un méchant avec des aspérités quand même. Ce n'est pas un vrai méchant parce qu'aucun personnage n'est vraiment méchant.

  • Speaker #0

    Moi, je dirais qu'en fait, il est nul.

  • Speaker #1

    Mais le fait qu'il soit nul, par exemple, à la réception avec les aides-soignantes, moi, ce que je trouve qui ressort beaucoup, c'est les attentes envers la direction. Par exemple, tu vois, elles disent qu'elles ne pourraient pas travailler à la fin de l'expérience. Est-ce que vous pourriez travailler dans cet EHPAD ? Et il y en a plein qui disent non, alors que quand même, c'est un EHPAD où les gens sont... relativement valides, on peut le dire.

  • Speaker #0

    Elle a plein de trucs sympas, il y a plein d'activités, un beau cadre de vie.

  • Speaker #1

    En revanche, elles disent non, je ne pourrai pas y travailler parce qu'il y a un problème de direction.

  • Speaker #0

    Ok. Et le problème, elle l'identifie sur quoi ?

  • Speaker #1

    Peut-être que la direction, comme tu le dis, elle est nulle, elle ne prend pas ses responsabilités, elle ne fait pas le job et elle cadre...

  • Speaker #0

    Ouais, c'est ça. En fait, il décide pas. À chaque fois, il est un peu en panique, un peu paumé. Et il décide pas, quoi.

  • Speaker #1

    Alors, après, moi, je fais... Donc, il y a effectivement ça qui pose un problème. L'autre problème qui apparaît pour elle... Encore une fois, moi, je fais du qualitatif. Le but, c'est pas de monter en généralité, mais plutôt de faire l'état de tous les discours qu'il peut y avoir sur un même sujet. C'est ça qui est passionnant, parce qu'elles sont pas d'accord, globalement. C'est autour de la direction d'EHPAD, par exemple. C'est qu'il y a quand même très ancré ce truc de ils sont là pour faire de l'argent. La seule chose qui compte pour eux, c'est de respecter les budgets. Et que nous, peu importe. Donc, il y a vraiment ce truc de lutte un peu hiérarchique qui ressort aussi. À la fois, on attend beaucoup de cadres de leur part, et c'est ça qui rassure. Mais en même temps, on met en doute leurs intentions.

  • Speaker #0

    Ok. Et comment tu gères ça ? Parce que, du coup, est-ce que tu le prends un peu comme un sujet de la sensibilisation et des représentations, ou pas ? Et comment tu peux gérer ça ?

  • Speaker #1

    C'est-à-dire, à quel niveau, comment je peux gérer ça ?

  • Speaker #0

    Dans le groupe, en fait, parce que tu vois, si tu amènes le sujet plutôt sous forme d'une posture professionnelle, de situation un peu bien traitante et tout ça, et qu'en fait, ce qui ressort, c'est l'encadrement, ça déconne, la direction, ça déconne. Est-ce que tu en parles ? Est-ce que tu recentres ? Comment tu gères ça par rapport à la dynamique de groupe ?

  • Speaker #1

    Alors ça, ça a été un vrai enjeu parce que je pense que comme je suis une ancienne directrice de maison de retraite, malheureusement, tout ce que j'entendais sur les directeurs et directrices d'EHPAD qui n'en font pas assez et qui pensent qu'à l'argent, je me suis dit Ouh, on part de loin Mais après, c'est ça aussi, c'est là où j'évolue et là où le rôle de la recherche est en tout cas pour moi plus… Je ne sais pas si c'est plus confortable, mais en tout cas, j'ai accepté ce rôle du chercheur ou de la chercheuse au moment où on fait de l'enquête. C'est une posture, à la fois je suis engagée parce que je participe et que je rigole et que je relance et que je recadre, mais je recadre d'une certaine façon, mais en même temps, je ne donne pas mon avis et je ne fais pas de la formation. Donc, quand la tension montait sur certains sujets ou que j'entends des choses qui me déplaisent, les choses qui me déplaisent, je les mets de côté parce qu'en fait, chacun a le droit d'avoir son avis. Et en plus de ça, moi, j'envisage ça plutôt comme de la discussion éthique et que je pense que j'ai été bercée par ça depuis trois ans quand même à l'Espace Éthique Île-de-France et ensuite au Centre d'éthique clinique de Cochin. Et quand les échanges montaient un peu trop, je disais non, mais le but, ce n'est pas d'atteindre le consensus. En fait, vous avez le droit de ne pas être d'accord. Et en plus de ça, vous travaillez sur des sujets où de toute façon, il n'y a pas d'avis tranché. Donc c'est normal que vous ne soyez pas d'accord et que chacun ait son avis. Et donc là, en général, ça faisait redescendre tout le monde, parce que le but, ce n'était pas de convaincre l'autre ou d'atteindre un consensus, c'était que chacun puisse s'exprimer. Et ça a été hyper bien vécu, dans le sens où j'ai été surprise, parce que là, j'ai relu tous les questionnaires anonymes que j'ai fait remplir à la fin. Je ne sais pas trop si je vais les exploiter parce que l'écrit, on récupère beaucoup moins de choses et ça a moins d'intérêt. Mais en revanche, je leur demande comment avez-vous vécu ces trois jours, parce qu'à chaque fois, je restais trois jours. Et ce qui ressort beaucoup, c'est le plaisir de cette conversation. Et ce qui ressort aussi, c'est que cette conversation, elle n'était pas dans le débat ou dans l'opposition, mais elles disent... On a aimé discuter, de voir que chacun avait un point de vue différent, de comparer nos points de vue. Et ce n'était pas du tout vécu comme une tension ou un problème, mais plutôt comme quelque chose d'hyper positif qui ressortait de l'expérience. Pour moi, c'était une discussion éthique, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, oui. Et puis en plus, tu es dans une logique d'observation et pas de formation où tu dois amener un peu plus... Un point B, mais je comprends bien. Après, c'est là où on voit, à travers la formation, qu'en fait, le besoin... Alors, je n'ai pas le recul pour dire si c'est le besoin aujourd'hui ou si ça a toujours été, mais il y a ce besoin énorme de vider son sac, en fait. Et là, tu as un motif parfait, parce qu'en plus, c'est moins... Tu vois, on ne parle pas de soi. On parle de ce qu'on voit à la télé, donc on peut y aller un peu plus. Mais en même temps, ça permet aussi de partager avec des gens qui... qui ne savent pas forcément s'ils sont en tout début de formation, mais avec toi et avec des gens qui l'ont vécu. Donc, c'est beaucoup plus fort.

  • Speaker #1

    Et moi, du coup, j'avais quand même deux limites. À la fois, moi, je n'étais pas là pour faire de la formation. Et donc, il ne faut pas que ça rentre en porte à faux avec les formateurs qui sont là, eux, à l'année et c'est eux qui vont former. Donc, il ne fallait pas non plus que j'amène des informations qui allaient contredire ce qu'ils allaient dire après. Donc moi, c'est pour ça aussi que je suis restée très en retrait par rapport à ça. Et puis, je crois que c'est comme tu dis, il faut qu'il y ait des espaces où les gens puissent s'exprimer sans qu'on les reprenne ou qu'on les reforme. Et il y avait une régulation par le groupe, vu que les plus expérimentés, en général, n'étaient pas forcément d'accord et qu'il faut faire confiance au groupe. Mais quand même, à la fin, on fait une conclusion. C'est là où je diffuse le dernier épisode et où on se quitte. Donc, on sent qu'il y a toujours aussi une difficulté à se quitter. C'est assez touchant. Mais je leur dis quand même, parce qu'il y a deux choses qui sont en question et qui reviennent régulièrement. C'est la liberté d'aller et venir et le droit à l'intimité. Et qu'à la fin, quand même, je me permets, je le fais devant tout le monde. Et je leur dis, bon, vous avez tous des avis différents, et puis vous allez travailler avec vos formateurs et formatrices, et vous verrez bien ce qu'il en est. Mais en revanche, il y a deux points que vous soulevez, sur la liberté d'aller et venir, sur le fait que les résidents aillent sur la plage comme ça, qu'il faudrait peut-être les fouiller à l'entrée, qu'il faut toujours dire où on va. Et il y a un autre sujet sur le droit à l'intimité, sur le fait que... Il faut le dire aux enfants, si les personnes ont des troubles cognitifs, bref, toutes ces tensions-là. Et je leur dis, en fait, ça, c'est quand même des droits fondamentaux. Et à partir du moment où vous venez les mettre en question, où vous venez les réduire, il y a un vrai sujet. Le droit à l'intimité, c'est un droit fondamental, c'est la base. Donc, en fait, automatiquement, non, il ne faut pas prévenir les enfants, c'est plutôt le contraire. C'est se poser la question, à la limite, de si on le dit ou pas, c'est une question qui est légitime, mais ce n'est pas automatique de le dire aux enfants parce que les résidents ont des troubles cognitifs. Et donc j'essaye un peu de les faire aller comme ça sur les libertés qu'on supprime assez rapidement pour leur dire, en fait non, la liberté, vous n'avez pas le choix, elle est là, vous avez le droit de la discuter, mais en fait, n'oubliez pas qu'elle est là à la base.

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr. Et c'est là où on est dans l'éthique, la réflexion. Et c'est un support qui permet de bien imager. Et ça, c'est cool. Au niveau des rencontres, du coup, tu disais que c'était trois jours d'échange. Donc, pour passer les... C'est quoi ? C'est neuf ou dix épisodes ? Il y a à peu près dix heures.

  • Speaker #1

    Dix épisodes, mais c'est dix épisodes de 26 minutes. Donc, ça fait trois heures et demie de projection.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est vrai.

  • Speaker #1

    Ouais, ça va assez vite et ça c'est très précieux. Je ne me rendais pas encore compte quand on s'est rencontré la dernière fois de la pépite que j'avais entre les mains avec la série Septième Ciel. A la fois parce que c'est de la comédie et pour aborder ces sujets-là, mine de rien comme tu disais, en fait si j'avais proposé un drame, je pense que ça aurait été autrement plus dur. Tandis que là, la comédie permet de rentrer dans les sujets assez facilement et avec une certaine distance. tout en s'attachant au fur et à mesure, ce qui permet aussi de faire de l'éthique parce qu'on est engagé avec les personnages et on est attaché à eux. Et les épisodes sont très rythmés. Et donc, moi, j'en montrais à peu près trois par jour parce que je me suis rendu compte, j'avais fait un terrain exploratoire, qu'au-delà de trois, je perdais tout le monde. Enfin, plus d'une heure de projection, c'est hyper difficile. Surtout dans des conditions qui sont très... qui sont très artificielles, en fait. Les séries, tu les regardes chez toi, tranquille, ou alors en couple. Il y a plein de pratiques différentes des séries, mais tu ne regardes pas des séries dans une classe de 30 personnes, avec tes formateurs à côté, et tu n'en discutes pas après, dans la vraie vie. Donc, il y avait ce truc-là de regarder la série tous ensemble, dans une salle de cours, qui était quand même une expérience un peu particulière.

  • Speaker #0

    Oui, je me doute. Tu faisais les épisodes... consécutifs ou tu débriefes chaque épisode et où est-ce que tu les découpes même ?

  • Speaker #1

    Alors, je faisais trois par trois. Moi, c'est la solution que j'ai trouvée. Et après, du coup, les questions qui suivaient... Et après, je voyais en petits groupes, en focus groupes, où on discutait des épisodes qu'on avait vus tous ensemble le matin. Et surtout, j'ai gardé le dernier épisode pour la conclusion. Je voulais pas qu'on en parle, parce que je me suis rendue compte quand j'avais fait mon terrain exploratoire, où j'avais montré les 4 derniers épisodes à la suite, déjà que c'était trop long, 4 épisodes, mais qu'en plus de ça, il y a quand même... comment dire... La logique des séries fonctionne à plein, c'est-à-dire que quand on s'est attaché au personnage, et ben en fait on est triste de l'équité, et que ça coupe les jambes. Si je montrais le dernier épisode, en fait, les gens allaient plus parler. Parce qu'ils sont tristes d'avoir quitté les personnages, parce qu'on ne peut plus imaginer ce qui va leur arriver ensuite.

  • Speaker #0

    Et que quand même, tout le focus group, s'il fonctionne, c'est parce qu'on imagine la suite et qu'on fait des hypothèses sur la suite. Et donc, c'est pour ça que le dernier épisode, finalement, j'ai décidé de le garder pour la conclusion. Et c'est le dernier moment où on se voit et tout le monde attend avec impatience le dernier épisode. Et après, on se dit au revoir et chacun retourne à sa vie. C'est une façon de fermer l'expérience.

  • Speaker #1

    Ouais, pendant trois jours. Tu as vu combien de groupes ?

  • Speaker #0

    J'ai vu 14 groupes.

  • Speaker #1

    C'est vrai, quand même.

  • Speaker #0

    80 personnes interrogées.

  • Speaker #1

    OK, 14 groupes. Et du coup, ça rentrait dans un programme IFAS. C'est ça. OK. Au final, qu'est-ce que tu retiens de ces groupes ? Qu'est-ce que les étudiants t'ont retenu ? Est-ce que tu as eu des retours après ? En gros, qu'est-ce que tu as vu ? Qu'est-ce que ça a pu changer ?

  • Speaker #0

    Il y a quelque chose qui change et que j'avais sous-estimé. C'est effectivement le sujet de la sexualité des personnes âgées. C'est vraiment un espèce de point nodal pour faire évoluer la représentation qu'on a des personnes âgées. Je suis arrivée... Pour moi, tout le monde, c'était mon préjugé en tout cas, je savais que c'était un sujet tabou la sexualité des personnes âgées en établissement, mais pour autant, tout le monde savait que ça existait. Et donc là, je me suis retrouvée avec des discours qui étaient très différents les uns des autres, avec certaines personnes qui ne savaient pas que ça existait, avec d'autres personnes qui pensaient que c'était interdit si les gens n'étaient pas mariés. avec d'autres personnes au contraire qui étaient individuellement hyper enthousiastes à l'idée que ça existe et qu'il fallait vachement protéger ça. Et donc je me suis retrouvée avec une pluralité de discours véritablement autour de ce sujet-là, la sexualité c'est vraiment le sujet important de la série. Mais ce que je trouve assez passionnant, c'est que la sexualité des personnes âgées semble être un peu un impensé. C'est comme si ça n'existait pas véritablement. Et que là, à la découverte de la série, on se rend compte que ça existe. Et donc, c'est déjà un apprentissage en soi. Encore une fois, pas de généralité, pas tout le monde. Il y en a qui savent que ça existe. Mais que le fait que les personnes âgées aient une sexualité, Les fait passer d'objets de soins, où vraiment on dit qu'on veut travailler avec la personne âgée, il y a tout ce discours sur vraiment ce sont des patients, ce sont des objets de soins, il faut en prendre soin. Là, comme ils ont une sexualité et qu'ils tombent amoureux, le regard change complètement sur les personnes âgées, et d'objets de soins, ils deviennent de véritables sujets en fait. Et on ne les considère pas du tout de la même façon. Et donc, quelque part, c'est à travers cette impensée de la sexualité des personnes âgées qu'il y a une forme d'apprentissage. Et auparavant, dans la recherche en général, sur les séries qui nous permettent d'apprendre des choses, typiquement, c'était Dominique Pasquet qui a fait un travail sur Hélène et les garçons qui était très regardé par les petites filles pré-adolescentes. pour une éducation sentimentale, pour apprendre comment on allait faire son premier baiser, comment on abordait quelqu'un pour lui dire qu'on l'aimait, pour déclarer son amour, etc. Mais tout ça, ce ne sont pas des choses impensées, puisqu'on sait qu'elles existent, et on va voir une série pour apprendre. Tandis que là, on part d'une série où quelque part, on ne sait pas que ça existe, et on découvre avec la série que ça existe. Et donc, le mode d'apprentissage se fait à partir de quelque chose qu'on ne pensait pas véritablement exister. Alors après, tu vois ce que je veux dire ? Après, la richesse, et moi, c'est ça que j'ai adoré, c'est que certes, je ne fais pas de la formation, mais en revanche, j'en ai eu fait. Donc, j'ai déjà été formatrice, que j'ai fait de l'éthique. Et que, parce que aussi, je retiens tous les prénoms et que je pense que j'ai à cœur que ce soit un climat de confiance et que les gens puissent s'exprimer, qu'ils puissent aussi dire des âneries. puissent les dire librement sans avoir un jugement sur eux. Tout le monde se sentait libre de s'exprimer et notamment les plus anciennes et les plus expérimentées qui venaient en fait partager leurs pratiques, leurs anecdotes. Et dans les plus jeunes, il y en a certaines qui venaient partager des anecdotes autour du sujet de la sexualité. mais dont on sentait que c'était un peu réactivé et remis en question au moment où elle venait le proposer dans le focus group. Que par exemple, il y en a une qui racontait qu'elle était dans un établissement, et donc là tu vas voir que c'est un truc assez classique, que peut-être que tu auras déjà rencontré, mais le cas classique c'est que tu as deux personnes âgées qui ont des troubles cognitifs, qui commencent à se rapprocher, mais comme ça peut... peut être dangereux, qu'il y a un risque, on décide, par exemple, de les séparer des tâches, misant sur le fait qu'ils ne se souviendront pas exactement où l'un et l'autre sont. Et donc, on les sépare des tâches. Dans la vraie vie, parfois, ils se retrouvent. En tout cas, moi, ça m'est arrivé, j'étais extrêmement surprise. J'ai appris quelque chose à ce moment-là. Mais donc, là, par exemple, cette jeune aide-soyante en début de formation, Reraconter cette anecdote à un moment opportun pour venir le remettre en question, pour se dire, mais en fait, pourquoi on les a séparés à ce moment-là ? Qu'est-ce qui faisait de mal ? Et donc, venir re-questionner toute la question du risque. C'est comme si le risque, parce qu'il y avait un risque supposé, on réfléchissait même plus au droit.

  • Speaker #1

    Là, tu es clairement dans la question éthique, en fait. Donc, c'est... C'est 100% éthique. Mais ce qui est super intéressant, je trouve, c'est que cet angle bien-traitance, qui veut tout et rien dire, mais qui veut surtout tout dire, l'aborder avec un sujet aussi précis, ça permet de rendre les choses aussi concrètes. Et je trouve ça super intéressant. En fait, l'idée, c'est d'avoir un moyen différent d'entrer dans le sujet et puis d'amener les équipes, les professionnels, d'amener les gens, en fait, à... à regarder les choses juste un petit peu différemment, à faire ce petit pas de côté et ça c'est super.

  • Speaker #0

    Oui, et l'avantage avec une série, c'est qu'à la fois t'es attaché au personnage, c'est comme si c'était des vrais gens, mais tu sais que c'est pas des vrais gens, et en même temps t'es à distance parce que tu sais que c'est de la fiction. Donc, tandis que dans la vraie vie, il y a... c'est plus incarné, t'es toujours plus investi parce que c'est un résident que tu connais, parce que tu connais sa famille, parce que tu sens les choses de cette façon-là. Là, quand même, elles sont beaucoup moins engagées, c'est pas des vrais gens. Mais pour autant, elles sont quand même attachées, ce qui fait qu'elles s'engagent dans la discussion politique.

  • Speaker #1

    Même que ce soit avec des collègues, c'est dur, quoi. Surtout si c'est un sujet qui nous concerne, par rapport à un résident, une situation où... Il faut faire un choix, il faut décider. Et là, c'est difficile. Donc, ça permet de prendre un recul plus facile et d'amener aussi sur d'autres sujets.

  • Speaker #0

    Pas de décision à prendre à la fin dans le cas de la recherche. Donc, je pense qu'il y a moins d'enjeux.

  • Speaker #1

    OK. La prochaine étape ou les prochaines étapes, qu'est-ce que... Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que tu vois ? Est-ce qu'il y aura d'autres recherches ? Déjà, est-ce que tu peux nous dire des choses par rapport à la saison 2 ? S'il y a une saison 2, mais je crois que tu m'en avais parlé, donc...

  • Speaker #0

    Oui, il y a une saison 2, elle vient de sortir, puisqu'à chaque fois qu'on se voit, Arnaud, il y a une saison qui sort. Super. Et donc la saison 2 est sortie, on est au cœur de l'actualité. Elle est sortie sur Ciné+, OCS, donc pour les gens qui ont le canal plus...

  • Speaker #1

    C'est déjà OCS, ouais.

  • Speaker #0

    Et donc là, l'histoire est complètement... Les deux saisons peuvent se voir séparément, mais il y a quand même une évolution des personnages qu'on retrouve. Mais donc là, ils sont partis de l'EHPAD. Entre-temps, Jacques est mort. Et donc Rose va devoir se reconstruire. Se reconstruire et en plus de ça, faire vivre une histoire qu'elle avait à la fois du grand. C'était de construire un habitat partagé, autogéré. Une autre difficulté. Et donc là, ça va être une autre histoire autour du personnage de Rose. Ça va encore plus loin en termes de sexualité. Et moi, ce qui me fascine dans leur écriture, et parce que c'est des scénaristes hyper talentueux, c'est à quel point ils vont loin dans les possibles de l'amour. en travaillant à partir de personnages âgés ? Et comment l'âge devient aussi la condition d'une plus grande liberté ? Je ne sais pas si c'est réaliste, je ne sais pas si ce sera comme ça, comme moi-même je serai vieille. Mais en tout cas, je trouve ça bien qu'il y ait aussi ce genre de perspective pour l'avenir.

  • Speaker #1

    C'est clair que c'est plus joyeux que tout ce qu'on peut entendre tout le temps. Et c'est... Alors, j'imagine qu'il y a toujours cette pointe d'humour, mais c'est vrai qu'il y a aussi une... Oui, c'est une question de vie et de liberté, et c'est super sympa. Et c'est intéressant, moi, du coup, il faut que je m'y mette. Parce que ça m'intéresse aussi de voir comment on aborde l'habitat partagé.

  • Speaker #0

    Ça a été une grande question, et là, pour le coup, j'ai été là avec eux dès le début. Donc quand ils ont commencé à écrire parce qu'ils avaient envie d'écrire sur la coloc de personnes âgées, etc. On a vu les différents modèles qui existaient dans l'habitat partagé. Est-ce que c'est autogéré ou est-ce que c'est géré par un tiers ? Est-ce que c'est privé commercial ou est-ce qu'on est plutôt sur de l'associatif ? Et de voir aussi les problèmes qu'il y avait dans l'habitat partagé. Le vivre ensemble. quand quelqu'un décède, comment il est remplacé, comment on recrute les nouvelles personnes, est-ce qu'on fait du recrutement, comment on gère les conflits ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, il y a tout un fantasme aussi avec l'habitat partagé, de se dire que ça pourrait être la réponse qu'on a complètement oubliée, de se dire que c'est simple, on ferme les Ehpad et on fait des colloques et tout va bien. Ça pourrait dans certains cas, mais à mon avis pas tous. un peu le début, donc c'est intéressant aussi de voir comment c'est abordé, et puis juste d'en parler, parce qu'il y a certainement plein de belles choses à prendre, mais il faut en parler, il faut tester des trucs, et puis voilà.

  • Speaker #0

    La fiction l'a testé.

  • Speaker #1

    Et du coup, avec la fiction, on va pouvoir réfléchir un peu. Nickel. Qu'est-ce qu'on peut dire aux personnes qui sont intéressées ? Alors, la thèse, c'est pas pour tout de suite, la série. Par contre, c'est pour tout de suite. OCS, tu l'as dit. Comment on peut conclure ?

  • Speaker #0

    Canal+, je précise. Pour les gens qui ont Canal+, ils peuvent le trouver dans leur abonnement.

  • Speaker #1

    Ok, cool. Pour toi, c'est quoi la prochaine étape ?

  • Speaker #0

    Moi, la prochaine étape, c'est une étape d'écriture. Parce qu'écrire, c'est penser. Et que là, j'ai été pendant des mois avec les voix des aides-soignantes en début de formation, avec leur rire, leur discussion, etc. Que j'en ai tiré des pages et des pages de conversation. Mais que maintenant, il faut que tout ça ait du sens et de voir exactement où ça résonne. Donc on va rentrer dans le temps de l'analyse et de l'écriture. Et pour une soutenance qui est prévue en juin 2026. Bon,

  • Speaker #1

    un an et demi, le temps de faire un troisième épisode, peut-être autour d'une saison 3 où tu pourras nous raconter à ce sujet. Merci Manon, et puis à bientôt.

  • Speaker #0

    Merci Arnaud.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté l'épisode jusqu'au bout, j'espère que le sujet vous a plu et qu'il vous inspire. Pour m'aider à faire connaître le podcast, abonnez-vous sur votre plateforme d'écoute préférée. ou notez-le et partagez-le sur vos réseaux sociaux. N'hésitez pas à me contacter sur LinkedIn pour ma proposition de sujet. Bonne journée et à bientôt sur le podcast des établissements de médicaux sociaux.

Description


Dans cet épisode, je retrouve Manon Cerdan, ancienne directrice d’EHPAD et aujourd’hui chercheuse, pour parler de sa thèse et de la série Septième Ciel. Cette comédie, qui raconte avec humour et émotion la vie en EHPAD, sert à ouvrir des discussions importantes avec des aides-soignants en formation.


Manon utilise la série pour travailler les représentations de la vieillesse auprès d'étudiants en école d'aides-soignants.


👉 Au programme :

  • La fiction qui fait réfléchir : comment une série peut changer notre regard sur la vieillesse et les métiers du soin.

  • Les réactions des soignants : ce qu’ils retiennent des personnages de la série et ce que ça leur apprend sur leur métier.

  • Les grands sujets discutés : la liberté des résidents, leur intimité, et même la sexualité des personnes âgées, un sujet encore tabou mais essentiel.

  • Le rôle de la direction en EHPAD : attentes, critiques et incompréhensions autour de la figure du directeur, souvent caricaturée dans la fiction.

  • Les dynamiques de groupe en formation : entre échanges constructifs et déconstruction des préjugés grâce au prisme de la série.

  • Un aperçu de la saison 2 : cette fois, on explore les défis et les belles idées autour de l’habitat partagé pour les personnes âgées.


✨ Un épisode qui montre comment une série peut aider à mieux comprendre et améliorer la vie en établissement. Bonne écoute !


🎧 Disponible sur toutes les plateformes. Abonnez-vous, partagez et laissez une note pour soutenir le podcast ! 🙌


Vous pouvez contacter Manon du Linkedin et regarder la série (avec abonnement)


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et bienvenue sur le podcast des établissements médico-sociaux. Je m'appelle Arnaud Chevalier et après avoir été directeur d'EHPAD pendant 8 ans, j'aide les établissements de santé à adopter les meilleures innovations pour simplifier et améliorer leur quotidien. J'écris ce podcast pour partager les belles expériences portées par des gens passionnés. Avant de commencer, si vous appréciez ce podcast, vous pouvez vous abonner pour ne rater aucun épisode. Et encore mieux, mettre une note 5 étoiles sur Apple Podcasts et le partager à vos collègues. Sur ce, bon épisode. Bonjour à tous, aujourd'hui je discute avec Manon Cerdan. On a déjà fait un épisode en janvier 2023, donc on arrive à la suite, quasiment deux ans plus tard, même deux ans plus tard le temps de le diffuser. On avait parlé de la série 7e ciel, sur laquelle tu avais plus que collaboré, tu avais beaucoup participé, et notamment pour faire en sorte que ce soit une série qui représente la manière de la... possible le fonctionnement et le quotidien d'un établissement. Moi, franchement, c'est une série que j'ai vraiment adorée, que j'ai dévorée, mais en voyant des trucs, tout ça, j'ai beaucoup risqué, beaucoup aussi des démotions sur des trucs, sur plein de sujets, je me suis vu. Donc, c'est vraiment une série qu'il faut recommander à tous les gens qui sont placés de près ou de loin dans un établissement. Et depuis la sortie de cette série, toi tu t'es engagé sur un travail de recherche dans le cadre d'une thèse pour aller rencontrer les aides-soignantes, mais tu vas nous l'expliquer beaucoup mieux. Et l'idée c'est qu'est-ce qu'on fait d'une série qui montre la vie d'un établissement, qu'est-ce que ça peut apporter en gros pour les établissements et surtout pour les écrans. On va aborder ce sujet-là, tu vas pouvoir nous expliquer tout ça.

  • Speaker #1

    pour changer le monde, même si c'était plutôt plus complexe. Les images étaient capables d'auditer le regard. Donc ça, j'ai rejoint. Puis assez rapidement, dans mes 20 ans, j'avais 25 ans, j'ai décidé de creuser un peu cette envie que j'avais de travailler dans la vie de l'ES, parce que j'avais une grande question existentielle, qui est comment on fait pour rester libre jusqu'à la fin de sa vie. Et donc là, je suis passée par l'EHPAD, la direction d'EHPAD notamment. Une expérience qui a été fondatrice mais traumatisante pour moi. Ensuite, j'ai trouvé mon salut dans l'accueil familial pour les personnes âgées où je m'occupais des sujets de formation. Et puis il est arrivé ce moment où j'ai décidé de mettre en musique ces deux sujets d'intérêt dans ma vie, qui sont le cinéma et la vieillesse, en montant un projet de recherche en sciences de l'information et de la communication. Donc ça prend la forme d'une thèse aujourd'hui. Je suis financée pour cela par l'université Paris Panthéon-Assas. Je travaille sur la représentation de la vieillesse dans la fiction, et spécifiquement sur la série Septième Ciel, avec des aides-soignantes en début de formation.

  • Speaker #0

    Ok, alors, il y a plein de trucs sur lesquels je pourrais revenir. On l'a déjà abordé un petit peu la dernière fois, mais c'est vrai que toi, tu as eu un parcours aussi. de directrice, juste à un moment, comment ça vient, comment ça t'est venu ? Pourquoi ? Parce que si tu es dans le cinéma, comment tu te dis je vais aller bosser dans un Ehpad ?

  • Speaker #1

    En fait, ce qu'il y a, c'est que les deux étaient là dès le début. Ce qu'il y a, c'est que quand j'avais 20 ans, que j'étais à ce moment-là en école de commerce, j'avais quand même envie de me faire rêver et que la vieillesse allait tout de suite dans la vieillesse. J'avoue que ça me faisait probablement un peu peur. que le cinéma, voilà, j'avais envie de tenter ma chance et d'y aller. Et donc, j'avais ces deux-là au début. J'ai commencé par le cinéma. Assez vite, je me suis rendue compte que je préférais être une spectatrice plutôt que d'être dans les coulisses. Ça m'intéressait moins intellectuellement. Et donc, c'est pour ça que je suis allée vers la vieillesse, qui avait sa même place dans ma vie et dans mes intérêts. Et j'étais un peu plus mature. Et donc voilà, assez naturellement, quand j'ai quitté le cinéma, je me suis dit, bon, j'ai vu ce que j'avais à voir dans le cinéma, il est temps de passer à autre chose. Et finalement, la vieillesse, intellectuellement, professionnellement, existentiellement, ça m'apporte beaucoup plus.

  • Speaker #0

    C'est vrai que le cinéma se fait de prime abord beaucoup plus rêvé. Tu te dis que ça a l'air beaucoup plus fun, beaucoup plus cool. Et en pensant à ça, je me dis en même temps, même si ce n'est pas toujours simple, c'est tellement aussi vivant l'EHPAD et tout ce qui peut s'y passer de cocasse, d'incongru, d'assez hallucinant parfois, où du coup on se dit, est-ce que ce n'est pas même encore plus dynamique ? Il y a encore peut-être plus de surprises, je ne sais pas.

  • Speaker #1

    Oui, le réel, en général, c'est toujours plus surprenant que la fiction, de toute façon. Mais c'est surtout qu'en termes de profondeur, je trouvais que dans le secteur du vieillissement, à la fois parce que les sujets sont tellement plus profonds, c'est une expérience de la vie qui est une expérience extrême de la vie, la grande vieillesse. que je n'arrivais pas à trouver dans le cinéma. Et je pense que moi, je suis en plein dans mes questionnements existentiels et j'avais besoin de profondeur. Et ça, c'était surtout travailler auprès de la vieillesse, travailler auprès des personnes âgées, ou en tout cas y réfléchir, qui, moi, me nourrissaient immensément.

  • Speaker #0

    Je comprends. Tu voulais changer le monde. On avait eu forcément cette question-là. Est-ce que tu penses que le cinéma peut changer le monde ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne sais pas s'il peut changer le monde, mais là, tu vois, ce matin, j'étais en train de lire un ouvrage de Sabine Ausha de Mercé, qui est une sociologue et qui a beaucoup travaillé sur la fiction. Et elle, elle parle de comment, grâce à la fiction, la fiction a cet effet de transformation de la société, parce qu'elle permet de penser les problèmes qui sont en germe. d'y mettre de l'émotion, de les mettre en récit, et de toutes ces petites choses qu'on ressent dans la société, mais qui peut-être nous accablent, ou qu'on n'arrive pas à approcher, ou qui sont trop complexes, trop compliquées. La fiction et les scénaristes arrivent à le mettre en récit, et que ça, ça a une fonction d'anticipation et de projection, qui permet... parce que les citoyens arrivent à s'en emparer, arrivent à comprendre des problèmes complexes, à modifier la société et ses normes.

  • Speaker #0

    Je suis persuadé, ne serait-ce que par rapport à un changement culturel, tu vas voir quelque chose, se découvrir l'émotion, le fait de rêver aussi un petit peu, d'ouvrir, de voir autre chose, d'ouvrir un possible. Moi, je pense qu'il y a carrément un sujet, et puis c'était l'objet vraiment la dernière fois, mais on va passer à notre... nouvel objet, mais de se dire que le problème de l'EHPAD, c'est qu'il est complètement méconnu, voire inconnu. On ne sait pas ce que c'est. Du coup, on fantasme un petit peu sur des trucs qui n'ont pas forcément à voir et qu'à partir du moment où on rend les choses concrètes, ça peut déjà aussi changer beaucoup de choses. Tu vois, je pense à un truc qui a un petit peu de lien, mais C'est par rapport au YouTuber, par rapport à Innoxtag, à son documentaire, quand il monte, quand il escalade l'Everest. En gros, sur le coup, tu te dis qu'est-ce que c'est encore cette connerie ? Et en fait, tu te rends compte que derrière, c'est ultra profond et tout ça. Et sur un autre podcast, je l'ai entendu dire qu'il reçoit des messages de parents qui disent mes enfants, ils sont… coller toute la journée sur les jeux vidéo. Et puis là, en fait, ils disent quand est-ce qu'on va faire une rando, on voudrait faire ça. Et tu vois, moi, en fait, c'est pareil. En fait, j'ai mon fils qui a 9 ans qui me dit quand est-ce qu'on va faire le GR20 parce qu'il l'a vu dans l'épisode. Et finalement, ça fait changer un petit peu de perspective. Et je pense qu'on manque cruellement de reportages, de documentaires, de séries, de films, de tout ce qu'on veut, même peut-être de dessins animés. qui permettent de changer un petit peu notre vision de la vieillesse et du grand âge. Donc voilà, moi ça c'est mon point de vue.

  • Speaker #1

    Je suis d'accord avec toi et je le partage, et je le partage d'autant plus que même si j'en suis au traitement de mes données, comme on dit dans la recherche, donc j'en suis pas encore aux conclusions, je pense que la fiction est septième ciel auprès des aides-soignantes que j'ai rencontrées et à qui j'ai montré la série en entier. a vraiment fait évoluer leur regard. Et ça, je pense que ce sera la grande démonstration, en tout cas de ma thèse, c'est de montrer que non seulement ça fait évoluer le regard, mais de montrer comment ça le fait évoluer.

  • Speaker #0

    Du coup, est-ce que tu peux rentrer dans le détail ? En gros, comment tu vois les choses ? Qu'est-ce que tu as pu déjà mettre en place ? Quel retour ? Et puis, c'est quoi le principe de ta thèse ? En fait,

  • Speaker #1

    le principe de ma thèse, et comme ça, ça va permettre de faire le lien avec l'épisode qu'on avait fait il y a deux ans, c'est que je travaille à la fois sur la construction des représentations. Et donc, ça, c'était mon rôle de... conseillère grand âge au moment de l'écriture de la série. Et donc, comment on construisait les représentations avec les scénaristes ? Donc, Alice Vial, Clément Sazincourt et Clément Marchand. Et donc, quand tu fais des sciences de l'information et de la communication et quand tu étudies des contenus médiatiques, tu peux t'intéresser soit à la production, donc le scénario, ce que j'ai fait là, par exemple. tu peux t'intéresser au contenu, c'est-à-dire la série en elle-même, étudier un peu ex nihilo, comment tu étudies les représentations qu'il y a dans la série, sans savoir ce qui s'est passé ni à l'écriture ni à la réception. Et la troisième étape, c'est d'étudier la réception, c'est-à-dire comment un contenu est reçu par un public. Et donc moi, j'ai choisi de travailler sur deux pans, à la fois la production, c'est ce que je disais, pour travailler sur la construction des représentations à l'écriture. et comment ça se construit, et à la réception avec des aides-soignantes en début de formation. Et alors pourquoi j'ai choisi d'aller voir des aides-soignantes ? C'est que quand même, dans la série Septième Ciel, les scénaristes avaient choisi de mettre en valeur deux personnages d'aides-soignantes. Elsa, qui est une stagiaire, la petite vingtaine. Un peu perdu, qui est là par hasard, qui veut valider son stage, mais concrètement qui se comporte de façon étonnante, je dirais. Moi, c'est quelque chose qui m'avait gêné à l'écriture, mais c'est plutôt...

  • Speaker #0

    Alors, parce que du coup, moi, je la trouve génialissime. Et en fait, sans spoiler, mais un tout petit peu quand même, mais au tout début, on la voit, son réflexe en arrivant, c'est une personne âgée, endormie, qui bave un petit peu, mais voilà, pas trop, normal. Direct, c'est selfie et TikTok. Et moi, franchement, ça ne m'a pas choqué du tout. Je me suis dit, mais c'est normal. C'est le truc qu'on ne voit pas, mais c'est obligé que c'est comme ça dans la vraie vie.

  • Speaker #1

    Sûrement, moi, je trouvais qu'à l'écriture, c'était très exagéré, mais c'est le propre de la comédie. Et effectivement, quand j'ai rencontré les aides-soignantes en début de formation, et pour la plupart... Franchement, 90% ont travaillé en structure ou à domicile en tant qu'ASH ou faisant fonction. Toutes, elles disent, mais c'est la réalité. Nous, des jeunes, on en voit tout le temps des comme ça. Et en vrai, c'est là aussi où c'est un vrai bonheur d'avoir été là au moment de l'écriture, parce que ça me permet aussi, moi, de voir là où je me trompais et là où les auteurs ont décidé de suivre leur voix. Ils ont vraiment, pour eux, c'était hyper important que ce personnage soit aussi dans cette exagération très poussée de cette façon-là. Parce que c'est exactement ça qui fait réagir les aides-soignantes à la réception. Que contrairement à l'autre personnage, Karima, qui est une aide-soignante, vraiment c'est l'aide-soignante parfaite, dévouée, professionnelle, expérimentée, très juste, très calme. Le personnage de Karima fait beaucoup moins réagir. Donc finalement, en termes de recherche, elle a beaucoup moins d'intérêt que Elsa, la stagiaire qui fait tout n'importe comment. Parce que du coup, les aides-soignantes... qui sont en début de formation, encore une fois, en disant tout ce que le personnage d'Elsa fait mal, elles disent tout ce qu'il faut faire bien. Et donc là, on voit ce qui est important pour elles et qu'est-ce que ça veut dire être une bonne aide-soignante.

  • Speaker #0

    Oui, c'est clair. Non, mais oui, c'est logique. Et du coup, je comprends parce que je me dis, moi, j'ai envie de dire, oui, mais les nouveaux, c'est bien, ils vont arriver sur le circuit, donc c'est nickel qu'ils aient ce recul, en fait. peut-être un tout petit peu plus de maturité, mais je me dis, il y a quand même tous ceux qui sont en poste et pour lesquels c'est jamais négatif et mauvais de prendre un peu de recul. Mais c'est vrai que là, c'est un personnage qui correspond parfaitement. Oui,

  • Speaker #1

    ça correspond. Après, moi, c'est vrai que dans les aides-soignantes que je rencontre, alors oui, pourquoi j'ai choisi de faire ma recherche aussi en institut de formation aide-soignante, IFAS, en tout début de formation ? La première raison, c'est parce que moi, je voulais les rencontrer au moment où la norme professionnelle n'est pas trop marquée. Je ne voulais pas avoir que des postures ou des bonnes pratiques ou des choses qu'on dit parce que c'est comme ça qu'on l'a appris et qu'il faut faire. Je voulais encore qu'il y ait cette espèce de naïveté, tous ces idéaux qu'on peut avoir quand on se lance dans ce métier-là. Je voulais les toucher un peu du doigt. Ce qui est en partie une erreur de ma part, en tout cas un préjugé, parce que la plupart des aides-soignantes en début de formation que j'ai rencontrées, Donc c'est ce que je te disais, A, S, H, faisant fonction, il y en a qui ont trois mois d'expérience, il y en a d'autres qui ont 30 ans d'expérience. Donc j'avais quand même une pluralité d'expérience où clairement, non, elles n'étaient pas vierges de tout. Et le filtre de la norme professionnelle était quand même passé un peu dessus. Mais il y a quand même des idéaux qui restent. Et c'était assez beau d'aller toucher du doigt ses idéaux, mais aussi de déconstruire les postures. C'est-à-dire que moi, je les rencontre en tout début de formation, et le premier jour, après qu'on ait vu trois épisodes de la série, et assez classiquement, les premières remarques, ce ne sont que des critiques sur ce qui n'est pas réaliste dans la série, sur ce qui n'est pas bien. Il y en a plein qui disent Non, mais c'est n'importe quoi, ça ne se passe pas du tout comme ça dans la vraie vie Et c'est normal, en fait. quand tu es professionnel et que tu regardes une série qui parle de toi de ton métier encore plus quand tu es en début de formation où tu dois montrer que tu sais ou que tu es en train d'apprendre ou que tu es en train de devenir professionnel la chose la plus facile à faire c'est la critique et en fait je savais que la première séance on allait en passer par là qu'il fallait que ce soit déposé quelque part qu'on montre qu'on sait, qu'on est professionnel etc et que c'est qu'après qu'une fois que tout ça a été déposé toutes ces espèces de lieux communs, de choses qu'on a entendues, qu'il faut qu'on répète pour montrer qu'on sait, je savais que ça allait être le premier jour et qu'ensuite on allait rentrer vraiment dans l'attachement au personnage et dans les dilemmes qu'on allait pouvoir discuter.

  • Speaker #0

    Et c'est vrai que alors forcément il faut on raconte une histoire et puis il faut pour permettre de réagir il faut grossir un peu le trait, il y a sept ans. un passage où on se dit quand même où on pourrait on prend un peu cher le directeur il prend cher et du coup on pourrait se dire mince tu vas le prendre un peu pour soi et se dire bon en fait oui ok c'est de la connerie on adhère pas il y a ce côté là c'est sûr où il faut aller au delà de la remise en question et pas le prendre trop personnellement donc j'imagine c'est vrai que des gens aussi qui travaillent là depuis longtemps... ça peut faire une remise en question peut-être un petit peu trop violente. Du coup, on va se dire que c'est plus facile de mettre sous le tapis.

  • Speaker #1

    C'est intéressant ce que tu dis sur le directeur d'EHPAD. Forcément, quand tu regardes la série, tu vois ce comportement du directeur d'EHPAD. C'est la remarque que tu m'avais faite dans la fiction. Le directeur d'EHPAD, c'est toujours un peu le méchant. C'est un méchant avec des aspérités quand même. Ce n'est pas un vrai méchant parce qu'aucun personnage n'est vraiment méchant.

  • Speaker #0

    Moi, je dirais qu'en fait, il est nul.

  • Speaker #1

    Mais le fait qu'il soit nul, par exemple, à la réception avec les aides-soignantes, moi, ce que je trouve qui ressort beaucoup, c'est les attentes envers la direction. Par exemple, tu vois, elles disent qu'elles ne pourraient pas travailler à la fin de l'expérience. Est-ce que vous pourriez travailler dans cet EHPAD ? Et il y en a plein qui disent non, alors que quand même, c'est un EHPAD où les gens sont... relativement valides, on peut le dire.

  • Speaker #0

    Elle a plein de trucs sympas, il y a plein d'activités, un beau cadre de vie.

  • Speaker #1

    En revanche, elles disent non, je ne pourrai pas y travailler parce qu'il y a un problème de direction.

  • Speaker #0

    Ok. Et le problème, elle l'identifie sur quoi ?

  • Speaker #1

    Peut-être que la direction, comme tu le dis, elle est nulle, elle ne prend pas ses responsabilités, elle ne fait pas le job et elle cadre...

  • Speaker #0

    Ouais, c'est ça. En fait, il décide pas. À chaque fois, il est un peu en panique, un peu paumé. Et il décide pas, quoi.

  • Speaker #1

    Alors, après, moi, je fais... Donc, il y a effectivement ça qui pose un problème. L'autre problème qui apparaît pour elle... Encore une fois, moi, je fais du qualitatif. Le but, c'est pas de monter en généralité, mais plutôt de faire l'état de tous les discours qu'il peut y avoir sur un même sujet. C'est ça qui est passionnant, parce qu'elles sont pas d'accord, globalement. C'est autour de la direction d'EHPAD, par exemple. C'est qu'il y a quand même très ancré ce truc de ils sont là pour faire de l'argent. La seule chose qui compte pour eux, c'est de respecter les budgets. Et que nous, peu importe. Donc, il y a vraiment ce truc de lutte un peu hiérarchique qui ressort aussi. À la fois, on attend beaucoup de cadres de leur part, et c'est ça qui rassure. Mais en même temps, on met en doute leurs intentions.

  • Speaker #0

    Ok. Et comment tu gères ça ? Parce que, du coup, est-ce que tu le prends un peu comme un sujet de la sensibilisation et des représentations, ou pas ? Et comment tu peux gérer ça ?

  • Speaker #1

    C'est-à-dire, à quel niveau, comment je peux gérer ça ?

  • Speaker #0

    Dans le groupe, en fait, parce que tu vois, si tu amènes le sujet plutôt sous forme d'une posture professionnelle, de situation un peu bien traitante et tout ça, et qu'en fait, ce qui ressort, c'est l'encadrement, ça déconne, la direction, ça déconne. Est-ce que tu en parles ? Est-ce que tu recentres ? Comment tu gères ça par rapport à la dynamique de groupe ?

  • Speaker #1

    Alors ça, ça a été un vrai enjeu parce que je pense que comme je suis une ancienne directrice de maison de retraite, malheureusement, tout ce que j'entendais sur les directeurs et directrices d'EHPAD qui n'en font pas assez et qui pensent qu'à l'argent, je me suis dit Ouh, on part de loin Mais après, c'est ça aussi, c'est là où j'évolue et là où le rôle de la recherche est en tout cas pour moi plus… Je ne sais pas si c'est plus confortable, mais en tout cas, j'ai accepté ce rôle du chercheur ou de la chercheuse au moment où on fait de l'enquête. C'est une posture, à la fois je suis engagée parce que je participe et que je rigole et que je relance et que je recadre, mais je recadre d'une certaine façon, mais en même temps, je ne donne pas mon avis et je ne fais pas de la formation. Donc, quand la tension montait sur certains sujets ou que j'entends des choses qui me déplaisent, les choses qui me déplaisent, je les mets de côté parce qu'en fait, chacun a le droit d'avoir son avis. Et en plus de ça, moi, j'envisage ça plutôt comme de la discussion éthique et que je pense que j'ai été bercée par ça depuis trois ans quand même à l'Espace Éthique Île-de-France et ensuite au Centre d'éthique clinique de Cochin. Et quand les échanges montaient un peu trop, je disais non, mais le but, ce n'est pas d'atteindre le consensus. En fait, vous avez le droit de ne pas être d'accord. Et en plus de ça, vous travaillez sur des sujets où de toute façon, il n'y a pas d'avis tranché. Donc c'est normal que vous ne soyez pas d'accord et que chacun ait son avis. Et donc là, en général, ça faisait redescendre tout le monde, parce que le but, ce n'était pas de convaincre l'autre ou d'atteindre un consensus, c'était que chacun puisse s'exprimer. Et ça a été hyper bien vécu, dans le sens où j'ai été surprise, parce que là, j'ai relu tous les questionnaires anonymes que j'ai fait remplir à la fin. Je ne sais pas trop si je vais les exploiter parce que l'écrit, on récupère beaucoup moins de choses et ça a moins d'intérêt. Mais en revanche, je leur demande comment avez-vous vécu ces trois jours, parce qu'à chaque fois, je restais trois jours. Et ce qui ressort beaucoup, c'est le plaisir de cette conversation. Et ce qui ressort aussi, c'est que cette conversation, elle n'était pas dans le débat ou dans l'opposition, mais elles disent... On a aimé discuter, de voir que chacun avait un point de vue différent, de comparer nos points de vue. Et ce n'était pas du tout vécu comme une tension ou un problème, mais plutôt comme quelque chose d'hyper positif qui ressortait de l'expérience. Pour moi, c'était une discussion éthique, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, oui. Et puis en plus, tu es dans une logique d'observation et pas de formation où tu dois amener un peu plus... Un point B, mais je comprends bien. Après, c'est là où on voit, à travers la formation, qu'en fait, le besoin... Alors, je n'ai pas le recul pour dire si c'est le besoin aujourd'hui ou si ça a toujours été, mais il y a ce besoin énorme de vider son sac, en fait. Et là, tu as un motif parfait, parce qu'en plus, c'est moins... Tu vois, on ne parle pas de soi. On parle de ce qu'on voit à la télé, donc on peut y aller un peu plus. Mais en même temps, ça permet aussi de partager avec des gens qui... qui ne savent pas forcément s'ils sont en tout début de formation, mais avec toi et avec des gens qui l'ont vécu. Donc, c'est beaucoup plus fort.

  • Speaker #1

    Et moi, du coup, j'avais quand même deux limites. À la fois, moi, je n'étais pas là pour faire de la formation. Et donc, il ne faut pas que ça rentre en porte à faux avec les formateurs qui sont là, eux, à l'année et c'est eux qui vont former. Donc, il ne fallait pas non plus que j'amène des informations qui allaient contredire ce qu'ils allaient dire après. Donc moi, c'est pour ça aussi que je suis restée très en retrait par rapport à ça. Et puis, je crois que c'est comme tu dis, il faut qu'il y ait des espaces où les gens puissent s'exprimer sans qu'on les reprenne ou qu'on les reforme. Et il y avait une régulation par le groupe, vu que les plus expérimentés, en général, n'étaient pas forcément d'accord et qu'il faut faire confiance au groupe. Mais quand même, à la fin, on fait une conclusion. C'est là où je diffuse le dernier épisode et où on se quitte. Donc, on sent qu'il y a toujours aussi une difficulté à se quitter. C'est assez touchant. Mais je leur dis quand même, parce qu'il y a deux choses qui sont en question et qui reviennent régulièrement. C'est la liberté d'aller et venir et le droit à l'intimité. Et qu'à la fin, quand même, je me permets, je le fais devant tout le monde. Et je leur dis, bon, vous avez tous des avis différents, et puis vous allez travailler avec vos formateurs et formatrices, et vous verrez bien ce qu'il en est. Mais en revanche, il y a deux points que vous soulevez, sur la liberté d'aller et venir, sur le fait que les résidents aillent sur la plage comme ça, qu'il faudrait peut-être les fouiller à l'entrée, qu'il faut toujours dire où on va. Et il y a un autre sujet sur le droit à l'intimité, sur le fait que... Il faut le dire aux enfants, si les personnes ont des troubles cognitifs, bref, toutes ces tensions-là. Et je leur dis, en fait, ça, c'est quand même des droits fondamentaux. Et à partir du moment où vous venez les mettre en question, où vous venez les réduire, il y a un vrai sujet. Le droit à l'intimité, c'est un droit fondamental, c'est la base. Donc, en fait, automatiquement, non, il ne faut pas prévenir les enfants, c'est plutôt le contraire. C'est se poser la question, à la limite, de si on le dit ou pas, c'est une question qui est légitime, mais ce n'est pas automatique de le dire aux enfants parce que les résidents ont des troubles cognitifs. Et donc j'essaye un peu de les faire aller comme ça sur les libertés qu'on supprime assez rapidement pour leur dire, en fait non, la liberté, vous n'avez pas le choix, elle est là, vous avez le droit de la discuter, mais en fait, n'oubliez pas qu'elle est là à la base.

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr. Et c'est là où on est dans l'éthique, la réflexion. Et c'est un support qui permet de bien imager. Et ça, c'est cool. Au niveau des rencontres, du coup, tu disais que c'était trois jours d'échange. Donc, pour passer les... C'est quoi ? C'est neuf ou dix épisodes ? Il y a à peu près dix heures.

  • Speaker #1

    Dix épisodes, mais c'est dix épisodes de 26 minutes. Donc, ça fait trois heures et demie de projection.

  • Speaker #0

    Ah oui, c'est vrai.

  • Speaker #1

    Ouais, ça va assez vite et ça c'est très précieux. Je ne me rendais pas encore compte quand on s'est rencontré la dernière fois de la pépite que j'avais entre les mains avec la série Septième Ciel. A la fois parce que c'est de la comédie et pour aborder ces sujets-là, mine de rien comme tu disais, en fait si j'avais proposé un drame, je pense que ça aurait été autrement plus dur. Tandis que là, la comédie permet de rentrer dans les sujets assez facilement et avec une certaine distance. tout en s'attachant au fur et à mesure, ce qui permet aussi de faire de l'éthique parce qu'on est engagé avec les personnages et on est attaché à eux. Et les épisodes sont très rythmés. Et donc, moi, j'en montrais à peu près trois par jour parce que je me suis rendu compte, j'avais fait un terrain exploratoire, qu'au-delà de trois, je perdais tout le monde. Enfin, plus d'une heure de projection, c'est hyper difficile. Surtout dans des conditions qui sont très... qui sont très artificielles, en fait. Les séries, tu les regardes chez toi, tranquille, ou alors en couple. Il y a plein de pratiques différentes des séries, mais tu ne regardes pas des séries dans une classe de 30 personnes, avec tes formateurs à côté, et tu n'en discutes pas après, dans la vraie vie. Donc, il y avait ce truc-là de regarder la série tous ensemble, dans une salle de cours, qui était quand même une expérience un peu particulière.

  • Speaker #0

    Oui, je me doute. Tu faisais les épisodes... consécutifs ou tu débriefes chaque épisode et où est-ce que tu les découpes même ?

  • Speaker #1

    Alors, je faisais trois par trois. Moi, c'est la solution que j'ai trouvée. Et après, du coup, les questions qui suivaient... Et après, je voyais en petits groupes, en focus groupes, où on discutait des épisodes qu'on avait vus tous ensemble le matin. Et surtout, j'ai gardé le dernier épisode pour la conclusion. Je voulais pas qu'on en parle, parce que je me suis rendue compte quand j'avais fait mon terrain exploratoire, où j'avais montré les 4 derniers épisodes à la suite, déjà que c'était trop long, 4 épisodes, mais qu'en plus de ça, il y a quand même... comment dire... La logique des séries fonctionne à plein, c'est-à-dire que quand on s'est attaché au personnage, et ben en fait on est triste de l'équité, et que ça coupe les jambes. Si je montrais le dernier épisode, en fait, les gens allaient plus parler. Parce qu'ils sont tristes d'avoir quitté les personnages, parce qu'on ne peut plus imaginer ce qui va leur arriver ensuite.

  • Speaker #0

    Et que quand même, tout le focus group, s'il fonctionne, c'est parce qu'on imagine la suite et qu'on fait des hypothèses sur la suite. Et donc, c'est pour ça que le dernier épisode, finalement, j'ai décidé de le garder pour la conclusion. Et c'est le dernier moment où on se voit et tout le monde attend avec impatience le dernier épisode. Et après, on se dit au revoir et chacun retourne à sa vie. C'est une façon de fermer l'expérience.

  • Speaker #1

    Ouais, pendant trois jours. Tu as vu combien de groupes ?

  • Speaker #0

    J'ai vu 14 groupes.

  • Speaker #1

    C'est vrai, quand même.

  • Speaker #0

    80 personnes interrogées.

  • Speaker #1

    OK, 14 groupes. Et du coup, ça rentrait dans un programme IFAS. C'est ça. OK. Au final, qu'est-ce que tu retiens de ces groupes ? Qu'est-ce que les étudiants t'ont retenu ? Est-ce que tu as eu des retours après ? En gros, qu'est-ce que tu as vu ? Qu'est-ce que ça a pu changer ?

  • Speaker #0

    Il y a quelque chose qui change et que j'avais sous-estimé. C'est effectivement le sujet de la sexualité des personnes âgées. C'est vraiment un espèce de point nodal pour faire évoluer la représentation qu'on a des personnes âgées. Je suis arrivée... Pour moi, tout le monde, c'était mon préjugé en tout cas, je savais que c'était un sujet tabou la sexualité des personnes âgées en établissement, mais pour autant, tout le monde savait que ça existait. Et donc là, je me suis retrouvée avec des discours qui étaient très différents les uns des autres, avec certaines personnes qui ne savaient pas que ça existait, avec d'autres personnes qui pensaient que c'était interdit si les gens n'étaient pas mariés. avec d'autres personnes au contraire qui étaient individuellement hyper enthousiastes à l'idée que ça existe et qu'il fallait vachement protéger ça. Et donc je me suis retrouvée avec une pluralité de discours véritablement autour de ce sujet-là, la sexualité c'est vraiment le sujet important de la série. Mais ce que je trouve assez passionnant, c'est que la sexualité des personnes âgées semble être un peu un impensé. C'est comme si ça n'existait pas véritablement. Et que là, à la découverte de la série, on se rend compte que ça existe. Et donc, c'est déjà un apprentissage en soi. Encore une fois, pas de généralité, pas tout le monde. Il y en a qui savent que ça existe. Mais que le fait que les personnes âgées aient une sexualité, Les fait passer d'objets de soins, où vraiment on dit qu'on veut travailler avec la personne âgée, il y a tout ce discours sur vraiment ce sont des patients, ce sont des objets de soins, il faut en prendre soin. Là, comme ils ont une sexualité et qu'ils tombent amoureux, le regard change complètement sur les personnes âgées, et d'objets de soins, ils deviennent de véritables sujets en fait. Et on ne les considère pas du tout de la même façon. Et donc, quelque part, c'est à travers cette impensée de la sexualité des personnes âgées qu'il y a une forme d'apprentissage. Et auparavant, dans la recherche en général, sur les séries qui nous permettent d'apprendre des choses, typiquement, c'était Dominique Pasquet qui a fait un travail sur Hélène et les garçons qui était très regardé par les petites filles pré-adolescentes. pour une éducation sentimentale, pour apprendre comment on allait faire son premier baiser, comment on abordait quelqu'un pour lui dire qu'on l'aimait, pour déclarer son amour, etc. Mais tout ça, ce ne sont pas des choses impensées, puisqu'on sait qu'elles existent, et on va voir une série pour apprendre. Tandis que là, on part d'une série où quelque part, on ne sait pas que ça existe, et on découvre avec la série que ça existe. Et donc, le mode d'apprentissage se fait à partir de quelque chose qu'on ne pensait pas véritablement exister. Alors après, tu vois ce que je veux dire ? Après, la richesse, et moi, c'est ça que j'ai adoré, c'est que certes, je ne fais pas de la formation, mais en revanche, j'en ai eu fait. Donc, j'ai déjà été formatrice, que j'ai fait de l'éthique. Et que, parce que aussi, je retiens tous les prénoms et que je pense que j'ai à cœur que ce soit un climat de confiance et que les gens puissent s'exprimer, qu'ils puissent aussi dire des âneries. puissent les dire librement sans avoir un jugement sur eux. Tout le monde se sentait libre de s'exprimer et notamment les plus anciennes et les plus expérimentées qui venaient en fait partager leurs pratiques, leurs anecdotes. Et dans les plus jeunes, il y en a certaines qui venaient partager des anecdotes autour du sujet de la sexualité. mais dont on sentait que c'était un peu réactivé et remis en question au moment où elle venait le proposer dans le focus group. Que par exemple, il y en a une qui racontait qu'elle était dans un établissement, et donc là tu vas voir que c'est un truc assez classique, que peut-être que tu auras déjà rencontré, mais le cas classique c'est que tu as deux personnes âgées qui ont des troubles cognitifs, qui commencent à se rapprocher, mais comme ça peut... peut être dangereux, qu'il y a un risque, on décide, par exemple, de les séparer des tâches, misant sur le fait qu'ils ne se souviendront pas exactement où l'un et l'autre sont. Et donc, on les sépare des tâches. Dans la vraie vie, parfois, ils se retrouvent. En tout cas, moi, ça m'est arrivé, j'étais extrêmement surprise. J'ai appris quelque chose à ce moment-là. Mais donc, là, par exemple, cette jeune aide-soyante en début de formation, Reraconter cette anecdote à un moment opportun pour venir le remettre en question, pour se dire, mais en fait, pourquoi on les a séparés à ce moment-là ? Qu'est-ce qui faisait de mal ? Et donc, venir re-questionner toute la question du risque. C'est comme si le risque, parce qu'il y avait un risque supposé, on réfléchissait même plus au droit.

  • Speaker #1

    Là, tu es clairement dans la question éthique, en fait. Donc, c'est... C'est 100% éthique. Mais ce qui est super intéressant, je trouve, c'est que cet angle bien-traitance, qui veut tout et rien dire, mais qui veut surtout tout dire, l'aborder avec un sujet aussi précis, ça permet de rendre les choses aussi concrètes. Et je trouve ça super intéressant. En fait, l'idée, c'est d'avoir un moyen différent d'entrer dans le sujet et puis d'amener les équipes, les professionnels, d'amener les gens, en fait, à... à regarder les choses juste un petit peu différemment, à faire ce petit pas de côté et ça c'est super.

  • Speaker #0

    Oui, et l'avantage avec une série, c'est qu'à la fois t'es attaché au personnage, c'est comme si c'était des vrais gens, mais tu sais que c'est pas des vrais gens, et en même temps t'es à distance parce que tu sais que c'est de la fiction. Donc, tandis que dans la vraie vie, il y a... c'est plus incarné, t'es toujours plus investi parce que c'est un résident que tu connais, parce que tu connais sa famille, parce que tu sens les choses de cette façon-là. Là, quand même, elles sont beaucoup moins engagées, c'est pas des vrais gens. Mais pour autant, elles sont quand même attachées, ce qui fait qu'elles s'engagent dans la discussion politique.

  • Speaker #1

    Même que ce soit avec des collègues, c'est dur, quoi. Surtout si c'est un sujet qui nous concerne, par rapport à un résident, une situation où... Il faut faire un choix, il faut décider. Et là, c'est difficile. Donc, ça permet de prendre un recul plus facile et d'amener aussi sur d'autres sujets.

  • Speaker #0

    Pas de décision à prendre à la fin dans le cas de la recherche. Donc, je pense qu'il y a moins d'enjeux.

  • Speaker #1

    OK. La prochaine étape ou les prochaines étapes, qu'est-ce que... Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que tu vois ? Est-ce qu'il y aura d'autres recherches ? Déjà, est-ce que tu peux nous dire des choses par rapport à la saison 2 ? S'il y a une saison 2, mais je crois que tu m'en avais parlé, donc...

  • Speaker #0

    Oui, il y a une saison 2, elle vient de sortir, puisqu'à chaque fois qu'on se voit, Arnaud, il y a une saison qui sort. Super. Et donc la saison 2 est sortie, on est au cœur de l'actualité. Elle est sortie sur Ciné+, OCS, donc pour les gens qui ont le canal plus...

  • Speaker #1

    C'est déjà OCS, ouais.

  • Speaker #0

    Et donc là, l'histoire est complètement... Les deux saisons peuvent se voir séparément, mais il y a quand même une évolution des personnages qu'on retrouve. Mais donc là, ils sont partis de l'EHPAD. Entre-temps, Jacques est mort. Et donc Rose va devoir se reconstruire. Se reconstruire et en plus de ça, faire vivre une histoire qu'elle avait à la fois du grand. C'était de construire un habitat partagé, autogéré. Une autre difficulté. Et donc là, ça va être une autre histoire autour du personnage de Rose. Ça va encore plus loin en termes de sexualité. Et moi, ce qui me fascine dans leur écriture, et parce que c'est des scénaristes hyper talentueux, c'est à quel point ils vont loin dans les possibles de l'amour. en travaillant à partir de personnages âgés ? Et comment l'âge devient aussi la condition d'une plus grande liberté ? Je ne sais pas si c'est réaliste, je ne sais pas si ce sera comme ça, comme moi-même je serai vieille. Mais en tout cas, je trouve ça bien qu'il y ait aussi ce genre de perspective pour l'avenir.

  • Speaker #1

    C'est clair que c'est plus joyeux que tout ce qu'on peut entendre tout le temps. Et c'est... Alors, j'imagine qu'il y a toujours cette pointe d'humour, mais c'est vrai qu'il y a aussi une... Oui, c'est une question de vie et de liberté, et c'est super sympa. Et c'est intéressant, moi, du coup, il faut que je m'y mette. Parce que ça m'intéresse aussi de voir comment on aborde l'habitat partagé.

  • Speaker #0

    Ça a été une grande question, et là, pour le coup, j'ai été là avec eux dès le début. Donc quand ils ont commencé à écrire parce qu'ils avaient envie d'écrire sur la coloc de personnes âgées, etc. On a vu les différents modèles qui existaient dans l'habitat partagé. Est-ce que c'est autogéré ou est-ce que c'est géré par un tiers ? Est-ce que c'est privé commercial ou est-ce qu'on est plutôt sur de l'associatif ? Et de voir aussi les problèmes qu'il y avait dans l'habitat partagé. Le vivre ensemble. quand quelqu'un décède, comment il est remplacé, comment on recrute les nouvelles personnes, est-ce qu'on fait du recrutement, comment on gère les conflits ?

  • Speaker #1

    Bien sûr, il y a tout un fantasme aussi avec l'habitat partagé, de se dire que ça pourrait être la réponse qu'on a complètement oubliée, de se dire que c'est simple, on ferme les Ehpad et on fait des colloques et tout va bien. Ça pourrait dans certains cas, mais à mon avis pas tous. un peu le début, donc c'est intéressant aussi de voir comment c'est abordé, et puis juste d'en parler, parce qu'il y a certainement plein de belles choses à prendre, mais il faut en parler, il faut tester des trucs, et puis voilà.

  • Speaker #0

    La fiction l'a testé.

  • Speaker #1

    Et du coup, avec la fiction, on va pouvoir réfléchir un peu. Nickel. Qu'est-ce qu'on peut dire aux personnes qui sont intéressées ? Alors, la thèse, c'est pas pour tout de suite, la série. Par contre, c'est pour tout de suite. OCS, tu l'as dit. Comment on peut conclure ?

  • Speaker #0

    Canal+, je précise. Pour les gens qui ont Canal+, ils peuvent le trouver dans leur abonnement.

  • Speaker #1

    Ok, cool. Pour toi, c'est quoi la prochaine étape ?

  • Speaker #0

    Moi, la prochaine étape, c'est une étape d'écriture. Parce qu'écrire, c'est penser. Et que là, j'ai été pendant des mois avec les voix des aides-soignantes en début de formation, avec leur rire, leur discussion, etc. Que j'en ai tiré des pages et des pages de conversation. Mais que maintenant, il faut que tout ça ait du sens et de voir exactement où ça résonne. Donc on va rentrer dans le temps de l'analyse et de l'écriture. Et pour une soutenance qui est prévue en juin 2026. Bon,

  • Speaker #1

    un an et demi, le temps de faire un troisième épisode, peut-être autour d'une saison 3 où tu pourras nous raconter à ce sujet. Merci Manon, et puis à bientôt.

  • Speaker #0

    Merci Arnaud.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté l'épisode jusqu'au bout, j'espère que le sujet vous a plu et qu'il vous inspire. Pour m'aider à faire connaître le podcast, abonnez-vous sur votre plateforme d'écoute préférée. ou notez-le et partagez-le sur vos réseaux sociaux. N'hésitez pas à me contacter sur LinkedIn pour ma proposition de sujet. Bonne journée et à bientôt sur le podcast des établissements de médicaux sociaux.

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