- Speaker #0
Les histoires d'entrepreneurs, les échos du territoire, le territoire en écho, un podcast de Roissy Dev.
- Speaker #1
Bonjour et bienvenue dans cette série réalisée pour et par les entrepreneurs du territoire de Roissy Pays de France. Dans ce podcast, vous découvrirez les parcours inspirants de celles et ceux qui façonnent l'économie locale. Aujourd'hui, première partie d'un rendez-vous avec le directeur général de l'entreprise Dushow, le leader des solutions techniques de l'événementiel. C'est un homme idéaliste, altruiste, adepte de la gentillesse au quotidien. Voici Xavier Demay.
- Speaker #0
Le Territoire en écho, un podcast de Roissy Dev.
- Speaker #1
Bonjour Xavier.
- Speaker #0
Bonjour David.
- Speaker #1
350 collaborateurs, 5000 enceintes de sono, 4000 micros, 8000 projecteurs, le tout sur 30 000 m². C'est vertigineux.
- Speaker #0
Écoute, je ne me rends pas bien compte. J'espère que tu as bien fait tes calculs pour annoncer tout ça.
- Speaker #1
Je suis allé sur votre site.
- Speaker #0
Oui, il y a bien cette quantité-là. Moi, j'en suis le premier surpris aussi. Parce que quand on voit le parcours, effectivement, qu'on se retourne deux minutes en comptant tous ces équipements, je suis moi-même surpris.
- Speaker #1
Quand on voit le parcours, ça veut dire que vous venez d'où, Dushow ? Et d'où vient Xavier ?
- Speaker #0
Dushow, c'est un rassemblement d'entrepreneurs. C'est une entreprise qui a 40 ans passé. Qui a été créée en 1982. Moi, j'ai rejoint cette aventure en mi-des années 90, c'est-à-dire vers 1995-96. Et ce rassemblement d'entrepreneurs, c'est-à-dire de micro-entreprises créées dans les années 80, ces entreprises grandissantes, se sont au fil du temps rassemblées, associées, pour constituer une entreprise de plus en plus importante, qui a fini par s'appeler, vers 2010, Groupe Dushow, puisque ça représentait déjà à l'époque la première entreprise française des métiers de la technique du spectacle.
- Speaker #1
Donc déjà à l'époque et encore aujourd'hui ?
- Speaker #0
Et toujours aujourd'hui. Ce groupe Dushow a lui-même été repris par le groupe Novelty en 2018, puisque la logique des créations d'entreprises, c'est qu'au bout d'un moment, les fondateurs souhaitent réaliser, c'est-à-dire passer à une autre activité plus... plus tranquille, à base de chaises longues et de maisons au bord de mer, ce qui est logique.
- Speaker #1
On verra de quoi vous rêvez, mais ça, on le verra en fin de deuxième épisode.
- Speaker #0
Moi, j'étais le plus jeune des vieux, c'est ce que je disais, avec beaucoup de tendresse. C'est vrai que le temps a passé et que voilà, les générations sont passées. On représente la maturité on va dire.
- Speaker #1
Oui, c'est ça. Mais alors, avant la maturité, le Xavier de 10 ans, il rêve de quoi ? Il rêve déjà d'éclairage, de gros son, de vidéo ?
- Speaker #0
Non, pas tout à fait. Mais dès l'âge de 12 ans, j'achète des projecteurs, tu sais, de... Alors, excusez-moi.
- Speaker #1
Les PAR 56, là.
- Speaker #0
J'ai tendance à vous tutoyer parce que...
- Speaker #1
Non, non, mais c'est bien, c'est bien. Dans le spectacle, on se tutoie. Allez, hop, c'est parti, on se tutoie.
- Speaker #0
Dans mon habitude, c'est que je tutoie. Donc, j'ai du mal à parfois...
- Speaker #1
Oui, oui, c'est bien.
- Speaker #0
Bon. Moi je suis passionné, je passe devant les vitrines des magasins, je vois des ampoules de toutes les couleurs colorées qui clignotent, avec des petits modulateurs, je commence à acheter ça.
- Speaker #1
Et organiser tes premières booms.
- Speaker #0
Et j'organise des premières booms, je crame mes premiers amplis, parce que ça joue trop fort. En même temps, j'apprends la guitare, avec quelques copains on monte un groupe de rock, et j'organise à 15 ans et demi, on organise notre premier concert. Et ce jour-là, il y avait 500 personnes. Et ce n'était pas prévu du tout comme ça, parce qu'on était les premiers surpris. Et nous, on est des archi novices, on n'est pas très bons, on ne chante pas très bien. Mais d'un coup, je suis confronté à ce monde assez incroyable. Il y a du public, il y a des gens qui dansent et ça marque ma vie pour la suite, en me disant moi je veux être là, je ne veux pas être ailleurs.
- Speaker #1
Oui, c'est ça. L'étincelle, elle est aussi liée à cette grosse fréquentation d'un seul coup totalement inattendue.
- Speaker #0
Oui, un peu la surprise. Et puis je tombe, je suis un peu fasciné par cette foule qui attend au milieu de la lumière et qui, quand on passe au noir, se met à crier. Comme s'il se passait quelque chose. Voilà, on a juste éteint la lumière et tout le monde fait "haaaa" ! Et voilà, ce frisson, je l'ai toujours dans les plus gros shows qu'on puisse faire aujourd'hui. Ce moment où on fait le noir salle, c'est assez magique. On a l'impression d'avoir des super pouvoirs. Juste en éteignant la lumière, donc c'est assez rigolo.
- Speaker #1
Un long dimanche sans fin, ça te rappelle quelque chose, Never Ending Sunday ? C'est une chanson que tu as écrite avec tes complices pendant le confinement pour le personnel soignant. Vous avez donc réussi à vous occuper les gens d'événementiel pendant le confinement ?
- Speaker #0
On a été les premiers touchés en termes d'activité, puisque nous, dès le mois de janvier 2020, les gros concerts ont été annulés. Je te rappelle qu'on a réduit les jauges, les capacités des salles au fur et à mesure que le temps passe. Je crois qu'on est tombé à 1000 places juste avant. Ça veut dire qu'on pouvait faire un Bercy ou un Zénith, mais avec simplement 1000 personnes, ce qui était un peu compliqué économiquement, évidemment. Et puis ça s'est terminé évidemment par le confinement. L'histoire de cette musique-là, c'est que moi, comme je l'ai dit, je viens de la musique. Et je suis toujours musicien amateur, amateur éclairé, on va dire. Je fais ça pour mon plaisir avec mes amis, avec mon frère. Et puis pendant le Covid, effectivement, du temps, beaucoup de temps disponible. Et puis beaucoup d'artistes sur les réseaux qui font des petites vidéos. Et puis mes amis m'ont dit "Eh ouais, mais si nous on faisait quelque chose pour remercier les soignants
- Speaker #1
Est-ce que l'ennui a une place dans ta vie, Xavier ? Parce que le Covid a été propice à un peu d'ennui. L'ennui, attention, pas l'ennui de fainéantise, l'ennui qui permet de créer aussi.
- Speaker #0
Pour moi, c'est vachement important, l'ennui. L'ennui, ça fait partie de ce qui libère la boîte à idées. J'ai besoin, à titre personnel, je suis très sollicité par tous les projets qu'on essaye de mener, mais moi, j'ai besoin de ce temps de pause. Parce que j'ai besoin de réfléchir, j'ai besoin de laisser mon esprit. Et je le trouve dans la musique parce que j'écris ces morceaux, j'écris des textes. Et ça fait une espèce de thérapie, une espèce de… De méditation, c'est exactement ma méditation à moi. J'ai eu des emmerdes de santé, j'ai fait un Covid long, ça a fait un an et demi. Donc je suis resté chez moi, du coup à ne rien faire. Comme tu vois, je suis un peu hyperactif néanmoins. Donc, bloqué chez moi, j'ai pris 16 kilos et j'ai eu une dépression nerveuse parce qu'il n'y a rien à faire. Et qu'est-ce qui s'est passé ? Moi, ça m'a touché le système cognitif central. Donc, j'ai réappris B-A-BA, j'ai réappris les additions et les retenues dans les additions. Donc, 14 plus 17 égal… Oh là là, attends, ne bouge pas. Qu'est-ce qui s'est passé ? Je pense que j'aurais été chez un genre de boîte, ils m'auraient flippé. Moi, j'ai appelé le président du groupe, Jacques, que je connais depuis 38 ans. J'ai dit "bon Jacques, là, moi, je sucre les fraises, je suis comme un légume, j'ai deux tension, je ne peux pas assumer le job, je comprendrais que tu prennes quelqu'un, un manager de transit. J'en ai pour un an, d'après ce que les toubibs me disent." Et puis Jacques m'a dit : "c'est hors de question" Il m'a dit "tu te reposes. Les équipes ici se sont accaparées tout." Tu vois, tu avais un vrai accompagnement, un vrai... Bah ouais, je me dis, j'ai bien fait d'être gentil quand même, tu vois, quelque part.
- Speaker #1
C'est Yves Montand qui dit ça dans la chanson des Restos du Coeur. Notre démarche est en fait égoïste, demain nos noms peut-être grossiront la liste. Donc finalement,
- Speaker #0
c'est aussi de l'anticipation. T'as raison, c'est une très très belle remarque sur... J'étais justement sur les restos, on fait les restos du cœur depuis 30 ans, j'en suis l'héritier, mais ce n'est pas moi qui suis à l'origine de ça. J'y suis passé la semaine dernière, le dernier tournage c'était lundi. C'est extraordinaire l'accueil qu'on a vécu en arrivant par les équipes, la production, les artistes et tout. Pareil, là tu te dis, c'est quand même un métier, c'est sympa, on ne compte pas les heures, là il est quelle heure ? Ah bah oui, il est 1h30 du matin. En même temps, on est en train de boire un coup, il y a Zazie qui passe, est-ce qu'on est, tu vois, dans quel univers on est, voilà, c'est quand même une chance incroyable, c'est sûr. Et j'ai fait jusqu'à trois séances d'orphophonie par semaine pour retrouver la parole et retrouver les exercices, tu sais, d'enquête, de je ne sais plus quoi, d'énigmes et compagnie, pour refaire marcher tout ce qui est là. Quand tu te rends compte que tu es diminué, tu veux parler mais tu peux pas parce que tu sais tu as les idées mais tu arrives pas, les mots qui viennent pas. Donc bon j'ai fait une dépression au bout six mois que j'étais dans cet état là et j'en suis sorti par, bah tout le monde, mon entourage perso ma femme mes enfants, mais parce que j'étais particulièrement chiant pendant cette période. T'es caracteriel, t'envoie chier tout le monde.
- Speaker #1
Merci beaucoup c'est une belle leçon d'humanité. Et ça, ça va rendre service à des tas de gens en fait ?
- Speaker #0
T'entendre ça ? J'espère.
- Speaker #1
T'entendre cette vulnérabilité ?
- Speaker #0
Oui, oui, oui, bien sûr.
- Speaker #1
L'acceptation de cette vulnérabilité.
- Speaker #0
Quand je parle du droit à l'erreur dans l'entreprise, dans le monde du travail, c'est pouvoir dire... J'ai ma fille, demain je ne peux pas être là, il faut que je l'accompagne, j'ai un truc, c'est une galère, etc. On est vraiment dans cet esprit-là. Le Territoire en écho, un podcast de Roissy Dev.
- Speaker #1
Que fait de ses journées le DG que tu es à la tête d'un tel mastodonte, l'entreprise Dushow ? Ça ressemble à quoi ?
- Speaker #0
Je me demande, mais plus sérieusement, moi je suis au service des équipes. Je suis là pour les entourer, les accompagner. Donc c'est vrai que je dépense beaucoup d'énergie à être disponible. Et donc du coup, cette disponibilité me coûte parfois même,, même physiquement, des fois je suis un peu fatigué, mais c'est vraiment ma mission. Moi, je veux être au service des uns des autres, au-delà de l'activité commerciale, évidemment, financière, etc. J'aime bien me mettre des missions sur le développement personnel de nos équipes.
- Speaker #1
Alors, donne-nous un exemple.
- Speaker #0
Aujourd'hui, la volonté, l'idée qu'on en a, c'est vraiment de pousser nos équipes en interne à évoluer. Donc, on met beaucoup d'énergie dans la formation interne, dans des services RH qui gèrent énormément la carrière et l'évolution.
- Speaker #1
Il y a beaucoup de psychologie dans ce métier.
- Speaker #0
Écoute, oui, parce que tu sais, on est au service de personnes qui se mettent en danger quelque part. Alors attention, danger, tout est relatif. On ne fait pas de trucs dangereux, vraiment.
- Speaker #1
Vous montez quand même sur des beaux échafaudages parfois.
- Speaker #0
Oui, c'est vrai que vla sécurité à toute son importance. Mais si tu veux, la notion de mise en danger, je l'entends par le chanteur qui monte sur scène, ou le comédien, ou le comique, ou... Le PDG de l'entreprise qui vient parler du lancement de son nouveau produit, à un moment, il y a une certaine mise en danger. C'est-à-dire que là, il est obligé de nous faire confiance, faire confiance à la technique. Tu connais ça, David ? C'est-à-dire, au moment où tu parles dans le micro, il faut que ça fonctionne. Tu ne peux pas… Ah ben non, finalement, parce que là, tu perds tes moyens si tu as des problèmes techniques. Et puis, le message que tu voulais faire passer, c'est fini. L'audience, elle est là, c'est l'instant, c'est maintenant. Ça ne peut pas être demain. Toutes ces choses-là, ça crée ce phénomène de mise en danger, ça crée aussi la fidélité chez nous. Parce que, oui, quand on va rencontrer des problèmes techniques, mais qu'on n'a jamais rien lâché pour trouver les solutions, ça crée la fidélité parce qu'on peut compter sur nous.
- Speaker #1
Vous êtes responsable, en quelque sorte, de la sécurisation des artistes, des orateurs qui passent sur scène ?
- Speaker #0
Oui, oui, mais c'est aussi, si tu veux, la responsabilité, chez nous, c'est la liberté de pouvoir agir, de pouvoir avoir des initiatives, des nouvelles idées et la responsabilité, c'est-à-dire, bah oui, tu peux compter sur moi. J'ai des vieux adages comme ça, c'est qu'est-ce que je peux faire pour t'aider ? Ne t'inquiète pas, je m'en occupe. C'est des choses très très simples, des trucs vraiment de base, mais qu'on a besoin de redire régulièrement chez nous, parce que c'est ça la base de notre métier.
- Speaker #1
Il y a beaucoup d'altruisme en fait, dans l'événementiel, dans le son, la lumière, la vidéo, la pyrotechnie ?
- Speaker #0
Absolument. Vous savez, notre métier, nous, on est les hommes de l'ombre. On ne sait pas qui on est, on ne nous voit pas. On ne sait pas ce qu'on fait.
- Speaker #1
On voit des t-shirts noirs.
- Speaker #0
On voit des t-shirts noirs. De temps en temps, on voit un petit logo Dushow qui dépasse. C'est très rare. C'est très rare. La plupart du temps, on est dans le noir.
- Speaker #1
Comment vous vivez cette espèce d'ingratitude, en quelque sorte, d'ingratitude ? Je ne parle pas seulement de l'absence de remerciements à l'égard de la technique. Tout le monde ne s'appelle pas Michel Drucker, qui dit souvent remercie la technique. Je parle aussi... Tout simplement, justement, le fait d'être dans l'ombre et de ne pas pouvoir forcément s'exprimer comme peut le faire, encore une fois, un artiste ou un orateur.
- Speaker #0
Écoute, c'est le travail d'équipe qui nous motive. C'est d'être vraiment ensemble, solidaires, dans les moments de joie et de réussite, et aussi dans les difficultés qui peuvent être aussi les difficultés personnelles. C'est vraiment ça qu'on met en avant. C'est de dire, c'est une équipe qui gagne et parfois une équipe qui perd. C'est pouvoir dire je ne sais pas, je ne sais plus, j'ai besoin d'aide toutes ces choses-là. C'est ça qui crée, je crois, l'envie d'être ensemble pour réaliser nos travaux avec beaucoup d'humilité par rapport à l'artiste qui est sur scène, qui prend lui tous les risques devant 10 000 personnes, 300 personnes, 100 personnes. À un moment donné, il se met en risque. Nous, notre vocation, j'ai du mal à l'expliquer, mais moi ce qui me plaît, c'est vraiment ce travail d'équipe. C'est d'être dans le noir, derrière la scène, avec… Tous ceux et celles avec qui on travaille au quotidien, de se dire "Waouh, ça marche, c'est super beau, le sens sonne super bien, nos écrans sont magnifiques". Voilà, tu vois, c'est cette fierté-là d'avoir réalisé l'opération. Quand on arrive à 6h du matin, la salle est vide. et on repart après le spectacle.
- Speaker #1
À 6h le lendemain ?
- Speaker #0
Voilà, et entre-temps, il y a eu 10, 15, 20 000, 30 000, 40 000 personnes qui sont venues voir. Et cette question-là, elle revient toujours. Bon, parce que la salle est vide. Mais oui, la salle est vide.
- Speaker #1
Mais oui, vous apportez tout...
- Speaker #0
C'est comme le démontage, quand tu restes un peu après un concert, tu arrives à tout le monde, tu traînes un peu dans la salle, et puis tu vois que tout le monde se met à travailler, et que deux heures après, il n'y a plus rien.
- Speaker #1
On parle des magiciens, du son, de la lumière, de la pyrotechnie, de la vidéo, bien sûr, avec toi dans le prochain épisode. Tu parlais de peur, tu parlais aussi de grande réussite. On va parler d'une très grande réussite que tu as vécue avec ton équipe en 2024. À très vite, Xavier.
- Speaker #0
À très vite. Les histoires d'entrepreneurs, les échos du territoire, le territoire en écho, un podcast de Roissy Dev.