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Learning Coach

E1 - Gaell MAINGUY - Le changement du rapport au savoir

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26min |19/03/2024
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Description

Cet épisode met en lumière l'importance de l'innovation pédagogique et le rôle vital du formateur et du facilitateur dans la stimulation de l'autonomie et de l'engagement des apprenants. Gaell Manguy, directeur du Learning Planet Institute, partage son expérience sur la transformation des organisations pour devenir plus apprenantes et sur l'enseignement des principes des organisations apprenantes. Il souligne la nécessité d'une évolution vers un modèle éducatif qui favorise la collaboration, la coopération, et le développement des compétences personnelles et collectives pour faire face aux défis futurs. La discussion aborde également la facilitation dans l'apprentissage, la définition étendue de cette notion, et son impact profond sur la relation des apprenants à leur propre développement et à leur environnement. Finalement, le dialogue touche à l'importance de l'empathie dans l'éducation et comment les technologies comme l'IA redéfinissent les contours de la facilitation, proposant un avenir où l'éducation sert non seulement à former de bons citoyens et à préparer au marché du travail, mais aussi à aider les individus à devenir de meilleures versions d'eux-mêmes.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Sous-titrage ST'501

  • Speaker #1

    Vous écoutez Learning Coach by Traindy, le podcast qui part à la rencontre de ceux qui ont maîtrisé l'art d'apprendre et de former. Tout au long de cette saison, nous vous invitons à un voyage au cœur de l'innovation pédagogique, là où les rôles de formateur et de facilitateur s'entrelacent pour stimuler l'autonomie et l'engagement de vos apprenants. Dans cette série d'échanges, les conseils pratiques et les expériences personnelles de nos invités vous inspireront vers une maîtrise renouvelée de l'art d'accompagner l'apprentissage. Bienvenue dans ce nouvel épisode de Learning Coach, bienvenue à notre invité avec qui nous allons évoquer le changement de rapport au savoir. Et pour bien débuter, pouvez-vous s'il vous plaît vous présenter, nous donner, puisque c'est d'elle dont nous parlons, votre définition de la facilitation en formation. Comment s'applique-t-elle ? Quelles interactions ? Et finalement, quels sont ses bénéfices, ses apports ?

  • Speaker #0

    Moi, je m'appelle Gaell Manguy, je suis directeur général adjoint du Learning Planet Institute et à ce titre, j'ai plusieurs fonctions. D'une part je m'occupe de monter le pôle transformation des organisations pour qu'elles deviennent plus apprenantes, ça c'est notre motto, et puis d'autre part j'ai conservé quelques fonctions dans l'enseignement, j'aurais souhaité dans la recherche mais le temps est très limité, donc j'enseigne l'analyse systémique de la soutenabilité et les principes des organisations apprenantes. En gros, ce qu'on essaye de faire c'est d'être un acteur de cette transformation plus que nécessaire des systèmes qui permettent de d'apprentissage, de formation, d'enseignement, pour qu'on passe du modèle très XXe siècle à quelque chose qui soit plus tourné vers l'avenir et en particulier qui soit plus tourné vers notre capacité à affronter les différentes transitions, même si je n'apprécie pas spécialement ce mot, il a fait floresse, donc je l'utilise.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous pouvez développer ce dernier point, cet enjeu d'avenir que vous évoquez ?

  • Speaker #0

    Le monde dans lequel on va est un monde qui est d'une complexité telle que le système... où on est en compétition sur des savoirs bien établis et où il faut bien répéter, rétablir et refaire les raisonnements d'avant finalement. C'était utile avant pour pouvoir structurer les esprits et pour sélectionner pour aller dans les écoles, mais ce n'est pas quelque chose qui aujourd'hui est très efficace. J'en veux pour preuve que les sociétés qui sont les plus résilientes et les plus tournées vers l'avenir, et celles aussi qui ont le plus confiance les unes dans les autres et ont confiance dans l'avenir, sont justement des sociétés qui mettent la collaboration et la coopération au centre de l'apprentissage dès le plus jeune âge et qui misent moins sur les connaissances en tant que telles. que sur le développement des compétences personnelles et des compétences collectives, et en particulier la capacité à relever ensemble des défis.

  • Speaker #1

    Si je comprends bien, on parle carrément de changement de société.

  • Speaker #0

    Pour moi, c'est complètement fondamental. Le passage d'une société compétitive aux sociétés collaboratives, pour le dire comme ça, ou des systèmes éducatifs qui misent sur l'apprentissage individuel vers un apprentissage collectif, de facto, va donner un angle un peu différent, va donner une couleur un peu différente à la manière dont on imagine la transformation et les transitions, la disruption, la perturbation qu'on a. avec l'arrivée des IA génératifs.

  • Speaker #1

    Peut-on encore rester sur ce sujet de la nécessaire transformation de l'éducation, pour l'observer maintenant sous l'angle de la facilitation ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas quelle définition vous avez de facilitation, c'est un mot qui est assez large. Alors je ne sais pas si vous souhaitez vous m'en donner une, ou si vous préférez que je la discute, mais je veux bien prendre une petite minute pour la discuter. C'est un peu comme... enseignant ou formateur, c'est des mots qui peuvent recouvrir vraiment une très grande diversité. d'activité, de posture, de connaissances et surtout de compétences. Donc s'il se prend facilitation au sens premier du terme, c'est vraiment au sens chimique presque, c'est une sorte de catalyse, c'est-à-dire que vous allez abaisser des barrières et vous allez faciliter, par exemple la rencontre entre une personne et une autre personne, vous allez faciliter la rencontre entre une personne et une compétence ou un savoir-faire. De ce point de vue-là, si c'est pris de façon très macro, c'est quasiment la même chose qu'un enseignant, un formateur ou un mentor. C'est-à-dire que dans sa version la plus noble, la plus élevée, Tous les éducateurs le vivent comme ça. L'amour de ce métier extraordinaire, c'est de se dire, il y a un moment, il y a cette étincelle, il y a ce déclic, il y a cette personne qui a compris quelque chose et on a le sentiment d'être utile parce qu'on a réussi à faire... qu'il y ait quelque chose qui passe peut-être plus vite que si la personne l'avait fait par lui-même. Je ne dis pas plus que ça, mais en fait c'est très humble ce métier, et en même temps c'est des qualités humaines extraordinaires, parce que justement ce regard, cet éclat, ce sourire, ce merci, parce qu'on a réussi à faire comprendre quelque chose qui pour l'instant résistait à quelqu'un, on a ouvert la porte sur un autre monde qui ne soupçonnait pas, on a réussi à lever une barrière mentale qui était difficile, que la personne évidemment ne voyait pas. ou on était consciente mais n'arrivait pas à la lever, enfin il y a différents cas de figure, tout ça, ça tourne autour d'un sujet qui est, on essaye de rendre... plus facile l'accession à un autre soi, à un autre niveau de soi, parce qu'on a acquis une compétence, on a levé une barrière mentale, on a acquis une connaissance, etc. Mais rien ne nous dit que si on n'était pas là, la personne ne le ferait pas dans d'autres circonstances. Tout un chacun a appris énormément de choses sans forcément avoir besoin de l'action directe de quelqu'un. Je pense que tout ça est important à la lumière de à quoi sert la technos, ce qu'elle fait, ce qu'elle ne fait pas, et quelle est la place de l'humain là-dedans. Donc rien ne nous dit ça. Mais en même temps, ce qu'on sait, c'est que si on laisse quelqu'un seul, ça dépend des gens, mais il y a des gens qui savent apprendre par eux-mêmes avec une... Un niveau qui est assez remarquable, c'est d'ailleurs une compétence qui s'acquiert et qui se transforme. Ça, ça se facilite aussi, au niveau un peu méta. La plupart des humains, voire tous les humains, ont besoin des autres pour apprendre. Parce que l'apprentissage, c'est par construction une transformation de son système nerveux. Il y a un moment où il faut engrammer une forme différente, donc c'est bien un travail qu'on fait soi. Il n'y a personne d'autre qui peut le faire à votre place. Par contre, quand on est avec quelqu'un... Si nous inspire ou nous aide ou nous blesse ou nous punit, ça malheureusement on peut apprendre aussi bien évidemment à faire des choses qui sont négatives, c'est l'extérieur qui va nous indiquer ou qui va nous aider ou qui va nous rendre les choses faciles.

  • Speaker #1

    On tient tout de même là une définition pour le moins étendue de la facilitation.

  • Speaker #0

    J'essaie de couvrir dans cette digression les différents aspects de ce qu'on entend par facilitation. Si c'est la personne qui met trois post-it dans un petit atelier et qui fait que les gens ont passé un bon moment, c'est vraiment le degré zéro de la facilitation. Enfin, c'est le degré assez bas. Et c'est vrai que souvent, il y a une sorte d'opposition entre facilitation et formateur. Il y a le facilitateur de groupe qui est là pour, entre guillemets, faire que le groupe se passe bien, ce qui déjà en soi est un talent. Puis il y a le formateur qui, lui, est détenteur du savoir et qui va transférer les choses. Mais j'essaie de le regarder avec un autre prisme, il y a une sorte de continuité, parce que, que ce soit... Au niveau personnel ou que ce soit au niveau collectif, que ce soit dans un groupe, que ce soit avec une personne, la facilitation pour moi peut prendre un sens générique, quelque chose de vraiment très humain, de fondamental, qui fonde en partie notre espèce. Il n'y a pas beaucoup d'espèces où on apprend autant. Il n'y a pas beaucoup d'espèces où on dédie autant de temps à former les autres.

  • Speaker #1

    Arrêtons-nous sur le personnage de l'enseignant, du formateur. C'est quoi l'un comme l'autre en 2024 ?

  • Speaker #0

    Toutes ces personnes ont en commun d'exercer un métier. qui débouche sur le passage, une transition, enfin, des facilitateurs, ils facilitent la transition interne chez des gens avec qui ils travaillent pour qu'à la fin, ils en sachent plus qu'avant. Soit ils en sachent plus parce qu'ils ont appris plus de choses sur un sujet ou parce qu'ils ont développé une compétence sur un sujet. Qu'on soit prof d'histoire, prof d'anglais, prof de maths, ou formateur d'auto-école, ou enseignant sur la sécurité routière, ou je ne sais quoi. De toute façon, il y a bien quelqu'un qui a un avant et un après pour la personne qui suit cet enseignement. Et l'idéal, c'est que la personne après ait mieux compris un sujet, se soit débloqué sur un autre et appris des faits et transformé son point de vue sur certaines choses ou a acquis des compétences. C'est vraiment très large, mais c'est bien cette idée de transition presque neurologique entre l'avant et l'après. Mais les mêmes personnes vont aussi vous apprendre à... Pour ce qui est du professeur de sciences nat, à regarder le monde avec d'autres yeux, surtout si vous êtes un citadin, de comprendre la magie du vivant, la façon dont tout est interrelié. L'extraordinaire raffinement des machines biologiques qui sont extrêmement inspirantes et qui vont vraiment vous amener à voir le monde complètement autrement. Et je pense qu'il y a un véritable talent là d'arriver à sortir simplement des faits pour en faire quelque chose. Mais au même titre, si je prends le formateur en auto-école, c'est une chose d'appliquer à la lettre les processus et de le faire acquérir par l'apprenant. Et il y en a une autre, d'expliquer l'esprit qu'il y a derrière la lettre et de comprendre pourquoi telle règle est plus importante que d'autres, pourquoi est-ce que les gens ne font pas bien ça et c'est un vrai danger mortel auquel on ne pense pas, ou comment se positionner différemment dans la voiture pour ne pas, au bout de 20 ans, avoir des tendinites chroniques, etc. Donc il y a un savoir-faire, une compétence, une qualité qui va permettre à l'apprenant de se dire mais c'est formidable la chance que j'ai eu d'avoir quelqu'un comme ça parce qu'il m'a ouvert les yeux sur, il m'a permis d'apprendre que, etc. Et donc il y a un mélange systématique, je pense, entre connaissances et compétences. Et pour revenir à l'enseignant plus classique, celui qu'on a connu sur les bancs de l'école, l'enseignant qui nous apprend à aimer à apprendre, chez ceux pour qui ce n'est pas inné, ou chez ceux qui ont eu des difficultés ou qui ont eu des problèmes dans d'autres classes, ou à la maison, ou qu'importe, celui qui réveille le désir d'apprendre ou celui qui arrive à l'enflammer. Mais celui-là, il a une puissance de transformation extraordinaire. Parce qu'une fois que vous savez que vous êtes capable d'apprendre et d'aller trouver les maîtres qui vont vous apprendre à mieux apprendre, vous avez gagné dans une autonomie et votre soif de savoir s'en trouve décuplée.

  • Speaker #1

    On parle de capacité relationnelle. J'ai presque le sentiment que l'on flirte avec l'intime. Au plus,

  • Speaker #0

    vous allez gagner en estime de vous-même grâce à quelqu'un qui, d'une certaine manière, un facilitateur, au niveau de l'enseignant. Cette capacité de facilitation, ça peut être quelqu'un qui vous facilite votre propre relation à vous. Je pense que ça, c'est une manière de le présenter que je trouve assez jolie, parce que finalement, rappelez-vous quand vous étiez sur les bancs de l'école, quand vous n'étiez pas bien, ce prof ou cette prof extraordinaire qui vous a... refait aimer une matière ou qui vous a redonné confiance en vous et qui vous a réconcilié avec une partie de vous-même. Il a facilité, il a abaissé des barrières en vous, il vous a redonné le goût de... C'est vraiment intime, c'est un fonctionnement très intime sur votre relation à vous-même. Non, je suis nul en maths, non, je ne ferai jamais de sport, l'art, ce n'est pas pour moi. Les études, ce n'est pas pour moi, je ne sais pas. Il y a mille et une choses et on se les fixe automatiquement. Et on sait bien à quel point ça joue un rôle surdéterminant dans la projection des enfants et dans la reproduction des classes sociales. Vous connaissez cette expérience probablement, mais quand on demande à des gamins ce qu'ils veulent faire plus tard, si vous êtes enfant de CSP+, vous voulez faire docteur, si vous êtes enfant issu de milieu difficile, à ce moment-là, vous allez faire infirmier. Mais par contre, si on demande au même enfant, quel est ton héros préféré ? Alors, mettons que ce soit Superman. Qu'est-ce que Superman voudrait faire ? Là, Superman, il veut faire docteur. Oui, et donc ça c'est vraiment de la facilitation, c'est trouver un subterfuge pour faire dire à l'enfant ce qu'il n'ose pas se dire lui-même, et là en l'occurrence c'est pour pouvoir construire son estime de soi, mais ça peut être valable sur tous les sujets, c'est-à-dire avoir des techniques, et pour ça il faut avoir une empathie, il faut avoir une envie d'aider l'autre, pour moi qui est proche du soin, on pourrait étendre le sujet, mais le rapport à soi qui est développé par les enseignants. et pour moi très proche fondamentalement dans l'approche de ceux qui pratiquent le soin, qui aident aussi les gens à se réconcilier avec eux-mêmes pour qu'ils aillent mieux.

  • Speaker #1

    Comment prendre conscience de tout cela pour un professionnel de la formation, qu'il soit d'ailleurs en activité ou qu'il s'y destine ? Est-ce que l'on forme à l'empathie ? Oui,

  • Speaker #0

    c'est une question centrale et je pense qu'on peut essayer de distinguer ce qui se fait dans notre pays et ce qui se fait ailleurs. Je pense que c'est très lié à ce qu'on s'est dit au début de cet échange, c'est que ce n'est pas culturellement quelque chose d'entré chez nous. Donc on se pose cette question, alors que j'imagine qu'il y a d'autres pays où ils ont déjà bien avancé. Pour donner quelques éléments de contexte, au Danemark vous avez des cours d'empathie. Les petites classes depuis 1998, c'est une sorte de marqueur, ça donne une idée. Nous, on est en train de discuter, de savoir s'il faut en mettre ou pas. Eux, ça fait depuis 1998 qu'ils le font. Je vais faire le calcul, c'est assez intéressant. Le Canada a développé le social emotional learning, l'apprentissage socio-émotionnel, là encore, à tous les âges de la vie, dans leur enseignement. La classe au collège et lycée, ça fait partie intégrante du cursus depuis des décennies. À partir du moment où ça fait partie du programme et qu'on estime que c'est quelque chose qu'il faut apprendre, ça veut dire que les gens vont être recrutés parce qu'ils le maîtrisent et qu'avant ils vont être formés pour pouvoir l'enseigner. Donc ça fait partie, c'est très structurant quand même. Je trouve ça très intéressant comme choix parce que nous on axe beaucoup les savoirs fondamentaux sur ce qu'il faut apprendre. D'un autre côté, on a beaucoup plus d'heures de cours que... Nos petits amis, qu'ils soient canadiens, finlandais, hollandais, j'ai vécu deux ans en Hollande, on voit bien que c'est pas tout. À 15h, ils sont partis et ils vont faire du sport. Nous, non, on continue à travailler pour apprendre des choses. Ça ne fait pas forcément des petits-enfants qui sont plus heureux, ou des petits-enfants qui sont plus à même avec leurs problèmes, qui sont plus capables d'exprimer leurs émotions et de les gérer en public, ou de comprendre l'autre, de développer l'empathie. Donc il y a quelque chose quand même d'assez intéressant de voir qu'il y a d'autres pays qui ont fait autrement et qui a priori ont une longueur d'avance, mais ça veut dire que c'est faisable et on peut s'inspirer d'eux pour voir comment on le fait. La réponse toute faite, c'est aujourd'hui, c'est très peu fait. La réponse étendue, c'est qu'il y a d'autres endroits qui le font, on peut s'en inspirer. Et il y a des initiatives très intéressantes, je suis sûr, aux quatre coins de France, de gens qui sont en train d'expérimenter des choses. Donc si on apprend d'eux et qu'on leur donne plus de moyens pour qu'ils puissent faire école, ça peut rentrer dans les cursus après et ça peut nous aider à transformer notre système.

  • Speaker #1

    Nous parlons d'autonomie dans les apprentissages, nous parlons d'empathie. J'ai envie de prendre un léger... Contre-pied à notre échange, parlons un peu d'IA, ces dispositifs qui simulent l'empathie, qui sont programmés pour. Est-ce que ces technologies ne redéfinissent pas déjà les contours de la facilitation ? Je pense que personne n'a la réponse à cette belle question,

  • Speaker #0

    tout simplement parce que l'humanité est en train de faire une expérience à l'échelle planétaire sur le sujet. On l'a vu avec le Covid, ceux qui nous ont dit comment ça allait se passer ont tous eu tort à un moment ou à un autre. Pour une bonne raison, c'est que face à un problème ouvert, il faut faire de la recherche, il n'y a pas d'autre solution. On ne peut pas dire que le dogmatisme ne fonctionne pas. Il n'y aura pas d'IA chez moi où tout le monde va se mettre sur l'IA, ce sont deux bornes d'un spectre intéressant sur lequel il va falloir... Apprendre collectivement ce qui se passe. Ce que je trouve assez remarquable, c'est que GPT a officiellement sorti du bois publiquement en novembre 2022. Ça fait un an et trois mois, grosso modo. Les transformeurs et GPT, ça faisait un moment qu'ils marinaient, on voyait bien qu'il y avait un truc assez énorme qui allait sortir. Mais ça n'empêche pas que ça a pris le public de cours. Et ça a aussi été l'innovation technologique qui s'est diffusée le plus vite possible, le plus rapidement dans toute l'histoire de l'humanité. On n'a jamais vu ça. Donc on est sur quelque chose qui est de toute façon qui est là et qui est là et qui va beaucoup plus vite que tout ce qu'on pouvait imaginer. Et le taux d'adoption est beaucoup plus rapide que ce qu'on pouvait imaginer. Je pense que c'est important de poser les bases parce que j'ai suivi avec attention les demandes d'un grand nombre de spécialistes de l'IA qui demandaient un moratoire. Ça a duré un mois et ça n'a eu aucune portée politique. En fait, le coup est parti, l'économie est déjà transformée. Tout le monde utilise déjà l'IA sans le savoir depuis au moins 30 ans. C'est une nouvelle forme d'IA plus puissante et c'est rien en comparaison de celle qui arrive demain. Donc le gros de l'humanité va fonctionner avec de l'IA et toujours plus dans les années qui viennent. C'est un peu les bases de mon raisonnement pour ce qui va suivre. Sur ce, plus on apprend à la domestiquer, mieux c'est. Quand je dis la domestiquer, c'est un outil, donc il faut apprendre à s'en servir. Ça, encore une fois, c'est une borne du spectre. C'est Elon Musk qui dit, soit vous apprenez à donner des ordres aux IA, soit les IA vont vous donner des ordres. C'est très manichéen, c'est du musk, mais ça dit une chose, qui est que cet outil est tellement puissant que si on ne sait pas s'en servir, on va avoir un problème demain. Et ça, c'est déjà vrai. C'est déjà vrai parce que, je vais donner des exemples un peu autour de moi, les gamins qui n'ont pas attendu que les profs les autorisent, aujourd'hui font leur CV, leur lettre de motivation avec de lire. Et ils savent les faire bien plus vite et bien mieux que la génération du dessus, sans avoir pris des cours sur comment on fait un CV. Donc il y a des choses qui vont très vite et il y a une course. C'est la course à l'armement entre les différents corps. Maintenant, qu'est-ce que ça veut dire sur le cerveau des garçons, le cerveau de nos enfants, nos propres cerveaux et nos capacités à apprendre et nos capacités à développer nos compétences ? Je pense qu'on est dans une expérience à l'étendue à échelle planétaire. Et ce que je trouve très intéressant, c'est qu'il y a beaucoup de chercheurs qui sont sur ce sujet et qui publient là-dessus parce qu'ils font des expériences pédagogiques. Ils montrent à quel point l'IA peut faire des choses formidables et à quel point il y a des choses qui ne marchent pas. rapidement, avec des délais de publication qui sont rapides, et qui nous permettent déjà d'avoir une bonne base qui sera toujours plus forte demain sur ce qu'on peut faire et ce qu'il ne faut pas faire, ou les choses sur lesquelles il faut qu'on soit vigilant. Par construction, les jeunes qui vivent avec l'IA vont développer une relation au savoir qui va être différente des générations précédentes. Mais exactement comme la génération qui a vécu avec Internet le vit différemment que la génération qui l'a vu avec le livre. Le livre c'était beaucoup de par cœur parce que vous n'allez pas trimballer votre encyclopédie universaliste avec vous. Maintenant les jeunes générations n'apprennent pas par cœur certaines choses, elles apprennent les chemins par où on peut les trouver, ce qui est radicalement différent. Ça, ça a bien été étudié et ce n'est pas tout à fait le même fonctionnement du cerveau. Je suis à peu près persuadé que demain, en tout cas c'est très probable, demain les gens vont apprendre aussi différemment. C'est-à-dire qu'est-ce qu'ils doivent apprendre ou qu'est-ce qu'ils n'ont pas besoin d'apprendre parce que l'IRA saura le faire mieux qu'eux. Il y a une autre manière de poser la question, parce qu'on a toujours autant de temps dans notre vie, on a toujours autant de neurones et de synapses à la naissance, on a toujours plus de sollicitations internes et externes, de rencontres sociales, de biens culturels, de choses à apprendre, d'expériences à vivre, etc. Et donc pour construire sa propre trajectoire d'individuation, pour devenir soi, où est-ce qu'on va consacrer du temps ? Les règles d'avant ne vont plus forcément fonctionner aujourd'hui. C'est en ça que le dogmatisme, dans un cas comme dans l'autre, ne va pas marcher. On ne va pas tout remplacer par de l'IA et on ne va certainement pas rien remplacer par de l'IA. Par contre, c'est à tout un chacun de décider ou d'optimiser la relation du temps qu'il consacre à demander à une machine pour qu'il le fasse à sa place, un peu comme si vous aviez un assistant personnel dédié. Et puis, quelle est la chose que vous voulez faire par vous-même ? parce que ça compte pour vous, parce que c'est important pour vous. Et de ce point de vue-là, la tâche du facilitateur, ou en tout cas son enseignement plutôt qu'une tâche, l'enseignement du facilitateur, là où il peut vraiment aider, c'est dans la version la plus noble, pour devenir soi-même, c'est à essayer de se connecter au plus profond de qui on est vraiment, de là où on veut contribuer, de ce qu'on aime faire, de là où on pense qu'on peut faire quelque chose d'important pour soi, pour sa communauté, pour le monde, et d'essayer d'aider les personnes avec qui il travaille, à optimiser son propre système pour qu'il soit toujours capable d'être le plus apprenant possible. Kenchima dit être dans son flot, être dans sa capacité à apprendre. Si vous avez envie d'écrire un livre, mais que vous n'avez que trois semaines et que l'IA peut vous aider à faire quelque chose et que vous n'endormez pas et que vous passez trois semaines, peut-être que ça vous aurait pris six mois sans l'IA et que ça va vous prendre trois semaines maintenant. Mais si c'est quelque chose de bien, a priori, l'IA ne va pas se substituer à vous. Elle va vous aider à faire des recherches documentaires. elle va vous aider à voir les défauts. C'est votre action à vous. Si vous demandez à l'IA de le faire, ce sera le livre de l'IA, ce ne sera pas le vôtre. Vous n'êtes pas transformé par ce système, vous êtes exactement comme avant, si ce n'est que vous avez demandé à quelqu'un d'autre de faire le boulot à votre place. Ça ne vous construit pas. en tant que personne. Je pense que ce qui compte, c'est au-delà de l'objet, c'est si on ressent sur l'apprenant, c'est à quoi est-ce qu'il va dédier son temps et à quoi il va dédier son attention. Et si on le pose comme ça, l'IA peut être un formidable outil pour ceux qui savent où est-ce qu'ils veulent aller ou pour les aider à trouver où est-ce qu'ils veulent aller. Par contre, ça va être un formidable piège pour ceux qui, ne sachant pas trop où aller nulle part, ou ne sachant pas comment aborder le sujet, vont déléguer à l'IA le soin de faire pour eux des tâches qu'ils devraient les construire. Et en ce sens-là, j'entends dans le premier cas les promesses qu'on nous fait, et dans le deuxième, la légitimité des craintes des éducateurs ou des enseignants qui voient le risque de la paresse. À plusieurs reprises, vous avez utilisé les expressions

  • Speaker #1

    devenir soi-même ou encore se construire. C'est dans ces expressions que la facilitation trouve son sens le plus étendu en termes d'éducation et de formation ? Oui, alors c'est un parti pris que je prends.

  • Speaker #0

    En fait, les discussions sur l'éducation et sur les missions de l'éducation sont minées dès le départ. C'est un spécialiste d'éducation qui m'avait expliqué ça quand on avait fait la consultation nationale en 2017. Il m'a dit que c'est un sujet sur lequel on ne peut pas discuter parce que les gens ne discutent pas de la même chose. Mais si on explique pourquoi ils ne discutent pas de la même chose, comme toujours, à ce moment-là on peut très facilement trouver des terrains d'entente. En fait, les gens entendent éducation pour au moins trois missions différentes, qui sont trois dimensions. La première dimension, enfin la première c'est pas… Il y a trois dimensions, la première il faut bien que je sois linéaire, ça veut dire que c'est pas la plus importante. Il y en a une qui est devenir un bon citoyen, ça c'est le collectif. Il y en a une deuxième qui est trouver un emploi et trouver un métier. Ça c'est plutôt organiser l'économie. Et la troisième c'est devenir une meilleure personne à titre individuel et se trouver soi-même. Suivant que vous êtes plutôt sur une, la deuxième ou la troisième, si vous rencontrez quelqu'un qui privilégie, qui a une autre vision dans cet espace à trois dimensions et qui est plutôt, mettons, arrêtons la philosophie, ça ne sert à rien, il faut plutôt que les gens sachent faire des choses pour qu'ils soient employables, vous voyez, enfin après vous allez avoir tous les discours sur l'éducation, vous allez les ranger dans cette matrice A3. Et vous allez effectivement trouver qu'à priori, ils n'ont pas l'air d'être compatibles. En fait, si, puisqu'il y a trois missions, par construction, tout ça coexiste. Et ça sert, entre guillemets, il n'y a pas de bonne ou de mauvaise éducation sur l'ensemble de ces trois, en fonction du cadre global. Maintenant, si vous poussez tout le monde à devenir soi-même, mais qu'à la fin, ils n'ont aucun emploi et qu'ils ne deviennent pas des bons citoyens, et que la démocratie explose par l'individualisme, et que les boîtes n'arrivent plus à recruter, et que l'économie s'effondre, on n'aura pas forcément gagné. Donc il n'y a pas cette logique-là globalement. Mais mon propos, à titre personnel, j'ai tendance à insister sur celle-ci plutôt que les deux autres, c'est que si vous formez les gens à être plus eux-mêmes, à être plus en compréhension de leurs besoins profonds, de leur aptitude profonde et de leur capacité profonde pour savoir quoi développer, ils ont de meilleures armes et de meilleures cartes pour jouer dans la société en fonction des signaux qu'ils reçoivent pour savoir ce sur quoi ils peuvent jouer et où se spécialiser. Voilà, c'est ça, et je l'entends bien dans un sens collectif, qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit, j'ai insisté sur les modèles scandinaves ou canadiens, il y a une dimension, parce qu'on apprend d'autant mieux à être soi, qu'on le fait dans un respect de l'autre et qu'on est dans une action collective, donc les deux pour moi sont très liés. Je pense que ces trois dimensions sont conciliables, à partir du moment où on fonde. les systèmes d'éducation et de formation sur la capacité des uns et des autres à développer notre meilleure capacité d'action. C'est ce que les Anglais appellent agency. Les Anglais ont deux mots, il y a empowerment et agency, et nous on n'en a aucun. Je ne sais pas si c'est un signe, mais ça peut éventuellement être le mot de la fin. Pour conclure ce podcast,

  • Speaker #1

    avez-vous un exemple de pratique de facilitation qui a vos faveurs et que vous pourriez partager avec nos auditeurs ?

  • Speaker #0

    J'aime bien utiliser des dispositifs qui obligent les gens à pratiquer une écoute active et une écoute active à plusieurs niveaux. Par exemple, il y a l'exercice des quatre chaises où chacun répond à une question particulière tour à tour. Et l'objet de cette... Cet exercice c'est de permuter. Donc vous avez une personne qui répond à la question, qui est en général une question assez profonde, assez personnelle, et les trois autres qui sont attentifs à différents composants du langage. Ça peut être le propos, la teneur du propos, la sémantique. L'autre ça va plutôt être le phrasé, les expressions émotionnelles. Le troisième ça va peut-être être le langage corporel. On peut varier à l'infini différents canaux. Une fois que la première personne a parlé, les trois autres lui font un feedback sur ce qu'ils ont décrypté et ce qu'ils ont observé. et c'est extraordinairement riche comme réflexivité. Et c'est un exercice, vous le faites en permutation circulaire, tout le monde y passe et ça crée des liens d'une manière extrêmement rapide et ça crée une connivence et un ancrage profond et ça crée de la confiance quasiment instantanément. Donc c'est un exercice que je trouve assez remarquable. Merci Gaël Mingui pour votre participation. Merci à vous,

  • Speaker #1

    chers auditeurs. Pour aller plus loin, découvrez la Masterclass Facilitateur d'apprenance sur le site www.learning.coach Vous retrouverez cet épisode sur le site internet traindy.io, sur nos réseaux sociaux et sur l'ensemble des plateformes d'écoute. A très bientôt pour le prochain épisode. Sous-titrage ST'501

Description

Cet épisode met en lumière l'importance de l'innovation pédagogique et le rôle vital du formateur et du facilitateur dans la stimulation de l'autonomie et de l'engagement des apprenants. Gaell Manguy, directeur du Learning Planet Institute, partage son expérience sur la transformation des organisations pour devenir plus apprenantes et sur l'enseignement des principes des organisations apprenantes. Il souligne la nécessité d'une évolution vers un modèle éducatif qui favorise la collaboration, la coopération, et le développement des compétences personnelles et collectives pour faire face aux défis futurs. La discussion aborde également la facilitation dans l'apprentissage, la définition étendue de cette notion, et son impact profond sur la relation des apprenants à leur propre développement et à leur environnement. Finalement, le dialogue touche à l'importance de l'empathie dans l'éducation et comment les technologies comme l'IA redéfinissent les contours de la facilitation, proposant un avenir où l'éducation sert non seulement à former de bons citoyens et à préparer au marché du travail, mais aussi à aider les individus à devenir de meilleures versions d'eux-mêmes.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Sous-titrage ST'501

  • Speaker #1

    Vous écoutez Learning Coach by Traindy, le podcast qui part à la rencontre de ceux qui ont maîtrisé l'art d'apprendre et de former. Tout au long de cette saison, nous vous invitons à un voyage au cœur de l'innovation pédagogique, là où les rôles de formateur et de facilitateur s'entrelacent pour stimuler l'autonomie et l'engagement de vos apprenants. Dans cette série d'échanges, les conseils pratiques et les expériences personnelles de nos invités vous inspireront vers une maîtrise renouvelée de l'art d'accompagner l'apprentissage. Bienvenue dans ce nouvel épisode de Learning Coach, bienvenue à notre invité avec qui nous allons évoquer le changement de rapport au savoir. Et pour bien débuter, pouvez-vous s'il vous plaît vous présenter, nous donner, puisque c'est d'elle dont nous parlons, votre définition de la facilitation en formation. Comment s'applique-t-elle ? Quelles interactions ? Et finalement, quels sont ses bénéfices, ses apports ?

  • Speaker #0

    Moi, je m'appelle Gaell Manguy, je suis directeur général adjoint du Learning Planet Institute et à ce titre, j'ai plusieurs fonctions. D'une part je m'occupe de monter le pôle transformation des organisations pour qu'elles deviennent plus apprenantes, ça c'est notre motto, et puis d'autre part j'ai conservé quelques fonctions dans l'enseignement, j'aurais souhaité dans la recherche mais le temps est très limité, donc j'enseigne l'analyse systémique de la soutenabilité et les principes des organisations apprenantes. En gros, ce qu'on essaye de faire c'est d'être un acteur de cette transformation plus que nécessaire des systèmes qui permettent de d'apprentissage, de formation, d'enseignement, pour qu'on passe du modèle très XXe siècle à quelque chose qui soit plus tourné vers l'avenir et en particulier qui soit plus tourné vers notre capacité à affronter les différentes transitions, même si je n'apprécie pas spécialement ce mot, il a fait floresse, donc je l'utilise.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous pouvez développer ce dernier point, cet enjeu d'avenir que vous évoquez ?

  • Speaker #0

    Le monde dans lequel on va est un monde qui est d'une complexité telle que le système... où on est en compétition sur des savoirs bien établis et où il faut bien répéter, rétablir et refaire les raisonnements d'avant finalement. C'était utile avant pour pouvoir structurer les esprits et pour sélectionner pour aller dans les écoles, mais ce n'est pas quelque chose qui aujourd'hui est très efficace. J'en veux pour preuve que les sociétés qui sont les plus résilientes et les plus tournées vers l'avenir, et celles aussi qui ont le plus confiance les unes dans les autres et ont confiance dans l'avenir, sont justement des sociétés qui mettent la collaboration et la coopération au centre de l'apprentissage dès le plus jeune âge et qui misent moins sur les connaissances en tant que telles. que sur le développement des compétences personnelles et des compétences collectives, et en particulier la capacité à relever ensemble des défis.

  • Speaker #1

    Si je comprends bien, on parle carrément de changement de société.

  • Speaker #0

    Pour moi, c'est complètement fondamental. Le passage d'une société compétitive aux sociétés collaboratives, pour le dire comme ça, ou des systèmes éducatifs qui misent sur l'apprentissage individuel vers un apprentissage collectif, de facto, va donner un angle un peu différent, va donner une couleur un peu différente à la manière dont on imagine la transformation et les transitions, la disruption, la perturbation qu'on a. avec l'arrivée des IA génératifs.

  • Speaker #1

    Peut-on encore rester sur ce sujet de la nécessaire transformation de l'éducation, pour l'observer maintenant sous l'angle de la facilitation ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas quelle définition vous avez de facilitation, c'est un mot qui est assez large. Alors je ne sais pas si vous souhaitez vous m'en donner une, ou si vous préférez que je la discute, mais je veux bien prendre une petite minute pour la discuter. C'est un peu comme... enseignant ou formateur, c'est des mots qui peuvent recouvrir vraiment une très grande diversité. d'activité, de posture, de connaissances et surtout de compétences. Donc s'il se prend facilitation au sens premier du terme, c'est vraiment au sens chimique presque, c'est une sorte de catalyse, c'est-à-dire que vous allez abaisser des barrières et vous allez faciliter, par exemple la rencontre entre une personne et une autre personne, vous allez faciliter la rencontre entre une personne et une compétence ou un savoir-faire. De ce point de vue-là, si c'est pris de façon très macro, c'est quasiment la même chose qu'un enseignant, un formateur ou un mentor. C'est-à-dire que dans sa version la plus noble, la plus élevée, Tous les éducateurs le vivent comme ça. L'amour de ce métier extraordinaire, c'est de se dire, il y a un moment, il y a cette étincelle, il y a ce déclic, il y a cette personne qui a compris quelque chose et on a le sentiment d'être utile parce qu'on a réussi à faire... qu'il y ait quelque chose qui passe peut-être plus vite que si la personne l'avait fait par lui-même. Je ne dis pas plus que ça, mais en fait c'est très humble ce métier, et en même temps c'est des qualités humaines extraordinaires, parce que justement ce regard, cet éclat, ce sourire, ce merci, parce qu'on a réussi à faire comprendre quelque chose qui pour l'instant résistait à quelqu'un, on a ouvert la porte sur un autre monde qui ne soupçonnait pas, on a réussi à lever une barrière mentale qui était difficile, que la personne évidemment ne voyait pas. ou on était consciente mais n'arrivait pas à la lever, enfin il y a différents cas de figure, tout ça, ça tourne autour d'un sujet qui est, on essaye de rendre... plus facile l'accession à un autre soi, à un autre niveau de soi, parce qu'on a acquis une compétence, on a levé une barrière mentale, on a acquis une connaissance, etc. Mais rien ne nous dit que si on n'était pas là, la personne ne le ferait pas dans d'autres circonstances. Tout un chacun a appris énormément de choses sans forcément avoir besoin de l'action directe de quelqu'un. Je pense que tout ça est important à la lumière de à quoi sert la technos, ce qu'elle fait, ce qu'elle ne fait pas, et quelle est la place de l'humain là-dedans. Donc rien ne nous dit ça. Mais en même temps, ce qu'on sait, c'est que si on laisse quelqu'un seul, ça dépend des gens, mais il y a des gens qui savent apprendre par eux-mêmes avec une... Un niveau qui est assez remarquable, c'est d'ailleurs une compétence qui s'acquiert et qui se transforme. Ça, ça se facilite aussi, au niveau un peu méta. La plupart des humains, voire tous les humains, ont besoin des autres pour apprendre. Parce que l'apprentissage, c'est par construction une transformation de son système nerveux. Il y a un moment où il faut engrammer une forme différente, donc c'est bien un travail qu'on fait soi. Il n'y a personne d'autre qui peut le faire à votre place. Par contre, quand on est avec quelqu'un... Si nous inspire ou nous aide ou nous blesse ou nous punit, ça malheureusement on peut apprendre aussi bien évidemment à faire des choses qui sont négatives, c'est l'extérieur qui va nous indiquer ou qui va nous aider ou qui va nous rendre les choses faciles.

  • Speaker #1

    On tient tout de même là une définition pour le moins étendue de la facilitation.

  • Speaker #0

    J'essaie de couvrir dans cette digression les différents aspects de ce qu'on entend par facilitation. Si c'est la personne qui met trois post-it dans un petit atelier et qui fait que les gens ont passé un bon moment, c'est vraiment le degré zéro de la facilitation. Enfin, c'est le degré assez bas. Et c'est vrai que souvent, il y a une sorte d'opposition entre facilitation et formateur. Il y a le facilitateur de groupe qui est là pour, entre guillemets, faire que le groupe se passe bien, ce qui déjà en soi est un talent. Puis il y a le formateur qui, lui, est détenteur du savoir et qui va transférer les choses. Mais j'essaie de le regarder avec un autre prisme, il y a une sorte de continuité, parce que, que ce soit... Au niveau personnel ou que ce soit au niveau collectif, que ce soit dans un groupe, que ce soit avec une personne, la facilitation pour moi peut prendre un sens générique, quelque chose de vraiment très humain, de fondamental, qui fonde en partie notre espèce. Il n'y a pas beaucoup d'espèces où on apprend autant. Il n'y a pas beaucoup d'espèces où on dédie autant de temps à former les autres.

  • Speaker #1

    Arrêtons-nous sur le personnage de l'enseignant, du formateur. C'est quoi l'un comme l'autre en 2024 ?

  • Speaker #0

    Toutes ces personnes ont en commun d'exercer un métier. qui débouche sur le passage, une transition, enfin, des facilitateurs, ils facilitent la transition interne chez des gens avec qui ils travaillent pour qu'à la fin, ils en sachent plus qu'avant. Soit ils en sachent plus parce qu'ils ont appris plus de choses sur un sujet ou parce qu'ils ont développé une compétence sur un sujet. Qu'on soit prof d'histoire, prof d'anglais, prof de maths, ou formateur d'auto-école, ou enseignant sur la sécurité routière, ou je ne sais quoi. De toute façon, il y a bien quelqu'un qui a un avant et un après pour la personne qui suit cet enseignement. Et l'idéal, c'est que la personne après ait mieux compris un sujet, se soit débloqué sur un autre et appris des faits et transformé son point de vue sur certaines choses ou a acquis des compétences. C'est vraiment très large, mais c'est bien cette idée de transition presque neurologique entre l'avant et l'après. Mais les mêmes personnes vont aussi vous apprendre à... Pour ce qui est du professeur de sciences nat, à regarder le monde avec d'autres yeux, surtout si vous êtes un citadin, de comprendre la magie du vivant, la façon dont tout est interrelié. L'extraordinaire raffinement des machines biologiques qui sont extrêmement inspirantes et qui vont vraiment vous amener à voir le monde complètement autrement. Et je pense qu'il y a un véritable talent là d'arriver à sortir simplement des faits pour en faire quelque chose. Mais au même titre, si je prends le formateur en auto-école, c'est une chose d'appliquer à la lettre les processus et de le faire acquérir par l'apprenant. Et il y en a une autre, d'expliquer l'esprit qu'il y a derrière la lettre et de comprendre pourquoi telle règle est plus importante que d'autres, pourquoi est-ce que les gens ne font pas bien ça et c'est un vrai danger mortel auquel on ne pense pas, ou comment se positionner différemment dans la voiture pour ne pas, au bout de 20 ans, avoir des tendinites chroniques, etc. Donc il y a un savoir-faire, une compétence, une qualité qui va permettre à l'apprenant de se dire mais c'est formidable la chance que j'ai eu d'avoir quelqu'un comme ça parce qu'il m'a ouvert les yeux sur, il m'a permis d'apprendre que, etc. Et donc il y a un mélange systématique, je pense, entre connaissances et compétences. Et pour revenir à l'enseignant plus classique, celui qu'on a connu sur les bancs de l'école, l'enseignant qui nous apprend à aimer à apprendre, chez ceux pour qui ce n'est pas inné, ou chez ceux qui ont eu des difficultés ou qui ont eu des problèmes dans d'autres classes, ou à la maison, ou qu'importe, celui qui réveille le désir d'apprendre ou celui qui arrive à l'enflammer. Mais celui-là, il a une puissance de transformation extraordinaire. Parce qu'une fois que vous savez que vous êtes capable d'apprendre et d'aller trouver les maîtres qui vont vous apprendre à mieux apprendre, vous avez gagné dans une autonomie et votre soif de savoir s'en trouve décuplée.

  • Speaker #1

    On parle de capacité relationnelle. J'ai presque le sentiment que l'on flirte avec l'intime. Au plus,

  • Speaker #0

    vous allez gagner en estime de vous-même grâce à quelqu'un qui, d'une certaine manière, un facilitateur, au niveau de l'enseignant. Cette capacité de facilitation, ça peut être quelqu'un qui vous facilite votre propre relation à vous. Je pense que ça, c'est une manière de le présenter que je trouve assez jolie, parce que finalement, rappelez-vous quand vous étiez sur les bancs de l'école, quand vous n'étiez pas bien, ce prof ou cette prof extraordinaire qui vous a... refait aimer une matière ou qui vous a redonné confiance en vous et qui vous a réconcilié avec une partie de vous-même. Il a facilité, il a abaissé des barrières en vous, il vous a redonné le goût de... C'est vraiment intime, c'est un fonctionnement très intime sur votre relation à vous-même. Non, je suis nul en maths, non, je ne ferai jamais de sport, l'art, ce n'est pas pour moi. Les études, ce n'est pas pour moi, je ne sais pas. Il y a mille et une choses et on se les fixe automatiquement. Et on sait bien à quel point ça joue un rôle surdéterminant dans la projection des enfants et dans la reproduction des classes sociales. Vous connaissez cette expérience probablement, mais quand on demande à des gamins ce qu'ils veulent faire plus tard, si vous êtes enfant de CSP+, vous voulez faire docteur, si vous êtes enfant issu de milieu difficile, à ce moment-là, vous allez faire infirmier. Mais par contre, si on demande au même enfant, quel est ton héros préféré ? Alors, mettons que ce soit Superman. Qu'est-ce que Superman voudrait faire ? Là, Superman, il veut faire docteur. Oui, et donc ça c'est vraiment de la facilitation, c'est trouver un subterfuge pour faire dire à l'enfant ce qu'il n'ose pas se dire lui-même, et là en l'occurrence c'est pour pouvoir construire son estime de soi, mais ça peut être valable sur tous les sujets, c'est-à-dire avoir des techniques, et pour ça il faut avoir une empathie, il faut avoir une envie d'aider l'autre, pour moi qui est proche du soin, on pourrait étendre le sujet, mais le rapport à soi qui est développé par les enseignants. et pour moi très proche fondamentalement dans l'approche de ceux qui pratiquent le soin, qui aident aussi les gens à se réconcilier avec eux-mêmes pour qu'ils aillent mieux.

  • Speaker #1

    Comment prendre conscience de tout cela pour un professionnel de la formation, qu'il soit d'ailleurs en activité ou qu'il s'y destine ? Est-ce que l'on forme à l'empathie ? Oui,

  • Speaker #0

    c'est une question centrale et je pense qu'on peut essayer de distinguer ce qui se fait dans notre pays et ce qui se fait ailleurs. Je pense que c'est très lié à ce qu'on s'est dit au début de cet échange, c'est que ce n'est pas culturellement quelque chose d'entré chez nous. Donc on se pose cette question, alors que j'imagine qu'il y a d'autres pays où ils ont déjà bien avancé. Pour donner quelques éléments de contexte, au Danemark vous avez des cours d'empathie. Les petites classes depuis 1998, c'est une sorte de marqueur, ça donne une idée. Nous, on est en train de discuter, de savoir s'il faut en mettre ou pas. Eux, ça fait depuis 1998 qu'ils le font. Je vais faire le calcul, c'est assez intéressant. Le Canada a développé le social emotional learning, l'apprentissage socio-émotionnel, là encore, à tous les âges de la vie, dans leur enseignement. La classe au collège et lycée, ça fait partie intégrante du cursus depuis des décennies. À partir du moment où ça fait partie du programme et qu'on estime que c'est quelque chose qu'il faut apprendre, ça veut dire que les gens vont être recrutés parce qu'ils le maîtrisent et qu'avant ils vont être formés pour pouvoir l'enseigner. Donc ça fait partie, c'est très structurant quand même. Je trouve ça très intéressant comme choix parce que nous on axe beaucoup les savoirs fondamentaux sur ce qu'il faut apprendre. D'un autre côté, on a beaucoup plus d'heures de cours que... Nos petits amis, qu'ils soient canadiens, finlandais, hollandais, j'ai vécu deux ans en Hollande, on voit bien que c'est pas tout. À 15h, ils sont partis et ils vont faire du sport. Nous, non, on continue à travailler pour apprendre des choses. Ça ne fait pas forcément des petits-enfants qui sont plus heureux, ou des petits-enfants qui sont plus à même avec leurs problèmes, qui sont plus capables d'exprimer leurs émotions et de les gérer en public, ou de comprendre l'autre, de développer l'empathie. Donc il y a quelque chose quand même d'assez intéressant de voir qu'il y a d'autres pays qui ont fait autrement et qui a priori ont une longueur d'avance, mais ça veut dire que c'est faisable et on peut s'inspirer d'eux pour voir comment on le fait. La réponse toute faite, c'est aujourd'hui, c'est très peu fait. La réponse étendue, c'est qu'il y a d'autres endroits qui le font, on peut s'en inspirer. Et il y a des initiatives très intéressantes, je suis sûr, aux quatre coins de France, de gens qui sont en train d'expérimenter des choses. Donc si on apprend d'eux et qu'on leur donne plus de moyens pour qu'ils puissent faire école, ça peut rentrer dans les cursus après et ça peut nous aider à transformer notre système.

  • Speaker #1

    Nous parlons d'autonomie dans les apprentissages, nous parlons d'empathie. J'ai envie de prendre un léger... Contre-pied à notre échange, parlons un peu d'IA, ces dispositifs qui simulent l'empathie, qui sont programmés pour. Est-ce que ces technologies ne redéfinissent pas déjà les contours de la facilitation ? Je pense que personne n'a la réponse à cette belle question,

  • Speaker #0

    tout simplement parce que l'humanité est en train de faire une expérience à l'échelle planétaire sur le sujet. On l'a vu avec le Covid, ceux qui nous ont dit comment ça allait se passer ont tous eu tort à un moment ou à un autre. Pour une bonne raison, c'est que face à un problème ouvert, il faut faire de la recherche, il n'y a pas d'autre solution. On ne peut pas dire que le dogmatisme ne fonctionne pas. Il n'y aura pas d'IA chez moi où tout le monde va se mettre sur l'IA, ce sont deux bornes d'un spectre intéressant sur lequel il va falloir... Apprendre collectivement ce qui se passe. Ce que je trouve assez remarquable, c'est que GPT a officiellement sorti du bois publiquement en novembre 2022. Ça fait un an et trois mois, grosso modo. Les transformeurs et GPT, ça faisait un moment qu'ils marinaient, on voyait bien qu'il y avait un truc assez énorme qui allait sortir. Mais ça n'empêche pas que ça a pris le public de cours. Et ça a aussi été l'innovation technologique qui s'est diffusée le plus vite possible, le plus rapidement dans toute l'histoire de l'humanité. On n'a jamais vu ça. Donc on est sur quelque chose qui est de toute façon qui est là et qui est là et qui va beaucoup plus vite que tout ce qu'on pouvait imaginer. Et le taux d'adoption est beaucoup plus rapide que ce qu'on pouvait imaginer. Je pense que c'est important de poser les bases parce que j'ai suivi avec attention les demandes d'un grand nombre de spécialistes de l'IA qui demandaient un moratoire. Ça a duré un mois et ça n'a eu aucune portée politique. En fait, le coup est parti, l'économie est déjà transformée. Tout le monde utilise déjà l'IA sans le savoir depuis au moins 30 ans. C'est une nouvelle forme d'IA plus puissante et c'est rien en comparaison de celle qui arrive demain. Donc le gros de l'humanité va fonctionner avec de l'IA et toujours plus dans les années qui viennent. C'est un peu les bases de mon raisonnement pour ce qui va suivre. Sur ce, plus on apprend à la domestiquer, mieux c'est. Quand je dis la domestiquer, c'est un outil, donc il faut apprendre à s'en servir. Ça, encore une fois, c'est une borne du spectre. C'est Elon Musk qui dit, soit vous apprenez à donner des ordres aux IA, soit les IA vont vous donner des ordres. C'est très manichéen, c'est du musk, mais ça dit une chose, qui est que cet outil est tellement puissant que si on ne sait pas s'en servir, on va avoir un problème demain. Et ça, c'est déjà vrai. C'est déjà vrai parce que, je vais donner des exemples un peu autour de moi, les gamins qui n'ont pas attendu que les profs les autorisent, aujourd'hui font leur CV, leur lettre de motivation avec de lire. Et ils savent les faire bien plus vite et bien mieux que la génération du dessus, sans avoir pris des cours sur comment on fait un CV. Donc il y a des choses qui vont très vite et il y a une course. C'est la course à l'armement entre les différents corps. Maintenant, qu'est-ce que ça veut dire sur le cerveau des garçons, le cerveau de nos enfants, nos propres cerveaux et nos capacités à apprendre et nos capacités à développer nos compétences ? Je pense qu'on est dans une expérience à l'étendue à échelle planétaire. Et ce que je trouve très intéressant, c'est qu'il y a beaucoup de chercheurs qui sont sur ce sujet et qui publient là-dessus parce qu'ils font des expériences pédagogiques. Ils montrent à quel point l'IA peut faire des choses formidables et à quel point il y a des choses qui ne marchent pas. rapidement, avec des délais de publication qui sont rapides, et qui nous permettent déjà d'avoir une bonne base qui sera toujours plus forte demain sur ce qu'on peut faire et ce qu'il ne faut pas faire, ou les choses sur lesquelles il faut qu'on soit vigilant. Par construction, les jeunes qui vivent avec l'IA vont développer une relation au savoir qui va être différente des générations précédentes. Mais exactement comme la génération qui a vécu avec Internet le vit différemment que la génération qui l'a vu avec le livre. Le livre c'était beaucoup de par cœur parce que vous n'allez pas trimballer votre encyclopédie universaliste avec vous. Maintenant les jeunes générations n'apprennent pas par cœur certaines choses, elles apprennent les chemins par où on peut les trouver, ce qui est radicalement différent. Ça, ça a bien été étudié et ce n'est pas tout à fait le même fonctionnement du cerveau. Je suis à peu près persuadé que demain, en tout cas c'est très probable, demain les gens vont apprendre aussi différemment. C'est-à-dire qu'est-ce qu'ils doivent apprendre ou qu'est-ce qu'ils n'ont pas besoin d'apprendre parce que l'IRA saura le faire mieux qu'eux. Il y a une autre manière de poser la question, parce qu'on a toujours autant de temps dans notre vie, on a toujours autant de neurones et de synapses à la naissance, on a toujours plus de sollicitations internes et externes, de rencontres sociales, de biens culturels, de choses à apprendre, d'expériences à vivre, etc. Et donc pour construire sa propre trajectoire d'individuation, pour devenir soi, où est-ce qu'on va consacrer du temps ? Les règles d'avant ne vont plus forcément fonctionner aujourd'hui. C'est en ça que le dogmatisme, dans un cas comme dans l'autre, ne va pas marcher. On ne va pas tout remplacer par de l'IA et on ne va certainement pas rien remplacer par de l'IA. Par contre, c'est à tout un chacun de décider ou d'optimiser la relation du temps qu'il consacre à demander à une machine pour qu'il le fasse à sa place, un peu comme si vous aviez un assistant personnel dédié. Et puis, quelle est la chose que vous voulez faire par vous-même ? parce que ça compte pour vous, parce que c'est important pour vous. Et de ce point de vue-là, la tâche du facilitateur, ou en tout cas son enseignement plutôt qu'une tâche, l'enseignement du facilitateur, là où il peut vraiment aider, c'est dans la version la plus noble, pour devenir soi-même, c'est à essayer de se connecter au plus profond de qui on est vraiment, de là où on veut contribuer, de ce qu'on aime faire, de là où on pense qu'on peut faire quelque chose d'important pour soi, pour sa communauté, pour le monde, et d'essayer d'aider les personnes avec qui il travaille, à optimiser son propre système pour qu'il soit toujours capable d'être le plus apprenant possible. Kenchima dit être dans son flot, être dans sa capacité à apprendre. Si vous avez envie d'écrire un livre, mais que vous n'avez que trois semaines et que l'IA peut vous aider à faire quelque chose et que vous n'endormez pas et que vous passez trois semaines, peut-être que ça vous aurait pris six mois sans l'IA et que ça va vous prendre trois semaines maintenant. Mais si c'est quelque chose de bien, a priori, l'IA ne va pas se substituer à vous. Elle va vous aider à faire des recherches documentaires. elle va vous aider à voir les défauts. C'est votre action à vous. Si vous demandez à l'IA de le faire, ce sera le livre de l'IA, ce ne sera pas le vôtre. Vous n'êtes pas transformé par ce système, vous êtes exactement comme avant, si ce n'est que vous avez demandé à quelqu'un d'autre de faire le boulot à votre place. Ça ne vous construit pas. en tant que personne. Je pense que ce qui compte, c'est au-delà de l'objet, c'est si on ressent sur l'apprenant, c'est à quoi est-ce qu'il va dédier son temps et à quoi il va dédier son attention. Et si on le pose comme ça, l'IA peut être un formidable outil pour ceux qui savent où est-ce qu'ils veulent aller ou pour les aider à trouver où est-ce qu'ils veulent aller. Par contre, ça va être un formidable piège pour ceux qui, ne sachant pas trop où aller nulle part, ou ne sachant pas comment aborder le sujet, vont déléguer à l'IA le soin de faire pour eux des tâches qu'ils devraient les construire. Et en ce sens-là, j'entends dans le premier cas les promesses qu'on nous fait, et dans le deuxième, la légitimité des craintes des éducateurs ou des enseignants qui voient le risque de la paresse. À plusieurs reprises, vous avez utilisé les expressions

  • Speaker #1

    devenir soi-même ou encore se construire. C'est dans ces expressions que la facilitation trouve son sens le plus étendu en termes d'éducation et de formation ? Oui, alors c'est un parti pris que je prends.

  • Speaker #0

    En fait, les discussions sur l'éducation et sur les missions de l'éducation sont minées dès le départ. C'est un spécialiste d'éducation qui m'avait expliqué ça quand on avait fait la consultation nationale en 2017. Il m'a dit que c'est un sujet sur lequel on ne peut pas discuter parce que les gens ne discutent pas de la même chose. Mais si on explique pourquoi ils ne discutent pas de la même chose, comme toujours, à ce moment-là on peut très facilement trouver des terrains d'entente. En fait, les gens entendent éducation pour au moins trois missions différentes, qui sont trois dimensions. La première dimension, enfin la première c'est pas… Il y a trois dimensions, la première il faut bien que je sois linéaire, ça veut dire que c'est pas la plus importante. Il y en a une qui est devenir un bon citoyen, ça c'est le collectif. Il y en a une deuxième qui est trouver un emploi et trouver un métier. Ça c'est plutôt organiser l'économie. Et la troisième c'est devenir une meilleure personne à titre individuel et se trouver soi-même. Suivant que vous êtes plutôt sur une, la deuxième ou la troisième, si vous rencontrez quelqu'un qui privilégie, qui a une autre vision dans cet espace à trois dimensions et qui est plutôt, mettons, arrêtons la philosophie, ça ne sert à rien, il faut plutôt que les gens sachent faire des choses pour qu'ils soient employables, vous voyez, enfin après vous allez avoir tous les discours sur l'éducation, vous allez les ranger dans cette matrice A3. Et vous allez effectivement trouver qu'à priori, ils n'ont pas l'air d'être compatibles. En fait, si, puisqu'il y a trois missions, par construction, tout ça coexiste. Et ça sert, entre guillemets, il n'y a pas de bonne ou de mauvaise éducation sur l'ensemble de ces trois, en fonction du cadre global. Maintenant, si vous poussez tout le monde à devenir soi-même, mais qu'à la fin, ils n'ont aucun emploi et qu'ils ne deviennent pas des bons citoyens, et que la démocratie explose par l'individualisme, et que les boîtes n'arrivent plus à recruter, et que l'économie s'effondre, on n'aura pas forcément gagné. Donc il n'y a pas cette logique-là globalement. Mais mon propos, à titre personnel, j'ai tendance à insister sur celle-ci plutôt que les deux autres, c'est que si vous formez les gens à être plus eux-mêmes, à être plus en compréhension de leurs besoins profonds, de leur aptitude profonde et de leur capacité profonde pour savoir quoi développer, ils ont de meilleures armes et de meilleures cartes pour jouer dans la société en fonction des signaux qu'ils reçoivent pour savoir ce sur quoi ils peuvent jouer et où se spécialiser. Voilà, c'est ça, et je l'entends bien dans un sens collectif, qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit, j'ai insisté sur les modèles scandinaves ou canadiens, il y a une dimension, parce qu'on apprend d'autant mieux à être soi, qu'on le fait dans un respect de l'autre et qu'on est dans une action collective, donc les deux pour moi sont très liés. Je pense que ces trois dimensions sont conciliables, à partir du moment où on fonde. les systèmes d'éducation et de formation sur la capacité des uns et des autres à développer notre meilleure capacité d'action. C'est ce que les Anglais appellent agency. Les Anglais ont deux mots, il y a empowerment et agency, et nous on n'en a aucun. Je ne sais pas si c'est un signe, mais ça peut éventuellement être le mot de la fin. Pour conclure ce podcast,

  • Speaker #1

    avez-vous un exemple de pratique de facilitation qui a vos faveurs et que vous pourriez partager avec nos auditeurs ?

  • Speaker #0

    J'aime bien utiliser des dispositifs qui obligent les gens à pratiquer une écoute active et une écoute active à plusieurs niveaux. Par exemple, il y a l'exercice des quatre chaises où chacun répond à une question particulière tour à tour. Et l'objet de cette... Cet exercice c'est de permuter. Donc vous avez une personne qui répond à la question, qui est en général une question assez profonde, assez personnelle, et les trois autres qui sont attentifs à différents composants du langage. Ça peut être le propos, la teneur du propos, la sémantique. L'autre ça va plutôt être le phrasé, les expressions émotionnelles. Le troisième ça va peut-être être le langage corporel. On peut varier à l'infini différents canaux. Une fois que la première personne a parlé, les trois autres lui font un feedback sur ce qu'ils ont décrypté et ce qu'ils ont observé. et c'est extraordinairement riche comme réflexivité. Et c'est un exercice, vous le faites en permutation circulaire, tout le monde y passe et ça crée des liens d'une manière extrêmement rapide et ça crée une connivence et un ancrage profond et ça crée de la confiance quasiment instantanément. Donc c'est un exercice que je trouve assez remarquable. Merci Gaël Mingui pour votre participation. Merci à vous,

  • Speaker #1

    chers auditeurs. Pour aller plus loin, découvrez la Masterclass Facilitateur d'apprenance sur le site www.learning.coach Vous retrouverez cet épisode sur le site internet traindy.io, sur nos réseaux sociaux et sur l'ensemble des plateformes d'écoute. A très bientôt pour le prochain épisode. Sous-titrage ST'501

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Cet épisode met en lumière l'importance de l'innovation pédagogique et le rôle vital du formateur et du facilitateur dans la stimulation de l'autonomie et de l'engagement des apprenants. Gaell Manguy, directeur du Learning Planet Institute, partage son expérience sur la transformation des organisations pour devenir plus apprenantes et sur l'enseignement des principes des organisations apprenantes. Il souligne la nécessité d'une évolution vers un modèle éducatif qui favorise la collaboration, la coopération, et le développement des compétences personnelles et collectives pour faire face aux défis futurs. La discussion aborde également la facilitation dans l'apprentissage, la définition étendue de cette notion, et son impact profond sur la relation des apprenants à leur propre développement et à leur environnement. Finalement, le dialogue touche à l'importance de l'empathie dans l'éducation et comment les technologies comme l'IA redéfinissent les contours de la facilitation, proposant un avenir où l'éducation sert non seulement à former de bons citoyens et à préparer au marché du travail, mais aussi à aider les individus à devenir de meilleures versions d'eux-mêmes.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Sous-titrage ST'501

  • Speaker #1

    Vous écoutez Learning Coach by Traindy, le podcast qui part à la rencontre de ceux qui ont maîtrisé l'art d'apprendre et de former. Tout au long de cette saison, nous vous invitons à un voyage au cœur de l'innovation pédagogique, là où les rôles de formateur et de facilitateur s'entrelacent pour stimuler l'autonomie et l'engagement de vos apprenants. Dans cette série d'échanges, les conseils pratiques et les expériences personnelles de nos invités vous inspireront vers une maîtrise renouvelée de l'art d'accompagner l'apprentissage. Bienvenue dans ce nouvel épisode de Learning Coach, bienvenue à notre invité avec qui nous allons évoquer le changement de rapport au savoir. Et pour bien débuter, pouvez-vous s'il vous plaît vous présenter, nous donner, puisque c'est d'elle dont nous parlons, votre définition de la facilitation en formation. Comment s'applique-t-elle ? Quelles interactions ? Et finalement, quels sont ses bénéfices, ses apports ?

  • Speaker #0

    Moi, je m'appelle Gaell Manguy, je suis directeur général adjoint du Learning Planet Institute et à ce titre, j'ai plusieurs fonctions. D'une part je m'occupe de monter le pôle transformation des organisations pour qu'elles deviennent plus apprenantes, ça c'est notre motto, et puis d'autre part j'ai conservé quelques fonctions dans l'enseignement, j'aurais souhaité dans la recherche mais le temps est très limité, donc j'enseigne l'analyse systémique de la soutenabilité et les principes des organisations apprenantes. En gros, ce qu'on essaye de faire c'est d'être un acteur de cette transformation plus que nécessaire des systèmes qui permettent de d'apprentissage, de formation, d'enseignement, pour qu'on passe du modèle très XXe siècle à quelque chose qui soit plus tourné vers l'avenir et en particulier qui soit plus tourné vers notre capacité à affronter les différentes transitions, même si je n'apprécie pas spécialement ce mot, il a fait floresse, donc je l'utilise.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous pouvez développer ce dernier point, cet enjeu d'avenir que vous évoquez ?

  • Speaker #0

    Le monde dans lequel on va est un monde qui est d'une complexité telle que le système... où on est en compétition sur des savoirs bien établis et où il faut bien répéter, rétablir et refaire les raisonnements d'avant finalement. C'était utile avant pour pouvoir structurer les esprits et pour sélectionner pour aller dans les écoles, mais ce n'est pas quelque chose qui aujourd'hui est très efficace. J'en veux pour preuve que les sociétés qui sont les plus résilientes et les plus tournées vers l'avenir, et celles aussi qui ont le plus confiance les unes dans les autres et ont confiance dans l'avenir, sont justement des sociétés qui mettent la collaboration et la coopération au centre de l'apprentissage dès le plus jeune âge et qui misent moins sur les connaissances en tant que telles. que sur le développement des compétences personnelles et des compétences collectives, et en particulier la capacité à relever ensemble des défis.

  • Speaker #1

    Si je comprends bien, on parle carrément de changement de société.

  • Speaker #0

    Pour moi, c'est complètement fondamental. Le passage d'une société compétitive aux sociétés collaboratives, pour le dire comme ça, ou des systèmes éducatifs qui misent sur l'apprentissage individuel vers un apprentissage collectif, de facto, va donner un angle un peu différent, va donner une couleur un peu différente à la manière dont on imagine la transformation et les transitions, la disruption, la perturbation qu'on a. avec l'arrivée des IA génératifs.

  • Speaker #1

    Peut-on encore rester sur ce sujet de la nécessaire transformation de l'éducation, pour l'observer maintenant sous l'angle de la facilitation ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas quelle définition vous avez de facilitation, c'est un mot qui est assez large. Alors je ne sais pas si vous souhaitez vous m'en donner une, ou si vous préférez que je la discute, mais je veux bien prendre une petite minute pour la discuter. C'est un peu comme... enseignant ou formateur, c'est des mots qui peuvent recouvrir vraiment une très grande diversité. d'activité, de posture, de connaissances et surtout de compétences. Donc s'il se prend facilitation au sens premier du terme, c'est vraiment au sens chimique presque, c'est une sorte de catalyse, c'est-à-dire que vous allez abaisser des barrières et vous allez faciliter, par exemple la rencontre entre une personne et une autre personne, vous allez faciliter la rencontre entre une personne et une compétence ou un savoir-faire. De ce point de vue-là, si c'est pris de façon très macro, c'est quasiment la même chose qu'un enseignant, un formateur ou un mentor. C'est-à-dire que dans sa version la plus noble, la plus élevée, Tous les éducateurs le vivent comme ça. L'amour de ce métier extraordinaire, c'est de se dire, il y a un moment, il y a cette étincelle, il y a ce déclic, il y a cette personne qui a compris quelque chose et on a le sentiment d'être utile parce qu'on a réussi à faire... qu'il y ait quelque chose qui passe peut-être plus vite que si la personne l'avait fait par lui-même. Je ne dis pas plus que ça, mais en fait c'est très humble ce métier, et en même temps c'est des qualités humaines extraordinaires, parce que justement ce regard, cet éclat, ce sourire, ce merci, parce qu'on a réussi à faire comprendre quelque chose qui pour l'instant résistait à quelqu'un, on a ouvert la porte sur un autre monde qui ne soupçonnait pas, on a réussi à lever une barrière mentale qui était difficile, que la personne évidemment ne voyait pas. ou on était consciente mais n'arrivait pas à la lever, enfin il y a différents cas de figure, tout ça, ça tourne autour d'un sujet qui est, on essaye de rendre... plus facile l'accession à un autre soi, à un autre niveau de soi, parce qu'on a acquis une compétence, on a levé une barrière mentale, on a acquis une connaissance, etc. Mais rien ne nous dit que si on n'était pas là, la personne ne le ferait pas dans d'autres circonstances. Tout un chacun a appris énormément de choses sans forcément avoir besoin de l'action directe de quelqu'un. Je pense que tout ça est important à la lumière de à quoi sert la technos, ce qu'elle fait, ce qu'elle ne fait pas, et quelle est la place de l'humain là-dedans. Donc rien ne nous dit ça. Mais en même temps, ce qu'on sait, c'est que si on laisse quelqu'un seul, ça dépend des gens, mais il y a des gens qui savent apprendre par eux-mêmes avec une... Un niveau qui est assez remarquable, c'est d'ailleurs une compétence qui s'acquiert et qui se transforme. Ça, ça se facilite aussi, au niveau un peu méta. La plupart des humains, voire tous les humains, ont besoin des autres pour apprendre. Parce que l'apprentissage, c'est par construction une transformation de son système nerveux. Il y a un moment où il faut engrammer une forme différente, donc c'est bien un travail qu'on fait soi. Il n'y a personne d'autre qui peut le faire à votre place. Par contre, quand on est avec quelqu'un... Si nous inspire ou nous aide ou nous blesse ou nous punit, ça malheureusement on peut apprendre aussi bien évidemment à faire des choses qui sont négatives, c'est l'extérieur qui va nous indiquer ou qui va nous aider ou qui va nous rendre les choses faciles.

  • Speaker #1

    On tient tout de même là une définition pour le moins étendue de la facilitation.

  • Speaker #0

    J'essaie de couvrir dans cette digression les différents aspects de ce qu'on entend par facilitation. Si c'est la personne qui met trois post-it dans un petit atelier et qui fait que les gens ont passé un bon moment, c'est vraiment le degré zéro de la facilitation. Enfin, c'est le degré assez bas. Et c'est vrai que souvent, il y a une sorte d'opposition entre facilitation et formateur. Il y a le facilitateur de groupe qui est là pour, entre guillemets, faire que le groupe se passe bien, ce qui déjà en soi est un talent. Puis il y a le formateur qui, lui, est détenteur du savoir et qui va transférer les choses. Mais j'essaie de le regarder avec un autre prisme, il y a une sorte de continuité, parce que, que ce soit... Au niveau personnel ou que ce soit au niveau collectif, que ce soit dans un groupe, que ce soit avec une personne, la facilitation pour moi peut prendre un sens générique, quelque chose de vraiment très humain, de fondamental, qui fonde en partie notre espèce. Il n'y a pas beaucoup d'espèces où on apprend autant. Il n'y a pas beaucoup d'espèces où on dédie autant de temps à former les autres.

  • Speaker #1

    Arrêtons-nous sur le personnage de l'enseignant, du formateur. C'est quoi l'un comme l'autre en 2024 ?

  • Speaker #0

    Toutes ces personnes ont en commun d'exercer un métier. qui débouche sur le passage, une transition, enfin, des facilitateurs, ils facilitent la transition interne chez des gens avec qui ils travaillent pour qu'à la fin, ils en sachent plus qu'avant. Soit ils en sachent plus parce qu'ils ont appris plus de choses sur un sujet ou parce qu'ils ont développé une compétence sur un sujet. Qu'on soit prof d'histoire, prof d'anglais, prof de maths, ou formateur d'auto-école, ou enseignant sur la sécurité routière, ou je ne sais quoi. De toute façon, il y a bien quelqu'un qui a un avant et un après pour la personne qui suit cet enseignement. Et l'idéal, c'est que la personne après ait mieux compris un sujet, se soit débloqué sur un autre et appris des faits et transformé son point de vue sur certaines choses ou a acquis des compétences. C'est vraiment très large, mais c'est bien cette idée de transition presque neurologique entre l'avant et l'après. Mais les mêmes personnes vont aussi vous apprendre à... Pour ce qui est du professeur de sciences nat, à regarder le monde avec d'autres yeux, surtout si vous êtes un citadin, de comprendre la magie du vivant, la façon dont tout est interrelié. L'extraordinaire raffinement des machines biologiques qui sont extrêmement inspirantes et qui vont vraiment vous amener à voir le monde complètement autrement. Et je pense qu'il y a un véritable talent là d'arriver à sortir simplement des faits pour en faire quelque chose. Mais au même titre, si je prends le formateur en auto-école, c'est une chose d'appliquer à la lettre les processus et de le faire acquérir par l'apprenant. Et il y en a une autre, d'expliquer l'esprit qu'il y a derrière la lettre et de comprendre pourquoi telle règle est plus importante que d'autres, pourquoi est-ce que les gens ne font pas bien ça et c'est un vrai danger mortel auquel on ne pense pas, ou comment se positionner différemment dans la voiture pour ne pas, au bout de 20 ans, avoir des tendinites chroniques, etc. Donc il y a un savoir-faire, une compétence, une qualité qui va permettre à l'apprenant de se dire mais c'est formidable la chance que j'ai eu d'avoir quelqu'un comme ça parce qu'il m'a ouvert les yeux sur, il m'a permis d'apprendre que, etc. Et donc il y a un mélange systématique, je pense, entre connaissances et compétences. Et pour revenir à l'enseignant plus classique, celui qu'on a connu sur les bancs de l'école, l'enseignant qui nous apprend à aimer à apprendre, chez ceux pour qui ce n'est pas inné, ou chez ceux qui ont eu des difficultés ou qui ont eu des problèmes dans d'autres classes, ou à la maison, ou qu'importe, celui qui réveille le désir d'apprendre ou celui qui arrive à l'enflammer. Mais celui-là, il a une puissance de transformation extraordinaire. Parce qu'une fois que vous savez que vous êtes capable d'apprendre et d'aller trouver les maîtres qui vont vous apprendre à mieux apprendre, vous avez gagné dans une autonomie et votre soif de savoir s'en trouve décuplée.

  • Speaker #1

    On parle de capacité relationnelle. J'ai presque le sentiment que l'on flirte avec l'intime. Au plus,

  • Speaker #0

    vous allez gagner en estime de vous-même grâce à quelqu'un qui, d'une certaine manière, un facilitateur, au niveau de l'enseignant. Cette capacité de facilitation, ça peut être quelqu'un qui vous facilite votre propre relation à vous. Je pense que ça, c'est une manière de le présenter que je trouve assez jolie, parce que finalement, rappelez-vous quand vous étiez sur les bancs de l'école, quand vous n'étiez pas bien, ce prof ou cette prof extraordinaire qui vous a... refait aimer une matière ou qui vous a redonné confiance en vous et qui vous a réconcilié avec une partie de vous-même. Il a facilité, il a abaissé des barrières en vous, il vous a redonné le goût de... C'est vraiment intime, c'est un fonctionnement très intime sur votre relation à vous-même. Non, je suis nul en maths, non, je ne ferai jamais de sport, l'art, ce n'est pas pour moi. Les études, ce n'est pas pour moi, je ne sais pas. Il y a mille et une choses et on se les fixe automatiquement. Et on sait bien à quel point ça joue un rôle surdéterminant dans la projection des enfants et dans la reproduction des classes sociales. Vous connaissez cette expérience probablement, mais quand on demande à des gamins ce qu'ils veulent faire plus tard, si vous êtes enfant de CSP+, vous voulez faire docteur, si vous êtes enfant issu de milieu difficile, à ce moment-là, vous allez faire infirmier. Mais par contre, si on demande au même enfant, quel est ton héros préféré ? Alors, mettons que ce soit Superman. Qu'est-ce que Superman voudrait faire ? Là, Superman, il veut faire docteur. Oui, et donc ça c'est vraiment de la facilitation, c'est trouver un subterfuge pour faire dire à l'enfant ce qu'il n'ose pas se dire lui-même, et là en l'occurrence c'est pour pouvoir construire son estime de soi, mais ça peut être valable sur tous les sujets, c'est-à-dire avoir des techniques, et pour ça il faut avoir une empathie, il faut avoir une envie d'aider l'autre, pour moi qui est proche du soin, on pourrait étendre le sujet, mais le rapport à soi qui est développé par les enseignants. et pour moi très proche fondamentalement dans l'approche de ceux qui pratiquent le soin, qui aident aussi les gens à se réconcilier avec eux-mêmes pour qu'ils aillent mieux.

  • Speaker #1

    Comment prendre conscience de tout cela pour un professionnel de la formation, qu'il soit d'ailleurs en activité ou qu'il s'y destine ? Est-ce que l'on forme à l'empathie ? Oui,

  • Speaker #0

    c'est une question centrale et je pense qu'on peut essayer de distinguer ce qui se fait dans notre pays et ce qui se fait ailleurs. Je pense que c'est très lié à ce qu'on s'est dit au début de cet échange, c'est que ce n'est pas culturellement quelque chose d'entré chez nous. Donc on se pose cette question, alors que j'imagine qu'il y a d'autres pays où ils ont déjà bien avancé. Pour donner quelques éléments de contexte, au Danemark vous avez des cours d'empathie. Les petites classes depuis 1998, c'est une sorte de marqueur, ça donne une idée. Nous, on est en train de discuter, de savoir s'il faut en mettre ou pas. Eux, ça fait depuis 1998 qu'ils le font. Je vais faire le calcul, c'est assez intéressant. Le Canada a développé le social emotional learning, l'apprentissage socio-émotionnel, là encore, à tous les âges de la vie, dans leur enseignement. La classe au collège et lycée, ça fait partie intégrante du cursus depuis des décennies. À partir du moment où ça fait partie du programme et qu'on estime que c'est quelque chose qu'il faut apprendre, ça veut dire que les gens vont être recrutés parce qu'ils le maîtrisent et qu'avant ils vont être formés pour pouvoir l'enseigner. Donc ça fait partie, c'est très structurant quand même. Je trouve ça très intéressant comme choix parce que nous on axe beaucoup les savoirs fondamentaux sur ce qu'il faut apprendre. D'un autre côté, on a beaucoup plus d'heures de cours que... Nos petits amis, qu'ils soient canadiens, finlandais, hollandais, j'ai vécu deux ans en Hollande, on voit bien que c'est pas tout. À 15h, ils sont partis et ils vont faire du sport. Nous, non, on continue à travailler pour apprendre des choses. Ça ne fait pas forcément des petits-enfants qui sont plus heureux, ou des petits-enfants qui sont plus à même avec leurs problèmes, qui sont plus capables d'exprimer leurs émotions et de les gérer en public, ou de comprendre l'autre, de développer l'empathie. Donc il y a quelque chose quand même d'assez intéressant de voir qu'il y a d'autres pays qui ont fait autrement et qui a priori ont une longueur d'avance, mais ça veut dire que c'est faisable et on peut s'inspirer d'eux pour voir comment on le fait. La réponse toute faite, c'est aujourd'hui, c'est très peu fait. La réponse étendue, c'est qu'il y a d'autres endroits qui le font, on peut s'en inspirer. Et il y a des initiatives très intéressantes, je suis sûr, aux quatre coins de France, de gens qui sont en train d'expérimenter des choses. Donc si on apprend d'eux et qu'on leur donne plus de moyens pour qu'ils puissent faire école, ça peut rentrer dans les cursus après et ça peut nous aider à transformer notre système.

  • Speaker #1

    Nous parlons d'autonomie dans les apprentissages, nous parlons d'empathie. J'ai envie de prendre un léger... Contre-pied à notre échange, parlons un peu d'IA, ces dispositifs qui simulent l'empathie, qui sont programmés pour. Est-ce que ces technologies ne redéfinissent pas déjà les contours de la facilitation ? Je pense que personne n'a la réponse à cette belle question,

  • Speaker #0

    tout simplement parce que l'humanité est en train de faire une expérience à l'échelle planétaire sur le sujet. On l'a vu avec le Covid, ceux qui nous ont dit comment ça allait se passer ont tous eu tort à un moment ou à un autre. Pour une bonne raison, c'est que face à un problème ouvert, il faut faire de la recherche, il n'y a pas d'autre solution. On ne peut pas dire que le dogmatisme ne fonctionne pas. Il n'y aura pas d'IA chez moi où tout le monde va se mettre sur l'IA, ce sont deux bornes d'un spectre intéressant sur lequel il va falloir... Apprendre collectivement ce qui se passe. Ce que je trouve assez remarquable, c'est que GPT a officiellement sorti du bois publiquement en novembre 2022. Ça fait un an et trois mois, grosso modo. Les transformeurs et GPT, ça faisait un moment qu'ils marinaient, on voyait bien qu'il y avait un truc assez énorme qui allait sortir. Mais ça n'empêche pas que ça a pris le public de cours. Et ça a aussi été l'innovation technologique qui s'est diffusée le plus vite possible, le plus rapidement dans toute l'histoire de l'humanité. On n'a jamais vu ça. Donc on est sur quelque chose qui est de toute façon qui est là et qui est là et qui va beaucoup plus vite que tout ce qu'on pouvait imaginer. Et le taux d'adoption est beaucoup plus rapide que ce qu'on pouvait imaginer. Je pense que c'est important de poser les bases parce que j'ai suivi avec attention les demandes d'un grand nombre de spécialistes de l'IA qui demandaient un moratoire. Ça a duré un mois et ça n'a eu aucune portée politique. En fait, le coup est parti, l'économie est déjà transformée. Tout le monde utilise déjà l'IA sans le savoir depuis au moins 30 ans. C'est une nouvelle forme d'IA plus puissante et c'est rien en comparaison de celle qui arrive demain. Donc le gros de l'humanité va fonctionner avec de l'IA et toujours plus dans les années qui viennent. C'est un peu les bases de mon raisonnement pour ce qui va suivre. Sur ce, plus on apprend à la domestiquer, mieux c'est. Quand je dis la domestiquer, c'est un outil, donc il faut apprendre à s'en servir. Ça, encore une fois, c'est une borne du spectre. C'est Elon Musk qui dit, soit vous apprenez à donner des ordres aux IA, soit les IA vont vous donner des ordres. C'est très manichéen, c'est du musk, mais ça dit une chose, qui est que cet outil est tellement puissant que si on ne sait pas s'en servir, on va avoir un problème demain. Et ça, c'est déjà vrai. C'est déjà vrai parce que, je vais donner des exemples un peu autour de moi, les gamins qui n'ont pas attendu que les profs les autorisent, aujourd'hui font leur CV, leur lettre de motivation avec de lire. Et ils savent les faire bien plus vite et bien mieux que la génération du dessus, sans avoir pris des cours sur comment on fait un CV. Donc il y a des choses qui vont très vite et il y a une course. C'est la course à l'armement entre les différents corps. Maintenant, qu'est-ce que ça veut dire sur le cerveau des garçons, le cerveau de nos enfants, nos propres cerveaux et nos capacités à apprendre et nos capacités à développer nos compétences ? Je pense qu'on est dans une expérience à l'étendue à échelle planétaire. Et ce que je trouve très intéressant, c'est qu'il y a beaucoup de chercheurs qui sont sur ce sujet et qui publient là-dessus parce qu'ils font des expériences pédagogiques. Ils montrent à quel point l'IA peut faire des choses formidables et à quel point il y a des choses qui ne marchent pas. rapidement, avec des délais de publication qui sont rapides, et qui nous permettent déjà d'avoir une bonne base qui sera toujours plus forte demain sur ce qu'on peut faire et ce qu'il ne faut pas faire, ou les choses sur lesquelles il faut qu'on soit vigilant. Par construction, les jeunes qui vivent avec l'IA vont développer une relation au savoir qui va être différente des générations précédentes. Mais exactement comme la génération qui a vécu avec Internet le vit différemment que la génération qui l'a vu avec le livre. Le livre c'était beaucoup de par cœur parce que vous n'allez pas trimballer votre encyclopédie universaliste avec vous. Maintenant les jeunes générations n'apprennent pas par cœur certaines choses, elles apprennent les chemins par où on peut les trouver, ce qui est radicalement différent. Ça, ça a bien été étudié et ce n'est pas tout à fait le même fonctionnement du cerveau. Je suis à peu près persuadé que demain, en tout cas c'est très probable, demain les gens vont apprendre aussi différemment. C'est-à-dire qu'est-ce qu'ils doivent apprendre ou qu'est-ce qu'ils n'ont pas besoin d'apprendre parce que l'IRA saura le faire mieux qu'eux. Il y a une autre manière de poser la question, parce qu'on a toujours autant de temps dans notre vie, on a toujours autant de neurones et de synapses à la naissance, on a toujours plus de sollicitations internes et externes, de rencontres sociales, de biens culturels, de choses à apprendre, d'expériences à vivre, etc. Et donc pour construire sa propre trajectoire d'individuation, pour devenir soi, où est-ce qu'on va consacrer du temps ? Les règles d'avant ne vont plus forcément fonctionner aujourd'hui. C'est en ça que le dogmatisme, dans un cas comme dans l'autre, ne va pas marcher. On ne va pas tout remplacer par de l'IA et on ne va certainement pas rien remplacer par de l'IA. Par contre, c'est à tout un chacun de décider ou d'optimiser la relation du temps qu'il consacre à demander à une machine pour qu'il le fasse à sa place, un peu comme si vous aviez un assistant personnel dédié. Et puis, quelle est la chose que vous voulez faire par vous-même ? parce que ça compte pour vous, parce que c'est important pour vous. Et de ce point de vue-là, la tâche du facilitateur, ou en tout cas son enseignement plutôt qu'une tâche, l'enseignement du facilitateur, là où il peut vraiment aider, c'est dans la version la plus noble, pour devenir soi-même, c'est à essayer de se connecter au plus profond de qui on est vraiment, de là où on veut contribuer, de ce qu'on aime faire, de là où on pense qu'on peut faire quelque chose d'important pour soi, pour sa communauté, pour le monde, et d'essayer d'aider les personnes avec qui il travaille, à optimiser son propre système pour qu'il soit toujours capable d'être le plus apprenant possible. Kenchima dit être dans son flot, être dans sa capacité à apprendre. Si vous avez envie d'écrire un livre, mais que vous n'avez que trois semaines et que l'IA peut vous aider à faire quelque chose et que vous n'endormez pas et que vous passez trois semaines, peut-être que ça vous aurait pris six mois sans l'IA et que ça va vous prendre trois semaines maintenant. Mais si c'est quelque chose de bien, a priori, l'IA ne va pas se substituer à vous. Elle va vous aider à faire des recherches documentaires. elle va vous aider à voir les défauts. C'est votre action à vous. Si vous demandez à l'IA de le faire, ce sera le livre de l'IA, ce ne sera pas le vôtre. Vous n'êtes pas transformé par ce système, vous êtes exactement comme avant, si ce n'est que vous avez demandé à quelqu'un d'autre de faire le boulot à votre place. Ça ne vous construit pas. en tant que personne. Je pense que ce qui compte, c'est au-delà de l'objet, c'est si on ressent sur l'apprenant, c'est à quoi est-ce qu'il va dédier son temps et à quoi il va dédier son attention. Et si on le pose comme ça, l'IA peut être un formidable outil pour ceux qui savent où est-ce qu'ils veulent aller ou pour les aider à trouver où est-ce qu'ils veulent aller. Par contre, ça va être un formidable piège pour ceux qui, ne sachant pas trop où aller nulle part, ou ne sachant pas comment aborder le sujet, vont déléguer à l'IA le soin de faire pour eux des tâches qu'ils devraient les construire. Et en ce sens-là, j'entends dans le premier cas les promesses qu'on nous fait, et dans le deuxième, la légitimité des craintes des éducateurs ou des enseignants qui voient le risque de la paresse. À plusieurs reprises, vous avez utilisé les expressions

  • Speaker #1

    devenir soi-même ou encore se construire. C'est dans ces expressions que la facilitation trouve son sens le plus étendu en termes d'éducation et de formation ? Oui, alors c'est un parti pris que je prends.

  • Speaker #0

    En fait, les discussions sur l'éducation et sur les missions de l'éducation sont minées dès le départ. C'est un spécialiste d'éducation qui m'avait expliqué ça quand on avait fait la consultation nationale en 2017. Il m'a dit que c'est un sujet sur lequel on ne peut pas discuter parce que les gens ne discutent pas de la même chose. Mais si on explique pourquoi ils ne discutent pas de la même chose, comme toujours, à ce moment-là on peut très facilement trouver des terrains d'entente. En fait, les gens entendent éducation pour au moins trois missions différentes, qui sont trois dimensions. La première dimension, enfin la première c'est pas… Il y a trois dimensions, la première il faut bien que je sois linéaire, ça veut dire que c'est pas la plus importante. Il y en a une qui est devenir un bon citoyen, ça c'est le collectif. Il y en a une deuxième qui est trouver un emploi et trouver un métier. Ça c'est plutôt organiser l'économie. Et la troisième c'est devenir une meilleure personne à titre individuel et se trouver soi-même. Suivant que vous êtes plutôt sur une, la deuxième ou la troisième, si vous rencontrez quelqu'un qui privilégie, qui a une autre vision dans cet espace à trois dimensions et qui est plutôt, mettons, arrêtons la philosophie, ça ne sert à rien, il faut plutôt que les gens sachent faire des choses pour qu'ils soient employables, vous voyez, enfin après vous allez avoir tous les discours sur l'éducation, vous allez les ranger dans cette matrice A3. Et vous allez effectivement trouver qu'à priori, ils n'ont pas l'air d'être compatibles. En fait, si, puisqu'il y a trois missions, par construction, tout ça coexiste. Et ça sert, entre guillemets, il n'y a pas de bonne ou de mauvaise éducation sur l'ensemble de ces trois, en fonction du cadre global. Maintenant, si vous poussez tout le monde à devenir soi-même, mais qu'à la fin, ils n'ont aucun emploi et qu'ils ne deviennent pas des bons citoyens, et que la démocratie explose par l'individualisme, et que les boîtes n'arrivent plus à recruter, et que l'économie s'effondre, on n'aura pas forcément gagné. Donc il n'y a pas cette logique-là globalement. Mais mon propos, à titre personnel, j'ai tendance à insister sur celle-ci plutôt que les deux autres, c'est que si vous formez les gens à être plus eux-mêmes, à être plus en compréhension de leurs besoins profonds, de leur aptitude profonde et de leur capacité profonde pour savoir quoi développer, ils ont de meilleures armes et de meilleures cartes pour jouer dans la société en fonction des signaux qu'ils reçoivent pour savoir ce sur quoi ils peuvent jouer et où se spécialiser. Voilà, c'est ça, et je l'entends bien dans un sens collectif, qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit, j'ai insisté sur les modèles scandinaves ou canadiens, il y a une dimension, parce qu'on apprend d'autant mieux à être soi, qu'on le fait dans un respect de l'autre et qu'on est dans une action collective, donc les deux pour moi sont très liés. Je pense que ces trois dimensions sont conciliables, à partir du moment où on fonde. les systèmes d'éducation et de formation sur la capacité des uns et des autres à développer notre meilleure capacité d'action. C'est ce que les Anglais appellent agency. Les Anglais ont deux mots, il y a empowerment et agency, et nous on n'en a aucun. Je ne sais pas si c'est un signe, mais ça peut éventuellement être le mot de la fin. Pour conclure ce podcast,

  • Speaker #1

    avez-vous un exemple de pratique de facilitation qui a vos faveurs et que vous pourriez partager avec nos auditeurs ?

  • Speaker #0

    J'aime bien utiliser des dispositifs qui obligent les gens à pratiquer une écoute active et une écoute active à plusieurs niveaux. Par exemple, il y a l'exercice des quatre chaises où chacun répond à une question particulière tour à tour. Et l'objet de cette... Cet exercice c'est de permuter. Donc vous avez une personne qui répond à la question, qui est en général une question assez profonde, assez personnelle, et les trois autres qui sont attentifs à différents composants du langage. Ça peut être le propos, la teneur du propos, la sémantique. L'autre ça va plutôt être le phrasé, les expressions émotionnelles. Le troisième ça va peut-être être le langage corporel. On peut varier à l'infini différents canaux. Une fois que la première personne a parlé, les trois autres lui font un feedback sur ce qu'ils ont décrypté et ce qu'ils ont observé. et c'est extraordinairement riche comme réflexivité. Et c'est un exercice, vous le faites en permutation circulaire, tout le monde y passe et ça crée des liens d'une manière extrêmement rapide et ça crée une connivence et un ancrage profond et ça crée de la confiance quasiment instantanément. Donc c'est un exercice que je trouve assez remarquable. Merci Gaël Mingui pour votre participation. Merci à vous,

  • Speaker #1

    chers auditeurs. Pour aller plus loin, découvrez la Masterclass Facilitateur d'apprenance sur le site www.learning.coach Vous retrouverez cet épisode sur le site internet traindy.io, sur nos réseaux sociaux et sur l'ensemble des plateformes d'écoute. A très bientôt pour le prochain épisode. Sous-titrage ST'501

Description

Cet épisode met en lumière l'importance de l'innovation pédagogique et le rôle vital du formateur et du facilitateur dans la stimulation de l'autonomie et de l'engagement des apprenants. Gaell Manguy, directeur du Learning Planet Institute, partage son expérience sur la transformation des organisations pour devenir plus apprenantes et sur l'enseignement des principes des organisations apprenantes. Il souligne la nécessité d'une évolution vers un modèle éducatif qui favorise la collaboration, la coopération, et le développement des compétences personnelles et collectives pour faire face aux défis futurs. La discussion aborde également la facilitation dans l'apprentissage, la définition étendue de cette notion, et son impact profond sur la relation des apprenants à leur propre développement et à leur environnement. Finalement, le dialogue touche à l'importance de l'empathie dans l'éducation et comment les technologies comme l'IA redéfinissent les contours de la facilitation, proposant un avenir où l'éducation sert non seulement à former de bons citoyens et à préparer au marché du travail, mais aussi à aider les individus à devenir de meilleures versions d'eux-mêmes.


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Transcription

  • Speaker #0

    Sous-titrage ST'501

  • Speaker #1

    Vous écoutez Learning Coach by Traindy, le podcast qui part à la rencontre de ceux qui ont maîtrisé l'art d'apprendre et de former. Tout au long de cette saison, nous vous invitons à un voyage au cœur de l'innovation pédagogique, là où les rôles de formateur et de facilitateur s'entrelacent pour stimuler l'autonomie et l'engagement de vos apprenants. Dans cette série d'échanges, les conseils pratiques et les expériences personnelles de nos invités vous inspireront vers une maîtrise renouvelée de l'art d'accompagner l'apprentissage. Bienvenue dans ce nouvel épisode de Learning Coach, bienvenue à notre invité avec qui nous allons évoquer le changement de rapport au savoir. Et pour bien débuter, pouvez-vous s'il vous plaît vous présenter, nous donner, puisque c'est d'elle dont nous parlons, votre définition de la facilitation en formation. Comment s'applique-t-elle ? Quelles interactions ? Et finalement, quels sont ses bénéfices, ses apports ?

  • Speaker #0

    Moi, je m'appelle Gaell Manguy, je suis directeur général adjoint du Learning Planet Institute et à ce titre, j'ai plusieurs fonctions. D'une part je m'occupe de monter le pôle transformation des organisations pour qu'elles deviennent plus apprenantes, ça c'est notre motto, et puis d'autre part j'ai conservé quelques fonctions dans l'enseignement, j'aurais souhaité dans la recherche mais le temps est très limité, donc j'enseigne l'analyse systémique de la soutenabilité et les principes des organisations apprenantes. En gros, ce qu'on essaye de faire c'est d'être un acteur de cette transformation plus que nécessaire des systèmes qui permettent de d'apprentissage, de formation, d'enseignement, pour qu'on passe du modèle très XXe siècle à quelque chose qui soit plus tourné vers l'avenir et en particulier qui soit plus tourné vers notre capacité à affronter les différentes transitions, même si je n'apprécie pas spécialement ce mot, il a fait floresse, donc je l'utilise.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous pouvez développer ce dernier point, cet enjeu d'avenir que vous évoquez ?

  • Speaker #0

    Le monde dans lequel on va est un monde qui est d'une complexité telle que le système... où on est en compétition sur des savoirs bien établis et où il faut bien répéter, rétablir et refaire les raisonnements d'avant finalement. C'était utile avant pour pouvoir structurer les esprits et pour sélectionner pour aller dans les écoles, mais ce n'est pas quelque chose qui aujourd'hui est très efficace. J'en veux pour preuve que les sociétés qui sont les plus résilientes et les plus tournées vers l'avenir, et celles aussi qui ont le plus confiance les unes dans les autres et ont confiance dans l'avenir, sont justement des sociétés qui mettent la collaboration et la coopération au centre de l'apprentissage dès le plus jeune âge et qui misent moins sur les connaissances en tant que telles. que sur le développement des compétences personnelles et des compétences collectives, et en particulier la capacité à relever ensemble des défis.

  • Speaker #1

    Si je comprends bien, on parle carrément de changement de société.

  • Speaker #0

    Pour moi, c'est complètement fondamental. Le passage d'une société compétitive aux sociétés collaboratives, pour le dire comme ça, ou des systèmes éducatifs qui misent sur l'apprentissage individuel vers un apprentissage collectif, de facto, va donner un angle un peu différent, va donner une couleur un peu différente à la manière dont on imagine la transformation et les transitions, la disruption, la perturbation qu'on a. avec l'arrivée des IA génératifs.

  • Speaker #1

    Peut-on encore rester sur ce sujet de la nécessaire transformation de l'éducation, pour l'observer maintenant sous l'angle de la facilitation ?

  • Speaker #0

    Je ne sais pas quelle définition vous avez de facilitation, c'est un mot qui est assez large. Alors je ne sais pas si vous souhaitez vous m'en donner une, ou si vous préférez que je la discute, mais je veux bien prendre une petite minute pour la discuter. C'est un peu comme... enseignant ou formateur, c'est des mots qui peuvent recouvrir vraiment une très grande diversité. d'activité, de posture, de connaissances et surtout de compétences. Donc s'il se prend facilitation au sens premier du terme, c'est vraiment au sens chimique presque, c'est une sorte de catalyse, c'est-à-dire que vous allez abaisser des barrières et vous allez faciliter, par exemple la rencontre entre une personne et une autre personne, vous allez faciliter la rencontre entre une personne et une compétence ou un savoir-faire. De ce point de vue-là, si c'est pris de façon très macro, c'est quasiment la même chose qu'un enseignant, un formateur ou un mentor. C'est-à-dire que dans sa version la plus noble, la plus élevée, Tous les éducateurs le vivent comme ça. L'amour de ce métier extraordinaire, c'est de se dire, il y a un moment, il y a cette étincelle, il y a ce déclic, il y a cette personne qui a compris quelque chose et on a le sentiment d'être utile parce qu'on a réussi à faire... qu'il y ait quelque chose qui passe peut-être plus vite que si la personne l'avait fait par lui-même. Je ne dis pas plus que ça, mais en fait c'est très humble ce métier, et en même temps c'est des qualités humaines extraordinaires, parce que justement ce regard, cet éclat, ce sourire, ce merci, parce qu'on a réussi à faire comprendre quelque chose qui pour l'instant résistait à quelqu'un, on a ouvert la porte sur un autre monde qui ne soupçonnait pas, on a réussi à lever une barrière mentale qui était difficile, que la personne évidemment ne voyait pas. ou on était consciente mais n'arrivait pas à la lever, enfin il y a différents cas de figure, tout ça, ça tourne autour d'un sujet qui est, on essaye de rendre... plus facile l'accession à un autre soi, à un autre niveau de soi, parce qu'on a acquis une compétence, on a levé une barrière mentale, on a acquis une connaissance, etc. Mais rien ne nous dit que si on n'était pas là, la personne ne le ferait pas dans d'autres circonstances. Tout un chacun a appris énormément de choses sans forcément avoir besoin de l'action directe de quelqu'un. Je pense que tout ça est important à la lumière de à quoi sert la technos, ce qu'elle fait, ce qu'elle ne fait pas, et quelle est la place de l'humain là-dedans. Donc rien ne nous dit ça. Mais en même temps, ce qu'on sait, c'est que si on laisse quelqu'un seul, ça dépend des gens, mais il y a des gens qui savent apprendre par eux-mêmes avec une... Un niveau qui est assez remarquable, c'est d'ailleurs une compétence qui s'acquiert et qui se transforme. Ça, ça se facilite aussi, au niveau un peu méta. La plupart des humains, voire tous les humains, ont besoin des autres pour apprendre. Parce que l'apprentissage, c'est par construction une transformation de son système nerveux. Il y a un moment où il faut engrammer une forme différente, donc c'est bien un travail qu'on fait soi. Il n'y a personne d'autre qui peut le faire à votre place. Par contre, quand on est avec quelqu'un... Si nous inspire ou nous aide ou nous blesse ou nous punit, ça malheureusement on peut apprendre aussi bien évidemment à faire des choses qui sont négatives, c'est l'extérieur qui va nous indiquer ou qui va nous aider ou qui va nous rendre les choses faciles.

  • Speaker #1

    On tient tout de même là une définition pour le moins étendue de la facilitation.

  • Speaker #0

    J'essaie de couvrir dans cette digression les différents aspects de ce qu'on entend par facilitation. Si c'est la personne qui met trois post-it dans un petit atelier et qui fait que les gens ont passé un bon moment, c'est vraiment le degré zéro de la facilitation. Enfin, c'est le degré assez bas. Et c'est vrai que souvent, il y a une sorte d'opposition entre facilitation et formateur. Il y a le facilitateur de groupe qui est là pour, entre guillemets, faire que le groupe se passe bien, ce qui déjà en soi est un talent. Puis il y a le formateur qui, lui, est détenteur du savoir et qui va transférer les choses. Mais j'essaie de le regarder avec un autre prisme, il y a une sorte de continuité, parce que, que ce soit... Au niveau personnel ou que ce soit au niveau collectif, que ce soit dans un groupe, que ce soit avec une personne, la facilitation pour moi peut prendre un sens générique, quelque chose de vraiment très humain, de fondamental, qui fonde en partie notre espèce. Il n'y a pas beaucoup d'espèces où on apprend autant. Il n'y a pas beaucoup d'espèces où on dédie autant de temps à former les autres.

  • Speaker #1

    Arrêtons-nous sur le personnage de l'enseignant, du formateur. C'est quoi l'un comme l'autre en 2024 ?

  • Speaker #0

    Toutes ces personnes ont en commun d'exercer un métier. qui débouche sur le passage, une transition, enfin, des facilitateurs, ils facilitent la transition interne chez des gens avec qui ils travaillent pour qu'à la fin, ils en sachent plus qu'avant. Soit ils en sachent plus parce qu'ils ont appris plus de choses sur un sujet ou parce qu'ils ont développé une compétence sur un sujet. Qu'on soit prof d'histoire, prof d'anglais, prof de maths, ou formateur d'auto-école, ou enseignant sur la sécurité routière, ou je ne sais quoi. De toute façon, il y a bien quelqu'un qui a un avant et un après pour la personne qui suit cet enseignement. Et l'idéal, c'est que la personne après ait mieux compris un sujet, se soit débloqué sur un autre et appris des faits et transformé son point de vue sur certaines choses ou a acquis des compétences. C'est vraiment très large, mais c'est bien cette idée de transition presque neurologique entre l'avant et l'après. Mais les mêmes personnes vont aussi vous apprendre à... Pour ce qui est du professeur de sciences nat, à regarder le monde avec d'autres yeux, surtout si vous êtes un citadin, de comprendre la magie du vivant, la façon dont tout est interrelié. L'extraordinaire raffinement des machines biologiques qui sont extrêmement inspirantes et qui vont vraiment vous amener à voir le monde complètement autrement. Et je pense qu'il y a un véritable talent là d'arriver à sortir simplement des faits pour en faire quelque chose. Mais au même titre, si je prends le formateur en auto-école, c'est une chose d'appliquer à la lettre les processus et de le faire acquérir par l'apprenant. Et il y en a une autre, d'expliquer l'esprit qu'il y a derrière la lettre et de comprendre pourquoi telle règle est plus importante que d'autres, pourquoi est-ce que les gens ne font pas bien ça et c'est un vrai danger mortel auquel on ne pense pas, ou comment se positionner différemment dans la voiture pour ne pas, au bout de 20 ans, avoir des tendinites chroniques, etc. Donc il y a un savoir-faire, une compétence, une qualité qui va permettre à l'apprenant de se dire mais c'est formidable la chance que j'ai eu d'avoir quelqu'un comme ça parce qu'il m'a ouvert les yeux sur, il m'a permis d'apprendre que, etc. Et donc il y a un mélange systématique, je pense, entre connaissances et compétences. Et pour revenir à l'enseignant plus classique, celui qu'on a connu sur les bancs de l'école, l'enseignant qui nous apprend à aimer à apprendre, chez ceux pour qui ce n'est pas inné, ou chez ceux qui ont eu des difficultés ou qui ont eu des problèmes dans d'autres classes, ou à la maison, ou qu'importe, celui qui réveille le désir d'apprendre ou celui qui arrive à l'enflammer. Mais celui-là, il a une puissance de transformation extraordinaire. Parce qu'une fois que vous savez que vous êtes capable d'apprendre et d'aller trouver les maîtres qui vont vous apprendre à mieux apprendre, vous avez gagné dans une autonomie et votre soif de savoir s'en trouve décuplée.

  • Speaker #1

    On parle de capacité relationnelle. J'ai presque le sentiment que l'on flirte avec l'intime. Au plus,

  • Speaker #0

    vous allez gagner en estime de vous-même grâce à quelqu'un qui, d'une certaine manière, un facilitateur, au niveau de l'enseignant. Cette capacité de facilitation, ça peut être quelqu'un qui vous facilite votre propre relation à vous. Je pense que ça, c'est une manière de le présenter que je trouve assez jolie, parce que finalement, rappelez-vous quand vous étiez sur les bancs de l'école, quand vous n'étiez pas bien, ce prof ou cette prof extraordinaire qui vous a... refait aimer une matière ou qui vous a redonné confiance en vous et qui vous a réconcilié avec une partie de vous-même. Il a facilité, il a abaissé des barrières en vous, il vous a redonné le goût de... C'est vraiment intime, c'est un fonctionnement très intime sur votre relation à vous-même. Non, je suis nul en maths, non, je ne ferai jamais de sport, l'art, ce n'est pas pour moi. Les études, ce n'est pas pour moi, je ne sais pas. Il y a mille et une choses et on se les fixe automatiquement. Et on sait bien à quel point ça joue un rôle surdéterminant dans la projection des enfants et dans la reproduction des classes sociales. Vous connaissez cette expérience probablement, mais quand on demande à des gamins ce qu'ils veulent faire plus tard, si vous êtes enfant de CSP+, vous voulez faire docteur, si vous êtes enfant issu de milieu difficile, à ce moment-là, vous allez faire infirmier. Mais par contre, si on demande au même enfant, quel est ton héros préféré ? Alors, mettons que ce soit Superman. Qu'est-ce que Superman voudrait faire ? Là, Superman, il veut faire docteur. Oui, et donc ça c'est vraiment de la facilitation, c'est trouver un subterfuge pour faire dire à l'enfant ce qu'il n'ose pas se dire lui-même, et là en l'occurrence c'est pour pouvoir construire son estime de soi, mais ça peut être valable sur tous les sujets, c'est-à-dire avoir des techniques, et pour ça il faut avoir une empathie, il faut avoir une envie d'aider l'autre, pour moi qui est proche du soin, on pourrait étendre le sujet, mais le rapport à soi qui est développé par les enseignants. et pour moi très proche fondamentalement dans l'approche de ceux qui pratiquent le soin, qui aident aussi les gens à se réconcilier avec eux-mêmes pour qu'ils aillent mieux.

  • Speaker #1

    Comment prendre conscience de tout cela pour un professionnel de la formation, qu'il soit d'ailleurs en activité ou qu'il s'y destine ? Est-ce que l'on forme à l'empathie ? Oui,

  • Speaker #0

    c'est une question centrale et je pense qu'on peut essayer de distinguer ce qui se fait dans notre pays et ce qui se fait ailleurs. Je pense que c'est très lié à ce qu'on s'est dit au début de cet échange, c'est que ce n'est pas culturellement quelque chose d'entré chez nous. Donc on se pose cette question, alors que j'imagine qu'il y a d'autres pays où ils ont déjà bien avancé. Pour donner quelques éléments de contexte, au Danemark vous avez des cours d'empathie. Les petites classes depuis 1998, c'est une sorte de marqueur, ça donne une idée. Nous, on est en train de discuter, de savoir s'il faut en mettre ou pas. Eux, ça fait depuis 1998 qu'ils le font. Je vais faire le calcul, c'est assez intéressant. Le Canada a développé le social emotional learning, l'apprentissage socio-émotionnel, là encore, à tous les âges de la vie, dans leur enseignement. La classe au collège et lycée, ça fait partie intégrante du cursus depuis des décennies. À partir du moment où ça fait partie du programme et qu'on estime que c'est quelque chose qu'il faut apprendre, ça veut dire que les gens vont être recrutés parce qu'ils le maîtrisent et qu'avant ils vont être formés pour pouvoir l'enseigner. Donc ça fait partie, c'est très structurant quand même. Je trouve ça très intéressant comme choix parce que nous on axe beaucoup les savoirs fondamentaux sur ce qu'il faut apprendre. D'un autre côté, on a beaucoup plus d'heures de cours que... Nos petits amis, qu'ils soient canadiens, finlandais, hollandais, j'ai vécu deux ans en Hollande, on voit bien que c'est pas tout. À 15h, ils sont partis et ils vont faire du sport. Nous, non, on continue à travailler pour apprendre des choses. Ça ne fait pas forcément des petits-enfants qui sont plus heureux, ou des petits-enfants qui sont plus à même avec leurs problèmes, qui sont plus capables d'exprimer leurs émotions et de les gérer en public, ou de comprendre l'autre, de développer l'empathie. Donc il y a quelque chose quand même d'assez intéressant de voir qu'il y a d'autres pays qui ont fait autrement et qui a priori ont une longueur d'avance, mais ça veut dire que c'est faisable et on peut s'inspirer d'eux pour voir comment on le fait. La réponse toute faite, c'est aujourd'hui, c'est très peu fait. La réponse étendue, c'est qu'il y a d'autres endroits qui le font, on peut s'en inspirer. Et il y a des initiatives très intéressantes, je suis sûr, aux quatre coins de France, de gens qui sont en train d'expérimenter des choses. Donc si on apprend d'eux et qu'on leur donne plus de moyens pour qu'ils puissent faire école, ça peut rentrer dans les cursus après et ça peut nous aider à transformer notre système.

  • Speaker #1

    Nous parlons d'autonomie dans les apprentissages, nous parlons d'empathie. J'ai envie de prendre un léger... Contre-pied à notre échange, parlons un peu d'IA, ces dispositifs qui simulent l'empathie, qui sont programmés pour. Est-ce que ces technologies ne redéfinissent pas déjà les contours de la facilitation ? Je pense que personne n'a la réponse à cette belle question,

  • Speaker #0

    tout simplement parce que l'humanité est en train de faire une expérience à l'échelle planétaire sur le sujet. On l'a vu avec le Covid, ceux qui nous ont dit comment ça allait se passer ont tous eu tort à un moment ou à un autre. Pour une bonne raison, c'est que face à un problème ouvert, il faut faire de la recherche, il n'y a pas d'autre solution. On ne peut pas dire que le dogmatisme ne fonctionne pas. Il n'y aura pas d'IA chez moi où tout le monde va se mettre sur l'IA, ce sont deux bornes d'un spectre intéressant sur lequel il va falloir... Apprendre collectivement ce qui se passe. Ce que je trouve assez remarquable, c'est que GPT a officiellement sorti du bois publiquement en novembre 2022. Ça fait un an et trois mois, grosso modo. Les transformeurs et GPT, ça faisait un moment qu'ils marinaient, on voyait bien qu'il y avait un truc assez énorme qui allait sortir. Mais ça n'empêche pas que ça a pris le public de cours. Et ça a aussi été l'innovation technologique qui s'est diffusée le plus vite possible, le plus rapidement dans toute l'histoire de l'humanité. On n'a jamais vu ça. Donc on est sur quelque chose qui est de toute façon qui est là et qui est là et qui va beaucoup plus vite que tout ce qu'on pouvait imaginer. Et le taux d'adoption est beaucoup plus rapide que ce qu'on pouvait imaginer. Je pense que c'est important de poser les bases parce que j'ai suivi avec attention les demandes d'un grand nombre de spécialistes de l'IA qui demandaient un moratoire. Ça a duré un mois et ça n'a eu aucune portée politique. En fait, le coup est parti, l'économie est déjà transformée. Tout le monde utilise déjà l'IA sans le savoir depuis au moins 30 ans. C'est une nouvelle forme d'IA plus puissante et c'est rien en comparaison de celle qui arrive demain. Donc le gros de l'humanité va fonctionner avec de l'IA et toujours plus dans les années qui viennent. C'est un peu les bases de mon raisonnement pour ce qui va suivre. Sur ce, plus on apprend à la domestiquer, mieux c'est. Quand je dis la domestiquer, c'est un outil, donc il faut apprendre à s'en servir. Ça, encore une fois, c'est une borne du spectre. C'est Elon Musk qui dit, soit vous apprenez à donner des ordres aux IA, soit les IA vont vous donner des ordres. C'est très manichéen, c'est du musk, mais ça dit une chose, qui est que cet outil est tellement puissant que si on ne sait pas s'en servir, on va avoir un problème demain. Et ça, c'est déjà vrai. C'est déjà vrai parce que, je vais donner des exemples un peu autour de moi, les gamins qui n'ont pas attendu que les profs les autorisent, aujourd'hui font leur CV, leur lettre de motivation avec de lire. Et ils savent les faire bien plus vite et bien mieux que la génération du dessus, sans avoir pris des cours sur comment on fait un CV. Donc il y a des choses qui vont très vite et il y a une course. C'est la course à l'armement entre les différents corps. Maintenant, qu'est-ce que ça veut dire sur le cerveau des garçons, le cerveau de nos enfants, nos propres cerveaux et nos capacités à apprendre et nos capacités à développer nos compétences ? Je pense qu'on est dans une expérience à l'étendue à échelle planétaire. Et ce que je trouve très intéressant, c'est qu'il y a beaucoup de chercheurs qui sont sur ce sujet et qui publient là-dessus parce qu'ils font des expériences pédagogiques. Ils montrent à quel point l'IA peut faire des choses formidables et à quel point il y a des choses qui ne marchent pas. rapidement, avec des délais de publication qui sont rapides, et qui nous permettent déjà d'avoir une bonne base qui sera toujours plus forte demain sur ce qu'on peut faire et ce qu'il ne faut pas faire, ou les choses sur lesquelles il faut qu'on soit vigilant. Par construction, les jeunes qui vivent avec l'IA vont développer une relation au savoir qui va être différente des générations précédentes. Mais exactement comme la génération qui a vécu avec Internet le vit différemment que la génération qui l'a vu avec le livre. Le livre c'était beaucoup de par cœur parce que vous n'allez pas trimballer votre encyclopédie universaliste avec vous. Maintenant les jeunes générations n'apprennent pas par cœur certaines choses, elles apprennent les chemins par où on peut les trouver, ce qui est radicalement différent. Ça, ça a bien été étudié et ce n'est pas tout à fait le même fonctionnement du cerveau. Je suis à peu près persuadé que demain, en tout cas c'est très probable, demain les gens vont apprendre aussi différemment. C'est-à-dire qu'est-ce qu'ils doivent apprendre ou qu'est-ce qu'ils n'ont pas besoin d'apprendre parce que l'IRA saura le faire mieux qu'eux. Il y a une autre manière de poser la question, parce qu'on a toujours autant de temps dans notre vie, on a toujours autant de neurones et de synapses à la naissance, on a toujours plus de sollicitations internes et externes, de rencontres sociales, de biens culturels, de choses à apprendre, d'expériences à vivre, etc. Et donc pour construire sa propre trajectoire d'individuation, pour devenir soi, où est-ce qu'on va consacrer du temps ? Les règles d'avant ne vont plus forcément fonctionner aujourd'hui. C'est en ça que le dogmatisme, dans un cas comme dans l'autre, ne va pas marcher. On ne va pas tout remplacer par de l'IA et on ne va certainement pas rien remplacer par de l'IA. Par contre, c'est à tout un chacun de décider ou d'optimiser la relation du temps qu'il consacre à demander à une machine pour qu'il le fasse à sa place, un peu comme si vous aviez un assistant personnel dédié. Et puis, quelle est la chose que vous voulez faire par vous-même ? parce que ça compte pour vous, parce que c'est important pour vous. Et de ce point de vue-là, la tâche du facilitateur, ou en tout cas son enseignement plutôt qu'une tâche, l'enseignement du facilitateur, là où il peut vraiment aider, c'est dans la version la plus noble, pour devenir soi-même, c'est à essayer de se connecter au plus profond de qui on est vraiment, de là où on veut contribuer, de ce qu'on aime faire, de là où on pense qu'on peut faire quelque chose d'important pour soi, pour sa communauté, pour le monde, et d'essayer d'aider les personnes avec qui il travaille, à optimiser son propre système pour qu'il soit toujours capable d'être le plus apprenant possible. Kenchima dit être dans son flot, être dans sa capacité à apprendre. Si vous avez envie d'écrire un livre, mais que vous n'avez que trois semaines et que l'IA peut vous aider à faire quelque chose et que vous n'endormez pas et que vous passez trois semaines, peut-être que ça vous aurait pris six mois sans l'IA et que ça va vous prendre trois semaines maintenant. Mais si c'est quelque chose de bien, a priori, l'IA ne va pas se substituer à vous. Elle va vous aider à faire des recherches documentaires. elle va vous aider à voir les défauts. C'est votre action à vous. Si vous demandez à l'IA de le faire, ce sera le livre de l'IA, ce ne sera pas le vôtre. Vous n'êtes pas transformé par ce système, vous êtes exactement comme avant, si ce n'est que vous avez demandé à quelqu'un d'autre de faire le boulot à votre place. Ça ne vous construit pas. en tant que personne. Je pense que ce qui compte, c'est au-delà de l'objet, c'est si on ressent sur l'apprenant, c'est à quoi est-ce qu'il va dédier son temps et à quoi il va dédier son attention. Et si on le pose comme ça, l'IA peut être un formidable outil pour ceux qui savent où est-ce qu'ils veulent aller ou pour les aider à trouver où est-ce qu'ils veulent aller. Par contre, ça va être un formidable piège pour ceux qui, ne sachant pas trop où aller nulle part, ou ne sachant pas comment aborder le sujet, vont déléguer à l'IA le soin de faire pour eux des tâches qu'ils devraient les construire. Et en ce sens-là, j'entends dans le premier cas les promesses qu'on nous fait, et dans le deuxième, la légitimité des craintes des éducateurs ou des enseignants qui voient le risque de la paresse. À plusieurs reprises, vous avez utilisé les expressions

  • Speaker #1

    devenir soi-même ou encore se construire. C'est dans ces expressions que la facilitation trouve son sens le plus étendu en termes d'éducation et de formation ? Oui, alors c'est un parti pris que je prends.

  • Speaker #0

    En fait, les discussions sur l'éducation et sur les missions de l'éducation sont minées dès le départ. C'est un spécialiste d'éducation qui m'avait expliqué ça quand on avait fait la consultation nationale en 2017. Il m'a dit que c'est un sujet sur lequel on ne peut pas discuter parce que les gens ne discutent pas de la même chose. Mais si on explique pourquoi ils ne discutent pas de la même chose, comme toujours, à ce moment-là on peut très facilement trouver des terrains d'entente. En fait, les gens entendent éducation pour au moins trois missions différentes, qui sont trois dimensions. La première dimension, enfin la première c'est pas… Il y a trois dimensions, la première il faut bien que je sois linéaire, ça veut dire que c'est pas la plus importante. Il y en a une qui est devenir un bon citoyen, ça c'est le collectif. Il y en a une deuxième qui est trouver un emploi et trouver un métier. Ça c'est plutôt organiser l'économie. Et la troisième c'est devenir une meilleure personne à titre individuel et se trouver soi-même. Suivant que vous êtes plutôt sur une, la deuxième ou la troisième, si vous rencontrez quelqu'un qui privilégie, qui a une autre vision dans cet espace à trois dimensions et qui est plutôt, mettons, arrêtons la philosophie, ça ne sert à rien, il faut plutôt que les gens sachent faire des choses pour qu'ils soient employables, vous voyez, enfin après vous allez avoir tous les discours sur l'éducation, vous allez les ranger dans cette matrice A3. Et vous allez effectivement trouver qu'à priori, ils n'ont pas l'air d'être compatibles. En fait, si, puisqu'il y a trois missions, par construction, tout ça coexiste. Et ça sert, entre guillemets, il n'y a pas de bonne ou de mauvaise éducation sur l'ensemble de ces trois, en fonction du cadre global. Maintenant, si vous poussez tout le monde à devenir soi-même, mais qu'à la fin, ils n'ont aucun emploi et qu'ils ne deviennent pas des bons citoyens, et que la démocratie explose par l'individualisme, et que les boîtes n'arrivent plus à recruter, et que l'économie s'effondre, on n'aura pas forcément gagné. Donc il n'y a pas cette logique-là globalement. Mais mon propos, à titre personnel, j'ai tendance à insister sur celle-ci plutôt que les deux autres, c'est que si vous formez les gens à être plus eux-mêmes, à être plus en compréhension de leurs besoins profonds, de leur aptitude profonde et de leur capacité profonde pour savoir quoi développer, ils ont de meilleures armes et de meilleures cartes pour jouer dans la société en fonction des signaux qu'ils reçoivent pour savoir ce sur quoi ils peuvent jouer et où se spécialiser. Voilà, c'est ça, et je l'entends bien dans un sens collectif, qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit, j'ai insisté sur les modèles scandinaves ou canadiens, il y a une dimension, parce qu'on apprend d'autant mieux à être soi, qu'on le fait dans un respect de l'autre et qu'on est dans une action collective, donc les deux pour moi sont très liés. Je pense que ces trois dimensions sont conciliables, à partir du moment où on fonde. les systèmes d'éducation et de formation sur la capacité des uns et des autres à développer notre meilleure capacité d'action. C'est ce que les Anglais appellent agency. Les Anglais ont deux mots, il y a empowerment et agency, et nous on n'en a aucun. Je ne sais pas si c'est un signe, mais ça peut éventuellement être le mot de la fin. Pour conclure ce podcast,

  • Speaker #1

    avez-vous un exemple de pratique de facilitation qui a vos faveurs et que vous pourriez partager avec nos auditeurs ?

  • Speaker #0

    J'aime bien utiliser des dispositifs qui obligent les gens à pratiquer une écoute active et une écoute active à plusieurs niveaux. Par exemple, il y a l'exercice des quatre chaises où chacun répond à une question particulière tour à tour. Et l'objet de cette... Cet exercice c'est de permuter. Donc vous avez une personne qui répond à la question, qui est en général une question assez profonde, assez personnelle, et les trois autres qui sont attentifs à différents composants du langage. Ça peut être le propos, la teneur du propos, la sémantique. L'autre ça va plutôt être le phrasé, les expressions émotionnelles. Le troisième ça va peut-être être le langage corporel. On peut varier à l'infini différents canaux. Une fois que la première personne a parlé, les trois autres lui font un feedback sur ce qu'ils ont décrypté et ce qu'ils ont observé. et c'est extraordinairement riche comme réflexivité. Et c'est un exercice, vous le faites en permutation circulaire, tout le monde y passe et ça crée des liens d'une manière extrêmement rapide et ça crée une connivence et un ancrage profond et ça crée de la confiance quasiment instantanément. Donc c'est un exercice que je trouve assez remarquable. Merci Gaël Mingui pour votre participation. Merci à vous,

  • Speaker #1

    chers auditeurs. Pour aller plus loin, découvrez la Masterclass Facilitateur d'apprenance sur le site www.learning.coach Vous retrouverez cet épisode sur le site internet traindy.io, sur nos réseaux sociaux et sur l'ensemble des plateformes d'écoute. A très bientôt pour le prochain épisode. Sous-titrage ST'501

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