5) Céline Ripoll conteuse bordelaise témoigne de violences conjugales cover
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Les balades d'Isa

5) Céline Ripoll conteuse bordelaise témoigne de violences conjugales

5) Céline Ripoll conteuse bordelaise témoigne de violences conjugales

12min |24/02/2025|

24

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Les balades d'Isa

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12min |24/02/2025|

24

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Description

Série : Céline Ripoll, raconte la violence conjugale dans un spectacle (cinquième épisode)

Céline Ripoll explique dans cet épisode, quel a été le déclencheur qui lui a donné l'impulsion de quitter le domicile conjugal. De quelle façon ce départ a t-il été vécu ? Comment elle a pu trouver un refuge, une habitation pour elle, puis ses filles. Car là est aussi la question, où partir ? Qui peut soutenir une femme dans cette situation ? Quel organisme ? La Maison des femmes a été un repère pour Céline Ripoll.

La Maison des femmes de Saint-Denis est fondée en 2016, a rapidement inspiré d’autres structures et professionnels. Dès 2017, un modèle proche ouvre à Bruxelles, puis à Bordeaux, Brive, Reims, etc. En mars 2021, le collectif ReStart est créé pour réunir les structures nées sur le modèle de La Maison des femmes de Saint-Denis. https://www.lamaisondesfemmes.fr/

Son spectacle présenté le 29 mai 2025 au Festival Cap Breton se nomme "Née le 8 mars 1977". Pour mieux connaitre cette artiste, allez voir sur le site : https://celineripoll.com/

Musique libre de droits Amaski Night détective, Luca Francini solitude et glossy de Coma média.

@Isabelle Wagner créatrice et autrice de la collection Podcast "Les balades d'Isa"


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Isabelle Wagner

    Céline Rippol, vous partez. On continue sur la l'affaire de ce qui s'est passé sur l'île de Pâques. On raconte cette violence conjugale qui a été vécue un enfer pendant plusieurs années. Ce jour-là, vous partez avec votre voiture. À ce moment, il veut vous écraser le visage avec des pierres. Vous arrivez à partir et vous dites, ça y est, stop, c'est fini. Et là, qu'est-ce qui se passe ? Est-ce que vous allez vers une personne, vers une famille pour vous réfugier ? Ou est-ce que vous vous dites, il faut que je m'en sorte ? toute seule avec mes deux filles. Comment on gère ça aussi, ce côté mère de famille, puisque vous le disiez très bien, on ne sépare pas la famille.

  • Céline Ripoll

    Je ne sais même pas si j'ai réussi à penser à ce moment-là. Je pars en voiture, je pars me réfugier là où sont mes filles, c'est-à-dire chez ma belle-sœur. J'arrive, il est donc 4h30 du matin, j'ouvre la porte, j'arrive en courant, je crie, je la réveille, je dis il va me tuer, il va me tuer, il va me tuer, et je plonge dans une penderie et je ferme la porte de la penderie et je me cache dans cette penderie. Elle, elle n'a rien compris. Et tout d'un coup, son frère arrive, me cherche partout et tout ça. Et moi, quand je suis dans la penderie, je réalise que je suis dans le château de Barbebleu. C'est fou. Moi qui ne raconte que des contes du Pacifique, voilà que me vient une légende française, d'Europe. Et donc là, elle arrive à le calmer, ils s'engueulent, ils parlent dans leur langue, elle arrive à le calmer, etc. Elle me donne un sédatif, je m'endors, je dors quelques heures. Et là, la question, c'est, on est le 1er janvier 2020, qu'est-ce que je fais ? À côté de sa maison, il y a la maison de la cousine qui dit, moi j'ai une maison, elle est libre, c'est les maisons pour les touristes, va te reposer un peu, puis tu réfléchis. Donc je vais dans cette maison et je dis, écoute, je vais la prendre pour un mois. Donc je retourne dans ma maison à moi, prendre quelques trucs, tout ça. De toute façon, lui, il repart travailler, il n'est pas là en journée, je suis avec mes filles. Finalement, je ne sais rien, il ne s'est rien passé dans la nuit. Et quand arrive la fin de l'après-midi, je me dis non, non, non, je ne peux pas, je ne peux pas. Donc je reste chez moi, dans cette maison-là, dans ma maison, avec mes filles, etc. Et lui, il va rentrer vers 10h du soir. Je ne sais même plus si on se parle ou quoi. Si, il vient pour s'excuser. Le schéma habituel ? Oui, le schéma habituel et même le schéma très sordide. Parce que ces gars-là, en fait, pour s'excuser, c'est du sexe. Ce n'est pas dans la tête que ça se passe. Leur cerveau, il n'est pas là. S'ils avaient un cerveau, à la limite, ils réfléchiraient. Là, c'est vraiment... C'est de la pulsion animale qui est d'ailleurs pour moi, que j'ai dû subir pendant plusieurs années, ça aussi. Parce que des gars comme ça, à un moment, on ne les veut plus. Seulement, la première fois que j'avais dit non, il avait tout pété dans la maison, il m'avait fouetté. Donc, au bout d'un moment, on comprend qu'on peut obtenir un peu de calme si monsieur arrive à se soulager. Donc, comme après diront d'autres personnes dans les cercles de parole, moi, je faisais le vide-boule. Eh bien, voilà. Je crois d'ailleurs, on peut... t'insulter, on peut te... Même, à la limite, les bleus, ça s'efface. Par contre, cette humiliation-là, c'est une saleté intérieure qui peut vous ronger. Moi, ça va, j'ai travaillé dessus, mais ça, c'est vraiment une humiliation très dure. Donc, je vais rester comme ça quatre jours encore jusqu'au 4 janvier, dans cette maison où je vais... Là, c'est du calcul stratégique. C'est-à-dire qu'en une journée, je ne peux pas déménager toutes mes affaires. Donc, subtilement, je vais emmener deux, trois trucs. Tout ça. Voilà, ça, c'est vraiment de la survie. Parce que là, je sais qu'il peut me tuer. Je ne sais pas comment je vais faire avec mes filles. Et puis, au bout du quatrième jour, je mets une panière dans ma voiture. Et je lui dis, écoute, ce soir, je vais dormir dans la maison que ta cousine m'a prêtée. Et là, il reprend deux pierres. Donc, euh... J'arrive à négocier, c'est presque un quart d'heure de négociation, de discours, etc. Je n'ai pas mes filles, donc du coup je comprends que je ne peux pas aller les chercher. Et je vais réussir à aller dormir dans cette maison, cette nouvelle maison qu'on me prête, sans mes filles. Première chose le lendemain matin, c'est voir si elles sont en vie. Puisque comme je l'ai dit dans un autre épisode, moi mon père, va essayer de nous tuer. Et donc, ça va être vraiment ma grande angoisse, c'est de laisser mes filles avec lui, puisque je sais qu'un père est capable de tuer. Par rage et par vengeance, tout simplement. Par égo. Cet égo qui est pincé chez eux, qui est piqué. Donc, ça va être ma grande angoisse. Et tout ne sera que stratégie pour aller chercher ci, aller chercher ça, aller chercher mes papiers. mes livres, mes disques durs avec tous mes bouquins écrits à l'intérieur, etc. L'ordinateur, etc. Et je vais comme ça, donc je vais récupérer mes filles au bout de 4-5 jours. Elles vont finir par dormir avec moi. Tous les jours, tous les jours, je vais retourner dans cette maison, faire une lessive, le voir comme par hasard. Il va rentrer à 5h de l'après-midi, alors qu'avant non, etc. Voilà, bon ça va, j'espère que tu as réfléchi. C'est toujours ces petits discours. Et puis, je sens bien que je suis un peu prête à l'excuser, prête à revenir, etc. Et là, encore une fois, la chance, la vie extraordinaire. Cette nouvelle maison que je venais de prendre n'avait pas de meubles. Donc je fais venir quelqu'un pour me faire deux, trois meubles avec trois planches. Ce gars vient de se séparer, il a des yeux rieurs, machin. Moi, je ne vois pas quel genre de bonhomme c'est. Je vois juste quelqu'un de bonne humeur. Eh bien oui, sauf que... entre guillemets, c'est ma bouée de sauvetage. C'est ce qui va faire que je me dis, finalement, je ne suis pas la mère que je suis. Parce qu'on se sent vieille, on se sent grosse, on se sent moche, quand on sort d'un truc comme ça. Et puis là, il y a tout d'un coup quelqu'un qui vous regarde. Je dis, ah bon, très bien. Je me dis, et si finalement, c'était l'amour de ma mère ? Tu vois, la connerie. L'amour romantique. ça met quelques semaines tu vois sauf que c'est ce qui va me faire dire n'y retourne pas tout de suite ce qui va me faire dire que quelqu'un qui est joyeux ça existe et c'est ce qui va tout d'un coup quand il va découvrir ce petit truc de rien du tout mais quand il va découvrir ça ça va le mettre dans une furie Et il va venir m'agresser de nouveau chez moi. Et là, je suis écroulée. Parce que je réalise que depuis deux mois, je retourne dans la maison. Je vois le père de mes filles tous les jours. Et je trouve toujours un prétexte pour y aller. Toujours un prétexte. Et puis, il est toujours très gentil, etc. Donc je me dis super on peut avoir une séparation correcte comme des parents intelligents, mes enfants vont aller voir leur père, moi j'habite à côté, bon très bien. Je peux peut-être refaire ma vie avec une autre personne, bon bref. Et puis en fait pas du tout. Il n'attendait qu'une chose, c'était que je retourne avec lui. Il se sent humilié que je prenne une aventure alors que lui c'était monsieur. aventure, c'était un aventurier ce monsieur c'était un aventurier gens du village touristes tout ça je vais l'apprendre après je vais l'apprendre après bien sûr cette double, triple, quadruple vie bref et à ce moment là donc je suis complètement et puis cette nouvelle personne me dit mais c'est pas possible, tu peux pas tolérer ça Et des copines vont me voir, j'ai encore les bleus sur les bras, etc. Et des copines vont me voir et me disent « Céline va porter plainte » . Et je vais porter plainte, ou d'ailleurs je ressors, ou on m'accuse moi de... de mettre de l'huile sur le feu. C'est moi la coupable. C'est un grand classique. Surtout qu'en plus, j'ai dû le mordre pour me défendre puisqu'il m'avait attrapé les deux poignets. Et je leur ai expliqué, cette fois-ci, ce n'était pas mon sang que j'avais dans la bouche. Et là, le gars m'explique, il me dit, si vous l'avez mordu, il a des marques. S'il a des marques, c'est lui qui est agressé. Ce n'est pas vous. Donc là, je vous mets en prison et fini les enfants. Donc, mais d'avoir quand même porté plainte. va faire que je suis envoyée à la maison des femmes. J'ai droit à un rendez-vous à la maison des femmes pour voir si je veux un suivi psychologique. Et quand j'arrive, j'arrive face à une psychologue chilienne, Mapuche. Mapuche, c'est un groupe, on va dire un peuple racine du Chili. Elle arrive, tout tatatata, il faut l'imaginer avec des grands bouts d'oreilles, des cheveux, une rasta, tout, et on commence à parler. Et en quelques mots, elle me fait comprendre parce qu'elle me dit, donne-moi ta date, on fait de l'administratif, ta date de naissance. Et je lui dis, je suis née le 8 mars 1977. Elle me dit, impossible. Je dis, comment ça, il n'y a pas de 8 mars 1977 au Chili ? Elle me dit, mais c'est surtout que c'est la date et l'année où l'ONU a déclaré officiellement cette journée-là comme journée de lutte internationale pour les droits des femmes. Et je lui dis, moi, je lui dis bêtement en espagnol. Moi, c'est le jour que j'ai choisi pour pousser mon premier cri. Et elle me répond, le premier d'une longue liste. Et je comprends que la violence, ce n'est pas ce qui s'est passé la semaine dernière, ce n'est pas ce qui s'est passé pendant dix ans, c'est peut-être ce qui s'est passé depuis le 8 mars 1977. Et je pars sur ce chemin-là, de comprendre avec quoi je me suis construite, quels sont les pavés de mon chemin. qui m'ont menée jusqu'à ces deux pierres, jusqu'à cet extrême.

Description

Série : Céline Ripoll, raconte la violence conjugale dans un spectacle (cinquième épisode)

Céline Ripoll explique dans cet épisode, quel a été le déclencheur qui lui a donné l'impulsion de quitter le domicile conjugal. De quelle façon ce départ a t-il été vécu ? Comment elle a pu trouver un refuge, une habitation pour elle, puis ses filles. Car là est aussi la question, où partir ? Qui peut soutenir une femme dans cette situation ? Quel organisme ? La Maison des femmes a été un repère pour Céline Ripoll.

La Maison des femmes de Saint-Denis est fondée en 2016, a rapidement inspiré d’autres structures et professionnels. Dès 2017, un modèle proche ouvre à Bruxelles, puis à Bordeaux, Brive, Reims, etc. En mars 2021, le collectif ReStart est créé pour réunir les structures nées sur le modèle de La Maison des femmes de Saint-Denis. https://www.lamaisondesfemmes.fr/

Son spectacle présenté le 29 mai 2025 au Festival Cap Breton se nomme "Née le 8 mars 1977". Pour mieux connaitre cette artiste, allez voir sur le site : https://celineripoll.com/

Musique libre de droits Amaski Night détective, Luca Francini solitude et glossy de Coma média.

@Isabelle Wagner créatrice et autrice de la collection Podcast "Les balades d'Isa"


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Isabelle Wagner

    Céline Rippol, vous partez. On continue sur la l'affaire de ce qui s'est passé sur l'île de Pâques. On raconte cette violence conjugale qui a été vécue un enfer pendant plusieurs années. Ce jour-là, vous partez avec votre voiture. À ce moment, il veut vous écraser le visage avec des pierres. Vous arrivez à partir et vous dites, ça y est, stop, c'est fini. Et là, qu'est-ce qui se passe ? Est-ce que vous allez vers une personne, vers une famille pour vous réfugier ? Ou est-ce que vous vous dites, il faut que je m'en sorte ? toute seule avec mes deux filles. Comment on gère ça aussi, ce côté mère de famille, puisque vous le disiez très bien, on ne sépare pas la famille.

  • Céline Ripoll

    Je ne sais même pas si j'ai réussi à penser à ce moment-là. Je pars en voiture, je pars me réfugier là où sont mes filles, c'est-à-dire chez ma belle-sœur. J'arrive, il est donc 4h30 du matin, j'ouvre la porte, j'arrive en courant, je crie, je la réveille, je dis il va me tuer, il va me tuer, il va me tuer, et je plonge dans une penderie et je ferme la porte de la penderie et je me cache dans cette penderie. Elle, elle n'a rien compris. Et tout d'un coup, son frère arrive, me cherche partout et tout ça. Et moi, quand je suis dans la penderie, je réalise que je suis dans le château de Barbebleu. C'est fou. Moi qui ne raconte que des contes du Pacifique, voilà que me vient une légende française, d'Europe. Et donc là, elle arrive à le calmer, ils s'engueulent, ils parlent dans leur langue, elle arrive à le calmer, etc. Elle me donne un sédatif, je m'endors, je dors quelques heures. Et là, la question, c'est, on est le 1er janvier 2020, qu'est-ce que je fais ? À côté de sa maison, il y a la maison de la cousine qui dit, moi j'ai une maison, elle est libre, c'est les maisons pour les touristes, va te reposer un peu, puis tu réfléchis. Donc je vais dans cette maison et je dis, écoute, je vais la prendre pour un mois. Donc je retourne dans ma maison à moi, prendre quelques trucs, tout ça. De toute façon, lui, il repart travailler, il n'est pas là en journée, je suis avec mes filles. Finalement, je ne sais rien, il ne s'est rien passé dans la nuit. Et quand arrive la fin de l'après-midi, je me dis non, non, non, je ne peux pas, je ne peux pas. Donc je reste chez moi, dans cette maison-là, dans ma maison, avec mes filles, etc. Et lui, il va rentrer vers 10h du soir. Je ne sais même plus si on se parle ou quoi. Si, il vient pour s'excuser. Le schéma habituel ? Oui, le schéma habituel et même le schéma très sordide. Parce que ces gars-là, en fait, pour s'excuser, c'est du sexe. Ce n'est pas dans la tête que ça se passe. Leur cerveau, il n'est pas là. S'ils avaient un cerveau, à la limite, ils réfléchiraient. Là, c'est vraiment... C'est de la pulsion animale qui est d'ailleurs pour moi, que j'ai dû subir pendant plusieurs années, ça aussi. Parce que des gars comme ça, à un moment, on ne les veut plus. Seulement, la première fois que j'avais dit non, il avait tout pété dans la maison, il m'avait fouetté. Donc, au bout d'un moment, on comprend qu'on peut obtenir un peu de calme si monsieur arrive à se soulager. Donc, comme après diront d'autres personnes dans les cercles de parole, moi, je faisais le vide-boule. Eh bien, voilà. Je crois d'ailleurs, on peut... t'insulter, on peut te... Même, à la limite, les bleus, ça s'efface. Par contre, cette humiliation-là, c'est une saleté intérieure qui peut vous ronger. Moi, ça va, j'ai travaillé dessus, mais ça, c'est vraiment une humiliation très dure. Donc, je vais rester comme ça quatre jours encore jusqu'au 4 janvier, dans cette maison où je vais... Là, c'est du calcul stratégique. C'est-à-dire qu'en une journée, je ne peux pas déménager toutes mes affaires. Donc, subtilement, je vais emmener deux, trois trucs. Tout ça. Voilà, ça, c'est vraiment de la survie. Parce que là, je sais qu'il peut me tuer. Je ne sais pas comment je vais faire avec mes filles. Et puis, au bout du quatrième jour, je mets une panière dans ma voiture. Et je lui dis, écoute, ce soir, je vais dormir dans la maison que ta cousine m'a prêtée. Et là, il reprend deux pierres. Donc, euh... J'arrive à négocier, c'est presque un quart d'heure de négociation, de discours, etc. Je n'ai pas mes filles, donc du coup je comprends que je ne peux pas aller les chercher. Et je vais réussir à aller dormir dans cette maison, cette nouvelle maison qu'on me prête, sans mes filles. Première chose le lendemain matin, c'est voir si elles sont en vie. Puisque comme je l'ai dit dans un autre épisode, moi mon père, va essayer de nous tuer. Et donc, ça va être vraiment ma grande angoisse, c'est de laisser mes filles avec lui, puisque je sais qu'un père est capable de tuer. Par rage et par vengeance, tout simplement. Par égo. Cet égo qui est pincé chez eux, qui est piqué. Donc, ça va être ma grande angoisse. Et tout ne sera que stratégie pour aller chercher ci, aller chercher ça, aller chercher mes papiers. mes livres, mes disques durs avec tous mes bouquins écrits à l'intérieur, etc. L'ordinateur, etc. Et je vais comme ça, donc je vais récupérer mes filles au bout de 4-5 jours. Elles vont finir par dormir avec moi. Tous les jours, tous les jours, je vais retourner dans cette maison, faire une lessive, le voir comme par hasard. Il va rentrer à 5h de l'après-midi, alors qu'avant non, etc. Voilà, bon ça va, j'espère que tu as réfléchi. C'est toujours ces petits discours. Et puis, je sens bien que je suis un peu prête à l'excuser, prête à revenir, etc. Et là, encore une fois, la chance, la vie extraordinaire. Cette nouvelle maison que je venais de prendre n'avait pas de meubles. Donc je fais venir quelqu'un pour me faire deux, trois meubles avec trois planches. Ce gars vient de se séparer, il a des yeux rieurs, machin. Moi, je ne vois pas quel genre de bonhomme c'est. Je vois juste quelqu'un de bonne humeur. Eh bien oui, sauf que... entre guillemets, c'est ma bouée de sauvetage. C'est ce qui va faire que je me dis, finalement, je ne suis pas la mère que je suis. Parce qu'on se sent vieille, on se sent grosse, on se sent moche, quand on sort d'un truc comme ça. Et puis là, il y a tout d'un coup quelqu'un qui vous regarde. Je dis, ah bon, très bien. Je me dis, et si finalement, c'était l'amour de ma mère ? Tu vois, la connerie. L'amour romantique. ça met quelques semaines tu vois sauf que c'est ce qui va me faire dire n'y retourne pas tout de suite ce qui va me faire dire que quelqu'un qui est joyeux ça existe et c'est ce qui va tout d'un coup quand il va découvrir ce petit truc de rien du tout mais quand il va découvrir ça ça va le mettre dans une furie Et il va venir m'agresser de nouveau chez moi. Et là, je suis écroulée. Parce que je réalise que depuis deux mois, je retourne dans la maison. Je vois le père de mes filles tous les jours. Et je trouve toujours un prétexte pour y aller. Toujours un prétexte. Et puis, il est toujours très gentil, etc. Donc je me dis super on peut avoir une séparation correcte comme des parents intelligents, mes enfants vont aller voir leur père, moi j'habite à côté, bon très bien. Je peux peut-être refaire ma vie avec une autre personne, bon bref. Et puis en fait pas du tout. Il n'attendait qu'une chose, c'était que je retourne avec lui. Il se sent humilié que je prenne une aventure alors que lui c'était monsieur. aventure, c'était un aventurier ce monsieur c'était un aventurier gens du village touristes tout ça je vais l'apprendre après je vais l'apprendre après bien sûr cette double, triple, quadruple vie bref et à ce moment là donc je suis complètement et puis cette nouvelle personne me dit mais c'est pas possible, tu peux pas tolérer ça Et des copines vont me voir, j'ai encore les bleus sur les bras, etc. Et des copines vont me voir et me disent « Céline va porter plainte » . Et je vais porter plainte, ou d'ailleurs je ressors, ou on m'accuse moi de... de mettre de l'huile sur le feu. C'est moi la coupable. C'est un grand classique. Surtout qu'en plus, j'ai dû le mordre pour me défendre puisqu'il m'avait attrapé les deux poignets. Et je leur ai expliqué, cette fois-ci, ce n'était pas mon sang que j'avais dans la bouche. Et là, le gars m'explique, il me dit, si vous l'avez mordu, il a des marques. S'il a des marques, c'est lui qui est agressé. Ce n'est pas vous. Donc là, je vous mets en prison et fini les enfants. Donc, mais d'avoir quand même porté plainte. va faire que je suis envoyée à la maison des femmes. J'ai droit à un rendez-vous à la maison des femmes pour voir si je veux un suivi psychologique. Et quand j'arrive, j'arrive face à une psychologue chilienne, Mapuche. Mapuche, c'est un groupe, on va dire un peuple racine du Chili. Elle arrive, tout tatatata, il faut l'imaginer avec des grands bouts d'oreilles, des cheveux, une rasta, tout, et on commence à parler. Et en quelques mots, elle me fait comprendre parce qu'elle me dit, donne-moi ta date, on fait de l'administratif, ta date de naissance. Et je lui dis, je suis née le 8 mars 1977. Elle me dit, impossible. Je dis, comment ça, il n'y a pas de 8 mars 1977 au Chili ? Elle me dit, mais c'est surtout que c'est la date et l'année où l'ONU a déclaré officiellement cette journée-là comme journée de lutte internationale pour les droits des femmes. Et je lui dis, moi, je lui dis bêtement en espagnol. Moi, c'est le jour que j'ai choisi pour pousser mon premier cri. Et elle me répond, le premier d'une longue liste. Et je comprends que la violence, ce n'est pas ce qui s'est passé la semaine dernière, ce n'est pas ce qui s'est passé pendant dix ans, c'est peut-être ce qui s'est passé depuis le 8 mars 1977. Et je pars sur ce chemin-là, de comprendre avec quoi je me suis construite, quels sont les pavés de mon chemin. qui m'ont menée jusqu'à ces deux pierres, jusqu'à cet extrême.

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Série : Céline Ripoll, raconte la violence conjugale dans un spectacle (cinquième épisode)

Céline Ripoll explique dans cet épisode, quel a été le déclencheur qui lui a donné l'impulsion de quitter le domicile conjugal. De quelle façon ce départ a t-il été vécu ? Comment elle a pu trouver un refuge, une habitation pour elle, puis ses filles. Car là est aussi la question, où partir ? Qui peut soutenir une femme dans cette situation ? Quel organisme ? La Maison des femmes a été un repère pour Céline Ripoll.

La Maison des femmes de Saint-Denis est fondée en 2016, a rapidement inspiré d’autres structures et professionnels. Dès 2017, un modèle proche ouvre à Bruxelles, puis à Bordeaux, Brive, Reims, etc. En mars 2021, le collectif ReStart est créé pour réunir les structures nées sur le modèle de La Maison des femmes de Saint-Denis. https://www.lamaisondesfemmes.fr/

Son spectacle présenté le 29 mai 2025 au Festival Cap Breton se nomme "Née le 8 mars 1977". Pour mieux connaitre cette artiste, allez voir sur le site : https://celineripoll.com/

Musique libre de droits Amaski Night détective, Luca Francini solitude et glossy de Coma média.

@Isabelle Wagner créatrice et autrice de la collection Podcast "Les balades d'Isa"


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Isabelle Wagner

    Céline Rippol, vous partez. On continue sur la l'affaire de ce qui s'est passé sur l'île de Pâques. On raconte cette violence conjugale qui a été vécue un enfer pendant plusieurs années. Ce jour-là, vous partez avec votre voiture. À ce moment, il veut vous écraser le visage avec des pierres. Vous arrivez à partir et vous dites, ça y est, stop, c'est fini. Et là, qu'est-ce qui se passe ? Est-ce que vous allez vers une personne, vers une famille pour vous réfugier ? Ou est-ce que vous vous dites, il faut que je m'en sorte ? toute seule avec mes deux filles. Comment on gère ça aussi, ce côté mère de famille, puisque vous le disiez très bien, on ne sépare pas la famille.

  • Céline Ripoll

    Je ne sais même pas si j'ai réussi à penser à ce moment-là. Je pars en voiture, je pars me réfugier là où sont mes filles, c'est-à-dire chez ma belle-sœur. J'arrive, il est donc 4h30 du matin, j'ouvre la porte, j'arrive en courant, je crie, je la réveille, je dis il va me tuer, il va me tuer, il va me tuer, et je plonge dans une penderie et je ferme la porte de la penderie et je me cache dans cette penderie. Elle, elle n'a rien compris. Et tout d'un coup, son frère arrive, me cherche partout et tout ça. Et moi, quand je suis dans la penderie, je réalise que je suis dans le château de Barbebleu. C'est fou. Moi qui ne raconte que des contes du Pacifique, voilà que me vient une légende française, d'Europe. Et donc là, elle arrive à le calmer, ils s'engueulent, ils parlent dans leur langue, elle arrive à le calmer, etc. Elle me donne un sédatif, je m'endors, je dors quelques heures. Et là, la question, c'est, on est le 1er janvier 2020, qu'est-ce que je fais ? À côté de sa maison, il y a la maison de la cousine qui dit, moi j'ai une maison, elle est libre, c'est les maisons pour les touristes, va te reposer un peu, puis tu réfléchis. Donc je vais dans cette maison et je dis, écoute, je vais la prendre pour un mois. Donc je retourne dans ma maison à moi, prendre quelques trucs, tout ça. De toute façon, lui, il repart travailler, il n'est pas là en journée, je suis avec mes filles. Finalement, je ne sais rien, il ne s'est rien passé dans la nuit. Et quand arrive la fin de l'après-midi, je me dis non, non, non, je ne peux pas, je ne peux pas. Donc je reste chez moi, dans cette maison-là, dans ma maison, avec mes filles, etc. Et lui, il va rentrer vers 10h du soir. Je ne sais même plus si on se parle ou quoi. Si, il vient pour s'excuser. Le schéma habituel ? Oui, le schéma habituel et même le schéma très sordide. Parce que ces gars-là, en fait, pour s'excuser, c'est du sexe. Ce n'est pas dans la tête que ça se passe. Leur cerveau, il n'est pas là. S'ils avaient un cerveau, à la limite, ils réfléchiraient. Là, c'est vraiment... C'est de la pulsion animale qui est d'ailleurs pour moi, que j'ai dû subir pendant plusieurs années, ça aussi. Parce que des gars comme ça, à un moment, on ne les veut plus. Seulement, la première fois que j'avais dit non, il avait tout pété dans la maison, il m'avait fouetté. Donc, au bout d'un moment, on comprend qu'on peut obtenir un peu de calme si monsieur arrive à se soulager. Donc, comme après diront d'autres personnes dans les cercles de parole, moi, je faisais le vide-boule. Eh bien, voilà. Je crois d'ailleurs, on peut... t'insulter, on peut te... Même, à la limite, les bleus, ça s'efface. Par contre, cette humiliation-là, c'est une saleté intérieure qui peut vous ronger. Moi, ça va, j'ai travaillé dessus, mais ça, c'est vraiment une humiliation très dure. Donc, je vais rester comme ça quatre jours encore jusqu'au 4 janvier, dans cette maison où je vais... Là, c'est du calcul stratégique. C'est-à-dire qu'en une journée, je ne peux pas déménager toutes mes affaires. Donc, subtilement, je vais emmener deux, trois trucs. Tout ça. Voilà, ça, c'est vraiment de la survie. Parce que là, je sais qu'il peut me tuer. Je ne sais pas comment je vais faire avec mes filles. Et puis, au bout du quatrième jour, je mets une panière dans ma voiture. Et je lui dis, écoute, ce soir, je vais dormir dans la maison que ta cousine m'a prêtée. Et là, il reprend deux pierres. Donc, euh... J'arrive à négocier, c'est presque un quart d'heure de négociation, de discours, etc. Je n'ai pas mes filles, donc du coup je comprends que je ne peux pas aller les chercher. Et je vais réussir à aller dormir dans cette maison, cette nouvelle maison qu'on me prête, sans mes filles. Première chose le lendemain matin, c'est voir si elles sont en vie. Puisque comme je l'ai dit dans un autre épisode, moi mon père, va essayer de nous tuer. Et donc, ça va être vraiment ma grande angoisse, c'est de laisser mes filles avec lui, puisque je sais qu'un père est capable de tuer. Par rage et par vengeance, tout simplement. Par égo. Cet égo qui est pincé chez eux, qui est piqué. Donc, ça va être ma grande angoisse. Et tout ne sera que stratégie pour aller chercher ci, aller chercher ça, aller chercher mes papiers. mes livres, mes disques durs avec tous mes bouquins écrits à l'intérieur, etc. L'ordinateur, etc. Et je vais comme ça, donc je vais récupérer mes filles au bout de 4-5 jours. Elles vont finir par dormir avec moi. Tous les jours, tous les jours, je vais retourner dans cette maison, faire une lessive, le voir comme par hasard. Il va rentrer à 5h de l'après-midi, alors qu'avant non, etc. Voilà, bon ça va, j'espère que tu as réfléchi. C'est toujours ces petits discours. Et puis, je sens bien que je suis un peu prête à l'excuser, prête à revenir, etc. Et là, encore une fois, la chance, la vie extraordinaire. Cette nouvelle maison que je venais de prendre n'avait pas de meubles. Donc je fais venir quelqu'un pour me faire deux, trois meubles avec trois planches. Ce gars vient de se séparer, il a des yeux rieurs, machin. Moi, je ne vois pas quel genre de bonhomme c'est. Je vois juste quelqu'un de bonne humeur. Eh bien oui, sauf que... entre guillemets, c'est ma bouée de sauvetage. C'est ce qui va faire que je me dis, finalement, je ne suis pas la mère que je suis. Parce qu'on se sent vieille, on se sent grosse, on se sent moche, quand on sort d'un truc comme ça. Et puis là, il y a tout d'un coup quelqu'un qui vous regarde. Je dis, ah bon, très bien. Je me dis, et si finalement, c'était l'amour de ma mère ? Tu vois, la connerie. L'amour romantique. ça met quelques semaines tu vois sauf que c'est ce qui va me faire dire n'y retourne pas tout de suite ce qui va me faire dire que quelqu'un qui est joyeux ça existe et c'est ce qui va tout d'un coup quand il va découvrir ce petit truc de rien du tout mais quand il va découvrir ça ça va le mettre dans une furie Et il va venir m'agresser de nouveau chez moi. Et là, je suis écroulée. Parce que je réalise que depuis deux mois, je retourne dans la maison. Je vois le père de mes filles tous les jours. Et je trouve toujours un prétexte pour y aller. Toujours un prétexte. Et puis, il est toujours très gentil, etc. Donc je me dis super on peut avoir une séparation correcte comme des parents intelligents, mes enfants vont aller voir leur père, moi j'habite à côté, bon très bien. Je peux peut-être refaire ma vie avec une autre personne, bon bref. Et puis en fait pas du tout. Il n'attendait qu'une chose, c'était que je retourne avec lui. Il se sent humilié que je prenne une aventure alors que lui c'était monsieur. aventure, c'était un aventurier ce monsieur c'était un aventurier gens du village touristes tout ça je vais l'apprendre après je vais l'apprendre après bien sûr cette double, triple, quadruple vie bref et à ce moment là donc je suis complètement et puis cette nouvelle personne me dit mais c'est pas possible, tu peux pas tolérer ça Et des copines vont me voir, j'ai encore les bleus sur les bras, etc. Et des copines vont me voir et me disent « Céline va porter plainte » . Et je vais porter plainte, ou d'ailleurs je ressors, ou on m'accuse moi de... de mettre de l'huile sur le feu. C'est moi la coupable. C'est un grand classique. Surtout qu'en plus, j'ai dû le mordre pour me défendre puisqu'il m'avait attrapé les deux poignets. Et je leur ai expliqué, cette fois-ci, ce n'était pas mon sang que j'avais dans la bouche. Et là, le gars m'explique, il me dit, si vous l'avez mordu, il a des marques. S'il a des marques, c'est lui qui est agressé. Ce n'est pas vous. Donc là, je vous mets en prison et fini les enfants. Donc, mais d'avoir quand même porté plainte. va faire que je suis envoyée à la maison des femmes. J'ai droit à un rendez-vous à la maison des femmes pour voir si je veux un suivi psychologique. Et quand j'arrive, j'arrive face à une psychologue chilienne, Mapuche. Mapuche, c'est un groupe, on va dire un peuple racine du Chili. Elle arrive, tout tatatata, il faut l'imaginer avec des grands bouts d'oreilles, des cheveux, une rasta, tout, et on commence à parler. Et en quelques mots, elle me fait comprendre parce qu'elle me dit, donne-moi ta date, on fait de l'administratif, ta date de naissance. Et je lui dis, je suis née le 8 mars 1977. Elle me dit, impossible. Je dis, comment ça, il n'y a pas de 8 mars 1977 au Chili ? Elle me dit, mais c'est surtout que c'est la date et l'année où l'ONU a déclaré officiellement cette journée-là comme journée de lutte internationale pour les droits des femmes. Et je lui dis, moi, je lui dis bêtement en espagnol. Moi, c'est le jour que j'ai choisi pour pousser mon premier cri. Et elle me répond, le premier d'une longue liste. Et je comprends que la violence, ce n'est pas ce qui s'est passé la semaine dernière, ce n'est pas ce qui s'est passé pendant dix ans, c'est peut-être ce qui s'est passé depuis le 8 mars 1977. Et je pars sur ce chemin-là, de comprendre avec quoi je me suis construite, quels sont les pavés de mon chemin. qui m'ont menée jusqu'à ces deux pierres, jusqu'à cet extrême.

Description

Série : Céline Ripoll, raconte la violence conjugale dans un spectacle (cinquième épisode)

Céline Ripoll explique dans cet épisode, quel a été le déclencheur qui lui a donné l'impulsion de quitter le domicile conjugal. De quelle façon ce départ a t-il été vécu ? Comment elle a pu trouver un refuge, une habitation pour elle, puis ses filles. Car là est aussi la question, où partir ? Qui peut soutenir une femme dans cette situation ? Quel organisme ? La Maison des femmes a été un repère pour Céline Ripoll.

La Maison des femmes de Saint-Denis est fondée en 2016, a rapidement inspiré d’autres structures et professionnels. Dès 2017, un modèle proche ouvre à Bruxelles, puis à Bordeaux, Brive, Reims, etc. En mars 2021, le collectif ReStart est créé pour réunir les structures nées sur le modèle de La Maison des femmes de Saint-Denis. https://www.lamaisondesfemmes.fr/

Son spectacle présenté le 29 mai 2025 au Festival Cap Breton se nomme "Née le 8 mars 1977". Pour mieux connaitre cette artiste, allez voir sur le site : https://celineripoll.com/

Musique libre de droits Amaski Night détective, Luca Francini solitude et glossy de Coma média.

@Isabelle Wagner créatrice et autrice de la collection Podcast "Les balades d'Isa"


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Isabelle Wagner

    Céline Rippol, vous partez. On continue sur la l'affaire de ce qui s'est passé sur l'île de Pâques. On raconte cette violence conjugale qui a été vécue un enfer pendant plusieurs années. Ce jour-là, vous partez avec votre voiture. À ce moment, il veut vous écraser le visage avec des pierres. Vous arrivez à partir et vous dites, ça y est, stop, c'est fini. Et là, qu'est-ce qui se passe ? Est-ce que vous allez vers une personne, vers une famille pour vous réfugier ? Ou est-ce que vous vous dites, il faut que je m'en sorte ? toute seule avec mes deux filles. Comment on gère ça aussi, ce côté mère de famille, puisque vous le disiez très bien, on ne sépare pas la famille.

  • Céline Ripoll

    Je ne sais même pas si j'ai réussi à penser à ce moment-là. Je pars en voiture, je pars me réfugier là où sont mes filles, c'est-à-dire chez ma belle-sœur. J'arrive, il est donc 4h30 du matin, j'ouvre la porte, j'arrive en courant, je crie, je la réveille, je dis il va me tuer, il va me tuer, il va me tuer, et je plonge dans une penderie et je ferme la porte de la penderie et je me cache dans cette penderie. Elle, elle n'a rien compris. Et tout d'un coup, son frère arrive, me cherche partout et tout ça. Et moi, quand je suis dans la penderie, je réalise que je suis dans le château de Barbebleu. C'est fou. Moi qui ne raconte que des contes du Pacifique, voilà que me vient une légende française, d'Europe. Et donc là, elle arrive à le calmer, ils s'engueulent, ils parlent dans leur langue, elle arrive à le calmer, etc. Elle me donne un sédatif, je m'endors, je dors quelques heures. Et là, la question, c'est, on est le 1er janvier 2020, qu'est-ce que je fais ? À côté de sa maison, il y a la maison de la cousine qui dit, moi j'ai une maison, elle est libre, c'est les maisons pour les touristes, va te reposer un peu, puis tu réfléchis. Donc je vais dans cette maison et je dis, écoute, je vais la prendre pour un mois. Donc je retourne dans ma maison à moi, prendre quelques trucs, tout ça. De toute façon, lui, il repart travailler, il n'est pas là en journée, je suis avec mes filles. Finalement, je ne sais rien, il ne s'est rien passé dans la nuit. Et quand arrive la fin de l'après-midi, je me dis non, non, non, je ne peux pas, je ne peux pas. Donc je reste chez moi, dans cette maison-là, dans ma maison, avec mes filles, etc. Et lui, il va rentrer vers 10h du soir. Je ne sais même plus si on se parle ou quoi. Si, il vient pour s'excuser. Le schéma habituel ? Oui, le schéma habituel et même le schéma très sordide. Parce que ces gars-là, en fait, pour s'excuser, c'est du sexe. Ce n'est pas dans la tête que ça se passe. Leur cerveau, il n'est pas là. S'ils avaient un cerveau, à la limite, ils réfléchiraient. Là, c'est vraiment... C'est de la pulsion animale qui est d'ailleurs pour moi, que j'ai dû subir pendant plusieurs années, ça aussi. Parce que des gars comme ça, à un moment, on ne les veut plus. Seulement, la première fois que j'avais dit non, il avait tout pété dans la maison, il m'avait fouetté. Donc, au bout d'un moment, on comprend qu'on peut obtenir un peu de calme si monsieur arrive à se soulager. Donc, comme après diront d'autres personnes dans les cercles de parole, moi, je faisais le vide-boule. Eh bien, voilà. Je crois d'ailleurs, on peut... t'insulter, on peut te... Même, à la limite, les bleus, ça s'efface. Par contre, cette humiliation-là, c'est une saleté intérieure qui peut vous ronger. Moi, ça va, j'ai travaillé dessus, mais ça, c'est vraiment une humiliation très dure. Donc, je vais rester comme ça quatre jours encore jusqu'au 4 janvier, dans cette maison où je vais... Là, c'est du calcul stratégique. C'est-à-dire qu'en une journée, je ne peux pas déménager toutes mes affaires. Donc, subtilement, je vais emmener deux, trois trucs. Tout ça. Voilà, ça, c'est vraiment de la survie. Parce que là, je sais qu'il peut me tuer. Je ne sais pas comment je vais faire avec mes filles. Et puis, au bout du quatrième jour, je mets une panière dans ma voiture. Et je lui dis, écoute, ce soir, je vais dormir dans la maison que ta cousine m'a prêtée. Et là, il reprend deux pierres. Donc, euh... J'arrive à négocier, c'est presque un quart d'heure de négociation, de discours, etc. Je n'ai pas mes filles, donc du coup je comprends que je ne peux pas aller les chercher. Et je vais réussir à aller dormir dans cette maison, cette nouvelle maison qu'on me prête, sans mes filles. Première chose le lendemain matin, c'est voir si elles sont en vie. Puisque comme je l'ai dit dans un autre épisode, moi mon père, va essayer de nous tuer. Et donc, ça va être vraiment ma grande angoisse, c'est de laisser mes filles avec lui, puisque je sais qu'un père est capable de tuer. Par rage et par vengeance, tout simplement. Par égo. Cet égo qui est pincé chez eux, qui est piqué. Donc, ça va être ma grande angoisse. Et tout ne sera que stratégie pour aller chercher ci, aller chercher ça, aller chercher mes papiers. mes livres, mes disques durs avec tous mes bouquins écrits à l'intérieur, etc. L'ordinateur, etc. Et je vais comme ça, donc je vais récupérer mes filles au bout de 4-5 jours. Elles vont finir par dormir avec moi. Tous les jours, tous les jours, je vais retourner dans cette maison, faire une lessive, le voir comme par hasard. Il va rentrer à 5h de l'après-midi, alors qu'avant non, etc. Voilà, bon ça va, j'espère que tu as réfléchi. C'est toujours ces petits discours. Et puis, je sens bien que je suis un peu prête à l'excuser, prête à revenir, etc. Et là, encore une fois, la chance, la vie extraordinaire. Cette nouvelle maison que je venais de prendre n'avait pas de meubles. Donc je fais venir quelqu'un pour me faire deux, trois meubles avec trois planches. Ce gars vient de se séparer, il a des yeux rieurs, machin. Moi, je ne vois pas quel genre de bonhomme c'est. Je vois juste quelqu'un de bonne humeur. Eh bien oui, sauf que... entre guillemets, c'est ma bouée de sauvetage. C'est ce qui va faire que je me dis, finalement, je ne suis pas la mère que je suis. Parce qu'on se sent vieille, on se sent grosse, on se sent moche, quand on sort d'un truc comme ça. Et puis là, il y a tout d'un coup quelqu'un qui vous regarde. Je dis, ah bon, très bien. Je me dis, et si finalement, c'était l'amour de ma mère ? Tu vois, la connerie. L'amour romantique. ça met quelques semaines tu vois sauf que c'est ce qui va me faire dire n'y retourne pas tout de suite ce qui va me faire dire que quelqu'un qui est joyeux ça existe et c'est ce qui va tout d'un coup quand il va découvrir ce petit truc de rien du tout mais quand il va découvrir ça ça va le mettre dans une furie Et il va venir m'agresser de nouveau chez moi. Et là, je suis écroulée. Parce que je réalise que depuis deux mois, je retourne dans la maison. Je vois le père de mes filles tous les jours. Et je trouve toujours un prétexte pour y aller. Toujours un prétexte. Et puis, il est toujours très gentil, etc. Donc je me dis super on peut avoir une séparation correcte comme des parents intelligents, mes enfants vont aller voir leur père, moi j'habite à côté, bon très bien. Je peux peut-être refaire ma vie avec une autre personne, bon bref. Et puis en fait pas du tout. Il n'attendait qu'une chose, c'était que je retourne avec lui. Il se sent humilié que je prenne une aventure alors que lui c'était monsieur. aventure, c'était un aventurier ce monsieur c'était un aventurier gens du village touristes tout ça je vais l'apprendre après je vais l'apprendre après bien sûr cette double, triple, quadruple vie bref et à ce moment là donc je suis complètement et puis cette nouvelle personne me dit mais c'est pas possible, tu peux pas tolérer ça Et des copines vont me voir, j'ai encore les bleus sur les bras, etc. Et des copines vont me voir et me disent « Céline va porter plainte » . Et je vais porter plainte, ou d'ailleurs je ressors, ou on m'accuse moi de... de mettre de l'huile sur le feu. C'est moi la coupable. C'est un grand classique. Surtout qu'en plus, j'ai dû le mordre pour me défendre puisqu'il m'avait attrapé les deux poignets. Et je leur ai expliqué, cette fois-ci, ce n'était pas mon sang que j'avais dans la bouche. Et là, le gars m'explique, il me dit, si vous l'avez mordu, il a des marques. S'il a des marques, c'est lui qui est agressé. Ce n'est pas vous. Donc là, je vous mets en prison et fini les enfants. Donc, mais d'avoir quand même porté plainte. va faire que je suis envoyée à la maison des femmes. J'ai droit à un rendez-vous à la maison des femmes pour voir si je veux un suivi psychologique. Et quand j'arrive, j'arrive face à une psychologue chilienne, Mapuche. Mapuche, c'est un groupe, on va dire un peuple racine du Chili. Elle arrive, tout tatatata, il faut l'imaginer avec des grands bouts d'oreilles, des cheveux, une rasta, tout, et on commence à parler. Et en quelques mots, elle me fait comprendre parce qu'elle me dit, donne-moi ta date, on fait de l'administratif, ta date de naissance. Et je lui dis, je suis née le 8 mars 1977. Elle me dit, impossible. Je dis, comment ça, il n'y a pas de 8 mars 1977 au Chili ? Elle me dit, mais c'est surtout que c'est la date et l'année où l'ONU a déclaré officiellement cette journée-là comme journée de lutte internationale pour les droits des femmes. Et je lui dis, moi, je lui dis bêtement en espagnol. Moi, c'est le jour que j'ai choisi pour pousser mon premier cri. Et elle me répond, le premier d'une longue liste. Et je comprends que la violence, ce n'est pas ce qui s'est passé la semaine dernière, ce n'est pas ce qui s'est passé pendant dix ans, c'est peut-être ce qui s'est passé depuis le 8 mars 1977. Et je pars sur ce chemin-là, de comprendre avec quoi je me suis construite, quels sont les pavés de mon chemin. qui m'ont menée jusqu'à ces deux pierres, jusqu'à cet extrême.

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