Speaker #0Bienvenue dans les Icones du jour, le podcast qui répare l'histoire, une femme à la fois. Aujourd'hui, on entre dans la lumière d'une femme trop souvent effacée. Voici Suzanne Césaire, penseuse, écrivaine et pionnière du mouvement de la nécritude. Elle était bien plus que les pauvres. Suzanne Roussy naît le 11 août 1915 au Trois-Îlées en Martinique. Sa mère est institutrice et son père ouvrier sucrier. Très tôt brillante, elle poursuit ses études à Toulouse, puis intègre l'ENS à Paris en 1936. C'est là qu'elle rencontre Léopold Sangor, Léon Gontrand-Damas et bien sûr Aimé Césaire. Elle l'épouse en juillet 1937. L'année suivante, de retour en Martinique, elle devient professeure au lycée Schellcher à Fort-de-France. À cette époque, les idées de la négritude émergent, mais ils sont rarement portés par une femme. Suzanne ne se contente pas d'accompagner son mari. Elle pense, écrit, réagit. Elle veut éclairer le monde de son regard singulier. En 1941, en pleine occupation vichyste, elle cofonde avec Aimé Césaire et René Ménil la revue Tropique. Cette revue est pensée comme une revue surréaliste, anticolonialiste et culturelle. Suzanne y publie sept essais, entre 1941 et 1945, et autant d'articles intellectuels et engagés, sur Léo Frobenius, Alain ou André Breton, puis sur le colonialisme, la poésie et l'identité caribéenne. Elle rédige aussi la lettre de défense de Tropique contre la censure du régime, signée en 1943. C'est elle qui négocie. Dans l'une de ses tirades marquantes, elle dit « La poésie martiniquaise sera cannibale ou ne sera pas » . Elle y dénonce l'exotisme touristique, réclame une lucidité totale face à l'assimilation coloniale. Trop brillante, trop libre, trop tôt pour son époque. Après la guerre, la revue s'arrête. Suzanne se retire, enseigne en France et écrit une pièce perdue, Aurore de la liberté, en 1952. Puis elle disparaît des radars en 1966. Il aura fallu des décennies pour que les féministes et chercheurs redécouvrent Suzanne Césaire. Sa pensée, oscillant entre surréalisme et anticolonialisme, a influencé nombre d'intellectuels, jusque France Fanon et Édouard Glissant. Fanon a notamment puisé chez les Césaires l'esprit de la négritude, comme la thèse de nombreux chercheurs. Aujourd'hui, sa voix est célébrée. Ses essais figurent dans des anthologies modernes, et elle est désormais représentée comme une figure majeure du féminisme anticolonial. Suzanne était une passeuse d'idées, une poétesse de la révolte, une femme noire et antillaise au cœur de l'histoire. Suzanne Césaire disait « Je revendique le monde entier comme un terrain de ma poésie » . La pensée libre par excellence. Merci d'avoir écouté les Icones du jour. Suzanne Césaire nous rappelle que même effacées, les voix puissantes finissent toujours par revenir. Derrière chaque essai, chaque mot, il y a une femme qui dit non au colonialisme, au silence, à l'invisibilité. Cet épisode t'a plu ? Alors abonne-toi, partage-le et mets 5 étoiles sur ta plateforme d'écoute préférée. Et dis-moi en commentaire le nom d'une femme qu'on devrait tous et toutes connaître. Alors à demain pour une autre icône qui éclaire nos chemins de la liberté.