- Angi
Personne qui est venu me voir qui m'a dit Grâce à ta conférence, ma fille a l'espoir d'avoir un avenir. Moi, j'ai un mantra, je flippe à mort, mais j'y vais quand même. Parce qu'il y a beaucoup de choses dont j'ai peur qui ne sont pas forcément rationnelles.
- Chloé
Hello, c'est lundi et tu fais bien d'écouter Les Meneuses pour lancer ta semaine avec une dose d'inspiration. C'est Chloé, ta PMM préférée. Et aujourd'hui, j'accueille Angi Guillard qui est développeuse chez Shodo. Ne ratifiez pas et nous partagez son parcours, l'harcèlement scolaire qui fait sa réconciliation avant le bac, sa recouvertion dans le développement grâce à l'école 42, ainsi que sa prise de parole en conférence sur l'inclusion des personnes autistes en entreprise. Allez, installez-vous confortablement. C'est bon ? Alors c'est parti ! Bonne écoute et si l'épisode te plait, pense à le partager. Bonjour Angi, comment est-ce que tu vas ?
- Angi
Ça va bien, bonjour !
- Chloé
Très contente de t'avoir avec moi pour cet épisode, ça fait longtemps que je te suis de loin, on n'a pas encore eu l'occasion de se voir en vrai, mais j'aime beaucoup qui tu es. Pour les personnes qui ne te connaissent pas et qui nous écoutent, est-ce que tu peux te présenter ?
- Angi
Je suis reconvertie, j'étais serveuse en restauration et puis j'ai fait... l'école 42 et puis après au milieu d'un stage je suis passée je suis devenue développeuse génial mais en toute façon va reparler un petit peu de tout ça de temps parcours mais du coup tu es ta fait l'école 42 comment est-ce que tu es tombé dans la tech passé de la restauration à la tech et qu'est ce qui t'a attiré techniquement j'étais déjà un peu dans la tech depuis toute petite parce que enfin mon papa était geek enfin il est toujours d'ailleurs Donc, on a toujours eu des ordinateurs à la maison, on a toujours bricolé des trucs. Et il m'a aidée à monter mon PC quand j'avais 10 ans. Et j'étais déjà partie pour faire un parcours scientifique à la base quand j'étais au lycée. Mais pour ce qui est de comment je suis devenue développeuse, en fait, j'étais serveuse. J'avais... pas grand chose, j'avais du mal à trouver du travail parce que c'était pas un métier qui me convenait des masses, même si ça m'amusait, mais c'était pas le plus adapté, enfin j'étais pas adaptée pour ce genre de métier. Et un jour je suis tombée sur un article qui parlait de l'école 42, et qui disait que ça allait bientôt ouvrir, que pour pouvoir y rentrer il fallait faire des jeux en ligne de logique. pour rentrer après dans la piscine de sélection. Et moi, je me suis arrêtée à jeux en ligne. C'était jeux de logique en ligne, d'ailleurs. Et je suis allée les faire. Et quelques jours plus tard, je reçois un mail qui dit Vous êtes pris pour la piscine de sélection Je n'avais pas grand-chose à faire parce que je n'avais pas de travail à ce moment-là. Donc, pas grand-chose à perdre. Et comme il y avait possibilité de dormir sur place à ce moment-là encore, j'y suis allée. Et j'ai fait la piscine de sélection et j'ai découvert un monde où je me sentais bien et du coup c'est comme ça que ça a commencé.
- Chloé
Génial, j'adore. J'adore le papa geek. On s'est un peu perdu en chemin et ensuite avoir cette occasion-là avec l'école 42, on va y revenir juste un petit peu après. Du coup tu disais que tu allais normalement sur des filières scientifiques au lycée. Je sais que ta période scolaire a été assez lourde psychologiquement. Et d'ailleurs, on en a discuté avec ton accueil. On va pouvoir en parler parce que c'est un sujet qui est de plus en plus d'actualité, malheureusement, tout ce qui est harcèlement, etc. Donc, tu avais des facilités pour les sciences, mais tu as eu des freins à accéder à la filière S. Et à ça, c'est ajouté toute une phobie scolaire qui s'est développée à cause de harcèlement que tu as subi. Au final, tu as quitté le lycée sans le bac et tu es parti sur de la restauration. À cette époque, quel mécanisme tu as ? développer pour survivre parce que c'est vraiment de la survie à ce moment là et comment ces expériences ont influencé la femme que tu es devenue aujourd'hui parce que tu es épanouie, tu fais énormément de choses, est-ce que tu peux nous partager un petit peu ça parce que c'est super encourageant je pense notamment pour pas mal de jeunes ados qui vivent des périodes compliquées on sait qu'il y en a beaucoup malheureusement j'avais des bonnes notes un peu...
- Angi
dans tout ce qui était scientifique, sans travailler, parce que ça m'amusait. Et pas de très bonnes notes sur les trucs littéraires, etc. Mais au moment de choisir la direction, j'ai eu un prof qui essayait de me pousser à plutôt choisir les filières LES, parce que selon lui, j'étais plutôt créative et c'est un endroit qui me plairait un petit peu mieux que le côté scientifique. Ce n'était pas trop pour moi, je n'allais pas m'y plaire, etc. Et ce que j'ai fait, je suis quelqu'un d'un petit peu butée. Déjà, je n'en ai pas parlé à mes parents. et je l'ai envoyé chier j'ai quand même tous les trucs que j'ai remplis je disais que je voulais faire S bref je l'ai pas écouté ça arrive souvent quand quelqu'un me dit des conneries je fonce et ça même quand je suis pas sûre de moi par contre pour la partie harcèlement j'ai eu effectivement un peu de mal Un harcèlement assez violent. Je ne vais pas rentrer dans tous les détails, mais j'ai été bousculée, j'ai été insultée, j'étais suffisamment petite pour qu'on m'accroche au porte-manteau, c'était très chiant. des conneries du genre, quand on va faire du sport, après on prend une douche, on pose les vêtements au milieu, on ferme la porte du truc de douche, on prenait mes vêtements et on les mettait au milieu de la cour, j'étais en serviette à aller chercher mes vêtements, plein de choses, on a aussi découpé mes DM, des trucs comme ça, bref. Là-dessus, je n'ai pas de remède miracle parce que j'ai eu beaucoup de mal. Ça a été une période assez sombre pour moi. J'étais très renfermée. J'avais heureusement quelques personnes avec qui j'étais en groupe. Je ne suis pas encore en contact avec toutes les personnes aujourd'hui avec qui j'étais. Mais sans elle, je pense qu'il y a des chances que je ne serais plus là aujourd'hui. Du coup, j'étais un petit peu entourée. J'avais quand même un papa qui était génial et qui essayait de me soutenir un petit peu. Mais sinon, sur les mécanismes à l'école, j'avais essayé énormément de choses qui n'avaient pas fonctionné. J'avais essayé de... J'observais beaucoup les gens, j'essayais de faire un petit peu comme eux, de m'habiller un peu comme eux, ça ne marchait pas. De toute façon, j'étais pauvre, donc je n'avais pas de marque, donc j'avais juste des trucs qui ressemblaient vaguement. Je faisais des trous dans mes jeans ou des trucs de ce genre-là. J'essayais de parler un peu comme les autres, mais quand on parle comme les autres sans comprendre les raisons des différents codes sociaux, en fait, on le fait mal. J'essayais de... de copier les différentes mimiques du visage. J'essayais de faire des blagues qui ressemblaient, mais je tombais toujours à côté, j'étais toujours à côté de la blague, donc ça ne marchait pas du tout. Et puis, quand je n'en pouvais plus, je me renfermais, je m'enfermais dans mes bouquins, où je faisais mumuse à faire des exercices de maths ou des trucs comme ça, et j'étais vraiment déçu. un peu vider le monde autour et pas penser au fait que les gens étaient durs avec moi. Et c'était plein de regards à supporter tous les jours. C'était des... parfois, je sais pas si ça se voit, mais j'ai une cicatrice. Ça se voit pas bien, mais je me suis fait mordre par un chien quand j'étais gamine. Donc j'ai une cicatrice là et l'un de mes surnoms à l'école, c'était Albator. Donc dans les couloirs, il y avait des gens qui chantaient. qui chantait le générique de Albator. C'est plein de choses qui... Les unes séparées des autres, c'est innocent, mais l'accumulation, ça pèse énormément. Et quand tu demandes de l'aide, parce que j'ai demandé de l'aide à des professeurs, parfois à mon père pour lui demander comment on faisait. Il y avait des professeurs qui n'étaient pas très fut-fut, qui me disaient qu'il fallait se défendre. réagis, réponds, machin. Oui, mais quand tu réponds à côté de la plaque des trucs qui font rire les autres encore plus. Bref, pour supporter tout ça, je sais pas, j'ai survécu. Et après, quand je suis sortie de ça, j'ai fait une formation de serveuse, et là, c'était des gens adultes, c'était un petit peu plus facile. J'ai fait une phobie scolaire du coup avec ce harcèlement donc au bout d'un moment j'avais tellement... le cœur qui se serrait juste à l'idée d'aller là-bas. J'avais mal au ventre juste d'aller à l'école et de savoir qu'on allait encore... Enfin, j'étais très angoissée. Donc, au bout d'un moment, j'y allais quasiment plus. Et évidemment, les notes chutent quand on ne va plus à l'école, quand on n'est plus dans les classes à écouter les cours des profs. Je n'avais plus les datas qu'il fallait pour pouvoir passer le bac. Bref, je suis sortie de ça, j'ai été dans un univers un petit peu plus adulte et ça allait un petit peu mieux, je masquais un petit peu mieux, même si je n'étais pas intégrée, mais au moins on ne me harcelait pas. Et pour ce qui a fait, ce qui fait de moi aujourd'hui ce que je suis, il y a du positif et du négatif. Par exemple, j'ai toujours... Peur d'être rejetée, c'est un truc que même aujourd'hui, je me dis, les amis que j'ai aujourd'hui, peut-être un jour, elles vont se rendre compte que finalement, elles n'aiment pas tant que ça. Peut-être que les gens vont se rendre compte que je suis une fraude. Peut-être que je vais dire un truc à côté de la plaque. C'est plein de pensées irrationnelles qui se bousculent. Ils sont là de moins en moins souvent parce que aujourd'hui, je suis entourée de personnes qui sont vachement bien. Mais j'ai toujours ces peurs-là qui sont là et des peurs d'être pas très bien intégrées au travail. J'ai beaucoup, beaucoup travaillé sur la communication et j'ai arrêté de masquer. Ça m'arrive de faire un peu semblant quand je suis avec des gens que je connais pas et que... et que je dois jauger encore à quel point je peux leur montrer qui je suis parce que j'ai toujours ces inquiétudes-là, mais j'ai énormément travaillé sur ces sujets-là. Après, je communique beaucoup sur mes besoins, sur le fait que j'ai du mal avec l'implicite. Quand je ne comprends pas quelque chose, je dis directement Est-ce que ça, c'était de l'implicite ? Est-ce que c'était une blague ? Est-ce que ce que tu me demandes de faire là aujourd'hui, c'est vraiment ça, ça, ça et ça quand je suis au travail ? Plein de petits trucs pour compenser ce que je ne comprends pas naturellement et que la plupart des gens ont intégré depuis des années. Et à côté de ça, comme j'ai vécu des choses qui sont très violentes, je pense que ça fait de moi quelqu'un qui est très combatif aujourd'hui. Si je vois des injustices devant moi, j'ai envie de tout brûler. Alors je sais que tout brûler, ce n'est pas une solution, donc j'étais psychologique. Mais il y a des fois, j'ai un peu la rage quand même. Mais du coup, quand je vois des personnes qui ont des difficultés, je vais les soutenir, je vais voir si je peux faire quelque chose, si elles en ont envie aussi. bien sûr, on ne fait pas d'aide infligée. Quand je vois qu'il y a des gens qui se comportent mal, j'en ai absolument rien à foutre de comment on va me percevoir si j'ouvre ma gueule, mais j'ouvre ma gueule. Et même si ça m'a déjà porté préjudice, au moins, je fais partie de ceux qui, j'espère, qui participent à montrer comment on doit un peu mieux se comporter avec les gens. et les impacts qu'on a sur eux quand c'est négatif.
- Chloé
Merci beaucoup pour ton partage qui m'a émue et à la fois m'a donné mal au bide parce que c'est terrible de devoir vivre des choses comme ça, encaisser des choses comme ça. Et ce qui est fort aujourd'hui, c'est que tu arrives à en parler et à dire à la fois... Comment tu t'es relevé les bons côtés, mais qui a toujours des aspects compliqués et de l'impact même 15 ans plus tard. Donc je pense que c'est important que les gens puissent entendre ça et réaliser parce que là, on parle d'un schéma scolaire, mais dans le schéma même du travail, ce sont des choses qui arrivent encore. Donc c'est bien de pouvoir mettre une voix et je suis contente. que ce soit ta voix donc donc merci pour ça et du coup sur ton parcours mais moi je trouve ça vraiment vraiment très très chouette parce que ben tu as ta quitter ta quitter l'école tu pars sans bac aujourd'hui tu es développeuse chez chez chaudot et on pourra en reparler comme tu disais bête a découvert par hasard l'école 42 donc ça a été une vraie révélation pour toi du coup En quoi ce modèle d'apprentissage a changé ta vie et a changé aussi et été adapté pour toi et t'a permis de découvrir le métier que tu fais aujourd'hui ?
- Angi
À 42, déjà, 42, c'était une grosse découverte pour moi parce que quand je suis arrivée là-bas, il y avait des gens qui étaient à peu près aussi timbres que moi. Donc, c'est là que j'ai laissé un peu tomber tous les masques, tous les trucs que j'avais mis en place pour fonctionner avec les gens entre guillemets normaux. Eh bien, j'ai pu tout laisser tomber là-bas pour... découvrir comment moi j'étais avec les gens et ça fonctionnait plutôt bien parce qu'on avait des similarités, on arrivait à se comprendre et c'était super chouette. Et du coup ça m'a permis aussi de tester justement ce qui me plaisait, ce qui ne me plaisait pas au niveau de la communication et de comment je voulais être avec les gens et de comment je voulais que les gens soient avec moi. Déjà sur ce plan-là c'était hyper important. Et ça a été vraiment un moment charnier, on dit ?
- Chloé
Oui, un moment charnier.
- Angi
Et j'ai pu du coup commencer à voir ce qui fonctionnait avec moi, ce que je pouvais mettre en place tout en restant moi-même, pour fonctionner avec les gens. 42, c'est on choisit un projet, on s'inscrit dessus. On a des vidéos qui nous expliquent peut-être 10% de ce qu'on doit savoir pour faire le projet. Et le reste, on doit chercher tout seul. Soit on cherche tout seul sur Google, soit on demande aux camarades. Et j'avais trouvé un bon groupe de travail pour m'aider. On s'entraînait beaucoup et c'était hyper chouette. Et du coup, c'est réussir à apprendre que je pouvais travailler en équipe. que je pouvais comprendre des choses que d'autres gens ne comprenaient pas forcément. Dans notre groupe, on avait une personne qui sortait de bac plus 5 en ingénierie, moi qui n'avais pas de bac, pas d'études en maths ou un truc comme ça, on avait un niveau très différent, mais on arrivait à fonctionner ensemble parce que là où lui, il proposait des solutions hyper compliquées et qui fonctionnaient, qui étaient... des manières de faire qu'il avait appris, etc. Moi, j'avais d'autres visions. Je me disais, mais ça, pourquoi on ne fait pas ça en moins de lignes de code, de manière un petit peu plus simple ? On avait des choses qui... Quand on faisait un juste milieu entre ces trucs-là, eh bien, ça envoyait du lourd. Moi, je trouvais à ce moment-là, en tout cas. Et ça, c'était super chouette. Et puis, c'est tout l'univers où on est en... Vraiment, on apprend en faisant. On n'est pas assis devant un professeur qui nous déblate de choses qu'on doit engranger. Tu apprends ce dont tu as besoin pour faire ce que tu es en train de faire. Et du coup, ça rentre vachement plus. Et ça rend super curieux aussi sur comment on fait mieux aussi. Et puis après, les autres trucs qu'il y a, c'est... Quand on a rendu le projet, on se fait corriger par ses camarades et les camarades vont dire t'as pas fait comme ça ou là t'as fait cette erreur-là et du coup, ça c'est comme ça que tu pourrais le corriger C'est un système d'entraide qui, je pense, m'a beaucoup aidée à bien fonctionner dans le monde du travail aujourd'hui, dans le développement. Il faut apprendre à poser des questions, il faut montrer qu'on a besoin d'aide, il faut faire de la veille, il faut apprendre des choses par soi-même, il ne faut pas rester reposé sur ses acquis et aider ses camarades quand ils sont en galère. Et ça, je l'ai toujours aujourd'hui. C'est excellent parce que du coup,
- Chloé
cette école, ça a été une révélation parce que ça t'a montré. des dynamiques sociales où tu peux t'intégrer et te sentir toi, ce qui est essentiel dans la vie, parce qu'avoir un masque en permanence, c'est épuisant. Et en plus, ça t'a permis d'apprendre pour le travail différemment et avec un apprentissage aussi qui correspondait. Et je trouve ça très chouette. Moi, je ne connaissais pas exactement, je connaissais deux noms, mais sans savoir ce qui se faisait. Et du coup, une fois que tu as fini l'école, comment ça s'est passé, ton entrée dans le monde du travail ?
- Angi
Alors déjà, techniquement, je n'ai pas terminé 42. Je ne veux pas terminer les trucs. J'ai fait mon premier stage avec 42. Et à l'issue du premier stage, ils m'ont proposé un CDI. Et moi, je viens d'un monde qui est plutôt pauvre. Un monde où, quand on te propose un CDI, tu ne dis pas non. C'est le golden ticket, Steve va. Et moi, j'étais en mode, mais je vais gagner mon premier salaire. Je vais avoir un mois complet de salaire. Parce que pendant le stage, j'étais payée 400 euros par mois. Et là, c'était en mode... C'était un CDI à... au SMIC. Mais c'était quand même la première fois que j'allais avoir quelque chose où c'était mon travail, où j'étais tellement bien pour l'entreprise qu'ils voulaient me prendre en CDI et j'étais en mode super plein de gratitude et j'avais envie de faire bien les choses et c'était la preuve aussi que mon travail, il avait fait... Enfin bref. C'était... À ce moment-là, je trouvais ça trop bien. Après, maintenant, je me rends compte que je me suis fait avoir, quand même. Ah, merde ! Mais sur le moment, c'était trop bien. Parce que, normalement, même si je n'ai pas terminé 42, à ce moment-là, j'aurais pu être payée un petit peu plus que juste le SMIC, quoi. Surtout que si ils m'ont pris en CDI, c'était parce que... Et aujourd'hui... Je conseille aux personnes qui sortent de l'école de ne pas se laisser attendrir par des jolis mots. Même si l'endroit où tu es, c'est super chouette et on te propose un CDI derrière, ce n'est pas une raison pour te sous-évaluer et pour être sous-payée. Déjà, tu as eu droit au stage ou à l'alternance comme une période d'essai gratuite. Ce qu'on fait comme travail, ça vaut quelque chose. On ne fait pas du bénévolat.
- Chloé
Du coup, en même temps, on propose un CDI trop contente, c'est le Golden Ticket pour toi, et après, quelques désillusions par la suite. T'as fait combien d'entreprises ? Est-ce que tu peux nous parler un peu de ton parcours ?
- Angi
Sur mon premier travail, justement, mon premier CDI, l'un des trucs qui avait été dit, c'était... Pour l'instant, on te prend au SMIC et puis dans trois mois, si ça se passe toujours aussi bien, on t'augmente au prix que tu voulais. Et je crois qu'à l'époque, je demandais quelque chose comme 1500 euros net. Oui, je ne demandais pas en nombre de mille à l'année parce que je n'étais pas encore à ce stade-là. Et donc, trois mois plus tard, je reviens vers eux. Puis le chef de l'équipe, il dit, bah non, déjà, j'ai jamais dit ça. Et puis, toute façon, avec ce que tu fais, si on regarde le nombre de lignes de code que tu fais et que je te payais à la ligne de code, je te paierais encore moins que ce que je te paye aujourd'hui. Et en plus de ça, il me disait que jamais on m'embaucherait au prix que je demandais.
- Chloé
Sympa.
- Angi
Moi, comme je suis un petit peu butée et que j'aime bien avoir des preuves de ce qu'on avance, je suis allée chercher du travail ailleurs. Et donc, j'ai été embauchée dans une autre... On m'a proposé autre chose dans une autre boîte, dans une ESN, cette fois-ci, parce que là, j'étais chez un client final. Une ESN, c'est une entreprise qui prend prestations de services, qui propose à des clients de mettre des développeurs ou développeuses chez eux pour compléter leurs équipes. Et donc, c'était une ESN. Et ils me proposaient encore plus que ce que je demandais à la base. Dans mon entreprise, je pose ma démission avec la proposition d'embauche à côté en mode t'as dit des conneries, on y prend pour elle en plus Il ne m'a plus parlé jusqu'à la fin du contrat. Et puis je commence mon travail dans l'autre entreprise et j'ai fait une première mission. où ça s'est pas trop mal passé, c'était sympa. Et puis la deuxième mission, c'est là où j'ai été formée à l'accessibilité. Et où du coup, c'était déjà un truc sur lequel j'étais plutôt sensible. Mais en plus de ça, j'avais l'occasion de montrer que... Enfin, de devenir un petit peu responsable de certains trucs. Parce que comme ça m'intéressait moi et que ça n'intéressait personne dans l'équipe... J'étais devenue un peu la référence après sur ces sujets-là et ça c'était trop bien, c'est de me rendre compte que j'étais capable de faire quelque chose et qu'en plus on commençait à m'écouter sur les différents choix qu'on pouvait faire et sur comment appliquer ces choses-là au produit, faire en sorte qu'il soit accessible au plus grand nombre de gens et que tout le monde puisse utiliser le produit avec les mêmes informations, tout ça, et ça c'était trop bien.
- Chloé
Génial, trop bien. Et ensuite, aujourd'hui tu es chez Shodo. Je sais que durant ton parcours, tu t'es heurtée parfois à des moments des entreprises qui se disent être inclusives mais qui ne le sont pas. Quelle est selon toi la première erreur que ces entreprises-là font et quels sont les petits gestes concrets qui pourraient vraiment faire la différence ?
- Angi
La première erreur, c'est de dire qu'on veut faire de l'inclusion, mais de juste le dire et de ne pas se rendre compte qu'il y a du travail à faire derrière. C'est bien de dire qu'on veut des femmes, on veut des personnes handicapées. Tu as le droit d'être différente chez nous, mais c'est bien de faire en sorte aussi que la différence puisse être acceptée dans les équipes dans lesquelles on va te mettre. C'est bien de se former. Au niveau de la communication, de se rendre compte que quand tu as été dans un univers de dudes et que d'un seul coup tu as d'autres profils qui arrivent, des personnes neuroatypiques, des femmes, des LGBT, qu'on ne parle pas à ces personnes-là comme on parle aux programmeurs de base que tu connais. C'est pas comme ça qu'on respecte les gens, c'est pas comme ça non plus qu'on leur donne confiance dans la possibilité qu'ils puissent être eux-mêmes ou elles-mêmes dans l'entreprise. Pour moi, c'est ça le plus gros souci. Je préfère une entreprise qui me dise on veut faire de l'inclusion, mais on a encore du taf à faire dedans. plutôt que de dire, ici, on fait de l'inclusion, t'es safe chez nous, et se rendre compte que deux ans plus tard ou quelques mois plus tard, que la différence, c'est bien, mais seulement quand tu vas bien. Donc,
- Chloé
t'es pas si safe que ça, au final.
- Angi
C'est ça, de se rendre compte que... Justement, il y a une des entreprises où j'ai été, où au début, on m'a beaucoup dit des choses hyper positives, en mode, t'apportes plein de choses, tu... J'ai un peu permis d'huiler certaines communications. On avait organisé des repas bimensuels qui faisaient que les gens se mettaient à se reparler. On était encore dans une OSN, donc c'est difficile de faire en sorte qu'il y ait une vie dans l'entreprise. Et je faisais partie des personnes qui amélioraient un petit peu cette sensation d'être dans une entreprise, d'appartenir à un truc. Donc là, tant que tout se passait bien à ce moment-là, tant que ça allait dans le sens que la direction voulait, on me remerciait beaucoup et c'était bien pour eux d'avoir une personne différente, parce que j'avais un regard qui permettait de faire des choses bien. Et quand j'ai commencé à détecter des problèmes de communication entre la direction et certaines autres personnes, ou qu'il y a des choses, des personnes qui ne devraient pas être traitées comme elles sont traitées, ou des injustices, et que je les pointe du doigt, de la même manière que je dis quand il y a des choses positives, je dis aussi quand il y a des choses négatives, qu'on peut progresser. Et quand on voit qu'il n'y a rien qui se passe et que du coup je vais moins bien parce que ça me coûte beaucoup d'énergie, ou qu'il y a des choses qui font que moi je vais moins bien et que du coup je suis moins capable de faire des choses. que je suis moins capable de... Et là, l'entreprise n'est plus là alors que ça fait partie de mes difficultés et du deal. Quand ils m'ont pris, tu es quelqu'un de différent, tu as des besoins différents, on va faire en sorte qu'ils soient répandus pour que tu puisses fonctionner.
- Chloé
C'est un peu facile, tout va bien, tu amènes ta touche, etc. Mais quand ça se complique, en fait, il n'y a rien qui est fait derrière. C'est un peu du vin. Comment ça s'est passé derrière ça ? Tu n'étais pas bien ? Qu'est-ce que tu as fait ? Tu as fini par partir ? Comment ça s'est passé ?
- Angi
Je faisais partie du CSE, donc j'avais essayé d'améliorer les choses et de faire en sorte que ces problèmes-là s'arrêtent. Donc on commence par communiquer avec la direction, essayer de... de montrer qu'il y a des choses qui ne se passent pas, de prendre les doléances des personnes qui ne vont pas bien et de prendre toutes ces émotions qu'elles ont et qu'elles ont besoin d'en parler. On venait beaucoup vers moi pour me dire les problèmes qu'il y avait. Je recevais les pleurs, je recevais les moments de colère, je recevais plein de choses et j'essayais d'aider. Et quand j'ai vu qu'en parler à la direction ça ne suffisait pas, on a vu avec le CSE pour commencer une procédure avec eux, et une procédure où il y avait huit personnes qui étaient témoins victimes de ce qui se passait, et on appelle ça une procédure harcèlement, contre le directeur d'agence. Je croyais vraiment que l'entreprise avait envie que ça se passe bien, de corriger les problèmes. Et donc, je pensais que travailler avec le CSE, c'était justement collaborer avec la direction pour enquêter sur pourquoi ça se passe comme ça et essayer de résoudre la situation. Le but, c'était pas de... C'est sûr que dire une procédure harcèlement, c'est un gros mot, mais le but premier, c'était vraiment de résoudre cette situation, d'arrêter d'avoir des gens qui souffrent. D'arrêter de voir des gens qui sortent en pleurant du bureau du directeur et de reprendre confiance dans l'entreprise et dans les personnes avec qui on travaille. Et à l'issue de cette procédure, il faut savoir que ce genre de procédure, la direction est en obligation de faire des actions pour résoudre la situation. Et l'action qui avait été donnée, le directeur d'agence qui était aussi directeur de région, et on lui a retiré la responsabilité de directeur d'agence, on nous a demandé de ne pas en parler et de le laisser à l'annoncer. Et la manière dont il l'a annoncé, il l'a annoncé comme s'il était promu, et qu'il promouvait une personne à sa place de directeur d'agence. Et on n'avait pas le droit d'en parler normalement. Donc évidemment, on a quand même expliqué la situation aux personnes qui ont participé à cette alerte. Mais moi, je suis tombée de Ausha ce moment-là, parce que je pensais que le but, c'était de faire en sorte d'assainir la situation dans l'entreprise. d'éviter les risques psychosociaux, vraiment de faire en sorte que tout aille mieux. Et je me suis rendue compte que la direction, l'entreprise au-dessus de l'agence où on était, on n'avait rien à foutre de comment on se sentait et du fait qu'on partait en burn-out, qu'il y avait trois personnes parfois à la fois qui étaient en arrêt parce qu'elles n'en pouvaient plus. Et de me rendre compte de ça, alors que c'est une entreprise qui dit qu'elle privilégie le bien-être des collaborateurs et collaboratrices, qu'ils sont là pour le bien des gens de manière générale, que la manière dont ils l'annoncent, ça amène énormément de personnes qui ont été rejetées du système dans plein d'endroits parce qu'ils sont un peu atypiques. Moi, je tombe de haut, j'avais plein d'espoir sur ces trucs-là et ça m'a dégoûtée. Et donc, j'ai tout lâché à ce moment-là. Et je suis partie en burn-out. Et c'est à ce moment-là où, chaudot, on est entrés en contact. Je ne sais plus comment ça s'était passé, mais du coup, j'avais commencé le processus de recrutement. C'est comme ça que j'ai fini par entrer là-bas, en voyant que Shodo, justement, il dit beaucoup de choses, mais en fait, il le prouve. Quand il communique sur les réseaux, il communique sur leurs actions, et leurs actions disent... ce que l'entreprise promeut. Aujourd'hui, il faut faire attention à la manière dont les entreprises communiquent parce que c'est bien de vouloir être dans une entreprise qui dit qu'elle fait attention au bien-être des gens, mais il faut bien faire attention à comment elle le communique pour pouvoir lever les red flags. D'ailleurs, Shodo, j'étais sceptique au début parce que je venais de vivre plusieurs traumas. Le burn-out, on met du temps à s'en remettre, surtout quand il y a du harcèlement qui est dans le lot. Je me méfiais beaucoup quand même, même si ça m'a fait du rêve. J'y suis allée avec quelques boucliers et petit à petit, je me rends compte que ce qu'ils font, qu'ils disent, ils le font vraiment. Ils disent ce qu'ils font et ils font ce qu'ils disent. C'est vraiment une grosse différence.
- Chloé
Je suis contente que tu aies pu trouver Shodo et que tu t'y épanouisses parce qu'en effet, les expériences précédentes sont assez difficiles quand même. Et puis le message de promouvoir l'harceleur, ça en dit long. Du coup, de toutes tes expériences professionnelles, plus ou moins faciles et assez contrastées. Qu'est-ce qui t'a convaincue d'écrire ton premier talk sur l'inclusion des neuro-apps typiques ? Et pourquoi, à ce moment-là, quand tu t'es lancée, c'était urgent pour toi de le faire ?
- Angi
Justement, c'était dans l'ancienne entreprise où j'avais... Moi, ça se passait bien parce que je communiquais assez facilement sur comment j'étais et les différents besoins que j'avais. Mais j'ai été témoin de... du traitement du directeur d'agence assez toxique envers une autre personne qui était neuro-atypique. Et je l'ai vu faire, ça a été hyper violent parce qu'en fait, il n'avait pas compris que cette personne était Ausha, il n'avait pas compris qu'elle était peut-être autiste et il a été hyper dur avec lui. parce qu'il avait mal compris une instruction en particulier. C'était un moment où il y avait deux portes fermées entre moi et le bureau où ça se passait, et je l'entendais crier. Quelques minutes après, la personne vient dans le bureau où je suis et m'explique qu'en gros, il va rentrer chez lui, mais il va s'envoyer en l'air. Et moi, c'était vraiment la foi de trop. Parce que j'avais vu plusieurs problèmes de communication du directeur et je pensais honnêtement qu'il avait juste des coups de chaud, que ce n'était pas volontaire de sa part, qu'il ne comprenait pas comment certaines personnes pouvaient fonctionner. Et donc, je me disais qu'il faut juste l'expliquer et éviter que ça se reproduise. Parce que moi, ça m'a beaucoup bouleversée. Cette personne qui me dit ça, j'ai passé un long moment avec lui pour éviter que ça arrive, qu'il s'envoie en l'air. Et j'ai bu ses émotions, j'ai bu tout ce qui s'était pris et je ne veux pas voir ça se reproduire. Il n'y a pas de monde où c'est normal que ça se passe dans une entreprise, surtout une entreprise qui dit qu'elle veut le bien-être de ses collaborateurs. dans quel monde... Donc c'est avec cet état d'esprit où je me suis dit, je voulais déjà parler d'autisme de manière générale, je savais pas encore comment faire et là là j'avais le sujet c'était comment on fait pour intégrer une personne autiste en entreprise et pourquoi j'en parle comme ça alors que aussi c'est pas que pour les personnes autistes c'est donc le C'est comme ça que j'ai fait ce talk à la base, je ne voulais le faire que dans l'entreprise où j'étais. Et avec l'idée de, si tu fais ces différentes astuces pour améliorer l'intégration d'une personne autiste dans l'entreprise, en fait tu... Tu n'as pas besoin de savoir que la personne est autiste. Si tu fais ça avec tout le monde, l'environnement sera plus serein pour tout le monde, plus compréhensif, plus cadré, les communications sont plus sereines, on s'assure que les différents besoins sont répandus. Et ça, ce genre de choses, il n'y a pas que les personnes autistes, il n'y a pas que les personnes handicapées, il n'y a pas que les personnes neuroatypiques qui en ont besoin. C'était vraiment juste dans ce but là que j'avais fait le talk et j'avais invité une personne que j'avais rencontrée sur les réseaux, Amélie Abdallah, qui était venue du coup à ce talk pour me soutenir un peu parce que le sujet l'intéressait aussi et parce qu'elle est super sympa. Et quand, à la fin du truc, elle m'a un peu poussée à proposer le talk au Devox et au MixIT.
- Chloé
Ok.
- Angi
Et à la base, je l'ai fait. J'ai demandé à des personnes de m'aider à écrire les abstracts, à recadrer un petit peu des choses. Donc, j'ai demandé aussi à Julien Topsu, je crois que ça se prononce Topsu, justement de relire mon abstract et de m'aider à faire des... faire que la proposition donne envie et du coup j'ai fait ma proposition et j'ai été pris aux deux génial comment te dire que quand c'est arrivé j'ai hyper ventilé parce qu'en plus j'ai reçu les deux réponses la même journée J'étais au travail, je reçois le mail, je vais voir les collègues, les copains aussi, mais les collègues en leur disant « j'ai été pris à des Vox » et j'étais en train d'hyperventiler. Et puis peut-être une heure plus tard, alors que je n'avais toujours pas réussi à me remettre à travailler, je reçois la réponse du MixIT. Et j'étais en mode « mais je ne peux pas faire ça, je ne peux pas aller aux deux » . En plus, c'était un jour, enfin il y avait les deux, ils étaient les deux mêmes jours. Donc j'allais faire le talk au MixIT le lendemain. Au final,
- Chloé
tu as réussi.
- Angi
Et donc j'ai mis le doigt dans l'engrenage des conférences comme ça et je me suis rendue compte que... Alors, je n'aime pas trop me mettre en avant. Ça ne se voit pas forcément, mais je n'aime pas être sur scène. Mais j'ai l'impression que... que j'ai à dire est important. Et comme c'est moi qui l'essaie et pas d'autres gens, il faut que je le fasse. Et donc je le fais. Et je ne suis pas... Je me suis beaucoup améliorée sur la manière dont je suis sur scène et sur comment je communique aussi. Je m'en rends bien compte. Mais à la base, je ne me voyais pas du tout faire ça. Je ne suis pas une personne qui aime qu'on la regarde, qu'on vienne me parler après. Aujourd'hui, j'y arrive mieux et puis j'ai moins d'angoisse sur ces choses-là parce que si j'ai peur, enfin si je n'aime pas trop ça, c'est aussi parce que j'ai peur de dire des conneries, de mal faire les choses, que les gens se rendent compte une fois que je ne suis plus sur scène que je ne suis pas si intelligente que ça. Ce n'est pas parce que je sais des choses quand je suis sur scène que je suis pareille. J'ai travaillé sur ma conférence, je ne travaille pas sur comment je suis tous les jours. c'est pas le même nombre d'heures quoi.
- Chloé
Je vois ce que tu veux dire. Tu t'es un peu mise dans une mission de te dire, bon ok, je sais que c'est un message important à partager, je suis à même de le faire, mais en même temps, je suis pas hyper à l'aise, et c'est un gros challenge. Donc c'est ça que je trouve assez fort, parce qu'en effet, c'est pas facile, et avec tout... toutes les émotions qui sont en toi. Au final, je vais te dire un truc et tu vas dire un non, c'est pas vrai, etc. Mais pour moi, tu es devenue une référence en tant que speakers dans le secteur. Je pense qu'il y a plein de personnes qui, comme toi, moi, pareil, j'ai beaucoup de difficultés à me dire mais en fait, je fais un talk, tout le monde me dit c'est super et derrière, ils vont se rendre compte que je suis une grosse fraude. Alors que non, il faut arrêter d'être aussi dur avec soi. Et donc, je pense qu'il y a plein de personnes comme toi qui ont envie de porter certains messages qui sont importants, mais qui à la fois ont ces angoisses-là, etc. Quels sont les conseils que tu pourrais leur donner pour les mots de suivi et faire comme toi ?
- Angi
Oula ! Alors moi, j'ai un mantra que j'ai depuis... depuis un peu avant 42 d'ailleurs, je flippe à mort, mais j'y vais quand même. C'est parce qu'il y a beaucoup de choses dont j'ai peur qui ne sont pas... qui ne sont pas forcément rationnelles, qui ne sont pas prouvables. Donc, il faut que je le fasse. Et si ça se passe comme ce que j'avais peur, eh bien, je ne suis pas morte, ça va. Je me suis ridiculisée un peu, mais ce n'est pas beaucoup arrivé encore. Je suis même plutôt agréablement surprise par je fais quelque chose, même si je flippe à mort et que j'ai peur de me casser la gueule. En fait, ça se passe bien. Et même, il y a des gens qui... qui me font des retours qui sont juste trop touchants. Ce n'est pas la question que tu as posée, mais sur ma dernière conférence, il y a une personne qui est venue me voir, qui m'a dit, j'ai été voir ta conférence à la base à MixIT, et je suis revenue parce qu'il fallait absolument que je t'en parle. C'est que grâce à ta conférence, ma fille a l'espoir d'avoir un avenir. Et ça m'a touchée de haut parce qu'en fait, même si je ne suis pas diagnostiquée, elle se reconnaît un petit peu dans les choses que je raconte et où j'ai pris un peu de moi pour en parler. Et puis j'ai aussi le taux que je l'ai construit en parlant à des personnes autistes diagnostiquées et à des psys pour être sûre de ne pas dire de conneries. Mais du coup, elle s'est reconnue dans certaines choses que je parle. Et puis, elle se dit, elle est sur scène et elle fait des trucs. Et elle fonctionne. Ça veut dire que moi, peut-être, je peux faire pareil. Oui,
- Chloé
c'est génial.
- Angi
Et juste, voilà. Bref, donc, flipper, y aller quand même. Et le fait d'avoir peur de ne pas forcément bien faire, ce n'est aussi pas trop une mauvaise chose. C'est... Il ne faut pas que ce soit extrême, mais ça veut dire que c'est important pour toi. Ça veut dire que tu veux que ce soit bien fait. Donc ça veut dire aussi que tu vas travailler un peu plus que quelqu'un qui n'en a rien à foutre pour rendre un résultat qui est correct. Du coup, il ne faut pas toujours voir sa peur comme quelque chose de négatif. C'est que tu vas dans une bonne direction, parfois. Je dis parfois parce que parfois, t'as peur parce que la personne en face, c'est un gros connard.
- Chloé
Parfois, c'est pas forcément la bonne direction. Non, mais c'est super intéressant et merci d'avoir partagé ce retour qu'on t'a fait qui est très touchant. Ça me met les larmes aux yeux, mais moi, je suis une grosse fragile, donc je suis très vite touchée. Mais je trouve ça très beau et du coup, ça me montre, ça permet de montrer qu'on a tous et toute notre place. Et peu importe les différences et qui on est, c'est bien de pouvoir le mettre en avant. Et du coup, comme si tu n'avais pas déjà un milliard de trucs, en plus d'être speaker, tu fais partie du réseau IT Women de Yeso et fais du mentoring. Et tu m'as notamment raconté que tu avais accompagné une femme qui voulait... abandonné la tech et qui ne l'a pas fait grâce à ton accompagnement. Qu'est-ce qui t'a donné envie d'aller sur du mentoring et qu'est-ce que ça t'apporte, toi, professionnellement et aussi personnellement ?
- Angi
J'ai eu beaucoup de mal à me dire, je peux faire du mentoring, déjà de base parce que je n'ai pas toujours très confiance en moi. Je n'ai pas l'impression d'être une énorme référence. Pour moi, je suis médiocre un peu partout et j'ai peur de ne pas forcément avoir des choses bien. Mais j'avais envie de... Même si je ne suis pas aux exigences que j'aimerais par rapport à moi, je suis là, contrairement à d'autres gens. Et du coup, si je peux offrir un petit peu de mon expérience, un petit peu de ce que j'ai vécu, un peu de soutien aussi. ça me fait trop plaisir de le faire et de me dire que c'est utile. La personne qui était au bord de quitter la tech, quand j'ai appris sa situation, c'était un de ces moments où j'avais envie de tout brûler. Parce qu'elle était vraiment très maltraitée dans son alternance. Et en même temps, ce n'était pas ça l'important, c'était elle. Et ça faisait du bien, en fait, pour une fois, de ne pas être dans la destruction, de ne pas être dans le combat. C'était d'être dans le soutien d'une personne, un petit peu comme une pom-pom girl, je ne sais pas, et de me dire... Je lui permets de tenir un petit peu, peut-être d'essayer de travailler sur les trucs, de se rediriger vers des trucs un peu plus positifs, parce qu'elle avait beaucoup de négatifs qu'elle recevait. Regarde, on a fait un meet-up où on a travaillé ensemble avec d'autres filles sur du code. On a fait des kata, des exercices de code, et on était en groupe à travailler ensemble. Et puis, on a... On a fait ce qu'on appelle du mob. En gros, tu as une personne sur le clavier et les autres qui lui disent quoi taper pour réussir l'exercice. Et puis, on switch deux personnes toutes les dix minutes ou quelque chose comme ça. Et elle me disait que ça lui avait fait du bien parce qu'elle pouvait s'exprimer, parce qu'elle était avec des personnes qui étaient bienveillantes. qu'elle se rendait compte que travailler ensemble, ce n'est pas forcément avoir quelqu'un qui va te dire que ce que tu fais, c'est de la merde et que ce n'est pas comme ça qu'il faut faire et que tu ne sais pas ça, mais normalement, à ton niveau, tu devrais savoir ce genre de choses. Non, ce n'est pas comme ça qu'on apprend, ce n'est pas comme ça qu'on progresse et qu'on fait progresser quelqu'un. Après, j'ai demandé aussi de l'aide d'autres personnes pour ce mentorat précis. Parce que... Parce que les problèmes qu'il pouvait y avoir n'étaient pas seulement sur la technique. Comment on fait pour essayer de faire en sorte que ça s'améliore dans l'entreprise ? Comment on communique ses besoins ? On revient un petit peu sur ces trucs-là dont je vous ai déjà parlé. Souvent, c'est des problèmes de communication et de management. Et donc, il y a des choses à mettre en place. Et donc, il y avait d'autres personnes qui étaient un peu plus adaptées que moi sur ces parties-là pour l'aider. Et voir qu'au bout de ça... En fait, elle s'est accrochée, elle a repris espoir dans ses compétences et dans comment travailler. Elle voyait le bout aussi de son alternance, mais qu'elle ne le voyait plus comme quelque chose où elle allait sombrer après. Et qu'elle avait espoir de trouver un CDI, et ce qu'elle a fait d'ailleurs. Et qu'en plus de ça, à côté de ça, elle a fait aussi un talk. plein de choses comme ça où je vois une personne qui à la base était prête à se dire je suis pas faite pour ce métier là et puis qu'en fait elle fait plein de choses maintenant et rayonne elle va dans d'autres meet up et ça fait ça fait super plaisir de se dire que j'ai un peu aidé à ne pas perdre une personne géniale dans le monde de la tech et qui va peut-être apporter énormément de choses sur sur ces trucs là
- Chloé
Trop bien, ça fait du bien, ça fait chaud au cœur. Et du coup, mon point, c'était de savoir, toi, qu'est-ce que ça t'apporte professionnellement et même personnellement de faire ce mentoring-là ?
- Angi
Déjà, je me rends compte que finalement, je sais des trucs. Justement, l'expérience que j'apporte, elle me sert à moi aussi. Je me rends compte que j'ai appris des trucs et je les reformule. Et je les intègre un petit peu mieux. Et ça fait du bien aussi de se dire qu'on aide des personnes. Et professionnellement, je ne sais pas si ça m'apporte quelque chose. Mais juste, moi, ça me fait plaisir de savoir que je soutiens des gens. Et ça me donne un peu plus confiance en moi aussi. Si, ça doit m'aider d'une certaine manière, mais je ne l'ai pas encore vue.
- Chloé
Ça va, ça prend son temps, mais du coup, j'espère que dans quelques mois, on pourra rediscuter et tu arrêteras de dire que tu es peut-être une fraude ou que tu n'es pas une référence. Mais du coup, non, mais c'est extra. Et du coup, tu as eu un parcours, un sacré parcours, si tu pouvais revenir il y a dix ans. et te revoir toi, il y a un an dit, d'il y a dix ans, quels sont les conseils que tu lui donnerais ?
- Angi
Tu peux y arriver. C'est déjà ça, arrête de te flageller, arrête de te dire que t'es une merde. Même si t'as pas encore les compétences, les compétences ça s'acquiert. Et c'est pas parce que tu les as pas que t'es mauvaise. Et ce n'est pas parce que tu ne t'entends pas avec tout le monde que tu es quelqu'un de mal aussi. La communication, ça va dans les deux sens. Parfois, ce n'est pas que tu communiques mal. Parfois, c'est que les gens autour de toi n'ont pas suffisamment d'empathie pour réussir à communiquer avec toi. Et ce n'est pas grave. Et les personnes qui ont pu faire du mal, ce n'est pas forcément parce que tu as mal agi. Et je sais pas, franchement aujourd'hui, si on m'avait dit il y a dix ans que j'en serais là où j'en suis aujourd'hui, je n'y aurais pas cru, mais juste dire ça va fonctionner. Il y a des moments qui vont être difficiles, mais ils ne seront que passagers. Et après, tu t'auras appris plein de trucs et tu vas briller, tu vas permettre à d'autres personnes de briller aussi et ça sera chouette.
- Chloé
Non mais tu veux vraiment me faire pleurer je crois. Franchement c'est très émouvant et je trouve ça très fort. Parfois malheureusement on n'a pas le choix d'être forte. Mais je pense que tu as de quoi largement donner tous ces enseignements que tu as pu avoir. Et même te rendre compte que tu es une personne extra. Donc merci beaucoup de... de tous ces partages. Et est-ce que tu peux nous partager une des choses qui t'inspire, un bouquin, je sais que tu as sorti un bouquin, un film, une musique, que tu as envie de donner cette good vibe aux personnes qui nous écoutent.
- Angi
Je voulais parler de deux trucs. J'ai amené un bouquin, effectivement, Mati de Sayou. techno féministe je sais pas s'il ya des personnes qui ont déjà suggéré mais non super bouquin qui qui montre un peu l'état des lieux de justement du sexisme dans la tech et de dans ce qui peut se passer sur les réseaux et et je vais en parler très mal donc je vais pas trop parce que je n'ai pas toutes les connaissances de mathilde sayou mais il ya énormément de de trucs qui te font te rendre compte quand même de comment le monde de la tech a été designé quand même plus pour des hommes que pour des femmes, et qu'il a fallu beaucoup de choses pour que des femmes puissent réussir à faire des noms dans la tech. Et il y a aussi sur la fin du bouquin des débuts de solutions sur comment on pourrait faire pour... pour progresser et faire en sorte que les gens soient un petit peu mieux intégrés de manière générale dans ce monde-là. Et la deuxième personne dont je voudrais parler, et là c'est ce qu'elle fait de manière un peu plus large, c'est Julie Daché, qui a fait le bouquin La différence invisible. plein d'autres trucs. C'est une personne autiste qui essaye d'ailleurs, qui sensibilise sur l'autisme et qui explique comment ça fonctionne et comment on peut fonctionner justement dans le monde pour les personnes autistes, mais aussi comment faire comprendre aux personnes qui ne sont pas forcément autistes comment tout fonctionne. Et elle a plein de trucs, donc la différence invisible d'ailleurs qui est là. Cette BD-là, ça suit l'histoire d'une nana qui découvre qu'elle est autiste et son parcours sur cette découverte-là. Et ce bouquin-là, je l'ai adoré. Je trouve qu'il y a des choses qu'on pourrait reprocher, mais je pense que pour une découverte de ce que c'est... C'est super et c'est le genre de bouquin à offrir à tes parents quand tu veux expliquer pourquoi tu fonctionnes d'une certaine manière. Et donner un début de discussion sur ces sujets-là. Et à côté de ça, elle fait aussi des formations sur les sujets de l'autisme. Et elle a aussi un bouquin qui s'appelle « L'autisme autrement » . Enfin bref, elle a plein de... de trucs et je vous conseille vraiment d'aller sur ce vers son travail elle est aussi sur linkedin si vous voulez regarder C'est fait. Voilà.
- Chloé
Génial. Merci pour les recos. Je ne connaissais pas, j'avais entendu parler de Julie, mais le premier bouquin, je ne le connaissais pas. Je pense que ça va rentrer direct dans ma liste à acheter, même la BD. Donc, merci pour ce partage. Et la dernière question de cet épisode, qui est-ce que tu aimerais entendre dans ce podcast ?
- Angi
Alors, d'abord, il y aurait Houleymatou. mais on m'a dit qu'on te l'avait déjà proposé mais elle fait des choses incroyables avec Yesso c'est une personne qui est un vrai soleil et qui apporte énormément de choses autour d'elle, qui a une énergie folle, je sais pas d'où elle vient, elle doit être nourrie avec un trou noir, je sais pas mais c'est bon chaque fois que je la vois ou que je l'ai au téléphone, je suis boostée pour une semaine et et ça me fait vraiment plaisir d'être avec elle sur l'aventure de Yeso et de participer avec elle. Elle porte énormément de choses sur ce truc là. Je n'arrive pas à s'achever. Elle est incroyable. Comme on te l'a déjà proposé, j'avais un autre nom. Je pensais à Emmanuelle Aboaf. Je ne sais pas si ça te parle. Oui. C'est... Elle est aussi chez Shode, je suis désolée, j'ai eu deux personnes de Shodo du coup, mais c'est une personne qui est juste incroyable. C'est une personne sourde et qui est développeuse et qui milite énormément pour améliorer les conditions des personnes handicapées au travail. et qui milite aussi beaucoup pour l'accessibilité et qui le fait d'une manière, je la trouve vachement plus douée que moi pour parler, c'est quand même impressionnant comment elle est une excellente oratrice, elle a même fait un TEDx.
- Chloé
Oui, j'ai vu.
- Angi
Et c'est une personne aussi qui est très chouette et qui a certainement énormément de choses à dire. Oui. Que ce soit sur comment elle a pu être traitée dans le monde du travail, comment elle est aujourd'hui et comment elle a réussi à devenir la femme qu'elle est aujourd'hui. Et où il y a beaucoup de personnes qui la suivent et qui profitent de son travail, qui sont touchées par son travail.
- Chloé
Ouais, mais je la suis et je suis très touchée aussi par elle, donc je me reconnais et il va falloir que je la contacte. Merci beaucoup pour la proposition et merci beaucoup pour cet échange, Angi. C'était vraiment top, j'ai vraiment beaucoup apprécié et merci de parler de tous ces sujets qui ne sont pas forcément faciles mais qui vont faire, je pense, écho à beaucoup de monde. Et je pense apporter aussi un peu de chaleur et de réconfort si des personnes sont concernées. Donc merci pour tout. Un grand merci pour ton écoute. On se retrouve lundi dans deux semaines pour la découverte d'une nouvelle meneuse. J'espère que l'épisode t'a plu. Si c'est le cas, laisse-moi ton avis sur la plateforme que tu utilises. Et s'il te reste encore un peu de temps, partage cet épisode à ton entourage. Fais un gros big up à notre menace du jour. La bise si tu le veux bien. Et toujours plein de loutres dans ta vie. Ciao !