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Lumière sur... La plateforme GISMO

Lumière sur... La plateforme GISMO

14min |13/03/2025
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14min |13/03/2025
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Description

Dans cet épisode, le CNRS vous invite à découvrir une plateforme scientifique à la pointe de la technologie, capable de répondre aux questions liées à l’évolution des climats passés, l’adaptation des espèces marines, ou même le stress hydrique des vignes en Bourgogne, rien que ça !

 

Cette plateforme, c'est GISMO, la fierté du laboratoire Biogéosciences (CNRS/EPHE/UBE) à Dijon. Et pour en parler, nous recevons Anne-Lise Santoni, responsable technique de cette machine à explorer l’invisible. A l'aide de ses deux spectromètres de masse, elle décortique les secrets de la matière, collabore avec des chercheurs du monde entier. Zoom sur la manière dont ces analyses isotopiques transforment des données en découvertes, et comment Anne-Lise et son équipe jonglent entre technique de pointe et la gestion d’une plateforme d’envergure.

 

Un véritable voyage dans l’infiniment petit pour comprendre le monde qui nous entoure !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Lumière, capable de répondre aux grandes questions des chercheuses et chercheurs. Mais quelles questions me diriez-vous ? Eh bien, l'évolution des climats passés, l'adaptation des espèces marines ou même le stress hydrique des vignes en Bourgogne. Rien que ça. Cette plateforme, c'est GISMO, la fierté du laboratoire biogéosciences à Dijon. Et pour en parler, j'ai la chance de recevoir Anne-Lise Santoni, responsable technique de cette machine à explorer l'invisible. Derrière ses 12 spectromètres de masse, elle décortique les secrets de la matière collabore avec des chercheurs du monde entier. Bref, on va découvrir comment ces analyses isotopiques transforment des données en découvertes et comment Anne-Lise jongle entre technique de pointe et la gestion d'une plateforme d'envergure. Accrochez-vous, on s'apprête à plonger dans l'infiniment petit pour comprendre le monde qui nous entoure. Bonjour Anne-Lise !

  • Speaker #1

    Bonjour !

  • Speaker #0

    D'abord Anne-Lise, est-ce que vous pouvez nous présenter rapidement GISMO et en quoi cette plateforme est essentielle pour les recherches menées au laboratoire biogéosciences ?

  • Speaker #1

    Oui, alors GISMO, c'est une plateforme technologique qui est adossée au laboratoire Biogéosciences à l'Université de Dijon. Et donc GISMO, c'est l'acronyme pour géochimie, isotopie, morphométrie et écologie moléculaire. Donc en fait, c'est une plateforme qui est structurée en deux grands domaines. Le domaine géomine, qui est donc la partie géochimie, et le domaine morphoptics, qui regroupe des équipements d'imagerie et de microscopie. et qui est aussi composé d'un secteur dédié à l'écologie moléculaire.

  • Speaker #0

    Alors, quel type d'équipement vous gérez sur cette plateforme-là ? Dans mon introduction, je parlais de spectromètre de masse, c'est bien ça ? Oui,

  • Speaker #1

    tout à fait. Moi, je suis chimiste de formation, donc je gère plus spécifiquement deux spectromètres de masse à rapports isotopiques qui sont couplés à quatre interfaces de séparation.

  • Speaker #0

    Justement, vous parlez de rapports isotopiques, d'isotopes. Vous travaillez sur l'analyse des isotopes du carbone et de l'azote. Bon, rapidement. Qu'est-ce que c'est qu'un isotope ?

  • Speaker #1

    Deux isotopes, ce sont des éléments chimiques qui ont le même nombre de protons, mais un nombre de neutrons différents. Le fait qu'ils ont un nombre de neutrons différents va faire qu'ils ont une masse différente. Les principaux éléments qui constituent les molécules terrestres sont présents sous forme de plusieurs isotopes. Cette abondance naturelle d'isotopes n'est pas uniforme sur Terre, parce qu'il y a une discrimination qui se fait lors des processus biochimiques. Comme par exemple la photosynthèse, certains types de plantes vont plus ou moins privilégier le carbone léger, qui est plus facile à assimiler, donc le carbone 12 plutôt que le carbone 13. Et donc c'est cette discrimination naturelle qui va donner ce que l'on appelle la signature isotopique d'un échantillon, et qui pourra servir de traceur des phénomènes physico-chimiques. Donc les analyses qui sont réalisées sur la plateforme au niveau isotopie, vont pouvoir aider à la compréhension de différentes applications scientifiques. Dans les études environnementales, c'est plus appliqué, on va comprendre les processus biochimiques. Par exemple, on travaille sur le stockage du carbone dans le sol ou le stress hydrique de la vigne. En agronomie, on va pouvoir utiliser le marquage isotopique pour suivre les flux d'éléments dans la plante et donc mieux comprendre la physiologie de la plante. En écologie, on va pouvoir suivre les migrations animales et les réseaux trophiques, c'est-à-dire les régimes alimentaires des différentes espèces et leurs relations entre espèces. Et enfin, en géologie, on travaille avec beaucoup de géologues, ça va être plus sur l'enregistrement stratigraphique. En fait, on va analyser les différentes couches, les différentes strates de roches et on va pouvoir décrire l'évolution et les perturbations du cycle du carbone dues aux changements climatiques passés. ou au volcanisme.

  • Speaker #0

    C'est vraiment multidisciplinaire et du coup, vous collaborez avec des chercheurs et des chercheuses de disciplines très variées. Comme la géologie, vous l'avez dit, la climatologie, même la viticulture. Ce sont des sujets qui sont très chers à nos régions. Comment ça se passe, cette multidisciplinarité au quotidien ? Est-ce que c'est compliqué ? Est-ce que c'est fascinant ?

  • Speaker #1

    C'est dans un sens compliqué parce qu'il faut découvrir et s'approprier de nombreuses thématiques de recherche. Donc ça, je pense que jusqu'à la fin de ma carrière, je vais continuer d'apprendre des choses et m'améliorer. Mais après, c'est le côté fascinant du métier, c'est qu'on apprend des choses tous les jours. Et concrètement, ça se passe comme ça. Les chercheurs me demandent des analyses et on se rend compte, pour étudier la faisabilité, donc moi je leur apporte le point de vue technique, voir si en fonction de ce que vont contenir leurs échantillons, il va y avoir des problèmes d'interaction, il va falloir adapter le mode de préparation des échantillons avant de les passer au spectromètre. Et eux, de leur côté, vont m'expliquer le but du projet, à quoi vont servir toutes ces analyses. Donc c'est vraiment un échange gagnant.

  • Speaker #0

    Sur le sujet comme l'étude du stress hydrique des vignes, par exemple, quel résultat avez-vous pu tirer ?

  • Speaker #1

    Alors là, c'est vrai que c'est un sujet qui est très important pour les viticulteurs bourguignons. En fait, l'analyse du rapport isotopique C13 sur C12 dans les sucres de mou de raisin, ça va nous donner, ça va pouvoir permettre d'estimer le stress hydrique de la plante. Et là, on travaille beaucoup avec le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne. et les chambres d'agriculture de Bourgogne, pour pouvoir aider les viticulteurs sur les adaptations culturales de la vigne. Notamment, on essaye de voir si le mode de coupe de la vigne, par exemple couper la plante au niveau du sommet, le paillage, toutes ces pratiques-là sont testées, et on a pu voir que l'effeuillage apical permet de réduire le stress hydrique de la vigne. Donc ça, c'est des choses qui vont tout de suite être appliquées et pouvoir aider les viticulteurs à pallier le réchauffement climatique et la sécheresse, leur donner des pistes d'adaptation, puisqu'on ne peut pas toujours utiliser l'irrigation. Ensuite, on teste aussi, la Chambre d'agriculture teste des différentes variétés aussi, avec un conservatoire de collection. et voir s'il n'y aurait pas des variétés plus adaptées au changement climatique à la région Bourgogne. Ce sont des projets sur le long terme, sur plusieurs années.

  • Speaker #0

    Anne-Lise, vous assurez également la maintenance de vos spectromètres, de vos équipements sur la plateforme GISMO. Vous les chouchoutez, j'imagine ?

  • Speaker #1

    Oui, je les chouchoute parce que quand il y a une panne, ça bloque les appareils, ça bloque le planning. Donc, je fais très attention. J'assure la maintenance préventive des équipements. Je change les tubes des réactifs chimiques. Et je fais aussi la maintenance curative. Par exemple, quand on envoie trop de molécules sur le filament, c'est le filament qui sert à ioniser les molécules, il va se rompre. Donc là, il faut démonter toute la machine et démonter la source à impact électronique. C'est un peu comme de l'horlogerie fine. Ça fait plein de toutes petites pièces de petites vis. qu'il faut nettoyer, changer, remettre à leur place. Donc il faut être très minutieux pour cette étape. Ensuite, j'ai aussi dû passer mon habilitation électrique, parce qu'il y a beaucoup de pannes électroniques sur ce type d'instrument, surtout avec un parc vieillissant. Donc malheureusement, on doit changer des blocs d'alimentation, des cartes électroniques.

  • Speaker #0

    Oui, vous touchez vraiment à tout finalement sur ces machines.

  • Speaker #1

    Oui, finalement, quand j'ai voulu faire chimiste, je n'imaginais pas qu'on allait devoir toucher à tout ça. Mais voilà, il faut s'adapter et puis c'est intéressant aussi. Il faut être assez polyvalent finalement.

  • Speaker #0

    Vous n'êtes pas toute seule sur la maintenance de ces équipements quand même ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai la chance d'avoir quand même des chercheurs avec moi qui aiment un petit peu trifouiller les machines et qui m'aident à réparer. Mais sinon, on évite de faire venir les fournisseurs parce que ça coûte. toujours tout de suite très cher.

  • Speaker #0

    J'imagine. Et comment ça se passe si jamais vous devez remplacer ou améliorer de tels appareils ?

  • Speaker #1

    En fait, quand on doit remplacer les appareils, on doit répondre, on répond à des appels à projets pour obtenir des financements, que ce soit régional, national ou européen. Mais c'est difficile, les enveloppes sont restreintes. Et quand on obtient un financement, il faut souvent apporter un cofinancement. Donc c'est pour ça qu'on fait des prestations analytiques. En fait, on fait des prestations pour les entreprises privées qui nous apportent de l'argent.

  • Speaker #0

    De l'argent, ça vous apporte aussi, je pense, de l'expérience et peut-être que ça apporte aussi des résultats pour la recherche en même temps ?

  • Speaker #1

    Oui, en effet. Alors, quand on fait des prestations pour, par exemple, les chambres d'agriculture, comme je disais tout à l'heure, ça nous apporte des connaissances et en plus, souvent, c'est un peu en lien aussi avec les recherches à biogéosciences. Ça peut mener à des partenariats intéressants. Je travaille beaucoup avec les INRAE, Dijon et Bordeaux. Et aussi, c'est vrai que ça nous pousse à diversifier nos activités et à développer de nouvelles méthodes. Donc c'est quand même enrichissant.

  • Speaker #0

    Vous travaillez aussi avec des entreprises privées, des collectivités territoriales. Quel genre de projet vous avez avec eux ?

  • Speaker #1

    Par exemple, avec les champs d'agriculture, trouver des méthodes de culture plus appropriées au changement climatique.

  • Speaker #0

    Vous participez parfois à des missions de terrain pour collecter les échantillons. Alors déjà, à quoi ressemblent les échantillons que vous allez collecter et comment ces expériences influencent-elles votre travail en laboratoire ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai la chance de participer de temps en temps à des missions de terrain. Donc là, j'étais hier d'ailleurs, j'étais dans les vignes de nuit Saint-Georges. Donc là, on a prélevé du sol à différentes profondeurs pour regarder le stockage du carbone. C'est intéressant d'aller sur le terrain parce qu'en fait, ça me permet de mieux appréhender les problématiques de recherche. De remettre les échantillons dans leur contexte, c'est plus intéressant pour moi.

  • Speaker #0

    Vous formez aussi des étudiants, des doctorants, des post-docs. Comment se déroule cette partie de votre métier et comment est-ce que vous articulez tout ça avec vos missions au labo ?

  • Speaker #1

    En fait, ça se fait assez naturellement. C'est que les étagères de L3, M1, M2 sont sur le laboratoire entre la période de janvier à juin. Donc, ils sont avec nous. Donc, je les forme directement aux diverses techniques de préparation des échantillons. Et ensuite, je leur explique le... fonctionnement des machines. Donc là, je ne laisse pas du tout en autonomie sur les spectromètres de masse, parce que ce sont des appareils très sensibles qui nécessitent plusieurs mois de formation. Mais sinon, je fais aussi un petit TP de bonne pratique de laboratoire aux stagiaires de M2 pour les remettre un petit peu à niveau, parce qu'ils n'ont pas forcément beaucoup de formation chimie dans leur cursus. De sorte que quand ils arrivent en stage, ils aient déjà vu les règles d'hygiène de sécurité sur le maniement des produits chimiques. On gagne du temps et puis ça leur est bénéfique.

  • Speaker #0

    Du coup, comment se passe la vie au quotidien au laboratoire ? Comment vous travaillez avec vos collègues, avec vos chercheurs, avec les techniciens sur la plateforme ?

  • Speaker #1

    Avec les collègues de la plateforme, j'interagis sur l'aspect surtout organisationnel. Parce que comme je suis responsable technique, je vais coordonner tous les bilans analytiques, les bilans financiers. qui sont demandés au niveau des plateformes technologiques labellisées en Bourgogne-Franche-Comté. Je vais animer les comités de pilotage de la plateforme. On va pouvoir discuter des projets d'achat d'équipements, prioriser les différents besoins. Donc ça, ce sont plutôt les liens avec tous les acteurs de la plateforme. Et puis aussi, j'interagis beaucoup avec les gestionnaires du laboratoire pour la rédaction des devis qui sont demandés par les prestataires, le suivi des facturations. et pour toutes les commandes nécessaires sur le laboratoire. Je suis aussi impliquée sur les activités collectives pour l'UMR, puisque je m'occupe de la communication. Je suis dans la cellule communication du laboratoire avec plusieurs collègues. On fait des plaquettes du labo, des plaquettes de la plateforme. J'anime aussi une page LinkedIn de la plateforme. Je mets à jour le site de GISMO. Et puis... En dehors de ça aussi, je suis sauveteur-scourrice du travail. Comme ça, quand il y a un étudiant qui a un malaise, on sait comment intervenir.

  • Speaker #0

    Donc au final, vous n'avez pas toujours une blouse sur vous, des lunettes, vous n'êtes pas tout le temps sur la plateforme ou sur le terrain. En fait, votre métier est très, très varié.

  • Speaker #1

    Il y a une grosse part administrative, effectivement.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui vous plaît le mieux dans votre métier ?

  • Speaker #1

    En fait, ce que j'aime bien, c'est faire un peu de tout. Avant, j'étais collaboratoire. Là, je suis contente que ça évolue un petit peu vers cette partie administrative. J'aime bien avoir les deux côtés.

  • Speaker #0

    Anne-Lise, avant d'exercer le métier de responsable technique de la plateforme GISMO, vous avez eu de nombreuses expériences, toutes différentes et enrichissantes, je crois. Quel a été votre parcours ? Racontez-nous.

  • Speaker #1

    Alors, j'ai suivi des études de chimie. J'ai travaillé dans le privé pour faire du contrôle qualité de produits industriels. Et ensuite, j'ai essayé de passer des concours. J'ai réussi celui de l'INRAE de Dijon. J'ai travaillé dix ans à l'INRAE. Et ensuite, j'ai souhaité changer un petit peu et travailler sur une plateforme. Ça me paraissait plus intéressant pour moi. Et donc là, j'ai passé un concours externe d'ingénieur chimiste à l'université.

  • Speaker #0

    Quels conseils vous donneriez à celles et ceux qui souhaiteraient s'orienter vers un métier similaire au vôtre ou dans la recherche en général ?

  • Speaker #1

    Je dirais, renseignez-vous sur le site de l'emploi public. où vous trouverez tous les concours de la fonction publique qui répondent à vos critères. Et puis ensuite, préparez bien surtout vos épreuves de concours, lisez bien les guides du candidat, surtout pour les preuves orales, il ne faut pas y aller les mains dans les poches, il faut bien s'entraîner avant.

  • Speaker #0

    C'était Lumière sur la plateforme GISMO avec Anne-Lise Santoni, responsable technique au laboratoire Biogéosciences à Dijon.

Description

Dans cet épisode, le CNRS vous invite à découvrir une plateforme scientifique à la pointe de la technologie, capable de répondre aux questions liées à l’évolution des climats passés, l’adaptation des espèces marines, ou même le stress hydrique des vignes en Bourgogne, rien que ça !

 

Cette plateforme, c'est GISMO, la fierté du laboratoire Biogéosciences (CNRS/EPHE/UBE) à Dijon. Et pour en parler, nous recevons Anne-Lise Santoni, responsable technique de cette machine à explorer l’invisible. A l'aide de ses deux spectromètres de masse, elle décortique les secrets de la matière, collabore avec des chercheurs du monde entier. Zoom sur la manière dont ces analyses isotopiques transforment des données en découvertes, et comment Anne-Lise et son équipe jonglent entre technique de pointe et la gestion d’une plateforme d’envergure.

 

Un véritable voyage dans l’infiniment petit pour comprendre le monde qui nous entoure !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Lumière, capable de répondre aux grandes questions des chercheuses et chercheurs. Mais quelles questions me diriez-vous ? Eh bien, l'évolution des climats passés, l'adaptation des espèces marines ou même le stress hydrique des vignes en Bourgogne. Rien que ça. Cette plateforme, c'est GISMO, la fierté du laboratoire biogéosciences à Dijon. Et pour en parler, j'ai la chance de recevoir Anne-Lise Santoni, responsable technique de cette machine à explorer l'invisible. Derrière ses 12 spectromètres de masse, elle décortique les secrets de la matière collabore avec des chercheurs du monde entier. Bref, on va découvrir comment ces analyses isotopiques transforment des données en découvertes et comment Anne-Lise jongle entre technique de pointe et la gestion d'une plateforme d'envergure. Accrochez-vous, on s'apprête à plonger dans l'infiniment petit pour comprendre le monde qui nous entoure. Bonjour Anne-Lise !

  • Speaker #1

    Bonjour !

  • Speaker #0

    D'abord Anne-Lise, est-ce que vous pouvez nous présenter rapidement GISMO et en quoi cette plateforme est essentielle pour les recherches menées au laboratoire biogéosciences ?

  • Speaker #1

    Oui, alors GISMO, c'est une plateforme technologique qui est adossée au laboratoire Biogéosciences à l'Université de Dijon. Et donc GISMO, c'est l'acronyme pour géochimie, isotopie, morphométrie et écologie moléculaire. Donc en fait, c'est une plateforme qui est structurée en deux grands domaines. Le domaine géomine, qui est donc la partie géochimie, et le domaine morphoptics, qui regroupe des équipements d'imagerie et de microscopie. et qui est aussi composé d'un secteur dédié à l'écologie moléculaire.

  • Speaker #0

    Alors, quel type d'équipement vous gérez sur cette plateforme-là ? Dans mon introduction, je parlais de spectromètre de masse, c'est bien ça ? Oui,

  • Speaker #1

    tout à fait. Moi, je suis chimiste de formation, donc je gère plus spécifiquement deux spectromètres de masse à rapports isotopiques qui sont couplés à quatre interfaces de séparation.

  • Speaker #0

    Justement, vous parlez de rapports isotopiques, d'isotopes. Vous travaillez sur l'analyse des isotopes du carbone et de l'azote. Bon, rapidement. Qu'est-ce que c'est qu'un isotope ?

  • Speaker #1

    Deux isotopes, ce sont des éléments chimiques qui ont le même nombre de protons, mais un nombre de neutrons différents. Le fait qu'ils ont un nombre de neutrons différents va faire qu'ils ont une masse différente. Les principaux éléments qui constituent les molécules terrestres sont présents sous forme de plusieurs isotopes. Cette abondance naturelle d'isotopes n'est pas uniforme sur Terre, parce qu'il y a une discrimination qui se fait lors des processus biochimiques. Comme par exemple la photosynthèse, certains types de plantes vont plus ou moins privilégier le carbone léger, qui est plus facile à assimiler, donc le carbone 12 plutôt que le carbone 13. Et donc c'est cette discrimination naturelle qui va donner ce que l'on appelle la signature isotopique d'un échantillon, et qui pourra servir de traceur des phénomènes physico-chimiques. Donc les analyses qui sont réalisées sur la plateforme au niveau isotopie, vont pouvoir aider à la compréhension de différentes applications scientifiques. Dans les études environnementales, c'est plus appliqué, on va comprendre les processus biochimiques. Par exemple, on travaille sur le stockage du carbone dans le sol ou le stress hydrique de la vigne. En agronomie, on va pouvoir utiliser le marquage isotopique pour suivre les flux d'éléments dans la plante et donc mieux comprendre la physiologie de la plante. En écologie, on va pouvoir suivre les migrations animales et les réseaux trophiques, c'est-à-dire les régimes alimentaires des différentes espèces et leurs relations entre espèces. Et enfin, en géologie, on travaille avec beaucoup de géologues, ça va être plus sur l'enregistrement stratigraphique. En fait, on va analyser les différentes couches, les différentes strates de roches et on va pouvoir décrire l'évolution et les perturbations du cycle du carbone dues aux changements climatiques passés. ou au volcanisme.

  • Speaker #0

    C'est vraiment multidisciplinaire et du coup, vous collaborez avec des chercheurs et des chercheuses de disciplines très variées. Comme la géologie, vous l'avez dit, la climatologie, même la viticulture. Ce sont des sujets qui sont très chers à nos régions. Comment ça se passe, cette multidisciplinarité au quotidien ? Est-ce que c'est compliqué ? Est-ce que c'est fascinant ?

  • Speaker #1

    C'est dans un sens compliqué parce qu'il faut découvrir et s'approprier de nombreuses thématiques de recherche. Donc ça, je pense que jusqu'à la fin de ma carrière, je vais continuer d'apprendre des choses et m'améliorer. Mais après, c'est le côté fascinant du métier, c'est qu'on apprend des choses tous les jours. Et concrètement, ça se passe comme ça. Les chercheurs me demandent des analyses et on se rend compte, pour étudier la faisabilité, donc moi je leur apporte le point de vue technique, voir si en fonction de ce que vont contenir leurs échantillons, il va y avoir des problèmes d'interaction, il va falloir adapter le mode de préparation des échantillons avant de les passer au spectromètre. Et eux, de leur côté, vont m'expliquer le but du projet, à quoi vont servir toutes ces analyses. Donc c'est vraiment un échange gagnant.

  • Speaker #0

    Sur le sujet comme l'étude du stress hydrique des vignes, par exemple, quel résultat avez-vous pu tirer ?

  • Speaker #1

    Alors là, c'est vrai que c'est un sujet qui est très important pour les viticulteurs bourguignons. En fait, l'analyse du rapport isotopique C13 sur C12 dans les sucres de mou de raisin, ça va nous donner, ça va pouvoir permettre d'estimer le stress hydrique de la plante. Et là, on travaille beaucoup avec le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne. et les chambres d'agriculture de Bourgogne, pour pouvoir aider les viticulteurs sur les adaptations culturales de la vigne. Notamment, on essaye de voir si le mode de coupe de la vigne, par exemple couper la plante au niveau du sommet, le paillage, toutes ces pratiques-là sont testées, et on a pu voir que l'effeuillage apical permet de réduire le stress hydrique de la vigne. Donc ça, c'est des choses qui vont tout de suite être appliquées et pouvoir aider les viticulteurs à pallier le réchauffement climatique et la sécheresse, leur donner des pistes d'adaptation, puisqu'on ne peut pas toujours utiliser l'irrigation. Ensuite, on teste aussi, la Chambre d'agriculture teste des différentes variétés aussi, avec un conservatoire de collection. et voir s'il n'y aurait pas des variétés plus adaptées au changement climatique à la région Bourgogne. Ce sont des projets sur le long terme, sur plusieurs années.

  • Speaker #0

    Anne-Lise, vous assurez également la maintenance de vos spectromètres, de vos équipements sur la plateforme GISMO. Vous les chouchoutez, j'imagine ?

  • Speaker #1

    Oui, je les chouchoute parce que quand il y a une panne, ça bloque les appareils, ça bloque le planning. Donc, je fais très attention. J'assure la maintenance préventive des équipements. Je change les tubes des réactifs chimiques. Et je fais aussi la maintenance curative. Par exemple, quand on envoie trop de molécules sur le filament, c'est le filament qui sert à ioniser les molécules, il va se rompre. Donc là, il faut démonter toute la machine et démonter la source à impact électronique. C'est un peu comme de l'horlogerie fine. Ça fait plein de toutes petites pièces de petites vis. qu'il faut nettoyer, changer, remettre à leur place. Donc il faut être très minutieux pour cette étape. Ensuite, j'ai aussi dû passer mon habilitation électrique, parce qu'il y a beaucoup de pannes électroniques sur ce type d'instrument, surtout avec un parc vieillissant. Donc malheureusement, on doit changer des blocs d'alimentation, des cartes électroniques.

  • Speaker #0

    Oui, vous touchez vraiment à tout finalement sur ces machines.

  • Speaker #1

    Oui, finalement, quand j'ai voulu faire chimiste, je n'imaginais pas qu'on allait devoir toucher à tout ça. Mais voilà, il faut s'adapter et puis c'est intéressant aussi. Il faut être assez polyvalent finalement.

  • Speaker #0

    Vous n'êtes pas toute seule sur la maintenance de ces équipements quand même ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai la chance d'avoir quand même des chercheurs avec moi qui aiment un petit peu trifouiller les machines et qui m'aident à réparer. Mais sinon, on évite de faire venir les fournisseurs parce que ça coûte. toujours tout de suite très cher.

  • Speaker #0

    J'imagine. Et comment ça se passe si jamais vous devez remplacer ou améliorer de tels appareils ?

  • Speaker #1

    En fait, quand on doit remplacer les appareils, on doit répondre, on répond à des appels à projets pour obtenir des financements, que ce soit régional, national ou européen. Mais c'est difficile, les enveloppes sont restreintes. Et quand on obtient un financement, il faut souvent apporter un cofinancement. Donc c'est pour ça qu'on fait des prestations analytiques. En fait, on fait des prestations pour les entreprises privées qui nous apportent de l'argent.

  • Speaker #0

    De l'argent, ça vous apporte aussi, je pense, de l'expérience et peut-être que ça apporte aussi des résultats pour la recherche en même temps ?

  • Speaker #1

    Oui, en effet. Alors, quand on fait des prestations pour, par exemple, les chambres d'agriculture, comme je disais tout à l'heure, ça nous apporte des connaissances et en plus, souvent, c'est un peu en lien aussi avec les recherches à biogéosciences. Ça peut mener à des partenariats intéressants. Je travaille beaucoup avec les INRAE, Dijon et Bordeaux. Et aussi, c'est vrai que ça nous pousse à diversifier nos activités et à développer de nouvelles méthodes. Donc c'est quand même enrichissant.

  • Speaker #0

    Vous travaillez aussi avec des entreprises privées, des collectivités territoriales. Quel genre de projet vous avez avec eux ?

  • Speaker #1

    Par exemple, avec les champs d'agriculture, trouver des méthodes de culture plus appropriées au changement climatique.

  • Speaker #0

    Vous participez parfois à des missions de terrain pour collecter les échantillons. Alors déjà, à quoi ressemblent les échantillons que vous allez collecter et comment ces expériences influencent-elles votre travail en laboratoire ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai la chance de participer de temps en temps à des missions de terrain. Donc là, j'étais hier d'ailleurs, j'étais dans les vignes de nuit Saint-Georges. Donc là, on a prélevé du sol à différentes profondeurs pour regarder le stockage du carbone. C'est intéressant d'aller sur le terrain parce qu'en fait, ça me permet de mieux appréhender les problématiques de recherche. De remettre les échantillons dans leur contexte, c'est plus intéressant pour moi.

  • Speaker #0

    Vous formez aussi des étudiants, des doctorants, des post-docs. Comment se déroule cette partie de votre métier et comment est-ce que vous articulez tout ça avec vos missions au labo ?

  • Speaker #1

    En fait, ça se fait assez naturellement. C'est que les étagères de L3, M1, M2 sont sur le laboratoire entre la période de janvier à juin. Donc, ils sont avec nous. Donc, je les forme directement aux diverses techniques de préparation des échantillons. Et ensuite, je leur explique le... fonctionnement des machines. Donc là, je ne laisse pas du tout en autonomie sur les spectromètres de masse, parce que ce sont des appareils très sensibles qui nécessitent plusieurs mois de formation. Mais sinon, je fais aussi un petit TP de bonne pratique de laboratoire aux stagiaires de M2 pour les remettre un petit peu à niveau, parce qu'ils n'ont pas forcément beaucoup de formation chimie dans leur cursus. De sorte que quand ils arrivent en stage, ils aient déjà vu les règles d'hygiène de sécurité sur le maniement des produits chimiques. On gagne du temps et puis ça leur est bénéfique.

  • Speaker #0

    Du coup, comment se passe la vie au quotidien au laboratoire ? Comment vous travaillez avec vos collègues, avec vos chercheurs, avec les techniciens sur la plateforme ?

  • Speaker #1

    Avec les collègues de la plateforme, j'interagis sur l'aspect surtout organisationnel. Parce que comme je suis responsable technique, je vais coordonner tous les bilans analytiques, les bilans financiers. qui sont demandés au niveau des plateformes technologiques labellisées en Bourgogne-Franche-Comté. Je vais animer les comités de pilotage de la plateforme. On va pouvoir discuter des projets d'achat d'équipements, prioriser les différents besoins. Donc ça, ce sont plutôt les liens avec tous les acteurs de la plateforme. Et puis aussi, j'interagis beaucoup avec les gestionnaires du laboratoire pour la rédaction des devis qui sont demandés par les prestataires, le suivi des facturations. et pour toutes les commandes nécessaires sur le laboratoire. Je suis aussi impliquée sur les activités collectives pour l'UMR, puisque je m'occupe de la communication. Je suis dans la cellule communication du laboratoire avec plusieurs collègues. On fait des plaquettes du labo, des plaquettes de la plateforme. J'anime aussi une page LinkedIn de la plateforme. Je mets à jour le site de GISMO. Et puis... En dehors de ça aussi, je suis sauveteur-scourrice du travail. Comme ça, quand il y a un étudiant qui a un malaise, on sait comment intervenir.

  • Speaker #0

    Donc au final, vous n'avez pas toujours une blouse sur vous, des lunettes, vous n'êtes pas tout le temps sur la plateforme ou sur le terrain. En fait, votre métier est très, très varié.

  • Speaker #1

    Il y a une grosse part administrative, effectivement.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui vous plaît le mieux dans votre métier ?

  • Speaker #1

    En fait, ce que j'aime bien, c'est faire un peu de tout. Avant, j'étais collaboratoire. Là, je suis contente que ça évolue un petit peu vers cette partie administrative. J'aime bien avoir les deux côtés.

  • Speaker #0

    Anne-Lise, avant d'exercer le métier de responsable technique de la plateforme GISMO, vous avez eu de nombreuses expériences, toutes différentes et enrichissantes, je crois. Quel a été votre parcours ? Racontez-nous.

  • Speaker #1

    Alors, j'ai suivi des études de chimie. J'ai travaillé dans le privé pour faire du contrôle qualité de produits industriels. Et ensuite, j'ai essayé de passer des concours. J'ai réussi celui de l'INRAE de Dijon. J'ai travaillé dix ans à l'INRAE. Et ensuite, j'ai souhaité changer un petit peu et travailler sur une plateforme. Ça me paraissait plus intéressant pour moi. Et donc là, j'ai passé un concours externe d'ingénieur chimiste à l'université.

  • Speaker #0

    Quels conseils vous donneriez à celles et ceux qui souhaiteraient s'orienter vers un métier similaire au vôtre ou dans la recherche en général ?

  • Speaker #1

    Je dirais, renseignez-vous sur le site de l'emploi public. où vous trouverez tous les concours de la fonction publique qui répondent à vos critères. Et puis ensuite, préparez bien surtout vos épreuves de concours, lisez bien les guides du candidat, surtout pour les preuves orales, il ne faut pas y aller les mains dans les poches, il faut bien s'entraîner avant.

  • Speaker #0

    C'était Lumière sur la plateforme GISMO avec Anne-Lise Santoni, responsable technique au laboratoire Biogéosciences à Dijon.

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Description

Dans cet épisode, le CNRS vous invite à découvrir une plateforme scientifique à la pointe de la technologie, capable de répondre aux questions liées à l’évolution des climats passés, l’adaptation des espèces marines, ou même le stress hydrique des vignes en Bourgogne, rien que ça !

 

Cette plateforme, c'est GISMO, la fierté du laboratoire Biogéosciences (CNRS/EPHE/UBE) à Dijon. Et pour en parler, nous recevons Anne-Lise Santoni, responsable technique de cette machine à explorer l’invisible. A l'aide de ses deux spectromètres de masse, elle décortique les secrets de la matière, collabore avec des chercheurs du monde entier. Zoom sur la manière dont ces analyses isotopiques transforment des données en découvertes, et comment Anne-Lise et son équipe jonglent entre technique de pointe et la gestion d’une plateforme d’envergure.

 

Un véritable voyage dans l’infiniment petit pour comprendre le monde qui nous entoure !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Lumière, capable de répondre aux grandes questions des chercheuses et chercheurs. Mais quelles questions me diriez-vous ? Eh bien, l'évolution des climats passés, l'adaptation des espèces marines ou même le stress hydrique des vignes en Bourgogne. Rien que ça. Cette plateforme, c'est GISMO, la fierté du laboratoire biogéosciences à Dijon. Et pour en parler, j'ai la chance de recevoir Anne-Lise Santoni, responsable technique de cette machine à explorer l'invisible. Derrière ses 12 spectromètres de masse, elle décortique les secrets de la matière collabore avec des chercheurs du monde entier. Bref, on va découvrir comment ces analyses isotopiques transforment des données en découvertes et comment Anne-Lise jongle entre technique de pointe et la gestion d'une plateforme d'envergure. Accrochez-vous, on s'apprête à plonger dans l'infiniment petit pour comprendre le monde qui nous entoure. Bonjour Anne-Lise !

  • Speaker #1

    Bonjour !

  • Speaker #0

    D'abord Anne-Lise, est-ce que vous pouvez nous présenter rapidement GISMO et en quoi cette plateforme est essentielle pour les recherches menées au laboratoire biogéosciences ?

  • Speaker #1

    Oui, alors GISMO, c'est une plateforme technologique qui est adossée au laboratoire Biogéosciences à l'Université de Dijon. Et donc GISMO, c'est l'acronyme pour géochimie, isotopie, morphométrie et écologie moléculaire. Donc en fait, c'est une plateforme qui est structurée en deux grands domaines. Le domaine géomine, qui est donc la partie géochimie, et le domaine morphoptics, qui regroupe des équipements d'imagerie et de microscopie. et qui est aussi composé d'un secteur dédié à l'écologie moléculaire.

  • Speaker #0

    Alors, quel type d'équipement vous gérez sur cette plateforme-là ? Dans mon introduction, je parlais de spectromètre de masse, c'est bien ça ? Oui,

  • Speaker #1

    tout à fait. Moi, je suis chimiste de formation, donc je gère plus spécifiquement deux spectromètres de masse à rapports isotopiques qui sont couplés à quatre interfaces de séparation.

  • Speaker #0

    Justement, vous parlez de rapports isotopiques, d'isotopes. Vous travaillez sur l'analyse des isotopes du carbone et de l'azote. Bon, rapidement. Qu'est-ce que c'est qu'un isotope ?

  • Speaker #1

    Deux isotopes, ce sont des éléments chimiques qui ont le même nombre de protons, mais un nombre de neutrons différents. Le fait qu'ils ont un nombre de neutrons différents va faire qu'ils ont une masse différente. Les principaux éléments qui constituent les molécules terrestres sont présents sous forme de plusieurs isotopes. Cette abondance naturelle d'isotopes n'est pas uniforme sur Terre, parce qu'il y a une discrimination qui se fait lors des processus biochimiques. Comme par exemple la photosynthèse, certains types de plantes vont plus ou moins privilégier le carbone léger, qui est plus facile à assimiler, donc le carbone 12 plutôt que le carbone 13. Et donc c'est cette discrimination naturelle qui va donner ce que l'on appelle la signature isotopique d'un échantillon, et qui pourra servir de traceur des phénomènes physico-chimiques. Donc les analyses qui sont réalisées sur la plateforme au niveau isotopie, vont pouvoir aider à la compréhension de différentes applications scientifiques. Dans les études environnementales, c'est plus appliqué, on va comprendre les processus biochimiques. Par exemple, on travaille sur le stockage du carbone dans le sol ou le stress hydrique de la vigne. En agronomie, on va pouvoir utiliser le marquage isotopique pour suivre les flux d'éléments dans la plante et donc mieux comprendre la physiologie de la plante. En écologie, on va pouvoir suivre les migrations animales et les réseaux trophiques, c'est-à-dire les régimes alimentaires des différentes espèces et leurs relations entre espèces. Et enfin, en géologie, on travaille avec beaucoup de géologues, ça va être plus sur l'enregistrement stratigraphique. En fait, on va analyser les différentes couches, les différentes strates de roches et on va pouvoir décrire l'évolution et les perturbations du cycle du carbone dues aux changements climatiques passés. ou au volcanisme.

  • Speaker #0

    C'est vraiment multidisciplinaire et du coup, vous collaborez avec des chercheurs et des chercheuses de disciplines très variées. Comme la géologie, vous l'avez dit, la climatologie, même la viticulture. Ce sont des sujets qui sont très chers à nos régions. Comment ça se passe, cette multidisciplinarité au quotidien ? Est-ce que c'est compliqué ? Est-ce que c'est fascinant ?

  • Speaker #1

    C'est dans un sens compliqué parce qu'il faut découvrir et s'approprier de nombreuses thématiques de recherche. Donc ça, je pense que jusqu'à la fin de ma carrière, je vais continuer d'apprendre des choses et m'améliorer. Mais après, c'est le côté fascinant du métier, c'est qu'on apprend des choses tous les jours. Et concrètement, ça se passe comme ça. Les chercheurs me demandent des analyses et on se rend compte, pour étudier la faisabilité, donc moi je leur apporte le point de vue technique, voir si en fonction de ce que vont contenir leurs échantillons, il va y avoir des problèmes d'interaction, il va falloir adapter le mode de préparation des échantillons avant de les passer au spectromètre. Et eux, de leur côté, vont m'expliquer le but du projet, à quoi vont servir toutes ces analyses. Donc c'est vraiment un échange gagnant.

  • Speaker #0

    Sur le sujet comme l'étude du stress hydrique des vignes, par exemple, quel résultat avez-vous pu tirer ?

  • Speaker #1

    Alors là, c'est vrai que c'est un sujet qui est très important pour les viticulteurs bourguignons. En fait, l'analyse du rapport isotopique C13 sur C12 dans les sucres de mou de raisin, ça va nous donner, ça va pouvoir permettre d'estimer le stress hydrique de la plante. Et là, on travaille beaucoup avec le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne. et les chambres d'agriculture de Bourgogne, pour pouvoir aider les viticulteurs sur les adaptations culturales de la vigne. Notamment, on essaye de voir si le mode de coupe de la vigne, par exemple couper la plante au niveau du sommet, le paillage, toutes ces pratiques-là sont testées, et on a pu voir que l'effeuillage apical permet de réduire le stress hydrique de la vigne. Donc ça, c'est des choses qui vont tout de suite être appliquées et pouvoir aider les viticulteurs à pallier le réchauffement climatique et la sécheresse, leur donner des pistes d'adaptation, puisqu'on ne peut pas toujours utiliser l'irrigation. Ensuite, on teste aussi, la Chambre d'agriculture teste des différentes variétés aussi, avec un conservatoire de collection. et voir s'il n'y aurait pas des variétés plus adaptées au changement climatique à la région Bourgogne. Ce sont des projets sur le long terme, sur plusieurs années.

  • Speaker #0

    Anne-Lise, vous assurez également la maintenance de vos spectromètres, de vos équipements sur la plateforme GISMO. Vous les chouchoutez, j'imagine ?

  • Speaker #1

    Oui, je les chouchoute parce que quand il y a une panne, ça bloque les appareils, ça bloque le planning. Donc, je fais très attention. J'assure la maintenance préventive des équipements. Je change les tubes des réactifs chimiques. Et je fais aussi la maintenance curative. Par exemple, quand on envoie trop de molécules sur le filament, c'est le filament qui sert à ioniser les molécules, il va se rompre. Donc là, il faut démonter toute la machine et démonter la source à impact électronique. C'est un peu comme de l'horlogerie fine. Ça fait plein de toutes petites pièces de petites vis. qu'il faut nettoyer, changer, remettre à leur place. Donc il faut être très minutieux pour cette étape. Ensuite, j'ai aussi dû passer mon habilitation électrique, parce qu'il y a beaucoup de pannes électroniques sur ce type d'instrument, surtout avec un parc vieillissant. Donc malheureusement, on doit changer des blocs d'alimentation, des cartes électroniques.

  • Speaker #0

    Oui, vous touchez vraiment à tout finalement sur ces machines.

  • Speaker #1

    Oui, finalement, quand j'ai voulu faire chimiste, je n'imaginais pas qu'on allait devoir toucher à tout ça. Mais voilà, il faut s'adapter et puis c'est intéressant aussi. Il faut être assez polyvalent finalement.

  • Speaker #0

    Vous n'êtes pas toute seule sur la maintenance de ces équipements quand même ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai la chance d'avoir quand même des chercheurs avec moi qui aiment un petit peu trifouiller les machines et qui m'aident à réparer. Mais sinon, on évite de faire venir les fournisseurs parce que ça coûte. toujours tout de suite très cher.

  • Speaker #0

    J'imagine. Et comment ça se passe si jamais vous devez remplacer ou améliorer de tels appareils ?

  • Speaker #1

    En fait, quand on doit remplacer les appareils, on doit répondre, on répond à des appels à projets pour obtenir des financements, que ce soit régional, national ou européen. Mais c'est difficile, les enveloppes sont restreintes. Et quand on obtient un financement, il faut souvent apporter un cofinancement. Donc c'est pour ça qu'on fait des prestations analytiques. En fait, on fait des prestations pour les entreprises privées qui nous apportent de l'argent.

  • Speaker #0

    De l'argent, ça vous apporte aussi, je pense, de l'expérience et peut-être que ça apporte aussi des résultats pour la recherche en même temps ?

  • Speaker #1

    Oui, en effet. Alors, quand on fait des prestations pour, par exemple, les chambres d'agriculture, comme je disais tout à l'heure, ça nous apporte des connaissances et en plus, souvent, c'est un peu en lien aussi avec les recherches à biogéosciences. Ça peut mener à des partenariats intéressants. Je travaille beaucoup avec les INRAE, Dijon et Bordeaux. Et aussi, c'est vrai que ça nous pousse à diversifier nos activités et à développer de nouvelles méthodes. Donc c'est quand même enrichissant.

  • Speaker #0

    Vous travaillez aussi avec des entreprises privées, des collectivités territoriales. Quel genre de projet vous avez avec eux ?

  • Speaker #1

    Par exemple, avec les champs d'agriculture, trouver des méthodes de culture plus appropriées au changement climatique.

  • Speaker #0

    Vous participez parfois à des missions de terrain pour collecter les échantillons. Alors déjà, à quoi ressemblent les échantillons que vous allez collecter et comment ces expériences influencent-elles votre travail en laboratoire ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai la chance de participer de temps en temps à des missions de terrain. Donc là, j'étais hier d'ailleurs, j'étais dans les vignes de nuit Saint-Georges. Donc là, on a prélevé du sol à différentes profondeurs pour regarder le stockage du carbone. C'est intéressant d'aller sur le terrain parce qu'en fait, ça me permet de mieux appréhender les problématiques de recherche. De remettre les échantillons dans leur contexte, c'est plus intéressant pour moi.

  • Speaker #0

    Vous formez aussi des étudiants, des doctorants, des post-docs. Comment se déroule cette partie de votre métier et comment est-ce que vous articulez tout ça avec vos missions au labo ?

  • Speaker #1

    En fait, ça se fait assez naturellement. C'est que les étagères de L3, M1, M2 sont sur le laboratoire entre la période de janvier à juin. Donc, ils sont avec nous. Donc, je les forme directement aux diverses techniques de préparation des échantillons. Et ensuite, je leur explique le... fonctionnement des machines. Donc là, je ne laisse pas du tout en autonomie sur les spectromètres de masse, parce que ce sont des appareils très sensibles qui nécessitent plusieurs mois de formation. Mais sinon, je fais aussi un petit TP de bonne pratique de laboratoire aux stagiaires de M2 pour les remettre un petit peu à niveau, parce qu'ils n'ont pas forcément beaucoup de formation chimie dans leur cursus. De sorte que quand ils arrivent en stage, ils aient déjà vu les règles d'hygiène de sécurité sur le maniement des produits chimiques. On gagne du temps et puis ça leur est bénéfique.

  • Speaker #0

    Du coup, comment se passe la vie au quotidien au laboratoire ? Comment vous travaillez avec vos collègues, avec vos chercheurs, avec les techniciens sur la plateforme ?

  • Speaker #1

    Avec les collègues de la plateforme, j'interagis sur l'aspect surtout organisationnel. Parce que comme je suis responsable technique, je vais coordonner tous les bilans analytiques, les bilans financiers. qui sont demandés au niveau des plateformes technologiques labellisées en Bourgogne-Franche-Comté. Je vais animer les comités de pilotage de la plateforme. On va pouvoir discuter des projets d'achat d'équipements, prioriser les différents besoins. Donc ça, ce sont plutôt les liens avec tous les acteurs de la plateforme. Et puis aussi, j'interagis beaucoup avec les gestionnaires du laboratoire pour la rédaction des devis qui sont demandés par les prestataires, le suivi des facturations. et pour toutes les commandes nécessaires sur le laboratoire. Je suis aussi impliquée sur les activités collectives pour l'UMR, puisque je m'occupe de la communication. Je suis dans la cellule communication du laboratoire avec plusieurs collègues. On fait des plaquettes du labo, des plaquettes de la plateforme. J'anime aussi une page LinkedIn de la plateforme. Je mets à jour le site de GISMO. Et puis... En dehors de ça aussi, je suis sauveteur-scourrice du travail. Comme ça, quand il y a un étudiant qui a un malaise, on sait comment intervenir.

  • Speaker #0

    Donc au final, vous n'avez pas toujours une blouse sur vous, des lunettes, vous n'êtes pas tout le temps sur la plateforme ou sur le terrain. En fait, votre métier est très, très varié.

  • Speaker #1

    Il y a une grosse part administrative, effectivement.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui vous plaît le mieux dans votre métier ?

  • Speaker #1

    En fait, ce que j'aime bien, c'est faire un peu de tout. Avant, j'étais collaboratoire. Là, je suis contente que ça évolue un petit peu vers cette partie administrative. J'aime bien avoir les deux côtés.

  • Speaker #0

    Anne-Lise, avant d'exercer le métier de responsable technique de la plateforme GISMO, vous avez eu de nombreuses expériences, toutes différentes et enrichissantes, je crois. Quel a été votre parcours ? Racontez-nous.

  • Speaker #1

    Alors, j'ai suivi des études de chimie. J'ai travaillé dans le privé pour faire du contrôle qualité de produits industriels. Et ensuite, j'ai essayé de passer des concours. J'ai réussi celui de l'INRAE de Dijon. J'ai travaillé dix ans à l'INRAE. Et ensuite, j'ai souhaité changer un petit peu et travailler sur une plateforme. Ça me paraissait plus intéressant pour moi. Et donc là, j'ai passé un concours externe d'ingénieur chimiste à l'université.

  • Speaker #0

    Quels conseils vous donneriez à celles et ceux qui souhaiteraient s'orienter vers un métier similaire au vôtre ou dans la recherche en général ?

  • Speaker #1

    Je dirais, renseignez-vous sur le site de l'emploi public. où vous trouverez tous les concours de la fonction publique qui répondent à vos critères. Et puis ensuite, préparez bien surtout vos épreuves de concours, lisez bien les guides du candidat, surtout pour les preuves orales, il ne faut pas y aller les mains dans les poches, il faut bien s'entraîner avant.

  • Speaker #0

    C'était Lumière sur la plateforme GISMO avec Anne-Lise Santoni, responsable technique au laboratoire Biogéosciences à Dijon.

Description

Dans cet épisode, le CNRS vous invite à découvrir une plateforme scientifique à la pointe de la technologie, capable de répondre aux questions liées à l’évolution des climats passés, l’adaptation des espèces marines, ou même le stress hydrique des vignes en Bourgogne, rien que ça !

 

Cette plateforme, c'est GISMO, la fierté du laboratoire Biogéosciences (CNRS/EPHE/UBE) à Dijon. Et pour en parler, nous recevons Anne-Lise Santoni, responsable technique de cette machine à explorer l’invisible. A l'aide de ses deux spectromètres de masse, elle décortique les secrets de la matière, collabore avec des chercheurs du monde entier. Zoom sur la manière dont ces analyses isotopiques transforment des données en découvertes, et comment Anne-Lise et son équipe jonglent entre technique de pointe et la gestion d’une plateforme d’envergure.

 

Un véritable voyage dans l’infiniment petit pour comprendre le monde qui nous entoure !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Lumière, capable de répondre aux grandes questions des chercheuses et chercheurs. Mais quelles questions me diriez-vous ? Eh bien, l'évolution des climats passés, l'adaptation des espèces marines ou même le stress hydrique des vignes en Bourgogne. Rien que ça. Cette plateforme, c'est GISMO, la fierté du laboratoire biogéosciences à Dijon. Et pour en parler, j'ai la chance de recevoir Anne-Lise Santoni, responsable technique de cette machine à explorer l'invisible. Derrière ses 12 spectromètres de masse, elle décortique les secrets de la matière collabore avec des chercheurs du monde entier. Bref, on va découvrir comment ces analyses isotopiques transforment des données en découvertes et comment Anne-Lise jongle entre technique de pointe et la gestion d'une plateforme d'envergure. Accrochez-vous, on s'apprête à plonger dans l'infiniment petit pour comprendre le monde qui nous entoure. Bonjour Anne-Lise !

  • Speaker #1

    Bonjour !

  • Speaker #0

    D'abord Anne-Lise, est-ce que vous pouvez nous présenter rapidement GISMO et en quoi cette plateforme est essentielle pour les recherches menées au laboratoire biogéosciences ?

  • Speaker #1

    Oui, alors GISMO, c'est une plateforme technologique qui est adossée au laboratoire Biogéosciences à l'Université de Dijon. Et donc GISMO, c'est l'acronyme pour géochimie, isotopie, morphométrie et écologie moléculaire. Donc en fait, c'est une plateforme qui est structurée en deux grands domaines. Le domaine géomine, qui est donc la partie géochimie, et le domaine morphoptics, qui regroupe des équipements d'imagerie et de microscopie. et qui est aussi composé d'un secteur dédié à l'écologie moléculaire.

  • Speaker #0

    Alors, quel type d'équipement vous gérez sur cette plateforme-là ? Dans mon introduction, je parlais de spectromètre de masse, c'est bien ça ? Oui,

  • Speaker #1

    tout à fait. Moi, je suis chimiste de formation, donc je gère plus spécifiquement deux spectromètres de masse à rapports isotopiques qui sont couplés à quatre interfaces de séparation.

  • Speaker #0

    Justement, vous parlez de rapports isotopiques, d'isotopes. Vous travaillez sur l'analyse des isotopes du carbone et de l'azote. Bon, rapidement. Qu'est-ce que c'est qu'un isotope ?

  • Speaker #1

    Deux isotopes, ce sont des éléments chimiques qui ont le même nombre de protons, mais un nombre de neutrons différents. Le fait qu'ils ont un nombre de neutrons différents va faire qu'ils ont une masse différente. Les principaux éléments qui constituent les molécules terrestres sont présents sous forme de plusieurs isotopes. Cette abondance naturelle d'isotopes n'est pas uniforme sur Terre, parce qu'il y a une discrimination qui se fait lors des processus biochimiques. Comme par exemple la photosynthèse, certains types de plantes vont plus ou moins privilégier le carbone léger, qui est plus facile à assimiler, donc le carbone 12 plutôt que le carbone 13. Et donc c'est cette discrimination naturelle qui va donner ce que l'on appelle la signature isotopique d'un échantillon, et qui pourra servir de traceur des phénomènes physico-chimiques. Donc les analyses qui sont réalisées sur la plateforme au niveau isotopie, vont pouvoir aider à la compréhension de différentes applications scientifiques. Dans les études environnementales, c'est plus appliqué, on va comprendre les processus biochimiques. Par exemple, on travaille sur le stockage du carbone dans le sol ou le stress hydrique de la vigne. En agronomie, on va pouvoir utiliser le marquage isotopique pour suivre les flux d'éléments dans la plante et donc mieux comprendre la physiologie de la plante. En écologie, on va pouvoir suivre les migrations animales et les réseaux trophiques, c'est-à-dire les régimes alimentaires des différentes espèces et leurs relations entre espèces. Et enfin, en géologie, on travaille avec beaucoup de géologues, ça va être plus sur l'enregistrement stratigraphique. En fait, on va analyser les différentes couches, les différentes strates de roches et on va pouvoir décrire l'évolution et les perturbations du cycle du carbone dues aux changements climatiques passés. ou au volcanisme.

  • Speaker #0

    C'est vraiment multidisciplinaire et du coup, vous collaborez avec des chercheurs et des chercheuses de disciplines très variées. Comme la géologie, vous l'avez dit, la climatologie, même la viticulture. Ce sont des sujets qui sont très chers à nos régions. Comment ça se passe, cette multidisciplinarité au quotidien ? Est-ce que c'est compliqué ? Est-ce que c'est fascinant ?

  • Speaker #1

    C'est dans un sens compliqué parce qu'il faut découvrir et s'approprier de nombreuses thématiques de recherche. Donc ça, je pense que jusqu'à la fin de ma carrière, je vais continuer d'apprendre des choses et m'améliorer. Mais après, c'est le côté fascinant du métier, c'est qu'on apprend des choses tous les jours. Et concrètement, ça se passe comme ça. Les chercheurs me demandent des analyses et on se rend compte, pour étudier la faisabilité, donc moi je leur apporte le point de vue technique, voir si en fonction de ce que vont contenir leurs échantillons, il va y avoir des problèmes d'interaction, il va falloir adapter le mode de préparation des échantillons avant de les passer au spectromètre. Et eux, de leur côté, vont m'expliquer le but du projet, à quoi vont servir toutes ces analyses. Donc c'est vraiment un échange gagnant.

  • Speaker #0

    Sur le sujet comme l'étude du stress hydrique des vignes, par exemple, quel résultat avez-vous pu tirer ?

  • Speaker #1

    Alors là, c'est vrai que c'est un sujet qui est très important pour les viticulteurs bourguignons. En fait, l'analyse du rapport isotopique C13 sur C12 dans les sucres de mou de raisin, ça va nous donner, ça va pouvoir permettre d'estimer le stress hydrique de la plante. Et là, on travaille beaucoup avec le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne. et les chambres d'agriculture de Bourgogne, pour pouvoir aider les viticulteurs sur les adaptations culturales de la vigne. Notamment, on essaye de voir si le mode de coupe de la vigne, par exemple couper la plante au niveau du sommet, le paillage, toutes ces pratiques-là sont testées, et on a pu voir que l'effeuillage apical permet de réduire le stress hydrique de la vigne. Donc ça, c'est des choses qui vont tout de suite être appliquées et pouvoir aider les viticulteurs à pallier le réchauffement climatique et la sécheresse, leur donner des pistes d'adaptation, puisqu'on ne peut pas toujours utiliser l'irrigation. Ensuite, on teste aussi, la Chambre d'agriculture teste des différentes variétés aussi, avec un conservatoire de collection. et voir s'il n'y aurait pas des variétés plus adaptées au changement climatique à la région Bourgogne. Ce sont des projets sur le long terme, sur plusieurs années.

  • Speaker #0

    Anne-Lise, vous assurez également la maintenance de vos spectromètres, de vos équipements sur la plateforme GISMO. Vous les chouchoutez, j'imagine ?

  • Speaker #1

    Oui, je les chouchoute parce que quand il y a une panne, ça bloque les appareils, ça bloque le planning. Donc, je fais très attention. J'assure la maintenance préventive des équipements. Je change les tubes des réactifs chimiques. Et je fais aussi la maintenance curative. Par exemple, quand on envoie trop de molécules sur le filament, c'est le filament qui sert à ioniser les molécules, il va se rompre. Donc là, il faut démonter toute la machine et démonter la source à impact électronique. C'est un peu comme de l'horlogerie fine. Ça fait plein de toutes petites pièces de petites vis. qu'il faut nettoyer, changer, remettre à leur place. Donc il faut être très minutieux pour cette étape. Ensuite, j'ai aussi dû passer mon habilitation électrique, parce qu'il y a beaucoup de pannes électroniques sur ce type d'instrument, surtout avec un parc vieillissant. Donc malheureusement, on doit changer des blocs d'alimentation, des cartes électroniques.

  • Speaker #0

    Oui, vous touchez vraiment à tout finalement sur ces machines.

  • Speaker #1

    Oui, finalement, quand j'ai voulu faire chimiste, je n'imaginais pas qu'on allait devoir toucher à tout ça. Mais voilà, il faut s'adapter et puis c'est intéressant aussi. Il faut être assez polyvalent finalement.

  • Speaker #0

    Vous n'êtes pas toute seule sur la maintenance de ces équipements quand même ?

  • Speaker #1

    Alors, j'ai la chance d'avoir quand même des chercheurs avec moi qui aiment un petit peu trifouiller les machines et qui m'aident à réparer. Mais sinon, on évite de faire venir les fournisseurs parce que ça coûte. toujours tout de suite très cher.

  • Speaker #0

    J'imagine. Et comment ça se passe si jamais vous devez remplacer ou améliorer de tels appareils ?

  • Speaker #1

    En fait, quand on doit remplacer les appareils, on doit répondre, on répond à des appels à projets pour obtenir des financements, que ce soit régional, national ou européen. Mais c'est difficile, les enveloppes sont restreintes. Et quand on obtient un financement, il faut souvent apporter un cofinancement. Donc c'est pour ça qu'on fait des prestations analytiques. En fait, on fait des prestations pour les entreprises privées qui nous apportent de l'argent.

  • Speaker #0

    De l'argent, ça vous apporte aussi, je pense, de l'expérience et peut-être que ça apporte aussi des résultats pour la recherche en même temps ?

  • Speaker #1

    Oui, en effet. Alors, quand on fait des prestations pour, par exemple, les chambres d'agriculture, comme je disais tout à l'heure, ça nous apporte des connaissances et en plus, souvent, c'est un peu en lien aussi avec les recherches à biogéosciences. Ça peut mener à des partenariats intéressants. Je travaille beaucoup avec les INRAE, Dijon et Bordeaux. Et aussi, c'est vrai que ça nous pousse à diversifier nos activités et à développer de nouvelles méthodes. Donc c'est quand même enrichissant.

  • Speaker #0

    Vous travaillez aussi avec des entreprises privées, des collectivités territoriales. Quel genre de projet vous avez avec eux ?

  • Speaker #1

    Par exemple, avec les champs d'agriculture, trouver des méthodes de culture plus appropriées au changement climatique.

  • Speaker #0

    Vous participez parfois à des missions de terrain pour collecter les échantillons. Alors déjà, à quoi ressemblent les échantillons que vous allez collecter et comment ces expériences influencent-elles votre travail en laboratoire ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai la chance de participer de temps en temps à des missions de terrain. Donc là, j'étais hier d'ailleurs, j'étais dans les vignes de nuit Saint-Georges. Donc là, on a prélevé du sol à différentes profondeurs pour regarder le stockage du carbone. C'est intéressant d'aller sur le terrain parce qu'en fait, ça me permet de mieux appréhender les problématiques de recherche. De remettre les échantillons dans leur contexte, c'est plus intéressant pour moi.

  • Speaker #0

    Vous formez aussi des étudiants, des doctorants, des post-docs. Comment se déroule cette partie de votre métier et comment est-ce que vous articulez tout ça avec vos missions au labo ?

  • Speaker #1

    En fait, ça se fait assez naturellement. C'est que les étagères de L3, M1, M2 sont sur le laboratoire entre la période de janvier à juin. Donc, ils sont avec nous. Donc, je les forme directement aux diverses techniques de préparation des échantillons. Et ensuite, je leur explique le... fonctionnement des machines. Donc là, je ne laisse pas du tout en autonomie sur les spectromètres de masse, parce que ce sont des appareils très sensibles qui nécessitent plusieurs mois de formation. Mais sinon, je fais aussi un petit TP de bonne pratique de laboratoire aux stagiaires de M2 pour les remettre un petit peu à niveau, parce qu'ils n'ont pas forcément beaucoup de formation chimie dans leur cursus. De sorte que quand ils arrivent en stage, ils aient déjà vu les règles d'hygiène de sécurité sur le maniement des produits chimiques. On gagne du temps et puis ça leur est bénéfique.

  • Speaker #0

    Du coup, comment se passe la vie au quotidien au laboratoire ? Comment vous travaillez avec vos collègues, avec vos chercheurs, avec les techniciens sur la plateforme ?

  • Speaker #1

    Avec les collègues de la plateforme, j'interagis sur l'aspect surtout organisationnel. Parce que comme je suis responsable technique, je vais coordonner tous les bilans analytiques, les bilans financiers. qui sont demandés au niveau des plateformes technologiques labellisées en Bourgogne-Franche-Comté. Je vais animer les comités de pilotage de la plateforme. On va pouvoir discuter des projets d'achat d'équipements, prioriser les différents besoins. Donc ça, ce sont plutôt les liens avec tous les acteurs de la plateforme. Et puis aussi, j'interagis beaucoup avec les gestionnaires du laboratoire pour la rédaction des devis qui sont demandés par les prestataires, le suivi des facturations. et pour toutes les commandes nécessaires sur le laboratoire. Je suis aussi impliquée sur les activités collectives pour l'UMR, puisque je m'occupe de la communication. Je suis dans la cellule communication du laboratoire avec plusieurs collègues. On fait des plaquettes du labo, des plaquettes de la plateforme. J'anime aussi une page LinkedIn de la plateforme. Je mets à jour le site de GISMO. Et puis... En dehors de ça aussi, je suis sauveteur-scourrice du travail. Comme ça, quand il y a un étudiant qui a un malaise, on sait comment intervenir.

  • Speaker #0

    Donc au final, vous n'avez pas toujours une blouse sur vous, des lunettes, vous n'êtes pas tout le temps sur la plateforme ou sur le terrain. En fait, votre métier est très, très varié.

  • Speaker #1

    Il y a une grosse part administrative, effectivement.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui vous plaît le mieux dans votre métier ?

  • Speaker #1

    En fait, ce que j'aime bien, c'est faire un peu de tout. Avant, j'étais collaboratoire. Là, je suis contente que ça évolue un petit peu vers cette partie administrative. J'aime bien avoir les deux côtés.

  • Speaker #0

    Anne-Lise, avant d'exercer le métier de responsable technique de la plateforme GISMO, vous avez eu de nombreuses expériences, toutes différentes et enrichissantes, je crois. Quel a été votre parcours ? Racontez-nous.

  • Speaker #1

    Alors, j'ai suivi des études de chimie. J'ai travaillé dans le privé pour faire du contrôle qualité de produits industriels. Et ensuite, j'ai essayé de passer des concours. J'ai réussi celui de l'INRAE de Dijon. J'ai travaillé dix ans à l'INRAE. Et ensuite, j'ai souhaité changer un petit peu et travailler sur une plateforme. Ça me paraissait plus intéressant pour moi. Et donc là, j'ai passé un concours externe d'ingénieur chimiste à l'université.

  • Speaker #0

    Quels conseils vous donneriez à celles et ceux qui souhaiteraient s'orienter vers un métier similaire au vôtre ou dans la recherche en général ?

  • Speaker #1

    Je dirais, renseignez-vous sur le site de l'emploi public. où vous trouverez tous les concours de la fonction publique qui répondent à vos critères. Et puis ensuite, préparez bien surtout vos épreuves de concours, lisez bien les guides du candidat, surtout pour les preuves orales, il ne faut pas y aller les mains dans les poches, il faut bien s'entraîner avant.

  • Speaker #0

    C'était Lumière sur la plateforme GISMO avec Anne-Lise Santoni, responsable technique au laboratoire Biogéosciences à Dijon.

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